JURI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON JUSTICE AND HUMAN RIGHTS
COMITÉ PERMANENT DE LA JUSTICE ET DES DROITS DE LA PERSONNE
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le jeudi 20 novembre 1997
[Traduction]
La présidente (Mme Shaughnessy Cohen (Windsor—St. Clair, Lib.)): Nous sommes de retour. Le Comité permanent de la justice reprend son examen du projet de réglementation sur les armes à feu, conformément à l'article 32(5) du Règlement et au paragraphe 118(1) de la Loi sur les armes à feu.
Nous accueillons ce matin les représentants de la Gendarmerie royale du Canada, soit John L'Abbé, commissaire adjoint et directeur des Services d'information et d'identité judiciaire; J.A.J. Mike Buisson, directeur du Registre canadien des armes à feu, Services d'information et d'identité judiciaire; et Murray Smith, expert scientifique, Armes à feu, Laboratoire judiciaire central.
Je sais que vous aviez des notes, mais comme elles ne sont pas traduites, il n'y aura pas de mémoire pour les membres du comité. Vous pouvez commencer tout de suite votre exposé et je suis sûre que nous aurons beaucoup de questions à vous poser.
Le commissaire adjoint John L'Abbé (directeur, Services d'information et d'identité judiciaire, Gendarmerie royale du Canada): Merci beaucoup, madame la présidente.
Mesdames et messieurs, membres du comité, je voudrais tout d'abord vous remercier de l'occasion qui nous est donnée aujourd'hui de vous parler de cette réglementation.
• 1110
La GRC a toujours appuyé la Loi sur les armes à feu,
l'enregistrement des armes à feu et un contrôle accru des armes à
feu. En fait, la GRC tient un registre des armes à feu depuis les
années 30, et c'est une responsabilité que nous assumons avec
fierté.
Aux termes de la Loi sur les armes à feu, la GRC s'est vu confier de nouvelles responsabilités qui seront directement touchées par cette réglementation.
D'abord, la GRC sera chargée d'administrer le système canadien d'enregistrement des armes à feu par l'entremise du directeur du registre des armes à feu. Le directeur actuel, le surintendant Mike Buisson, m'accompagne aujourd'hui.
À titre d'information, il convient de vous signaler que le registre aura environ 180 employés pendant la période d'activité la plus intensive, c'est-à-dire pendant la mise en oeuvre de la loi. Après la période de mise en oeuvre, environ 90 employés permanents seront chargés de tenir le registre et le système d'enregistrement, et de délivrer des permis d'importation et d'exportation, de même que des permis de transporteurs d'armes à feu interprovinciaux.
Comme cette responsabilité relève désormais de la GRC, cette dernière s'intéresse vivement à la réglementation touchant l'enregistrement des armes à feu, la délivrance des certificats d'enregistrement et les permis d'importation et d'exportation. La Gendarmerie royale a d'ailleurs été consultée dans le cadre de l'élaboration de cette réglementation.
Pour régler le problème de la mise en oeuvre tardive des mesures de contrôle frontalier, nous avons décidé dans l'immédiat de nous appuyer sur les dispositions de la Loi sur les tarifs douaniers.
[Français]
Le ministère de la Justice a aussi demandé à la GRC d'administrer la Loi sur les armes à feu dans les provinces qui ont indiqué leur intention de se retirer de son application.
De ce fait, nous avons un intérêt particulier pour tous les règlements déposés, incluant ceux sur les champs de tir, les expositions d'armes à feu et les agents publics.
[Traduction]
Je voudrais surtout aborder aujourd'hui la question de la vérification des armes à feu et des certificats d'enregistrement des armes à feu. De l'avis de la GRC, une procédure de vérification, comme celle prévue dans les conditions de cession de la réglementation dont le comité est actuellement saisi, s'impose pour assurer la bonne marche de tout système d'enregistrement des armes à feu.
La possibilité que des erreurs se glissent dans les demandes présentées par des membres du public, qui peuvent ne pas bien connaître le système de classement des armes à feu, est extrêmement forte. Si les services de police canadienne ne sont pas convaincus de l'exactitude des données introduites dans le système canadien d'enregistrement des armes à feu, ils ne vont pas exploiter celui-ci à fond. Si cela se produit, ce dernier ne pourra atteindre son objectif principal, qui est d'assurer et même d'accroître la sécurité du public.
C'est d'ailleurs à cette fin que la GRC travaillera avec les contrôleurs des armes à feu dans tout le Canada pour établir une procédure administrative permettant de garantir que la norme actuelle concernant l'enregistrement des armes à feu à autorisation restreinte et prohibée continuera de s'appliquer, c'est-à-dire depuis la date d'entrée en vigueur de la loi jusqu'à l'application de la vérification universelle de toute cession d'armes à feu en l'an 2003.
