FINA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON FINANCE
COMITÉ PERMANENT DES FINANCES
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 4 novembre 1997
Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): Je déclare la séance ouverte. Bon après-midi et bienvenue à tous.
Comme vous le savez, conformément à l'article 83.1 du Règlement, notre comité tient des audiences pour recueillir le point de vue des Canadiens en vue du prochain budget fédéral. Au cours de notre tournée du pays, divers groupes, organisations et particuliers nous ont fait des suggestions intéressantes à propos des mesures que nous devrions prendre pour tenter d'améliorer la qualité de vie des Canadiennes et des Canadiens.
Nous entendrons cet après-midi les représentants de la Fédération canadienne des municipalités, de la Coalition pour le renouvellement des infrastructures du Canada, de la Canadian Association of Oilwell Drilling Contractors, de l'Association canadienne de la construction et de l'Association des pompiers professionnels de l'Ontario.
Beaucoup parmi vous ont déjà participé à des séances de ce genre. Vous avez cinq minutes pour faire vos exposés, après quoi, nous procédons à une période de questions.
Nous débuterons par les représentants de la Fédération canadienne des municipalités, MM. Jae Eadie et Gilles Vaillancourt.
Soyez les bienvenus.
M. Jae Eadie (président, Fédération canadienne des municipalités): Merci beaucoup, monsieur le président et membres du comité.
Je suis président de la Fédération canadienne des municipalités et maire suppléant de la ville de Winnipeg au Manitoba. Je suis accompagné de mon collègue, M. Gilles Vaillancourt, maire de Laval au Québec, qui a été réélu pour un troisième mandat il y a à peine deux jours. M. Vaillancourt préside notre Comité permanent des finances municipales.
La Fédération canadienne des municipalités (FCM) est reconnue comme le porte-parole national des administrations municipales depuis 1937. Quelque 630 municipalités de chacune des provinces et des deux territoires sont membres de la FCM, représentant globalement plus de 20 millions de Canadiens. De plus, les 16 principales associations provinciales et territoriales de municipalités en sont également membres et sont représentées à notre conseil national d'administration.
• 1240
Compte tenu du temps qui nous est alloué, j'aborderai
directement le point principal de notre exposé.
Dans toutes les discussions qui se sont tenues à propos de l'excédent budgétaire fédéral tant attendu et des «dividendes» qui sont censées en découler, une préoccupation prioritaire et constante des administrations municipales a été complètement omise, et c'est celle du nécessaire réinvestissement dans les infrastructures municipales de services publics et de transport, après des années de restrictions budgétaires, de retrait du gouvernement fédéral du secteur des transports et de transferts de coûts aux administrations municipales.
La FCM apprécie à leur juste valeur les mesures prises par le gouvernement pour permettre la modernisation des infrastructures municipales. En effet, le programme Travaux d'infrastructure Canada, dont l'idée de base avait émané de la FCM, a été couronné de succès tant sur le plan de la création d'emplois que sur celui du renouvellement et de la construction d'équipements collectifs durables. Il a aussi fourni, partout au pays, un solide exemple de fédéralisme canadien et de coopération intergouvernementale.
La Fédération canadienne des municipalités croit qu'il faut élaborer une stratégie tripartite à long terme en matière d'infrastructures municipales afin de combler le déficit qui subsiste à ce chapitre et de se doter des équipements collectifs requis pour faire face à la croissance rapide de la population engendrée par la politique fédérale sur l'immigration.
Une étude de l'Université McGill a conclu qu'il reste pour plus de 40 milliards de dollars de travaux à réaliser pour pouvoir restaurer convenablement les infrastructures municipales. En raison des accords fiscaux intergouvernementaux actuels ainsi que de l'épidémie de délestages fédéraux, provinciaux et territoriaux qui se manifeste dans presque tous les secteurs de dépenses, les municipalités ne peuvent carrément pas venir à bout de cette tâche. Il s'agit là d'un problème qui devrait tous nous préoccuper. Les citoyens, les industries, les milieux d'affaires et tous les paliers de gouvernement souffrent de la détérioration des infrastructures de base et du manque d'équipements pour répondre aux besoins engendrés par la croissance.
[Français]
Le président: Gilles Vaillancourt.
M. Gilles Vaillancourt (président du comité des finances, Fédération canadienne des municipalités): Merci, monsieur le président.
Les municipalités partout au Canada ont subi les contrecoups du retrait sans précédent du gouvernement fédéral du domaine des transports, en particulier celles qui sont situées à l'extérieur du corridor Québec-Windsor.
• 1245
À la FCM, nous constatons un mouvement d'insatisfaction
grandissant dans les provinces de l'Atlantique, dans
l'Ouest et dans le Nord face au délestage d'aéroports,
de ports de mer et de ports de pêche, à l'abandon de
lignes ferroviaires, à la réduction des services de VIA
Rail et à la dégradation des routes. Ces mesures
contribuent à alimenter le germe du régionalisme et de
l'aliénation entre les régions urbaines et les régions
rurales.
Au même titre que les infrastructures urbaines, les infrastructures de transport nationales sont essentielles à notre économie d'abord et ensuite à notre qualité de vie. La FCM voudrait qu'on reconnaisse le principe qu'en certaines circonstances, il est souhaitable de faire de nouveaux investissements stratégiques dans les infrastructures de transport. Ces investissements doivent être évalués d'un point de vue environnemental et social, et surtout d'un point de vue économique. Plus particulièrement, la FCM appuie la création d'un programme fédéral-provincial-territorial d'entretien du réseau routier national en raison de son importance pour le commerce national et international et pour le tourisme. Cette question prend de plus en plus d'importance dans le contexte de la rationalisation continue du service ferroviaire et du délestage des aéroports et des ports de mer fédéraux, à cause de la hausse du trafic des marchandises et des passagers occasionnée sur la route. Les répercussions se font sentir sur les coûts d'entretien des routes municipales et provinciales, ainsi que sur l'environnement. La situation est, à toutes fins pratiques, devenue insoutenable.
Les problèmes environnementaux: La FCM croit que le Canada doit respecter ses engagements dans le domaine du réchauffement planétaire. Les gouvernements municipaux ont un rôle important et évident à jouer en matière de changement climatique. Ils sont prêts à collaborer avec le gouvernement fédéral, mais la collaboration doit se faire à deux.
Nous appuyons la recommandation du Comité permanent de l'environnement et du développement durable de la Chambre des communes et le Livre rouge du Parti libéral qui stipulent qu'il incombe au gouvernement de s'assurer que la politique environnementale ne soit pas affaiblie par la politique fiscale. Malheureusement, le gouvernement fédéral refuse encore d'emboîter le pas à d'autres pays industrialisés et d'abolir l'impôt sur le laissez-passer de transport en commun payé par l'employeur. En vertu de la politique fédérale sur l'impôt sur le revenu, les avantages de stationnement fournis par l'employeur sont officiellement imposables, mais la plupart des employés sont admissibles à des exemptions. Par contre, les laissez-passer de transport en commun payés par les employeurs sont imposés en entier, ce qui représente un avantage fiscal d'environ 570 $ par année au fédéral pour ceux qui prennent leur voiture pour aller au travail par rapport à ceux qui utilisent le transport en commun. En ajoutant la valeur moyenne annuelle d'un espace de stationnement urbain et la TPS économisée, on en arrive à une différence moyenne de 1 726 $ entre les deux. Voilà une véritable mesure incitative à utiliser sa voiture plutôt que l'autobus.
L'abolition de l'impôt sur les laissez-passer de transport en commun payés par les employeurs permettrait d'éliminer jusqu'à 300 millions de kilomètres de déplacements urbains en voiture par année d'ici 10 ans, réduisant ainsi de près de 35 p. 100 la croissance prévue de la circulation aux heures de pointe aux abords des grands centres du Canada. Il en résulterait des milliards de dollars d'économies au chapitre de la construction routière, une diminution de dizaines de milliers de tonnes d'émanations nocives de gaz à effet de serre chaque année et un désengorgement des routes, ce qui aurait des effets positifs à la fois sur les coûts de transport et sur l'efficience économique. La FCM invite fortement le comité à appuyer la demande que le laissez-passer de transport en commun payé par l'employeur devienne non imposable pour l'utilisateur, comme c'est le cas aux États-Unis et en Europe.
La préservation du patrimoine revêt une grande importance, pour des motifs tant d'ordre culturel qu'environnemental. Mais actuellement, la règle sur la perte finale de la Loi fédérale de l'impôt sur le revenu encourage plutôt la démolition d'immeubles d'intérêt patrimonial. Nous voudrions appuyer des modifications à la Loi de l'impôt sur le revenu qui favoriseraient plutôt la conservation, la restauration et le don d'immeubles historiques.
[Traduction]
M. Jae Eadie: La FCM et les municipalités qui en sont membres sont saluées dans le monde entier pour leur travail de chefs de file dans le domaine de la coopération municipale à l'échelle internationale. Forte du soutien de l'ACDI, la FCM gère des partenariats municipaux et des programmes de formation en collaboration avec des administrations municipales d'Afrique, d'Amérique latine, d'Asie et d'Europe de l'Est. Le savoir-faire canadien à l'échelon municipal est de plus en plus en demande, particulièrement en raison des programmes de décentralisation et de démocratisation qu'ont entrepris d'appliquer de nombreux pays, programmes qui amènent les municipalités à assumer une plus grande part de responsabilité en matière de traitement des déchets et d'aménagement du territoire ainsi que dans d'autres domaines connexes.
• 1250
La collaboration municipale à l'échelle internationale mène au
développement de liens commerciaux et diplomatiques importants pour
notre gouvernement et nos entreprises.
Le fait que le premier ministre ait jugé bon d'inviter nos dirigeants municipaux à participer aux missions commerciales qu'Équipe Canada a effectuées ces dernières années dans divers pays du monde l'illustre bien.
La Fédération canadienne des municipalités exhorte le comité à recommander au gouvernement d'accroître le budget de l'ACDI afin de favoriser la coopération municipale à l'échelle internationale.
En conclusion, les gouvernements municipaux jugent qu'après des années de restrictions budgétaires le réinvestissement dans les infrastructures municipales de services publics et de transport doit demeurer au rang des priorités.
Enfin, le régime fiscal fédéral doit soutenir et non entraver le maintien à long terme d'un environnement de qualité.
Merci, monsieur le président. Cela met fin à notre exposé.
Le président: Merci beaucoup. Votre exposé était très intéressant.
Nous allons maintenant passer au représentant de la Coalition pour le renouvellement des infrastructures du Canada, M. John D. Redfern.
M. John Redfern (président, Coalition pour le renouvellement des infrastructures du Canada): Monsieur le président, membres du comité, je vous remercie de l'occasion qui m'est offerte aujourd'hui de pouvoir m'adresser à vous.
On nous a demandé de contribuer à la discussion sur les trois questions qui ont été soumises à l'attention du comité: sur quelles prémisses économiques le gouvernement devrait-il se fonder pour établir le prochain budget; devrait-il s'engager à faire de nouveaux investissements stratégiques; et quels moyens devrait-il prendre pour accroître les possibilités de création d'emplois?
De l'avis de la CRIC, une grande partie des réponses à ces questions se trouve dans un programme national à long terme de renouvellement du réseau routier, programme dont le gouvernement fédéral assumerait la direction. Il importe que les gouvernements administrent le pays de manière à créer un climat économique propre à stimuler l'investissement. Les conditions dans lesquelles se livre maintenant la concurrence pour attirer les investissements ont bien changé. Le Canada doit veiller à ce que ce climat soit adapté aux réalités mondiales. L'entreprise canadienne doit désormais être prête à être en compétition avec des sociétés de partout dans le monde.
