FAIT Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE
COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 2 décembre 1997
[Traduction]
Le vice-président (M. Bob Mills (Red Deer, Réf.)): La séance est ouverte.
Je constate que la plupart des Libéraux se sont installés à l'autre bout de la table; j'imagine que c'est parce que c'est moi qui préside la séance. Je voulais seulement le signaler.
Permettez-moi de souhaiter la bienvenue à nos invités. Je crois savoir que trois témoins vont nous brosser un tableau de la situation. Je vous invite à être le plus bref possible, ce qui permettra aux membres du comité de faire ce qui les intéresse le plus: vous poser des questions sur le dossier algérien. Plus vous serez brefs, plus il y aura de questions.
• 0910
Nous allons commencer par M. Frenette, je crois.
[Français]
M. Michel Frenette (directeur, Amnistie internationale): Bonjour à tous. Je m'appelle Michel Frenette et je suis le directeur général de la section canadienne francophone d'Amnistie internationale.
Comme vous le savez, le 24 octobre dernier, plusieurs organisations adressaient une lettre commune au ministre des Affaires étrangères demandant que le Canada milite en faveur de la tenue d'une session spéciale de la Commission des droits de l'homme des Nations unies devant permettre l'envoi d'une mission d'enquête internationale en Algérie.
La Ligue des droits et des libertés ainsi qu'Amnistie internationale s'étaient faites les promoteurs de cette démarche, répercutant ainsi au plan canadien l'appel conjoint lancé en ce sens une semaine plus tôt à Paris par Amnistie internationale, la Fédération internationale des droits de l'homme, Human Rights Watch et Reporters sans frontières.
Pourquoi une telle mobilisation et pourquoi surtout une telle demande? La réponse est très simple. C'est parce que la violence qui s'abat sur la population civile algérienne a atteint un seuil intolérable et que pourtant, au même moment, cette population se voit de plus en plus abandonner à elle-même, tant par son propre gouvernement que par le monde entier.
Il faut se rappeler en effet qu'aucun mécanisme de l'ONU spécialisé dans les droits humains n'est intervenu en Algérie au cours des six dernières années. Pendant ce temps-là, 80 000 personnes ont été tuées. Ce que nous disons aujourd'hui, c'est que cela suffit, que ça ne peut plus continuer et que s'il est vrai que les droits humains n'ont pas de frontières, la communauté internationale, en commençant par le Canada, doit agir sans plus tarder.
Il y a deux semaines aujourd'hui même, Amnistie internationale lançait à New York son plus récent rapport sur l'Algérie, le sixième consacré à ce pays depuis 1993. Il montre comment la population civile, prise entre la terreur des groupes islamistes armés et les violations commises par les forces de sécurité, se voit de moins en moins protégée, d'autant plus qu'elle se trouve dans un contexte où l'état de droit s'affaiblit et où les autorités algériennes s'efforcent d'ériger un mur de silence pour dissimuler le véritable état de crise des droits de la personne.
Les groupes islamistes armés tuent des civils de manière délibérée et arbitraire, avec une sauvagerie sans cesse accrue. Au cours des premières années du conflit, ils s'attaquaient aux membres des forces de sécurité et à leurs proches, puis à des groupes ciblés tels que les enseignants, les journalistes et les femmes professionnelles. Des homicides, ils sont passés aux attentats et à l'explosif, tuant alors sans discrimination.
Enfin, plus récemment, ce furent les massacres: Sidi Raïs, 300 victimes; Sidi Youssef, 60; Bentalha, 200; on a massacré en grand nombre des femmes, des enfants, des vieillards et même des bébés même. Ces tueries qui durent quelquefois durant des heures ont lieu dans des zones hautement militarisées, car la population qui y habite est traditionnellement favorable au Front islamique du salut.
Dans bien des cas, il est établi que l'armée et les forces de sécurité étaient stationnées à proximité des villages et qu'elles avaient largement le temps d'intervenir pour mettre un terme aux atrocités et appréhender les assaillants. Jamais elles ne l'ont fait. Doit-on porter foi à certains témoignages laissant entendre que les groupes armés qui se livrent aux massacres opèrent parfois de concert avec certaines unités de l'armée ou des forces de sécurité, ou du moins qu'ils agissent avec leur consentement? La question reste posée du point de vue d'Amnistie internationale.
Chose certaine, la réticence ou l'incapacité de l'armée et des forces de sécurité à protéger la population civile et l'absence complète d'enquêtes sur ces tueries s'avèrent des plus troublantes. Le gouvernement algérien continue d'affirmer qu'il contrôle la situation du point de vue de la sécurité et que la violence n'est que résiduelle. Plus que jamais on peut douter de la véracité de ces affirmations.
• 0915
La preuve en est d'ailleurs que depuis 1995, les
autorités ont encouragé la population civile à prendre
les armes et à s'organiser en milices. Ces milices, qui
participent souvent à des opérations militaires de
grande ampleur, se livrent elles-mêmes à des exactions
pour exercer leur contrôle sur les populations.
C'est comme ça qu'on voit des groupes d'individus
recrutés sur la base de critères arbitraires qui
agissent en dehors du cadre de la loi, sans la
formation ni la supervision nécessaires. Cette
privatisation du conflit représente un recul certain de
l'état de droit.
Au cours des dernières années, un climat d'anarchie et d'impunité s'est installé. L'appareil judiciaire n'a que peu de contrôle sur les différentes branches des forces de sécurité. Étant donné qu'aucune enquête n'est effectuée sur les violations des droits fondamentaux et que leurs auteurs ne sont pas déférés à la justice, les membres des forces de sécurité savent qu'ils n'auront pas à rendre compte de leurs agissements. Conséquemment, les violations se multiplient. On parle ici de trois types de violations.
Il y a d'abord les disparitions, pour lesquelles, depuis 1994, Amnistie a recueilli des informations fiables sur des centaines de cas.
Alors que la loi algérienne permet le maintien en garde à vue pendant 12 jours, dans la pratique, les personnes arrêtées sont maintenues en détention secrète pendant des semaines ou des mois, en dehors de tout cadre juridique. Privées de tout contact avec l'extérieur, elles sont gardées dans des centres de détention secrets. Pendant cette période de détention au secret, le recours à la torture devient une pratique courante. Au cours des cinq dernières années, Amnistie internationale a soumis aux autorités algériennes plusieurs centaines de cas de détenus qui se plaignaient d'avoir été torturés en leur demandant de veiller à ce que des enquêtes soient effectuées. À la connaissance de l'organisation, aucune information judiciaire n'a été ouverte.
Enfin, il y a les exécutions extrajudiciaires pour tous ceux qu'on ne prend plus la peine d'arrêter et de juger. Le fait qu'Amnistie ait soumis des centaines de cas aux autorités algériennes démontre qu'il s'agit de pratiques bien établies et non d'incidents isolés d'abus de pouvoir, comme l'affirment les autorités algériennes.
Aux demandes d'Amnistie, les autorités ont toujours opposé le silence, un silence d'ailleurs renforcé par toutes les restrictions qu'elles imposent à la collecte des informations et à leur diffusion. Un décret publié en juin 1994 par le ministre de l'Intérieur donne des instructions aux rédacteurs en chef des journaux à propos de ce qu'ils peuvent publier et de la manière de présenter l'information. Et si cela n'est pas suffisant, des pressions financières sont utilisées pour restreindre la liberté de presse.
L'assassinat de plus de 60 journalistes et travailleurs des médias entre 1993 et 1996, plus que dans tout autre pays d'ailleurs, a dissuadé beaucoup de journalistes étrangers de venir en Algérie. Parmi ceux qui souhaitaient quand même s'y rendre, plusieurs n'ont pu obtenir de visa ou, au nom de leur soi-disant protection, se sont vu imposer des mesures de surveillance.
Les organisations algériennes de défense des droits humains ne sont plus en mesure de recueillir des informations, d'effectuer des recherches et de mener des enquêtes appropriées. Menaces de mort, harcèlement des militants, arrestations et interdiction de réunion ont paralysé ces organisations. Pour les organisations internationales de défense des droits humains, l'accès au territoire algérien est lui aussi aléatoire. Ainsi, depuis le début de 1997, Amnistie s'est vu refuser cet accès. La dernière fois que le CICR a envoyé des délégués en Algérie remonte à 1992.
Conséquemment, la crise des droits humains que traverse l'Algérie est entourée d'un mur de silence. C'est pourquoi nous croyons que l'ouverture d'une enquête indépendante et impartiale, qui ferait la lumière sur les crimes commis et qui établirait les responsabilités, constitue le premier pas pour sortir du cycle infernal des violations des droits humains en Algérie.
• 0920
Les autorités algériennes, qui ne se privent pas de
demander à la communauté internationale son soutien
dans la lutte au terrorisme, se cachent derrière les
prétextes de la souveraineté et de la non-ingérence lorsqu'il
s'agit de rendre compte de la situation.
Les droits fondamentaux ne peuvent être considérés
comme une simple affaire intérieure. Et nul État, pas
plus l'Algérie que les autres, ne peut s'arroger le
droit de laisser une population livrée à elle-même
subir des carnages au nom de la non-ingérence.
En ratifiant les traités internationaux relatifs aux
droits humains, l'État algérien a déjà admis que ces
droits n'ont pas de frontières.
Je fais donc appel à vous pour appuyer la demande adressée au ministre des Affaires étrangères voulant que le Canada intervienne activement en faveur de la mise sur pied d'une mission d'enquête internationale sous l'égide des Nations unies.
Je vous remercie.
[Traduction]
Le vice-président (M. Bob Mills): Merci beaucoup.
Je crois que nous allons entendre les trois témoins, puis nous passerons aux questions. Nous entendrons maintenant M. André Paradis.
[Français]
M. André Paradis (chargé de projets, Algérie, Ligue des droits et libertés): Bonjour. Je m'appelle André Paradis et je suis chargé de projets sur l'Algérie à la Ligue des droits et libertés.
C'est à titre de membre de la Fédération internationale des droits de l'homme que la Ligue des droits et libertés intervient dans le dossier de l'Algérie. La Fédération internationale des droits de l'homme regroupe une centaine d'organisations nationales de défense des droits de l'homme dans toutes les régions du monde et compte parmi ses membres deux organisations algériennes.
La Fédération internationale suit l'évolution de la situation en ce qui a trait aux droits humains en Algérie depuis longtemps, et ce avec particulièrement d'attention depuis le début de la crise en 1992. Elle a fait au sujet de cette crise de nombreuses interventions, autant auprès de l'opinion publique internationale qu'auprès des instances de l'ONU, de l'OUA et du gouvernement algérien.
La position de la Fédération internationale a toujours été de condamner sans réserve le terrorisme des groupes intégristes, mais aussi de dire que la réponse appropriée ne saurait être celle d'un terrorisme d'État, car seul un État de droit, respectueux des droits de l'homme, est capable de stopper le mouvement de haine des groupes intégristes armés et autres extrémistes algériens.
La position de la Fédération internationale a toujours été aussi d'essayer d'empêcher l'isolement de la société algérienne devenue l'otage des groupes extrémistes minoritaires.
C'est en raison de ces positions de base que la Fédération internationale s'est alliée avec Amnistie internationale, Human Rights Watch, Reporters sans frontières et l'Organisation mondiale contre la torture au cours de ces derniers mois pour demander la tenue d'une session extraordinaire de la Commission des droits de l'homme de l'ONU sur l'Algérie et la création d'une commission internationale d'enquête sur les violations des droits fondamentaux dans ce pays.
La Fédération internationale, comme Amnistie internationale et les autres grandes organisations internationales de droits, est en effet devenue convaincue que seules les mesures concrètes prises par la communauté internationale sont capables d'arrêter l'engrenage et la violence et d'assurer la protection de la population civile algérienne.