Le processus de vérification sera certainement très lent. De nombreux propriétaires d'armes à feu voudront attendre plusieurs décennies pour procéder à la cession de leurs armes à feu. À long terme, un retard de cinq ans pour le lancement de ce processus ne sera sans doute pas critique. Ce qui est critique, par contre, c'est que le gouvernement défende les solutions administratives que trouveront le directeur et les contrôleurs provinciaux des armes à feu pour régler les problèmes techniques qui surgiront dans l'intérim.
En conclusion, nous sommes convaincus que les organismes d'application de la loi conviendront avec nous qu'un système amélioré de contrôle des armes à feu accroîtra la protection du public. Mesdames et messieurs, nous avons hâte de faire notre part.
Encore une fois, je remercie le comité d'avoir bien voulu nous donner ce temps de parole.
[Français]
Le surintendant Buisson, directeur du Registre canadien des armes à feu, M. Murray Smith, expert scientifique en chef, Armes à feu, du laboratoire judiciaire central, et moi-même nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.
[Traduction]
Je suis à votre disposition pour répondre aux questions du comité.
La présidente: Merci.
Comm. adj. John L'Abbé: Madame la présidente, avant de partir, je dois attirer votre attention sur le tableau de présentation—que vous avez sans doute remarqué, d'ailleurs— indiquant les différents types d'armes à feu. Si nous avons préparé ce tableau pour le comité, c'est parce que nous voulions pouvoir montrer aux membres comment on procède à l'identification des armes à feu. Vous avez donc la possibilité de faire le tour et d'examiner les différents dessins. Vous pourrez y voir les marques, les modèles, et les numéros de série. Nous avons remis au greffier une série de photos qui mettent en lumière les difficultés que nous rencontrons quand nous essayons d'identifier les armes à feu.
Dans mon bref exposé, j'ai parlé de la possibilité que des erreurs se glissent dans les demandes. Nous savons, depuis 1930, que même ceux qui ont beaucoup de connaissances se trompent parfois, d'où la nécessité d'instaurer un processus réaliste. Nous voulons surtout éviter que les services de police se voient imposer un plus lourd fardeau administratif. Nous ne voulons pas que ce système devienne trop lourd. Des familles d'un bout à l'autre du pays possède des armes d'épaule depuis de nombreuses années et nous ne voulons pas que ce système leur crée des ennuis.
Le fait est que 99,9 p. 100 des citoyens canadiens sont des gens honnêtes qui travaillent fort et qui respectent la loi. Ils ne cherchent pas à contourner la loi. Ils sont au contraire très préoccupés par leur sécurité—c'est-à-dire la leur et celle de leurs amis et voisins dans les localités où ils vivent.
Comme je suis agent de police depuis presque 32 ans, et que j'ai travaillé aux paliers municipal, provincial et fédéral, que ce soit comme membre d'une équipe chargée d'enquêter sur d'éventuelles infractions commises par les députés, sous l'égide de notre Section des enquêtes fédérales spéciales, ou dans d'autres secteurs, j'ai appris au fil des ans que si le Canada est considéré comme le meilleur pays au monde, ce n'est certainement pas pour rien. Ce n'est pas notre superficie qui fait du Canada un pays magnifique. Non, c'est grâce à nous tous.
Je vous donne peut-être l'impression de faire un discours politique, mais ce n'est pas du tout mon objectif. Je suis fermement convaincu de ce que je vous dis.
Au moment d'élaborer des nouveaux systèmes, je sais que mon équipe et celle du ministère de la Justice se sont toujours efforcées de trouver un moyen terme entre les positions les plus extrêmes. Il faut absolument que la solution soit pratique. Elle doit être raisonnable et on doit pouvoir l'appliquer dans la pratique.
Vous ayant fait ces quelques remarques, je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.
La présidente: Merci. Il serait peut-être bon de prendre quelques minutes pour permettre aux députés de les examiner avant qu'on entame la période des questions, n'est-ce pas?
Comm. adj. John L'Abbé: Oui, absolument. Allez-y.
La présidente: Très bien. C'est ce que nous allons faire.
Comm. adj. John L'Abbé: Et Murray Smith sera là pour vous donner tous les détails et vous expliquer les raisons pour lesquelles ils sont là.
La présidente: Nous allons faire une pause de cinq minutes pour permettre aux députés d'examiner cette information.
La présidente: Nous rouvrons la séance. Notre pause a duré plus de cinq minutes, mais je crois qu'elle a été utile à tous les députés, sauf peut-être à Mme Finestone, qui sait tout sur les armes à feu.
L'honorable Sheila Finestone (Mont-Royal, Lib.): Je voulais juste vous dire que
[Note du rédacteur: Inaudible]... la Loi sur les mines antipersonnel, je pense qu'on devrait les éliminer.