Il est crucial pour tout gouvernement qui aspire à promouvoir la croissance économique et la création d'emplois de mettre en place les infrastructures de base requises.
En tant que porte-parole national d'une vaste coalition représentant tous les secteurs de l'économie, notre organisme est vivement préoccupé par le piètre état dans lequel se trouve notre réseau routier et par l'incidence négative qu'engendre cette détérioration sur la croissance économique et la création d'emplois au Canada.
Un groupe de travail que les libéraux, lorsqu'ils étaient encore dans l'opposition, avaient chargé de se pencher sur la question des infrastructures avait souligné l'importance des routes pour l'économie canadienne. Il avait recommandé au gouvernement fédéral de s'engager à restaurer et à prolonger l'autoroute transcanadienne. Voici ce qu'il déclarait dans son rapport:
-
[...] Les conséquences économiques du mauvais état des routes sont
renversantes. Des études révèlent que la productivité d'une région
dépend dans une très large mesure de son système de transport. Les
embouteillages augmentent le coût de transport des matériaux, ce
qui réduit la compétitivité de l'industrie. Le mauvais état des
routes [...] a également un impact négatif sur le tourisme, un
secteur important de l'économie canadienne.
Le rapport du Comité permanent des transports de la Chambre des communes en venait à la même conclusion. Voici ce qu'on pouvait lire dans le rapport du comité:
-
[...] Un réseau routier efficace et concurrentiel constitue l'une
des conditions fondamentales d'une économie saine. On a fait la
preuve hors de tout doute de l'importance que revêt pour le
tourisme et le commerce un réseau de transport routier sûr et
compétitif.
Notre mémoire fait état de la rentabilité d'investissements de ce genre: augmentation du tourisme, réduction du nombre d'accidents mortels, accroissement de la productivité, renforcement de l'unité du pays, etc. Les retombées du projet spécial d'infrastructures réalisé par Transports Canada confirment cette rentabilité.
Depuis neuf ans, le gouvernement fédéral s'occupe directement, en collaboration avec les gouvernements provinciaux, de la planification et de l'aménagement du réseau routier national. D'ailleurs, Ottawa participe depuis 1919 à des projets de construction de routes et d'infrastructures de toutes sortes.
Le gouvernement fédéral intervient également dans le cadre de sept programmes bilatéraux.
• 1255
Compte tenu de ces faits, la CRIC recommande au gouvernement
fédéral d'adopter une politique routière nationale à long terme qui
lui permettrait dans l'avenir de superviser au besoin la réfection
et l'expansion du réseau routier national du Canada.
Auparavant, il faudra toutefois avoir d'abord trouvé réponse à la question suivante: où trouverons-nous l'argent pour financer le coût des travaux requis? Pour un gouvernement qui examine diverses options d'investissement dans les infrastructures, il peut être attrayant de chercher à obtenir l'aide du secteur privé en l'invitant à participer à des partenariats État-secteur privé. Le succès d'entreprises conjointes de cette nature repose sur l'adoption de solutions créatives, de même que sur une volonté et une ouverture à l'égard de formules de financement originales.
Si on l'y invite, le secteur privé participera à la conception et à la mise en oeuvre d'un plan national de renouvellement du réseau routier national canadien. Le gouvernement fédéral doit cependant garder le leadership et être prêt à s'engager dans un programme à long terme. Comme le mentionnait le Comité permanent des transports cette année, le gouvernement fédéral doit pouvoir fournir une source sûre et garantie de financement à long terme pour la reconstruction et l'entretien du réseau routier national.
Les provinces ont témoigné à plusieurs reprises leur empressement à participer à une telle entreprise conjointe. Pas plus tard qu'en juin dernier, les ministres des Finances des provinces de l'Ouest ont présenté au ministre des Finances fédéral un document où ils faisaient état de leurs priorités. L'élaboration d'un plan routier national figurait en deuxième place sur cette liste.
Les coûts des travaux de construction et d'entretien du réseau routier national du Canada effectués par les gouvernements provinciaux et fédéral ont toujours été financés à même les recettes fiscales. Or, contrairement à ce qui se passe actuellement aux États-Unis, il n'existe aucun lien direct entre les sommes que le gouvernement fédéral perçoit en taxes sur l'essence et ce qu'il investit dans notre réseau routier national. Le gouvernement fédéral perçoit 13,7 ¢ le litre en taxes sur l'essence. En 1996, Ottawa a ainsi perçu 5 milliards de dollars en taxes d'accise sur la vente d'essence. Or, Transports Canada ne dépensera que 5 p. 100 de ces sommes.
La qualité des routes canadiennes a une incidence sur les décisions que prennent les entreprises concernant l'endroit où elles s'installent, leurs investissements immobiliers, leurs méthodes de production, leurs relations avec les fournisseurs et la clientèle, la localisation et la disponibilité de leurs stocks et l'accès à la main-d'oeuvre. Un plan à long terme du genre de celui qui est décrit dans le rapport d'examen de la politique routière nationale nous permettrait de consolider notre réseau routier avec le maximum d'efficacité et de stimuler notre économie. Permettez-moi de vous citer un extrait de l'éditorial du Globe and Mail du 24 août 1996. On y mentionnait:
-
La qualité et l'attrait des routes d'une région sont parmi les
facteurs qui contribuent le plus au maintien de sa prospérité et de
sa capacité d'attirer des visiteurs et des investissements; on
devrait prendre grand soin de les maintenir en bon état.
Je m'arrête ici. J'ai hâte de discuter de cette question avec vous cet après-midi et j'espère que j'aurai l'occasion de vous faire part de mes conclusions plus tard.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Redfern.
Je vais maintenant céder la parole aux représentants de la Canadian Association of Oilwell Drilling Contractors, MM. Duane Mather, président; Colin MacDonald, conseiller juridique; et Don Herring, directeur général.
Soyez les bienvenus, messieurs.
M. Duane Mather (président, Canadian Association of Oilwell Drilling Contractors (CAODC)): Merci, monsieur le président. Nous avons rédigé un mémoire à votre intention et à celle des membres du comité. Je n'ai pas l'intention de le lire intégralement; je vais me contenter de vous en présenter un résumé.
Permettez-moi d'abord de vous dire un mot de notre association et de nos membres. Notre association compte 98 sociétés membres qui emploient plus de 15 000 personnes. Ces entreprises exploitent plus de 1 200 installations de forage et d'entretien de puits; en 1996, elles ont foré au total dans l'Ouest canadien 12 700 puits de développement et d'exploration de pétrole et de gaz naturel et elles prévoient en forer 16 000 autres cette année. Nos membres forent des puits de pétrole et de gaz naturel non seulement dans l'Ouest canadien, mais aussi au Yukon et dans les Territoires du Nord-Ouest, au Québec et en Ontario, ainsi qu'au large de la côte Est.
Nous sommes une organisation vraiment nationale qui est fière d'avoir contribué historiquement au développement des ressources naturelles de notre pays. Nos membres utilisent des technologies de pointe pour le forage de puits horizontaux et fournissent à leurs clients, nos sociétés pétrolières et gazières, les installations de forage les plus modernes au monde pour leur permettre d'exploiter nos ressources naturelles de la manière la plus rentable possible.
Ainsi, cette nouvelle technologie a permis à notre industrie de réduire considérablement dans ses opérations ce qu'on appelle les émissions de gaz à effet de serre. La CAODC et les entreprises de forage qu'elle représente participent à un programme volontaire de réduction des émissions dans le cadre d'un protocole d'entente qu'elles ont signé l'an dernier avec Ressources naturelles Canada. Depuis lors, nous avons réussi à diminuer de 30 p. 100 notre consommation de mazout et, partant, ces émissions. Nous escomptons obtenir des résultats aussi spectaculaires une fois que ce protocole d'entente aura été étendu à nos entreprises membres qui oeuvrent dans le secteur de l'entretien des puits. On constate donc qu'il est possible de marquer des progrès quantifiables passablement importants en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre à l'aide d'un tel programme volontaire.
• 1300
Sur le plan macroéconomique, comme nous l'indiquons dans notre
mémoire, nos membres se réjouissent de ce que le gouvernement du
Canada se soit attaqué, au cours des quatre dernières années, à son
énorme problème de déficit, ce qui a permis de maintenir les taux
d'intérêt à un bas niveau et, partant, de stimuler concrètement les
investissements dans le secteur des ressources naturelles. À cet
égard, ce que nous conseillons au gouvernement par l'entremise de
votre comité, c'est de maintenir le cap.
Il y a toutefois une recommandation précise que nous aimerions soumettre au ministre des Finances en vue du prochain budget. Elle concerne le traitement des allocations de subsistance dans la Loi de l'impôt sur le revenu.
Permettez-moi, si vous le voulez bien, monsieur le président, de décrire le problème que connaissent nos sociétés membres et leurs employés à cet égard.
Nos sociétés membres versent à leurs employés qui travaillent sur des chantiers de forage éloignés une allocation de subsistance de l'ordre de 60 $ à 80 $ par jour. Cette allocation avait toujours été considérée comme une dépense entièrement déductible du revenu imposable de la société de forage et pouvait être versée à l'employé sans être assujettie à l'impôt. Elle a pour objet de compenser une partie de ce qu'il en coûte à ces employés pour leur logement, leurs déplacements et leurs frais accessoires lorsqu'ils doivent travailler loin de leur lieu de résidence.
Il y a deux ou trois ans, Revenu Canada s'est mis à considérer qu'une partie de cette allocation devait être attribuée au paiement des repas des employés et que seulement 50 p. 100 de cette dépense était déductible du revenu de l'entreprise. Il s'agit là, de la part de Revenu Canada, d'une nouvelle façon d'interpréter la Loi en ce qui concerne ces allocations.
Au cours de dix dernières années, Revenu Canada n'avait jamais contesté la pleine déductibilité des allocations de subsistance. Suite à ce changement de politique, la plupart de nos sociétés membres ont reçu un avis de cotisation dont l'incidence fiscale représente, pour l'ensemble de ces sociétés, au moins 10 millions de dollars.
Nous estimons que cette interprétation des dispositions pertinentes de la Loi de l'impôt sur le revenu est injuste, puisque ces dispositions n'ont été clarifiées qu'après la publication d'un bulletin d'interprétation en avril 1996. Selon nous, toutes les cotisations antérieures à cette date devraient être annulées au nom de l'équité.
Nous contestons d'ailleurs la position de Revenu Canada qui considère qu'une partie de cette allocation sert à compenser le coût des repas des employés. D'après certaines enquêtes que nous avons effectuées récemment, il appert que l'allocation de 80 $ que nous versons actuellement ne suffit même pas à couvrir le coût du séjour à l'hôtel, des déplacements et des frais accessoires, encore moins celui des repas. Le coût des repas, selon nos calculs, n'est nullement compris dans cette allocation, et le fait qu'on considère qu'une partie de cette allocation sert au paiement des repas et que, partant, elle n'est pas déductible du revenu imposable de l'employeur est non seulement injuste mais inconsidéré.
D'ailleurs, de la façon dont on applique actuellement le paragraphe 67.1(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu, une entreprise qui aurait une cantine ou qui, en vertu d'une entente avec un restaurant ou un traiteur local, paierait les repas de tous ses employés sur les lieux de travail aurait droit de déduire la totalité de ces dépenses. Revenu Canada considère toutefois, on ne sait trop pourquoi, que, lorsque ces frais sont payés au moyen d'une allocation, ils ne sont déductibles du revenu de l'entreprise que dans une proportion de 50 p. 100.
