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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 15 novembre 1994

RECOURS AU RÈGLEMENT

LA PÉRIODE DES QUESTIONS

AFFAIRES COURANTES

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

LOI SUR LE MINISTÈRE DU TRAVAIL

    Projet de loi C-287. Adoption des motions portant présentation et première lecture 7769

PÉTITIONS

LE SUICIDE ASSISTÉ

LES DROITS DE LA PERSONNE

QUESTIONS TRANSFORMÉES EN ORDRES DE DÉPÔT DE DOCUMENTS

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-LES CHEMINS DE FER

    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 7773
    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 7789
    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 7790
    M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead) 7790
    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 7793
    Mme Ringuette-Maltais 7794

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LE MUSÉE DES BEAUX-ARTS DU CANADA

HOMMAGE À QUATRE QUÉBÉCOIS

LES COUPLES HOMOSEXUELS

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

LE COLLOQUE SUR LA POLITIQUE SOCIALE

L'ORCHESTRE NATIONAL DES JEUNES DU CANADA

LE COMMERCE INTERNATIONAL

LE FONDS MONÉTAIRE INTERNATIONAL ET LA BANQUE MONDIALE

VIA RAIL

L'ÉQUIPE CANADA

LA SENSIBILISATION AUX TOXICOMANIES

LE TOURISME

    M. Mills (Broadview-Greenwood) 7803

LA MIL DAVIE

L'AGENCE DE PROMOTION ÉCONOMIQUE DU CANADA ATLANTIQUE

    M. White (Fraser Valley-Ouest) 7804

L'ENSEIGNEMENT POSTSECONDAIRE

L'ÉDUCATION

QUESTIONS ORALES

LE COLLÈGE MILITAIRE ROYAL DE SAINT-JEAN

LA MIL DAVIE

LA COMMISSION DE L'IMMIGRATION ET DU STATUT DE RÉFUGIÉ

LES CHANTIERS MARITIMES

LA COMMISSION DE L'IMMIGRATION ET DU STATUT DE RÉFUGIÉ

LE TIMOR ORIENTAL

    M. Leblanc (Longueuil) 7808
    M. Leblanc (Longueuil) 7808

LES SOINS DE SANTÉ

L'ASSURANCE-CHÔMAGE

    Mme Gagnon (Québec) 7808
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 7808
    Mme Gagnon (Québec) 7809
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 7809

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

LES PARLEMENTAIRES

    M. Breitkreuz (Yellowhead) 7809
    M. Breitkreuz (Yellowhead) 7809

LES MÉDICAMENTS BREVETÉS

L'INDUSTRIE FORESTIÈRE

L'ENVIRONNEMENT

L'EMBARGO SUR LES ARMEMENTS EN EX-YOUGOSLAVIE

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

LE TRANSPORT DU GRAIN

L'ÉDUCATION

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 7812

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

LES SOINS DE SANTÉ

AFFAIRES COURANTES

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

EXAMEN DE LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE DU CANADA

    M. Gauthier (Ottawa-Vanier) 7812

QUESTION DE PRIVILÈGE

LE COMITÉ MIXTE SPÉCIAL CHARGÉ DE L'EXAMEN DE LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE DU CANADA

RECOURS AU RÈGLEMENT

LE DÉBAT D'AJOURNEMENT

    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 7815

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-LES CHEMINS DE FER

    Reprise de l'étude de la motion 7815
    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 7822
    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 7823

LOI SUR LE MINISTÈRE DU PATRIMOINE CANADIEN

    Projet de loi C-53. Reprise de l'étude en deuxième lecture 7833
    Rejet de l'amendement par 132 voix contre 92 7833

LOI SUR L'OFFICE DES DROITS DE SURFACE DU YUKON

    Projet de loi C-55. Reprise de l'étude de la motion de deuxième lecture 7834
    Adoption de la motion par 183 voix contre 41 7834
    Deuxième lecture et adoption du projet de loi 7835

LES PROGRAMMES DE SÉCURITÉ SOCIALE

    Projet de loi C-54. Reprise de l'étude de la motion de deuxième lecture 7835
    Adoption de la motion par 178 voix contre 45 7835
    Deuxième lecture et adoption du projet de loi 7836

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LE CENTRE DE LA SÉCURITÉ DES TÉLÉCOMMUNICATIONS

MOTION D'AJOURNEMENT

LE CRTC

LA JUSTICE

    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 7845

7769


CHAMBRE DES COMMUNES

Le mardi 15 novembre 1994


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

[Traduction]

RECOURS AU RÈGLEMENT

LA PÉRIODE DES QUESTIONS

M. Bill Blaikie (Winnipeg Transcona, NPD): Monsieur le Président, je prends aujourd'hui la parole parce que, tout comme vous, j'étais préoccupé par la parution dans la presse écrite d'articles qui donnaient l'impression que je vous avais personnellement accusé de faire montre de favoritisme à l'endroit d'un parti à la Chambre en ce qui a trait à la période des questions. Je voulais simplement préciser publiquement, sans laisser l'ombre d'un doute, que je n'ai rien fait de tel.

La période des questions et le temps attribué à mon parti durant cette période sont des sujets qui me préoccupent toujours, comme vous le savez, monsieur le Président, mais je n'ai jamais voulu insinuer que vous vous étiez rendu coupable de favoritisme envers l'un ou l'autre des partis à la Chambre. Je voulais que ce soit bien clair.

Le Président: Je remercie le député de Winnipeg Transcona d'avoir eu l'amabilité de faire cette intervention. Pour un député de longue date, il importe encore davantage que ce genre de précision soit faite aussi vite que possible.

Pour ma part et en ce qui concerne la Chambre, je considère que cette question touchant le député de Winnipeg Transcona est réglée. Je le remercie beaucoup d'avoir fait cette mise au point.

_____________________________________________

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à 22 pétitions.

[Français]

LOI SUR LE MINISTÈRE DU TRAVAIL

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve, BQ) demande à présenter le projet de loi C-287 intitulé Loi modifiant la Loi sur le ministère du Travail (admissibilité aux allocations aux anciens employés).

(1010)

-Monsieur le Président, je vous signale que ce projet de loi, que je dépose pour une deuxième fois en cette Chambre, vise à modifier le programme PATA, particulièrement l'admissibilité des travailleurs montréalais qui font l'objet d'une terrible discrimination en ce sens qu'une entreprise qui procède à un licenciement doit remercier 100 travailleurs à la fois, ce qui ne correspond pas au tissu industriel de Montréal. J'espère que ce projet de loi recevra l'aval de la Chambre.

(La motion est réputée adoptée, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

* * *

[Traduction]

PÉTITIONS

LE SUICIDE ASSISTÉ

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, je prends aujourd'hui la parole pour présenter une pétition au nom de 40 habitants de Calgary qui demandent qu'il plaise au Parlement de s'assurer que les dispositions actuelles du Code criminel du Canada interdisant le suicide assisté sont appliquées rigoureusement, et de ne faire aucune modification à la loi qui sanctionne l'encouragement ou l'aide au suicide, ou encore l'euthanasie active ou passive.

Étant donné que le débat sur cette question prend de l'ampleur, je prie tous les députés de communiquer à leurs électeurs des renseignements présentant les deux côtés de la question.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Janko Peric (Cambridge, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter une pétition que m'ont adressée les habitants de ma circonscription, Cambridge, et qui comporte environ 52 signatures.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de n'apporter au Code des droits de la personne, à la Loi canadienne sur les droits de la personne ou à la Charte des droits et libertés, aucune

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modification qui tendrait à indiquer que la société approuve les relations entre personnes de même sexe ou l'homosexualité.

* * *

QUESTIONS TRANSFORMÉES EN ORDRES DE DÉPÔT DE DOCUMENTS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, si la question no 47 pouvait être transformée en ordre de dépôt de document, ce document serait déposé immédiatement.

Le Président: Plaît-il à la Chambre que la question no 47 soit transformée en ordre de dépôt de document?

Des voix: D'accord.

[Texte]

Question no 47-M. Scott:

Quelle est la liste et quels sont les montants totaux ainsi que les montants dépensés pour chaque réception et pour chaque voyage effectué par chaque sous-ministre au cours des exercices 1991, 1992 et 1993?
(Le document est déposé.)

[Traduction]

M. Milliken: Monsieur le Président, je demande que les autres questions restent au Feuilleton.

Le Président: Les autres questions restent-elles au Feuilleton?

Des voix: D'accord.

_____________________________________________


7770

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-LES CHEMINS DE FER

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ) propose:

Que la Chambre dénonce l'inaction et le manque de transparence du gouvernement en ce qui a trait à la restructuration envisagée des chemins de fer, l'abandon graduel des services régionaux du CN, du CP et de VIA, tout particulièrement au Québec, et le manque de vision du gouvernement concernant le TGV.
-Monsieur le Président, je vous remercie d'avoir fait lecture à la Chambre de la motion que j'ai l'honneur de présenter sur le transport ferroviaire.

Comme vous l'avez mentionné, je désire que cette Chambre, en l'occurence mes honorables collègues, dénoncent l'inaction et le manque de transparence du gouvernement libéral en ce qui a trait à la restructuration envisagée des chemins de fer. Je voudrais aussi souligner l'abandon graduel des services régionaux du CN, du CP et de VIA Rail, tout particulièrement au Québec. Je voudrais aussi mentionner à cette Chambre l'absence de vision du gouvernement concernant le TGV.

Au lendemain de la dernière guerre, l'opinion s'est répandue dans le public que le transport en commun dans les sociétés riches comme le Québec serait chose du passé et que l'avenir serait à la voiture et aux camions. On a alors laissé l'outil ferroviaire péricliter, tout en donnant au pays à coût de milliards de denses réseaux d'autoroute.

(1015)

Durant cette période, l'Europe et l'Asie amélioraient leur réseau ferroviaire et en faisaient un pilier du développement économique. L'Europe en particulier s'appuyait fortement sur son réseau ferroviaire pour effectuer le transport des passagers.

Le transport ferroviaire joue un rôle fondamental dans le système de transport au Canada. La contribution la plus importante du ferroviaire au système de transport canadien est sans contredit au niveau du transport des ressources naturelles. Le transport de produits en vrac, de potasse, de blé, de charbon, de bois, de papier journal, etc., représentait en 1993, selon les chiffres de l'Office national des transports, environ 54 p. 100 du trafic des compagnies ferroviaires, soit un léger recul de 2 p. 100 par rapport à 1992. C'est dire à quel point le transport ferroviaire est tributaire du commerce des matières premières.

Au niveau de l'intermodal, le transport rail-route est le plus important, suivi par le transport rail-route-mer. Le transport intermodal représente une partie importante et en croissance du trafic du CN et du CP. En 1993, ce trafic pour les deux transporteurs a augmenté de 8 p. 100. Il se chiffrait à 6,2 millions de tonnes pour le CN et 5,4 millions de tonnes pour le CP.

Ce type de marchandise se situait en 1993 au troisième rang des marchandises transportées par le CN et le CP. On comprendra que les deux transporteurs aient consenti d'importants investissements dans ce secteur, soit le tunnel de St. Clair entre Sarnia et Port Huron pour le CN et l'amélioration des tunnels dans l'Ouest pour le CP.

Depuis quelques années, le CN et le CP ont conclu d'importants contrats avec des entreprises intermodales et de camionnage. Le CN a notamment conclu un accord avec CSX, entreprise américaine, pour l'acheminement des remorques routières entre le Canada, le sud-est et le midwest américain, et le CP a fait de même avec la compagnie Gilford Transportation. Donc, le transport intermodal représente le potentiel de croissance le plus important pour les compagnies ferroviaires.

Pour les compagnies de transport ferroviaire canadiennes, la compétition provient principalement de deux sources: le camionnage et le transport ferroviaire fait aux États-Unis. Le transport par camion bénéficie d'un support gouvernemental important puisque les camionneurs n'ont pas à supporter les coûts d'entretien et de construction de l'infrastructure routière. Les compagnies ferroviaires doivent développer et entretenir leur réseau. Les camionneurs se trouvent donc à bénéficier d'un avantage important sur les compagnies ferroviaires.

Le CN et le CP se sont plaints à maintes reprises de l'inégalité de traitement au niveau fiscal entre le Canada et les États-Unis. Il semblerait en effet que la taxe sur le diesel et les différents impôts fonciers qu'elles doivent payer sur les terrains où passent les voies imposeraient un fardeau fiscal plus important que celui défrayé par leurs concurrents américains, ce qui rendrait les transporteurs canadiens non concurrentiels. Le CP a évalué que


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le fardeau fiscal canadien imposé aux compagnies ferroviaires était de 48 p. 100 supérieur au fardeau fiscal américain imposé aux transporteurs américains.

On sait que la situation financière du CN et du CP n'est pas reluisante. On sait que les deux compagnies n'arrivent pas à dégager des revenus d'exploitation suffisants pour déclarer des bénéfices nets. En fait, depuis 1988, le CN n'a déclaré des profits qu'en 1989 et on note une perte de l'ordre de 900 millions en 1992. Fait encourageant, le CN vient de déclarer des profits de l'ordre de 200 millions depuis le début de l'année 1994. Ce profit est toutefois nettement insuffisant pour maintenir un rendement sur actif acceptable.

Le CP, pour sa part, n'a eu que deux années de perte depuis 1988, soit les années 1991 et 1992. Ses profits sont nettement aussi insuffisants pour assurer un rendement sur actif acceptable.

Enfin, le rendement sur actif des compagnies de chemin de fer au Canada a diminué depuis 1987 et s'élevait à seulement 3 p. 100 en 1992. Cette situation est inquiétante puisque les transporteurs américains ont fait passer le rendement sur actif de 4,9 p. 100 en 1987 à 7,2 p. 100 en 1992.

Si les compagnies de chemin de fer ne sont pas en mesure de générer des profits suffisants, il est clair qu'elles ne seront pas en mesure d'effectuer les investissements nécessaires pour le maintien et l'amélioration du réseau.

Parlons maintenant rapidement du trafic. Le trafic ferroviaire total s'élevait à 238,9 millions de tonnes en 1993, c'est-à-dire une augmentation de 1,1 sur 1992.

(1020)

Le CN avait une part du trafic ferroviaire intérieur de 39,6 p. 100, 33,1 pour le CP, et les compagnies régionales 27,3, toujours selon l'Office national des transports.

Au niveau des effectifs, on sait qu'en 1985 les effectifs du CN et du CP s'élevaient à 77 960 travailleurs. Ils ont été réduits à 48 841 en 1993. La masse salariale des deux compagnies en 1993 s'élevait de 2,7 milliards ou 49 p. 100 des frais d'exploitation de 5,5 milliards. En 1993, le CN a entrepris un plan de rationalisation de ses effectifs. Ceux-ci s'élevaient à 32 392, ils ne seront plus que 22 395. Environ 2 096 personnes travailleront alors au siège social de la compagnie à Montréal et un total de près de 6 800 personnes travailleront pour le CN au Québec.

Dans aucun pays du monde, le transport ferroviaire de passagers ne couvre complètement ses frais. C'est un service public comme le sont le réseau routier, le transport des écoliers, la Voie maritime du Saint-Laurent, la Garde côtière, les Forces armées, et je pourrais en allonger la liste considérablement.

Le Canada s'était doté d'un réseau ferroviaire remarquable et remarqué par tous les pays européens; jamais le Canada ne se serait développé de la même façon si le train n'avait pas relié l'Atlantique au Pacifique. Pourtant, même si le train de passagers n'est pas rentable, les autres pays continuent à l'exploiter et à le développer car il a aussi ses avantages.

On pourrait citer le désengorgement des autoroutes. On pourrait citer au niveau des régions périphériques telles l'Abitibi, la Gaspésie, le Saguenay-Lac-Saint-Jean où le train de passagers est indispensable pour pallier l'insuffisance locale des réseaux scolaires, cégeps, universités et aussi médicale en matière de soins spécialisés. On n'imagine pas un malade de Gaspé payant environ 600 $ d'avion pour se faire soigner à Montréal ou faisant 22 heures d'autobus. Un train possédant la nouvelle technologie pourrait remplacer ces moyens de transport, tout en étant économique.

Il faut tenir compte, en se servant des nouvelles technologies comme en Europe, que le train élimine quasi totalement la pollution. Même en gardant la technologie actuelle, les trains sont beaucoup moins polluant que la voiture ou l'autobus.

Comme vous le savez, monsieur le Président, supprimer les liaisons ferroviaires de passagers dans les banlieues des principales villes et régions périphériques veut dire rejeter le trafic sur la route et contribuer au pelletage des dépenses du fédéral vers les provinces. L'industrie canadienne est évidemment intéressée au maintien du transport passagers au pays, considérant qu'elle a développé une technologie qu'elle exporte dans les autres pays.

Le dicton selon lequel «nul n'est prophète dans son pays» s'applique bien à la firme Bombardier qui exporte sa technologie à l'étranger. Pour s'en convaincre, il s'agit de voir le succès du TGV en France.

L'abandon des lignes ferroviaires de passagers semble imminent sur certaines lignes québécoises. Je cite entre autres Jonquière-Montréal, la ligne Chaleur-Gaspé-Montréal, Montréal-Senneterre, Senneterre-Cochrane, en Ontario, et Montréal-Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick, et à Halifax.

Comme cette Chambre le sait, l'abandon des services de passagers n'est pas soumis à la Loi sur les transports nationaux. Certains de mes collègues de toute façon auront l'occasion d'y revenir.

Dernièrement, plusieurs postes des sièges sociaux de CN et de VIA ont été transférés de Montréal à Campbellton qui s'avère être par hasard le comté du ministre des Transports. Je suis persuadé qu'il ne s'agit que d'un hasard. Plusieurs postes ont aussi été transférés de Montréal à Winnipeg. Comme vous le savez, monsieur le Président, ce comté est aussi représenté en cette Chambre par le ministre du Développement des ressources humaines. Je suis convaincu que ce n'est aussi qu'un hasard, à moins que ce soit pour remercier le ministre de tenter de nous faire avaler la couleuvre que représente la réforme des programmes sociaux. Mais encore là, vous savez que ce n'est que des suppositions qui courent dans les corridors de la Chambre des communes et que ces racontars n'ont aucun fondement de vérité. Le gouvernement est trop transparent pour préparer des choses semblables, n'est-ce pas?

Comme vous le savez, plusieurs demandes d'abandon se retrouvent actuellement devant l'Office national des transports.


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Faire une demande à l'office, c'est quasi avoir une autorisation automatique, et ce, la majorité du temps, sans avoir à recourir aux audiences publiques. Je cite à titre d'exemple la ligne du Murray Bay qui traverse mon beau comté de Beauport-Montmorency-Orléans. Dans le cas du Murray Bay, le milieu a demandé d'être entendu par l'Office national des transports. Celui-ci a refusé aussi, et le Murray Bay a été vendu sans que les principaux concernés ne soient entendus.

(1025)

Mes collègues auront l'occasion, dans les discours, de revenir sur ce point des abandons de lignes. On sait que les trains représentent un outil de développement économique. J'aimerais donner un exemple de développement économique, à savoir la petite municipalité de Port-Daniel, en Gaspésie, qui touche deux comtés, le comté de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine et le comté de Gaspé. Cette municipalité a la chance d'obtenir un projet des pays arabes qui désirent y implanter une cimenterie.

Alors que le taux de chômage actuel est de 18 p. 100 en Gaspésie et de 39,4 p. 100 à Port-Daniel, il serait possible de créer 400 nouveaux emplois. Ces promoteurs arabes ont deux exigences incontournables pour s'installer dans cette municipalité, un port de mer et un chemin de fer. Qu'arrivera-t-il si la voie ferroviaire entre Gaspé et Montréal disparaît? Eh bien, la cimenterie coule à pic et la municipalité demeure avec le même taux de chômage. Les 400 personnes qu'aurait employé cette cimenterie demeurent sur l'assurance-chômage ou sur l'aide sociale et ce sont les payeurs de taxes qui en acquittent la facture. C'est une horreur créée par des décideurs qui n'ont pas de vue à moyen et à long terme.

Il est facile de démontrer avec des chiffres qu'un service est non rentable. Par contre, il faut s'assurer, avant de tirer des conclusions, que nous possédons toutes les coordonnées. De plus, nous savons qu'en temps difficile, chaque catégorie d'emploi devra faire sa part. Mais cela, ça part du président jusqu'aux travailleurs et aux travailleuses. Croyez-vous, monsieur le Président, qu'il soit intéressant pour les employés du CN d'accepter de diminuer leurs conditions de travail lorsqu'ils feuillettent certaines revues et y retrouvent des faits qui ressemblent aux suivants.

Le Canadien National aurait prêté à son président, M. Paul Tellier, une somme de 432 000 $ sans intérêt, pour s'acheter une maison. Ce prêt serait réparti comme ceci: 300 000 $ provenant du CN Rail et 132 000 $ provenant de SRS, le Supplemental Retirement Security. Ce prêt ne serait pas garanti par une hypothèque, afin de ne pas rendre publique cette transaction. Le président aurait en échange signé une note provisoire et augmenté son assurance-vie personnelle de 300 000 $ payable au CN Rail pour garantir son prêt. Mais ce qui est pire encore, c'est qu'on aurait consenti un prêt de 432 000 $ et que l'évaluation de la maison, d'après nos informations, serait de 283 000 $.

Ce même président a obtenu que la partie de son plan de retraite payable par lui soit assumé par le Canadien National, soit pour un montant de 14 000 $ annuellement. Pourtant, la compagnie paie à son président, M. Paul Tellier, un salaire annuel de 345 000 $, en plus de défrayer ses dépenses. Après ces quelques horreurs, je voudrais revenir à d'autres sujets qui sont d'une importance capitale pour la population québécoise et canadienne, lorsqu'on a des décisions à prendre concernant les chemins de fer.

Mes collègues auront l'occasion de revenir sur la question de l'environnement, sur la question de la consommation d'énergie causée par le rail. Mes collègues auront l'occasion de vous parler du TGV, alors que ce projet placerait le Canada sur la carte du transport ferroviaire de grande vitesse en Amérique du Nord, où le marché est évalué à 200 milliards de dollars. Mais le gouvernement libéral actuel préfère engloutir des milliards de dollars dans des projets comme Hibernia, dont la rentabilité est douteuse.

Monsieur le Président, le temps me manque. Mes collègues auront l'occasion de revenir à l'approche, au niveau des CFIL, les chemins de fer d'intérêt local. La rationalisation des chemins de fer doit se continuer, mais le gouvernement doit permettre l'émergence de ces CFIL pour exploiter le réseau secondaire. Il faut de plus que les citoyens canadiens et les québécois soient informés d'une question d'intérêt national et je parle de l'attitude cavalière du gouvernement, qui a écarté l'opposition officielle ainsi que le troisième parti de l'étude de la commercialisation de la plus grande société d'État, le CN. C'est totalement inacceptable!

Il est inconcevable que le gouvernement s'apprête à entreprendre des décisions majeures dans l'industrie du rail sans consulter les Canadiens et en ne permettant pas aux élus de participer aux décisions. Il faut condamner l'incurie du gouvernement et son manque de vision dans le domaine du transport ferroviaire. Il faut de plus demander à tous les Québécois et Canadiens de boycotter ce comité d'étude de commercialisation, composé de huit députés libéraux et d'un sénateur libéral, comité duquel on a exclu le Bloc québécois et le Parti réformiste.

(1030)

Formé de cette façon, ce comité aura la maîtrise d'appeler les témoins qu'il désire, donc le contrôle de se faire dire ce qu'il veut entendre.

[Traduction]

En outre, il faut demander à tous les Québécois et à tous les Canadiens de boycotter le groupe de travail sur la restructuration du CN, étant donné que ce groupe est composé de huit députés libéraux et d'un sénateur libéral et ne comprend aucun député du Bloc québécois ou du Parti réformiste. Vu sa composition, le comité aura tout loisir de convoquer les témoins de son choix pour les entendre dire ce qu'il souhaite entendre.

[Français]

En terminant, je voudrais informer la Chambre des communes que les agissements et les orientations actuelles du gouvernement en ce qui a trait aux chemins de fer ne fait que donner des munitions au Bloc québécois et au Parti québécois lors du prochain référendum. En effet, plus le gouvernement fédéral coupe les services à la population, plus les Québécois devront se poser la question s'ils en ont encore pour les 28 milliards de dollars qu'ils paient en impôts annuellement à Ottawa.


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M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je vais saisir cette occasion de ne pas nécessairement faire le procès du fédéralisme car, après tout, c'est grâce au Canada qu'on a su développer l'essor économique du Québec. D'ailleurs, on en a la preuve tangible grâce à la visite de M. Chrétien en Asie. Je ne vais pas m'écarter du dossier, sauf que je trouve très curieux d'entendre le député de l'opposition dire que le présent gouvernement ne fait rien pour le rail.

J'aimerais bien lui poser la question suivante: Où était l'actuel chef de l'opposition du temps qu'il était ministre au sein du gouvernement conservateur quand, le 4 octobre 1989, le gouvernement conservateur, avec Lucien Bouchard comme ministre de l'Environnement dans le cabinet Mulroney, annonçait des coupures de 50 p. 100 des services de VIA Rail à travers le pays?

Je crois qu'on devrait saisir cette journée pour ne pas faire le procès du fédéralisme et de sa politique de transport, mais plutôt faire le procès du chef de l'opposition, à savoir où il était. Il était là et c'est lui qui a coupé, par exemple, le service Montréal-Trois-Rivières-Québec, rive nord. C'est Lucien Bouchard aussi qui a fait partie de la décision de couper le service Montréal-Ottawa-Sudbury-Winnipeg-Calgary et Vancouver, le Canadien. C'est Lucien Bouchard qui était là au moment où on a coupé le service Montréal-Toronto, liaison de nuit. C'est Lucien Bouchard qui était là au moment de couper le service Winnipeg-Capreol.

Le Président: Si c'était possible, j'aimerais mieux que l'honorable député parle de l'honorable député à titre de chef de l'opposition ou de député de Lac-Saint-Jean au lieu d'utiliser son nom.

M. Gagnon: Oui. Je m'en excuse, monsieur le Président, vous avez raison.

Je voulais seulement faire une démonstration que le dernier gouvernement est celui qui a justement coupé les services pancanadiens. C'est lui qui a coupé le service sept jours pour le faire passer à trois jours dans ma région gaspésienne. Par contre, ce sont nous qui avons décidé de remettre le service sur les rails, sauf que je demande à l'opposition de reconnaître que leur chef a fait partie d'une décision importante de sabrer les services de VIA Rail dans tout le Canada. Et je crois que le chef de l'opposition a l'obligeance de se retrouver ici devant nous pour s'expliquer devant les députés de cette Chambre, devant les Canadiens, devant les Québécois et de leur dire: «J'ai coupé les services de VIA Rail parce que je n'y croyais plus.»

Je demande à son critique de l'opposition de me dire pourquoi M. Bouchard, pardon, le chef de l'opposition-excusez-moi, monsieur le Président-qui se dit le grand défenseur des Québécois, a coupé tant de services, jusqu'à 50 p. 100, dans tout le Canada en 1989.

M. Guimond: Monsieur le Président, on est habitué d'entendre le député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine s'exprimer de la sorte. Mais j'informerais le député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine que ce que le chef de l'opposition a fait en mai 1990, vous, aucun des ministres, aucun des députés qui siègent sur les premières banquettes ne le fera. Cet homme, le chef de l'opposition, a démissionné. Et encore moins vous, monsieur le ministre des Transports. . .

(1035)

M. Young: Oui, oui, c'est cela.

Le Président: Chers collègues, je vous demanderais encore une fois de vous adresser à la Présidence.

M. Young: Il a démissionné comme ambassadeur aussi.

M. Guimond: Monsieur le Président, pourriez-vous informer les députés libéraux et les ministres libéraux que le chef de l'opposition a démissionné du Parti conservateur pour respecter ses principes, et il a fait ce que personne, ni le député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine ni aucun ministre ne fera dans cette législature. Il l'a fait en raison de ses principes, et sur cela, il est inattaquable.

Lorsque le député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine demandait tout à l'heure où était le chef de l'opposition, pourriez-vous, monsieur le Président, me donner la permission de demander au député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, lorsqu'au mois d'avril, on est allé tenir des audiences publiques à Gaspé, organisées par Dignité rurale Gaspésie, Cynthia Paterson, où étiez-vous lors de ces audiences où on a entendu 50 mémoires de Gaspésiens et de Gaspésiennes. Où étiez-vous?

Le Président: Chers collègues, je vous demanderais, encore une fois, de toujours vous adressser à la Présidence. Je suis toujours ici. Je serai avec vous pendant la journée.

M. Gagnon: Monsieur le Président, je n'étais surtout pas à Paris. En 1989, je veux bien quand même faire remarquer à l'honorable député que le chef de l'opposition était ministre du dernier gouvernement, et d'ailleurs il a fait part de ses décisions. Et, autre chose, je n'étais pas député à l'époque moi non plus. J'ai été quand même élu en 1993. Cependant, je peux dire pour mes électeurs, et je crois qu'il y a une reconnaissance unanime dans le comté de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, en Gaspésie, que Patrick Gagnon, le député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, c'est le promoteur de la région, c'est le défenseur des intérêts régionaux, et croyez-moi, c'est le promoteur no 1 quand c'est le temps de parler de CN et de VIA Rail. Je crois qu'on peut quand même en témoigner, parce que c'est nous qui avons rétabli le système, qui avons fait des économies, mais c'est nous qui allons garantir ce service. Ce n'est pas en séparant le Québec du Canada qu'on va régler l'avenir du CN et d'un service adéquat pour les régions.

Autre chose, quand j'entends l'opposition nous dire qu'est-ce qu'on fait avec l'avenir, quand on parle du TGV, par exemple, on n'entend jamais parler des régions éloignées. Qu'est-ce qu'on garantit pour les régions éloignées? Sauf que ce n'est pas moi qui doit subir le procès, je ne suis pas ministre, je ne suis qu'un simple député. Je représente dignement, je l'espère bien, mes électeurs, et moi je veux des réponses. Les Québécois veulent des réponses pourquoi est-ce que M. Bouchard a fait partie de cette décision de sabrer à 50 p. 100 dans le service ferroviaire au


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Québec? On demande des réponses, et au lieu d'attaquer le député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, tournez-vous vers votre chef de l'opposition et posez-lui la question au lieu de me poser la même question.

M. Guimond: Monsieur le Président, ce que je mentionnais tout à l'heure, je ne me référais pas à des événements de 1989 alors que le député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine n'était pas député. Je veux savoir, en avril 1994, lorsque nous avons entendu 50 mémoires de Gaspésiens et de Gaspésiennes, les CLSC, le regroupement des Caisses populaires, les intervenants du milieu, où était le député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine? C'est ce qu'on appelle l'effet boomerang. Et il y a un proverbe chez nous qui dit: «Quand on est dans une maison de verre ou quand on est dans une serre, on ne lance pas des roches.» C'est tout simplement ce que je voulais dire.

M. Gagnon: Monsieur le Président, j'ai mené une campagne électorale sur VIA Rail, sur le besoin essentiel de maintenir ce service. J'invite l'opposition à regarder très précieusement et très précisément ce qui s'est dit lors de cette campagne électorale. Je peux vous assurer que j'ai consulté les travailleurs, les gens de ma municipalité bien avant l'idée que le Bloc québécois, que l'opposition organise une session d'information dans la région gaspésienne. Vous faites lecture de lettres qui ont été envoyées au ministre des Transports, vous faites lecture des journaux locaux de l'implication et de l'engagement du député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine dans ce dossier-là, vous allez voir que j'avais plusieurs mois d'avance sur l'opposition.

(1040)

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, dès le début, je veux signaler une erreur souvent commise par des députés qui se laissent emporter par la partisanerie. Mais en reconnaissance et avec tout le respect que je dois au député de Restigouche-Chaleur, je veux souligner à l'honorable député de Beauport-Montmorency-Orléans que Campbellton, au Nouveau-Brunswick, n'est pas dans ma circonscription. Je sais qu'il profitera de la première occasion qui lui sera donnée pour se lever en Chambre et s'excuser pour ses propos au sujet du transfert d'employés à Campbellton, au Nouveau-Brunswick.

Je sais que le député ne connaît probablement pas la différence, n'a pas vérifié ces faits, mais Campbellton est un centre du CN qui a déjà eu environ 1 000 employés travaillant à partir de Campbellton, dans la circonscription de Restigouche-Chaleur. Le ministre des Transports est le député de Acadie-Bathurst. Je sais que le député fera ce qui s'impose en Chambre, se lever et s'excuser.

Parfois, lorsqu'on fait un discours sur un sujet qui peut rehausser les émotions, tel que ce qui se passe avec les chemins de fer, VIA Rail et tout cela, on peut induire nos collègues en erreur, mais sans faute. Ce n'est pas par méchanceté, c'est simplement par un manque de connaissance des faits. C'est pour cela que j'accepte facilement que le député reconnaîtra que les propos qu'il a tenus en voulant suggérer que le Canadien National avait transféré des emplois dans ma circonscription est totalement et absolument faux.

Évidemment, lorsqu'on entame un débat et que le député qui est le critique pour l'opposition en matière de transport s'implique, c'est très difficile. Souvent, soit qu'il oublie les faits ou qu'il n'a pas fait son travail de façon adéquate, mais cela nous rend la tâche très difficile parce qu'il faut quand même de temps en temps parler des faits.

Dans la motion qui a été proposée aujourd'hui, on parle d'un manque de transparence. Monsieur le Président, vous n'êtes pas sans savoir qu'il y a une dizaine de jours, j'étais à Winnipeg, et on a parlé de transparence, d'intégrité, de clarté, et encore du grand débat qui va entourer le Canada et le Québec au niveau du référendum lorsqu'il aura lieu. On a parlé par exemple à savoir si le Bloc québécois représente l'option d'indépendance, de séparation. Et encore là, une députée du Bloc québécois qui était présente lors de ce débat voulait encore nous passer le sapin de la souveraineté.

Si on veut parler de transparence, d'intégrité, d'honnêteté, il faut se baser sur les faits, il faut se servir des mots qui sont appropriés, des constatations qu'on est prêt à défendre. Il ne s'agit pas de se lever en Chambre et de prendre avantage d'un débat comme celui-ci pour sortir toutes sortes d'histoires qui ne sont pas du tout fondées.

C'est pourquoi je pensais qu'on aurait peut-être un débat sur la vision nationale du Canada que le Bloc québécois appuie en ce qui a trait au système ferroviaire, que ce soit pour le CN, le CP ou VIA Rail. Cela aurait été fort intéressant d'écouter notre ami, le porte-parole du Bloc québécois, nous expliquer comment eux voient un système intégré à travers le Canada, un système national, un système qui rend des services à tous les Canadiens, à toutes les Canadiennes, de l'Atlantique au Pacifique à l'Arctique. Il semble que cela aurait été fort intéressant que les citoyens, les citoyennes du Québec et du Canada aient cette occasion de savoir exactement quelle sorte de système ces gens veulent pour le Canada, pas seulement dans le contexte du débat d'aujourd'hui, mais dans cinq ans, dix ans, quinze ans d'ici.

[Traduction]

Ce qui est tragique dans ce genre de débat, c'est que le député et ses collègues de l'opposition, du Bloc québécois, pour diverses raisons qui n'ont rien à voir avec un réseau de transport efficient et efficace, se lancent dans un débat sur les institutions ou sur le secteur ferroviaire du réseau de transport national avec un seul objectif en tête, soit celui de semer le plus de discorde possible et de fausser le faits en ce qui concerne notamment la restructuration du CN.

(1045)

Comme je l'ai dit, il est odieux qu'un député intervienne à la Chambre dans un débat sur une motion de l'opposition pour faire des allégations et qu'il ne se rétracte pas quand il en a l'occasion. Le député n'a pas saisi l'occasion que je lui ai fournie pour se lever et s'excuser d'avoir induit la Chambre en erreur en insinuant que le CN avait muté des employés à Campbellton, au Nouveau-Brunswick, qu'il prétend être dans ma circonscription. C'est totalement faux. Il ne l'a pas dit par mégarde. Il s'était préparé à l'avance et prononçait son discours selon un texte écrit.

Voilà précisément le genre de situations auxquelles nous sommes confrontés quotidiennement à la Chambre: fausses déclarations, déformation des faits, comportement inapproprié et inca-


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pacité d'agir honorablement, c'est-à-dire de se lever pour se rétracter.

En ce qui concerne les mesures que nous prenons à l'égard de l'industrie ferroviaire, je ferai remarquer au député, qui est le porte-parole du Bloc québécois en matière de transport, que depuis l'arrivée au pouvoir de ce gouvernement, le 4 novembre 1993, VIA Rail n'a pas présenté la moindre demande d'abandon de services au Canada, à la stricte exception du service VIA entre Montréal et Saint John. Si la société a annoncé sa décision de modifier ce service, ce n'est pas qu'elle le voulait. Elle devait le faire à cause de l'abandon de ce service par le CP qui est propriétaire de la voie et qui doit l'entretenir d'une manière satisfaisante pour le trafic voyageur.

À entendre les commentaires de l'opposition, on croirait avoir affaire à de graves réductions de services partout au Canada, alors qu'en réalité, et je sais que l'opposition a du mal à regarder les choses en face quand cela ne fait pas son affaire, VIA Rail n'a pas demandé le moindre abandon de services au Canada. Le seul cas qui s'est produit était motivé par des raisons complètement indépendantes de sa volonté.

De la fin de 1993 jusqu'à l'été de 1994, le Canadien Pacifique et le Canadien National ont tenu des pourparlers. Les deux sociétés ont discuté sérieusement d'une fusion de leurs activités à l'est de Winnipeg. Au début de l'été, leurs responsables ont déclaré que les pourparlers n'avaient pas abouti à des résultats définitifs ou certains.

Quelques jours après, le Canadien Pacifique a présenté une soumission spontanée en vue d'acheter les éléments d'actif du CN qui se trouvent à l'est de Winnipeg. Le gouvernement analyse actuellement cette proposition et l'examine en tenant compte de la politique. Le Canadien national et son conseil d'administration assument une responsabilité de mandataire qui les oblige à analyser l'offre et à faire des recommandations au gouvernement. Nous avons dit que nous y répondrions au moment opportun.

Avons-nous entendu quoi que ce soit aujourd'hui de la part du porte-parole de l'opposition sur la position de son parti face à l'offre spontanée du CP? Avons-nous entendu dire si l'opposition était pour ou contre la fusion? Quelles sont les autres possibilités? Quelle politique ont-ils à part celle qui consiste à dire que c'est un autre argument en faveur de la séparation du Québec?

Nous avons formé un comité chargé d'examiner la commercialisation du CN parce que nous avons jugé que cela s'imposait devant l'offre spontanée d'achat, par le CP, des installations du CN à l'est de Winnipeg. Cela signifierait la privatisation de toutes les activités ferroviaires à l'est de Winnipeg, c'est-à-dire jusqu'à l'Atlantique. Cela mettrait pratiquement fin à toute concurrence dans le transport ferroviaire à l'est de Winnipeg. Nous ne pouvions pas permettre cela.

Qu'avons-nous fait? Nous nous sommes adressés au Comité des transports pour lui demander comment se présentait son horaire pour cet automne et puisqu'il était très chargé, nous avons demandé à des députés ministériels de siéger au sein d'un groupe d'étude spécial sur le potentiel de commercialisation des activités du CN dans tout le Canada, avec la participation des employés, espérons-le.

Nous avons demandé au député de Kenora-Rainy River de présider ce groupe d'étude. Avant d'être élu député, il a travaillé au Canadien Pacifique comme chef de train et il a été un des principaux porte-parole des syndicats du chemin de fer dans l'ouest du Canada. Nous avons demandé à des Canadiens des quatre coins du pays qui s'intéressent aux chemins de fer de siéger au sein de ce groupe. Le groupe de travail va tenir d'un bout à l'autre du pays des réunions où l'on examinera ces questions en profondeur. Nous espérons que les citoyens y participeront. Des députés des deux côtés de la Chambre ont exprimé un certain appui, certaines préoccupations, certaines opinions. Nous voulons entendre les députés du Bloc Québécois nous dire ce qu'ils pensent de la commercialisation du CN. Croient-ils que les employés du CN auraient une meilleure chance de protéger leurs emplois s'ils étaient, du moins certains d'entre eux, actionnaires d'une exploitation commercialisée du CN d'un bout à l'autre du pays?

(1050)

Nous voulons savoir quelles sont les options qui s'offrent à nous si l'offre d'achat du CP est acceptée. Quelle incidence cela aura-t-il sur la concurrence? Quelles en seront les répercussions sur le service dans l'est du Canada? Que devient le CN dans l'Ouest? Qu'advient-il de la commercialisation du CN d'un bout à l'autre du pays, avec ou sans la participation des employés? Quels sont les avantages et quels sont les inconvénients?

Qu'arrive-t-il si nous maintenons le statu quo, si l'ONT continue de se trouver saisi, de façon ponctuelle, de demandes d'abandon de lignes ferroviaires dans des provinces comme l'Ontario, la Saskatchewan et la Colombie-Britannique, où il est très difficile d'avoir des lignes de chemin de fer sur courtes distances? Quelle est la position du Bloc québécois sur les chemins de fer d'intérêt local? Nous savons que les bloquistes veulent conserver des chemins de fer d'un bout à l'autre du pays. Ils ne veulent pas conserver le pays, mais ils veulent conserver les chemins de fer. C'est une position typique. Comme nous disons en français: Ils ne savent pas sur quel pied danser.

Il sera intéressant à un moment donné de les entendre faire des suggestions concrètes au lieu de dire qu'ils veulent conserver tout ce qui existe en matière ferroviaire, mais aussi détruire le pays. Voyons ce que nous pouvons découvrir sur ce que les députés du Bloc québécois pensent vraiment à propos de l'avenir du rail au Canada.

Le gouvernement croit que les Canadiens du Québec, de l'Ontario, de la Colombie-Britannique, des Prairies et de l'Atlantique veulent maintenant qu'on prenne des décisions qui offrent un certain degré de certitude, mais une certitude qui permette également un allégement du fardeau pour les contribuables.


7776

[Français]

C'est pour cette raison qu'on demande continuellement aux Canadiens et aux Canadiennes s'intéressant à ce sujet de se prononcer. Nous avons entamé des consultations à travers le pays. Il y a des gens qui sont affectés à Transport Canada et qui ont le mandat de consulter les personnes et les entités intéressées dans tout le pays, afin de savoir quelles sont leurs préoccupations, mais surtout quelles sont les solutions qu'ils peuvent nous amener, quelles sont leurs propositions pour protéger un système ferroviaire qui répond aux besoins des gens qui veulent s'en servir?

Ce qui se passe, c'est qu'on a toujours la même histoire du Bloc québécois. Ils veulent maintenir tout ce qu'il y a dans le pays au niveau du système ferroviaire, que ça soit CN ou CP, et ils veulent retenir tous les services de VIA, mais ils veulent détruire le pays, ils veulent se séparer. Ils veulent maintenir tous les services ferroviaires, mais ils veulent séparer le Québec de l'ensemble du système qui va de l'Est à l'Ouest et au Nord.

À un moment donné, on peut demander à la population de réagir, de nous donner son point de vue sur ces questions, mais il incombe à l'opposition, quand même, d'être responsable et de mettre de l'avant des propositions concrètes, de nous dire exactement ce qu'elle voit comme étant l'avenir. Pas dans des rêves où on peut parler de la France ou de l'Allemagne ou d'autres pays, où un système fonctionne plus ou moins bien. Au Canada, on veut savoir ce qui est proposé par le Bloc québécois comme solution aux problèmes qui existent depuis très longtemps avec les chemins de fer. Ce n'est quand même pas quelque chose qui a commencé il y a douze ou quatorze mois.

Le statu quo est inacceptable, parce qu'il a eu comme résultat qu'il n'y a pas de service ferroviaire à Terre-Neuve, ni à l'Île-du-Prince-Édouard. Le Canadien Pacifique va abandonner toutes ses activités à partir du 1er janvier 1995, à l'est de Sherbrooke. C'est ça, le statu quo, parce que le statu quo est un concept, dans ce débat-ci, qui est absolument inutile, parce que les changements proposés sont devant nous à tous les jours. Pour notre part, nous voulons assurer les Canadiens et les Canadiennes que nous allons proposer des changements qui, nous espérons, refléteront la réalité canadienne.

[Traduction]

Dans cette optique, j'inviterais donc les députés des deux côtés de la Chambre, quel que soit le point de vue qu'ils défendent, à cesser de dresser la liste de tous les malheurs qui se sont abattus sur l'industrie ferroviaire canadienne au cours des deux dernières décennies et à parler sérieusement des solutions que nous devrions envisager. Quelles sont les solutions de rechange qui existent vraiment pour les actionnaires, les expéditeurs et les employés du Canadien Pacifique, pour les actionnaires du Canadien national, c'est-à-dire les contribuables canadiens, ses expéditeurs et ses employés, ainsi que pour VIA, qui a vu ses subventions réduites considérablement même si celles-ci demeurent très tangibles?

(1055)

Je suis impatient d'entendre, au cours de ce débat qui se poursuivra toute la journée, des solutions concrètes, de véritables propositions que les députés de part et d'autre de cette Chambre pourront évaluer d'une manière pragmatique. Si nous voulons conférer au secteur ferroviaire le genre de stabilité nécessaire pour étayer une économie en reconstruction, nous aurons besoin de la coopération des gestionnaires des sociétés ferroviaires, de leurs employés, des expéditeurs et de ceux qui utilisent les services ferroviaires offerts. Nous devrons aussi convaincre les Canadiens que nous faisons ce qu'il faut.

Déformer à la Chambre ce qui a été dit ou fait et formuler des allégations que l'on sait incorrectes ne contribuent en rien à faire avancer ce débat que les Canadiens estiment nécessaire quant à l'avenir des services ferroviaires au Canada.

En terminant, je tiens à féliciter les membres du groupe de travail qui ont entrepris cette tâche très difficile d'aller d'un océan à l'autre entendre ce qu'ont à dire les Canadiens de toutes les régions qui ont vraiment à coeur l'avenir des services ferroviaires et de leur demander leur opinion sur la commercialisation du Canadien National.

Que pensent les Canadiens de la privatisation de cette entreprise avec la participation des employés, pour peu que ce soit possible? Que considèrent-ils important pour l'avenir des services ferroviaires au Canada? Serait-il question d'un service de Halifax à Vancouver? S'agirait-il d'une société ferroviaire nationale fournissant un service essentiel? Sont-ils convaincus que c'est une solution de rechange méritant d'être examinée? Croient-ils que le gouvernement du Canada devrait évaluer l'offre non sollicitée du CP par rapport à son acceptation ou à son rejet, mais aussi en regard du statu quo que, selon moi, tous les députés estiment inacceptable? Y a-t-il d'autres solutions, outre l'offre du CP et la commercialisation du CN?

Des députés représentant le gouvernement parcourront le Canada d'un océan à l'autre. Nous leur avons demandé de remettre leur rapport le plus tôt possible. Les gens savent sans doute que l'offre présentée par le CP était assortie d'un délai aux termes duquel le gouvernement devait répondre dans les 90 jours. Nous avons dit que nous ne nous sentons pas liés par cette restriction, mais le gouvernement et le Canadien National font actuellement une analyse commerciale concrète de la proposition.

Le gouvernement doit considérer cette question en fonction de ses orientations en raison des répercussions d'une telle offre. J'espère que le groupe de travail Nault, en compagnie des députés qui s'intéressent de très près à cette question, pourra recueillir les points de vue des Canadiens de tous les coins du pays. Des décisions devront être prises très bientôt pour régler les vrais problèmes qui perdurent depuis cinq, dix, quinze ou vingt ans.

J'ai hâte d'entendre les députés du Parti réformiste et d'autres députés du Bloc québécois qui, j'en suis convaincu, feront beaucoup mieux que le porte-parole du Bloc sur les transports, qui a, de toute évidence, éprouvé des difficultés à relater correctement les faits quand il a amorcé le débat. Mais je ne doute pas qu'à mesure que la journée avancera nous entendrons des suggestions constructives de la part des députés de l'opposition, du Parti réformiste et d'autres députés des deux côtés de cette enceinte. Au Canada, tout le monde connaît l'importance d'un solide réseau ferroviaire national pour l'économie et l'avenir du pays.


7777

[Français]

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ): Monsieur le Président, avec votre permission, je voudrais que vous informiez le ministre des Transports qu'il n'est pas dans les moeurs et dans les coutumes que j'aie à m'excuser pour ce type de propos. Par contre, étant donné que je me considère comme une personne honnête, j'aimerais que vous informiez le ministre des Transports que, actuellement, mon bureau fait des recherches pour savoir si les faits qu'il a mentionnés sont exacts à l'effet que la ville de Campbellton est située dans le comté de Restigouche-Chaleur. Si tel est le cas, si vous pouviez dire au ministre des Transports qu'au moment jugé le plus opportun aujourd'hui, je ferai les corrections qui s'imposent. Mais je ne crois pas que j'aie à faire des excuses. De toute façon, le ministre des Transports lui-même est celui qui a eu le plus souvent de fois l'occasion de s'excuser en cette Chambre, quand on sait les propos qu'il tient sur une base régulière.

(1100)

Monsieur le Président, le ministre des Transports qui se dit être transparent, qui a avoué que le Comité sur la commercialisation, présidé par le député de Kenora-Rainy River était composé uniquement de libéraux, il a mentionné l'agenda trop chargé du Comité des transports. Est-ce que je pourrais informer le ministre des Transports qu'aux environs du 18 février 1994, lorsque le Comité des transports a été formé, que le porte-parole de l'opposition officielle du Bloc québécois, donc moi-même, a fait la demande qu'on devait étudier le rail en priorité.

À ce moment-là, j'avais sorti entre autres le rapport libéral sur le groupe de travail libéral, donc sur les coupures de VIA en 1989, où le ministre des Transports avait signé lui-même. J'invoquais qu'avant de continuer des abandons de lignes, on devrait obtenir les commentaires des usagers et les commentaires des régions. C'est pour ça que le 18 février, j'ai demandé que le rail soit inscrit. La majorité libérale, au sein du Comité des transports, a mentionné à ce moment-là, étant donné qu'il y avait un projet de fusion CN-CP, que ça pourrait compromettre les possibilités de fusion CN-CP; reportons ça à plus tard, le rapport devrait être soumis à la fin juin.

Nous avons ajourné en juin. Le 19 septembre, lorsque nous avons repris, pourriez-vous, monsieur le Président, informer le ministre des Transports, que cette journée-là, je suis revenu à la charge et j'ai dit: «Maintenant que le projet de fusion est arrêté, est-ce qu'on va étudier le rail en priorité?» Je me suis fait répondre que les aéroports étaient beaucoup plus prioritaires et que ça pourrait nuire aux négociations.

Comme argument, j'ai dit ceci à la majorité libérale au sein du comité: «On peut s'engager à n'entendre aucun représentant des travailleurs et de la direction des compagnies concernées, mais entendre les usagers, entendre les régions qui vont venir nous expliquer comment le rail est un outil de développement économique.» Encore une fois, ma proposition a été défaite au Comité des transports.

La réponse que le ministre nous a donnée le 29 septembre, est à l'effet qu'il annonçait la formation d'un comité libéral, partisan, gouvernemental, pour l'étudier. Si le ministre est transparent, pourquoi n'a-t-il pas ajouté sur ce comité un représentant de l'opposition officielle et un représentant du troisième parti?

M. Young: Monsieur le Président, c'est une coutume très bien connue de la Chambre que lorsque les comités de la Chambre sont formés, la majorité a même son mot à dire, et ça fait partie de la tradition parlementaire depuis très longtemps.

En ce qui a trait à des groupes de travail qui sont demandés à faire des choses par des partis politiques, c'est assez commun. Depuis qu'on est ici, on a vu énormément d'exemples par le passé. Que ce soit l'opposition ou le gouvernement, lorsqu'on veut se pencher sur un sujet quelconque, on demande un avis sur une base très politicisée. Il n'y a aucun doute que les gens qui sont sur le comité, comme le député de Kenora-Rainy River qui est président, sont du côté du gouvernement, et on leur a demandé de faire un travail pour pouvoir nous donner des avis importants et utiles pour que le gouvernement puisse en arriver à une décision à savoir comment réagir, d'une part, à la proposition de CP, mais aussi, d'autre part, préparer d'autres alternatives.

Il n'y a pas de doute qu'il y a plusieurs outils de travail pour les députés, entre autres à l'intérieur des comités de la Chambre. Tel que l'honorable député vient de nous dire, si le Comité des transports n'était pas en mesure pour des raisons quelconques, ou si la majorité avait déterminé, pour des raisons qui sont bien connues, qu'ils ne voulaient pas se pencher ou n'avaient pas le temps de se pencher sur cette question, il fallait que nous procédions parce qu'il fallait réagir à la proposition de CP.

Maintenant, à savoir si le Bloc québécois ou le Parti réformiste auraient été prêts à participer à un comité qui a été mandaté par le ministre des Transports, je n'en sais rien. Ce n'est pas une coutume que je voudrais commencer, parce que la Chambre a ses mécanismes pour évaluer des questions qu'elle considère importantes. Mais les partis politiques, les formations à l'intérieur de cette Chambre ont aussi le droit de demander à leurs collègues d'aller voir dans un dossier quelconque pour nous fournir des avis, des conseils qu'ils décident appropriés.

Il n'y a rien de machiavélique là-dedans. C'est une façon de faire les choses, ce qui existe depuis très longtemps. J'espère que nous allons voir dans cet exercice que M. Nault a déjà commencé, des occasions où toutes les personnes qui seront intéressées, y inclus les députés de la Chambre, vont faire connaître leurs points de vue.

(1105)

Cependant, il y a une chose qui est claire, c'est que les députés de l'opposition ont une occasion en or, aujourd'hui, de faire connaître leur point de vue sur l'offre de CP, sur la possibilité de commercialiser le CN et aussi sur le statu quo. Ce serait une bonne façon de leur permettre de prendre la parole et de nous dire ce qu'ils pensent, plutôt que de simplement faire la litanie de tous les malaises que l'on connaît depuis très longtemps déjà et auxquels on essaie de trouver des solutions.