La présidente: Ce sont des propos provocateurs dans ce comité-ci.
Allez-y, monsieur Ramsay. Vous avez 10 minutes.
M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Merci, madame la présidente. Je tiens tout d'abord à remercier nos témoins de leur présence et surtout à remercier ce monsieur. Je pense que vous avez défini de façon très claire les défis que nous avons à relever et les difficultés que nous allons sans doute rencontrer au fur et à mesure de la mise en oeuvre de ce système d'enregistrement.
Vous avez dit qu'il y a de fortes chances pour que des renseignements non vérifiés soient introduits dans le système, et c'est tout à fait normal. Les gens qui n'ont pas obtenu d'AAAF possèdent des armes qu'ils n'ont pas l'intention de vendre ou d'échanger, mais simplement de garder. Ils vont remplir le formulaire au mieux de leur connaissance—ce formulaire ou un autre de même genre—ils vont le transmettre aux autorités et un certificat d'enregistrement sera délivré en fonction de cette information. Cette dernière sera ensuite introduite dans le système. C'est bien cela?
Comm. adj. John L'Abbé: Oui.
M. Jack Ramsay: Très bien. Le problème—et vous en avez vous-même parlé dans votre exposé, ce que j'apprécie, d'ailleurs—c'est que si un citoyen commet une erreur involontaire—disons qu'il mette un trois à la place d'un huit, ou un sept à la place d'un quatre, enfin peu importe—ces données qui seront introduites dans le système ne permettront pas d'identifier cette arme à feu si les neuf autres particularités sont les mêmes—comme c'est le cas pour les Lee-Enfields. Il y a des milliers de Lee-Enfields au Canada, et la seule chose qui permet de les distinguer les unes des autres, c'est leur numéro de série. Il y a les Cooey de calibre .22 et toutes sortes d'autres armes à feu qui tombent dans la même catégorie.
S'il m'arrive de commettre une erreur involontaire au moment d'enregistrer mon arme à feu—je me trompe d'un chiffre, mettons—à ce moment-là, mon arme à feu ne sera pas bien enregistrée. C'est bien cela?
Comm. adj. John L'Abbé: L'arme à feu sera enregistrée, et s'il s'agit d'une erreur faite de bonne foi—personne n'est parfait dans ce monde—nous allons devoir trouver une façon de corriger ce problème. D'après ce que j'ai pu comprendre, pendant la planification de ce système et j'avoue que je ne suis pas au courant de tous les détails de son fonctionnement—on a prévu des renvois pour éviter justement le problème des erreurs de transposition de chiffres pour certaines séries.
L'avantage d'un système d'enregistrement—même dans votre exemple, monsieur Ramsay, où le numéro de série est mal indiqué ou il y a transposition de chiffres—c'est que si vous êtes cambriolé et qu'on vous vole votre arme à feu, nous avons au moins un point de départ. Vous avez été membre de la GRC; vous avez fait beaucoup d'enquêtes et vous savez donc de quoi je parle. Quand nous examinons la preuve, nous ne nous intéressons pas seulement à un ou deux ou trois aspects d'une affaire, nous essayons de nous pencher sur tous les détails. S'il s'agit d'une erreur de transposition faite de bonne foi, tout le monde va la reconnaître comme telle, même dans le cadre du système actuel. Dans le cadre du système d'enregistrement actuellement en vigueur, il arrive que les gens commettent des erreurs involontaires. Quand nous nous en rendons compte, nous y apportons les modifications qui s'imposent. Je peux vous assurer que notre base de données nationale pour les armes à feu n'est pas parfaitement exacte. D'ailleurs, je ne connais aucun organisme au Canada qui puisse se vanter d'avoir un système absolument parfait.
• 1140
Donc, je suis tout à fait d'accord avec vous. La
vérification est certainement une préoccupation pour nous. J'ai
même dit dans mon petit exposé liminaire que la vérification est
essentielle. J'ai mentionné que nous aimerions que le comité
envisage de prévoir la vérification des armes à feu à
autorisation restreinte dont les détails sont actuellement
consignés dans nos dossiers. J'aimerais que cela continue d'être
le cas, afin que nous n'imposions pas un fardeau trop lourd aux
propriétaires d'armes à feu. Ils sont actuellement tenus de le
faire. Ils détiennent des certificats qui indiquent les numéros
de série de leurs armes à feu, et nous aimerions maintenir ce
même système pour les armes de poing et les armes prohibées. Ce
sont ces armes-là qui nous préoccupent le plus.