Nous croyons que l'intention qu'avait initialement le Parlement en permettant de déduire seulement une portion des dépenses relatives aux repas et aux loisirs était logique. Nous estimons toutefois que le coût des repas pris sur un lieu de travail éloigné ne devrait pas être traité de la même façon que ne le serait le coût de repas pris en plein coeur de la ville de Calgary ou d'Ottawa et qu'il n'a jamais été de l'intention du Parlement de ne les rendre déductibles que partiellement.
Nous nous sommes adressés directement au ministère des Finances et à Revenu Canada pour tenter de régler ces questions et nous sommes toujours en discussion avec eux à ce sujet.
Notre mémoire contient à cet égard certaines recommandations que nous avons déjà soumises aux deux ministères; nous espérons pouvoir les porter aujourd'hui à votre attention et vous convaincre de les appuyer.
Nous ne sommes pas les seuls à vouloir mettre cette question sur le tapis. Nos collègues de l'Association canadienne de la construction la soulèvent également dans le mémoire qu'ils vous ont soumis. Nous partageons sur ce chapitre les mêmes griefs et nous espérons vous convaincre que rien ne justifie qu'on traite injustement nos membres et ceux de cette association dans l'application de cette disposition de la Loi de l'impôt sur le revenu.
En fin de compte, ce sont nos 15 000 employés qui écoperont si on ne modifie pas cette disposition de la loi ou si on ne l'interprète pas autrement.
Je vous remercie beaucoup, monsieur le président, de nous avoir donné l'occasion de participer aujourd'hui à cette table ronde.
Le président: Merci beaucoup.
Nous entendrons maintenant les représentants de l'Association canadienne de la construction, MM. Michael Atkinson, président, et John DeVries, vice-président.
Bienvenue messieurs.
M. Michael Atkinson (président, Association canadienne de la construction): Merci beaucoup, monsieur le président et membres du comité.
L'Association canadienne de la construction (ACC) représente quelque 20 000 entreprises de l'industrie de la construction non résidentielle, l'industrie, monsieur le président, qui apporte la plus importante contribution à l'économie canadienne et qui emploie directement quelque 750 000 Canadiens.
• 1305
L'Association canadienne de la construction est heureuse
d'avoir l'occasion d'exprimer ses points de vue en prévision du
prochain budget fédéral. Vous avez invité les témoins à répondre à
trois questions auxquelles nous croyons avoir tenté de répondre
dans le mémoire que vous avez en main. Nous trouvons certes
encourageants les progrès soutenus qui ont été réalisés jusqu'à
maintenant en vue de l'élimination du déficit fédéral et souhaitons
que le gouvernement poursuive dans la même voie pour s'attaquer à
la dette fédérale accumulée. Nous estimons cependant qu'il ne doit
pas chercher à atteindre cet objectif en haussant les impôts.
Or, à notre avis, le refus de reconnaître, pour quelque raison que ce soit, la déductibilité de certaines dépenses constitue une augmentation d'impôt déguisée. Le porte-parole de la Canadian Association of Oilwell Drilling Contractors vous a parlé tout à l'heure du traitement fiscal inéquitable que Revenu Canada réserve depuis quelque temps aux allocations de subsistance ou d'éloignement. Il va sans dire que cette décision a suscité une profonde inquiétude au sein de notre industrie. Vous pouvez facilement imaginer combien une telle mesure peut freiner l'embauche dans une industrie comme la nôtre qui est le plus gros employeur au pays. La mobilité de la main-d'oeuvre est primordiale dans notre secteur.
Pour nos entrepreneurs membres, le fait de se voir imposer ainsi à brûle-pourpoint et sans avertissement une interprétation de la loi qui les amène à ne plus pouvoir déduire la totalité du coût de ces allocations engendre chez eux de graves inquiétudes non seulement parce qu'ils verront leurs impôts augmenter, mais aussi en raison des conséquences négatives qu'aura une telle mesure sur l'emploi, sur la mobilité de la main-d'oeuvre, etc. Cette question revêt donc pour nous une importance capitale.
Comme le mentionnaient mes collègues de l'Association des entrepreneurs en forage, ce ne sont pas ces allocations que visait le législateur quand il a adopté cette mesure; c'est sûrement plutôt aux «déjeuners-martinis», comme d'aucuns les appellent, ou si vous préférez, aux repas d'affaires qu'il voulait s'attaquer. D'ailleurs, dans certaines des premières directives que Revenu Canada et le ministère des Finances ont publiées concernant la déductibilité de 80 p. 100, on précisait entendre par là les «repas d'affaires».
Les allocations de subsistance que versent les entreprises membres de notre industrie ou de celle du forage à leurs employés afin de leur procurer un minimum pour les aider à se loger et à se nourrir pendant qu'ils travaillent loin de leur foyer, pas toujours dans des circonstances ou dans un milieu des plus agréables, dans bien des cas... et d'aller dire que ces allocations devraient être traitées sur le même pied que les «déjeuners-martinis», c'est une farce. Pour notre industrie, c'est un sérieux problème.
De concert avec nos collègues, nous pressons votre comité d'examiner cette question de très près et de recommander lui aussi au ministère des Finances de veiller à ce que l'intention première du législateur en rédigeant cette loi soit respectée.
Un autre aspect qui nous inquiète est que l'attitude qu'adopte Revenu Canada dans l'application de ces dispositions est très discriminatoire. Nos entreprises membres sont lésées par cette interprétation restrictive de la loi dans certaines régions et non dans d'autres. Il n'est d'ailleurs par rare qu'on ne réagisse pas de façon identique, selon les régions, à l'égard d'allocations versées par un même employeur.
Les régions qui sont frappées par cette application indue de la loi—le nord de l'Alberta, le nord de l'Ontario, le Québec—sont justement celles où notre industrie commence enfin à entrevoir la lumière au bout du tunnel après avoir connu une période de faible volume de production, de faible embauche, etc. Cette interprétation restrictive de la Loi de l'impôt sur le revenu ne pouvait tomber à un pire moment pour notre industrie.
J'ai mentionné que nous souhaiterions que le gouvernement maintienne le cap quand viendra le moment de s'attaquer à la dette fédérale accumulée, et qu'il le fasse sans augmenter les impôts. Nous estimons également qu'il a suffisamment de marge de manoeuvre pour accorder certains allégements fiscaux stratégiques. À ce propos, j'aimerais vous parler ici très brièvement d'un domaine particulier où il pourrait le faire, celui des cotisations d'assurance-emploi.
De concert avec un certain nombre d'autres groupes du milieu des affaires, nous demandons instamment au gouvernement fédéral de faire passer le taux des cotisations d'assurance-emploi de 2,90 $ à 2 $ par 100 $ de rémunération. On prévoit que le surplus accumulé dans le compte d'assurance-emploi sera d'environ 12,8 milliards de dollars à la fin de 1997 et qu'il atteindra les 14 milliards en 1998, même si le taux de cotisation est réduit comme nous le proposons. Ces prévisions se fondent sur les propres projections du gouvernement. Il va sans dire qu'un surplus de 14 milliards de dollars dans le compte de l'assurance-emploi, c'est plus que suffisant comme réserve en prévision des mauvais jours.
• 1310
Une réduction de cette ampleur permettrait de réinjecter
quelque 6,5 milliards de dollars dans l'économie. Selon nous, elle
serait tout particulièrement justifiée puisque, rappelons-nous-le,
les cotisations d'AE, qu'on appelait à cette époque les cotisations
d'AC, ont été considérablement haussées en 1989 pour permettre au
gouvernement de financer des programmes de formation, d'utiliser
les fonds de l'AC à des fins productives, comme on le disait alors.
Les cotisations ont donc été expressément augmentées pour financer,
par exemple, la formation en apprentissage, à laquelle nous
attachons tous tant d'importance dans l'industrie de la
construction—à même le compte de l'AC ou maintenant de l'AE.
Le gouvernement fédéral a pourtant annoncé l'an dernier qu'il se retirait du financement de ces programmes. En principe, les fonds du compte de l'AE continuent de s'accumuler notamment pour être dépensés et investis dans des programmes de formation comme le programme de formation en apprentissage, alors qu'en réalité le gouvernement fédéral se retire progressivement du financement de tels programmes tout en maintenant les cotisations au même niveau.
L'industrie de la construction a donc un double argument, une double raison, pour demander que les cotisations soient réduites.
Mes collègues de la Fédération canadienne des municipalités et de la Coalition pour le renouvellement des infrastructures du Canada vous ont parlé de l'urgente nécessité—et j'utilise ces mots tout à fait à dessein—de nous doter d'une politique stratégique nationale à long terme de renouvellement de nos infrastructures. Nos infrastructures sont dans un tel état de détérioration que nous éprouvons le besoin d'en parler comme de notre second déficit national, un déficit qui atteint des proportions alarmantes et qui est aussi menaçant et suicidaire pour la prospérité future du Canada que ne l'est notre dette publique.
Le gouvernement fédéral doit exercer un leadership dans ce domaine. Notre infrastructure nationale de base est trop importante pour notre prospérité future pour laisser les différents paliers de gouvernement se renvoyer bêtement la balle ou pour qu'on se permette de verser dans la petite politique partisane.
Nous exhortons donc le gouvernement à donner suite aux recommandations contenues dans le rapport que le Comité permanent des transports de la Chambre des communes a publié en février 1997 concernant la réfection et l'entretien de notre réseau routier national.
À l'instar de nos collègues de la Fédération canadienne des municipalités, nous pressons le gouvernement de doter notre pays d'une politique nationale et d'un programme à long terme de renouvellement de nos infrastructures municipales.
On s'interroge souvent à savoir si nous avons les moyens de nous payer un tel programme. À cela, je réponds que nous devons plutôt nous demander si nous pouvons nous permettre de ne pas le réaliser.
Je n'ai jamais entendu dire que quelqu'un ait déclaré, lors d'une des innombrables rencontres ou séances de comité qu'on a tenues pour nous interroger sur le piètre état de nos infrastructures, que nous devrions nous en désintéresser, que nous devrions les laisser se détériorer jusqu'à ce que nos autoroutes, nos routes et nos ponts soient devenus inutilisables, jusqu'à ce que l'eau ne puisse plus circuler normalement dans nos réseaux municipaux d'aqueduc et que nous ne puissions plus nous débarrasser de nos eaux usées. Je n'ai jamais entendu personne dire qu'après tout, cela n'était pas tellement important.
Vraiment, monsieur le président, il ne s'agit pas de nous demander si nous devrions réinvestir dans nos infrastructures, mais bien de nous demander quand nous allons nous y mettre et combien cela va nous coûter. Comme vous le savez tous, plus on tarde à réparer un toit qui coule, plus la réparation finit par coûter cher.
Je vous remercie encore une fois de l'occasion que vous nous avez donnée de vous faire part de nos points de vue. Nous sommes bien sûr impatients de répondre à vos questions et de discuter de ces points avec vous.
Le président: Merci, monsieur Atkinson.
Ce sera maintenant au tour de l'Association des pompiers professionnels de l'Ontario, dont le porte-parole est M. Rick Miller.
M. Dale Kinnear (analyste du travail, Association canadienne des policiers): Je vous remercie de nous avoir invités à comparaître devant vous pour vous expliquer notre point de vue sur une question à laquelle le gouvernement devrait à notre avis s'attaquer dans son prochain budget.
