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INDY Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON INDUSTRY

COMITÉ PERMANENT DE L'INDUSTRIE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 24 mars 1998

• 1523

[Traduction]

La présidente (Mme Susan Whelan (Essex, Lib.)): Conformément au paragraphe 108.(2) du Règlement, nous faisons une étude sur la préparation de la technologie de l'information en vue de l'an 2000. Nous recevons aujourd'hui trois témoins, qui représentent deux groupes différents. Il s'agit de Mme Jennifer McNeill, présidente de Cipher Systems et de Ted Eedson et Ian Nunn, coprésidents du Sous-comité des systèmes intégrés.

Mme McNeill ne pourra rester avec nous que jusqu'à 16 h 30. Nous entendrons les deux groupes de témoins, comme d'habitude, avant de passer aux questions, mais je vais commencer par Mme McNeill.

Mme Jennifer McNeill (présidente, Cipher Systems): Merci.

Je trouve très encourageant qu'on m'ait demandé de prendre la parole devant vous. Cela fait plusieurs années que je parle de l'an 2000, mais sans vraiment pouvoir me faire entendre. Notre entreprise a effectué la première conversion pour l'an 2000 en 1993. Depuis, nous avons livré une longue bataille pour essayer de faire comprendre aux gens ce que l'an 2000 représentait.

Je voudrais donc vous informer très rapidement. Si je vous répète des choses que vous savez déjà, je m'en excuse, mais il m'est très difficile de savoir à quel point vous comprenez les systèmes intégrés. J'ai constaté que la plupart des gens, y compris les spécialistes de la technologie de l'information, ont une connaissance limitée de ce que ce problème représente pour une organisation. Je suis très inquiète.

Comme mon accent vous le dira, je viens du sud de Calgary. Notre entreprise est établie à Calgary.

M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): J'ignorais que Calgary s'étendait aussi loin au sud.

Mme Jennifer McNeill: Je vis au Canada depuis 11 ans environ et j'adore cela.

La situation m'inquiète. Nous avons environ un an de retard par rapport aux États-Unis sur le plan de nos préparatifs pour l'an 2000 et de sérieux problèmes se posent dans les organisations du pays.

• 1525

Le problème que posent les systèmes intégrés c'est qu'au départ on ne pensait pas qu'il y en avait un. Je vais vous expliquer ce qu'est un système intégré. Un système intégré est un microprocesseur qui fait fonctionner un type de technologie qui contrôle un appareil, par exemple un ascenseur. Dans l'ascenseur, il contrôle à quel moment l'ascenseur commencera à fonctionner. Ou dans un climatiseur ou dispositif de refroidissement, il le déclenchera automatiquement à certains moments. Les systèmes intégrés causeront des problèmes dans toutes sortes d'industries.

C'est la même chose que pour notre technologie de l'information, si ce n'est que, dans la plupart des cas, nous ne pouvons pas modifier le système. Nous ne pouvons rien changer à la technologie. Elle est intégrée dans un microprocesseur qui réside dans un dispositif.

Je vais vous parler un peu de certains des domaines touchés, mais c'est important étant donné que nous avons toutes sortes de microprocesseurs qui contrôlent toutes sortes d'activités.

L'un de mes collègues gère les préparatifs pour l'an 2000 chez MacMillan Bloedel. Cette société a 300 sites éloignés et s'est rendu compte que 15 p. 100 des systèmes intégrés de ces sites vont flancher. Malheureusement, elle ne peut pas établir quels sont ceux qui lâcheront et quand ils le feront. Ces systèmes contrôlent des données environnementales en indiquant quand les billes de bois entrent et quand elles sortent. Il y a un tas d'autres situations de ce genre.

Malheureusement, les systèmes intégrés se trouvent partout. Dans bien des cas, il est très difficile d'établir où ils sont. La plupart des gens qui essaient de résoudre le problème de l'an 2000 sont des spécialistes de la technologie de l'information qui ne comprennent pas les systèmes intégrés. Par conséquent, lorsqu'un client vient demander à une entreprise comme la mienne de l'aider à se préparer pour l'an 2000, il commence par examiner ses systèmes informatiques. Malheureusement, il ne pense pas à ses systèmes d'air climatisé et de chauffage, à ses ascenseurs, comme nous venons de le voir, ou, dans une usine de fabrication, aux dispositifs de contrôle de l'usine qui, dans bien des cas, ont remplacé des centaines de gens et contrôlent le déroulement des opérations. Ce sont là de très sérieux problèmes pour toutes les organisations, mais le plus grave est que ces systèmes sont très difficiles à localiser.

Tous les types de systèmes sont touchés. Cela va des hôpitaux—et je sais que vous avez été informés au sujet des hôpitaux et de certains problèmes relatifs aux soins médicaux. Les stimulateurs cardiaques, les appareils respiratoires et un tas de systèmes hospitaliers posent de sérieux problèmes. J'ai des hôpitaux parmi ma clientèle et je leur parle de la planification d'urgence par exemple au cas où les ascenseurs ne fonctionneraient plus alors que les salles d'opération se trouvent au troisième étage. Comment emmenez-vous des patients en salle d'opération si vous ne pouvez pas les transporter? Ce sont là des questions qu'il faut absolument se poser pour déterminer les problèmes qui attendent nos entreprises et nos organisations.

D'autre part, nous utilisons une quantité importante de vieilles technologies. Les fabricants sont peu coopératifs et je vais vous expliquer pourquoi. Quand nous allons voir des fabricants pour leur demander pourquoi leurs systèmes ne fonctionneront pas, ils nous répondent qu'ils ne vendent plus le dispositif en question et qu'ils n'ont donc pas à nous aider. Seulement 30 à 40 p. 100 des fabricants de matériel apportent leur coopération. Les autres ne répondent pas à nos appels ou à nos lettres et ils refusent d'aider leurs clients.

Notre matériel a une capacité limitée. Dans bien des cas, il faut le remplacer. Un gouvernement provincial a établi qu'il devrait dépenser 200 millions de dollars dans ses hôpitaux et ses services de santé pour remplacer ses systèmes intégrés parce qu'il ne peut pas déceler les problèmes. Il est conscient de certains problèmes et essaie de les cerner très rapidement.

Encore une fois, c'est le même problème que pour l'an 2000. La plupart des microprocesseurs repèrent une date à deux chiffres, comme 99, et dans bien des cas lorsqu'ils arrivent à 99, ils interprètent ce chiffre comme un code d'erreur. Nous croyons que les problèmes commenceront à s'aggraver en 1999. Pour ce qui est des ascenseurs, seule une partie d'entre eux seront touchés, mais pour ceux qui le seront, si vous avez 00 dans la date, le système croira qu'il est temps d'entretenir l'appareil et l'amènera au rez- de-chaussée où il restera immobilisé. Vous pourrez faire venir le service d'entretien immédiatement, mais si ce phénomène se produit dans tout le pays, cela posera de sérieux problèmes.

Nous avons également des systèmes d'exploitation pour lesquels cette technologie causera des difficultés. Encore une fois, ce n'est pas mesurable. Il nous est très difficile de mesurer l'étendue du problème.

• 1530

Quand nous demandons aux organisations de nous dresser l'inventaire de leurs systèmes intégrés, nous commençons par cette assez longue liste. Nous nous retrouvons finalement avec 15 p. 100 environ des systèmes qui sont touchés. Malheureusement, il y a d'autres puces à l'intérieur des puces.

Le mois dernier, une grande compagnie de télécommunications avait un système qu'elle croyait répondre aux exigences de l'an 2000. Il contenait des systèmes intégrés. La compagnie avait testé ses unités, mais sans intégrer les tests à l'échelle de tous ses réseaux. Tout s'est arrêté. De sérieuses difficultés s'annoncent dans un certain nombre de grandes organisations.

Si nous ajoutons cela au problème très vaste que soulève l'an 2000, nous avons des problèmes de taille. D'après ce que j'ai constaté, ce sont nos fabricants qui sont les plus exposés. On estime en effet que 30 p. 100 des entreprises vont avoir des difficultés à cause de l'an 2000. Telle est l'estimation globale du Groupe Gartner.

Je crois que le pourcentage est encore plus élevé pour le Canada. Je le crois, car 300 grandes entreprises du pays n'ont rien fait. Rien du tout. Elles n'ont aucun plan. Elles ignorent ce qu'elles feront du côté de leur technologie de l'information et encore plus du côté des systèmes intégrés.

Pour ce qui est des systèmes intégrés, encore une fois, certains fabricants ont non seulement des systèmes pour leur technologie de l'information qui sont surtout des systèmes spécialisés et existants, mais également des systèmes de contrôle du processus de fabrication qui vont poser de sérieux problèmes dans l'usine s'ils ne fonctionnent pas comme il faut.

Ils ne comprennent pas comment remédier à la situation. Les fournisseurs ne répondent pas à leurs questions. Si 30 p. 100 de leurs fournisseurs ne peuvent pas les approvisionner, ils auront de sérieuses difficultés.

Comme vous le savez, selon certaines statistiques de Statistique Canada, nos fabricants apportent 13 p. 100 de notre produit intérieur brut et environ 68 p. 100 de nos revenus d'exportation. C'est important, très important.

D'autre part, même si les grandes entreprises semblent bouger un peu, les PME ne font rien. Cela représente un sérieux problème étant donné que les PME constituent l'épine dorsale de l'économie canadienne, comme chacun sait.

C'est grave, parce qu'elles n'ont pas l'argent voulu ni les renseignements requis. Elles ne comprennent pas l'incidence de l'an 2000 et les entreprises qui se spécialisent dans la préparation à l'an 2000 s'adressent directement aux grandes sociétés qui ont de l'argent. Nos petites et moyennes entreprises ne reçoivent aucune aide.

D'autre part, il est difficile de tester les systèmes intégrés étant donné qu'ils servent généralement à la production. Si vous voulez les tester, vous devez donc arrêter certaines activités d'une entreprise. Nos clients sont de plus en plus nombreux à dire qu'ils ne peuvent pas fermer une usine de pétrole ou de gaz parce qu'elle fonctionne sept jours sur sept et 24 heures sur 24.

J'ai rencontré de nombreuses de sociétés pétrolières et gazières du Canada, surtout à Calgary. Il y a de sérieux risques de ce côté-là. Des représentants de grandes sociétés pétrolières et gazières m'ont dit que si certaines de leurs installations s'arrêtaient, ce serait la faillite. Certaines d'entre elles, qui sont dans le Grand Nord, remplissent des fonctions qui sont certainement contrôlées par l'heure et la date.

Je crois donc que le risque est sérieux. Il est également certain que de graves risques se posent pour les plates-formes de forage. Le secteur des hydrocarbures va avoir des ennuis.

D'autre part, un grand nombre de nos systèmes intégrés se parlent entre eux. Si nous avons un système, il peut envoyer de l'information à un autre, comme c'est le cas dans une entreprise de télécommunications. Il y a donc un problème à ce niveau. Nous transmettons de l'information d'une organisation vers une autre. Le secteur des télécommunications en est un parfait exemple. L'information circule d'un bout à l'autre.

Le secteur de l'électricité a un très sérieux problème. Nous travaillons avec TransAlta à ses systèmes intégrés. La situation est grave, mais on ne sait pas exactement où se situe le problème et comment il va pouvoir être réglé à temps.

Certaines centrales nucléaires posent également des difficultés dans ce même secteur. Je donne des colloques sur l'an 2000 dans tout le Canada et je reçois beaucoup de renseignements de la part de personnes dont je ne peux pas vous communiquer le nom. Néanmoins, une compagnie d'électricité m'a dit que 60 p. 100 de son électricité était d'origine nucléaire et qu'elle allait devoir fermer sa centrale. C'est un chiffre important.

L'information nous parvient graduellement. Malheureusement, on n'en tient pas toujours compte, car beaucoup de gens ne veulent pas que le public apprenne les mauvaises nouvelles. Cela soulève des questions de politique au sein des organisations, comme vous pouvez certainement l'imaginer.

• 1535

Il va y avoir des poursuites en responsabilité civile, mais j'espère que ce sera moins grave qu'aux États-Unis. Je ne crois pas que nous en arriverons là. D'après les estimations, la transition à l'an 2000 va susciter des actions en justice d'une valeur de 1,3 billion de dollars, mais cela ne portera pas seulement sur les systèmes intégrés. Nous espérons que tout cela se passera aux États-Unis et pas au Canada, même si de nombreuses entreprises canadiennes fournissent de l'électricité et de nombreuses marchandises aux États-Unis. Nos organisations sont donc largement exposées elles aussi. Un certain nombre d'entreprises de matériel et de logiciel devront fermer leurs portes parce qu'elles n'auront pas le temps d'adapter leur équipement et elles seront poursuivies devant les tribunaux. Nous allons voir ce genre de choses se produire.

Encore une fois, on utilise beaucoup de périphériques d'entrée et de sortie sans trop savoir comment ils sont conçus. Il y a beaucoup de technologie ancienne pour laquelle on essaie d'établir où se situent les problèmes. On ne peut pas trouver de schémas. On ne sait pas exactement quelles fonctions joue le microprocesseur. On sait que la date pose un problème, mais sans pouvoir déterminer où il se situe.

Encore une fois, on s'attend à ce que le cinquième environ des systèmes intégrés posent un problème de date. Pour à peu près 15 p. 100 de ces systèmes, nous ne savons pas du tout à quoi nous attendre.

Nous recommandons aux organisations d'établir un plan d'urgence pour la gestion des risques afin qu'elles sachent très vite ce qu'elles vont devoir faire. Si l'ascenseur ne fonctionne pas alors que la salle d'opération est au troisième étage, il va falloir déménager le service de chirurgie au premier étage.

