AAND Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON ABORIGINAL AFFAIRS AND NORTHERN DEVELOPMENT
COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES AUTOCHTONES ET DU DÉVELOPPEMENT DU GRAND NORD
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le jeudi 4 décembre 1997
ERRATUM (le mardi 27 janvier 1998)
Les Témoignages parus le lundi 5 janvier 1998 attribuaient par erreur la déclaration du Groupe de travail sur l'examen des répercussions environnementales de la vallée du Mackenzie (à 11 h 26) à Mme Heidi Klein plutôt qu'à Mme Alestine André. L'erreur d'attribution se répète d'un bout à l'autre de ces témoignages.
L'erreur a été corrigée dans le texte.
[Français]
Le président (M. Guy St-Julien (Abitibi, Lib.)): Nous sommes prêts à commencer.
Aujourd'hui, nous examinons le projet de loi C-6, Loi constituant certains offices en vue de la mise en place d'un système unifié de gestion des terres et des eaux de la vallée du Mackenzie et modifiant certaines lois en conséquence.
Nous sommes aujourd'hui à notre dernière journée de témoignages sur le projet de loi C-6 et je tiens à remercier tous les députés qui ont été présents ainsi que tous nos témoins.
Nous recevons aujourd'hui M. Gary Bohnet, président de la Nation métis des Territoires du Nord-Ouest, et M. George Kurszewski, négociateur en chef du South Slave Métis Tribal Council. Est-ce que vous avez une déclaration à faire?
[Traduction]
Avez-vous une déclaration? Vous avez dix minutes.
M. Gary Bohnet (président, Nation métisse, Territoires du Nord-Ouest): Merci beaucoup, monsieur le président et membres du comité. Nous vous remercions de nous donner l'occasion de témoigner devant vous.
Je voudrais d'abord dire quelques mots au sujet de la nation métisse, Territoires du Nord-Ouest.
Nous sommes les Métis de la partie occidentale des Territoires du Nord-Ouest. Notre région s'étend à partir du 60e parallèle à Fort Smith jusqu'à Aklavik dans le delta du Mackenzie et nous sommes entre 5 000 et 7 000 Métis dans la vallée du Mackenzie.
Nous avons quatre organismes communautaires métis dans le delta, c'est-à-dire dans la région du règlement des Gwich'in, un à Aklavik, un autre à Inuvik, un à Fort McPherson et un à Tsiigehtchic. Dans la région du Sahtu, nous avons des groupes à Fort Good Hope, à Norman Wells et à Tulita et de nombreux autres dans la partie occidentale du territoire.
Nous sommes au courant de cette mesure depuis déjà très longtemps. Quand je dis que nous sommes au courant du projet de loi, c'est parce que nous faisons part de nos positions à ce sujet depuis 1994. Le 4 juillet dernier, nous avons envoyé une lettre, dont nous vous avons fait parvenir copie, à l'honorable Ron Irwin pour expliquer notre position. Nous disions essentiellement à ce moment-là que nous continuions d'appuyer l'instauration d'offices de gestion dans les territoires visés par un règlement territorial, c'est-à-dire le territoire des Gwich'in et la région du Sahtu dans la vallée du Mackenzie. Le gouvernement a l'obligation devant la loi de respecter les règlements territoriaux. En même temps, nous le sommes toujours pour que la mesure s'applique dans les régions visées par les règlements territoriaux. D'autre part, nous considérions qu'on ne devait pas imposer le nouveau régime dans les régions où les revendications territoriales ne sont pas réglées. C'est encore notre position.
• 1015
Je vous signale que, pendant l'été de 1995, lors de
l'assemblée nationale des Métis dans les Territoires du
Nord-Ouest à laquelle assistaient des délégués de tout l'Ouest
arctique, y compris des régions visées par les règlements
territoriaux, nous avions adopté une résolution à l'unanimité.
Je voudrais vous en citer un passage:
-
IL EST DONC RÉSOLU QUE la nation métisse - Territoires du
Nord-Ouest continue d'appuyer le travail entrepris par le
gouvernement fédéral dans le cadre de ses obligations découlant
de l'accord final avec les Gwich'in et les habitants du Sahtu;
-
ET IL EST AUSSI RÉSOLU QUE l'exécutif de la nation métisse -
Territoires du Nord-Ouest continuera d'exercer des pressions
auprès du gouvernement fédéral et du ministère des Affaires
indiennes et du Développement du Nord pour qu'ils fournissent les
ressources nécessaires à la nation métisse - Territoires du
Nord-Ouest pour qu'elle consulte les Premières nations des
régions de North Slave, de South Slave, de Deh Cho, des Gwich'in
et du Sahtu pour élaborer un régime provisoire qui permettra
d'appliquer pleinement les accords définitifs des Gwich'in et du
Sahtu sans empêcher les habitants des régions qui ne sont pas
encore visées par un tel accord général de s'occuper de ces
importantes questions de leur propre point de vue.
Cette résolution avait été adoptée à l'unanimité.
Nous avons continué de faire part de nos préoccupations au gouvernement fédéral. En un mot, je pense que les fonctionnaires du gouvernement fédéral commettent une grave erreur en appliquant cette entente particulière dans tout l'Ouest arctique. À mon avis, cela pose des problèmes de taille aux Métis et aux autres Premières nations des régions qui ne sont pas encore visées par un accord.
Sur ce, monsieur le président, je voudrais permettre à mon collègue, qui est porte-parole des Métis de South Slave, de dire quelques mots.
Le président: Allez-y.
M. George Kurszewski (négociateur en chef, South Slave Métis Tribal Council): Merci, monsieur le président.
Les Métis de South Slave représentent le groupe le plus nombreux de Métis des Territoires du Nord-Ouest. Nous sommes aussi visés par l'entente des Dénés et des Métis qui fait partie de notre histoire. Nous sommes en train de négocier un accord sur la gestion des terres et des ressources et sur l'autonomie gouvernementale avec le gouvernement du Canada pour préciser quelle est notre position, quel est notre territoire et quels sont nos droits dans la région de South Slave des Territoires du Nord-Ouest.
Selon nous, le projet de loi va à l'encontre de principes très fondamentaux qui font partie de notre pays. Certains de mes commentaires à propos de ces principes se rapprochent de ce que vous a dit M. Bohnet.
Nous ne croyons pas qu'une région du pays a le droit de prendre des décisions au nom d'un autre secteur de compétence ou d'une autre région du pays. D'après nous, les Gwich'in n'ont pas le droit, dans un pays démocratique, de prendre une décision au nom des Métis de South Slave. Cela nous insulte. Si le gouvernement et le Parlement du Canada appuient une telle façon de faire, le Québec devrait aussi pouvoir prendre des décisions au nom de la Colombie-Britannique ou vice versa, et ce devrait être possible pour n'importe quelle autre région du pays de prendre des décisions qui s'appliqueront dans une autre région relevant d'un gouvernement différent.
Une autre chose qui nous déplaît, c'est que quand les Gwich'in négociaient leur entente territoriale, nous les avons toujours appuyés. Nous les considérons comme des parents. Nous avions adopté des motions lors de nos propres assemblées pour appuyer les Gwich'in et nous ne sommes jamais intervenus dans leurs négociations. Pour nous, c'est un principe très important.
Cependant, nous avons enfin entamé nos propres négociations en 1997. Nous l'avons fait cette année. Le Cabinet a approuvé le début de nos négociations, en avril dernier. Maintenant, les Gwich'in ont pris des mesures en faisant appel aux tribunaux pour forcer le gouvernement fédéral à nous appliquer partout dans la vallée du Mackenzie un régime qui s'inspire de la mentalité des années 80.
Dans les années 80, les négociations des Dénés-Métis, pour lesquels j'étais à l'époque négociateur en chef, avaient abouti au régime proposé dans le projet de loi, surtout pour donner certains pouvoirs au gouvernement autochtone. L'accord n'avait pas reçu l'approbation des assemblées en 1990 et il est donc tombé à l'eau. Par la suite, les Gwich'in ont repris cet accord et l'ont instauré dans leur propre région en 1992, dans le cadre de leurs propres revendications territoriales.
• 1020
Depuis, certaines choses ont changé. Le gouvernement n'est
plus le même. La politique a évolué. Nous avons appris certaines
choses. Une chose qui a certainement pas mal changé la situation,
c'est que l'on négocie maintenant des ententes d'autonomie
gouvernementale. L'entente des Dénés-Métis de 1990 sur laquelle
s'appuie le régime Gwich'in ne portait pas sur l'autonomie
gouvernementale.
Comme les négociations ne portaient pas sur l'autonomie gouvernementale à l'époque, tout ce qu'on devait régler était des questions de gestion du territoire et des ressources. Les négociations à ce sujet tenaient compte du fait qu'un gouvernement populaire devait s'occuper des terres et des ressources. Ce n'est plus le cas. Maintenant que l'on a commencé à signer des accords d'autonomie gouvernementale, les gouvernements autochtones ont compétence à l'égard de leurs propres terres et de leurs propres ressources. Le projet de loi ne respecte pas ce principe. Il ne reflète que ce qui s'était passé dans les années 80. C'est injuste. Nous sommes en 1997. Nous sommes à la veille du prochain millénaire, et cet accord est dépassé. Le projet de loi est dépassé.
C'est ce que nous avions dit il y a quelques années quand on nous a parlé de ce projet de loi la première fois, mais on ne nous a pas permis de participer au processus de consultation. Nous avions demandé des ressources pour participer à la rédaction du projet de loi et au processus consultatif. Cela fait d'ailleurs trois ou quatre ans, on me dit que cela fait quatre ans et demi, que nous ne pouvons pas le faire. J'ai appris ce qui se passait il y a à peine trois semaines quand les fonctionnaires sont venus d'Ottawa à Yellowknife pour mettre les gouvernements autochtones de l'Ouest au courant. Lors de cette séance, j'ai appris que les Gwich'in, et je songe plus particulièrement à un de mes collègues qui siège comme moi au sommet autochtone, participaient à la rédaction de cette mesure depuis quatre ans et demi. Nous l'ignorions. On ne nous a jamais donné l'occasion de faire la même chose.
Nous trouvons très insultant que le gouvernement du Canada donne son appui et du financement à un groupe, la nation Gwich'in, pour participer à la rédaction du projet de loi, sans permettre en même temps aux Métis de South Slave de faire la même chose. Tout ce qu'on nous a permis de faire était d'assister aux séances d'information. Ce n'est pas de la consultation. Cela ne correspond pas aux consultations qu'on devrait avoir pour un tel pacte.
Il y a bien des choses qui nous déplaisent à propos du processus et à propos du projet de loi lui-même. J'ai apporté un document pour vous. Malheureusement, nous ne l'avons pas fait traduire. Comme je l'ai dit tantôt, nous manquons de ressources humaines et financières et nous n'avons pas pu vous avoir une traduction à temps. Vous avez cependant le temps de lire ce document. Je ne veux pas répéter des choses que vous avez déjà entendues. Je sais que vous arrivez à la fin de vos propres consultations et de votre travail au sujet du projet de loi et je sais que d'autres groupes vous ont exprimé certaines préoccupations. J'espère que notre document expliquera bien notre position. Certaines de nos inquiétudes se rapprochent de celles d'autres groupes et d'autres gouvernements, mais certaines concernent tout particulièrement les Métis.
L'une des omissions bien claires du projet de loi, c'est que l'article 5 qui porte sur les revendications territoriales et les droits autochtones ne parle pas de l'autonomie gouvernementale. Il ne permet pas la protection des négociations en vue de l'autonomie gouvernementale comme celles qui se déroulent maintenant. Il ne permet pas que ces négociations pour l'autonomie gouvernementale aboutissent à des régimes de gestion et à des processus de prise de décision qui pourraient modifier le projet de loi. Il n'en est pas question. Le projet de loi l'emporterait sur tout accord futur d'autonomie gouvernementale et empêcherait qu'on puisse prendre de meilleures décisions sur l'application de régimes de gestion, particulièrement dans notre région et peut-être dans la vallée du Mackenzie.
Je vous incite à lire les recommandations détaillées que nous formulons pour modifier le projet de loi, mais ce n'est que notre position de repli. Selon nous, on ne devrait pas permettre que le projet de loi s'applique dans notre région. En réalité, la mesure devrait être instaurée de façon graduelle. Les Gwich'in sont peut-être prêts à l'accepter. Nous sommes d'accord avec un tel concept parce que c'est ce qu'ils voulaient, ce qu'ils ont négocié et ce qu'ils ont accepté. Nous sommes bien d'accord là-dessus. Que les Gwich'in le fassent, mais nous ne sommes pas prêts à faire la même chose. Nos propres négociations détermineront comment nous gérerons nos terres et nos ressources.
• 1025
Le projet de loi l'emporterait sur toute décision que le
gouvernement métis pourrait prendre à l'égard des terres et des
ressources des Métis. Notre propre plan d'utilisation des terres
serait assujetti à un plan d'utilisation des terres élaboré dans
le cadre de ce régime. Cela nous insulte parce que nos propres
décisions et notre propre avenir nous seraient enlevés par un
système bureaucratique des années 80 et qu'on veut appliquer à la
situation actuelle. Cela nous semble insensé.
