JURI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON JUSTICE AND HUMAN RIGHTS
COMITÉ PERMANENT DE LA JUSTICE ET DES DROITS DE LA PERSONNE
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le jeudi 27 novembre 1997
[Traduction]
La présidente (Mme Shaughnessy Cohen (Windsor—St. Clair, Lib.)): La séance est ouverte. Bonjour. Nous poursuivons notre examen du projet de règlement sur les armes à feu.
Aujourd'hui, nous accueillons les représentants du Groupe d'utilisateurs d'armes à feu, dont Steve Torino, le président.
Soyez le bienvenu, Steve. Vous avez déjà témoigné devant notre comité? Très bien. Vous savez donc que nous sommes impatients de vous entendre. Les députés vous poseront ensuite des questions.
M. Terrence Burns (membre, Groupe d'utilisateurs d'armes à feu): Nous croyons savoir que le mémoire n'a pas été traduit. Nous aimerions néanmoins le lire. Je crois que vous avez le sommaire.
La présidente: En effet, la traduction du mémoire n'est pas encore terminée, mais allez-y.
M. Terrence Burns: Nous vous remercions, madame la présidente, messieurs et mesdames les membres du comité, de nous avoir invités à vous présenter le point de vue des utilisateurs d'armes à feu sur le projet de réglementation et à répondre à vos questions.
Il importe de noter que les recommandations contenues dans notre mémoire ne sont pas des opinions personnelles, mais bien les recommandations du groupe.
Nous continuons d'examiner les effets de la loi et de la réglementation concernant les armes à feu sur tous les intéressés, de dispenser des conseils et de formuler des recommandations pour encourager le respect de la loi par le biais de règles pratiques acceptables pour tous les utilisateurs d'armes à feu. Nous avons toujours estimé que c'est par le nombre de gens qui respectent une loi qu'on peut juger de son efficacité. Si les propriétaires d'armes à feu refusent ou ne sont pas en mesure de remplir une exigence législative, c'est qu'il y a un problème grave.
La communication a toujours été et demeure un aspect important. Nous avons déjà mis en relief, dans nos témoignages précédents, les difficultés qu'avait suscité le manque de communication sur le projet de loi C-17. Nous tenions à ce que cela ne se reproduise pas et nous y tenons toujours.
À notre avis, les meilleures méthodes de communication sont les suivantes: la ligne téléphonique 1-800; le bulletin du Centre canadien des armes à feu; le bulletin interne du Centre canadien des armes à feu; le manuel de formation sur les armes à feu; la publicité dans les médias; et les conférences et réunions s'adressant aux organisations d'utilisateurs d'armes à feu.
• 0940
Nous recommandons que les communications demeurent une
priorité. Nous recommandons qu'un niveau de service élevé soit
maintenu après la mise en application de la nouvelle loi. Nous
recommandons fortement que se poursuivent toutes les réunions et
les discussions, de façon régulière, avec tous les organismes
nationaux et provinciaux qui traitent des armes à feu, surtout
pendant la mise en application de la Loi sur les armes à feu et de
ses règlements.
Notre mémoire a pour thème la conformité. Si une loi est jugée répressive ou si l'on juge qu'il est trop difficile ou coûteux de la respecter, que la loi soit de nature générale ou particulière, on ne s'y conformera pas.
En ce qui a trait à notre analyse du règlement sur la possession autorisée dans des cas particuliers et à nos recommandations, la partie III de ce règlement est un bon exemple de prévention du problème. On a su bien traiter de la question du transport des armes à feu visées à l'article 12 autres que les armes de poing visées au paragraphe 12(6) dans ce règlement, car on confère au contrôleur des armes à feu le pouvoir de délivrer un permis pour les activités normales pratiquées avec ces armes à feu dans les conditions énoncées.
Cette prévoyance est louable et doit être encouragée. Ces dispositions inciteront au respect de la loi et permettront de prévenir des difficultés pour tous les intéressés. Nous recommandons de régler d'autres aspects de la loi avec une méthode pratique visant à prévenir les problèmes plutôt qu'à essayer de les régler après coup.
Nous recommandons aussi que les propriétaires d'armes à feu ne soient pas tenus d'obtenir un permis de transport chaque fois qu'ils font du tir et que, pour des raisons de simplicité, le permis annuel vise aussi les activités exécutées avec de telles armes à feu.
Eu égard au règlement sur les certificats d'enregistrement d'armes à feu, les principales difficultés que présente l'identification des armes à feu ont été soulevées pour la première fois lors de l'examen de l'étude de 1996 sur le caractère unique des armes à feu. Il existe un nombre inconnu de marques et de modèles d'armes à feu utilisées au Canada qui ne portent pas de numéro de série. Bon nombre de ces armes sont relativement peu coûteuses, d'autres sont très coûteuses. On avait conclu qu'il ne serait ni économique, ni pratique d'estamper ou de graver un nombre unique sur ces armes à feu. Par conséquent, un nombre inconnu de ces armes étaient utilisées sans qu'on puisse les enregistrer de façon simple et peu coûteuse.
On s'est aussi demandé quels seraient les effets de l'estampage sur l'intégrité structurelle de bon nombre de vieilles armes à feu.
Il fallait aussi déterminer comment les propriétaires d'armes à feu habitant dans les régions rurales ou isolées pourraient faire estamper leurs armes s'il leur fallait parcourir des centaines de kilomètres en voiture ou en avion pour ce faire.
On s'est donc penché, et l'étude se poursuit, sur une proposition selon laquelle une étiquette autocollante serait fixée sur toutes les armes à feu sans numéro de série, quel que soit leur type. Le Centre canadien des armes à feu, la GRC et le ministère de la Justice ont fait preuve d'une grande collaboration. Les résultats des essais de longévité ont été très positifs et ont indiqué qu'on pourrait réaliser de grandes économies avec l'étiquette autocollante par opposition à l'estampage et à la gravure. Nous estimons qu'on a trouvé une méthode pratique et acceptable pour remplacer l'estampage.
L'article 5 du règlement dit que si:
-
l'arme à feu ne porte pas un numéro de série qui permet de la
distinguer des autres armes à feu selon l'alinéa 14a) de la loi,
le certificat doit être modifié de façon à inclure tout autre critère devant servir à l'identifier, tel que la marque, le modèle, le calibre, le mécanisme, la longueur du canon, etc., qu'on utilise actuellement pour les armes à feu à autorisation restreinte.
Étant donné que ces critères serviront à déterminer la nécessité d'imposer une étiquette autocollante, nous sommes d'avis qu'elle devrait figurer dans le règlement pour plus de clarté. Elle devrait être ajoutée à l'alinéa 14b) de la loi.
Nous recommandons que l'exigence de visibilité à l'oeil nu soit modifiée pour laisser le choix de mettre l'étiquette sur la carcasse ou la boîte de culasse, en dessous de la monture, pour protéger les propriétaires contre la production illicite de leur numéro d'identification d'arme à feu.
Bon nombre d'armes à feu de qualité, y compris celles qui sont actuellement enregistrées, nécessitent le démontage pour que le numéro de série situé sous la poignée soit visible. Les policiers faisant partie de notre groupe qui ont participé aux discussions à ce sujet ont déclaré que la visibilité à l'oeil nu n'était pas d'une grande importance au début d'une enquête.
Nous recommandons que les règles de vérification, y compris l'intervention de vérificateurs approuvés, soient établies avant la mise en oeuvre du règlement pertinent et incluses dans ce règlement avant sa mise en oeuvre, au lieu de l'être par la suite.
Nous recommandons que le libellé de l'article 6, qui énonce des exigences en matière d'étiquetage au lieu de l'estampage, soit clarifié et reproduise ce qui figure actuellement dans la fiche écrite en langage clair et simple.
En ce qui concerne les règlements sur l'importation et l'exportation d'armes à feu, étant donné que ces règlements s'appliqueront à toute personne qui traversera la frontière canadienne avec une arme à feu, ils devraient être aussi clairs et concis que possible et énoncer clairement les responsabilités associées au fait de traverser la frontière avec une arme à feu.
Nous sommes d'avis que le premier problème est celui du titre. En revanche, le moratoire prévu jusqu'au 1er janvier 2001 sera très utile.
• 0945
Nous recommandons d'ajouter au titre du règlement l'indication
claire qu'il vise quiconque traverse la frontière canadienne avec
une arme à feu afin de chasser ou pour participer à un concours.
La plupart des gens croient que l'importation et l'exportation sont des activités réservées à des entreprises qui vendent et achètent des armes à feu dans un autre pays.
Nous recommandons que ce règlement, qui devra servir souvent, soit largement diffusé pour que le maximum de Canadiens et de ressortissants étrangers connaissent dès que possible les responsabilités qui leur incombent au-delà de la frontière, avant qu'ils ne se présentent aux postes frontière sans disposer de l'information nécessaire aux yeux des autorités.
Nous recommandons d'encourager l'usage de déclarations de vive voix par le retrait des mots «si l'agent des douanes le permet», compte tenu des paragraphes 2(2), 7(2) et 11(2) du projet de règlement. Si les douanes estiment qu'il y a un problème, elles ont suffisamment de pouvoir pour agir de manière qu'elles souhaitent. Toutefois, le fait de laisser la déclaration de vive voix à la discrétion de l'importateur ou de l'exportateur causera probablement beaucoup de retards inutiles à ceux qui ont tous les enregistrements nécessaires et de longs trajets à faire, sans que cela soit avantageux pour le système d'enregistrement et la surveillance du mouvement des armes à feu enregistrées.
Nous recommandons que le règlement soit étudié de près pour évaluer son effet sur les activités récréatives et les activités de tir sportif au Canada et sur les secteurs de la randonnée avec guide, de la pourvoirie et du tourisme. Nous recommandons que ce règlement important soit considérablement condensé à des fins de clarté et pour faciliter la compréhension du Canadien moyen.
Pour ce qui concerne le règlement régissant les clubs et champs de tir, le règlement actuel porte que seuls les champs de tir qui acceptent les armes à autorisation restreinte et autres doivent obtenir l'approbation provinciale, étant donné que leurs activités sont autorisées aux termes d'un permis de champ ou de club de tir. Le nouveau règlement exige la délivrance d'un permis pour tous les champs de tir, peu importe le genre d'armes à feu qu'on y utilise, ce qui assujettit de nombreux champs de tir existants au nouveau règlement. Cependant, on n'a pas encore établi de normes nationales pour eux.
Outre ces nouvelles exigences, la nouvelle terminologie, qui n'est pas assortie des explications appropriées, causera au début des problèmes lorsqu'il s'agira de faire la distinction entre un club de tir et un champ de tir.
Nous croyons fermement que le fait d'avoir à observer des exigences très coûteuses, d'avoir des politiques d'assurance commerciale mal comprises, d'avoir des règles de protection environnementale, de rétention des projectiles, étant donné l'espace géographique des champs de tir, etc., pourrait fort bien dépasser les moyens financiers et pratiques de plusieurs champs de tir extérieurs. Sans l'aide du législateur et sans le soutien financier du gouvernement fédéral, ces exigences auront pour effet de faire fermer plusieurs petits champs de tir établis, mais importants et essentiels. La réduction du nombre de champs de tir autorisés pour le tir à la cible pourrait amener plusieurs propriétaires d'armes à feu à se livrer à leur sport dans des secteurs qui ne seraient peut-être pas sécuritaires.
Il faut examiner attentivement les dispositions relatives à l'assurance. Les détails de la responsabilité, des erreurs et omissions, et les exigences de la protection continue dans ce règlement sont plus que vagues. Les nombreux courtiers que nous avons contactés ont diverses opinions sur la légalité de cette assurance.
D'après les prix indicatifs que les membres du groupe ont reçus, une telle assurance coûterait très cher. D'ailleurs, les prix que nous avons reçus sont jusqu'à 10 fois plus élevés que ceux qu'a obtenus le personnel du ministère de la Justice. Rien que cet élément suffirait à faire fermer plusieurs champs de tir bien établis. Si les clubs de tir, dont les seuls revenus proviennent des droits qu'ils exigent des participants aux tournois, doivent obtenir une assurance aussi prohibitive, plusieurs, qui sont pourtant de grande valeur et bien établis, n'auront d'autre choix que de renoncer à la charte qui en fait des organisations sans but lucratif. D'où une situation très négative et dangereuse qui, à notre avis, nécessite une attention immédiate.
On n'encourage pas l'observation des règlements de sécurité de la Loi sur les armes à feu en fermant des clubs et des champs de tir établis depuis longtemps qui ne peuvent tout simplement pas se conformer aux exigences. Les endroits peut-être dangereux où ces activités auront alors lieu ne sont sûrement pas ce que les auteurs de la loi avaient et ont à l'esprit. Si l'on n'encourage pas activement l'observation de tous les éléments de ces lois, il se pourrait aussi qu'on n'observe pas d'autres éléments de la loi.
Étant donné que la sécurité est d'une importance primordiale, il faut tout faire pour encourager les clubs et les champs de tir existants à poursuivre leurs activités et à confiner le tir à la cible dans ces secteurs supervisés.
Nous recommandons que le travail sur les normes nationales soit achevé avant la mise en oeuvre de ce règlement, et que ces normes soient incluses ici pour plus d'uniformité.
Nous recommandons une assurance minimale d'un million de dollars pour la responsabilité générale. Nous recommandons fortement le retrait des exigences relatives aux erreurs et omissions.
Nous recommandons aussi l'inspection de tous les champs de tir existants étant donné que le maintien de leur existence, en tant que lieux où tous les tireurs à la cible d'aujourd'hui et demain peuvent exercer leur sport dans la plus parfaite légalité, est d'une importance primordiale.
Pour alléger le fardeau qu'impose ce règlement, nous recommandons fortement l'instauration d'une aide fédérale tant financière que législative pour assurer l'existence des champs et des clubs de tir autorisés.
Pour ce qui est des expositions d'armes à feu, la plupart des expositions d'armes à feu connues de nos membres semblent déjà se conformer à la plupart des articles de ce règlement. Mais c'est très souvent qu'on décide à la dernière minute de participer à une exposition d'armes à feu ou d'annuler sa participation, et c'est habituellement lorsque le bureau du directeur n'est pas ouvert. Si la rigidité du système est telle qu'on n'autorise pas de telles choses, il se peut que les terrains de stationnement deviennent des points de vente. Les ramifications d'un tel état de choses seraient inacceptables. De même, si l'on juge trop élevé le coût d'une participation légitime, les terrains de stationnement pourraient devenir des sites attrayants pour les acheteurs potentiels.
• 0950
Imposer la responsabilité aux commanditaires pour la sécurité
de l'immeuble, l'entreposage, la montre et la manutention, c'est
ôter cette responsabilité à ceux qui accompliraient normalement de
telles fonctions. Nous croyons que les efforts des commanditaires
doivent porter davantage sur l'optimisation de la participation
légitime. Nous croyons que ce règlement doit continuer d'encourager
l'uniformisation nationale et la participation optimale des
exposants autorisés en imposant des droits aussi bas que possible
et en facilitant l'obtention des permis nécessaires. Nous croyons
aussi que c'est le bureau du directeur, et non le commanditaire,
qui doit informer les autorités compétentes de la tenue de
l'exposition d'armes à feu.
Pour ce qui est des agents publics, nous croyons que le règlement qui les concerne peut poser un problème dans la mesure où les agents publics responsables de l'application du règlement sur les armes à feu ont créé une infraction, nommément l'article 17. À notre avis, c'est une mesure impraticable dans la mesure où l'on rend les agents publics responsables des décisions que leurs services ont prises concernant l'entreposage sécuritaire des armes à feu. À notre avis, nul ne pourra faire respecter cet article. Nous recommandons la modification du paragraphe 3(1) du règlement sur les armes à feu des agents publics feu afin de séparer la responsabilité du service public de celle de l'agent public.
Nous avons d'autres recommandations concernant l'observation du règlement. Tous les règlements actuels, le barème des droits, plus les divers décrets en conseil, constituent plus de 20 références que doit consulter un propriétaire d'armes à feu chaque fois qu'un problème se pose. Si on ne leur donne pas une forme juridique plus accessible et plus condensée qui supprimerait toute répétition, rares seront les propriétaires d'armes à feu qui pourront bien comprendre leurs responsabilités. Seul un règlement clair et concis, bien intitulé, bien répertorié, avec les renvois réciproques voulus, rejoindra l'audience cible et optimisera l'observation du règlement. Encore là, nous recommandons au comité, avec la plus grande énergie, de faire tout ce qui est en son pouvoir pour simplifier le plus possible le règlement en regroupant et en condensant les dispositions sous une forme qu'on pourra trouver et comprendre aisément.
Nous recommandons que chaque disposition soit suivie du droit qui est assorti afin de donner au lecteur toutes les informations qu'il lui faut.
Nous recommandons qu'une période d'essai précède la mise en oeuvre de la phase d'enregistrement de la Loi sur les armes à feu, ou y soit incorporée, afin de permettre à tous les intéressés d'éliminer tous les irritants et de se familiariser davantage avec le système.
Nous recommandons la création d'un programme de sensibilisation sécuritaire dans les écoles afin d'informer la jeunesse des réalités des armes à feu. C'est en enseignant la manutention sécuritaire des armes à feu que l'on réussira à contrer les messages inexacts émanant du cinéma, de la télévision et des autres médias.
Une observation optimale, encouragée par des règles pratiques et acceptables, est à notre avis essentielle à toute bonne loi.
Merci.
La présidente: Merci.
Monsieur Ramsay, vous avez sept minutes.
M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Merci, madame la présidente. Je tiens à remercier aussi nos témoins.
Avant que vous partiez, j'aimerais que vous définissiez, pour les besoins du procès-verbal de notre comité, ce que c'est qu'un groupe d'utilisateurs, le rôle que vous jouez, comment votre groupe a été créé—ce genre de choses. Ainsi, si une personne prend connaissance de notre procès-verbal, elle comprendra tout de suite la contribution que vous avez apportée, peu importe ce qu'elle sera, et le rôle que votre groupe d'utilisateurs a joué.
Y a-t-il quelqu'un au ministère de la Justice qui vous a dit que les informations qui vont entrer dans le nouveau système d'enregistrement ne seront pas vérifiées? Rien ne sera vérifié, sauf dans les cas où les armes à feu seront vendues ou cédées. Saviez-vous que c'est la nature même de ce système d'enregistrement, que toutes les informations relatives à l'enregistrement d'une arme à feu dans le système d'enregistrement par la poste... et voici l'une des formules; ce n'est pas la formule définitive, ce n'est qu'une ébauche où l'on demande plus de 30 éléments d'information qui vont entrer dans le système d'enregistrement et qui permettront d'identifier une seule arme à feu parmi des milliers d'autres. Saviez-vous qu'on ne comptait nullement vérifier ces informations?
M. Steve Torino (président, Groupe d'utilisateurs d'armes à feu): Au moment où ce document a été déposé, on nous a donné les pages 45 et 46 des modifications relatives aux conditions de cession des armes à feu et aux autres règlements sur les armes, tout particulièrement l'article 3, page 46. Il y est dit qu'après le 1er janvier 2003 le cédant présentera des preuves relatives à la vérification, et c'est pourquoi la vérification ne sera pas obligatoire avant cette date.
M. Jack Ramsay: Et vous le saviez.
M. Steve Torino: Nous le savons maintenant.
M. Jack Ramsay: Bien. Vous savez donc également qu'un certificat d'enregistrement délivré en fonction de ces renseignements ne serait pas très fiable. En étiez-vous conscients?
M. Steve Torino: Pour ce qui est du degré de fiabilité, tout dépend de la définition finale sur la formule que vous avez devant vous. Nous avons vu cette formule pour la première fois il y a trois jours et avons reçu de l'information sur la vérification pendant notre réunion. Nous avons eu une réunion de trois jours du groupe d'utilisateurs pendant les audiences et nous avons reçu de l'information sur la vérification.
M. Jack Ramsay: Les contrôleurs des armes à feu de l'Île-du-Prince-Édouard et de la Colombie-Britannique ont comparu devant le comité plus tôt cette semaine. Le contrôleur des armes à feu de l'Île-du-Prince-Édouard nous a remis un mémoire qui, je l'imagine, avait l'appui de son collègue de la Colombie-Britannique. Il y dit que:
-
... les données du registre sur les armes prohibées et à
autorisation restreinte ne seront pas vérifiées et par conséquent
ne seront pas fiables.
Il disait que cela aurait une incidence sur la sécurité des policiers, la sécurité publique et sur l'application de la loi.
Le commissaire adjoint John L'Abbé a déclaré lorsqu'il a comparu devant le comité:
-
Le processus de vérification, tel qu'indiqué dans les exigences du
règlement sur les cessions dont votre comité est saisi, est, de
l'avis de la GRC, absolument crucial pour l'efficacité de tout
système d'enregistrement des armes à feu.
-
La possibilité que des erreurs se glissent dans les demandes
présentées par des membres du public, qui peuvent ne pas bien
connaître le système de classement des armes à feu, est extrêmement
forte.
Il dit ensuite:
-
Si les services de police canadienne ne sont pas convaincus de
l'exactitude des données introduites dans le système canadien
d'enregistrement des armes à feu, ils ne vont pas exploiter
celui-ci à fond.
Si cela se produit, ce dernier ne pourra atteindre son objectif
principal, qui est d'assurer et même d'accroître la sécurité
publique.
Il dit enfin:
-
Le processus de vérification sera certainement très lent. De
nombreux propriétaires d'armes à feu voudront attendre plusieurs
décennies pour procéder à la cession de leurs armes à feu.
Autrement dit, de les vendre. Beaucoup de propriétaires d'armes à feu n'ont pas d'AAAF parce qu'ils n'en ont pas acheté ni vendu. Ils ont des armes à feu sans avoir l'intention de les vendre. Cela signifie que le processus de vérification pour certaines armes à feu ne pourrait jamais avoir lieu, tant que leur propriétaire ne mourra pas, moment où l'arme à feu fera partie de son héritage et entrera alors dans le processus.
Des fonctionnaires nous ont dit des choses qui m'ont étonné, sinon choqué. Je ne sais pas si votre groupe d'utilisateurs en a été informé, mais d'après le ministère de la Justice un certificat d'enregistrement dont le numéro de série ne correspond pas à l'arme à feu enregistrée sera tout de même considéré comme étant un enregistrement valable pour cette arme à feu. En étiez-vous au courant?