Malheureusement, la plupart de nos hôpitaux n'ont rien fait. Les choses bougent un peu en Alberta. Les autres provinces où je travaille, comme la Nouvelle-Écosse, la Colombie-Britannique et l'Alberta, bougent très très lentement. En fait, je dirais que 90 p. 100 des hôpitaux de la Colombie-Britannique et de la Nouvelle-Écosse n'ont rien fait. Ils n'ont pas cherché à remédier à leur problème de technologie de l'information.

Comme je l'ai dit, on n'a pas accès au code source. On s'est servi de détecteurs de date et de simulateurs. Il faut s'attendre à de très sérieuses difficultés de ce côté-là.

Nous essayons surtout de faire comprendre aux gens qu'ils doivent aller discuter avec les fabricants. Lorsqu'ils leur envoient des lettres pour leur demander ce qu'ils doivent faire pour l'an 2000, ou bien les fabricants ne leur répondent pas parce que leur contentieux leur conseille de ne rien dire ou ils répondent qu'ils ne savent pas très bien où est le problème. Environ 40 p. 100 d'entre eux ne répondent pas du tout.

Nous recommandons aux entreprises d'aller discuter directement avec leurs fournisseurs. Nous disons aux grandes sociétés de brandir un gros bâton et de profiter de l'influence que leur confère leur grande taille pour amener les fabricants à les aider.

Dans le secteur du pétrole et du gaz, un grand nombre de compagnies pétrolières et gazières ont adapté les microprocesseurs à leurs besoins particuliers. Elles leur font remplir certaines fonctions pour elles. Malheureusement, la plupart de nos techniciens se font kidnapper par les États-Unis et, bien souvent, les personnes qui ont conçu la technologie spécialisée ne sont plus là.

Le manque de ressources nous cause des difficultés, et cela pour tout le monde, surtout au Canada, car nous ne pouvons pas payer les mêmes salaires qu'aux États-Unis. Nous n'avons pas perdu un seul de nos employés, mais nos clients ont perdu jusqu'à quatre ou cinq personnes par semaine dans leur service de technologie de l'information. Il y a une importante perte de ressources humaines.

Comprenez bien que les spécialistes des systèmes intégrés ne sont pas des spécialistes de la technologie de l'information. Ce sont des ingénieurs électriciens dont le nombre est d'ailleurs très limité. Nous disposons donc de peu de ressources pour nous en sortir.

En résumé, cela aggrave nos difficultés pour l'an 2000 alors qu'elles sont déjà assez graves. Nous essayons seulement d'établir où se pose le problème pour nos clients et nous essayons d'amener les gens à obtenir des renseignements des fabricants. C'est la planification d'urgence qui va nous aider au moins à contourner les difficultés, à déterminer ce qu'il faudra faire.

Certaines organisations vont actionner manuellement un commutateur à un moment donné pour que tout continue à fonctionner. Nous avons recommandé à certaines entreprises de télécommunications avec lesquelles nous travaillons d'installer des génératrices dans toutes leurs installations extérieures pour qu'elles puissent continuer à opérer.

• 1540

Nous sommes prêts à répondre à vos questions.

La présidente: Merci beaucoup, madame McNeill. En fait, avant de passer aux questions, nous allons entendre les autres témoins.

Monsieur Nunn et monsieur Eedson, s'il vous plaît.

M. Ian Nunn (coprésident, Sous-comité des systèmes intégrés): Merci et bon après-midi, madame la présidente, membres du comité et madame McNeill.

[Français]

Je m'appelle Ian Nunn et je suis heureux d'être ici aujourd'hui

[Traduction]

en tant que coprésident du Sous-comité des systèmes intégrés du Groupe de travail interministériel sur le problème de l'an 2000.

Les séances précédentes du comité témoignent de son intérêt pour les nombreux aspects du défi que représente l'an 2000 et nous vous remercions de nous avoir invités à vous faire part des progrès accomplis par le gouvernement sur le plan des technologies intégrées.

J'ai l'intention de vous présenter un aperçu général du problème de l'an 2000 en ce qui concerne les technologies intégrées. Mon collègue, Ted Eedson, vous décrira ensuite le sous- comité et son mandat et vous donnera des exemples précis de ce que nous avons réalisé jusqu'ici pour résoudre le problème des systèmes intégrés pour l'an 2000.

Un dispositif ou système intégré est un produit qui inclut un ou plusieurs microprocesseurs ou autres dispositifs logiques programmables, autrement dit des puces, si vous voulez. Ces produits sont contrôlés par des programmes qui sont soit incorporés à la puce, soit stockés dans une puce mémoire connexe non reprogrammable ou reprogrammable uniquement grâce à une technologie de pointe. On peut trouver ce système dans des produits qui incluent des fonctions de surveillance, de captage, de calcul ou de contrôle et dont la taille et la complexité couvrent une vaste gamme, de la simple montre-bracelet fabriquée à des centaines de milliers d'exemplaires, aux systèmes uniques et complexes de contrôle de processus utilisés dans les grandes usines pétrochimiques et les réacteurs nucléaires.

Selon une convention arbitraire, ne sont pas désignés sous le nom de systèmes intégrés les ordinateurs normalement associés à la catégorie des ordinateurs centraux, des mini-ordinateurs et des micro-ordinateurs et des dispositifs de télécommunications, y compris les commutateurs voix-données et le matériel de réseautage. Ce n'est là qu'une distinction arbitraire. Je crois que le comité a récemment obtenu des renseignements sur le passage à l'an 2000 du secteur des télécommunications lorsque le CRTC, Bell Canada et Nortel ont témoigné.

Le problème de l'an 2000, dans le contexte des systèmes intégrés, présente certaines caractéristiques.

Premièrement, il y a une très grande quantité de dispositifs actuellement en service.

Deuxièmement, il y a une grande variété des produits à technologie intégrée, par exemple les jouets, les automobiles, les appareils électroménagers et la presque totalité des composantes électriques fabriquées.

Troisièmement, il y a la diversité des versions d'une catégorie de produits, par exemple le nombre de marques et de modèles de photocopieurs, dont chacun utilise des pièces ininterchangeables et possède des caractéristiques conceptuelles qui lui sont propres.

Il y a aussi le caractère caché de la technologie. La plupart des utilisateurs ignorent que la conception de ces produits intègre la technologie du microprocesseur.

La variété des fournisseurs et des conceptions de puces logiques est un autre facteur à explorer. Durant la vie utile d'un produit, on peut se procurer chez plusieurs fabricants différents des puces dont les caractéristiques et le rendement peuvent être différents.

Les compétences nécessaires pour la conception et la maintenance des systèmes intégrés sont rares et ultra-spécialisées. Seule la combinaison d'une formation universitaire et d'une vaste expérience de l'industrie permet d'acquérir ces compétences.

Enfin, le coût et la taille de ces dispositifs peuvent être fortement disproportionnés par rapport à la valeur et au nombre de produits dont ils facilitent la production. Des capteurs et des commandes numériques de quelques dollars à peine servent à contrôler des procédés industriels capables de réaliser des produits finis dont la valeur peut atteindre des milliers, voire des millions de dollars.

D'autre part, le défi que pose l'ordinateur personnel ou PC relativement au problème de l'an 2000 est très différent. Sa conception ou son architecture a évolué lentement au cours des 15 dernières années et les modifications apportées ont éventuellement été perçues comme des changements standard à travers l'industrie. Relativement interchangeables entre les produits des différents fabricants, les pièces peuvent souvent être remplacées par l'utilisateur. De plus, il existe une importante main-d'oeuvre qualifiée jouissant d'une connaissance approfondie des ordinateurs personnels. Pour acquérir les compétences requises, il suffit de s'inscrire à des programmes de formation de courte durée dispensés dans les collèges.

Quels sont les types et les incidences de la non-conformité pour l'an 2000? Il y a trois genres d'incidences. La première est catastrophique, car le dispositif tombe en panne et risque de ne pas pouvoir être relancé. La deuxième incidence est le fonctionnement erroné détectable. Le dispositif continue à fonctionner plus ou moins, mais les ratés produisent des résultats erronés ou entraînent des déficiences sur le plan opérationnel.

• 1545

En troisième lieu, il y a le fonctionnement erroné non détectable. Le phénomène est le même que ci-dessus, mais il s'accompagne d'effets intermittents ou si peu perceptibles qu'ils ne peuvent être détectés. Les erreurs ne sont détectables que dans les systèmes auxquels le dispositif défectueux est branché.

Je vais vous donner un bref exemple de ces trois scénarios. Dans le premier cas, le système peut cesser de fonctionner parce qu'il n'est pas en mesure de traiter le code de date 00. Dans le deuxième scénario, il peut associer la valeur 00 au lundi 1er janvier 1990 plutôt qu'au 1er janvier 2000 et créer un calendrier de travail fondé sur une hypothèse erronée quant au jour de la semaine. Dans le troisième scénario, le système peut associer par erreur la valeur 00 à l'année 1990 et déclencher des activités de maintenance périodique ou exécuter par erreur d'autres fonctions automatisées.

La gamme des incidences éventuelles liées à la non-conformité en 2000 va du simple désagrément au désastre majeur. L'inscription par un télécopieur de bureau de la mauvaise date sur les copies lors du passage à l'an 2000 peut s'avérer, tout au plus agaçante. Par contre, dans le cas d'une usine pétrochimique, le mauvais fonctionnement d'une soupape de commande de processus qui entraîne le déversement de produits toxiques dans l'environnement peut constituer un désastre majeur, avec possibilité de pertes de vies humaines.

À titre d'anecdote, mentionnons le cas de la centrale électrique de 500 mégawatts en Angleterre où ont été effectués des essais réels de passage à l'an 2000. Un capteur thermique «intelligent» d'une valeur de quelques dollars, dans un conduit de fumée de la centrale, est tombé en panne et a entraîné la fermeture de cette centrale valant des centaines de millions de dollars. De telles anecdotes sont nombreuses et, quoique difficiles à vérifier, elles donnent une idée de l'ampleur des risques auxquels on s'expose.

Une des solutions les plus pratiques que préconise le Sous- comité interministériel est celle de la boîte noire. La première étape à suivre en pareil cas est celle de l'identification. Où chercher? Il faut vérifier tous les dispositifs numériques ou électriques. Quoi chercher? Vous examiner toute utilisation de dates dans des rapports, des données, des affichages ou des données d'entrée et des contrôles. Il faut se demander si l'utilisateur peut initialiser ou modifier une date. En cas de doute, ce dispositif peut être inclus dans la liste des systèmes à tester.

La deuxième méthode est celle de l'inventaire. Obtenez le maximum de renseignements sur le produit, y compris la marque, le modèle, la version, le numéro de révision, la date de fabrication, le numéro de série... tout ce que vous pouvez trouver. Des changements mineurs de conception ou la sélection du fabricant de puces d'une même série de modèles peuvent avoir une incidence sur la performance du dispositif lors du passage à l'an 2000.

La troisième étape est l'établissement de la conformité du fournisseur: tentez d'obtenir du fournisseur ou du fabricant l'énoncé de conformité, les méthodologies d'essai et les résultats. Si le fournisseur déclare que le dispositif est conforme, demandez- lui comment cela a été établi. Exigez qu'il vous montre les résultats. Établissez les conditions et les règles de conformité de façon à savoir à quoi répond le fournisseur. D'après votre expérience, même si un fournisseur déclare qu'un dispositif est conforme, cela ne garantit pas son bon fonctionnement dans les conditions où vous allez l'utiliser. C'est ce que nous avons constaté.

La quatrième étape est celle du tri. Déterminez la nature critique de chaque dispositif ou système par rapport au mandat de l'organisation. Établissez une liste de priorités pour les dispositifs et les systèmes aux fins de suivi. Le suivi consiste à effectuer des essais en fonction des priorités. Testez les dispositifs pour lesquels vous disposez de suffisamment de temps et de ressources à partir de la liste de priorités que vous avez établie.

La dernière étape est celle des mesures correctives. Il faut effectuer une des trois activités commençant par la lettre R soit réparer, remplacer ou réformer, pour chaque élément jugé problématique. Il faut tenir compte de la valeur comptable par rapport au coût des essais. Si le dispositif a déjà un certain âge et que sa valeur comptable n'est que de quelques centaines de dollars, il ne vaut peut-être pas la peine de le soumettre à des essais. Il est peut-être arrivé au terme de son cycle de vie et vous devriez alors le remplacer.

J'ajouterais une étape supplémentaire qui est celle de l'analyse des risques et de la planification d'urgence. Avant de procéder à des essais, il vous faut un plan d'urgence au cas où le dispositif que vous testez ne pourrait pas reprendre son fonctionnement normal. De toute façon, vous devez établir un plan d'urgence pour tous les dispositifs essentiels que vous testez au cas peu probable, mais certainement envisageable, où le système en question tomberait quand même en panne en l'an 2000. Pour les dispositifs non essentiels, prévoyez la planification d'urgence que vous jugerez appropriée.

• 1550

Pour conclure, je voudrais vous faire part de certains faits constatés jusqu'ici. Je crois que Mme McNeill m'a fourni quelques renseignements complémentaires à cet égard et j'aimerais en discuter avec elle tout à l'heure.

Néanmoins, la technologie intégrée est la dernière des questions techniques liées au problème de l'an 2000 que l'on a identifiée et sur laquelle on s'est penché. Par conséquent, on ne fait que commencer à en saisir l'importance. Les essais en temps réel effectués dans les industries et les entreprises de services publics permettent d'identifier des cas documentés de dispositifs défectueux.

Des estimations préliminaires de l'ampleur du problème permettent d'estimer qu'environ 5 p. 100 des dispositifs installés sont visés. Il importe de signaler qu'à ce stade-ci nous ne disposons d'aucun moyen d'évaluer avec fiabilité l'incidence de cet aspect du problème de l'an 2000. Lorsque de tels moyens seront disponibles, il sera trop tard pour les utiliser.