Cet engrenage de la violence s'est accéléré et accentué au cours de la dernière année, et même dans les derniers mois, avec de nombreux massacres qui se disputent l'horreur et la barbarie et qui ont touché des milliers et même des dizaines de milliers de personnes.
Non seulement les autorités algériennes se sont-elles montrées incapables d'empêcher la multiplication de ces massacres des populations civiles, mais des soupçons persistants se sont développés dans la population algérienne touchée par ces massacres et parmi de nombreux observateurs de la situation algérienne quant au laissez-faire délibéré de la part des forces de l'ordre en ce qui a trait à ces massacres.
Au printemps dernier, suite à une mission d'enquête sur l'administration de la justice en Algérie, mission dirigée par le président même de la Fédération internationale des droits de l'homme, la Fédération avait conclu à des violations graves et systématiques des droits de l'homme de la part des diverses forces de sécurité militaire de l'État algérien.
Plus précisément, la FIDH avait conclu que la sphère d'application du judiciaire est fortement restreinte au profit de l'extrajudiciaire, et d'autre part que le cadre judiciaire n'est pas synonyme de garantie des droits et libertés du justiciable.
L'extrajudiciaire renvoie aux violations les plus graves des droits de l'homme en dehors de tout cadre légal et judiciaire. Il s'agit d'actes contraires à la loi algérienne, y compris dans ses dispositions les plus répressives liées au maintien de l'État d'urgence et en vigueur depuis le 9 février 1992.
• 0925
La Fédération internationale des droits de l'homme a
pu ainsi documenter solidement les arrestations
arbitraires et détentions au secret; la pratique
systématique de la torture et des mauvais traitements à
l'encontre des membres avérés ou présumés des groupes
terroristes; les disparitions forcées dont de nombreux
cas peuvent être attribués aux forces de sécurité; les
exécutions sommaires et l'élimination physique par les
forces de sécurité de suspects ou présumés tels; les
exactions nombreuses des milices, c'est-à-dire des
gardes communaux et des groupes d'autodéfense légitimes
mis sur pied à la demande de l'État.
La Fédération internationale a aussi pu mesurer combien les garanties du système de justice étaient devenues formelles et pratiquement inopérantes dans la plupart des cas.
Les conclusions du rapport de la Fédération internationale, comme celles des autres ONG internationales des droits, montrent bien qu'au lieu de se raffermir, l'état de droit s'est considérablement affaibli au cours de la dernière année. C'est pour cette raison, parce que l'État algérien est incapable d'assurer le respect des droits les plus fondamentaux de ses citoyens et parce que ses forces de sécurité et militaires sont elles-mêmes responsables d'abus graves que le gouvernement algérien ne peut pas ou ne veut pas sanctionner, que la communauté internationale doit maintenant intervenir.
Après le secrétaire général de l'ONU, le haut-commissaire des droits de l'homme de l'ONU, la directrice de l'UNICEF et le Haut-Commissariat pour les réfugiés, c'est le premier ministre français Lionel Jospin qui déclarait il y a deux semaines à Paris: «La communauté internationale a besoin de savoir ce qui se passe en Algérie.»
Nous croyons que le Canada doit aller dans le même sens et même un peu plus loin. Nous pensons qu'il doit appuyer, au sein de l'ONU, la demande des ONG internationales pour la création d'une commission internationale d'enquête sur les violations des droits fondamentaux en Algérie, une enquête qui visera, comme l'a dit mon collègue, à établir les faits, à examiner les prétendues responsabilités et à formuler des recommandations concernant les massacres et autres abus commis par toutes les parties en conflit. C'est seulement à partir de gestes semblables qu'il sera peut-être possible d'entrevoir une solution à la crise algérienne.
Je vous remercie.
[Traduction]
Le vice-président (M. Bob Mills): Merci beaucoup.
Paul, voulez-vous prendre le relais?
M. Paul Dingledine (directeur général, Moyen-Orient et Afrique du Nord, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Je m'appelle Paul Dingledine. Je suis le directeur général du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord aux Affaires étrangères. Je suis accompagné de M. Mark Bailey, directeur pour l'Afrique du Nord, ainsi que de M. Michel Archambault, directeur général, Afrique du Nord et Moyen-Orient, à l'ACDI.
Monsieur le président, ce conflit terrible qui dure en Algérie depuis 1992 a maintenant fait plus de 60 000 victimes. Des femmes, des enfants et des personnes âgées ont été les victimes de prédilection de terroristes sans merci à l'occasion d'attaques quotidiennes contre les membres les plus faibles de la société algérienne. Les femmes en particulier ont payé un lourd prix. Ces derniers mois, la violence a atteint un sommet de cruauté. Les Canadiens sont renversés et profondément troublés par les nombreuses atrocités infligées à une population sans défense.
Le tableau précis de ce qui se passe en Algérie est obscurci par l'incapacité de la presse, aussi bien algérienne qu'étrangère, de faire le compte rendu intégral des événements qui se produisent dans ce pays. De même, la capacité de notre personnel d'ambassade d'observer et de rendre compte de la situation est gravement limitée par les inquiétudes qui entourent sa propre insécurité. Néanmoins, un certain nombre d'éléments du tableau sont incontestables.
Les terroristes connus sous le nom de Groupe islamique armé se livrent à des attaques d'une grande férocité contre la population civile. Plusieurs autres groupes d'opposition armés, notamment le Front islamique du salut, viennent de déclarer la trêve dans le but de bien isoler le GIA comme l'auteur des massacres.
Les forces de sécurité, qui comprennent l'armée, la gendarmerie et la Sûreté nationale, cherchent à neutraliser le GIA au moyen de campagnes militaires d'envergure dans les secteurs où on le sait actif, mais elles sont loin d'avoir réalisé leur objectif. Les autorités disposent aussi d'éléments armés dans la population civile pour que celle-ci puisse se défendre, notamment en régions rurales. Ce sont eux que l'on appelle les patriotes.
Il a été avancé—je l'ai entendu encore ce matin—que les forces de sécurité ont assisté sans intervenir à certains des massacres et que certaines unités ainsi que certains patriotes y auraient participé. Les autorités algériennes nient catégoriquement ces allégations de complicité ou de participation.
• 0930
Il a aussi été allégué que les forces de sécurité, à
l'occasion de leurs campagnes antiterroristes, ont commis des
atteintes aux droits de l'homme. Les autorités algériennes
soutiennent que lorsque ces cas leur sont signalés, elles font
enquête et interviennent et répriment les coupables.
[Français]
Le drame algérien nous touche d'autant plus que le Canada entretient de très bonnes relations avec l'Algérie. Le ministre des Affaires étrangères du Canada a écrit à son collègue algérien pour lui réitérer la condamnation totale et sans équivoque par le Canada du terrorisme et lui exprimer la profonde sympathie des Canadiens envers les victimes de cette violence horrible.
Au cours des derniers mois, le ministre Axworthy a également eu l'occasion à deux reprises de s'entretenir avec le ministre des Affaires étrangères de l'Algérie de la situation sécuritaire et humanitaire dans ce pays.
[Traduction]
En signe de solidarité avec le peuple algérien et en témoignage de notre détermination à lui venir en aide, le Canada, contrairement à certains autres pays, conserve son ambassade à Alger. De fait, nous comptons inaugurer une nouvelle chancellerie cet hiver, preuve de notre confiance à long terme dans l'avenir de l'Algérie et des Algériens.
Grâce à sa présence ininterrompue en Algérie, le Canada peut intervenir directement et apporter de l'aide humanitaire à la population, notamment les couches visées par les terroristes.
Par exemple, le Canada a participé à la reconstruction de la Maison de la presse, à Alger, après son plasticage par les terroristes. Le Canada a participé à la rénovation des garderies pour que les mères de famille puissent retourner au travail. Nous avons acheté des outils et des machines pour aider les Algériens handicapés à trouver du travail. En tout, notre ambassade a réalisé une cinquantaine de projets humanitaires au cours des deux dernières années.
Nous avons remporté un tel succès qu'un pays européen qui n'a pas d'ambassade à Alger a récemment communiqué avec nous pour demander à l'ambassade canadienne de réaliser à son compte des projets semblables dans ce pays.
Notre présence diplomatique en Algérie nous permet d'entretenir un dialogue ouvert et continu avec les autorités. Elles savent que la question de la sécurité et des droits de l'homme dans leur pays occupe la pensée de notre gouvernement et de nos concitoyens.
Le ministre Axworthy a fait état de ces préoccupations dans l'allocution consacrée aux droits de l'homme qu'il a prononcée récemment à l'Université d'Ottawa. Il en a également été question dans l'intervention du Canada sur les droits de l'homme à l'Assemblée générale de l'ONU.
Pour ma part, la semaine dernière, j'ai convoqué l'ambassadeur de l'Algérie au ministère pour discuter de certaines questions qui nous préoccupent. Notre ambassadeur à Alger soulève également ces questions lors de ses rencontres quotidiennes auprès des autorités algériennes. Nous sommes d'avis qu'en définitive la solution à ces problèmes de sécurité et de droits de l'homme réside dans la consolidation de l'état de droit et de la réforme en profondeur du régime politique et économique en Algérie.
En conséquence, le Canada appuie les réformes qui ont pour but d'accroître la participation des citoyens aux affaires publiques et de jeter les assises d'une croissance économique soutenue. Ce n'est que de cette façon que l'Algérie pourra résoudre les difficultés socio-économiques qui sont à l'origine des troubles actuels.
En particulier, le Canada a apporté son aide à la tenue des élections législatives de juin dernier en offrant un spécialiste des élections à l'équipe de l'ONU qui a assemblé les observateurs étrangers, puis en fournissant deux observateurs à cette équipe.
Mon collègue, Michel Archambault, vous décrira lui-même les principaux programmes de l'ACDI en Algérie; quant aux Affaires étrangères, le ministère s'emploie à aider les entreprises canadiennes à trouver des clients et des associés à des entreprises de coparticipation en Algérie, car nous sommes convaincus que le renforcement des liens commerciaux entre nos deux pays profitera à nos populations respectives. Cela contribuera à développer le secteur privé algérien, ce qui est l'objectif prioritaire de la réforme algérienne.
En résumé, monsieur le président, la position du Canada en ce qui concerne l'Algérie se compose des éléments suivants: une condamnation sans réserve des terroristes; une aide humanitaire grâce à notre ambassade à l'intention des couches de la population algérienne visées par les terroristes; et un appui aux réformes politiques et économiques actuellement en cours en Algérie.
Merci.
Le vice-président (M. Bob Mills): Merci beaucoup.
Michel, vous avez une intervention à faire, je crois.
[Français]
M. Michel Archambault (directeur général, Afrique du Nord et Moyen-Orient, Agence canadienne de développement international): Merci, monsieur le président. Je m'appelle Michel Archambault et je représente l'ACDI.
Mesdames et messieurs, j'ai fait remettre hier à la greffière de votre comité une note d'information sur le programme de l'ACDI en Algérie. Je n'entends pas la répéter ici, mais seulement prendre deux minutes pour une courte introduction portant sur la raison d'être des interventions de l'ACDI en Algérie.
• 0935
Dans son énoncé Le Canada dans le monde, le Canada
indique que la coopération au développement fait partie
intégrante de la politique étrangère canadienne.
Lorsque l'ACDI a défini avec l'Algérie un programme de
coopération, il y a eu convergence entre les deux
gouvernements pour que l'assistance canadienne
soutienne le renforcement du secteur privé en Algérie.