M. Jim Adam (Groupe d'utilisateurs d'armes à feu): Je pense pouvoir vous répondre, monsieur Ramsay. Officiellement, non, nous n'étions pas au courant. Parce que j'avais d'autres engagements, j'ai moi-même dû m'absenter pendant une journée et demie des derniers trois jours de réunion. À moins que cela n'ait été présenté lundi dernier, nous n'étions pas au courant; nous ne connaissions pas toutes les conséquences et ramifications de cela.
M. Jack Ramsay: Que pensez-vous de ce témoignage présenté au comité par les fonctionnaires du ministère?
• 1000
Pour que tout soit clair, je vais vous dire ce que j'ai
compris. Si un certificat d'enregistrement est délivré pour une
arme donnée et que le numéro de série du certificat ne concorde pas
avec celui de l'arme à feu, le certificat est tout de même valide
et sert à enregistrer l'arme à feu.
Qu'en pensez-vous?
La présidente: Qu'il soit clair, pour les besoins du compte rendu, que vos commentaires portent sur les propos rapportés par M. Ramsay. Je comprends que vous n'avez pas sous les yeux le témoignage sur lequel vous avez à formuler des commentaires.
M. Jim Adam: Merci, madame la présidente. Je crois que c'est là ce que nous pensons. Nous ne connaissons pas ce témoignage dont vous parlez dans votre question.
Mais pour répondre à votre question, monsieur Ramsay, nous en avons discuté entre nous et avons conclu unanimement que si un numéro de série qui a été effacé de manière délibérée ou non sur une arme à feu ne peut être lu, l'arme à feu ne peut être vérifiée.
Est-ce que cela répond à votre question, monsieur?
M. Jack Ramsay: Oui.
Quelqu'un d'autre a-t-il une opinion à exprimer à ce sujet?
M. Steve Torino: Nous pensons que sur les huit ou dix caractéristiques servant à identifier l'arme à feu, toutes, à l'exception du numéro de série, servent à dire de quelle sorte d'arme il s'agit, que ce soit un Mauser, un Remington ou autre chose. L'unicité de l'arme à feu ne peut toutefois être confirmée que par le numéro de série. Par conséquent, sans le numéro de série, on ne peut pas identifier l'arme dans son unicité.
M. Jack Ramsay: Bien.
Merci.
La présidente: Monsieur MacKay.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Merci, madame la présidente.
Je veux vous remercier tous d'être venus ici aujourd'hui. Nous apprécions vos commentaires.
Ma première question porte sur un commentaire que vous avez fait, monsieur Adam, au sujet des conséquences et incidences. Je dirais que vous êtes des personnes très au courant de la mise en oeuvre de ces règlements. Vous avez eu l'occasion de les revoir. Vous savez ce qui se passe aussi dans le milieu des propriétaires d'armes à feu.
Mais que pensez-vous du citoyen moyen, du propriétaire d'armes à feu qui n'est pas membre d'un club, qui a une carabine ou un fusil de chasse dans sa grange ou dans sa remise? Serons-nous en mesure ou est-ce que ce sera très difficile de les mettre au courant de ces règlements?
M. Jim Adam: Monsieur MacKay, votre question porte-t-elle sur l'enregistrement, la conformité à l'enregistrement ou tout ce qu'il faut pour se conformer aux mesures législatives se rapportant aux armes à feu?
M. Peter MacKay: Toutes ces réponses. À ce comité, on m'a rappelé à maintes reprises de me pencher uniquement sur les règlements. Mais comme vous l'avez dit, la question qui nous intéresse est celle de l'observation des règlements. J'aimerais savoir quelle est votre opinion au sujet de l'observation de ces règlements.
M. Jim Adam: Sans vouloir faire de blague, je dirais qu'on aurait des réponses bien différentes si l'on posait la même question à quelqu'un dans la rue, sur la rue Yonge, à Toronto, et à quelqu'un d'autre dans une région rurale de la Nouvelle-Écosse.
Pour répondre à votre question, il faut voir si l'observation se fera au niveau régional ou territorial. Sans entrer dans les détails, je pense que le bon sens dictera la façon dont on se conformera aux règlements.
M. Peter MacKay: Bien.
Certains articles des règlements empêchent le gouvernement de revendre des armes à feu à certains groupes—les groupes enregistrés, le public, qui que ce soit, d'ailleurs, quels que soient son intention et ses objectifs. J'aimerais savoir ce que vous pensez de cela: toutes les armes à feu saisies seront détruites.
M. Jim Adam: Pour vous répondre, il faut donner son opinion personnelle, monsieur MacKay, et je n'ai pas d'objection à le faire.
Le gouvernement provincial m'a demandé de détruire certaines de ces armes à feu, à des fins de formation. Quand on me remet une arme à feu confisquée valant 2 000 $ pour que je la détruise afin qu'elle n'aie plus aucune valeur, de manière qu'elle puisse être utilisée pour la formation dans le cadre d'un programme d'AAAF, par exemple, je ne peux m'empêcher de penser que si l'on percevait 50 p. 100 de la valeur de cette arme à feu, on pourrait faire beaucoup pour le programme d'AAAF, qui dans bien des cas ne fait que vivoter, faute de moyens. C'est un programme volontaire, et beaucoup des armes à feu dont on s'y sert ont été acquises par toutes sortes de moyens. Je ne veux pas dire illégalement, mais on les a quêtées, empruntées. J'allais dire volées, mais elles ne sont pas volées; elles ont tout de même été acquises et sont utilisées pour la formation.
• 1005
Parfois, ce sont comme des béquilles, et voilà qu'on me
demande de détruire ce qu'il y a de mieux comme arme à feu parce
que quelqu'un s'est dit: «Qu'est-ce que cela peut bien faire?» Il
faut le détruire. Que ce soit détruit et mis dans la poubelle ou
détruit et mis sur une table pour former des gens, c'est insensé
pour quelqu'un comme moi.
Voilà mon opinion personnelle, monsieur. Je ne parle pas au nom du groupe.
M. Peter MacKay: Est-ce que le groupe a une position officielle à ce sujet?
La présidente: Excusez-moi, monsieur MacKay, mais M. Torino voulait vous répondre.
M. Steve Torino: J'aimerais répondre à votre première question, si possible, monsieur MacKay. Vous avez posé une question d'ordre général sur l'observation des règlements.
Le premier principe dont il faut faire état se trouvait dans notre premier mémoire, à notre première comparution. Vous ne pouvez espérer un quelconque degré de conformité si vous ne faites pas circuler l'information. Elle commence à circuler, mais de l'avis de notre groupe il faut en faire beaucoup plus pour que l'information exacte et concise soit diffusée de manière que tous comprennent bien leurs responsabilités.
Ce n'est pas encore chose faite. Que ce soit dans les grandes régions urbaines, dans les secteurs ruraux ou éloignés, l'information n'est pas encore arrivée, et elle doit s'y rendre. Ce n'est que lorsque les gens comprendront ce qui est exigé d'eux qu'ils pourront décider s'ils vont ou non s'y conformer. La décision d'observer ou non le règlement dépendra de divers facteurs, personnels et autres.
Si les choses sont bien présentées, ils sauront quelles sont leurs responsabilités. Si chacun estime que les exigences sont justes ou qu'ils peuvent vivre avec elles, comme nous l'avons dit souvent en réunion, on aura alors le meilleur taux d'observation possible. Il semble que ce soit là le facteur clé.
M. Peter MacKay: D'après le groupe, mais vous pouvez aussi me donner une réponse personnelle, qu'est-ce qui nuira le plus au succès de ces règlements: la complexité de leur formulation ou les droits qui y sont associés? Je vous pose respectueusement cette question, à laquelle vous pouvez répondre comme groupe, comme membre de club de tir ou à titre personnel.
M. Steve Torino: J'aimerais dire quelque chose que je dis régulièrement lors des réunions du groupe: pour se conformer à ceci...en fait l'épaisseur du document se passe d'explications, surtout si l'on pense à l'ancien projet de loi C-17, qui avait à peut près cette épaisseur-ci. Il faudra y travailler pour en faire quelque chose de plus facilement compréhensible. On pourrait en faire des feuillets d'information, des guides, ou quoi que ce soit, mais ce doit être complet et facile à comprendre. En regardant ce règlement, les gens seront automatiquement découragés. Cela commence à ressembler à la Loi de l'impôt sur le revenu, et on sait bien qu'elle est trop compliquée. Mais si on peut lire le règlement sous une autre forme qui réponde aux principales questions, je pense que cela aidera beaucoup.
M. Peter MacKay: Sauf votre respect, je sais que vos recommandations sont destinées à améliorer la loi, mais nous avons entendu divers groupes, dont la plupart ont proposé des recommandations. J'aime bien que vos recommandations soient basées sur le principe de la simplicité, de la simplification de la loi.
On pourrait encore tenir des réunions de comité pendant toute une année, je dirais, sans épuiser la liste des témoins qui auraient voulu comparaître. Chacun vient avec ses recommandations, et on pourrait finir par avoir un rapport ou un règlement plus épais que le Code criminel.
Si votre objectif est la simplicité, que proposez-vous que nous fassions pour réduire ces mesures législatives afin d'en faire quelque chose de plus digeste? Faut-il supprimer certains articles?
M. Steve Torino: Au début de notre rapport, je pense que nous avons réussi une certaine synthèse ou un résumé. Comme je le disais, des guides qui se concentrent sur les principaux problèmes peuvent beaucoup aider. Il y a le manuel de formation concernant la Loi sur les armes à feu qui est sorti depuis quelque temps et que nous avons vu au Centre canadien des armes à feu du ministère de la Justice. Il a une présentation modulaire.
• 1010
La présentation modulaire permet à une personne qui
s'intéresse, disons, au certificat d'enregistrement, à l'inspection
ou à quoi que ce soit, de recevoir tout ce qui se rapporte à son
problème particulier ce jour-là. On y donne tous les articles
pertinents de la loi et des règlements; il y a ensuite une
explication objective, assortie d'exemples.
Je pense qu'on pourrait faire beaucoup pour ce dont vous avez parlé en adoptant encore une fois cette présentation modulaire.
La présidente: Merci, monsieur MacKay.
Mme Bakopanos a une question à poser, de même que M. Maloney.
Mme Eleni Bakopanos (Ahuntsic, Lib.): Merci, madame la présidente.
Pour clarifier les choses, il faut dire que ces règlements n'entreront vraiment en vigueur qu'en 2003, ce qui donne à vous, au gouvernement ou à nous tous ensemble, un certain nombre d'années pour renseigner le public, pour préparer des trousses d'information, pour faire comprendre à la population que s'il y a un problème, de l'aide sera disponible, puisque des vérificateurs seront disponibles—ils pourraient provenir des rangs des policiers ou des agents de la GRC, selon le territoire—qui seront responsables de la vérification. Il y aura un système mis sur pied pour fournir l'information et les explications au public.
Voudriez-vous que nous fassions quelque chose d'autre? Nous parlons d'un peu plus de cinq ans.
M. Steve Torino: Cinq ans, cela peut sembler très long. Vous pouvez regarder un calendrier et compter les jours. Mais ce n'est qu'hier que le projet de loi C-17 est entré en vigueur et demain, en termes relatifs, que le projet de loi C-68 sera loi. La population, le milieu des propriétaires d'armes à feu, et d'autres, ont toutes sortes de fausses impressions, ou disposent de renseignements justes, mais ne peuvent les appliquer. Il y a encore beaucoup de pain sur la planche.
Mme Eleni Bakopanos: Le projet de loi C-68 entrera en vigueur le 1er octobre.
M. Steve Torino: Autant dire demain.
Mme Eleni Bakopanos: Cela signifie qu'il nous reste...
M. Steve Torino: Dans l'espace temporel actuel, c'est en fait demain. C'est très, très proche.
Mme Eleni Bakopanos: C'est dans neuf mois. Une fois lancé, s'il y a des problèmes, il y a encore cinq ans pour corriger les anomalies du système.
J'aimerais clarifier une autre chose: avez-vous été consultés par le passé? Vous avez dit plus tôt qu'on vous avait consultés au cours des trois derniers jours. Avez-vous été consultés cet été, dans le cadre des consultations menées par le gouvernement auprès d'au moins 100 groupes différents?
M. Steve Torino: Pour répondre à votre question, je peux revenir à la demande de M. Ramsay, qui veut avoir une définition du groupe d'utilisateurs. Ce groupe a été créé il y a deux ans par le ministre Rock, et dès le lendemain, je crois que c'était le 7 décembre 1995, nous avons reçu pour mandat de travailler sur le système d'enregistrement et d'aider le plus possible à la mise en oeuvre de la Loi sur les armes à feu. Nous avons été consultés régulièrement pendant ces deux années.
Au sujet du dernier groupe de règlements, notre mémoire de février 1997 est dans vos dossiers. Nous travaillons depuis aux règlements.
Nos recommandations étaient-elles acceptables? Nous croyons avoir eu une influence très positive. Nous pensons que beaucoup de nos recommandations ont été acceptées et bien accueillies.
Mais j'aimerais revenir à ce «nous» que vous avez utilisé. Nous sommes dans une position très particulière en tant que conseillers du ministre de la Justice en matière d'armes à feu. Nous ne travaillons ni pour le gouvernement, ni pour les propriétaires d'armes à feu. Nous sommes entre les deux, dans une sorte de zone grise. Pour faire un jeu de mots, nous nous faisons tirer dessus des deux côtés. Parfois, cela rend notre vie très intéressante.
Mme Eleni Bakopanos: Je pense que vous êtes alors dans la meilleure position pour offrir des conseils. Merci.
La présidente: Merci.
Monsieur Maloney.
M. John Maloney (Erie-Lincoln, Lib.): J'ai quelques questions à poser au sujet de vos préoccupations relatives à la grande visibilité du certificat. Vous dites que ce serait peut-être une sorte d'invitation au vol. Voulez-vous parler du vol de la petite étiquette ou de l'arme à feu elle-même?
Au premier paragraphe de la deuxième page de votre résumé, vous dites: «Nous recommandons que l'exigence de visibilité «à l'oeil nu» soit modifiée...» Vous dites craindre une «invitation éventuelle au vol» et vouloir protéger «les propriétaires contre la reproduction illicite de leur numéro d'identification d'arme à feu»...
M. Steve Torino: Nous parlons là du vol du numéro même. Normalement, le numéro de série est estampé sur l'arme à feu, mais n'est pas visible à l'oeil nu; il est tout simplement là. Il est estampé en bleu ou en noir. Ce numéro fait partie des autres informations figurant sur l'arme à feu. Il est beaucoup plus difficile à voir qu'une étiquette autocollante, aussi visible que si elle était phosphorescente.
Nous voulons assurer la confidentialité du numéro et empêcher qu'on ne reproduise le numéro et qu'on ne l'appose sur une autre arme à feu.
M. John Maloney: Vous voulez dire en y apposant une étiquette ou en gravant le numéro?
M. Steve Torino: On pourrait reproduire le numéro d'une façon ou d'une autre, mais pas voler l'étiquette comme telle.
M. John Maloney: Avez-vous vu les étiquettes autocollantes?
M. Steve Torino: Oui. Nous avons reçu des échantillons officiels cette semaine. Elles sont très bien.
M. John Maloney: Vous anticipez donc un problème sérieux?
M. Steve Torino: Nous ne croyons pas que ce sera un problème sérieux, mais nous voulons nous assurer de prévenir un problème éventuel. Notre groupe, à titre de groupe national, tente de prévoir les principaux problèmes, du moins ceux qu'il peut prévoir dans le peu de temps dont il dispose pendant ses réunions de deux à quatre jours.
Nous avons convenu que bon nombre d'armes à feu—les armes à canons superposés, entre autres—portent le numéro de série sur la boîte de culasse, mais sous le canon. Il faut démonter l'arme pour voir le numéro de série. Nous avons donc conclu que l'exigence de visibilité à l'oeil nu constituerait un problème. Le numéro de série est apposé sous l'arme, et non bien en vue pour prévenir tout genre de vol et pour protéger le numéro de série. Ce précédent a été établi il y a longtemps en Europe.
M. John Maloney: Vous dites aussi que les règles de vérification devraient être établies avant l'entrée en vigueur de ces règlements. Avez-vous des suggestions de règles à nous faire?
M. Steve Torino: On nous a consultés cette semaine, et les consultations se poursuivent. Toutefois, je peux vous dire que nous estimons qu'on ne devrait pas attendre cinq ans avant de vérifier les numéros d'enregistrement. La vérification devrait se faire dès que possible.
M. John Maloney: Croyez-vous que le lobby des armes à feu accepterait une vérification immédiate?
M. Steve Torino: Nous n'en avons pas encore discuté; c'est un des sujets qui seront abordés pendant le processus en cours.
M. John Maloney: Mais quelle est votre opinion?
M. Steve Torino: Je préfère ne pas vous donner mon opinion personnelle, monsieur.
M. John Maloney: D'accord.
En ce qui concerne l'assurance-responsabilité d'un million de dollars, savez-vous quel genre d'assurance ont habituellement les clubs et les champs de tir?
M. Terrence Burns: La plupart des clubs que je connais ont déjà une assurance d'un million de dollars. Ils n'ont toutefois pas d'assurance contre les erreurs et omissions. J'en ai parlé à un courtier au Nouveau-Brunswick—Steve s'est informé auprès d'un courtier du Québec et Jim, de la Nouvelle-Écosse—qui a 35 ans d'expérience dans le domaine, et il m'a dit que le gouvernement fédéral devrait définir ce qu'il entend par assurance contre les erreurs et omissions en l'occurrence, sinon les assureurs refuseront de vendre ce genre d'assurance aux clubs et aux champs de tir.
M. John Maloney: Si l'on exige une assurance-responsabilité de 2 millions de dollars plutôt que d'un million de dollars, cela coûtera-t-il beaucoup plus cher?
M. Terrence Burns: Pour faire passer la protection d'un million de dollars à 2 millions de dollars, le coût sera probablement minime. On augmentera légèrement la prime. Ce qui coûtera cher, c'est l'assurance contre les erreurs et omissions, ou, le mieux que nous pouvons trouver pour l'instant, l'assurance- responsabilité des administrateurs. Selon la taille du club, le nombre d'administrateurs et les sommes d'argent en cause, on nous a fait des prix allant de 2 000 $ à 6 000 $. Dans bien des cas, c'est le double, parce que le propriétaire du club de tir est aussi propriétaire du champ de tir et qu'il lui faut une assurance pour le club et le champ.
Dès qu'on exigera cela, les clubs de tir que je connais fermeront leurs portes.
M. John Maloney: Merci beaucoup.
Merci, madame la présidente.
La présidente: Monsieur Ramsay, vous avez cinq minutes.
M. Jack Ramsay: J'aimerais aborder le sujet des expositions d'armes à feu et des champs de tir, mais je ferai d'abord une remarque, et j'aimerais que vous y répondiez.
On a conçu un système d'enregistrement par la poste pour réduire le coût au minimum. Si de trois à six millions de propriétaires d'armes à feu devaient apporter de six à 20 millions d'armes à feu à leur poste de police local pour faire vérifier les renseignements, comme on le fait actuellement avec les armes de poing, le coût serait énorme. Si je me souviens bien, c'est ce qu'avait dit l'ancien ministre de la Justice. Le système retenu ne sera pas coûteux; chaque arme à feu coûtera environ 82 $ à enregistrer. Mais si on multiplie 82 $ par six à 20 millions, le nombre d'armes à feu d'épaule au pays, le coût devient faramineux, bien au-delà des 85 millions de dollars dont parle le ministère.
Le problème de la vérification est inhérent au système d'enregistrement par la poste, et cela m'a toujours préoccupé. À quoi sert un système d'identification si on ne vérifie pas les informations qu'il contient? Cela a toujours été le problème de cet élément clé du projet de loi C-68, les systèmes d'enregistrement et de permis.
• 1020
Si vous avez des remarques à faire là-dessus, faites-les, je
vous en prie, mais j'aimerais vous poser une question sur les
expositions d'armes à feu et les champs de tir. J'ai reçu des
appels de gens qui organisent des expositions d'armes à feu depuis
des années. Ils estiment qu'ils ne pourront pas satisfaire aux
exigences du projet de réglementation. Des expositions d'armes à
feu disparaîtront, des clubs de tir et des champs de tir devront
fermer leurs portes.
Connaissez-vous ces domaines? Que pensez-vous des préoccupations qui m'ont été communiquées?
M. Jim Adam: Je vous répondrai en premier, monsieur Ramsay, et je suis certain que M. Torino voudra ajouter quelque chose.
Il y a quatre ou cinq ans, lorsque les rumeurs et indications sur l'augmentation du coût ont commencé à circuler, il y avait en Nouvelle-Écosse neuf expositions d'armes à feu par année. Aujourd'hui, il n'y en a plus qu'une, et elle a du mal à survivre. Cet état de choses est attribuable aux règlements régissant les expositions d'armes à feu, qui sont complexes et mal compris et qui entraînent des coûts importants.
Il n'y avait qu'en Nouvelle-Écosse qu'on exigeait 50 $ pour chaque exposition, alors que dans le reste du pays on ne payait des droits qu'une fois par année. Cela a eu pour effet de pousser les gens vers le marché noir... les gens vendent dorénavant leurs armes à feu dans leurs voitures plutôt que dans les expositions d'armes à feu.
Si je puis me le permettre, je vais vous raconter ce que j'ai vu à la télévision, il y a trois semaines. On interviewait un homme d'affaires prospère de la vallée d'Annapolis.
Étant moi-même marchand d'armes à feu, armurier et instructeur au maniement utilitaire des armes à feu, je peux vous dire que mon chiffre d'affaires a baissé de 85 p. 100, comme c'est le cas de mes confrères. Mais je m'éloigne du sujet.
L'homme qu'on interviewait avait une entreprise très prospère jusqu'à tout récemment. Son chiffre d'affaires a baissé de 85 p. 100; c'est son gagne-pain, le gagne-pain dont dépend sa famille. Il ne vend pas que des armes; il vend aussi de l'équipement connexe.
Par coïncidence, le préposé adjoint aux armes à feu de la Nouvelle-Écosse était aussi présent. Le journaliste a demandé au marchand d'armes pourquoi son chiffre d'affaires avait tant baissé. Le marchand a répondu qu'il était devenu extrêmement difficile de vendre des armes à feu avec les nouvelles lois sur le contrôle des armes à feu et que, en outre, il devait payer des taxes sur les produits qu'il vendait—la TVH et une taxe additionnelle payée chaque année sur les ventes. Il a ajouté que son entreprise souffrait beaucoup des activités des gens qui vendent illégalement des armes dans leurs voitures, et il a pointé une personne du doigt.
