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Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON CANADIAN HERITAGE

COMITÉ PERMANENT DU PATRIMOINE CANADIEN

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 9 décembre 1997

• 1105

[Français]

Le vice-président (M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.)): Messieurs, mesdames, si vous le voulez, on peut commencer la réunion de ce matin.

J'offre des excuses de la part de M. Lincoln, qui ne peut être là. Il m'a demandé de le remplacer et j'ai accepté. J'espère que cela vous convient.

On a des caméras dans la salle.

[Traduction]

Mme Lill a demandé si nous pouvions permettre aux caméras de filmer pendant quelques minutes A Day in the Life of... Si les membres du comité n'y voient pas d'inconvénient, nous laisserions les caméras filmer quelques instants, uniquement le début de notre séance. On nous a signalé que nous pourrions voir A Day in the Life of...

M. Mark Muise (West Nova, PC): C'est la seule chose que je vous demanderais, monsieur le président.

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): Fort bien; c'est noté.

[Français]

Ce matin, nos témoins sont M. Keith Kelly, le directeur national de la Conférence canadienne des arts, et M. Garry Neil, un expert-conseil. Ensuite nous entendrons le professeur Bernier de la Faculté de droit de l'Université Laval.

Nous vous demanderons, messieurs, de faire une présentation et de vous en tenir à une dizaine de minutes. On peut faire preuve d'un peu de souplesse. Nous passerons ensuite à une série de questions, jusqu'à épuisement des questions ou du temps. Est-ce que cela convient à tout le monde?

[Traduction]

Monsieur Kelly, vous voulez peut-être commencer?

M. Keith Kelly (directeur national, Conférence canadienne des arts): Merci beaucoup, monsieur le président, et merci également aux membres du comité de nous donner ainsi l'occasion de venir vous entretenir du dossier de la culture et du commerce international.

Depuis quelques années, nous constatons que les rigueurs des accords commerciaux internationaux ont de plus en plus d'impact sur les politiques et les programmes culturels mis en oeuvre par le Canada pour encourager et promouvoir les arts et les entreprises à vocation culturelle.

En juin dernier, lorsque notre conseil d'administration s'est réuni à Winnipeg, il a dû se saisir d'une vaste gamme de problèmes très graves découlant précisément des accords commerciaux internationaux. Il s'agissait notamment de la décision de l'instance d'appel de l'OMC, un jugement qui battait en brèche les éléments fondamentaux de notre politique nationale concernant l'industrie des périodiques, les pressions ininterrompues exercées par la compagnie Polygram, qui conteste la viabilité de notre politique nationale en matière de distribution de films cinématographiques, des menaces formulées par les États-Unis, qui envisagent d'interjeter appel auprès de l'OMC dans le cas du projet de loi C-32, qui révise la Loi sur le droit d'auteur, les négociations en vue d'un accord multilatéral sur les investissements, qui, à défaut d'exemptions pour le secteur de la culture, aurait une incidence profonde sur les politiques culturelles du Canada, ainsi que toutes les activités visant à élargir davantage encore les accords commerciaux multilatéraux grâce à la participation du Canada à l'APEC ainsi que les prochaines négociations à l'Organisation mondiale du commerce.

Le conseil d'administration de la CCA a fait de ce dossier sa priorité numéro 1 et a chargé le personnel d'entreprendre une initiative tous azimuts pour étudier le dossier du commerce et de la culture. Cela s'est concrétisé par la création d'un groupe de travail sur la politique culturelle pour le 21e siècle qui a permis de rassembler un vaste aréopage sectoriel et pancanadien d'artistes, de travailleurs de la culture et autres experts afin de discuter de façon exhaustive et en toute connaissance de cause l'avenir de la politique culturelle du Canada tout en examinant de près les incidences des accords commerciaux internationaux sur cette même politique.

Lors de ses délibérations, le groupe de travail a fait quelques découvertes intéressantes à propos de la position du Canada dans le dossier du commerce international.

Bien qu'on associe souvent la participation croissante du Canada aux instruments multilatéraux et régionaux en matière commerciale comme étant un phénomène d'un genre nouveau, en réalité, rien n'est moins vrai.

Le commerce a toujours été un leitmotiv dans la vie politique canadienne. Les premières discussions concernant le libre-échange avec les États-Unis ont animé la politique canadienne et la naissance de la Confédération. Par contre, ces énergies se sont trouvées mobilisées lors de la conférence de Bretton Woods de 1944 durant laquelle, soucieux de jeter les fondements d'une économie prospère pour l'après-guerre, le Canada allait officiellement proclamer qu'il entendait oeuvrer pour un système commercial planétaire libre de toute entrave. Et depuis lors, tous les gouvernements successifs ont réaffirmé cet objectif.

Pendant les délibérations qui ont entouré la création du GATT en 1947, les tarifs douaniers avaient été définis comme étant la principale et la plus importante entrave à la création d'un système commercial planétaire sans frontières. En réduisant ou en éliminant ces tarifs douaniers, le système commercial planétaire pouvait, disait-on, faire un énorme bond en avant sur la voie d'un système d'échange beaucoup plus libre. Cet objectif a été atteint avec une célérité remarquable, et certaines retombées favorables n'ont pas tardé à se manifester. Cela étant, l'attention se tourna bientôt vers ce qu'on appelait les barrières non tarifaires, et, une fois encore, le Canada allait être un participant enthousiaste en militant pour l'élimination de ces obstacles. Les subventions, les politiques nationales ainsi que le cadre législatif ont ainsi tous été examinés comme autant de suspects possibles.

La négociation des accords commerciaux régionaux comme l'ALE et l'ALENA sont encore venus élargir la portée de ces négociations. Le traitement accordé à la culture et aux autres secteurs vulnérables de l'économie provoqua un grand débat national sur les mérites et les carences relatifs de ces deux puissants instruments. L'inclusion de ce qu'on allait appeler l'exemption culturelle fut le résultat des pressions exercées par les Canadiens dans le secteur culturel et les secteurs périphériques, car, disaient-ils, il fallait impérativement que le Canada garde les moyens voulus pour poursuivre son épanouissement culturel de la façon qui convenait le mieux à ses besoins sans risquer d'intervention ou de représailles venant de l'étranger.

• 1110

Cette aspiration continue à nous échapper dans le cas de l'ALE et de l'ALENA à cause de la clause dérogatoire qui permet aux États-Unis de prendre des mesures unilatérales à l'endroit de n'importe quel secteur de l'économie du Canada pour obtenir l'effet commercial équivalent, que les États-Unis sont par ailleurs libres de définir de façon unilatérale dès l'introduction d'une nouvelle mesure culturelle qu'ils jugent préjudiciable à leurs intérêts commerciaux. Les représailles américaines résultant de l'application de cette clause sont sans appel et ne peuvent être renvoyées devant le tribunal constitué pour régler les différends.

Lors des négociations de l'Uruguay Round pour le GATT, le Canada s'est une fois encore révélé être un militant enthousiaste du multilatéralisme. Aiguillonnée par la France, la Communauté européenne proposa une exception pour l'audiovisuel comme étant une mesure culturelle vitale pour la sauvegarde de ses intérêts culturels. Le Canada a accordé un certain appui à cette intervention européenne, mais, aux derniers jours des négociations, les Américains ont fait clairement comprendre qu'ils n'étaient pas disposés à se rallier à une quelconque exception générale qui fût fondée sur l'argument de la culture. En fin de compte, aucune disposition de ce genre ne fut ratifiée. Les Américains n'étaient pas prêts à céder, et ils ne cédèrent pas.