Compte tenu de l'envahissement de cette technologie et de l'ampleur du problème, le mot d'ordre qui s'impose est qu'il faut passer à l'action. Les spécialistes qui possèdent des compétences dans ce domaine auront disparu du marché bien avant les spécialistes des autres aspects du problème de l'an 2000. Nous savons déjà que les stocks de produits pour certains des dispositifs, tels que les contrôleurs logiques programmables, ne suffiront pas à la demande.

Je vous remercie. Je vais maintenant vous demander d'écouter Ted Eedson, l'autre coprésident de ce sous-comité.

M. Ted Eedson (coprésident, Sous-comité des systèmes intégrés): Merci, Ian. Bon après-midi, madame la présidente, membres du comité et madame McNeill.

[Français]

Je m'appelle Ted Eedson et je suis ici à titre de coprésident du Sous-comité sur la technologie intégrée du groupe de travail interministériel.

[Traduction]

Comme Ian l'a mentionné, je tiens à remercier le Comité permanent de l'industrie de nous avoir invités à parler de l'an 2000 et de ses effets sur les technologies intégrées.

Je vais vous parler un peu des travaux du Sous-comité des systèmes intégrés. D'abord et avant tout, notre sous-comité est constitué d'employés du gouvernement qui se sont portés volontaires pour relever le défi que pose l'an 2000 en ce qui concerne les systèmes intégrés. Nous comptons des représentants de 22 ministères et organismes fédéraux, de même que des gouvernements municipaux locaux.

Je voudrais vous indiquer quel est le but de notre sous-comité qui comprend plusieurs éléments clés. Nous informons les ministères des problèmes que l'an 2000 représente pour les systèmes intégrés. Nous regroupons l'information que nous trouvons sur les systèmes intégrés, surtout les données concernant les essais et les méthodes d'essai afin d'éviter un dédoublement des efforts dans les divers ministères et organismes.

Nous avons identifié des produits et proposé leur inclusion dans la base centrale de données du service d'information du gouvernement canadien sur la préparation des fournisseurs au passage à l'an 2000. Les questions particulièrement préoccupantes ou qui exigent un mandat ont été portées à l'attention du Groupe de travail interministériel afin que des mesures soient prises. Enfin, nous avons rejoint d'autres organismes pour partager nos connaissances avec eux et les sensibiliser davantage.

Il y a un certain nombre de catégories de systèmes ou de produits identifiés qui intéressent le sous-comité.

La présidente: excusez-moi. Pourrais-je vous demander de résumer votre mémoire... Je ne m'étais pas rendu compte que M. Nunn et vous-même alliez lire entièrement deux mémoires. Comme nous avons peu de temps pour les questions, je préférerais que vous le résumiez.

M. Ted Eedson: Certainement.

Les questions qui intéressent le sous-comité sont les produits de bureautique, les installations et l'équipement de laboratoire, les dispositifs médicaux, l'infrastructure des immeubles, les systèmes de contrôle des processus, l'électricité et les autres services publics ainsi que les systèmes de transport et de navigation. Des volontaires ont accepté de se charger de la coordination de la plupart de ces domaines.

Nous partons du principe que nous allons échanger des renseignements et nous servir de la base de données sur les fournisseurs qui est gérée par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux. Cette base de données est actuellement à la disposition du gouvernement canadien, mais nous avons appris qu'à compter du 1er avril, ce site, qui est un site Intranet, deviendra accessible au public par Internet. Il s'agit d'une base de données contenant des renseignements sur les produits que nous avons recueillis auprès de l'industrie.

Nous avons fait un effort concerté pour veiller à ce que les renseignements communiqués par les fournisseurs soient les plus à jour et exacts possible. Néanmoins, le ministère des Travaux publics sait parfaitement que les fournisseurs se réservent le droit de contrôler leurs produits respectifs. Par conséquent, le ministère ne peut pas garantir, explicitement ou implicitement, l'exactitude des renseignements fournis dans le cas de cette étude de conformité. Nous avons conseillé aux usagers de vérifier auprès de leur ministère et de leur service technique avant de prendre des décisions technologiques ou commerciales.

• 1555

Pour conclure, je voudrais dire quelques mots au sujet de certains produits sur lesquels des renseignements sont fournis dans le site. Les produits de bureautique représentent une nouvelle catégorie, mais nous utilisons des données qui ont été récemment publiées par la Building Owners and Managers Association. Elle a produit une excellente publication sur les immeubles, mais également sur la bureautique. Cela date de janvier 1998 et j'en ai apporté quelques exemplaires à votre intention.

Le deuxième domaine est celui des installations et du matériel de laboratoire. Nous avons appris que le site Web de Santé Canada présenterait bientôt des données sur les recherches effectuées à l'égard de la conformité et des essais. L'Agence canadienne d'inspection des aliments a constitué une base de données pour 22 laboratoires contenant plus de 1 500 pièces d'équipement incluant des microprocesseurs intégrés et ces renseignements seront également disponibles dans les sites Web existants.

Jusqu'ici, nous possédons une quantité de renseignements sur l'infrastructure des immeubles. Le ministère qui offre ces données sur son site Web est celui des Travaux publics et des Services gouvernementaux qui a eu des contacts assez fructueux avec l'industrie. Il a contacté environ 70 entreprises et le taux de réponse dépassait les 60 p. 100.

À l'heure actuelle, 122 produits sont sur notre liste. Certains d'entre eux représentent un ou plusieurs produits d'une catégorie connexe. Sur les 122 produits de la liste, le fournisseur a répondu par l'affirmative dans 81 p. 100 des cas. Cela s'applique à un modèle précis ou une version particulière, mais nous obtenons ces données. Neuf produits en sont encore à la phase des essais et 13 ont été déclarés non conformes, mais nous avons obtenu des renseignements quant à la mise à jour nécessaire.

Le problème de l'an 2000 se pose dans l'industrie des ascenseurs où la plupart des fabricants ont répondu que tous leurs produits étaient conformes. Trois des quatre fournisseurs de systèmes d'alarme d'incendie ont également répondu et ils ont 22 produits conformes.

Le comité des systèmes intégrés n'a pas encore obtenu de renseignements au sujet des systèmes de contrôle des processus. Un examen préliminaire réalisé par les experts de la Commission de contrôle de l'énergie atomique laisse entendre que l'an 2000 ne posera peut-être pas de problème sur le plan de la sécurité nucléaire, mais nous n'avons pas de renseignements concrets jusqu'ici.

Pour ce qui est de l'énergie électrique et des autres services publics, notre sous-comité a reçu des données d'Hydro Ottawa et d'Hydro Ontario et le groupe de travail interministériel a également obtenu une mise à jour de la Commission de contrôle de l'énergie atomique. Hydro Ottawa a dit qu'elle s'était donnée jusqu'en juillet 1999 pour réaliser la conversion et elle estime que cette date ne peut pas être différée. Hydro Ontario croit pouvoir tester et déployer sa conversion d'ici la fin décembre 1998.

Un dernier domaine est celui du système de transport et de navigation. Grâce à un échange d'information, nous avons appris que le ministère des Pêches et des Océans avait dressé une liste de 6 000 articles dans son inventaire de l'an 2000. Il compte engager quelqu'un pour les répertorier par catégories vers le mois de mai.

Transports Canada est en train de superviser les activités de NAV CANADA pour l'an 2000 et d'après les résultats, ces systèmes seront prêts et on s'attend seulement à des retards mineurs dans les vols.

Je vous remercie, encore une fois, pour l'intérêt que vous portez à notre sous-comité. Même si les ministères et organismes assument la responsabilité ultime d'une conversion réussie de tous leurs systèmes, notre groupe de volontaires assume ce qu'il estime être une responsabilité sociale à l'égard de l'échange de renseignements afin de relever le défi de l'an 2000 en ce qui concerne la technologie intégrée.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Eedson et monsieur Nunn.

Je rappelle à tous les membres du comité que Mme McNeill n'est avec nous que jusqu'à 16 h 30. Peut-être pourriez-vous donc en tenir compte pour votre premier tour de questions.

Monsieur Schmidt.

• 1600

M. Werner Schmidt: Merci, madame la présidente.

Merci beaucoup, madame McNeill, Ian et Ted de votre comparution cet après-midi. Je pense que c'est là un problème de plus en plus important dont nous sommes tous conscients. Je constate qu'une personne qui s'occupe de cette question depuis deux ans est encore prête à reconnaître qu'elle ne comprend pas tout. C'est à la fois inquiétant et encourageant, car cela veut dire qu'il nous reste quelque chose à apprendre et que vous êtes disposés à apprendre ce qu'il faut faire pour résoudre le problème.

Je suis très inquiet par ce que vient de dire M. Nunn, à savoir que la capacité de fabrication actuelle n'est pas suffisante pour rétablir la compatibilité de nos dispositifs de contrôle, surtout ceux qui comportent des systèmes intégrés. Je voudrais savoir comme résoudre le problème. Si nous savons déjà que la capacité de fabrication n'est pas suffisante et qu'il y a un problème, quelle est la solution à ce problème complexe?

M. Ian Nunn: Cela nous ramène au secteur de l'industrie où le problème commence à apparaître. Ces renseignements se fondent sur les données fournies sur les compagnies d'électricité des États- Unis qui se servent de ces contrôleurs logiques programmables pour la commutation.

J'ignore s'il est possible de porter la capacité à un niveau suffisant lorsqu'un problème est clairement mis en lumière. Je suis certain que des mesures extraordinaires devraient être prises en ce sens au niveau gouvernemental.

M. Werner Schmidt: Je ne pense pas que nous puissions nous contenter de suppositions. Si nous sommes confrontés à une crise, il faut agir. Si nous savons déjà qu'une crise risque de se produire dans un domaine donné et que la capacité de fabrication est inexistante, il ne suffit pas de dire que le gouvernement trouvera un moyen de gérer la crise. C'est insuffisant. Nous ne pouvons pas attendre indéfiniment comme le gouvernement le fait généralement. Il tergiverse jusqu'à ce qu'une crise survienne.

Que va-t-on faire? Que faut-il faire maintenant pour éviter ce genre de situation? Cela me paraît d'une importance critique. Si ce que vous dites est vrai et si les recherches dont vous parlez ont été faites; si les conclusions de nos chercheurs sont exactes, nous n'avons pas le choix. Il faut faire quelque chose et cela immédiatement.

M. Ian Nunn: Je suis d'accord.

M. Werner Schmidt: D'accord, alors que fait-on?

Mme Jennifer McNeill: Il faut que tout cela aille jusqu'aux instances supérieures du gouvernement et de l'industrie du Canada afin que les diverses organisations possèdent les connaissances voulues pour comprendre quels sont leurs risques.

On ne peut pas se contenter de s'occuper des systèmes de technologie de l'information qui sont essentiels ou des systèmes intégrés. Les organisations doivent mettre en place un système de gestion des risques et de planification d'urgence afin, qu'en cas de problèmes qui entraîneraient une perturbation des services, par exemple si un hôpital ne peut pas ouvrir ses portes ou si les alarmes d'incendie ne se déclenchent pas, on sache comment y remédier. Il faut le faire dès maintenant.

M. Werner Schmidt: Si je comprends bien votre réponse, nous devons reconnaître aujourd'hui même s'il y aura des problèmes.

Mme Jennifer McNeill: C'est exact, mais malheureusement, personne ne veut s'aventurer à l'admettre. Les gens ne veulent pas en prendre le risque, même nous savons que d'autres problèmes se sont déjà produits dans le monde entier. Personne, dans l'industrie ou au gouvernement, ne veut se risquer à reconnaître que nous avons un sérieux problème et qu'il faut le résoudre.

M. Werner Schmidt: Le fait est qu'au moment où je vous parle, nous avons enregistré votre déclaration selon laquelle il y aura des problèmes.

Mme Jennifer McNeill: C'est exact.

M. Werner Schmidt: Selon moi, si c'est exact, madame la présidente, il faut que ce soit annoncé publiquement. C'est une tribune publique que nous tenons ici cet après-midi.

S'agit-il alors de déterminer où les problèmes se situeront et d'établir une liste de priorités en fonction du risque de panne?

Compte tenu de votre expérience, pouvez-vous nous dresser une liste des problèmes graves menaçant la vie humaine auxquels il faut s'attendre?

• 1605

Il y a des situations qui menacent la vie des gens et également des situations financières graves, par exemple en ce qui concerne le transfert de fonds d'un compte à l'autre. Ce n'est qu'un aspect des obligations contractuelles existant entre les entreprises.

Mme Jennifer McNeill: Je peux vous dire qu'il faut commencer par les compagnies d'électricité afin d'établir si elles pourront nous alimenter en électricité et dans quelle mesure.

Cela fait, il serait utile d'établir quelles sont les autres entreprises qui seront touchées. Si une entreprise de télécommunications ne peut pas obtenir d'électricité, elle ne pourra pas assurer des services téléphoniques. Si une personne ne peut pas composer le 911 lorsqu'un enfant ou quelqu'un d'autre est malade, il y aura des morts.

Tels sont les risques qui sont très clairement établis. Vous pouvez les constater. Les hôpitaux sont en tête de liste des priorités. Il faut déterminer quels sont, au sein des hôpitaux, les secteurs qui posent des problèmes. La plupart des hôpitaux qui ont effectué ce travail ont déjà localisé leurs difficultés. Il faut échanger ces renseignements au sein du même secteur.

La présidente: Une dernière question, monsieur Schmidt.

M. Werner Schmidt: Merci.

Les problèmes étant mis en lumière, pouvons-nous faire des essais pour nous assurer que ces domaines critiques seront capables de faire face à la crise de l'an 2000? Pouvons-nous les tester?