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ): Monsieur le Président, comme promis, on m'a remis, pendant la réponse du ministre, le découpage de la carte électorale du Nouveau-Brunswick. Comme le ministre l'a justement déclaré, je prends l'engagement envers le ministre de ne


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plus jamais mentionner que la ville de Campbellton est dans le comté d'Acadie-Bathurst. Elle est dans le comté de Restigouche-Chaleur, représenté par un des membres du comité partisan.

Je ne considère pas que c'est une excuse. C'est comme si je demandais au ministre s'il sait que la ville de Saint-Tite-des-Caps est dans mon comté plutôt que dans le comté de Charlevoix. De toute façon, c'est dans le comté voisin du ministre et c'est dans la région d'origine du ministre. Cela ne change rien à ce que j'ai mentionné tout à l'heure.

Je voudrais dire au ministre que toute la question de la position du parti sur les CFIL, sur la fusion au CN, sur l'offre d'achat non sollicitée de CP, les autres intervenants vont en discuter aujourd'hui. Vous comprendrez qu'en 20 minutes, j'ai manqué de temps pour couvrir tous ces sujets, mais je le ferai en temps et lieu.

Nous avons eu l'occasion d'être informés des propos qu'il a tenus au début d'octobre à Winnipeg, où il mentionnait des «railway workers with education grade 8 or 9. . .» etc. Il a eu l'occasion de me donner une réponse en Chambre qui s'avère peut-être un peu différente de la réalité. J'aimerais que le ministre, s'il est vrai qu'il a tenu ces propos dans le contexte où il m'a répondu, nous explique pourquoi il y a des gens qui ont quitté la pièce et pourquoi WESTAC a dû s'excuser des propos qui constituaient une insulte aux 62 00 travailleurs du rail au Canada?

M. Young: Monsieur le Président, je ne suis pas du tout au courant de ce que le député suggère au sujet de WESTAC et du fait que quelqu'un ait dû s'excuser. Mais pour mettre en contexte ce qui s'est passé à cette réunion à Winnipeg où il y avait peut-être 150 personnes, trois personnes se sont levées, à ma connaissance, et sont sorties, parce qu'elles avaient interprété ce que j'avais dit comme étant inacceptable.

Avant d'arriver à la réunion, il y avait des gens qui faisaient du piquetage devant l'hôtel parce qu'ils s'opposaient à la nomination de M. Nault à la présidence du groupe de travail pour étudier la commercialisation du CN. Ces gens s'opposaient à cela, parce qu'ils trouvaient inacceptable que M. Nault ait travaillé pour CP. C'était le genre d'atmosphère qui régnait et je veux citer, parce que c'est peut-être la meilleure façon de clarifier la chose, un extrait précis de l'enregistrement du discours que j'ai donné à Winnipeg, à WESTAC. Je cite:

[Traduction]

Certains des problèmes ont évidemment été créés par les gouvernements en raison de réglementations et d'impôts excessifs, de même que par la direction des chemins de fer en raison de structures de direction trop lourdes et par les syndicats, qui ont été parties à des ententes ayant pour effets une faible productivité et des règles de travail archaïques.

Je tiens à souligner aujourd'hui, en ce qui concerne la situation dans les chemins de fer, que je n'ai jamais blâmé les travailleurs n'ayant jamais fait plus qu'une huitième ou une neuvième année qui sont au service des chemins de fer depuis 40 à 50 ans et qui ont pu négocier ce genre d'entente avec des gens gagnant beaucoup plus qu'eux pour gérer les chemins de fer.

Je ne vais pas menacer ces gens-là qui ont obtenu les meilleures conditions possibles lorsqu'ils en ont eu la chance. J'ai déjà exprimé mon désarroi à la Chambre à l'idée qu'on puisse mal interpréter ces observations et penser qu'elles ne constituent pas un vibrant hommage à ces gens-là qui ont travaillé très fort dans des circonstances difficiles afin de protéger les acquis et les droits de leurs confrères des syndicats des chemins de fer.

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Monsieur le Président, la motion ayant trait aux chemins de fer au Canada comporte trois volets: l'inaction du gouvernement, son manque de transparence et, enfin, son absence de vision concernant le TGV.

(1110)

Je ne vais pas proposer une série de solutions, comme le ministre l'a demandé, parce que nous allons aborder les points précis que le Bloc québécois a soulevés dans sa motion. Je vais néanmoins lancer plusieurs défis au ministre qui, je l'espère, saura les relever pendant la période des questions et observations. S'il n'en fait rien, je comprendrai qu'il souscrit à contre-coeur à mes arguments.

Commençons par l'inaction du gouvernement. Je suis absolument d'accord avec le Bloc quand il parle de l'inaction du gouvernement. Cela n'a rien d'étonnant. Le fait est qu'elle est omniprésente dans tous les ministères fédéraux.

En ce qui concerne les transports, voyons des dossiers comme le contrat de l'aéroport Pearson et la loi portant son annulation. Nous avons demandé au ministre d'ouvrir une enquête publique. Sans nous prononcer si c'est une bonne ou mauvaise affaire, nous disons simplement: «Comment peut-on condamner quelque chose qui n'a pas fait l'objet d'une enquête en bonne et due forme?»

Dans un premier temps, le ministre a refusé la tenue de cette enquête. Dans un deuxième temps, les médias nous ont appris qu'il songeait sérieusement à ordonner une enquête publique. Dans un troisième temps, un autre ministre a tranché la question. En effet, la vice-première ministre a dit qu'il n'y aurait pas d'enquête. Eh bien, il n'y a pas eu d'enquête!

C'est un exemple d'une série d'actions qui ont abouti à l'inaction. Cela pose la question de savoir qui dirige en réalité le ministère des Transports.

Venons-en maintenant au dossier du port de Churchill. Le procès-verbal d'une réunion du Conseil national des ports a d'abord indiqué que Churchill allait être fermé. Or, ces mots ont ensuite disparu comme par enchantement du procès-verbal de la réunion où cette décision a été prise.

La question a été soulevée à la Chambre. Qui en était responsable? Le ministre ou le dirigeant du Conseil national des ports, une personne nommée par ses amis libéraux, évidemment? Eh bien, ce n'était pas le ministre! Il s'agissait encore d'un autre ministre qui siège tout près, lequel s'intéressait davantage à la chose puisque cela se passe dans sa province natale. C'est donc lui qui a fait apparaître un marqueur magique sur le procès-ver-


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bal. Encore une fois, je me demande qui dirige le ministère des Transports. N'est-ce pas une des causes de l'inaction du gouvernement?

Il y a aussi les ressources humaines. Il s'agit encore une fois d'un nouveau concept que les libéraux pratiquent avec un art consommé et qui consiste à transformer une série d'actions en une absence de toute action. En ce qui concerne les ressources humaines, dès le commencement de l'année, les libéraux ont majoré les cotisations d'assurance-chômage. Puis, autre coup de maître, ils ont réduit l'augmentation qu'ils avaient eux-mêmes décrétée, ce qui revenait à annuler leur première intervention, et ils se sont vantés d'avoir réalisé une grosse économie pour le bien du pays. J'avais dit alors que s'ils avaient augmenté dix fois le montant, puis l'avait réduit, ils auraient réalisé une économie bien plus grande encore. Il est évident qu'on aboutit à une inertie totale.

Il y a ensuite le ministère le Justice. Il parle de réformer le système de justice pénale, mais aucune mesure concrète n'est prévue. Les problèmes se perpétuent.

Parlons maintenant du ministère de la Santé. Non seulement il ne prend lui-même aucune mesure, mais il pénalise les provinces qui essaient d'agir. C'est le cas, par exemple, de ma province, la Colombie-Britannique, qui cherche à mettre en oeuvre des mesures destinées à réduire les coûts, ainsi qu'à assainir, par le fait même, le système de santé et à le rendre plus efficace. Au lieu de cela, la province subit une réduction des paiements de transfert, car elle n'a pas emboîté le pas au gouvernement libéral.

Arrêtons-nous ensuite sur le ministère de l'Immigration et les prétendues consultations qu'on mène actuellement. Ce ne sont pas de véritables consultations, car les Canadiens exigent des mesures concrètes et précisent très clairement ce qu'ils attendent du gouvernement. Par contre, les membres du comité ne font que défendre auprès des Canadiens le programme que le gouvernement a déjà établi.

On peut aussi parler du ministère des Pêches. Là encore, il est question d'une autre étude dans le seul but de trouver un bouc émissaire pour l'inertie du ministère des Pêches et des Océans qui ne sera plus bientôt que le ministère des Océans, car le secteur des pêches n'existera plus.

Il y a également le ministère des Finances qui n'a pas de plan réalisable. Rien ne nous permet de croire que les objectifs qu'il a établis sont atteignables. D'ailleurs, ces objectifs sont trop bas, même si le ministère réussit à les atteindre par je ne sais trop quel tour de magie, grâce à son prétendu plan d'action actuel.

Voilà ce que fait, en général, le gouvernement qui aime qualifier beaucoup de ses déclarations de «plans d'action». Il faut plus que des paroles creuses pour vraiment agir.

(1115)

Quelles mesures le gouvernement prend-il pour remédier à l'abandon des lignes ferroviaires? De quels changements sommes-nous témoins? Rien n'est fait pour résoudre le problème de l'excédent des lignes dans l'Est.

Chose intéressante, lorsque le CN et le CP parlaient de rationalisation, de la fusion des deux compagnies pour former une nouvelle compagnie, Newco, le ministre semblait penser que c'était une excellente idée. Par contre, maintenant qu'une des compagnies souhaite acheter l'autre, ce n'est plus une bonne idée, même si cela donnerait en gros la même chose. En fait, les résultats seraient encore meilleurs, parce qu'il y aurait quand même encore une certaine concurrence dans le cadre de cette nouvelle proposition.

Le gouvernement ne fait rien pour alléger le fardeau fiscal inéquitable des compagnies de chemins de fer, même si c'est certes un problème très important qui explique en grande partie les difficultés qu'éprouvent les chemins de fer.

Il ne prend aucune mesure pour s'attaquer à des problèmes provinciaux, comme les lois du travail et les impôts fonciers qui non seulement frappent durement les compagnies de chemin de fer actuelles, mais qui aussi empêchent dans une large mesure d'amener des exploitants privés de chemins de fer sur courtes distances à s'occuper de ces voies abandonnées lorsque les grosses compagnies de chemins de fer ne peuvent plus les exploiter de façon rentable.

On n'essaie pas non plus d'harmoniser les règles sur la dépréciation des immobilisations pour que les compagnies canadiennes puissent être en mesure de bien concurrencer les compagnies américaines.

Je vais maintenant m'arrêter sur le manque de transparence du gouvernement face au secteur ferroviaire. Là encore, c'est une situation qui se retrouve dans tous les ministères.

Bien entendu, dans le domaine du transport, nous avons été témoins de choses comme le contrat de l'aéroport Pearson. Lorsqu'il a déposé le projet de loi C-22, nous avons tenté d'y introduire un élément de transparence. S'il avait été en accord avec cela, nous aurions appuyé ce projet de loi. Tout ce que nous voulions, c'est que les demandes d'indemnité et les paiements qui en résulteraient soient soumis à l'étude du Comité des transports, composé de députés de tous les partis, pour que ces demandes et ces paiements soient connus et transparents et qu'il ne puisse y avoir aucune entente secrète. Le comité a refusé d'approuver cette proposition d'amendement. L'amendement a également été rejeté à la troisième lecture du projet de loi.

Il y a ensuite la magnifique entente conclue derrière des portes closes entre le ministre des Transports et Air Canada au sujet des vols à destination d'Osaka. Le ministre, qui s'est adressé directement à moi à la Chambre, a nié qu'une entente avait eu lieu dans le secret. Il a continué de le nier pendant deux jours, après quoi il a admis avoir conclu une entente avec Air Canada. Est-ce cela la transparence? Absolument pas.

Au ministère des Ressources humaines, là encore, les nominations teintées de favoritisme sont légion, même dans ma petite circonscription rurale du sud-est de la Colombie-Britannique. Il a fallu attendre un an avant de trouver quelqu'un qui puisse occuper le poste de président du conseil arbitral, le gouvernement ayant tenté d'y nommer une personne dénuée de toute compétence. Lorsque la situation a été mise au jour, le gouvernement a attendu plus d'un an pour procéder à une nomination sans favoritisme. Cela a causé d'énormes difficultés pour les gens de


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ma circonscription qui avaient des problèmes d'assurance-chômage. Il s'agit là d'un autre exemple du manque de transparence de la part du gouvernement.

Le ministère de la Santé mène actuellement une étude de 12 millions de dollars, non pas pour apprendre quelque chose, mais bien pour vendre des notions et des idées préconçues au sujet du gouvernement. Cela n'est pas de la transparence, et c'est inacceptable.

Il y a également le ministère de l'Immigration, qui possède son propre programme caché et sa commission d'examen. Au sein de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, à Vancouver, il y avait un membre qui avait été nommé par le gouvernement précédent et qui ne rendait une décision favorable que dans 38 p. 100 des cas. Ces quatre dernières années, on a fait appel de seulement trois de ses décisions. Deux appels ont été entendus et un seul a été rejeté, à cause d'une erreur dans la traduction des renseignements que l'appelant lui avait fournis. Cela changeait le sens des témoignages de ce qu'on lui avait dit. C'est le seul cas qui a été rejeté. Il n'y en a pas eu d'autres.

Le ministre vient de fixer un objectif de 75 p. 100 pour le taux d'acceptation. Pourquoi cet objectif? On ne devrait accepter que les immigrants qui répondent aux critères. S'il y en a 10 p. 100, il y en aura 10 p. 100. S'il y en a 90 p. 100, il y en aura 90 p. 100. Comment peut-on avoir un objectif si l'on n'a pas de programme caché? Cela nous amène à nous interroger sur la transparence des mesures prises par le gouvernement.

(1120)

Le fait est que si l'une des deux personnes qui examinent les appels accepte la demande, celle-ci est acceptée. Si elle est acceptée, il n'est pas nécessaire de rédiger un rapport. Par contre, si elle est rejetée, il faut écrire un long rapport. Cela nous pousse à accepter les demandes, que cela serve ou non les intérêts du Canada.

Je voudrais maintenant parler de la transparence au ministère des Pêches et des Océans, de l'étude du problème très grave, voire catastrophique, de la pêche au saumon sur la côte ouest. Le ministère a mené une étude interne au lieu d'une enquête publique. Le problème a été étudié à l'intérieur du ministère par le ministre. Comment peut-il donner une réponse objective quand c'est lui qui procède à l'étude?

Qu'en est-il de la transparence au ministère des Finances? On refuse absolument de prendre quelque engagement que ce soit sur la question d'une taxe sur les combustibles fossiles ou sur l'imposition des REER.

Le cas du ministère de la Justice est intéressant. Là, c'est tout à fait l'opposé de la transparence. Il y a une transparence épouvantable quand il s'agit de choses telles que le projet de loi sur le contrôle des armes à feu et que le ministre déclare publiquement qu'il ne prendra pas de mesure législative fondée sur le vote populaire, mais qu'il fera, en fait, ce qui est bon pour les gens. Autrement dit, il se fiche de ce que les gens veulent. Il pense être mieux placé qu'eux pour décider.

Qu'en est-il de la transparence dans les transports? On a déjà parlé du groupe de travail sur le CN. Y a-t-il un problème à ce sujet-là? Est-ce transparent, viable? Bien sûr que non. Il n'y a absolument aucune raison que les questions soulevées au sujet du CN n'aient pu être examinées par le Comité des transports; la participation de membres de tous les partis aurait permis une certaine crédibilité, ou du moins une certaine transparence.

Nous savons que récemment un groupe de travail constitué par le comité des transports pour examiner la question de la Voie maritime a produit un rapport minoritaire. Il n'était pas question que l'on exprime une opinion dissidente. Il se trouvait que mon parti n'était pas d'accord, mais enfin, les gens ont tout de même le droit de s'exprimer. Voilà ce qu'un groupe de travail entièrement libéral chargé d'étudier le CN arriverait à bloquer.

Quand le groupe de travail va examiner la question du CN et la proposition du CP, trois scénarios sont possibles. À mon avis, son rapport est déjà prêt.

Le premier scénario est qu'il pourrait dire que la proposition du CP est bonne, ce qui libère le ministre de toute responsabilité. Le ministre peut maintenant dire que les gens ont été consultés et qu'ils sont d'accord. Et ça finit là. Cela rejoint ce que nous avons déjà dit à propos d'autres projets de loi pour lesquels le gouvernement a tenu des consultations, ce qui est en soi censé vouloir dire que la solution à laquelle il est arrivé est la bonne. Le fait de tenir des consultations ne veut pas dire que tout ce que contient le rapport final a quoi que ce soit à voir avec l'opinion exprimée. Il ne sert à rien de procéder à des consultations si l'on ne tient pas compte de l'opinion des gens.

Le deuxième scénario est qu'il pourrait dire au CP: «Votre proposition d'acheter une partie du CN nous plaît, sauf que nous voulons que vous achetiez le tout.» C'est inacceptable. Cela ôterait en effet tout reste de concurrence que permet encore la proposition actuelle du CP.

Le dernier scénario est qu'il pourrait dire: «Non, nous refusons de vendre une partie du CN. Nous voulons privatiser ce dernier entièrement et le vendre en un seul bloc.» Ça non plus, ce n'est pas acceptable parce que ça ne change rien au problème du surplus de voies ferrées dans l'est du Canada.

Je suppose qu'il existe une quatrième solution, celle de ne rien faire du tout. Les libéraux semblent très en faveur de cette solution. J'espère tout de même qu'ils se rendent compte que ce n'est pas possible.

Nous pourrions nous en tenir à la proposition du CP. À mon avis, l'offre du CP au CN est bonne. Je rappelle au ministre qu'elle n'est pas tellement différente de l'idée qu'il a déjà appuyée, à savoir la fusion des deux compagnies, sauf que dans ce cas, il n'y aurait plus du tout de concurrence, alors que la proposition du CP laisse encore place à la concurrence.

Puisque le député le mentionne dans sa motion, je voudrais dire un mot au sujet de VIA Rail. C'est bien simple, VIA Rail devrait être privatisée. Prenons par exemple Rocky Mountaineer Railtours, le service des excursions en chemin de fer dans les montagnes Rocheuses offert par VIA Rail en Colombie-Britannique et en Alberta. Malgré les subventions considérables qu'elle a reçues pendant des années à cette fin, la compagnie a réussi à perdre de l'argent avec ce service.


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VIA a vendu Rocky Mountaineer Railtours à Great Canadian Railtour Company. Cette société a exploité ce service dans les mêmes conditions que le faisait VIA, mais à la manière d'une entreprise privée. Elle doit retirer un profit de son investissement dans VIA. Elle s'est heurtée à des obstacles importants mis sur son chemin par la société même qui lui avait vendu la voie ferrée et elle a dû avoir recours aux tribunaux. Malgré tout, elle réussit à encaisser des profits sans recevoir de subventions.

Les sociétés privées peuvent-elles faire mieux que les sociétés d'État? Assurément. Nous croyons que le transport ferroviaire de passagers ne devrait être subventionné que pour les trajets reliant les régions éloignées et là encore, seulement lorsque le besoin en est démontré.

On peut toujours se rappeler avec nostalgie l'époque où le train reliait entre elles les diverses régions du pays. Nous devons reconnaître que les progrès de la technologie permettent maintenant aux locomotives de transporter des charges plus lourdes qu'autrefois, plus rapidement et dans des conditions plus sûres, mais le concept même de transport ferroviaire n'a pas beaucoup évolué au fil des années.

À l'époque où le transport ferroviaire a vu le jour, il n'existait guère d'autres modes de transport. Le chemin de fer a vu le jour avant tout autre concept généralisé de transport, à l'exception du cheval. Il n'existait alors ni avion, ni autobus, ni automobile. La diversification des moyens de transport engendrée par le progrès technologique nous oblige à repenser la vocation du chemin de fer.

Bon nombre de régions peuvent être desservies par l'entreprise privée, qui pourrait faire des bénéfices sans avoir à compter sur des subventions gouvernementales, partout où le nombre d'utilisateurs est suffisant. Cela réglerait en outre le problème de l'engorgement du réseau routier. En régions éloignées, là où des solutions de rechange sont possibles, il faudra probablement les envisager. Ce n'est que lorsqu'aucune autre solution n'est réalisable qu'on devrait envisager le recours à des subventions gouvernementales.

Finalement, je veux aborder la question du train à grande vitesse. On en a déjà parlé. La réponse qu'on peut donner aujourd'hui est la même qu'auparavant. On ne prévoit pas établir de réseau ferroviaire pour trains à grande vitesse au coût de sept ou huit milliards de dollars dans un avenir prochain, surtout pas si la moitié de cet argent doit être puisé dans les coffres vides du gouvernement fédéral. Nous n'avons pas d'argent pour ces choses dont nous discutons aujourd'hui.

Les députés d'en face nous parlent de la nécessité de réduire les dépenses, et nous sommes d'accord là-dessus. Nous savons qu'il faudra réduire les dépenses. Pourquoi, à une époque où nous parlons de la nécessité de réduire les dépenses, sommes-nous en train de discuter d'un investissement de sept ou huit milliards dans un train à grande vitesse? Nous ne parlons même pas d'un réseau national de trains à grande vitesse, mais seulement d'un corridor unique.

On a dit que la moitié de cet argent devrait être puisé dans les coffres du gouvernement. Si vraiment c'est une entreprise rentable, comme les gens qui proposent cette motion veulent nous le faire croire, pourquoi veulent-ils y associer le gouvernement, qui a toujours perdu de l'argent dans tout ce qu'il a entrepris? Par ailleurs, si cette entreprise n'est pas rentable, pourquoi le gouvernement s'imposerait-il une autre ponction fiscale?

Les solutions existent. Le gouvernement ne les trouvera pas s'il ne prend pas dès maintenant des mesures pour mettre en oeuvre celles qu'il connaît déjà. Il ne les trouvera pas s'il persiste à cacher ses intentions, s'il évite la transparence, s'il refuse d'inviter ouvertement et honnêtement la participation et d'appliquer les solutions qui lui seront alors proposées, au lieu d'inventer des justifications à son propre programme.

Le ministre aura amplement l'occasion d'entendre des propositions. Malheureusement, chaque fois que les ministériels ont emprunté une politique réformiste, que nous étions heureux de partager, ils n'en ont pris que des bribes. Ils se sont arrangés pour en faire un tel gâchis que nous sommes devenus presque réticents à aider le gouvernement, à moins qu'il nous laisse le guider jusqu'au bout, comme nous sommes parfaitement disposés à le faire, d'ailleurs.

La balle est dans le camp du gouvernement. S'il veut réfuter tous mes arguments, je l'entendrai avec plaisir. Sans cela, je demanderais au gouvernement de devenir plus transparent et de commencer à prendre des mesures pour consulter les députés de ce côté-ci de la Chambre qui ont des solutions à proposer. Il ne nous sert à rien de les lui communiquer s'il n'entend pas les utiliser.

M. Glen McKinnon (Brandon-Souris, Lib.): Monsieur le Président, je suis arrivé en retard ce matin et je n'ai donc pas entendu toute l'allocution du député. Je tiens à féliciter le député sur sa façon d'aborder nombre de nos problèmes nationaux.

(1130)

Ne conviendra-t-il pas, toutefois, qu'il y a forcément des moments où un ministère ne peut pas être transparent, dans les premiers stades d'une étude, notamment? Certes, dans les domaines des transports, de la justice, de l'agriculture, les recherches ont leurs exigences.

M. Gouk: Monsieur le Président, je signale au député que nous ne parlons pas ici du droit du gouvernement de mener ses recherches. À mon avis, le groupe de travail sur le CN n'a rien à voir avec cela. Il s'agit d'une étude visant à déterminer si l'offre du CP est valable, s'il existe des solutions de rechange et quelle politique on devrait suivre.

C'est le genre de choses que fait le Comité permanent des transports. C'est à cela que servent les comités: à examiner diverses propositions. Le CP a offert d'acheter une partie d'une entreprise gouvernementale, le gouvernement ne devant évidemment pas être en affaires.


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Une entreprise indépendante a fait l'offre légitime d'acquérir une partie d'un service gouvernemental. Si cela ne mérite pas d'être examiné par un comité multipartite, je me demande bien ce qui mériterait de l'être.

[Français]

M. Gagnon: Monsieur le Président, je trouve déplorable qu'on touche une question aussi importante que celle proposée par l'opposition alors qu'on ne retrouve qu'un député en face. Franchement, je crois que cela démontre le peu de sérieux que le Bloc québécois a pour ce sujet pressant. J'en vois entrer quelques-uns. D'accord. C'est bien. Alors, ils ne sont que deux, monsieur le Président.

M. Duceppe: Monsieur le Président, le député ne devrait pas souligner l'absence de députés, sinon, on passerait notre temps à déplorer l'absence de ministres de l'autre côté de la Chambre. Probablement que mon jeune ami ne connaît pas le Règlement.

Le président suppléant (M. Kilger): Je pense que les députés des deux côtés de la Chambre connaissent assez bien le Règlement. Il y a quand même quelquefois des distinctions qui sont difficiles à faire et je considère le rappel au Règlement soulevé par l'honorable whip de l'opposition, en autant qu'on ne vise pas un député en particulier. Je le remercie de son intervention et je demanderais au secrétaire parlementaire de bien vouloir continuer son intervention.

M. Gagnon: Monsieur le Président, il s'agit quand même d'un débat très important et des députés qui ont fait partie de ces décisions il y a quelques années, en 1989, dont un certain ministre de l'Environnement à l'époque qui est présentement chef de l'opposition, ne sont pas ici pour s'expliquer devant la Chambre.

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre, s'il vous plaît. Nous devons comprendre, surtout en vertu des demandes des députés de cette Chambre, tant députés que ministres ou secrétaires parlementaires, que les exigences sont très grandes et que notre disponibilité est limitée par les nombreux comités, les rencontres, etc.

Je crois quand même que le secrétaire parlementaire connaît très bien le Règlement et qu'il a acquis une certaine expérience depuis son arrivée ici sur la Colline parlementaire. Alors, je lui demanderais de bien vouloir s'en tenir au Règlement et de se souvenir que l'on ne nomme personne, d'un côté de la Chambre ou de l'autre, en ce qui concerne leur présence en Chambre.

M. Duceppe: Monsieur le Président, je demanderais au député de retirer ses paroles, sinon on n'a qu'à faire comme lui et déplorer par la suite de l'avoir fait sans avoir effectivement retiré de paroles.

Donc, je lui demande de retirer les paroles qu'il a prononcées, à savoir d'avoir souligné l'absence d'un membre de la Chambre. Qu'il les retire et qu'il s'en excuse, sinon les députés de ce côté-ci comprendront qu'ils peuvent le faire tout le reste de la journée envers les ministres qui seraient absents.

Le président suppléant (M. Kilger): Je ne suis pas en mesure de demander à qui que ce soit de retirer un commentaire qui n'est vraiment pas dans le contexte de celui que nous évoquons habituellement en ce qui concerne un commentaire antiparlementaire ou qui pourrait avoir un impact sur l'intégrité et l'honnêteté d'un député.

(1135)

Il ne s'agit pas d'un recours au Règlement, mais quand même, j'apprécie l'intervention du whip de l'opposition officielle sur ce sujet et j'espère que tous les députés des deux côtés de la Chambre démontreront une plus grande sensibilisation à cet égard.

M. Gagnon: Monsieur le Président, je voudrais quand même remercier l'opposition de nous avoir invités à un débat sur ce sujet. Je crois que cela nous permet d'éclaircir certains points et certaines allégations qui ont été soulevés par les membres de l'opposition.

Dans un premier temps, je crois qu'on devrait quand même regarder un peu la toile de fond de ce débat, quand on parle de l'industrie ferroviaire qui fait actuellement face à de nombreuses questions pressantes au Canada, une industrie qui est sans doute à la croisée des chemins pour ce qui est de son avenir.

Les contribuables canadiens, il faut bien le dire, verseront cette année plus de 1,6 milliard de dollars en subventions directes au réseau de transport du Canada. De ce montant, 331 millions de dollars seront des subventions directes au service ferroviaire pour voyageurs. Nous estimons, et c'est l'avis de tous, que le rôle et la structure des sociétés d'État, comme VIA Rail, doivent à l'occasion être rééxaminés. Nous devons rester pragmatiques et nous concentrer sur des solutions réalisables, car les passagers de VIA Rail doivent pouvoir compter sur un réseau de transport multimodal, sûr, fiable, et bien entendu abordable.

Avant d'aborder la question de l'avenir de VIA Rail, je crois qu'il serait utile de faire un bref historique de la société et de la situation actuelle. J'ai justement fait état, il y a quelques instants, qu'en 1989, le chef de l'opposition a fait partie d'un gouvernement qui a coupé de 50 p. 100 le service VIA Rail au Canada, qu'on y a éliminé près de 2 500 emplois en 1989. Je crois que quand même l'odieux repose sur l'opposition, avec ce ministre qui a fait partie de ce gouvernement, qui est aujourd'hui chef de l'opposition. C'est à lui de nous expliquer pourquoi on a coupé VIA et CN en 1989, de 50 p. 100. Pourquoi a-t-on coupé plus de 2 500 emplois?

Je trouve que c'est regrettable, et d'ailleurs ceux qui en ont fait les frais ce sont les travailleurs, les familles, les Montréalais, de bons Québécois et des Canadiens qui ont dû subir ces coupures qui n'ont jamais été justifiées par l'opposition.

Je vais poursuivre dans ce discours. Aujourd'hui, tout le monde se lève, on fait le procès du gouvernement du Canada, mais comme tout le monde le sait, nous n'étions pas au pouvoir à l'époque et je n'étais pas député non plus. J'invite l'opposition à saisir cette occasion pour expliquer devant les Canadiens, devant les membres de cette Chambre pourquoi ils ont demandé un débat sur cette question.


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Je crois qu'on demande et on exige, on a le droit de poser ces questions, pourquoi est-ce qu'on a un chef de l'opposition qui a fait partie de ce gouvernement qui a sensiblement, si on veut, il faut bien l'avouer, changé le portrait de VIA et de CN au Canada.

Je poursuis. Je voudrais aussi faire quand même remarquer à cette Chambre qu'il y avait plusieurs autres membres de l'opposition qui ont fait partie de ce gouvernement conservateur qui, à mon avis, sont des complices privilégiés. Aujourd'hui, ils ne sont pas ici pour s'expliquer. Quand même, ils ont fait partie de cette rationalisation de CN, de cette coupure de 50 p. 100 et nous devons leur poser des questions.

Je vois qu'il y a quand même le whip de l'opposition en Chambre qui. . .

M. Duceppe: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Visiblement, le député ne comprend pas ou fait semblant de ne pas comprendre, n'applique pas les indications que vous lui avez données quant au bon comportement en Chambre. Il récidive.

Je pense qu'au-delà du débat civilisé qu'on devrait avoir, car on devrait avoir un débat civilisé et non pas ce genre d'attitude juvénile du député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine. Qu'il s'oppose, qu'il dénonce certaines décisions prises dans le passé. . .

Le président suppléant (M. Kilger): Je crois qu'on a interrompu le député sur un recours au Règlement qui suivait un recours au Règlement précédent, mais soudainement nous nous retrouvons dans un débat. Une fois de plus je demande au secrétaire parlementaire qui a la parole de bien vouloir éviter de mentionner soit la présence ou l'absence de qui que ce soit dans le cours de son intervention.

(1140)

Je dis, de façon très respectueuse envers mon collègue, le whip de l'opposition officielle, que ce n'est pas un recours au Règlement comme tel et je redonne la parole au secrétaire parlementaire.

M. Gagnon: Monsieur le Président, ce n'est pas juvénile de défendre les intérêts de ses commettants, de faire appel au raisonnement des députés ici présents, de faire en quelque sorte le constat de la situation. Il y a quand même un historique. Je ne crois pas que les déboires de CN et de VIA Rail ont nécessairement commencé avec l'arrivée du nouveau gouvernement. Je crois qu'il faut tenir compte d'une chose: on doit quand même regarder en arrière pour trouver des explications raisonnables à la situation que l'on connaît.

Je peux dire aussi que j'ai été tout à fait consterné qu'en 1989, quand j'ai voulu prendre le train pour descendre dans le comté de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, bon sang, le service de train avait été réduit de sept à trois jours. Il est certain que cela m'a bouleversé, cela a bouleversé plusieurs de mes commettants. Justement, c'est un fait indéniable que le train, que le service VIA Rail a été réduit par l'ancien gouvernement. Cela n'a pas été fait par les libéraux mais par les conservateurs. Sauf que la seule chose que j'ai à dire c'est qu'il y a plusieurs députés de l'opposition actuelle qui ont fait partie de ce gouvernement. Je n'y étais pas et, croyez-moi, j'aurais dénoncé vivement cette politique et cette prise de position mal pensée sur l'avenir de VIA Rail et CN en 1989.

On parle de transparence. Le critique de l'opposition nous a parlé de transparence. Je félicite le désir de l'opposition de faire état de la transparence gouvernementale à ce sujet, mais quand on parle de transparence, il ne faut pas uniquement se référer au présent ministre des Transports qui n'était pas ministre à l'époque. Si on parle de transparence, il faut quand même faire une évaluation générale de la situation. C'est tout ce que j'attends de l'opposition.

Faisant moi-même preuve de transparence, malgré les accusations qui ont ét portées contre ma personne, contre mes efforts et mon travail envers le service VIA Rail et CN dans le comté de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, je serais bien curieux de savoir combien de députés de l'opposition ont pris le temps de prendre le train depuis un an. Je serais curieux de savoir combien de députés de l'opposition et du gouvernement, qui, ayant accès à un service ferroviaire dans leur localité et dans leur comté, ont pris le train pour se rendre ici à Ottawa.

Je peux vous dire que je lance le défi à l'opposition, s'il y en avait quelques uns devant moi, de me dire combien de fois ils ont pris le train pour faire le trajet entre Ottawa et leur comté respectif. Personnellement, je tâche de prendre le train chaque fois. Évidemment, pas aux îles de la Madeleine, car je n'ai pas d'autre choix que d'utiliser l'avion et m'y rendre dans un temps raisonnable. Sauf que lorsque je me rends dans le comté de Bonaventure je me rends directement dans ma localité de New Richmond. C'est quand même 13 heures de train à partir de Montréal. Je prends la peine de prendre le train à 14 ou 15 heures à Ottawa, j'arrive à Montréal vers 17 heures, j'attends deux heures, et ensuite je prends le train pour me rendre dans le comté de Bonaventure. Cependant, il y a certains soirs où on n'a aucun service dans la péninsule gaspésienne. Parfois j'arrive à Campbellton, au Nouveau-Brunswick, à 4 h 30 du matin. Si cela n'est pas un député qui prend sérieusement son service qui veut le rentabiliser, qui veut faire sa part, je suis prêt à débarquer à 4 h 30 le matin pour assurer ma présence.

Si on veut maintenir le train, on doit s'en servir. Forcément, tout le monde le sait, il y a très peu de gens qui prennent le train. On a beaucoup plus à faire au niveau du marketing, on a beaucoup plus à faire au niveau de la publicité et de convaincre non seulement la population mais d'inviter les députés de l'opposition et tous les députés de cette Chambre à démontrer leur bonne foi en utilisant le train le plus souvent possible. Il y a plusieurs députés qui pensent que c'est beaucoup plus facile de prendre l'avion entre Montréal et Ottawa pour faire la navette entre leur comté et leurs responsabilités ici dans cette Chambre. Sauf que je voudrais quand même assurer l'opposition et surtout mes commettants qu'ils ont un député qui se sert du train et qui va s'en servir encore pour longtemps, croyez-moi.

(1145)

Alors, là on parlait justement de transparence. Il est certain qu'on n'a pas entendu de solution pratique venant de l'opposition. Comme dans la plupart des cas, c'est toujours le procès du fédéral, c'est toujours la faute du Canada. Il n'y a rien qui marche au Québec, parce que, en gros, ça ne fonctionne pas, à leur avis. Sauf qu'on a quand même monté un comité, on a quand même invité l'opposition à nous proposer des solutions concrètes. Je


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n'ai jamais entendu le mot, par exemple, «intermodal». Je n'ai jamais entendu des nouvelles idées pour rentabiliser VIA Rail ou rentabiliser le CN, ou rentabiliser le service des transports au Canada. Tout ce qu'on entend, ce qui est fort malheureux, c'est que toute cette politique des transports au Canada est un échec retentissant. Sauf que, quand même, le Canada a été bâti grâce à ce lien.

[Traduction]

C'est un lien qui unit.

En 1867, lorsque le Canada est né et n'était qu'une petite colonie britannique, nous avions un rêve national, nous avions une vision où tous les Canadiens s'unissaient, où nous allions vers l'ouest, jusqu'au Pacifique, où nous unissions le Canada comme nous le connaissons aujourd'hui, en dépit des pressions exercées pour le maintien et le renforcement de nos liens avec les Américains. Nous sortions tout juste d'une guerre révolutionnaire, devrais-je ajouter. Il y avait plus de visionnaires au Canada à cette époque. Ces visionnaires ont été envoyés jeter des rails d'un bout à l'autre du Canada pour être certains que ce pays deviendrait celui qu'il est aujourd'hui.

Nous savons tous quelle position le Canada occupe. Je n'ai pas à le rappeler aux députés. Je pense que les Nations Unies répètent année après année que le Canada est le meilleur pays du monde.

Bien sûr, le dossier du rail n'est pas simple. Le Canada est un pays qui a été forgé. Ce n'est pas un pays né d'une révolution et de luttes. C'est un pays qui a été édifié par des immigrants, des minorités et toutes sortes de gens qui sont venus au Canada pour améliorer leur sort. Dieu merci, c'est le train qui les amenés ici. Nous avons aujourd'hui des avions et d'autres moyens de transport dans notre magnifique pays.

Peut-être, étant donné nos contraintes financières, le temps est-il venu d'examiner les services de transport et de prendre les moyens pour que les Canadiens en aient pour leur argent. C'est ce que dit l'opposition.

Cependant, nous devons trouver de nouvelles solutions. Bien sûr, nous pouvons regarder ce qui se fait en Europe. Cependant, en France, au Japon, en Asie, en Allemagne et en Grande-Bretagne, la population est beaucoup plus concentrée qu'elle l'est au Canada. En Belgique, la densité de population est d'environ 350 personnes au kilomètre carré tandis qu'elle n'est que de trois au Canada. En France, la densité est d'environ 250 habitants au kilomètre carré et ce pays est capable d'offrir un excellent service.

Après tout, si je ne m'abuse, le Canada est 18 fois plus grand que la Grande-Bretagne et plus de six fois plus grand que la France. Le Canada est un immense pays qui compte seulement 30 millions d'habitants. Évidemment, le service ferroviaire que nous sommes prêts à offrir ici n'est pas nécessairement l'équivalent de ce qu'on trouve en Europe et au Japon, lorsqu'on pense au TGV et au Shinkansen. Je crois que le contexte canadien est fort différent.

Toutefois, l'opposition a probablement raison de dire que nous devrions examiner le TGV. J'ai entendu les députés du Bloc mentionner cela à plusieurs reprises. Je tiens cependant à rappeler au député que toute la question du TGV a été soulevée à l'origine par les libéraux fédéraux. On avait formé un comité pour examiner la question. Ce comité avait conclu qu'il y avait des possibilités entre Québec et Windsor. D'après ce qu'on me dit, une autre étude est actuellement en cours.

[Français]

Enfin, un groupe de travail étudie cette question, qui comprend le gouvernement du Québec, le gouvernement de l'Ontario et bien entendu le gouvernement du Canada.

(1150)

On apprend que c'est une étude exhaustive, une étude qui va réévaluer la situation et le potentiel pour développer un train à très grande vitesse, si on veut, entre Québec et Windsor. Cependant, j'entends les députés de l'opposition, surtout ceux du Parti réformiste, se dire: «Eh bien, qu'est-ce que ça veut dire pour l'Ouest canadien?»

[Traduction]

Qu'est-ce que cela veut dire pour l'ouest du Canada? Qu'est-ce que cela veut dire pour les régions rurales? Devrions-nous investir toutes nos ressources dans l'implantation d'un TGV entre Québec et Windsor? Qu'adviendrait-il des autres régions du Canada comme les Maritimes, l'Ouest et la Gaspésie, d'où je viens? Je ne crois pas que les députés du Bloc pensent à implanter un TGV qui irait jusqu'en Gaspésie parce que ce n'est tout simplement pas faisable.

Toutefois, quel que soit le type de service en place au Canada et malgré les allégations de l'opposition selon lesquelles rien ne se fait, nous devons fournir certains services essentiels dans ce pays. Nous devons desservir les régions rurales du Canada. Nous devons desservir le coeur de notre pays. Je crois que c'est le rôle que nous sommes appelés à jouer en tant que parlementaires.

[Français]

Cela étant dit, je suis surpris d'entendre l'opposition nous dire qu'ils veulent un TGV qui va desservir le Québec, l'Ontario, Windsor, mais malheureusement, ces gens nous proposent quand même la fin de la fédération canadienne. Ils nous proposent le démantèlement du Canada, ils nous proposent la séparation du Québec. De quelle façon pourrions-nous construire un lien ferroviaire entre Québec et Windsor avec une frontière entre le Québec et l'Ontario?

J'entends les rires de l'opposition, mais c'est la dure et triste réalité. On doit apprendre à travailler ensemble. On doit monter un système ferroviaire national qui réponde aux aspirations des Québécois, des Ontariens et de tous les Canadiens. Et c'est certain que moi, en tant que député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, j'ai l'obligation et le devoir de m'assurer le maintien d'un service dans ma communauté rurale du Québec profond.


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Il est certain que le discours de l'opposition est souvent un discours urbain qui tient très peu compte des régions éloignées. D'ailleurs, je crois que le chef de l'opposition en a fait une démonstration magistrale quand, en 1989, il a fait partie de ceux en faveur de la décision de couper de 50 p. 100 le service ferroviaire au Québec et dans tout le Canada. Je crois qu'il ne faut pas avoir peur de dire ces faits et je crois, étant dans un pays libre, étant député-après tout, c'est un privilège d'être député à la Chambre des communes-qu'il est pleinement de mon droit, malgré les calomnies, malgré l'opposition, malgré les allégations de l'opposition que je ne remplis pas mon rôle de député, de dénoncer ce qui s'est fait en 1989.

Je crois qu'il est important de saisir cette occasion et de forger une vision pancanadienne et je crois que ce rêve de 1867 dure toujours. Beaucoup de gens de l'opposition ont su profiter de la liberté, des privilèges qui leur sont accordés en tant que Canadiens. Un de ces privilèges, un de ces liens qui unit le pays est bien entendu le service ferroviaire canadien, tel qu'on le connaît. Cependant, on doit se préparer pour le prochain siècle.

Je vais terminer sur cela, car je veux quand même donner l'occasion à l'opposition de poser des questions, je souhaite des questions qui ne sont pas trop partisanes, des questions qui tiennent compte avant tout des vrais intérêts des Québécois et des Canadiens, qui sont de maintenir un service, et de trouver des solutions avec nous. Au lieu de diviser, au lieu de séparer, au lieu de pointer du doigt les fédéralistes, au lieu de dire que le Canada ne fonctionne pas, je les invite à trouver des solutions communes avec nous. Et croyez-moi, l'opposition officielle doit quand même reconnaître qu'elle ne représente pas la majorité des Québécois. Ils sont à 48 p. 100. Ils ont la majorité des sièges du Québec, sauf qu'il y a quand même 52 p. 100 des Québécois qui n'ont pas appuyé le Bloc.

(1155)

Il est certain que quand je vais les entendre, quand ils vont entamer et amorcer ce débat, ces gens devront bientôt nous dire clairement qu'ils parlent pour un certain nombre de Québécois, mais pas pour le Québec tout entier. Je les invite à faire partie de ces débats, d'étudier et de proposer des solutions constructives pour l'avenir de VIA Rail et bien entendu du Canada tout entier.

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ): Monsieur le Président, je suis persuadé que le député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine a dû apprécier qu'on l'ait laissé parler durant son discours. Parce que lui, régulièrement, quand on parle à la Chambre des communes, on l'entend toujours japper derrière, et je pense que cela contribue à déconcentrer, et c'est une question de politesse.

M. Gagnon: Sur un recours au Règlement, monsieur le Président. Oser dire qu'un député jappe, dire qu'un député veut entraver les travaux de cette Chambre, je trouve que c'est plutôt odieux. Je suis un démocrate, un parlementaire et j'ai le droit, en tant que député de Bonaventure-ÎLEs-de-la-Madeleine, d'exprimer mon opinion.

Le président suppléant (M. Kilger): Encore une fois, avec tout le respect que j'ai pour mes collègues des deux côtés de la Chambre, ce n'est pas un recours au Règlement et je donne de nouveau la parole au député de Beauport-Montmorency-Orléans.

M. Guimond: Monsieur le Président, mon point étant établi, le député nous a invités à lui poser des questions sérieuses et d'être constructifs dans le débat. Je vais lui en poser des questions sérieuses et lui demander de me répondre de façon claire.

Premièrement, j'aimerais que le député m'indique pourquoi en avril 1994 il a refusé de participer aux audiences sur l'avenir du Chaleur en Gaspésie, dans son comté, organisées par Mme Cynthia Paterson, de Dignité rurale Gaspésie. Est-ce qu'il pourrait nous indiquer pourquoi il a refusé d'entendre les mémoires présentés par les 50 personnes et groupements de la Gaspésie, dont la majorité venaient de son comté? Est-ce qu'il pourrait répondre à cette question?

M. Gagnon: Monsieur le Président, on dirait qu'on s'éloigne du débat, mais je vais répondre avec plaisir. J'ai rencontré les travailleurs et Mme Paterson au mois de février, de mémoire c'est quelques mois avant l'organisation de cette consultation populaire organisée par le Bloc.

Vous savez, moi aussi je peux inviter l'opposition à faire part d'un développement durable en Gaspésie et dans les régions. Par exemple, j'ai fait des efforts en ce qui a trait au plan de l'Est. Je pense que j'ai travaillé très fort. Je pense que j'ai rempli mon mandat en tant que député. Ce n'est toujours pas réglé. Sauf, quand on parle du train, je me suis occupé de cela au mois de février dernier. Allez voir les travailleurs à New Carlisle, allez voir les travailleurs de VIA et du CN. Quand il y a eu des problèmes, Patrick Gagnon était là. Patrick Gagnon a même tenu une conférence de presse en présence de Mme Paterson, bien avant les audiences publiques, propagandistes, tenues par l'opposition.

J'ai rempli mon rôle, et en tant que député je suis fier du résultat qu'on a aujourd'hui. C'est que grâce à mes efforts, grâce aussi à la compréhension et la croyance du service VIA Rail du ministre des Transports, on garantit maintenant ce service. Je crois que j'ai rempli mon rôle car j'ai quand même mené une campagne sur cette question. En tant que député, je représente les intérêts, avant tout, du comté de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine. J'ai rencontré les travailleurs bien avant que l'opposition saisisse l'importance du train, car il faut croire, j'ai comme l'impression que l'opposition veut se racheter, parce que le chef de l'opposition a fait partie de cette décision gouvernementale de couper le service de VIA Rail de 50 p. 100, en 1989.

Ce n'est pas à moi de répondre, mais c'est au chef de l'opposition de se présenter devant moi, ici, devant les Canadiens, devant les Québécois et devant les Gaspésiens pour nous expliquer pourquoi vous, chef de l'opposition, vous avez coupé ce service


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de 50 p. 100 et que le train est passé de sept à trois jours, en 1989, dans le comté de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine.

Où êtes-vous Lucien Bouchard?

Le président suppléant (M. Kilger): Il faut quand même en arriver à un certain moment à ce qu'on se comprenne tous. Je demande une fois de plus-dans le contexte d'un débat vigoureux, ici à la Chambre des communes, où les sentiments sont forts, et où on tient à notre point de vue-que l'on nomme toujours le député selon ses responsabilités, ou par son comté. On retourne donc aux questions.

(1200)

M. Guimond: Monsieur le Président, ce qui est dommage c'est que cela fait huit fois qu'il est averti par la Présidence à ce sujet.

J'aurais une autre question. . .

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre! En toute franchise je ne sais pas si c'est la quatrième, cinquième, sixième, ou huitième fois, je ne les ai pas comptées. Quand même je continue avec la même patience à remplir mon devoir et à demander aux députés de se comporter de façon respectueuse et parlementaire pendant les débats. Tout simplement. Je continuerai pour la neuvième ou dixième fois, mais je dois vous dire que la patience a toujours le dernier mot.

M. Guimond: Monsieur le Président, de la façon dont vous dirigez, vous personnellement, le passé est garant de l'avenir. Je vous en remercie.

J'aurais un commentaire à faire sur le discours du député et une question pour terminer. J'aimerais savoir si le député, lui-même, a déjà pris le TGV qui relie Lille à Bruxelles? Lille, en France et Bruxelles, en Belgique. Je peux vous dire que j'étais avec le Comité des transports la semaine dernière et nous sommes allés en France et en Allemagne, reçus par les deux gouvernements. Cela n'a rien coûté aux contribuables canadiens. On a eu l'occasion de prendre le TGV et on a vu que le train, contrairement à une réponse que le premier ministre a déjà faite, le TGV n'arrête pas à la frontière de la Belgique. La procédure de dédouanement est la même que lorsqu'un avion circule; l'avion ne fait pas escale à tous les pays européens pour se faire dédouaner et passer les frontières. En train, en transport maritime et en transport aérien, on est dédouané lorsqu'on part et lorsqu'on arrive. C'est une aberration. On voit que le député parlait à travers son chapeau parce qu'il n'a jamais pris le TGV Lille-Bruxelles.

Tout à l'heure, dans mon discours, je faisais état de la construction d'une cimenterie à Port-Daniel, en Gaspésie, dans son comté. Est-ce que le député est conscient que pour une cimenterie, comme à Port-Daniel, dans son comté, le rail est un outil important? J'aimerais avoir son opinion concernant ce projet de cimenterie qui devrait être relié à un rail en Gaspésie.

M. Gagnon: Monsieur le Président, c'est une question de l'opposition qui est très intéressante. Non, je n'ai pas eu le privilège de prendre le TGV entre Paris et Lille car à l'époque je n'avais pas un sou, je n'étais que simple étudiant et je voyageais avec un pack sack. Je crois que j'ai fait cette distance en auto-stop. J'ai eu quand même le privilège de prendre le Shinkansen entre Tokyo et Osaka, il y a quelques années. Croyez-moi c'est un très bon service sauf que Japan Rail a été privatisé. Ce n'est pas un service rentable.

D'ailleurs quand on parle du service ferroviaire, je suis le premier intéressé dans mon comté. En tant que député, je crois que je suis le porte-parole légitime du comté de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine. Si le député d'en face porte un intérêt à ce comté, je l'invite à se présenter contre moi d'ici les trois ou quatre prochaines années, s'il veut vraiment connaître les dossiers.

Il n'y a pas que la cimenterie de Port-Daniel, il y a la Stone Consolidated , Abitibi Price, Tembec, il y a 10 à 20 millions de dollars d'utilisation du rail dans cette région-là. Mais on parle encore de la cimenterie. Écoutez, c'est un projet et, encore là, c'est certain que tout projet de développement socio-économique de la région dépend de la présence du rail. Pour rassurer le député d'en face, qui aimerait bien être député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, si on l'écoute parler, c'est que c'est un projet qui mérite beaucoup d'étude, il y a plusieurs étapes à franchir. Il y a des normes environnementales qui sont imposées par le gouvernement du Québec. J'ai rencontré un des promoteurs.

Je suis issu de cette région. Mon père est natif de Port-Daniel, ma famille vient de là. Croyez-moi, je suis ce projet avec beaucoup d'intérêt. C'est vrai, le train et le maintien d'un service commercial sont importants pour tout développement économique à moyen et long termes dans la péninsule gaspésienne.

(1205)

M. Duceppe: Monsieur le Président, à la suite de discussions entre les trois partis reconnus en cette Chambre, il y a accord et consentement unanime pour que les deux prochains intervenants soient des députés du Bloc québécois, à la suite de modifications dans l'horaire prévu pour la journée.

Le président suppléant (M. Kilger): Je ne crois pas que cela requiert un consentement unanime. Par contre, s'il y a une entente entre vous, c'est toujours mieux. Je peux ainsi procéder. Est-on d'accord?

Des voix: D'accord.

M. Paul Mercier (Blainville-Deux-Montagnes, BQ): Monsieur le Président, je tenterai de situer mon intervention à un niveau de sérieux qui est celui de l'intérêt national que le député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine essaie de lui faire perdre depuis le début de ce débat.

Nous avons demandé cette journée pour parler des chemins de fer, afin de considérer des solutions aux problèmes du ferroviaire et non pas à des considérations partisanes sur le passé ni sur des questions de personnes qui, d'ailleurs, ne sont pas là.


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Au cours de mon intervention, je ne vais pas non plus apporter des solutions que le ministre demandait parce que, avant de trouver les remèdes à un mal, il faut d'abord en faire le diagnostic, et il appert du diagnostic dont je me suis réservé l'exposé que l'inactivité, l'inertie du gouvernement est le coeur du problème ferroviaire. Alors, j'exposerai cette partie du diagnostic et non pas, en ce qui me concerne, des remèdes spécifiques.

L'inertie du gouvernement canadien en matière ferroviaire contraste étrangement avec le dynamisme de la plupart des autres pays développés en ce domaine. Au Canada, nos dirigeants considèrent le chemin de fer comme faisant partie du paysage du passé, comme un instrument de développement qui, certes, a connu son heure de gloire, mais qui est appelé à disparaître. À l'étranger, on voit le rail comme un moyen privilégié de transport qu'il est urgent d'adapter aux nécessités de l'heure. À ce propos, je reprendrai de nouveau les propos du député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine concernant la différence de densité entre la Belgique et le Québec.