En vertu de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce, le GATT, seules deux dispositions concernent le domaine de la culture: une exception générale permettant aux États signataires de protéger leurs trésors nationaux et, dans l'accord de 1947, une autre mesure qui permet l'imposition de quotas quantitatifs à l'importation d'oeuvres cinématographiques.

L'absence de points de référence culturelle dans ces accords fut un élément clé dans la contestation de notre politique nationale sur l'industrie des périodiques, contestation qui allait d'ailleurs aboutir. Nous nous en sommes marginalement mieux tirés dans le cas des accords régionaux que sont l'ALE et l'ALENA, où nous avons fait inclure une exemption pour les industries de la culture. Par contre, dans la hiérarchie des accords commerciaux internationaux, le GATT demeure souverain. C'est la raison pour laquelle les États-Unis n'ont pas tenté de régler ce contentieux dans le cadre de l'ALE et de l'ALENA, mais ont plutôt cherché un milieu plus réceptif au sein de l'OMC, pour laquelle les exemptions culturelles sont tout simplement des créatures injustifiables.

Il est important à ce point-ci de faire une pause pour réfléchir à la question du principe directeur qui a précisément inspiré notre adhésion et celle de bien d'autres pays du monde aux accords commerciaux internationaux. Les défenseurs d'un système commercial planétaire plus libre ont laissé entendre que la disparition d'une certaine souveraineté politique, économique et culturelle par suite de l'adoption de ces accords se justifiait en raison des retombées financières que le Canada pouvait escompter de la signature de ces accords. Lorsque les négociations étaient moins complexes, axées par exemple sur les tarifs douaniers, cette notion était relativement facile à accepter, mais à mesure que nous traitons de plus en plus d'obstacles non tarifaires, nous constatons que ces accords commerciaux limitent très sérieusement notre souveraineté.

Pour l'essentiel, le monde des négociations commerciales internationales est tout empreint de mystères. Je ne dis pas cela de façon péjorative, mais c'est un processus qui se déroule loin des yeux des Canadiens suite auquel on nous présente des accords qui limitent de plus en plus la liberté que nous avons de prendre des mesures qui, selon nous, correspondent à l'intérêt national. Nous croyons sincèrement que nous en sommes maintenant arrivés à un moment, lors de la négociation de ces instruments internationaux, où nous devrions véritablement avoir un grand débat national qui nous permettrait de déterminer jusqu'où nous sommes prêts à accepter que ces accords commerciaux empêchent nos gouvernements de relever les défis nouveaux et de saisir les potentialités qui se présentent.

Et à mesure que ces discussions absorbent de plus en plus de domaines relevant de la vie politique nationale, les conséquences pour la souveraineté nationale se font de plus en plus manifestes, et je pense d'ailleurs que Garry Neil vous parlera des conséquences qu'aurait l'AMI si on n'y apporte pas de correctifs.

En même temps que se poursuit et s'élargit la quête de ces accords internationaux sur le commerce, nous nous trouvons également confrontés au problème de la montée de la mondialisation et de l'avènement de nouvelles et puissantes technologies qui révolutionnent littéralement bon nombre de ces frontières traditionnelles que nous nous sommes employés à définir au fil des ans. Ces forces, nombreux sont ceux qui les considèrent irréversibles, et signifiant la mort certaine de bien des politiques et programmes à vocation culturelle que les tenants du libre-échange frappent du stigmate du protectionnisme et de l'obsolescence. Pour ceux-là, il est grand temps pour nous de reconnaître que le cadre général de notre politique culturelle est dépassé et de céder aux rigueurs du marché planétaire et à la puissance débridée des nouvelles technologies.

• 1115

Par conséquent, après en avoir délibéré, nous pensons qu'il y a ici trois grandes problématiques fondamentales.

Dans quelle mesure les retombées économiques du libre-échange international viennent-elles entraver, en la remplaçant, notre souveraineté nationale, économique, politique et culturelle, et jusqu'à quel point les Canadiens sont-ils prêts à aller?

Comment affirmer, dans le cadre du réseau des accords commerciaux internationaux qui existent déjà, le droit que nous avons de gérer librement notre propre secteur culturel?

Comment le Canada peut-il susciter des mesures en recours qui nous donneraient la garantie que les accords commerciaux internationaux existants et en projet soient remaniés ou structurés de manière à garantir la souveraineté culturelle?

Comment avoir la certitude que les forces de la mondialisation et de la nouvelle technologie pourront être infléchies de manière à venir épauler et renforcer la souveraineté et les objectifs culturels nationaux et assurer la pérennité de l'expression culturelle indigène au Canada et dans le reste du monde?

Le groupe de travail sur la politique culturelle pour le XXIe siècle est aux prises avec ces questions et s'emploie à apporter les réponses voulues afin que nous puissions soumettre au gouvernement et au Parlement des recommandations mûrement réfléchies, efficaces et bien étayées.

La seule chose que nous ayons découverte dans nos délibérations, c'est qu'il n'existe pas d'arme magique qui nous permettrait de nous sortir d'embarras sans autre coup férir. Il y a toutefois certaines choses que nous pouvons et que nous devrions faire au niveau national pour rétablir un peu l'ordre et la gouvernance dans un dossier qui, bien souvent, semble échapper à tout contrôle.

Il nous faut un cadre de politique culturelle clairement formulé qui dise aux Canadiens tout comme à nos partenaires internationaux pourquoi la souveraineté culturelle est véritablement importante pour nous en tant que nation et pourquoi elle l'est aussi sur le plan pratique. Cela nous permettrait de présenter nos politiques de façon claire et juste en évitant peut-être qu'elles soient interprétées à tort comme des mesures protectionnistes.

Le cadre d'une politique culturelle a principalement pour but de donner un fondement solide à l'épanouissement artistique dans l'expression culturelle, et non pas d'être une manière de plan insidieux qui nous permettrait de camoufler l'un ou l'autre objectif industriel ou économique en matière d'exportation.

Nous devons nous inspirer des efforts de la ministre du Patrimoine canadien, l'honorable Sheila Copps, qui a mobilisé les milieux internationaux pour arriver à rayer les politiques culturelles nationales de l'agenda de la négociation des instruments commerciaux internationaux. Cela ferait beaucoup pour protéger la réussite du cadre de la politique culturelle du Canada et assurer la préservation d'autres cultures indigènes ailleurs dans le monde.

Nous devons trouver la volonté commune d'imposer aux forces de la mondialisation et des nouvelles technologies des valeurs humaines plus larges encore qui nous permettront de défendre les droits souverains de nos semblables et de leurs États tout en multipliant les avantages qui découlent de ces puissants vecteurs.

La Conférence canadienne des arts va, dans les mois et les années à venir, activement militer pour que ces objectifs soient atteints. Nous allons également axer nos énergies sur un réexamen des institutions, des politiques et des initiatives déjà en place dans le secteur canadien de la culture afin précisément qu'elles soient capables de relever les défis et de saisir les potentialités qui nous attendent au prochain millénaire.

Le président du Conseil et les membres de la CCA sont prêts à oeuvrer de concert avec le comité et le gouvernement pour affirmer notre souveraineté culturelle et persévérer dans cette tâche si agréable qu'est l'édification, pour tous les Canadiens et toutes les Canadiennes, d'une vie culturelle dynamique, distincte et variée.

Je vous remercie.

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): Je vous remercie monsieur Kelly.

Monsieur Neil.

M. Garry Neil (consultant, Conférence canadienne des arts): Merci beaucoup monsieur le président et merci également aux membres du comité.

C'est un plaisir d'être aujourd'hui en votre compagnie pour vous entretenir de certaines des questions qui préoccupent énormément les milieux culturels et aussi, j'imagine, toute la nation.