Mme Jennifer McNeill: Nous pouvons tester certains d'entre eux, mais pas tous. Les systèmes qui ne peuvent pas être testés doivent être remplacés si l'on estime que le risque est grave, ou ils doivent être mis hors service.

M. Werner Schmidt: Ils ne peuvent pas être mis hors service.

Mme Jennifer McNeill: Si vous avez une usine de pétrole ou de gaz ou une usine pétrochimique qui va émettre des substances chimiques parce qu'elle ne sait pas quel jour on est, il faudra fermer ces usines s'il n'est pas possible de tester le système.

M. Werner Schmidt: D'accord, mais il y en a d'autres où des vies humaines sont en jeu. Si vous fermez les systèmes, c'est la mort.

Mme Jennifer McNeill: C'est exact.

M. Werner Schmidt: Vous ne pouvez donc pas les fermer. Comment pouvez-vous les tester pour voir s'ils fonctionneront?

Mme Jennifer McNeill: Dans bien des cas, ce n'est pas possible.

M. Werner Schmidt: Pour les tester, il faudrait les remplacer tout de suite.

Mme Jennifer McNeill: En effet.

M. Werner Schmidt: Merci, madame la présidente.

La présidente: Merci, monsieur Schmidt.

Madame Jennings.

Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Merci beaucoup.

Je voudrais aborder deux questions. La première fait suite à celle que M. Schmidt a soulevée.

Madame McNeill, vous avez dit que le Canada avait un an de retard par rapport aux États-Unis en ce qui concerne ce dossier. Pouvez-vous nous éclairer un peu? Sommes-nous en avance par rapport à d'autres pays?

Mme Jennifer McNeill: Oui. Je dirais que le Canada et la Grande-Bretagne en sont à peu près au même point. La difficulté pour la Grande-Bretagne, c'est qu'elle essaie en même temps de s'intégrer dans l'Union européenne, ce qui complique nettement la situation.

Je dirais que nous sommes en deuxième place. Les autres pays, comme les pays du Tiers monde... et la Russie ont déclaré qu'ils ne faisaient rien. Nous travaillons donc avec diligence, mais nous sommes très en retard.

Mme Marlene Jennings: Y a-t-il des régions du Canada qui sont plus en avance que les autres? Y a-t-il des secteurs d'activité plus avancés que d'autres—j'adresse ma question à n'importe lequel de vous trois—qui se sont penchés sur la situation assez tôt pour que tout problème qui pourrait surgir en l'an 2000 soit seulement mineur et ne crée pas de perturbations, au moins dans la sphère d'activité en question?

Mme Jennifer McNeill: En ce qui nous concerne, le secteur des télécommunications s'en occupe de façon très énergique et le secteur bancaire aussi.

Heureusement pour le secteur bancaire, nous n'avons pas 4 000 banques ou 10 000 banques confrontées au problème. Nous avons six grandes institutions financières qui auront des difficultés, mais elles pourront s'y attaquer à plus grande échelle que si nous avions autant de banques qu'aux États-Unis.

Mme Marlene Jennings: Pour ce qui est, disons, du secteur de la fabrication, où en sont ces divers éléments...?

Mme Jennifer McNeill: L'industrie automobile a pris les devants, mais elle y a été incitée par les États-Unis. Ford est stimulée par les États-Unis, ainsi que Chrysler. L'industrie automobile a exigé que ses 25 000 fournisseurs viennent lui dire si leurs systèmes pourraient faire la transition. Dans le cas contraire, elle ne fera plus affaire avec eux.

Mme Marlene Jennings: Très bien.

Pour ce qui est du domicile du Canadien moyen, avez-vous examiné les conséquences éventuelles? Je connais un peu les magnétoscopes, mais y aura-t-il des répercussions plus graves?

• 1610

Nous venons de traverser une tempête de verglas dans l'est de l'Ontario et dans une bonne partie du Québec et cela a centré l'attention sur la question des sources d'énergie pour le chauffage et les appareils électriques. Vous me dites qu'Hydro Ontario et Hydro Ottawa examinent la situation, mais savez-vous si Hydro- Québec en fait autant?

M. Ted Eedson: Nous avons une lettre d'Hydro-Québec disant qu'elle s'attaquait au problème, mais sans fournir de précisions. Nous allons donc faire un suivi.

Lorsqu'Hydro Ontario est venu faire un exposé devant la Municipalité régionale d'Ottawa-Carleton et les représentants du gouvernement canadien qui se trouvaient là, son représentant a dit que l'on cherchait à résoudre le problème en Alberta, en Colombie- Britannique et je crois, au Manitoba. J'ai trouvé étonnant qu'il ne dise rien à propos de l'est du pays, mais encore une fois, l'information circule.

Mme Marlene Jennings: Ce sera ma dernière question. Pouvez- vous nous faire des recommandations concrètes quant à ce que le gouvernement fédéral peut faire pour que les choses progressent. Ainsi, lorsque surviendront les problèmes auxquels il faut inévitablement s'attendre, ils seront nettement moins nombreux et leurs répercussions seront moins graves. Ma question s'adresse à l'un de vous trois.

M. Ted Eedson: Je dirais que les difficultés auxquelles notre sous-comité s'est trouvé confronté tiennent du fait que nous assumons ces responsabilités à l'échelle ministérielle, mais sans avoir accès à une perspective nationale ou à des mécanismes nationaux pour résoudre les problèmes. Nous croyons que ces mécanismes nationaux sont inexistants. Par exemple, dans le secteur de l'énergie, il y a un certain nombre d'organisations nationales et continentales. Certaines se trouvent au sein du gouvernement, d'autres dans le secteur privé et elles ont un rôle à jouer, mais à ma connaissance il n'existe aucune organisation qui recueille des renseignements sur la préparation des compagnies de services publics en vue du passage à l'an 2000. Il n'y a pas de mécanismes de rapport, pas d'exigences à cet égard si bien que nous n'avons aucun moyen de prédire quel est le risque pour les compagnies de services publics.

Il nous faut un bureau national quelconque pour recueillir les données, exiger des compagnies de services publics qu'elles les fournissent, les compiler, les examiner et produire un plan d'action si besoin est. Selon moi, ce serait une façon de régler la situation.

Pour ce qui est des autres secteurs comme les hôpitaux, là encore, ils ne relèvent pas des autorités nationales ou fédérales. Je crois qu'ils relèvent des gouvernements provinciaux. Si vous voulez aborder le problème dans une perspective nationale, il faut mettre en place un organisme national. Je ne pense pas qu'il y en ait un actuellement.

Mme Marlene Jennings: Merci.

La présidente: Merci, madame Jennings.

Monsieur Jones, avez-vous des questions?

M. Jim Jones (Markham, PC): Oui.

Ce qu'il y a d'alarmant c'est que l'un de vous—je crois que c'était vous, Jennifer, a dit que 300 des 500 principales entreprises du pays n'avaient rien prévu pour faire face à la situation. Que devez-vous faire pour les convaincre d'agir? De nombreuses PME attendent sans doute de suivre leur exemple et si elles voient qu'elles ne font rien, elles ne seront pas incitées à faire grand-chose non plus. Que faut-il faire?

Mme Jennifer McNeill: Encore une fois, la sensibilisation doit se faire à partir des hautes instances nationales. Il faut faire comprendre aux gens que le problème est réel. On s'imagine toujours que c'est purement alarmiste, que certains ont inventé ce problème pour tenter de s'enrichir. On s'imagine encore que la situation ne peut pas être aussi grave. Pourtant, elle est grave.

Quand vous allez voir une entreprise qui réalise 10 millions de dollars de profit sur six ou sept ans pour lui dire qu'elle va devoir dépenser deux fois plus pour régler ses problèmes de l'an 2000, il est très difficile de l'amener à faire quoi que ce soit. Certaines de ces entreprises décideront sans doute de fermer tout simplement leurs portes ou de ne pas se servir de leurs ordinateurs.

Pour ce qui est des 500 plus grandes entreprises, non seulement elles sont lentes à réagir, mais leur haute direction ne veut pas s'en mêler, car elle considère que le problème touche seulement la technologie de l'information. Les cadres supérieurs ne comprennent pas que cela va toucher leur entreprise. Ils ont un gestionnaire de la technologie de l'information qui leur dit que tout ira bien et ils le croient sur parole. Ces gestionnaires ne leur disent pas la vérité parce qu'ils ont peur de perdre leur emploi.

• 1615

C'est donc un problème du point de vue personnel, du point de vue des ressources humaines, mais nous constatons que la haute direction des très grandes organisations ne comprend pas la situation, ignore totalement ce qui l'attend. Nous devons l'instruire. Nous devons consacrer autant de temps qu'il le faudra à informer les dirigeants des risques que court leur organisation, parce qu'ils seront tenus responsables financièrement.

M. Jim Jones: Quels genres de problèmes aurons-nous si les pays comme la Russie et les pays européens, et peut-être aussi les pays de l'Asie du Pacifique ne prennent pas des mesures suffisantes ou ne font pratiquement rien? Quelles conséquences cela pourrait-il avoir pour le Canada?

Mme Jennifer McNeill: Des conséquences importantes du point de vue financier.

Nous serons touchés parce que nous faisons des affaires avec un grand nombre de pays. Les pays d'Asie ne se préparent pratiquement pas en prévision de l'an 2000. La Russie, du point de vue de la défense... Certains problèmes se posent pour les pays qui ne sont peut-être pas en guerre contre nous, mais qui pourraient l'être contre les États-Unis. Le moment est venu pour eux d'agir.

M. Jim Jones: À votre connaissance, y a-t-il des pays ou des gouvernements qui légifèrent pour obliger les gens à prendre des mesures et à en faire rapport? Est-ce là ce dont Ian parlait, de certains pouvoirs, mais surtout, de lois obligeant pratiquement les gens à faire rapport de leurs préparatifs, tout comme l'obligation de faire une déclaration d'impôt sur le revenu?

M. Ian Nunn: Oui.

Mme Jennifer McNeill: Le gouvernement britannique a déposé, il y a environ, un projet de loi obligeant toutes les organisations à se préparer à l'an 2000. Il lui est impossible d'exercer un contrôle, mais cela a augmenté le niveau de sensibilisation quant à l'importance de régler cette question.

M. Jim Jones: Nous estimons que la responsabilité pourrait s'élever à 1,3 billion de dollars. Est-ce pour le Canada ou pour le monde entier?

Mme Jennifer McNeill: Le monde entier.

M. Jim Jones: C'est pour le monde entier à condition que tout le monde fasse quelque chose.

Mme Jennifer McNeill: C'est exact.

M. Jim Jones: Cela pourrait être pire que la Seconde Guerre mondiale.

Mme Jennifer McNeill: Cela pourrait être nettement pire.

M. Jim Jones: Merci.

La présidente: Merci, monsieur Jones.

Monsieur Shepherd.

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Peut-être pourriez-vous m'apporter une précision. Ma question est peut-être tout à fait stupide, mais les puces intégrées... Je devrais peut-être poser la question à mon fils étant donné qu'il est en ingénierie informatique.

Pour ce qui est de certaines des applications dont vous parlez, je ne comprends pas pourquoi la date a tellement d'importance. Vous avez parlé, je crois, de l'exploitation forestière? Certaines personnes parlent des ascenseurs. Qu'est-ce que les dates ont à voir avec ce type d'appareil?

Mme Jennifer McNeill: Prenons l'exemple d'un stimulateur cardiaque, car j'ai eu pas mal de difficulté à comprendre moi-même. Comment se fait-il qu'un stimulateur cardiaque pourrait poser un problème en l'an 2000? Nous avons constaté qu'il y avait trois types différents d'appareils de ce genre. Il y a les modèles les plus anciens qui n'ont pas de puce électronique. Il y a ensuite une catégorie de stimulateurs dont la fabrication remonte à plus de 18 mois. Ces appareils doivent être réétalonnés à une certaine date si bien que la date y est incluse. À compter de la date en question, le patient doit retourner à l'hôpital pour faire réétalonner son stimulateur. Ceux qui ont été fabriqués au cours des 18 derniers mois se réétalonnent tout seuls. C'est cette catégorie d'appareils qui pose un problème.

À Halifax, l'hôpital Queen Elizabeth II a décidé de ne fournir aucun de ces nouveaux appareils parce qu'il manquait d'argent si bien que la majorité des stimulateurs en circulation sont plus anciens ou font partie du groupe intermédiaire.

Dans bien des cas, c'est un problème de maintenance. Ce n'est pas nécessairement que le système va dire, lorsqu'il affichera 00, que c'est l'an 2000. Il affichera une date. Dans le cas de certaines pompes à incendie, par exemple, une date a été fixée pour l'entretien et lorsque deux zéros s'alignent, tout s'arrête afin que l'on procède à l'entretien de la machine. Elle ne fonctionne plus.

M. Alex Shepherd: D'accord. Vous avez répondu à ma question.

Je suppose que la question est de savoir comment amener tout le pays à prendre cette situation au sérieux. Ce que j'ai suggéré, à d'autres réunions—et cela faisait partie des recommandations du groupe de travail—c'est que le gouvernement fédéral accorde un amortissement rapide par l'entremise du ministère des Finances. Ce n'est sans doute pas grand-chose, mais nous pourrions accorder un amortissement de 100 p. 100 pour l'achat de matériel conforme; pour une partie du matériel.

Pensez-vous que cela montrera que le gouvernement prend ce problème au sérieux, qu'il est prêt à accorder aux gens un amortissement comparable à celui qui a accompagné l'adoption du système métrique? Nous avons accordé cet amortissement à tout le monde pour se conformer au système métrique. Pensez-vous que ce serait utile?