La caméra nous a ensuite montré cette personne, monsieur Ramsay. On ne voyait pas son visage, seulement son corps. On lui a demandé depuis combien de temps il faisait cela. Il a répondu qu'il vendait ainsi des armes à feu depuis 10 ans et qu'il continuerait de le faire parce que le préposé adjoint aux armes à feu ne pouvait l'en empêcher.
C'est là le genre de chose qui se produit. Je ne veux insulter personne, mais je suis certain que, à Ottawa, on n'entend jamais parler de ce genre de chose. On ne voit pas cela, au centre-ville, dans la rue Sparks, mais cela se produit dans la région d'où je viens.
Ce qu'ont subi les gens comme moi... et je parle en leur nom. Ils m'ont donné carte blanche, croyez-moi, ils ont fait de moi leur porte-parole. Avant de venir ici, je suis allé les voir pour leur demander si je pouvais m'exprimer en leur nom si ce sujet était soulevé. Ils m'ont répondu: «Absolument.»
On les accule à la faillite, monsieur. On les accule tout simplement à la faillite.
M. Jack Ramsay: Merci.
La présidente: Monsieur Torino.
M. Steve Torino: En ce qui concerne les expositions d'armes à feu, nous sommes d'avis que l'établissement de normes nationales ou de règles uniformes contribuera grandement à éliminer certains des problèmes que Jim a soulevés, à savoir qu'il y a dans certaines provinces des règles qui ont entraîné une réduction du nombre d'expositions, alors que ce n'est pas le cas ailleurs.
En imposant des normes nationales et en exigeant un permis du commanditaire de l'exposition plutôt que de chaque exposant, les exposants pourront plus facilement participer aux expositions de toutes les régions du pays, et on supprimera bon nombre de ces inégalités.
• 1025
Vous avez aussi parlé des champs de tir, mais je crois qu'il
faut faire la distinction entre les deux. Je crois que les normes
régleront bien des problèmes concernant les expositions d'armes à
feu. Les autres problèmes à ce chapitre ont été soulevés plus tôt
cette semaine par les associations de collectionneurs, et leurs
recommandations figurent, je crois, au compte rendu.
Merci.
La présidente: Merci, monsieur Ramsay.
Merci, messieurs, de votre travail. Nous suspendons la séance pour cinq minutes pour permettre aux témoins suivants de prendre place. Merci beaucoup.
La présidente: Nous reprenons nos travaux. Nous accueillons le sergent-détective Neal Jessop, du service de police de Windsor, qui est le président de l'Association canadienne des policiers, et Scott Newark, le directeur général de l'association, ainsi qu'une troisième personne. Comment s'appelle-t-elle?
Le sergent-détective Neal Jessop (président, Association canadienne des policiers): Madame la présidente, nous sommes accompagnés du sergent Gerry Pyke, du service de police de Vancouver, notre représentant au Groupe des utilisateurs d'armes à feu.
La présidente: Merci. Vous connaissez la marche à suivre.
Le sergent-détective Neal Jessop: Oui.
Je m'appelle Neal Jessop, et je vous présente tout de suite mes excuses, car je devrai vous quitter sous peu. M. Newark et M. Pyke répondront à vos questions. Je dois aller sur la colline du Parlement pour appuyer M. Scott dans son initiative contre le crime organisé.
Madame la présidente, j'aimerais d'abord vous parler d'une chose qui me préoccupe beaucoup depuis deux semaines. MM. Newark et Pyke pourront aborder avec vous les détails du projet de réglementation, mais j'aimerais revenir au projet de loi C-68 et à l'enregistrement des armes à feu en général.
Nous avons appuyé l'enregistrement des armes à feu, croyant—et c'était, je crois, une croyance sincère—que si toutes les armes à feu étaient enregistrées, les policiers qui travaillent sur le terrain, qui répondent aux appels, auraient un accès immédiat aux informations sur les propriétaires d'armes à feu enregistrées, surtout leur nom et adresse. Cette question était cruciale pour nos membres, et j'estime que c'est ce qui a convaincu nos membres d'appuyer le projet de loi C-68.
Comme vous le savez, cet appui n'a pas été unanime. Notre organisation est démocratique, et cette question a été litigieuse pour nous, mais nous en avons discuté de façon exhaustive. Lorsque nos membres ont appris que la population et eux-mêmes profiteraient de ces informations, que ces informations leur seraient disponibles sans délai une fois la loi mise en oeuvre, ils se sont dits d'accord. Je crois pouvoir dire que notre appui a grandement contribué au soutien populaire dont a joui le projet de loi.
• 1040
Il y a environ deux semaines, sachant que nous devions
comparaître devant votre comité et ayant besoin d'information, j'ai
demandé à M. Newark de s'informer auprès du ministère de la Justice
et de demander à rencontrer la ministre au sujet du projet de
réglementation. Pour être bref, je dirai que nous n'avons obtenu
que ce matin les informations que nous souhaitions avoir; pendant
que j'attendais mon tour, on m'a remis une lettre de la ministre,
sans signature—elle a depuis été signée—ou elle me dit qu'elle
m'appuiera.
Vous savez, dans notre métier il y a beaucoup de hauts et de bas, de controverses, d'émotions et d'activités extrêmes. Une fois que la poussière est retombée, ce qui nous intéresse, c'est le résultat: le criminel a-t-il été arrêté? Les gens honnêtes sont-ils en sécurité? Des policiers ont-ils été blessés? Et ainsi de suite. C'est de ce point de vue que j'envisage la situation ce matin. Pour quelque raison que ce soit, la communication s'est rompue, et, pour quelque raison que ce soit, je suis venu ici ce matin prêt à tout pour défendre ce principe. Évidemment, heureusement ou malheureusement, selon votre point de vue, la situation a fait les manchettes.
Je crois que tous les membres du comité ici présents nous ont déjà entendus. Quand il s'agit d'enjeux comme celui-ci, ce qui compte, ce n'est pas de gagner. Il faut faire ce qui doit être fait, et non pas tenter de gagner. J'ai maintenant les garanties que je voulais. Nous avons l'intention d'y donner suite et de nous assurer qu'on ne les oublie pas. Lorsque le système sera en place, j'en serai ravi, comme le seront mes collègues, parce que, lorsque nous devons nous rendre sur les lieux de l'incident où il y a une arme à feu, si toutes les informations nécessaires ont été entrées dans le système, nous savons que c'est une situation où il y a une arme à feu qui pourrait blesser des gens, que ce soit des policiers ou non.
Je termine là-dessus. D'après ma longue expérience... Je n'aime pas qu'on fasse les choses ainsi, mais ce sont les résultats qui comptent, la protection du public.
Il est malheureux que le 14 ou le 15 novembre 1997, lorsque j'ai écrit à la ministre, elle n'ait pu me répondre sans délai. Bien sûr, nous tiendrons compte de l'information qui vient de nous être fournie. Je vous remercie de votre attention.
La présidente: Merci. Devez-vous partir dès maintenant?
Le sergent-détective Neal Jessop: Je peux peut-être rester encore 10 minutes.
La présidente: Je suis certaine que vos collègues peuvent très bien répondre à nos questions.
Le sergent-détective Neal Jessop: Je n'en doute pas.
La présidente: Je tente de vous faciliter les choses, car vous êtes de Windsor.
M. Scott Newark (directeur général, Association canadienne des policiers): Il a rendez-vous avec un ministre de la Couronne.
Le sergent-détective Neal Jessop: Merci.
La présidente: Merci beaucoup.
Monsieur Ramsay, vous avez huit minutes.
M. Jack Ramsay: Merci, madame la présidente. Je remercie les témoins d'être venus. Étant un ancien policier, j'hésite toujours à tirer des conclusions qui ne sont pas fondées sur des faits et des preuves solides, et je garde l'esprit ouvert, car d'autres preuves peuvent se présenter qui pourraient modifier mes conclusions.
Je suis très préoccupé par le fondement même du projet de loi C-68, le système d'enregistrement. Si nous créons un système d'enregistrement qui servira aussi de système d'identification, les policiers doivent pouvoir compter sur les informations qu'il contiendra. Toutefois, le système d'enregistrement qu'on mettra en place et qu'on appelle aussi un système d'identification contiendra des informations non vérifiées, ce qui m'inquiète beaucoup.
• 1045
Un système d'identification non fiable peut-il donner les
outils dont a besoin la police? C'est cela la question.
Je répète que d'après les témoignages que nous avons entendus, du moins de la GRC et des contrôleurs des armes à feu, le système tel qu'il est organisé recevra des quantités d'informations. Celles-ci n'auront pas été vérifiées et ne seront donc pas fiables, ce qui est dangereux à la fois pour la police et pour le grand public et compliquera le maintien de l'ordre. Voilà ce que nous a dit le contrôleur des armes à feu.
Comme nous n'avons pas beaucoup de temps, je ne reviendrai pas sur le témoignage présenté par le sous-commissaire de la GRC, mais cela revenait à peu près à la même chose. J'aimerais que vous me disiez ce que vous en pensez.
Nous avons maintenant finalement enfin vu le système d'enregistrement. Depuis des années—au moins trois ans—on proposait un système d'enregistrement par la poste qui devait présenter certains avantages. Toute arme à feu serait enregistrée, si bien que ce système pourrait identifier une arme parmi les six à 20 millions qui existaient. Nous constatons maintenant que ce ne sera peut-être pas le cas. Il faut remplir un formulaire comme celui que j'ai ici. Des erreurs sont donc possibles. On peut faire une erreur en remplissant le formulaire ou en versant des informations à l'ordinateur. Il peut y avoir erreur de part et d'autre.
Il n'y a donc pas de vérification tant que l'on ne vend pas l'arme à feu. Personne ne va vérifier les renseignements tant que cette arme n'est pas cédée. Comment la police peut-elle s'en remettre à...? Un agent supérieur de la police a déclaré que tant qu'il n'y aurait pas de vérification ce système ne donnerait pas les résultats que l'on nous promet depuis trois ans au ministère de la Justice, ne permettrait pas à la police de mieux faire son travail.
Sgt Gerald Pyke (Service de police de Vancouver): Vous avez soulevé un certain nombre de points intéressants. Étant nous aussi utilisateurs du système, nous avons examiné ce problème. Une des choses que nous avons dites au nom de l'Association canadienne des policiers, au début, c'était que nous devions pouvoir trouver l'adresse de la personne qui fait enregistrer des armes à feu, qu'il s'agisse d'un particulier ou d'une entreprise. La vérification est un élément essentiel du processus.
La vérification comporte plusieurs éléments. D'une part, l'exactitude des renseignements que nous recevons. Deuxièmement, l'importance de ces précisions pour le policier de patrouille. Par exemple, à Vancouver, si je réponds à un appel en cas de violence familiale contre un homme ou une femme—et je préciserais que nous déplorons toute violence au Canada, que la victime soit un homme ou une femme—c'est dans tous les cas inacceptable.
Si, par exemple, l'inexactitude de ces renseignements fait que je n'ai à ma disposition que le numéro de série de l'arme de poing dont est propriétaire cet individu et avec laquelle il menace ou blesse sa partenaire... Si c'est simplement une erreur dans le numéro de série, je ne pense pas que le problème pourrait mettre en danger le policier ni quiconque qui répondrait à cet appel. Toutefois, si c'est l'adresse qui est inexacte ou si la personne a indiqué exprès de fausses adresses, le problème devient très sérieux pour les services de police.
Un pourcentage énorme de la population canadienne va obéir à la loi. S'il y a des erreurs dans la transcription de numéros de série, etc., ces erreurs seront un jour ou l'autre corrigées.
Deuxième point à propos de la vérification, je ne pense pas que cela doive commencer en 2003. Il faudrait au contraire commencer dès la date d'entrée en vigueur, le 1er octobre, si c'est à ce moment-là que cela se passe. Le processus doit débuter immédiatement.
M. Jack Ramsay: Êtes-vous favorables au système d'enregistrement par la poste, sachant les problèmes que pose la vérification? Évidemment, personnellement, je croyais que la raison pour laquelle on envisageait un système d'enregistrement par la poste était économique. S'il faut venir avec ses armes d'épaule comme avec ses armes de poing—et comme on le faisait ces 60 dernières années pour les enregistrer—cela va coûter environ 82 $ pour l'enregistrement de chacune de ces armes à feu.
L'idée était de limiter les coûts. Toutefois, avec le système d'enregistrement par la poste, il y a le problème de la vérification. J'ai une arme à feu que j'enregistrerai, mais cela ne sera jamais vérifié. Les renseignements que j'ai sur cette arme à feu ne seront jamais vérifiés, parce que je ne vendrai pas l'arme en question. Je vais la garder. C'est un souvenir. Je l'ai eue alors que j'étais enfant. Je ne la céderai jamais.
Il n'y aura donc pas de vérification. Je suppose que ce sera le cas pour beaucoup de propriétaires d'armes à feu au Canada. On va donc avoir un système d'enregistrement et d'identification qui comporte des volumes énormes d'informations non vérifiées.
Les experts légistes des laboratoires que je suis allé visiter avant que nous n'entamions l'étude du projet de loi C-68 m'ont dit que ce serait un fouillis indescriptible. Quand je leur ai demandé de m'expliquer pourquoi, ils m'ont dit que les agents de police et les contrôleurs d'armes à feu déclarent que l'on peut enregistrer quelque chose que l'on n'inspecte pas.
Sgt Gerald Pyke: Je reviendrai sur la question de la vérification. J'accepte que vous ayez une arme à feu qui ne sera peut-être jamais vérifiée. Elle le sera tout de même un jour, que ce soit après votre mort ou parce que vous finirez par la céder à quelqu'un d'autre, peu importe.
Le plus important dans ce que vous dites, c'est que l'inexactitude de ces renseignements ne dérangera pas nécessairement l'agent de police. Je n'ai peut-être pas vérifié exactement le numéro de série de votre arme à feu. Le plus important, pour moi, c'est que nous savons que cette arme à feu existe chez vous ou chez moi. J'ai moi-même quelques armes à feu. Ce qui est important, c'est que l'agent de police puisse avoir accès à cette information.
Je conviens avec vous que la raison pour laquelle nous avons un système postal à l'heure actuel est purement économique. Il serait impossible, au début, de vérifier pratiquement toutes les armes à feu une par une. Il y a des gens qui vivent dans des régions isolées, ou même dans des villes, et qui devraient faire des centaines et des centaines de kilomètres en voiture ou en avion pour faire inspecter et vérifier ces armes, ou alors il faudrait envoyer du personnel sur place.
M. Jack Ramsay: Donc, vous ne vous inquiétez pas de la fiabilité du système.
Sgt Gerald Pyke: Cela ne m'inquiète pas lorsqu'il s'agit d'erreurs mineures dans la transposition des numéros de série. Ce qui m'inquiète, ce sont les gens qui essaient de tout faire pour que le système ne marche pas en donnant délibérément des informations fausses. C'est cela le problème pour les agents de police.
M. Scott Newark: Puis-je également ajouter quelque chose? Vous avez tout à fait raison: chaque fois que l'on a un système d'auto-déclaration, qu'il s'agisse d'armes à feu ou de n'importe quoi d'autre, les données ne sont pas vérifiées par un tiers.
Ce qu'essaie de dire le sergent Pyke, c'est que même si tout n'est pas parfaitement exact, cela ne compromet pas l'intérêt général du système d'enregistrement des armes à feu.
Il y a pour moi quelque chose de plus important. Tout ce processus permet une certaine identification. Ce ne sera pas aussi simple qu'on a essayé de nous le faire croire. Ce ne sera pas aussi utile que nous aurions tous espéré que ce le serait.
Il va falloir constamment essayer de parvenir à équilibrer le coût, la fiabilité, les inconvénients, l'exactitude des renseignements et la nature des renseignements enregistrés. Je suis sûr qu'il y a des tas de choses que nous allons découvrir au fur et à mesure.
C'est la raison pour laquelle, du moins pour nous, il est d'autant plus impératif que nous sachions exactement comment le ministère va créer cette structure, et que le pouvoir exécutif reconnaisse l'importance de ces questions et ne les laisse pas de côté pendant trop longtemps.
• 1055
C'est un peu ce dont nous discutions, monsieur Ramsay, il y a
quelques semaines, à propos de la Cour suprême du Canada. C'est
impossible de savoir exactement ce qu'il en sera. Il y a là des
variables qui défient ce genre de définition. L'important, à mon
avis, c'est que nous restions tous toujours très attentifs aux
avantages et aux inconvénients que présente le système que nous
sommes en train de créer et que nous restions honnêtes dans notre
appréciation.
M. Jack Ramsay: Merci.
La présidente: Monsieur Bellehumeur.
[Français]
M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Je voudrais d'abord vous remercier d'avoir déposé votre mémoire dans les deux langues officielles. Vous avez compris le message la dernière fois.
Deuxièmement, j'ai écouté votre président et j'ai lu en diagonale le mémoire que vous déposez, entre autres les points 2 et 3. Est-ce une idée que je me fais ou si votre président et votre association semblent moins enthousiastes quant à l'application de la loi? Je vous ai entendus au sujet de C-68. Vous l'aviez appuyé et vous étiez optimistes. Vous aviez entre autres des engagements du ministre de la Justice de l'époque. Aujourd'hui vous me semblez moins optimistes par rapport à son application.
Entre autres, vous dites dans le paragraphe 2:
-
Jusqu'à ce qu'on confirme que tous les coûts
d'enregistrement d'armes à feu seront défrayés par le
gouvernement fédéral, la justification de cette
priorité demeurera suspecte dans le cadre d'un tel
programme.
Par la suite, vous parlez même de certaines choses au niveau de l'information que les policiers devaient avoir. Dans le système, on assurait que les policiers étaient capables d'avoir l'information nécessaire lorsqu'ils arrivaient à une adresse. Ils pouvaient savoir si, par exemple, le propriétaire de tel édifice avait des armes à feu. Vous semblez mettre cela en doute dans votre mémoire. De plus, vous dites dans votre mémoire, et votre président le dit verbalement, qu'après avoir écrit au ministre de la Justice les 14 et 15 octobre dernier, vous n'avez pas les réponses à ces questions-là.
Ai-je raison de penser que vous semblez moins optimistes quant à l'application de cette loi-là, étant donné les remarques de votre président, ce que je lis dans votre mémoire et le silence du ministre de la Justice face aux questions que vous posez?
[Traduction]
M. Scott Newark: La réalité—et je vais prendre un peu de temps pour répondre à cette question; on m'accuse parfois de donner de longues réponses—, c'est que la Loi sur les armes à feu n'était pas pour l'Association canadienne des policiers aussi prioritaire pour la sécurité publique ou la réforme de la justice pénale que la question des délinquants à risque élevé ou certains éléments de la réforme du système de libération conditionnelle, la Loi sur les jeunes contrevenants, les banques de données sur l'ADN, ce genre de choses. Mais le gouvernement est le gouvernement, et nous répondons quand le gouvernement prend une initiative.
Franchement, même si nous ne sommes pas d'accord sur tout, nous pensons qu'il est évident qu'un système d'enregistrement des armes à feu présente un intérêt indéniable pour la sécurité du public et de la police. Nous avons examiné cela de très près. Nous avons analysé la chose. Nous sommes parvenus à certaines conclusions, notamment à propos du financement d'un tel système. Bien qu'il soit utile d'enregistrer les armes à feu, nous ne pensons pas que cela justifie de confier l'administration de ce système à des agents de police, qui ne pourraient plus alors assumer leurs fonctions actuelles en service actif.
Nous avons dit à M. Rock qu'une condition préalable serait que cela ne diminue en aucune façon les budgets actuels de fonctionnement des services de police. Cette condition a été acceptée par le ministre, qui l'a déclaré à notre assemblée, aux médias nationaux, à votre comité, au Sénat.
• 1100
L'autre conclusion portait sur le système lui-même. Ce système
devait pouvoir nous servir à un certain nombre de choses pour que
nous puissions le juger utile. S'il ne pouvait fournir les
informations en question aux agents de patrouille, il ne fallait
pas dire à la population qu'il permettrait de faire certaines
choses, en particulier en ce qui concerne les agents de police.
J'étais dans la salle lorsque le ministre Rock a eu des entretiens avec des fonctionnaires de son ministère et que l'on a découvert une lacune dans la capacité technique du système. J'étais là lorsque M. Rock a dit que le système devait faire ce qu'il avait promis qu'il ferait. C'est une des raisons pour lesquelles je crois que nous avons un groupe d'utilisateurs; c'est pourquoi nous sommes représentés au sein de ce groupe.
Pour nous, ce genre d'engagements est extrêmement important, et vous pouvez le comprendre. Nous avons aussi dû fournir des réponses à nos membres. Nous avons dit: «Écoutez, il s'agit là d'engagements. Ce n'est pas quelque chose que l'on peut mettre dans la loi que de dire qu'on ne diminuera pas les budgets actuels.» Mais c'est ce que nous a dit le ministre de la Justice. Il l'a dit publiquement, et nous le croyons. J'ai souvent dit aux gens qui ne sont pas d'accord avec nous sur l'enregistrement des armes à feu qu'une partie de notre rôle a été d'essayer de surveiller tout cela pour nous assurer que cet engagement était tenu.
Si donc, monsieur Bellehumeur, vous avez eu l'impression à la lecture de notre mémoire que nous commencions à nous inquiéter sérieusement, c'est parce que nous étions en effet très inquiets lorsque nous avons remarqué dans les règlements... et c'était en fait la première occasion que nous avions de faire des commentaires dans le contexte d'un texte législatif. Comme le disait M. Ramsay, ces règlements commencent maintenant à étoffer un peu ce système d'enregistrement.
Il est évident que certaines choses peuvent coûter cher, notamment à la police. Nous avons donc essayé d'obtenir l'assurance que maintenant que nous avons certains détails, ce n'est pas quelque chose qui va devoir s'ajouter au budget de la police.
Nous savions qu'à la date à laquelle nous allions témoigner nous n'aurions pas reçu confirmation de cette capacité de recherche dans le système. Ce que vous avez dans le mémoire et ce qu'a dit M. Jessop—et ce que nous vous avons dit l'un et l'autre ce matin—c'est que nous ne semblions pas pouvoir obtenir une réponse claire. Certains de nos membres ayant entrepris de surveiller cela, nous nous sommes sentis obligés de le signaler assez rapidement, comme nous avions évidemment l'intention de le signaler à nos membres.