Je suis consultant et je travaille dans le secteur de la politique culturelle au sens général du terme. J'ai pour clients des réalisateurs de la télévision et du cinéma, des maisons d'édition et des associations commerciales. J'ai également travaillé dans le domaine des périodiques. À l'heure actuelle, je suis conseiller en matière de politique auprès de l'ACTRA, l'Association des artistes canadiens du cinéma, de la télévision et de la radio.

Je travaille dans cette discipline depuis plusieurs années déjà. J'ai fait partie du groupe consultatif sectoriel pour le commerce international dans le domaine des arts et de la culture pendant sept ou huit ans, alors que se négociaient l'ALENA et le GATT et que débutaient les négociations sur l'AMI.

La CCA m'a demandé de jeter un coup d'oeil sur le projet d'accord multilatéral sur les investissements et de lui donner mon avis sur ses conséquences possibles pour le secteur de la politique culturelle au Canada. Je lui ai remis un texte qui, je pense, résume mes préoccupations à cet égard et qui, je n'en doute pas, est à la disposition des membres du comité. Je sais que j'en ai déjà remis copie à un ou deux d'entre vous.

Il ne fait aucun doute que, sous leur forme actuelle, les dispositions de l'accord couvrent totalement le secteur culturel. La version de mai du texte de l'accord et, avant cela, le texte de janvier, de même que le texte d'octobre ne prévoient aucune forme d'exception, d'exemption ou de réserve, de sorte que l'intégralité du secteur culturel serait manifestement prise en compte par les paramètres de cet accord. Je dirais qu'en règle générale, les gens en ont pris conscience et, dans quelques instants, nous reviendrons à ce qu'il importe de faire maintenant.

• 1120

Ce que cela signifie, c'est que pratiquement toute la palette des mesures auxquelles nous avons eu recours au fil des ans pour encourager les artistes canadiens et pour appuyer les industries culturelles risque d'être touchée par les dispositions de l'accord. Dans l'ensemble des industries de la culture, nous avons imposé des restrictions à la propriété étrangère. Toutes ces restrictions seraient contraires aux dispositions sur le traitement national et aux dispositions sur le traitement de la nation la plus favorisée qui se trouvent dans l'accord. Il s'agit notamment de choses comme le règlement selon lequel pour pouvoir posséder une licence de radiodiffusion au Canada, il faut qu'au minimum deux tiers des intérêts appartiennent à des Canadiens. Il y a aussi, dans le domaine de l'édition, la politique qui interdit l'implantation de nouvelles compagnies au Canada, celle qui interdit la vente de compagnies canadiennes à des intérêts étrangers, sauf dans certaines circonstances. Il y a également la politique du cinéma et du disque, qui interdit aux compagnies étrangères d'acquérir des firmes canadiennes, d'étendre leurs activités au Canada ou d'implanter de nouvelles installations sur notre sol.

Un second dossier qui serait tout entier touché par l'accord est celui des programmes de financement qui existent au Canada et qui sont réservés aux entreprises canadiennes. Ainsi, seules les firmes canadiennes peuvent obtenir une subvention dans le cadre de toute une série de programmes, par exemple le programme de développement de l'industrie de l'édition ou encore le programme de subvention des frais de port pour l'industrie des périodiques. Toute entreprise non canadienne est automatiquement exclue de ces programmes. Cela aussi serait contraire aux dispositions de l'accord multilatéral sur les investissements concernant le traitement national.

Les critères en matière de contenu canadien qui sont l'une des assises de l'industrie de la télévision et de l'industrie du disque au Canada... S'agissant de la télévision, et il est important de noter ici la distinction, pour que l'émission soit conforme aux critères relatifs au contenu canadien, il faut que le producteur soit canadien. Une compagnie étrangère qui produirait mettons une émission dont le contenu serait à 100 p. 100 canadien ne pourrait pas recevoir un numéro d'agrément du CRTC. Cela aussi serait contraire aux dispositions de l'accord. De fait, à mesure que je lisais l'accord, j'ai commencé à réfléchir à toute la palette des politiques que nous avons au Canada et je me suis rendu compte que très rares seraient celles qui seraient à l'abri d'une contestation en vertu de l'AMI.

Nous en arrivons donc à l'exemption parce que nous savons que le ministre Marchi a bien dit que le Canada n'accepterait pas un accord dont les dispositions seraient pour nous moins avantageuses que celles de l'ALENA. Essentiellement, nous envisageons donc comme formule possible celles de l'exemption qu'on trouve dans l'ALENA.

Après avoir étudié la version de janvier du texte de l'accord, le gouvernement français a transmis un document très intéressant au groupe de négociation réuni à Paris. Ils disaient en substance qu'ils avaient étudié la version en question et qu'ils avaient noté que ce texte porterait préjudice à toute une série de mesures adoptées par le gouvernement français à l'appui de la diversité linguistique et culturelle et que, suite à cet examen, le gouvernement français avait résolu de déposer une demande d'exemption.

Je voudrais d'ailleurs faire deux ou trois observations à propos de ce qu'on appelle ainsi l'exemption française. Pour commencer, elle ne figure pas dans le texte de l'accord. La proposition de la France se trouve dans le commentaire, c'est-à-dire les pages qui sont annexées au corps de l'accord et où certains éléments de celui-ci sont discutés.

Sur la scène internationale, lorsqu'on négocie un accord, on arrête un texte et tout ce qui ne fait pas l'objet d'un accord est en quelque sorte mis entre crochets. Pendant que l'accord est négocié, il s'agit alors d'éliminer autant d'éléments entre crochets que possible, ou alors d'en modifier le texte jusqu'au moment où on parvient à un accord final.

Dans le corps principal du texte de l'accord, on ne trouve nulle part d'exception ou d'exemption pour la culture, nulle part. La proposition de la France se trouve dans la partie réservée aux commentaires et il s'agit d'un petit paragraphe dans lequel les Français disent qu'ils proposent une exception.

• 1125

Je pense personnellement que la portée du texte proposée par les Français est beaucoup trop étroite. On y parle simplement de politiques et de programmes conçus dans le but général d'améliorer la diversité linguistique et culturelle.

Selon moi, ce qui pose beaucoup plus de problèmes dans le cas de la proposition de la France, c'est qu'il faut bien comprendre ce que veulent les Français. Ils ne veulent pas du tout de cette série de contestations et de problèmes que nous connaissons ici au Canada. Nous sommes les voisins du pays le plus puissant au monde, du producteur culturel le plus puissant de la planète, un pays qui produit beaucoup plus et beaucoup moins cher que ce que nous pourrions faire nous ici au Canada. Voilà le défi qui se pose à nous, qu'il s'agisse du domaine des périodiques, de l'édition, du cinéma, de la télévision ou des actualités.

Les Français n'ont pas ce problème hormis l'audiovisuel. Ce qu'ils veulent, c'est conserver pour la télévision les quotas en matière de contenu qui s'inscrivent déjà dans le cadre de la directive des communautés européennes. C'est pour cela qu'ils se sont battus pendant la négociation du GATT, et en fin de compte, c'est surtout cela qui préoccupe le gouvernement français. Ils n'ont pas le même problème que nous dans l'industrie de l'édition parce qu'ils ont mille ans d'histoire et une langue commune qui permettent l'épanouissement d'une industrie de l'édition solidement ancrée dans le pays. Si nous suivons de trop près la proposition de la France, nous risquons je pense d'arriver à un résultat qui ne répondrait pas à nos besoins dans l'ensemble du secteur culturel.