• 1620

Mme Jennifer McNeill: Ce serait un début. Tout ce que nous pouvons faire pour que les organisations comprennent la gravité du problème sera utile. Plus le gouvernement sensibilisera le public, meilleures seront nos chances. Les entreprises commenceront à s'attaquer au problème.

M. Alex Shepherd: On nous dit que c'est un problème de communication. Qu'est-ce que le gouvernement pourrait faire d'autre selon vous? Peut-être devrions-nous diffuser chaque soir sur les ondes de la SRC un vidéo montrant des entreprises qui font faillite et qui se font poursuivre en justice pour des millions de dollars. Le gouvernement devrait-il envisager ce genre de choses?

Mme Jennifer McNeill: Certainement, mais il est également important de ne pas donner l'impression—et c'est ce qu'il y a de délicat—que notre problème est plus grave que celui des autres. Si le Canada commence à donner l'impression à ses partenaires commerciaux du monde entier qu'il aura de graves difficultés en l'an 2000, cela peut susciter des problèmes. La récession pourrait arriver avant l'an 2000. Il faut donc à la fois éduquer les Canadiens sans trop alarmer les gens des autres pays.

M. Alex Shepherd: Vous avez dit que cela pourrait arriver avant l'an 2000. Voulez-vous dire qu'il y aura une récession en l'an 2000 à cause de ce problème?

Mme Jennifer McNeill: C'est ce que je crois personnellement, d'après les renseignements que j'ai accumulés à ce sujet depuis des années. Je ne fais aucune prédiction. Ne venez pas me demander des comptes. Je ne veux aucune répercussion juridique. Mais c'est certainement mon opinion personnelle. Si nous nous en tirons avec une récession, nous aurons de la chance. Vous ne pouvez pas avoir 2 p. 100 des entreprises du pays qui feront faillite parce qu'elles ne pourront plus fonctionner sans avoir un grave problème économique. On s'attend actuellement à ce que 30 p. 100 des entreprises s'arrêtent. Si 50 p. 100 d'entre elles n'ont encore rien fait, et c'est ce qu'a dit Statistique Canada, il ne sera pas possible de rattraper ce retard.

La présidente: Merci, monsieur Shepherd.

Monsieur Lowther.

M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Réf.): Merci, madame la présidente.

J'aurais une ou deux brèves questions à laquelle j'invite n'importe lequel des témoins à répondre, mais je m'adresserai surtout à vous, madame McNeill, étant donné que vous devez partir assez rapidement.

Si j'ai bien compris, vous vous occupez de ce problème depuis deux ans environ. C'est exact?

M. Jennifer McNeill: Nous avons effectué notre première conversion en 1993, si bien que nous faisons ce travail depuis 1993 environ.

M. Eric Lowther: D'accord. Il y a six mois, notre comité a été saisi de cette question et nous nous sommes dit que ce serait vite fait, qu'il nous suffirait d'acheter le logiciel Microsoft pour tout régler. Mais maintenant, vous pouvez constater que nous sommes beaucoup plus sérieux.

Vous travaillez à cela depuis deux ans et avez-vous pensé vous aussi, au départ, que ce serait un problème rapidement réglé? Voyez-vous une sorte d'escalade de la situation ou saviez-vous à quoi vous en tenir depuis le premier jour?

Mme Jennifer McNeill: Je savais que le problème serait de taille, mais je croyais que les entreprises s'y attaqueraient. Il y a deux ans, des gens m'ont dit qu'ils avaient quatre ans devant eux. Mais étant programmeur de métier, je sais combien il faut de temps pour changer les codes. Je sais quelle est la gravité de la situation.

Ce que je trouve décourageant c'est d'essayer de faire comprendre à la haute direction l'importance du problème. C'est très difficile. Je constate que les entreprises commencent à bouger. Depuis janvier 1998, il semble que l'on ait pris conscience de la date fatidique.

M. Eric Lowther: Si le niveau de sensibilisation était suffisant, si nous pouvions retarder l'horloge de deux ans, l'an 2000 poserait-il quand même un problème ou pourrions-nous l'éviter?

Mme Jennifer McNeill: Je crois que, dans 95 p. 100 des cas, nous pourrions l'éviter et que les autres risques seraient mineurs. Je crois que si nous avions commencé...

M. Eric Lowther: Mais vous nous dites, comme vous l'avez déclaré à M. Schmidt, je crois, que nous allons avoir des difficultés.

Mme Jennifer McNeill: Je crois que nous en aurons, en effet.

M. Eric Lowther: Par conséquent, nous en faisons peut-être trop peu et trop tard?

Mme Jennifer McNeill: Absolument.

M. Eric Lowther: Pour ce qui est de ma deuxième question, je vous demande de ne pas vous en offenser. Vous gagnez de l'argent en cherchant des solutions. N'y a-t-il pas ici un certain élément...? J'ai lu un article, l'autre jour, selon lequel toute cette histoire a été montée en épingle alors qu'il n'y aura peut-être que de légers inconvénients le premier jour de l'an 2000. Pourriez-vous nous dire si tout cela n'est pas un peu alarmiste?

• 1625

Mme Jennifer McNeill: Non. En fait, j'essaie d'adopter l'attitude inverse. Si je vous disais tout ce que je sais à propos de certaines industries qui vont avoir de graves problèmes, cela vous dresserait les cheveux sur la tête. Je ne veux donc pas le faire.

Je crois que le problème est de taille. Je travaille quotidiennement dans des organisations qui tentent de résoudre les problèmes dans leurs codes et leurs puces intégrées et je sais quelles sont leurs difficultés. Ces gens s'efforcent de les résoudre. Les renseignements que je vous donne se fondent sur des exemples concrets, par exemple de compagnies d'électricité qui estiment que 60 p. 100 de leur énergie nucléaire... Elles ne savent pas trop comment elles vont fonctionner.

M. Eric Lowther: Vous avez dit que lorsque vous traitez avec les entreprises, vous vous occupez notamment de la planification d'urgence. Quel pourcentage cela représente-t-il? Pour un certain pourcentage d'entreprises vous allez chercher à résoudre tous leurs problèmes. Pour les autres, comme tous les problèmes ne pourront pas être réglés, qu'allez-vous faire? Quel pourcentage des efforts cela représente-t-il? Si l'effort est de 100 p. 100, quelle serait la part de la planification d'urgence?

Mme Jennifer McNeill: Pour le moment, je recommande qu'environ 70 p. 100 des efforts soient consacrés à la planification d'urgence, car les entreprises auront de la chance si les 30 p. 100 restants peuvent être terminés et mis à l'essai. Je recommande à tous mes clients de faire une gestion des risques. Mes clients sont de très grandes organisations.

M. Eric Lowther: Pourriez-vous me décrire le scénario auquel il faut s'attendre? Si vous ne voulez pas le faire, vous n'y êtes pas obligée, mais vous possédez de l'expérience et vous avez, de toute évidence, pénétré des entreprises auxquelles nous n'avons pas accès. Si cela vous met mal à l'aise, très bien, mais...

Nous sommes aux petites heures du 1er janvier de l'an 2000. Que se passe-t-il?

Mme Jennifer McNeill: Selon moi, au moins certaines localités rurales seront privées d'électricité. Les services téléphoniques seront évidemment en panne dans les mêmes secteurs. La plupart des entreprises, ou du moins un grand nombre d'entre elles, auront des difficultés et ne pourront plus fonctionner. Dans le secteur de la santé, les hôpitaux auront de graves problèmes pour fournir leurs services. Certaines écoles ne pourront pas ouvrir, peut-être parce que leur système de chauffage et d'air climatisé ne marchera pas ou, dans les régions rurales, parce qu'elles seront sans électricité.

M. Eric Lowther: Merci... je pense.

La présidente: Madame McNeill, nous savons que vous avez peu de temps. Quel que soit l'endroit où vous devez aller, nous vous excusons.

Monsieur Bellemare.

[Français]

M. Eugène Bellemare (Carleton—Gloucester, Lib.): Avant de poursuivre, je crois qu'il serait nécessaire que le comité soit renseigné sur le projet de loi que Mme McNeill nous a présenté, d'autant plus qu'elle a parlé de la Grande-Bretagne. Je pense que nous devrions en avoir une copie et que nos recherchistes devraient nous faire un rapport sur les recommandations que nous devrions faire au Parlement.

[Traduction]

Cela dit, madame McNeill, nous avons été frappés par la tempête de verglas dans l'est de l'Ontario et le sud du Québec. C'était très dur parce que c'était l'hiver. Nous étions en janvier. Ce n'était pas l'hiver le plus rigoureux, mais il était très froid. Cela pourrait nous donner un avant-goût de ce qui risque de se produire à l'échelle de tout le pays ou du moins dans certaines provinces et dans certaines régions clés des provinces. Convenez- vous que c'est une possibilité?

Mme Jennifer McNeill: Oui. L'un des principaux responsables des systèmes intégrés d'une des compagnies d'électricité avec lesquelles nous travaillons m'a dit que la situation au Québec n'était qu'un incident mineur par rapport à ce qui pourrait se produire. Le problème le plus grave est que toutes les compagnies d'électricité en seraient au même point et qu'elles ne pourraient donc pas faire appel à celles des autres régions pour les aider.

M. Ted Eedson: C'est ce que nous avons entendu dire également. Non seulement le délai est immuable, mais le problème arrivera partout en même temps. La panne sera générale. Comme il y a des différences d'un fuseau horaire à l'autre, ce sera progressif, mais la panne frappera tout le monde à peu près au même moment.

• 1630

M. Eugène Bellemare: Comme l'Ontario, et surtout le Québec, ont de gros contrats avec de nombreux États américains, cela pourrait créer tout un incident international.

Mme Jennifer McNeill: Absolument. Comme je l'ai déjà dit, il y a énormément d'interdépendance entre les différents systèmes. Tous les réseaux électriques d'Amérique du Nord sont reliés les uns aux autres. Si une compagnie d'électricité du Canada a des difficultés, cela se répercutera sur les autres, au moins au Canada.

M. Eugène Bellemare: D'accord, c'était hier soir que le spectacle avait lieu à Hollywood. Aujourd'hui, certains estiment que nous sommes victimes d'un grand battage publicitaire orchestré par des entreprises qui jouent le rôle des quatre cavaliers de l'Apocalypse. Que répondez-vous à cela?

Mme Jennifer McNeill: Je recommande non pas que les organisations commencent à dépenser immédiatement de l'argent pour résoudre le problème, mais plutôt qu'elles essaient de déterminer quels sont les risques. Si elles constatent que les risques sont inexistants, elles pourront faire autre chose.

Mais elles ne font rien. Elles n'ont pas vérifié pour voir si elles avaient un problème. Peu importe qu'elles me paient ou non. Je veux qu'elles fassent quelque chose pour continuer à fonctionner.

M. Eugène Bellemare: En tant que députés, nous avons la responsabilité d'alerter les gens. Nous n'avons pas à leur faire peur et à susciter une panique qui causerait encore plus de perturbations que le problème comme tel.

Que suggérez-vous que le gouvernement fasse? Cela s'ajouterait aux réunions qu'il faudra tenir un peu partout entre les ministères et certains éléments de l'industrie afin d'alerter l'industrie ou le secteur privé en les faisant défiler ici un jour sur deux. Que devons-nous faire afin qu'à compter du 1er janvier 2000 nous puissions souffler au lieu de battre notre coulpe?. Que devrions- nous faire en plus d'informer le public?

Mme Jennifer McNeill: Nous devons informer les organisations quant aux problèmes réels qui se posent. Je veux parler non seulement des échelons inférieurs des organisations, mais également des cadres supérieurs, des P.D.G.

M. Eugène Bellemare: Il semble qu'ils soient tous informés.

Mme Jennifer McNeill: Ce n'est pas le cas.

M. Eugène Bellemare: Quand vous parlez de P.D.G., de quel niveau s'agit-il? Cela comprend-il la petite épicerie du coin ou d'autres entreprises?

Mme Jennifer McNeill: Au moins au départ, nous parlons de grandes organisations comme Chrysler Canada. Le P.D.G. de certaines grandes sociétés comme Petro-Canada a fait partie du groupe de travail, mais les P.D.G. des grandes organisations que j'ai rencontrés ne comprennent pas du tout l'ampleur du problème.

M. Eugène Bellemare: Merci.

La présidente: Merci, monsieur Bellemare.

Les deux témoins ont parlé des compagnies de services publics et du chauffage. Si j'ai bien compris, d'après les discussions que j'ai eues depuis la tempête de verglas, il y a une autre solution qui n'exige pas de l'électricité pour chauffer votre maison. Si vous avez le gaz et si votre chaudière de chauffage centrale est dotée d'une veilleuse automatique, le système peut se déclencher automatiquement. L'électricité n'est pas nécessaire.

Un grand nombre de nouvelles chaudières n'ont pas été installées de cette façon, mais en principe, il est possible de les adapter selon un de nos collègues qui travaillait dans ce secteur avant.

C'est une chose que les gens pourraient envisager pour ne pas avoir froid le 1er janvier 2000.

M. Ted Eedson: Le problème se pose toutefois en ce sens qu'une fois que la chaleur est produite, vous avez besoin d'un ventilateur pour la faire circuler dans la maison et les ventilateurs fonctionnent à l'électricité.

La présidente: Je suppose que j'irais m'asseoir à côté de la chaudière.

M. Ted Eedson: J'achèterais une corde de bois.

La présidente: Monsieur Johnston, avez-vous des questions?

M. Dale Johnston (Wetaskiwin, Réf.): Non.

La présidente: Monsieur Schmidt.

M. Werner Schmidt: Le genre de conversation que nous avons eue cet après-midi est plutôt décourageante. Je pense que le problème est très grave.

Le gouvernement en est un excellent exemple. Nous avons écrit à chaque ministère pour lui demander de nous dire ce qu'il fait, mais nous n'avons pas reçu beaucoup de réponses.