Je lui dirai tout de suite qu'il n'est pas dans l'intention du Parti québécois de proposer de chemin de fer dans le Grand-Nord, qui intervient pour une bonne part dans l'intensité moyenne du pays, mais seulement dans le couloir sud, dont la densité est tout à fait comparable à celle de nombreux pays européens qui cherchent actuellement à rénover et à développer leur réseau ferroviaire.

L'inaction de notre gouvernement dans le transport ferroviaire relève essentiellement d'un manque de vision, comme l'a très bien démontré mon collègue du comté de Beauport-Montmorency-Orléans. Quand on n'a pas de vision de la source du mal, on peut difficilement bouger. C'est de ce mal que souffre le gouvernement et plus particulièrement son ministre des Transports pour qui le chemin de fer est essentiellement folklorique.

Le gouvernement n'agit pas. Il laisse des lignes ferroviaires faisant partie d'un des plus grands réseaux ferroviaires au monde à la merci de démantèlements qui sont le produit de décisions étroitements comptables. L'analyse de la rentabilité socio-économique d'une ligne ferroviaire est balayée du revers de la main au profit d'une froide et étroite analyse comptable.

Ce gouvernement n'agit pas. Il laisse des milliers de travailleurs de l'industrie ferroviaires perdre leurs emplois. La restructuration des plus importants pourvoyeurs d'emploi du pays s'opère sans aucun suivi. Il laisse se vider le siège social du CN à Montréal au profit de Winnipeg et Moncton, au détriment de la qualité des services. À cet égard, je cite le cas d'une entreprise de mon comté, Transpotech, qui peut témoigner de la détérioration de la qualité du service au CN, auquel elle faisait souvent appel, depuis le déplacement de services de Montréal à Winnipeg.

Le gouvernement n'agit pas. Il tergiverse encore dans le dossier du TGV en se demandant encore si le projet ne va pas coûter trop cher, alors que le consortium dont fait partie Bombardier l'assure de la viabilité du projet et accumule d'importants contrats partout à travers le monde, sauf au Canada. Ces gens n'ont-ils pas suffisamment fait leurs preuves à l'échelle internationale pour qu'on les écoute?

(1210)

Le gouvernement n'agit pas. Aucune définition articulée des besoins de transport du Canada pour les années à venir n'existe. Alors que des gouvernements étrangers favorisent et priorisent le rail, notre gouvernement ignore superbement les écueils fiscaux et réglementaires auxquels sont confrontés nos transporteurs.

Il n'agit pas, le gouvernement, il est incapable de voir les avantages écologiques et économiques du renforcement de l'infrastrucutre ferroviaire. S'il est incapable de le faire, l'opposition est, elle, en mesure de lui démontrer que la conjuguaison du développement économique et de la protection de l'environnement peut être réalisée dans une politique réfléchie du chemin de fer.

Je proposerai ce matin des outils et présenterai des données qui sont susceptibles d'inciter le gouvernement et son ministre des Transports à se réveiller. De tous les modes de transport, le train, et c'est un truisme, est certes celui qui nuit le moins à l'environnement. Il consomme moins d'énergie que les autres modes et il génère moins d'émissions polluantes, contribuant ainsi de façon significative à la qualité de l'air.

Des statistiques publiées en 1990 démontrent que le train a un pourcentage d'émissions de particules de 4,8 p. 100. Ce même pourcentage pour le camionnage s'élevait, quant à lui, à 18,4 p. 100, soit quatre fois plus que le train. Par sa structure tarifaire, le camionnage est devenu le principal obstacle à une utilisation plus marquée du train et ce, malgré les avantages socio-économiques de celui-ci. C'est la raison pour laquelle j'établis des comparaisons entre ces deux outils de transport, qui au lieu d'être concurrentiels, devraient pouvoir être utilisés tous les deux de façon coordonnée et notamment-et on y reviendra-par le bimodal.

Les chiffres concernant la différence de pollution apportée par les deux modes de transport sont éloquents. N'en voici qu'un: les dioxydes de carbone pour le train sont de 13,9 p. 100 et pour le camionnage, 48,4 p. 100, ce qui s'explique par l'insignifiance de la consommation relative d'énergie pétrolière du train, par rapport à celle du camionnage.

Considérons cette comparaison entre les modes de transport. Les avantages de l'utilisation du rail sont importants. Toutefois, un avantage majeur du train, comparativement au camion, est sans aucun doute sa capacité à transporter de lourds chargements sur de longues distances. Par exemple, une étude a démontré que le déplacement de 200 «containers» à travers les États-Unis exigerait entre trois et cinq locomotives d'un côté, et plus de 200 camions de l'autre.

Les caractéristiques intrinsèques du rail permettent donc de faire obstacle à l'encombrement routier qui porte préjudice au développement économique. Si toutes les voies étaient électrifiées, au Canada, les émissions atmosphériques du train seraient nettement diminuées, bien évidemment. Des pays soucieux de la qualité de leur environnement considèrent l'électricification de


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leur réseau ferroviaire comme étant conforme à une politique de développement durable. C'est en Europe occidentale que le réseau ferroviaire est le plus électrifié. En Suisse, il l'est à 99 p. 100, en Italie, à 55 p. 100 et au Royaume-Uni, à 26 p. 100.

Le Canada est derrière les États-Unis avec un taux de moins de 1 p. 100, malgré son énorme potentiel hydro-électrique. On ne peut rêver meilleur exemple de l'inadéquation de notre réseau, non seulement à la nature de ces besoins, mais aussi à celle des ressources qu'il consomme. L'avion est sans contredit le mode de transport le plus polluant, car il pollue plus que le train et consomme aussi beaucoup plus d'énergie, ce qui m'amène à aborder le dossier des TGV, mais strictement du point de vue écologique, car ma consoeur de Laval-Centre aura tantôt l'occasion de vous en entretenir dans de plus explicites détails.

On le sait, le TGV français et aussi les autres trains rapides, le ICE allemand, le Trans-Rapide allemand, par exemple, peuvent facilement rivaliser avec l'avion, au chapitre de la durée du parcours sur une marge de distance extrêmement large.

(1215)

Ainsi, parce que ses tarifs sont plus avantageux que ceux de l'avion et parce qu'il ne consomme pas ou guère de carburant, le TGV notamment s'avère une alternative écologiquement rentable en plus de satisfaire les besoins de vitesse et de confort de la clientèle.

Monsieur le Président, vous remarquerez que le train ne craint aucune concurrence quant à la consommation d'énergie. Qu'il roule à très grande ou à très petite vitesse, il a l'avantage de pouvoir se déplacer, dans la plupart des cas, grâce à cette énergie électrique.

Toute incitation à une plus grande utilisation du rail doit être soutenue par une politique fiscale et réglementaire adéquate. Actuellement, le train ne bénéficie d'aucun avantage fiscal au plan de la taxe sur les carburants. Si le gouvernement veut nous convaincre de sa volonté de relancer l'industrie ferroviaire, il doit nécessairement commencer par des aménagements fiscaux qui favoriseront une utilisation plus prononcée du rail.

L'industrie ferroviaire devrait pouvoir bénéficier des mêmes avantages que l'industrie routière, de loin sa principale concurrente. Il est urgent que le gouvernement mette à jour ses interventions fiscales qui soutiennent indirectement l'industrie du camionnage et qui laissent les compagnies ferroviaires développer et entretenir elles-mêmes leurs réseaux. Pourtant, les camionneurs n'ont pas à supporter les coûts d'entretien et de construction de l'infrastructure routière qu'ils contribuent, dans une très large part, à détériorer.

Le transport routier est économiquement très onéreux parce que les routes sont souvent à refaire. Il est aussi écologiquement très coûteux parce qu'il souffre de gourmandise territoriale. Une autoroute utilise en effet six fois plus d'espace qu'une ligne ferroviaire. Ainsi, il a été calculé que deux voies ferrées peuvent transporter en une heure autant de personnes que seize voies d'autoroute.

Un groupe de l'est du Québec, le Comité de la protection de la santé et de l'environnement, avait chiffré, dans un mémoire présenté en 1989, les bénéfices fonciers d'une approche-on les oublie souvent ces avantages-fondée sur le ferroviaire. Ainsi, ces gens avaient évalué que pour la construction d'une nouvelle grande route, il faut environ 20 acres de terre pour chaque mille. Pour ce même mille, le train ne demande que 6 acres de terre. Il n'en tient pas d'un problème de rareté des terres, mais bien d'utilisation optimale des sols.

J'ai expliqué pourquoi il nous faut, en matière de transport, consacrer plus d'énergie à stimuler l'industrie ferroviaire. Il convient maintenant de présenter comment peut se déployer cette croissance que nous souhaitons tous.

Une multitude d'intervenants du monde des transports réclame une politique nationale et intégrée des transports. Il faut nous doter d'une politique qui respecte la concurrence et les forces du marché, et qui sache traiter équitablement tous les modes de transport de ce pays. Il faut en outre que disparaissent toutes ces iniquités fiscales qui tuent, qui mettent en péril, le secteur ferroviaire.

Bien qu'il soit détérioré, nous disposons d'un immense réseau ferroviaire duquel une foule d'intéressants défis peuvent être relevés. Du point de vue strictement économique, la revitalisation de l'infrastructure ferroviaire est le premier défi à relever pour qu'on puisse songer à s'attaquer au suivant, en l'occurence l'intermodalité ou multimodalité.

En effet, les besoins des usagers des divers modes de transport reposent de plus en plus sur l'utilisation combinée de plusieurs modes de transport. L'introduction d'une technologie intermodale, c'est-à-dire d'équipement qui permette de transférer facilement des marchandises d'un camion ou d'un navire sur un train, stimulera une reprise du transport de marchandises par rail.

L'intermodalité, c'est l'avenir du chemin de fer. En 1991, les revenus totaux générés par l'activité intermodale pour le Canadien National et pour le Canadien Pacifique, s'élevaient à 745 millions de dollars. Ce montant représente 6 p. 100 du tonnage total de l'activité ferroviaire et 13 p. 100 des revenus totaux du CN et du CP. Depuis quelques années, ces deux compagnies ont consenti d'importants investissements en vue de s'adapter à une nouvelle réalité du marché. Nul doute que l'adoption d'une approche globale et intégrée du transport appuierait leur tentative d'échapper au marché traditionnel des chemis de fer.

(1220)

Le volume total du trafic intermodal au CN et au CP en 1991 se chiffrait à 12,2 millions de tonnes. De tous les secteurs d'activités de l'intermodal, l'import-export est de loin le plus important. À elle seule, l'activité import-export représente la moitié du tonnage total que véhicule l'intermodalité.

Dans le contexte actuel de la mondialisation des marchés, il est inutile d'insister sur l'importance de raffermir nos activités d'import-export. Sans tomber dans le roman d'anticipation, il est réaliste d'affirmer que l'intermodalité est un outil indispensable pour permettre au Canada et au Québec de conquérir, avec assurance, le grand marché mondial à venir au XXIe siècle.

Mais pour ce faire, nous avons besoin du rail. Ce gouvernement utilise un chemin qui va tout à fait à contresens de celui


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qu'empruntent actuellement les Européens. Sur ce continent, les décideurs ont compris la place primordiale que doit occuper le chemin de fer dans le développement économique. Le Canada utilise dix fois moins ses infrastructures ferroviaires pour le fret et le transport de passagers que la plupart des pays européens. Le dynamisme des échanges économiques, le marché commun européen, est le résultat d'une politique qui intègre tous les moyens de transport en les considérant, à leur juste valeur, comme un puissant outil de développement qui concilie à la fois les intérêts économiques et environnementaux.

La Commission européenne estime qu'entre 1990 et 2010, le volume du fret routier progressera de 42 p. 100. Alarmés par la perspective d'un encombrement des routes qui deviendra ultimement incontrôlable, les dirigeants de la Communauté européenne proposent de transférer, autant que faire se peut, le transport des marchandises de la route vers l'eau et le chemin de fer.

Le transport ferroviaire de marchandises reçoit une impulsion des gouvernements européens préoccupés par l'aggravation des dommages que subissent les écosystèmes, du fait d'un recours excessif aux camions. Lorsqu'on considère qu'en France, en Italie et en Espagne, le trafic routier est en moyenne 6,5 fois plus élevé que le trafic ferroviaire et qu'au Canada le trafic routier est 76 fois plus élevé, il serait sage d'en faire autant ici.

Une politique de transport intégré implique l'établissement d'un réseau ferroviaire de base. Un tel réseau, essentiel et spécialisé, devra nécessairement être élaboré conjointement avec les provinces puisqu'elles ont des intérêts économiques majeurs dans un tel réseau.

Pour être efficace, l'intervention du gouvernement fédéral devra reconnaître les compétences de ses partenaires provinciaux dans l'élaboration d'un système de transport intégré. L'action du gouvernement doit s'inscrire dans la rencontre de ses responsabilités à l'égard des compagnies de chemin de fer, sans par contre porter ombrage à l'action légitime des gouvernements provinciaux en matière de transport routier. L'intégration du système de transport n'oblige pas à l'uniformité.

D'ici à ce qu'un réseau de base pancanadien soit établi, un moratoire doit être décrété afin d'éviter la destruction prématurée et insensée d'importantes infrastructures ferroviaires. En effet, il faut juguler l'hémorragie des démantèlements de lignes au Canada, et particulièrement au Québec. Quand le ministre des Transports aura enfin réalisé la nécessité de doter ce pays d'un réseau ferroviaire de base qui intègre harmonieusement tous les modes de transport, à l'allure où on va, il sera trop tard.

Le moratoire prend donc ici toute son importance. Il nous permettra d'analyser, un à un, les projets d'abandon de lignes et, surtout, d'évaluer l'éventuel rôle que pourraient jouer ces lignes dans le nécessaire projet de réseau ferroviaire de base qu'il nous faut réaliser.

La métaphore que voici est éloquente: il faut remettre l'industrie ferroviaire sur les rails de la prospérité. Alors que le monde entier, et ceci inclut nos voisins du Sud, accorde une place de plus en plus grande au transport ferroviaire, au Canada, on lui accorde une place de plus en plus importante dans le folklore populaire et dans la nostalgie du passé.

Plutôt que de se contenter d'honorer la mémoire des Pères de la Confédération, il nous faudrait rendre un immense service aux contribuables de ce pays en stimulant des échanges commerciaux par l'entremise du chemin de fer. Le transport ferroviaire est incontestablement un service essentiel.

(1225)

Il est temps de saisir les avantages économiques, sociaux et environnementaux d'une utilisation du rail. Un engagement public est nécessaire. La Suède et l'Allemage unifiée ont déjà projeté d'investir autant dans le chemin de fer que dans leur réseau routier. Naturellement, un éventuel engagement public devra être accompagné d'une mesure qui élimine les irritants tels que les subventions inéquitables dans le domaine des transports et les exemptions fiscales sur le carburant qui ne sont pas généralisées.

Il est surtout temps de se doter d'un réseau de base qui intégrera tous les moyens de transport, en collaboration et non en confrontation. Tant qu'une politique de transport intégrée n'aura pas été envisagée sérieusement, on ne peut pas tirer argument de la sous-utilisation des voies ferrées canadiennes pour en justifier l'abandon.

Le statut du Québec au prochain siècle ne doit nullement venir interférer dans ce projet de grand réseau. Les Européens se sont dotés d'un tel réseau et pourtant, l'Europe est composée d'une multitude de pays souverains qui sont tous partenaires dans le développement économique continental. À l'heure de l'ALENA, il faut s'inspirer de ce qu'ont fait les communautés mondiales.

Il faut souhaiter que tous les peuples d'Amérique du Nord, au XXIe siècle, soient liés par un immense réseau de transport moderne, efficace, viable, sûr, abordable et qui facilitera le déplacement des biens et des personnes dans le respect de l'environnement. C'est ce à quoi nous sommes conviés. Si nous voulons être du rendez-vous, c'est maintenant qu'il faut agir.

M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt l'exposé du député d'en face. Je trouve qu'il a quand même démontré certains éléments très importants, comme l'environnement, les émissions, le problème que posent les lourds chargements de camions sur les routes du Québec et, bien entendu, de tout le Canada. Aussi, il a parlé un peu de développement durable. Il a fait un exposé fort intéressant sur les coûts de transport et je voudrais quand même prendre ce moment pour le féliciter de cette analyse.

Aussi, la question que je voudrais lui poser, c'est qu'il se dit très sensible à ces grandes questions et il parle aussi d'une politique nationale intégrée des transports. Il est certain que lorsqu'on parle d'une politique nationale, on parle, bien entendu, d'une plate-forme, si on veut, pancanadienne. Alors, j'ai un peu de difficulté, ça me trouble, à savoir de quelle façon il peut aménager un tel programme, advenant l'indépendance ou la séparation du Québec du reste du Canada, et dans le contexte actuel, j'aimerais bien savoir quel rôle le Québec et les provinces


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pourraient jouer au niveau de la taxation des carburants? Est-ce qu'il y aurait moyen de les réduire?

Il est sûrement plus en contact avec ses homologues de Québec que moi, mais quelle est la position du Québec sur cette question? Que peut-on faire pour réduire les taxes sur le carburant et de quelle façon le Québec pourrait-il s'intégrer dans la grande famille canadienne, dans une politique nationale des transports? Je voudrais entendre le député sur cette question.

M. Mercier: Monsieur le Président, même si je suis certainement plus en contact avec mes collègues de Québec que le député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, je ne me permettrai pas de parler à leur place de leur politique fiscale et des projets de politique fiscale qu'ils pourraient avoir à l'égard des taxes sur les carburants.

Mais, je vois qu'il y a une question qui préoccupe beaucoup mon honorable collègue et c'est celle de la comptabilité qu'il nie entre l'existence de plusieurs États dans l'établissement d'un réseau ferroviaire. Mon collègue vient de lui faire remarquer que le train Bruxelles-Lille traverse une frontière sans s'y arrêter et d'ailleurs, c'est quelque chose, étant moi-même originaire de cette région, qui ne date pas du TGV, je peux l'en assurer, mais bien de dizaines d'années. D'une façon générale, les réseaux sont internationaux, à l'exception sans doute de celui du Japon et peut-être également celui de Madagascar, qui est une autre île, mais je n'ai pas été vérifier.

Mais d'une façon générale, quand il existe un réseau international, chacun des pays qui font partie de ce réseau est préoccupé par la qualité des réseaux des autres pays, parce que l'intérêt du réseau dans son ensemble dépend de la qualité du service dans chacune de ses constituantes.

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Si nous nous intéressons à la qualité du réseau fédéral, c'est parce que nous considérons, malgré nos vues souverainistes, que l'intérêt du réseau québécois dépend de la qualité du réseau nord-américain d'une façon tout à fait générale. Et une collaboration doit évidemment exister entre le Canada et le Québec, actuellement une province, pour la réalisation de ce grand réseau nord-américain; il faudrait qu'elle se concrétise avec le niveau de qualité qui est celui des autres pays actuellement, dans l'intérêt national.

M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, il est vrai que l'honorable député est originaire d'Europe. Il est certain que lorsqu'on parle de la CEE le contexte historique est fort différent, à l'association qui s'est faite entre ces pays européens. Il ne faut pas oublier que l'Europe sortait d'une guerre et que, malgré tout, il y a eu un désir commun de se regrouper.

Pour le bénéfice des gens qui nous écoutent, il ne faut pas oublier que l'adhésion à la CEE a commencé avec l'Europe des six, l'Europe des douze, et qu'elle inclut maintenant plusieurs pays. L'avantage canadien c'est que nous sommes déjà sur place. Nous avons déjà des politiques nationales qui font presque l'envie de l'Europe, quant à la façon dont on traite les provinces et les différentes communautés.

Encore une fois, je voudrais franchement savoir de quelle façon le Québec pourrait tirer profit d'une séparation éventuelle en ce qui concerne les transports. Le tout serait à renégocier, et je crois que le député d'en face va quand même reconnaître qu'il y aurait plusieurs hésitations de la part des autres provinces et même des États-Unis à négocier avec un pays indépendant.

À mon avis, je crois que le député devrait quand même nous dire de quelle façon le Québec pourrait renégocier une politique nationale des transports, advenant la brisure du pays et le durcissement des positions, soit au Québec ou dans les autres provinces.

M. Mercier: Monsieur le Président, il est bien évident que, advenant l'indépendance du Québec, il y aurait plusieurs questions d'ordre technique à régler, et le ferroviaire en est une parmi une infinité d'autres. Mais il doit comprendre que s'il s'agit là d'une question à régler, il ne s'agit pas d'une impossibilité à résoudre. C'est une question parmi d'autres.

Il est bien évident que, par exemple, l'intérêt que le Québec pourrait avoir à la séparation-je pense à un parmi d'autres-c'est qu'il serait mieux placé pour électrifier le réseau, ce qui serait une manière de consommer de l'énergie nationale plutôt que de l'énergie qui, de son point de vue, est importée, avec les avantages que cela comporte sur l'environnement.

D'autre part, et ceci n'est pas particulier au ferroviaire mais concerne aussi d'autres domaines, nous pourrions avoir une politique qui soit conforme à nos intérêts nationaux plutôt que de les voir dilués dans d'autres intérêts. Tout le monde sait que l'Ouest a toujours eu la faveur du gouvernement en ce qui concerne le ferroviaire et que c'était l'ensemble des contribuables nationaux qui payait ses largesses.

À partir du moment où le Québec devient indépendant, il n'a plus à participer à des largesses qui ne l'avantageraient pas, et il aurait à considérer son intérêt national mais, je le répète, dans un cadre canadien et nord-américain de collaboration, de continuité et de coopération.

M. Maurice Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead, BQ): Monsieur le Président, je suis très heureux d'intervenir dans ce débat. Depuis plusieurs semaines je demande qu'une journée de l'opposition soit consacrée au dossier du ferroviaire. Il me fait donc plaisir aujourd'hui de prendre la parole sur ce sujet.

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Je voudrais, avant d'en venir au coeur même de mon intervention, faire quelques remarques suite aux propos que le ministre des Transports a tenus en cette Chambre ce matin et que j'ai eu l'occasion d'entendre.

D'abord, le ministre nous a accusés, nous, de l'opposition officielle, quand on aborde le dossier ferroviaire, d'insister ou de demander que la situation ne change point, que la situation que l'on connaît actuellement dans ce domaine reste ce qu'elle est. Autrement dit, que nous serions, nous, du Bloc québécois, des partisans du statu quo en matière de politique de transport, particulièrement dans le domaine ferroviaire.

Je veux tout de suite dire au ministre que ce n'est pas là la position, et il le sait très bien, du Bloc québécois. Son propos en


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est un purement partisan pour épater sa clientèle mais il ne touche pas vraiment au fond du débat. Son propos démontre le peu de sérieux qu'accorde le gouvernement fédéral, le gouvernement libéral actuel au transport ferroviaire. J'en ai pour preuve les remarques que le ministre des Transports a faites et comme autre élément de preuve, le fait que le gouvernement semble n'avoir que le député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine pour réagir aux propos des députés du Bloc québécois. Il semble qu'il ne vise simplement qu'à nous entraîner dans des débats qui n'ont rien à voir plus souvent qu'autrement avec le débat qui est en cours devant la Chambre. Cela nous démontre hors de tout doute le peu d'importance qu'accorde ce gouvernement au dossier ferroviaire.

Je rappelle, et mon collègue de Beauport-Montmorency-Orléans l'a très bien précisé ce matin, le Bloc québécois demande depuis presque un an maintenant que le dossier ferroviaire soit pris en compte par le Comité permanent des transports. Cela nous a été refusé pour toutes sortes de considérations plus ou moins boiteuses les unes que les autres, de sorte qu'on se retrouve un an après la prise de pouvoir par le Parti libéral devant une situation qui est empirée dans le domaine ferroviaire.

Je dis tout de suite au ministre des Transports que ce que nous voulons, nous du Bloc québécois, c'est savoir où s'en va le gouvernement dans le dossier ferroviaire. C'est sa responsabilité de nous dire quelles sont ses orientations, quelles sont ses intentions, surtout après un an de pouvoir. Nous voulons que le gouvernement protège les intérêts des Canadiens et des Canadiennes dans leur ensemble, et les intérêts, en ce qui me concerne de façon plus particulière, des Québécois et des Québécoises, je dirais les intérêts des gens de mon comté qui sont affectés par les décisions que le gouvernement fédéral est en train de prendre dans le domaine ferroviaire. J'y reviendrai un peu plus tard.

Nous voulons un véritable débat public sur le transport ferroviaire et son avenir. Nous voulons des vraies solutions. Nous nous refusons, du côté du Bloc québécois, à identifier comme boucs émissaires que les seuls employés du CN et du CP et leurs soi-disant conventions collectives qui sont dorées. Quand on regarde les avantages qui ont été consentis en termes de conditions de travail au président du CN, auquel a référé ce matin mon collègue de Beauport-Montmorency-Orléans, et les avantages scandaleux qui lui ont été consentis au niveau de sa maison, je trouve qu'on est mal foutus du côté du gouvernement de désigner les seuls employés syndiqués du CN et du CP comme étant les grands responsables de la non-rentabilité du transport ferroviaire dans l'ensemble du Canada et plus particulièrement dans l'est du Canada, à l'est de Winnipeg.

Les raisons pour lesquelles également j'ai longtemps insisté pour que cette journée ait lieu m'ont amené à m'interroger sur l'avenir du réseau ferroviaire au Québec.

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Et je le dis tout de suite pour le bénéfice du député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, mon intervention s'adresse d'abord et avant tout, en termes de préoccupations, à l'avenir du réseau ferroviaire au Québec, en lien, bien sûr, avec l'ensemble de l'Amérique du Nord.

Il y a maintenant plusieurs mois que j'étudie le dossier du rail, et j'ai pu constater la menace qui pèse sur tout le Québec. Cette menace est la destruction lente mais systématique du réseau de chemin de fer au Québec.

Ma circonscription, celle de Mégantic-Compton-Stanstead, constitue l'exemple parfait de cette manoeuvre que je qualifie d'hypocrite et que le gouvernement fédéral s'apprête à effectuer au Québec. En effet, la ligne reliant Sherbrooke, en Estrie, et Saint John, au Nouveau-Brunswick, est menacée d'abandon dès le 1er janvier 1995. Cet abandon a été ordonné par l'Office national des transport, sous l'ancien gouvernement. Je le dis encore là pour le bénéfice du député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine pour éviter qu'il n'ait à se lever tantôt pour accuser le chef de l'opposition de toutes les décisions qui ont été prises depuis que la Confédération existe.

Cet abandon constituerait, pour la région de l'Estrie, une véritable catastrophe économique dont les conséquences pourraient être dévastatrices pour toute cette région, et je dirais même pour l'ensemble de la région de l'Estrie.

Pourtant, alors que nous vivons une véritable crise de changements majeurs et de coupures draconiennes dans l'industrie du rail au Québec et au Canada, le Comité permanent des transports-et j'insiste encore une fois-a toujours systématiquement refusé d'aborder le dossier ferroviaire, et ce, malgré les demandes répétées du représentant de l'opposition officielle.

On nous donne comme prétexte que le comité doit concentrer ses efforts sur l'avenir de l'industrie de l'aviation, sur l'avenir des aéroports. Donc, il n'y a pas de temps à accorder à l'avenir du ferroviaire, une industrie qui, encore en 1993, employait près de 50 000 personnes à travers tout le pays. Pas de place! Le comité n'a pas le temps! Constatant le ridicule de la situation, le ministre des Transports annonçait, le 29 septembre dernier, la création d'un groupe de travail pour étudier la privatisation possible du CN.

Mais pour s'assurer qu'il ne nuise pas aux manoeuvres visant entre autres à démanteler le réseau ferroviaire québécois, le ministre a pris la peine de ne nommer que des libéraux pour y siéger, dont un seul représentant du Québec. Le ministre peut dormir en paix, ce groupe de travail ne risque pas de créer une grosse commotion.

La question qu'il faut se poser en ce moment, est la suivante: Pourquoi le gouvernement craint-il ainsi la présence de députés du Bloc québécois à l'intérieur de ce groupe de travail? Pourquoi cette attitude louche aux allures conspiratrices? Eh bien, c'est en analysant l'ensemble du dossier qu'on peut alors vraiment comprendre les sinistres intentions du fédéral dans le dossier du ferroviaire.

Cela m'amène à reprendre un peu brièvement les scénarios qu'on a connus au cours de la dernière année dans le dossier du ferroviaire. Le ministre y a fait allusion ce matin.

Il y a d'abord eu, en décembre 1992, la déclaration du président du CN, M. Paul Tellier, qui disait vouloir intégrer les deux réseaux ferroviaires CN et CP, ce qu'on appelé la période de la fusion des opérations du CN-CP qui a duré quelques mois et qui, pour des considérations que l'on ne connaît point, puisque tout cela s'est fait en cachette, a achoppé, quelque part vers le mois de juin 1994.


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Par la suite, et c'est encore le cas maintenant, on assiste à l'offre faite par CP Rail d'acquérir les installations de CN pour un montant de 1,4 milliard.

Les députés du Bloc québécois ont rencontré, il y a quelques semaines, des représentants de la haute direction de CP afin de se faire expliquer le contenu de l'offre qui a été déposée devant la direction de CN et les instances gouvernementales. Nous sommes ressortis de cette rencontre avec beaucoup plus de questions que de réponses.

Nous sommes particulièrement préoccupés par le fait que le gouvernement fédéral, je l'ai dit tantôt, veuille se départir d'actifs qui appartiennent à l'ensemble de la population canadienne et québécoise. Quand on parle du réseau CN, il faut avoir en tête qu'il s'agit là d'une compagnie publique, et par conséquent, que les installations du CN à la grandeur du Canada appartiennent aux contribuables canadiens et québécois.

Nous sommes tout à fait préoccupés par le fait qu'une compagnie privée, nommément la compagnie CP puisse acquérir ce réseau et par la suite pouvoir décider de son avenir comme bon lui semble. C'est justement le reproche principal que nous faisons actuellement au gouvernement, nous de l'opposition officielle.

Comme nous le disons dans notre motion, où nous faisons référence au manque de transparence du gouvernement dans ce dossier, nous trouvons impensable que l'on soit en train de prendre des décisions qui concernent l'avenir d'une infrastructure publique, c'est-à-dire le réseau ferroviaire, celui appartenant à CN à tout le moins, sans que l'ensemble de la population-tout au moins les intervenants socio-économiques, et l'opposition officielle, de même que le Parti réformiste-ne soit impliquée dans la consultation, dans la discussion et dans la décision qui devra venir dans le futur concernant le dossier du ferroviaire.

Concernant la vente des installations à CP, nous disons donc que nous aurons besoin de beaucoup plus d'information, de beaucoup plus d'assurance si le gouvernement souhaite que nous puissions donner notre aval à une telle transaction.

Dans ma circonscription, la ligne du Canadien Pacifique qui va de Saint-Jean, Nouveau-Brunswick, à Sherbrooke, passe au Québec, en très grande partie dans le comté de Mégantic-Compton-Stanstead. Cette ligne de chemin de fer appartient à CP, et quand on constate depuis des années le «démarketing» qui a été fait par la compagnie CP afin de décourager les industriels, les clients potentiels à utiliser leur service, quand on constate la difficulté que les gens de la région ont eue-aujourd'hui, on semble changer un peu d'attitude puisqu'on a besoin de l'appui de la population, de la part de CP pour acheter CN-mais quand on constate les difficultés qu'on a eues dans le passé à obtenir de l'information de la compagnie CP, nous sommes en droit de nous interroger sur ce qu'il adviendra le jour où cette compagnie sera propriétaire de l'ensemble du réseau dans l'est du Canada, et plus particulièrement au Québec. Personnellement j'aurai besoin de bons arguments pour me convaincre de la justesse d'une telle transaction.

Je voudrais dire un mot sur les critères que le gouvernement fédéral retient quand il fait l'évaluation des réseaux qui doivent être abandonnés ou vendus.

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Tout le monde convient que les deux principaux critères qui sont retenus sont ceux de la rentabilité et de l'intérêt public. Tout le monde convient également qu'à l'est de Winnipeg,-et ce n'est pas un propos d'un partisan séparatiste, puisque ça touche autant l'Ontario, que les Maritimes ou le Québec-quand vient le temps d'analyser l'avenir d'une voie ferroviaire, d'un tronçon ferroviaire, c'est le critère de la rentabilité qui est retenu par l'Office national des transports.

Comment les gens du milieu doivent-ils démontrer la rentabilité d'un tronçon? Je dirais qu'ils doivent le faire presque pied par pied et non pas pour l'ensemble du tronçon. Je donne simplement un exemple pour illustrer mon propos. La ligne de chemin de fer qui me concerne, Saint-Jean-Sherbrooke, a un client, Eka Nobel qui est à environ une dizaine de kilomètres à l'ouest de Sherbrooke. Cette compagnie, à elle seule, fait des transactions avec CP pour le transport de ses marchandises pour plus de 3,5 millions par année.

Lorsqu'est venu le temps d'étudier la rentabilité de la ligne de chemin de fer à l'est de Sherbrooke, on n'a pas tenu compte de ce client-là qui est à 15 kilomètres à l'ouest de Sherbrooke. Cela démontre le ridicule d'une telle situation qui fait qu'on fait dire aux chiffres ce qu'on veut bien leur faire dire.

Lorsqu'on regarde et qu'on analyse l'avenir des chemins de fer dans l'Ouest canadien, le critère retenu est celui de l'intérêt public. J'en veux comme preuve, et cela ne peut être contesté par personne, les subventions qui sont accordées au transport du blé dans l'Ouest. Pour l'année en cours, on parle d'environ 600 millions de dollars de nos taxes qui vont servir à financer le transport du blé dans l'Ouest. L'équivalent n'existe pas dans l'est du Canada. Il y a donc là une politique de deux poids deux mesures qui défavorise de façon évidente l'est du Canada dans le domaine ferroviaire.

En terminant, je voudrais dire un mot sur l'avenir du ferroviaire, puisque le ministre ce matin-et je l'ai dit, je l'ai répété plus tôt-accusait l'opposition officielle de vouloir maintenir le statu quo. Le collègue qui m'a précédé a parlé d'un moratoire pour l'abandon des lignes de chemin de fer dans l'ensemble du Canada et particulièrement au Québec. Nous ne demandons pas un moratoire pour maintenir le statu quo mais pour permettre aux intervenants locaux, régionaux, au gouvernement du Québec de s'asseoir avec les représentants du gouvernement fédéral afin de trouver des alternatives. Des alternatives, il en existe. D'autres de mes collègues qui viendront aujourd'hui parleront des CFIL, les chemins de fer d'intérêt local, que la législation québécoise favorise et permet de mettre sur pied. Pour mettre sur pied des CFIL, nous avons besoin de faire en sorte que le milieu se prenne en main.

Un des problèmes que l'on vit dans le domaine ferroviaire, c'est le désintéressement de la population depuis un certain nombre d'années. Il y a plusieurs raisons qui peuvent expliquer ce désintéressement et je pense que l'attitude de nos compagnies de chemin de fer, CN et CP, y est pour quelque chose. Leur façon de procéder dans le plus grand secret pour leurs transactions, la façon dont a procédé CP dans ma région, font en sorte que les utilisateurs éventuels ne veulent plus faire affaire avec cette compagnie. Cela a eu comme conséquence le désintéressement de la population.

Il nous faut donc un véritable débat. C'est la raison pour laquelle je souhaite que nos interventions à la Chambre


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aujourd'hui ne constituent pas un aboutissement dans le domaine du dossier ferroviaire, mais plutôt le début d'un véritable débat public, dans lequel le gouvernement et l'opposition devront s'impliquer et faire part de leur position, pour nous assurer que la place du réseau ferroviaire sera non seulement maintenue mais développée à travers tout le Canada.

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Mais de façon plus particulière en ce qui me concerne, au Québec et dans ma circonscription, il n'y a pas d'avenir économique sans le maintien d'un réseau ferroviaire rentable et la présence d'un réseau ferroviaire peut contribuer nécessairement au développement économique, mais peut également se rentabiliser. La façon de le faire est d'impliquer tous les intéressés et c'est ce à quoi nous travaillons, nous du Bloc québécois, et c'est ce sur quoi nous souhaiterions que le gouvernement travaille également.

M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, j'ai suivi avec beaucoup d'intérêt l'intervention de l'honorable député. Justement, on parlait d'une politique nationale encore une fois, sauf que l'orateur précédent a fait état de son désir de l'électrification du réseau ferroviaire au Québec.

Alors, j'essaie de voir de quelle façon on pourrait faire une coordination nationale, si on est seulement électrifié au Québec, mais que dans l'ensemble du Canada, c'est encore la méthode conventionnelle. Alors, j'aimerais bien savoir quels seraient les coûts de l'établissement d'un service unique au Québec, tel que proposé par l'opposition, et je voudrais bien savoir si l'honorable député a des réponses à cette question tout à fait légitime.

M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead): Monsieur le Président, malgré tout le respect que j'ai pour mon collègue de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, je constate qu'il ne connaît absolument rien du dossier ferroviaire. Je souhaiterais, il nous reste encore quelques heures de débat, que le gouvernement puisse faire intervenir des gens qui ont un minimum de connaissance dans ce dossier.

Quand on parle, nous, du Bloc québécois, de l'avenir du réseau ferroviaire au Québec, ou en tout cas, quand moi j'en parle, c'est bien sûr en lien avec l'ensemble des États provinciaux ou fédéraux ou les États-Unis qui nous entourent. Au Québec, je veux le rappeler à mon collègue de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, ce sont les souverainistes qui ont été, lors du débat sur le libre-échange, les plus farouches défenseurs et partisans du libre-échange. Le premier ministre conservateur Brian Mulroney a rendu hommage à l'actuel vice-premier ministre du Québec, M. Bernard Landry, pour avoir, en 1988, parcouru l'ensemble du Québec et je dirais même l'ensemble du Canada, pour appuyer le traité de libre-échange avec les États-Unis.

Alors, les souverainistes ne sont pas des frileux sur le plan économique. Nous n'avons pas aucune espèce de problème avec la concurrence. Nous savons très bien que nous vivons en Amérique du Nord, nous voulons développer nos liens économiques, culturels, sociaux, autant avec l'ensemble du Canada qu'avec les États-Unis et le réseau ferroviaire est un outil parmi d'autres. Mon collègue, qui a une expérience des chemins de fer en Europe l'a très bien fait ressortir il y a quelques instants, dans son propos. En Europe, les réseaux ferroviaires traversent les pays, je dirais presque à tous les 600 ou 700 kilomètres et il n'y a aucun problème, il n'y a personne à qui est venue l'idée de dire: «On va avoir un réseau pour la France qui n'aura aucune connexion avec la Belgique ou l'Italie ou l'Espagne.»

Alors nous, et moi personnellement, mais c'est le cas également de l'ensemble de mes collègues, quand on voit le développement du réseau ferroviaire, il est évident que c'est en lien avec l'ensemble du Canada, avec également les Américains, puisque chez nous, ma ligne de chemin de fer est une ligne précisément de niveau international, puisqu'elle traverse le Québec, le Maine, pour se rendre au Nouveau-Brunswick. Alors, il est évident qu'on doit penser continental, quand on pense à un réseau ferroviaire. C'est la raison pour laquelle on souhaite, nous, sauver notre réseau à l'interne pour nous permettre d'être en mesure de connecter avec les réseaux américains et l'ensemble du Canada.

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Quant au dossier de l'électrification du train, c'est une solution parmi d'autres. C'est une solution qui en vaut bien d'autres. Ce que mon collègue voulait faire ressortir, c'est qu'il existe, si on met l'imagination au pouvoir, des solutions qui permettent d'envisager un avenir prometteur pour le rail.

M. Mercier: Monsieur le Président, mon honorable collègue de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine a fait allusion à mes propos au sujet de l'électrification. Je veux également préciser que l'électrification est une solution parmi d'autres qui présente d'énormes avantages du point de vue économique et du point de vue environnemental, au Québec aussi bien qu'en Ontario, qui sont deux provinces productrices de grandes quantités d'énergie électrique.

Ce que je voulais dire, c'est que le Québec pourrait, s'il était souverain, examiner la possibilité d'électrifier le réseau avec une plus grande liberté et un plus grand souci exclusif, oserais-je dire, des intérêts nationaux que dans la situation actuelle où il y a du lobbying pour maintenir les privilèges du mazout. Je lui dirai également qu'il existe des lignes, et j'ai circulé dessus, qui sont à traction, sur une partie du trajet, à mazout et sur une autre partie du trajet, électrique. Cela ne pose pas de problème majeur.

Le président suppléant (M. Kilger): Le député de Mégantic-Compton-Stanstead veut-il commenter?

M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead): Est-ce que j'ai encore du temps?

Le président suppléant (M. Kilger): Vous avez encore du temps, certainement.

M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead): Monsieur le Président, j'aimerais aller un peu dans le sens de ce que mon collègue vient de dire. En fait, l'essentiel de son propos, c'est tout simplement, et je l'ai mentionné tantôt, pour insister sur l'importance d'examiner toutes les possibilités ou de laisser ouvertes toutes les avenues dans le domaine du transport ferroviaire, comme c'est le cas dans tous les domaines.

On nous a questionné également et le député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine nous a demandé, pas spécifiquement à moi, mais à d'autres de mes collègues, quelle serait l'attitude du gouvernement du Québec dans le dossier ferroviaire? Quelle pourrait être l'attitude des municipalités concernant la taxation? Il se référait à la taxation sur le fuel, mais quelle serait l'attitude des municipalités?

J'aimerais dire quelques mots là-dessus, puisque depuis un an, je travaille en étroite collaboration avec les gens de mon


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milieu, pour susciter ou démontrer l'intérêt que la population devrait avoir quant à l'avenir du transport ferroviaire. Je pense que des pas importants ont été franchis au cours des dernières semaines en ce sens et j'en suis très heureux.

J'ai eu l'occasion également de discuter avec des représentants des maires, des conseillers de municipalités qui m'ont dit n'avoir aucune espèce d'objection à revoir leur droit à des taxes foncières sur leur territoire. Des industriels ont démontré leur intérêt à investir dans des compagnies de chemin de fer à intérêt local. Tout cela pour dire que le seul ingrédient qui manque pour l'instant, c'est une volonté nette, claire, précise du gouvernement et du ministre des Transports, en particulier, d'inclure dans le débat l'ensemble de la population ou leurs représentants.

Bien sûr, l'opposition, et on le voit dans le comité bidon mis sur pied par le ministre des Transports, il n'y a pas de place pour l'opposition, ni l'opposition officielle, ni le Parti réformiste. Dans les consultations qu'on veut faire dans le milieu, c'est une farce monumentale et c'est pourquoi nous disons à nos intervenants de boycotter cette espèce de consultation qui a comme seul objectif de permettre au gouvernement d'entendre ce qu'il veut entendre. Ce qu'il faut faire, c'est une véritable consultation partout à travers le Canada et je m'engage à collaboarer avec le gouvernement pour que les intervenants chez nous viennent dire ce qu'ils pensent du transport ferroviaire et surtout, ce qu'ils sont prêts à faire pour son avenir.

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Mme Pierrette Ringuette-Maltais (Madawaska-Victoria, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais en premier lieu féliciter le député de Mégantic-Compton-Stanstead pour l'ouverture d'esprit qu'il a démontrée en défendant un réseau ferroviaire national d'un bout à l'autre du pays, c'est-à-dire de l'Atlantique au Pacifique, en passant certainement par le Québec.

Il me fait plaisir de vous parler aujourd'hui d'une composante essentielle de l'infrastructure canadienne: CN Amérique du Nord. Le CN est non seulement le plus gros transporteur ferroviaire au Canada, mais aussi la plus importante société d'État fédérale. Son actif s'élève à plus de cinq milliards de dollars et ses dépenses pour 1994 devraient dépasser les 4 milliards. CN Amérique du Nord exploite un vaste réseau de 18 000 milles et assure près de 30 000 emplois aux Canadiens et Canadiennes. Elle dessert des expéditeurs dans huit provinces, leur donnant accès à tous les grands ports canadiens et aux marchés américains.

CN Amérique du Nord a dû surmonter de nombreuses difficultés depuis sa création, surtout au cours des dernières années, et je m'explique. Le marché des services ferroviaires a énormément changé, et les transporteurs routiers livrent aujourd'hui une vive concurrence aux compagnies de chemin de fer. Les expéditeurs de marchandises pour lesquelles le train constitue le meilleur mode de transport doivent concurrencer les prix du marché mondial et recherchent des prix de transport réduits. Les expéditeurs du secteur manufacturier exigent des services plus fiables et plus rapides.

Tous ces facteurs ont eu un effet sur le rendement financier de CN Amérique du Nord, si bien que la société subit des pertes depuis plusieurs années. Je crois toutefois que CN Amérique du Nord a commencé à prendre des mesures pour améliorer son sort. La société a effectivement décidé de rationaliser son réseau. Elle abandonne les lignes qui ne sont plus utilisées et vend à des entrepreneurs celles qui servent à des marchés locaux et peuvent être exploitées à profit par une petite compagnie de chemin de fer.

Ces compagnies de chemin de fer, dites régionales ou secondaires, peuvent habituellement mieux répondre aux besoins des expéditeurs locaux et, par conséquent, fournir des services de qualité égale ou supérieure à ceux d'un transporteur de la classe 1. Comme leurs règles de travail sont plus souples, elle peuvent s'adapter rapidement aux exigences du marché à un coût moins élevé que le transporteur traditionnel de la classe 1.

En plus de rationaliser son réseau, CN Amérique du Nord a entrepris un important programme de réduction des effectifs. Elle a annoncé en 1992 que 11 000 emplois seraient abolis en trois ans. Si cette annonce a entraîné pour la compagnie une réduction de valeur importante et une perte de plus d'un milliard de dollars cette année-là, elle démontrait néanmoins très clairement aux marchés financiers que le CN avait la ferme intention de contrôler ses dépenses.

Ce programme de CN Amérique du Nord en est maintenant à sa deuxième année. La société a récemment confirmé que 70 p. 100 des réductions annoncées sont maintenant chose faite. Ces importants changements organisationnels s'imposaient pour que CN Amérique du Nord devienne viable.

CN Amérique du Nord a également affiné sa stratégie de marketing et investi pour pouvoir offrir aux expéditeurs le meilleur service qui soit. L'expansion du tunnel de Sarnia est un exemple parfait d'un investissement qui permettra à la société de concurrencer efficacement sa rivale sur le marché du transport intermodal. Grâce aux 200 millions de dollars investis dans le tunnel de Sarnia, CN Amérique du Nord pourra bientôt offrir un service de conteneurs gerbés entre Montréal, Toronto et Chicago. Ce service pourrait représenter pour les expéditeurs une économie de 12 heures.

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Cette volonté de CN Amérique du Nord d'améliorer ses services s'est aussi manifestée récemment lorsque la société a acheté un système d'information de pointe qui permet de suivre chaque envoi depuis le point de ramassage jusqu'au point de livraison. CN Amérique du Nord et ses expéditeurs sauront ainsi, en tout temps, où se trouve un envoi donné et quand il arrivera à destination.

Je suis heureuse d'informer la Chambre que CN Amérique du Nord commence à récolter les fruits de tous ses efforts. Elle a enregistré des recettes de 186 millions de dollars au cours des 9 mois se terminant le 30 septembre dernier, alors que, pour la même période en 1993, elle avait subi des pertes de 41 millions. Donc, la société pourra réaliser cette année un profit de 225 millions de dollars et mettre fin ainsi à ses longues années de déficit.

Mais ce profit n'est pas la fin heureuse que nous souhaitons tous à CN Amérique du Nord. La société a toujours une dette fort élevée de 2,2 milliards, et le profit prévu pour 1994 ne suffira pas


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pour la réduire d'une façon significative, puisque des investissements en capital doivent absolument être faits.

CN Amérique du Nord doit continuer à investir dans son infrastructure pour pouvoir répondre à la demande toujours croissante, tout en réduisant ses coûts. Il lui faudra réaliser de plus gros profits pendant plusieurs années encore pour parvenir à réduire sa dette. Heureusement, les programmes de réduction des dépenses et d'accroissement des recettes que CN Amérique du Nord a récemment instaurés lui permettent de tirer avantage de la forte croissance économique actuelle et de poser les fondements d'une exploitation viable.

Nous savons tous que, le 22 septembre, Canadien Pacifique Ltée a présenté au gouvernement une proposition spontanée dans laquelle elle offrait d'acheter l'actif de CN Amérique du Nord dans l'est canadien. Cette offre a été faite quelques mois après que CN Amérique du Nord et Canadien Pacifique Ltée ont annoncé l'échec de leurs négociations sur la fusion dans l'est.

Vous vous rappellerez que Canadien Pacifique Ltée et CN Amérique du Nord ont entrepris ces négociations il y a plus d'un an dans l'espoir de fusionner leurs activités qui sont déficitaires dans l'est canadien. Les discussions ont avorté, puisque les sociétés n'ont pas pu s'entendre sur la valeur des éléments d'actif que chacune devrait contribuer.

Le gouvernement étudie actuellement la proposition du CN pour déterminer les nombreuses conséquences qu'elle risque d'entraîner pour l'industrie ferroviaire, les expéditeurs, les employés de chemin de fer et les contribuables. Il attache une importance particulière aux répercussions que cette proposition pourrait avoir sur les expéditeurs de l'est canadien et, aussi, sur le trafic transcontinental et les expéditeurs de l'Ouest.

L'incidence du transfert sur les emplois au pays sera également étudiée. Enfin, le gouvernement a retenu les services professionnels de la maison bancaire d'investissement Wood Gundy qui le conseillera sur les aspects financiers du transfert proposé.

L'étude progresse rapidement, mais le gouvernement a bien fait comprendre qu'il prendrait tout le temps nécessaire pour examiner l'offre d'achat sous tous ses angles.

Cette offre spontanée a incité le ministre des Transports à annoncer, le 29 septembre dernier, la mise sur pied d'un groupe de travail sur la commercialisation de CN Amérique du Nord. Ce groupe, présidé par mon collègue de Kenora-Rainy River, Robert Nault, se penchera sur la question de la commercialisation de la société, et notamment sur la participation éventuelle des employés.

Le groupe de travail consultera les divers acteurs de l'industrie ferroviaire, les employés, les expéditeurs, les provinces, les communautés et les compagnies de chemin de fer.

Il a déjà rencontré les hauts dirigeants de CN Amérique du Nord et d'autres experts de l'industrie ferroviaire, ainsi que des représentants de l'Association des syndicats de cheminots du Canada et de l'Office national des transports.

(1315)

Les consultations publiques s'amorceront dès la semaine prochaine, soit le 22 novembre, à Ottawa. Le groupe de travail visitera ensuite une douzaine de villes canadiennes aux quatre coins du pays, au cours des prochains mois. Son rapport devrait être présenté au ministre des Transports avant la fin de l'année.

Je tiens à souligner que cette étude du groupe de travail est une des nombreuses initiatives que le gouvernement a prises dans le but de rationaliser ses activités et de redéfinir son rôle, en se demandant ce qu'il doit faire en tant que gouvernement et ce que le secteur privé peut faire de son côté. Transports Canada passe actuellement en revue toutes ses activités pour déterminer lesquelles pourraient être mieux exécutées par le secteur privé ou en partenariat avec lui.

Dans le domaine du transport ferroviaire, Transports Canada a entrepris une étude de l'industrie, dans le but de définir les obstacles majeurs à la performance efficace des chemins de fer. L'objectif est de trouver une stratégie pour régler les problèmes relevés et permettre aux sociétés ferroviaires de mieux concurrencer et d'offrir aux expéditeurs canadiens des services efficaces et à prix raisonnable.

Transports Canada a maintenant terminé ses consultations régionales. Il a rencontré les expéditeurs, les compagnies de chemin de fer et les syndicats et leur a demandé comment on pourrait, selon eux, améliorer le rendement et la compétitivité des sociétés ferroviaires. Tout un éventail de questions ont été abordées, depuis la gestion des chemins de fer jusqu'aux pratiques de travail, en passant par la réglementation.

En plus de mener des consultations auprès de l'industrie, Transports Canada passe en revue toute sa réglementation, pour s'assurer que nos sociétés de transport, notamment les compagnies de chemin de fer, fonctionnent dans un milieu qui favorise l'utilisation efficace des ressources et la prestation de services de grande qualité aux expéditeurs.

De toute évidence, toutes ces initiatives auront un effet sur l'avenir de CN Amérique du Nord. L'évolution de l'industrie ferroviaire et la nouvelle perception du rôle du gouvernement vis-à-vis de cette société d'État auront une incidence directe sur CN Amérique du Nord. Il est encore trop tôt pour savoir ce que l'avenir réserve à CN Amérique du Nord. Le gouvernement a entrepris des études diverses qui toucheront la société d'État d'une façon ou d'une autre. Mentionnons l'étude sur le milieu d'exploitation de la société, l'analyse de la proposition spontanée du CP et l'examen des avantages éventuels de la commercialisation de CN Amérique du Nord.

La société CN Amérique du Nord a commencé à prendre des mesures pour devenir efficace et les conclusions des études du gouvernement aideront à tirer le maximum de ces initiatives. Le gouvernement veillera à ce que les sociétés ferroviaires puissent concurrencer en toute liberté et s'adapter aux demandes des expéditeurs de la façon la plus efficace et la plus économique possible.


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C'est donc ce qu'il y a de mieux pour l'industrie ferroviaire, les expéditeurs et tout le peuple canadien qui décidera de l'avenir de CN Amérique du Nord.

[Traduction]

M. John Duncan (North Island-Powell River, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat de la motion proposée en ce jour réservé à l'opposition, dénonçant l'inaction et le manque de transparence du gouvernement en ce qui a trait à la restructuration éventuelle des chemins de fer du Canada.