Il y a ensuite la troisième formule possible, celle qu'on appelle des réserves propres à un pays. Même si les 29 pays de l'OCDE se rallient tous à cet accord, les pays ont néanmoins le loisir d'y ajouter leurs propres réserves. J'imagine que nous inscrivions ainsi nos propres mesures culturelles en disant voilà les mesures qui existent déjà chez nous et qui sont contraires aux engagements que nous prenons en vertu de l'AMI. Le gouvernement canadien ne s'est pas encore engagé dans cette voie, je vous le signale. Jusqu'à présent, les réserves que nous avons avancées ne comprennent pas les politiques culturelles.

Si nous utilisons cette formule, nous risquons de très graves problèmes. L'accord proprement dit précise très clairement que d'une façon ou d'une autre, les réserves propres à un pays doivent respecter deux principes. Le premier est celui du statu quo, par lequel les nations conviennent que les seuls changements admissibles aux mesures précisées seraient ceux qui rendraient les mesures en question plus conformes aux dispositions d'ensemble de l'accord. En d'autres termes, il serait impossible de rendre un règlement plus restrictif encore, par contre il serait possible de l'assouplir. Le second principe est celui du démantèlement: l'objectif, très clairement précisé dans l'accord, consiste à éliminer toutes les mesures non conformes énumérées par chacun des pays.

Mais ce qui me préoccupe peut-être le plus en fait, c'est la position du gouvernement canadien dans tout cela. Dans le texte proprement dit de l'accord et dans le commentaire, il y a au moins 21 ou 22 passages dans lesquels on note que le Canada a pris position, dans certains cas avec beaucoup de fermeté. Par exemple, à en croire le texte de l'accord, le Canada tient la dragée haute pour tout ce qui est de l'application extraterritoriale des lois, en d'autres termes le contentieux Helms-Burton. Mais on ne trouve nulle part dans le texte de l'accord une telle position du Canada dans le domaine culturel. À la table de négociation de l'OCDE, nous n'avons nullement fait valoir nos préoccupations quant aux répercussions possibles de l'accord pour notre secteur culturel.

Plus encore, vous m'excuserez d'être un peu sceptique lorsque j'entends les assurances données par les fonctionnaires canadiens chargés de la négociation de l'accord. Je faisais partie du groupe consultatif sectoriel sur le commerce international lorsque certains de ces mêmes fonctionnaires et autres grands juristes du gouvernement sont venus nous dire «Ne vous inquiétez pas pour la politique sur les périodiques. Nous allons perdre le numéro tarifaire si les Américains font appel», parce qu'il s'agissait en fait d'une violation des anciennes dispositions du GATT de 1947. «Mais», ajoutait-il, «la taxe d'accise a été précisément conçue pour résister à toute contestation américaine en vertu de l'OMC, et il en va de même pour le programme de subvention des frais de port». On nous avait dit de ne pas nous inquiéter, et bien entendu l'issue de l'appel fut que ces trois éléments de notre politique sur les périodiques ont été déclarés contraires aux dispositions du GATT, de l'OMC.

Voilà ce qui me préoccupe. Je pense que nous ne devons pas nous contenter simplement de dire que nous allons obtenir une exemption. Je pense que le gouvernement du Canada devrait être beaucoup plus ferme en se portant à la défense des positions que nous avons prises dans ce domaine. Je vous remercie.

• 1130

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): Merci monsieur Neil. Monsieur Kelly, je suis persuadé que vous aurez suscité plusieurs questions dans l'esprit de nos membres, et je vais d'ailleurs leur demander de tenir bon.

[Français]

Monsieur Bernier, merci de votre patience. C'est à vous maintenant.

M. Ivan Bernier (professeur, Faculté de droit, Université Laval): Un certain nombre de choses que j'avais l'intention de soulever ont déjà été mentionnées. Je vais donc essayer plus simplement de faire le point sur la situation actuelle en ce qui a trait à la place de la culture dans les accords commerciaux internationaux. Je vous parlerai de ce que cela nous dit pour le futur et de ce qu'il y aurait lieu de faire maintenant relativement à cette question.

On étudie de façon attentive la situation actuelle qui est faite à la culture dans les accords commerciaux internationaux et on se rend compte qu'il y a actuellement un vaste débat qui est en cours, qui est loin d'être réglé, dans lequel des positions divergentes sont prises. Les solutions définitives à ce débat sont encore à trouver.

Donc, il est important, avant ou d'accepter que ces accords commerciaux internationaux l'emportent inévitablement et que la culture cède devant les intérêts essentiellement économiques, qu'on essaie de comprendre où on en est exactement.

De ce point de vue, je veux vous souligner dès le départ que c'est un débat assez ancien, celui de la place de la culture dans les accords commerciaux internationaux. Cela remonte aux années 1920, à l'époque où on a développé l'industrie du cinéma. Déjà, dans les années 1920, les Européens ont commencé à adopter des lois ayant pour but de préserver une production cinématographique en Europe face à une invasion de la cinématographie américaine après la Première Guerre mondiale.

Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis avaient réussi à convaincre la plupart des pays européens d'abandonner des lois de cette nature en exerçant parfois des pressions de nature économique liées à l'octroi de prêts, entre autres, à ces États.

Mais le débat s'est en partie réglé au moyen d'une clause qui était celle de l'article 4 de l'accord du GATT. Cette disposition, qui permettait le maintien de quotas à l'écran pour préserver une présence nationale dans le domaine du cinéma, a fonctionné pendant un certain nombre d'années. Plusieurs pays ont eu recours à une telle clause, de telle sorte qu'on a eu l'impression que la question culturelle pouvait trouver une réponse de cette nature.

Mais assez rapidement, dès le début des années 1960, les conflits sont réapparus à propos de la télévision. C'étaient essentiellement des conflits entre les États-Unis, d'une part, et un certain nombre d'États, d'autre part, y compris le Canada, mais pas uniquement le Canada. Je dois dire que plusieurs pays étaient visés, soit parce qu'ils établissaient des restrictions quantitatives en ce qui a trait aux programmes de télévision, soit parce qu'ils subventionnaient la télévision ou le cinéma.

Quoi qu'il en soit, on en arrive assez rapidement aux négociations de l'Uruguay Round, où apparaît à nouveau la question de la place de la culture dans le commerce international, en particulier dans le secteur du commerce des services. C'est à cette occasion qu'il y a eu toute une série d'interventions en Europe de la part des acteurs, des metteurs en scène et des producteurs, et tout cela a donné lieu à une publicité considérable en faveur de l'exception culturelle.

Malgré tout, l'Uruguay Round n'a donné aucun résultat à cet égard. Cela a été un modus vivendi. On s'est contenté de laisser les choses, dans une large mesure, comme elles étaient auparavant et on se retrouve à nouveau, à peine quelques ans après la clôture de l'Uruguay Round, avec le problème de la multiplication des conflits, des différends entre États, en particulier entre le Canada et les États-Unis.

Il y a eu une décision de l'Organisation mondiale du commerce dans le cas des périodiques, mais ce n'est pas la seule cause qui a été présentée à l'OMC dans les dernières années. Les États-Unis ont attaqué la Turquie sur une question de redevances en faveur du cinéma lorsqu'il y avait des films étrangers présentés sur les écrans turcs. Ils ont attaqué cette disposition, mais ont réglé ultimement sans aller devant un panel.

• 1135

Ils ont également attaqué le Japon dans le domaine des droits d'auteur en ce qui a trait au disque, aux enregistrements sonores. Et, évidemment, il y a eu un certain nombre de menaces auxquelles on a fait allusion plus tôt.