Je suis accompagné aujourd'hui de Sean McManus, qui est directeur pour le Canada de l'Association internationale des pompiers, et de Rick Miller, du poste no 5 du service des incendies de la ville de Windsor, qui préside le Comité sur les pensions de l'Association des pompiers professionnels de l'Ontario et qui est membre du conseil de direction du Régime de retraite des employés municipaux de l'Ontario.
Je m'appelle Dale Kinnear. Je suis analyste du travail pour l'Association canadienne des policiers et je fais partie de l'effectif de la Police provinciale de l'Ontario. Je représente 40 000 policiers canadiens.
Nous sommes ici non pas pour traiter des trois points qui figuraient sur la liste de consultation, mais pour porter à votre attention un problème relatif à nos prestations de retraite.
• 1315
Comme vous le savez, la Loi de l'impôt sur le revenu crée une
catégorie à part pour les préposés à la sécurité publique. Les
policiers et les pompiers font partie de cette catégorie. La loi
les exempte de l'application des dispositions régissant l'âge
normal de la retraite qui figurent dans la définition des régimes
de pension agréés.
Compte tenu de la nature de notre travail d'intervenants de première ligne en situation d'urgence, nous croyons que nous méritons plus que de simplement pouvoir prendre notre retraite quelques années plus tôt sans être pénalisés. Ce que nous vous demandons, c'est d'envisager la possibilité de modifier la loi de manière à permettre à nos membres de profiter d'un taux annuel d'accumulation des prestations supérieur au taux de 2 p. 100 actuellement permis aux cotisants de régimes de pension agréés. La seule conséquence pour le gouvernement serait une légère perte de revenu découlant du supplément de cotisation que nos membres seraient autorisés à déduire de leur revenu imposable en vertu des dispositions régissant les régimes de pension agréés.
Les policiers et les pompiers sont plus souvent victimes d'accidents mortels lorsqu'ils sont en devoir que n'importe quel autre préposé à la sécurité publique. Des pompiers trouvent inutilement la mort dans des incendies allumés volontairement ou causés par une négligence. La semaine dernière encore, ici même sur la rue Somerset à Ottawa, le service des incendies était appelé à combattre un incendie qui aurait pu anéantir plusieurs immeubles. On a découvert par la suite qu'il s'agissait d'un incendie criminel.
Il n'existe aucun moyen de prévoir, encore moins de contrôler, les innombrables matières dangereuses ou toxiques auxquelles un pompier peut être exposé durant sa carrière. Ces derniers mois ou années, des policiers ont été abattus parce qu'ils exercent ce métier et qu'ils se sont engagés sous serment à faire leur devoir. Les peines les plus sévères prévues dans le Code criminel sont celles liées au meurtre d'un agent de la paix. Il n'existe aucune autre fonction dont le titulaire est aussi exposé à être victime d'attentat.
Dans aucun autre métier au Canada on ne risque autant de mourir en devoir que dans celui de pompier ou de policier. Voilà pourquoi nous vous demandons de prendre en considération la demande suivante dans vos délibérations préparatoires au budget de 1998. Je laisse maintenant le soin à Rick Miller de vous expliquer en quoi elle consiste.
M. Rick Miller (président, Comité des pensions, Association des pompiers professionnels de l'Ontario): Bonjour à tous. Avant de débuter, je tiens à souhaiter aux municipalités bonne chance dans leur demande d'amélioration du réseau routier, car je serais bien heureux de pouvoir conduire un camion d'incendie sur des voies plus carrossables. Le seul avantage des chemins cahoteux, c'est qu'ils semblent permettre aux gens de voir un peu mieux clignoter nos feux.
J'aimerais ajouter quelques explications à l'exposé sommaire que nous avons remis aux membres du comité. Je vais examiner avec vous quatre aspects qui portent à conséquence pour nos pompiers et nos policiers.
D'abord, en ce qui concerne le projet de modification du Régime de pensions du Canada, les nouvelles prestations réduites seront calculées en fonction du revenu des cinq dernières années plutôt que sur celui des trois dernières comme actuellement. Ce changement dans le mode de calcul entraînera une diminution du revenu de retraite de nos membres, sans compter qu'après le décès du bénéficiaire, son conjoint ne touchera que 60 p. 100 de ce nouveau montant réduit de prestations.
Augmentation des cotisations pour les prochaines années... le plafond éventuel se situera aux alentours de 9,9 p. 100, ce qui se traduira par une perte monétaire immédiate pour les pompiers professionnels et les policiers. Le blocage de l'exemption annuelle de base appauvrira également nos membres. Ce sont là les trois éléments qui nous inquiètent le plus dans les réformes que le gouvernement se propose d'apporter au RPC par son projet de loi C-2. Compte tenu de la nature de nos fonctions, je me demande bien comment nous allons faire pour combler ce manque à gagner dans nos futurs revenus de retraite et dans nos revenus d'emploi, vu que la règle relative à l'âge de la retraite obligatoire nous enlève la possibilité de demeurer à l'emploi plus longtemps.
À cause d'une des mesures annoncées dans le budget de 1997, nos membres verront leur plafond annuel de contribution au REER réduit de 400 $, ce qui représente pour chacun d'eux 10 000 $ sur une carrière de 25 ans. Ils perdront donc l'impôt sur ces 400 $ qui s'ajouteront à leur revenu imposable, plus l'intérêt progressif accumulé sur ce manque à gagner dans leur REER. Voilà un autre recul pour nos membres.
Allocations de retraite. Dans son budget de 1995, le ministre des Finances a décidé de cesser d'exonérer d'impôt les allocations de retraite pour les années de service ultérieures au 31 décembre 1995. Nos futurs membres risquent donc de perdre au profit du fisc jusqu'à 50 p. 100 de ces allocations au moment de prendre leur retraite. L'allocation de retraite leur permet d'accroître leur fonds de pension, ce qui leur importe d'autant plus que leur carrière est brève. Nos futurs retraités profiteront donc de moins en moins de cette ancienne exemption, ce qui constituera une autre brèche dans le revenu qu'ils escomptaient toucher à leur retraite, et ils ne disposeront d'aucun moyen pour compenser cette perte.
• 1320
Dans son projet de prestation de pension de l'an 2001, le
gouvernement se propose d'éliminer le crédit pour revenu de pension
et le crédit en raison d'âge, mesure qui amputera encore davantage
le revenu de nos retraités au moment où ils produiront leur
déclaration d'impôt. Le montant des prestations de sécurité de la
vieillesse sera calculé en fonction du revenu combiné du
particulier plutôt qu'exclusivement en fonction de son revenu
personnel comme c'est le cas actuellement. La plupart des régimes
de pension à prestations déterminées ont été instaurés au cours des
années 60, avec l'intégration du RPC à 65 ans. Une réduction des
prestations s'applique à 65 ans, mais le retraité commence alors à
toucher sa pension de sécurité de la vieillesse, ce qui a pour
conséquence d'atténuer l'importance de cette réduction pour nos
membres.
Ici encore, je vous demande comment nos membres vont pouvoir compenser cette perte de revenu.
La Loi de l'impôt sur le revenu reconnaît que les membres de nos deux professions ont une occupation liée à la sécurité publique, ce qui indique clairement qu'on a tenu à faire un cas à part des métiers liés à la sécurité publique. Cela fait bien des années que le gouvernement reconnaît les risques, les dangers et le niveau de stress que comportent nos professions. Une disposition de la Loi de l'impôt sur le revenu nous permet de quitter la population active plus tôt que les autres travailleurs, mais il importe que nous ayons accès aux mêmes droits que ceux qui exercent d'autres métiers en ce qui concerne l'accumulation des cotisations ouvrant droit à pension. Ces dispositions sont soulignées dans notre documentation.
Quels sont les problèmes qui se posent à nous?
En 1986, un tribunal a reconnu, dans une cause liée au respect des droits de la personne, que notre profession était de celles où la mise à la retraite devait obligatoirement se faire à 60 ans, et plusieurs experts témoins des deux parties ont alors recommandé qu'on nous oblige même à prendre notre retraite bien avant cet âge. Ce tribunal a donc, comme le gouvernement, reconnu le risque réel que comportait l'exercice de métiers liés à la sécurité publique et a retenu l'âge de 60 ans; il a même recommandé que la retraite puisse être même prise à un âge plus précoce.
L'incendie majeur qui s'est produit à Hamilton cette année de même que celui de Kitchener qui a causé des émanations chimiques toxiques illustrent bien les risques que pose l'exercice de nos professions parce que liées à la sécurité publique. Ces incidents ont touché certains de nos membres physiquement et mentalement, d'aucuns parce qu'ils ont vu leur carrière écourtée, d'autres parce qu'ils y ont trouvé la mort. Comment ceux de nos membres qui ont survécu à ces événements vont-ils pouvoir compenser ces manques à gagner s'ils sont en mauvaise santé et ont cinq ans de moins devant eux pour gagner leur vie comparé aux autres travailleurs?
Le ministre des Finances, dans une lettre—dont je vais vous lire quelques lignes—écrivait ceci:
-
Je tiens à vous signaler que je suis très conscient des pressions
que subissent quotidiennement les préposés à la sécurité publique
et du fait qu'en raison du fardeau que représente pour eux
l'exercice de leur profession un grand nombre de pompiers et de
policiers voient leur carrière écourtée.
C'était un passage d'une lettre que l'honorable Paul Martin a rédigée en 1995.
Ceux qui parmi nos membres sont physiquement ou mentalement en mesure de rester au travail jusqu'à 60 ans vont persévérer jusqu'à cet âge pour essayer de combler la perte de revenu que ces modifications législatives leur infligent, et ceux qui ont été embauchés plus tardivement, ceux qui sont aujourd'hui âgés de 25 ans, par exemple, vont être forcés de prendre leur retraite à 60 ans et de se contenter d'une pension réduite. Ils n'auront aucune possibilité de combler leur perte de revenu découlant de ces coupes, car ils seront obligés de prendre leur retraite à 60 ans. Un enseignant ou tout autre professionnel peut décider de rester en poste après l'âge de 60 ans, jusqu'à 65 ans s'il le veut, pour compenser cette perte de revenu.
Le pire, comme l'ont mentionné les experts dans ces causes sur les droits de la personne, c'est que la population et nos collègues de la profession... le risque s'accroît avec l'âge, et il peut même s'ensuivre des pertes de vie.
Pour compenser les sacrifices que font les membres de nos deux professions et pour la sécurité de la population, nous demandons au gouvernement de modifier la Loi de l'impôt sur le revenu de façon à nous permettre d'accumuler des droits aux prestations au rythme de 2,3 p. 100 plutôt que de 2 p. 100 comme c'est le cas actuellement.
Cela permettrait à nos membres de contribuer davantage à leur régime de pension agréé, d'utiliser ainsi une plus grande part de leur contribution maximale au REER et, partant, de compenser une partie de leur perte de revenu de retraite, et peut-être même de mieux assurer la protection du public. Les membres des autres professions peuvent travailler plus longtemps, mais pas nous. Nous méritons d'être traités équitablement.
Les conséquences de tout cela. En 1982, le juge McIntyre de la Cour suprême du Canada a statué que notre métier est un métier de jeunes. Auparavant, il n'y avait pas de diminution d'effectif dans notre profession, mais il y a maintenant des périodes où l'effectif s'amenuise. Cette proposition aiderait le gouvernement à créer des emplois pour les jeunes, dans ce métier de jeunes, aux quatre coins du Canada.