• 1635

Vous avez parlé aux P.D.G. de ces très grandes sociétés, mais qu'en est-il du premier ministre? Que font les ministres de notre gouvernement?

Mme Jennifer McNeill: La suggestion que j'ai faite aux membres du groupe de travail, et qui n'a pas été accueillie de façon très positive, est qu'il fallait faire sérieusement comprendre à Jean Chrétien la nature du problème. C'est un des problèmes les plus graves que notre pays ait eu à affronter. Il faut au moins l'informer et lui faire comprendre la situation et les risques qu'elle comporte. Cela me paraît normal. Il serait injuste de ne pas l'informer. Je ne suis pas sûr que cela a été fait.

M. Werner Schmidt: Nous risquons d'avoir une catastrophe mondiale et pas seulement nationale. L'an 2000 va toucher tout le monde à peu près en même temps et nous sommes tous interdépendants. Plus nous développons le commerce international et ce genre de liens, plus ce problème aura des effets. Notre dépendance vis-à-vis du réseau électrique est fondamentale.

On commence à se demander si, au niveau mondial, une petite unité pourrait entraîner l'arrêt de tout le réseau. Même si les États-Unis sont prêts, si le Canada est prêt et même si, disons, 90 p. 100 des industries sont prêtes—je ne pense pas que vous serez d'accord avec le chiffre de 90 p. 100, mais faisons cette supposition—se peut-il que quelqu'un, en Chine, qui n'est pas prêt puisse tout flanquer par terre? Cela peut-il arriver à cause d'une situation qui existe ailleurs?

Mme Jennifer McNeill: Voilà pourquoi le risque est tellement important pour les entreprises. Elles s'imaginent que si elles règlent la situation du point de vue de la technologie d'information, elles n'auront pas de difficultés en l'an 2000. Elles ne comprennent pas que si 30 p. 100 de leurs fournisseurs tombent en panne, elles ne pourront pas fabriquer leurs produits. Elles ne pourront pas les produire.

M. Werner Schmidt: Que suggérez-vous? De toute évidence, vous êtes convaincue. Vous-même et les P.D.G. avec qui vous avez travaillé êtes convaincus. Il vous reste des gens à convaincre. Que faut-il faire? Compte tenu de votre expérience, vous devez savoir comment convaincre les gens qui ne pensent qu'un problème existe alors que nous savons maintenant qu'il y en a un. Comment faire cela au gouvernement et au Canada?

Mme Jennifer McNeill: D'après ce que j'ai constaté, il n'est pas possible de leur dire toute la vérité, car c'est trop difficile à accepter. Vous devez leur communiquer l'information petit à petit. Vous devez leur faire savoir qu'ils seront tenus juridiquement responsables s'ils se trompent.

En fait, il s'agit de leur dire: «Si vous pouvez me garantir que votre entreprise fournira ses services sans anicroche en l'an 2000, vous n'aurez aucune obligation juridique ou morale». Cela les amène au moins à réfléchir un peu plus au problème et à comprendre qu'ils seront poursuivis devant les tribunaux ou peut-être tenus responsables des décès ou des difficultés qui se produiront. Une fois qu'ils commencent à assumer cette responsabilité, ils se mettent à agir.

M. Werner Schmidt: Tout est là, n'est-ce pas? Il s'agit de les amener à reconnaître que c'est leur problème? En fait, c'est une question de changement au sein d'une organisation ou de comportement humain. Comment le modifier? D'après ce que j'ai constaté, le plus difficile est d'amener les gens à accepter la responsabilité d'un problème. Tant qu'ils ne l'ont pas fait, rien ne peut changer.

Quel argument avez-vous trouvé pour amener les gens à assumer la responsabilité de ce problème? Vous devez avoir de l'expérience sur ce plan. Vous devez avoir constaté un changement d'attitude chez les gens lorsqu'ils prennent conscience de la situation. Quel est l'élément déclencheur?

Mme Jennifer McNeill: L'élément déclencheur a été les exemples réels de problèmes que nous avons pu leur donner et leurs contacts avec des personnes qui ont vécu ces situations leur ont permis de prendre conscience de la réalité.

M. Ted Eedson: Il y a aussi l'échange d'information. Nous avons reçu de l'industrie des lettres disant que tel modèle de tel produit est conforme tandis que tel autre ne l'est pas. Nous affichons ces renseignements dans l'Internet avec la lettre attestant de la conformité du produit afin qu'on puisse lire exactement les paroles du fournisseur. Dit-il: «Ne vous inquiétez pas, nos produits sont conformes» ou bien: «D'après ce protocole, tels modèles sont conformes tandis que tels autres ne le sont pas et voici ce que vous devez faire»? C'est le genre de renseignements que nous pouvons fournir à nos collègues et à l'industrie. On nous dit quelles sont les réparations à effectuer. C'est assez précis.

La présidente: Merci, monsieur Schmidt.

Monsieur Lastewka, s'il vous plaît.

• 1640

M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Je remercie vivement les témoins de leur travail. Je me réjouis de pouvoir poser quelques questions à Mme McNeill avant qu'elle ne parte.

J'essaie de faire la part des choses. Vous avez dit à une ou deux reprises qu'il fallait transmettre le message. Il est de plus en plus clair à mes yeux que les hauts dirigeants, les P.D.G. et directeurs ne comprennent pas le problème et n'accordent pas à leurs services de technologie de l'information l'aide dont ils ont besoin pour faire face aux urgences auxquelles ils sont confrontés.

Je sais que le premier ministre a écrit à tous les ministres du Cabinet pour accélérer leur travail sur les projets de l'an 2000. Faudrait-il que le premier ministre déclare l'état d'urgence à la télévision nationale sans trop susciter la panique, mais pour envoyer très clairement le message aux organisations, aux dirigeants, aux P.D.G. et leur faire comprendre également qu'il est très important d'échanger de l'information?

Il est très important d'informer ceux qui essaient de se préparer. Par exemple, il y a une quinzaine de jours, l'Ontario Hospital Association nous a parlé des 200 hôpitaux auxquels Santé Canada devait transmettre certains renseignements pour qu'ils puissent se mettre à la tâche. L'interdépendance est telle qu'il faut faire le suivi des entreprises pour s'assurer que leurs fournisseurs se conforment aux exigences, quel que soit le pays du monde où ils se trouvent. En sommes-nous arrivés à ce stade?

Mme Jennifer McNeill: Je crois qu'il serait très utile que le premier ministre fasse une déclaration. Le président Clinton a fait une déclaration sur le réseau national. Il a été interviewé à la télévision et, lorsqu'on lui a posé la question, sans parler de catastrophe, il a dit que c'était là un sérieux problème auquel les entreprises devaient s'attaquer. Même une déclaration aussi limitée inciterait au moins les organisations à prendre la situation au sérieux et à commencer à l'évaluer. L'important est de leur faire comprendre que c'est là une question commerciale, car sa portée outrepasse la simple technologie de l'information. Si elles entendent dire, encore une fois, que c'est un problème de l'an 2000, elles penseront à la technologie de l'information. Elles ne penseront pas aux systèmes intégrés, aux fournisseurs, aux relations internationales qu'elles ont avec d'autres pays.

M. Walt Lastewka: Les compagnies d'électricité sont un excellent exemple. Comme vous vous en souviendrez, il y a plusieurs années, tout le réseau de la côte Est a été paralysé à la suite d'une petite panne. Tout le réseau s'est arrêté et n'a pas pu redémarrer parce qu'il était trop gros. Il a fallu le remettre en marche progressivement.

Vous avez dit que vous travaillez avec un grand nombre de grandes sociétés dont les P.D.G. ne sont pas encore entièrement convaincus. Pourquoi pas? Qu'est-ce qui les en empêche? Que faut-il faire pour les amener à agir?

Mme Jennifer McNeill: Je citerais, à titre d'exemple, une des plus grandes sociétés de l'Alberta qui m'a demandé de faire une vérification uniquement du côté de la technologie de l'information pour voir où en étaient ses projets. Elle a mis un plan en place depuis 1996 pour résoudre le problème. Le P.D.G. de cette société pensait que tout allait bien. En réalité, rien n'a été fait. Cette société a 310 applications pour lesquelles rien n'a encore commencé et cela représente un travail énorme. La personne responsable des problèmes de l'an 2000 a affirmé que tout irait bien. Ces employés avaient peur de perdre leur emploi s'ils révélaient à quel point ce serait grave.

Nous avons fourni ces renseignements à la haute direction, mais le travail ne sera pas fini à temps pour les 310 applications qui sont pourtant essentielles. Elles ont déjà été classées par ordre de priorité. Il y a beaucoup de travail à accomplir, mais nous commençons seulement à nous occuper de la gestion des risques et de la planification d'urgence.

La situation est surtout due à la nature humaine et à l'hésitation qu'ont les employés à transmettre des mauvaises nouvelles à leur patron. La société est faite ainsi. Nous recommandons que l'intéressé fasse quotidiennement son rapport au P.D.G. Chaque semaine, il doit préciser où en est son projet. Quand j'arrive dans une organisation où le chef du projet an 2000 me dit: «Notre projet va à la dérive; nous perdons des gens et nous ne pourrons pas le terminer», le lendemain, je lis dans le journal que le P.D.G. a donné une interview dans laquelle il a dit: «Nous n'aurons aucun problème en l'an 2000, tout est réglé». C'est incroyable. Ils ne se rendent pas compte de ce qu'ils font.

• 1645

La présidente: C'est votre dernière question, monsieur Lastewka.

M. Walt Lastewka: Il faut quelque chose de plus convaincant pour rejoindre tous les dirigeants, P.D.G. et administrateurs. Ces derniers sont également responsables. Nous avons déjà entendu dire qu'ils voulaient se dégager de toute responsabilité. Il faut leur faire comprendre très clairement le message, et peut-être que notre comité devra le faire dans un rapport intérimaire ou autrement. Les dirigeants et administrateurs sont responsables et ils auront des comptes à rendre s'ils ne règlent pas le problème. Il ne suffit pas de dire que tout va bien.

Mme Jennifer McNeill: En effet.

M. Walt Lastewka: Merci.

La présidente: Monsieur Nunn, voulez-vous répondre?

M. Ian Nunn: Je voudrais faire une observation. L'idée de demander au premier ministre de faire une déclaration est bonne; ce serait très utile. Il faut le faire avec beaucoup de prudence afin de ne pas causer de panique, mais c'est peut-être dans ce sens qu'il faudrait aller.

Comme je l'ai déjà dit, il nous faudrait une organisation nationale, un organisme, un bureau quelconque qui comprenne vraiment le problème et dont il faudrait faire partie.

Vous devez vous demander si vous dormez bien la nuit. Si vous dormez sur vos deux oreilles, c'est que vous ne comprenez pas vraiment le problème, car il est beaucoup plus grave que la plupart des gens ne l'imagine. Le problème n'est pas de nature technologique, mais de nature commerciale et économique.

Si je peux vous poser une simple question, quel pourcentage de faillites d'entreprises acceptez-vous? Est-ce 30 p. 100, 10 p. 100, 5 p. 100? Quel pourcentage allez-vous accepter?

General Motors a environ 7 000 fournisseurs de première ligne. Si 5 p. 100 d'entre eux font faillite, General Motors fermera ses portes jusqu'à ce qu'elle puisse prendre d'autres dispositions. Il peut se passer des jours, mais plus probablement des semaines, avant qu'elle ne puisse rétablir ses sources d'approvisionnements, en supposant que ce soit possible.

Nous connaissons les effets d'une grève de l'automobile sur l'économie, lorsque cela touche un seul fabricant. Qu'arrivera-t-il si toute l'industrie automobile s'arrête en même temps? Qu'arrivera-t-il lorsque l'industrie sidérurgique s'immobilisera au même moment? N'est pas une question raisonnable à se poser ou une prévision raisonnable à faire?

La récente crise asiatique a eu des effets comparables à une tempête de verglas sur les marchés monétaires mondiaux et les économies mondiales en ce sens qu'elle a précipité une crise des devises dans quelques pays, ainsi que la faillite de plusieurs banques et maisons de courtage. Nous savons que le Tiers monde, y compris l'Asie, ne sera pas prêt. Nous savons que pour cette raison, il y aura des faillites bancaires massives dans toute cette région. Quelles en seront les répercussions sur notre économie, sans même parler des effets locaux éventuels?

Nous devons examiner attentivement ces questions, les étudier dans une perspective globale et préparer des plans d'urgence, car je ne vois pas comment nous pourrons éviter ces scénarios. C'est très grave.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Nunn. Nous apprécions vos observations.

Monsieur Jones.

M. Jim Jones: Je continuerai dans la même veine que Walt, car c'est de cela que je voulais parler.

Disons qu'Ontario Hydro ait un problème et que son réacteur nucléaire s'arrête, que les soupapes s'ouvrent et que l'eau lourde se répande. Qui sera responsable? Cela pourra être le conseil d'administration. Si M. Chrétien veut faire quelque chose, il ne s'agit pas nécessairement de faire une déclaration à la télévision, mais plutôt d'envoyer des lettres d'avertissement plutôt acerbes à M. Harris et M. Bouchard et à tous ceux qui pourraient être tenus responsables.

• 1650

La situation n'est pas la même que pour la tempête de verglas ou la grippe asiatique, en ce sens que la tempête de verglas était une catastrophe naturelle. Personne n'est responsable d'une catastrophe naturelle si ce n'est qu'on peut vous reprocher de ne pas avoir préparé de plan d'urgence.

Mais dans ce cas-ci, vous pouvez être tenu responsable. Si c'est le cas, il faudrait que les intéressés le sachent bien. Ils devraient commencer à prendre toutes les précautions voulues pour que leurs entreprises soient prêtes.