Tout cela montre qu'il y a à l'heure actuelle un débat assez important, un débat qu'on retrouve dans un nombre assez remarquable d'écrits et d'articles qui sortent régulièrement. J'ai recensé, depuis les années 1990, une quarantaine d'articles qui sont sortis, dont une bonne majorité aux États-Unis. Mais il y a manifestement quelque chose qui préoccupe, qui intéresse, et on a le sentiment qu'il y a une décision qui va devoir se prendre sur cette question de la place de la culture dans les accords commerciaux internationaux. C'est assez clair.

Cela dit, pour vous donner une idée de l'état d'incertitude qui entoure ce débat, outre les clauses que l'on retrouve dans le GATT, qui sont les articles 4 et 20, qui portent sur les restrictions imposées pour la protection des trésors nationaux ayant une valeur artistique, historique ou archéologique, je tiens à souligner ici que, même si ces dispositions ne sont peut-être pas d'une importance majeure dans l'ensemble de ce débat, elles sont une reconnaissance de principe de la spécificité du produit culturel. Ce n'est pas une chose à ignorer. Qu'il s'agisse de l'article 20 ou de l'article 4, il y a là-dedans une reconnaissance des particularités des produits culturels.

Évidemment, si on fait exception de ces deux articles dans le cadre du GATT, on se retrouve avec un traitement des produits culturels qui est équivalent à celui offert à tous les autres produits. C'est ce qui nous a donné la décision de l'OMC sur les périodiques. On constate que dans cette décision-là, que j'ai eu l'occasion d'analyser en détail, on a traité essentiellement les périodiques et leur contenu intellectuel de la même façon que l'on avait traité, dans une autre décision, un conflit concernant la vodka japonaise comparée à la vodka étrangère.

Évidemment, on se retrouvait avec des choses qui n'étaient pas nécessairement de même nature. L'interprétation qui a été donnée dans la décision sur les périodiques est une interprétation extrêmement technique, qui laisse peu de place à une prise en compte de la spécificité des produits culturels. Elle a été très critiquée par plusieurs, et j'ai la conviction que ce n'est pas la fin de l'histoire.

Pour vous donner une idée de la situation—je reviendrai sur d'autres accords qui traitent de la culture—, déjà le directeur général du GATT, M. Ruggiero, dans une conférence qu'il donnait il y a quelques mois, parlait justement de cette importance de la culture. Il disait ce qui suit, et je le cite en anglais:

[Traduction]

    Gérer un monde où les économies, les peuples et les civilisations convergent et où chacun essaie de préserver sa propre identité et sa propre culture, voilà le défi numéro un et la potentialité numéro un de notre époque.

[Français]

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): Monsieur Bernier, je vous demanderais de ralentir un peu votre débit parce les interprètes ont peine à suivre.

M. Ivan Bernier: D'accord, mais 10 minutes, c'est contraignant.

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): On vous donnera deux minutes de plus.

M. Ivan Bernier: Donc, il présentait cette question du maintien des identités et des cultures dans un monde de convergence des économies comme un des défis majeurs de notre époque.

Je pourrais aussi citer Mme Sylvia Ostry, qui était ambassadrice canadienne au moment de l'Uruguay Round, qui disait:

[Traduction]

    Si la biodiversité est indispensable, il est certain que la diversité des cultures l'est également.

[Français]

Ce qu'elle voulait signifier essentiellement, c'est que quelque part, il va falloir arrêter d'accepter que des accords comme celui du GATT ou l'Accord multilatéral sur l'investissement embarquent à peu près sur tout. Le GATT, actuellement, a une propension à aller dans tous les domaines, et il y a là un problème et peut-être même un risque éventuel pour le commerce lui-même. Donc, même du côté des instances internationales ou des spécialistes du commerce international, on peut constater à l'heure actuelle qu'il y a des hésitations sur le traitement accordé à la culture.

On retrouve également des manifestations concrètes de ces hésitations dans le fait que, par exemple, dans les négociations sur les services au moment de l'Uruguay Round, il y a eu bon nombre de réserves de faites concernant le traitement de la nation la plus favorisée. C'étaient des réserves concernant les accords de coproduction cinématographique et des accords dont la justification, décrite par les États qui demandaient les réserves, était spécifiquement la protection de l'identité nationale ou de l'identité régionale. On demandait des réserves pour ce but précis.

• 1140

De la même façon, en ce qui a trait aux engagements spécifiques, on sait que l'Union européenne et le Canada ont refusé de prendre des engagements spécifiques en ce qui concerne l'accès au marché des services et le traitement national en matière de services, dans ce cas culturels, parce qu'ils n'avaient évidemment pas obtenu, ni un ni l'autre, le type de clause qu'ils auraient souhaité.

Ici, je veux préciser qu'en ce qui concerne les relations entre le Canada et la France durant cette négociation sur les services, le Canada avait avancé une proposition très tôt et mentionné cette proposition à la France, mais comme c'était une proposition globale relative à l'ensemble de la culture et que l'Europe était plutôt préoccupée par l'audiovisuel, il y a eu un manque d'entente entre le Canada et la France. Tout cela a abouti à un débat larvé qui n'a pas vraiment eu lieu dans le contexte de l'accord sur les services.

Cela dit, on retrouve également des clauses d'exception culturelle dans les accords de libre-échange du Canada avec Israël et le Chili. Ce sont des clauses complètes. Il n'y a pas de mesures d'effet commercial équivalent de prévues dans ces clauses d'exception culturelle. On retrouve aussi des clauses d'exception culturelle dans les accords bilatéraux d'investissement du Canada avec 16 ou 17 pays à l'heure actuelle. Donc, malgré tout, un certain nombre de pays acceptent qu'il y a lieu de considérer un traitement différencié ou distinct des produits culturels ou une exception culturelle complète pour ce type de produits.

On peut aussi mentionner, dans le cas de l'Accord multilatéral sur l'investissement, le fait que la clause française qui a été proposée a quand même maintenant l'appui de huit ou neuf pays. Ce n'est plus que le Canada ou la Belgique. Il y a maintenant un certain nombre de pays, et cela signifie qu'il commence à y avoir une reconnaissance du fait qu'il y a là un problème qui est peut-être plus important qu'on ne le croyait.

Dans un débat de cette nature, qui met en cause la protection de l'identité culturelle—moi, j'ai tendance à aller plus loin et à lier la culture au processus démocratique en tant que tel—, il est important de faire l'impossible pour trouver des façons d'assurer une production culturelle dynamique à l'intérieur des pays et en même temps favoriser la diversité culturelle en acceptant les productions culturelles d'un nombre important de pays et non pas d'un seul pays. Il y a donc deux aspects à ce problème.

En ce qui concerne la politique canadienne, à l'heure actuelle, que ce soit dans le cadre de l'Accord multilatéral sur l'investissement...

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): Monsieur Bernier, vous avez une minute pour conclure.

M. Ivan Bernier: ...ou en ce qui concerne les négociations qui auront lieu en l'an 2000 dans le domaine des services, le Canada doit faire tout ce qu'il peut pour explorer à fond la possibilité d'avoir une exception culturelle. Cela veut dire prendre contact avec des pays étrangers, développer une argumentation solide autour de cette possibilité, essayer de voir quelles sont les possibilités de gagner d'autres pays aux positions canadienne et française, donc faire l'impossible pour vider cette question.

Si on fait cela et si on doit par la suite retomber sur les réserves, comme c'est fort possible, on pourra peut-être alors avoir une chance, stratégiquement parlant, d'insister sur une réserve qui soit ouverte et complète et non pas sur une réserve fermée comme celle qui s'annonce à l'heure actuelle. Merci.

[Traduction]

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): Avant de passer aux questions, monsieur Neil, auriez-vous l'obligeance de vérifier si le greffier a bien reçu copie du document dont vous avez parlé dans votre exposé et que vous avez déjà remis à un ou deux de nos membres? Ainsi, tout le monde aura ce texte.