Notre première position est donc que le gouvernement fédéral ne doit pas nous faire une telle chose. Nous ne le méritons pas. Nous méritons d'être traités de la même façon que les Gwich'in. Nous méritons d'être traités de la même façon que d'autres Canadiens dans d'autres régions. C'est à nous de décider comment nous allons vivre dans notre propre région.
Nous appuyons le principe d'un régime de gestion des ressources intégré, mais donnez-nous la chance de donner notre avis sur la façon dont il sera instauré. Nous avons de bonnes idées. Les Métis des Territoires du Nord-Ouest ont contribué beaucoup au développement des territoires. Nous avons contribué beaucoup au développement de l'ouest du Canada. Depuis quelques centaines d'années, notre contribution a été énorme: les voyageurs, le commerce des fourrures. Tout le long de notre histoire, les Métis ont contribué au Canada.
Nous voulons continuer à le faire. Nous aimons collaborer. Nous aimons participer aux décisions qui influent sur notre propre pays. Nous sommes très frustrés quand quelque chose de ce genre arrive et nous ne comprenons pas pourquoi. Il y a peut-être des raisons que vous pourrez nous expliquer, mais cette décision nous est imposée d'ailleurs et nous ne méritons pas cela. Permettez-nous de jouer un plus grand rôle. Donnez-nous les mêmes occasions que vous avez données aux Gwich'in et aux habitants du Sahtu. Montrez-nous le même respect et nous pourrons contribuer au moins autant qu'eux. Nous ferons de notre mieux.
Je ne veux pas prendre plus de temps. S'il y a des questions que vous voulez poser au sujet du projet de loi, j'y répondrai volontiers. Nous avons essayé de vous expliquer nos préoccupations particulières. Je serai maintenant heureux de vous répondre. Je vais laisser au comité la chance de nous poser des questions.
Merci.
Le président: Merci, monsieur Kurszewski.
[Français]
Vous représentez très bien les Métis de votre région et vous êtes, je pense, un leader dans votre groupe.
On va passer à la période de questions. Monsieur Konrad,
[Traduction]
vous avez cinq minutes.
M. Derrek Konrad (Prince Albert, Réf.): Merci beaucoup.
J'aurais bien voulu avoir ce document plus tôt parce que j'aurais aimé pouvoir le lire. Il semble relativement complet. Vous avez présenté le point de vue de votre peuple de façon passionnée, ce qui me pousse à vous poser quelques questions à propos de ce que vous avez dit quant au fait que l'on ne respectait pas les principes de la démocratie relativement à votre région.
Si j'ai bien compris, les conseils des diverses régions devront proposer des membres pour les offices d'aménagement territorial, etc. Si vous jugez les principes démocratiques importants, que penseriez-vous d'un office élu se composant de représentants de votre région, sans restriction aucune, si c'est ce qu'on décidait de faire d'une façon ou d'une autre? Pouvez-vous me dire ce que vous en pensez?
M. George Kurszewski: Merci de votre question, monsieur Konrad. Voici ma réponse.
L'ancien ministre des Affaires indiennes nous a envoyé une lettre pour nous demander de recommander quelqu'un qui ferait partie de l'office pour représenter notre région. Les nations du Traité 8, qui habitent la même région que nous, ont reçu la même lettre. Les nations du Traité 8 feront donc une nomination et nous aussi. C'est la ministre qui décidera si c'est la personne proposée par les Métis ou celle qu'ont proposée les nations du Traité 8 qui fera partie de l'office.
Supposons que la ministre choisisse la personne proposée par les nations du Traité 8, qui représente les Dénés. Cela voudrait dire que les Métis, qui sont 3 000 dans notre région, ne seraient pas représentés à l'office et n'auraient pas leur mot à dire dans ce régime de gestion. Nous trouvons que c'est tout à fait inacceptable.
M. Derrek Konrad: Vous seriez donc d'accord pour que l'on élise ouvertement les membres de l'office, comme je l'ai proposé?
M. George Kurszewski: En réalité, nous contestons la conception même de l'office. Pour l'instant, l'office fait partie d'un régime de gouvernement populaire qui ne prévoit pas la possibilité pour des gouvernements autochtones de conclure des ententes intergouvernementales. Cela ne nous dérange pas de participer à un régime intégré, mais nous avons notre propre gouvernement.
• 1030
Nous avons un gouvernement métis et nous pouvons sans
problème conclure un accord avec le gouvernement populaire au
sujet d'un régime de gestion intégré. Nous le faisons déjà dans
d'autres domaines et nous pourrions le faire ici. Dans ce cas-ci,
cependant, on nous demande d'oublier que nous sommes des Métis,
de faire partie d'un office populaire, de jurer de respecter les
objectifs de l'office et de suivre les directives d'un président.
Nos recommandations ne refléteraient pas ce qui se passe dans les
années 90, maintenant que les gouvernements autochtones
entretiennent des rapports avec les gouvernements municipaux,
provinciaux ou territoriaux. Nous trouvons que c'est une
meilleure façon de procéder. La nouvelle façon est préférable.
Elle fonctionne mieux.
M. Gary Bohnet: Si vous me permettez d'ajouter quelque chose en termes très simples, je vous demanderai qui représente les Métis au sein des offices de gestion ou ailleurs. Les Métis veulent déterminer eux-mêmes comment choisir ceux qui les représenteront, mais ces personnes doivent être des Métis. Personne d'autre ne peut exprimer l'opinion des Métis sur les terres et les ressources des Métis.
M. Derrek Konrad: Pour revenir à ma question, les Métis, les Gwich'in, les habitants du Sahtu et n'importe quel autre peuple peuvent être représentés à n'importe quel échelon gouvernemental. Si je ne m'abuse, l'ancien chef du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest est maintenant président des Gwich'in, même si ce n'est pas du conseil tribal.
Si quelqu'un comme moi allait s'installer dans les territoires et si je passais toute ma vie dans la région des Gwich'in et que mes enfants et mes petits-enfants y grandissaient, nous n'aurions aucun droit dans le genre de gouvernement dont vous parlez. Cela m'inquiète.
M. George Kurszewski: De quel type de gouvernement parlez-vous? Du gouvernement populaire?
M. Derrek Konrad: Non, pas du gouvernement populaire, mais du gouvernement métis, par exemple. Supposez que nous vivions dans une région où...
M. George Kurszewski: Je pense qu'il faut dire un mot de l'héritage des Métis. Les Métis héritent des terres de leurs ancêtres. Nous avons la responsabilité de gérer ces terres en vertu d'une longue tradition. Il y a longtemps que nous le faisons et nous avons l'intention de continuer à le faire. C'est notre responsabilité. Il nous incombe de nous occuper d'une partie de ce pays et c'est ce que nous avons toujours fait.
Ce faisant, lors des négociations, nous renonçons à cette responsabilité. Lors des négociations Dénés-Métis, le peuple autochtone—en l'occurrence, les Métis—a renoncé à 80 p. 100 des terres qui sont devenues terres publiques, lesquelles ont été remises à des gens comme vous donc, et en a gardé 20 p. 100. C'est un fait. Nous conservons essentiellement 20 p. 100 du territoire qui nous a toujours appartenu. Nous nous occupons donc de ces terres et ce sont ces terres qui nous préoccupent. Quant aux 80 p. 100 qui restent—elles font partie désormais du régime public.
Ceux qui habitent ces terres, ceux qui y déménagent pour y vivre et s'y installer, ne sont pas exclus de la prise de décisions. En fait, ils constituent 50 p. 100 des représentants à ces offices, comme dans le cas de celui-ci. Personne n'est donc laissé pour compte. En fait, la difficulté vient du fait que les dispositions de ce projet de loi nous enlèvent une partie de la prise de décisions concernant les 20 p. 100 de terres qui nous appartiennent car ceux qui prennent les décisions concernant les 80 p. 100 de terres publiques les prennent aussi pour nos 20 p. 100.
M. Derrek Konrad: Je pense que nos raisonnements ne convergent pas. Il faut que vous sachiez que quand vous parlez de gens comme moi, je ne comprends pas très bien de qui vous parlez. Une de mes arrière-grands-mères était aussi autochtone.
M. George Kurszewski: Je parle de ma région.
M. Gary Bohnet: Même si vous êtes un de nos frères métis perdus de vue depuis longtemps...
M. Derrek Konrad: Je suis Canadien, je vous remercie.
Le président: Merci, monsieur Konrad.
[Français]
Monsieur Bachand s'il vous plaît.
M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Je suis heureux de vous accueillir, monsieur Bohnet, ainsi que votre négociateur. J'ai d'ailleurs de bons souvenirs de mon passage parmi les Métis. En changeant de bureau, j'ai même pris soin de déménager les ceintures fléchées qui m'avaient été données par les Métis lorsque je me suis rendu à Yellowknife pour les rencontrer il y a déjà plusieurs années. Ce sont des souvenirs très précieux pour moi. Je suis aussi très sensible aux arguments qui nous sont apportés.
Il y a curieusement cinq régions dans la vallée du Mackenzie. Les Gwich'in et les Sahtu sont passés devant nous, eux aussi. Ils disent qu'ils ne voient pas de problème à ce que l'entente sur les revendications territoriales qui prévoyait un projet de loi, lequel projet de loi est devant nous aujourd'hui, s'étende à toute la vallée du Mackenzie.
Les trois autres régions, qui n'ont pas encore d'entente de revendications territoriales ni d'autonomie gouvernementale, s'opposent à cela, et je le comprends. J'ai d'ailleurs demandé aux Gwich'in, à un moment donné, s'ils seraient d'accord pour accepter les termes d'un projet de loi découlant d'une entente sur les revendications territoriales et l'autonomie gouvernementale qu'ils n'auraient pas encore signée. Le chef a alors souri.
• 1035
J'ai du mal à comprendre comment il est possible pour
une ou deux régions d'imposer une entente à l'ensemble
de la vallée quand cette entente n'a pas été signée par
tout le monde. Je pense que vous avez adopté une bonne
approche politique à ce problème.
Je voudrais donc que vous réagissiez sur le projet de loi tel qu'il est. Les fonctionnaires et ceux qui ont fait le projet de loi nous disent qu'il y a des dispositions pour inclure les gens qui n'ont pas encore signé. Entre autres, dans le préambule du projet de loi, on dit:
-
qu'il est dans l'intention du gouvernement fédéral
de procéder, en collaboration avec les Premières Nations
de la vallée du Mackenzie, à la révision des
dispositions pertinentes de la présente loi dans le
cadre des négociations relatives à leur autonomie
gouvernementale,
Cela signifie que, lorsqu'ils auront négocié l'autonomie gouvernementale avec vous, ils seront d'accord pour modifier le projet de loi C-6 s'il y a des modifications à y apporter. C'est la première chose.
Deuxièmement, vous avez parlé du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, qui est un droit reconnu à l'article 35. Le paragraphe 5(2) du projet de loi dit:
-
...ne porte pas atteinte à la protection des droits
existants—ancestraux ou issus de traités—des
peuples...
Vous connaissez tous l'article 35 de la Constitution.
Alors, on nous dit qu'il ne faut pas s'inquiéter, parce qu'on va probablement modifier le projet de loi pour ceux qui n'ont pas négocié leurs revendications territoriales.
D'un autre côté, il y a l'autre principe politique qui veut forcer les trois autres régions à accepter ce que les deux premières régions ont signé. Je voudrais donc savoir si le fait d'avoir ces dispositions dans le projet de loi vous rassure ou bien si vous maintenez qu'on ne peut pas imposer à d'autres régions ce qui a été négocié uniquement avec deux régions spécifiques de la vallée du Mackenzie.
[Traduction]
M. Gary Bohnet: Nous allons probablement répondre tous les deux, mais je vais commencer.
Nous négocions d'une façon ou d'une autre depuis 25 ans. Nous savons comment les fonctionnaires travaillent. Nous avons négocié avec eux à plusieurs reprises. Mais il faut tenir compte de la réalité. Nous ne sommes pas aussi naïfs qu'on le croit. En réalité, une fois qu'un projet de loi est adopté, à la table des négociations, le maximum que l'on peut obtenir, à cause des dispositions législatives, est ce que les autres ont déjà obtenu. Les négociateurs en face de vous sont prompts à brandir la nouvelle loi. Ils disent que les dispositions législatives sont limitatives. Ainsi, la position est en fait préétablie grâce à la loi qui va affecter trois régions dans la partie occidentale de l'Arctique.
M. George Kurszewski: Merci de cette question.
L'autonomie gouvernementale est capitale pour nous. Nous pensons que ces accords aboutiront à de meilleures décisions dans notre région du pays et il nous faut donc protéger cela. Nous pensons qu'en l'occurrence le projet de loi lui-même, s'il est amendé pour donner aux ententes d'autonomie gouvernementale la même importance qu'il donne aux ententes réglant les revendications territoriales, constituera une amélioration. Toutefois, il y a encore un obstacle majeur.