Je vous remercie de nous avoir accordé un peu de votre temps. Au nom de tous nos membres, nous sollicitons votre aide.
Le président: Merci beaucoup.
Nous allons maintenant passer à la période des questions. Le premier intervenant sera M. Ritz.
M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, Réf.): Merci, monsieur le président.
• 1325
Je tiens à vous remercier tous, messieurs, des exposés que
vous nous avez présentés aujourd'hui. Ils suscitent chez nous une
foule de questions. Malheureusement, comme nous ne disposons nous
aussi que de cinq minutes, je devrai être expéditif et m'en tenir
à deux ou trois questions seulement.
J'aimerais connaître l'opinion des représentants de la CRIC et des MR sur deux sujets. Premièrement, comment concilier les intérêts du secteur privé et ceux des MR, elles qui sont situées au dernier échelon de la hiérarchie gouvernementale, elles qui fournissent une foule des services dont les paliers supérieurs se délestent—elles qui héritent en fin de compte d'une bonne part des responsabilités? Comment répondre aux souhaits et aux besoins de tout le monde quand vient le temps de réaliser un programme d'infrastructures? En tout cas, lors de la dernière consultation, on nous a cité des exemples de MR qui accomplissaient tout le travail elles-mêmes, qui ne faisaient pas d'appel d'offres, et on nous a dit que cela créait des disparités. Je souhaiterais donc entendre les deux sons de cloche à ce sujet.
Deuxièmement, les porte-parole du groupe des MR ont parlé du réchauffement de la planète. Ils appuient les mesures prises par le gouvernement à cet égard. Je me demande si les entrepreneurs en forage de puits de pétrole n'aimeraient pas formuler quelques commentaires à ce sujet. Ils ont mentionné le réchauffement de la planète et les émissions de gaz à effet de serre, qui, évidemment contribuent à ce réchauffement. Y a-t-il vraiment là un problème? S'agit-il d'un phénomène réel ou fictif? Disposons-nous de suffisamment de preuves scientifiques pour justifier que nous allions à Kyoto signer cette convention, ou ne devrions-nous pas d'abord étudier la question beaucoup plus à fond?
Ce sont là mes deux questions, messieurs.
Le président: Qui veut répondre en premier?
Allez-y, monsieur Eadie.
M. Jae Eadie: Monsieur le président, j'ignore ce que sont les MR.
M. Gerry Ritz: Je m'excuse, je parlais des municipalités rurales en Saskatchewan.
M. Jae Eadie: Nous représentons la Fédération canadienne des municipalités, monsieur le président. Nous comptons parmi nos membres des municipalités de toutes tailles, des grandes métropoles aux plus petites municipalités rurales. Nous représentons un large éventail d'administrations municipales.
M. Ritz a posé une question à propos d'un nouveau programme d'infrastructures et de la façon de concilier les intérêts publics et les intérêts privés dans la réalisation d'un tel programme. Dans le cas de l'actuel programme d'infrastructures, on a marqué des progrès vers l'établissement de partenariats État-sociétés privées. Il y a même eu certains partenariats qui ont été créés en dehors de ce programme. Je pourrais à cet égard vous citer l'exemple de ma propre ville, où nous avons construit, grâce à une entente de partenariat entre la ville et le secteur privé, un pont de 30 millions de dollars, qui, soit dit en passant, a été érigé au coeur même du quartier que je représente au conseil municipal. C'est l'entreprise privée qui l'a construit, et c'est nous qui en assurerons l'entretien, et, quand la ville en deviendra propriétaire dans 20 ans, il sera libre de dettes. C'est un exemple.
Le programme d'infrastructures a donné lieu à cet égard à de nombreuses réussites remarquables. En fait, pour la réalisation de ce genre de programme, on fait généralement largement appel au secteur privé, vu que la plupart des municipalités ne possèdent pas à l'interne le savoir-faire voulu pour se lancer dans de grands travaux de reconstruction de chemins ou de restauration de systèmes d'égout. À ma connaissance, les travaux de ce genre sont pour la plupart donnés à contrat à l'entreprise privée par voie d'appel d'offres.
Le programme d'infrastructures apporte de formidables retombées bénéfiques qui rejaillissent sur tous les secteurs de notre économie, parce qu'il met les gens au travail et améliore la qualité de vie dans nos municipalités. C'est ce qui explique que l'actuel programme ait connu un tel succès. C'est d'ailleurs pourquoi nous demandons au gouvernement d'instituer un nouveau programme d'infrastructures, mais à plus long terme cette fois et orienté vers l'avenir, pour pouvoir consolider les acquis et réduire notre déficit national en matière d'infrastructures.
Le président: Monsieur Mather.
M. Duane Mather: M. Herring traitera de la question des gaz à effet de serre.
M. Don Herring (directeur général, Canadian Association of Oilwell Drilling Contractors): Monsieur le président, il y a, à notre connaissance, un grand débat qui se poursuit actuellement à propos des preuves scientifiques des conséquences des émissions de gaz à effet de serre, et nous ne croyons pas qu'on soit encore parvenu à prouver scientifiquement que ces émissions contribuent au réchauffement de la planète.
Cela dit, nous n'en sommes pas moins convaincus que le gouvernement canadien devrait, à la veille de la Conférence de Kyoto, se doter d'une politique qui soit fondée sur une approche favorisant l'adoption de mesures volontaires en vue de réduire les émissions de gaz à effet de serre.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Herring.
Monsieur Redfern, désirez-vous ajouter quelque chose?
M. John Redfern: J'aurais deux commentaires à formuler.
D'abord, concernant les gaz à effet de serre, il est abondamment prouvé qu'un réseau routier efficace, qu'il soit municipal, interurbain ou national, contribue à réduire de façon significative la consommation d'essence et, partant, les émissions de gaz à effet de serre. Il est donc indéniable que la qualité d'un réseau routier a une influence sur l'environnement.
Pour ce qui est des partenariats État-sociétés privées et des possibilités qu'offre à cet égard la réalisation d'un programme routier national, la planification proprement dite a été dans le passé et devrait continuer d'être effectuée conjointement et dans un esprit de collaboration par les deux paliers de gouvernement— les provinces et les territoires, d'une part, et le gouvernement fédéral, de l'autre.
Le cofinancement public-privé constitue toutefois un moyen efficace de réunir des fonds pour des travaux routiers ou d'autres projets spéciaux. Les techniques en cette matière se sont passablement raffinées. Ce genre de parrainage peut se révéler encore plus avantageux si le contrat adjugé porte non seulement sur la construction d'installations, mais également sur la responsabilité de leur entretien. On obtient alors une garantie plus solide relativement à la qualité des travaux et, partant, un meilleur rendement sur l'investissement.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Redfern.
[Français]
Monsieur Loubier.
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): J'aurais deux questions. La première s'adresse à M. Herring. J'aimerais qu'il me dise à quel endroit il a lu que les hydrocarbures ne contribuaient pas de façon significative à l'augmentation de l'effet de serre, parce que toutes les études qu'on a pu analyser, depuis la Conférence de Rio jusqu'à nos jours, nous disent tout à fait le contraire.
Il faut prendre des mesures rapides, des mesures drastiques puisqu'on parle d'une variation climatique de 2 à 6 degrés au cours des prochaines années. Par exemple, s'il y avait une variation de seulement 3 degrés, la production céréalière dans les Prairies n'existerait plus. Donc, s'il n'y a pas de sentiment d'urgence, contrairement à nos collègues réformistes, nous encourageons le gouvernement, en vue de la Conférence de Kyoto, à prendre ses responsabilités et à prendre des mesures drastiques en ce qui a trait à votre industrie et à toutes les autre industries qui peuvent contribuer à l'augmentation de l'effet de serre. À quel endroit avez-vous lu qu'il n'y avait pas de problème?
[Traduction]
M. Don Herring: Monsieur le président, nous pensons qu'il s'agit là d'une question sur laquelle les scientifiques ne s'entendent pas. Si vous prenez par exemple, dans le cas du Canada, les conclusions de l'Institut Fraser, ou encore, dans celui des États-Unis, les observations des changements climatiques à l'échelle planétaire réalisées par la NASA, vous constaterez qu'on y estime que ces changements sont en réalité très minimes. En fait, depuis qu'on s'interroge sur cette question, on n'est pas encore parvenu à prouver que les émissions de gaz à effet de serre causent un réchauffement de la planète.
[Français]
M. Yvan Loubier: À quel endroit avez-vous vu qu'il n'y avait pas urgence, qu'il n'y avait pas péril en la demeure, alors que, depuis la Conférence de Rio, on parle d'un état d'urgence et que, depuis Rio, la plupart des pays qui ont pris l'engagement de réduire la production d'émanations de gaz à effet de serre n'ont pas respecté leur engagement?
Vous m'avez dit qu'il n'y avait rien de prouvé scientifiquement sur les changements significatifs du climat, mais vous ne m'avez pas dit à quel endroit vous aviez pêché vos analyses. Toutes les analyses qu'on voit affirment l'inverse de ce que vous dites, et il faut qu'à Kyoto, la plupart des pays prennent des engagements significatifs avant qu'on crève. C'est aussi simple que cela.
[Traduction]
M. Don Herring: J'ajouterai à mes remarques de tout à l'heure que la CAODC fait également partie d'une organisation du nom de AREA, qui regroupe des représentants de divers milieux qui s'intéressent aux mutations environnementales. Ces gens détiennent l'information pertinente. Ils ont d'ailleurs tenu une conférence ici même à Ottawa il y a au plus deux mois et ont à cette occasion colligé toute une documentation sur cette question. Si tel est le souhait du député, nous nous ferons un plaisir de lui fournir cette information par l'entremise du président.
Le président: Merci, monsieur Herring.
[Français]
M. Yvan Loubier: Monsieur le maire Vaillancourt, plus tôt, vous avez fait une suggestion fort intéressante ayant trait à la modification de la politique fiscale sur les laissez-passer de transport en commun subventionnés par l'employeur. Pour le bénéfice des membres du comité, j'aimerais que vous élaboriez sur votre suggestion, qui m'est apparue fort intéressante, d'autant plus qu'elle entre dans l'optique de deux préoccupations, celle d'un rééquilibrage au niveau de la fiscalité et celle de la conservation de l'environnement. J'aimerais que vous nous en parliez un peu plus, monsieur Vaillancourt.
M. Gilles Vaillancourt: Un laissez-passer payé par un employeur est déductible à titre de dépense pour l'employeur, mais c'est un bénéfice conféré à l'employé qui est imposable pour ce dernier. La voiture qui est utilisée par le même employé, pour toutes sortes de raisons, est officiellement imposable, mais regardez tout ce que peut récupérer celui qui l'utilise. Il obtient, entre autres, un stationnement gratuit. Dès que vous devez sortir avec votre véhicule pendant votre travail, le prix de votre espace de stationnement n'est pas imposé.
• 1335
Cela résulte en une distorsion
importante. Cela peut représenter jusqu'à 1 726 $
pour un
employé exécutant à peu près les mêmes fonctions. Cela
devient finalement un incitatif à l'utilisation de
l'automobile plutôt que du transport en
commun.
Les transporteurs en commun du pays perdent de la clientèle et leurs coûts sont importants. Il y a là une infrastructure qui peut être utilisée davantage, qui est très bénéfique sur le plan de l'environnement et qui pourrait éviter des investissements importants dans le réseau routier, les ponts, etc.