M. Garry Neil: Certainement.

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): Monsieur Obhrai.

M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, Réf.): Je voudrais d'abord remercier nos invités d'être venus aujourd'hui. Il a été très intéressant d'entendre vos arguments. Peut-être pourriez-vous m'éclairer sur un point. Je vous ai tous les trois entendus défendre de main de maître la culture canadienne et les accords sur la scène internationale.

• 1145

Voici donc ma préoccupation ou plutôt ma question. Je constate que nous avons pendant longtemps eu des politiques destinées à protéger la culture canadienne. Mais avec la mondialisation et toutes les mutations qu'on constate dans le monde entier, de plus en plus nous nous sentons pressés d'ouvrir notre marché. Et ces sollicitations s'exercent dans tous les domaines. Il ne s'agit pas que de la culture, il en va de même dans l'économie et dans tous les secteurs de celle-ci. Nous semblons fort bien réussir partout où nous accueillons la concurrence.

Si je vous ai bien compris, vous nous dites tous les trois qu'il faut protéger la culture. Si on accueille la concurrence, nos artistes et nos institutions culturelles pourront également en profiter par réciproque. Ce même produit que nous essayons de protéger, ils pourront fort bien réussir à le vendre ailleurs. Je pense que nous devons faire confiance à ces institutions et à ces artistes car eux aussi pourraient rayonner et exceller sur le marché mondial.

Je pense que déjà ils réussissent très bien. Bien sûr il pourrait y avoir une définition rigoureuse et étroite de la culture qui selon nous est indispensable et que nous voudrions conserver. Mais avec un accord planétaire, sur le marché international, ne pensez-vous pas que nous devrions permettre à nos propres institutions de rayonner ainsi et de s'épanouir sur ce marché?

M. Keith Kelly: Pour commencer, c'est effectivement une question intéressante et qui revient sans cesse dans toutes les discussions. Chaque fois qu'on nous accuse de faire du protectionnisme dans le domaine culturel, nous en sortons échaudés.

Il suffit de voir les chiffres. Par exemple, 85 p. 100 des films projetés en salle viennent de l'étranger, tout comme 85 p. 100 des magazines en kiosque et 60 p. 100 des émissions de langue anglaise diffusées aux heures de grande écoute. Notre marché est peut-être le plus ouvert au monde pour ce qui est des produits culturels provenant non seulement des États-Unis mais de partout, et nous souhaitons qu'il le demeure. Les Canadiens apprécient les produits culturels qui leur sont offerts de toutes les régions du monde. En fait, nous sommes très favorisés à cet égard.

Il faut démentir l'idée que ces mesures empêchent l'arrivée au Canada de produits et d'artistes étrangers. C'est tout à fait faux.

Ce que nous voulons, c'est conserver notre capacité d'établir une assise nationale solide pour le développement artistique et culturel au Canada afin que les Canadiens puissent communiquer les uns avec les autres.

M. Deepak Obhrai: Mes propos vont dans le sens inverse. Vous dites que notre marché est ouvert. Je suis tout à fait d'accord avec vous. Mais ce que je dis, moi, c'est que les artistes et les établissements canadiens doivent pouvoir participer à la scène internationale et promouvoir la culture canadienne. Il faut donner l'accès dans l'autre direction, pas dans celle-là.

M. Garry Neil: Les artistes canadiens sont de taille à faire concurrence à n'importe qui. Prenez le monde de l'édition, par exemple. Nous sommes tous heureux du succès international que remportent Margaret Atwood, Michael Ondaatje, Carol Shields, Robertson Davies et Rohinton Mistry. Et je pourrais en nommer bien d'autres. Bon nombre de nos artistes se sont acquis une renommée internationale. En fait, nous espérons tous, dans notre secteur, qu'il y en ait davantage. Les producteurs canadiens d'émissions de télévision ont maintenant leur place sur le marché international.

Mais ce qui m'inquiète, c'est la relève, la génération d'artistes qui viendra après Margaret Atwood et Robertson Davies. Margaret Atwood, Robertson Davies et Mordecai Richler ont tous pu compter sur une industrie canadienne de l'édition qui était suffisamment forte pour prendre le risque de publier le recueil de poésies de Margaret Atwood.

Michael Ondaatje a d'abord écrit de la poésie. Son premier livre s'est peut-être vendu à 75 exemplaires. Il n'est pas devenu une vedette internationale du jour au lendemain. Il a pu développer son talent grâce à des éditeurs canadiens qui ont eux-mêmes grandement profité du financement offert par le Conseil des arts du Canada, de programmes d'édition et de restrictions sur la propriété étrangère. À l'heure actuelle, nous sommes en train de perdre au Canada notre capacité de créer une autre génération de vedettes internationales.

• 1150

Pour réussir sur la scène internationale, il faut que le Canada soit en mesure de prendre des risques, car c'est à partir de tous ces essais et tentatives que se dégagera la prochaine génération de vedettes.

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): Merci, monsieur Obhrai. Nous vous laisserons de nouveau la parole plus tard si c'est possible.

Madame Tremblay.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Mitis, BQ): Je m'excuse d'être arrivée en retard. Merci pour les présentations.

C'est un peu confus dans ma tête. Ce n'est pas parce qu'on est un Canadien et qu'on va chanter des «tunes» américaines en Angleterre qu'on transporte la culture canadienne. Je regrette, mais je ne marche pas là-dedans. Il faudrait qu'on arrive à savoir ce qui nous distingue des Américains et ce qui fait qu'on est Canadiens ou qu'on ne l'est pas. Cela m'apparaît important. Ce n'est pas parce qu'on est exotiques et qu'on chante dans les deux langues qu'on est la vedette la plus internationale du monde et qu'on reflète la culture canadienne. J'ai beaucoup de misère avec cela.

Plus j'entends parler de ce dossier de la protection culturelle, plus je sens le bulldozer prêt à nous passer dessus. Ils n'ont pas du tout la même notion de la culture que nous.

Quand on essaie de s'asseoir et de dire qu'on va définir la culture, on nous dit: On ne touchera pas à cela. Il y a autant de définitions qu'il y a de personnes. Si on prend une éternité pour définir ce que c'est, on n'arrivera jamais à la protéger.

Où va-t-on commencer? Ne vaudrait-il pas mieux essayer, au lieu de perdre notre temps dans des négociations... Quand je regarde toute l'encre qui a coulé pour Kyoto et ce qui va en sortir, toute l'encre qui coule pour l'AMI et ce qui va en sortir—il n'y aura peut-être rien qui va nous protéger vraiment—, je pense qu'il vaudrait peut-être mieux travailler à des accords bilatéraux tout de suite. Ne ferait-on pas mieux de commencer par se protéger d'un pays à la fois et de dire: Bon, si tu nous protèges, on te protège. On peut ainsi faire des échanges au lieu de perdre notre temps à faire une négociation avec 29 ou 30 pays. Ils n'ont pas le même objectif, et on nous l'a dit. Les gens de la business ne pensent qu'aux jobs et à la croissance économique. Si cela ne protège pas la culture, ce n'est pas leur problème. Si cela crée des jobs et contribue à la croissance économique, ils sont d'accord.

Finalement, que doit-on faire si on veut être totalement certains d'être mieux protégés? Si on avait été aussi bien protégés qu'on nous l'avait dit, on n'aurait pas perdu dans le cas des magazines.

M. Ivan Bernier: Je pense que la stratégie bilatérale à laquelle vous faites allusion en est une qui est déjà en place et qui donne des résultats dans des secteurs comme l'investissement et aussi au plan des accords bilatéraux de libre-échange.