Ce secteur, vous le savez, est l'une des six priorités de l'ACDI qu'on retrouve dans l'énoncé de la politique étrangère. La situation particulière de l'Algérie nous laisse croire que le choix de ce secteur était le bon; d'abord parce que l'Algérie est rendue à un stade de développement où il est nécessaire que le secteur privé, par ses investissements et sa mise à niveau pour affronter la concurrence internationale, participe plus activement à la croissance du pays; ensuite parce qu'une présence plus forte et plus structurée du secteur privé favorise l'émergence d'une classe moyenne et d'une société civile plus équilibrée dans les pays en développement. En renforçant les capacités du secteur privé algérien par le transfert de technologies canadiennes là où c'est approprié et par la mise en contact des opérateurs algériens et canadiens, l'ACDI contribue à l'ouverture de l'Algérie.
De même, en cherchant à jumeler les institutions de formation professionnelle et technique algériennes et canadiennes qui doivent répondre aux besoins en ressources humaines de leur secteur privé respectif, nous allons dans le même sens: répondre aux besoins du secteur privé et participer à l'ouverture du pays. Ce projet, qui se nomme le PRICAL et dont j'ai fait mention dans la note d'information, devrait commencer bientôt.
Je serai heureux de répondre à vos questions. Merci.
[Traduction]
Le vice-président (M. Bob Mills): Merci beaucoup, messieurs. Je vais commencer par vous poser quelques questions, puis je donnerai la parole aux autres membres.
Monsieur Dingledine, j'aimerais savoir ce que vous pensez de l'idée d'une commission d'enquête spéciale, comme l'idée vient d'être proposée.
Monsieur Archambault, j'aimerais savoir comment vous pouvez réaliser les projets de l'ACDI dans les conditions qui nous ont été décrites. Cela doit être très difficile.
M. Paul Dingledine: En ce qui concerne la commission spéciale d'enquête, un éventail d'options s'offre au ministre. C'est évidemment à lui de décider.
L'une des considérations dont il faut tenir compte lorsque l'on parle d'intervention de l'étranger, c'est le fait que le gouvernement de l'Algérie a expressément rejeté l'idée d'une intervention étrangère, tout comme l'ont fait les partis d'opposition, les terroristes et d'autres éléments.
Dans ses déclarations, le ministre n'a pas rejeté l'idée d'une commission d'enquête. Tout simplement, lorsqu'il a fait observer l'absence de tout appui ou de coopération de la part du gouvernement de l'Algérie, des terroristes ou des autres partis, il s'est interrogé sur ce qu'il serait raisonnable d'attendre d'une intervention de pays étrangers dans la crise.
Le vice-président (M. Bob Mills): Merci.
Monsieur Archambault.
M. Michel Archambault: Merci. Je voulais seulement vous rappeler que les projets dont Paul a parlé dans son allocution sont réalisés par l'ambassade pour des motifs humanitaires, comme le sont ceux de l'ACDI. C'est une façon pour nous de participer de plus près à des projets dans le milieu. Toutefois, vous avez raison de dire que les deux principaux projets que j'ai décrits dans les notes d'information sont effectivement difficiles à réaliser à l'heure actuelle.
[Français]
La question de la sécurité nous préoccupe beaucoup et, bien sûr, nous ralentit parfois dans l'exécution des deux plus importants projets que nous avons, dont le Fonds de développement du secteur privé, où nous voulons mettre ensemble des opérateurs canadiens et des opérateurs algériens pour renforcer la capacité des Algériens à affronter la concurrence internationale.
• 0940
Cependant, nous pouvons encore avoir des missions
algériennes au Canada. Tout récemment, en juin
si ma mémoire m'est fidèle, une mission composée d'une
quinzaine d'opérateurs canadiens s'est rendue à Annaba,
une région qui est moins touchée par la
violence. Cela nous pose des problèmes de sécurité.
Nous continuons cependant à oeuvrer avec le
gouvernement algérien pour surmonter ces questions et
nous faisons de notre mieux pour protéger la
vie des Canadiens et pour ne pas les mettre en danger,
tout en continuant cette ouverture qu'entretiennent les
opérateurs canadiens et algériens. Merci.
[Traduction]
Le vice-président (M. Bob Mills): Monsieur Turp.
[Français]
M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Messieurs, madame, merci beaucoup de vous être présentés devant le comité. C'était une intervention que le Bloc québécois souhaitait; nous souhaitions que le comité soit saisi de cette question pour que nous puissions en débattre en ayant en main des informations de la part des ONG et de la part du gouvernement canadien.
Nous avons à plusieurs reprises soulevé cette question à la Chambre des communes depuis le début de ses travaux, le 22 septembre. J'ai à plusieurs reprises parlé à M. Axworthy, le ministre, de cette question qui nous préoccupe beaucoup.
Et les autorités algériennes savent qu'elle nous préoccupe parce que l'ambassadeur a demandé à nous rencontrer la semaine dernière. C'est ce que nous avons fait. Mme Debien et moi avons rencontré l'ambassadeur et un de ses conseillers, qui nous ont présenté les vues du gouvernement algérien sur la question. Il y a un certain nombre de questions que je souhaite vous poser.
D'abord, je m'adresserai au représentant des organisations gouvernementales. J'aimerais que vous établissiez les faits, si vous êtes en mesure de le faire. Une des questions qui étaient débattues avec l'ambassadeur, c'était la responsabilité du gouvernement dans les massacres directs ou indirects et sa responsabilité à l'égard d'autres violations des droits de la personne.
Comme l'a dit le représentant des Affaires étrangères, l'ambassadeur, comme les représentants de son État, se défend bien de participer d'une quelconque façon à ces massacres. J'aimerais savoir si vos organisations sont en mesure d'établir une relation entre les massacres qui ont eu lieu jusqu'à présent et le gouvernement ou ses agents, et dans quelle mesure cette question pose un problème qui justifierait une enquête internationale.
J'aimerais que vous distinguiez la question des massacres de celle des autres atteintes aux droits de l'homme, parce que l'accent est beaucoup mis sur les massacres, alors que d'autres violations des droits de la personne sont évoquées dans vos rapports et dans les rapports d'autres organisations non gouvernementales.
J'aimerais aussi savoir de la part des ONG si les autres sections d'Amnistie internationale ou de la Fédération internationale des droits de l'homme font des démarches analogues auprès de la France et des États-Unis, qui sont deux joueurs clés et qui pourraient jouer un rôle important lorsqu'il s'agira ou non de permettre à la Commission des droits de l'homme d'établir une commission d'enquête.
Au représentant du gouvernement, j'adresserai deux questions. J'aimerais savoir ce que vous savez et si vous avez des renseignements sur le rôle que jouent les militaires dans la vie publique algérienne et leurs impact et influence au sein du gouvernement, s'il en est une.
J'aimerais savoir, parce que M. Axworthy m'a dit la semaine dernière qu'on lui avait conseillé lors de son voyage au Moyen-Orient de ne pas toucher à l'Algérie, si à défaut d'accepter l'idée d'une commission internationale d'enquête pour les motifs que vous avez signalés, il ne serait pas intéressant que le ministre, comme il l'a fait pour d'autres choses, fasse comme l'on fait en Europe et envoie une délégation de parlementaires canadiens de notre Chambre des communes en Algérie pour qu'une enquête soit faite de cette façon-là.
Voilà mes questions, monsieur le président.
[Traduction]
Le vice-président (M. Bob Mills): Qui veut y aller? Allez-y, Michel.
[Français]
M. Michel Frenette: Comme vous avez pu le constater tout à l'heure lors de mon bref exposé, Amnistie internationale n'a jamais affirmé de façon nette qu'il y avait une collusion certaine entre l'armée ou les forces de sécurité et les auteurs des massacres. Ce n'est pas établi. Plusieurs témoignages laissent supposer cela, mais à ce jour, il n'y a aucune preuve à cet effet.
Cependant, ce qui est établi de façon absolument certaine, c'est qu'il y a un certain lien indirect au sens où il est très clair que dans beaucoup de cas, l'armée était en mesure d'intervenir et ne l'a pas fait. Pourquoi ne l'a-t-elle pas fait?
Nous aussi avons rencontré l'ambassadeur d'Algérie la semaine dernière, et il a fait valoir toutes sortes d'arguments, dont l'étendue du territoire et la difficulté de circuler. Aucun de ses arguments n'a su nous convaincre. On sait très bien, et cela est documenté dans le rapport d'Amnistie, qu'il y a des cas précis où des forces suffisantes étaient situées à proximité. Ce qu'on est obligés de constater, c'est qu'il y a eu un refus d'intervenir. Sur quoi se base ce refus d'intervenir? La seule lecture qu'on est mesure de faire actuellement, c'est qu'on constate que les populations qui ont été victimes de ces massacres étaient des populations qui appuyaient le Front islamique du salut aux élections de 1990-1991. Est-ce que cela veut dire qu'il y avait une volonté délibérée de s'en prendre à des sympathisants islamistes? La question est posée.
En ce qui concerne la question de massacres et d'autres atteintes, vous avez raison. Il y a toujours eu à la fois exaction commise par les forces armées d'opposition et violation par les forces de sécurité ou les militaires. Dans ses tout premiers rapports, dès 1992, Amnistie affirmait cela, ce qui a d'ailleurs toujours suscité grandement la colère des autorités algériennes, qui ont toujours dit que c'était incorrect, que c'était pratiquement indécent que de vouloir mettre sur un même pied les terroristes et les forces de l'ordre. On ne cherche pas à les mettre sur le même pied et on n'est pas intéressés à mesurer si la violence de l'un est supérieure à la violence de l'autre; ce n'est pas notre propos. Ce qu'on sait cependant, c'est que la violence vient des deux côtés.
Quand l'ambassadeur dit qu'il y a des enquêtes et des sanctions, on aimerait bien voir les résultats concrets de cela. Si c'est vrai, pourquoi à ce moment-là les autorités algériennes ne remettent-elles jamais à Amnistie internationale les résultats de ces enquêtes? L'ambassadeur nous a dit la semaine passée qu'on devrait comprendre qu'il est normal que quand on juge des militaires, cela se fasse à huis clos. C'est une façon un peu facile de régler le problème. Nous sommes devant une espèce de mur du silence. On sait cependant que quand on a documenté des centaines de cas, on ne peut plus parler de bavures isolées. On sait qu'il y a une pratique à tout le moins fréquente de plusieurs types de violation.
Traditionnellement, nos médias ont toujours beaucoup fait état des exactions des islamistes et des intégristes, mais très peu des violations commises par les forces de l'ordre. Il faut tenir compte des deux, je crois.
M. André Paradis: Je voudrais juste ajouter quelques mots concernant les massacres. La position de la Fédération internationale des droits de l'homme est qu'il y a des soupçons persistants de laissez-faire de la part des militaires et des forces de l'ordre. Cette position est basée sur des témoignages recueillis auprès des populations des villages où sont survenus les massacres et auprès de plusieurs intervenants dans la société algérienne.
J'aimerais juste faire remarquer que les trois massacres qui ont particulièrement marqué l'actualité au cours des mois de septembre et octobre, les massacres de Benthala, Raïs et Beni Messous, sont survenus dans la plaine de Mitidja, qui est tout près l'Alger et qui est la région la plus militarisée du pays.
• 0950
Les massacres sont survenus dans des villages qui sont
parfois à un, trois ou sept kilomètres de casernes
militaires très importantes, dans une région où il y a
plein d'avant-postes des forces de sécurité et où
les militaires ont de
grandes capacités d'intervenir. Ils ont même de
l'artillerie lourde, c'est-à-dire des chars d'assaut,
et dans le cas d'au moins un village, l'armée
encerclait le village alors que s'est produit le
massacre.
L'ambassadeur d'Algérie nous a expliqué qu'il était difficile d'intervenir dans ce terrain-là. Dans d'autres cas, il nous a dit que les terrains auprès des villages avaient été minés par les groupes armés intégristes. Mais comment se fait-il que des gens du village ont pu s'enfuir du village, parcourir ces terrains supposément minés et même rejoindre les avant-postes des forces de sécurité et leur demander d'intervenir, et que les forces de sécurité et les forces militaires ne sont dans aucun cas intervenues? Il y avait parfois certaines casernes ou certains postes de gendarmerie qui étaient à moins de 100 mètres des lieux où ont eu lieu les massacres.