Je profiterai de l'occasion pour parler de vision, d'histoire et de l'intégrité de notre grand pays. Il est difficile de ne pas devenir nostalgique et peut-être même un peu sentimental quand on parle d'un symbole de notre patrimoine, d'un simple chemin de fer qui a forgé notre pays et uni un pays encore jeune il y a plus de 125 ans.

Quel enfant de notre génération ne se rappelle pas avoir couru à la fenêtre pour regarder le train, ou avoir entendu tard le soir le rugissement obsédant de la locomotive à vapeur et le coup strident du sifflet crachant un nuage de fumée. La vapeur, le charbon et la fumée sont peut-être disparus, remplacés par les moteurs diesel et les moteurs électriques, mais le souvenir persiste, n'est-ce pas? Et s'il persiste, pour combien de temps encore?

(1320)

En préparant mon intervention, je n'ai pu m'empêcher de me rappeler deux oeuvres formatrices de la littérature canadienne: Le grand défi: le chemin de fer canadien et Le dernier mille. Le vaste ouvrage que Pierre Berton a consacré à CP Rail de même que le chemin de fer qui a réuni ma province, la Colombie-Britannique, à la Confédération constituent deux oeuvres durables. Il est difficile d'oublier les dernières lignes de l'ouvrage de Berton. Au moment où se termine la construction du dernier mille de voie ferrée à Craigellachie, la petite locomotive traverse les montagnes et s'engage sur la pente menant aux pâturages de la vallée du Fraser et jusqu'aux eaux bleues du Pacifique, et entre dans l'histoire. Cela a l'étoffe de la légende et de la tradition, et c'est ce qui a uni notre pays.

Rien n'est statique. On peut évoquer le passé, sa simplicité et sa fragile beauté, mais un pays évolue, et pas toujours comme il devrait. Le changement n'est pas toujours synonyme d'amélioration. Le mouvement n'est pas toujours synonyme de progrès, et les hommes ordinaires manquent parfois de la vision de nos ancêtres et ils ne font pas toujours les bons choix.

Nous sommes ici aujourd'hui pour nous interroger sur la voie dans laquelle s'engage notre pays, non pas dans toutes les dimensions, mais dans une dimension fondamentale, soit le transport ferroviaire, qu'il s'agisse du CN, du CP ou de VIA Rail. Nous sommes ici pour nous interroger sur notre vision, nos progrès et nos choix.

Parfois, malgré ce qu'en pense le gouvernement actuel, l'argent ne peut acheter la vision. Il ne peut, comme en l'occurrence, acheter l'esprit de décision en matière de politique ferroviaire pour notre pays. Le fait reste que le gouvernement a manifesté une complète indifférence à l'égard d'une politique ferroviaire pour le Canada.

Les temps ont changé, comme durant les années 1860. Les solutions que nous avons utilisées pour élaborer la politique ferroviaire durant les années 1960 et 1970 ne conviennent pas pour résoudre les problèmes actuels, y compris le transport des marchandises et des passagers. Alors qu'une politique ferroviaire éclairée pourrait créer une nouvelle dynamique dans le secteur des transports au Canada, le gouvernement actuel méprise toute mention de vision d'avenir ou de changement. Les vieux politicailleurs à l'administration centrale du CN à Montréal travaillent en secret. Leur vision correspond à celle des bloquistes qui proposent l'aménagement non réaliste de corridors ferroviaires longeant le fleuve Saint-Laurent, au coût de 7 à 10 milliards de dollars. Ce sont là des monuments à la gloire de la cupidité et des largesses des jours meilleurs, pas des solutions de rechange valables à l'inertie qui saisit ces gens.

Nous ne sommes plus en 1860. Le gouvernement et le secteur public ne sont pas les maîtres de tout. Il n'y a pas de puits intarissable rempli de dollars pour des corridors ferroviaires destinés aux trains à grande vitesse. Le flambeau a été passé, et l'idée que le gouvernement ou le secteur public peuvent mieux faire les choses ne passe pas le test décisif des années 90. Les prétendus aventuriers comme les Bombardier, qui aiment innover pour autant que des fonds publics soient investis, ne sont pas des solutions, mais des puits sans fond, surtout en ce qui concerne la politique ferroviaire.

Le Parti réformiste préconise la privatisation et propose de remettre au secteur privé les retombées des activités de transport fédérales. Il appuie la motion du Bloc qui condamne la mauvaise politique ferroviaire du gouvernement, pour peu qu'il en ait une. Qui sait ce que l'avenir réserve aux sociétés ferroviaires CN et CP?

Le Parti réformiste appuie l'offre d'achat récente que le CP a présentée pour les activités du CN dans l'Est. Comment le ministre des Transports a-t-il réagi? Avec mépris, hésitation et indécision. Est-ce là une politique ferroviaire? Qu'attend-t-il? Une meilleure offre? Non. Il se contente du statu quo et, à bien des égards, cette attitude est aussi indispensable que le sifflet à vapeur et les nuages de fumée. Si le ministre n'a pas de solution ou de vision d'avenir, pourquoi ne pas tenir un examen public sur la question?

(1325)

Le ruban d'acier qui traversait le pays d'est en ouest diminue sans cesse au point de devenir une spirale où nous finissons par tourner en rond. Nous n'allons nulle part. Prenons VIA Rail, l'exemple parfait de l'inefficacité. Cette entité démesurément fonctionnarisée du transport canadien est au nombre de celles qui essuient les plus lourdes pertes financières, et ce n'est pas à cause des syndiqués de la base de VIA Rail. Non, il faut avoir une mentalité et des antécédents liés à la fonction publique pour ruiner un chemin de fer tout en gagnant un salaire de six chiffres.

Il ne fait aucun doute qu'en cédant VIA Rail à des intérêts privés, on réduira les coûts tout en revitalisant l'entreprise et son personnel par le rétablissement du service voyageur sur des routes abandonnées ou sur le point de l'être. Il n'est pas nécessaire d'avoir une vision particulière pour continuer de comprimer les dépenses afin d'épargner quelques dollars, mais dans le cas de VIA la compression des dépenses se traduit non pas par des économies, mais par des pertes. Il faut le faire.

Si VIA était cédée à des intérêts privés, des routes marginales pourraient de nouveau être rentables, mais pas tant que VIA restera une société publique. La complaisance et l'endettement


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perdurent au sein de cette société. VIA Rail n'a proposé ni stratégie de commercialisation, ni plan d'entreprise, ni la moindre vision pour ses activités actuelles.

Le financement public de lignes à grande vitesse à coups de milliards de dollars exploitées par le gouvernement assurera la perpétuation de la situation présente. Pourquoi le Bloc et le gouvernement ont-ils si peur de céder l'entreprise à ceux qui sont le plus aptes à la gérer?

Pense-t-on vraiment que si les investisseurs privés avaient accès à un financement de 330 millions de dollars par année, soit ce que recevra VIA cette année, ils gaspilleraient cet argent en versant des salaires faramineux à leurs dirigeants? Pourquoi donc VIA reçoit-elle ces subventions alors qu'elle continue de perdre de l'argent même si elle supprime des routes et des services?

Parlant de gestion, en 1992, le CN a supprimé 10 000 emplois et a perdu 1 milliard de dollars. La même année, le CP a demandé l'autorisation de supprimer toutes ses lignes à l'est de Sherbrooke. Où allons-nous donc? Le savons-nous? Le Parti réformiste est favorable à l'idée que le gouvernement se retire du CN en le cédant à des intérêts privés. Les gouvernements ne devraient plus intervenir dans cette industrie en subventionnant notre système national de transports.

Le gouvernement ne veut pas admettre ses erreurs et s'accroche à sa bonne vieille méthode qui consiste à vouloir tout régler à coups de subventions. En réalité, à la place d'une politique ferroviaire, nous avons eu une société criblée de dettes, le CN, vivant aux crochets du gouvernement.

Cependant, le Parti réformiste estime que le gouvernement ne peut simplement céder ses intérêts dans l'industrie des transports sans reconnaître qu'il faut modifier profondément la législation en cette matière pour l'adapter aux années 90. La loi actuelle pénalise durement quoiqu'involontairement l'industrie ferroviaire à cause de la structure fiscale fédérale existante. Il incombe au gouvernement, et au ministre des Transports en particulier, de récrire la politique ferroviaire, d'éliminer les anomalies et d'établir une stratégie permettant aux investisseurs d'entrer dans l'arène en fonction de paramètres clairs.

Pour appuyer l'implantation de ce nouveau régime, le Parti réformiste propose les mesures suivantes. Premièrement, nous favoriserions, grâce à des réformes fiscales et à des prêts à taux d'intérêt réduit, l'installation d'exploitants de chemin de fer secondaire dans les régions du pays où les grandes compagnies de chemin de fer ne sont plus rentables ou ne sont pas disposées à investir les capitaux nécessaires au renouvellement d'une industrie de transport ferroviaire qui soit rentable.

(1330)

Deuxièmement, nous négocierions la réforme de la composante provinciale de la structure de l'impôt foncier et de la taxe sur les carburants à l'égard des exploitants de chemin de fer, grands et petits, afin que leurs coûts soient sensiblement les mêmes que ceux de leurs concurrents américains.

Troisièmement, nous reconnaîtrions officiellement, par le truchement de la réforme fiscale fédérale, la supériorité du transport par chemin de fer sur le transport par camion à grande distance dans le contexte de l'environnement et des infrastructures.

Enfin, toujours en ce qui concerne ce dernier aspect, nous procéderions à un examen approfondi et juste de l'ensemble de la structure fiscale pour qu'elle reflète mieux les coûts que les compagnies de chemin de fer doivent maintenant assumer.

À l'heure actuelle, le gouvernement donne d'une main et reprend de l'autre. Depuis qu'il a pris le pouvoir l'année dernière, le gouvernement n'a pas su défendre les intérêts de l'industrie canadienne du chemin de fer. Il est prisonnier du passé et n'a pas de vision ou d'orientation claire. Cependant, contrairement aux bloquistes, nous sommes pour une moins grande participation de l'État. Les gouvernements devraient établir des directives, puis se retirer. La situation actuelle ne plaît à personne et c'est l'industrie du chemin de fer qui en souffre.

Dans les années 60, au siècle dernier, nous avons établi le lien ferroviaire menant au Pacifique. À la fin des années 30 et 40 de notre siècle, nous avons unifié le pays, grâce au vol aérien continental. Dans les années 60, nous avons terminé le système routier transcanadien. Faisons en sorte que ces exemples de vision, de courage et de capacité d'agir ne soient pas ternis, dans les années 90, par une absence de politique cohérente concernant les chemins de fer.

Le président suppléant (M. Kilger): J'ai oublié de demander au député, au début de son intervention, s'il avait l'intention de partager son temps de parole avec son collègue. Il a utilisé dix minutes, et je ne sais pas s'il est prêt à se soumettre à des questions ou observations pendant cinq ou dix minutes.

Si c'est ce que veut le Parti réformiste, je suis prêt à accorder les dix minutes qui restent au député de Lisgar-Marquette. Avant d'accorder la parole au député de Lisgar-Marquette, je tiens à dire qu'il y aura cinq minutes pour des questions ou observations.

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais poser seulement une question au député.

Il y a un certain temps, une compagnie de la Colombie-Britannique, la Great Canadian Railtour Company, a acheté à VIA Rail un service appelé le Montagnard des Rocheuses. Une fois la vente conclue, VIA Rail, une société d'État, a tenté de revenir sur cette entente de différentes façons. Elle a tenté de falsifier le contrat, de l'interpréter différemment et, plus tard, de réintroduire un service concurrentiel sur une ligne adjacente, tout cela, en contravention de l'esprit sinon de la lettre du contrat qui avait été signé.

Cela risque d'inquiéter les personnes désireuses d'acquérir une partie des activités de CN Rail. Il faudrait regarder ce que le ministre a fait dans des cas comme le contrat Pearson.

Dans ce cas-là, des entreprises canadiennes se sont réunies et ont signé avec le gouvernement un contrat que celui-ci a par la suite annulé, comme il en avait le droit. Ce n'est pas ce droit que nous mettons en doute, mais tout le processus que le gouvernement a suivi pour essayer de présenter une mesure législative qui interdirait de recourir aux tribunaux afin de demander la réparation des torts causés.


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Le député pense-t-il que les mesures que le ministre des Transports a prises dans l'affaire du contrat Pearson pourraient avoir des répercussions sur les sociétés privées désireuses d'acquérir une partie ou la totalité des activités de CN Rail?

M. Duncan: Monsieur le Président, les gens d'affaires veulent plusieurs choses. Ce qu'ils veulent par-dessus tout, c'est de la certitude et la possibilité de travailler dans un climat dont ils connaissent les règles et où ces règles leur permettront de dissiper tout conflit, notamment en recourant au dernier palier d'appel, soit nos tribunaux fédéraux et provinciaux. C'est ce que nous appelons la justice, et c'est sur elle que repose notre société.

(1335)

À mon avis, toute la question de l'accord Pearson et l'orientation controversée que prend actuellement le projet de loi créeront de l'incertitude dans ce domaine. Le seul moyen d'aller au fond des choses à ce stade-ci, c'est de régler cette question en tenant une enquête publique, ce qui permettra de faire la lumière avec équité et transparence. C'est aussi ce que nous demandons au sujet du groupe de travail sur le CN.

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt le discours du député.

L'idée d'un système de transport ferroviaire à grande vitesse dans le corridor Montréal-Toronto m'intéresse au plus au point, car ces voies passeraient dans ma circonscription. J'ai eu déjà un certain temps pour examiner tout cela.

L'un des problèmes évidents réside dans la densité de la population. En outre, une étude de systèmes ferroviaires semblables dans d'autres pays, comme le Japon et la France, donne à penser que ces réseaux ne semblent pas rentables. En fait, nous venons juste d'être témoins de l'ouverture de la voie reliant Londres à Paris et on a déjà accumulé une dette énorme qui ne sera peut-être jamais remboursée.

Le député a parlé de privatisation. Je suppose que la question qui se pose est celle-ci: Le système actuel de transport ferroviaire au Canada est-il viable, en tant qu'entreprise privée? S'il ne l'est pas totalement, il faudrait alors fragmenter le réseau ferroviaire en petites parties et envisager d'abandonner tout le réseau ferroviaire dans certaines régions du pays.

Le député propose-t-il donc que nous divisions ainsi le système ferroviaire et que le secteur privé puisse décider qu'il n'est pas rentable de relier Toronto à la Colombie-Britannique par chemin de fer?

M. Duncan: Monsieur le Président, on a posé plusieurs questions. En ce qui concerne le train à grande vitesse dans cette région du monde, par opposition à l'Ouest où je vis, si c'est une excellente proposition, je veux bien alors que le secteur privé se lance dans cette entreprise s'il le souhaite.

Nous devons comprendre que le gouvernement ne peut plus s'occuper de ces choses. Le gouvernement fédéral emprunte de l'argent à des prêteurs étrangers pour assurer le fonctionnement quotidien du gouvernement. Notre pays n'a plus les moyens de consacrer d'énormes crédits à certains de ces grands projets.

En ce qui concerne les orientations possibles pour notre réseau ferroviaire national, nous avons l'exemple de ce qui s'est produit en Nouvelle-Zélande lorsqu'on a privatisé la compagnie de chemin de fer. C'était la moins efficiente du monde occidental et elle est devenue la plus efficiente. Cela modifie la rentabilité de nombreux embranchements et le reste. Cela ne veut pas dire nécessairement que tous les embranchements éloignés deviendront rentables.

Dans un pays comme le nôtre, nous allons probablement avoir pour politique de conserver certaines de ces voies éloignées. Nous pourrons le faire grâce à des encouragements ou à la négociation.

(1340)

Que nous conservions ou non un énorme réseau ferroviaire ou que nous le divisions ou pas, je pense que c'est une décision qui devait être laissée davantage au secteur privé, plutôt qu'au gouvernement. Il est difficile de savoir au juste la meilleure façon de procéder. En un sens, ce sont les considérations financières, plutôt qu'une stratégie directrice maîtresse, qui dicteront notre conduite.

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette, Réf.): Monsieur le Président, c'est un privilège et un plaisir pour moi d'aborder cette motion de l'opposition officielle. Je suis d'accord avec la partie de la motion qui dénonce l'inaction du gouvernement libéral. Je suis moins d'accord avec celle qui dénonce le manque de transparence. Je crois plutôt qu'il existe une grande transparence et je n'aime pas du tout ce que je vois.

La politique du présent gouvernement libéral sur le transport ressemble étrangement à celle des libéraux des années 70. J'ai constaté bien peu de différence entre la politique de cette époque et ce que j'ai entendu récemment à la Chambre.

Selon l'orientation générale des libéraux des années 70, si une entreprise fonctionnait mal, il valait mieux la fermer. Il était inutile de corriger la situation, puisque quelqu'un d'autre le ferait éventuellement. Je me souviens très bien des pressions exercées à cette époque pour que soient abandonnés les embranchements ferroviaires non rentables. Le public était forcé d'accepter ces décisions. À cette époque, on avait promis aux collectivités où ces embranchements étaient abandonnés qu'on économiserait des sommes qui seraient ensuite investies dans l'infrastructure routière.

Malheureusement, je dois signaler à la Chambre qu'aucune des améliorations promises n'a été réalisée. Nous les attendons encore. Si vous visitez les régions rurales du Manitoba et si vous roulez sur les routes de campagne vers la fin juin, après que les employés de la voirie ont réparé les nids de poule, vous constaterez qu'ils mettent un peu trop de bitume pour bien s'assurer que ces nids de poule sont bien remplis, de sorte qu'ils créent des bosses. Lorsque les autorités modifient la loi ou annulent les restrictions et qu'on peut enfin transporter nos charges habituelles sur les routes et que les agriculteurs commencent à transporter leurs céréales, on peut voir des douzaines de camions de ferme faire du saute-mouton de bosse en bosse sur la route.


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Nous endurons cette situation depuis vingt ans et les agriculteurs en ont assez de ce genre d'infrastructure. Lorsque le gouvernement libéral a proposé le nouveau programme d'infrastructure qui allait coûter environ six milliards de dollars aux contribuables, l'une des premières observations que j'ai entendues de la part de mes électeurs a été la suivante: «Jake, arrange ça pour qu'on fasse quelque chose pour notre système routier. On nous avait promis cela dans les années 70, et nous attendons encore.»

J'ai le triste devoir, monsieur le Président, de vous informer que nous attendons toujours. Après avoir examiné les projets d'infrastructure qui ont récemment été approuvés au Manitoba, je peux déclarer à la Chambre que les collectivités rurales ont obtenu environ la moitié de ce qu'a reçu la circonscription de Winnipeg-Sud-Centre, alors que je ne vois ni systèmes de silos ni grandes autoroutes à l'horizon. Tout ce que je vois dans cette région, ce sont des projets de construction de centres communautaires, de piscines et autres types d'infrastructure sportive de luxe.

Je suis stupéfait quand j'entends le député libéral prétendre que notre réseau ferroviaire unit le pays. Je dois lui dire que ces traverses, ces pièces d'acier, n'existent plus dans nos collectivités. Ces traverses s'étendent maintenant sur des kilomètres et des kilomètres et servent à retenir quatre brins de fil barbelé ou à supporter les planches d'un corral afin de séparer le bétail.

(1345)

Si, par «unir le pays», l'actuel gouvernement entend abandonner encore d'autres chemins de fer au lieu de chercher à les rendre efficaces, je ne crois pas que ce genre d'unité me convienne.

Ce matin, le ministre a sollicité des avis sur la façon de résoudre ces problèmes. Selon moi, le message adressé au ministre des Transports et au ministre de l'Agriculture, au mois de mai dernier, était on ne peut plus clair quand le sous-comité chargé d'étudier le dossier de l'attribution du matériel remorqué a proposé l'abolition de l'Office du transport du grain. Cet organisme posait plus de problèmes qu'il n'en résolvait dans ce domaine.

Tous les membres du sous-comité et du Comité permanent de l'agriculture ont également insisté pour que nous prenions enfin des mesures au sujet du retour en arrière. Nous gaspillons des millions de dollars en acheminant les céréales dans la direction opposée, ce qui perturbe le système de manutention des céréales. Il existe une solution très simple à cela; à cet égard, je voudrais lire quelques observations tirées du Quorum d'hier:

Selon l'Office national des transports, l'année dernière, 1,1 million de tonnes de céréales qui sont arrivées à Thunder Bay ont été renvoyées à Winnipeg, ville de départ du Canadien Pacifique Limitée à destination des États-Unis, ainsi qu'à Fort Francis, en Ontario, liaison du Canadian National avec les États-Unis.
Ces wagons sont renvoyés d'un endroit à l'autre, ce qui nous coûte de l'argent, mais il serait très simple de régler ce problème.

«C'est ridicule, déclare Tad Cawkwell, un producteur d'orge de Nut Mountain, en Saskatchewan. On ne se dirige pas vers le nord lorsqu'on veut se rendre au sud.»
Ce qui me consterne, c'est que lorsque les céréales arrivent à Winnipeg, au lieu de leur faire prendre un virage à 90 degrés au sud pour les acheminer vers les États-Unis, les responsables du réseau ferroviaire et des silos décident de leur faire parcourir 700 kilomètres supplémentaires à l'est, puis de les faire revenir à Winnipeg et de leur faire prendre un virage à gauche en direction sud.

Qu'est-ce qui en résulte? Il en résulte que, chaque année, environ 13 000 wagons-trémies chargés de blé, d'orge et d'avoine du Canada qui sont destinés aux États-Unis empruntent une route panoramique qui s'étend sur 1 400 kilomètres de plus que n'importe quelle route directe.

Que dit le ministre de l'Agriculture au sujet d'un tel problème? J'ai presque été étonné lorsque j'ai lu ses propos dans le journal. Il s'agit là d'une aberration du système qui remonte à de nombreuses années. Pour en payer le coût, on doit simplement dilapider quelques-unes des ressources limitées dont nous disposons. Est-ce là le genre de gouvernement libéral qui tolère une pareille politique? Si c'est là l'idée qu'il se fait d'un bon système de transport, je suis étonné qu'il en existe encore un.

J'ai été très heureux d'entendre ce matin le ministre des Transports citer un passage d'un discours qu'il a prononcé à Winnipeg le 6 octobre. Je voudrais mentionner quelques autres statistiques qu'il a données dans ce discours. À mon avis, il avait une très bonne idée des vrais problèmes et les a très bien cernés. Je voudrais les exposer à la Chambre cet après-midi.

Comme il l'a souligné dans une de ses premières déclarations, la productivité de la main-d'oeuvre des réseaux ferroviaires américains dépasse de 64 p. 100 celle des réseaux canadiens. Le ministre sait quel est un des problèmes. Aux États-Unis, le nombre de tonnes par mille dépasse d'environ 66 p. 100 celui du Canada. Pourquoi le gouvernement reconnaît-il que c'est bien le cas, mais ne fait rien à ce sujet.

En réponse à ces questions, nous avons des compagnies céréalières et des compagnies de chemin de fer qui exercent d'énormes pressions pour qu'on ne change rien au système, car il est profitable, et elles se fichent éperdument du sort des agriculteurs. Tant que ces derniers feront pousser des céréales, elles savent qu'ils devront les expédier et elles continueront de nous saigner à blanc autant qu'elles le peuvent.

(1350)

Le ministre des Transports a ajouté que la situation était très difficile, que tout le monde avait sa part de responsabilité dans le problème et que le problème ne résidait pas simplement dans l'incapacité de s'adapter à l'évolution de la technologie ou des conditions économiques. Les gouvernements ont créé d'autres problèmes en établissant des règlements exagérés et des impôts excessifs. La direction des chemins de fer a créé des structures trop lourdes. Enfin, les travailleurs ont eu une productivité trop mince et les conventions de travail étaient trop complexes.

Lorsque je vois l'Office de transport du grain publier des chiffres qui nous apprennent que tous les mois, durant l'été, un millier de wagons-trémies ont été placés sur des voies d'évitement et retirés vides ensuite, je me demande qui s'occupe vrai-


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ment du système et dans quelle mesure ces gens sont qualifiés pour le faire.

Je pense que, lorsque le comité a recommandé de se débarrasser de l'Office de transport du grain, cela a été l'une des recommandations les plus sages qu'il a probablement jamais faite, et on y a donné suite.

Le ministre a ajouté que la survie du secteur ferroviaire était essentielle au Canada, mais qu'elle ne pouvait se faire à tout prix et que l'industrie devait se renouveler en profondeur. Comment l'industrie pourrait-elle le faire, alors que, depuis trente ans, nous ne profitons pas des progrès technologiques et que ceux-ci n'augmentent en rien l'efficience du système de transport?

Comment ce réseau ferroviaire pourrait-il se transformer, lorsqu'on sait que les compagnies de chemin de fer doivent payer entre 6 000 $ et 7 000 $ de plus en taxes sur le carburant, pour relier Toronto à Vancouver, qu'il ne leur en coûterait sur la même distance aux États-Unis. Le gouvernement a besoin de cet argent, et je ne pense pas qu'il soit prêt à sacrifier cette somme pour accroître l'efficience du réseau ferroviaire. Cependant, cela devra se produire d'une façon ou d'une autre.

Je ne comprends pas très bien ce que le ministre veut dire quand il parle de réinventer le système. Je pense que nous avons besoin de précisions là-dessus. Je ne crois pas que nous puissions faire rouler des wagons-trémies sans roues et les rendre encore plus efficaces.

Je voudrais souligner un point très important dont le ministre a parlé. Il y a, dans le secteur des chemins de fer, plus de 200 types de mesures ou de décisions qui doivent être approuvés par l'Office national des transports. Pourquoi ces règlements existent-ils? Pourquoi le gouvernement a-t-il permis qu'ils soient adoptés? Je suis certain que dans la plupart des cas, ils ont été adoptés par suite de pressions exercées sur les gouvernements provinciaux par des groupes d'intérêts spéciaux et certainement pas par des agriculteurs.

Le ministre dit ensuite-et c'est presque incroyable que l'on soit au courant de ces choses et que l'on ne fasse rien-qu'au Canada, il faut compter jusqu'à six mois pour faire approuver les transports, tandis qu'aux États-Unis, cela ne prend que quelques jours.

Je pense que le ministre et le gouvernement savent parfaitement ce qui se passe dans le système de transport et qu'ils connaissent les réponses ou les solutions, mais qu'ils ne montrent pas la volonté politique d'agir. Cela me surprend de voir certaines des provinces donner le ton pour la nouvelle réglementation ou la déréglementation du système de transport.

Le Manitoba et la Nouvelle-Écosse ont déjà supprimé une partie des impôts fonciers et des taxes sur les carburants des compagnies de chemin de fer pour aider le système à devenir plus efficient et plus productif. Pourquoi le gouvernement fédéral ne peut-il pas prendre de mesure législative, à la Chambre, pour appuyer certaines des initiatives provinciales?

À propos de Churchill, quand je vois ce que l'on cherche à faire à ce port, je me demande toujours pourquoi il y a un port à cet endroit. Nous avons ici un port en eau salée qui ferait l'envie de n'importe quel pays et pourtant, depuis les années 70, les différents gouvernements ont tenté de le détruire ou de faire croire qu'il n'était pas efficace ou rentable.

J'espère, par mon intervention, encourager le gouvernement à prendre des mesures, parce qu'il y a, c'est certain, de l'inaction et un manque de transparence.

(1355)

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec grand intérêt le discours de mon collègue. Étant donné les négociations en cours entre les sociétés CN et CP, il se pourrait que cette dernière prenne à son compte certaines des voies ferrées du CN dans les Maritimes.

C'est peut-être un détail, mais une chose m'inquiète, et je me demande si le député ne pourrait pas m'éclairer à ce sujet. Le CP a récemment changé son logo. Le nouveau logo renferme un drapeau canadien qui se déplie et se transforme en quelque sorte en drapeau américain. Personnellement, je trouve cela très choquant.

Puisque ce sont les Canadiens qui ont subventionné le réseau de voies ferrées dans les Maritimes et à l'est de Winnipeg, je me demande si le député ne pourrait pas nous dire s'il est opportun, selon lui, de présenter ce logo sur les wagons d'un système ferroviaire payé par les contribuables canadiens.

Deuxièmement, le député a parlé de l'état de l'infrastructure routière dans sa région. Je voudrais préciser, même si le présent débat ne porte pas directement sur ce point, que les projets dans le cadre du programme d'infrastructure sont choisis par les municipalités. Par conséquent, il n'est pas très juste de la part du député de critiquer le gouvernement fédéral. Il devrait s'adresser plutôt aux politiciens municipaux.

Troisièmement, point plus important encore, j'ai écouté le député précédent du Parti réformiste parler de privatisation et j'entends maintenant ce député exprimer ses inquiétudes quant à l'abandon des voies ferrées. Il me semble que ces deux opinions sont contradictoires.

Je me demande si le député ne pourrait pas expliquer l'abandon des embranchements ferroviaires dans sa circonscription où ils ne sont pas économiquement viables.

M. E. Hoeppner: Monsieur le Président, je ne sais pas si je peux répondre à toutes les questions, parce que je ne suis pas sûr de me souvenir de toutes.

Je crois que la première avait trait au logo. Si je devais concevoir un logo pour le Canadien Pacifique, je parlerais du Canadien pas si vite. Je pense que cela plairait à tous les agriculteurs de l'Ouest. Selon moi, c'est à cause du manque de rigueur du gouvernement précédent si la Loi sur le transport du grain de l'Ouest a vu le jour. Cette loi permettait presque aux compagnies de chemin de fer d'imprimer de l'argent. Les énormes subventions auxquelles elles avaient droit leur ont permis d'étendre leurs services aux États-Unis, ce qu'elles n'auraient pu faire dans le cadre d'une politique des transports plus normale.

Pour ce qui est du programme d'infrastructure, je me contenterai de demander au député pourquoi les ministres libéraux ou les responsables de l'application du programme d'infrastructure au moyen de l'enveloppe du Développement des ressources humaines semblent obtenir deux fois plus d'argent pour leur circonscription que les autres. C'est le cas en Nouvelle-Écosse

7801

et au Manitoba. Je crois qu'il faudrait examiner de près cette situation, et vérifier où ont été investis les fonds affectés à ce programme d'infrastructure.

Quant à l'idée d'abandonner des lignes de chemin de fer, le député doit savoir que ce mode de transport est le plus efficace pour le transport des marchandises. Un bon nombre de ces lignes de chemin de fer pourraient probablement être réparées plutôt qu'abandonnées.

Le Président: Comme il est 14 heures, conformément au paragraphe 30(5) du Règlement, la Chambre passe aux déclarations de députés prévues à l'article 31 du Règlement.

_____________________________________________


7801

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LE MUSÉE DES BEAUX-ARTS DU CANADA

M. Morris Bodnar (Saskatoon-Dundurn, Lib.): Monsieur le Président, j'ai eu récemment l'occasion de visiter le Musée des beaux-arts du Canada. J'ai été absolument consterné de constater l'absence, dans la section Canadiana, de nombreux grands artistes de l'ouest du Canada, en particulier de la Saskatchewan.

On dirait qu'Emily Carr est la seule artiste produite par l'Ouest dans toute l'histoire de l'art canadien. C'est la seule artiste dont plusieurs oeuvres sont exposées au musée.

De grands artistes comme Kereluk ont seulement droit à une ou deux oeuvres accrochées au mur. D'autres artistes pleins de talent comme Allan Sapp, Ernest Lindner, William Perehudoff, Dorothy Knowles, Rita Cowley et beaucoup d'autres, qui sont reconnus dans tout le Canada, voire certains mondialement réputés, n'ont même pas une oeuvre exposée.

Je suis sûr qu'il y a au Manitoba, en Alberta et en Colombie-Britannique beaucoup d'artistes qui méritent d'avoir leurs oeuvres exposées.

* * *

[Français]

HOMMAGE À QUATRE QUÉBÉCOIS

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, hier, la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal a honoré quatre Québécois pour leur contribution exceptionnelle à la culture et à la société québécoise.

C'est M. Paul Piché, auteur-compositeur-interprète, qui a été couronné Patriote de l'année.

Myriam Bédard, gagnante de deux médailles d'or aux Jeux olympiques d'hiver de Lillehamer en biathlon, a reçu le prix Maurice-Richard, soulignant sa performance au titre d'athlète par excellence.

Jacques Bobet, producteur, réalisateur et scénariste à l'ONF, a reçu le prix André-Guérin pour sa contribution au cinéma.

Finalement, le poète, romancier et essayiste, Fernand Ouellette a obtenu le prix Ludger-Duvernay en raison de la portée internationale de son oeuvre.

Les députés du Bloc québécois désirent rendre hommage à ces quatre personnalités dont tous les Québécois et Québécoises sont fiers.

* * *

[Traduction]

LES COUPLES HOMOSEXUELS

Mme Sharon Hayes (Port Moody-Coquitlam, Réf.): Monsieur le Président, la Cour suprême du Canada se penche actuellement sur la question de savoir s'il convient, en vertu de la Charte des droits et libertés, d'étendre aux couples homosexuels les avantages sociaux accordés aux familles.

En attendant que la Cour suprême se prononce, il importe de rappeler que ce devrait être au Parlement et non pas aux tribunaux de décider de telles questions. Il n'est pas juste que, en tant que représentants élus, nous laissions aux tribunaux la responsabilité de définir la politique sociale du pays ou que nous les laissions usurper le pouvoir du Parlement dans ce domaine. C'est au Parlement de décider de cette question.

Cela permettrait de veiller à ce que les lois de ce pays soient conçues et mises en oeuvre selon un processus démocratique et non pas par les représentants des tribunaux qui ont été nommés à leur poste. Si nous voulons nous assurer que les Canadiens sont bien représentés au Parlement, cette question doit faire l'objet d'un vote libre.

* * *

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Harbance Singh Dhaliwal (Vancouver-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je désire encore une fois réitérer mon appui total à un renforcement de la législation sur le contrôle des armes à feu.

Le 8 novembre, le Dr Gary Romalis, un de mes électeurs, à été atteint d'une balle pendant qu'il prenait son petit-déjeuner chez lui. Des incidents de ce genre sont des choses horribles et incompréhensibles pour les Canadiens, et notre société n'a pas à les tolérer.

J'implore tous les députés d'adopter des mesures qui permettent de mieux contrôler les armes à feu et de prévenir plus efficacement la criminalité. Nous devons faire en sorte que des fusillades pareilles ne puissent plus se produire.

J'éprouve beaucoup de sympathie pour le Dr Romalis et sa famille et je suis sûr que tous les députés se joindront à moi pour lui souhaiter un prompt et complet rétablissement.

Je suis très troublé par le nombre de fusillades qui se produisent dans des endroits publics et dans nos foyers. En tant que député fédéral de Vancouver-Sud, je poursuivrai mes interventions en faveur de mesures qui rendront nos rues et nos maisons plus sûres.


7802

LE COLLOQUE SUR LA POLITIQUE SOCIALE

M. Andy Mitchell (Parry Sound-Muskoka, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais exprimer ma reconnaissance à près d'une centaine de mes électeurs qui ont participé, la semaine dernière, à un colloque sur la politique sociale dans ma circonscription, Parry-Sound-Muskoka.

Le colloque, qui a duré deux jours, a regroupé des travailleurs sociaux de nombreux secteurs d'activité et des électeurs. Onze orateurs provenant du mouvement syndical, du monde de l'enseignement, de la formation, de l'entreprise, des gouvernements municipaux, des programmes d'apprentissage et des services aux familles et aux enfants ont exprimé des points de vue divers. Cette approche très variée a permis aux discussions de groupe d'englober tous les sujets traités dans le document de travail du ministre du Développement des ressources humaines.

Je tiens également à remercier tout spécialement le secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines pour sa participation active au colloque. Ses interventions ont été bien reçues et ont fourni une bonne base aux discussions qui ont duré deux jours.

Je communiquerai au ministre les recommandations faites par mes électeurs afin de m'assurer qu'il prenne connaissance de leur point de vue.

* * *

L'ORCHESTRE NATIONAL DES JEUNES DU CANADA

M. Tony Ianno (Trinity-Spadina, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à souligner la belle réussite de l'Orchestre national des jeunes du Canada, une organisation sans but lucratif très spéciale, établie dans ma circonscription de Trinity-Spadina et reconnue dans le monde entier pour la qualité de la formation qu'elle donne.

Depuis 1960, l'Orchestre national des jeunes du Canada a assuré la formation de jeunes Canadiens tant pour ce qui est de la technique musicale que de la représentation devant un public.

L'expérience acquise au sein de l'orchestre sert de tremplin aux jeunes musiciens qui veulent se joindre à des orchestres symphoniques canadiens. Ces jeunes, qui viennent de régions et de milieux divers, partagent un même idéal et une même volonté d'apprendre. En donnant des concerts partout au Canada, les jeunes musiciens n'acquièrent pas seulement une formation professionnelle essentielle, mais aussi une meilleure compréhension de ce que représente le pays.

L'Orchestre national des jeunes du Canada est un microcosme du pays. Je profite de cette occasion pour saluer ces jeunes et cette importante institution qui aide les Canadiens à mieux se connaître en les rapprochant.

(1405)

[Français]

LE COMMERCE INTERNATIONAL

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Monsieur le Président, alors que le gouvernement actuel met la hache dans l'État-Providence, voici qu'avec le voyage de Team Canada en Asie, il le remplace par l'État-Spectacle! Et encore les contribuables n'ont droit qu'à beaucoup de réchauffé. Ainsi, nous nous étonnions hier de la «resignature» de l'entente liant Bombardier et Power Corporation en Chine, une entente signée depuis avril dernier.

Ajoutons aussi le contrat pour le métro de Kuala Lumpur, en Malaisie, «annoncé» en primeur la semaine dernière, lequel avait bel et bien été signé à la fin de septembre. Comment le gouvernement peut-il en retirer le crédit, alors que les wagons étaient déjà en construction chez UTDC, en Ontario, bien avant le voyage de Team Canada? Le gouvernement prend le train alors que les wagons sont déjà en marche!

Nous nous réjouissons tous, bien sûr, des contrats obtenus par des entreprises canadiennes et québécoises en Asie, mais nous dénonçons le fait que le gouvernement essaie de les récupérer à des fins partisanes. Comme le dirait Confucius «À beau gonfler qui est au loin».

* * *

[Traduction]

LE FONDS MONÉTAIRE INTERNATIONAL ET LA BANQUE MONDIALE

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound, Réf.): Monsieur le Président, il y a quelques semaines, j'ai assisté aux réunions marquant le 50e anniversaire de la mise sur pied du FMI et de la Banque mondiale.

Ces institutions ont bien servi le monde. Cependant, la discipline imposée par le FMI aux gouvernements qui empruntent est aujourd'hui sérieusement remise en question. Le mandat de la Banque mondiale, qui est de consentir des prêts aux gouvernements, n'a plus sa raison d'être.

Ce sont les organismes de charité privés qui se chargent de combler directement les besoins dus à une pauvreté croissante. Les mouvements de capitaux privés minimisent les ressources des deux institutions et assurent une protection efficace contre la mauvaise gestion de l'économie par les gouvernements.

Ces institutions coûtent très cher. L'administrateur canadien de la Banque mondiale qui a récemment pris sa retraite gagnait un salaire annuel réel de plus de 350 000 $.

J'invite le gouvernement du Canada à se prononcer énergiquement sur l'avenir de ces institutions au cours de la prochaine réunion des pays du G-7 qui aura lieu à Halifax, en mars. Ces institutions ont rempli leur rôle. . .


7803

Le Président: La députée de Saint John.

* * *

VIA RAIL

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, le 15 décembre, VIA Rail cessera complètement de desservir Saint John, la ville où j'habite.

Récemment, VIA Rail a lancé une campagne de publicité visant à convaincre les gens de prendre le train au cours des prochains mois. Certains foyers de Saint John ont reçu par la poste une enveloppe de VIA Rail. La société ferroviaire offre des tarifs réduits pour les adultes et un rabais de 25 p. 100 sur les tarifs pour les déplacements effectués entre le 15 décembre et le 5 janvier.

Cette nouvelle campagne de publicité sème la confusion parmi la population de Saint John. VIA a annoncé que VIA Atlantique cesserait ses activités le 15 décembre, mais offre des tarifs spéciaux entre le 15 décembre et le 5 janvier. Que penser? Comment peut-on obtenir un rabais s'il n'y a pas de train? Apparemment, ces rabais ne visaient pas la population de Saint John.

Je demande au ministre des Transports de mettre une automotrice à la disposition des citoyens de Saint John pour qu'ils puissent profiter des magnifiques économies offertes par VIA. J'exhorte le ministre à sauver notre train.

* * *

L'ÉQUIPE CANADA

M. Jesse Flis (Parkdale-High Park, Lib.): Monsieur le Président, je suis convaincu que tous les députés s'uniront à moi pour féliciter l'Équipe Canada pour le succès sans précédent remporté dans la prospection d'excellentes occasions d'affaires pour les Canadiens dans les pays du Pacifique.

Le dernier succès remporté est l'obtention pour le Canada, par le premier ministre, d'une place au sein de l'APEC, l'Organisation de coopération économique Asie-Pacifique. Cela nous donnera un accès privilégié aux marchés qui connaissent la croissance la plus rapide dans le monde.

L'Équipe Canada compte des dirigeants d'entreprises et de gouvernements de toutes les régions du Canada et son succès prouve qu'un effort d'équipe est beaucoup plus efficace que toute action isolée de la part d'une province ou d'un territoire.

Lorsque le Comité mixte spécial de la politique étrangère du Canada déposera son rapport cet après-midi, les députés verront que les affaires étrangères sont de moins en moins une chasse gardée du gouvernement fédéral et deviennent un domaine où le travail d'équipe prend de plus en plus d'importance.

* * *

LA SENSIBILISATION AUX TOXICOMANIES

Mme Hedy Fry (Vancouver-Centre, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à signaler la Semaine de sensibilisation aux drogues et la Semaine nationale de sensibilisation aux toxicomanies.

En tant que représentante d'une circonscription située dans le centre d'une grande ville et en tant que médecin, j'ai vu de mes yeux vu le potentiel destructeur des toxicomanies. J'encourage tous les Canadiens à participer aux activités qui, dans leur milieu, visent à promouvoir la compréhension et la sensibilisation à l'égard des drogues.

Avec l'aide financière de la Stratégie canadienne antidrogue, des programmes communautaires ont cherché à la base des solutions locales à des problèmes locaux. Cela permet à tous les Canadiens d'en apprendre le plus possible sur les toxicomanies. J'exhorte tout le monde à y participer dès maintenant.

* * *

(1410)

LE TOURISME

M. Dennis J. Mills (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, plus tôt ce mois-ci, le ministre de l'Industrie, M. John Manley, huit ministres provinciaux du Tourisme et 20 membres émérites de l'industrie touristique canadienne ont entrepris une mission de neuf jours au Japon. La visite comprenait la participation à la première conférence internationale des ministres du Tourisme, à Osaka, et à la deuxième conférence Canada-Japon du tourisme, à Minabe.

À la conférence Canada-Japon, le ministre a présenté la réponse du Canada au défi touristique japonais de s'efforcer en collaboration de tripler le nombre des Japonais qui visitent chaque année le Canada. Mise au point avec la participation d'une importante brochette d'intervenants du secteur touristique, la réponse représente le genre de collaboration qui sera essentielle à l'avenir au succès de notre industrie touristique.

Nous sommes impatients de voir mener à bien cette entreprise. Elle rapportera au Canada des recettes annuelles additionnelles évaluées à un milliard de dollars et la création de plus de 20 000 emplois tant pour les jeunes qui cherchent un premier emploi que pour les personnes qui souhaitent réintégrer le marché du travail.

* * *

[Français]

LA MIL DAVIE

M. Antoine Dubé (Lévis, BQ): Monsieur le Président, nous apprenons aujourd'hui que le chantier naval de la MIL Davie à Lévis subira 300 nouvelles mises à pied vendredi, de sorte qu'il ne restera bientôt que 400 employés au travail.

Le gouvernement fédéral est directement responsable de ces mises à pied. Son inaction dans le dossier du traversier des Îles-de-la-Madeleine démontre clairement son insensibilité envers la situation de l'emploi au Québec.

Le ministre des Transports s'amuse même à créer de la confusion dans ce dossier. On ne sait plus qui, de lui ou de son confrère de l'Industrie, est véritablement le ministre responsable. Le gouvernement fédéral a exigé, en 1986, que l'industrie des chantiers maritimes du Québec mette de l'ordre dans ses rangs. C'est fait. Il ne reste plus qu'un seul grand chantier au Québec. À Ottawa maintenant de faire sa part pour la survie et le développe-

7804

ment de MIL Davie, comme il s'est engagé à le faire lors des élections.

* * *

[Traduction]

L'AGENCE DE PROMOTION ÉCONOMIQUE DU CANADA ATLANTIQUE

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement libéral dépense notre argent de la même façon que le faisaient les conservateurs. Prenons par exemple la subvention de 22 300 $ accordée par l'Agence de promotion économique du Canada atlantique pour étudier la gelée de bleuets.

Pour examiner l'utilité de cette subvention, j'ai communiqué avec une spécialiste de la fabrication de la gelée, ma mère. Sans que cela ne coûte un cent aux contribuables, elle m'a dit ceci: «Lave bien les bleuets, mon garçon. Ajoute de l'eau et fais-les cuire lentement jusqu'à ce qu'ils soient tendres. Passe-les à l'étamine. Fais-les bouillir rapidement pendant cinq minutes. Mesure ensuite le jus et ajoute une quantité égale de sucre. Refais bouillir le mélange rapidement jusqu'à ce qu'il se transforme en gelée.»

Il ne faut plus permettre aux libéraux de dépenser 22 300 $ pour des choses aussi ridicules. Quand le gouvernement va-t-il enfin se rendre compte que de telles dépenses inutiles nous conduiront droit au désastre?

Notre dette croît plus rapidement que les bleuets dans une bleuetière, atteignant maintenant 538 307 766 417,60 $.

* * *

L'ENSEIGNEMENT POSTSECONDAIRE

M. Bill Blaikie (Winnipeg Transcona, NPD): Monsieur le Président, dans son livre vert sur la réforme de la sécurité sociale, le gouvernement libéral nous dit que nous devons permettre à un plus grand nombre de Canadiens d'avoir accès à l'enseignement supérieur. Pourtant, il propose que les étudiants d'aujourd'hui paient des frais de scolarité beaucoup plus élevés que ceux qu'ont dû payer leurs parents.

C'est comme si Walmart essayait d'attirer de nouveaux clients en haussant ses prix. Ce que les libéraux nous disent en réalité, c'est qu'ils veulent que les universités et collèges du Canada deviennent comme les magasins Holt Renfrew. La plupart des étudiants devront alors se contenter de rêver à ce qu'ils feraient s'ils avaient les moyens de fréquenter ces établissements réservés à une élite.

Les libéraux aiment répéter le slogan des réformistes selon lequel nous devons réduire le déficit si nous ne voulons pas hypothéquer l'avenir de nos enfants. Pourtant, ils vont tout à fait à l'encontre de ce slogan en demandant aux étudiants d'aujourd'hui de payer des frais de scolarité considérablement plus élevés et, en tant que futurs contribuables, de rembourser la dette accumulée par les générations antérieures.

L'avenir des étudiants qui doivent emprunter pour payer des frais de scolarité plus élevés sera doublement hypothéqué, car ils devront rembourser leur dette d'études et rembourser la dette publique que leur auront laissée les générations antérieures.

* * *

(1415 )

L'ÉDUCATION

M. Harold Culbert (Carleton-Charlotte, Lib.): Monsieur le Président, ce soir, 15 novembre 1994, se tiendra sur le campus de Woodstock du Collège communautaire du Nouveau-Brunswick, un banquet, dont Mike Duffy sera le conférencier invité, pour célébrer le 10e anniversaire de l'établissement. Il s'agit non seulement du 10e anniversaire de cet établissement, mais aussi du 75e anniversaire de la formation et de l'enseignement professionnels dans la région, dont les débuts remontent à la fondation de l'École technique du comté de Carleton, il y a environ 75 ans.

Ce genre d'éducation et de formation à caractère communautaire s'est révélé fructueux depuis 75 ans, et jamais son importance n'a été plus grande qu'aujourd'hui. À en juger d'après la concurrence grandissante dans le monde entier, il est impérieux que les collèges communautaires demeurent un élément important de notre système d'éducation.

Je profite de l'occasion pour féliciter le comité organisateur des célébrations d'anniversaire, le personnel de l'administration et les étudiants ainsi que tous ceux qui ont contribué à mettre sur pied cet établissement, de même que ceux qui en ont assuré le succès au fil des années.

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7804

QUESTIONS ORALES

[Français]

LE COLLÈGE MILITAIRE ROYAL DE SAINT-JEAN

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, après avoir rejeté la proposition du Québec visant à maintenir la vocation militaire du Collège de Saint-Jean, le gouvernement fédéral reçoit maintenant du nouveau maire de la ville de Saint-Jean la suggestion d'un moratoire de trois ans quant à la fermeture du collège.

Ma question s'adresse au ministre des Affaires intergouvernementales. Puisqu'un moratoire aurait le mérite de permettre la poursuite des discussions entre partenaires, le ministre ne croit-il pas devoir agréer à la demande du maire de Saint-Jean?

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre chargé du Renouveau de la fonction publique, Lib.): Monsieur le Président, il faut se rappeler deux choses. La première, c'est que chaque année pendant laquelle nous gardons ouvert le présent Collège de Saint-Jean alors que nous n'en n'avons plus besoin coûte 23 millions de dollars aux contribuables. Cela représente donc, sur trois ans, près de 70 millions de dollars.

M. Plamondon: C'est faux!

M. Massé: La deuxième, c'est que nous avons maintenant une entente avec le gouvernement du Québec qui nous permet de garder ouvert le Collège de Saint-Jean et d'en faire une institution civile. C'est l'accord que nous avons présentement et que nous désirons mettre en oeuvre.


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L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, le ministre sait que les aménagements actuels de Kingston n'ont pas la capacité d'absorber, à la date prévue, une augmentation de 600 à 1 200 élèves-officiers qui va être rendue nécessaire par la fermeture des collèges de Saint-Jean et de Victoria.

Je lui demande donc comment il ne peut pas voir, dans un tel contexte, qu'il y a un très grand avantage à accepter le moratoire proposé par le maire de Saint-Jean?

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre chargé du Renouveau de la fonction publique, Lib.): Monsieur le Président, les plans qui ont déjà été faits pour accueillir les 300 élèves supplémentaires à Kingston nous permettent d'occuper des baraques de CFB Kingston qui, à présent, sont inoccupées. Par conséquent, le coût est minimal et d'ici trois ans, nous allons être revenus à un niveau de 900 élèves.

Dans les circonstances, ce qui fait du sens, c'est de concentrer les étudiants à Kingston, parce que notre armée a diminué et nous n'avons plus besoin de trois collèges. Nous devons maintenant utiliser à fond le Collège de Kingston qui est le seul dont nous ayons besoin.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, je crois qu'il y a un véritable pattern dans la conception que le gouvernement fédéral a du genre d'établissement d'éducation qu'il faut mettre à la disposition des francophones à Kingston. Pour les élèves-officiers francophones qui vont quitter Saint-Jean, des baraquements, pour les élèves de l'école Marie-Rivier, des baraquements et des toilettes de l'autre bord de la rue. Il y a comme un modèle là que nous ne saurions trop déplorer.

Je voudrais, avant de commettre l'irréparable, demander au ministre s'il ne reconnaît pas qu'il devrait faire preuve d'un peu de flexibilité et saisir l'occasion qui lui est donnée de décréter un moratoire d'au moins un an. Réalise-t-il que beaucoup de gens au Québec et au Canada attendent de lui qu'il accepte la trêve que l'opposition officielle lui propose aujourd'hui et prenne le temps d'amorcer, avec les intéressés, un véritable dialogue constructif?

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre chargé du Renouveau de la fonction publique, Lib.): Monsieur le Président, le chef de l'opposition a raison quand il dit qu'il est temps de faire une trêve, de voir le bon sens, d'avoir un compromis. Or, ce compromis, nous l'avons déjà. Nous avons fait un compromis avec le gouvernement du Québec. Nous avons conclu une entente qui permet une certaine présence militaire sur le campus de Saint-Jean et qui permet la continuation du Collège de Saint-Jean.

(1420)

Voici l'entente, elle a été signée par Daniel Johnson, le premier ministre du Québec à ce moment-là. Nous avons une entente, que l'opposition nous permette de la mettre en oeuvre.

* * *

LA MIL DAVIE

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ): Monsieur le Président, pendant que le gouvernement continue de tergiverser dans le dossier de construction du traversier des îles de la Madeleine, on apprend la mise à pied de 300 travailleurs de la MIL Davie dès vendredi. Ces 300 mises à pied s'ajoutent aux 200 autres annoncées récemment. Rappelons que le chantier employait plus de 3 700 travailleurs en 1992 et qu'il n'y en aura plus que 400 d'ici Noël.

Le ministre des Transports convient-il qu'avec 300 mises à pied additionnelles, une décision du gouvernement fédéral commence à presser si l'on veut maintenir en vie le dernier grand chantier maritime québécois?

[Traduction]

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, le député semble encore une fois laisser sous-entendre que la société MIL Davie est confrontée à un seul problème, soit l'obtention d'un contrat pour la construction d'un traversier.

Si le député faisait mieux ses recherches, il saurait que, sous réserve de l'approbation d'un plan d'entreprise par l'actionnaire de MIL Davie et de la coopération des syndicats de cette entreprise, il est possible que des contrats de transition soient utiles, mais que ce n'est pas nécessairement le cas.

En essayant de lier l'avenir de cette société à un seul contrat, le député montre qu'il comprend très mal la complexité des problèmes avec lesquels ce chantier maritime est aux prises.

[Français]

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ): Monsieur le Président, comment le ministre de l'Industrie peut-il justifier son attitude de se réfugier derrière le plan d'affaire de la MIL Davie au moment où le gouvernement québécois lui propose par écrit de s'impliquer concrètement dans le financement de la construction du traversier des îles de la Madeleine?