Très honnêtement, ce matin, alors que nous étions ici, nous avons reçu la réponse que nous attendions. Nous en sommes très satisfaits, mais nous savons que nous devons rester un peu plus vigilants pour nous assurer que l'on comprend bien notre priorité. Je serai à nouveau très clair. Si ce système exige que des agents de police ne patrouillent plus les rues, cela ne vaut pas la peine. Deuxièmement, si ce système ne présente pas toute la capacité d'accès aux informations nécessaires aux agents de patrouille, ce ne sera certainement pas aussi efficace que le prétend le gouvernement, et, dans les deux cas, nous considérerions que le gouvernement a renié sa promesse.
Notre intention, en présentant ce mémoire et en continuant à discuter de la question, c'est de nous assurer que le gouvernement comprend bien que c'est là notre priorité.
Voilà une longue réponse à une question assez courte, mais vous avez raison, et nous avons été quelque peu rassurés ce matin.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Mais vous avez encore des incertitudes par rapport aux engagements que le gouvernement avait pris à votre égard. Si je comprends bien, si le gouvernement ne répond pas à 100 p. 100 aux engagements qu'il avait pris, l'application même des règlements qu'on est en train de vérifier est mise en péril. Il faut que le gouvernement réponde à 100 p. 100 à ses engagements pour qu'on ait les règlements les plus beaux et les mieux faits du monde. Si on n'a pas les ressources ou si on n'a pas ce qu'il faut pour les appliquer, on ne pourra pas les appliquer. C'est ce que je dois comprendre. La ministre doit, de façon très claire et le plus rapidement possible, confirmer les engagements de son prédécesseur.
[Traduction]
M. Scott Newark: En effet. Étant donné que nous parlons de questions de police, d'un engagement concernant le financement du système, ce n'est pas quelque chose que l'on peut mettre dans une loi, mais c'est quelque chose que nous espérons... Très franchement, la ministre l'a déclaré, nous l'avons noir sur blanc, et c'est une déclaration que je vais garder au-dessus de mon dossier, et nous espérons que lorsque la ministre comparaîtra ici ou à la Chambre, elle le confirmera à nouveau.
Je puis vous assurer que nous resterons très vigilants, car nous estimons qu'il est essentiel que ce système ne mène pas à diminuer le nombre d'agents de patrouille, mais offre au contraire aux agents la possibilité de faire des recherches en information.
Par exemple, nous avons deux membres au comité des utilisateurs, et il nous faut remplacer quelqu'un à ce comité.
Je puis vous dire qu'ayant vu cela, c'est devenu pour nous une plus grande priorité, précisément du fait des conséquences que cela peut avoir: du point de vue pratique d'une part, et également parce qu'il faut pouvoir compter sur la parole des gens qui s'engagent à quelque chose. Ayant reçu cette lettre de Mme McLellan, nous sommes convaincus que la promesse sera tenue.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Merci. C'est tout, Madame la président.
[Traduction]
La présidente: Merci, monsieur Bellehumeur.
Monsieur MacKay, vous avez huit minutes.
M. Peter MacKay: Monsieur Newark, je dois tout d'abord vous remercier d'avoir pris le temps de venir ici l'un et l'autre, et je vous demanderais si vous ne pourriez pas laisser une copie de cette lettre au comité.
M. Scott Newark: Certainement. C'est une lettre que nous avons reçue ce matin de la ministre.
La présidente: Il faut le consentement unanime pour qu'un document puisse être déposé dans une seule langue.
M. Peter MacKay: Votons.
La présidente: D'accord?
Des voix: D'accord.
La présidente: Vous pouvez la déposer.
M. Peter MacKay: Monsieur Newark, je tiens à nouveau à vous remercier de ce mémoire très complet que vous nous avez remis après un très court préavis.
Il semble que la seule chose qui vous inquiète réellement, c'est l'affectation des ressources, le fait que vous ne voudriez pas que l'on réaffecte des ressources utilisées actuellement pour lutter contre le crime pour mettre en oeuvre cette loi. Est-ce que c'est un problème aujourd'hui, ou est-ce que vous pensez que cela risque de le devenir?
M. Scott Newark: Nous nous en sommes tellement inquiétés lors de la présentation du projet de loi C-68 que nous en avons fait une condition préalable à notre appui, et nous avons reçu un engagement de M. Rock. La lettre qui a été déposée au cours des audiences de ce comité le confirme, et c'est toujours le point de vue du gouvernement du Canada.
Comme M. Bellehumeur, vous avez raison de dire que c'est notre priorité absolue sur ce sujet, car malgré les avantages du nouveau régime, nous pensions, comme l'ensemble de nos membres, qu'il n'y avait pas lieu d'affecter des agents de police à l'application d'un régime réglementaire plutôt qu'à leurs fonctions opérationnelles habituelles. Évidemment, les avantages étaient manifestes, mais dans la mesure où c'était en fait une nouvelle politique fédérale, il aurait fallu y consacrer des ressources supplémentaires au lieu de s'en débarrasser sur la police. Je n'hésite pas à dire que c'est toujours le point de vue de l'ACP.
M. Peter MacKay: Est-ce qu'on peut dire qu'en l'absence de ressources supplémentaires la police serait amenée à retirer des policiers qui travaillent actuellement sur le terrain ou dans la rue pour leur confier des rôles administratifs dans la mise en oeuvre de cette loi?
M. Scott Newark: C'est sans doute davantage un effet de domino, mais ceux qui assument des tâches administratives devront en assumer davantage et se faire aider par d'autres.
À mon sens, il y a indéniablement un rapport de cause à effet, et malgré toute l'imprécision du règlement quant aux fonctions des agents de la force publique, il n'est pas douteux qu'on envisage de leur confier de nouvelles fonctions administratives. En résumé, je réponds oui, voilà ce que nous en pensons.
M. Peter MacKay: Monsieur Newark, connaissant vos antécédents, et comme vous êtes un expert en matière de législation sur l'ADN et en tout ce qui concerne les activités policières au Canada, que pensez-vous de la mise en oeuvre de la présente mesure législative, compte tenu de la démarche gouvernementale visant l'adoption d'une loi sur l'ADN? Ne risque-t-il pas d'en résulter de graves difficultés pour les agents de police et les administrateurs en particulier?
M. Scott Newark: Il n'est pas facile de vous répondre. Compte tenu de ce qu'on envisage dans le projet de loi, j'ai plus de questions que de réponses à vous soumettre.
Vous vous souvenez que lors de la présentation du projet de loi C-68, il était entouré, en quelque sorte, d'un ensemble d'autres mesures législatives fédérales: les mandats de perquisition concernant l'ADN, les délinquants à risque élevé, la réforme de la libération conditionnelle du projet de loi C-45, et le projet de loi C-37 réformant la Loi sur les jeunes contrevenants. En fait, il faisait partie d'un ensemble beaucoup plus vaste de mesures qui, bien franchement, nous paraissaient beaucoup plus importantes pour la sécurité du public et des agents de police que le projet de loi C-68. La plupart de ces mesures ont été adoptées, peut-être pas avec tous les amendements que nous aurions souhaités, mais telle est la réalité.
Notre souhait principal qui reste en suspens concerne les banques de données d'identification par l'ADN.
M. Peter MacKay: Si vous me permettez d'intervenir, vous avez parlé de priorités, et ma question peut paraître injuste, mais du point de vue de la police, dont vous êtes le porte-parole—je suis bien conscient des vastes ambitions du gouvernement dans cette démarche—tout cela est-il bien réaliste? Entre la loi sur l'ADN et la loi visant à éliminer les armes à feu dans les rues, laquelle est susceptible de protéger le plus efficacement les Canadiens et, en particulier, de sauver des vies?
M. Scott Newark: Notre perspective n'a rien de nouveau. Nous l'avons dit dès le départ. J'ai même proposé un jour un autocollant qui disait: «Enregistrez les criminels avant les armes à feu.» De notre point de vue, une banque de données d'identification par l'ADN est beaucoup plus efficace du point de vue de la sécurité publique. Néanmoins, la démocratie est telle que les gens assis de ce côté de la table ont été élus pour former le gouvernement et que leur fonction première consiste à établir les priorités.
Nous ne le contestons pas. C'est pourquoi nous avons répondu à la proposition législative, sans nous contenter de dire que nous n'étions pas d'accord sur le choix des priorités, donc que nous ne voulions pas commenter cette loi. L'enregistrement des armes à feu présente indéniablement des avantages. Notre mission consiste à convaincre le gouvernement d'envisager de temps en temps nos propres priorités, et nous n'y parvenons pas toujours.
Comme il appartient au gouvernement de fixer les priorités comme il l'entend et d'essayer d'obtenir l'adhésion du public, nous rappelons notre demande concernant les banques de données d'identification par l'ADN et nous proposons des solutions pour améliorer l'efficacité du système. C'est un processus continu, et vous devez savoir mieux que moi, monsieur MacKay, comment le gouvernement fixe les priorités, mais nous sommes toujours là pour essayer d'infléchir ces décisions.
M. Peter MacKay: En ce qui concerne les montants en cause, nous savons que l'enregistrement des armes à feu devrait coûter 85 millions de dollars. Ce montant est sans doute déjà dépassé, avant même que le régime ne soit mis en place. Si je comprends bien, un système de banques de données d'identification par l'ADN coûterait beaucoup moins cher que cela.
M. Scott Newark: Oui. J'ai participé aux débats sur la création et la mise en oeuvre d'un tel système, qui devrait coûter beaucoup moins que 85 millions de dollars.
À notre avis, l'avantage d'un système de banques de données d'identification par l'ADN—et c'est là le message de nos recommandations d'ordre législatif—c'est que contrairement à l'enregistrement des armes à feu, qui est d'application très générale, ces banques de données ne visent qu'un groupe précis d'individus au comportement criminel antisocial bien identifié, et les données doivent servir à appréhender spécifiquement les individus en question. C'est tout l'intérêt du système.
Ce que l'on constate en Amérique du Nord, et même dans le monde entier, c'est qu'un grand nombre d'infractions sont commises par un tout petit nombre de délinquants. Lorsqu'on a des outils pour s'en prendre à ce groupe, on note une nette amélioration de la situation.
Depuis le début de ce gouvernement, par exemple, le taux de détention—c'est-à-dire les cas les plus graves qui restent en détention pendant toute la durée de leur sentence—a augmenté. La législation sur les délinquants à risque élevé et sur les restrictions à l'octroi de la libération conditionnelle aux récidivistes violents a été appliquée dans un plus grand nombre de cas, et ce n'est donc pas par hasard que le taux des crimes violents les plus graves a diminué.
Nous affirmons que les banques de données d'identification par l'ADN pourraient produire des résultats tout aussi positifs. Il n'en demeure pas moins qu'un régime d'enregistrement des armes à feu permettra d'améliorer la sécurité pour le public et pour les agents de police. Mais nous considérons de notre devoir de dire qu'à notre avis un système de banques de données d'identification par l'ADN serait plus rentable.
• 1115
Cependant, des députés ont été élus pour former le
gouvernement, et c'est ainsi que le système fonctionne.
M. Peter MacKay: Votre système vise les criminels, et non pas l'ensemble du public, n'est-ce pas? Il coûte donc moins cher et pourrait donc être mis en place plus rapidement et à moindre coût que l'enregistrement des armes à feu.
M. Scott Newark: C'est exact, bien que le système d'enregistrement des armes à feu fasse partie d'un ensemble plus vaste de mesures qui comprennent l'élagage et l'amélioration des dispositions du Code criminel en matière de procédures et de sanctions. On ne peut pas considérer l'enregistrement des armes à feu hors contexte. De façon générale, je dois reconnaître—et je suis certain que tout le monde ne sera pas d'accord avec moi—qu'à mon avis, en plus des renseignements qu'il fournira sur les détenteurs d'armes à feu, ce système aura aussi l'avantage de bien indiquer à quel point les professionnels de la justice pénale, que ce soit les agents de police, le ministère public, les magistrats, les juges des cours d'appel, prennent au sérieux les armes et les incidents impliquant des armes à feu.
D'ici une génération, les incidents impliquant des armes à feu seront considérés comme beaucoup plus graves, ce qui devrait se traduire par une amélioration de la sécurité publique, mais évidemment, ce n'est là que pure conjecture de ma part.
Dans les poursuites auxquelles j'ai participé, notamment pour un incident impliquant l'utilisation d'une arme à feu, ce n'était pas le cas. En décidant de consacrer des ressources, du temps et de l'énergie à l'enregistrement de toutes les armes à feu, la société indique qu'elle prend le problème très au sérieux, comme elle doit le faire.
La présidente: Monsieur McKay.
M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Pour en revenir au sujet de ce matin, à savoir les règlements, j'aimerais revenir à la page 3 de votre mémoire, où il est question de l'article 17, qui prévoit une infraction relative aux dispositions de l'article 4 concernant l'entreposage des armes; vous vous opposez à cette mesure.
Selon moi, ce règlement prévoit une infraction dans le cas du policier ou du service de police récalcitrant qui n'accepterait cette loi qu'à contrecoeur. Pouvez-vous nous préciser le sens de votre objection?
M. Scott Newark: Je ne suis pas certain qu'il en soit ainsi, mais supposons que la mesure vise, comme vous le dites, un service de police récalcitrant; il faut savoir qu'un service de police est un organisme paramilitaire et que si un supérieur impose une installation d'entreposage à un policier, celui-ci devra l'utiliser, mais il est inconcevable que ce policier engage sa responsabilité personnelle s'il exécute les ordres et qu'il place son arme dans un endroit décidé à cette fin par la direction. Je ne parle pas d'un cas de refus d'appliquer la loi. Il est difficile de faire la part de la responsabilité personnelle face à une décision prise par la direction du service de police.
M. John McKay: Le problème concerne donc l'attribution de l'infraction à la personne plutôt qu'au service ou...
M. Scott Newark: Oui.
M. John McKay: D'accord. C'était donc le sens de votre objection.
Vous avez également formulé une objection à l'encontre du délai de 30 jours. Que dites-vous à ce sujet? Vous considérez sans doute que ce délai est trop court.
M. Scott Newark: Oui. En fait, il y a eu un processus évolutif. Vous remarquerez que nous disons ensuite qu'il va falloir consulter les organismes visés, mais nous indiquons clairement que les frais d'administration supplémentaires... Nous voulons attirer l'attention sur ce problème, car, compte tenu de la nature des exigences administratives et en fonction, au départ, de l'identité des propriétaires des armes à feu, ce délai de 30 jours risque de créer un volume considérable de paperasse, et nous aimerions nous réserver le droit de demander une prolongation.
Nous n'avons pas eu l'occasion de solliciter l'opinion des plus gros organismes. Nous indiquons simplement que vous pourriez considérer ce problème avant de faire vos recommandations.
M. John McKay: Le problème concerne peut-être la période de lancement du système, où les demandes d'enregistrement vont affluer en grand nombre, puis l'afflux des demandes va se régulariser par la suite.
M. Scott Newark: Mais on a prévu de les répartir dans le temps par roulement, n'est-ce pas?
M. John McKay: Oui.
M. Scott Newark: En fait, je pense que c'est une question de détail. Cela ne devrait pas empêcher...
M. John McKay: Vous n'en faites pas une question sine qua non.
M. Scott Newark: Vous avez raison. Il y a plusieurs points sur lesquels nous n'avons pas d'opinion catégorique.
Vous pouvez également consulter les services de police des grandes villes, car ce sont eux qui risquent de faire face à un volume important de demandes.
M. John McKay: Vous pourrez sans doute me faire savoir ultérieurement si vous avez de sérieuses réserves à ce sujet...
M. Scott Newark: Oui.
M. John McKay: ...car nous tenons à éviter toute difficulté imputable à une inadvertance.
Ma dernière question est d'ordre plus général. Nous avons entendu parler tout à l'heure de trafic d'armes à feu, de gens qui vendent des armes à feu qu'ils transportent dans le coffre de leur voiture sans que la police intervienne. Apparemment, de telles opérations se déroulent en présence de policiers qui n'interviennent pas.
En quoi cette loi va-t-elle aider les autorités policières à contrer le trafic d'armes à feu?
M. Scott Newark: Je voudrais faire deux remarques.
La première concerne le trafic d'armes à feu volées. Nous avons recommandé un article qui sanctionnerait le trafic et la contrebande d'armes à feu volées, car c'est un problème grave, et il y avait une disposition à cet effet dans le projet de loi initial. Nous avons accueilli très favorablement cette disposition.
Il est assez évident... M. Ramsay a raison de parler de l'exactitude de l'information, mais il est toujours plus facile d'apporter des preuves lorsqu'on a un numéro d'identification. Avec ce numéro, il est plus facile de prouver qu'on est en présence d'un bien volé que si l'on doit s'en remettre à une description générique.
J'ai entendu le témoignage dont vous parlez, mais il me semble que c'est davantage un problème de volonté d'agir qu'un problème imputable à la loi en tant que telle. En ce sens...
M. John McKay: C'est défier la loi intentionnellement.
M. Scott Newark: Et c'est sans doute dû au fait que les autorités policières ne sont pas déterminées à appliquer la loi.
Nous avons déjà abordé ce sujet à propos de la protection de nos frontières et de la contrebande, mais en réalité, je ne suis pas en mesure de vous fournir une réponse intelligente à ce sujet dans l'immédiat. Je n'ai pas étudié ce problème.
Je ne sais pas si Gerry a quelque chose à ajouter de la part du groupe des utilisateurs.
Le sergent Gerald Pyke: Le problème est celui de la contrebande et des armes volées.
M. John McKay: Nous avons entendu plusieurs témoignages concernant les risques d'erreur dans les formulaires.
Vous avez bien indiqué que lorsqu'on vous appelle pour une querelle domestique, vous voulez au moins savoir s'il y a un fusil dans la maison. Peu importe qu'il corresponde exactement au numéro, ni qu'un ou deux chiffres ne soient pas exacts; au moins, vous saurez qu'il y a une arme dans ce domicile, alors qu'actuellement, vous ne le savez pas.
Pensez-vous à d'autres problèmes qu'il conviendrait de résoudre en ce qui concerne les conséquences pour l'administré des renseignements erronés qui peuvent figurer sur la demande d'enregistrement? J'attire votre attention sur le fait qu'en vertu de la Loi sur les sûretés mobilières de l'Ontario, toute erreur dans le document d'enregistrement a des conséquences très graves et peut notamment invalider les documents de sécurité fondés sur un tel enregistrement.
À part le risque d'induire un officier de police en erreur dans un très petit pourcentage de cas, les erreurs dans les renseignements fournis peuvent-elles avoir d'autres conséquences graves?
Le sergent Gerald Pyke: Pour le groupe des utilisateurs, nous avons parlé de l'intention délibérée à propos de l'intention trompeuse ou de la présentation délibérée de faux renseignements dans un formulaire de demande. Comme on utilise le mot «délibérée», il faut considérer l'intention. S'il y a intention délibérément trompeuse, les sanctions prévues au niveau fédéral s'appliquent, mais quant à la validité de l'enregistrement, je ne sais pas quelle est la réponse.
M. Scott Newark: Ce n'est pas comme dans le cas du système Torrens Title, où le titre existe...
M. John McKay: C'est exact.
M. Scott Newark: Je n'en suis donc pas certain.
En fait, c'est là l'une des autres conditions à notre appui à ce projet de loi, et dont nous n'avons pas encore parlé. Au départ, le non-respect des exigences d'enregistrement constituait spécifiquement une infraction au Code criminel. Compte tenu de l'orientation de vos questions, je dois vous dire que nous avons proposé d'en faire aussi une infraction au règlement d'application sur la Loi sur les armes à feu. Comme il s'agit du non-respect d'un règlement, il n'est pas indispensable d'invoquer le Code criminel.
M. John McKay: La Couronne devra donc prouver l'intention de l'auteur de la demande erronée.
M. Scott Newark: C'est exact, mais la police conserve la possibilité de porter des accusations pour infraction au règlement d'application de la Loi sur les armes à feu, par exemple dans le cas d'une personne qui enfouit une arme dans son jardin car on veut éviter d'avoir à appliquer le Code criminel. C'était l'une de nos conditions, et M. Rock a modifié le projet de loi pour nous donner satisfaction.
La présidente: Merci, monsieur McKay.
Une courte question, monsieur Maloney.
M. John Maloney: En ce qui concerne le numéro d'identification d'une arme à feu, vous semble-t-il très important qu'il soit visible, comme l'exige la loi? Est-ce qu'il pourrait figurer sur la carcasse ou sur la boîte de culasse, et pensez-vous que les exceptions prévues dans le règlement sont suffisantes?
Le sergent Gerald Pyke: En tant que membre du groupe des utilisateurs, je considère qu'à l'étape initiale d'une enquête de police, il n'est pas essentiel que l'officier de police sache d'avance où il va trouver le numéro de série ou le numéro d'identification de l'arme à feu. Il pourra le trouver plus tard en cours d'enquête, mais il n'est pas indispensable, pour le succès de l'enquête, qu'on puisse immédiatement trouver ce numéro.
M. John Maloney: Est-ce qu'il est préférable de le voir, est-ce important?
Le sergent Gerald Pyke: Ce n'est préférable que dans la mesure où l'on peut vérifier si le numéro de série ou le numéro d'identification de l'arme correspond bien à celui des formulaires d'enregistrement. Autrement, on peut être amené à démonter la poignée ou le mécanisme pour trouver ce numéro.
M. John Maloney: Merci.
La présidente: Merci, monsieur Maloney.
Madame Bakopanos, avez-vous une question?
Mme Eleni Bakopanos: Merci, madame la présidente, je serai brève.
Je voudrais obtenir une précision, car je ne suis pas dans la police. Est-il vrai qu'une banque de données d'identification par l'ADN permettrait d'identifier certaines catégories d'éléments criminels dans notre société...? Non? Comme je l'ai dit, je ne suis pas de la police. Puis-je terminer ma question?
Une voix: Oui, excusez-moi.
Mme Eleni Bakopanos: Est-ce que vous visez deux groupes différents? Vous avez dit tout à l'heure, monsieur Newark, que cette mesure n'est qu'un élément de l'ensemble de la politique gouvernementale en matière de prévention de la criminalité. C'était effectivement l'objectif du gouvernement, et on va apporter d'autres changements au Code criminel. Je crois savoir que la banque de données d'identification par l'ADN fait partie de l'ensemble.