Alors, tout cela, je pense, justifie des soupçons très sérieux sur l'attitude des forces de sécurité, compte tenu aussi du fait que dans ces régions-là se retrouvent des gens qui ont voté aux élections pour le Front islamique du salut, le FIS. Il nous semble inacceptable à tout le moins, pour ne pas utiliser de mots plus fermes, que le gouvernement algérien—et je précise encore une fois que ce sont des allégations—laisse massacrer des populations parce que ces gens-là auraient voté pour un parti islamiste.
[Traduction]
Le vice-président (M. Bob Mills): Messieurs, si vous vouliez bien être un peu plus brefs dans vos réponses, cela permettrait de donner la parole à tous ceux qui veulent vous poser des questions.
Monsieur Robinson.
[Français]
M. Daniel Turp: J'aurais une question à l'intention du représentant du ministère des Affaires étrangères.
[Traduction]
Le vice-président (M. Bob Mills): Nous sommes déjà un peu en retard. Peut-être pourrons-nous revenir à vous plus tard et peut-être que la réponse viendra dans la suite des échanges.
Monsieur Robinson.
M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le président, je suis d'accord avec M. Turp. Nous aussi nous voulons des réponses des représentants du ministère des Affaires étrangères. Je vais donc peut-être continuer dans la même veine.
J'ai écouté soigneusement le témoignage de M. Dingledine au nom du ministère, et j'avoue être troublé et préoccupé par ce que j'ai entendu. Il a dit que la position du Canada comportait trois éléments: la condamnation des terroristes, l'aide humanitaire et l'aide à la réforme politique et économique. Ce que je n'ai pas entendu, c'est une position sur le rôle du gouvernement de l'Algérie dans cette catastrophe des droits de l'homme, ni même la reconnaissance que ce gouvernement a un rôle.
Je demande à M. Dingledine, en sa qualité de représentant du ministère, de nous dire quelle est la position du Canada concernant la convocation d'une séance extraordinaire de la Commission des droits de l'homme de l'ONU, qui examinerait la tragédie qui se joue actuellement en Algérie.
M. Paul Dingledine: En ce qui concerne l'idée d'une séance extraordinaire ou de toute autre intervention internationale, comme je l'ai déjà dit, plusieurs formules ont été suggérées. Aucune d'elles n'a été acceptée ou rejetée.
Ce que le ministère et le ministre ont constaté, c'est que sans la coopération et l'encouragement du gouvernement algérien et des autres parties au conflit, on peut se demander ce qui pourrait être réalisé. Il va sans dire que l'ambassadeur a été très occupé ces dernières semaines. Je peux, je crois, m'en attribuer une partie du mérite, parce que si je l'ai convoqué, c'était pour encourager le gouvernement de l'Algérie à accepter la légitimité des inquiétudes de la communauté internationale face à ce qui se passe en Algérie et de ne pas écarter aussi rapidement et de façon aussi cavalière les préoccupations tout à fait légitimes, de nous-mêmes, des Américains, des Européens et d'autres, face à cette crise.
• 0955
En ce qui concerne la participation du gouvernement algérien
lui-même...
M. Svend Robinson: Désolé. Avant que vous n'abordiez ce point, je n'ai toujours pas entendu de réponse claire sur la question de la réaction du Canada à l'appel lancé par de nombreux groupes—un appel auquel je joins sans hésitation ma voix et celle de mon parti—en faveur d'une séance extraordinaire de la Commission des droits de l'homme de l'ONU. Dans son témoignage, il n'en a pas fait état. Il a parlé d'une commission d'enquête internationale et de la difficulté de la mettre sur pied sans la coopération du gouvernement algérien. Alors, une séance extraordinaire de la Commission des droits de l'homme de l'ONU peut se tenir, que le gouvernement algérien veuille ou non coopérer, comme le témoin le sait très bien.
Je repose ma question: le gouvernement du Canada est-il prêt à appuyer l'appel en faveur d'une séance extraordinaire de la commission pour examiner cette question?
M. Paul Dingledine: Seul le ministre peut donner cette réponse, monsieur Robinson. Le gouvernement n'a pas pris position sur cette question.
M. Svend Robinson: Voilà donc la réponse. Le gouvernement n'a pas de position sur cette question.
M. Paul Dingledine: Je ne sais pas. M. Axworthy...
M. Svend Robinson: Mais c'est ce que vous êtes en train de dire. Si le gouvernement a une position, j'aimerais la connaître.
M. Paul Dingledine: C'est une question d'orientation que le ministre devra énoncer.
M. Svend Robinson: Et jusqu'à présent, il n'y a pas de position.
M. Paul Dingledine: Il n'a pas répondu à cette question précise.
M. Svend Robinson: Il n'y a donc pas de réponse à cette question. Je trouve troublant que le gouvernement ne soit pas prêt à joindre sa voix à ceux qui réclament une séance extraordinaire, alors que cela n'exige pas la coopération du gouvernement algérien.
Le Parlement européen vient de décider d'envoyer une délégation en Algérie pour examiner la situation sur le terrain, avec la coopération du gouvernement algérien, je crois. Il a rejeté d'autres formes d'enquête internationale, mais il vient d'accepter cette délégation, sauf erreur.
M. Dingledine peut-il nous dire si le gouvernement du Canada serait ouvert à l'idée d'une délégation parlementaire canadienne du même genre qui irait examiner la situation sur le terrain, si nous étions en mesure d'envoyer une délégation multipartite comme celle-là, semblable à la délégation parlementaire européenne? Cette initiative recevrait-elle l'approbation du gouvernement?
M. Paul Dingledine: Ici non plus, je ne peux parler au nom du ministre. Nous savons en effet qu'une délégation du Parlement européen se rendra en Algérie.
Le ministre algérien des Affaires étrangères, M. Attaf, s'est rendu au Luxembourg dernièrement et a accepté l'idée. Alger nous a laissé entendre que le gouvernement de ce pays pourrait être ouvert à une proposition du même genre venant de nous. Mais c'est le Parlement et le ministre qui pourront donner une réponse. Je ne peux pas répondre au nom du ministre.
M. Svend Robinson: Je voudrais en savoir davantage sur la position du gouvernement, dans la mesure où vous, plutôt que le ministre, pouvez nous la donner. En ce qui concerne la position du gouvernement et du Canada concernant le rôle du gouvernement algérien dans les atteintes persistantes aux droits de l'homme, on nous a parlé des massacres et de la condamnation des terroristes, mais il faut évidemment mettre la situation dans son contexte historique. Les résultats du scrutin de 1992 ont été faussés. On ne parle pas uniquement de massacres; on parle d'atteintes caractérisées à la liberté d'expression, de censure généralisée et de ce que d'aucuns, dont Amnistie internationale et la Ligue des droits et libertés, qualifient d'impunité pour les auteurs de certains de ces massacres.
Je ne vous ai rien entendu dire, au nom du gouvernement, pour condamner les atteintes aux droits de l'homme commises par le gouvernement de l'Algérie. Quelle est la position du gouvernement du Canada concernant les violations commises par le gouvernement algérien?
Je sais fort bien que l'Algérie est notre principal partenaire commercial en Afrique et que le commerce a tendance à dominer, voire à occulter, nos préoccupations devant les atteintes aux droits de l'homme et notre volonté de les dénoncer. Jusqu'à présent, au nom du gouvernement, vous avez été muet. Pourriez-vous nous dire quelle est notre position en ce qui concerne la reconnaissance du fait que le gouvernement de l'Algérie a une responsabilité en matière d'atteintes aux droits de l'homme?
M. Paul Dingledine: Il ne fait pas de doute que le ministre et le ministère ainsi que le gouvernement ont régulièrement condamné les atteintes aux droits de l'homme en Algérie commises par le gouvernement de ce pays. Ils ont dit sans ambages—le ministre l'a fait dans son allocution à l'Université d'Ottawa il y a quelques semaines—que la brutalité et la férocité des terroristes ne justifient pas les atteintes aux droits de l'homme commises par le gouvernement dans sa lutte contre le terrorisme. Il l'a dit en public et également en privé lors de ses rencontres avec le ministre des Affaires étrangères, M. Attaf.
• 1000
Évidemment, je ne peux pas parler pour le gouvernement de
l'Algérie, mais il se dégage de nos entretiens avec ses
représentants une distinction très nette entre les atteintes aux
droits de l'homme et le terrorisme. Comme je l'ai déjà dit, il ne
veut aucune intervention étrangère dans le dossier du terrorisme
parce que, à son avis, cela encouragerait et fortifierait les
terroristes. Le gouvernement nous a toutefois dit accepter la
légitimité des préoccupations internationales à propos des
violations des droits de l'homme; comme moi-même et d'autres
témoins l'ont dit, le gouvernement affirme que lorsque ces
violations lui sont signalées, il prend les moyens juridiques qui
s'imposent pour y mettre fin.
Sans quelqu'un sur le terrain, dans les tribunaux et dans les villages où ces choses se produisent, il est très difficile pour nous ou pour la presse internationale ou nos collègues des ONG de confirmer sans l'ombre d'un doute que ces choses se produisent. Mais il y a suffisamment d'éléments qui nous amènent à être très inquiets et qui poussent le ministre à intervenir en public et en privé pour condamner les violations de ce genre dans la lutte contre le terrorisme.
Le vice-président (M. Bob Mills): Monsieur Brison.
M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Merci, monsieur le président.
La situation en Algérie est un bon exemple du genre de conflit de l'après-guerre froide. Il y a plus de 100 conflits inter-États, et, dans beaucoup de cas, le conflit opposait l'État à sa propre population. Selon le point de vue que l'on adopte, il pourrait s'agir ici d'un de ces conflits entre les autorités et la population.
La crise trouve son origine dans les élections de 1991-1992, lorsque le Front islamique du salut a été privé de sa victoire et a été interdit par les militaires et le gouvernement. Celui-ci avait remporté l'élection et a été empêché de former le gouvernement. C'est ce qui est à l'origine du conflit actuel.
D'après ce que je vois, le Canada a pour politique de créer un partenariat pour la reconstruction de la société civile et la stabilisation de l'Algérie. Nous sommes en partenariat avec les mêmes gens. Comme M. Robinson, j'ai des réserves face à cette position et à notre hésitation à reconnaître le rôle du gouvernement dans ce conflit.
Le commerce sert l'intérêt national du Canada, mais c'est aussi l'un des moyens de pression dont nous disposons si nous voulons intervenir. Ce moyen de pression devrait nous permettre d'obtenir la coopération du gouvernement, si l'on a recours à la conditionnalité positive et négative, au lieu de nous contenter de dénoncer les terroristes. Dans quelle mesure a-t-on songé à recourir à la conditionnalité positive et négative, surtout en ce qui concerne le commerce, pour résoudre le conflit, au lieu de simplement nouer un partenariat avec le parti au pouvoir?
Deuxièmement, nous avons joué un rôle de premier plan dans l'intervention de la communauté internationale dans l'est du Zaïre. Du point de vue des droits de l'homme, de l'intérêt national et du commerce, il est très important pour les Canadiens de voir la situation en Algérie se régler de façon juste. Dans quelle mesure le gouvernement du Canada envisage-t-il d'autres actions pour faire intervenir des partenaires étrangers dans une opération de plus grande envergure en Algérie?