Nous ne voyons pas l'urgence ici. Nous savons qu'il y a un engagement qui découle de l'entente avec les Gwich'in. La date limite est dépassée parce que le gouvernement a mis trop de temps à résoudre les différends dans toutes les régions. On peut peut-être expliquer cette lenteur—pour ne pas jeter le blâme uniquement sur le gouvernement—du fait de la nature même du processus qui aboutit aux négociations ou aux accords avec les autres régions.
Nous disons qu'il n'y a pas d'urgence, qu'il n'y a pas de besoin pressant en ce qui concerne le territoire occidental et qu'il n'est pas nécessaire de s'empresser d'y imposer les dispositions de ce projet de loi. On peut attendre encore quelques années. D'ici deux ou trois ans, nos négociations seront terminées et il en ira de même pour les négociations du Traité 8, espérons-le. Les Dogrib s'attendent à une entente de principe au printemps de 1998.
Qu'est-ce qui presse tant? Nous nous précipitons pour mettre en place ce genre de régime alors que nous savons que les négociations se poursuivent actuellement, qu'elles seront terminées bientôt, et qu'elles auront une incidence sur les régimes prévus, voire qu'elles porteront sur ce sujet-là précisément. Nous ne voyons pas l'urgence et nous ne pensons pas qu'il faille se précipiter.
Le président: Madame Hardy.
Mme Louise Hardy (Yukon, NPD): Ainsi, de la façon dont c'est organisé actuellement, votre droit de regard sur les 20 p. 100 de terres s'en trouverait diminué, n'est-ce pas? Pouvez-vous me donner des éclaircissements? Il se peut qu'on ne vous consulte pas s'il y a des terres qui chevauchent d'autres terres. Il se peut qu'il n'y ait personne pour vous représenter à l'office et qui puisse protéger les 20 p. 100 de terres qui sont à vous. Pouvez-vous développer cet aspect-là?
M. George Kurszewski: C'est tout à fait vrai et c'est ce qui nous effraie au plus haut point. Dans la proposition actuelle, qui prévoit dix membres de l'office et un président, il est tout à fait possible que nous n'ayons aucun représentant à l'office. Nos terres pourraient constituer de 20 000 à 25 000 milles carrés dans une région d'une centaine de milliers de milles carrés. Quant à nous, nous pourrions avoir des projets pour ces terres que nous possédons, où nous voulons faire fructifier nos propres économies. Tous nos efforts pourraient être vains, car l'office pourrait très bien annuler nos décisions.
Nous ne pensons pas que ce soit un très bon régime. Cela deviendra très risqué pour nous d'affecter des ressources au développement de nos propres plans qui pourraient, pour finir, être contrecarrés et rejetés par d'autres régions.
L'office lui-même représente cinq régions. Dans la région du Delta, la région Gwich'in aurait deux représentants, un du grand public et un Gwich'in. Les Sahtu auraient un représentant du grand public et un Gwich'in, et cela couvre toute notre région. D'autres régions pourraient avoir la responsabilité des plans d'aménagement de nos terres. Ce n'est pas ainsi que nous concevons les choses. Nous n'avons jamais fonctionné ainsi. Nous trouvons que le principe est inacceptable.
Mme Louise Hardy: Si ces dispositions sont adoptées, que se passera-t-il avec vos revendications territoriales? Comment cela va-t-il modifier votre méthode de négociation?
M. George Kurszewski: Ces dispositions sapent l'intégrité de notre équipe de négociation, qui n'a pas la liberté de négocier un accord convenable entre notre peuple et les représentants du Canada. L'intégrité est sapée car il existe déjà quelque chose qui nous oriente dans une certaine direction, car quelqu'un d'autre a pris une décision en notre nom.
Ainsi, notre intégrité est atteinte et cela n'est pas le cas d'autres règlements portant sur des revendications territoriales. Nous ne considérons pas que notre région ou d'autres régions portent atteinte à l'intégrité des négociations des Gwich'in ou des Sahtu. Mais voilà que dans notre cas, quelqu'un d'autre porte atteinte à notre intégrité, et c'est inacceptable.
Mme Louise Hardy: Merci.
[Français]
Le président: Merci, madame Hardy.
Nous allons donner la parole à M. Patry, qui va partager son temps avec M. Bryden.
Monsieur Patry.
M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.): Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Merci, monsieur Kurszewski. Je voudrais faire une remarque et poser une question. Vous dites au début de votre mémoire que vous n'avez pas été consultés. En fait, vous n'avez pris connaissance de l'existence du projet de loi qu'au cours des derniers mois.
Selon ce que dit le ministère, la nation métisse aurait à deux reprises accepté 20 000 $, en 1994-1995 et 1995-1996, afin de pouvoir étudier ce projet de loi. Je signale cela en passant. D'autre part, on me dit que vous avez rencontré des représentants du ministère à deux reprises à Yellowknife.
Ma question porte sur les accords de revendication territoriale. Le paragraphe 5(1) dispose que les accords de revendication territoriale auront préséance sur les dispositions de ce projet de loi. Est-ce ainsi que vous interprétez ce paragraphe, à savoir que tout accord de revendication territoriale supplantera les dispositions du projet de loi C-6?
M. George Kurszewski: Permettez-moi de répondre d'abord à votre dernière question, car elle est plus technique.
En effet, les accords de revendication territoriale auront préséance. Toutefois, ces accords ont de nos jours une deuxième particularité. Ils sont assortis d'ententes sur l'autonomie gouvernementale qui, elles aussi, doivent avoir préséance, mais elles ont été oubliées.
Pour ce qui est de la consultation, j'ai dit que ce n'était qu'il y a trois semaines que j'ai découvert que les Gwich'in avaient participé à la rédaction de ce document. On ne nous a pas donné à nous aussi l'occasion de participer à sa rédaction.
La nation métisse constitue un organisme cadre qui représente les régions à propos de certaines questions. Les Métis de South Slave sont autonomes à ce propos. La nation métisse peut justifier l'utilisation des sommes que le gouvernement fédéral lui a accordées. Quant aux Métis de South Slave dans notre région, ils n'ont rien reçu. Nous avons assisté à ces séances d'information, mais ce n'est pas ce que j'appelle des consultations.
M. Gary Bohnet: Ce genre de question surgit d'habitude pour une raison que je vais vous donner. Considérez cela comme ma réponse en ce qui concerne le processus de consultation.
• 1045
S'agissant de consultation, vous auriez intérêt à venir dans
le Nord. Il faudrait que vous vous rendiez compte des distances
et de l'éloignement de nos collectivités dans le Nord et de ce
que cela représente en frais de déplacement aérien. Par exemple,
il en coûte plus cher d'aller d'Inuvik à Yellowknife qu'il m'en a
coûté de venir de Yellowknife à Ottawa.
Pour ce qui est des 20 000 $, cela représente une somme infime quand il s'agit de réunir un groupe représentatif de gens aussi divers que les Métis des territoires. Essentiellement, il ne s'agissait pas de consultation. Je refuse de reconnaître que c'était là des consultations. Essentiellement, c'était un exposé de la part de fonctionnaires du ministère.
Le document, que vous avez vu, est si technique et si complexe que la plupart des gens ne peuvent pas le comprendre même s'ils sont des initiés.
Cette somme était infime. Il ne s'agissait pas de consultation. Le ministère devrait avoir honte d'appeler cela des consultations. Je parle pour ceux qui sont assis derrière.
M. Bernard Patry: Merci de cette précision.
Merci, monsieur le président.
Le président: Monsieur Bryden.
M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Très brièvement, à l'article 41, où sont décrits les pouvoirs des offices, en soulignant le mot «peut» dans cet article que vous citez, vous avez raison de reconnaître que les offices d'aménagement auront le pouvoir d'appréciation quand il s'agira d'accepter le plan d'aménagement d'une première nation dans une région désignée.
Que se passerait-il selon vous si on remplaçait le mot «peut» par «doit»? C'est la seule avenue possible. Quoi que vous disiez sur l'état de vos négociations et quels que soient vos arguments, à y regarder de près, si on utilisait «doit» à la place de «peut» dans cet article, ne supprimerait-on pas la raison d'être même des offices d'aménagement? Ainsi, on donnerait à chaque collectivité et à chaque région le pouvoir absolu de décision quant à l'aménagement et un office d'aménagement perdrait toute raison d'être. N'êtes-vous pas d'accord?
M. George Kurszewski: Je ne pense pas que ce soit le cas. Je pense qu'il y a certaines décisions qui doivent être prises à l'échelle de la région. Je pense qu'il faut une certaine collaboration entre les gouvernements, le gouvernement autochtone et le gouvernement populaire. Je pense toutefois que ce genre de collaboration, ces discussions devraient être tout à fait libres, sans acculer qui que ce soit au pied du mur.
M. John Bryden: C'est tout à fait ce que le mot «peut» signifie. Si on le remplace par «doit», il n'y a plus de discussion possible. Il y a balkanisation de l'aménagement et chaque groupe a son propre office d'aménagement, son propre plan, ce qui relègue les intérêts de l'ensemble au deuxième plan. C'est l'un ou l'autre.
À mon avis, si on a mis «peut» c'est pour que l'office d'aménagement prête une oreille attentive au plan des autres régions et c'est lui qui, pour finir, prendra la décision dans l'intérêt de toute la région et non pas dans celui d'une seule collectivité. Il n'y a pas d'autre solution.
C'est ainsi que cela se passe au Canada. Vous constaterez toujours que les offices d'aménagement locaux doivent s'incliner devant les décisions des offices d'aménagement régionaux. Il n'y pas d'autre solution.
M. George Kurszewski: Êtes-vous en train de me dire que des plans d'aménagement élaborés en Ontario peuvent être supplantés par des plans d'aménagement conçus par un office où d'autres provinces sont représentées?
M. John Bryden: C'est toujours ainsi que les choses se passent. Je ne saurais vous dire si cela s'applique entre le palier provincial et le palier fédéral, mais certainement...
M. George Kurszewski: Non, ce n'est pas le cas.
M. John Bryden: ...entre le palier municipal et le palier régional, c'est le cas.
M. George Kurszewski: Voilà où nous avons du mal à nous entendre ici. Prenez le cas des Territoires du Nord-Ouest. Ils représentent un tiers du Canada. La région de South Slave est plus vaste que les Maritimes.
M. John Bryden: Oui, mais combien y a-t-il d'habitants?
M. George Kurszewski: Combien d'habitants?
M. John Bryden: Oui.
M. George Kurszewski: Nous nous rendons bien compte que 90 p. 100 de la population canadienne vit à 100 milles de la frontière américaine. Il est vrai que nous ne sommes pas nombreux, mais une forte population mais nous avons un vaste territoire à couvrir.
M. John Bryden: Précisément. Vous représentez un petit nombre de gens et le Canada s'occupe d'un grand pays. Vous n'êtes pas un État-nation et vous ne le serez jamais.
M. George Kurszewski: Nous ne sommes pas un État-nation. Il ne s'agit pas de cela et ce n'est pas ce que nous prétendons.
Nous disons que nous avons des responsabilités. Nous nous occupons de cette partie du pays depuis des temps immémoriaux. Nous y étions alors et nous y sommes toujours. Nous nous occupons toujours de cette partie du pays.
Actuellement, notre rôle de partie prenante dans ce pays est contesté. Nous voulons être considérés comme des collaborateurs dans ce pays.
M. John Bryden: Excusez-moi, mais vous n'êtes pas une province. Il ne s'agit pas d'avoir 40 provinces au nord de la Saskatchewan.
M. George Kurszewski: Ce n'est pas ce que nous disons.
M. John Bryden: C'est ce que vous dites finalement quand vous refusez de reconnaître une autorité supérieure en matière d'aménagement.
M. George Kurszewski: Ce n'est pas ce que nous demandons non plus. Nous disons que nous sommes d'accord.
M. John Bryden: Je vous dis tout simplement que si l'on met «peut», cela veut dire qu'il y aura un dialogue. Si vous mettez «doit», ce que vous proposez, il n'y aura pas de dialogue. Tout le monde va être souverain.
D'habitude, mon ami, assis de l'autre côté, aime bien que j'utilise le mot souveraineté. Je ne vais pas utiliser le mot séparatisme.
M. Gary Bohnet: Monsieur le président, permettez-moi de répondre à cette question concernant la population. Ce n'est pas un élément qui a beaucoup de poids dans le cas de cette loi en particulier. Ce que l'on recherche avant tout c'est une forme de système de gestion intégré. C'est ce que nous considérerons. Mais qu'on impose, à partir du territoire situé au sud du 60e parallèle, un type de régime, essentiellement celui-ci, conçu par les fonctionnaires du ministère, nous paraît déplacé étant donné la piètre gestion des ressources, des terres et de l'eau qu'ils ont à leur actif. Nous ne pouvons pas accepter qu'on nous impose un régime dans ces conditions.