Ce que je veux dire, c'est que face aux problèmes de la violence en milieu familial, les données sur l'ADN n'aideront pas les policiers à faire leur travail. Ce qu'il faut savoir, comme l'a dit tout à l'heure un de mes collègues, c'est s'il y a une arme dans le domicile où la police doit intervenir. Il faut que l'agent de patrouille sache s'il y a une arme à cette adresse. Est-ce que l'ADN est véritablement spécifique à une partie de la population que vous visez en particulier?
M. Scott Newark: De façon générale, j'aurais tendance à répondre oui.
L'ADN ne vise aucune catégorie particulière. On peut s'en servir pour retrouver les auteurs d'un meurtre ou d'un viol qui ont laissé des traces derrière eux. L'ADN peut être très utile pour résoudre les crimes les plus graves. C'est pourquoi nous avons même recommandé—et je sais que je m'écarte ici du sujet—que les échantillons soient prélevés au moment de l'arrestation, et non pas au moment de la condamnation. Sinon, on laisse une grande brèche dans le processus.
Mais vous avez tout à fait raison, et il est vrai de dire que la législation sur les armes à feu présente un avantage différent de celui qui découle de la législation sur les délinquants à risque élevé ou sur les jeunes contrevenants. La sécurité publique et la réforme de la justice criminelle sont beaucoup trop complexes pour ne nécessiter qu'un projet de loi visant un objectif spécifique. Notre évaluation est sans doute subjective, mais nous considérons qu'il serait préférable, dans l'intérêt général, d'agir autrement; cela ne veut pas dire pour autant que le système d'enregistrement des armes à feu ne présente aucun intérêt, bien au contraire, en particulier dans les circonstances dont vous parlez.
Il appartient au gouvernement de définir ses priorités, mais une fois qu'elles sont définies, elles restent entourées par d'autres initiatives. Il est tout à fait vrai que l'avantage qui découle de l'enregistrement des armes à feu ne peut être obtenu par aucune autre initiative gouvernementale, si louable soit-elle.
Mme Eleni Bakopanos: Merci beaucoup.
La présidente: Merci beaucoup. Nous allons passer à la suite, puisque nos témoins suivants sont prêts.
Merci, monsieur Newark, monsieur Pyke et monsieur Jessop.
La présidente: Nous reprenons la séance. Nous recevons maintenant Neil McLeod, chef accessoiriste de la société Six Angles Productions Incorporated.
Est-ce bien votre titre exact?
M. Neil McLeod (maître accessoiriste, Six Angles Productions Inc.): Mon poste est appelé «maître accessoiriste», ce qui est peut-être au-dessus du chef accessoiriste.
La présidente: Nous devions avoir un représentant des techniciens de la production de longs métrages en studio, cellule 891. Est-ce que vous représentez...
M. Neil McLeod: Oui, je les représente également. Je suis membre de cet organisme.
La présidente: Monsieur McLeod, merci tout d'abord de vous être déplacé. Deuxièmement, je vous prie de nous excuser pour notre retard. Nous essayons de cumuler la rédaction de notre rapport et l'audition des témoins, ce qui occasionne parfois quelques problèmes. Vous m'excuserez de vous accueillir en retard.
Nous vous écoutons. Dites-nous ce que vous avez à dire. Ensuite, mes collègues vous poseront des questions.
M. Neil McLeod: Merci.
Je suis maître accessoiriste dans l'industrie du film en Colombie-Britannique. À l'occasion, je travaille également dans l'État de Washington. Je travaille dans le domaine du spectacle depuis 28 ans. J'ai participé au tournage de longs métrages, de films d'actualité, de séries télévisées et de films d'action où toutes sortes d'armes à feu étaient utilisées. J'étais le spécialiste des armes de guerre lors du tournage de Légende d'automne avec Anthony Hopkins et Brad Pitt, où...
La présidente: Un film formidable.
M. Neil McLeod: Qui a dit «un film formidable» après que j'ai prononcé le nom d'Anthony Hopkins? Personne, sans doute.
Si vous avez vu ce film, on y voyait une séquence qui mettait en présence 750 soldats canadiens et 350 soldats allemands, tous équipés des armes et des uniformes de l'époque.
C'est la troisième fois que je comparais devant un comité parlementaire à propos des règlements d'application du projet de loi C-68. Je représente les accessoiristes de l'industrie du cinéma de Colombie-Britannique, Six Angles Productions, ma propre compagnie spécialisée en accessoires historiques et qui loue des armes à d'autres sociétés de production, et j'interviens également en tant qu'homme d'affaires et père de famille.
J'ai regroupé mes commentaires en cinq catégories. La première concerne l'ensemble de la loi et des règlements proposés ainsi que leurs conséquences pour l'industrie du cinéma.
Tout d'abord, je voudrais dire que le CFC... à mon avis, nous avons beaucoup de chance d'avoir l'aide de personnes intelligentes et énergiques qui tentent de déchiffrer les formules très complexes de ce projet de loi, qui va poser de grandes difficultés d'application.
Le projet de loi C-68 aura des conséquences considérables pour l'industrie du cinéma et pour ses accessoiristes, qui sont responsables des armes à feu. À cause des nombreux changements de procédure, des permis, des licences et des enregistrements, il va falloir consacrer beaucoup plus de temps et d'efforts à remplir des formules et à téléphoner à divers endroits, la production va s'en trouver ralentie et il va falloir régler tous les problèmes d'interprétation juridique des différentes exigences du tournage. Nous essayons de protéger et de favoriser cette industrie en croissance en préservant son efficacité et sa compétitivité par rapport aux autres industries cinématographiques du monde entier.
Les membres de la section locale 891 de l'Association internationale des techniciens de longs métrages ont décidé de travailler à titre individuel et collectif afin d'obtenir que le libellé des règlements nuise le moins possible à l'industrie.
• 1155
Nous aurions pu abandonner la partie, hausser les épaules et
dire aux représentants des studios cinématographiques et des
sociétés de production, étrangères et nationales: «Ce sont les lois
sur les armes à feu du Canada. Lors de l'adoption de ce projet de
loi, on n'a pas tenu compte de votre industrie et de vos
investissements, mais maintenant, vous devez respecter ces nouveaux
règlements, quels qu'ils soient».
Lorsque nous avons étudié la loi, nous avons pensé qu'à sa lecture, ces entreprises seraient saisies de panique et partiraient nombreuses emportant tout leur argent. Nous avons donc choisi de tenter de voir comment adopter la loi à leurs besoins afin de nous permettre de continuer à travailler et à fonctionner. Jusqu'à présent, tout ce que nous avons réussi à faire, selon le projet de règlement, c'est-à-dire ce que nous avons tous, ici, sous les yeux, c'est un régime d'enregistrement qui assujettit tous ceux qui sont responsables du maniement d'armes à feu dans des films et des théâtres, tous les membres de nos familles et leur famille à un examen intensif ainsi qu'à des systèmes de sécurité et de permis sans parler de la possibilité de commettre un acte criminel suite tout simplement à un malentendu.
Cela peut signifier la nécessité d'inscrire des collections d'armes à feu historiques constituées comme investissement futur dans des inventaires d'entreprises et de se départir d'investissements coûteux auxquels, nous dit-on, nous n'avons plus droit. Cela signifie qu'il faudra consacrer plusieurs heures par semaine à remplir des formulaires, à faire des appels téléphoniques, à consulter des chiffres, etc., simplement pour transporter régulièrement de la marchandise. Cela signifie des droits annuels pour les permis qu'on pourra ou non récupérer puisqu'il se peut que l'on n'utilise pas d'armes à feu dans un film pendant deux ou trois ans. C'est ainsi dans notre industrie. Pourtant, chacun devra obtenir un permis au cas où il ou elle aurait l'occasion de travailler dans un film dans lequel on utilise des armes à feu.
Encore plus incroyable cependant, c'est qu'il semblerait que nous avons accepté d'ouvrir nos vies personnelles et celles de nos conjoints et enfants, nos états financiers, nos bilans de santé, nos relations professionnelles et la sécurité de nos foyers et relations à l'examen de tout agent responsable de l'application de la Loi sur les armes à feu pour dissection, enregistrement ou partage avec d'autres, selon son bon plaisir.
Il nous apparaît étrange que le gouvernement, au lieu de venir nous dire: «Félicitations. Vous avez construit une industrie qui vaut 2 milliards de dollars en 15 ans. Vous vous y connaissez. Est-ce qu'il y a quelque chose que nous pouvons faire pour vous aider à mieux réussir encore?», semble plutôt nous dire: «Nous avons mis en place une loi qui changera toute votre vie et celle de vos familles, voisins, et certainement vos relations avec nous. Voici ce que vous devez faire pour éviter d'être considérés comme des criminels».
Je ne veux pas dire qu'on ne nous a pas consultés. Nos lettres au ministre Rock avant et peu après le dépôt du projet de loi ont donné suite à un dialogue avec le ministère de la Justice avant la dans les inventaires des entreprises ou céder des investissements coûteux auxquels, nous dit-on, nous n'avons plus droit, création du Centre canadien des armes à feu. Le ministère s'est montré très intéressé par notre réaction et nos besoins et a travaillé avec une grande diligence à rédiger des règlements qui respectent les définitions de la loi tout en en réduisant l'incidence négative sur notre industrie. Nous lui en sommes tous très reconnaissants.
Je tiens toutefois à souligner qu'en ce qui concerne les répercussions du projet de loi C-68, dans notre industrie, on est très déçu et pessimiste face à l'avenir. Le libellé de la loi est tel qu'il est quasi impossible de prédire quelle réglementation pourrait être imposée à l'avenir et par conséquent, nous ne savons pas comment nous pourrons faire face à des changements imprévisibles. Nous pensons que nous devrons consacrer du temps et de l'argent à interpréter, sans fin, de nouveaux règlements et à tenter de nous y adapter alors que ce qu'il nous faut vraiment, c'est l'appui du gouvernement, pas nécessairement sur le plan financier, mais sur le plan de la réglementation.
Dans l'industrie, ne vous y trompez pas, nous admettons tous que nous avons la responsabilité de ne pas confier d'armes à des agresseurs. Nous travaillons, depuis 15 ans maintenant, avec nos CAF en vue d'élaborer des procédures de sécurité qui vont au-delà de toutes les normes prévues dans des lois. Nous avons également mis en place des procédures de maniement et d'entreposage sécuritaires pour les armes et nous insistons pour que quiconque manie des armes à feu, d'autres types d'armes ou d'engins dangereux, y compris les réalisateurs, les producteurs et leurs adjoints, connaissent ces procédures et les suivent.
Nous réalisons actuellement un vidéofilm de formation, en collaboration avec les membres du Justice Institute on Safe Handling Security of Firearms. On utilisera ce vidéo dans le cadre d'un cours de deux heures, niveau 1, à l'intention de tout le personnel du plateau concerné par les armes ou le tir d'arme—évidemment le tir à blanc.
• 1200
Nous irons même jusqu'à préparer des cours de niveaux 2 et 3
à l'intention des hommes et des femmes responsables des accessoires
qui auront ainsi le choix du niveau de formation qu'il leur faut
pour être admissibles à des permis de divers niveaux. Nous figurons
sur la liste des utilisateurs autorisés d'armes à feu. Les chiffres
révèlent que nous avons fait nos preuves dans la surveillance, la
réglementation et la formation de nos membres. Mais nous sommes
inquiets cependant lorsque nous voyons la réglementation et les
coûts auxquels nous, dans cette industrie, et la population
canadienne faisons maintenant face pour nous conformer à cette loi.
J'ai plusieurs commentaires sur des questions plus précises.
D'abord, la question des répliques. C'est l'une de nos plus grandes préoccupations. Dans notre industrie, on ne peut fonctionner sans utiliser des répliques sans danger d'armes réelles. J'ai déjà parlé de cette question lors de séances précédentes et le CCAF s'est penché là-dessus.
Nous estimons que les règlements seront applicables pour l'essentiel, à une exception près. Les répliques de divers produits sécuritaires sont fabriquées sur place; par exemple, les répliques en caoutchouc d'armes réelles. Toutefois, les répliques en métal ou en plastique dur sont en général importées de fabricants à l'étranger. Je n'ai rien trouvé dans les règlements quant à la procédure pour importer de nouvelles répliques.
Nous recommandons qu'aucune procédure plus stricte ne soit imposée que celle qui existe actuellement pour l'importation des autres articles interdits destinés à être utilisés dans des films ou au théâtre.
Structure et procédures d'enregistrement: parlons d'abord du droit acquis qui touche les armes de poing. Certains ici se rappelleront peut-être ce que j'ai dit lors de deux comparutions précédentes devant les comités de la Chambre et du Sénat, à savoir que l'interdiction qui frappe les armes de poing à canon court et celles de petit calibre, qui ont des droits acquis et qui sont décrites au paragraphe 12(6) de la loi, représente un grave problème pour notre industrie. Nous avons souligné que si les maîtres accessoiristes n'avaient pas accès à ces armes, cela aurait des répercussions budgétaires énormes sur certains projets cinématographiques. Puisque ces armes ne sont pas, en soi, plus dangereuses que celles à autorisation restreinte, on devrait pouvoir se procurer un permis pour les posséder.
En d'autres termes, nous recommandons la création d'un deuxième niveau de permis afin que certains maîtres accessoiristes puissent continuer à exercer leurs fonctions en choisissant d'obtenir des permis pour posséder certaines armes prohibées sans avoir besoin de l'expertise technique et sans avoir à payer les droits extrêmement élevés associés aux permis pour toutes les armes prohibées.
Avant de nous réunir à nouveau ici, j'ai discuté avec les membres du CCAF, Caroline et Bill... Je vais vous faire part de la confusion qui existe dans nos esprits au sujet du libellé des règlements bien que je sache que pour nous, on a remédié au problème. Toutefois, je vais quand même continuer.
Je n'ai pas eu la possibilité d'obtenir des précisions—j'ai maintenant eu cette possibilité—du CCAF sur les points suivants et nous pouvons peut-être régler ça maintenant.
À la page 61, paragraphe 15 du projet de règlement du mois d'octobre 1997, on fait une distinction entre les armes de petit calibre à canon court et les autres armes prohibées en prévoyant une structure de droit de permis différente. Toutefois le libellé du règlement porte à croire qu'un permis de 400 $ pour fournitures de production cinématographique ne permet que la fourniture d'armes à feu à autorisation restreinte, de dispositifs prohibés et d'armes prohibées. Veut-on interdire ici la possession sous ce permis d'armes de poing de petit calibre à canon court?
De plus, à la page 61, paragraphe 15(b), ne veut-on pas dire: «armes à feu prohibées autres que celles» plutôt que «pour de telles armes» dont il est fait mention au paragraphe 12(6) de la loi?
Nous avions recommandé que l'on fasse une distinction, pour l'industrie cinématographique, outre les catégories de permis afin d'inclure les armes pouvant jouir de droits acquis au premier niveau de permis, c'est-à-dire au niveau inférieur. Je vous exhorte fortement à inclure les armes de poing à canon court, de calibre .25 et .32 au paragraphe 15, page 61, dans la catégorie de permis de 400 $ pour production cinématographique et théâtrale.
Pour de plus amples détails sur l'effet que cette interdiction particulière aura sur notre industrie, je vous renverrai à la page 3 de mon mémoire présenté au Comité des affaires juridiques et constitutionnelles du Sénat, le 6 décembre 1996, dans lequel j'explique les problèmes que cela pourrait éventuellement engendrer. Si cela vous intéresse, je peux vous en donner copie.
• 1205
Ce qui n'est clair ni dans la loi ni dans les règlements, ce
sont les procédures et exigences pour obtenir les divers permis. Je
reconnais que cela est de compétence provinciale et que ces
exigences doivent être déterminées par les CAF, mais je vous
exhorte fortement, à exercer l'influence dont vous disposez afin de
vous assurer que les exigences provinciales ne sont pas
restrictives au point de forcer les gens à abandonner leurs
occupations.
Il est également extrêmement important que les exigences en matière d'avis soient connues bien avant qu'il faille obtenir les permis afin que l'on puisse prendre les dispositions nécessaires. Cette loi ne vise certainement pas à forcer les gens à trouver d'autre travail.
En ce qui concerne le coût des permis, les chefs accessoiristes de la Colombie-Britannique sont d'avis que les 400 $ par année prévus au paragraphe 15 sont trop élevés. Les activités et responsabilités de ces personnes prévues aux termes de l'AAAF qui exigent l'octroi d'un permis qui n'est assorti d'aucun droit, ne changeront pas beaucoup en fonction de cette réglementation. Il nous semble que 250 $ seraient raisonnables.
Considérons les activités incluses au titre des divers permis et droits. Je ne sais pas au juste, d'après ces règlements, si une entreprise devra se procurer plus d'un permis pour s'acquitter de toutes ses activités. Par exemple, le détenteur d'un permis de fourniture pour des productions cinématographiques devra-t-il se procurer un permis supplémentaire pour vendre ou fabriquer des armes à feu ou pour offrir des services d'armurier? Dans l'affirmative, faudra-t-il payer des droits supplémentaires? S'il y a confusion, je vous exhorte à vous assurer que c'est clair pour tous les intéressés.
Songez à imposer des limites à des droits excessifs à l'avenir. On ne semble pas avoir inclus dans la loi ni dans les règlements de limites qui permettent de modifier de façon prudente et ordonnée les droits imposés à l'avenir. Y a-t-il des mesures qui limitent l'augmentation des droits à des niveaux impossibles?
En ce qui concerne l'enregistrement, le numéro d'enregistrement d'armes à feu, le NEAF, pourrait nous créer des difficultés s'il n'y a pas plus de souplesse.
Évidemment, d'autres groupes d'utilisateurs ont exprimé leurs opinions quant à la valeur historique, etc. C'est également l'une de nos préoccupations. La valeur inhérente d'une arme à feu historique représente un investissement considérable qui pourrait être sérieusement compromis en y collant ou en plaçant une étiquette NEAF.
Dans les paragraphes 2 à 5, page 6 du «Guide des projets de règlements relatifs aux armes à feu» ou dit que ces dispositions ne s'appliquent qu'aux armes à feu qu'on possède déjà au moment de l'entrée en vigueur de la loi et aux armes à feu importées pour une courte période seulement et que les fournisseurs de l'industrie cinématographique ne sont pas tenus de marquer les armes à feu lorsqu'ils les importent temporairement aux fins d'une production cinématographique.
On ne s'applique pas à un inventaire permanent ou semi-inventaire. Il n'est pas question de marquer tout un inventaire de fusils des Plaines d'Abraham en y imposant des étiquettes à codes-barres, des étiquettes au laser ou quoi que ce soit d'autre qui soit visible à l'écran. Il n'est pas non plus raisonnable de graver un NEAF de 1999 sur le cadenas, la monture ou le baril d'arme historique.
Nous recommandons que les décisions soient prises, au cas par cas. Si un fournisseur se porte acquéreur de plusieurs armes à feu avec l'intention de les garder de façon permanente, et dans l'éventualité fort peu probable que ces armes ne portent aucun numéro de série, c'est l'acheteur, en consultation avec le directeur qui devrait déterminer comment les identifier. Il faut accorder une certaine souplesse.
Passons maintenant à toutes les procédures et au traitement des demandes. Vu la nature même du domaine cinématographique, où les budgets sont déterminés en fonction du nombre de jours qu'une entreprise cinématographique ou qu'un studio juge nécessaire pour terminer un projet, le temps et les échéances sont toujours rigides. Il est essentiel que l'on traite rapidement les permis, les enregistrements, les permis d'import-export.
Le régime actuel en Colombie-Britannique tient compte des contraintes de temps rigides et est très efficace. Les réalisateurs sont très inquiets qu'avec la mise ne place d'un nouveau régime compliqué qui vise de nombreuses circonstances et où les questions de compétence seront peut-être floues dans bien des régions, tout va s'arrêter et rien n'avancera plus.
Cela serait nuisible à l'industrie cinématographique. Il suffirait d'un arrêt de production pendant quelques jours, à la suite d'un malentendu au moment du traitement d'une demande de permis pour déclencher une réaction en chaîne dans toute l'industrie. Il est absolument essentiel que toutes les parties collaborent afin d'éviter que cela ne se produise.
• 1210
Il faut fournir la même information et enseigner les mêmes
procédures à Douanes Canada, à UPS, à Postes Canada, aux lignes
aériennes, aux chefs accessoiristes et aux fournisseurs d'armes
afin d'éviter les arrêts et évidemment, assurer la sécurité du
public. Je vous encourage à insister auprès du CCAF pour qu'on ait
une idée exacte du temps nécessaire pour le traitement de chaque
demande de permis et d'autorisation. Il avait été question d'un
enregistrement «instantané» au point de cession d'une arme. Qu'en
est-il des permis? Et des permis d'importation et d'exportation?
Nous devons tous comprendre que si l'on met en oeuvre ces règlements, cela ne doit se faire que lorsque l'on aura éliminé toutes les imperfections et une fois qu'on aura vérifié et analysé et vérifié encore tous les systèmes.
Nous, le syndicat local 891, de l'industrie cinématographique, vous offrons nos services encore une fois, pour faire des essais, des analyses à l'importation à l'exportation, tout ce qu'il faudra pour éviter tout arrêt grave de production.
En examinant toute cette documentation, j'ai eu quelques réactions, des réactions personnelles dont j'aimerais vous faire part. J'essaie de faire fonctionner tout cela avec le reste de ma vie aussi, et c'est à ce titre que j'aimerais ajouter encore quelque chose, à titre personnel, je le répète.
Le monde n'est pas un endroit parfait. L'industrie cinématographique tente de nous le montrer. Notre patrimoine littéraire tente de nous le dire. Même nos grands-parents essaient de nous le dire. Il y a des forces qui vont profiter de nous, nous duper, nous mentir et nous mettre en péril physique.
Quand les Canadiens ont-ils perdu ce lien avec leur propre sécurité et leur protection? Quand le gouvernement a-t-il commencé à penser qu'il devait prendre les choses en main parce que les citoyens ne le faisaient pas? Je ne pense pas avoir les moyens de payer pour protéger tous ceux qui semblent incapables de se protéger. C'est vrai dans le cas du temps qu'il fait, des ceintures de sécurité, de la fumée de cigarette, des conducteurs dangereux, des stupéfiants, des produits photothérapeutiques, les guérisseurs, les vendeurs de voitures d'occasion, les sites pornographiques sur l'Internet, les terroristes, et les situations qui sont menaçantes sur le plan mental ou physique.