[Traduction]

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je comprends mal le raisonnement du député, qui est un représentant élu à la Chambre des communes et, partant, qui est un des administrateurs de l'argent des contribuables, quand il dit que nous nous réfugions derrière l'exigence d'un plan d'entreprise pour ne pas investir de deniers publics dans une entreprise privée dont l'actionnaire principal est le gouvernement du Québec.

Soyons réalistes au sujet des solutions qui s'offrent à cette société et à toutes les autres qui sont aux prises avec des problè-


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mes d'adaptation aux changements qui se produisent dans le monde. Cette entreprise, comme les autres, survivra si elle devient concurrentielle, si elle produit des biens qui trouvent des acheteurs, et non pas si elle obtient un contrat pour l'aider à se tirer provisoirement d'embarras.

Il faut s'attaquer aux vrais problèmes pour trouver de vraies solutions.

* * *

LA COMMISSION DE L'IMMIGRATION ET DU STATUT DE RÉFUGIÉ

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, sur tous les plans, on peut diviser les membres de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié en au moins deux camps: les membres nommés par les conservateurs et dirigés par la présidente, Mme Mawani, et ceux qui ont été nommés par les libéraux, l'ami du ministre en tête, M. Schelew.

Il y a eu des fuites de documents, le contenu de conversations confidentielles a été divulgué et la Loi sur la protection des renseignements personnels a été jetée par-dessus bord. Tout ce remue-ménage à la CISR est attribuable au mode de nomination, qui laisse sévir le favoritisme et les querelles politiques.

Le ministre n'admettra-t-il pas qu'il faut affranchir la CISR de tout favoritisme politique et mettra-t-il en place un processus plus digne de confiance pour traiter les demandes des immigrants et des réfugiés?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, notre gouvernement a nommé beaucoup de personnes dignes de confiance, expérimentées et intègres. À tel point que le secrétaire de presse du chef du Parti réformiste aurait dit plus tôt cette année, selon le Toronto Star: «Beaucoup de Canadiens seront heureux de constater que, en ce qui concerne les nominations, les promesses électorales ont été honorées, car les nominations se font plus en fonction de la valeur des candidats que de leurs relations politiques.»

(1425)

Le système est tout de même loin d'être parfait. Nous avons proposé un certain nombre de réformes dont l'organisme est maintenant saisi et qui ont été soumises à l'équipe qui revoit les programmes sous la direction du ministre des Affaires intergouvernementales. Si le chef de l'opposition a d'autres recommandations à faire, c'est avec plaisir que nous en prendrons connaissance.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, parlons de l'une de ces nominations. L'ami du ministre, M. Schelew, est accusé d'avoir essayé de forcer des membres de la commission à rendre des décisions qui vont à l'encontre de leur jugement. Lorsqu'on a envisagé de faire enquête, il a essayé d'influencer ses accusateurs au moyen de renseignements que le ministère lui a procurés.

Il y a sûrement là motif à renvoyer cette personne. Le ministre va-t-il demander à son ami de démissionner ou approuve-t-il le comportement de cette personne qu'il a lui-même nommée?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, nous avons été d'une ouverture totale. Lorsque j'ai reçu les allégations, je n'ai rien dissimulé. Je les ai transmises à la présidente de la commission et je lui ai demandé de les examiner.

J'ai reçu le rapport de la présidente, qui formule des recommandations. J'ai demandé au vice-président de commenter ces recommandations, et il m'a répondu. D'ici à la fin de la semaine, nous allons prendre la décision appropriée, en nous fondant sur les faits.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, au cabinet du ministre, l'application de la Loi sur la protection des renseignements personnels semble faire problème.

Hier, le ministre de la Justice a dit qu'il ne pouvait divulguer les détails de l'avis que son juriste a donné au ministre de l'Immigration dans l'affaire Schelew parce que «le ministère de la Justice n'a pas l'habitude de divulguer publiquement les avis qu'il donne aux ministères clients.» Il semble que le ministère de l'Immigration ait au contraire l'habitude de divulguer des renseignements confidentiels au moindre prétexte, surtout lorsque c'est dans l'intérêt de l'ami du ministre.

Je demande donc au ministre de la Justice s'il y a deux normes au Canada quant au respect des renseignements confidentiels, l'une lorsqu'il s'agit de protéger les ministres et l'autre lorsqu'il s'agit de simples citoyens.

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, je rejette d'emblée ces allégations incendiaires, tendancieuses et dénuées de tout fondement.

Les noms ont été communiqués par un avocat du ministère de la Justice à l'avocat du vice-président. Nous avons demandé un avis juridique au contentieux du ministère de la Justice. Nous avons reçu cet avis et nous avons agi dans le respect de la loi.

* * *

[Français]

LES CHANTIERS MARITIMES

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie.

En 1986, le gouvernement fédéral demandait au Québec de rationaliser les activités de ses chantiers maritimes. Quatre-vingt-dix pour cent de toute la rationalisation des chantiers maritimes au Canada s'est faite au Québec, ce qui s'est traduit par la fermeture de la Versatile Vickers à Montréal et de Marine Industries à Sorel, entraînant la perte de 1 700 emplois.


7807

Faut-il voir dans l'inaction d'Ottawa au sujet du traversier des îles sa volonté de finir la job commencée dans les années 1980 et de provoquer volontairement la fermeture du dernier grand chantier maritime au Québec?

[Traduction]

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais que le Bloc québécois explique quels sont les plans de l'actionnaire de la MIL Davie pour son chantier maritime. Je puis donner au député l'assurance que j'ai travaillé avec M. Véronneau, président de la MIL Davie, et avec le gouvernement provincial précédent pour trouver une solution aux problèmes qui accablent cette entreprise.

Cependant, comme je l'ai dit au député qui a posé la question précédente, on ne réglera pas ces problèmes en dénichant simplement un contrat à octroyer de façon ponctuelle. Si c'était là la solution aux problèmes de l'entreprise, ceux-ci auraient été réglés depuis longtemps, car une série de contrats lui a été octroyée.

Le défi pour la MIL Davie, comme pour le reste du secteur manufacturier canadien, c'est de devenir concurrentiel dans un monde où le marché pour les produits manufacturés, notamment les navires, est d'envergure mondiale. Puisque le marché national canadien ne suffit pas à assurer la survie d'un chantier naval, celui-ci doit être concurrentiel.

(1430)

Si nous pouvons relever ce défi, nous réussirons, à la MIL Davie comme ailleurs. Mais c'est là un défi fondamental à relever, et l'octroi d'un seul contrat ne suffira pas à résoudre le problème.

[Français]

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Monsieur le Président, en question complémentaire, si on comprend bien la logique du ministre, il vient de nous annoncer que MIL Davie doit fermer. Ma question complémentaire s'adresse au ministre des Transports. Doit-on comprendre que c'est pour camoufler sa stratégie de fermer la MIL Davie au profit de la Saint John Shipbuilging de sa province que le ministre des Transports a décidé de transférer récemment le dossier du traversier à son collègue de l'Industrie?

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, ça fait plusieurs mois qu'on essaie d'expliquer aux députés de l'opposition qu'en ce qui a trait au traversier entre les Îles de la Madeleine et l'Île-du-Prince-Édouard, il s'agit d'une situation que Transports Canada doit régler avec l'opérateur du service, qui reçoit chaque année un subside pour fournir le service à ceux qui veulent se prévaloir des services du traversier.

En ce qui concerne la MIL Davie et la construction d'un navire, cela a affaire avec la question de l'industrie, de la création d'emplois au Québec, et on comprend très bien la différence entre les deux dossiers. J'espère qu'avec le temps, peut-être après un an ou deux, mes honorables collègues du Bloc comprendront la différence aussi.

* * *

[Traduction]

LA COMMISSION DE L'IMMIGRATION ET DU STATUT DE RÉFUGIÉ

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, le ministre de l'Immigration avait promis qu'il déciderait du sort de son ami M. Schelew hier au plus tard. Hier est passé et aucune mesure n'a été prise, si ce n'est la publication des noms des personnes qui ont accusé M. Schelew.

Le ministre est au courant de la situation depuis septembre. A-t-il tardé si longtemps à prendre des mesures pour donner la possibilité à M. Schelew de persuader les commissaires de renoncer à leurs plaintes?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, la réponse est simple, absolument pas.

J'ai demandé au vice-président de répondre au rapport de la présidente. Je n'ai reçu la réponse en question à mon bureau que tard jeudi. Je ne l'ai lue que vendredi soir.

Je n'ai jamais promis qu'une décision serait prise lundi au plus tard. J'ai le rapport de la présidente et une longue réponse à ce rapport. Je réfléchis à cette affaire et prends conseil à ce sujet. Je prendrai une décision d'ici à la fin de la semaine.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, le rapport confidentiel rédigé contre Schelew fait état de mois d'intimidation et de menaces voilées. On y mentionne des liens d'amitié entre le ministre et Schelew. On y rapporte que Schelew aurait dit aux commissaires de ne pas tenir compte des mensonges que leur racontent les demandeurs du statut de réfugié parce que «tout le monde ment».

Le ministre laisse sans aucune raison partir de la commission des personnes nommées par les conservateurs, comme Greg Fyffe. Pourquoi a-t-il choisi de protéger Schelew au détriment des commissaires et de l'intégrité de tout le processus de détermination du statut de réfugié?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, au lieu de s'en tenir aux faits, le député préfère exploiter la situation pour se faire du capital politique.

Je répète au député que j'ai demandé à la présidente de me faire un rapport, ce qu'elle a fait. J'ai demandé au vice-président, par l'intermédiaire d'un avocat du ministère de la Justice, ce qu'il avait à répondre et ce qu'il pensait de la recommandation.

J'ai été saisi de ces deux documents. Je réfléchis à la preuve qu'ils renferment, puis je prendrai une décision. C'est aussi simple que ça. Je suis désolé de décevoir le député. Mais c'est très simple et très direct. Personne ne cache quoi que ce soit.


7808

[Français]

LE TIMOR ORIENTAL

M. Nic Leblanc (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères. Le Timor oriental est occupé depuis 1975 par l'Indonésie. Environ 200 000 personnes seraient mortes, suite à des répressions qui sévissent toujours dans ce pays. En 1991, le premier ministre actuel demandait que le Canada fasse des pressions pour appliquer les résolutions des Nations Unies, exigeant que l'Indonésie se retire du Timor.

Comment le ministre des Affaires étrangères peut-il expliquer le silence du premier ministre sur cette question, lors de son passage en Indonésie?

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, il me fait plaisir d'informer l'honorable député que de fait, la question du Timor oriental a fait l'objet de discussions entre le président Suharto et le premier ministre Chrétien.

(1435)

M. Nic Leblanc (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, chaque jour, au Timor oriental, je crois que le ministre le sait, selon Amnistie Internationale, des gens sont victimes de répression, de brutalité et même d'assassinat. Le ministre peut-il nous dire comment le premier ministre, qui est actuellement en Indonésie, peut renier ses engagements passés et laisser filer une si belle occasion de faire progresser le respect des droits de la personne?

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je pense que les propos de l'honorable député sont totalement sans fondement. Le premier ministre a de fait annoncé, à l'occasion de sa visite en Indonésie, que le gouvernement du Canada, par l'entremise de l'Agence canadienne de développement international, financera un projet avec Care Canada pour aider les populations du Timor oriental.

* * *

[Traduction]

LES SOINS DE SANTÉ

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, la ministre de la Santé a récemment semoncé l'Alberta au sujet de ses cliniques de soins privées et des frais d'utilisation qui y sont imposés. La ministre peut-elle nous expliquer la différence entre les frais d'utilisation qui sont imposés en Alberta et ceux qui sont imposés ailleurs au Canada?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député d'avoir posé cette question. Je peux fournir quelques explications.

La Loi canadienne sur la santé dispose que les provinces doivent offrir les services de santé assurés selon des modalités uniformes et ne pas faire obstacle, directement ou indirectement, et notamment par facturation aux assurés, à un accès satisfaisant par eux à ces services.

Certaines des cliniques en cause bénéficient de fonds publics du fait que les honoraires des médecins sont payés. La population n'a donc pas un accès libre aux services qu'elle paie puisque certains Canadiens ne peuvent acquitter les frais d'utilisation de ces cliniques.

Cette question préoccupe beaucoup le gouvernement. Nous ne voulons pas d'un régime d'assurance-santé qui privilégie les gens riches et bien portants aux dépens des malades et des Canadiens ordinaires.

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, les cliniques privées fonctionnent sur le même principe partout au Canada. Prenons, par exemple, le Mediclub Montreal qui effectue des examens de santé pour des dirigeants d'entreprise. Les cliniques d'avortement de sept provinces imposent des frais de 200 à 500 $ alors que les honoraires des médecins sont financés par des fonds publics.

Pourquoi avoir deux poids et deux mesures dans le cas de l'Alberta? Bonne chance!

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, l'imposition de frais d'utilisation lorsque des fonds publics interviennent m'inquiète toujours. Ce gouvernement entend préserver un régime qui a servi les Canadiens à merveille.

Les Canadiens ordinaires nous ont élus pour préserver ce régime et c'est précisément ce que nous faisons.

* * *

[Français]

L'ASSURANCE-CHÔMAGE

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines. Le ministre a réitéré hier son intention de faire des travailleurs précaires des chômeurs de seconde classe qui se verraient verser des prestations réduites, fondées sur le revenu familial, ou même pas de prestations du tout dans certains cas.

Comment le ministre peut-il proposer d'obliger des travailleurs à payer des cotisations d'assurance-chômage pour ensuite leur enlever le droit de bénéficier des prestations?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, comme le sait la députée, ce qui a été rendu public hier, c'est un document technique. Je lui rappelle que, au commencement du débat sur la réforme des programmes sociaux, le chef de son parti demandait, furieux, que nous fournissions des données sur les répercussions des différentes options.

Nous avons maintenant fourni ces données. J'imagine que le Bloc québécois n'aime pas ce que disent ces données.

Ce ne sont que des faits, des renseignements. Nous savons que le Bloc québécois n'aime pas trop avoir à affronter les faits. Nous le constatons chaque jour à la Chambre, mais ce sont des faits, et


7809

je demande à la députée de réfléchir sérieusement à ce qu'ils signifient et à leurs répercussions.

(1440)

[Français]

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, le ministre réalise-t-il qu'il remet en question une fois de plus l'autonomie financière des femmes, durement acquise, en proposant l'évaluation du revenu familial pour déterminer le droit aux prestations d'assurance-chômage?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, l'analyse révèle, par exemple, que dans ma province, le Manitoba, il y a plus de 600 utilisateurs fréquents de l'assurance-chômage qui ont des revenus supérieurs à 75 000 $.

Il y a beaucoup d'honnêtes travailleurs qui versent de l'argent durement gagné en cotisations et il y a des gens qui n'en ont pas besoin qui les récupèrent sous forme de prestations. Nous demandons tout simplement aux Canadiens s'ils croient que c'est juste. Croient-ils qu'il est juste que des gens qui gagnent des revenus de plus de 100 000 $ reçoivent les prestations maximales d'assurance-chômage que des travailleurs qui gagnent 15 000 ou 20 000 $ par année paient? Je demande à la députée si elle croit que c'est juste.

* * *

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Jim Jordan (Leeds-Grenville, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice et a trait au nouveau projet de loi visant à réglementer les armes à feu qu'on se propose de présenter.

Même si cela constitue une légère intrusion dans ma vie privée, je suis disposé à faire enregistrer mes armes à feu si j'y suis obligé. Si l'on imposait un droit d'enregistrement élevé, cela aurait cependant pour effet de réduire le niveau de coopération et de respect de la loi dont le ministre aura besoin s'il veut mettre sa loi en application.

Le ministre peut-il me donner l'assurance que, s'il devient obligatoire de faire enregistrer ses armes à feu, cela se fera à un coût très modeste pour le propriétaire?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Comme mon collègue le sait sans doute, monsieur le Président, nous sommes encore en train de mettre au point des propositions dont nous saisirons la Chambre d'ici quelques semaines concernant les armes à feu.

Si nous décidions d'instituer un système d'enregistrement, cela se ferait uniquement à condition qu'on puisse établir un tel système à un coût raisonnable, que le système soit sûr pour ce qui est de stocker et d'extraire de l'information et qu'il occasionne pour le propriétaire d'arme à feu une dépense qui reste raisonnable. Le député a parlé d'un coût modeste et c'est exactement notre objectif.

* * *

LES PARLEMENTAIRES

M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead, Réf.): Monsieur le Président, le ministre des Finances a demandé à maintes reprises qu'on lui suggère des moyens de réduire le déficit. Nous avons formulé au fil des années de nombreuses suggestions pour réduire les dépenses publiques. En voici une autre.

La vice-première ministre donnera-t-elle l'exemple et agira-t-elle dès maintenant, avant le 21 novembre, pour réformer le régime de retraite incroyablement généreux des parlementaires?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre a déjà dit à la Chambre qu'il avait l'intention de saisir la Chambre d'une mesure à cet égard avant la fin de l'année.

M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead, Réf.): Monsieur le Président, je le demande à la vice-première ministre, quand? Quand donc?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, je pense avoir répondu à la question: bientôt, très bientôt.

* * *

[Français]

LES MÉDICAMENTS BREVETÉS

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Santé. Hier, j'ai tenté de connaître la position de la ministre quant à la révision de la loi C-91 sur la protection des médicaments brevetés et elle a laissé au ministre de l'Industrie l'occasion de refaire son baratin habituel à l'effet que la loi C-91 prévoit une révision de ses dispositions dans un délai donné.

Ce qu'on veut savoir de la ministre, qui est encore responsable de la Santé, c'est si elle entend défendre la protection des médicaments brevetés ou si elle souhaite un changement de réglementation comme plusieurs de ses collègues de l'Ontario. Ce qu'on veut savoir, c'est sa position à elle, comme ministre de la Santé.

(1445)

[Traduction]

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, les députés du Bloc québécois semblent avoir de la difficulté à comprendre que, dans le cadre du partage des responsabilités ministérielles, certains assument les responsabilités qui leur incombent.

Quant à la Loi sur les brevets, elle relève du ministère de l'Industrie. Si les députés veulent poser au gouvernement des questions concernant la Loi sur les brevets, c'est moi qui leur répondrai. J'espère que je serai aussi cohérent dans mes réponses que l'a prétendu la députée qui a posé la question.


7810

[Français]

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, il est clair que la ministre de la Santé a visiblement reçu l'ordre de ne pas prendre position, mais j'aimerais lui rappeler qu'elle ne peut nier sa responsabilité quant à l'homologation des nouveaux médicaments.

La ministre réalise-t-elle que son refus de prendre position sur la question des médicaments brevetés accroît le climat d'incertitude et constitue un encouragement tacite à ceux qui veulent la disparition de la protection des nouveaux médicaments?

[Traduction]

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, une brève leçon de droit constitutionnel serait peut-être de mise.

Comme les députés bloquistes le comprendront, le gouvernement a une position, contrairement au Bloc qui semble n'en avoir aucune.

Si je comprends bien, la porte-parole du Bloc québécois en matière de santé dit qu'elle veut un changement. Elle parle du coût des soins de santé. J'aimerais bien comprendre sa position sur cette question. Si elle veut prendre la parole et me l'expliquer, je me ferai un plaisir de l'écouter.

* * *

L'INDUSTRIE FORESTIÈRE

M. Bill Gilmour (Comox-Alberni, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères. Au cours de la dernière année, le gouvernement fédéral et la Colombie-Britannique ont dépensé de l'argent en Europe pour défendre les méthodes d'exploitation forestière canadiennes.

Par contre, en contradiction flagrante avec les mesures que je viens d'expliquer, le ministère dont le ministre a la responsabilité a financé, par l'entremise de l'ACDI, des groupes environnementaux canadiens qui discréditent activement les méthodes d'exploitation forestière de la C.-B. en Amérique du Nord et en Europe.

Pourquoi le gouvernement finance-t-il des groupes dont l'objectif premier est de délibérément nuire à l'industrie forestière canadienne?

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à dire au député que sa question est tout à fait légitime. Je vais immédiatement me renseigner et déterminer si ses allégations sont fondées.

Si elles le sont, je puis lui donner l'assurance que nous cesserons de financer pareilles activités.

* * *

L'ENVIRONNEMENT

L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Pêches et des Océans. En 1990, le gouvernement de l'époque avait promis de présenter un document de travail et de présenter ensuite à la Chambre une mesure législative sur les océans. Or, ni le document de travail ni le projet de loi n'ont été présentés.

Ce projet de loi devait protéger la qualité des eaux côtières et des océans. Étant donné l'importance des trois océans pour le bien-être du Canada, le ministre pourrait-il nous dire si l'on va ou non présenter à la Chambre une loi sur les océans?

L'hon. Brian Tobin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de sa question. En fait, le député de Davenport est reconnu, à juste titre, comme l'un des plus ardents défenseurs de l'environnement au Canada, à l'heure actuelle.

Je suis ravi de dire au député que le gouvernement donnera suite à la recommandation du rapport du NABST concernant la présentation d'une loi sur les océans. Nous avons l'intention de publier, dès demain, un document de travail qui exposera notre vision de la gestion des océans. Nous pourrons ainsi entendre le point de vue des gens des côtes et de toutes les personnes qui s'inquiètent de la santé de nos océans.

Dès que nous le pourrons, nous présenterons une nouvelle loi canadienne sur les océans.

* * *

(1450)

[Français]

L'EMBARGO SUR LES ARMEMENTS EN EX-YOUGOSLAVIE

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères. La décision américaine de ne plus participer au contrôle de l'embargo sur les armes à destination de l'ex-Yougoslavie a suscité de vives réactions chez les Alliés, laissant éclater une division au sein de l'OTAN et des pays du Groupe de contact sur l'ex-Yougoslavie. Le conseil de l'OTAN, qui s'est réuni ce matin à Bruxelles, insiste sur la solidarité nécessaire au sein de l'Alliance.

Le ministre peut-il nous dire quelle est la position du Canada sur la question de l'embargo en ex-Yougoslavie?

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je peux rassurer l'honorable député, à l'effet que le Canada continue à croire qu'il est très important de maintenir un embargo sur les armements en ex-Yougoslavie. La décision prise par les Américains est une décision qui ne met pas en péril la poursuite de cet embargo, puisque d'autres pays, particulièrement des pays qui ont des troupes sur le territoire, pourront suppléer et maintenir de façon efficace l'embargo sur les armes.

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, le ministre peut-il nous dire s'il envisage de revoir la participation du Canada à la mission de l'ONU en ex-Yougoslavie, dans le cas où les États-Unis maintiendraient leur décision?

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je viens de répondre à l'honorable député que la décision américaine ne met pas en péril le maintien de l'embargo sur les armements. Il est certain, cependant, que si les Nations Unies venaient à prendre une décision à l'effet de lever l'embargo sur les armements, dans une telle éventualité, le


7811

Canada a déjà indiqué, par la voix du premier ministre, que nous retirerions nos troupes et nous ne sommes pas seuls à avoir exprimé une telle opinion.

Les Français et les Anglais, qui avec nous, ont le plus de troupes impliquées dans la force de paix dans l'ex-Yougoslavie, ont exprimé la même opinion. Mais, pour le moment, nous pensons que cet embargo peut être maintenu et que les contrôles peuvent être efficaces, de nature à ne pas compromettre la mission des Nations Unies.

* * *

[Traduction]

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, ce week-end, le ministre de la Justice a de nouveau dit souhaiter établir un système universel d'enregistrement des armes à feu au Canada.

Le ministre va-t-il admettre que, depuis la mise en oeuvre d'un système universel d'enregistrement des armes de poing au Canada, l'utilisation de ces armes à des fins criminelles a augmenté? Va-t-il reconnaître ce paradoxe?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, oui, mais, si vous me le permettez, je voudrais dire que je ne crois pas que cela permette d'en arriver logiquement à la conclusion que cela prouve qu'il est inutile d'enregistrer toutes les armes à feu au Canada.

Je voudrais préciser que l'utilisation des armes de poing à des fins criminelles, depuis quelques années, est un phénomène qu'on constate surtout dans les centres urbains et que cette situation découle de l'entrée au pays d'armes illégales en contrebande.

Notre proposition portera notamment sur les façons d'empêcher l'entrée d'armes illégales au pays. Nous ne parviendrons jamais à le faire parfaitement, mais nous pouvons améliorer la situation actuelle.

De plus, je voudrais dire très brièvement, en ce qui a trait à l'enregistrement des armes d'épaule, qu'il faut se rappeler que, dans les régions rurales, le taux de mortalité attribuable à des armes à feu est supérieur à celui qui existe dans les régions urbaines et que cette situation découle principalement des armes d'épaule, pas des armes de poing.

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, le ministre de la Justice vient apporter de l'eau à notre moulin. Il faut mettre l'accent sur le contrôle de la contrebande et ce genre de choses.

Le professeur Garry Mauser de l'Université Simon Fraser, a publié un rapport qui estime que l'enregistrement universel des armes à feu au Canada coûtera au minimum un demi-milliard de dollars et que le coût total pourrait même aller jusqu'à un milliard de dollars.

Étant donné l'échec des programmes actuels d'enregistrement pour ce qui est d'enrayer la criminalité, ainsi que la situation financière catastrophique de notre pays, comment le ministre peut-il justifier d'envisager cette nouvelle initiative très coûteuse?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, si le gouvernement décidait d'adopter un système universel d'enregistrement, sitôt après avoir annoncé cela à la Chambre, j'enverrais à ce professeur de l'Université Simon Fraser une copie de l'analyse des coûts que nous avons effectuée.

Nous n'allons jamais mettre en oeuvre un système d'enregistrement aussi coûteux que cela.

(1455)

Quoi qu'il en soit, si notre gouvernement décide d'établir ce type de système, ce sera parce que notre objectif fondamental consiste à accroître la sécurité publique au Canada.

* * *

LE TRANSPORT DU GRAIN

M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD): Monsieur le Président, la position du gouvernement à l'égard des subventions au transport du grain comporte un certain nombre de contradictions que j'aimerais évoquer aujourd'hui.

Le ministre du Commerce international dit qu'il faut abolir la subvention du Nid-de-corbeau et que le plus tôt sera le mieux. Le ministre des Transports affirme vouloir que son ministère supprime la subvention. La semaine dernière, son sous-ministre a dit: «En ce qui concerne la subvention du Nid-de-corbeau, le gouvernement doit prendre une autre direction.» Même le ministre de l'Agriculture a reconnu la nécessité des compressions, tout en laissant entendre publiquement qu'il continue de défendre le maintien de la subvention du Nid-de-corbeau au Cabinet.

Voici ma question au ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire: Défend-il la subvention du Nid-de-corbeau contre les attaques? Est-il prêt aujourd'hui à s'exprimer clairement sur la question et à faire savoir aux agriculteurs des Prairies que le gouvernement fédéral a l'intention d'assurer le transport du grain par chemin de fer en maintenant la subvention du Nid-de-corbeau. . .

Le Président: Je donne la parole au ministre de l'Agriculture.

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, j'ai traité assez longuement de la question dans un discours que j'ai prononcé la semaine dernière au congrès annuel de l'Union des producteurs de grain qui a eu lieu à Calgary. Dans le souci d'économiser le temps précieux de la Chambre, je serai heureux de faire parvenir au député une copie de ce discours.

J'aimerais renseigner le député sur ce qui se passe actuellement. Comme le ministre des Transports et moi l'avions promis, il y a quelques mois, nous sommes engagés dans une dernière série d'entretiens avec des agriculteurs et des organisations agricoles au sujet des modifications à apporter à la Loi sur le transport du grain de l'Ouest. Plus tard aujourd'hui, j'aurai l'occasion d'en parler avec les ministres de l'Agriculture des Prairies. Au cours des deux prochains mois, le ministre des Transports et moi traiterons de la question avec toutes les grandes organisations agricoles de notre pays.

Notre objectif est d'arrêter la position du gouvernement à l'égard de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest pour que nous puissions formuler des propositions à nos collègues du Cabinet au début de la prochaine année.

7812

L'ÉDUCATION

Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Monsieur le Président, les étudiants ont participé très activement à quelque cent réunions publiques qu'ont tenues des députés dans tout le pays au cours des dernières semaines. Ces étudiants manifestent leur intérêt, sont préparés à débattre les questions et savent que le statu quo ne représente pas une option. Beaucoup d'entre eux m'ont dit qu'ils avaient besoin d'une meilleure transition entre l'école et le marché du travail, d'un meilleur accès à la formation en milieu de travail et de programmes plus équitables de remboursement des prêts aux étudiants.

Ma question au ministre du Développement des ressources humaines est la suivante: Quelles mesures concrètes prend-il pour faire en sorte que le régime d'enseignement postsecondaire réponde vraiment aux besoins des étudiants d'aujourd'hui?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, je remercie la députée de sa question.

Je voudrais souligner à la députée et à tous les autres députés qu'aujourd'hui même, au cours d'une réunion des 15 conseils sectoriels qui constituent des partenariats entre employeurs et employés, j'ai signé deux nouvelles ententes qui amèneront plus de 1 000 étudiants à suivre des stages de préparation au marché du travail. La première entente, en horticulture, vise les étudiants des collectivités rurales, tandis que l'autre, qui porte sur le tourisme, facilitera la formation des stagiaires autochtones dans ce domaine.

L'important dans tout cela, c'est que ce projet coûtera 18 millions de dollars. Par contre, grâce à ces partenariats, la contribution du gouvernement fédéral se réduira à la moitié de celle des autres partenaires. Cela donne à croire que le raisonnement selon lequel nous pouvons faire plus à des coûts moindres et offrir de meilleures possibilités de formation et d'éducation aux jeunes devient déjà une réalité.

* * *

[Français]

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, le ministre de la Justice déclarait en fin de semaine qu'il comptait déposer cet automne une législation pour resserrer le contrôle sur les armes à feu au Canada.

Le ministre de la Justice s'engage-t-il à simplifier et à rendre cohérents les règlements sur l'entreposage, la mise en montre et le transport des armes à feu pour qu'enfin le commun des mortels puisse les comprendre et les respecter?

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, les propositions tiendront compte de cet aspect; nous ferons tout notre possible pour simplifier la réglementation. Je suis bien conscient qu'il s'agit pour nous de faire en sorte que les Canadiens comprennent les exigences relatives à l'entreposage et s'y conforment.

Une très importante enquête se tient actuellement au Québec, dans le cadre de laquelle un coroner examine une douzaine de cas de décès, si je ne trompe, afin de voir s'il existe un lien entre les conditions d'entreposage et le suicide, entre autres choses.

Je suis conscient de cette nécessité. Nous ferons de notre mieux pour que les propositions permettent de mieux comprendre les exigences et de mieux les appliquer.

* * *

(1500)

LES SOINS DE SANTÉ

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, la ministre de la Santé n'a pas expliqué plus tôt pourquoi elle utilise des méthodes discriminatoires au sujet des frais dans les cliniques. Pourquoi menace-t-elle les cliniques en Alberta alors que des cliniques ont recours aux mêmes pratiques dans d'autres provinces?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de pouvoir apporter des éclaircissements au sujet de ce que j'ai dit. Je rappelle à la Chambre que lors de la dernière rencontre fédérale-provinciale des ministres à Halifax, neuf provinces à l'exception de l'Alberta ont accepté d'établir un cadre législatif pour répondre aux problèmes auxquels les cliniques font face. Nous attendons toujours la réponse de l'Alberta. Toutefois, je l'ai dit et je le répète, le gouvernement a été patient, mais sa patience touche à sa fin.

Le Président: Conformément à un ordre adopté le 14 novembre, nous revenons maintenant au dépôt de rapports de comités.

_____________________________________________


7812

AFFAIRES COURANTES

[Français]

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

EXAMEN DE LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE DU CANADA

M. Jean-Robert Gauthier (Ottawa-Vanier, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter à la Chambre, dans les deux langues officielles, le rapport du Comité mixte spécial chargé de l'examen de la politique étrangère du Canada.

Conformément à l'ordre de renvoi, notre rapport examine les changements dans le monde et comment ceux-ci affectent le Canada. Nous constatons que le village monde, en anglais global village, de Marshall McLuhan est de plus en plus une réalité pour les Canadiens et les Canadiennes. Cette réalité affecte leur sécurité, leur emploi, leur bien-être. Toute la terre s'en ressent. La politique étrangère du Canada est donc une politique intérieure, la politique intérieure est une politique étrangère.

En fonction de ces changements, certains diraient que des bouleversements dans les intérêts et les valeurs profondes donnent des défis aux Canadiens d'aujourd'hui. Notre rapport présente des conclusions et des recommandations sur les principes et les priorités qui devraient guider notre politique étrangère.


7813

En fait, notre rapport propose un nouvel ordre du jour pour les années 1990 et au-delà, les premières années du XXIe siècle.

[Traduction]

Ce nouvel ordre du jour que nous proposons tient compte de valeurs profondément enracinées que les Canadiens veulent voir dans leur politique étrangère et tient compte également de la nécessité de faire des choix stratégiques parmi les données et les critères de sélection.

L'ordre du jour comporte la réforme des grandes institutions internationales qui gouvernent le monde, comme l'Organisation des Nations Unies et les institutions financières internationales, pour qu'elles deviennent plus transparentes, plus représentatives et plus responsables. L'extension du principe de sécurité aux facteurs non militaires et une plus grande spécialisation des forces armées de façon à mieux conduire les opérations de maintien de la paix. La promotion d'un système de commerce multilatéral basé sur des règles et une approche concertée, genre Équipe Canada, pour le développement du commerce et de la politique étrangère en général.

Le nouvel ordre du jour commprend aussi: un accent plus marqué sur la culture canadienne et l'enseignement canadien en tant qu'éléments essentiels de la politique étrangère; une stratégie de gestion de la relation complexe avec les États-Unis d'Amérique, prévoyant notamment une meilleure utilisation des mécanismes multinationaux; une réforme des programmes d'aide extérieure pour que celle-ci serve plus efficacement à la satisfaction des priorités de développement des populations.

Enfin, le nouvel ordre du jour comprend: le resserrement des liens entre la politique étrangère et le développement durable et le respect des droits de la personne; et la poursuite de la démocratisation de la politique étrangère canadienne par le dialogue et l'éducation.

[Français]

Je tiens à remercier les quelque 500 témoins qui ont comparu devant nous au cours des sept derniers mois, ainsi que tous ceux et celles qui ont envoyé des mémoires et des propositions. Nous avons reçu près de 560 mémoires. Un sincère remerciement également à toute l'équipe: les greffiers et leur personnel, les adjoints de recherche et tous les collaborateurs qui nous ont si bien appuyés.

(1505)

Je tiens en mon nom personnel à rendre hommage à mes collègues de cette Chambre et du Sénat qui ont travaillé ferme pour produire ce que je considère un très bon rapport.

Les membres du comité ont tous été frappés par l'engagement des Canadiennes et des Canadiens en faveur du principe simple que nous devons bâtir un monde meilleur. Ce rapport constate qu'ensemble, solidaires les uns des autres, les Canadiennes et les Canadiens peuvent apporter une contribution unique.

En vertu de l'article 109 du Règlement, monsieur le Président, le comité aimerait que le gouvernement dépose une réponse globale de ce rapport.

M. Stéphane Bergeron (Verchères, BQ): Monsieur le Président, j'ai l'honneur aujourd'hui de m'associer au dépôt du rapport du Comité mixte spécial chargé de l'examen de la politique étrangère du Canada, et plus particulièrement au dépôt du rapport dissident des députés du Bloc québécois, membres du comité.

Pendant leurs travaux, les membres du comité ont consciencieusement cherché à proposer une vision innovatrice de ce que pourrait être la nouvelle politique étrangère du Canada. Pour cela, je tiens à les remercier et à les féliciter cordialement.

J'aimerais en outre m'associer aux remerciements qui ont été faits par mon collègue d'Ottawa-Vanier et coprésident du Comité mixte, à toutes les personnes qui ont collaboré de près ou de loin à la réalisation de ces travaux et plus particulièrement aux Canadiens et Canadiennes, aux Québécoises et Québécois qui ont pris la peine de comparaître et d'envoyer un mémoire à l'intention des membres du comité.

Cependant, malgré toute la bonne volonté du monde, le rapport de la majorité traduit une lecture de la réalité internationale à laquelle nous ne pouvons souscrire. Le rapport dissident du Bloc québécois relève les égarements et les carences du rapport de la majorité et propose des alternatives qui, à notre avis, sont plus conformes à ce que devrait être une politique étrangère à la fois progressiste et réaliste.

Nous reprochons notamment au gouvernement d'escamoter des questions fondamentales comme le nationalisme, l'émergence de nouveaux États et l'accès récent à la vie internationale d'une multitude de nouveaux acteurs.

Nous déplorons également le manque de lignes directrices claires en matière d'aide internationale, le non-respect des compétences du Québec, en particulier en ce qui concerne la culture et l'éducation, et de leur prolongement au niveau international.

Enfin, nous trouvons inexplicable l'absence d'un chapitre portant spécifiquement sur la question des droits de la personne, de même que nous ne pouvons endosser la méfiance indue dont fait preuve le rapport majoritaire à l'égard de notre principal partenaire, les États-Unis.

Je soumets donc ce rapport à votre attention, monsieur le Président, en exprimant le souhait que le gouvernement sache en tirer le maximum d'enseignement.

* * *

[Traduction]

QUESTION DE PRIVILÈGE

LE COMITÉ MIXTE SPÉCIAL CHARGÉ DE L'EXAMEN DE LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE DU CANADA

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, je soulève la question de privilège.

Ma question de privilège porte sur la publication prématurée du rapport du Comité mixte spécial chargé de l'examen de la politique étrangère du Canada. Si j'ai bien compris, le rapport qui vient d'être déposé est entre les mains des journalistes depuis près d'une semaine. On en a abondamment parlé dans les journaux, et certains articles citent même des propos de membres du comité. Depuis la publication d'un tel article dans la presse


7814

écrite francophone, le 10 novembre dernier, plusieurs membres des médias ont communiqué avec moi pour me demander mon avis.

Le commentaire 877(1) de la sixième édition de Beauchesne affirme ceci:

Rien de ce qui s'est déroulé en comité ne doit être divulgué avant que le comité n'ait fait rapport à la Chambre.
On y lit ensuite:

[. . .] Les témoignages entendus par un comité spécial de la Chambre et les documents soumis au comité, mais dont il n'a pas été fait rapport à la Chambre, ne doivent pas être divulgués par un membre du comité ni par aucune autre personne. Constitue une atteinte au privilège le fait de publier les délibérations d'un comité tenues à huis clos ou des rapports de comités avant qu'ils n'aient été mis à la disposition des députés.
Monsieur le Président, en tant que député de fraîche date, j'ai cru bon de m'abstenir de répondre à ces demandes des médias, de crainte d'être trouvé coupable d'outrage à la Chambre. Le commentaire 877(2) affirme en outre:

Il est arrivé, au Canada, qu'on a soulevé la question de privilège par suite de la publication du rapport d'un comité avant son dépôt devant la Chambre. Le président de la Chambre avait alors déclaré qu'il lui était impossible de trancher la question suivant l'usage britannique parce que la motion dont il était saisi semblait attaquer la presse, qui avait publié le document confidentiel, sans s'en prendre toutefois à l'attitude des députés vis-à-vis de leurs propres documents confidentiels. Il a conclu qu'on avait oublié là un élément très important concernant les privilèges de la Chambre.
(1510)

J'insiste sur le passage suivant: «sans s'en prendre toutefois à l'attitude des députés vis-à-vis de leurs propres documents confidentiels».

Les fuites sont apparemment devenues monnaie courante au cours de la présente législature. C'était évident dans le cas du rapport sur la TPS que le Comité des finances a déposé à la Chambre en juin dernier. Le député de Willowdale a alors soulevé une question de privilège à la Chambre et je me reporte à votre décision du 1er juin 1994, à la page 4702 du hansard, dans laquelle vous avez recommandé que le Comité des finances étudie lui-même la question.

J'ai discuté avec le président du comité, le député d'Ottawa-Vanier, et il soulèvera la question à notre prochaine réunion.

Aujourd'hui, je voudrais parler de la question des privilèges personnels. Je considère qu'il y a eu atteinte à mes privilèges de député puisque les médias et d'autres membres du comité ont obtenu des copies du rapport, et des députés ont fait des déclarations publiques en se reportant directement au contenu du rapport. En fait, je n'ai même pas vu le rapport minoritaire avant que l'opposition officielle ne le dépose à la Chambre hier.

En tant que parlementaire, je reconnais être tenu de garder des rapports confidentiels tant qu'ils ne sont pas déposés à la Chambre. Malheureusement, certains députés ont décidé de ne pas respecter ce principe et ont parlé à la presse.

Par mon silence et mon respect des règles, je crains que j'ai pu laisser croire à tort que notre parti appuyait le gouvernement alors qu'en réalité, nous avions déposé un avis dissident. Nous sommes rendus au point où la Chambre doit établir à l'intention des députés des lignes directrices claires et exécutoires sur la divulgation de renseignements confidentiels. Les députés doivent savoir qu'une violation des règles entraînera la prise de mesures punitives.

Dans ce cas-ci, il s'agit d'une atteinte évidente à mes privilèges de député et d'une marque de mépris à l'égard du Parlement. Je demande donc le renvoi de cette question au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Si vous jugez qu'il y a des présomptions suffisantes, je serai disposé à proposer la motion appropriée.

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, le député a raison, dans son préambule, lorsqu'il affirme que les rapports des comités de la Chambre doivent demeurer confidentiels tant qu'ils n'ont pas été déposés à la Chambre. Je crois qu'il a également raison lorsqu'il affirme que toute personne qui divulgue le contenu d'un rapport avant son dépôt se rend coupable d'outrage à la Chambre. Je pense d'ailleurs que cela a été confirmé par des précédents.

J'ajouterai que si le député pouvait identifier l'auteur de la fuite, celui-ci pourrait être amené devant la Chambre pour qu'elle lui impose la sanction appropriée. Le comité pourrait aussi s'occuper du coupable et présenter un rapport sur la question. Cela étant dit, je présume que le député ignore qui est l'auteur de la fuite. Dans les circonstances, et ce n'est pas la première fois que nous nous trouvons dans une telle situation, je ne sais pas si la Chambre peut imposer de sanction pour cet outrage.

Quant à savoir si on a porté atteinte aux privilèges du député, c'est une autre question. Je reconnais qu'il a peut-être jugé ses privilèges amoindris puisqu'il a dû se retenir de commenter le rapport jusqu'à ce qu'il soit officiellement rendu public cet après-midi. Nous pourrions peut-être nous pencher là-dessus.

Je serais heureux que la question soit renvoyée au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, que j'ai l'honneur de présider, pour qu'il l'étudie. Peut-être après cela aurions-nous quelque chose d'utile à ajouter, je l'ignore. Je ne suis pas convaincu que le député ait été empêché de s'acquitter de ses fonctions.

J'invite la présidence à examiner ce que le député a dit à ce sujet. Si la présidence juge que la question de privilège paraît fondée à première vue, soyez assuré que le comité sera heureux d'étudier l'affaire, si elle lui est renvoyée.

7815

Le Président: Chers collègues, je prends toutes les questions de privilège très au sérieux. Je vais examiner attentivement les informations qui m'ont été présentées et, avec la permission de la Chambre, je rendrai ma décision lorsque je serai prêt.

* * *

(1515 )

RECOURS AU RÈGLEMENT

LE DÉBAT D'AJOURNEMENT

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, comme vous le savez, j'ai pris la parole hier soir durant le débat d'ajournement. Le 28 octobre, conformément au paragraphe 37(3) du Règlement, j'ai informé le Président que je n'étais pas satisfaite de la réponse à la question que j'avais posée au ministre du Patrimoine canadien au sujet de la lettre d'intervention qu'il a envoyée au CRTC.

Hier, avant 17 heures, conformément aux paragraphes 38(3) et (4) du Règlement, le vice-président a informé la Chambre que ma question serait soulevée à l'heure de l'ajournement, comme en fait foi la page 7753 du hansard.

Durant le débat d'ajournement, la secrétaire parlementaire du ministre du Revenu national a dit, et je cite ce qu'on peut lire à la page 7757 du hansard:

Je ne suis pas prête à répondre à la question soulevée le 28 octobre. Si la députée le désire, je pourrais répondre en termes généraux au sujet des faits du 24 octobre.
Le paragraphe 38(5) du Règlement est clair. Les ministres et les secrétaires parlementaires doivent répondre aux questions soulevées par les députés. Non seulement la secrétaire parlementaire n'a pas répondu à la question que j'ai soulevée, mais elle a admis ne pas être prête à répondre et s'en est même excusée.

Ma question portait sur une affaire sérieuse qui a été débattue à la Chambre pendant deux semaines. Je voulais profiter du débat d'ajournement pour éclaircir certaines questions concernant l'incompétence du ministère du Patrimoine canadien et la lettre d'intervention envoyée par le ministre au CRTC. Je me suis toutefois vu refuser le droit d'obtenir la réponse que je cherchais durant le débat d'ajournement.

On me dit qu'il n'existe aucun précédent à cet égard. Par ailleurs, je n'ai trouvé aucun cas où le gouvernement a refusé de répondre à une question soulevée à l'heure de l'ajournement. Je rappelle au Président que le débat d'ajournement fait partie de la procédure parlementaire depuis 30 ans.

Le gouvernement vient de créer un précédent inacceptable. Afin de réparer cette entorse à la procédure, je demande au gouvernement une réponse écrite à la question que j'ai soulevée hier soir et je veux que cette réponse soit donnée à la Chambre ce soir, à l'heure de l'ajournement.

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, la députée a laissé entendre dans son intervention qu'elle avait du mal à établir l'incompétence du ministère du Patrimoine canadien. Il y a une très bonne raison à cela, et c'est qu'il est dirigé par un ministre très compétent et qu'il est très bien administré. Je vais cependant laisser de côté cette partie de son intervention et passer à la teneur du problème de procédure dont elle voulait parler avant de s'écarter de son sujet avec ce genre de propos sectaires au sujet du ministre du Patrimoine canadien.

La secrétaire parlementaire qui était ici hier soir pour répondre à la députée n'était pas la secrétaire parlementaire du ministre du Patrimoine canadien, laquelle n'était pas en mesure d'être ici hier soir. Elle s'est vu remettre une série de notes en prévision d'une question sur le sujet qui ne relève pas de sa compétence, mais elle devait donner immédiatement la réplique. Or, comme il s'agissait de la mauvaise série de notes portant sur la mauvaise question, elle a été victime d'une confusion qui s'est produite pour des raisons indépendantes de sa volonté.

Elle a donc jugé inopportun de sa part de tenter de donner la réplique à l'intervention de quatre minutes que la députée avait faite sur la question. La députée vient de suggérer qu'on y réponde ce soir au moment du débat d'ajournement grâce à une addition spéciale de deux minutes pour permettre à la secrétaire parlementaire de donner une réponse; c'est une suggestion que nous, du côté ministériel, trouvons très satisfaisante.

Si la Chambre y consentait, je serais heureux qu'on donne ainsi cette réplique de deux minutes ce soir. Je me rends bien compte que la députée elle-même ne disposerait pas de quatre minutes pour faire son intervention avant la réplique, mais elle en a bénéficié hier soir. Nous aurons donc eu l'intervention de quatre minutes d'hier soir et la réplique de deux minutes de ce soir, de sorte que tout le monde sera satisfait et heureux d'y consentir.

Le Président: Il me semble que nous avons trouvé une solution à notre petit dilemme. J'espère qu'elle est acceptable pour la députée et pour tous les autres députés à la Chambre et il en sera ainsi ordonné.

_____________________________________________


7815

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-LES CHEMINS DE FER

La Chambre reprend l'étude de la motion.

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir, cet après-midi, parler brièvement de la motion dont la Chambre est saisie aujourd'hui.


7816

[Français]

Je dois admettre que j'ai été un peu surpris, étonné de voir la motion que nous a proposée le Bloc québécois. Le Bloc québécois se plaint souvent; ses députés prétendent être concernés par le déficit, par la dette et expriment souvent l'avis qu'on doit couper dans des dépenses qui ne sont pas nécessaires, qu'on doit effectuer des coupures dans ce qu'ils qualifient de gaspillage, un grand terme qui demeure toujours indéfini et pour lequel nous n'avons jamais d'explication valable.

(1520)

Je me demande si dans la définition du Bloc québécois d'entamer des dépenses extraordinaires, dépenses que le gouvernement ne peut faire en tant que gouvernement, si cela constitue du gaspillage. Il reste à connaître la réponse.

[Traduction]

Le Bloc nous dit qu'il dénonce la politique du gouvernement en matière ferroviaire. Je tiens à dire clairement mon profond désaccord. En fait, je veux féliciter le ministre d'avoir eu-je vais utiliser du langage parlementaire-la force d'âme intérieure de soulever certaines questions très importantes à propos du transport ferroviaire, maritime ou aérien.

Dans le secteur du transport aérien, il y a une chose que je n'ai jamais pu comprendre. Le ministre l'a expliqué d'une manière très éloquente dans le discours que d'autres députés et moi-même avons entendu récemment. Il a alors dit qu'il y a au Canada des aéroports qui accueillent deux millions de passagers par année et qui n'obtiennent aucune subvention, et d'autres qui reçoivent deux millions de dollars de subventions par année et qui n'accueillent pas de passagers. Il doit y avoir des aspects du système qui laissent à désirer. Le ministre a le courage d'aborder ces questions importantes.

[Français]

La même chose s'applique dans le domaine ferroviaire. Dans ma région, monsieur le Président-et vous la connaissez bien-il y a une voie ferrée qui joint les villes d'Ottawa et de Montréal, l'emprise d'Alexandria, si vous voulez. Dans cette emprise d'Alexandria, les trains rejoignent ces deux grands centres. Mais que se passe-t-il? En 1986, le CN menaçait à l'époque de fermer cette emprise. À ce moment-là, il n'y avait aucune certitude qu'il y aurait des trains pour joindre Ottawa-Montréal, et bien sûr, cela signifiait la fin du transport-passagers entre les deux villes, puisque VIA Rail utilise la voie ferrée du CN.

Aujourd'hui, il y a une entente entre CN et CP pour que, conjointement, on maintienne cette emprise et que les trains de CN et de CP utilisent la voie ferrée. Cela augmente le trafic sur la voie ferrée, augmente sa viabilité et assure la survie à long terme de l'emprise en question.

Quand la fuite a été découverte en 1986, à l'effet que CN voulait fermer cette emprise, vous savez ce qui s'est passé. Alexandria Moulding, une entreprise de chez nous qui embauchait quelque 200 personnes, a mis fin à ses plans d'expansion. Pourquoi? Parce qu'il n'y avait pas de sécurité à long terme. Aujourd'hui, le ministre s'occupe de ces dossiers.

[Traduction]

À mon avis, le ministre devrait, entre autres choses, continuer d'autoriser l'exploitation de lignes de chemin de fer secondaires par des groupes locaux. Il faut accélérer le processus. Supposons que le CN ou le CP-ou les deux dans le cas de la subdivision d'Alexandria qui sera exploitée conjointement-doivent supprimer une partie de leurs services. Si un groupe d'entreprises locales, de municipalités, etc., peut maintenir cette ligne secondaire, nous devrions leur donner le feu vert au lieu de dépenser de l'argent pendant des années à discuter de la question devant différents conseils et organismes. Évidemment, nous devons nous assurer que ceux qui exploitent des lignes de chemin de fer secondaires le fassent conformément à toutes les normes de sécurité en vigueur. C'est bien certain.

Il faut toutefois accélérer le processus pour rendre possible ce genre de situation. Le ministre s'intéresse à ces questions. Il faut le féliciter. Certains de nos gouvernements provinciaux, notamment ceux d'allégeance socialiste, comme celui de l'Ontario, ont par contre institué ce que l'on appelle les droits du successeur dans le domaine ferroviaire.

(1525)

Qu'ont eu pour effet ces droits du successeur? Soit dit en passant, la même chose est arrivée en Saskatchewan et devinez qui est au pouvoir dans cette province? Eh oui, ce sont aussi ces dinosaures socialistes. Les dinosaures socialistes provinciaux ont adopté des lois créant des droits du successeur dans trois provinces. Il en résulte que certaines entreprises ferroviaires exploitant des chemins de fer secondaires ne peuvent commencer à exercer leur activité en raison de ces droits du successeur.

Voici comment les choses se passent. Dans un cas particulier, en Saskatchewan, un chemin de fer secondaire a été cédé à un groupe d'intérêts locaux. Ce chemin de fer n'avait évidemment pas besoin d'un personnel très nombreux. Il n'avait en fait que 18 employés, qui faisaient partie de 14 syndicats différents. Est-ce sensé? Je ne le pense pas.

Prenons l'exemple d'un chemin de fer secondaire encore plus petit qui n'aurait besoin que d'une poignée d'employés. À cause des différentes conventions collectives en vigueur, ce chemin de fer ne pourrait commencer ses activités parce qu'il serait forcé d'engager du personnel dont il n'a pas besoin. Autrement dit, il faudrait que deux personnes différentes fassent office de serre-frein et exercent d'autres fonctions à bord du train parce qu'elles font partie de syndicats différents. Par conséquent, certains employés ne feraient rien pendant que d'autres feraient leur travail. Est-ce comme cela qu'il faut protéger les emplois? Non, parce qu'au bout du compte il n'y aura pas de chemin de fer du tout et s'il n'y a pas de chemin de fer, il n'y a de travail pour personne.

Les dirigeants de ces régimes socialistes devraient peut-être s'en souvenir. S'ils ne le font pas, ils ne resteront pas au pouvoir bien longtemps, en Ontario notamment. L'avenir leur réserve le même sort que dans le cas du gouvernement qui a été remplacé il


7817

y a un peu plus d'un an par l'excellent gouvernement qui est maintenant au pouvoir.