Je m'en tiendrai à cela.
M. John Bryden: Monsieur le président, permettez-moi de conclure et je serai très...
Le président: Non. Vous aurez un deuxième tour. Merci.
[Français]
Monsieur Bohnet, comme je viens moi-même d'une région isolée de 802 000 kilomètres carrés en haut du 60e parallèle, c'est-à-dire l'Abitibi, je vous comprends très bien.
[Traduction]
M. Gary Bohnet: Merci.
Le président: Monsieur Konrad.
M. Derrek Konrad: Je crois comprendre que vous ne trouvez aucun réconfort dans l'article dit du réconfort, mais je voudrais passer à autre chose, quant à moi. Vous souhaiteriez que les dispositions du projet de loi C-6 s'appliquent seulement à cette petite parcelle et pourtant il y a des pipelines qui sont construits et qui sont proposés. Il y a des mines, et la compagnie d'électricité est installée dans toute la région, usines de production et lignes de transmission incluses, ce qui est absolument essentiel pour le développement.
La Chambre des mines des Territoires du Nord-Ouest et d'autres groupes nous ont fait part d'une préoccupation, à savoir qu'il faudrait qu'un seul régime régisse toute la région. Le dirigeant des Territoires du Nord-Ouest en dit autant. Si l'on multiplie les régimes, l'aménagement ne se fera pas et c'est seulement quand on aura fini d'extraire les minerais dans les autres régions du monde que l'on se tournera vers les Territoires du Nord-ouest.
Que répondez-vous à cette préoccupation? Quand vous dites qu'une telle proposition ne devrait pas être soumise au régime, que cette loi ne s'applique pas à une telle proposition et que nous avons un ensemble de règlements différents... Ces règlements et lois ont aussi été reconnus comme présentant des lacunes. Que répondez-vous à cela?
M. George Kurszewski: Il faut connaître les Territoires du Nord-Ouest pour comprendre que... À l'heure actuelle, le projet de loi ne s'applique pas, bien entendu; il s'agit d'une mesure proposée.
Vous dites que le problème tient à la situation actuelle. La situation actuelle n'empêche pourtant pas les mines Cominco de faire de l'exploitation minière dans notre région, à Pine Point, depuis 25 ans, d'y prendre tout le plomb et le zinc à haute teneur et de repartir en laissant plein de trous dans le sol. Elle n'a pas empêché les mines Giant et Conwest de creuser toutes sortes de tunnels sous Yellowknife pour extraire l'or du sous-sol. Elle n'a pas empêché le développement de Norman Wells ni celui de la mer de Beaufort. Elle n'a certainement pas empêché BHP de venir dans le pays des Dogrib et de réclamer le droit à la propriété de toutes les ressources souterraines qui s'y trouvent, afin de les exploiter pour en extraire du diamant.
Le régime actuel de prise de décisions et d'examen des répercussions des projets d'aménagement dans les Territoires du Nord-Ouest n'a donc aucun effet négatif.
M. Derrek Konrad: Vous écartez donc d'office cet argument.
M. George Kurszewski: Oui, d'office. Les preuves sont là. Elles éloquentes. Vous n'avez qu'à vérifier la situation à la Bourse.
M. Derrek Konrad: Ce n'est certainement pas ce que pensent la plupart des autres témoins que nous avons entendus. Je suppose que c'est quelque chose de difficile à prouver quand on ne le voit pas.
• 1055
Je m'arrête là. Je n'ai pas vraiment d'autre question, alors
je cède la parole.
[Français]
Le président: Merci. Je m'excuse, mais il fallait suivre la procédure prévue. Nous allons passer à M. Finlay, qui sera suivi de M. Fournier et de M. Wilfert.
Monsieur Finlay,
[Traduction]
vous avez cinq minutes.
M. John Finlay (Oxford, Lib.): Merci, monsieur le président, et merci à vous, messieurs.
Je viens de m'entretenir brièvement avec mon collègue: il semble que nous soyons revenus à la case départ. Monsieur Kurszewski, ce que vous dites me rappelle beaucoup ce que j'ai entendu il y a un an et ce que j'ai entendu l'année d'avant de la part de M. Mercredi. J'ai beaucoup de mal à voir ce qui ne va pas, selon vous. Vous dites, d'une part, que vous reconnaissez la valeur d'un régime fondé sur l'écosystème, que vous acceptez que tous les éléments de la nature sont interreliés, etc., puis, d'autre part, vous dites que, quand il s'agit d'autonomie gouvernementale, vous ne respecterez pas ce principe; c'est vous qui allez prendre les décisions quant à ce qui se passera dans les 20 p. 100 du territoire que vous occupez. Il y a d'autres parcelles de 20 p. 100, de 5 p. 100 et de 10 p. 100 dans toute la région nordique et dans tout le pays, et ce qui s'applique dans une démocratie moderne devra s'appliquer à l'ensemble du Canada. Vous avouez faire partie du Canada.
Vous me dites qu'on ne vous a jamais donné l'occasion de vous prononcer. J'ai lu hier trois résolutions qui ont été adoptées en 1994 et en 1995 et qui disent essentiellement: «Nous, les Métis» ou «Nous, les Dogrib», etc., «ferons tout notre possible pour empêcher l'adoption d'une loi sur la gestion des terres et des ressources». C'est bien ce que vous semblez avoir fait en choisissant simplement de ne pas participer ou de ne pas lire les projets de document qui vous ont été envoyés, ou je ne sais quoi encore. Cela ne vous mène nulle part, et cela ne mène le Canada nulle part.
Ce qui est bon pour les Gwich'in et les Sahtu ne semble pas assez bon pour vous. J'ai aussi du mal à accepter cela.
Il n'est pas juste de dire que la loi proposée l'emporterait sur tout cela. Vous dites que les revendications territoriales sont visées, mais pas l'autonomie gouvernementale. Permettez-moi de ne pas être de cet avis. La loi proposée, au paragraphe 5(2), parle de la «reconnaissance et de [la confirmation] [des droits existants] au titre de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982». La mesure dispose également que le gouvernement fédéral a l'intention de procéder, en collaboration avec les Premières nations, à la révision des dispositions pertinentes de la loi relatives à la vallée du Mackenzie dans le cadre des négociations liées à leur autonomie gouvernementale.
Les Métis sont une première nation, d'après ce que je comprends de la Constitution et de l'article 35.
Vous dites que cela n'a pas empêché Cominco d'exercer son activité. Cette loi n'est pas en vigueur. Ce que nous voulons, ce sont des plans d'aménagement du territoire dans lesquels les Métis et les gens du Nord ont leur mot à dire. Ce qui s'est passé il y a 25 ans n'était peut-être pas bien—je suis de ceux qui pensent que ce n'était pas bien—mais la loi proposée vise à faire en sorte que les gens de la région aient voix égale au chapitre dans ces décisions, de façon que le bras du Grand lac des Esclaves ne puisse pas être pollué, comme il l'a été par Conwest à tel point que le poisson ne peut pas y être consommé. Voilà ce que nous cherchons à faire.
Évidemment, nous avons cette exploitation de Norman Wells et nous avons eu une enquête au sujet du pipeline. Je sais que le pipeline proposé n'a pas été construit, mais un des témoins est venu me dire: «Ah, oui, mais ce pipeline a été construit.» Oui, il l'a été, depuis Norman Wells jusqu'au nord de l'Alberta, pas dans l'aire de migration des caribous et, de toute façon, il s'agit d'un pipeline souterrain qui ne fait pas 48 pouces de diamètre, mais 12 pouces, je crois. L'impact environnemental a été minime.
Nous voulons que les Métis soient partie au développement du Nord, qu'ils fassent partie de notre pays, mais... Vous parlez de gouvernement populaire. Votre gouvernement sera un gouvernement populaire. Il n'existe pas de gouvernement privé, à moins que vous vouliez opter pour une dictature. Tout gouvernement doit nécessairement être populaire, doit pouvoir être scruté par la population, doit tenir compte de l'avis de la population, doit tenir compte de ce qu'elle veut.
Il doit aussi reconnaître que personne n'obtiendra tout ce qu'il veut. Les gens de ma ville, du sud de l'Ontario, n'obtiennent pas tout ce qu'ils veulent. Il y a toujours deux ou trois ou quinze facettes aux problèmes. Nous croyons toutefois qu'avec des lois comme celle-ci et en donnant à la population indigène qui vit là...
• 1100
Je comprends parfaitement que vous vous préoccupiez de
l'environnement—j'ai moi-même cette préoccupation—mais il nous
faut y travailler ensemble.
Vous avez parlé quelque part de vos propres plans de gestion et d'aménagement du territoire. Le fait est toutefois que, à l'heure actuelle, les gens du Nord sont en grande partie financés par les gens du Sud, par toutes ces personnes qui vivent dans la bande de 100 milles qui nous séparent de la frontière américaine.
Le seul ministère qui a vu son budget augmenter pendant la première année de notre mandat a été le ministère des Affaires indiennes, parce que les autochtones constituent une population qui croît rapidement. Les autochtones ont besoin de service.
Merci, monsieur le président.
M. George Kurszewski: Merci pour vos questions.
J'ai du respect pour vos propos. Vous parlez un peu comme un de nos aînés. Nous avons des gens chez nous qui contestent certaines de nos décisions, bien entendu, et c'est bien qu'ils le fassent.
Je suis en partie d'accord avec vous sur certains des points que vous avez soulevés.
Je veux toutefois commencer par apporter une précision. Les gouvernements autochtones ne sont pas des gouvernements privés. Ils sont par nature populaires, mais ce sont des gouvernements autochtones, différents du système de gouvernement populaire qui a été conçu ici à Ottawa et envoyé dans le Nord. Voilà la distinction qu'il convient de faire entre les deux.
Parlons de ce principe de la gestion intégrée des ressources. Nous souscrivons à ce principe. Nous ne nous y opposons pas. Nous nous opposons toutefois au moment qui a été choisi pour la mise en oeuvre et au fait qu'on veuille nous imposer l'idée que quelqu'un d'autre se fait de la façon d'appliquer ce principe chez nous. Nous aimerions avoir notre mot à dire quant à la façon d'appliquer le principe de la gestion intégrée chez nous. Voilà ce que nous disons. D'accord. Je veux donc que ce soit clair. Nous ne sommes pas contre le principe. Nous voudrions avoir notre mot à dire dans la façon dont il est appliqué.
Nous avons en fait un pouvoir de prise de décision chez nous qui doit être protégé. Il peut être protégé jusqu'à un certain point par l'article 35, mais la seule façon de savoir s'il peut l'être, c'est d'intenter des poursuites contre quelqu'un. Nous ne voulons pas être constamment en train d'intenter des poursuites. Nous n'avons pas les moyens d'intenter constamment des poursuites pour protéger les droits qui nous sont garantis en vertu de l'article 35. Si le Canada protégeait dès le départ les droits qui nous sont garantis à l'article 35, cela nous épargnerait beaucoup d'argent.
Vous dites que les gens du Nord sont financés grâce à ce milliard de dollars que vous donnez au gouvernement des Territoires du Nord-Ouest. C'est précisément pour cette raison que nous sommes en train de négocier l'autonomie gouvernementale: parce que nos gens n'obtiennent pas les programmes et les services; parce qu'ils n'obtiennent pas ce qui leur est dû. Vous n'avez qu'à examiner les statistiques—vous avez sans doute accès à ces statistiques: le nombre de fonctionnaires par rapport à la population est plus élevé dans les Territoires du Nord-Ouest que partout ailleurs. Nous avons plein de gens qui viennent du sud du Canada pour s'occuper de nous et qui sont payés à même ce milliard de dollars que vous envoyez chez nous.
Ceux de la région que cet argent est censé aider sont pauvres. Ce sont des trappeurs dont l'activité économique a disparu. L'industrie de la fourrure a disparu. Que peuvent-ils faire d'autre? Il n'y a rien d'autre. Il n'y a pas d'emplois dans la fonction publique pour eux. Le plus gros employeur des Territoires du Nord-Ouest, c'est le gouvernement, et devinez qui occupe la majorité de ces emplois dans la fonction publique?
Je pourrais continuer longtemps encore à discourir là-dessus. C'est pour cette raison que nous négocions l'autonomie gouvernementale et le règlement de nos revendications territoriales, parce que nous voulons corriger la situation.
M. John Finlay: Exactement. C'est pour cette raison que nous formons actuellement des Autochtones pour occuper ces emplois.
Vous n'avez pas du tout raison. Notre gouvernement n'a pas été conçu à Ottawa. C'est quelque chose qui a évolué.
M. George Kurszewski: Pas dans les Territoires du Nord-Ouest.
M. John Finlay: Notre système de gouvernement s'est formé sur une période de 2 000 ans et nous faisons partie de cette tradition.