Donc, il y a là un incitatif à l'utilisation de l'automobile qu'il faut au moins contrebalancer par un incitatif raisonnable pour l'usager du transport en commun.
M. Yvan Loubier: Est-ce une pratique courante pour un employeur que d'offrir ce genre d'avantage social?
M. Gilles Vaillancourt: Ce le sera de plus en plus, compte tenu qu'il y a de la congestion dans les grands centres urbains et qu'il serait avantageux pour l'employé que ce bénéfice ne soit pas imposable au même titre que l'autre. On pense que cela pourrait avoir un effet très positif sur l'utilisation du transport en commun et que cela réduirait la congestion automobile dans les milieux urbains. Le système actuel a fait ses preuves. On utilise surtout l'automobile, car la fiscalité encourage son usage.
M. Yvan Loubier: Dans votre présentation, vous avez réuni un certain nombre d'estimations sur l'impact d'une telle mesure sur le nombre de kilomètres que parcourront les automobilistes au cours des 10 prochaines années. Pourriez-vous m'indiquer la source de vos analyses? Qui a fait ces prévisions-là?
M. Gilles Vaillancourt: Je vous la donnerai en sortant, parce que je ne l'ai pas ici. C'est une étude qui a été faite à l'interne à la FCM.
M. Yvan Loubier: Je vous remercie.
[Traduction]
Le président: Monsieur Jones.
M. Jim Jones (Markham, PC): Merci, monsieur le président.
J'ai écouté ce que les entrepreneurs en forage et les gens du secteur de la construction ont dit à propos des allocations de subsistance, et j'appuie entièrement leur position. Mais ce ne sont que quelques dollars qui sont en jeu dans cette revendication.
Quelle sera votre position, pensez-vous...? On s'apprête à hausser les cotisations du Régime de pensions du Canada, une hausse qui atteindra probablement 73 p. 100 d'ici quelques années. Par ailleurs, il y a les cotisations d'assurance-emploi qui... Les cotisations d'assurance-emploi sont actuellement fixées à 2,80 $, alors qu'il suffirait de 1,85 $ pour maintenir le compte de l'assurance-emploi en équilibre.
Si on ne compense pas cette hausse des cotisations du RPC par une baisse des cotisations d'assurance-emploi, quelles conséquences l'augmentation des charges sociales aura-t-elle chez les employés et chez l'industrie?
Le président: Qui veut se risquer à répondre à une question aussi ardue? Monsieur Atkinson.
M. Michael Atkinson: Ma première idée, ça été de passer le micro à mon collègue, M. DeVries. Mais si vous me demandez expressément ce que je pense de la hausse des cotisations du RPC...
M. Jim Jones: Et d'AE.
M. Michael Atkinson: Je tiens à vous dire dès le départ que toute hausse des taxes, particulièrement sur la masse salariale, comme les cotisations d'AE, par exemple... Un des mythes qui a cours à propos de notre industrie, c'est qu'elle ne serait constituée que d'une poignée de grandes entreprises, alors qu'en réalité, 95 p. 100 des entreprises qui oeuvrent dans le secteur de la construction non résidentielle sont sous tous rapports de petites entreprises. Il s'agit généralement d'entreprises qui comptent moins de 20 employés, souvent des entreprises familiales, etc. Donc, tout ce qui heurte les petites entreprises en général touche forcément notre industrie au même titre. Chaque fois qu'on décrète une hausse des charges sociales, notre secteur en souffre.
Puis-je demander à mon collègue John DeVries d'ajouter quelques mots?
M. John DeVries (vice-président, Association canadienne de la construction): J'aurais simplement une remarque à formuler concernant les charges sociales. Nul n'est besoin, je crois, de parler ici longuement de leur incidence sur la création d'emploi. Il va sans dire que toute hausse de ces charges ne peut qu'avoir un effet négatif sur ce plan.
Ce que j'aimerais souligner, c'est que le fardeau que représentent les charges sociales pour les très petites entreprises du secteur de la construction constitue un incitatif extrêmement efficace pour amener des gens à se tourner vers le travail au noir. Je suis d'avis que plus ces taxes, plus les cotisations à la CAT et tous les autres prélèvements qu'effectue le fisc au niveau provincial sont élevés, plus on incite les travailleurs autonomes à ne pas déclarer leurs gains. Je pense que vous devez toujours garder cette réalité à l'esprit. Si l'on hausse les charges sociales et les cotisations de tout genre comme on songe à le faire, je crois que telles en seront les conséquences.
En ce qui concerne les cotisations de RPC, il y a tout un processus de consultation de prévu, et il s'impose qu'on y apporte des changements.
Quant aux cotisations d'AE, elles devraient, selon moi, être réduites. En tout état de cause, la réserve de 14 milliards de dollars dont nous disposerions même en abaissant la cotisation à 2 $ serait plus que suffisante pour parer aux jours sombres.
J'aimerais qu'on transmette mon message à qui de droit concernant l'économie clandestine.
Le président: Merci.
Quelqu'un d'autre aimerait-il ajouter quelque chose en réponse à cette question? Monsieur Atkinson.
M. Michael Atkinson: Monsieur le président, il y avait, dans le préambule à la question, un commentaire voulant que seuls de petits montants seraient en jeu—en parlant des allocations de subsistance. Ce n'est pas forcément le cas. Je connais une entreprise de notre secteur qui doit verser à l'impôt 1,5 million de dollars de plus à cause de ces mesures. Il ne s'agit que de l'impôt additionnel, sans parler des pénalités possibles et des intérêts.
Le président: Merci.
Monsieur Szabo.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Merci, monsieur le président.
Merci à vous tous de vos exposés. Je suis particulièrement sympathique à la cause des préposés à la sécurité publique. Pas plus tard qu'hier, j'ai fait une déclaration à la Chambre où je terminais en disant que nous devrions songer à organiser quelque chose de spécial pour reconnaître les services qu'ils nous rendent et en parlant d'eux comme de nos héros qui d'un océan à l'autre risquent quotidiennement leur vie au travail.
Ce dont je veux vous parler, c'est du RPC, parce qu'à mon avis il s'agit là d'une question extrêmement importante. Je crois qu'aucun d'entre vous ne voudra se contenter de dire qu'il est contre les mesures envisagées, car s'en tenir à être contre ne règle rien. Il faut alors proposer des solutions de rechange.
Le RPC a été instauré en 1966. Il a été créé avant tout pour venir en aide aux personnes âgées de l'époque qui avaient vécu les deux grandes guerres et les années de crise et qui n'avaient pas eu la chance d'assurer leur retraite. C'est ce qui nous a amenés à adopter un système de financement par répartition, où les travailleurs actuels paient pour les retraités actuels. À cette époque, il y avait huit travailleurs contre un retraité. De nos jours, le ratio est de cinq contre un; en 2015, il sera de trois contre un. Du train où vont les choses, le RPC ne pourra manifestement pas continuer de s'autofinancer. L'actuaire en chef a clairement établi que le régime ne saurait se maintenir si nous ne réagissons pas.
Les consultations qui se sont tenues aux quatre coins du Canada ont abouti essentiellement à un consensus, le gouvernement fédéral et toutes les provinces, de même que les électeurs s'entendant pour dire qu'il ne fallait pas toucher aux prestataires actuels, aux personnes qui sont actuellement âgées ou qui reçoivent des prestations d'invalidité. Dans leur cas, si l'on changeait les règles du jeu maintenant qu'ils ne sont plus de la partie, il ne leur serait pas possible de se rattraper. Ce qui signifie que c'est le reste d'entre nous qui allons devoir combler la différence.
Selon le calendrier actuel, les taux de cotisation passeront à 10,2 p. 100 en 2013 et à 14,2 p. 100 en 2030. Autrement dit, nous qui sommes ici autour de cette table allons continuer de payer aux alentours de 5,85 p. 100, à part égale avec notre employeur, et nous allons prendre de l'arrière à un tel point que nos enfants en viendront à se dire qu'il vaudrait mieux pour eux abandonner un tel régime puisqu'ils ne pourront récupérer en fin de compte que 80 p. 100 de leur mise.
Il s'impose donc qu'on modifie les taux de cotisation. Au lieu de taux qui continuent de monter lentement et graduellement, nous devrons opter pour un taux de cotisation de régime permanent.
Je vous invite à revoir votre réaction, à ne pas vous contenter de répondre sans nuances «ne faites pas cela» et de nous aider à établir où se situe le juste milieu, c'est-à-dire à trouver une solution qui soit équitable et adéquate.
M. Michael Atkinson: Je ne me souviens pas que nous ayons dit «ne faites pas cela». Quant à savoir si une hausse de ces cotisations aurait un effet négatif sur la petite entreprise, la réponse est oui. Si vous me demandez si le remède est difficile à avaler ou non, je vous répondrai qu'il a plutôt mauvais goût.
Essentiellement, nous avons participé aux consultations sur les réformes proposées et nous pensons que, oui, les cotisations devront être relevées jusqu'à un certain point. Certes, la position que nous avons déjà soutenue à quelques reprises devant le Comité des finances était que, oui, nous constations qu'il faudrait peut-être modifier les cotisations et les contributions, mais qu'il fallait regarder toutes les facettes du régime, y compris la structure des prestations. Il nous faudrait nous demander si le régime répond toujours à ses objectifs initiaux ou si, comme un trop grand nombre de nos programmes au Canada, il n'est pas devenu un fourre-tout.
Nous comprenons certes qu'il faille rajuster le niveau des cotisations du RPC, mais cela n'enlève rien au fait que ces modifications causeront énormément de problèmes aux petites entreprises. Qu'on soit d'accord ou non, on devra faire face à la réalité, accepter des hausses dans ce domaine.
Il y a 10 ou 15 ans, notre association s'est inquiétée de la survie de ce régime quand elle a vu ce qu'on faisait de ce fonds qu'elle croyait à vocation unique, que des montants étaient prêtés aux provinces à des taux passablement attrayants pour l'époque. Vraiment, en tout respect pour mes collègues, c'est un peu comme si on décidait enfin d'ouvrir l'eau une fois que la maison a été incendiée.
• 1345
Du moins vue sous cet angle, la réponse à la question de
savoir si ces hausses auraient des conséquences négatives pour nos
membres est assurément oui. Mais, nous n'avons jamais dit que nous
étions absolument opposés à toute forme de modification du RPC sur
ce plan.
M. Paul Szabo: En ce cas, parlons plutôt de l'AE. Parce que nous entrevoyons d'accumuler un excédent de quelque 20 milliards dans le compte théorique—car il ne s'agit pas de fonds qui sont mis en réserve—, vous nous demandez de faire passer le taux des cotisations de 2,90 $ à 2 $. Or, étant donné que cette baisse à elle seule nous coûterait 6,5 milliards de dollars annuellement, d'année en année, toutes choses demeurant égales par ailleurs, l'excédent serait vite épuisé. Et si l'économie fléchissait en 1998—car, soyons réalistes, personne n'a encore réussi à nous débarrasser des cycles économiques—, étant donné que le dernier déficit que nous ayons enregistré à ce poste avait atteint un sommet de quelque 6 milliards de dollars, il pourrait arriver théoriquement que le compte de l'AE se mette à évoluer à l'inverse, que le régime n'arrive plus à s'autofinancer et qu'il faille de nouveau hausser les cotisations.