Je sais que l'on a proposé de créer une commission d'enquête internationale ainsi qu'une autre commission d'enquête à l'ONU. Au nom de mon parti, j'espère sincèrement que le gouvernement du Canada appuiera cette proposition. Y a-t-il une proposition en faveur d'un cadre d'intervention dans le but de restaurer la sécurité et les institutions civiles ainsi que pour assurer la démocratisation? Ce que nous faisons actuellement ressemble un peu à un cataplasme sur une jambe de bois si tout repose en effet sur le partenariat avec le gouvernement. Quelqu'un a-t-il proposé une formule plus exhaustive pour régler ce problème très complexe?
M. Paul Dingledine: Le gouvernement du Canada estime que la solution à long terme du problème algérien sera l'instauration d'une société libre et pluraliste dotée d'institutions démocratiques et d'une économie de marché. C'est ce qui, au bout du compte, réglera le problème, peut-être pas dans les 10 prochains jours, mais à longue échéance.
Les efforts du gouvernement du Canada, soit sous forme d'aide, comme M. Archambault en a parlé, soit sous forme politique—et cela comprend le dialogue avec les autorités algériennes au Canada et dans ce pays, le fait que nous ayons dépêché des observateurs de l'ONU aux élections en dépit des risques que cela comportait pour eux et, enfin, nos relations économiques—tout cela a pour but d'orienter l'Algérie vers une société libre et pluraliste dotée d'une économie de marché. Lorsque vous parlez de conditionnalité, non, nous n'avons pas songé à refuser de l'aide humanitaire ou à suspendre le commerce si l'Algérie ne s'engage pas dans cette voie. Cette option n'a pas été envisagée. Jusqu'à présent nous avons jugé qu'il vaut mieux recourir aux instruments de la politique étrangère dont nous disposons pour soutenir la réforme qui, à terme, réglera le problème.
En ce qui concerne le partenariat, c'est effectivement un partenariat avec le gouvernement dans la mesure où vous travaillez dans son pays et que vous ne voulez pas le faire contre sa volonté. Mais envoyer des observateurs électoraux pour un scrutin parrainé par l'ONU, ce n'est pas faire du partenariat avec le gouvernement. Pas plus que de donner de l'aide humanitaire aux victimes des terroristes. Non seulement nous soutenons la réforme économique et politique en cours en Algérie, mais nous essayons également d'apporter toute l'aide possible aux victimes des terroristes.
M. Scott Brison: N'y a-t-il pas là une incohérence, étant donné que les militaires ont joué un rôle pour réprimer la volonté du peuple lors des élections de 1991-1992? Dans une certaine mesure, lorsque nous essayons de favoriser la démocratisation, nous nous associons à un groupe qui avait justement privé son peuple de démocratie.
M. Paul Dingledine: C'est assurément là l'origine des problèmes qui durent depuis sept ans. On assiste aujourd'hui, comme d'autres témoins l'ont dit, à un terrorisme d'une brutalité, d'une férocité et d'une envergure rarement vues.
J'ajouterai que même si la lutte dans les années qui ont suivi l'élection était relativement simple et opposait le gouvernement aux terroristes islamiques, aujourd'hui la situation est beaucoup plus trouble. J'y étais au mois de mai. J'en ai profité pour avoir des entretiens avec d'autres collègues des milieux diplomatiques, en plus des représentants du gouvernement, pour essayer de faire le point sur la situation. Ce n'est pas clair du tout. En plus du conflit qui oppose les islamiques et le gouvernement, il y a tout un ensemble d'affrontements entre les tribus, entre les villages, et entre les familles, et il y en a qui ne sont rien de plus que des bandits. Tout cela se confond, si bien qu'il est très difficile de démarquer chaque camp.
Encore une fois, la solution à long terme, c'est la démocratie et l'économie de marché. C'est ce à quoi nous travaillons.
M. Scott Brison: Encore une fois, j'estime que la conditionnalité positive et la conditionnalité négative seraient des outils efficaces, surtout en matière de commerce. La position de notre parti en ce qui concerne la présence du Canada ailleurs, en Chine par exemple, c'est que nous pouvons utiliser ces moyens de pression et devons le faire pour créer un lien entre les droits de l'homme et la politique commerciale, pour que chaque question ne soit pas indépendante de l'autre.
• 1010
Le cas se pose ici encore. Il y aurait semble-t-il, scission
au sein du gouvernement entre ceux qui sont prêts à traiter avec
les groupes islamiques plus modérés et ceux qui sont contre. Y a-t-
il moyen de traiter avec les membres modérés du gouvernement pour
obtenir un consensus et isoler ceux qui ne veulent pas participer?
M. Paul Dingledine: Le gouvernement du Canada communique directement avec le gouvernement de l'Algérie par l'intermédiaire de son ministère des Affaires étrangères, comme nous le faisons ici, de sorte que je ne peux pas vraiment répondre à la question, sauf pour dire que sur la question de ce que le gouvernement appelle là-bas «l'intervention extérieure» ou «l'intervention internationale» dans le conflit, il n'y a pas que le parti au pouvoir qui est contre; les partis d'opposition le sont aussi.
M. Scott Brison: Une dernière...
Le vice-président (M. Bob Mills): Je crois que M. Assadourian est le suivant. Merci.
M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Je vous remercie de comparaître pour venir nous parler de la question algérienne. J'ai vécu la question d'assez près lorsque je fréquentais l'école au Moyen-Orient. Chaque fois qu'il y avait une grande célébration, les «Combattants de la liberté», ou terroristes, selon la description qu'on veut donner d'eux, faisaient sauter une bombe en guise de protestation contre l'occupation française.
Ma première question s'inspire d'ailleurs de cette réalité. Y a-t-il donc un rapport entre le conflit actuel et celui qui existait durant les années 50, ou au début des années 60, lorsque les Algériens combattaient pour leur indépendance par rapport à la France? Le mouvement révolutionnaire aurait été composé de plus d'un groupe, l'un d'entre eux détenant les commandes du pouvoir à l'heure actuelle et l'autre en étant écarté. Voilà donc ma première question.
Deuxièmement, existe-t-il une lutte des classes entre les populations urbaines et rurales? Lorsque les Français occupaient le territoire algérien, ils ont créé leur propre classe. Ils disaient de l'Algérie qu'elle faisait partie de la France, même si elle était située au sud de la Méditerranée. Ils disaient que nous faisions tous partie du même peuple, etc. Je me souviens de cela également.
Également, en 1992, lorsqu'on n'a pas tenu compte des élections, qu'avons-nous fait? Avons-nous rappelé notre ambassadeur en Algérie? Avons-nous convoqué l'ambassadeur d'Algérie ici à Ottawa? Ou nous sommes-nous tout simplement tenus à l'écart, de sorte que nous sommes aujourd'hui des ouvriers de la onzième heure? Nous nous sommes tenus à l'écart en 1992, nous n'avons rien fait, et maintenant nous nous sentons coupables. Au cours des six ou sept dernières années, 60 000 personnes sont mortes. Est-il nécessaire que 60 000 personnes meurent pour que nous soyons incités à agir? Sur le plan humain, voilà qui me frustre considérablement.
Si vous aviez agi en 1992, lorsque le gouvernement algérien a pris les mesures qui ont débouché sur cette situation... Vous auriez pu convoquer l'ambassadeur d'Algérie et lui dire que nous trouvions la situation intolérable, que son pays devait la corriger, sans quoi nous allions cesser d'entretenir des rapports avec lui. Ou bien encore, vous auriez pu rappeler notre ambassadeur en Algérie en disant que nous en avions assez, comme nous l'avons fait dans d'autres situations. Vous êtes au courant de la situation au Nigéria, j'en suis certain. Elle était semblable. Nous avons décidé d'expulser les Nigérians du Commonwealth. Nous n'avons pas manqué d'agir. J'en suis très content.
Ma question a rapport au fait que l'Algérie a été une colonie française. L'Algérie fait-elle partie de la francophonie?
M. Paul Dingledine: Non.
M. Sarkis Assadourian: Non? D'accord. Elle fait partie de la Ligue arabe, n'est-ce pas?
M. Paul Dingledine: En effet.
M. Sarkis Assadourian: Traitons-nous avec la Ligue arabe au sujet des questions qui ont trait aux pays arabes, ou bien faisons- nous tout à fait abstraction de la Ligue arabe dans le conflit actuel?
Voilà donc certaines des questions que je voulais poser. Merci.
M. Paul Dingledine: D'accord. Je ne suis pas certain d'avoir suffisamment d'information sur l'Algérie pour vous répondre en détail.
Pour ce qui est des rapports entre ce qui se passe aujourd'hui et la guerre d'indépendance—il se peut que Mark puisse ajouter à ma réponse—je ne crois pas qu'il y ait un rapport direct, sauf que la guerre d'indépendance en Algérie a laissé dans son sillage une certaine amertume et une certaine agressivité à l'égard des Français, ainsi qu'une lutte des classes, qui continue de caractériser très nettement la société algérienne aujourd'hui. Cependant, je ne vois pas de lien direct entre les deux.
Mark, souhaitez-vous...
M. Sarkis Assadourian: J'avais à l'esprit le groupe de M. Ben Bella, le premier président de l'Algérie, et ses opposants.
M. Paul Dingledine: Je ne suis pas en mesure de répondre à cette question.
M. Mark Bailey (Division du Maghreb et de la Péninsule arabe, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Merci. Je m'appelle Mark Bailey et je travaille avec M. Dingledine au ministère des Affaires étrangères.
M. Ben Bella est actuellement en exil au Maroc. Franchement, je doute beaucoup que cet aspect soit significatif dans la conjoncture actuelle. Je suis certainement d'accord avec ce qu'a dit M. Dingledine au sujet de ce que la guerre d'indépendance menée contre les Français a laissé dans son sillage en Algérie. Je crois également que la méfiance qu'ils manifestent à l'égard de la collectivité internationale est également attribuable en partie à ce que les Algériens ont vécu au moment de cette lutte vraiment horrible qu'ils ont menée contre les Français.
M. Paul Dingledine: Pour ce qui est de certaines autres questions dont j'ai pris note, je dirais qu'on pourrait moins parler de lutte des classes à l'heure actuelle. Les événements, le terrorisme, ont surtout lieu en dehors d'Alger. Cela se passe dans les villages, et il s'agit de conflits entre tribus, entre villages, et parfois entre individus, mais généralement pas entre classes sociales.
Pour ce qui est de savoir si nous avons rappelé notre ambassadeur en 1992, il faudrait que je le vérifie, étant donné que je ne sais pas au juste ce que nous avons fait à cet égard.
Je crois qu'il faut bien établir une distinction entre l'exemple du Nigéria, dont vous avez parlé, et le cas de l'Algérie. En Algérie, il s'agit de terroristes qui ont tué 60 000 personnes, et non pas du gouvernement. Dans le cas d'autres endroits d'où nous avons rappelé nos ambassadeurs, nous l'avons fait parce que nous étions consternés par les actions du gouvernement à l'égard de ses propres citoyens.
M. Sarkis Assadourian: Dans le cas qui nous intéresse, le gouvernement se tient à l'écart pendant que des gens se font tuer. Quelle est la différence?
M. Paul Dingledine: Certains prétendent que le gouvernement se tient à l'écart. J'en ai parlé, et d'autres aussi.
M. Sarkis Assadourian: On nous a dit que les soldats se tenaient à 500 mètres de l'endroit où des femmes et des enfants se faisaient massacrer.
M. Paul Dingledine: Mais le gouvernement algérien le nie catégoriquement. Ses représentants l'ont nié devant M. Turp et ils l'ont fait devant moi également. Je crois que le gouvernement algérien reconnaît la possibilité d'un problème en matière de droits de la personne, mais, pour lui, il s'agit essentiellement d'un problème de terrorisme. Ce sont les terroristes qui tuent les gens.
Le vice-président (M. Bob Mills): Nos témoins qui représentent les ONG ont-ils quelque chose à ajouter à cela? Non?
Monsieur Assadourian.