Le Canada ne connaît pas de crise de violence armée bien que cette loi le sous-entende. Si certaines des ressources consacrées à réglementer les bons étaient consacrées à enseigner aux gens à prendre soin d'eux-mêmes, il y aurait beaucoup plus de vies de sauvées à moindre coût pour le contribuable. On attraperait bien plus de mauvais garnements pour les traîner en justice; un plus grand nombre de ressources seraient réorientées à partir des ordinateurs vers les collectivités et bien des gens retrouveraient leur dignité.
Merci.
La présidente: Merci, monsieur McLeod.
Monsieur Ramsay, vous avez cinq minutes.
M. Jack Ramsay: J'aimerais commencer, monsieur McLeod, par vous remercier d'être venu et par vous dire que je suis tout à fait d'accord avec votre conclusion.
Nous n'avons pas de crise des armes à feu dans notre pays. En fait, si l'on consulte les dossiers, nous ne savons même pas combien il y a d'armes à feu au Canada. Nous en avons une idée approximative, par suite d'un sondage, et si nous prenons ces chiffres et qu'on les divise par le nombre de morts provoquées par des armes à feu, le pourcentage est très faible. Je pense qu'il faut tenter de réduire ce pourcentage, mais il s'agit ici d'une énorme mesure législative qui n'était pas destinée à englober tous et chacun comme c'est le cas. Il se trouve que vous êtes du nombre. Vous représentez un des secteurs qui a été englobé.
Au cours du dernier examen des règlements que nous avons faits en janvier et février, neuf groupes différents nous ont fait part des énormes frais que ces règlements allaient leur coûter. Lorsque j'ai demandé aux fonctionnaires du ministère de la Justice s'ils avaient analysé l'incidence économique de ce projet de loi, ils ont répondu que non. Je ne peux que conclure que s'ils ne l'ont pas fait, c'est ou qu'ils ne le savent—mais ils le savent certes—, ou que cela ne les préoccupait pas suffisamment. Lorsque nous présentons des lois, nous devons savoir quelle en sera l'incidence économique sur la société. Je pense que l'on s'est montré irresponsable.
J'aimerais vous demander...je pense l'avoir déjà fait d'ailleurs. J'ai certainement posé ces questions à d'autres témoins qui représentent des groupes et organismes qui s'autoréglementent dans le domaine des armes à feu ou des répliques.
• 1215
Vous avez mentionné que vous êtes dans le métier depuis
15 ans.
M. Neil McLeod: Je suis dans l'industrie du spectacle depuis 27 ans.
M. Jack Ramsay: D'après votre expérience personnelle, est-ce que le maniement des armes à feu, des répliques, etc., dans l'industrie cinématographique a créé des problèmes de sécurité personnelle ou publique?
M. Neil McLeod: Je ne connais que deux circonstances où cela a été le cas. Cela ne veut pas dire que cela ne s'est pas produit plus souvent. Je ne suis au courant que de deux cas.
D'abord, il y a de nombreuses années, dans le cadre d'une production d'un projet de Sylvester Stallone en Colombie-Britannique, on avait modifié des armes à feu afin de tirer des blancs—donc ce n'était pas une menace sérieuse, mais néanmoins, ces armes ont disparu pendant un certain temps. Ça c'est un cas. C'était aux environs de 1981.
M. Jack Ramsay: A-t-on retrouvé ces armes?
M. Neil McLeod: Oui, on les a retrouvées. Les armes avaient disparu, non pas par négligence, mais parce que quelqu'un savait où trouver ces armes et s'était donné bien du mal pour les obtenir. Les armes étaient enfermées dans un camion, dans une chambre forte, comme c'est toujours le cas. Néanmoins, les armes ont disparu. Je n'ai jamais entendu parler d'une autre situation semblable.
Dans l'autre cas dont j'ai entendu parler, il s'agissait en fait de répliques d'armes. Une personne qui travaillait sur un plateau comme figurant, a placé l'arme dans son sac à la fin de la prise de vues. On a découvert la disparition. Il avait apporté l'arme chez lui pour s'amuser avec son colocataire.
Outre ces deux cas, je ne connais aucune situation dans l'industrie cinématographique où l'on ait enfreint les principes habituels de sécurité dans le maniement des armes à feu.
M. Jack Ramsay: À votre avis, pour maintenir le même niveau élevé de sécurité dans l'utilisation et la maniement des armes à feu dans votre industrie, avez-vous besoin de cette réglementation?
M. Neil McLeod: Non.
J'ai réfléchi pendant un instant. Je n'arrive pas à trouver quoique ce soit dans cette loi qui va nous faciliter la tâche de rendre l'industrie plus sécuritaire que ce n'est que déjà le cas par l'autosurveillance. Rien dans cette loi ne va rationaliser l'industrie et donc la rendre plus efficace et plus sécuritaire. En fait, ce sera l'inverse. Il y a des risques de surrèglement dans ce genre de choses.
M. Jack Ramsay: Pouvez-vous vous accommoder de cette réglementation? Votre industrie peut-elle croître et prendre de l'ampleur on utilisant des armes à feu sur films? Est-ce que ces règlements vous le permettent? Une industrie saine, en croissance et prospère comme la vôtre peut-elle y parvenir aux termes de ce projet de loi et de ces règlements?
M. Neil McLeod: Voilà une question difficile. Manifestement, c'est la loi, et nous devons nous en accommoder. Je ne peux vraiment pas vous dire autre chose.
Je suis ici aujourd'hui parce j'essaie désespérément de faire fonctionner cette réglementation sans saboter toute l'industrie. Les producteurs américains ont réagi avec une grande nervosité en songeant aux conséquences éventuelles de ces règlements. Il peut en coûter plus d'un million de dollars par journée de filmage perdu. La perte d'une journée parce que les documents sont à la frontière ou à Ottawa ou à Victoria, Calgary, Edmonton ou Dieu sait où peuvent causer un problème financier énorme pour l'industrie.
• 1220
Si cela devait se produire, comme je l'ai mentionné ici,
l'effet en chaîne qui se sera sentir dans toutes les piscines de
Los Angeles nuira énormément à notre industrie, en
Colombie-Britannique assurément.
La présidente: Monsieur MacKay.
M. Peter MacKay: Je vais poursuivre dans la même veine.
Mais auparavant, j'aimerais vous remercier de votre exposé. Vous avez des antécédents—j'ai remarqué le professionnalisme—sans effets théâtraux, si je peux me permettre d'utiliser ce mot, votre exposé était très bien organisé.
Je ne peux que conclure, à la suite de votre exposé, que non seulement je suis d'accord avec chacun des points que vous avez fait valoir, mais également avec votre constatation qu'il n'y a pas de crise des armes à feu au Canada. Plus précisément, il n'y a guère de crises dans votre industrie où les armes à feu ne représentent pas une menace pour le citoyen moyen ou quiconque. N'est-ce pas?
M. Neil McLeod: Comment définir «menace»? Si nous sommes des personnes responsables, alors c'est le cas. Évidemment il s'agit de matériaux qui sont dangereux en soi même lorsqu'ils sont modifiés pour l'être beaucoup moins. La plupart de ces armes n'utilisent pas de munitions vives, bien que certaines pourraient le faire.
Pour répondre à votre question, à mon avis, non, on ne compromet en aucune façon les principes de sécurité.
M. Peter MacKay: Si je vous pose aussi directement la question, c'est que vous avez dit que rien dans cette loi ne va améliorer la sécurité dans votre industrie.
M. Neil McLeod: En effet.
M. Peter MacKay: En fait, sa plus grande incidence, tout particulièrement celle des règlements semble être le lourd fardeau financier et réglementaire non seulement pour l'industrie au Canada, mais même pour des entreprises aux États-Unis ou ailleurs qui viennent au Canada pour y réaliser des productions cinématographiques.
M. Neil McLeod: Justement.
M. Peter MacKay: Très bien.
La question du retard est l'une de vos principales préoccupations aussi. Vous avez affirmé qu'un retard d'une journée pourrait coûter jusqu'à un million de dollars?
M. Neil McLeod: Dans le cas d'un grand long métrage, oui. Normalement, cela coûterait peut-être 450 000 $.
M. Peter MacKay: Peut-on dire que l'industrie cinématographique américaine est celle qui aurait la plus grande incidence sur votre production à Vancouver?
M. Neil McLeod: Il y a également les productions japonaises, car il est très difficile de réaliser des films au Japon vu le manque de place. Les Japonais font leurs films d'aventure et d'action au Canada.
M. Peter MacKay: Donc la réaction des étrangers à ces règlements semble très négative et pourrait les empêcher tout simplement de venir.
M. Neil McLeod: Peut-être.
Pour l'instant, ils nous font confiance et pensent que nous pourrons faire fonctionner cela. Plusieurs des règlements proposés et beaucoup de travail comptent sur nos efforts pour en tirer le meilleur parti possible. On attend de voir la tournure des événements. Lorsque je retournerai et que je dirai voilà, voici où en sont les choses, ici nous avons perdu, ici nous avons gagné, alors il y aura une évaluation et les choses continueront comme d'habitude jusqu'à ce qu'un problème surgisse.
M. Peter MacKay: Vous nous avez dit que c'était essentiellement une industrie de 2 milliards de dollars, en croissance, n'est-ce pas.
M. Neil McLeod: Oui.
M. Peter MacKay: Il semblerait, du moins dans votre cas, que l'on fasse des efforts sincères et qu'on continuera à en faire pour se conformer à la loi. Avez-vous l'impression, après avoir parlé à d'autres dans votre industrie que certains pourraient ne pas s'y conformer? Je ne vous demande pas de les nommer ni même de les identifier, mais je sais est-ce votre impression?
M. Neil McLeod: Tout à fait, je ne sais pas s'il faut prendre au sérieux ces menaces, mais il est très difficile pour une loi d'enlever aux gens leur bon sens.
M. Peter MacKay: Vous avez raison.
Preuve supplémentaire de votre bonne volonté, vous avez mentionné le fait que votre société de production avait préparé des vidéos de formation. Vous avez proposé certaines mesures qui, selon vous, rendraient la réglementation plus acceptable, mais ce que vous préféreriez c'est d'être exempté de son application.
M. Neil McLeod: On a, à certains égards, simplifié le libellé de la loi dans les règlements proposés. Puisqu'on étudie à la loupe tout le processus qui permettrait à l'industrie cinématographique d'avoir accès à des armes à feu, on a réussi à certains égards à simplifier le processus. À l'heure actuelle, la réglementation varie d'une province à l'autre. Chaque province aborde la question à sa façon. Nous nous réjouissons, pour des raisons de sécurité, de l'adoption d'une approche cohérente. Si la réglementation est uniforme, nous comprenons tous ce que nous devons faire, ce qui ne peut qu'accroître la sécurité. Les tracasseries administratives dans cette ville ont cependant atteint un niveau...
La présidente: C'est le moins qu'on puisse dire.
M. Neil McLeod: La situation ne fait qu'empirer. Elle empire tellement qu'elle va vous entraîner à la ruine. J'en suis convaincu.
M. Peter MacKay: J'ai une dernière question à vous poser sur les commentaires que vous faisiez plus tôt au sujet de l'impact de la réglementation. Pensez-vous qu'un jour les sociétés de production américaines et les Brad Pitt et Sylvester Stallone ne viendront plus faire des films au Canada?
M. Neil McLeod: L'endroit où est tourné le film importe beaucoup pour les films de ce genre. Quand on a un budget de 60 millions de dollars pour tourner un film, on peut se permettre de le tourner n'importe où. Quand on choisit de tourner un film au Canada, c'est pour profiter de certains paysages comme ceux de l'Ouest. Il s'agit de films qui doivent être filmés à un certain endroit. Ce qui intéresse ces sociétés, c'est qu'au lieu de leur coûter 60 millions de dollars, ce film leur en coûtera peut-être seulement 49 millions de dollars étant donné que l'infrastructure voulue existe dans l'Ouest canadien, à Toronto ou à Montréal. L'industrie peut aussi compter sur les spécialistes voulus. C'est vraiment intéressant pour les producteurs de films.
Quoi qu'il en soit, la raison pour laquelle ces films sont faits ici plutôt qu'en Tchécoslovaquie, en Afrique du Sud ou en Argentine, c'est qu'ils exigent un certain décor. Quant aux autres films qui sont produits ici, c'est parce que le taux de change est favorable et que nous pouvons offrir des équipes de tournage talentueuses.
Les producteurs de longs métrages à gros budgets—je vous réponds honnêtement ici—ce qui ne veut pas dire que je ne vous ai pas répondu honnêtement jusqu'ici—pourraient donc se permettre d'assumer la dépense supplémentaire qu'entraînera la législation sur les armes à feu que nous essayons de chiffrer. C'est plutôt nous qui aurons du mal à le faire, nous qui essayons de gagner notre vie ici. Nos coûts sont tellement élevés que nous ne pourrons plus nous permettre de faire des films ici.
• 1230
Les séries télévisées qui mettent l'accent sur l'action et
l'aventure seront filmées ailleurs parce qu'elles doivent être
filmées très rapidement. Il faudra mettre un jour et demi pour
remplir toutes les formalités et cela retardera le tournage. S'il
est impossible de filmer l'épisode de la semaine, il faudra que le
réseau passe une reprise. C'est à peu près le pire qui puisse
arriver dans le secteur de la télévision.
Cette réglementation n'aura pas donc pas un impact aussi important sur les longs métrages que sur les petits films et les grandes séries télévisées.
M. Peter MacKay: Qu'en est-il de la production canadienne?
M. Neil McLeod: Le coût de la production canadienne montera également en flèche en raison de cette réglementation, mais pas dans tous les cas.
La présidente: Je vous remercie, monsieur MacKay.
Monsieur Lee.
M. Derek Lee (Scarborough-Rouge River, Lib.): Monsieur McLeod vous avez attiré notre attention sur les problèmes que cette réglementation risque de poser pour la production de films et de séries télévisées. Si je ne m'abuse, il s'agit d'une industrie d'exportation assez florissante pour le Canada qui présente encore un certain potentiel de croissance. Vous avez certainement attiré notre attention sur un problème qui mérite d'être étudié. À mon avis, nous sommes parvenus à imposer aux Canadiens un règlement de plus, et voilà pourquoi j'aimerais faire deux observations à ce sujet.
Premièrement, vous avez signalé les conséquences d'erreurs qui pourraient retarder la production d'un film. À votre avis, des retards dans la production de films attribuables à cette réglementation pourraient amener les producteurs et les sociétés de production à simplement éviter le Canada. Il pourrait y avoir un effet de cascade. Pourrait-on régler le problème si quelqu'un au Centre canadien des armes à feu était chargé de répondre aux demandes de l'industrie cinématographique? Pensez-vous que l'industrie serait favorable à une solution de ce genre?
M. Neal McLeod: Je crois que la CFC a vraiment montré qu'elle était prête à collaborer dans ce domaine. Nous ne savons pas du tout quelles seront les décisions qui seront prises à cet égard aux niveaux local et provincial. Je suppose que ce que vous proposez n'est pas que nous téléphonions à quelqu'un et disions: «Caroline, téléphonez à Hank et réglez le problème; vous avez jusqu'à midi pour le faire». Je ne vois cependant pas d'inconvénient à m'adresser à Caroline.
M. Derek Lee: Je propose qu'on nomme quelqu'un qui puisse satisfaire les demandes de votre industrie. Vous n'êtes pas sûr que ce soit la solution, mais j'aime croire que ce l'est. Seul le temps nous le dira. Vous êtes un spécialiste de votre domaine et je présume que vos collègues de la Colombie-Britannique, de l'Ontario, du Québec et de l'Est seraient favorables à l'idée que quelqu'un soit nommé tant au niveau provincial qu'au niveau fédéral pour répondre aux besoins de votre industrie. J'espère qu'on le fera. Je serais très déçu si ce n'était pas le cas. Ai-je raison?
M. Neil McLeod: Je crois que oui. Nous sommes habitués à régler de nombreux problèmes de bien des façons et la raison pour laquelle je comparais maintenant, c'est que j'essaie de régler celui-ci.
M. Derek Lee: Très bien.
J'aimerais maintenant vous parler des coûts liés à l'observation de la réglementation. Vous avez dit que les frais exigés n'auraient pas un effet dissuasif sur les grandes sociétés de production. Il est question ici de frais annuels ou de frais quinquennaux de 25 $, 50 $ ou 100 $. Une course en taxi peut parfois être plus coûteuse.
• 1235
Avez-vous bien dit que ces frais risquent d'être trop élevés
pour les petites entreprises du domaine cinématographique?
M. Neil McLeod: Oui.
M. Derek Lee: Qu'en est-il de votre entreprise? Des frais annuels de 1 000 $ sont-ils tellement lourds pour vous?
M. Neil McLeod: Certainement. Il faut bien trouver l'argent quelque part. Je vais devoir réduire ma facture de foin, réduire ma facture d'épiceries ou facturer cela à quelqu'un d'autre. C'est évidemment ce que je vais faire.
Parce que je travaille régulièrement avec des armes à feu, je dois acquérir un permis et c'est ce que je ferai.
Une quarantaine d'autres personnes du département des biens de la section 891 du syndicat des techniciens de l'industrie cinématographique ne savent pas encore quelle décision ils vont prendre. Ils produisent peut-être une émission où l'on utilise des armes à feu tous les trois ou quatre ans. Certaines personnes vont peut-être refuser de faire cette émission parce qu'elles n'aiment pas la réglementation. Ce sont ces particuliers que nous forçons maintenant à se comporter comme des entreprises et qui doivent ensuite acheter un permis d'exploitation, payer des impôts, la TPS et ainsi de suite.
Je ne vois rien qui empêchera les municipalités de demander à ces 40 entrepreneurs indépendants qui, une fois par an doivent trouver un fusil pour le film où le mauvais garnement armé se précipite de l'ascenseur. Les municipalités vont dire à ces gens qu'il leur faut un permis, des installations d'entreposage réglementaires ainsi qu'un système de sécurité électronique.
Pour acheter cet équipement, pour se le procurer auprès de moi ou d'autres fournisseurs, ils devront s'établir à leur compte. Voilà donc pourquoi beaucoup de gens me demandent pourquoi ils doivent le faire désormais alors qu'ils n'ont pas à le faire maintenant.
M. Derek Lee: Vous croyez donc que ces frais et que cette réglementation vont réduire la concurrence pour ce qui est de la fourniture de services à l'industrie cinématographique. Vous pensez qu'ils amèneront certaines personnes à se retirer du domaine.
M. Neil McLeod: Oui. Je n'aurais pas présenté les choses de cette façon, mais comme vous le faites, je crois que c'est le cas. À mon avis, les frais et la réglementation forceront des particuliers soit à quitter l'industrie, soit s'établir à leur compte.
M. Derek Lee: Très bien. Si les frais étaient réduits de moitié, ils deviendraient plus acceptables. Si je comprends bien le barème des frais, après une période transitoire initiale d'un ou de deux ans, une entreprise comme la vôtre devra payer 500 $ par an pour les armes à autorisation restreinte et pour les armes à feu sans restriction et 1 250 $ si vous vous servez d'armes à feu prohibées.
M. Neil McLeod: C'est juste.
M. Derek Lee: Comment cela se compare-t-il au coût actuel d'un certificat d'enregistrement?
M. Neil McLeod: J'oublie ce que j'ai dû payer la dernière fois. Je pense que c'était 25 $. Le permis qui me permet de transporter les armes dont j'ai besoin est gratuit.
M. Derek Lee: Oui.
M. Neil McLeod: Il suffit de téléphoner à la Division E de la GRC.
M. Derek Lee: Mais cela va maintenant vous coûter 2 000 $ par an.
M. Neil McLeod: Non, ce sera 1 250 $.
M. Derek Lee: Je m'excuse. Ce sera donc 500 $ plus 1 250 $.
M. Neil McLeod: Il semblerait que nous ayons réglé ce problème-là aussi. Le permis autorisant une entreprise à fournir des armes à l'industrie cinématographique coûtera 1 250 $. Cette somme couvrira tous les aspects de nos activités. Ainsi, on pourrait dire que nous fabriquons des armes à feu. Nous offrons aussi des services d'armurier. Nous vendons des armes à feu. Nous ajoutons certaines armes à feu à notre inventaire et nous en retirons d'autres. Si je ne m'abuse, le permis de 1 250 $ vaudra pour toutes ces activités.
M. Derek Lee: Ce n'est pas ce qui est dit dans la réglementation, mais vous avez eu avec des personnes compétentes des discussions qui vous amènent à le croire.
M. Neil McLeod: Oui, c'est ce qu'on m'a donné à entendre.
M. Derek Lee: C'est rassurant.
M. Neil McLeod: Ces frais ne s'ajouteront donc pas aux frais de 500 $. Il s'agit de deux permis distincts. L'un s'applique aux activités d'un certain niveau et l'autre aux activités de niveau supérieur.
Nous aimerions que les frais s'appliquant aux activités de niveau inférieur soient réduits pour éviter que ces particuliers n'aient à devoir se constituer en entreprise.
M. Derek Lee: Je vous remercie.
La présidente: Je vous remercie beaucoup, monsieur McLeod. Je regrette que vous ayez dû attendre et je vous remercie de votre exposé.
M. Neil McLeod: Je vous remercie beaucoup de m'avoir donné l'occasion de comparaître devant le comité.
La présidente: Nous allons tout de suite entendre notre prochain groupe de témoins. Il s'agit de Gerald Morin, président du Conseil national des Métis, de Tony Belcourt, président de la Nation métis de l'Ontario, de Bob Stevenson, représentant pour les fourrures du Conseil national des Métis et de Dwayne Roth, avocat de la Saskatchewan qui travaille pour les Métis. Bienvenue à vous tous.
Qui va faire l'exposé? Est-ce que ce sera vous, monsieur Morin?
M. Gerald Morin (président, Conseil national des Métis): Je crois que nous avons tous quelque chose à dire.
La présidente: Très bien.
M. Gerald Morin: Je crois que nous allons tous faire une déclaration préliminaire. Je commencerai par faire quelques brèves remarques.
J'aimerais d'abord remercier le comité qui nous donne de nouveau l'occasion de lui faire part de nos vues sur la question du contrôle des armes à feu. Nous avons comparu devant le comité permanent lorsqu'il a étudié le projet de loi sur les armes à feu et nous avons aussi comparu sur le même sujet devant le Comité sénatorial permanent des questions juridiques et constitutionnelles.