M. Gary Bohnet: Monsieur Finlay, il y a un point que je voudrais soulever et porter à votre attention. Depuis que les Libéraux sont arrivés au pouvoir, le gouvernement actuel et l'ancien gouvernement libéral ont finalement fait beaucoup plus pour faire avancer la cause des Métis dans les Territoires du Nord-Ouest que n'importe quel autre gouvernement dans l'histoire de ce pays. J'en félicite donc le parti.
• 1105
Le gouvernement actuel reconnaît aussi, s'agissant de
questions environnementales, que la nation métisse des
Territoires du Nord-Ouest est un chef de file parmi les peuples
autochtones. C'est une préoccupation que nous partageons. Nous
avons beaucoup de préoccupations communes.
Peut-être ne le communiquons-nous pas bien, mais notre propos vise essentiellement à dire qu'il ne faut pas créer ce nouveau régime dans d'autres régions tant que ces régions n'auront pas achevé leurs négociations. Nous sommes entièrement d'accord pour dire qu'il faut établir un régime de gestion intégré des terres. Nous sommes entièrement d'accord là-dessus, et nous ne nous y opposons pas. Nous disons toutefois que, si le projet de loi est adopté sans certains amendements ou sans une disposition prévoyant qu'il ne s'applique pas dans les régions qui n'ont pas encore réglé leurs revendications, il aura en quelque sorte pour effet d'établir les paramètres pour ces régions. Nous irons à la table de négociation avec les représentants du gouvernement fédéral qui auront leur mandat et qui devront se conformer à cette loi qui précise qu'ils ne peuvent pas envisager d'autres régimes de gestion qui pourraient être encore meilleurs ou plus simples que celui qui est proposé.
Le projet de loi est très complexe et difficile à comprendre. Je dis simplement que nous pourrions peut-être trouver un meilleur régime de gestion qui pourrait être appliqué par les régions qui n'ont pas encore réglé leurs revendications.
Nous sommes du même avis sur bien des choses, mais nous vous demandons de ne pas nous imposer ce régime à ce moment-ci dans les régions qui n'ont pas réglé leurs revendications.
[Français]
Le président: Monsieur Fournier, puis Madame Hardy.
M. Ghislain Fournier (Manicouagan, BQ): Tantôt, j'ai cru comprendre que M. Bohnet blâmait le ministre des Affaires indiennes de ne pas avoir assez contribué.
Je ne suis certainement pas ici pour défendre les politiques du gouvernement libéral, mais on m'apprend qu'en 1997, en août exactement, le ministre des Affaires indiennes avait annoncé un programme temporaire de gestion des ressources destiné à aider les collectivités autochtones qui vivent dans vos régions, dans les Territoires du Nord-Ouest. Si je comprends bien, il s'agit en particulier de votre région. Selon les informations que j'ai eues, ce programme incluait quatre points: l'évaluation environnementale, les permis, la planification des ressources et la consultation.
Dans un premier temps, j'aimerais savoir si vous êtes au courant et si vous connaissez ce programme. Est-ce que ce programme peut vous aider un peu, moyennement ou beaucoup? J'aimerais avoir votre opinion parce que 1,5 million de dollars, c'est beaucoup d'argent. En tout cas, si j'annonçais l'octroi de 1,5 million de dollars pour ma région, je pense qu'on en serait heureux.
Je voudrais donc avoir votre opinion là-dessus. Ce n'est peut-être pas assez pour votre région, dans votre contexte, mais c'est peut-être suffisant. Je vous laisse commenter là-dessus.
[Traduction]
M. Gary Bohnet: Je crois que vous voulez parler du programme provisoire de gestion des ressources. Le programme n'est pas encore opérationnel. Les fonds n'ont pas encore commencé à être déboursés. Il s'agit d'un excellent programme qui sera très très utile pour tous les Autochtones pour les territoires de l'Ouest. Il est bien conçu. Nous avons d'ailleurs participé à sa conception. Il pourrait sans doute être financé plus généreusement, mais il n'est tout simplement pas encore opérationnel.
Au sujet du manque de ressources pour les consultations antérieures, vous dites que j'ai félicité le ministère et la ministre d'une part, et que, d'autre part, j'ai dit que nous n'obtenions pas les ressources voulues. Le fait est que nous recevons des fonds de bien des sources différentes pour bien des choses différentes. S'agissant toutefois de la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie, nous avons obtenu très peu de fonds pour nous permettre de bien participer aux consultations à ce sujet. Nous recevons cependant des fonds du gouvernement dans d'autres domaines.
En tout cas, le nouveau programme sera très bien.
M. George Kurszewski: Si vous me permettez de répondre moi aussi, je dirai que le nouveau programme nous paraît excellent comme mesure provisoire, en attendant que nous ayons un programme intégré opérationnel. C'est finalement tout ce dont nous avons besoin pour l'heure, pour les quelques années à venir, tant que nos négociations ne seront pas terminées et que nous ne pourrons pas participer à part entière à ce processus. Si le programme en question pouvait être maintenu pendant deux ou trois ans, ce serait une excellente façon pour nous de pouvoir participer. Nous aurons ensuite nos propres ententes où la façon de gérer nos terres selon un régime intégré sera précisée.
[Français]
M. Ghislain Fournier: Merci.
[Traduction]
Le président: Merci.
M. Wilfert, suivi de Mme Hardy.
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Merci, monsieur le président.
Messieurs, je suis désolé d'être arrivé en retard. J'ai toutefois lu votre mémoire. Je tiens tout d'abord à vous en remercier.
Cependant, plus j'écoute ce qui se dit à cette table, moins je comprends.
M. Gary Bohnet: C'est notre cas à nous aussi.
M. Bryon Wilfert: Je commençais tout juste à enfin comprendre, mais tout d'un coup, depuis deux jours, je ne comprends plus rien. Je croyais que le processus visait à vous donner un certain pouvoir. Je croyais que nous voulions élaborer une démarche axée sur la gestion intégrée des ressources de la vallée du Mackenzie. Je croyais que, pour ce qui est de protéger l'environnement en tout cas, nous avions beaucoup à apprendre de vous. Il ne fait aucun doute que nous voulons tous être sûrs de faire ce qui doit être fait. Nous n'aurons qu'une chance, et il faut bien faire les choses. Je ne pense pas que nous cherchions à mettre sur pied cinq autorités distinctes ni rien d'autre dans ce genre.
Je suis invariablement troublé quand on parle de processus, car, pour moi, le processus est très important. Je suis consterné de vous entendre dire que c'est seulement dans les dernières semaines que vous avez entendu parler de cela. Je sais que le processus se poursuit depuis un certain temps, et je crois que plus longtemps nous y travaillons... Nous ne semblons guère avancés; nous semblons plutôt faire du sur-place.
Je comprends que vous ayez des préoccupations quant au cheminement suivi jusqu'ici. Si toutefois nous n'allons pas de l'avant et que, comme vous dites, nous établissons telle chose dans les régions du Sahtu et des Gwich'in, mais que dans ces autres régions, vous n'êtes pas prêts à emboîter le pas ou vous êtes toujours en train de négocier des revendications territoriales, etc.—je comprends tout cela, qu'advient-t-il toutefois de la gestion de ces régions? Si nous ne suivons pas une démarche intégrée, où chacun a sa part de responsabilité, qu'arrivera-t-il à ces régions dans l'intervalle? L'intervalle pourrait être long. Les discussions se poursuivent depuis 25 ans environ. Je ne voudrais pas qu'elles durent encore 25 ans.
M. John Finlay: Peut-être 50 ans.
M. George Kurszewski: Nous ne voulons pas continuer pendant 25 ans encore. Nous sommes très fatigués. Nous en avons déjà parlé ce matin. Les habitants des Territoires du Nord-Ouest sont très peu nombreux comparativement à la population du reste du Canada. Nous avons des ressources humaines limitées et certains d'entre nous s'occupent de la plupart des dossiers. Nous sommes fatigués de nous occuper de tous ces problèmes depuis 25 ans. Nous espérons en arriver à une solution très bientôt.
Comme je l'ai dit, l'entente de principe des Dogrib devrait être conclue au printemps 1998, de sorte que, pour cette région, les problèmes pourraient être réglés très rapidement.
Pour ce qui est des Métis et des Métis de South Slave, nous sommes toujours en négociation. Nous prévoyons d'avoir peut-être une entente de principe d'ici à l'automne 1998 et une entente finale un an ou deux plus tard. Nous sommes sur la bonne voie. Nous tentons de tout régler avant que le mandat du gouvernement actuel ne se termine. Nous voulons tout régler maintenant. Nous ne voulons pas avoir à passer par de nouvelles élections et un nouveau gouvernement. Nous ne voulons pas nous embarquer là-dedans, parce qu'il faudra encore 25 ans. Nous voulons que cela se fasse maintenant.
Nous avons toutefois besoin d'une certaine protection dans nos négociations pour que non seulement les nouvelles idées mais aussi les éléments positifs du processus suivi dans le cas des Dénés-Métis, des Gwich'in, des Sahtu et des Dogrib puissent nous être utiles. Nous pouvons obtenir une entente encore meilleure que celles en vertu desquelles ce régime a été adopté. Nous apprenons au fur et à mesure et nous faisons mieux les choses aussi. Nous estimons que, pour pouvoir participer de façon convenable à ce genre de régime intégré, que nous appuyons—nous appuyons le principe...
M. Bryon Wilfert: Je sais.
M. George Kurszewski: ...il faut nous laisser le temps d'en tirer des enseignements pour les traduire dans nos propres accords.
M. Bryon Wilfert: Si la ministre était assise à côté de vous, que serait votre message préféré en quittant Ottawa?
M. George Kurszewski: Celui que la ministre me laisserait?
M. Bryon Wilfert: Non, celui que vous lui laisseriez.
M. George Kurszewski: Excellente question. Je lui conseillerais de retarder de quelques années l'adoption du projet de loi C-6. Cela ne devrait pas causer trop de perturbations dans le Nord et cela permettrait, comme les concernés le demandent dans leurs propres négociations, de participer volontairement à cet exercice. C'est l'élément clé.
Nous finirons par accepter et par soutenir un régime intégré. Mais nous voulons le faire volontairement. Nous ne voulons pas nous le faire imposer.
Laissez-nous le temps de négocier notre accord de principe et nous passerons volontiers à l'étape suivante en qualité de partenaires.
M. Bryon Wilfert: Ce serait votre message à la ministre. Quel serait votre message aux Gwich'in et aux Sahtu?
M. George Kurszewski: Je demanderais aux Gwich'in et aux Sahtu de nous accorder le même respect que nous leur avons accordé pendant leurs négociations. Nous ne sommes pas intervenus. Nos négociations ne leur imposeront absolument rien. Accordez-nous le même respect et nous serons également partenaires. Nous sommes de la même famille.
C'est tout ce que nous souhaitons.
M. Bryon Wilfert: Bien qu'ils soient anxieux de passer à l'étape suivante.
M. George Kurszewski: Je le sais fort bien, puisque leur accord remonte déjà à un ou deux ans. Ils veulent qu'il soit appliqué correctement, ce que je comprends; cependant le seul problème c'est que l'impact sur notre liberté de négociation est négatif, et ce n'est pas juste.
Je leur demanderais donc de réévaluer leur situation et de nous donner le même soutien que celui que nous leur avons donné. Nous avons adopté résolution sur résolution pour les soutenir, les appuyer pendant leurs négociations. Qu'ils fassent la même chose. Nous sommes à l'extrême limite du territoire et de la vallée du Mackenzie, mais qu'on nous accorde le même respect.
Le président: Merci.
[Français]
C'est le tour de la dernière intervenante, Mme Hardy, et nous passerons ensuite à la vidéoconférence avec Inuvik.
[Traduction]
Mme Louise Hardy: Je tiens à vous remercier d'être venus et à vous faire savoir que je comprends et partage votre sens de l'espace et des distances quand on vit dans le Nord, ainsi que le temps qu'il faut pour se retrouver pour travailler ensemble.
J'admire aussi votre courage d'être venus jusqu'ici. Je sais que beaucoup de résidents du Nord ont l'impression d'être considérés comme une quantité négligeable, à cause de leur petit nombre. C'est inadmissible et cela ne favorise en rien le sentiment d'unité du pays.
Vous voulez que l'adoption de ce projet de loi soit reportée, que le projet de loi soit modifié ou que vous en soyez exclus. C'est bien cela?
M. George Kurszewski: Exactement. Vous avez très bien résumé la situation.
Mme Louise Hardy: Merci.
[Français]
Le président: Merci, madame Hardy. Je tiens à remercier M. Bohnet et M. Kurszewski. J'ai trouvé remarquables les gens venant de l'Ouest canadien qui ont très bien exposé la situation de leur peuple, les Métis. Vous êtes des gens francs et polis, et je sais que vous avez parlé avec votre coeur. J'espère qu'en 1998, le comité aura la chance d'expérimenter l'isolement de votre belle région et de vos terres. Merci beaucoup.
[Traduction]
M. Gary Bohnet: Nous vous remercions également de nous avoir permis de venir partager avec vous notre point de vue. Nous espérons que dans un avenir pas trop lointain, vous pourrez nous rendre visite chez nous dans la région occidentale de l'Arctique et que nous pourrons partager sur place certaines des expériences des Autochtones du Grand Nord.