M. Sarkis Assadourian: Vous dites que vous allez vérifier ce qui s'est passé en 1992. Je suppose que nous n'avons rien dit, étant donné que je n'ai vu personne s'indigner et condamner de façon véhémente l'action du gouvernement algérien.
Pensez-vous que nous avons gardé le silence parce que nous nous réjouissions en réalité de voir le gouvernement algérien faire un travail qui nous répugnait? Ils ont interdit les intégristes islamistes, et, puisque nous ne souhaitions pas la présence de gouvernements de type iranien dans la région, cela faisait bien notre affaire. S'est-il agi d'une sorte de coopération internationale, du fait que nous avions l'impression qu'on avait fait le travail à notre place? Nous ne voulons pas d'intégristes en Algérie. En effet, la Libye est le pays voisin. Puis, de l'autre côté de la Méditerranée, il y a l'Iran. Nous ne voulons plus de ce qui s'est passé en Europe centrale, dans les Balkans; nous ne voulons plus de guerre qui risque de donner naissance à une autre république musulmane. Nous avons donc peut-être été tentés de laisser le problème algérien au gouvernement algérien, en nous disant qu'il faisait un bon travail. Le gouvernement a annulé les élections. Il n'en a pas tenu compte. Qu'il en soit ainsi. Nous nous en lavons les mains, pour ainsi dire. Aujourd'hui, nous payons le prix—ai-je raison?
M. Paul Dingledine: Eh bien, je n'occupais pas cette fonction en 1992, de sorte que je ne suis franchement pas en mesure de vous décrire exactement la réaction à l'époque. C'est quelque chose...
M. Sarkis Assadourian: Pouvez-vous vérifier cet aspect également, s'il vous plaît? J'aimerais savoir ce que nous faisions à l'époque pour condamner les actions du gouvernement.
M. Paul Dingledine: Monsieur le président, nous nous ferons plaisir de vérifier quelles déclarations ont été faites ou quelles mesures ont été prises.
Le vice-président (M. Bob Mills): Vous pouvez transmettre l'information par l'intermédiaire de la greffière, de manière à ce que tous aient la réponse.
M. Sarkis Assadourian: Je vous en serais reconnaissant. Merci.
M. Paul Dingledine: Et vous voulez donc de l'information au sujet de la période postérieure aux élections?
M. Sarkis Assadourian: À partir du moment des élections, durant les élections, après les élections, au moment où le gouvernement a pris des décisions visant à annuler les élections. C'est cela. Et, lorsque nous nous sommes tenus à l'écart, j'aimerais bien vous entendre dire que nous ne nous réjouissions pas de voir le gouvernement algérien faire le travail à notre place. Tout renseignement que vous pourrez me fournir me sera utile.
M. Paul Dingledine: Nous allons déterminer ce qui a été dit et fait à l'époque.
Le vice-président (M. Bob Mills): Merci beaucoup.
Nous pourrions passer à Mme Guay.
[Français]
Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): J'adresserai mes questions à M. Archambault de l'ACDI. J'ai pris connaissance d'un document qu'a préparé le ministère le 28 novembre, lequel s'intitule: Algérie, Notes d'information sur le programme de coopération de l'ACDI. J'aurais deux questions à ce sujet.
Selon vous, monsieur Archambault, est-il opportun que l'ACDI augmente son budget de la coopération au développement en Algérie de 3,2 millions de dollars en 1996-1997 à un peu moins de 4 millions de dollars pour 1997-1998, compte tenu de ce qui se produit là-bas depuis quelques années?
M. Michel Archambault: Il est exact qu'une augmentation est prévue à ce budget, mais il faut apporter des précisions. Nous devons souligner que nous avons prévu décaisser des sommes supérieures pour la présente année financière parce que les activités que nous avons planifiées il y a un certain temps déjà sont plus nombreuses qu'elles ne l'étaient l'an dernier.
• 1020
Depuis deux ans, nous n'avons approuvé aucun
nouveau projet. Même le projet PRICAL dont fait état
ce document n'est pas actuellement en opération, bien
qu'il ait été approuvé il y a un certain temps par notre
ministre. Lorsqu'il viendra en opération, il y aura
des décaissements de fonds qui suivront cet engagement financier
qu'a pris le gouvernement canadien
lorsque le ministre a approuvé le projet. À l'époque,
je pense que c'était M. Boudria qui était le ministre,
ou peut-être même M. Pettigrew.
Donc, les décaissements de fonds actuels au cours de chaque année suivent l'évolution des opérations sur le terrain, et non pas la question des engagements. Nous n'avons pas pour le moment pris d'engagements supérieurs à ceux que nous avions par le passé. Le ministre approuve chaque année un plan quinquennal et ce que nous appelons des indicateurs de planification, et nous ne dépassons pas cette limite qu'approuve le ministre. Il arrive même à l'occasion que nous devions réduire le nombre d'activités parce que depuis quelques années, les sommes que le Parlement met à la disposition de l'ACDI sont passablement réduites. Nous diminuons donc parfois nos activités pour satisfaire à la demande du Parlement, qui alloue les budgets à l'ACDI, budgets qui sont ensuite répartis par le ministre responsable de l'ACDI selon la politique du gouvernement. Cette augmentation de 800 000 $ se rapporte à des activités supplémentaires, mais ne correspond pas nécessairement à des engagements supplémentaires de la part de l'ACDI.
J'espère avoir été clair et ne pas avoir utilisé trop de jargon bureaucratique. Je suis à votre disposition pour vous fournir de plus amples renseignements.
Mme Monique Guay: Monsieur Archambault, quelle est la différence entre une augmentation des activités et une augmentation de budget? Ce n'est pas clair.
M. Michel Archambault: D'accord. Nous décidons quel sera le programme de l'ACDI lorsque nous planifions les projets. Par exemple, lorsqu'en 1995, nous planifiions un projet de 15 millions de dollars, nous estimions, au moment où nous le planifiions et au moment où nous demandions à notre ministre de l'approuver, qu'au cours des cinq prochaines années, nous dépenserions environ 3 millions de dollars par année. Mais il arrive à l'occasion que surviennent des retards et que nous ne dépensions que 2 millions de dollars pour les opérations d'un certains projet, tandis que dans d'autre cas, nous pouvons augmenter des activités parce que le projet le demande et nous déboursons des sommes supérieures. Ce qui a été approuvé par le ministre, c'est une somme 15 millions de dollars. C'est une question de gestion du cash-flow et non pas une question d'engagements plus nombreux. Pour le moment, nos engagements sont limités à ces deux plus importants projets, en plus du Fonds canadien d'initiatives locales dont fait état le document.
Mme Monique Guay: Je vous remercie de cette explication. Elle était claire et nous avons bien compris. De ce budget d'un peu moins de 4 millions de dollars que déboursera l'ACDI en 1997-1998, seulement 270 000 $ seront directement injectés pour la défense des droits de la personne et le développement démocratique. Comment pouvez-vous nous expliquer une aussi faible part du budget global du programme de l'ACDI en Algérie, alors que les besoins en ce qui a trait à la défense des droits de la personne et du développement démocratique sont beaucoup plus grands et beaucoup plus criants en ce moment? J'aimerais peut-être aussi entendre le point de vue des représentants d'Amnistie, si c'est possible.
M. Michel Archambault: De fait, moi aussi, parce que je ferai un commentaire à ce sujet.
D'abord, je voudrais préciser que la question des droits de la personne et celle de l'ouverture de l'Algérie sont deux aspects d'une même réalité. Lorsque nous travaillons à mettre ensemble des opérateurs canadiens et des opérateurs algériens et lorsque, dans le cadre du Programme canadien de renforcement des institutions algériennes, nous mettrons ensemble des institutions canadiennes de formation technique et professionnelle, des collèges communautaires et des cégeps avec des institutions équivalentes en Algérie, nous allons faire de l'ouverture et du développement de personne à personne. C'est cela que nous cherchons à réaliser par notre programme. À la différence de ce que nous faisons dans le programme commercial, nous cherchons à rapprocher les gens pour que ceux-ci bénéficient du réseautage.
• 1025
Quand nous le faisons à travers le Fonds de
développement du secteur privé,
notre objectif est plus axé sur la question du
développement du secteur privé, mais nous le faisons
pour l'ouverture de la société en Algérie.
La question des droits de la personne est une question assez délicate. Il y a une question d'absorption en Algérie. Vous avez noté que, dans le dernier paragraphe de la note de breffage, j'ai indiqué qu'il n'y avait actuellement aucune activité de la part d'organisations non gouvernementales canadiennes en Algérie.
Nous comptons souvent sur les organisations non gouvernementales dans les pays en développement pour transférer les valeurs canadiennes. Ce sont des instruments de la politique étrangère et les Canadiens sont des instruments de la politique étrangère canadienne. Ils sont souvent les leaders de la politique étrangère canadienne.
En Algérie, les circonstances historiques font qu'il y a eu trop d'interventions des groupes canadiens. Ce que nous cherchons à faire, tout comme le gouvernement canadien, c'est à encourager les opérateurs d'affaires et également les opérateurs dans le secteur de l'éducation parce que nous savons que le gouvernement algérien le désire. Nous avons donc de meilleures chances d'intervenir si le gouvernement algérien et les Algériens responsables des secteurs d'affaires et responsables des secteurs d'éducation veulent nous avoir dans leur pays.
C'est pourquoi nous serions prêts à participer financièrement à des ONG canadiennes qui désireraient travailler en Algérie, qui désireraient prendre des partenariats avec des associations ou des organisations algériennes. Je sais que c'est très difficile, mais nous serions prêts à participer financièrement à leur effort si certaines d'entre elles prenaient ce risque.
[Traduction]
Le vice-président (M. Bob Mills): Nous avons passablement dépassé notre limite de temps. Si nous passions maintenant à Mme Beaumier, nous aurions le temps de faire un autre tour.
Mme Colleen Beaumier (Brampton-Ouest—Mississauga, Lib.): Je serai brève, monsieur le président.
C'est plutôt difficile à comprendre. Il semble qu'il y ait toutes sortes de méchants là-bas. D'après ce que j'ai pu comprendre, certaines autorités du gouvernement sont de connivence avec les militaires, qui, eux, sont de mèche avec les deux côtés. Personne ne semble vouloir assumer la responsabilité de ce qui se déroule là-bas.
Il y a cette séance spéciale de l'ONU, et puis cette enquête. Sans la coopération du parti au pouvoir, qu'adviendra-t-il? Et que fait l'ambassadeur dans tout cela? Vous dites que vous lui parlez. Il a communiqué avec le Bloc. Que veut-il? Que demande-t-il? Personne ne semble vouloir assumer la responsabilité ou reconnaître sa participation aux événements.
J'aimerais que le représentant de l'ACDI me dise quel pourcentage de l'aide est affecté au développement commercial et quel pourcentage à l'aide humanitaire respectivement. Dans le cas de la Chine, nous avons constaté que, avec la croissance du commerce, les violations des droits de la personne ont augmenté, et non pas diminué. Nous savons également que dans les pays où l'on constate des violations des droits de la personne, la corruption constitue un très grave problème.
Lorsque vous parlez de développement commercial dans ces pays, vous ne voulez pas vraiment parler de développement commercial et de création d'une nouvelle classe moyenne. Ce sont généralement les personnalités influentes du gouvernement qui en profitent.
J'aimerais donc savoir quel pourcentage de l'aide est accordé sous forme d'une aide humanitaire qui favorise le développement de la démocratie.
M. Paul Dingledine: Permettez-moi d'amorcer une réponse.
Je suis bien d'accord avec vous pour dire que la situation est difficile à démêler. Le nombre d'intervenants est grand, et la désolation est considérable. Je pense qu'on a raison de se demander ce qui arriverait après une séance spéciale de l'ONU, et il faut peut-être s'interroger là-dessus avant que la séance de l'ONU n'ait lieu. Je pense que personne ne sait ce qui va arriver par la suite.