[Français]

Les députés d'en face disent que le gouvernement devrait procéder immédiatement à l'installation d'un train à grande vitesse au Canada, un TGV. Ce sont les mêmes députés d'en face qui, dans le passé, condamnaient le gouvernement pour des dépenses qu'on ne pouvait pas se permettre. J'ai un peu de difficultés avec leurs propositions, avec la logique de ces gens d'en face.

Premièrement, il y a une étude qui est en cours dans le moment afin de déterminer si un TGV est viable. Les gens d'en face refusent de voir les résultats de ces études, mais ils veulent le TGV tout de suite et qu'on blâme le gouvernement parce qu'il ne l'a pas déjà fait. Attendez une minute. Gardez cette idée dans votre tête pendant une minute, monsieur le Président.

Alors, on peut seulement conclure que les députés d'en face veulent construire un TGV, même si ce n'était pas viable. Autrement, pourquoi n'attendraient-ils pas les résultats de l'étude de viabilité. Bien non. Ils veulent le construire, que ce soit viable ou non, pour que, le jour où il y en aura un qui ne sera pas viable, ils puissent ensuite se lever en Chambre pour dénoncer le gouvernement d'avoir constuit un système qui n'était pas viable, donc du gaspillage. Ça, c'est la logique des gens d'en face. Vous voyez l'expert en matière ferroviaire, le député de Hochelaga-Maisonneuve, si je ne m'abuse, qui vient de nous dire que c'est viable. On peut conclure qu'il se réfère à cette étude qui date de je ne sais pas quand. Il pourrait peut-être la partager avec nous, la Chambre serait donc mieux informée là-dessus.

[Traduction]

Il y a d'autres questions à régler. L'une d'elles concerne les impôts fonciers applicables aux chemins de fer. Au Canada, les impôts fonciers s'élèvent généralement, si je ne m'abuse, à quelque chose comme 14 p. 100 des dépenses des sociétés ferroviaires. C'est ce qu'a révélé la société d'experts-conseils Peat Marwick, Stevenson & Kellogg. Il semble qu'aux États-Unis la proportion soit d'environ 8 p. 100. Cet écart influe beaucoup sur la viabilité des chemins de fer. Il a pour effet que les coûts d'exploitation des chemins de fer sont plus élevés au Canada, ce qui nuit à leur compétitivité.

Voilà le genre de questions que le ministre examine, j'en suis sûr. Il doit faire ce travail pour rendre nos chemins de fer concurrentiels.

(1530)

À longue échéance, si nous ne prenons pas de mesures pour rendre nos chemins de fer viables, pour faire en sorte qu'ils soient exploités comme il se doit, ils disparaîtront purement et simplement. Nous ne pouvons pas continuer d'avoir un système où les chemins de fer accumulent dettes et déficits d'exploitation et s'attendre à ce qu'ils survivent bien longtemps. Cela n'arrivera pas.

Nous devons les rendre viables. Nous devons veiller à ce qu'ils soient efficaces, qu'ils soient concurrentiels afin de fournir des services de transport aux Canadiens, à nos exportations et à nos importations et de garantir l'emploi des travailleurs de ce très important secteur qu'est l'industrie du transport ferroviaire.

Voilà pourquoi je ne puis accorder mon appui à la motion présentée par nos collègues d'en face. Je la condamne et j'aurais cru que nos vis-à-vis auraient présenté une solution constructive pour la survie de notre industrie ferroviaire.

[Français]

M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Monsieur le Président, naturellement, je ne suis pas du tout d'accord avec le whip du gouvernement, surtout en ce qui a trait à son discours antisyndical.

Le TGV est viable, il va relier les deux provinces les plus populeuses du Canada, les deux villes les plus populeuses, Montréal et Toronto. Le transport ferroviaire traverse une crise profonde. Je suis d'accord avec la motion du Bloc québécois pour condamner les politiques du gouvernement en matière ferroviaire et pour dénoncer la fermeture graduelle des services des trois compagnies CN, CP et VIA, surtout que ces fermetures ont lieu particulièrement au Québec.

Des milliers d'emplois ont été supprimés et en plus de cela, aujourd'hui, les employeurs veulent rouvrir les conventions collectives pour s'attaquer à la sécurité d'emploi, aux avantages sociaux, aux salaires et ils demandent de plus en plus de concessions. On fait cela avec la complicité et du gouvernement et surtout du ministère des Transports et des compagnies, les employeurs. Au Québec, les syndicats du transport ferroviaire affiliés à la FTQ ont créé un front commun et effectuent un travail formidable.

Je viens de recevoir un mémoire sur la situation actuelle dans l'industrie ferroviaire préparé par la section locale 4334 de TCA, le syndicat canadien de l'automobile. Le Québec est très affecté, parce qu'il y a des services qui sont transférés vers l'Ouest. Est-ce que c'est cela le fédéralisme canadien que vous voulez nous imposer? Oui, c'est le Québec qui est le plus affecté à cause de la crise ferroviaire. Des services sont transférés, surtout à Winnipeg.

Est-ce que vous seriez d'accord pour un moratoire pour réexaminer la situation du transport ferroviaire pour créer une table de concertation regroupant les gouvernements, les syndicats et les compagnies pour examiner les mesures de redressement avant de continuer la destruction du transport ferroviaire au Canada?

M. Boudria: Monsieur le Président, il y a trois choses qui méritent d'être soulignées. Premièrement, je n'ai rien dit d'antisyndical. Au contraire! Vouloir protéger les emplois des gens qui travaillent dans le domaine ferroviaire dans les entreprises à courte distance, ce n'est pas être antisyndical. C'est de vouloir aider à conserver des emplois. Les prétentions sont fausses.

Dans un deuxième temps, il y a ce dossier du moratoire. Je dois informer le député, et il n'est pas sans savoir qu'un groupe de travail de parlementaires est en train-ce n'est pas un jeu de mots-un groupe de travail de parlementaires vient d'entamer une étude sur tout le dossier ferroviaire au Canada. Ce groupe de parlementaires visitera plusieurs villes au pays. D'ailleurs, il fera rapport au ministre des Transports.


7818

(1535)

Le ministre des Transports, j'en suis sûr, partagera ce dossier avec la Chambre des communes. Alors, s'il parle d'une table de concertation, il y en a une, composée de parlementaires qui rencontreront des gens de l'industrie, des usagers des chemins de fer, des employés et des employeurs.

Monsieur le Président, il y a tout ça dans le groupe de travail si bien présidé par l'honorable député de Kenora-Rainy River.

[Traduction]

M. Pat O'Brien (London-Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, en réponse à la motion qui a été présentée aujourd'hui, je voudrais parler de la question de la rationalisation des chemins de fer du Canada, une question qui intéresse vivement tous les Canadiens.

Jusqu'à tout récemment, la rationalisation ne voulait dire qu'une chose, soit l'abandon de lignes de chemin de fer et la perte de services directs pour les expéditeurs qui utilisent encore le transport ferroviaire.

Les options de rationalisation qui s'offrent aux compagnies de chemin de fer et aux expéditeurs ont changé au cours des dernières années et incluent maintenant des services sur courtes distances et des fusions. Dans les faits, cependant, les facteurs qui amènent les compagnies de chemin de fer à rationaliser leurs services n'ont pas changé. Ce sont encore l'évolution des besoins et des éléments de la logistique, les demandes constantes des expéditeurs pour faire réduire les coûts et obtenir de meilleurs services et la concurrence de l'industrie du transport routier et des compagnies de chemin de fer américaines.

La part occupée par les chemins de fer dans le marché des transports de surface diminue depuis 1950, depuis que le transport routier a commencé à livrer une grande concurrence au transport ferroviaire. Les chemins de fer occupent aujourd'hui moins de 40 p. 100 de ce marché.

Compte tenu de l'évolution de la demande, on a supprimé graduellement les lignes moins achalandées qui coûtaient plus cher à exploiter qu'elles ne rapportaient.

L'abandon de lignes a toujours été une expérience traumatisante pour les collectivités et les expéditeurs. C'est pourquoi on a tant parlé de la viabilité des lignes ou de leur avenir. Au cours des vingt dernières années, on a surtout abandonné des lignes de chemin de fer situées à l'est de la frontière manitobaine, car une grande partie des lignes de chemin de fer des Prairies sont protégées contre les abandons jusqu'à l'an 2000.

Cependant, c'est également dans l'Est que le secteur du camionnage réussit à venir prendre une part du marché des compagnies de chemin de fer. Je pense que ma région, le sud-ouest de l'Ontario, est peut-être le meilleur exemple de cela.

Le trafic ferroviaire dans l'ouest du pays dépend surtout du transport en vrac ou du transport de matières premières. Ainsi, il est plus difficile pour les entreprises de camionnage de concurrencer les chemins de fer. Par contre, dans l'est du pays, il est bien davantage question du transport de produits manufacturés, lequel se prête parfaitement à la concurrence du secteur du camionnage.

Au cours des dernières années, c'est dans le transport intermodal que les chemins de fer ont connu la croissance la plus forte. Cependant, ce type de transport, surtout sur les marchés de l'est du pays où les distances sont plus courtes, favorise beaucoup la concurrence par le secteur du camionnage. Là encore, je pourrais donner la région du sud-ouest de l'Ontario comme un excellent exemple.

Même si l'abandon de certaines voies était la façon traditionnelle de rationaliser les opérations des chemins de fer, ce n'est absolument pas la seule méthode qui fait que les compagnies de chemin de fer de catégorie 1 sont en mesure d'accroître leur efficience. Elles peuvent notamment vendre de petits tronçons à de nouveaux exploitants dont les coûts sont moindres. Il y a également la coproduction qui consiste à regrouper sur une seule voie le trafic qui passe normalement sur deux voies parallèles et à abandonner la voie superflue ou à la confier à un exploitant de lignes ferroviaires sur courtes distances. On peut enfin avoir recours à des fusions ou à des acquisitions.

À la suite de l'entrée en vigueur de la Staggers Rail Act, aux États-Unis, en 1980, les chemins de fer américains ont accéléré la rationalisation de leurs systèmes. Dans certains cas, des voies aient été abandonnées, bien que, dans d'autres cas, des voies aient été vendues à d'autres exploitants, ce qui a conduit à une croissance explosive des lignes ferroviaires sur courtes distances.

L'expression a une portée très large et peut englober de simples embranchements jusqu'à d'énormes réseaux régionaux. En général, ces lignes ferroviaires viennent se raccorder aux réseaux des plus grosses compagnies de chemins de fer, généralement de catégorie 1. Elles ont des coûts moindres que les grosses compagnies, étant donné que leurs besoins en main-d'oeuvre et leurs conditions de travail sont bien différentes, et elles offrent des services qui répondent beaucoup plus aux besoins locaux.

En général, on peut dire que le secteur des lignes ferroviaires sur courtes distances est florissant aux États-Unis. En fait, le taux de faillite de ce type d'entreprise est nettement inférieur à celui qu'on retrouve dans d'autres secteurs. Ce succès remporté aux États-Unis a également influé sur les chemins de fer canadiens ou les éventuels exploitants de courts tronçons au Canada.

(1540)

Malheureusement, malgré les progrès remarquables accomplis au Canada, le secteur des chemins de fer secondaires a mis beaucoup de temps à se développer. Même si la première compagnie de chemin de fer secondaire, la Western Railway, est née dans l'Ouest, la plupart des sociétés exploitant des tronçons courts se trouvent aujourd'hui dans l'est du Canada. Encore une fois, il faut citer à cet égard le cas du sud-ouest de l'Ontario.

Dans le sud de l'Ontario, la Goderich and Exeter Railway, qui se trouve à environ une heure au nord de la circonscription de London-Middlesex que je représente, est un des premiers exemples de compagnie de chemin de fer secondaire au Canada. Depuis sa création, la Goderich and Exeter Railway dessert les affréteurs qui jalonnent son tronçon jusqu'à Goderich, si bien que l'Ontario a réussi à accroître sensiblement le trafic ferroviai-


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re et ses revenus. Le CN a vendu la Goderich and Exeter Railway à une société américaine qui possède vingt autres courts tronçons aux États-Unis et, plus récemment, au Canada.

Railtex a acheté dernièrement le tronçon Sydney-Truro du CN en Nouvelle-Écosse, a rebaptisé la société exploitante la Cape Breton and Central Nova Scotia Railway et a lancé un programme semblable en vue d'accroître le trafic et les revenus, tout en améliorant la qualité des services offerts aux expéditeurs.

Une des principales caractéristiques des compagnies de chemin de fer secondaire, c'est que leur structure de coûts est inférieure à celle des grandes compagnies de chemin de fer, notamment parce que les premières ont moins d'employés et peuvent conclure des arrangements plus souples avec ceux-ci, d'où des frais de main-d'oeuvre beaucoup moindres. Une compagnie de chemin de fer secondaire a environ la moitié moins d'effectifs qu'en aurait une grande compagnie de chemin de fer desservant le même tronçon.

Pour les exploitants éventuels, l'un des principaux attraits d'exploiter des chemins de fer secondaires est que cela leur permet de structurer leurs opérations de façon à faire une utilisation optimale de la main-d'oeuvre. Cependant, plusieurs provinces ont adopté récemment des mesures législatives afin de veiller à la protection des droits des employés lors du transfert de propriété de la voie ferrée des autorités fédérales aux autorités provinciales, étant donné que les chemins de fer secondaires relèvent typiquement de la compétence des provinces.

La Colombie-Britannique, la Saskatchewan et l'Ontario ont adopté des mesures législatives qui veillent à la protection des droits des employés lors du transfert de propriété d'une voie ferrée d'une compétence à une autre. La Colombie-Britannique a très peu de voies ferrées pouvant être considérées comme offrant des possibilités pour l'exploitation de chemins de fer secondaires et les changements législatifs en Saskatchewan sont trop récents pour pouvoir en évaluer les conséquences. Par contre, en Ontario, ma province, plusieurs exploitants éventuels ont renoncé à l'achat de chemins de fer secondaires étant donné l'évolution de la situation.

Railtex notamment négociait avec le CN en vue de l'achat de cinq chemins de fer secondaires en Ontario. Quand la nouvelle loi sur la main-d'oeuvre a été adoptée en Ontario, Railtex a immédiatement mis fin aux négociations. C'est triste à dire, mais tout ce qu'a fait cette mesure législative, c'est de retarder le développement d'une industrie de chemins de fer secondaires dans cette province.

Malgré les appréhensions du début et une longue étude, par le Sénat, de la proposition de Railtex d'acheter au CN le tronçon Sydney-Truro, la province de Nouvelle-Écosse appuie maintenant sans réserve son industrie de chemins de fer secondaires. En fait, le deuxième chemin de fer secondaire, la ligne reliant Windsor et Hantsport, vient d'entrer en service dans la province après l'acquisition de la ligne Dominion Atlantic Railway du CP.

Le Nouveau-Brunswick, qui a récemment adopté une loi sur les chemins de fer secondaires qui pourrait servir de modèle aux autres lois, est sur le point d'avoir son premier chemin de fer secondaire puisque le groupe Irving va vraisemblablement acheter une partie de Canadian Atlantic Railway au CP. Cette ligne de chemin de fer, dont l'Office national des transports du Canada avait ordonné l'abandon à compter du 1er janvier 1995, sera vraisemblablement exploitée par la société Guilford Transportation Industries et desservira le Nouveau-Brunswick et le Maine.

Une autre compagnie a récemment exprimé le désir d'acquérir le reste de la ligne jusqu'à Sherbrooke, au Québec, et de l'ajouter à son réseau du Maine. Le Québec a pour sa part pris position en faveur de la création d'une industrie de chemins de fer secondaires sur son territoire et a adopté une loi à cette fin.

Le CN, qui est sur le point de vendre sa ligne passant près de Québec à un exploitant de chemin de fer secondaire, a fait savoir qu'il désire céder plusieurs lignes secondaires dans le nord du Québec et en Gaspésie à des exploitants de chemins de fer secondaires. On s'attend à ce que le CN aille de l'avant avec ces transactions sous peu. Le CP a également mis en vente ses lignes reliant Delson, au Québec, près de Montréal et Sherbrooke.

Il est clair que nos transporteurs de marchandises de catégorie 1, le CN et le CP, ont non seulement d'autres solutions que d'attendre que le trafic diminue sur les lignes au point que leur abandon devienne la seule solution possible, mais qu'ils s'empressent de céder des lignes secondaires à des exploitants possibles pendant que cela est dans l'intérêt commercial de tous les partenaires.

(1545)

Cela ne veut pas dire que l'abandon des voies ferrées ne sera pas une solution étant donné qu'il existe dans l'Est un petit nombre de voies qui ne présentent vraisemblablement aucun attrait même pour un exploitant de chemins de fer secondaires dont la structure des coûts est plus avantageuse.

Ce que ça veut dire, c'est que l'abandon des voies ferrées est beaucoup moins probable, notamment là où les gouvernements sont réceptifs à l'idée de développer une industrie des chemins de fer secondaires. Même s'il se peut qu'un petit nombre de voies soient abandonnées quoi qu'il arrive, un tiers peut-être de l'actuel réseau de catégorie un, soit près de 16 000 kilomètres de voie ferrée, pourrait présenter un attrait pour les exploitants éventuels de chemins de fer secondaires. Il en résulterait pour le Canada un réseau de catégorie 1 très semblable aux réseaux ferroviaires américains, soit à haute densité et à faible coût.

Une autre solution pour le CN et le CP consiste en la coproduction, le groupement sur une seule voie ferrée du trafic assuré sur deux voies parallèles. La voie en trop serait en principe abandonnée, encore qu'il y a possibilité d'en faire un chemin de fer secondaire.

Le chemin de fer de la vallée de l'Outaouais, dont l'exploitation sur les voies du CN et du CP a été approuvée par l'Office national des transports et qui doit assurer la liaison entre un point situé à proximité de la frontière entre l'Ontario et le Québec et North Bay via Ottawa, est un exemple de coproduction. Les contestations devant les tribunaux relativement à cette proposition retardent la mise en service de cette ligne. Cependant, il existe seulement un nombre limité de régions au Canada, principalement en Ontario, où la coproduction serait possible.


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Pour terminer, la rationalisation des chemins de fer n'est pas seulement inévitable, elle est nécessaire. Les pressions exercées sur les compagnies CN et CP afin qu'elles réduisent leurs coûts signifient qu'elles doivent adopter des façons nouvelles, non traditionnelles de répondre aux signes du marché. La clé pour les chemins de fer consiste à trouver des solutions de rationalisation qui permettent à la fois de minimiser les coûts pour les transporteurs et les expéditeurs, et de maximiser, pour les compagnies de chemin de fer, la possibilité de devenir financièrement viables et pour les expéditeurs, celle de maintenir et d'améliorer leur accès à des services ferroviaires compétitifs.

[Français]

M. Paul Mercier (Blainville-Deux-Montagnes, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt l'exposé de mon collègue d'en face et je le remercie pour l'intéressante série de transferts réussis de la propriété de lignes courtes, comme il dit, à des compagnies privées qu'on appelle les CFIL.

Je voudrais seulement attirer son attention sur le fait que, avant de décider qu'un bout de ligne sera abandonné avec l'accord du gouvernement ou de l'Office national des transports, il conviendrait qu'une étude sérieuse en soit faite parce que ce genre de transfert présente des inconvénients d'ordre juridique et aussi d'ordre social pour le personnel, quoi qu'on en dise.

C'est la raison pour laquelle, notre parti demande un moratoire pour ces suppressions de lignes, parce qu'il n'existe pas, et c'est ce que nous reprochons au gouvernement, de plan d'ensemble de la restructuration du réseau ferroviaire auquel on puisse se référer pour accepter ou refuser des suppressions de lignes ou des destructions d'embranchement par les compagnies CP et CN.

Nous demandons un moratoire pour examiner la chose. Nous sommes d'accord qu'il y aura peut-être des parties de lignes qui ne pourront pas être gardées par la compagnie ni être reprises par des CFIL parce que ce ne serait pas rentable. Mais une remarque doit quand même être faite, c'est que l'absence de rentabilité de ligne est parfois due à l'extrême mauvaise qualité du service, et dans ce cas il faut voir où se trouve l'origine de la situation. Est-ce que l'insuffisante clientèle ne provient pas d'une qualité de services délibérément mauvaise que l'on entretiendrait justement pour avoir l'autorisation de supprimer ces lignes?

Ceci mène à ces questions concernant le personnel et le fait que certaines catégories de personnel seraient avantagées dans les compagnies de transports. Je n'ai pas étudié leurs conventions collectives, mais une chose devrait être considérée dans la structure des dépenses du CN quand il dit qu'il doit réduire ces avantages. Le CN avait équipé un centre de tarification à Montréal et après l'avoir équipé au prix d'un certain nombre de millions, il décide tout à coup de le transférer dans l'Ouest, après que tout fut fait pour l'installer à Montréal.

(1550)

Ce matin, mon collègue, le vice-président du Comité des transports, évoquait un cas assez scandaleux d'avantages extraordinaires donnés à un cadre. Il faudrait examiner toutes ces choses avant de décider qu'il y a abus, qu'il y a nécessité de transférer des propriétés de lignes à des compagnies privées pour soulager la pression des salaires.

Ceci m'amène à la question plus générale des. . .

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre, s'il vous plaît! Lorsque les députés se partagent le temps, il y a dix minutes pour l'intervention et cinq minutes de questions et commentaires. Il reste très peu de temps au député pour répondre ou faire un commentaire à vos propos. Alors, je demanderais, s'il y a conclusion, de la livrer tout de suite afin qu'on puisse demander au député de London-Middlesex d'y répondre.

M. Mercier: Monsieur le Président, ma conclusion serait trop longue, alors je serai heureux d'entendre la réponse de mon collègue.

[Traduction]

M. O'Brien: Monsieur le Président, il ne me faudra que peu de temps puisque je n'ai franchement relevé aucune question. J'ai plutôt entendu des observations intéressantes de la part du député.

Il a effleuré plusieurs sujets, dont un sur lequel je m'arrête brièvement. Il a parlé de l'abandon de voies de chemins de fer comme d'un fait qu'il redoutait. Pour ma part, je viens du sud-ouest de l'Ontario, qui est une des régions qui connaissent une grande activité ferroviaire, je suis aussi d'une famille où depuis longtemps on est fier de travailler pour une société ferroviaire, et je peux dire au député que mes collègues et moi-même craignons autant que lui l'abandon des lignes de chemins de fer qui est un expédient commode.

Malheureusement, il faut admettre que les sociétés ferroviaires telles qu'elles sont structurées actuellement au Canada sont peu rentables. Il faut féliciter le ministre qui cherche à rationaliser un réseau qui coûte simplement trop cher dans sa forme actuelle, c'est une question de bon sens.

Le président suppléant (M. Kilger): Je remercie le député d'avoir répondu brièvement. Nous reprenons le temps perdu.

[Français]

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi, BQ): Monsieur le Président, il est agréable de prendre la parole aujourd'hui concernant le dossier ferroviaire, d'autant plus que malgré les efforts du gouvernement pour écarter l'opposition officielle de l'étude de la commercialisation du CN et des décisions majeures dans l'industrie du rail, le Bloc québécois peut se faire entendre aujourd'hui, parce qu'il a décidé lui-même de consacrer une journée de l'opposition au transport ferroviaire. Sans cette possibilité, le gouvernement, encore une fois, aurait agi en catimini.

Donc, le sujet abordé aujourd'hui est très important, puisqu'il fait suite à la Loi de 1987 sur les transports nationaux. Cette loi permet aux compagnies ferroviaires, depuis le 1er janvier 1993, de décider de l'abandon des voies ferrées et ce, sans aucune limite. Bien entendu, il doit y avoir approbation, selon les critères de l'Office national des transports, des critères établis selon des normes comptables et non pas comme ils devraient l'être, c'est-à-dire des critères établis selon des normes socio-économiques. Mais, j'y reviendrai.


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Le but de ces abandons de lignes est de rationaliser, paraîtrait-il, le réseau des compagnies ferroviaires afin d'augmenter leur rentabilité et leur compétitivité. Toutefois, il faut être conscient que la rentabilité de la ligne ferroviaire pour les transporteurs ne tient pas compte du développement économique des régions. Dans un premier temps, il ressort du dossier ferroviaire un élément majeur, à l'effet que les critères utilisés par le gouvernement pour permettre l'abandon des lignes sont très étroits et démontrent le peu de vision du gouvernement fédéral en matière de transport.

L'Office national des transports étudie les demandes d'abandon selon des critères qui ne tiennent pas compte des retombées économiques qui peuvent découler de l'exploitation d'une ligne ferroviaire. L'un des critères fait en sorte que l'Office national des transports ordonne l'abandon des lignes non rentables et qui n'ont pas de chance de le devenir dans l'avenir. Cette rentabilité est celle du transporteur uniquement et ne tient pas compte de la rentabilité socio-économique qui permet aux régions de se développer. L'autre critère permet le maintien d'une ligne rentable ou non rentable qui a des possibilités de le devenir.

(1555)

L'Office prend en compte alors le critère d'intérêt public pour en déterminer l'abandon ou le maintien. Toutefois, la loi n'est pas claire sur le critère d'intérêt public pour les lignes non rentables et qui n'ont pas de chance de le devenir dans le futur. Jusqu'à présent, la pratique nous indique que ces lignes sont abandonnées tout simplement.

De plus, l'Office n'est tenu d'étudier les documents relatifs à l'abandon de la ligne que s'il y a eu opposition à l'abandon de cette ligne, ce qui donne comme résultat que si aucune contestation n'est enregistrée, les lignes peuvent être abandonnées sans que l'Office justifie la demande de l'abandon. On touche donc directement ici au développement économique des régions qui est fortement lié à l'exploitation de ces lignes ferroviaires.

L'abandon de certaines de ces lignes au Canada fait perdre des retombées économiques plus importantes encore que les pertes d'exploitation des transporteurs pour l'opération de ces lignes. Il faut absolument, oui absolument, que le gouvernement considère l'ensemble des retombées économiques des demandes d'abandons de lignes, et non pas seulement des données comptables, des profits et pertes des transporteurs.

L'axe ferroviaire Chibougamau-Chapais-Chambord est un exemple concret lorsqu'on parle des retombées économiques. Le réseau ferroviaire au Lac Saint-Jean dessert entre autres 16 entreprises qui emploient un total de 4 095 employés. La suppression du rail avec et sans transferts à une tête de rail au Lac Saint-Jean affecterait 9 entreprises sur 16 qui devraient faire face à une fermeture imminente, soit la perte de 2 200 emplois. Trois entreprises seraient affectées directement quant à leur rentabilité et accuseraient une fermeture possible à plus ou moins long terme. Il n'y a que deux entreprises sur 16 qui ne seraient aucunement touchées. Voici des réalités concrètes sur les retombées économiques lorsque l'on abandonne des lignes. Plusieurs chômeurs en plus viendraient grossir le nombre déjà impressionnant que connaît le Canada.

C'est inacceptable pour une région comme la mienne où l'on détient déjà le trophée du plus haut taux de chômage au pays. Mais le plus beau cadeau de grec que le gouvernement libéral fait au Québec par l'abandon des lignes ferroviaires a de lourdes conséquences pour le réseau routier. Les routes, faut-il le rappeler, sont de responsabilité provinciale. Il est donc évident que les décisions d'abandonner les lignes ont un impact direct sur les finances publiques des provinces.

Eh oui, l'abandon des lignes augmentera de façon considérable le trafic sur les routes, ce qui implique des coûts supplémentaires de très grande importance. Il faudra dans certains cas construire de nouvelles routes pour accommoder le transport routier supplémentaire. Il faudra également augmenter l'entretien de ces routes-là. La durée de vie sera réduite en fonction de l'augmentation du trafic. Les risques d'accident routier augmenteront proportionnellement à l'augmentation du trafic sur les routes.

Qui paiera la facture et subira les conséquences sur le niveau d'activités économiques de ces régions? Les provinces. Il est évident que le réseau routier se dégradera plus rapidement et qu'il est essentiel de le préserver pour en assurer la sécurité et la qualité.

(1600)

Que le gouvernement libéral ne vienne pas contredire ces faits. Des études prouvent hors de tout doute la véracité des conséquences sur le réseau routier. L'impact de ces transferts du rail vers la route se concrétise par une augmentation d'environ 30 à 40 p. 100 du coût annuel d'entretien relié à la qualité de roulement et à la capacité de portance de la route. Ce sont des coûts additionnels d'entretien pour le ministère des Transports d'environ deux millions de dollars par année sur une longueur de 800 kilomètres seulement, ce qui est approximativement le coût de 2 200 kilomètres par année en surplus.

Si on parle en nombre exact de camions sur les routes, le ministère des Transports a estimé que l'abandon progressif du service ferroviaire entre Lac-Frontière et Vallée-Jonction depuis 1982 a amené entre 4 000 et 7 000 camions de plus sur la route 204 en 1989, et ce quotidiennement. La région de l'Abitibi verrait gonfler l'achalandage de la route 117 de 360 camions supplémentaires quotidiennement, avec naturellement la perte du service ferroviaire.

Deux autres études d'importance ont été faites pour les régions du lac Saint-Jean et de l'Abitibi afin d'évaluer l'impact sur les finances publiques de l'abandon du rail. La première étude décrit différents scénarios d'abandon du rail au lac Saint-Jean. L'un de ces scénarios envisage l'abandon total du rail au nord de Chambord et la création d'une ligne de tête intermodale efficace à Chambord, ce qui amène une évaluation des coûts annuels supplémentaires pour le gouvernement du Québec de près de 700 000 $. Ce chiffre, en plus d'être très important, ne tient pas compte des coûts de construction de routes qui seraient nécessaires pour augmenter la capacité de ce réseau routier. Il ne tient pas compte non plus de la variation ou plutôt de la diminution de durée de vie des routes en raison de l'augmentation du trafic de véhicules lourds.


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La deuxième étude porte sur l'abandon du rail en Abitibi. S'il y a retrait total, les coûts annuels supplémentaires pour le gouvernement du Québec sont évalués à 3,9 millions de dollars. Ces coûts tiennent compte des rentrées additionnelles d'argent au niveau des taxes sur les carburants et des nouvelles émissions de permis de camionnage.

Il est évident que l'abandon des lignes ferroviaires a des conséquences économiques considérables sur les finances publiques des gouvernements fédéral et provinciaux. Le gouvernement doit donc envisager l'élaboration d'une politique globale rail-route. Les décisions devraient se faire en collaboration avec les gouvernements provinciaux concernés parce que ce sont les provinces qui ont la responsabilité du réseau routier et ce sont elles qui paient la note des abandons de lignes ferroviaires.

Au-delà de l'argent il existe également un facteur humain qu'il faut considérer. L'augmentation accrue du trafic a un impact environnemental considérable au niveau des émissions polluantes et du bruit pour les communautés traversées par les routes. Cet état de choses constitue également une augmentation du risque d'accidents routiers. En effet, la Société d'assurance automobile du Québec indique une augmentation importante des blessés graves occupant un camion impliqué dans un accident, soit 41 p. 100 entre 1988 et 1989 alors que le nombre de blessés d'un véhicule de promenade a chuté de 12,9 p. 100 pour la même période.

(1605)

Une autre étude nous permet de conclure que l'augmentation du trafic de camions ne peut que se traduire par une augmentation proportionnellement beaucoup plus grande du nombre de blessés et de morts.

Le mémoire du ministère sur le projet de construction d'une voie ferrée pour l'usine Laterrière d'Alcan affirme qu'en ce qui a trait à la sécurité, le chemin de fer est nettement supérieur au camion. Ce mémoire fait transparaître le fait que les poids lourds représentent 8 à 9 p. 100 des véhicules immatriculés, mais qu'ils contribuent à environ 23 p. 100 des accidents. En 1987, les accidents pour les camions représentaient un chiffre de 1 206 accidents pour chaque million de tonnes transportées. Pour chaque million de tonnes transportées, le train n'a fait que trois accidents.

Ce qui nous intéresse davantage est le fait que pour les poids lourds, les autoroutes s'avèrent quatre fois plus sécuritaires que les autres routes. Or, les régions périphériques ne possèdent pas les autoroutes qu'on retrouve dans les régions centrales. Ces mêmes régions périphériques seront davantage touchées par l'augmentation du risque d'accidents en plus d'être touchées plus étroitement dans leur économie.

Le transport ferroviaire est d'une grande importance. Il fait face à des défis immenses au cours des prochaines années, la concurrence est féroce et notre société est en déclin. Le gouvernement fédéral n'a plus les moyens de subventionner les lignes non rentables qui génèrent des retombées économiques supérieures aux pertes des transporteurs. Il lui faut donc trouver d'autres moyens de maintenir ces lignes en fonction, il en va ainsi du développement des régions.

Puisque le Québec n'a pas l'intention de voir disparaître ces lignes ferroviaires essentielles à l'économie, le Québec n'a pas non plus l'intention d'écoper de la facture. Le Québec ne veut pas voir ses régions périphériques se détériorer économiquement. Le Québec veut qu'Ottawa instaure une politique intégrée du transport. Le Québec veut prendre part aux décisions en matière de transport ferroviaire. Le Québec veut des politiques qui permettront de maintenir les transporteurs en santé et à la fine pointe de la technologie en maintenant le maximum du réseau existant.

Le Québec, par la voix du Bloc québécois, ne se laissera pas passer un sapin. Les conséquences de la vision libérale en matière de transport ferroviaire sont trop dangereuses pour l'avenir du Québec. Le gouvernement devrait soutenir financièrement la création de CFIL puisque le Québec n'a pas l'intention de voir disparaître encore une fois ces lignes ferroviaires essentielles à son économie.

Le fédéral doit impliquer les provinces au niveau des décisions parce qu'elles sont mieux placées qu'Ottawa pour intervenir dans ce dossier. Il faut donner tous les moyens nécessaires aux provinces pour qu'elles mettent en place, par elles-mêmes, un système intermodal rail-route.

M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le député de l'opposition a brossé un tableau plutôt correct de la situation en région, surtout de la dépendance sur un réseau routier et surtout un réseau ferroviaire qui est une garantie, non seulement une garantie, mais surtout un outil de développement économique dans les régions éloignées dont la péninsule gaspésienne, des grandes parties du nord du Québec, le Saguenay-Lac-Saint-Jean et il y en a sûrement d'autres.

La question que j'aimerais poser au député provient du fait que j'ai entendu dire que l'opposition s'intéresserait à une politique nationale intégrée dans le domaine du transport. Cela veut dire, à mon avis, que le Québec devrait consentir à rencontrer le gouvernement fédéral ainsi que ses collègues provinciaux pour en venir à une position commune sur une vraie stratégie de transport qui engloberait évidemment le rail, le transport routier ainsi que le transport aérien.

(1610)

Je crois qu'il est nécessaire d'en arriver à un consensus. C'est un peu ce qu'on fait dans tous les pays, on le voit aux États-Unis, on le voit même dans la Communauté économique européenne. Je me demande pourquoi le Parti québécois, le gouvernement au pouvoir au Québec, ne demande pas à nous rencontrer ici pour établir une politique nationale.

Il est certain que l'état des routes du Québec, comme le savent surtout les députés du Québec, est plutôt lamentable. Les coûts d'entretien sont très élevés. Il est vrai que cela représente des dépenses énormes et importantes pour la province de Québec, mais si le Québec et les autres provinces venaient nous rencontrer et nous offrir la possibilité d'en venir à une politique nationale intégrée dans le domaine du transport, je suis convaincu qu'on pourrait sûrement garantir non seulement le lien essentiel que représente le rail dans les régions éloignées du Québec, mais surtout, le maintien et la réduction des coûts d'entretien du réseau routier de la belle province.

M. Fillion: Monsieur le Président, je dois remercier mon collègue pour sa question. J'aimerais y répondre assez directement. C'est bien sûr que le Québec est prêt à s'asseoir avec les autres gouvernements pour pouvoir discuter d'une politique globale et intégrée du transport ferroviaire, tout comme cela s'est fait dans les pays qu'on vient de citer, dans les pays de la CEE. Ce sont des pays souverains qui ont réussi à s'entendre sur


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une politique et qui, aujourd'hui, font la leçon au Canada qui lui n'a pas réussi à s'entendre encore avec les gouvernements qui l'entourent.

Donc, c'est bien sûr que le Québec est prêt et il veut être partie prenante des décisions. Le Québec souverain n'élèvera pas de frontières entre les provinces du reste du Canada. Donc, à ce moment-là, je pense qu'il est très important que le Québec ait son mot à dire et qu'une table de concertation et de discussion franche soit mise sur pied pour faire un portrait et prendre des décisions concernant le transport ferroviaire.

M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, on n'entend que la démagogie de l'opposition. On dit que tout va se régler à la condition que le Québec devienne un pays indépendant. Mais il y a quand même le constat suivant que nous devons faire dans la situation du rail et des emplois que cela représente au Québec.

Par exemple, CN contribue plus de 500 millions de dollars en salaires et bénéfices au Québec. Il y a plus de 300 millions de dollars en achats, il y a plus de 100 millions de dollars en taxes, il y a plus de 100 millions de dollars en pensions et bénéfices. Il ne faut pas oublier non plus que CN maintient près de 8 000 emplois au Québec et que 30 p. 100 de tous les employés de CN se retrouvent au Québec.

Il est certain que 68 ou 70 p. 100 des cadres supérieurs se retrouvent dans la province de Québec. Au lieu de parler de Constitution et de nous dire que la seule façon de s'en sortir au Québec, surtout dans le domaine du rail et du transport, c'est de faire la souveraineté, cela fausse vraiment le débat. J'ai invité l'honorable député à informer sa maison-mère à Québec et de lui dire que nous, on est prêts à négocier, on est prêts à travailler en vraie fédération.

Je dois quand même rappeler au député que la fédération canadienne est un succès retentissant. Vous n'avez qu'à explorer cette question avec un peu plus de fond et un peu plus d'honnêteté, et tâchez de vous reculer un peu de la partisanerie séparatiste et souverainiste qui ne règle en rien l'avenir du CN et du transport au Canada, et surtout au Québec.

M. Fillion: Monsieur le Président, j'ignore lequel des deux est le plus démagogique. Les faits qu'on vient de citer et les chiffres qu'on vient de citer nous indiquent bien sûr un certain pourcentage d'emplois.

(1615)

Ce que ces chiffres ne montrent pas c'est combien d'emplois vont disparaître en se posant des questions sur ces lignes ou en les faisant disparaître. Combien d'emplois précaires viendront remplacer ces emplois qui sont fort rémunérateurs? C'est là la question.

Quant à la fédération canadienne, nous avons vu jusqu'où cela nous a menés depuis cent ans. La fédération est un gros bateau qui est en train de couler actuellement. On n'a qu'à regarder son déficit, sa dette et ainsi de suite. Je pense que les Québécois et les Québécoises ont la réponse lorsqu'ils regardent les chiffres réels et non pas des chiffres qui tentent de camoufler certaines vérités. Il y aura perte d'emplois si on abandonne ces lignes de chemin de fer et ces emplois seront remplacés par des emplois très précaires.

Le président suppléant (M. Kilger): Je profite tout simplement de l'occasion pour rappeler à tous et chacun de passer par l'intermédiaire de la Présidence. Je cède donc la parole à l'honorable secrétaire parlementaire.

M. Gagnon: Monsieur le Président, encore une fois on parlait de VIA Rail et du CN. On peut quand même parler de VIA Rail. Il y a quand même 1 600 emplois, 45 p. 100 des emplois et des employés de VIA Rail se trouvent au Québec. Quel scénario l'opposition nous propose-t-elle? Je ne comprends plus. On parle d'un système national de transport intégré et après on nous dit: Si on veut passer à un transport national intégré, il faut passer par l'indépendance, c'est-à-dire la souveraineté.

On prend du recul. Je demande à l'opposition de dire oui à la fédération canadienne, oui on peut travailler ensemble, oui on veut conserver les 8 000 ou 10 000 emplois qui dépendent du CN et de VIA Rail au Québec. Je trouve que Montréal est quand même la plaque tournante de l'industrie et je crois qu'on met en péril ces emplois si on poursuit dans cette logique bloquiste qui ne règle en rien l'avenir des travailleurs et travailleuses de cette industrie si importante au Québec.

M. Fillion: Monsieur le Président, je vais m'attarder simplement à la dernière partie du commentaire qui a été fait. On vient de me signaler que Montréal était la plaque tournante. Oui, c'est une plaque tournante qui est en train de déménager à cause de coupures qui ont été faites sans discussion, suite à la fermeture et à l'abandon de certaines lignes, puisque lorsqu'on faisait des calculs pour fermer des lignes, on y ajoutait les frais de réparation qui étaient faits bien souvent dans d'autres centres.

Donc, les chiffres qui sont indiqués actuellement ne donnent pas une vue exacte des choses, ce n'est pas la réalité. C'est bien dommage, mais encore une fois je dois vous signaler que le fédéralisme canadien ne sert pas actuellement les intérêts des Québécois et des Québécoises, quoi que vous en pensiez.

M. Bernard Patry (Pierrefonds-Dollard, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour venir appuyer les dires de mon collègue au sujet du renouveau de l'industrie du transport ferroviaire au Canada. Comme lui, j'estime que le transport ferroviaire est d'une importance capitale pour les expéditeurs. Le réseau ferroviaire canadien est le troisième plus important au monde et l'apport des transporteurs ferroviaires à l'économie canadienne et à la création d'emplois pour des milliers de Canadiens est appréciable.

Nos expéditeurs font face à une vive concurrence sur les marchés mondiaux et exigent à juste titre un système de transport efficace pour les aider à y prospérer. Nos exportateurs doivent compter sur des tarifs de transport réduits pour soutenir la concurrence mondiale.

Les compagnies ferroviaires ont lancé diverses initiatives visant à les rendre plus efficaces. Elles tentent de vendre ou d'abandonner leurs lignes improductives. Par exemple, le CN projette de céder ses lignes situées dans le nord du Québec à des exploitants de chemins de fer secondaires fort probablement. De son côté, le CP est en pourparlers avec le groupe Irving pour la vente d'une partie de son réseau situé au Nouveau-Brunswick.


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La vente de ces actifs aiderait à maintenir l'accès aux réseaux pour certains expéditeurs et permettrait aux transporteurs ferroviaires de se défaire de lignes non rentables. Comme mon collègue l'a fait remarquer, il existe malheureusement des obstacles, tant fédéraux que provinciaux, à la création de chemins de fer secondaires à partir des lignes cédées par les transporteurs ferroviaires de la classe un. Je suis d'accord également pour inclure une revue de cette question dans notre projet de renouveau du transport ferroviaire.

(1620)

Les compagnies ferroviaires se doivent aussi de progresser sur d'autres fronts. Elles doivent continuer à améliorer la qualité de leurs services aux expéditeurs si elles sont appelées à concurrencer le secteur du camionnage et les transporteurs ferroviaires américains. Elles doivent continuer d'améliorer le rapport avec l'industrie du camionnage de façon à rendre l'ensemble du système de transport plus efficace pour les expéditeurs canadiens.

La responsabilité, à ce dernier égard, n'incombe pas qu'aux transporteurs ferroviaires. La main-d'oeuvre est un facteur déterminant de la situation des transporteurs ferroviaires par rapport à la concurrence et de leur rentabilité. Un transporteur ferroviaire ne peut pas survivre sans une main-d'oeuvre qualifiée et dévouée.

Mon collègue l'a mentionné, les salaires versés aux employés des chemins de fer sont parmi les plus élevés dans l'industrie du transport. Leur pouvoir de négociation basé sur l'importance historique des chemins de fer leur a permis d'obtenir des taux de rémunération on ne peut plus généreux et une sécurité d'emploi enviable.

Toutefois, les ententes conclues à ce chapitre ne sont guère réalistes dans l'actuel milieu d'exploitation ferroviaire. Les compagnies ferroviaires demandent une plus grande marge de manoeuvre que ce que prévoit les conventions collectives en vigueur pour le déploiement de leurs ressources humaines. Employés et syndicats veulent, par contre, protéger leurs acquis au chapitre des emplois et des avantages sociaux.

Employeurs et employés doivent s'entendre au sujet de la situation actuelle. Les compagnies ferroviaires sont aux prises avec des problèmes de rentabilité, ce qui les gêne dans leur tentative d'atteindre l'efficacité dont les expéditeurs auront si besoin à l'aube du XXIe siècle.

Il est indispensable que tous les intervenants contribuent au renouveau du transport ferroviaire au Canada, et notre gouvernement est conscient du rôle qu'il est appelé à tenir à cet effet.

Le gouvernement se doit d'établir un système de réglementation suffisamment souple pour que les compagnies ferroviaires puissent maximiser leur efficacité.

Je suis d'accord avec mon collègue pour dire que le système actuel gêne les chemins de fer de plusieurs façons. Ces derniers doivent suivre un processus long et ardu avant de mettre en oeuvre des décisions qui, si elles étaient prises dans un autre secteur, seraient de nature purement commerciale.

Les intérêts des expéditeurs et des collectivités desservies ne doivent pas être négligés, mais il nous faut envisager la possibilité d'accorder aux chemins de fer une plus grande marge de manoeuvre pour la restructuration et la modernisation de leur réseau.

Il faut que nos deux paliers de gouvernement en viennent à examiner la façon de simplifier les règles du jeu auxquelles les chemins de fer canadiens sont confrontés actuellement: la concurrence de l'industrie canadienne du camionnage et des transporteurs ferroviaires américains.

Tout comme mon collègue, j'estime que le régime fiscal imposé aux chemins de fer canadiens est beaucoup plus astreignant que celui de l'industrie canadienne du camionnage ou des chemins de fer américains. Le gouvernement devrait considérer l'importance de ce facteur dans la route des transporteurs ferroviaires vers la rentabilité.

En ce qui concerne la structure de l'industrie, mon collègue a fait état de l'étude que fera le gouvernement au sujet de l'offre spontanée de CP Rail pour l'achat des biens du CN situés à l'est ainsi que du groupe de travail gouvernemental sur la commercialisation du CN.

J'en profite pour souligner que le gouvernement doit examiner toutes les options de restructuration des chemins de fer, tout en rappelant qu'une restructuration d'entreprise ne représente pas la panacée dans le secteur ferroviaire.

Je viens de mettre au premier plan les questions à débattre par plusieurs intervenants, soit les chemins de fer, la main-d'oeuvre et le gouvernement pour le renouveau du transport ferroviaire au Canada. Les tables rondes régionales et nationales qu'organise Transports Canada sur ce projet et que mon collègue a abordées permettront au gouvernement d'obtenir les commentaires des intervenants sur les efforts qu'ils déploient actuellement dans ce dossier.

En conclusion, permettez-moi de rappeler que notre gouvernement est des plus actifs dans le renouveau du transport ferroviaire. Toutes les parties ont cependant un rôle à tenir à cet égard. Notre participation à tous est requise pour la rentabilité des chemins de fer. Il en va des intérêts certes de ces compagnies, mais également de nombreux Canadiens pour qui ce mode de transport est indispensable.

[Traduction]

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat d'aujourd'hui, parce que je suis très favorable au transport ferroviaire et parce que je crois beaucoup à l'avenir du TGV, mais dans le contexte d'un réseau de transport intégré dans l'est du Canada. Je doute qu'on privilégie de nouveau un mode de transport plutôt qu'un autre dans une région du Canada.

Compte tenu de la position que défendent les gens d'en face, je voudrais expliquer à la Chambre certains de principes qui sous-tendent la position du gouvernement à l'égard de cette question très importante.

En novembre 1991, le ministre fédéral des Transports de l'époque, de concert avec ses homologues du Québec et de l'Ontario, a annoncé la tenue d'une étude de faisabilité conjointe sur l'exploitation d'un TGV dans le corridor reliant les villes de Québec et de Windsor. Ce corridor est le plus achalandé au Canada.

L'étude devait durer de 18 à 24 mois et son coût de 6 millions de dollars devait être partagé également entre les trois gouverne-


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ments. La décision de réaliser cette étude a donné suite aux recommandations publiées en mai 1991 par un groupe de travail conjoint Québec-Ontario. Le groupe de travail avait conclu que la décision définitive d'aller de l'avant avec un projet de TGV ne pouvait être prise sans une étude plus détaillée.

L'étude porte notamment sur des prévisions concernant le trafic, les parcours, les technologies disponibles, les questions environnementales, les possibilités de financement par le secteur privé et par les divers gouvernements intéressés.

Toutes ces questions sont essentielles pour prendre une décision judicieuse d'aller de l'avant ou non avec le TGV. Si nous décidions d'exécuter le projet, il fallait aussi décider du mode d'exécution. Pour que le projet réussisse, nous devons obtenir tous les renseignements disponibles.

Le rapport de mai 1991 a aussi recommandé que le gouvernement du Canada participe activement à l'étude. Et c'est ce que nous faisons. Cette étude de faisabilité a pour objet de déterminer si le gouvernement devrait établir ou appuyer des services ferroviaires passagers à grande vitesse dans le corridor Québec-Windsor.

Nous savons tous, y compris les députés d'en face, que les gouvernements ne sont pas toujours les mieux placés pour exploiter des services de ce genre. Souvent, ils ne sont pas les mieux placés pour financer des services de ce genre. Ils le sont parfois, mais il faut déterminer si c'est le cas ici. Si le gouvernement décide d'établir les services, il devra les payer et les exploiter. Cette étude vise à déterminer quel serait le meilleur partenariat entre le secteur privé et le secteur public, y compris le gouvernement fédéral qui, je le répète, s'intéresse beaucoup à ce projet.

Or, les députés d'en face accusent le gouvernement d'avoir adopté une politique à courte vue. En général-c'est du moins comme cela que je l'entends-une politique à courte vue ne tient pas compte du long terme. J'estime que dans ce cas-ci, il nous faut une vision à long terme plutôt que des mesures de circonstance. L'étude des répercussions et de l'incidence du TGV dans l'est du Canada est effectivement conforme à une bonne vision à long terme.

Établir un système ferroviaire moderne, ce n'est pas comme ouvrir un sentier dans le bois. Il ne suffit pas de défricher à la hache en espérant aboutir au bon endroit. C'est un projet d'intérêt public important qui demande du temps et de la planification, et, partant, de l'information et une bonne étude.

(1630)

À mon avis, le gouvernement fédéral fait preuve de responsabilité envers les Canadiens en ne se lançant pas aveuglément dans l'aventure du TGV. Il serait irresponsable de mettre en oeuvre un projet d'une telle ampleur sans recueillir d'abord toute l'information nécessaire.

L'étude en cours est la plus vaste et la plus approfondie a avoir été entreprise au Canada concernant le TGV. Plus d'une trentaine d'experts-conseils y participent. Cette étude n'intéresse pas seulement le transport ferroviaire et ses diverses options, mais aussi l'incidence de ces propositions sur le transport aérien, le transport par autobus, le camionnage dont le député d'en face vient de parler, et tous les autres moyens de transport.

La circonscription de Peterborough, que je représente ici, est située le long de ce corridor. Il y a là-bas l'une des rares grandes compagnies d'autocar du Canada, la Trentway Wagar. Je crois qu'il faut encourager des compagnies de ce genre et la Voie maritime de la même façon qu'on encourage l'industrie canadienne du camionnage. Le corridor Québec-Windsor est probablement la voie de transport la plus fréquentée et la plus complexe au monde. La Voie maritime longe ce corridor. Selon un rapport que la Chambre a reçu, la Voie maritime éprouve des problèmes. Nous avons besoin de la Voie maritime et cela, autant dans l'est que dans l'ouest du Canada.

Les députés d'en face s'inquiètent de l'état des routes au Québec. Je m'inquiète de l'état des routes en Ontario. Je sais que ce dont nous avons besoin dans ce corridor, c'est la bonne combinaison entre le transport aérien, le transport routier par autocar et par camion et le transport maritime. C'est pourquoi le gouvernement examine l'impact d'un TGV sur tous ces moyens de transport dans l'est du Canada et dans tout le pays, impact qui, nous l'espérons, sera positif.

En examinant la possibilité d'implanter un TGV, nous devons penser non seulement aux prochaines années, mais aux prochaines décennies. Est-ce déplacé que de faire une étude approfondie sur un projet de si grande envergure qui a autant de ramifications? Je dirais que non. Le gouvernement ne manque certainement pas de vision en entreprenant une telle étude. Nous devons examiner les coûts et les avantages réels à long terme pour pouvoir déterminer de façon juste la faisabilité d'un projet d'infrastructure de ce genre qui représente des milliards de dollars.

[Français]

Les bénéfices apparents à court terme ne devraient pas motiver notre décision sur l'avenir d'un train à grande vitesse. Le gouvernement a démontré son engagement envers la réduction du déficit. En raison du niveau très élevé des déficits, les gouvernements voudront s'assurer que les nouveaux projets d'infrastructure ne nécessiteront pas une somme considérable de fonds publics.

[Traduction]

Nous devons examiner les sommes que nous allons dépenser et la façon dont elles seront dépensées. Je le répète, la possibilité d'implanter un TGV doit être examinée dans le contexte plus large des besoins globaux en matière de transport au Canada.

Selon l'échéancier actuel du gouvernement, le rapport final de cette étude que je viens de décrire doit être présenté aux trois gouvernements, soit les gouvernements du Québec et de l'Ontario et le gouvernement fédéral, au début de 1995. À l'instar des autres députés de ce côté-ci de la Chambre, je suis impatient de lire ce rapport et je veux que nous ayons le meilleur système de transport intégré dans l'est du Canada.


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[Français]

M. André Caron (Jonquière, BQ): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que j'interviens aujourd'hui sur la motion de mon collègue, sur le transport ferroviaire au Canada. Je vais surtout m'attacher à la dimension du transport des voyageurs et illustrer mon propos en faisant le lien avec les lignes de transport-voyageurs Jonquière-Montréal et Senneterre-Montréal.