Merci beaucoup.
[Français]
Le président: Nous vous souhaitons un bon retour et de bonnes Fêtes de fin d'année. Joyeux Noël.
[Traduction]
Merci beaucoup.
[Français]
La vidéoconférence commencera dans deux minutes.
[Traduction]
Nous faisons une petite pause.
Le président: La séance reprend.
Madame Klein, vous êtes prête? Tout va bien?
Mme Heidi Klein (directrice exécutive, Groupe de travail sur l'examen des répercussions environnementales de la vallée du Mackenzie): Oui, tout va bien. C'est Alestine André.
Le président: Nous commençons immédiatement avec le Groupe de travail sur l'examen des répercussions environnementales de la vallée du Mackenzie.
[Français]
Nous entendons directement d'Inuvik, dans l'Ouest canadien, Mme Heidi Klein, directrice exécutive, et Mme Alestine André, membre du conseil.
[Traduction]
Pourriez-vous lire votre déclaration? Nous vous donnons dix minutes.
Mme Alestine André: Bonjour. Nous tenons à vous faire savoir que nous appuyons globalement la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie qui confère aux résidents du Nord la responsabilité de prendre les décisions touchant la gestion des terres et des eaux dans cette région.
Le Groupe de travail sur l'examen des répercussions environnementales de la vallée du Mackenzie est formé d'éventuels candidats à des postes de l'Office d'examen des répercussions environnementales—OERE—et de représentants des gouvernements fédéral et territorial; le conseil tribal des Gwich'in et le secrétariat des Sahtu y comptent également chacun un représentant. Le groupe est basé à Yellowknife.
Le Groupe de travail a été créé en mai 1996 afin d'orienter la mise sur pied de l'Office d'examen. Jusqu'à maintenant, le Groupe de travail s'est consacré à des activités de dotation, à la détermination des méthodes administratives et du processus d'évaluation et d'examen des répercussions environnementales, ainsi qu'à l'orientation, la planification et la budgétisation des activités de l'Office. Lorsque l'Office sera officiellement constitué, le Groupe de travail recommandera qu'il approuve le travail qu'il a entrepris ou effectué.
J'aimerais vous dire quelques mots sur le travail que nous avons fait pendant l'année qui vient de s'écouler. Entre autres, nous avons élaboré des lignes directrices. Le Groupe de travail a consulté l'industrie, les organisations autochtones et environnementales et la population en général, et est au courant de leurs préoccupations. Il a établi des lignes directrices en vue de trouver des solutions à bon nombre des problèmes soulevés.
Le Groupe de travail a fait sien le principe des meilleures pratiques de gestion. Il a pris connaissance des méthodes utilisées pour les examens, les études détaillées et les examens publics effectués aux termes de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, ainsi que d'autres pratiques excellentes utilisées pour les évaluations environnementales.
Par exemple: la souplesse. Le Groupe de travail s'efforcera d'établir des lignes directrices suffisamment souples pour être adaptées à des projets de développement d'envergure différent. Il est conscient que peu de projets auront une importance aussi grande que, par exemple, la dernière mine de diamant du Canada (BHP) ou le pipeline de la vallée du Mackenzie. La plupart seront en effet d'envergure plus modeste. Il importe d'harmoniser les efforts déployés à l'ampleur des projets à l'étude.
Deuxièmement, l'imputabilité. Pour toutes les propositions de projets qu'il évaluera, l'Office d'examen publiera les raisons de sa décision ou les recommandations qu'il a formulées et les mettra à la disposition du public.
Troisièmement, rationalisation. Pour simplifier le processus d'évaluation après l'envoi d'une proposition de projet à l'Office d'examen, on utilisera l'information recueillie lors d'évaluations antérieures et à l'avenir, celle recueillie lors des évaluations préalables dans la mesure où cette information sera pertinente.
• 1130
En matière de coordination, tout sera fait pour assurer la
coordination des efforts des intéressés. À cette fin, on
encouragera les proposants à communiquer avec différents
intéressés et organismes chargés de l'octroi des licences avant
de présenter leurs demandes de licence.
Je sais que les consultations ont fait l'objet de critiques. Les exigences en matière de consultations, article 3, et la façon de mener ces dernières, article 120, sont prévues dans la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie. Chaque fois que des lignes directrices devront être établies, le Groupe de travail mènera des consultations approfondies.
Au début de 1998, il invitera les groupes et organismes intéressés, par exemple l'industrie, le gouvernement et les groupes environnementaux et autochtones, à désigner un représentant qui siégera à un comité consultatif de 10 membres environ. Ceux-ci donneront leur avis sur les lignes directrices en cours d'élaboration. Le Groupe de travail compte que les membres du futur Office d'examen se rendront également dans les localités de la vallée du Mackenzie pour expliquer le nouveau processus d'évaluation environnementale et pour solliciter des avis sur les lignes directrices. Pendant les consultations sur les lignes directrices et au cours des évaluations environnementales futures, le Groupe de travail prévoit d'accroître la participation de la population.
Conseils d'ordre technique. Le Groupe de travail recommandera à l'Office d'examen d'envisager la création d'un comité consultatif pour aider le personnel technique de l'Office à évaluer les propositions de projets de développement. Le mandat de ce comité serait semblable à celui de l'actuel comité régional d'examen environnemental chargé d'appuyer les activités menées aux termes de la LCEE.
Collaboration. Le Groupe de travail collabore étroitement avec les autres offices de la vallée du Mackenzie, le gouvernement et les Premières nations chargés des examens préalables afin d'établir des lignes directrices pour ces examens. Le Groupe de travail a déjà rencontré les directeurs des autres offices d'examen environnemental du Nord afin de prévoir des moyens de collaboration et d'échanger sur des préoccupations et des problèmes communs. Il a été prévu de tenir de telles réunions sur une base régulière.
Le Groupe de travail a établi un plan de formation afin que les candidats désignés soient prêts à exercer leurs fonctions. À titre d'exemple, les membres du Groupe de travail ont eu l'occasion de se familiariser avec les évaluations environnementales, la LGRVM, les consultations et les audiences publiques. Ils ont également été initiés aux principes du droit administratif, notamment aux motifs écrits des décisions.
Financement de la participation des intervenants. Le Groupe de travail est également conscient que le financement de la participation des intervenants pendant les examens publics revêt une très grande importance pour les résidents du Nord. Dans le budget distinct que l'Office d'examen doit soumettre avant de tenir des audiences publiques, des fonds seront prévus à cette fin.
Modifications proposées. En se penchant sur les mécanismes de la LGRVM, le Groupe de travail a relevé plusieurs éléments de la loi qui gagneraient à être modifiés et qui faciliteraient l'application de celle-ci.
Article 127. La version actuelle du projet de loi C-6 reconnaît que certains projets de développement devraient faire l'objet d'une évaluation environnementale aux termes de régimes d'évaluation antérieurs—par exemple, la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale et le décret sur les lignes directrices visant le processus d'évaluation et d'examen en matière d'environnement. Il a été convenu que les évaluations antérieures pourraient fournir de l'information d'importance capitale qui pourrait influer sur la portée de l'évaluation en cours et dont l'Office d'examen devrait tenir compte.
• 1135
Il est extrêmement utile de prendre connaissance des
rapports préparés aux termes des régimes d'évaluation antérieurs.
Bientôt, les projets de développement ne seront soumis qu'au
mécanisme décrit dans la Partie V de la LGRVM. Le projet de loi
C-6 n'exige en effet pas explicitement que l'Office d'examen
tienne dûment compte des rapports d'évaluation rédigés aux termes
de la Partie V de la LGRVM.
L'actuel projet de loi ne prévoit pas non plus d'exiger que les responsables de l'examen préalable tiennent compte des rapports antérieurs produits aux termes d'un autre régime.
L'Office d'examen pourrait envisager d'établir des règles exigeant que les responsables de l'examen préalable tiennent dûment compte des examens préalables et des évaluations environnementales effectuées antérieurement. Certains pourraient toutefois affirmer que cette tâche ne fait pas partie du mandat de l'Office. Seul l'Office d'examen est en effet tenu de tenir dûment compte des évaluations environnementales effectuées sous d'autres régimes que celui de la LGRVM.
L'Office n'est peut-être pas autorisé à étendre cette exigence aux responsables des examens préalables et à tenir compte des évaluations environnementales effectuées sous le régime de la LGRVM.
Le Groupe de travail recommande en conséquence de modifier l'article 127 pour rassembler les rapports antérieurs d'évaluation environnementale et de disposer que les responsables des examens préalables doivent également utiliser ces évaluations.
Paragraphe 159(2). Le libellé actuel du paragraphe 159(2) signifie qu'un projet de développement faisant l'objet d'un examen préalable ou d'une étude approfondie sous le régime de la LCEE mais pour lequel un rapport n'a pas été préparé serait assujetti au processus décrit à la Partie V de la LGRVM. Le Groupe de travail estime que cette disposition pourrait alourdir énormément la tâche du nouvel Office d'examen et serait inéquitable envers l'industrie et les promoteurs dont les projets font l'objet d'un examen.
Le Groupe de travail recommande donc que lorsque l'examen préalable ou l'étude approfondie d'un projet de développement a été amorcé sous le régime de la LCEE, il devrait se poursuivre sous ce régime et non pas être assujetti à celui de l'Office d'examen.
Article 112. Le Groupe de travail est préoccupé par la question du maintien du quorum. En l'absence de celui-ci, l'Office d'examen ne pourra en effet prendre aucune décision. Le Groupe de travail est d'avis que la façon de procéder pour nommer les membres de l'Office d'examen devrait être la même que celle établie pour les autres offices de la vallée du Mackenzie, par exemple l'Office des terres et des eaux, paragraphe 99(4). Autrement dit, le ministre des Affaires indiennes et du Développement du Grand Nord, et non pas seulement les Premières nations ou le gouvernement des Territoires, devrait pouvoir nommer des membres en consultation avec les Premières nations.
En élaborant les lignes directrices qu'il utilisera pour les évaluations et les examens des répercussions environnementales, le Groupe de travail s'est rendu compte que les dispositions visant la période de transition, les articles 158 et 159, ne font pas mention des projets de développement en cours depuis de nombreuses années et qui ont fait ou non l'objet d'une évaluation environnementale approfondie.
Ces projets seront assujettis à la Partie V de la LGRVM lorsque viendra le temps de renouveler un permis ou de proposer des changements sur le plan de l'exploitation. Une évaluation ou même un examen sera en outre vraisemblablement exigé parce que le projet est en cours depuis plusieurs années et qu'aucune mesure d'atténuation n'a été prise à ce jour. Le Groupe de travail est d'avis qu'il serait injuste et peu réaliste d'exiger que les projets soient interrompus pendant la durée de l'évaluation environnementale.
De même, le Groupe de travail estime que dans le cas d'un renouvellement de permis où aucun changement n'est prévu sur le plan de l'exploitation, le champ de l'examen préalable et de l'évaluation environnementale devrait être le même que celui décrit au paragraphe 74(4) de la LCEE. Si cette nouvelle disposition est approuvée, il faudrait également modifier l'article 152 de la LGRVM pour qu'il soit applicable. L'article 152 devrait reconnaître les activités en cours et ne pas les assujettir à la Partie V à moins qu'un changement soit proposé au projet.
• 1140
Nous souhaitons, avant de terminer, vous faire savoir que
nous sommes en faveur de la mise en place, dans un bref délai, de
l'Office des terres et des eaux de la vallée du Mackenzie. Sur un
plan purement pratique, nous pensons que l'Office d'examen ne
peut remplir efficacement son mandat sans la création d'un Office
des terres et des eaux pour l'ensemble de la vallée du Mackenzie.
L'intégration du régime de réglementation constitue un élément
essentiel du fonctionnement de la LGRVM. Sans l'Office des terres
et des eaux, un élément clé du régime, le processus sera
incomplet et inefficace.
Nous sommes sensibles aux questions soulevées par la Chambre des mines et par des financiers de ce secteur. Les recommandations qui figurent dans le présent document devraient permettre de résoudre une bonne partie des problèmes relevés et d'accroître l'efficacité des évaluations environnementales.
Nous sommes également conscients des préoccupations des Premières nations du sud Mackenzie et appuyons leurs droits ancestraux et ceux issus des traités.
Je vous remercie de nous avoir permis de comparaître devant le comité. Si vous avez des questions, nous nous ferons un plaisir d'y répondre.
Le président: Merci beaucoup, madame André.
[Français]
Nous allons passer à la période de questions. Monsieur Konrad.