L'entreprise ne juge-t-elle pas souhaitable que les taux relatifs aux charges sociales demeurent stables, que le régime puisse continuer de s'autofinancer et qu'avant d'abaisser ces taux on attende de pouvoir en garantir la stabilité ou encore de pouvoir les fixer en permanence de manière à ce que vous sachiez enfin ce qui vous attend sur ce chapitre?
M. Michael Atkinson: Je pense que vous avez déjà eu l'occasion de reconnaître qu'après tout il s'agissait là de notre argent. Eh bien, les employeurs et les employés canadiens considèrent qu'il s'agit effectivement de leur argent et qu'il se trouve que les hausses de cotisations qu'on a décrétées dans le passé, y compris celle de 1989 à laquelle j'ai fait référence, où on a majoré les cotisations d'assurance-chômage, comme on les appelait à l'époque, soi-disant pour créer un fonds qui devait servir à financer des projets créatifs... Nous étions déjà très réticents à accepter cette mesure, et voilà qu'au même moment le gouvernement annonçait qu'il se retirait du financement du programme de l'AC, un point c'est tout, sauf si le compte devenait déficitaire.
On nous a donc demandé, à nous les employeurs et les employés, de nous serrer encore une fois la ceinture et de payer un peu plus, mais de ne pas nous inquiéter, nous avait-on dit, puisque cet argent allait servir à la formation.
Nous avons fini par acquiescer, mais sans enthousiasme, et à la condition d'avoir notre mot à dire sur la manière dont les fonds seraient dépensés. C'est ce qui a mené à la création de la Commission canadienne de mise en valeur de la main-d'oeuvre.
Et puis voilà—je tiens à le rappeler, car tous semblent avoir la mémoire un peu courte dans ce milieu—, le gouvernement fédéral a alors décidé qu'il cesserait de financer programmes, mais qu'il n'en maintiendrait pas moins les cotisations au même niveau.
Ce qui nous importe le plus, ce n'est pas forcément qu'on nous garantisse à tout prix la stabilité dans tout cela, mais que lorsqu'on nous dit et nous assure que des sommes sont perçues à une fin déterminée, elles soient effectivement dépensées à cette fin plutôt que d'être basculées dans un gouffre sans fond où chacun ira puiser à sa guise pour tout et pour rien.
À propos de la mention que mes collègues qui réclament un programme routier national ont faite des 5 milliards de dollars que le gouvernement fédéral perçoit annuellement en taxes sur l'essence et le mazout, je suis presque certain que la plupart des usagers de nos routes croient que l'essentiel du produit de ces taxes sert à la réfection et à l'entretien de nos routes ou est réinvesti d'une manière ou d'une autre dans le réseau routier. Pourtant moins de 5 p. 100 de ces fonds, si je ne m'abuse, prend chaque année cette direction, alors qu'aux États-Unis, par exemple, ces fonds sont versés dans un compte spécial qui ne doit servir qu'au financement de l'amélioration du réseau routier.
Peut-être M. DeVries pourrait-il ajouter quelque chose à ce sujet.
M. John DeVries: J'aimerais dire quelques mots sur la question de la stabilité, qui m'apparaît primordiale.
Naturellement, les entreprises souhaitent que les cotisations d'AE demeurent stables pendant quelques années.
Nous avons examiné cette question. Nous avons observé les fluctuations du compte de l'AC au cours des 15 dernières années. J'ai ici les chiffres. Oui, le déficit a déjà effectivement atteint cumulativement les 6 milliards de dollars au terme de trois exercices déficitaires au début des années 90, pour ensuite être effacé en dedans de deux courtes années. Et voilà que nous entrevoyons maintenant un excédent de 6 ou 7 milliards de dollars.
Le programme plus restrictif d'AE que le gouvernement actuel a mis en place a notamment permis d'inciter davantage les prestataires à se chercher activement un emploi. À notre avis, un excédent accumulé de 3 milliards de dollars laisserait au gouvernement, ou à la Commission des ressources humaines, une marge de manoeuvre suffisante, pourvu que le programme soit géré efficacement.
Le problème, c'est que 10 milliards, c'est trop, à notre avis; 15 milliards, ce serait un peu exagéré. Et voilà qu'il est question de 20 milliards. C'est vraiment pousser trop loin.
Le président: Madame Torsney, et ensuite, M. Loubier.
Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Merci, monsieur le président.
Messieurs, l'important dans tout cet exercice, c'est de trouver le juste milieu. Nous avons entendu dans toutes les régions du pays et ici même à Ottawa une foule de témoins qui, au nom de nombreux organismes, nous ont soumis différentes propositions.
Le gouvernement a sans contredit fait un bon travail en équilibrant le budget et en réduisant les cotisations d'assurance-emploi pour les faire passer de 3,30 $ qu'elles étaient quand nous sommes arrivés au pouvoir à 2,90 $, puis à 2,80 $ en janvier. Et nous prévoyons même enregistrer bientôt un tout petit dividende financier.
Mais au rythme où tout le monde nous demande d'apporter des changements, ce dividende financier risque de ne jamais voir le jour. Nous serions de nouveau plongés dans une situation déficitaire si nous répondions aux attentes de tous ceux que nous avons rencontrés jusqu'à maintenant. On nous a demandé de faire plus en matière de création d'emplois et sur le chapitre du financement des services de santé, de l'éducation et de la recherche. On nous a demandé aujourd'hui de réduire de 90 ¢ les cotisations d'assurance-emploi, ce qui nous coûterait 6,5 milliards de dollars. On nous a demandé de ne pas investir dans le RPC et de consacrer davantage de fonds à l'APD et à la formation. Et aujourd'hui encore, on réclame un programme d'infrastructures et un programme routier national.
Une des choses que nous devons faire au moment de soupeser ces différentes demandes, c'est d'établir ce qui est important pour renforcer notre économie. Certes, nous en profitons tous quand le taux d'accidents diminue, quand le tourisme augmente et quand les coûts d'expédition sont plus concurrentiels. Mais comme nous devons aussi assurer une certaine équité entre les hommes, les femmes et les enfants dans notre pays, je vous demande ce que vous pensez de l'idée d'investir massivement dans un programme routier national ou dans un programme d'infrastructures quand on sait que les emplois qui seront créés dans le cadre de ces programmes iront surtout à des hommes, que les gouvernements provinciaux et municipaux qui réaliseront ces programmes n'ont pas comme nous de lignes directrices sur l'équité en matière d'emploi et que tous ces fonds risquent d'être répartis inéquitablement dans l'ensemble de notre collectivité.
Je vous invite à vous prendre une copie des mémoires qui ont été présentés ce matin, pour que vous puissiez comprendre certains des éléments qui doivent être rééquilibrés.
Vous parlez d'un déficit en matière d'infrastructures. On a fait grand cas ce matin de notre déficit social. J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Est-il plus important d'avoir un bon réseau routier ou d'avoir un bon système de santé? Qu'est-ce qui est le plus équitable à votre avis?
M. John Redfern: D'abord, gardons-nous de croire que nous avons le choix d'investir ou non dans notre réseau routier. Mon collègue vous a invités tout à l'heure, je crois, à répondre à la question de savoir si nous pouvons nous passer de nos routes ou s'il nous les faut. Elles sont, à mon sens, proprement essentielles à l'activité économique, au fonctionnement d'un système économique efficient et productif capable de générer les investissements et les profits nécessaires pour accroître nos recettes fiscales et, partant, notre capacité de dépenser.
Je crois que la preuve est faite que tarder à effectuer des travaux de réparation de routes, c'est se condamner à payer trois, quatre, voire cinq fois plus cher pour arriver au même point. Si quelqu'un nous arrivait en prétendant que nous pouvons nous passer de notre réseau routier et que nous devrions être prêts à y renoncer, alors là, mais là seulement, il y aurait peut-être lieu d'hésiter un peu avant de passer à l'action.
Je pense que nous avons effectivement repoussé des travaux qu'il aurait fallu effectuer dans nos infrastructures. À mon avis, il sera essentiel que nous rattrapions ce retard, d'autant que c'est ce qui nous permettra d'accroître notre productivité et notre efficience et, partant, d'avoir plus de fonds à dépenser.
Nous ne voulons pas parler de dépenses énormes. Nous demandons simplement qu'on se remette à investir dans notre réseau routier au même titre qu'on le faisait auparavant. On a réduit ces investissements comme si nous pouvions nous passer de notre réseau routier.
En ce qui concerne l'équité en matière d'emploi, nous avons des femmes qui conduisent des bétonnières mobiles, tout comme nous en avons qui travaillent dans des cimenteries. Les statistiques montrent que non seulement les femmes peuvent manoeuvrer des pièces d'équipement lourd, mais qu'elles y réussissent mieux que les hommes, car elles ne se défoulent pas sur l'équipement. La possibilité leur est offerte de faire carrière dans ces métiers. Quoi qu'il en soit, investir dans le réseau routier, c'est avant tout opter pour des objectifs de productivité, de sécurité et de sauvegarde de l'environnement. Il ne s'agit pas d'une dépense discrétionnaire. Nous pouvons agir dès maintenant ou reporter la dépense à plus tard comme il nous arrive si souvent de le faire et nous condamner à payer beaucoup plus cher plus tard.
Le président: Merci, monsieur Redfern.
Madame Torsney, avez-vous d'autres questions?
Mme Paddy Torsney: Je tiens simplement à ajouter que, en gros, les femmes sont aussi nombreuses que les hommes à payer de l'impôt. Comme vous le dites, le programme apportera des fruits sur les plans de la sécurité et je ne sais quoi encore, mais vous admettrez que, dans l'état actuel des choses au sein de cette industrie, les hommes seraient carrément avantagés avec ce genre de programme, car les emplois sont là... et oui, vous pouvez dire que les femmes peuvent conduire des pièces d'équipement lourd, mais jetez un coup d'oeil aux statistiques à cet égard. En toute honnêteté, elles ne sont pas aussi présentes dans ce secteur qu'elles devraient l'être.
Si vous dites que l'allocation de fonds dans le cadre d'un tel programme devrait être conditionnelle au respect de lignes directrices sur l'équité en matière d'emploi, c'est génial! Je suis même impatiente qu'on en fasse la recommandation.
M. John Redfern: Il y a deux types d'emplois liés à tout programme de construction comme le programme routier national. Il y a les emplois directs sur les chantiers de construction, et les emplois indirects chez les fabricants d'équipement et dans le secteur connexe de la recherche et du développement. En fait, le nombre d'emplois indirects qui en résulte est de deux à trois fois plus élevé que celui des emplois directs dans la construction proprement dite.
Autrefois, on ne voyait pas de femmes travailler dans la construction, mais de nos jours il s'en trouve de plus en plus qui le font, notamment comme opératrices d'équipement de haute technologie et comme conductrices de véhicules à commandes assistées.
Mme Paddy Torsney: Peut-être devriez-vous vous renseigner auprès de M. Atkinson en ce qui a trait aux statistiques.
M. Michael Atkinson: Si vous songez à l'égalité des chances en matière d'emploi et non à la comparaison des résultats statistiques, j'aimerais bien qu'on en parle. Malheureusement, on semble s'intéresser davantage à la comparaison des résultats qu'à l'égalité des chances.
Nous avons eu pendant un certain temps un programme volontaire d'équité en matière d'emploi dans notre industrie. Nous sommes allés recruter des jeunes filles de septième et de huitième année pour essayer de les amener à s'orienter vers une carrière dans le domaine de la construction. Nous avions avec nous un agent qui s'occupait à plein temps d'équité en matière d'emploi. Nous tenions à ce que les entreprises de notre secteur adoptent une véritable politique d'équité en matière d'emploi, où le sexe, la couleur, etc. du postulant n'ont rien à voir avec ses chances d'obtenir un emploi.