(1635)

Quand on parle du transport-voyageurs par train, on a l'impression, à entendre souvent certains chroniqueurs et certaines réflexions, qu'on parle d'un moyen de transport du XIXe siècle, qu'on parle de chevaux et de diligences. Il faut bien être conscient que le moyen de transport-voyageurs par train est un moyen de transport moderne, efficace, qui est un choix heureux pour nombre de pays où le transport-voyageurs est particulièrement efficace. On peut citer le Japon, la Corée, le Portugal, l'Espagne, la Hollande, la France et même les États-Unis, qui est un pays qui possède un territoire qui se rapproche de celui du Canada.

C'est sûr que le transport-voyageurs a des problèmes au Canada. Nous sommes un pays qui a une faible densité de population. Nous sommes par contre un pays qui a une infrastructure ferroviaire très importante, la troisième ou la quatrième du monde. Nous avons un passé qui s'est modelé autour du chemin de fer. Les compagnies de chemin de fer, que ce soit celles de l'Ouest ou celles qui ont traversé le Québec vers l'océan Atlantique ont façonné notre histoire. Elles ont été importantes dans notre histoire.

On peut dire qu'actuellement le Canada est un pays bien pourvu en termes d'infrastructures ferroviaires et en termes aussi de moyens de transport pour accommoder les voyageurs par train. Par contre, on a des problèmes. Certaines lignes ont des difficultés. On sait que le transport-voyageurs est assez fortement subventionné au Canada et on en reparlera tout à l'heure. On parle de faible achalandage, on a des difficultés. On sait que le transport par train c'est peut-être 3 p. 100 du transport-voyageurs au Canada et si on regarde seulement le transport en commun, c'est à peu près 12 p. 100. Je ne nierai pas que de sérieux problèmes existent. Je veux établir deux choses pour continuer mon exposé.

D'abord, j'aimerais que tout le monde comprenne que le chemin de fer c'est un moyen de transport efficace pour les voyageurs et c'est un moyen de transport aussi qui a ses lettres de créance, ses lettres de noblesse.

Au Canada, en 1977, on a retiré la responabilité du transport-voyageurs aux compagnies Canadien National et Canadien Pacifique et on l'a donné à une nouvelle compagnie créée qui s'appelle VIA Rail. C'est une compagnie qui est une créature du gouvernement en ce sens que c'est le gouvernement qui a décidé que le transport-voyageurs au Canada se ferait au moyen de cette compagnie-là. C'est une compagnie qui n'a pas eu de capital de départ. Il n'y a même pas eu de loi pour l'encadrer, en ce sens que c'était un décret. À ce moment-là, il reste que l'autonomie de cette compagnie-là, son pouvoir, son indépendance par rapport au gouvernement a été grandement réduite en vertu de cette situation. La compagnie s'engageait simplement à gérer et à commercialiser le transport par train au Canada. Il faut dire qu'au moment de sa formation, VIA Rail a hérité d'un parc de voitures et de locomotives qu'on pourrait qualifier d'inadéquat. Le système n'avait pas été renouvelé. Il y a des équipements qui étaient vieux et qui avaient besoin d'être remplacés.

VIA Rail s'est établi. Il était entendu que le gouvernement venait éponger les dettes de VIA Rail, les coûts d'exploitation. Chaque année, une subventiona été fournie de façon à ce que VIA RAil puisse continuer à exercer ses responsabilités. C'est environ 300 millions par année et dans les prochaines années, des coupures sont prévues par le ministère des Transports. On voit quand même que l'avenir de VIA Rail est dans une situation inquiétante. Dans les dernières années, une commission royale d'enquête sur le transport-voyageurs, qui a coûté en passant 23 millions de dollars, a été mise sur pied. D'après ce que je sais, la conclusion de cette commission d'enquête sur le transport ferroviaire, c'est de laisser le marché décider des services qui doivent être fournis et de faire payer par l'utilisateur la totalité des coûts des services.

(1640)

Autrement dit, il y a un courant de pensée actuellement au Canada qui dit que le transport ferroviaire c'est simplement un service comme un autre, même pas un service public, c'est comme n'importe quelle entreprise privée. Si l'entreprise ne couvre pas ses frais, elle n'a qu'à fermer sans que les pouvoirs publics aient quelque responsabilité dans cette fermeture.

Je pense que nous sommes dans une situation critique. Les régions, ma région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, celle de l'Abitibi, se sont développées en partie à cause du chemin de fer. On pourrait dire que nous avons simplement un attachement nostalgique à ce moyen de transport, mais ce n'est pas le cas. Nous croyons que le chemin de fer peut devenir, au Canada, si on l'intègre avec les autres moyens de transport, un service efficace et rentable.

Je prends par exemple la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Nous avons une ligne de transport-voyageurs qui va de Jonquière jusqu'à Montréal. Il y a des problèmes. Il y a des problèmes d'achalandage, quoique ces dernières années on a noté une augmentation notable du public qui a utilisé ce moyen de transport. Il y a des problèmes parce que le train c'est presque un moyen de transport public qu'on cache.

D'abord, il y a seulement trois trains qui partent de Jonquière par semaine. Ça prend quand même quelqu'un qui a du temps pour voyager par le train ou qui est maître de son horaire. Les heures ne sont pas très facilitantes. Il y a de gros problèmes de correspondance. Je peux citer mon cas. Si je veux venir à Ottawa par train, je ne peux me rendre en une journée. Il faut que je couche à Montréal et que je prenne le train le lendemain pour me rendre à Ottawa.

Le temps de parcours est à repenser; ça prend environ huit heures et demie pour venir de Jonquière à Montréal, c'est long. Cela pourrait être beaucoup mieux. Le temps pourrait être amélioré, si on considère les tables de vitesse qui pourraient être appliquées et si on considère aussi qu'on pourrait donner priorité aux trains de voyageurs plutôt qu'au transport de marchandises, comme c'est le cas actuellement.

Il y aurait aussi des problèmes techniques à régler. Je pense à la réservation de billets, il n'y a aucun terminal à Jonquière pour


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réserver des billets. Chaque fois qu'on achète un billet, la préposée doit téléphoner à Montréal. Si on veut tuer le système de réservations, je pense que c'est la meilleure façon. Quant à la publicité, il n'y en a aucune. Je n'ai jamais vu dans ma région de publicité pour présenter le service de train voyageurs, que ce soit pour les tarifs, le temps ou les périodes. Il y a de gros problèmes.

Tout cela pourrait être grandement amélioré. Mon collègue le député de Champlain a déposé cet été un mémoire au ministre du Transport faisant valoir qu'il y a beaucoup de municipalités entre Jonquière et Montréal, et Montréal et Senneterre, qui ne sont pas desservies par la route. Le train, c'est un peu le seul moyen de transport public pour ces localités et ce sont quand même des localités où il y a une population importante.

Je pense entre autres sur la ligne entre La Tuque et Senneterre, à des localités comme Weymontachie où il y a 570 personnes, à Casey où il y a 250 personnes, Parent où il y a 815 personnes. Il y a des citoyens le long de la voie ferrée qui ont besoin de ce service pour pouvoir aller vers les grands centres et vaquer à leurs obligations.

En ce qui concerne le transport des voyageurs, dans certains pays le train est un moyen de transport efficace, c'est un moyen de transport rentable dans une certaine mesure, et au Canada on ne semble pas en avoir conscience, on n'a pas l'air de prendre conscience de l'importance de ce moyen de transport. L'illustration que je vous ai donnée en ce qui concerne la ligne Jonquière/Montréal, le montre bien, en ce sens qu'on n'a rien fait pour essayer d'améliorer les services. On n'a rien fait pour montrer aux gens que c'est un moyen de transport efficace.

(1645)

Monsieur le Président, avant de terminer, parce que je veux quand même que mes confrères aient le temps de s'adresser à la Chambre sur le sujet, je voudrais quand même dire qu'il serait important qu'au Canada, au lieu de mettre de côté un moyen de transport public de voyageurs en évoquant une certaine rentabilité et les lois marchandes, il serait important qu'on regarde un petit peu plus loin pour se rendre compte, par exemple, que le transport des voyageurs peut représenter une économie d'énergie ainsi qu'un acquis en ce qui concerne la qualité de vie des voyageurs. Il est souvent beaucoup plus agréable de voyager par train que de voyager en autobus en étant serrés comme des sardines dans le fond de l'autobus.

Il y a aussi une économie de l'espace physique parce que la concurrence pour le transport public de voyageurs par chemin de fer c'est la route et l'autobus, mais surtout l'automobile. Si on considère ce qui s'est passé dans les dernière années et ce qui s'en vient dans l'avenir, le parc automobile augmente beaucoup. Cela veut dire qu'il va falloir de plus en plus de routes, qu'il va falloir de plus en plus d'espace, qu'il va falloir aussi tenir compte du fait que sur ces routes il y a beaucoup de circulation et beaucoup d'automobiles. Alors, il y a un problème de sécurité assez important. Et il va falloir aussi, si la quantité d'automobiles sur les routes continue d'augmenter, voir à la construction d'infrastructures coûteuses.

Alors, au Canada, au lieu de prendre simplement une attitude comptable très à court terme, si on regarde le chemin de fer et si on l'intègre avec les autres transports publics et le transport automobile, je pense qu'il y a moyen de faire en sorte que nous ayons un système de transport moderne où les besoins de la population ainsi que les coûts de transport sont pris en considération. Je ne nie pas qu'il faille diminuer le plus possible le coût des infrastructures et du transport ferroviaires, mais je pense qu'en intégrant et surtout en se rendant compte qu'une subvention accordée par l'État aux chemins de fer représente probablement, à long terme, des routes en moins à construire et une augmentation de la sécurité qui se reflète par une quantité moindre d'accidents lors des déplacements par automobile. Je pense que c'est à considérer aussi.

Alors, quand on me dit qu'il faut couper le transport des voyageurs par chemin de fer parce que ce n'est pas rentable, je pense qu'il faut regarder aussi ce que coûte le transport routier en infrastructures, en pollution, en environnement et en espace utilisé pour la construction des routes. Il faut tout prendre en considération.

J'espère que la journée d'aujourd'hui permettra aux responsables du gouvernement libéral de se rendre compte de leurs responsabilités et qu'ils prendront conscience que le chemin de fer doit entrer en ligne de compte quand on parle du transport des voyageurs au Canada.

[Traduction]

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, j'écoute les députés du Bloc québécois parler de leur position et plusieurs choses semblent revenir souvent dans ce qu'ils disent.

Tout d'abord, ils attendent encore que le gouvernement injecte davantage d'argent au Québec en accordant des subventions pour aider à maintenir un service ferroviaire qui, dans l'ensemble du Canada, éprouve énormément de difficultés à faire ses frais.

Nous avons entendu les bloquistes parler à plusieurs reprises d'un train rapide entre le Québec et l'Ontario, même si rien ne prouve qu'un tel train serait rentable. D'ailleurs, toutes les statistiques dont je dispose indiquent le contraire. Un tel train serait inévitablement déficitaire.

Je me demande comment un parti qui est très conscient de la position financière, de la crise, que le Canada traverse peut continuer de demander avec autant de constance que le gouvernement emprunte davantage d'argent pour fournir des services et des infrastructures au Québec. Il est insensé que les députés bloquistes continuent de croire que l'argent pousse dans les arbres et que le Québec subit un préjudice depuis 20 ou 30 ans. De tels raisonnements sont tout simplement illogiques. En fait, depuis de nombreuses années, le Québec accumule les déficits dans le système de péréquation. On ne peut pas vraiment dire que le Québec soit saigné de ses fonds.

(1650)

J'arrive à ma dernière remarque. Le Bloc québécois, qui demande toujours plus de fonds pour les infrastructures et les services au Québec, est arrivé à la Chambre des communes dans le but avoué de faciliter la séparation du Québec.

De toutes les propositions illogiques que j'ai entendues dans ma vie, la pire est celle des bloquistes qui ont l'audace de demander à la Chambre des communes de consacrer toujours plus d'argent au Québec tout en s'efforçant de réaliser la sépara-


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tion de cette province. Quelle est la logique dans tout cela? Finiront-ils par se faire une idée? Il est illogique de rester ici à les écouter.

[Français]

M. Caron: Monsieur le Président, il ne s'agit pas d'injecter de l'argent au Québec, il s'agit d'injecter de l'argent dans le transport ferroviaire au Canada, parce que c'est un moyen de transport efficace, pour les voyageurs et pour les marchandises.

Mon collègue évoque une perspective comptable et parle de rentabilité, mais je vous dirai que si on prend la même perspective, est-ce que le Canada est rentable? Chaque jour, nos collègues du Parti réformiste nous disent que la dette augmente, qu'on est près de la faillite. On parle de faillite, alors, à ce compte-là, parce que le Canada n'est pas rentable, fermons le Canada. Je le dis avec le sourire, parce que mon collègue sait bien que ce n'est pas si simple.

Un pays doit donner des services publics à ses citoyens, que ce soit l'éducation, les hôpitaux, les routes, l'armée, les impôts, aller chercher les taxes, un minimum de fonction publique. Et toutes ces choses, si on les regarde à très court terme, on peut toujours dire qu'elles ne sont pas rentables. Par exemple, si je considère chez nous l'hôpital de Jonquière, est-ce que c'est un hôpital rentable? J'ai l'impression que ça coûte beaucoup plus cher que ce que les gens dépensent individuellement pour être soignés.

À ce compte-là, on pourrait bien dire: «Privatisons.» Mais, si on privatise les hôpitaux, les écoles, les routes, l'armée, les prisons, à un moment donné, on va privatiser le gouvernement et il n'y aura plus de gouvernement, il n'y aura plus de pays et il n'y aura plus d'État.

Je pense qu'il faut regarder un petit peu plus loin. Il faut regarder aussi l'histoire. Il faut voir que de tout temps, les services publics ont été subventionnés par l'État, et ce qui fait qu'il y a un État, c'est que l'État puisse donner le service public. Et nous pensons, nous, que les transports au Canada, que ce soit le transport routier, que ce soit le transport ferroviaire qui s'intègre à tout cela, font partie des services publics et que les citoyens, compte tenu des taxes qu'ils paient, sont en droit d'avoir des services adéquats à ce sujet.

[Traduction]

M. Harris: Monsieur le Président, je pense que les députés du Bloc Québécois ne se rendent tout simplement pas compte de la situation. Le Canada est presque complètement à sec, si ce n'est pas déjà le cas. Nous avons une dette de 535 milliards de dollars. Nous avons un déficit budgétaire annuel de 40 milliards de dollars. Il n'y a tout simplement pas d'argent pour accroître les services. Le seul moyen de le faire à ce stade, c'est d'augmenter les impôts. Bien franchement, ce n'est pas une proposition viable. Les contribuables canadiens, aussi bien les particuliers que les sociétés, croulent sous les impôts. Ils ne peuvent pas en payer davantage.

Si nous ne mettons pas de l'ordre dans nos finances, si nous ne freinons pas le déficit, si nous ne commençons pas à réduire notre endettement, le Canada va se heurter à un mur. Et tous ces services, ces services de transport, ces services hospitaliers, tous ces services, ces infrastructures dont parlent les députés du Bloc Québécois, vont simplement devoir disparaître, un point c'est tout.

Le moment est venu pour le Canada d'établir une nette distinction entre ses désirs et ses besoins. Ce dont nous avons besoin, c'est ce que nous avons les moyens de nous offrir; ce que nous désirons, c'est ce que nous n'avons pas les moyens de nous offrir. Les bloquistes parlent de ce qui est désirable, mais il ne devrait même pas en être question à l'ordre du jour maintenant, étant donné notre situation financière.

(1655)

[Français]

M. Caron: Monsieur le Président, quand on regarde un pays, on peut regarder sa dette, mais il faut aussi regarder les actifs. Est-ce que le Canada vaut plus que les 500 milliards de dette que nous avons actuellement? Si le Canada ne vaut pas plus que ça, à ce moment-là, il est sûr qu'on va disparaître. Mais si on regarde ce que vaut le Canada, tous les actifs, la production, si on regarde ce qu'on est, toutes nos richesses naturelles, mettez tout ça ensemble et mettez ça à côté de notre dette, je pense qu'il y a une bonne différence. Mon collègue conviendra que simplement regarder la dette sans regarder les actifs, en bon procédé comptable, c'est un peu court.

Alors, je m'arrête, monsieur le Président, je veux simplement dire que je pense qu'il faut aussi regarder l'actif au lieu de simplement regarder la dette.

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, je veux tout simplement féliciter mon collègue pour son excellente analyse et surtout pour avoir expliqué aux réformistes qui ne comprennent strictement rien qu'il y a une différence entre un actif et une dépense.

Quand on a un actif qui est productif et qui risque de le devenir aussi à long terme, si on investit dedans et qu'il correspond à une tendance internationale qui fait en sorte qu'on utilise de plus en plus le système ferroviaire pour se déplacer, alors je pense qu'il va comprendre un jour qu'on peut enrichir un pays avec des actifs et qu'on peut aussi en arriver à contrôler les dépenses.

Si on écoutait les gens du Parti réformiste, avec qui j'ai l'honneur de travailler tous les jours au Comité des finances, on viderait, je vous dirais, neuf dixièmes du Canada pour remplir le dizième qui reste, parce qu'il n'y a rien de viable, selon eux. Alors, s'il n'y a rien de viable, je me demande ce qu'ils font dans un parti fédéraliste. Il faut démanteler ce pays-là. S'ils n'y croient pas en ce pays-là, pourquoi demeurent-ils en politique? Est-ce qu'ils sont là pour améliorer les choses ou s'ils sont là pour se faire des complices d'une démolition en règle? Quand ce n'est pas le système ferroviaire, on démolit en règle les programmes sociaux. On a commencé par l'assurance-chômage, l'éducation postsecondaire, la santé. Alors si c'est ça faire de la politique, pour eux, alors chapeau!

Le président suppléant (M. Kilger): Un bref commentaire du député de Jonquière.


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M. Caron: Monsieur le Président, mon collègue a très bien résumé. Un pays, c'est plus qu'un compte de banque, c'est plus qu'un rapport de comptabilité. C'est ce qu'on veut faire nous au Québec. On espère avoir l'occasion de le faire prochainement. À ce moment-là, on va pouvoir dire aux gens du Parti réformiste que ça peut très bien fonctionner, même avec des gens comme nous qui ont l'air un peu rêveur, mais quand on n'a pas de rêves, on meurt, monsieur le Président.

M. Raymond Bonin (Nickel Belt, Lib.): Monsieur le Président, il est bien beau de vouloir démembrer un pays, mais en même temps démembrer le système de voies ferrées au Canada, c'est quelque chose qui serait trop facile à faire.

Les Canadiens et Canadiennes ont été amenés à croire que le Canadien National est une compagnie qui n'est pas efficace et qui ne répond pas aux besoins des Canadiens. En faisant un peu de recherche, on se rend compte que le Canadien National, avec les lois du gouvernement du Canada qui lui sont imposées, qui l'empêche de devenir compétitif, qui l'empêche d'aller vendre des parts lorsqu'il est temps d'avoir un peu d'actifs, le Canadien National, lorsqu'il a besoin d'argent, il faut qu'il aille emprunter de la banque ou emprunter de différents individus, alors que le Canadien Pacifique peut vendre des parts.

Même avec ce terrain de jeu qui n'est pas compatible, qui n'est pas semblable, le Canadien National est venu à bout de prendre des décisions qui ont été très importantes. Il a été critiqué lorsqu'il a pris la décision de bâtir le tunnel pour raccourcir de 12 heures le trajet Montréal-Chicago. Les premiers à le critiquer étaient leurs compétiteurs.

Alors aujourd'hui, il est facile de se lever en Chambre et dire que l'on est contre toute démarche pour essayer de sauver le Canadien National, juste pour être contre. Il faut faire face au fait qu'au Canada, les brouettes d'argent qui viennent des contribuables, pour les sociétés de la Couronne, lorsqu'elles ont des difficultés, c'est fini. Il faut devenir efficace, il faut devenir innovateur, et puis on sait déjà que le Canadien National est une compagnie qui peut faire compétition de front commun avec Canadien Pacifique sans aucune difficulté. Je suis même convaincu qu'il est encore plus capable.

(1700)

[Traduction]

Un autre point important est que, tandis que le CN investissait largement dans son infrastructure, le CP n'en faisait rien. Il est donc normal que maintenant, devant la nécessité d'investir lui aussi dans son infrastructure, le CP veuille faire ce qui s'est fait autrefois et demande au gouvernement: «Vendez-nous cette société pour un montant symbolique, et nous vous garantissons que vous ne perdrez plus d'argent.» Cette époque est révolue. Le CN est une société de grande valeur, malgré les pressions qu'exerce le gouvernement. Elle est efficace. Ses employés sont les meilleurs en Amérique du Nord. Ils veulent que le CN soit une entreprise qui marche bien.

Dans ma circonscription, Nickel Belt, nous avons formé un comité qui s'appelle Capreol Save Our Rail Committee. Sur la ligne du nord, nous avons dû repousser les offensives du CP qui, au départ, voulait fusionner avec le CN. C'est une quasi impossibilité quand on sait que les deux concurrents n'ont pas été des amis très proches pendant de longues années.

L'autre possibilité était d'acheter le CN pour une bouchée de pain, comme le système de transport à Québec a été acheté par un éminent Canadien, un concitoyen de Sudbury, je dois préciser. Il aurait dit: «Vendez-moi la compagnie pour un dollar, et je vous promets que nous ne perdrez plus un sou.»

Je suis un retraité d'Air Canada, une victime de la privatisation. Mais je suis maintenant le meilleur porte-parole que cette société puisse trouver, et je ne lui coûte rien. Cette entreprise était menottée, entravée par les lois fédérales, mais elle a connu une période de croissance.

[Français]

Lorsque je travaillais pour Air Canada, nous avions un programme qui permettait aux employés de faire des suggestions. Si ces suggestions permettaient de faire des économies on recevait 10 p. 100. On avait de très bonnes idées comme employés. Malheureusement, chaque fois qu'on avait une idée qui avait du bon sens pour rendre la compagnie rentable, la réponse était: Oui, mais la loi du Canada empêche les corporations de la Couronne de pouvoir faire cela.

Comment une telle compagnie peut-elle être concurrentielle sur le marché international? On le sait maintenant, nos compétiteurs ne sont pas à l'intérieur du Canada, ils sont un peu partout dans le monde. La compétition mondiale veut que le Canadien National puisse être compétitif sur un pied d'égalité avec CP.

[Traduction]

Dans ma circonscription, avec le concours du Capreol Save Our Rail Committee, nous avons organisé une campagne qui prendra de l'ampleur. Nous voulons faire connaître aux Canadiens les faits réels sur la situation du CN. Ce n'est pas une société inefficace. C'est une excellente société, et ses employés sont hors pair. Elle a un bon rendement et réalise des bénéfices malgré les lois auxquelles elle est assujettie.

Nous ne devons pas oublier que le secteur ferroviaire passe maintenant par où sont déjà passés les transports aériens. N'oublions pas que CP Air a été achetée par une société plus petite qu'elle, Pacific Western. À l'époque, la société souhaitait fusionner avec Air Canada, et ensuite elle a voulu l'acheter. L'histoire se répète.

Qu'ont dit les Canadiens? Qu'il nous faut de la concurrence. Nous ne pouvons nous permettre d'avoir une seule compagnie aérienne ou une seule compagnie ferroviaire parce que les expéditeurs seront à leur merci.

Ce que demandent les Canadiens du Capreol Save Our Rail Committee, c'est la privatisation du CN. Les employés signent des cartes disant qu'ils veulent participer à cette transformation. S'ils le veulent, c'est parce qu'ils savent que, tant que le CN sera une société d'État, les autres sociétés chercheront à profiter de sa position favorable. Ceux qui sont le plus à même de profiter de la bonne position qu'occupe le CN, ce sont les employés. Nous


7830

réclamons donc une privatisation dont les employés prendraient la tête, comme cela s'est fait chez Air Canada.

(1705)

[Français]

Je pense qu'il est important de se rappeler, de se souvenir aussi qu'Air Canada, cette année, s'attend à au moins équilibrer ses livres et probablement faire un profit. Et la privatisation d'Air Canada a eu lieu pendant une récession. Pendant que des corporations au Canada ont fermé leurs portes, Air Canada a réussi à devenir la compagnie compétente qu'elle est aujourd'hui, et puis cette année, elle s'attend à avoir des livres équilibrés, ou peut-être même faire un profit.

[Traduction]

Si la société Air Canada y est parvenue durant une récession, je suis convaincu que le CN peut le faire alors qu'il y a une reprise économique. J'encourage tous les Canadiens à montrer leur désir de participer à une privatisation du CN dont les employés seraient les fers de lance.

Je ne reviendrai pas sans cesse sur le passé comme le font les députés du Bloc québécois. Je ne passerai pas en revue toutes les injustices dont ils ont parlé. Je me permettrai simplement de dire que l'atelier de réparations de Capreol, une installation moderne plus efficace que celle de Joffre, au Québec, a été fermée au profit de cette dernière. Comme de bons Canadiens qui se respectent, nous n'avons pas pleuré sans cesse sur notre sort. Nous avons essayé de trouver des solutions pour sauver ces installations. Nous n'avons pas abandonné. Les employés de ces installations sont en train de signer une entente pour acquérir des actions dans le CN. Il ne s'agit pas d'un engagement ferme, mais cela signifie qu'il existe une volonté en ce sens.

J'exhorte les Canadiens, les députés de l'opposition et tous les députés fédéraux à examiner sérieusement les avantages de privatiser le CN.

À titre d'ancien employé d'Air Canada et de retraité, je sais la fierté et la dignité qu'acquièrent les personnes qui, comme moi, ont été au service d'une entreprise pendant 25 ans. Dans le cas de l'usine de Capreol, trois générations sont visées. À propos de fierté, si quelqu'un demande à son grand-père comment les choses se passaient quand il travaillait pour la société de chemin de fer, lui, de son côté, il demande à son petit-fils ou à sa petite-fille comment les choses se passent aujourd'hui. La fierté de travailler pour une entreprise est un sentiment bien particulier qu'il faut avoir éprouvé. Il est trop facile de dire qu'on peut travailler pour une entreprise pendant de nombreuses années, bénéficier d'une excellente prime de départ et adorer cette entreprise ou obtenir une prime de départ pitoyable et s'en souvenir à tout jamais avec animosité.

Air Canada a déjà appartenu au CN.

[Français]

Les employés de ces compagnies, Air Canada et Canadien National, sont d'une race fière. Ce sont eux qui ont bâti la compagnie. Si j'ai une critique à faire à la compagnie Canadien National, c'est qu'il existe au Canada une attitude, parmi les Canadiennes et les Canadiens, à savoir que le Canadien National est une compagnie non efficace, est une compagnie qui perd de l'argent, qui prend des décisions qui n'ont aucun sens. Et si les Canadiens et les Canadiennes en sont venus à croire ça, et que moi, dans ma recherche, je découvre que les décisions prises par cette compagnie sont des bonnes décisions et qui aujourd'hui leur offre un profit, une rentabilité à la sortie d'une récession, déjà il faut croire qu'on ne peut garder le statu quo au Canadien national.

[Traduction]

Il faut que cela change. Les gouvernements doivent essayer de comprendre ce qu'ils doivent offrir à la population. Nous nous débattons pour offrir à la population des programmes sociaux, pour aider les nécessiteux, pour soigner les malades et pour nourrir ceux qui ont faim, tout en engloutissant des millions de dollars dans une entreprise qui peut mieux réussir toute seule. Le moment est venu pour les Canadiens de faire face à la réalité. Nous n'imprimons plus de billets de banque. Les temps sont durs, mais nous sommes en train de nous en sortir.

(1710)

Le système ferroviaire s'inscrit dans notre stratégie nationale sur le transport des marchandises et des passagers. À mon avis, si les sociétés ferroviaires n'ont pas assuré efficacement le transport des passagers, c'est à cause des lois du gouvernement. Assouplissons celles auxquelles elles sont assujetties. Laissons-les concurrencer directement en modernisant les lois.

La concurrence ne se fera plus seulement entre le CP et le CN. Le CP et le CN doivent en effet se trouver des partenaires. Ils doivent avoir les mêmes outils de travail, car leur concurrence est au sud de nos frontières. Leur concurrence, c'est l'industrie du camionnage. Il semblerait que l'industrie du camionnage ne puisse plus maintenir le même système de transport des marchandises que dans le passé. Nos routes ne peuvent l'absorber. Les Canadiens se rendent compte qu'ils subventionnent les routes de la même manière que nous subventionnions autrefois les chemins de fer.

Il est très difficile pour un camionneur de conduire à 4 heures du matin sachant qu'il traîne une dette de 200 000 $ sur sa semi-remorque derrière lui. Je crois fermement qu'à l'aide d'une bonne planification nous pourrons mettre sur pied un système viable tant pour les chemins de fer que pour l'industrie du camionnage. J'estime qu'il est raisonnable, en tant que Canadiens, de s'attendre à ce que tous participent et à ce que tous y trouvent leur compte. Je crois que le transport des marchandises au Canada devrait être assuré par un partenariat entre les chemins de fer et l'industrie du camionnage.

Pour conclure, je voudrais réitérer ce que j'ai déjà dit. Le comité de Capreol qui lutte pour la survie du chemin de fer a travaillé d'arrache-pied. Il y a quelques mois, les travailleurs du chemin du fer risquaient de perdre leur emploi. Les gens de Capreol sont très unis, ils sont merveilleux. J'ai assisté à leur défilé du père Noël samedi dernier. Vous auriez dû voir à quel point ils étaient unis et proches les uns des autres.

Quand les représentants du CP sont venus les voir, ils ont dit: «Nous allons vous offrir un dollar pour votre compagnie et vous n'allez plus jamais perdre le moindre cent.» Du même souffle, ils ont dit: «La première chose que nous allons faire le jour où nous serons propriétaires de ce tronçon du CN, c'est fermer la ligne du nord.» Nous n'avons pas l'intention de faire fléchir ni le gouvernement ni le CN. Nous abordons cette question d'une manière


7831

différente, moderne, propre aux libéraux et aux Canadiens. Nous faisons des réunions. Nous travaillons ensemble. Nous avons des opposants. Nous discutons avec eux. Nous apprenons à les connaître et à travailler avec eux.

Nous allons offrir une solution aux Canadiens et nous allons maintenir un chemin de fer transcontinental, du moins celui du CN. Nous allons demander qu'une loi soit adoptée pour garantir le maintien d'un chemin de fer transcontinental. Je sais que c'est là le souhait du CN s'il devait être privatisé. Il serait préférable pour tous les Canadiens que l'on maintienne cette ligne ainsi que celle du CP, si c'est possible.

Nous pourrions nous faire concurrence jusqu'à ce que nous apprenions à nous compléter dans un système de transport qui ferait l'envie non seulement de l'Amérique du Nord, mais encore du monde entier. Quand les deux compétiteurs apprendront à se compléter plutôt qu'à se concurrencer, nous mettrons sur pied un système en collaboration avec l'industrie des transports. Imaginez donc un système qui ferait l'envie de tous.

Le président suppléant (M. Kilger): Conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement ce soir. Conformément à l'accord conclu plus tôt aujourd'hui, la Chambre entendra d'abord la réponse du gouvernement à la question soulevée par la députée de Calgary-Sud-Est au sujet du CRTC, question qui figure à la page 7766 du hansard du lundi 14 novembre 1994; puis, le député de Notre-Dame-de-Grâce (M. Allmand), la justice.

(1715)

[Français]

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, avant de commencer mon allocution, je tiens à vous informer qu'elle n'aura que dix minutes, permettant par le fait même à mon collègue d'Argenteuil de prendre la parole.

La motion déposée aujourd'hui par l'opposition officielle demande à cette Chambre de dénoncer l'inaction et le manque de transparence du gouvernement en ce qui a trait à la restructuration envisagée des chemins de fer, et notamment à son manque de vision concernant le transport à grande vitesse.

Force est de constater que le gouvernement traîne lamentablement de la patte dans le dossier du TGV, au point de se demander s'il ne regarde pas tout simplement le train passer!

À l'heure où le gouvernement est préoccupé de prendre le virage de l'autoroute de l'information, il néglige de prendre le virage du transport à grande vitesse, ce qui permettrait aux citoyens et citoyennes du Canada et du Québec d'avoir accès à un réseau moderne, efficace et économique de transport.

Le TGV représente une véritable révolution dans le domaine des transports de surface, une révolution, à certains égards, aussi marquante que celle de l'autoroute de l'information. Les Européens l'ont bien compris. Alors que Français, Allemands et Suédois ont tous réglé leur montre à l'heure du transport à grande vitesse, il reste au gouvernement canadien de se mettre à l'heure de la modernité, puisque l'implantation d'un train à grande vitesse dans le corridor Québec-Windsor aurait pour conséquence d'assurer à une population de près de 10 millions de personnes un moyen de transport ultra-rapide.

Un trafic de l'ordre de 15 millions de déplacements annuels nécessite des moyens de transports efficaces. À l'aube du troisième millénaire, le Canada et le Québec se doivent de développer un moyen de transport de l'avenir. La technologie du TGV est la solution nécessaire et logique.

Cette technologie développée initialement par la France s'est caractérisée par sa rentabilité, sa sécurité, sa commodité, son confort et surtout par ses performances de vitesse. Découlant d'un concept technologique révolutionnaire, respectueux de l'environnement, le TGV amoindrit la pollution sonore et réduit grandement la consommation d'énergie. Par ses performances, il s'est imposé au marché européen pour les déplacements de moyennes et grandes distances. En accédant à des vitesses commerciales de 300 km/heure, il est devenu par rapport au mode traditionnel un moyen de transport très compétitif. Comparé à l'automobile, le TGV est plus rapide, plus confortable, plus sécuritaire et plus économique. Comparé à l'avion, il s'en démarque largement, puiqu'il canalise le déplacement de la population sur l'ensemble d'un territoire; il permet plus facilement l'accessibilité aux centres-villes; par les voies ferrées existantes, il pénètre au coeur des cités.

La technologie du TGV allie donc trois caractéristiques essentielles au succès d'un réseau de tranport moderne: connexité, connectivité et nodalité. En tenant compte de ces caractéristiques, l'implantation d'un train à grande vitesse dans le corridor Québec-Windsor n'est plus un projet à laisser sur une voie de garage, mais une nécessité.

M. Rémi Bujold, président de l'une des firmes de consultation ayant travaillé sur le dossier du TGV, déclarait que ce projet sera rentable s'il accapare 40 p. 100 du marché du corridor Montréal-Toronto, lequel marché ne représente à l'heure actuelle que 13 p. 100 des besoins de transport.

Comme le faisait remarquer mon collègue de Kamouraska-Rivière-du-Loup dans son intervention de mai dernier, la rentabilité de ce système repose sur son efficacité: «Québec-Montréal, 85 minutes; Montréal-Ottawa, 45 minutes; un rêve, et Montréal-Toronto, 140 minutes, et ce à 50 p. 100 du coût du transport aérien.»

Devant l'inertie du gouvernement, mon collègue se questionnait à savoir si Ottawa était davantage occupé à défendre les intérêts du lobby des transporteurs aériens qu'à prendre part à un projet créateur d'emplois, innovateur au plan technologie et puissant moteur économique des entreprises d'ici.

Le TGV a reçu l'appui d'une multitude de groupes, d'organisations publiques et privées, autant au Canada qu'au Québec. Bombardier, société multinationale, leader incontestable dans le


7832

domaine du transport est prêt à relever le défi, ici. Cette entreprise née au Québec a réussi mondialement à vendre son expertise, sa technologie, ses produits. Le gouvernement fédéral se targue, au lendemain d'une tournée de Team Canada, du succès et du mérite de nos entreprises à l'étranger. Mais que fait-il pour stimuler leur succès ici au Canada et au Québec? Le premier ministre pédale dans le vide et de toute évidence, son gouvernement fait du surplace.

(1720)

Plusieurs études démontrent que l'implantation du TGV entraînerait la création de près de 127 000 emplois-années. Pendant la construction, en tenant compte des retombées technologiques et économiques qu'un tel projet provoquera, près de 40 000 emplois-années s'ajouteront dans plusieurs secteurs. La gestion et l'entretien du réseau exigeraient quant à eux près de 1 200 emplois permanents. Les coûts du financement du TGV dans le corridor Québec-Windsor sont estimés à 7,5 milliards de dollars échelonnés sur une période de dix ans. Le secteur privé assumerait 70 p. 100 des coûts relatifs à l'implantation, le reste étant à la charge des gouvernements du Québec, de l'Ontario et du Canada.

Le 26 avril dernier, M. Marc LeFrançois, président du conseil d'administration de VIA Rail prononçait un vibrant plaidoyer en sa faveur. Selon lui, la survie du transport ferroviaire pour passagers au Canada passe par le concept du TGV. De l'avis du président de VIA Rail, les États-Unis constituent un marché accessible de plusieurs dizaines de milliards de dollars. La réalisation du TGV ouvrirait largement à nos entreprises le marché nord-américain, le dernier territoire où la grande vitesse n'a pas encore fait sa marque.

À l'heure où les compressions budgétaires draconiennes mettent en péril ce qui reste de l'industrie ferroviaire canadienne et québécoise, au moment où la rentabilité des principales compagnies ferroviaires bat de l'aile, alors que des milliers de travailleurs perdent leur emploi dans ce secteur, n'est-il pas temps pour ce gouvernement de démontrer un peu de leadership politique et économique en favorisant un projet mobilisateur, stimulant et générateur d'emplois? Le gouvernement doit se rendre à l'évidence, ce projet est non seulement réalisable, il est nécessaire. Alors que ce gouvernement s'entête à engloutir des millions et des millions de dollars dans le projet Hibernia dont la technologie est peu exportable et, à l'évidence, loin d'être rentable et susceptible de générer autant de retombées économiques que le projet du TGV, comment ne pas s'insurger devant l'inaction du gouvernement libéral dans ce dossier?

L'heure n'est plus aux tergiversations. L'histoire nous a appris que l'ensemble géopolitique canadien actuel a été façonné par le chemin de fer pour relier l'Atlantique au Pacifique. Plus d'un siècle marque cet épisode de l'histoire canadienne. En constatant la décrépitude du réseau ferroviaire canadien, héritage du laisser-aller et du laisser-faire de nombreux gouvernements qui se sont succédé à Ottawa, on peut se demander ce que penseraient les Pères de la Fédération canadienne de cet état de choses. Ils dénonceraient sans aucun doute l'apathie dans laquelle patauge le gouvernement. Le gouvernement doit agir maintenant dans le dossier du train à grande vitesse pour éviter que l'inertie actuelle se transforme en ineptie gouvernementale et que le dossier du TGV ne déraille. Les Pères de la Fédération ne le lui pardonneraient sans doute pas.

[Traduction]

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, j'ai écouté perplexe les observations de la députée du Bloc et il y a certaines questions que je voudrais soulever.

Elle affirme que le gouvernement se traîne les pieds en ce qui concerne le train à grande vitesse. En toute franchise, étant donné les statistiques à ce sujet, les perspectives financières et la viabilité d'un projet de train à grande vitesse dans le corridor Québec-Windsor, si je devais payer la note, croyez-moi, je ferais traîner les choses, moi aussi. Je ne voudrais pas me lancer dans cette entreprise.

La députée a parlé du succès des trains à grande vitesse en Europe. En fait, depuis de nombreuses années, les trains à grande vitesse en Europe sont fortement subventionnés par les gouvernements.

Notre pays n'a plus les moyens de subventionner davantage des sociétés d'État ou des systèmes de transport. Nous sommes subventionnés à outrance. Nous versons des centaines de millions de dollars pour le réseau de VIA Rail. Il est inconcevable que le président de cette compagnie, une compagnie qui essuie des pertes importantes chaque année et qui dépend complètement des subventions gouvernementales, soit maintenant en faveur de trains à grande vitesse.

(1725)

Au moins s'il avait obtenu certains résultats avec la compagnie qu'il dirige, son appui aurait un certain poids. La députée a parlé de l'aspect économique d'un train à grande vitesse. Il n'y a aucune donnée financière faisant croire qu'un système de ce genre au Canada, dans le corridor Québec-Windsor, pourrait même être à peine rentable sans d'énormes subventions gouvernementales.

Je voudrais m'arrêter sur une autre chose. D'où vont venir les clients? Supposons un instant qu'on attire ainsi un très grand nombre de personnes. Certaines entreprises de transport vont payer la note. Est-ce que ce seront les compagnies aériennes? Allons-nous leur demander de perdre davantage de clients qui prendront plutôt le train?

Les statistiques et les études montrent que les Canadiens adorent leur automobile. Nous n'allons pas changer cette situation en mettant en service un train à grande vitesse. Les gens ne vont pas cesser en très grand nombre d'utiliser leur automobile pour prendre, du jour au lendemain, les trains à grande vitesse.

Dans le cas présent, si le gouvernement se lançait dans cette entreprise, ce serait un peu comme si une personne allait acheter une nouvelle télévision lorsqu'elle n'a rien à manger chez elle. Voilà notre situation économique! Voilà notre situation financiè-


7833

re! Nous ne pouvons même pas nous permettre de songer à un train à grande vitesse à ce stade-ci.

[Français]

Mme Dalphond-Guiral: Monsieur le Président, je veux faire une promesse formelle, mais hélas, je sais que je ne pourrai la tenir, puisque bien sûr, je ne serai pas dans ce Parlement assez longtemps. Mais je peux vous jurer que le jour où il y aura un train Montréal-Ottawa qui fera la distance en 45 minutes, je serai ravie, avec tout le monde qui veut venir à Ottawa, de le prendre.

Il est bien évident qu'un TGV dans le corridor Québec-Windsor sera utilisé en grande partie par les gens qui y habitent. Alors, la population qui habite ce couloir, c'est 10 millions de personnes, ce sont des zones industrialisées, avec beaucoup d'industries. Ce projet va créer presque 130 000 emplois. Ce n'est pas rien! Des gens qui travaillent paient des impôts au gouvernement, plutôt que de recevoir de l'assurance-chômage. Alors, c'est un élément qui est fondamental et effectivement, si le gouvernement traîne la patte, je suis d'accord avec vous qu'il y a des intérêts, notamment les intérêts des transporteurs aériens, à protéger.

Quand un pays est dans une difficulté financière telle que l'est le Canada, il apparaît évident que les choix doivent se porter sur ce qui peut être le plus économique. Quand on parle d'un coût de transport 50 p. 100 moins cher que le transport aérien, ma foi, ça vaut la peine de le regarder.

M. Maurice Dumas (Argenteuil-Papineau, BQ): Monsieur le Président, je me permettrai simplement de faire une annonce. Le 23 mai dernier, la compagnie Canadien Pacifique Limitée déposait une demande d'abandon du tronçon Saint-Augustin-Mirabel-Thurso auprès de l'Office national des transports.

Un mémoire de l'opposition a été rédigé conjointement par mon collègue, le député de Blainville-Deux-Montagnes, par André Riendeau, du comté d'Argenteuil, Paul-André David, du comté de Papineau, ainsi que moi-même. Nous avons déposé ce document à l'Office national des transports le 27 juillet 1994. Nous y demandions la tenue d'une audience publique ainsi qu'un moratoire d'une durée de cinq ans.

Fait assez rare, nous avons obtenu cette audience publique qui aura lieu le 22 novembre prochain, et sur ce, je vous remercie.

Le président suppléant (M. Kilger): Comme il est 17 h 30, il est de mon devoir de faire savoir à la Chambre, conformément à l'article 81(19) du Règlement, que les délibérations relatives à la motion sont terminées.

* * *

LOI SUR LE MINISTÈRE DU PATRIMOINE CANADIEN

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 3 novembre 1994, de la motion: Que le projet de loi C-53, Loi constituant le ministère du Patrimoine canadien et modifiant ou abrogeant certaines lois, soit maintenant lu une deuxième fois et renvoyé à un comité.

Le président suppléant (M. Kilger): Comme il est 17 h 30, conformément à l'ordre adopté le jeudi 3 novembre 1994, la Chambre procédera maintenant au vote par appel nominal différé sur l'amendement de Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata), à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-53.

Convoquez les députés.

(La motion, mise aux voix, est rejetée.)

(Vote no 106)

POUR

Députés
Abbott
Ablonczy
Althouse
Asselin
Bellehumeur
Benoit
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Blaikie
Bouchard
Breitkreuz (Yellowhead)
Brown (Calgary Southeast)
Bélisle
Canuel
Caron
Chatters
Chrétien (Frontenac)
Cummins
Dalphond-Guiral
Daviault
Debien
de Jong
de Savoye
Deshaies
Duceppe
Dumas
Duncan
Epp
Fillion
Forseth
Gagnon (Québec)
Gauthier (Roberval)
Gilmour
Godin
Gouk
Grey (Beaver River)
Grubel
Guay
Guimond
Hanger
Hanrahan
Harper (Calgary West)
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Hayes
Hermanson
Hill (Macleod)
Hoeppner
Jacob
Jennings
Kerpan
Landry
Langlois
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lebel
Leblanc (Longueuil)
Lefebvre
Leroux (Richmond-Wolfe)
Loubier
Manning
Marchand
Martin (Esquimalt-Juan de Fuca)
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest)
McLaughlin
Mercier
Meredith
Mills (Red Deer)
Morrison
Ménard
Nunez
Paré
Penson
Picard (Drummond)
Plamondon
Pomerleau
Ringma
Robinson
Rocheleau
Sauvageau
Schmidt
Silye
Solberg
Speaker
St-Laurent
Strahl
Taylor
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Venne
Williams-92

CONTRE

Députés
Adams
Allmand
Anawak
Anderson
Arseneault
Assad
Assadourian
Axworthy (Winnipeg South Centre)
Baker
Barnes


7834

Bellemare
Berger
Bertrand
Bodnar
Bonin
Boudria
Bryden
Bélair
Caccia
Calder
Campbell
Cannis
Chamberlain
Clancy
Collenette
Collins
Copps
Cowling
Crawford
Culbert
DeVillers
Dhaliwal
Dromisky
Duhamel
Easter
English
Fewchuk
Finestone
Finlay
Flis
Fry
Gaffney
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gallaway
Gauthier (Ottawa-Vanier)
Gerrard
Godfrey
Goodale
Graham
Gray (Windsor West)
Grose
Guarnieri
Harb
Harvard
Hickey
Hopkins
Hubbard
Ianno
Iftody
Irwin
Jackson
Jordan
Karygiannis
Keyes
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
Lee
Lincoln
MacAulay
MacLellan (Cape/Cap Breton-The Sydneys)
Maloney
Manley
Marleau
Martin (LaSalle-Émard)
Massé
McGuire
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest)
McTeague
McWhinney
Mifflin
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Mitchell
Murphy
Murray
Nault
O'Brien
O'Reilly
Ouellet
Pagtakhan
Patry
Peric
Peters
Phinney
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Regan
Richardson
Rideout
Ringuette-Maltais
Rock
Serré
Sheridan
Simmons
Skoke
Speller
St. Denis
Steckle
Stewart (Brant)
Stewart (Northumberland)
Szabo
Telegdi
Terrana
Thalheimer
Tobin
Torsney
Ur
Valeri
Verran
Volpe
Walker
Wappel
Wayne
Wells
Whelan
Wood
Young
Zed-132

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Députés
Bachand
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bevilacqua
Brien
Chan
Cohen
Crête
Dingwall
Dubé
Eggleton
Lalonde
Leroux (Shefford)
Peterson
Proud
Sheridan
Tremblay (Rosemont)

(1755)

Le Président: Je déclare l'amendement rejeté.

Conformément à l'ordre adopté le jeudi 3 novembre 1994, la Chambre passe maintenant au vote par appel nominal différé à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-55.

* * *

LOI SUR L'OFFICE DES DROITS DE SURFACE DU YUKON

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 3 novembre 1994, de la motion: Que le projet de loi C-55, Loi établissant un organisme ayant compétence pour statuer sur les différends concernant les droits de surface au Yukon, et modifiant certaines lois en conséquence, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

(Vote no 107)

POUR

Députés
Adams
Allmand
Althouse
Anawak
Anderson
Arseneault
Assad
Assadourian
Asselin
Axworthy (Winnipeg South Centre)
Baker
Barnes
Bellehumeur
Bellemare
Berger
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Bertrand
Blaikie
Bodnar
Bonin
Bouchard
Boudria
Bryden
Bélair
Bélisle
Caccia
Calder
Campbell
Cannis
Canuel
Caron
Chamberlain
Charest
Chrétien (Frontenac)
Clancy
Collenette
Collins
Copps
Cowling
Crawford
Culbert
Dalphond-Guiral
Daviault
Debien
de Jong
de Savoye
Deshaies
DeVillers
Dhaliwal
Dromisky
Duceppe
Duhamel
Dumas
Easter
English
Fewchuk
Fillion
Finestone
Finlay
Flis
Fry
Gaffney
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gagnon (Québec)
Gallaway
Gauthier (Ottawa-Vanier)
Gauthier (Roberval)
Gerrard
Godfrey
Godin
Goodale
Graham
Gray (Windsor West)
Grose
Guarnieri
Guay
Guimond
Harb
Harvard
Hickey
Hopkins
Hubbard
Ianno
Iftody
Irwin
Jackson
Jacob
Jordan
Karygiannis
Keyes
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Landry
Langlois
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
Lebel
Leblanc (Longueuil)
Lee
Lefebvre
Leroux (Richmond-Wolfe)
Lincoln
Loubier
MacAulay
MacLellan (Cape/Cap Breton-The Sydneys)
Maloney


7835

Manley
Marchand
Marleau
Martin (LaSalle-Émard)
Massé
McGuire
McKinnon
McLaughlin
McLellan (Edmonton Northwest)
McTeague
McWhinney
Mercier
Mifflin
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Mitchell
Murphy
Murray
Ménard
Nault
Nunez
O'Brien
O'Reilly
Ouellet
Pagtakhan
Paré
Patry
Peric
Peters
Phinney
Picard (Drummond)
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Plamondon
Pomerleau
Regan
Richardson
Rideout
Ringuette-Maltais
Robinson
Rocheleau
Rock
Sauvageau
Serré
Shepherd
Simmons
Skoke
Speller
St-Laurent
St. Denis
Steckle
Stewart (Brant)
Stewart (Northumberland)
Szabo
Taylor
Telegdi
Terrana
Thalheimer
Tobin
Torsney
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Ur
Valeri
Venne
Verran
Volpe
Walker
Wappel
Wells
Whelan
Wood
Young
Zed-183

CONTRE

Députés
Abbott
Ablonczy
Benoit
Breitkreuz (Yellowhead)
Brown (Calgary Southeast)
Chatters
Cummins
Duncan
Epp
Forseth
Gilmour
Gouk
Grey (Beaver River)
Grubel
Hanger
Hanrahan
Harper (Calgary West)
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Hayes
Hermanson
Hill (Macleod)
Hoeppner
Jennings
Kerpan
Manning
Martin (Esquimalt-Juan de Fuca)
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest)
Meredith
Mills (Red Deer)
Morrison
Penson
Ringma
Schmidt
Silye
Solberg
Speaker
Strahl
Williams-41

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Députés
Bachand
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bevilacqua
Brien
Chan
Cohen
Crête
Dingwall
Dubé
Eggleton
Lalonde
Leroux (Shefford)
Peterson
Proud
Sheridan
Tremblay (Rosemont)

(1805)

Le Président: Je déclare la motion adoptée.

(Le projet de loi est lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.)

* * *

LES PROGRAMMES DE SÉCURITÉ SOCIALE

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 3 novembre 1994, de la motion: Que le projet de loi C-54, Loi modifiant la Loi sur la sécurité de la vieillesse, le Régime de pensions du Canada, la Loi sur les allocations spéciales pour enfants et la Loi sur l'assurance-chômage, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

Le Président: Conformément à l'ordre adopté le jeudi 3 novembre 1994, la Chambre passe maintenant au vote par appel nominal différé à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-54, Loi modifiant la Loi sur la sécurité de la vieillesse, le Régime de pensions du Canada, la Loi sur les allocations spéciales pour enfants et la Loi sur l'assurance-chômage.

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

(Vote no 108)

POUR

Députés
Abbott
Ablonczy
Adams
Allmand
Althouse
Anawak
Anderson
Arseneault
Assad
Assadourian
Axworthy (Winnipeg South Centre)
Baker
Barnes
Bellemare
Benoit
Berger
Bertrand
Blaikie
Bodnar
Bonin
Boudria
Breitkreuz (Yellowhead)
Brown (Calgary Southeast)
Bryden
Bélair
Caccia
Calder
Campbell
Cannis
Chamberlain
Chatters
Clancy
Collenette
Collins
Copps
Cowling
Crawford
Culbert
Cummins
de Jong
DeVillers
Dhaliwal
Dromisky
Duhamel
Duncan
Easter
English
Epp
Fewchuk
Finestone
Finlay
Flis
Forseth
Fry
Gaffney
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gallaway
Gauthier (Ottawa-Vanier)
Gerrard
Gilmour
Godfrey
Goodale
Gouk
Graham
Gray (Windsor West)
Grey (Beaver River)
Grose
Grubel
Guarnieri
Hanger
Hanrahan
Harb
Harper (Calgary West)
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Harvard
Hayes
Hermanson
Hickey
Hill (Macleod)
Hoeppner
Hopkins
Hubbard
Ianno
Iftody
Irwin
Jackson
Jennings
Jordan
Karygiannis
Kerpan
Keyes

7836

Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
Lee
Lincoln
MacAulay
MacLellan (Cape/Cap Breton-The Sydneys)
Maloney
Manley
Manning
Marleau
Martin (Esquimalt-Juan de Fuca)
Martin (LaSalle-Émard)
Massé
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest)
McGuire
McKinnon
McLaughlin
McLellan (Edmonton Northwest)
McTeague
McWhinney
Meredith
Mifflin
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Mills (Red Deer)
Mitchell
Morrison
Murphy
Murray
Nault
O'Brien
O'Reilly
Ouellet
Pagtakhan
Patry
Penson
Peric
Peters
Phinney
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Regan
Richardson
Ringma
Ringuette-Maltais
Robinson
Rock
Schmidt
Serré
Shepherd
Silye
Simmons
Skoke
Solberg
Speaker
Speller
St. Denis
Steckle
Stewart (Brant)
Stewart (Northumberland)
Strahl
Szabo
Taylor
Telegdi
Terrana
Thalheimer
Tobin
Torsney
Ur
Valeri
Verran
Volpe
Walker
Wappel
Wayne
Wells
Whelan
Williams
Wood
Young
Zed-178

CONTRE

Députés
Asselin
Bellehumeur
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Bouchard
Bélisle
Canuel
Caron
Chrétien (Frontenac)
Dalphond-Guiral
Daviault
Debien
de Savoye
Deshaies
Duceppe
Dumas
Fillion
Gagnon (Québec)
Gauthier (Roberval)
Godin
Guay
Guimond
Jacob
Landry
Langlois
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lebel
Leblanc (Longueuil)
Lefebvre
Leroux (Richmond-Wolfe)
Loubier
Marchand
Mercier
Ménard
Nunez
Paré
Picard (Drummond)
Plamondon
Pomerleau
Rocheleau
Sauvageau
St-Laurent
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Venne-45

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Députés
Bachand
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bevilacqua
Brien
Chan
Cohen
Crête
Dingwall
Dubé
Eggleton
Lalonde
Leroux (Shefford)
Peterson
Proud
Sheridan
Tremblay (Rosemont)

(1810)

Le Président: Je déclare la motion adoptée.