[Traduction]
M. Derrek Konrad: Je tiens à vous remercier. Avoir votre texte nous a permis de suivre plus facilement.
Vous dites que votre groupe de travail compte des représentants du conseil tribal des Gwich'in et du secrétariat des Sahtu. Étant donné que vous avez à établir des lignes directrices qui seront utilisées par d'autres groupes qui ne sont pas encore parvenus à un accord ou à un règlement de leurs revendications territoriales, ont-ils eux-mêmes exprimé le souhait de ne pas participer à ce groupe ou ont-ils été oubliés pour une raison ou pour une autre? Êtes-vous en mesure de me dire ce qui s'est passé?
Mme Heidi Klein (membre du conseil, Groupe de travail sur l'examen des répercussions environnementales de la vallée du Mackenzie): Je ne suis pas certaine à 100 p. 100 de la manière dont le Groupe de travail a été constitué. Je crois que ceux qui participaient directement aux négociations sur la loi ont été sélectionnés pour siéger au Groupe de travail et conseiller le futur office.
C'est justement pour s'assurer que tous les intéressés sont consultés qu'il est prévu de constituer un comité consultatif provisoire pendant l'élaboration des lignes directrices. C'est un des points mentionnés dans notre mémoire et nous inviterons des représentants de la Nation dénée à siéger à ce comité et à participer à ces travaux.
M. Derrek Konrad: La Nation dénée, cela ne fait qu'un autre groupe. Il y a les Deh Cho et un certain nombre d'autres régions et de groupes qui sont touchés. Seront-ils également invités à participer?
Mme Heidi Klein: Une lettre sera envoyée aux organisations pour leur demander de nommer un représentant qui siégera au sein de ce comité consultatif pendant l'élaboration des lignes directrices. Quant à savoir s'ils voudront participer, la décision sera la leur.
M. Derrek Konrad: La composition de ce groupe de travail est limitée et ce que vous proposez c'est un comité consultatif auprès de ce groupe. N'est-ce pas?
Mme Heidi Klein: Exactement.
M. Derrek Konrad: Avez-vous le budget pour ce comité consultatif? Quel sera son degré de participation et la durée de sa participation?
Mme Heidi Klein: Le Groupe de travail n'en a pas encore discuté.
M. Derrek Konrad: Comment! Je crains qu'ils ne soient pas très contents.
J'ai une autre question. Elle concerne les conseils d'ordre technique. Vous envisagez la création d'un comité consultatif technique. À qui avez-vous pensé? Avez-vous contacté des ministères fédéraux, l'arpenteur général ou d'autres spécialistes de ce genre pour vous conseiller? A qui avez-vous pensé?
Mme Heidi Klein: Pour commencer, nous avons pensé aux spécialistes membres du comité d'examen environnemental régional. Nous commencerons par vérifier s'ils conviennent pour cet office, pour le futur office.
M. Derrek Konrad: Très bien, mais l'examen environnemental repose sur une base d'information. Comment allez-vous préparer ces informations pour l'examen? N'avez-vous pas à remonter un peu en amont pour cela?
Mme Heidi Klein: Je ne comprends pas vraiment votre question.
M. Derrek Konrad: N'allez-vous pas devoir travailler sur des systèmes d'informations géographiques? Vous aurez à travailler sur des systèmes d'enregistrement foncier et à examiner toutes sortes de questions techniques. Est-ce que cela ne vous concernera pas autant que les impacts environnementaux en eux-mêmes?
Mme Heidi Klein: Vous me demandez si nous allons recourir à ces technologies dans le cadre de l'évaluation environnementale?
M. Derrek Konrad: Je n'en doute pas, mais vous élaborez des lignes directrices techniques. Est-ce que cela en fait partie?
Mme Heidi Klein: Nous établissons des lignes directrices pour la conduite de l'évaluation environnementale et nous ferons appel aux spécialistes des ministères, des communautés, des cabinets d'experts-conseils pour aider l'Office à analyser les rapports d'évaluation environnementale rédigés par les promoteurs. Je suppose que les ministères fourniront également des informations géotechniques et que les systèmes d'informations géographiques seront utilisés dans les évaluations. Nous utiliserons toutes les technologies et tous les moyens disponibles.
M. Derrek Konrad: Merci.
Le président: Merci, monsieur Konrad.
[Français]
Monsieur Bachand.
M. Claude Bachand: Merci, madame Klein et madame André, pour votre présentation. Je vais avoir recours à vos services d'expertise en environnement.
On sait que la vallée du Mackenzie, telle que définie dans la loi, comporte cinq régions: la région des Gwich'in, la région du Sahtu, la région de North Slave, la région de South Slave et la région des Deh Cho.
Actuellement, on est aux prises avec le problème des trois régions de North Slave, South Slave et Deh Cho, où les autochtones disent qu'ils ne veulent pas qu'on leur applique un tel régime puisqu'ils n'ont pas encore conclu leurs ententes de revendications territoriales.
Je crois comprendre que si jamais le projet de loi était modifié dans ce sens-là, cela créerait un double régime environnemental dans la vallée du Mackenzie. Or, je sais qu'actuellement, il y a certaines lois environnementales qui s'appliquent à l'ensemble de la vallée, comme je vous l'ai décrit tantôt. On peut penser à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale ou à la Loi sur les eaux des Territoires du Nord-Ouest. Il y a une panoplie de lois qui s'appliquent actuellement.
Par conséquent, si jamais la loi était amendée dans le sens où le nouveau projet de loi C-6 s'appliquerait uniquement aux Sahtu et aux Gwich'in, et que le reste des lois dont je viens de faire mention s'appliquaient aux trois autres régions, ce double régime pourrait-il avoir des conséquences négatives dans la vallée du Mackenzie?
[Traduction]
Mme Heidi Klein: Scinder le projet de loi, du point de vue de l'environnement, rendrait la tâche plus difficile pour l'office. Il aurait du mal à mesurer les conséquences en aval, les conséquences des activités industrielles dans le sud sur la région des Sahtu ou sur celle des Gwich'in.
Il faudrait qu'il y ait coopération entre les membres de l'Office et les responsables du régime actuel d'évaluation environnementale. Il faudrait une sorte de mécanisme permettant la coopération avec les responsables de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale pour examiner les projets ayant des conséquences en aval. Il faudrait une entente transcendant les deux régimes pour que l'Office de la vallée du Mackenzie joue un rôle dans les faits.
[Français]
M. Claude Bachand: C'est donc quelque chose qui serait faisable. Je comprends bien qu'il faudrait trouver une façon d'arrimer les deux régimes.
Je comprends aussi maintenant ce qui se passe au sud du Sahtu puisqu'on nous a démontré dans les premières minutes de la réunion du comité que l'eau coulait du sud vers le nord. Je comprends donc que les Gwich'in et les Sahtu sont à l'extrémité et que tout ce qui se passe avant a des effets sur leur région.
Cependant, vous dites que ça ne serait pas si désastreux malgré tout, dans la mesure où l'arrimage entre les régions du Sahtu et des Gwich'in puisse se faire avec le système qui continuerait d'exister dans North Slave, South Slave et Deh Cho.
Finalement, d'après ce que vous dites, c'est faisable.
[Traduction]
Mme Heidi Klein: Je crois que vous m'avez bien compris. Cela ne sera pas catastrophique, mais cela poserait des problèmes car je sais que les ententes d'harmonisation et de coopération peuvent prendre des années à négocier mais ce ne serait pas totalement impossible.
[Français]
Le président: Merci, Monsieur Bachand.
Monsieur Finlay.
[Traduction]
M. John Finlay: Merci, monsieur le président.
Je voulais poser la même question que M. Bachand et j'aimerais être certain d'avoir bien compris. À la page 3 de votre mémoire, vous dites à propos des conseils d'ordre technique que le Groupe de travail recommandera à l'Office d'examen d'envisager la création d'un comité consultatif pour aider le personnel technique de l'Office à évaluer les propositions de projets de développement. Vous dites également que le mandat de ce comité sera semblable à celui de l'actuel comité régional d'examen environnemental chargé d'appuyer les activités menées aux termes de la LCEE.
Le projet de loi C-6 risque-t-il de faire refaire deux fois la même chose? S'il y a déjà un comité d'examen qui est chargé du travail technique, qui a le personnel technique, pourquoi ne pas s'en servir? Qu'en pensez-vous? Quelle est actuellement la situation?
Mme Heidi Klein: L'adoption de ce comité régional d'évaluation environnementale serait la continuation du processus actuel. À toutes fins utiles, la LCEE disparaîtra de la région de la vallée du Mackenzie. Nous proposerons à l'Office, lorsqu'il aura été établi, de créer un comité consultatif analogue à celui qui existe déjà en vertu de la LCEE. Ce n'est donc pas un deuxième comité, mais plutôt une extension du premier.
J'aurais aussi un commentaire à faire à propos de la question précédente.
S'il est envisagé que l'OERE ne concerne que la région des Gwich'in et celle des Sahtu et que cette sorte de mécanisme soit mis en place pour favoriser la coopération au sud des Sahtu en matière d'évaluation environnementale, ma réponse concernait surtout les commissions, le travail commun en coopération de ces commissions et les mécanismes le permettant. Il faudrait aussi réfléchir aux méthodes de fonctionnement au niveau de l'évaluation environnementale—une étape intermédiaire avant l'examen public ou l'examen en commission.
M. John Finlay: Monsieur le président, j'ai encore une ou deux autres questions.
Je crois que M. Bachand ou M. Konrad ont également posé cette question à propos des consultations, mais je tiens à être sûr d'avoir bien compris. Vous dites que le Groupe de travail invitera les groupes et organismes intéressés—l'industrie, le gouvernement et les groupes environnementaux et autochtones—à désigner un représentant qui siégera au sein d'un groupe consultatif de dix membres environ. Je suppose que tous les groupes de la région, comme par exemple les Métis de South Slave, seront invités à participer. N'est-ce pas?
Mme Heidi Klein: Il est prévu que ce groupe consultatif n'existera que de manière temporaire pendant l'élaboration des lignes directrices et qu'ensuite ce sera l'Office lui-même qui consultera de manière beaucoup plus complète tous les groupes. Nous voulions avoir immédiatement un groupe provisoire pour entériner les lignes directrices. Ce sera la tâche de ce groupe de dix personnes.
• 1155
Ensuite, conformément aux définitions de la Partie III et de
l'article 120, des consultations beaucoup plus larges auront lieu
auprès des communautés et de tous les groupes immédiatement après
la fin du travail de ce groupe consultatif.
M. John Finlay: Mais ces gens seront invités à envoyer quelqu'un s'ils le souhaitent.
Mme Heidi Klein: Oui.
M. John Finlay: Merci.
Je dois vous applaudir pour ce que vous dites à propos du financement des intervenants à la page 4. Vous dites «dans le budget distinct que l'Office d'examen doit soumettre avant de tenir des audiences publiques, des fonds seront prévus à cette fin». C'est une de ces mesures qui me tiennent à coeur.
Mon autre commentaire concerne ce que vous dites à la page 6:
-
Ces projets seront assujettis à la Partie V de la LGRVM lorsque
viendra le temps de renouveler un permis ou de proposer des
changements sur le plan de l'exploitation. Une évaluation ou même
un examen sera en outre vraisemblablement exigé parce que le
projet est en cours depuis plusieurs années et qu'aucune mesure
d'atténuation n'a été prise à ce jour. Le Groupe de travail est
d'avis qu'il serait injuste et peu réaliste d'exiger que les
projets soient interrompus pendant la durée de l'évaluation
environnementale.
Je conviens avec vous de la nécessité d'examiner certains d'entre eux dans la mesure où les mesures d'atténuation, quelles qu'elles soient, sont insuffisantes si ce qu'on m'a dit il y a deux ans à Yellowknife est vrai—et je crois que c'est vrai. Une des mines là-bas... Il y a peut-être eu des améliorations depuis, mais elle pollue en permanence le lac et les conséquences pour la pêche sont épouvantables.
Merci, monsieur le président.
Le président: Monsieur Konrad.
M. Derrek Konrad: Merci, monsieur le président.
J'ai encore une ou deux questions.
Est-ce que ce groupe de travail deviendra l'Office d'examen des répercussions environnementales? Je vois que les membres de ce groupe de travail suivent une formation et que vous les qualifiez de «candidats éventuels». C'est une expression que je ne connaissais pas.
Mme Heidi Klein: Non, le Groupe de travail disparaîtra. Le groupe de travail est un corps provisoire constitué pour préparer l'Office d'examen des répercussions environnementales. Les candidats éventuels sont des candidats qui seront nommés à l'Office. Il y en a quatre actuellement—deux représentant les Gwich'in et deux les Sahtu—mais les sept qui restent, conformément à la loi, devront être proposés et nommés. Les autres conseillers—les représentants du conseil tribal des Gwich'in, du secrétariat des Sahtu, du gouvernement fédéral et du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest—ne feront plus partie de l'Office.
M. Derrek Konrad: Donc, si je comprends bien, les candidats éventuels seront choisis par les Gwich'in, les Sahtu, les Dénés et les Métis. J'en déduis qu'ils ont reçu l'approbation ministérielle?
Mme Heidi Klein: Exactement.