Il incombe peut-être à M. Manley et à M. Chrétien, ou à certaines autres personnes qui assument cette responsabilité, de veiller à ce que les intéressés sachent qu'ils seront tenus responsables.

M. Ted Eedson: Au sous-comité, nous entendons dire que les ministères font de gros efforts pour se préparer. Pour ce qui est des questions comme celle de l'électricité, nous nous rendons compte qu'il ne nous revient pas de nous attaquer à ce problème. Nous avons transmis la question au groupe de travail interministériel. Je crois que ce dernier veut le soumettre à son tour aux instances supérieures.

Mais vous avez raison, il faut se poser la question. D'après le témoignage d'Hydro Ontario, je sais que cette compagnie s'attaque au problème de l'an 2000. Son P.D.G. s'y est engagé. La rémunération au rendement des trois vice-présidents en dépend. Leur témoignage m'a paru très intéressant. Ils s'attaquent au problème avec l'intensité voulue. Ils se sont fixé un échéancier.

Il faut maintenant voir si les autres provinces sont aussi bien préparées.

Mme Jennifer McNeill: Je pense qu'il faut également comprendre que l'appel d'offres vient tout juste d'être lancé pour les applications du gouvernement fédéral. Nous étions sur la liste des soumissionnaires. On nous demande de réaliser pour 1,1 million de dollars de travail et il s'agit uniquement d'applications essentielles.

Par conséquent, pour réaliser tout ce travail d'ici décembre 1999, il ne sera pas possible d'embaucher autant de personnes qu'il le faudrait, même si nous avions les ressources voulues. Il y aura donc certains systèmes essentiels à la mission pour lesquels le gouvernement fédéral ne pourra pas fournir de fonds aux provinces parce que le travail ne sera pas terminé.

M. Jim Jones: Mais je crois également important de s'occuper des usines pétrochimiques et des raffineries de pétrole qui pourraient tomber en panne et polluer l'environnement. Il faut veiller à ce que le conseil d'administration, pas seulement la direction, mais aussi les administrateurs en assument la responsabilité. Il faut que cela vienne d'en haut.

La présidente: Merci.

Merci beaucoup, madame McNeill. Nous apprécions vraiment votre venue aujourd'hui ainsi que vos suggestions.

Monsieur Murray.

M. Ian Murray (Lanark—Carleton, Lib.): Je voudrais poser une question au sujet de la sécurité du public. M. Jones allait en parler, à propos des raffineries de pétrole, par exemple.

Je ne suis pas certain que vous puissiez répondre à cette question. Je sais que vous représentez des ministères fédéraux.

Disons que vous ayez une raffinerie de pétrole qui est une usine extrêmement complexe, avec toutes sortes de contrôles, de tuyaux et de cheminées. Cela veut-il dire qu'à cause de ce problème la raffinerie s'arrêterait ou que cela poserait également toutes sortes de problèmes catastrophiques sur le plan de la sécurité?

Connaissez-vous la réponse? Peut-être ne devrais-je pas vous poser la question.

M. Ian Nunn: Ce serait purement hypothétique.

M. Ted Eedson: D'après ce qu'Hydro Ontario a dit à propos des centrales nucléaires, comme elles sont à sécurité intégrée, elles s'arrêteront. La Commission canadienne de sûreté nucléaire a dit également que si la sécurité lui semble compromise, elle fermera les centrales.

Cela ne nous avancera pas beaucoup, car la sécurité de la centrale sera peut-être assurée, mais nous manquerons d'électricité. Je suppose que beaucoup d'usines de transformation sont également à sécurité intégrée et qu'elles s'arrêteraient également, ce qui empêcherait une catastrophe environnementale. Les Canadiens devront alors se passer de ces services.

• 1655

M. Ian Murray: Nous pourrions très facilement nous retrouver face à une grave pénurie de pétrole ou d'essence en l'espace de quelques jours. Les raffineries pourraient s'immobiliser et les gens ne pourraient plus acheter d'essence. Cela pourrait poser un problème pour la sécurité publique si les camions d'incendie, les ambulances et les voitures de police n'ont pas d'essence.

Il faut se pencher sur les répercussions financières des faillites d'entreprises et de banques...

La présidente: S'il n'y a pas d'argent, nous ne pourrons pas non plus acheter d'essence, monsieur Murray.

M. Ian Murray: C'est vrai également.

M. Ted Eedson: Prenez la tempête de verglas. La situation était si grave qu'au Québec on a sorti des locomotives des rails pour les amener à côté des postes d'incendie. Dans cette région, le gouvernement fédéral a fermé ses immeubles de Hull pour que les résidents de Hull soient alimentés en électricité. Je pense qu'il nous faut des plans d'urgence à cet égard et, d'après les renseignements qu'a obtenus le groupe de travail interministériel et les discussions qui ont eu lieu avec le Bureau du premier ministre, le gouvernement a chargé la Protection civile d'urgence de commencer à établir ce genre de plan d'urgence pour protéger les Canadiens en pareille situation.

M. Ian Murray: Vous pouvez voir que nous avons été plutôt ébranlés par les témoignages de cet après-midi. Comme M. Lowther l'a dit tout à l'heure, nous pensions qu'il suffisait peut-être de se procurer un logiciel Microsoft, mais le comité commence maintenant à s'inquiéter sérieusement—et je pense que la plupart d'entre nous partagent cet avis—mais en même temps, nous devons réfléchir sérieusement à ce que nous dirons dans notre rapport.

Encore une fois, vous êtes tous les deux des fonctionnaires. Vous faites partie du sous-comité d'un comité plus vaste de fonctionnaires et je suppose que vous êtes des gens raisonnables.

Compte tenu de ce que Mme McNeill a déclaré aujourd'hui, êtes- vous d'accord avec ce qu'elle nous a dit et pensez-vous qu'elle n'a pas été trop alarmiste? En vous écoutant tous les deux, j'ai eu l'impression que vous étiez à peu près d'accord avec elle quant à ce qui pourrait arriver.

Pour le moment, il s'agit de voir quelles sont les responsabilités que notre comité doit assumer pour faire comprendre aux Canadiens que c'est là un véritable problème. Pensez-vous que nous ne serions pas indûment alarmistes et irresponsables si nous émettions très bientôt un rapport pour attirer davantage l'attention du public sur cette situation?

M. Ted Eedson: Pour ce qui est de l'infrastructure, nous sommes 100 p. 100 d'accord. La question a été soulevée au groupe de travail interministériel. La question de l'électricité est très préoccupante.

D'après ce que nous ont dit certaines autres compagnies de services publics, nous constatons qu'elles ont des problèmes opérationnels. Elles ont des problèmes du côté de la technologie de l'information, ce qui veut dire qu'elles ne pourront peut-être pas nous faire payer, ce qui ne nous inquiète pas vraiment, mais il y a la question des pompes. Le produit sera-t-il disponible?

En fait, notre expérience ne va pas au-delà du contexte fédéral et des domaines dans lesquels nous travaillons. Ce que Mme McNeill nous a dit de l'industrie m'a donc vivement intéressé. Mais nous étions déjà conscients de l'existence de ces difficultés.

Pour ce qui est de l'infrastructure, nous sommes 100 p. 100 d'accord quant à la nécessité d'agir.

M. Ian Nunn: Je crois qu'il est difficile de sensibiliser davantage le public, lui faire comprendre que nous sommes devant un grave problème qu'il faut aborder sérieusement, sans susciter la panique. Je ne suis certainement pas très habile sur ce plan, mais vous avez là un défi à relever.

M. Ian Murray: Merci.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Murray.

Monsieur Lowther.

M. Eric Lowther: Je poserai seulement une ou deux brèves questions. À titre d'éclaircissement, quel est ce sous-comité dont vous faites partie? Je regrette, mais j'ai manqué le début.

M. Ted Eedson: C'est un sous-comité du Groupe de travail interministériel sur l'an 2000. Ce sous-comité est parrainé en partie par le Conseil du Trésor par l'entremise du Dirigeant principal de l'information. En fait, ce sous-comité a vu le jour parce qu'en tant que représentants du ministère au groupe de travail nous estimions que ce dernier était trop axé sur la technologie de l'information et qu'il fallait s'occuper aussi des systèmes intégrés.

• 1700

M. Eric Lowther: Vous pourriez donc faire un rapport au Dirigeant principal de l'information?

M. Ted Eedson: Nous relevons du président du groupe de travail qui relève lui-même du Dirigeant principal de l'information.

M. Eric Lowther: D'accord. Si j'ai bien compris la réponse que vous avez donnée à M. Murray, vous êtes d'accord avec Mme McNeill quant à l'urgence de la situation, n'est-ce pas?

M. Ian Nunn: Oui, et j'ajouterais qu'elle se fonde sur une vaste expérience concrète à laquelle nous n'avons pas accès.

M. Eric Lowther: Cela se comprend.

Pourrais-je vous poser une question ainsi peut-être qu'aux autres membres du comité? Nous voulons tous sensibiliser les gens sans causer de panique. Pourrions-nous envisager d'avoir un jour de l'an 2000 avant l'an 2000 ou peut-être même plusieurs? Ce jour-là, pourrions-nous demander aux diverses infrastructures d'agir comme si c'était le premier jour de l'an 2000? Les gens libelleraient leurs chèques, les compagnies de téléphone traiteraient les appels et les compagnies de services publics fonctionneraient au maximum comme si c'était l'an 2000. Ce test permettrait d'établir ce qui ne fonctionne pas, ce qui se passera si ça ne fonctionne pas, les améliorations à apporter aux plans d'urgence, etc.

Le Bureau du premier ministre ou le gouvernement pourrait décréter que le jour dit nous allons procéder à ces essais. Est-ce tellement irréaliste que cela ne marcherait pas, ou cela pourrait- il être utile?

M. Ian Nunn: Ma première réaction est que ce serait sans doute trop compliqué. Nous n'avons même pas encore effectué l'essai de nos systèmes à l'échelle de tout le gouvernement. Je reconnais que les travaux ne sont pas terminés, mais il n'y a pas encore eu d'essai global de tous les systèmes gouvernementaux. Je ne suis pas certain que ce serait réalisable dans l'ensemble du pays.

M. Ted Eedson: J'en reviens à l'exposé d'Hydro Ontario. Ses difficultés ne seraient pas attribuables au réacteur comme tel, mais au fait qu'elle devrait le mettre hors service pour pouvoir tester tous ses éléments à un moment donné. Vous parlez d'immobiliser tout le Canada pour mettre tous ces éléments à l'essai, ce qui serait très difficile à organiser.

M. Ian Nunn: L'expérience nous a montré que certains systèmes ne peuvent pas être remis en marche si on avance leur date jusqu'à l'an 2000. Ils ne peuvent plus être relancés. Une partie d'entre eux ne pourraient pas être remis en service ou fonctionner de nouveau comme il faut.

La présidente: Merci. Je reviendrai à vous.

Monsieur Shepherd, s'il vous plaît.

M. Alex Shepherd: Mme McNeill a parlé du secteur privé. Nous avons tous reconnu qu'en raison du manque de matériel et de puces d'ordinateur, il est impossible que tout le pays se conforme aux exigences. Ne faut-il pas en conclure que ce serait également impossible pour le gouvernement?

M. Ian Nunn: Je suis d'accord. Dans le domaine de l'équipement de laboratoire, par exemple—un secteur pour lequel j'ai coordonné les efforts des divers ministères—plusieurs ministères utilisent des dispositifs baptisés spectromètres de masse qui sont très coûteux et très volumineux. Les fabricants de ce matériel n'en ont donc pas beaucoup en stock. Ils savent que s'ils les soumettent à des essais et s'aperçoivent qu'ils ne répondent pas aux exigences, ils devront les remplacer dans leurs laboratoires de toute l'Amérique du Nord. Tant les laboratoires privés que publics devront les remplacer en même temps alors que le stock est limité et comme ces dispositifs ne peuvent pas être construits du jour au lendemain, quelqu'un devra s'en passer.

Par conséquent, ceux qui seront les premiers à constater le problème seront les premiers servis. Les derniers ne le seront peut-être pas.

• 1705

M. Alex Shepherd: Vous pouvez trouver une pièce d'équipement, mais il est certain que nous devons avoir également des microprocesseurs intégrés dans tous nos systèmes. Il doit y avoir toutes sortes de possibilités de panne, n'est-ce pas?

M. Ted Eedson: Je pense qu'il faut tenir compte des stocks et comprendre la nature critique des pannes. Si je sors ma calculatrice Casio, elle n'est pas entièrement conforme—et je l'ai vérifié. Elle va du 1er janvier 1901 à une date au-delà de mon espérance de vie après l'an 2000, mais quelle importance cela a-t- il? Je ne peux pas enregistrer les réunions auxquelles vous êtes allés en 1901.

Nous avons également parlé des maisons. Je sais que je dois vérifier mon magnétoscope. Quand j'inscris le mois, le jour et l'année dans mon magnétoscope, il me dit qu'aujourd'hui nous sommes mardi. Cela peut donc poser un problème. Également, j'ai un thermostat qui me permet de programmer la température sur cinq jours, un jour, un jour. Du moment que le lundi suit le dimanche, il répondra aux exigences de l'an 2000.

Je pense qu'il faut dresser un inventaire des systèmes dans lesquels il y a des dates et d'en faire une analyse critique. L'ascenseur d'un hôpital est essentiel. Pour ce qui est de l'ascenseur d'un immeuble du gouvernement, s'il cesse de fonctionner, c'est très ennuyeux, mais nous pouvons toujours emprunter l'escalier. Si le système d'incendie d'un immeuble fonctionne mal, nous ne pouvons pas laisser les gens entrer dans cet immeuble parce qu'il ne répond pas aux exigences de la loi

Il faut donc dresser un inventaire. Nous devons procéder à une évaluation et faire réparer l'équipement ou préparer un plan d'urgence.