J'aimerais d'abord insister sur le fait que nous avons déjà présenté des mémoires devant ces deux comités permanents. Notre position n'a pas changé depuis. Je tiens à préciser que nous continuons à défendre le même point de vue.
La présidente: Permettez-moi de vous assurer que nous le savions déjà et que nous l'acceptons.
M. Gerald Morin: Très bien.
J'aimerais cependant faire ressortir quelques points. Comme nous le faisions remarquer dans les deux mémoires dont je viens de parler, le Conseil national des Métis estime que le gouvernement fédéral a l'obligation constitutionnelle et fiduciaire en vertu de la Constitution du Canada de consulter les peuples autochtones, qui comprennent les Métis, sur les questions qui les touchent directement.
Comme nous l'avons déjà dit, nous estimons que le fait d'appliquer des dispositions législatives ou réglementaires qui pourraient avoir pour effet de priver certains Autochtones de leurs armes à feu ou de criminaliser la possession d'armes à feu, nous touche directement. La chasse, le piégeage et l'exploitation des terres font partie intégrante du mode de vie des Métis et de leurs collectivités. Ce mode de vie repose évidemment sur l'utilisation et la possession des armes à feu.
Nous réitérons ce que nous avons dit lors de notre première comparution devant le comité, à savoir que le fait de comparaître devant le comité n'équivaut pas à avoir été consultés sur le sujet. Le Conseil national des Métis estime que notre peuple et nos collectivités n'ont pas à toutes fins pratiques été consultés au moment de la rédaction de la Loi sur les armes à feu. Ils n'ont pas été non plus consultés avant le dépôt de ces règlements à la Chambre.
Notre peuple n'a donc pas été consulté sur la question des armes à feu. Avant d'adopter la Loi sur les armes à feu et les règlements qui en découlent, la Chambre n'a certainement obtenu le consentement des Métis du Canada. Le gouvernement fédéral appliquera néanmoins cette loi et ces règlements. Ce qui se produira sans doute si un Métis est accusé d'avoir enfreint les dispositions de la loi ou des règlements, c'est qu'il en contestera la validité devant les tribunaux. Compte tenu de notre interprétation de la Constitution et des obligations juridiques du gouvernement, nous croyons qu'un tribunal statuera sans doute que la Loi sur les armes à feu et les règlements ne peuvent s'appliquer au peuple et aux collectivités métis parce qu'elles sont contraires à la Constitution du Canada.
• 1245
En vertu des dispositions de la Constitution, nous sommes
d'avis que le gouvernement fédéral est tenu de consulter d'abord
notre peuple et d'obtenir son consentement à l'égard des lois et
des règlements qui le concernent directement. C'est d'ailleurs ce
qu'a confirmé la Cour suprême du Canada, en particulier dans la
décision Sparrow.
En ce qui nous concerne, cette loi ne peut pas s'appliquer à notre peuple et nos collectivités et ne s'y appliquera pas. Dwayne a fait une étude préliminaire du Règlement, tant la version la plus récente que celle qui a été déposée à la Chambre en 1996, si je ne m'abuse, et il vous fera part de notre point de vue sur celui-ci. J'aimerais cependant clairement préciser que le fait que nous comparaissions aujourd'hui devant le comité ne signifie pas que nous avons été consultés sur la question. Bien que nous soyons prêts à vous faire part de nos commentaires sur les règlements proposés, il ne faudrait pas en conclure que nous avons modifié la position que nous avons défendue auparavant devant le comité permanent.
Nous aimerions réaffirmer le fait que nous ne voyons pas comment la loi et les règlements permettront de combattre la criminalité dans le pays. Le fait que les gens auront à enregistrer leurs armes à feu et à obtenir un permis d'acquisition d'armes à feu ne les empêchera d'aucune façon, à notre avis, d'utiliser ces armes pour perpétrer des crimes.
Même si certains aimeraient croire que la loi et les règlements permettront d'empêcher certaines personnes de posséder des armes à feu, nous croyons qu'ils donneront plutôt lieu à la création d'un marché noir où ces personnes se procureront, si elles le souhaitent, des armes à feu pour mener des activités criminelles. Quoiqu'il en soit, ces personnes pourraient toujours se servir d'autres armes et d'autres outils comme des couteaux pour mettre à exécution leurs dessins. Nous voyons donc mal comment la loi et les règlements pourraient permettre de combattre la criminalité. À notre avis, le gouvernement fédéral a pris une initiative coûteuse, complexe et inutile qui ne permettra pas d'atteindre les objectifs escomptés.
Nous aimerions également insister sur le fait que comme le reste des Canadiens, notre peuple s'est urbanisé. Bon nombre de Canadiens, et je soupçonne que c'est le cas des législateurs fédéraux, provinciaux et municipaux, ne comprennent tout simplement pas dans quelles conditions vit notre peuple, que ce soit dans les régions éloignées des provinces ou dans les centres urbains.
Bon nombre de nos gens n'attachent tout simplement pas d'importance à des questions comme la loi et la réglementation sur les armes à feu. Soit ils n'en connaissent pas l'existence, soit ils ne s'en préoccupent pas.
Comme nous l'avons déjà fait ressortir, notre peuple vit dans des conditions sociales et économiques déplorables. Le niveau de revenu des Métis est extrêmement bas. Les statistiques le confirment d'ailleurs. Le chômage est très répandu chez les Métis et bon nombre d'entre eux comptent malheureusement sur l'aide sociale pour survivre. Nos gens ne peuvent tout simplement pas se permettre de payer des frais d'enregistrement d'armes à feu, si modestes soient-ils, ou d'enregistrer les armes à feu chaque fois qu'il y a cession d'un propriétaire à un autre. Ils ont d'autres priorités et d'autres besoins essentiels.
• 1250
Dans nos collectivités et notamment dans de nombreux centres
urbains du pays, vivent maintenant des Métis qui sont assujettis
non seulement à cette loi mais à de nombreuses autres lois en
particulier dans le domaine de la justice pénale.
Comme nous l'avons déjà dit, le contrôleur des armes à feu relèvera des provinces. Il s'agira d'un autre palier de bureaucratie qui s'ajoutera un système de justice pénale déjà inefficace au Canada. On créera ainsi toute une autre classe de fonctionnaires qui pourront opprimer notre peuple et auxquels on conférera d'immenses pouvoirs discrétionnaires concernant l'application de la loi et des règlements. Ils peuvent aussi décider subjectivement à quelles personnes ils délivreront des permis et à quelles personnes ils les révoqueront. Le nouvel appareil bureaucratique qui sera créé n'aidera en rien à redonner confiance à notre peuple dans le système canadien de justice pénale.
Les statistiques portant sur le nombre de Métis incarcérés sont tellement révélatrices que bien des gens en sont venus à croire que c'est un mode de vie pour nos gens et qu'il ne faut pas se préoccuper de la situation. Cette loi permettra à l'État d'incarcérer encore plus de Métis, de criminaliser leur comportement et de les harceler qu'ils vivent dans les villes, dans des collectivités métis ou à l'extérieur des grands centres. La loi et la réglementation non seulement ne s'appliqueront pas à nos gens et à nos collectivités, mais elles n'auront aucune importance pour eux. L'opinion voulant que nos gens ignorent la loi et la réglementation ou n'y attachent guère d'importance semble répandue.
Je crois qu'il est triste et malheureux que le gouvernement du Canada n'ait pas tenu vraiment compte des vues exprimées non seulement par le Conseil national des Métis mais aussi par tous les autres dirigeants autochtones au sujet de la Loi sur les armes à feu et les règlements qui en découlent. Le système d'enregistrement des armes à feu et le système de délivrance de permis sera non seulement coûteux en soi, mais il faudra aussi recruter des contrôleurs des armes à feu, emprisonner nos gens avec tous les coûts que cela suppose non seulement sur le plan financier mais humain. Le système de justice pénale a déjà montrer qu'il ne répondait pas aux besoins de notre peuple et de nos collectivités.
Je tenais à faire ces remarques. Le Conseil national des Métis réitère que cette loi et les règlements qui en découlent ne s'appliqueront pas à notre peuple ni à nos collectivités. Lorsque la loi et les règlements seront contestés devant les tribunaux, nous sommes convaincus que ceux-ci, se reportant à la Constitution du Canada, statueront que le peuple et les collectivités Métis n'y sont pas assujettis. Le gouvernement du Canada devra alors régler le problème et reconnaître l'existence de nos droits, de la Constitution canadienne et de la primauté du droit. Il lui faudra alors régler le problème sur lequel nous avons attiré son attention à diverses reprises.
Voilà qui met fin à ma déclaration préliminaire. J'invite maintenant mes collègues à faire la leur.
La présidente: Je vous remercie, monsieur Morin.
Monsieur Belcourt.
M. Tony Belcourt (président, Nation Métis de l'Ontario): Je suis le président de la Nation Métis de l'Ontario et je représente les Métis ontariens qui vivent dans environ 380 collectivités de la province. Nos gens sont répartis dans toute la province. Où qu'ils vivent, que ce soit à Welland, Sarnia, Windsor, Timmins, North Bay, ou Sault Ste. Marie, ils attachent beaucoup d'importance à la chasse, à la pêche, au piégeage et à l'exploitation des ressources.
La Nation Métis de l'Ontario existe, en tant qu'organisme, depuis quatre ans. Nous faisions autrefois partie d'un groupe de pression regroupant les Indiens non inscrits. Nous sommes l'aile ontarienne de la Nation Métis. Depuis 1994, nous exprimons et nous exerçons nos droits de chasse et de pêche à des fins de subsistance. Les Métis de l'Ontario se sont donné cette année une politique sur l'exploitation des ressources que nous avons communiquée au ministère des Ressources naturelles.
• 1255
Nous délivrons aux Métis qui exploitent des ressources, des
certificats pour deux raisons. Premièrement, nous nous assurons
ainsi que ceux qui possèdent des certificats sont vraiment
autorisés à exercer ce droit à titre d'Autochtone et de Métis. Nous
accordons ces certificats en vertu de notre système
d'enregistrement qui repose sur la façon dont nous nous sommes
toujours définis comme Autochtones, n'ayant pas le statut d'Indiens
inscrits, aux termes de la Loi sur les Indiens. Nous nous assurons
que ceux à qui nous délivrons ces certificats d'exploitation des
ressources ont bien des ancêtres autochtones.
Nous délivrons également ces certificats pour nous assurer que leurs propriétaires savent comment manier les armes à feu. Nous veillons à ce que nos citoyens connaissent nos règlements de sécurité en matière de chasse ainsi que les règlements qui s'appliquent concernant la chasse sur une propriété privée.
Gérald a raison d'insister sur le fait que nos gens soit ne comprennent pas la réglementation sur les armes à feu soit ne s'en préoccupent pas. Compte tenu du fait que la Nation Métis de l'Ontario ne reçoit que 80 000 $ par année comme budget de fonctionnement du gouvernement du Canada, nous ne sommes pas en mesure de fournir beaucoup d'informations à nos gens.
Nous avons le droit de chasser et de pêcher pour assurer notre subsistance. La Cour suprême l'a dit. Selon la Cour suprême, le gouvernement du Canada doit veiller à ce que nous puissions exercer nos droits. Tel n'est pas le cas. Nous nous opposons sans réserve à ce qui se passe à l'heure actuelle.
La présidente: Merci, monsieur Belcourt.
Monsieur Stevenson.
M. Bob Stevenson (Métis National Council): Merci.
Permettez-moi de vous parler un peu de moi-même dans le contexte de ce qui se passe à l'heure actuelle et à l'appui de ce que Tony et Gerald viennent de dire. On me qualifie de représentant en pelleterie pour la nation Métis. Je fais ce genre de travail de temps à autre. Cependant, nous n'avons pas de financement pour cela.
Je viens de la région frontalière entre l'Alberta et les Territoires du Nord-Ouest. Mon père était un irlandais pur laine. Son grand-père venait d'Irlande. Ma mère était Crie. Cependant, c'est mon arrière-grand-mère qui m'a élevé, si bien que je suis encore en mesure de parler ma langue Crie. Je n'ai pas appris l'anglais avant d'aller à l'école, à l'âge de huit ans ou à peu près. J'ai quitté Yellowknife il y a 15 ans.
J'aimerais partager avec vous certaines de mes expériences qui ont rapport à ce que ces personnes appellent le manque de consultation du gouvernement. Je m'efforce de me tenir au courant de ces questions de temps à autre au cas où des consultations auraient lieu, afin que nous puissions faire valoir les intérêts de nos groupes dans les provinces et territoires. Et si je dis au cas où, c'est que nous ne sommes pas nécessairement consultés.
J'ai quitté Yellowknife il y a 15 ans et j'ai déménagé par ici... J'habite maintenant avec les Mohawk à Akwesasne. Je ne sais pas s'ils ont comparu devant vous, mais ils vont probablement le faire s'ils ne l'ont pas déjà fait. Je travaille pour le Conseil mohawk d'Akwesasne, qui me paie pour comparaître aujourd'hui. Cependant, ceux qui m'emploient m'accordent la possibilité de participer à diverses réunions comme celle-ci pour que je puisse faire valoir mon droit en tant que Métis et aussi pour promouvoir la collaboration. C'est dire également que je participe, pour le compte du Métis National Council, au comité des chasseurs d'animaux à fourrure que nous tentons toujours de mettre sur pied. Nous avons certains représentants, mais ils ne sont pas subventionnés dans chaque province. Je siège également au comité des chasseurs de l'Assemblée des Premières nations, par le truchement du Conseil mohawk d'Akwesasne. Cet organisme est également reconnu par l'Assemblée des Premières nations, le Métis National Council, et le peuple Mohawk, étant donné qu'il s'intéresse non seulement aux fourrures, mais également à la chasse, à la trappe, à la pêche, à l'agriculture et à la cueillette.
• 1300
Le Canada dit-on, compte 50 000 trappeurs autochtones. Selon
moi, ces gens n'ont pas été consultés comme il se doit. Et il ne
s'agit-là que des secteurs de la chasse et de la trappe. J'ai
téléphoné au Centre des armes à feu pour savoir où avait lieu cette
réunion et j'ai appris que 190 personnes y travaillaient. Je ne
sais pas si c'est vrai, mais c'est ce que m'a dit un membre du
personnel.
Je n'ai eu connaissance de votre réunion qu'à la dernière minute.
Je reçois des lettres. Lorsque j'ai déménagé ici pour la première fois, il y a 15 ans, j'ai tenté de créer la Fédération des trappeurs autochtones du Canada pour régler toutes ces questions. En 1990, la fédération, qui n'avait bénéficié que d'un maigre soutien du ministère des Affaires indiennes et du Nord, de qui relevait le dossier de la fourrure, a cessé d'être subventionné. On a également cessé de financer une organisation qui s'appelle Indigenous Survival International, une autre organisation autochtone vouée aux mêmes objectifs. Les deux organisations ont été remplacées par un petit service administratif du ministère des Affaires indiennes et du Nord chargée du programme relatif à la fourrure. Depuis lors, le programme est mal administré. Cependant, c'est là d'une autre question que nous allons régler nous-mêmes.
Je voulais simplement vous faire part de mon expérience. Il est d'autant plus compliqué de mettre oeuvre une mesure comme celle qui a trait au contrôle des armes à feu lorsqu'on ne traite pas avec les personnes que la chose intéresse de très près, comme les chasseurs et les trappeurs des localités du Grand Nord—des gens qui sont pauvres, comme on l'a dit.
Essentiellement, j'aimerais que l'on consulte autrement que par ces annonces ridicules que les responsables des armes à feu diffusent à l'heure actuelle dans les stations de radio autochtones. Vous devriez entendre cela. J'aimerais bien en obtenir une copie. Je devrai peut-être copier moi-même l'annonce avec une enregistreuse. Dans l'annonce diffusée en ce moment, un Autochtone revient du bois après une grande chasse et on cherche à nous dire qu'il doit ranger son arme. L'auditeur a l'impression qu'il s'agit d'un Indien pas trop brillant qui parle à son fils. Le ton est insultant. Je n'aime pas cela du tout. Ce n'est pas une façon de consulter les gens ou de mettre en oeuvre une mesure. Ce n'est pas ça qui incite les gens à respecter les règlements en matière d'armes à feu.
La présidente: De qui est l'annonce?
M. Bob Stevenson: On donne un numéro 1-800 qui permet de communiquer avec le responsable des armes à feu à Ottawa, je suppose.
La présidente: D'accord.
M. Bob Stevenson: L'annonce est diffusée à la radio à Akwesasne. D'ailleurs, à titre de membre d'un comité de l'Assemblée des Premières nations, j'ai participé à une conférence téléphonique il y a deux jours. Certaines personnes du nord du Québec ont eu le même genre de commentaires.
La présidente: D'accord, il s'agit donc de commentaires assez généralisés au sujet de cette annonce.
M. Bob Stevenson: En effet.
La présidente: Merci de nous en avoir fait part.
M. Bob Stevenson: Les personnes qui ont été embauchées—il y en a 190, si c'est vrai—en sont déjà à l'étape de la mise en oeuvre, sans nous avoir consultés, et prennent des initiatives comme les annonces radiophoniques. Il me semble que l'argent serait mieux dépensé si on le confiait aux groupes pour qu'ils s'occupent eux-mêmes des gens qu'ils représentent, au lieu de le remettre à une station de radio que les gens n'écoutent peut-être même pas. De toute manière, il me semblait important de me défouler ou de me vider le coeur à ce sujet.
La présidente: Je pense qu'on doit dire qu'on se défoule ou qu'on se vide le coeur.
M. Bob Stevenson: Vous l'avez!
La présidente: Et on peut dire aussi qu'on en a plein le...
M. Bon Stevenson: Ayant déjà habité dans l'Ouest, je connais cette expression-là également.
C'est essentiellement ce que je voulais dire. Évidemment, on a également dit qu'il n'y avait pas eu d'étude d'impact économique pour l'industrie cinématographique. Voilà un autre aspect qu'on pourra approfondir. Il y en a plusieurs.
• 1305
Une telle façon de faire n'engendre pas la confiance ni ne
favorise de bons rapports de travail. Nous, les Autochtones, nous
nous sommes toujours efforcés de faire part de nos points de vue et
nous voulons simplement qu'on nous traite de la même façon, ce qui
n'est pas le cas habituellement. Donc, faute de consultations en
l'occurrence, nous nous exposons inévitablement à des difficultés
à l'avenir, comme l'a dit Gérald.
Cela dit, permettez-moi de vous remercier. Je dois participer à une autre réunion avec le ministère des Affaires indiennes, de l'autre côté de la rivière, au sujet de la fourrure. Nous verrons bien jusqu'où nous pourrons aller dans ce cas-là.
La présidente: Je ne suis pas certaine que nous puissions vous aider en cela, monsieur Stevenson, mais je vous remercie de votre exposé.
M. Bob Stevenson: Non, en effet, mais puisque le sujet concerne les trappeurs, il y a un certain rapport.
La présidente: En effet. Merci.
Monsieur Roth.
M. Dwayne Roth (conseiller juridique, Métis National Council): Madame la présidente, membres du comité, moi aussi je tiens à vous remercier de l'occasion qui m'est donnée de prendre la parole devant votre comité. Je suis le quatrième à comparaître, mais je n'ai essentiellement qu'une chose à vous dire. Au risque de vous ennuyer en répétant la même chose, je vais quand même vous exposer le message de notre organisation.
Essentiellement, la position du Métis National Council, celle des Métis du Canada, n'a pas changé. Les Métis ont déjà comparu devant votre groupe. Leur position n'a pas changé. Les nouveaux règlements entrés en vigueur en octobre 1997 visaient certains groupes précis. Ils ne visent pas directement des Métis.
Cependant, il ne faut pas perdre de vue que la situation de ceux qui sont visés directement par la nouvelle réglementation est très différente de celle des Métis. Je pense plus précisément aux clubs d'armes à feu, aux champs de tir, aux expositions d'armes à feu, à l'industrie cinématographique, aux agents de la Couronne, aux entreprises, aux citoyens en général. Toutes ces catégories de personnes sont dans une situation différente de celle des Métis, voire l'ensemble des peuples autochtones, à savoir que, comme M. Morin l'a dit, les peuples autochtones jouissent d'un droit protégé aux termes de l'article 35 de la Constitution de chasser, de pêcher, et de poursuivre toute activité liée à leurs droits inhérents. La position juridique des Métis consiste donc à dire que tout régime de réglementation qui porte atteinte à ces droits est nul et non avenu. Voilà une position que ne peuvent soutenir les autres groupes touchés par ce règlement d'octobre 1997. Les autres groupes autochtones peuvent par contre en dire autant, et c'est d'ailleurs ce qu'ils font, me semble-t-il.
Les Métis du Canada ont toujours joui de ces droits inhérents. Cependant, ce n'est que dernièrement que les tribunaux ont commencé à les reconnaître. Je suis moi-même un avocat métis de la Saskatchewan. Dans cette province, certaines affaires qui concernent cette question sont devant la Cour d'appel à l'heure actuelle. Nous avons eu gain de cause aux premières instances et nous croyons que les jugements des cours d'appel nous seront favorables. Il se pourrait que la question aboutisse à la Cour suprême du Canada. Dans le cas de l'Ontario, je suis au courant de l'affaire Buckner de février 1997, d'où il est ressorti également que les Métis de la province jouissaient d'un droit de chasse en vertu de l'article 35. Il est donc évident que les tribunaux commencent à reconnaître un droit que nous avons toujours eu, c'est-à-dire le droit inhérent de pratiquer la chasse.
Évidemment, un tel droit comporte certains corollaires, notamment le fait que tout régime de réglementation qui lui porte atteinte sera annulé par les tribunaux. J'exhorte les membres de votre comité à tenir compte de cet aspect lorsqu'ils se pencheront sur les mémoires des Métis du Canada.
La présidente: Merci.
Monsieur MacKay, je ne veux vous imposer aucune limite. Vous pouvez donc continuer jusqu'à ce que je vous arrête.
M. Peter MacKay: Merci, madame la présidente. Je suis convaincu que vous saurez m'avertir, le moment venu.
Je vous remercie tous d'être venus. Vos commentaires sont fort appréciés.
Vous venez de parler, monsieur Roth, du recours aux tribunaux. Il me semble qu'il serait très coûteux pour vous d'avoir constamment à recourir aux tribunaux pour faire valoir des droits qui, selon vous, vous sont clairement reconnus. Je suis bien d'accord avec votre président, M. Morin, selon lequel l'argent serait beaucoup mieux dépensé à améliorer la situation sociale et économique de la nation Métis.