M. Derrek Konrad: Je vois, et ce n'est pas conforme à cette loi, mais conforme à une autre procédure d'approbation.
Mme Heidi Klein: Ils ont reçu leur lettre de la ministre indiquant qu'ils avaient été proposés et que l'intention était de les nommer une fois que la loi serait adoptée et qu'il y aurait proclamation officielle de l'existence des offices.
M. Derrek Konrad: Très bien.
J'ai une autre question qui porte aussi sur le financement de la participation des intervenants. D'où viendront ces fonds et comment seront-ils administrés?
Mme Heidi Klein: Si l'OERE décide de procéder à un examen public, il doit faire une demande de crédit distincte à la ministre des Affaires indiennes et du Développement du Nord. Ce budget comprendra une demande de crédit pour le financement de la participation des intervenants.
Pour ce qui est de savoir comment ce sera administré, nous discutons justement en ce moment des formalités d'examen public à venir. Ce sera sans doute une structure semblable à celle qu'utilise l'Agence canadienne d'évaluation environnementale. Un groupe de personnes indépendantes examinera les demandes de financement pour la participation des intervenants et décidera qui seront ces intervenants et combien ils recevront.
M. Derrek Konrad: Merci beaucoup. Je ne crois pas avoir d'autre question.
[Français]
Le président: Merci, monsieur Konrad. Nous allons passer à M. Fournier et ensuite à M. Finlay, qui sera le dernier intervenant.
M. Ghislain Fournier: Moi aussi, je vous remercie d'être là et je vous remercie de votre intervention. J'aimerais que vous expliquiez au comité la raison pour laquelle il est essentiel d'établir rapidement un office des terres et des eaux dans la vallée du Mackenzie et pourquoi votre groupe de travail est de cet avis alors que plusieurs groupes autochtones de votre région n'ont pas encore réglé leurs revendications territoriales. Je voudrais savoir pourquoi vous êtes si pressés d'avoir votre office.
[Traduction]
Mme Heidi Klein: Ça ressemble à une question politique. Nous ne sommes pas un groupe politique. Il n'appartient pas à notre groupe de...
[Français]
M. Ghislain Fournier: Bien sûr. Indépendamment de la politique, c'est un fait. Vous avez chez vous plusieurs nations autochtones qui revendiquent leur droit aux terres, leur droit territorial et il me semble que c'est une grosse préoccupation pour elles. Je ne sais pas si c'est juste un problème entre vous et le gouvernement fédéral du Canada, mais je voudrais que vous expliquiez au comité, comme je vous l'ai demandé tout à l'heure, pourquoi vous êtes d'avis qu'il faut se hâter d'ouvrir un office pour travailler en collaboration avec tous ces groupes, alors que la préoccupation première de ceux-ci est de régler leurs revendications territoriales. Il me semble que politique ou pas, c'est un dossier qu'il faut régler. Est-ce que vous êtes d'avis que ce dossier doit être réglé ou bien pensez-vous que ces revendications ne sont pas légitimes?
[Traduction]
Mme Heidi Klein: À ce jour, le Groupe de travail s'est efforcé d'éviter le débat politique et de prendre ses distances par rapport aux autres groupes qui ont des revendications territoriales. Notre groupe a été formé pour mettre en place de bonnes pratiques d'évaluation environnementale. Il veut voir des régimes d'évaluation environnementale s'installer dans le Nord, et il veut que les décisions soient prises par les habitants du Nord. Mais il reconnaît aussi qu'il n'a pas l'entière maîtrise de la situation. Il appartient aux politiciens et aux autres organisations de décider quand ce régime sera mis en place, et le Groupe de travail est là pour répondre aux exigences des autres organisations. Dans l'attente de la création officielle de l'Office, le Groupe de travail a eu pour fonction jusqu'à ce jour de mettre en place de bonnes pratiques d'évaluation environnementale adaptées aux conditions qui existent dans la vallée du Mackenzie.
[Français]
M. Ghislain Fournier: J'aimerais ajouter quelque chose, monsieur le président.
Vous nous dites que vous savez très bien qu'il y a des nations qui, chez vous, revendiquent leurs terres, mais vous ne voulez pas trop vous mêler de ça parce que vous dites que c'est politique. Est-ce que ce serait osé de dire que si les Québécois revendiquent leur souveraineté, vous ne vous en mêlerez pas non plus? Peut-on dire que si ce sont des problèmes politiques, vos nations dans le Grand Nord, dans la vallée du Mackenzie, ne s'en mêleront pas non plus?
[Traduction]
Mme Alestine André: Ce que nous voulons dire, c'est que nous ne constituons pas une entité politique. Notre groupe s'occupe d'évaluation environnementale. C'est ce que nous faisons, et c'est ce pourquoi notre groupe a été créé.
Je préfère ne pas parler de ce qui se passe à l'extérieur dans l'arène politique. Ce qui nous préoccupe, c'est l'évaluation environnementale, ainsi que les lignes directrices dont parlait Heidi, et nous tâchons de nous préparer en vue du jour où la loi sera adoptée.
• 1205
Pour ce qui est de ce qui se passe sur le plan politique à
l'extérieur, cela ne nous regarde pas. Étant donné que nous nous
préoccupons de l'environnement ainsi que de l'évaluation
environnementale et des lignes directrices qui doivent la régir,
nous voulons rester aussi indépendants que possible. Est-ce
clair?
[Français]
M. Ghislain Fournier: Oui, c'est clair et je vous remercie de votre réponse. Ça me plaît que vous parliez d'autonomie, et je suis persuadé que mon collègue d'en face, M. John Finlay, sera heureux aussi de votre réponse. Pour ma part, j'en suis satisfait. J'ai hâte d'entendre les commentaires de mon ami John, qui est un homme actif et bien sympathique. Je vous remercie de votre réponse.
Le président: Merci, monsieur Fournier. Je vous reconnais, vous êtes un grand Québécois. Nous allons passer au dernier intervenant. Monsieur Finlay, vous avez cinq minutes parce que les députés Konrad et Fournier ont des réunions formelles après le dîner à la Chambre des communes. Je vous laisse la parole.
[Traduction]
M. John Finlay: Merci beaucoup, monsieur le président. Je comprends les observations de mon collègue, M. Fournier, mais j'aimerais pour ma part poser deux questions sans contenu politique.
La première concerne la recommandation que vous faites au sujet des personnes qui seront nommées à l'Office d'examen des répercussions environnementales, étant donné que votre recommandation semble contredire ce qui existe déjà, parce que vous dites que le ministre des Affaires indiennes devrait pouvoir faire ses nominations, après consultation avec les Premières nations, et pas seulement au moment où les noms sont proposés. Et vous vous préoccupez aussi du quorum. Pouvez-vous simplement m'expliquer comment ça marche? Pourquoi ce changement est-il nécessaire?
Mme Heidi Klein: Le Groupe de travail est conscient du fait qu'il existe des organisations au sud des Sahtu qui ne proposeront vraisemblablement pas de membre à l'OERE. La loi dit que les nominations ne peuvent être faites que sur recommandation et il y a un ratio 50/50.
La loi dit également qu'il faut qu'il y ait un quorum de cinq personnes pour qu'une décision soit prise, et l'on s'inquiète donc du fait qu'il pourrait y avoir des moments où il n'y aurait pas quorum, et l'Office serait alors incapable de prendre des décisions. S'il y avait une autre façon de régler la question du quorum, quelque chose de semblable à ce qui existe dans l'accord sur l'Inuvialuit disons où, s'il y a des retards dans les nominations, l'Office peut fonctionner comme s'il était au complet dans l'attente des recommandations et des nominations—il y a une mention à cet égard dans cet accord—ça pourrait marcher aussi.
Ce qui les préoccupe le plus, c'est la capacité de prendre des décisions étant donné que le quorum est fixé à cinq. Cinq personnes ont déjà été proposées, mais elles ne savent pas ce que l'avenir leur réserve.
M. John Finlay: Il me semble qu'il y a une chose qu'on devrait clarifier avant d'adopter ce projet de loi.
Ma dernière question rejoint celle que j'ai posée plus tôt parce que je trouve le libellé un peu embrouillé; il s'agit de ce passage où vous dites qu'il faut améliorer les dispositions régissant la transition, soit les dispositions 158 et 159, où l'on mentionne les projets déjà en cours depuis plusieurs années et qui auraient fait ou n'auraient pas fait l'objet d'une évaluation environnementale exhaustive.
Vous dites que ces projets «seront assujettis à la Partie V de la LGRVM lorsque viendra temps de renouveler un permis ou de proposer des changements sur le plan de l'exploitation», et «qu'une évaluation ou même un examen sera en outre vraisemblablement exigé parce que le projet est en cours depuis plusieurs années et qu'aucune mesure d'atténuation n'a été prise à ce jour».
• 1210
Je veux qu'on soit clair. Si l'on dit que le projet doit
demander le renouvellement du permis, et si ça se trouve, disons,
à l'intérieur des cinq prochaines années, ça va. Mais il se peut
que le projet existe depuis plus longtemps que ça. J'ignore ce
que dit le permis actuel. Est-ce 99 ans? Ou si l'on propose des
changements. Disons que l'Office d'examen ou les responsables de
l'évaluation environnementale pensent que ce projet pose un
problème et que l'on peut prendre des mesures d'atténuation. Ce
projet serait-il alors assujetti à un examen ou une évaluation en
vertu de la Partie V, ou cette évaluation peut-elle être
simplement déclenchée par le fait qu'on renouvelle le permis ou
que l'on propose un changement? Autrement dit, si l'on commet un
crime contre l'environnement dans la plus parfaite impunité,
est-ce qu'on va pouvoir continuer indéfiniment jusqu'au moment où
on demandera un changement?
Mme Heidi Klein: Il y a deux aspects ici. Le premier déclencheur dans cette loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie est la demande de permis ou d'autorisation. Cela figure dans le Règlement sur la liste des lois, qui est semblable à la liste de lois qu'on retrouve dans la LCEE, avec les modifications adaptées aux conditions de la vallée du Mackenzie et auxquelles s'ajoutent les lois et règlements territoriaux.
Donc, pour ce qui est de déclencher le processus, il faut qu'on demande le renouvellement du permis. À ce moment, on peut demander une modification au processus existant.
Pour ce qui est des mesures d'atténuation, on peut aussi s'en occuper en marge du processus d'évaluation environnementale, en s'adressant aux inspecteurs des ministères. Si un entrepreneur ne se conforme pas aux dispositions du permis, il existe des recours en marge du processus d'évaluation.
Pour ce qui est du changement qu'on propose à la LGRVM, tout ce que l'Office demande, c'est que l'on respecte les dispositions qui existent déjà dans la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Dans cette loi, on reconnaît qu'il y a des projets qui n'auraient pas été soumis au processus du PEEE ou de la loi. Autrement dit, ces projets ont été entrepris avant le 22 juin 1984. Tout ce que le Groupe de travail demande, c'est que pour plus d'uniformité, ces projets soient traités de la même manière qu'ils le seraient en vertu du processus canadien d'évaluation environnementale. En vertu de ce processus, ces projets pourraient y être assujettis si l'on propose des modifications au permis, mais s'il s'agit d'un simple renouvellement, le processus ne s'appliquerait pas. Du moins c'est le souvenir que j'ai du fonctionnement du processus.
M. John Finlay: Je me demande seulement si le Groupe de travail est heureux de cela, si c'est le mieux qu'on peut faire, et si par conséquent nous devrions laisser les choses telles quelles.
Mme Heidi Klein: Le Groupe de travail n'aurait pas fait une recommandation dont il ne voudrait pas. C'est ce que vous demandez?
M. John Finlay: Oui.
Mme Heidi Klein: On comprend les préoccupations qu'ont exprimées les divers groupes. En quelques années, on est passé du PEEE à la LCEE, et l'on veut maintenant simplement s'assurer que l'on va traiter les projets avec une certaine uniformité, qu'il s'agisse de la LGRVM ou de la LCEE.
Le président: Merci, monsieur Finlay.
[Français]
Je tiens à remercier Mme Klein et Mme André pour leur témoignage. En terminant, je voudrais préciser deux choses. C'est notre dernière journée d'audiences. Mardi prochain le 9 décembre à 11 heures, ce sera le début de l'étude article par article du projet de loi C-6. Si vous avez des amendements au projet de loi C-6, j'aimerais si possible qu'ils soient acheminés à notre greffière, Mme Fisher, par télécopieur ou par messager.
• 1215
Je tiens à remercier tous les témoins qui
ont été présents à nos audiences et qui ont été
excellents. Je tiens à remercier les employés du
ministère des Affaires indiennes qui ont été très
attentifs à tous les propos. Je remercie aussi notre
greffière, qui a fait un excellent travail et je tiens
à lui dire que je sais que c'est un gros travail. Je
remercie nos recherchistes parce qu'ils ont fait
un travail rapide et précis dès le début. Merci aussi à
nos traducteurs et traductrices, à notre équipe de soutien
et à nos messagers. Merci beaucoup à tous et à la semaine
prochaine.
La séance est levée.