(Le projet de loi est lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.)

Le Président: Comme il est 18 h 15, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.

_____________________________________________


7836

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LE CENTRE DE LA SÉCURITÉ DES TÉLÉCOMMUNICATIONS

M. Derek Lee (Scarborough-Rouge River, Lib.) propose:

Que de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait modifier la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité afin d'autoriser le Comité d'examen des activités du renseignement de sécurité à examiner les opérations du Centre de la sécurité des télécommunications (CST).
-Monsieur le Président, je suis heureux d'amorcer le débat par une motion que je considère très importante aujourd'hui. J'espère qu'elle se révélera tout aussi importante pour les Canadiens au cours des années à venir, si elle est adoptée à la Chambre. La motion dit:

Que de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait modifier la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité afin d'autoriser le Comité d'examen des activités du renseignement de sécurité à examiner les opérations du Centre de la sécurité des télécommunications (CST).
Je crois que j'utiliserai dorénavant le sigle CST pour désigner le Centre de la sécurité des télécommunications, car ce sera plus simple.

Je voudrais faire remarquer que la motion demandant l'autorisation d'examiner les activités du CST ne vise pas un seul examen. Elle vise un processus continuel de surveillance semblable à celui que suit le Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité pour examiner le fonctionnement du Service canadien du renseignement de sécurité.

Le CST a vu le jour durant la Seconde Guerre mondiale dans le contexte de l'interception de signaux et du décryptage de codes. En 1941, il a été établi officiellement à titre d'unité d'examen du Conseil national de recherches. Durant la première partie de son existence, cette unité a été responsable de l'interception et de


7837

l'analyse des communications du gouvernement de Vichy, en France, et du gouvernement allemand.

On estime que, en 1944, l'unité d'examen comptait déjà 45 employés, dont certaines personnes très spécialisées, capables de penser et de communiquer en langage chiffré et en code.

En avril 1975, en vertu d'un décret pris conformément à la Loi sur les restructurations et les transferts d'attributions dans l'administration publique, le contrôle et la supervision du Centre de la sécurité des télécommunications ont été transférés du Conseil national de recherches au ministère de la Défense nationale.

Le CST a été officiellement reconnu par le gouvernement du Canada pour la première fois, à ma connaissance, le 22 septembre 1983, quand l'honorable Jean-Luc Pepin, qui était ministre d'État aux Relations extérieures, a déclaré à la Chambre que:

Le Centre de la sécurité des télécommunications est chargé d'assurer la sécurité des communications du gouvernement fédéral. Il offre également, avec l'appui du Réseau radio supplémentaire des Forces canadiennes, un service de renseignement sur les transmissions pour soutenir les politiques de défense et les politiques étrangères du Canada. Par renseignement sur les transmissions, on entend l'information recueillie au sujet des pays étrangers, grâce à l'interception et à l'étude de leurs transmissions radio, de leurs transmissions radar et autres transmissions électroniques.
Qu'en est-il du budget du CST? Combien d'argent dépense-t-il? En réalité, nous, qui autorisons les dépenses publiques, ne le savons pas car on ne nous l'a jamais dit. Nous avons déjà posé la question, mais on ne nous a pas répondu.

Cependant, en 1991, un journaliste qui était bien renseigné à ce sujet, qui avait fait beaucoup de recherches et publié une série d'articles dans le Globe and Mail de Toronto a dit que le budget du CST se situait dans les 100 à 125 millions de dollars et que ce centre comptait environ 800 employés.

Je tiens à préciser une chose ici. Ce que je sais de la question, en tant que député, je le tiens d'un journaliste. Ce ne sont pas des questions aux comités parlementaires ou à la Chambre qui nous ont renseignés à ce sujet. Nous n'avons rien obtenu ici. Pour tirer l'affaire au clair, j'ai dû acheter un numéro du Globe and Mail. Voilà qui en dit long sur le processus.

(1820)

Quelles sont les fonctions du CST? Il faut y regarder d'un peu plus près, mais pas de trop près. Le CST a un double mandat. Premièrement, il assure la collecte de renseignements électromagnétiques sur les activités, les intentions et les capacités diplomatiques, militaires, économiques, commerciales et de sécurité de gouvernements, particuliers et organismes étrangers. Deuxièmement, il consulte sur les communications du gouvernement du Canada.

Nous sommes portés à croire qu'il s'acquitte bien de ces deux rôles. La première partie du mandat comprend le programme de renseignements électromagnétiques, la collecte des transmissions et leur analyse du décodage et l'analyse des données. Le CST, à l'aide du réseau radio supplémentaire des Forces canadiennes, recueille des données sur les transmissions émises par des radios, des radars et d'autres moyens électroniques étrangers, les étudie et en rend compte afin de fournir des renseignements extérieurs à notre gouvernement. Comme nous le verrons plus tard, certains renseignements extérieurs peuvent être communiqués et sont effectivement communiqués à d'autres gouvernements.

Le CST possède des installations d'interception de transmission dans de nombreuses régions du monde et a recours à un ensemble de techniques sophistiquées pour décoder et interpréter ces transmissions. Il emploie des techniques d'induction de pointe grâce auxquelles on peut lire sur un écran d'ordinateur qui se trouve dans un lieu éloigné. Il fait appel à des techniques de reconnaissance vocale et à des procédés de mots-clés grâce auxquels, à l'aide d'ordinateurs sophistiqués, il analyse et extrait des données sur différents sujets et sur des personnes.

Il peut vraisemblablement intercepter des transmissions en provenance et à destination de tous les points du globe. Du moins, l'organisme est en mesure de le faire. On peut présumer qu'il est capable d'intercepter des signaux envoyés du Canada vers d'autres régions du monde et venant d'autres régions du monde à destination du Canada-et qu'il le fait.

Je ne cherche pas à semer la panique. D'ailleurs, mes propos ne doivent surprendre personne à la Chambre. Ces techniques de pointe et ces fonctions sont couramment utilisées dans la plupart des pays industrialisés pour les fins de leurs services de renseignement à l'étranger. Je tenais à préciser que ces techniques existent. Nous les utilisons pour la collecte de renseignements à l'étranger.

Quelle est la chaîne de commandement du CST? Qui en est le grand responsable? De qui relève cet organisme? Je suppose que ce n'est pas si clair, mais heureusement, le CST a été assez franc à cet égard, par l'intermédiaire de sa direction et du gouvernement. Du moins, ce fut le cas ces dernières années. Tout n'a pas été tenu caché.

Le ministre de la Défense nationale doit rendre compte au Parlement des dépenses du CST. Il approuve ses grosses dépenses en capital, son plan opérationnel pluriannuel présenté chaque année et, en collaboration avec le comité du Cabinet sur la sécurité et le renseignement, ses grands projets ayant des répercussions importantes sur les politiques ou des questions juridiques.

Le chef du CST doit rendre des comptes au ministre de la Défense nationale pour les questions financières et administratives, mais au sous-greffier de la sécurité et du renseignement du Bureau du Conseil privé, pour les questions de politique et de fonctionnement. On a donc ici une structure de gestion bicéphale. L'un des chefs est le ministre de la Défense nationale et l'autre, le greffier du Bureau du Conseil privé, organisme dont le chef politique est le premier ministre.

Je souligne également que le client principal du CST est le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, qui est le principal utilisateur de renseignements sur l'étranger. En outre, on nous dit au Parlement que des mesures ont été prises


7838

pour veiller à ce que le CST satisfasse aux exigences du gouvernement en ce qui concerne les renseignements touchant l'étranger de façon légale, efficace et sensible à l'évolution des relations internationales.

(1825)

Je voudrais aussi faire remarquer que le CST et son chef administratif au BCP ont accepté librement de comparaître devant le sous-comité parlementaire sur la sécurité nationale à la fin de la dernière législature. Les renseignements recueillis ont été nettement moins importants que les membres ne l'avaient espéré, mais nous estimons que cela a permis d'établir certains rapports.

Pour ce qui est de la sécurité des télécommunications, la deuxième partie de ce mandat, le CST est chargé de concevoir des normes sur la sécurité des communications électroniques, de soumettre ces normes au Conseil du Trésor pour approbation, de donner des conseils sur l'application des mesures de sécurité, et de fournir du matériel et de la documentation cryptographiques aux institutions gouvernementales compétentes. C'est ce système de codage qui empêche les parties non autorisées d'écouter ou de comprendre les communications intragouvernementales.

Il travaille dans le cadre d'accords internationaux sur les télécommunications et la surveillance électronique et approuve la divulgation de renseignements de sécurité classifiés ou contrôlés aux entités gouvernementales et non gouvernementales.

Il rend compte au Conseil du Trésor, lorsque celui-ci lui en fait la demande, des questions concernant la sécurité des télécommunications. En fait, c'est de l'expertise du CST que dépend la sécurité des télécommunications des députés à l'intérieur du Parlement et dans la périphérie.

Le CST fournit des ressources capables d'effectuer la recherche, le développement et l'évaluation en matière de sécurité du matériel informatique, des logiciels et des systèmes de communication, de telle sorte que le gouvernement ait à sa disposition les renseignements nécessaires sur la sécurité et l'exploitation de ses systèmes informatiques.

Comme je l'ai mentionné précédemment, les ministères des Affaires étrangères et du Commerce international sont ses principaux clients, mais le CST compte aussi d'autres clients pour les renseignements sur les transmissions. Notons, entre autres, la Gendarmerie royale du Canada, le Service canadien du renseignement de sécurité et divers ministères qui s'intéressent aux questions de sécurité. Tous ces échanges de renseignements s'effectueraient au moyen d'un mécanisme de répartition des tâches régi par des protocoles d'entente.

Par l'entremise du ministère des Affaires étrangères, le CST échange aussi des renseignements sur les transmissions avec des gouvernements étrangers, encore dans le cadre de protocoles d'entente. On ne nous a jamais dévoilé lesquels; nous ne pouvons que faire des hypothèses.

Le CST participte pleinement à l'accord entre le Royaume-Uni et les États-Unis, qui structure le partage des renseignements sur les transmissions entre le Royaume-Uni, les États-Unis, l'Australie, le Canada et, depuis quelque temps, la Nouvelle-Zélande. Encore une fois, des protocoles d'entente auraient été conclus.

Deux questions se posent. La première concerne l'efficacité des dépenses du CST et l'autre, l'effet que peut avoir l'activité du CST sur les droits et les libertés des Canadiens, étant donné les vastes pouvoirs d'intrusion du CST.

Il y a quatre ans, les parlementaires ont terminé un examen quinquennal de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité. L'organisme avait alors cinq ans d'existence. Le rapport de cet examen s'intitule «Une période de transition, mais non de crise»; en voici un extrait très pertinent:

Bien que le Comité n'ait relevé aucune preuve d'abus par d'autres organismes, il est d'avis que certains ont la capacité d'empiéter de façon importante sur les droits et les libertés des Canadiens. Le Centre de la sécurité des télécommunications en est un bon exemple. Cet organisme a les moyens de s'ingérer de diverses façons dans la vie privée des Canadiens. Le Centre a été créé par décret du conseil et non par une loi; à toutes fins utiles, il n'a pas de comptes à rendre. Le Comité est d'avis que le Centre de la sécurité des télécommunications devrait avoir un mandat législatif qui comprenne des mécanismes de surveillance.
(1830)

La recommandation du comité, qui, je le signale, était unanime et appuyée par tous les partis représentés à la Chambre des communes, était que le Parlement crée officiellement le Centre de la sécurité des télécommunications au moyen d'une loi et fasse du CSARS l'organisme chargé de s'assurer que les activités du CST sont conformes aux lois du Canada et d'en faire rapport au Parlement.

Le gouvernement n'a pas vraiment réagi à cela et, en fait, il n'a donné une réponse favorable, je crois, qu'à une seule des 117 recommandations contenues dans ce rapport unanime présenté à la Chambre par des députés. On a parlé de une et demie, mais il ne s'agissait pas d'une réponse significative, pour dire le moins.

Que propose-t-on ici? Pourquoi reprendre ici la recommandation faite dans cette étude quinquennale du SCRS?

Voyons un peu ce que fait le CSARS. Deux choses principalement. D'abord, il s'occupe des appels interjetés par des fonctionnaires à l'égard de plaintes qu'ils ont formulées au sujet des formalités d'autorisation sécuritaire. Il s'agit de fonctionnaires de tous les ministères fédéraux. Le CSARS couvre tous les ministères et organismes fédéraux.

Ensuite, et c'est le plus important, le CSARS s'assure que les activités du SCRS sont conformes à son mandat législatif et aux politiques qui en découlent, et qu'elles sont conformes aux lois du Canada. À l'occasion, également, le comité se penche sur l'efficacité de la gestion du SCRS.

Dans le cadre de son mandat, le CSARS, ou Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité, a accès à toutes


7839

les personnes et à tous les documents du SCRS. Il travaille pour le compte du Parlement et fait rapport au Parlement. Je crois, et d'autres croient avec moi, que le CSARS peut remplir la même fonction pour le CST et cela, à un coût à peine plus élevé.

Nous croyons qu'une telle mesure serait un moyen d'examen et de surveillance peu coûteux qui viendrait se greffer à un organisme déjà créé par le Parlement et qui fonctionne raisonnablement bien. J'appuie fermenent cette idée.

Je me reporte au rapport de la commission Macdonald, qui commence à nous paraître bien vieux, mais qui est encore couramment cité. Dans le deuxième rapport, celui d'août 1981, la commission déclare qu'il y une dimension morale importante dans la façon dont le gouvernement s'occupe des questions de renseignement de sécurité.

Je vois qu'il me reste peu de temps. Je ne lirai donc pas toute la citation, mais je tiens tout de même à donner la référence.

Je ne veux pas dire que le Centre de la sécurité des télécommunications enfreint la loi. Le centre nous dit qu'il la respecte. Cependant, il est en mesure de porter atteinte au caractère confidentiel des communications des Canadiens par des moyens que la plupart d'entre nous ne parvenons pas à comprendre.

Pourquoi attendre un scandale? Pourquoi attendre d'être mis dans l'embarras? Pourquoi attendre que quelqu'un au CST commette une erreur? Dotons-nous tout de suite d'un mécanisme obligeant le CST à rendre des comptes aux Canadiens par l'intermédiaire du Parlement et du Comité d'examen des activités de renseignement de sécurité. Après cela, tout le monde saura à quoi s'en tenir. Tout le monde connaîtra les règles et tous les employés du CST sauront à qui ils ont affaire et quel est le programme.

Je souligne que le Comité d'examen des activités de renseignement de sécurité a fait remarquer que le SCRS utilisait déjà des données du CST et les intégrait à sa base de données. Il est donc clair que le comité d'examen à déjà un pied dans la porte.

(1835)

Je cite un ancien président du comité, M. Ron Atkey: «Nous ne cherchons pas de nouvelles fonctions. Nous avons déjà assez à faire. Cependant, nous ne pouvons pas manquer de remarquer à l'occasion qu'il n'existe aucun mécanisme d'examen dans d'autres secteurs du système du renseignement de sécurité.» Il parlait du CST.

En terminant, je souligne que le Parlement pourra continuer le débat sur la question un autre jour et que la motion sera mise aux voix.

Je demande à tous les députés de bien réfléchir à ce que j'ai dit et à ce que d'autres députés ont dit pour pouvoir prendre une décision éclairée lorsque nous serons appelés à voter.

[Français]

M. François Langlois (Bellechasse, BQ): Monsieur le Président, permettez-moi tout d'abord de féliciter le député de Scarborough-Rouge River qui est également président du Sous-comité sur la sécurité nationale, d'avoir saisi cette Chambre de la motion M-38.

Qui de mieux placé que le président du Sous-comité sur la sécurité nationale pour déposer une telle motion! Je pense que c'est un signe tangible qu'un contrôle s'impose. Je souscris à la motion présentée par le député de Scarborough-Rouge River, sous quelques réserves que je vais émettre et sujet à des modifications que j'aurai à proposer.

Il est bon, lorsque l'on parle d'un organisme comme le CST, le Comité de surveillance des télécommunications, d'en faire un bref historique. Mon collègue de Scarborough-Rouge River a remonté jusqu'en 1941, mais permettez-moi de citer les instruments juridiques qui en ont fait dans l'époque d'après-guerre l'institution que nous connaissons.

Le CST a vu le jour comme Service du conseil national de la recherche, tel qu'édicté par l'arrêté en conseil 54-3535 du 13 avril 1946. Le CST était l'héritier des Services de renseignements civils et militaires de la période de guerre qui avaient travaillé avec les services similaires américains et britanniques.

C'est le 1er avril 1975 que ce Service de communications du Conseil national de recherche est passé sous l'autorité du ministère de la Défense nationale. Le mandat du CST n'a jamais été formellement défini par voie législative, mais il est généralement admis que son mandat devrait être restreint par le Conseil privé à la sécurité extérieure du Canada.

Alors qu'on est en droit de s'attendre que les activités du CST se concentrent sur des communications venant d'un pays étranger ou en direction de celui-ci ou concernant les ambassades étrangères ou encore toute communication mettant en cause au moins un interlocuteur étranger, de sérieuses allégations récentes nous amènent à croire qu'il est plausible que le CST a intercepté, sans mandat judiciaire, sous autorité ministérielle ou même en l'absence d'autorité ministérielle, des conversations et communications à l'intérieur du Canada entre citoyens canadiens, et plus spécifiquement se serait livré à l'écoute de dirigeants du mouvement souverainiste québécois qui exercent leur activité en toute légitimité et légalité.

Le CST n'ayant de compte à rendre en dernier ressort qu'au bureau du Conseil privé, un laxisme certain peut s'être étendu à ses dirigeants et à ses agents. Il m'apparaît donc impératif de soumettre le CST à l'examen du Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité, communément appelé le CSARS, tout en maintenant, bien sûr, l'autorité du Parlement et du Sous-comité sur la sécurité nationale sur ces activités.


7840

(1840)

Mais le CSARS, tout comme la femme de César, doit être au-dessus de tout soupçon, ce qui n'est pas le cas actuellement. Le CSARS, le Comité de surveillance que nous connaissons actuellement, est composé de cinq membres. Trois de ces membres ont été nommés sur la recommandation du parti qui formait le gouvernement lors de la 34e Législature, le Parti conservateur, et ces trois membres sont M. Jacques Courtois, M. Edwin Goodman et M. George Vari.

Il y a donc, au sein du CSARS, plus de membres conservateurs qu'il y en a dans cette Chambre au complet. Il y a déjà une anomalie que l'opposition officielle ne soit pas représentée au sein du Comité de surveillance.

Nous retrouvons également comme membre du CSARS Mme Rosemary Brown, qui est actuellement présidente de la Commission des droits de la personne de l'Ontario. Elle travaille à temps plein pour cet organisme, et nous n'avons pas eu le plaisir de la rencontrer lorsque nous avons convoqué les membres du CSARS devant le sous-comité sur la sécurité nationale. Mme Brown a été nommée à la recommandation du Nouveau Parti démocratique, qui était à l'époque le troisième parti en cette Chambre, mais qui apparaît maintenant plutôt comme indépendant.

Finalement, le dernier membre que je vais nommer est Me Michel Robert, dont nous ne remettons pas en cause la compétence. Les seules questions que nous nous posons sont: Est-ce que Me Robert n'a pas un peu trop de travail sur le dos ces temps-ci, lui qui est membre du CSARS mais qui travaille aussi à la demande du gouvernement du Canada sur le dossier d'Oka? Il a à travailler dans un dossier avec des ministres de la Couronne et, d'autre part, il a à faire enquête sur des activités du Service canadien du renseignement de sécurité. Peut-être devrait-il laisser un de ses chapeaux pour coiffer celui qui lui sied le mieux.

Or, pour avoir un organisme de surveillance, de révision, un CSARS renouvelé et non pas un «bloody Caesar» comme nous avons actuellement, il est impératif que les membres actuels remettent tout simplement leur démission pour permettre une nouvelle nomination qui serait le reflet de la 35e Législature de se faire. Cela permettrait d'avoir trois membres nommés par le gouvernement sur recommandation d'un ministre de la Couronne, vraisemblablement des libéraux, un membre qui serait nommé sur recommandation de l'opposition officielle et un membre nommé par le troisième parti, le Parti réformiste du Canada. Ce serait le reflet de la démocratie en action, puisque le CSARS actuel a persisté, comme le Sénat, au-delà de l'élection sans qu'il y ait de changement.

Alors, oui, je souscris à la motion qui a été présentée, mais à condition qu'on renouvelle le personnel qui est membre du CSARS. D'autant plus que ce personnel a, lors de sa comparution devant le Comité sur la sécurité nationale, le 13 septembre dernier, systématiquement refusé de répondre aux questions qui lui ont été posées par les membres du comité au nom de la Chambre des communes qui est souveraine en la matière.

Comment pouvons-nous avoir plus longtemps confiance en des gens qui refusent leur coopération aux élus de la population, se réfugiant derrière une interprétation extrêmement tatillonne de l'article 54 de la Loi sur la sécurité nationale en disant: Nous, on a de rapport à faire qu'au ministre? Je regrette, monsieur le Président, tant que les membres du CSARS prétendront n'avoir de rapport à faire qu'au ministre, il y a un sérieux problème de crédibilité dans l'institution même qu'est le Parlement du Canada et la Chambre des communes, qui est une de ses composantes. Nous devons donc renouveler le personnel du CSARS par des gens qui comprendront que dans ce pays, jusqu'à ce que la preuve du contraire soit faite, l'autorité légitime, fondamentale et primordiale vient des élus de la population qui siègent en cette Chambre.

(1845)

En terminant, je vais faire la proposition d'amendement suivante. Appuyé par mon collègue de Berthier-Montcalm, je propose:

Qu'on modifie la motion, en ajoutant après le mot «télécommunications» ce qui suit: «et de déposer un rapport annuel à la Chambre sur lesdites activités.»
Le vice-président: Je déclare l'amendement recevable.

[Traduction]

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureuse de participer aujourd'hui au débat de la motion présentée par le député de Scarborough-Rouge River.

La question qu'on devrait se poser aujourd'hui n'est pas de savoir si la Chambre devrait adopter la motion, mais plutôt pourquoi il aura fallu attendre si longtemps pour en discuter. Il y a plus de dix ans, le Parlement a adopté une loi assurant que les activités du Service canadien du renseignement de sécurité feraient l'objet d'un examen de la part d'un organisme indépendant.

Personne du côté ministériel ne voudrait soutenir que le SCRS ne devrait pas être assujetti à un organisme de surveillance. Il y a quelques semaines pourtant, des ministres ont essayé de convaincre la Chambre et tous les Canadiens que le Centre de la sécurité des télécommunications n'avait pas besoin d'être assujetti à un tel organisme de surveillance. En réponse à un certain nombre de questions qui lui ont été posées par les députés de l'opposition officielle, la vice-première ministre a répété à maintes reprises la même réponse: «Le CST n'a pas pour mandat d'espionner les Canadiens.»

Cette réponse est intéressante pour deux raisons. Tout d'abord, on n'interrogeait pas la vice-première ministre à propos du mandat du CST. On lui demandait s'il avait déjà espionné des Canadiens. Elle a refusé de répondre à cette question, préférant parler du mandat du CST. Voyons donc en quoi il consiste. En réalité, j'aimerais bien examiner le mandat du CST, mais je ne le peux pas. Il ne semble pas en avoir, du moins certes pas un mandat fixé par une loi.

En septembre 1990, le Comité spécial d'examen de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité et de la Loi sur les infractions en matière de sécurité a déposé un rapport intitulé «Une période de transition mais non de crise». Aux pages 156-157 du rapport, on peut lire le passage suivant au sujet du CST:


7841

Cet organisme a les moyens de s'ingérer de diverses façons dans la vie privée des Canadiens. Le Centre a été créé par décret du conseil et non par une loi; à toutes fins utiles, il n'a pas de comptes à rendre. Le Comité reconnaît que le caractère secret de l'activité de cet organisme doit être protégé dans une certaine mesure, mais il estime que les Canadiens devraient néanmoins être au courant de ce qu'on y fait et qu'ils ne devraient pas avoir à se demander si leurs droits et leurs libertés ont été violés. Étant donné que le Comité a des preuves que la GRC et le SCRS ont confié des tâches au CST, il est d'avis que celui-ci devrait avoir un mandat législatif qui comprenne des mécanismes de surveillance.
Nous avons là un comité de la législature précédente, formé de députés de tous les partis, qui réclame un mécanisme de surveillance et d'examen des activités du CST. On ne sera pas étonné de constater que le député de Scarborough-Rouge River faisait partie de ce comité spécial. Il a alors reconnu qu'il était nécessaire d'obliger cet organisme à rendre des comptes et il continue de réclamer une telle reddition de comptes. Son appel n'a malheureusement pas été entendu par les députés de son propre parti qui siègent au Cabinet.

Le ministre de la Défense nationale croit que les activités du CST font déjà l'objet d'un examen suffisant.

(1850)

En réponse à une question de l'opposition officielle, le 24 octobre, le ministre a dit: «Pour ce qui est du CST en particulier, ce centre fait partie intégrante du ministère de la Défense nationale. Le Centre de la sécurité des télécommunications relève du ministre de la Défense nationale, lequel est membre du Cabinet et répond à la Chambre des communes.»

Le ministre croit donc avoir un contrôle ferme sur le CST et il estime suffisant qu'il rende des comptes à la Chambre. Le ministre devrait peut-être revoir le contenu de la réponse que le gouvernement a faite au rapport En transition du comité spécial, Maintenir le cap: La sécurité nationale dans les années 90. Aux pages 56 et 57 de ce rapport, on lit ceci: «Le Centre de la sécurité des télécommunications est contrôlé et supervisé par le ministre de la Défense nationale.» Cela concorde parfaitement avec les affirmations du titulaire actuel de ce portefeuille. Le rapport dit encore: «Le chef du CST relève du sous-ministre de la Défense nationale pour ce qui est des questions financières et administratives, et du sous-greffier (Sécurité et renseignement, et conseiller juridique) du Conseil privé pour ce qui est des questions de principe et des questions opérationnelles.»

Est-ce vraiment, alors, une partie intégrante du ministère de la Défense nationale, comme le ministre le prétend? Il n'en contrôle que les finances et l'administration, pas ses politiques ni ses activités. Dans ces conditions, comment peut-il rendre des comptes?

On trouve une autre observation intéressante dans Maintenir le cap. Le gouvernement précédent a dit qu'il avait songé à doter le ministre de la Défense nationale d'autres mécanismes de surveillance à l'égard du CST. Cette déclaration laisse supposer que même le ministre n'était pas entièrement habilité à examiner les activités du CST. Si le CST n'a pas de comptes à rendre au ministre, à qui doit-il en rendre?

C'est pour cette raison que nous sommes saisis de cette motion aujourd'hui. En ce moment, les Canadiens n'accepteront pas qu'un ministre leur dise que tout va bien et qu'ils doivent lui faire confiance. Il faut prévoir une sorte d'examen externe.

Il est bien connu que je ne suis pas une grande admiratrice du Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité. À l'instar des députés de l'opposition officielle, j'estime que les nominations au CSARS posent de véritables problèmes, mais je crois que cet organisme a sa raison d'être et qu'il doit effectuer cet examen.

Récemment, les Canadiens ont pu, pour la première fois, avoir une idée des activités du CST, avec la publication du livre Spyworld. Cet ouvrage rédigé par un ancien employé du CST donne aux Canadiens un aperçu d'une partie de cette organisation.

Lors de sa sortie, Spyworld a créé une légère commotion, car l'auteur y accusait le CST d'avoir servi à espionner Margaret Trudeau, certains ministres du Cabinet de Margaret Thatcher et René Lévesque.

Ces incidents sont des événements secondaires relatés dans le livre. Une très petite partie du livre est consacrée à leur description. Ils ont toutefois fait ressortir la nécessité de soumettre le CST à un examen externe.

Il semble que personne ne se soit indigné de la principale question abordée dans le livre, soit l'interception par le Canada de communications aux fins du renseignement. Ce ne sont que quelques incidents discutables qui ont causé tout l'émoi. Alors que l'écoute électronique peut en choquer certains, c'est une réalité de l'autoroute électronique d'aujourd'hui.

Notre gouvernement s'indigne-t-il à l'idée que d'autres pays interceptent nos communications gouvernementales? Non, il a plutôt pris des mesures pour lutter contre cela. Les bureaux sont sous écoute électronique, et les signaux téléphoniques sont codés. Cela fait partie de la réalité d'aujourd'hui. De même, personne ne s'inquiète indûment de ce que le Canada puisse faire la même chose à d'autres.

Le rapport «En transition» explique que cet organisme a clairement la capacité de porter atteinte à la vie privée des Canadiens de diverses façons. L'auteur du livre Spyworld le confirme en expliquant que, lorsque les employés du CST essayaient ou ajustaient leur équipement, ils écoutaient habituellement les conversations de Canadiens. C'est cette capacité qu'il faut surveiller pour éviter les abus.

(1855)

La meilleure façon de garantir qu'il n'y a pas d'abus, c'est de soumettre les activités du CST à un examen externe. J'exhorte donc tous les députés à appuyer cette motion proposée par le député de Scarborough-Rouge River.


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M. Tom Wappel (Scarborough-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, j'étais très heureux d'appuyer la motion qu'a présentée mon collègue et voisin de Scarborough-Rouge River. J'ai agi ainsi parce que je crois que, comme toujours, mon collègue a abordé cette question d'un point de vue analytique et juridique, qu'il a examiné la situation à fond et a proposé la solution qu'il croit et que je crois être raisonnable.

Au cours des dix minutes qui vont suivre, j'aimerais expliquer brièvement la nature de la motion, les raisons pour lesquelles j'y souscris et les problèmes que j'y décèle. Si la Chambre adoptait cette motion, on ferait ainsi comprendre au gouvernement que le Centre de la sécurité des télécommunications doit rester sous l'oeil vigilant, si vous me passez l'expression, du Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité, qui est composé de conseillers privés. Le travail de celui-ci consiste à avoir un oeil sur le Service du renseignement de sécurité.

Pour tenter d'y comprendre quelque chose, il faut savoir de quoi nous parlons. Qu'est-ce que le Centre de la sécurité des télécommunications? Ça semble un nom aseptisé, correct, sans histoire. Pour moi, c'est une ombre. Une ombre, on peut la voir si on sait où poser les yeux, mais on ne peut pas y toucher. On ne peut pas la sentir. On ne peut pas lui parler. On ne peut lui poser des questions, et voilà qui est un problème. Telle une ombre, ça peut s'approcher dangereusement, ça peut être petit, ça peut s'éloigner. Telle une ombre, ça peut être là sans qu'on s'en rende compte. Ça peut être un problème. Je ne dis pas que c'est un problème. Ça peut être un problème.

Que fait le Centre de la sécurité des télécommunications? Qu'est-ce que c'est? Pour le savoir, il faut se pencher sur ce qu'on appelle «les renseignements extérieurs». Qu'est-ce que les renseignements extérieurs? Je cite le ministère du Solliciteur général: «L'expression «les renseignements extérieurs»? désigne les renseignements ou les informations concernant les capacités, les intentions et les activités d'États, d'organismes et de particuliers étrangers. Il peut comprendre des informations de nature politique, économique, militaire, scientifique ou sociale et produire des informations ayant des conséquences pour la sécurité.»

D'après tout ce que je sais du Centre de la sécurité des télécommunications, cette définition lui convient certainement. Le centre a deux attributions. Avant d'en parler, je tiens à rappeler à la Chambre que le Centre de la sécurité des télécommunications n'est pas le seul de ce genre au monde. Il existe des organismes comparables dans d'autres pays. Il serait peut-être intéressant de dire à la Chambre quels sont ces organismes, afin qu'elle sache où le Canada se situe par rapport à ces derniers.

Aux États-Unis, il existe un organisme de ce genre qui s'appelle la National Security Agency. Au Royaume-Uni, il y a le Government Communications Headquarters, en Australie, le Defence Signals Directorate et en Nouvelle-Zélande, le Government Communications Security Bureau.

Tous ces organismes s'occupent de communications, mais ils ne communiquent pas, ils écoutent les communications. La question qu'il faut se poser est celle-ci: Quelles communications notre organisme écoute-t-il? Est-ce que ce serait effectivement les communications privées des gens? Nous l'ignorons.

Comment est né le Centre de la sécurité des télécommunications? Comment l'ombre a-t-elle vu le jour? Était-ce par une loi du Parlement? Non. Par décret. Cet aspect est très important, car le centre n'est donc pas le produit d'une loi. J'y reviendrai vers la fin de mes observations.

(1900)

Quel est le but de ce centre, qui a été créé par décret? Que fait-il? On nous dit qu'il s'occupe de recueillir des renseignements sur les transmissions, ce que l'on appelle parfois SIGNIT, et qu'il a une capacité offensive. Je suppose que l'on veut dire par là qu'il est indiscret. Il écoute nos conversations. Il y a aussi une composante qui a trait à la sécurité de l'information ou des communications, que l'on appelle parfois INFOSEC ou COMSEC. On dirait des codes pour lancer des missiles à partir de Boulder, au Colorado. INFOSEC et COMSEC ont une capacité défensive.

Ward Elcock qui, à l'époque, était greffier adjoint et responsable d'une partie, au moins, du CST, nous a dit que le COMSEC s'occupait notamment de la sécurité des télécommunications du gouvernement du Canada. C'est très important. Sa deuxième responsabilité consiste à recueillir des renseignements pour informer le gouvernement des activités diplomatiques, militaires, économiques, sécuritaires et commerciales des gouvernements, des particuliers et des sociétés d'autres pays. Je suppose qu'il n'y a rien de mal à cela, si nous voulons nous protéger.

C'est ce qu'il fait, en supposant que tous puissent comprendre ce que font INFOSEC, COMSEC, SIGINT, etc. Les gens qui travaillent là, le chef, comme on l'appelle, je pense-mais c'est peut-être une femme maintenant, je l'ignore-sont probablement les seuls à savoir ce que cet organisme est censé faire.

Eh bien, dira-t-on, nous savons comment cet organisme a été créé. Nous savons ce qu'il fait. De qui relève-t-il? C'est une question que nous sommes en droit de nous poser. Comme il n'y a pas de loi, on peut supposer qu'il relève du Parlement. Devinez quoi? Nous avons raison. Il ne relève pas du Parlement. Il est censé rendre des comptes au ministre de la Défense nationale et ce dernier doit faire rapport au Parlement. Le chef, dont j'ai parlé tout à l'heure, fait également rapport au sous-ministre de la Défense nationale pour ce qui est des questions financières et administratives, chose intéressante, et également au sous-greffier (Sécurité et renseignement) et conseiller juridique du Bureau du Conseil Privé pour d'autres questions.

Quel est le chaînon manquant? Ce sont les Canadiens. C'est le Parlement. Est-ce un problème? À mon avis, la réponse est oui. Il n'y a aucun mandat législatif donnant à cet organisme le


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pouvoir de se livrer à ce type d'intrusion dans la vie des Canadiens. Il faudrait peut-être parler d'intrusion possible.

Il n'y a aucune règle écrite dans une loi ou des règlements. Il se peut qu'il existe des règles écrites établies de temps à autre par le chef, le sous-greffier, le sous-ministre ou le ministre de la Défense nationale. Cependant, si elles existent, elles ne sont pas connues, du moins pas des Canadiens.

Ainsi, sans examen public, je prétends qu'on peut affirmer qu'il n'y a pas de contrôles appropriés. En effet, après tout, si tout se fait en catimini, comment pourrons-nous savoir si les contrôles voulus ont bien été effectués? Et chose plus importante encore, on ne s'assure pas que la législation est respectée et que, dans le cas contraire, on peut compter sur un mécanisme pour remédier à la situation. Pour moi, cela pose un problème possible énorme.

Comparons cela à notre agence d'espionnage. Nous ne qualifions pas cet organisme d'agence d'espionnage. Nous l'appelons plutôt le Centre de la sécurité des télécommunications. Cependant, notre propre agence d'espionnage, que nous connaissons en tant que telle, a été créée en vertu d'une loi par le Parlement. Elle doit suivre les règles établies par cette institution. Elle rend des comptes à un ministre qui, lui, fait rapport annuellement à la Chambre. Il est soumis au contrôle du Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité qui, je l'ai dit, est un organisme civil.

Je me demande pourquoi, si cela est assez bon pour notre service de renseignement, ce ne l'est pas pour le Centre de la sécurité des télécommunications. Ce n'est pas une idée qui m'est venue soudainement. Le comité parlementaire l'a reconnu dans le rapport dont ont parlé plusieurs de mes collègues, Une période de transition mais non de crise, dans lequel il a été recommandé non seulement comme le fait cette motion que le CSARS soit autorisé à examiner les opérations du CST, mais aussi que le CST soit constitué officiellement par une loi.

(1905)

J'appuie certainement ces deux recommandations qui en fait étaient unanimes. Logiquement, rien ne justifie dans une démocratie que cet organisme ne soit pas soumis à l'examen du Parlement par l'intermédiaire d'un comité. Je suis donc heureux d'appuyer cette motion.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, depuis des mois l'opposition officielle a sonné la cloche d'alarme au gouvernement dans le domaine de la sécurité nationale. L'opposition a questionné le gouvernement a plusieurs reprises pour savoir qui contrôlait qui, pour savoir qui commandait telle ou telle job, pour savoir exactement qui avait demandé telle ou telle enquête, sans jamais obtenir de réponse.

Pourtant, certaines questions étaient simples à répondre, n'exigeant que des noms de responsables payés par les taxes et les impôts des Canadiens et des Québécois, mais en vain, jamais de réponse. J'ai demandé personnellement, la main sur le coeur, qui contrôlait les espions dans ce pays, et spécifiquement dans le dossier du CST. Jamais de réponse. Aucune réponse satisfaisante n'est venue pour l'opposition officielle, mais aussi pour les millions de Québécois, de Québécoises et de Canadiens. On n'a qu'à lire les journaux et les éditoriaux pour s'en convaincre.

Nos inquiétudes ont commencé avec les révélations déconcertantes des activités illégales du Service canadien de renseignement de sécurité. Ensuite, les nouvelles révélations du Centre de la sécurité des télécommunications n'ont fait qu'alimenter nos craintes et confirmer qu'il n'y avait personne qui surveillait les espions dans ce pays qui se dit démocratique et se dit surtout un des meilleurs pays du monde.

Après des semaines d'attente, qu'est-ce que le gouvernement nous offre pour nous sécuriser, pour sécuriser les contribuables? Rien. Si bien qu'un député d'arrière-ban du gouvernement a senti le besoin de présenter une motion affirmant ce qui suit: «Que de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait modifier la Loi sur le service canadien de renseignement de sécurité afin d'autoriser le comité d'examen des activités de renseignement de sécurité à examiner les opérations du Centre de la sécurité des télécommunications», motion qui en dit long et qui confirme nos préoccupations et surtout qui nous donne raison, à nous, l'opposition officielle.

En tout premier lieu, il faudrait féliciter le député pour avoir compris l'indignation de l'opposition officielle à ce sujet. Malheureusement, il est un des rares à avoir saisi nos préoccupations légitimes, ou plutôt il est un des rares députés de l'actuel gouvernement libéral pour qui le fait d'avoir changé de côté de Chambre n'a pas altéré sa position dans le domaine de la sécurité nationale.

Faut-il rappeler que les libéraux du temps où il était dans l'opposition réclamaient exactement ce que nous réclamons depuis des mois, c'est-à-dire plus de contrôle de la part du Parlement sur les organismes d'espionnage au Canada? En Chambre et en comité, il s'agit de lire les procès-verbaux, les libéraux de l'époque des vaches maigres réclamaient plus de transparence. Les temps ont bien changé maintenant qu'ils ont le ventre plein. Il est vrai que l'inaction et le laisser-faire est une marque de commerce des libéraux par les temps qui courent, mais dans ce domaine, c'est tout de même renversant.

Force m'est donc de conclure qu'il faudra se contenter de cette motion alors que les révélations se multiplient, les allégations d'activités illégales du CST se quintuplent et la suspicion devient la règle. Qu'est-ce que cette motion apportera? Cette modification avancée, si elle est adoptée, saurait-elle rassurer les contribuables? Le changement proposé nous permettrait-il de savoir de façon précise ce que fait le Centre de la sécurité des télécommunications et comment le CST utilise les 250 millions de dollars, et c'est une évaluation très conservatrice de ma part, qui sont dépensés annuellement par cet organisme fédéral? Question légitime, que nous sommes en droit de nous poser.

Mes commettants et commettantes dans le comté de Berthier-Montcalm se posent exactement cette question-là, et pour cause. Et pour répondre à ces questions, il faut examiner ce que le comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité, ce que nous appelons le CSARS, a fait dans le passé.

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(1910)

Étant donné que le passé est garant de l'avenir, c'est drôlement important de savoir de quel bois ils se chauffent ces Sherlock Holmes de la sécurité nationale, ces fins limiers de la vérité, ces Colombo de l'espionnage canadien ou encore ces chiens de garde de l'obscurité de cette Chambre.

Plus sérieusement, avant d'apposer sur leurs frêles épaules de défenseurs à mi-temps une charge de travail supplémentaire, il faut répondre à ces questions-là. L'idée de mettre le CST sous surveillance est une très bonne idée en soi.

Pour ces motifs, je vous dis immédiatement que j'appuierai cette motion. C'est l'organisme sur lequel nous désirons octroyer ce pouvoir de surveillance qui est le problème. Un organisme de surveillance censé rassurer les élus, les contribuables et qui dit, par la bouche de son président, que dans ce service, on ne dit jamais ni oui ni non, vous en conviendrez avec moi, ce n'est pas tellement rassurant.

Dans l'état actuel des choses, nous devons répondre négativement aux questions que j'ai posées antérieurement. Vous comprendrez dans ce cas-là pourquoi l'amendement du Bloc québécois au niveau d'un suivi, au niveau d'une demande au CSARS de faire rapport à cette Chambre, c'est justement pour permettre à cette Chambre de surveiller l'organisme qui est censé surveiller les activités du CST.

La motion est acceptable aux yeux de l'opposition officielle, et la loi créant CSARS, bien qu'imparfaite, est passable. Cependant, je vous dis que si j'étais le solliciteur général du Canada, si cette loi-là me passait entre les mains, vous ne la reconnaîtriez pas une fois qu'elle serait passée par mon bureau, parce qu'il y aurait beaucoup de modifications. Dans le jargon québécois, on dit «faute de pain, on mange la galette», eh bien, il faut bien vivre avec la loi que nous avons entre les mains. Cela étant dit, pourquoi le Bloc québécois a-t-il des préoccupations constantes face à CSARS? Pourquoi avons-nous des craintes?

Je pense que mon collègue, le député du Bloc québécois du comté de Bellechasse, l'a très bien résumé dans son discours d'ouverture étayant la position de l'opposition officielle à ce sujet-là. Ce n'est pas le contenant mais le contenu de CSARS qu'il faut changer en tout premier lieu!

Les conservateurs notoires y siégeant n'ont plus aucune légitimité. Ils n'ont plus leur place. D'ailleurs, selon moi, ils ne l'ont jamais eue parce que le CSARS devrait être non partisan. Mais étant donné que le système est ainsi, suivons les règles jusqu'au bout.

Comme je l'ai fait dans le passé, je redemande à nouveau et j'espère qu'ils m'entendent, j'espère qu'ils me regardent, qu'ils regardent le débat, à MM. Jacques Courtois, Edwin A. Goodman, George W. Vari et même à Mme Rosemary Brown, dont le parti n'existe plus aussi, ou du moins officiellement, de remettre leur démission afin que le CSARS reflète la réalité démocratique de l'actuel Parlement.

Avec au minimum quatre nouveaux membres et un mandat plus large, le CSARS pourrait remplir son rôle premier de chien de garde. Il pourrait dans ce cas se voir accroître son rôle de surveillant.

Cette motion, si elle est adoptée, et j'ai hâte de voir la position du gouvernement face à cette motion, j'espère qu'ils vont l'appuyer, surtout que c'est une motion venant d'un député du gouvernement, d'un député d'arrière-ban, mais quand même un député du gouvernement libéral. J'espère qu'ils vont l'adopter avec le sourire. Je pense que si elle est adoptée telle quelle, ça va élargir les responsabilités du Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité et c'est donc important de partir du bon pied.

Je terminerai par une citation prise dans le rapport annuel 1993-1994 du CSARS où l'auteur citait lui-même M. William Pitt. La citation très courte est la suivante: «La tyrannie s'installe là où il n'y a plus de loi». À cela, monsieur le Président, j'ajouterais «encore faut-il avoir confiance à ceux qui sont censés l'appliquer et surtout la surveiller». Sur ce, je vous dis merci.

Le vice-président: La période prévue pour les affaires émanant des députés est maintenant expirée.

[Traduction]

Conformément à l'article 93 du Règlement, l'article retombe au bas de la liste de priorité du Feuilleton.

_____________________________________________


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MOTION D'AJOURNEMENT

(1915)

[Traduction]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

Le vice-président: Comme il a été convenu, en raison du malentendu qui s'est produit, la secrétaire parlementaire du ministre du Patrimoine canadien répondra à la question de la députée de Calgary-Sud-Est à laquelle elle n'a pu répondre hier.

LE CRTC

Mme Albina Guarnieri (secrétaire parlementaire du ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, en mars dernier, le ministre du Patrimoine canadien a reçu dans son bureau de circonscription un électeur qu'il n'avait jamais rencontré auparavant et qu'il n'a pas revu depuis. Cet homme lui a demandé d'écrire une lettre pour attirer l'attention du CRTC sur sa demande de licence pour une station de radio.

Le ministre a expliqué à cet électeur que, en tant que ministre responsable du CRTC, il ne pouvait pas s'ingérer dans les affaires du CRTC, mais que, en tant que député, il ferait son possible pour voir à ce qu'il soit traité de façon juste et équitable.

Le 15 mars, le ministre a écrit au président du CRTC à titre de député pour demander à la commission de donner à la demande de l'électeur la considération qu'elle méritait. C'était simplement une lettre d'un député cherchant à s'assurer qu'un de ses électeurs serait traité de façon juste et équitable. La lettre ne

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visait absolument pas à appuyer la demande de licence ni à exercer quelque pression que ce soit sur le CRTC.

Le 30 mars, le CRTC a accusé réception de la lettre du ministre, la qualifiant de lettre d'appui à l'égard de la demande de licence. Cet accusé de réception n'a jamais été porté à l'attention du ministre. S'il l'avait été, le ministre aurait immédiatement tiré les choses au clair.

Dès qu'il a appris qu'une des parties intéressées lui avait écrit en septembre au sujet de son prétendu appui à l'égard de la demande de licence, il a réagi immédiatement. Il a écrit à la partie intéressée pour dissiper tout malentendu au sujet de sa lettre antérieure. Dans cette lettre datée du 30 septembre, il disait, et je cite:

Dans ma lettre au CRTC datée du 15 mars 1994, je demandais simplement qu'on donne à la demande la considération qu'elle méritait. Il n'était pas question d'appuyer la demande ni de s'y opposer. Le CRTC est l'organisme chargé par la loi de prendre des décisions indépendantes concernant de telles demandes. C'est donc au CRTC qu'il revient d'évaluer les mérites des arguments soulevés par les demandeurs et les intervenants.
Les députés remarqueront que le ministre a pris ces mesures avant que l'affaire ne soit rendue publique. Il a fait de son mieux pour éclaircir la situation non pas à cause des pressions exercées par le public et les médias, puisqu'elles n'existaient pas à ce moment-là, mais bien parce que c'était la chose à faire.

LA JUSTICE

L'hon. Warren Allmand (Notre-Dame-de-Grâce, Lib.): Monsieur le Président, le 26 octobre, j'ai demandé au ministre de la Justice s'il modifierait l'article 690 du Code criminel pour en corriger certains défauts et pour changer le processus qui en découle.

Cet article permet au ministre de la Justice d'ordonner la tenue d'un nouveau procès lorsqu'une personne a été envoyée en prison à tort ou injustement, lorsqu'il y a eu une erreur, un faux témoignage, lorsque des éléments de preuve ont été cachés, et le reste. Beaucoup de critiques ont été formulées contre cet article depuis quelques années.

Nous savons tous que cet article a été invoqué en faveur de Donald Marshall, qui a été emprisonné pendant 10 ans pour un crime qu'il n'avait pas commis. Il a également été invoqué en faveur de David Milgaard, qui a été en prison pendant 23 ans après avoir été condamné à la suite d'un faux témoignage.

Des choses semblables sont arrivées dans d'autres pays également. Récemment, un grand nombre d'entre nous ont vu le film Au nom du père, au sujet des quatre Gilford, en Angleterre, les Irlandais qui ont été condamnés sur des preuves trafiquées et à qui il a fallu beaucoup de temps pour faire revoir leur cause et se faire libérer. Aux États-Unis, il y a la cause célèbre de Rubin Carter qui est resté en prison fort longtemps avant qu'on ne s'aperçoive qu'il y avait eu erreur et qu'on le libère.

Il s'agit ici de la disposition autorisant le ministre de la Justice à ordonner un nouveau procès lorsqu'on trouve qu'il y a eu erreur ou faux témoignage, que des faits ont été cachés ou qu'on a trouvé de nouveaux éléments de preuve.

Les critiques ont dit que, même si, en principe, le processus était excellent, il laissait à désirer parce que les délais étaient beaucoup trop longs. Il a fallu beaucoup de temps à Donald Marshall et à David Milgaard pour se prévaloir de cet article. Les délais ont été interminables.

En deuxième lieu, l'ensemble du processus se poursuit en secret, le ministre de la Justice et ses collaborateurs n'ayant aucun compte à rendre au public.

En troisième lieu, dans ces affaires, le procureur général fait office à la fois de juge et de procureur; il y a donc une certaine incompatibilité.

Enfin, le critère sur lequel on se fondera pour admettre une nouvelle preuve ou reconnaître qu'une erreur a été commise est plutôt vague et varie d'un ministre de la Justice à l'autre.

Plusieurs propositions ont été faites pour y remédier. Les principales l'ont été récemment par un organisme appelé Association in Defence of the Wrongly Convicted, ou AIDWYC. À l'occasion d'une réunion à Toronto en février, cette association a proposé qu'on apporte certaines modifications à l'article 690 pour accélérer le processus, pour rendre les autorités plus comptables, plus objectives, et ainsi de suite.

Quand le ministre de la Justice va-t-il apporter à l'article 690 quelques-unes des modifications qui ont été proposées par des organismes comme l'AIDWYC?

M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à informer le député que le ministre de la Justice continue de répondre aux préoccupations de ceux qui ont critiqué le processus relevant de l'article 690 en améliorant les procédures qui le régissent.

Plusieurs mesures ont été prises en ce sens. La décision du ministre à l'égard de la demande de Colin Thatcher a été rendue publique, afin que la population sache comment le processus fonctionne et quels principes régissent l'utilisation des pouvoirs conférés en vertu de l'article 690.

Le ministère a également rendu public un feuillet qui décrit les critères de présentation d'une demande, les personnes qui peuvent en présenter une, comment et où présenter une demande et les renseignements dont les requérants doivent disposer pour remplir leur demande.

Les renseignements qui ont été publiés décrivent également la façon dont les demandes sont évaluées. Ces renseignements montrent que l'évaluation d'une demande présentée aux termes de l'article 690 nécessite beaucoup de travail. Il faut du temps pour procéder à une évaluation consciencieuse et approfondie. Les requérants fournissent parfois des motifs supplémentaires pour avoir droit à l'examen prévu à l'article 690. Quand ces motifs sont présentés des mois, voire des années, après la demande initiale, cela prolonge le temps nécessaire pour enquêter sur le cas et l'évaluer.

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Je tiens à dire au député que l'on tente actuellement de traiter les demandes plus rapidement.

Ceux qui disent que le processus n'est pas indépendant ignorent que la plupart des personnes qui demandent que leur cas soit réexaminé en vertu de l'article 690 ont été poursuivies par le procureur général d'une province. Il est donc très rare que le procureur général du Canada doive examiner le cas d'une personne qui a été poursuivie par son représentant. Quand cela arrive, on demande à des avocats de l'extérieur du ministère d'évaluer la demande et de conseiller le ministre.

Il revient aux personnes qui évaluent les demandes de les examiner consciencieusement et minutieusement, tout comme il revient au ministre, en vertu des responsabilités qui lui sont conférées par le Parlement, d'examiner les demandes et de prendre les décisions nécessaires.

Le vice-président: Conformément au paragraphe 38(5) du Règlement, la motion d'ajournement de la Chambre est adoptée d'office. La Chambre s'ajourne donc à 14 heures demain, conformément à l'article 24 du Règlement.

(La séance est levée à 19 h 24.)