Mais l'État qui constitue la menace, c'est les États-Unis. Ce sont eux qui refusent. Donc, on peut multiplier les accords bilatéraux, et cela devient intéressant parce qu'on peut constater une acceptation d'une clause d'exemption culturelle de la part de pratiquement tous les autres pays. Il n'y a pas de résistance majeure qui se manifeste, sauf aux États-Unis ou dans certains pays qui, comme le Japon ou le Mexique, ont des intérêts particulièrement identifiés dans le domaine du cinéma et veulent avoir eux-mêmes un accès large pour leurs propres productions.

Cela dit, je pense que c'est quand même une stratégie qui a son mérite, parce que cela permet de voir jusqu'à quel point on peut aller. Plus il y aura d'États qui accepteront de s'engager, plus cela permettra de comprendre cette situation. Mais, ultimement, le problème restera toujours celui de la pénétration, d'abord et avant tout, de la production américaine. Dans la plupart des cas, c'est le problème.

Il y a deux aspects à cela. Le premier est d'essayer d'obtenir suffisamment de protection pour dire qu'on peut continuer à avoir une production dynamique et viable au Canada. Le deuxième, et c'est peut-être une autre optique, est de travailler à favoriser la diversité culturelle. Si on avait davantage de production diversifiée d'un peu partout dans le monde plutôt qu'une production en majeure partie américaine, on n'aurait pas du tout les mêmes problèmes. Je pense qu'au plan de la création canadienne, ce serait plus bénéfique. L'idée de base n'est pas d'empêcher la pénétration des produits culturels étrangers, mais d'empêcher la domination complète d'une production culturelle particulière.

C'est là-dessus qu'il faut continuer à se battre à pratiquement tous les niveaux. Ce n'est peut-être pas une réponse parfaite. Je pense qu'il n'y a pas de niveau où on peut laisser tomber à l'heure actuelle. C'est pourquoi j'ai insisté plus tôt sur l'exception culturelle, qui semble à peu près impossible à faire avaler à nos amis américains. Il faut continuer de se battre parce qu'il n'est pas impossible qu'il y ait un soutien qui croisse en faveur de cela.

• 1155

Mme Suzanne Tremblay: Si on y arrive vraiment, que va-t-on faire face aux Américains? Ils aiment un film. Ils ne prendront pas le film français, mais vont plutôt faire un remake américain qui sera un navet total. Quand on regarde ce qu'ils ont fait avec Trois hommes et un couffin, cela n'avait aucune mesure. Mais comment peut-on faire en sorte de ne pas être accusés si on empêche les trucs américains, si on dit, par exemple, qu'on adopte un règlement édictant qu'il y aura dorénavant un maximum de 20 p. 100 de production américaine qui entrera au Canada, parce qu'on veut donner 30 p. 100 au reste du monde et 50 p. 100 aux Canadiens? Pourrait-on décider quelque chose comme cela?

M. Ivan Bernier: Il y aurait un problème majeur. Mais si on décidait d'intervenir avec de l'aide pour favoriser la pénétration de produits diversifiés, je pense que cela pourrait graduellement modifier un peu la situation.

En ce qui concerne les États-Unis, vous soulevez un problème qui est assez intéressant, qui est celui du comportement des États-Unis eux-mêmes dans ce domaine-là. Dans le domaine du cinéma, c'est clair que les «majors» contrôlent le marché. C'est une intégration verticale. Les producteurs indépendants américains souffrent des mêmes problèmes que nous essentiellement. Ils sont exclus de leurs propres marchés.

Une stratégie sur laquelle il faudrait travailler serait de créer un réseau mettant en relation les producteurs indépendants au Canada, aux États-Unis et ailleurs dans le monde, et de développer vraiment des liens qui permettraient d'avoir autre chose.

Les États-Unis, dans le domaine de l'automobile, et je mentionne cela souvent, attaquent le Japon sur la base de ce qu'ils appellent les «empêchements structurels» ou les «structural impediments». Ils n'opposent pas d'obstacles formels au Japon, mais ils trouvent que le consommateur japonais n'achète pas assez de produits américains. la structuration de l'économie est ainsi faite. Le résultat est qu'ils surveillent très étroitement le comportement du Japon.

Je pense qu'on ne surveille pas assez étroitement ce qui se passe aux États-Unis et qu'on ne dit pas assez ouvertement qu'il y a certaines formes d'atteinte à la concurrence qui ont cours là-bas et qu'il faudrait surveiller, parce qu'elles ont des impacts chez nous et ailleurs.

Mme Suzanne Tremblay: Juste une petite question...

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): Madame Tremblay, je m'excuse. On reviendra plus tard.

Mme Suzanne Tremblay: Très bien.

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): Madame Lill.

[Traduction]

Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): Voilà plusieurs mois que j'écoute les discussions sur l'AMI et c'est tout cet accord qui m'inquiète. Je sais que nous essayons d'obtenir une exemption pour le domaine de la culture, mais personne ne semble très satisfait de ce qui s'est fait jusqu'à présent; personne ne semble croire qu'il puisse y avoir une exemption suffisamment solide ou suffisamment adroitement conçue pour résister aux pressions qui se présenteront.

C'est de cela que j'aimerais parler. L'AMI est une idée préconisée par les multinationales et les investisseurs internationaux. Le but visé est d'aplanir le marché et de libéraliser les mouvements de capitaux. Toute exception, aussi forte soit-elle, constituera une entrave et sera éliminée.

Parlons maintenant des possibilité de contestation. Je vous avoue d'emblée que je doute de la puissance que pourrait avoir une exception. Je m'inquiète également de la durée de cet accord. C'est un accord de 20 ans. Dans quel engrenage allons-nous mettre le doigt? À l'heure actuelle, la société Esso poursuit le gouvernement fédéral devant les tribunaux parce que ce dernier essaie d'empêcher l'entrée au Canada de certains additifs. La société Esso poursuit notre gouvernement parce qu'elle n'est pas en mesure d'exploiter financièrement notre marché. Quelle idée horrible, de penser que notre gouvernement ne peut prendre une décision en matière d'environnement parce qu'une entreprise essaie de faire des profits sur notre marché.

Ce n'est qu'un exemple illustrant le fait que les sociétés disposent de toutes sortes de moyens pour contourner toute exception que nous pourrions faire ajouter à l'accord. Si nous signons cet accord après avoir fait adopter des mesures que nous estimons inattaquables dans le domaine de la culture, que se produit-il ensuite si quelqu'un les conteste? Que pourront faire les Canadiens? Les parlementaires qui sont ici auront-ils leur mot à dire? Que pourront faire le Parlement et notre premier ministre? Qui négociera pour décider ce que Cineplex a le droit de faire? Je m'inquiète de la durée de cet accord, des contestations possibles, etc.

• 1200

M. Keith Kelly: Ce qui est très clair, dans l'accord, c'est qu'on ne peut porter atteinte à l'essentiel. Si quelqu'un en appelle de mesures prises par d'autres États signataires, dans quelque domaine que ce soit, le mécanisme de résolution des différends débouche sur des décisions définitives contre lesquelles il n'existe pas de recours. Je suppose que cela n'augmente pas beaucoup votre confiance dans cet accord.

L'intention ultime du...

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): Excusez-moi de vous interrompre, mais on nous a dit hier qu'il pourrait y avoir un vote à 12 h 30. Nous allons nous informer, mais rappelez-vous que la sonnerie pourrait se faire entendre et que nous devrons peut-être partir.

Une voix: La sonnerie sera pour 12 h 15, le vote aura lieu dans 15 minutes.

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): Pouvons-nous vérifier cela?