Pour notre part, nous estimons, comme je l'ai dit plus tôt, que la solution du problème à long terme passe par la démocratie et l'économie de marché. À court terme, nous continuons à encourager le gouvernement de l'Algérie à accepter que les inquiétudes qui sont manifestées à l'échelle internationale sont légitimes.
• 1030
Vous nous demandez ce que fait l'ambassadeur dans tout cela.
Il agit conformément à nos souhaits. Nous lui avons demandé de
prendre la parole, de parler aux Canadiens, aux députés canadiens,
de leur expliquer ce qui se passe, au lieu de dire que cette
question ne nous concerne pas, ce que nous jugeons inacceptable
comme réponse.
Permettez-moi d'ajouter que, dans nos efforts visant à inciter le gouvernement de l'Algérie à se montrer sensible aux inquiétudes qui sont exprimées à l'échelle internationale, nous avons invité le gouvernement de l'Algérie à faire comparaître un ministre devant votre comité. Une possibilité existait pour cette semaine, mais elle ne s'est pas concrétisée. Si le comité est encore intéressé au printemps, un autre ministre algérien sera ici, probablement en février ou mars, et il se peut que les Algériens soient disposés à le faire comparaître à ce moment-là.
Michel.
M. Michel Archambault: Je vous remercie de votre question. Je devrai nuancer ma réponse. Comme je le disais il y a quelques minutes, il existe une différence entre ce qui touche directement les besoins humanitaires et ce qui a une incidence indirecte sur l'ouverture de la société algérienne. La plus grande partie de notre programme vise le secteur privé algérien, mais ce que nous visons en réalité par cela, c'est d'influer sur l'ouverture de la société algérienne.
Cela étant dit, les chiffres que j'ai fournis vous permettront de constater que 300 000 $ environ par année sont destinés, par le truchement de l'ambassadeur du Canada à Alger, à de petites organisations qui répondent aux besoins humanitaires, aux besoins relatifs aux droits de la personne. L'ambassadeur du Canada à Alger, qui est sur place, qui est en mesure de constater les besoins, peut leur répondre de façon immédiate par des interventions ponctuelles. Le programme que nous administrons depuis l'administration centrale s'inscrit dans une perspective plus vaste; il s'agit d'une intervention à long terme.
Permettez-moi de dire également que notre intervention auprès du secteur privé algérien est axée sur la petite et la moyenne entreprise du pays. Par conséquent, nous visons des entreprises ayant de 10 à 50 employés. C'est le genre d'entreprises que nous voulons cibler
[Français]
Fonds de développement du secteur privé,
[Traduction]
puisque ce sont évidemment elles qui constituent l'épine dorsale de la société, comme nous le savons très bien ici au Canada, et également parce que ces sociétés ne bénéficient pas d'autant d'attention de la part du gouvernement que les sociétés algériennes de plus grande taille, notamment les sociétés d'État de l'Algérie.
Ainsi, en collaboration avec le gouvernement de l'Algérie, nous avons axé nos efforts visant le secteur privé sur les entreprises de petite et moyenne taille.
Mme Colleen Beaumier: Mais quel est le pourcentage de l'aide humanitaire par opposition à celle qui vise le développement économique?
M. Michel Archambault: Selon le document que j'ai fourni, l'ambassadeur se voit confier chaque année environ 300 000 $.
Mme Colleen Beaumier: Qu'est-ce que cela représente en pourcentage?
M. Michel Archambault: Par rapport à un total de 3 millions de dollars, l'aide humanitaire directe représente donc 10 p. 100, tandis que le reste vise
[Français]
l'ouverture du gouvernement et de la société.
[Traduction]
M. Svend Robinson: Monsieur le président, j'invoque le Règlement pour demander que les détails de ce budget de 270 000 $ soient transmis aux membres du comité par le truchement de la présidence.
Le vice-président (M. Bob Mills): Monsieur Robinson, si nous donnions l'occasion à M. Frenette...
M. Svend Robinson: Il s'agit d'une question de suivi. Il serait souhaitable que les détails nous soient transmis.
Le vice-président (M. Bob Mills): D'accord, certainement.
Pouvez-vous nous transmettre ces détails, monsieur Archambault?
Monsieur Frenette, vous aviez un commentaire.
[Français]
M. Michel Frenette: Oui, en effet. Mon commentaire porte sur la question de Mme Guay. En tant qu'organisme de défense des droits, il est certain que nous nous réjouissons de voir l'ACDI ou les Affaires étrangères aller de l'avant avec des projets humanitaires qui vont mener à une société civile plus forte et au développement de la démocratie.
Mais nous disons aussi qu'il ne faut pas se contenter de ce petit cheminement tranquille pendant que des gens se font massacrer. Il semble que ce n'est pas approprié. Ce n'est pas suffisant. Pour notre part, nous essayons de connaître le point de vue des victimes, et je peux vous dire que, de leur point de vue, des démarches comme celles dont vous parlez ne sont qu'une goutte d'eau. C'est insuffisant.
• 1035
Il faut agir, et il faut agir maintenant.
Je reviens sur ce qui a été dit précédemment, à savoir le fameux argument du refus des autorités algériennes. Qu'est-ce qu'on espère? Qu'ils nous demandent d'y aller? Ne soyez pas naïfs. Ils savent qu'ils seront les premiers à être directement concernés, directement visés, et qu'ils vont être la cible d'une commission d'enquête, quelle qu'elle soit.
Il n'y a pas un gouvernement de ce genre au monde—je ferais la même chose si j'étais à leur place—qui solliciterait une commission d'enquête. À mon avis, utiliser cet argument, c'est-à dire le refus du gouvernement algérien, pour intervenir n'est pas acceptable. On sait très bien que le gouvernement accepterait une commission d'enquête s'il n'avait rien à se reprocher. Le gouvernement algérien va résister tant et aussi longtemps que la pression internationale ne sera pas suffisamment forte. Vous avez d'ailleurs mentionné qu'il s'emploie à prévenir cette action par tous les moyens, y compris l'intimidation.
Vous savez sans doute que l'ambassadeur d'Algérie à Genève a même demandé qu'Amnistie internationale perde son statut consultatif auprès des Nations unies tellement il est en colère contre les organismes de défense des droits.
Actuellement, les ONG internationales les plus importantes de défense des droits ont mis la pression maximale. On peut difficilement faire plus que ce qui est fait.
Votre question, monsieur Turp, était de savoir si toutes les sections d'Amnistie faisaient de telles démarches. Je peux vous dire que oui. Toutes les sections européennes et américaines font des démarches similaires à la nôtre.
Au sein des Nations unies, beaucoup de gens importants se sont prononcés en faveur d'une action. Le secrétaire général lui-même et Mary Robinson, qui est la responsable de l'UNICEF, ont dit qu'une intervention internationale serait appropriée et que l'on devait considérer cette possibilité.
Les Nations unies fournissent un cadre d'action par des mécanismes adéquats, par la Commission des droits de l'homme et grâce à ses rapporteurs. Tout ce qui manque, c'est une volonté politique. C'est cela qui manque actuellement, et on peut dire que pas un pays d'Europe ou d'Amérique n'ose prendre l'initiative de déterminer une volonté politique qui permettrait de mettre en place un projet de commission d'enquête.
La question est donc de savoir si le Canada est prêt à prendre ce leadership-là, oui ou non. Moi, je pense que l'Algérie craint énormément une position du Canada dans ce sens-là, parce que le Canada peut justement profiter de sa neutralité pour donner du crédit à sa démarche.
Il est assez difficile de penser que la France se fasse le leader d'une telle demande quand on connaît l'histoire de l'Algérie et de la guerre d'indépendance. Le Canada est en bien meilleure position pour entreprendre une telle démarche.
[Traduction]
Le président: Je rappelle à nouveau à nos témoins d'adresser leurs réponses à la personne qui pose la question. Nous allons tenter de faire un autre tour. La chose est difficile lorsque l'on répond aux questions deux ou trois fois.
Madame Debien, vous avez cinq minutes.
[Français]
Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Non, ça va. M. Frenette a répondu à ma question.
[Traduction]
M. Sarkis Assadourian: À l'avenir, me semble-t-il, lorsque nous rencontrons des délégations, surtout celles de l'Algérie ou du Nigéria, il serait peut-être souhaitable que nous disposions d'un mémoire des Affaires étrangères portant sur le commerce entre nos pays et sur la situation politique. Un document de deux ou trois pages fera l'affaire. Nous pourrions alors poser des questions à partir de renseignements que nous aurions en main. Les réponses de l'ACDI pourraient en faire partie.
Le vice-président (M. Bob Mills): Je suppose que nous pourrions transmettre la demande aux recherchistes. Ce sont des renseignements faciles à obtenir. Ils existent aux Affaires étrangères.
M. Sarkis Assadourian: En effet, cela nous rendrait la tâche plus facile.
Le vice-président (M. Bob Mills): En effet. Je crois que nous pouvons le proposer.
[Français]
M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Je crois que c'est mon tour.
Le président: Monsieur Sauvageau.
M. Benoît Sauvageau: Merci. J'ai un commentaire à faire et quelques questions brèves à adresser au fonctionnaire du ministère des Affaires étrangères et à celui de l'ACDI, M. Archambault.
Votre argument me gêne un peu, lorsque vous dites, comme M. Frenette, qu'en intervenant directement auprès des individus, on fait avancer la cause et on ouvre l'avenir au gouvernement algérien. Regardez la première phrase du résumé d'Amnistie Internationale qui dit:
-
La crise des droits de l'homme s'est aggravée en
Algérie au cours de l'année écoulée.
• 1040
Depuis 1992, il y a eu, selon les statistiques connues,
80 000 morts. L'année dernière a été pire que les
années précédentes. Je pense donc que l'octroi de
quelques millions de dollars remis à certaines personnes
n'est pas la meilleure façon de faire, et les chiffres
nous l'ont démontré. Mais il ne faut pas
l'éliminer, comme M. Frenette l'a dit.
Mais il faudrait peut-être également entrevoir d'autres alternatives, comme celle de donner 10 p. 100 du budget directement à l'aide à la reconnaissance des droits de la personne. Je pense d'ailleurs que c'est un budget qu'on pourrait revoir à la hausse parce que, d'après les chiffres, ce n'est pas respecté.
Si la réunion de ce matin ne vous a pas convaincus, nous essaierons de nous y prendre d'une autre façon pour vous convaincre de l'importance et de la pertinence de réserver les fonds à cette cause. J'aimerais peut-être vous entendre à ce sujet tout à l'heure.
Ma question s'adresse à M. Paul Dingledine. Nous avons eu quelques petites discussions informelles pendant votre présentation. On a pensé qu'une délégation de parlementaires canadiens pourrait se rendre en Algérie pour constater de visu la situation. Pensez-vous qu'il serait à propos de compléter la délégation de l'Union européenne, c'est-à-dire de leur demander, étant donné qu'ils ont peut-être déjà un plan de travail, que des parlementaires canadiens de tous les partis se joignent à la délégation de l'Union européenne lors de leur visite en Algérie?
[Traduction]
M. Paul Dingledine: Pour ce qui est de la délégation qui irait en Algérie, il s'agit d'une question qui a été soulevée au cours des quelques derniers jours. Le ministre des Affaires étrangères de l'Algérie était au Luxembourg. Il a été proposé par les Européens, je suppose—je n'en suis pas certain—que l'Algérie accepte une délégation parlementaire européenne, ce à quoi les Algériens ont donné leur accord.