M. Alex Shepherd: Nous n'avons donc pas encore fait cette évaluation.

M. Ted Eedson: Nous sommes en train de la faire. Les ministères font de leur mieux pour dresser cet inventaire et faire cette évaluation.

M. Alex Shepherd: Mais nous n'avons même pas inventorié le problème et pas encore essayé de le résoudre. Est-ce bien ce que vous dites?

M. Ted Eedson: Plus ou moins, oui.

La présidente: Merci, monsieur Shepherd.

Monsieur Schmidt.

M. Werner Schmidt: Merci, madame la présidente.

Je voudrais revenir sur ce qu'a dit M. Lowther. Nous ne pouvons peut-être pas organiser une simulation de l'an 2000 à l'échelle du pays, mais nous pourrions peut-être le faire à plus petite échelle. Faisons-le, par exemple, pour un réseau électrique de l'Ontario. Faisons participer toute la province. C'est assez vaste, mais ce ne sera pas tout le pays. Je me demande si c'est possible. J'ai l'impression que cette simulation est importante. Ce n'est pas la réalité, mais cela pourrait nous donner une bonne idée de ce qui nous attend si quelque chose ne marche pas. Est-ce une possibilité?

M. Ian Nunn: Cela me paraît très possible. Cela exigerait une certaine coordination, mais je pense que c'est faisable. Faites-le pour les compagnies de services publics et les compagnies de télécommunications.

M. Ted Eedson: Nous pourrions également examiner de près les effets de la tempête de verglas et les plans d'urgence qui étaient censés être en place. Étudier dans quelle mesure ces plans d'urgence ont fonctionné afin de mieux voir quels sont les préparatifs à faire pour pouvoir faire face à ce genre de situation.

M. Werner Schmidt: Oui, c'est exact. Mais le problème ici est assez différent. La tempête de verglas avait un aspect très physique. Cette situation aussi, dans un certain sens, mais cela touche surtout les contrôles. C'est là que des pannes vont sans doute se produire. C'est du côté des fonctions de contrôle, du transfert des données, de l'échange d'information entre deux systèmes. Je crois que c'est là que se situe le problème. C'en est certainement un des éléments.

J'ai l'impression que nous ne comprenons pas parfaitement à quel point le réseau électrique est intégré. C'est très bien de parler du réseau. Il alimente les consommateurs en électricité. Mais il s'agit surtout de voir exactement quel est le rôle de l'électricité dans une entreprise de fabrication ou dans une infrastructure qui transmet l'information dans les divers services. Tout cela fait partie d'une même opération qui est électrique.

Ce qu'il faut surtout retenir ici c'est qu'il y a une pénurie d'ingénieurs électriciens. En fait, on ne comprend pas parfaitement toute la nature de l'électricité. Voilà pourquoi le problème des microprocesseurs intégrés est si complexe. Il y a un tas de choses qu'on n'avait jamais imaginées lorsque ces microprocesseurs ont été installés. Ils sont devenus dépendants de la date, sans même le savoir dans certains cas. En fait, ils ne savent toujours pas aujourd'hui qu'ils le sont. Ceux qui les ont mis là l'ignorent. Certains ingénieurs électriciens disent qu'ils pourraient l'être, mais ils n'en sont pas certains.

• 1710

Par conséquent, si nous pouvions séparer le problème en plusieurs éléments et en prélever un comme échantillon, aussi imparfaite cette solution soit-elle, ce serait quand même quelque chose.

M. Ian Nunn: Me permettez-vous de dire pourquoi cela me paraît une bonne solution?

Si nous ne faisons rien avant l'an 2000 et si toutes sortes de systèmes intégrés tombent en panne, les techniciens disponibles seront dispersés à gauche et à droite. Si vous pouvez prendre un élément isolé, comme les compagnies de services publics, et mettre sur le pied de guerre vos techniciens, les universités et les industries pour prêter main-forte en cas de panne importante, vous auriez alors un énorme réservoir de ressources pour résoudre le problème en cas de besoin.

M. Werner Schmidt: C'est un secteur très différent, mais j'ai entendu Mme McNeill dire qu'il y aura de nombreux problèmes du côté des banques. Elle a parlé de problèmes considérables.

La présidente: C'était en Asie.

M. Werner Schmidt: Non, ce n'est pas ce qu'elle a dit. Elle a dit qu'il y aurait des problèmes considérables du côté des banques.

La présidente: En Asie. Elle a dit que c'était dans les marchés asiatiques.

M. Werner Schmidt: Et cela ne nous touche pas?

La présidente: Non, ce n'est pas ce qu'elle a dit.

Une voix: Et vous croyez que cela ne nous touchera pas?

M. Werner Schmidt: Exactement. Là est la question. Supposons- nous, et notre comité croit-il vraiment, que s'il y a des grosses faillites bancaires en Asie, cela ne nous touchera pas?

Mme Marlene Jennings: Personne n'a dit cela.

M. Werner Schmidt: Vous avez tous dit... d'accord.

Mme Marlene Jennings: Permettez-moi d'apporter une rectification. C'est très important, si vous dites que des milliers de banques...

M. Walt Lastewka: Nous ne vous demandons pas de politiser la chose. Nous vous demandons de vous en tenir aux faits.

Mme Marlene Jennings: C'est exact.

M. Werner Schmidt: Je n'essaie pas de politiser quoi que ce soit. J'essaie seulement de faire comprendre que rien ne peut avoir des effets isolés dans toute cette situation.

Comme vous le voyez, certaines personnes ont décrit cela comme un problème commercial. Certains l'ont qualifié de problème économique. J'irais même un peu plus loin en disant que c'est un problème existentiel. C'est presque une question de vie ou de mort. Nous ne pouvons pas rester sans réagir.

Je me souviens de la question que nous avons posée... Je crois que c'était à l'Association des manufacturiers canadiens lorsqu'elle est venue ici: Comment tenir compte à la fois de la gravité du problème et dire aux gens qu'ils ne doivent pas céder à la panique demain matin, qu'ils n'ont pas à retirer tout leur argent de la banque? Comment maintenir un juste équilibre?

Lorsqu'elles sont venues, les banques nous ont assuré qu'elles avaient la situation en main et qu'elles étaient prêtes. J'ai parlé au vice-président d'une banque qui est responsable de ce système et qui m'a dit que sa banque était prête. Je lui ai posé la question une nouvelle fois. Il m'a répondu qu'il ne fallait pas oublier qu'au cas où les systèmes ne fonctionneraient pas, les opérations pourraient être faites manuellement. Ce n'est pas satisfaisant. Ce n'est pas un plan d'urgence. Mais c'était son plan d'urgence. Comment allez-vous faire s'il y a des problèmes considérables du côté des banques? Peu m'importe dans quel pays du monde. Vous ne pourrez pas écrire suffisamment vite pour faire face à la situation.

La présidente: Merci, monsieur Schmidt.

Avez-vous une réponse à cela, monsieur Nunn ou monsieur Eedson?

M. Ted Eedson: En fonction de mon expérience, en tant que Canadien, j'aurais deux choses à dire en ce qui concerne les deux domaines dont vous parlez. La première est que je retire de l'argent de la banque au moyen de ma carte bancaire, ce qui exige de l'électricité étant donné que le guichet automatique fonctionne à l'électricité. La deuxième est que ma carte bancaire passe par une ligne de télécommunications, probablement jusqu'à Montréal et revient très rapidement pour me cracher de l'argent. Si vous additionnez les deux, vous avez raison de dire que la banque peut répondre totalement aux exigences. Mais si nous n'avons pas d'infrastructure en place, cela ne marchera pas.

M. Ian Nunn: Je crois que M. Schmidt a raison de parler de la complexité et de l'interdépendance de notre civilisation. Cela me fait penser à la métaphore du papillon selon laquelle le papillon du Brésil a des effets sur la température du Canada. Cet événement en sera la démonstration. Des choses qui se produiront dans le monde entier auront des conséquences directes pour nous et ce sont des choses que nous ne pourrons jamais prévoir parce que nous ne pouvons pas imaginer qu'elles nous toucheront. Je peux seulement vous suggérer de mettre en place de bons plans d'urgence pour parer à toute éventualité.

La présidente: Merci, monsieur M. Schmidt.

Monsieur Lastewka, vous avez une question.

• 1715

M. Walt Lastewka: Je voudrais simplement revenir sur ce que M. Schmidt a dit tout à l'heure. Les banques nous ont déclaré qu'elles se livrent à des essais à partir de données de certains services. Après avoir discuté avec elles, j'ai l'impression qu'elles font ces essais à très petite échelle afin de s'assurer que tout est prêt.

Le faisons-nous également au sein du gouvernement? Dans la négative, ne pouvons-nous pas faire des essais pour nous assurer que les divers services sont prêts pour l'an 2000?

M. Ted Eedson: C'est ce que nous faisons, dans la mesure du possible, dans les divers secteurs où il y a des systèmes intégrés. Je pense que Mme McNeill en a parlé. C'est difficile, car il faut s'adresser au fabricant étant donné que nous ne savons pas comment il a monté les dispositifs. Puis il y a le genre de déclaration faite par Hydro Ontario. Il est très difficile de mettre une centrale nucléaire hors service pour effectuer ce genre d'essai.

Pour ce qui est des systèmes intégrés, nous faisons tout ce que nous pouvons. Tout dépend de la réponse de l'industrie. Nous avons été très satisfaits de certaines réponses, mais cela ne nous empêche pas de faire des essais. Si nous obtenons une bonne réponse et si nous la faisons suivre d'un essai sur place avec le fournisseur, afin de la valider... nous pourrons dire alors que tout va bien pour tel modèle, telle version, tel problème. Examinons les autres aspects. Nous faisons de notre mieux pour faire ces essais afin de pouvoir ensuite fournir ces renseignements au reste du monde.

M. Walt Lastewka: Si j'ai bien compris, les banques se sont penchées sur les systèmes interconnectés et elles ont investi... en fait, elles dépensent presque la moitié de leur argent pour vérifier les systèmes et les valider. Elles procèdent à ce genre d'examen pour leurs systèmes intégrés, en dehors de leur travail habituel étant donné qu'elles le font le samedi et le dimanche. Elles ont promis de revenir nous voir à l'automne pour nous dire où elles en sont. Il y a eu dédoublement des efforts, mais elles vérifient ces systèmes intégrés pour s'assurer qu'ils sont compatibles avec l'an 2000.

M. Ted Eedson: Cela devient plus difficile à répéter pour le système de chauffage, de ventilation et d'air climatisé d'un immeuble comme celui-ci. Il y a là toute une série de composantes provenant de divers fabricants. Nous devons compter sur le fabricant pour venir faire une analyse, nous préparer un rapport et donner suite à cette analyse.

M. Ian Nunn: Si j'ai bien compris, pour les systèmes centraux, si c'est ce dont vous parliez, on construit une installation comme celle que vous avez décrite et plusieurs services vont l'utiliser. Je crois également qu'à un moment donné on procédera à un essai du système à l'échelle de tout le gouvernement si bien que la totalité des principaux systèmes gouvernementaux sera testée.

La présidente: Monsieur Nunn et monsieur Eedson, avant que nous ne terminions, il y a deux questions sur lesquelles j'aurais besoin d'éclaircissements.

Mme McNeill a mentionné—et j'ignore si vous avez répondu à cela ou non, monsieur Nunn—que nous avions du retard par rapport aux États-Unis pour ce qui est des puces intégrées. Lors d'une réunion précédente, j'avais cru comprendre que nous étions en avance par rapport au gouvernement des États-Unis. Pourriez-vous me dire ce qu'il en est?

M. Ian Nunn: Je crois aussi que le Canada, l'Australie et le Royaume-Uni sont en tête pour ce qui est de la préparation à l'an 2000. Le Canada arrive en première ou en deuxième place, selon à qui vous parlez, et cela change d'un mois à l'autre.

La présidente: Pour ce qui est de la santé, vous avez dit également tout à l'heure que Santé Canada n'avait pas grand-chose à dire quant à ce qui se passait dans le secteur de la santé. Des témoins du ministère nous ont dit très clairement qu'ils réglementaient les dispositifs qui se trouvent sur le marché et qu'ils pourraient déréglementer tout dispositif qui ne pourrait pas faire la transition à l'an 2000.

M. Ian Nunn: C'est exact. Ce que j'ai dit était inexact.

La présidente: Merci. Je ne suis pas certaine que c'était inexact. J'ai peut-être mal compris. Je voulais seulement vérifier.

Au nom du comité, je tiens à vous remercier d'être venus aujourd'hui, monsieur Nunn et monsieur Eedson, ainsi que Mme McNeill qui a dû partir plus tôt.

• 1720

Je ne sais pas si vous avez un dernier mot à nous dire, mais vous pouvez le faire maintenant si vous le désirez.

M. Ted Eedson: Je dirai que les travaux de votre comité dont les journaux ont parlé dernièrement sont vraiment... d'un autre côté, cela augmente le travail qui s'empile sur mon bureau, mais de l'autre je l'apprécie énormément.

Des voix: Oh, oh!

M. Ted Eedson: Les préoccupations de la direction à cet égard ont vraiment... nous avons crevé une bulle et cela rend notre travail beaucoup plus difficile, mais au moins nous le faisons. Merci beaucoup.

La présidente: Merci, monsieur Eedson.

Monsieur Nunn.

M. Ian Nunn: Je voudrais vous remercier de nous avoir invités à comparaître. J'ai été très impressionné par votre compréhension du problème et vos connaissances et je suis certain que vous sensibiliserez le public et ferez comprendre aux Canadiens l'importance du problème de l'an 2000.

Merci beaucoup.

La présidente: Merci.

La séance est levée.