Ce dont nous ne voudrions pas, c'est de ce qui se fait à cet égard chez nos voisins du Sud, où toute l'attention se porte sur la comparaison des résultats. Ce n'est pas l'égalité des chances qu'on vise là-bas, ce sont les quotas. On vous y impose des quotas. Si votre registre du personnel montre que vous respectez les quotas, vous êtes en règle. On ne se préoccupe nullement d'être juste aussi envers vous qui voudriez quand même choisir les meilleurs parmi les candidats.
Donc, si c'est de véritable équité en matière d'emploi dont vous parlez, nous sommes avec vous à 150 p. 100. Nous avons d'ailleurs des programmes qui visent à attirer non seulement les femmes, mais aussi les jeunes et n'importe qui d'autre, je vous l'assure, car nous nous soucions vraiment de la provenance de notre main-d'oeuvre future. De ces points de vue, nous sommes des employeurs qui respectent scrupuleusement les principes d'équité en matière d'emploi. Mais qu'il soit bien compris que nous ne voulons parler que d'égalité des chances. Selon nous, les comparaisons statistiques présentent peu d'intérêt.
Mme Paddy Torsney: Merci, monsieur Atkinson. Évidemment, le système canadien d'équité en matière d'emploi est, comme vous le dites, fondé sur l'égalité des chances. C'est merveilleux que vous ayez comparé notre politique avec celle qu'ont adoptée les Américains, mais c'est tout à fait hors de propos dans notre discussion. Il reste que, dans votre industrie, il y a plus d'emplois—beaucoup plus d'emplois, démesurément plus d'emplois— pour les hommes que pour les femmes, et il s'impose parfois qu'on fasse des comparaisons.
Enfin, je tiens à rassurer les pompiers et leur dire que nous avons pris bonne note de leur demande et que nous en tiendrons compte lorsque nous discuterons du RPC. Vous nous avez fait des suggestions qui s'inscrivaient expressément dans les consultations prébudgétaires, mais il y en a d'autres que nous aimerions étudier.
Le président: Monsieur Loubier.
[Français]
M. Yvan Loubier: Merci, monsieur le président, pour cette dernière question qui va me coûter, je crois, 20 $. Non, c'est une blague.
Monsieur Atkinson, je partage votre consternation et votre révolte face à la dilapidation du fonds d'assurance-emploi. Je vous rappellerais que, dans un scénario normal, l'année prochaine, le surplus accumulé du fonds atteindra et même dépassera 17 milliards de dollars. C'est de l'argent payé par les employeurs et les employés, car le gouvernement fédéral ne contribue plus au fonds. Cependant, le ministre des Finances pige allégrement dans ce fonds.
S'agissant du fonds et de l'accumulation des surplus, je suis porté à vous demander si vous partagez l'idée de constituer un fonds vraiment indépendant, où seraient accumulées les contributions des employeurs et des employés, un fonds qui serait plutôt actuariel et qui serait distinct du bilan du gouvernement.
Ma deuxième question porte sur une suggestion faite par le vérificateur général, qui permettrait de suivre l'évolution du fonds et des besoins par rapport à ce fonds-là, ainsi que la question du sous-emploi au Canada.
Si vous aviez à réduire le taux de cotisation, qui est actuellement de 2,90 $ ou 2,95 $, à combien le réduiriez-vous pour que cela puisse avoir un impact significatif sur l'emploi?
[Traduction]
M. Michael Atkinson: D'abord, en ce qui concerne la création d'une sorte de fonds indépendant, en quelque sorte protégé, cette idée me semble s'apparenter de près au concept d'impôt spécial, un concept qui n'a jamais semblé très populaire auprès des différents gouvernements fédéraux qui se sont succédé, de quelque parti qu'ils aient été. Nous avons vu avec quelle énergie nos collègues qui souhaiteraient voir créé un programme routier national réclament qu'on n'utilise les taxes sur l'essence que pour financer des travaux routiers, par exemple, comme on le fait aux États-Unis.
• 1400
Peut-être devrais-je laisser M. DeVries réagir à vos questions
et commentaires concernant les statistiques.
M. John DeVries: À tort ou à raison, je crois que la plupart des employeurs et des travailleurs ont l'impression que les fonds de l'AE sont gardés en réserve dans un compte spécial. Il y a les impressions et la réalité, mais on a tendance à présumer que c'est la Commission de l'AE qui établit elle-même les taux de cotisation. Nous savons tous que ce processus n'a pas été respecté ces dernières années. Le ministre des Finances s'est servi de ce fonds dans le cadre de son opération de lutte au déficit, ce qui l'a d'ailleurs certes aidé dans la poursuite de ses objectifs à cet égard.
Au nom de notre industrie, nous avons débattu de cette question devant les comités des politiques et des ressources humaines au moment où l'on s'apprêtait à effectuer une réforme majeure dans ce domaine. Nous n'en étions pas venus à une conclusion ferme sur ce sujet, mais nous avons constaté qu'il y avait passablement d'appuis concernant l'idée de créer un fonds tout à fait indépendant, autrement dit de laisser les divers secteurs industriels s'occuper eux-mêmes de l'établissement de leurs propres structures de prestations et de la gestion de leur main-d'oeuvre. Nous avons pu noter une volonté en ce sens.
Nous n'avons pas pris officiellement position sur cette question, mais je puis vous assurer que la plupart des gens autour de la table disaient que si nous leur donnions les outils, ils pourraient mettre sur pied leurs propres programmes adaptés à chacun des secteurs. C'est ce genre d'attitude favorable qu'on a pu observer chez la plupart des intervenants à propos de cette hypothèse.
[Français]
M. Yvan Loubier: Vous parlez d'un fonds distinct du bilan du gouvernement. À l'heure actuelle, les surplus qui sont accumulés dans le fonds de l'assurance-emploi ne sont pas mis dans un fonds de réserve pour combattre les récessions ou les ralentissements économiques futurs, mais ils sont consignés comme des recettes, au même titre que les recettes de taxes et d'impôts.
La proposition que nous faisions, et que le vérificateur général faisait aussi, était de créer un fonds distinct dans lequel on recueillerait les cotisations des employeurs et des employés. Ce fonds deviendrait un fonds actuariel qui pourrait répondre aux besoins des personnes perdant leur emploi, année après année, et on obligerait le ministre des Finances à faire des comptabilités distinctes pour son fonds général et pour le fonds de l'assurance-emploi. Cela éviterait aussi que le ministre des Finances dérobe les cotisations des employeurs et des employés. Je pense que vous avez confondu cela et un fonds privé d'assurance-emploi, mais c'est une tout autre chose.
Seriez-vous d'accord qu'on ait un fonds distinct des autres fonds de recettes du gouvernement?
[Traduction]
M. Michael Atkinson: Je dois vous avouer que nous n'avons pas consacré beaucoup de temps à l'examen de cette option. Nous aimerions bien le faire. Un des avantages d'une telle orientation serait sans doute de redonner à ceux qui contribuent à ce fonds un certain droit de regard sur la façon dont on utilise leur argent. C'est primordial, ça aussi.
C'est une chose de dire au gouvernement qu'il doit constituer un fonds distinct, mais il serait souhaitable que du même coup on permette à ceux qui contribuent à ce fonds d'avoir leur mot à dire sur la façon dont on l'utilise.
[Français]
M. Yvan Loubier: Merci.
[Traduction]
Le président: Monsieur Atkinson, avant de conclure cette séance, je tiens à vous dire qu'en écoutant certains des commentaires qu'a formulés M. John DeVries concernant la mise sur pied de votre propre programme, j'ai cru déceler chez les divers porte-parole des secteurs que vous représentez une sorte de volonté de créer votre propre régime d'assurance-emploi.
J'aimerais que vous me disiez quel genre de programme vous pourriez mettre sur pied qui soit plus avantageux pour l'industrie de la construction que notre actuel régime d'assurance-emploi, où pour chaque dollar de contribution de votre part on vous verse 3,73 $ en prestations.
M. Michael Atkinson: Il y a toujours eu beaucoup de plaintes à cet égard de la part des autres groupes d'affaire, des autres secteurs, et peut-être mettons-nous là précisément le doigt sur le problème auquel il vous faut remédier. Si le secteur privé disait, très bien, nous allons, tout en respectant le cadre de la loi, concevoir notre propre programme, un programme entièrement financé par nous, nous ferions en sorte que les prestations correspondent à notre apport. Il n'y aurait plus de secteurs qui subventionnent les autres.
Mais je vous invite à la prudence dans l'utilisation de ces statistiques, car il en va différemment d'une région à l'autre. Il n'est évidemment pas possible de construire des routes en plein hiver dans le Grand Nord canadien, mais, dans certaines régions, on peut construire à longueur d'année et on ne note pas de facteurs saisonniers importants.
C'est le genre de choses dont nous avons débattu il y a quelques années, à l'époque où tout le programme a été remis en question en vue d'être réformé. On a alors beaucoup critiqué le fait que le secteur de la construction était subventionné par les autres secteurs. Que ce soit juste ou pas, dans un régime d'assurance, il y en a qui doivent payer plus que d'autres en regard de ce qu'ils reçoivent. Je reconnais que, dans la formule actuelle de mise en commun, c'est probablement nous qui recevons le plus, mais je pense que notre industrie n'en serait pas moins favorable à l'établissement d'un régime où chaque secteur constituerait et administrerait son propre fonds, pourvu qu'on nous donne les moyens d'établir notre propre structure de prestations et qu'on ne vienne pas nous retirer notre formule une fois bien rodée.
Le président: Ce que je tiens cependant à vous faire remarquer, c'est que lorsqu'on élabore une stratégie nationale dans une économie comme celle du Canada—qui comporte des variables dont il faut absolument tenir compte, dont celle relative à la diversité régionale—, les réponses aux questions qui se posent ne sont pas aussi simples que les gens sont portés à le croire.
• 1405
Ainsi, quand les secteurs prétendent qu'ils peuvent aménager
eux-mêmes un meilleur programme, cela reste à prouver. Je me penche
sur cette question depuis plus de quatre ans. Elle n'est pas facile
à résoudre en raison de la nature même de notre pays.
Cela dit, comme vous le savez, la tâche dont notre comité doit s'acquitter n'est pas des plus simples. Il est à vrai dire plus difficile de statuer sur la manière d'utiliser le dividende financier que de s'attaquer au déficit, car tant que tous visent un même objectif, chacun tire dans la même direction. Ce n'est qu'une fois qu'on commence à avoir quelques excédents à se partager que les divers intérêts se manifestent. Il est bien naturel que tout le monde veuille profiter du succès que nous avons connu sur le plan budgétaire grâce aux efforts soutenus de millions de Canadiens.
Je tiens simplement à vous dire, particulièrement à ceux qui sont venus témoigner en faveur d'un programme d'infrastructures, qu'il est incontestable que pour avoir une société et une économie compétitives, il nous faut des infrastructures solides. De nombreuses études attestent cette réalité partout dans le monde.
Vous pouvez être assurés que les nombreuses idées et opinions que vous avez exprimées aujourd'hui se retrouveront dans le rapport final que nous remettrons au ministre des Finances. Vous nous avez grandement éclairés. L'information que vous nous avez fournie nous apparaît vraiment très utile. Nous en ferons le meilleur usage possible.
Merci beaucoup, et bonne fin d'après-midi.
La séance est levée.