• 1310
J'aimerais savoir justement ce que vous pensez de l'idée
d'utiliser vos ressources financières pour défendre un droit qui
vous a déjà été reconnu au Canada.
M. Dwayne Roth: Je suis bien d'accord avec vous pour dire que l'argent serait beaucoup mieux dépensé à mettre en oeuvre le processus dont nous parlons qu'à livrer bataille au ministère de la Justice, pour ainsi dire, devant les tribunaux pour obtenir quelque chose que nous avons déjà. Mais, malheureusement, c'est ainsi que les choses se passent.
Je crois que nos dirigeants politiques cherchent depuis longtemps à trouver une solution qui répondra à nos besoins et qui nous donnera satisfaction mais, jusqu'à maintenant, leurs efforts n'a pas été fructueux.
En Saskatchewan, par exemple, jusqu'à ce que nous contestions le processus et fassions reconnaître nos droits de chasse, nos gens se voyaient criminalisés parce qu'ils se prévalaient de leur droit inhérent et, à cet égard, la discussion politique ne semblait mener nulle part.
L'argent nécessaire à cet égard pourrait être mieux dépensé ailleurs, je suis bien d'accord, et je crois que c'est ce que préféreraient les Métis.
M. Morin aurait peut-être un commentaire sur l'aspect politique.
M. Gerald Morin: Il y aurait effectivement moyen de mieux dépenser l'argent non seulement pour améliorer la situation sociale et économique de nos collectivités, mais aussi pour faire respecter l'objectif du Parlement du Canada, à savoir de réduire au minimum l'utilisation d'armes à feu à des fins criminelles.
Nous sommes favorables à certaines dispositions de la loi et nous l'avons bien dit avant de comparaître devant le comité permanent. Par exemple, les limites visant les armes de poing, les armes prohibées et les armes à autorisation restreinte, l'importation et le trafic des armes, ainsi que l'application de peines plus sévères dans le cas de crimes où des armes à feu sont utilisées. Nous ne sommes nullement en désaccord à ce sujet et nous ne sommes pas non plus contre le fait qu'on cherche à réduire la criminalité au Canada. Nous estimons tout simplement qu'il y aurait de meilleures façons pour le gouvernement du Canada, en partenariat avec les provinces—contrairement à ce qui se passe pour bon nombre de provinces dans le cas de ce projet de loi et des règlements—de combattre la criminalité, notamment dans les centres urbains, et nous sommes certainement disposés à participer à un dialogue à cet égard.
Sur le plan des ressources financières, les Métis en ont très peu. Même si les initiatives ont été prises un peu partout sur le territoire des Métis, c'est surtout en Saskatchewan qu'on a fait valoir des droits territoriaux et des droits de chasse et de pêche devant les tribunaux, heureusement, nous avons des gens comme Dwayne Roth et comme Clem Chartier, un avocat de la Saskatchewan ainsi que Jean Teillet de Toronto, des avocats métis qui ont accepté de porter des causes devant les tribunaux, même s'ils ont été bien peu défrayés pour leur peine. Ils l'ont fait parce qu'ils étaient convaincus du bon droit des Métis et des arguments qu'ils défendaient.
En Saskatchewan, un certain nombre d'affaires ont été portées dans les tribunaux avec le soutien, quoique modeste d'organisations métis comme la nôtre ou d'organisations provinciales apparentées. Par ailleurs, certaines campagnes de financement auprès de Métis, de non-Métis, d'organisations, etc. ont également permis d'absorber une partie des coûts.
Ainsi, en dépit des difficultés, nous arrivons à porter devant les tribunaux certaines affaires, lorsque nous sommes convaincus que nos droits ont été violés. Lorsque l'un des nôtres est accusé de contravention à la loi ou aux règlements et contacte une organisation ou un avocat métis pour contester la loi et demander une aide financière, il peut habituellement compter sur de l'aide, tout au moins sur une aide qui lui permettra d'aller devant les tribunaux. Il est malheureux que cela ne nous soit nécessaire, mais...
M. Peter MacKay: À cet égard, pouvez-vous nous dire comment les gens de votre communauté ont su qu'ils devraient se conformer aux règlements?
• 1315
Deuxièmement, jusqu'à quel point vont-ils s'y conformer
d'après vous? Vous avez dit que certaines personnes penseraient
peut-être à contester, mais à un point de vue plus pratique,
estimez-vous que l'on va respecter la réglementation d'une façon
générale?
Vous savez sans doute que le Grand Chef Phil Fontaine a déjà comparu devant le comité et que les mêmes questions lui ont été posées. Cependant, c'est votre point de vue qui m'intéresse. Dans vos communautés, sur le terrain, comment les gens réagissent-ils?
M. Gerald Morin: Je vais demander à Dwayne de répondre également après que je l'aurais fait.
C'est justement des réalités pratiques qui concernent nos gens dont je voulais vous parler tout à l'heure. Que les gens habitent à des endroits comme ma localité de Green Lake, dans le nord-ouest de la Saskatchewan, une communauté métis traditionnelle qui a une économie forestière axée largement sur la chasse et la pêche, ou qu'ils habitent un centre urbain comme Edmonton ou Saskatoon, il faut dire que bon nombre d'entre eux ne vont tout simplement pas se conformer à la loi et aux règlements. Bien des gens chez nous ne sont même pas au courant. Ils ne connaissaient rien de toute l'initiative du gouvernement fédéral en matière de contrôle des armes à feu. Lorsque j'ai dit que la réalité où grandissent ou vivent nos gens n'est pas la même que celle d'autres Canadiens, c'est de cela que je veux parler.
Le projet de loi et les règlements concernant les armes à feu proposés par le gouvernement du Canada n'a pas fait l'objet de vastes consultations auprès de notre peuple. Les Métis ne sont tout simplement pas au courant ou encore, s'ils le sont, ils ne s'en soucient guère. Ils estiment qu'ils vont conserver les mêmes modes de vie et qu'ils vont continuer à faire les choses comme auparavant en matière d'armes à feu sans rien changer à leurs habitudes, une fois que la loi sur les armes à feu et les règlements en vigueur.
Ce qui nous inquiète particulièrement, au Métis National Council, c'est qu'on a prévu un délai de cinq ans, je crois, pour la mise en oeuvre des régimes d'enregistrement et de permis exigés par la loi. Lorsque ce délai sera écoulé, les leaders à tous les niveaux de notre communauté craignent que les règles ne soient peut-être pas respectées.
L'État, le gouvernement, aura cet incroyable pouvoir de décider si nous devrons posséder des permis ou enregistrer nos armes à feu, et si nos permis devraient être révoqués ou la permission accordée pour leur cession. Les pouvoirs discrétionnaires, en particulier—et c'est pourquoi j'ai dit que le contrôleur des armes à feu représentait le système de droit pénal, etc.—sont très subjectifs et encore trop larges, malgré les changements qui ont été apportés à la loi et à ses règlements.
C'est pour toutes ces raisons qu'en fin de compte il y aura des violations. Il est effrayant que l'État puisse vous retirer vos armes à feu, emprisonner les gens ou imposer des amendes très élevées que nos gens ne pourront pas acquitter.
Le gouvernement du Canada et toute la société canadienne seront aux prises avec un problème très grave lorsque ce délai arrivera à échéance.
Dwayne, vous voulez ajouter quelque chose?
M. Dwayne Roth: Oui, brièvement.
Je suis certes d'accord avec l'évaluation que M. Morin fait de la situation. Dans son dernier témoignage devant votre comité, il a mentionné certaines statistiques sur la situation économique du peuple métis, de tous les Autochtones, mais surtout des Métis.
Ce qui me vient à l'esprit, c'est ce qu'on appelle la théorie de la hiérarchie des besoins de Maslow, que j'ai apprise à l'université. D'après cette théorie, les gens doivent d'abord répondre à leurs besoins primaires avant de combler ceux qui relèvent d'un ordre supérieur de conscience.
Notre peuple en est encore à l'étape des besoins primaires, si l'on veut. Les gens doivent se nourrir et survivre d'un jour à l'autre. Ils grandissent dans une réalité différente. On a dit que le coût de la réglementation est à peu près le même que celui d'une promenade en taxi. Eh bien chez nous, les gens n'ont pas les moyens de s'offrir une promenade en taxi. Dans certaines collectivités, il n'y a même pas de taxis. C'est une réalité entièrement différente.
On ne peut pas s'attendre à ce qu'ils sachent ce qui est nécessaire dans ce processus, qu'ils trouvent l'argent nécessaire pour l'enregistrement et qu'ils fassent les démarches pour s'enregistrer... Ils sont préoccupés par d'autres choses, par leur survie même, et c'est cela qui aura la priorité.
• 1320
Il y aura des gens qui respecteront les règles—probablement
dans les centres urbains—mais ce n'est pas sur ceux-là qu'il faut
mettre l'accent, puisqu'ils ne représentent pas la majorité des
propriétaires d'armes à feu. Ceux qui utilisent ces armes, ce sont
les gens qui s'adonnent encore à la chasse et au piégeage
traditionnels. Ils ne sont pas capables de comprendre tout ce
processus et ne respecteront pas les règles, involontairement, par
ignorance. Le résultat, c'est que bon nombre d'entre eux seront
considérés comme des criminels et auront à se défendre. C'est donc
à cet égard que nous contesterons les règlements.
La présidente: Merci, monsieur Morin.
M. Lee a peut-être des questions.
M. Derek Lee: Nous comprenons tous la difficulté qu'il y a à mettre en place un nouveau régime de règlements d'un bout à l'autre du pays, dans des zones urbaines, dans des zones rurales et dans d'autres zones que je décrirais comme des collectivités autochtones—puisque vous avez utilisé ce terme. Vous avez dit que la nation métis et ceux qui estiment en faire partie n'apprécieront pas d'être obligés de respecter cette loi ou les règlements, du moins tant que toutes les questions juridiques ne sont pas encore réglées et qu'on n'a pas décidé si la nation métis est protégée ou non, de par la Constitution, de certains aspects de leur application.
Une fois tout cela réglé, ce sera... C'est peut-être les tribunaux qui sont les mieux en mesure de décider de tout cela. Ils sont peut-être un bon point de départ. Vous avez d'un part le Parlement, l'exécutif du gouvernement de l'autre côté de la rue, où on négocie dans des bureaux, puis il y a les tribunaux. Lorsque les tribunaux auront terminé—et cela peut prendre un certain nombre d'années, croyez-vous que la nation métis acceptera le principe et un certain régime de sécurité à l'égard des armes à feu?
M. Gérald Morin: Eh bien, tout d'abord nous ne croyons pas que ce sont les tribunaux qui devraient régler des questions comme celle-là. Ce que nous disons, c'est que nous avons essayé d'examiner sérieusement cette question avec les législateurs avant que la loi ne soit adoptée. Le meilleur moyen de régler de telles questions, ce sont des négociations entre représentants politiques des gouvernements y compris des gouvernements autochtones. Malheureusement, nous devrons de nouveau avoir recours aux tribunaux parce qu'on n'a pas tenu compte de nous, parce que le gouvernement s'est encore une fois conduit conformément à son habitude et n'a reconnu ni notre peuple, ni nos droits. Ce n'est pas notre façon préférée de procéder, mais nous n'avons malheureusement pas d'autre choix. Nous sommes confrontés au problème.
Vous avez raison lorsque vous dites qu'il faudra plusieurs années avant que les tribunaux prennent une décision, surtout au niveau de la Cour suprême du Canada. Il faudra plusieurs années pour atteindre ce niveau et ce qui est triste, c'est que tant que cela ne sera pas fait—dans un lointain avenir—ce régime sera imposé à notre peuple sans son consentement. Cette loi et ses règlements amèneront plus de gens de notre peuple à se frotter au système de justice pénale. Ils seront plus nombreux à être emprisonnés, à être étiquetés comme criminels, et c'est très malheureux.
Du point de vue de la sécurité, nous ne nous opposons pas à ce qu'il y ait des mesures favorisant la sécurité dans l'utilisation des armes à feu. D'une façon générale, le peuple métis préconise le maniement sans danger des armes à feu. Nous avons toujours manié ces armes, cela fait partie de notre mode de vie traditionnel. Il y a bien sûr des accidents, mais d'une façon générale, la sécurité n'a jamais vraiment posé de problème dans nos communautés.
• 1325
Nous sommes certes prêts à collaborer avec les gouvernements
fédéral, provinciaux et municipaux. C'est pourquoi nous préconisons
des accords de cogestion pour accroître la sécurité du maniement
des armes à feu. Nous appuierions de tels accords.
Si nous pouvions travailler de concert avec d'autres paliers de gouvernement, dans un climat de collaboration, nous serions prêts à adopter de telles mesures, non seulement pour la sécurité, mais aussi pour la conservation des ressources fauniques. En effet, nous avons le droit de chasse et de pêche.
À l'heure actuelle, le gouvernement de la Saskatchewan a changé sa politique par suite des décisions des tribunaux. Nous avons le même droit de chasser que les Indiens inscrits de la province, ce qui a suscité de vives réactions chez le public. Nous souhaitions négocier des accords de cogestion en matière de conservation et de sécurité avec le gouvernement de la Saskatchewan, mais celui-ci a refusé de négocier avec nous.
Oui, nous appuyons les nobles objectifs de la loi en matière de sécurité et de conservation, mais nous pensons que les régimes d'enregistrement et d'octroi de permis qui y sont prévus, ne pourront être respectés par notre peuple et nous nous retrouverons de nouveau en conflit avec le système de justice pénale.
Il est peut-être possible que nous soyons d'accord avec de tels régimes plus tard, mais nous avons énoncé les principes fondamentaux voulant que nous avons le droit en tant que gouvernements autochtones, c'est-à-dire le droit inhérent de régir nos propres affaires. Ce droit est reconnu dans l'article 35 de la Constitution. Avant de mettre en place des règlements qui touchent directement nos vies, il faut qu'il y ait des consultations, il faut obtenir notre consentement. Ces principes doivent être maintenus.
M. Tony Belcourt: Je voudrais faire quelques commentaires, monsieur Lee.
Je suis vraiment en colère lorsque j'entends un député dire que la meilleure façon de régler les questions qui affectent toute une nation, un des peuples autochtones du Canada, est de nous envoyer devant les tribunaux, au lieu de collaborer avec nous pour s'assurer que les règlements et lois tiennent compte de nos intérêts. Cela me fâche énormément. Mais le gouvernement a toujours traité les métis de cette façon depuis l'époque de la Loi sur le Manitoba et la pendaison de Riel.
Je trouve une telle suggestion scandaleuse de la part d'un comité qui se dit être le Comité de la justice et des droits de la personne. Vous savez très bien que les prisons regorgent de nos gens. Un nombre disproportionné, très disproportionné, de prisons ont des prisonniers autochtones. Cela s'explique par la criminalisation systématique des lois canadiennes depuis 1870, depuis le temps où le premier ministre et la Chambre des communes ainsi que le nouveau régime au Manitoba se sont appropriés nos terres.
Vous avez parlé du coût, monsieur MacKay, du coût pécuniaire, mais il est temps d'examiner les autres coûts—les coûts humains.
Notre président national a dit que la question fait fureur en Saskatchewan. Pourquoi pensez-vous qu'on a commencé à faire la chasse de nuit? C'est parce que notre peuple ne pouvait pas chasser le jour. Voilà pourquoi on a ce genre de problème là-bas. Combien d'élus à Ottawa ou en Saskatchewan savent que la Métis Nation Wildlife Act en Saskatchewan interdit la chasse de nuit?
Quel genre de collaboration y a-t-il entre notre régime et les régimes canadiens pour s'assurer qu'on peut réglementer les choses comme nous le voulons? Nous prenez-vous pour des imbéciles? Croyez-vous que nous ne voulons pas assurer la sécurité de notre peuple? Nous sommes aussi inquiets que tout le monde.
Il faut tirer des leçons de l'époque de William McDougall, et des arpenteurs qui ont été envoyés avec lui. Riel les a arrêtés et dit, «Vous n'allez pas plus loin». Eh bien, ce pays n'ira pas plus loin en ce qui concerne nos droits.
• 1330
Gerald a dit, et je le répète: «Nous aussi nous voulons des
règlements.» Ils sont nécessaires. Toute société en a besoin.
D'ailleurs, la nation Métis en a déjà. Nous avons toujours eu nos
propres lois et nos propres règles. Nous voulons collaborer avec le
reste de la société canadienne pour garantir que nous en faisons
partie, mais ce n'est pas le cas.
Nos gens en ont assez. En Ontario, ils font valoir leur droit de chasser ou de pêcher pour assurer leur subsistance et ils le font dans leur collectivité, dans le bois, et nous savons à quel point certaines personnes peuvent être racistes, et ceux qui portent les insignes, ceux qui feront n'importe quoi pour nous harceler, ceux qui montrent leur attitude raciste envers nos peuples et le leur disent directement. Vous permettez ce genre de comportement; vous savez que ça va continuer, et ce, pour aussi longtemps que vous ne tenez pas compte de nos intérêts.
Les confrontations se multiplient au sein des nations Métis. Nous n'allons plus tolérer ce genre de traitement. Nous voulons faire partie de la société canadienne. Nous avons toujours voulu participer à la création d'une nation au Canada et à bien le faire, mais on a toujours fait la sourde oreille, et nous n'allons plus le tolérer. Ça ne peut plus continuer.
La présidente: Monsieur Lee, vous aviez quelque chose à dire?
M. Derek Lee: Je crois que je devrais, mais je dois faire attention de ne pas réagir de manière excessive. Je n'accepte pas qu'on me dise qu'il est scandaleux de proposer qu'une telle différence d'opinion sur l'application de la Constitution devrait être réglée devant les tribunaux. Il serait inadmissible de la régler dans un bureau quelque part avec des bureaucrates. Il serait peut-être juste de régler l'affaire dans un débat à la Chambre si on pouvait trouver une résolution ou une loi qui constituerait une solution acceptable à cette question.
Je n'ai aucun doute que le Parlement du Canada est tout à fait sensibilisé à l'histoire et au rôle de la nation métis. Je n'en ai aucun doute, et que crois qu'on connaît bien les événements historiques à l'origine de vos doléances. C'est tout documenté. Je peux vous assurer que nous sommes sensibles à votre cause.
Mais pour ce qui est d'une tribune qui établirait les règles de base constitutionnelles qu'Ottawa ou une province devraient suivre pour légiférer sur une question qui touche les Métis, à mon avis, il ne fait aucune différence que cela se fasse par des avocats dans un bureau ou devant un tribunal. À un moment donné, il va prendre la bonne décision. Une fois les règles de base établies, il est beaucoup plus facile de régler tous les cas individuels et financiers.
Nous nous écartons du sujet. Je me devais de réagir, et je dois dire que si nous voulons poursuivre ce dialogue, il faudra faire preuve d'énormément de respect mutuel pour le passé et pour le présent.
M. Tony Belcourt: Permettez-moi simplement de dire quelques mots à ce sujet...
La présidente: Allez-y. Je crois que votre conversation tourne peut-être autour d'un quiproquo. Je connais bien M. Lee et je suis sûr qu'il ne suggérait pas une contestation judiciaire au sens criminel. Je crois qu'il voulait parler d'un tribunal qui réglait les questions constitutionnelles. C'est tout. Il ne parlait pas d'arrêter un groupe de gens et de les envoyer en prison, et je crois que c'est ce que vous avez compris. Si c'est le cas, je crois que vous vous êtes trompé.
M. Tony Belcourt: Non, je crois avoir bien entendu M. Lee. Il parlait des questions constitutionnelles et de savoir si nous avions des droits ou non, et je ne suis pas d'accord pour dire qu'il faut régler ce genre de choses devant les tribunaux.
La présidente: Et il est d'avis que le système...
M. Tony Belcourt: Mais si vous me le permettez, madame la présidente...
Nous avions une résolution sur les droits des Métis dans l'Accord de Charlottetown. Nous avions l'accord relatif à la nation Métis. Chaque gouvernement au Canada, chaque assemblée législative au Canada, l'a approuvé. Nous avions négocié ce qui devait être la reconnaissance de nos droits.
Justice différée est justice refusée. La justice nous a été refusée en ce qui concerne nos droits territoriaux, parce que nous ne pouvons pas en discuter. Il n'y a aucune tribune où nous pouvons discuter des revendications territoriales. Nous devons donc recourir aux tribunaux.
Il a fallu dix ans à la Manitoba Métis Federation pour se rendre devant la Cour suprême du Canada; juste pour avoir le droit d'aller au tribunal. Cela a pris dix ans.
Vous dites que nous devrions porter ces questions devant les tribunaux. Vous savez que les tribunaux prennent une éternité à régler des questions. Pourquoi voulez-vous aller devant les tribunaux pour que ces derniers trouvent une résolution à ce qu'on a déjà pu discuter de façon raisonnable et approfondie.
Nous avons la Commission royale sur les peuples autochtones, qui a publié d'innombrables rapports qui fournit des preuves à l'appui de nos droits.
Le Parlement peut agir. Votre parti, le Parti libéral du Canada, dit qu'il croit au droit inhérent à l'autonomie gouvernementale et qu'il va l'appliquer. Et ensuite, il fait quelque chose de ce genre, faisant fi de nous.
Je deviens très frustré et fâché lorsque je pense à toutes nos générations qui ont tant lutté pour la justice. On nous dit maintenant que nous devons aller devant les tribunaux. Je regrette, monsieur Lee, mais c'est une vraie gifle.
La présidente: Je ne crois pas que c'était l'intention de M. Lee.
Monsieur MacKay, si je comprends bien, vous devez partir. C'est vrai?
M. Peter MacKay: Je ne veux pas retarder cette discussion. Encore une fois, je voudrais vous remercier tous d'être venus. La discussion a été très instructive.
M. Derek Lee: M. MacKay est notre responsable des activités sociales.
M. Peter MacKay: Mais pas du tout. Ce que ne je veux surtout pas faire, c'est retarder ces discussions. J'ai toujours préconisé une discussion ouverte. J'aurais aimé que nous ayons encore deux semaines pour entendre des groupes.
La présidente: Sur ce, je vous donne la permission de partir et nous devons lever la séance.
Les choses dites à ce comité ne tombent pas dans l'oreille d'un sourd. Nous avons bien compris votre message.
La séance est levée.