Une voix: Tout à fait.

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): D'accord, continuez.

Mme Wendy Lill: De quel mécanisme de contrôle la population ou les membres du gouvernement peuvent-ils se prévaloir à l'heure actuelle?

M. Keith Kelly: Pratiquement aucun. Nous pouvons nous défendre par le moyen du mécanisme de résolution des différends... oh oui, je me rappelle ce que j'allais dire.

Le but ultime de l'accord multilatéral sur l'investissement est son intégration au cadre de l'OMC. Durant les négociations d'Uruguay, on a discuté de mesures concernant les investissements et liées au commerce, mesures qui visaient un accord très général comme celui de l'AMI. Le tiers monde s'est opposé à ces mesures. Ces pays estimaient qu'en signant cet accord, ils se limitaient à tout jamais à des économies coloniales. Ils ont toutefois consenti à un ensemble de mesures plus restreintes que ce que souhaitent les pays industrialisés. C'est pourquoi les pays développés ont décidé d'élaborer cet accord d'abord auprès de l'OCDE, pour essayer plus tard de l'intégrer à l'OMC. J'estime néanmoins qu'ils auront beaucoup de difficulté à atteindre leurs fins.

On pourrait dire de l'AMI qu'il s'agit en fait... Yvan peut peut-être nous en dire davantage. Pourrait-on dire qu'il s'agit d'un accord régional sous l'égide de l'OMC?

M. Yvan Bernier: L'AMI de l'OCDE?

M. Keith Kelly: Oui.

M. Yvan Bernier: C'est un accord régional, mais qui touche une vaste région. Cet accord touche de nombreux pays de diverses régions du globe, mais il ne s'agit pas d'un accord multilatéral comme le sont les accords de l'OMC.

M. Keith Kelly: Donc, même si on dit dans l'accord qu'il n'existe pas de mécanisme d'appel, l'OMC se trouve néanmoins au sommet de la pyramide, d'après la hiérarchie des accords commerciaux. Il y a peut-être là-dedans des dispositions à cet égard, mais vous devrez poser la question aux experts techniques.

M. Garry Neil: Puis-je ajouter quelque chose?

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): Soyez bref, monsieur Neil, puisqu'il est 12 h 15.

M. Keith Kelly: D'accord.

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): Nous allons maintenant interrompre la séance. Chers collègues, voulez-vous revenir après le vote, ou bien...

Une voix: Nous avons encore 10 minutes.

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): Le vote aura lieu à 12 h 15, ce qui nous laisse environ cinq minutes.

Monsieur Neil, brièvement.

M. Garry Neil: Je serai très bref. J'estime qu'il faut mettre au point une exception beaucoup plus rigoureuse que ce que nous avons vu jusqu'à maintenant. Ce qu'il faut surtout, c'est une exemption très générale. Elle doit être plus générale que celle de l'ALÉNA, puisque l'exception que l'on trouve dans cet accord ne s'applique pas aux arts de la scène, aux arts visuels et aux métiers d'arts. Cette exception doit être définissable par elle-même. En fin de compte, les nations doivent être capables de décider elles-mêmes ce qui relève ou non du domaine de la culture.

Il importe également qu'un groupe d'experts puisse prendre ces décisions dans chaque pays. Si vous lisez l'accord, vous y trouverez toutes sortes de règles spéciales à l'égard des services financiers, et il est possible de constituer un groupe d'experts dans ce domaine pour traiter les appels. Il me semble qu'une mesure de ce genre devrait être incluse dans toute exception, quelle qu'elle soit.

Ce qui me préoccupe le plus, c'est l'avenir. Nous pouvons définir quelles seront les formes de l'expression culturelle en 1997, mais nous ne pouvons en faire autant pour le prochain millénaire, de par la nature même de l'expression culturelle.

• 1205

C'est pourquoi je ne suis pas d'accord lorsqu'on dit qu'il est possible d'établir la liste des industries et des formes d'expression qui existent maintenant et croire que la culture sera protégée à l'avenir, car nous ne savons pas ce que créeront les artistes en 2020. À moins d'avoir mis en place des dispositions suffisamment générales, nous ne pourrons pas prendre de mesures dans ces domaines en 2020.

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): Chers collègues, si vous le permettez, je soumets qu'il y a de nombreux éléments dans tout cela et que, lorsque nous reprendrons nos travaux en février, nous pourrions inviter de nouveau ces témoins à venir nous rencontrer.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay: Monsieur le président, juste une petite chose. J'avais exprimé le désir qu'on nous compare les ententes les unes par rapport aux autres pour qu'on sache ce qu'il y a dans l'ALENA et dans l'OMC en ce qui concerne la culture, parce qu'à chaque fois qu'on rencontre un groupe, ils nous apprennent un petit détail qu'on ne savait pas.

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): On nous dit qu'un représentant du ministère des Affaires étrangères s'occupe de cela et qu'on devrait l'avoir pour la rentrée en février.

Mme Suzanne Tremblay: Parfait. Merci.

[Traduction]

Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Si nous entendons le même groupe de témoins, il faudrait peut-être distribuer le document de M. Neil à tous les membres du comité avant la prochaine séance de février, puisqu'on y donne un magnifique résumé de l'AMI. Le document passe en revue tous les éléments et fournit d'excellents renseignements.

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): M. Neil a accepté de distribuer son document.

[Français]

Monsieur Bernier, avez-vous un document?

M. Ivan Bernier: Oui, je vais vous laisser un document, mais il y a un document plus substantiel, qui est un chapitre d'un livre qui doit sortir.

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): Je ne veux pas vous faire devancer la parution du livre, mais accepteriez-vous de partager ce chapitre?

M. Ivan Bernier: Moi, je veux bien vous le laisser, mais mon éditeur... Vous mettrez, disons, pour reproduction.

[Traduction]

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): Il nous faut prendre une minute pour traiter une question d'administration. Pour que nous puissions continuer nos travaux, il nous faut obtenir des crédits pour inviter des témoins et payer leurs déplacements. Si les membres du comité sont d'accord, je suis prêt à recevoir une motion demandant des crédits de 32 000 $.

Mme Sarmite Bulte: Je propose la motion.

[Français]

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): Mme Bulte, appuyée par Mme Tremblay, en fait la proposition.

[Traduction]

Il s'agit de 25 000 $, pour environ 50 témoins, 2 000 $ pour les vidéoconférences et 5 000 $ pour les services d'experts-conseils dont nous pourrions avoir besoin. Nous présenterons cette demande aux autorités compétentes.

[Français]

Y a-t-il des questions là-dessus? Tout le monde est d'accord?

    (La motion est adoptée)

[Traduction]

M. Joe Jordan (Leeds—Grenville, Lib.): Permettez-moi d'aborder une question de procédure. J'ai écrit une lettre à notre greffier demandant que soit invité, lorsque nous ferons une table ronde, un petit éditeur indépendant de ma circonscription. Il pourrait nous faire part d'un point de vue intéressant quant à la relation entre le niveau...

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): Nous soumettrons la chose au comité de direction.

M. Joe Jordan: Oui. J'ai envoyé la lettre. Je voulais simplement le signaler.

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): Dernière question.

Mme Wendy Lill: Pourrions-nous avoir copie du rapport du sous-comité sur l'AMI, de façon à avoir également cet aperçu de l'accord...

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): Nous nous en occuperons. Lorsqu'il sera déposé, le greffier en distribuera aux membres du comité, que le Parlement siège ou non.

Mme Wendy Lill: Quand sera-t-il déposé? Bientôt?

[Français]

Le vice-président (M. Mauril Bélanger): Joyeux Noël à tous.

La séance est levée.