L'idée d'une délégation parlementaire canadienne est venue dans le contexte des conversations entre notre ambassadeur et les autorités algériennes au cours du week-end. Ces conversations visaient notamment à convaincre le gouvernement de l'Algérie de faire comparaître un ministre devant notre comité aujourd'hui. Voilà donc le contexte dans lequel l'idée a été soulevée.
Il est essentiellement du ressort politique pour les membres du comité, le ministre, de déterminer si la Chambre souhaite agir directement avec l'Algérie ou agir de concert avec les Européens. Il ne revient pas à un fonctionnaire de répondre à une telle question.
Le vice-président (M. Bob Mills): Madame Augustine.
Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Merci, monsieur le président.
Il est toujours bouleversant pour les membres du comité de prendre connaissance de situations touchant les droits de la personne dans divers pays, et la chose est d'autant plus vraie dans le cas de l'Algérie. Il est bien difficile de savoir ce qui se passe exactement. On nous parle de tensions entre tribus, entre villages... d'une société profondément divisée, de la situation des femmes et des enfants, de l'absence complète d'égalité entre les sexes ou de reconnaissance d'une telle égalité. Il me semble que les problèmes découlent des moeurs religieuses et culturelles de la société puisque nous entendons dire que des massacres sont commis au nom de Dieu et que la société est en proie à une lutte entre le bien et le mal.
Quand je tente de démêler tous les morceaux du casse-tête, je me demande comment le Canada et l'ACDI peuvent exercer quelque influence que ce soit étant donné le climat. Que pouvons-nous faire pour améliorer la situation des femmes dans un tel milieu culturel? Que faisons-nous lorsque nous négocions des accords internationaux, lorsque nous participons à des conférences internationales pour obtenir que les droits de la personne soient respectés? Que pouvons-nous faire pour que l'Algérie reconnaisse le rôle des nations dans la défense des droits de la personne, du respect des personnes, de l'égalité des sexes?
• 1045
Quelle attitude prenons-nous devant tant de cas d'abus,
particulièrement à l'endroit des femmes, quand nous savons que
10 p. 100 des fonds que nous contribuons servent à des activités
souterraines? En quoi cela contribue-t-il à faire en sorte que
toutes ces questions fassent l'objet d'un véritable débat public?
M. Paul Dingledine: Toute cette question des droits de la personne au Moyen-Orient et ailleurs est manifestement un élément important de la politique étrangère du Canada tant au niveau multilatéral que bilatéral.
Il convient de noter que dans le cas de l'Algérie, nous occupons une place non traditionnelle en ce sens que nous jouons là un rôle beaucoup plus important que dans la plupart des autres pays. Nous avons la quatrième ou cinquième ambassade en importance à Alger. De nombreux pays européens n'y ont même pas d'ambassade. Ainsi, nous sommes un intervenant de poids dans le dialogue avec les Algériens. Nous exerçons une certaine influence, nous sommes écoutés et le personnel de notre ambassade fait valoir ses arguments relatifs aux droits de la personne tous les jours.
En ce qui a trait au développement, M. Archambault pourra vous donner une réponse plus précise.
M. Michel Archambault: Merci, madame Augustine, de votre question. Cela me permet en même temps de répondre à une question posée plus tôt par M. Sauvageau et M. Robinson.
Afin que vous ayez une meilleure idée de ce que fait notre ambassadeur en Algérie, je vais vous donner quelques exemples des associations et organisations qu'il a aidées.
Par exemple, nous avons attribué 5 000 $ à la Coopérative des jeunes pour qu'elle puisse acquérir le matériel et les matières brutes nécessaires pour fabriquer des vêtements en cuir. C'est cette aide-là dont avait besoin le groupe.
Nous avons donné 7 000 $ à la Coopérative féminine pour la confection de vêtements. Nous avons Les assises nationales des femmes démocrates. Il s'agit d'un groupe de discussion féminin. Nous lui avons versé 7 000 $ afin qu'elles puissent acheter du matériel informatique et communiquer les unes avec les autres. Nous avons aussi aidé un autre groupe de jeunes, «Achats d'informatique et bureautique».
Nous avons aidé l'Association des journalistes pour que ses membres puissent assister à des rencontres internationales de journalistes afin que les Algériens puissent se faire entendre. Nous leur avons donné 5 000 $ canadiens, c'est très peu. Mais cette aide que nous accordons directement contribue à étendre l'influence du Canada en Algérie.
J'ai de nombreux autres exemples de ce genre pour 1996-1997, et je crois que notre présence porte fruit. Comme l'a dit plus tôt M. Dingledine, un pays européen qui n'a pas d'ambassade à Alger a demandé à l'ambassade du Canada de distribuer pour son compte des fonds à de petites associations et organisations.
Ainsi, nous sommes un exemple, les gens apprécient ce que nous faisons et nous sommes toujours plus nombreux. Cela a un effet de levier. Ce n'est pas suffisant mais c'est ce que nous cherchons à accomplir.
Le vice-président (M. Bob Mills): Un petit commentaire, monsieur Dingledine, au sujet de la visite d'un député du Parlement européen. Je me demande si vous pouvez donner de l'information au comité à ce sujet. Quand cela se fera-t-il? Ce serait utile pour nous d'obtenir le rapport de ce qu'ils ont constaté, de ce qu'ils ont observé. Si nous voulions suivre leur exemple, il serait bon de voir quels sujets ils n'ont pas examinés. Autrement dit, le comité trouverait utile de savoir ce qu'ils font et ce que sont leurs projets. Si vous pouviez nous fournir ces renseignements, cela nous serait très utile.
M. Paul Dingledine: Monsieur le président, je n'ai pas beaucoup d'information pour l'instant. Cela s'est produit la semaine dernière. D'ici quelques jours, nous pourrons vous obtenir les renseignements qui sont déjà disponibles sur leurs projets et nous vous communiquerons par la suite des renseignements additionnels.
Le vice-président (M. Bob Mills): Je crois que ce serait très utile pour nous d'obtenir cette information.
Madame Debien.
[Français]
Mme Maud Debien: L'Algérie a signé en 1989 le Pacte sur les droits civils et politiques qui prévoit un examen régulier tous les deux ans. On sait que l'Algérie a soumis un rapport en 1992, avec presque trois ans de retard, et qu'il n'y en a pas eu d'autre depuis.
L'Algérie a promis aux États-Unis, par contre, de produire un rapport en 1998. Dans le contexte actuel, on se demande bien quels seront encore les délais que l'Algérie va demander avant de produire ce rapport-là. D'après les informations que nous avons, la Commission des droits de l'homme de l'ONU aurait l'intention d'envoyer un rapporteur spécial.
Je n'ai pas pris connaissance du rapport que l'Algérie a soumis à la Commission des droits de la personne en fonction de ce pacte sur les droits civils et politiques. Est-ce que le ministère—et ma question s'adresse à M. Dingledine—aurait en main ce rapport que l'Algérie a produit? Si oui, j'aimerais bien que le comité puisse en avoir une copie.
Ma deuxième question s'adresse à M. Frenette ou à M. Paradis. J'ai personnellement assisté à la Commission des droits de l'homme à Genève au printemps dernier, et je n'ai pas eu connaissance d'un quelconque rapport concernant l'Algérie. J'aimerais, d'une part, savoir si vous avez cette information et, d'autre part, savoir ce que vous pensez de la décision de la Commission des droits de la personne d'envoyer un rapporteur spécial. Je voudrais aussi savoir s'il y a déjà eu un rapporteur spécial.
M. André Paradis: À notre connaissance, la question de l'Algérie n'a pas été soulevée à la dernière session de la Commission des droits.
Le gouvernement algérien, il y a déjà trois ans, a transmis une invitation au rapporteur pour qu'il vienne s'informer et enquêter sur les exécutions sommaires qui ont eu lieu en Algérie. Il n'a pas pu, pour différentes raisons, donner suite à cette invitation du gouvernement algérien, mais nous savons qu'il y a actuellement un regain d'intérêt pour la visite de ce rapporteur en Algérie et peut-être même de grands rapporteurs sur des thèmes spécifiques comme l'exécution extrajudiciaire, l'exécution sommaire, la disparition, etc.
[Traduction]
M. Paul Dingledine: Je ne sais pas si nous avons un rapport précis. Nous tenterons de voir s'il existe des documents de l'ONU sur les droits de la personne en Algérie, et si nous avons de tels documents, nous vous les fournirons. Pour l'instant, je ne sais pas si de tels documents existent.
[Français]
Le président: Monsieur Turp.
M. Daniel Turp: Je vais essayer de vous éclairer. Il s'agit du rapport que l'Algérie fournit à la Commission des droits de l'homme de l'ONU et qui doit être fait de façon périodique. Il doit certainement se trouver à la Bibliothèque Lester B. Pearson.
• 1055
Je pense que c'est effectivement un document
important pour le comité, qui pourrait voir qu'on
ne dit rien dans ces rapports-là. On pourrait
peut-être avoir le procès-verbal de la réunion
à l'occasion de laquelle les membres du comité
ont posé des questions aux représentants algériens et
voir quelles réponses ont été données.
Personnellement, il me semble qu'il y a une espèce de dialogue de sourds. Quand des représentants d'une ONG demandent au gouvernement d'intervenir pour favoriser la tenue d'une session spéciale de la Commission des droits de l'homme des Nations unies ou de favoriser l'établissement d'une commission internationale d'enquête, le gouvernement se sert du prétexte que l'Algérie refuse pour ne pas le faire. Cela ne nous fait donc pas avancer.
Je voudrais demander aux représentants des ONG ce qu'ils souhaitent que nous fassions en tant que parlementaires pour que la situation en Algérie soit connue des citoyens. D'ailleurs, dans un récent sondage publié il y a quelques semaines, plus de 70 p. 100 des Québécois interrogés demandaient l'intervention du gouvernement du Canada dans ce dossier. Je voudrais savoir, messieurs, madame, ce que vous souhaitez que nous fassions en tant que parlementaires pour que quelque chose se passe.
M. André Paradis: Je pense que nous avons déjà exprimé clairement ce que nous souhaitons, à savoir que ce comité fasse des recommandations à la Chambre des communes et au ministre des Affaires étrangères pour soutenir les demandes qui ont été présentées par les grandes ONG internationales de défense des droits, c'est-à-dire la tenue d'une session extraordinaire de la Commission des droits sur l'Algérie et la création d'une forme de commission d'enquête internationale.
Je dois dire que le ministre des Affaires étrangères a demandé à nous rencontrer. Il y a une rencontre qui va avoir lieu la semaine prochaine ici, à Ottawa, où nous aurons l'occasion de discuter davantage avec lui des propositions que l'on présente.
Je voudrais souligner encore une fois ce qu'a dit mon collègue d'Amnistie. À l'origine, c'est le secrétaire général de l'ONU qui, le premier, a demandé l'intervention de la Communauté internationale. Ensuite, ce fut Mme Robinson, le haut-commissaire des droits de l'homme, puis des représentants de l'UNICEF et du Haut-Commissariat pour les réfugiés. Si on n'a pas donné suite à ces demandes et si on constate actuellement un silence de la part de l'ONU, c'est sans doute à cause de la réponse négative et très ferme du gouvernement algérien. Mais c'est peut-être dû surtout au fait que ces instances de l'ONU n'ont pas trouvé, comme cela a déjà été dit, d'appui ou de volonté politique parmi les États membres, en particulier ceux qui sont membres de la Commission des droits de l'ONU.
M. Daniel Turp: Nous prenons note de ce que vous avez dit, et le comité agira en conséquence. Nous avons l'intention de présenter une motion à ce sujet.
[Traduction]
Le vice-président (Bob Mills): Merci.
J'aimerais remercier les témoins d'être venus nous rencontrer aujourd'hui.
J'aimerais rappeler au comité que notre prochaine réunion est prévue pour jeudi à 9 h 30. Nous recevrons la ministre Marleau.
Merci. La séance est levée.