À mon avis, les autres personnes—c'est-à-dire 99,9 p. 100 des citoyens canadiens—vont bien s'acquitter de leurs responsabilités. Ils vont regarder les numéros, et nous-mêmes nous allons essayer de leur donner un coup de main. Je n'ai jamais connu d'agent de police au Canada qui ne soit pas disposé à aider un citoyen qui lui demande de l'aide. Nous espérons également solliciter le concours de clubs de propriétaires d'armes à feu, de gens qui s'y connaissent et de propriétaires de magasins, de sorte que quand des gens qui ne sont pas des experts leur demandent des renseignements, ils pourront les aider.
Donc, pour répondre à votre question, dans un sens, vous avez raison de dire que l'arme ne sera pas correctement enregistrée, puisque l'information ne sera pas tout à fait exacte. Mais même pour l'immatriculation des véhicules, il arrive que les numéros de série ne soient pas bien consignés sur les formulaires. Quelqu'un finit par se rendre compte de l'erreur au moment du renouvellement de l'immatriculation ou du permis de conduire. Il arrive aussi très souvent que personne ne s'en aperçoive; malgré tout il s'agit d'une erreur involontaire.
Je suppose que ce qui m'inquiète le plus, ce sont les gens qui vont profiter du système pour y consigner des renseignements inexacts.
M. Jack Ramsay: Je voudrais vous poser une question très précise et peut-être même technique. Si j'indique le mauvais numéro de série sur le formulaire d'enregistrement de mon arme à feu, et si je reçois ensuite un certificat d'enregistrement établi en fonction de ces données, et si l'information qui figure sur ce certificat ne cadre pas avec l'information qui est consignée sur mon arme à feu, à mon avis, strictement parlant, cette arme à feu n'est pas vraiment enregistrée.
Mettons que je suis cambriolé chez moi à Camrose et qu'on retrouve mon arme à feu sur le lieu d'un crime commis à Montréal. Si vous versez le numéro de série et toutes les autres particularités de cette arme à feu dans votre système, vous n'allez pas être en mesure de déterminer que j'en suis le propriétaire, car j'aurais commis une erreur en consignant sur le formulaire les particularités de l'arme à feu—en l'occurrence, le numéro de série—de sorte qu'un mauvais renseignement aura été introduit dans votre système. À ce moment-là, vous ne serez pas en mesure de déterminer, grâce à votre système d'enregistrement, que je suis le propriétaire de cette arme à feu. C'est bien cela?
Comm. adj. John L'Abbé: Non, je ne pense pas que vous ayez tout à fait raison. Mike Buisson, qui connaît beaucoup mieux ce système, va répondre à votre question.
Allez-y, Surintendant.
Le surintendant J.A.J. (Mike) Buisson (directeur, Registre canadien des armes à feu, Services d'information et d'identité judiciaire, Gendarmerie royale du Canada): Monsieur Ramsay, la situation que vous décrivez se produit assez fréquemment au Canada. Il arrive soit que les armes à feu ne soient pas enregistrées dans notre registre, soit qu'elles y soient enregistrées et, pour une raison ou une autre, que les numéros de série ne soient pas bien indiqués sur la demande, comme vous venez de le dire.
Mais il y a de l'espoir. Nous avons des pistes d'enquête qui nous aident, comme le disait M. L'Abbé, de même que des mécanismes internes et une section de correspondance qui nous aide à retrouver les propriétaires d'armes à feu. Nous faisons une recherche à la fois interne et externe.
Prenons l'exemple d'un revolver de calibre .22. Il est arrivé une fois au Nouveau-Brunswick que quelqu'un soit venu nous dire qu'un crime—un meurtre—avait été commis à l'aide d'un revolver de calibre .22. À notre avis, il devait s'agir soit d'une carabine, soit d'un revolver. Mais certains témoins disaient qu'ils avaient vu une arme à feu à canon court, par conséquent, il était probable qu'il s'agisse d'un pistolet ou d'un revolver.
• 1145
Nous avons procédé, à l'interne, à une recherche que nous
qualifions d'administrative, c'est-à-dire une recherche autonome,
qui nous a permis de retrouver un seul détenteur d'enregistrement
dans un rayon de 50 milles. Par la suite, grâce à cette piste
d'enquête, ce détenteur a été accusé et trouvé coupable de
meurtre. Voilà un exemple du genre de recherche interne que nous
sommes en mesure d'effectuer.
Si les numéros de série sont inexacts ou si nous constatons qu'ils le sont, vous avez raison de dire, monsieur Ramsay, que l'agent de police à Toronto qui interroge le système du Centre d'information de la police canadienne ne va certainement pas obtenir une réponse pertinente. Le système n'indiquera pas que cette arme à feu a été perdue ou volée, ou qu'elle appartient à quelqu'un.
L'étape suivante pour l'agent de police est de s'adresser au Registre canadien des armes à feu, c'est-à-dire l'ancienne Section de l'administration et de l'enregistrement des armes à feu, la SAEAF, qui procède à une recherche interne en vue de retrouver ces armes à feu.
Cette année, nous avons traité 656 demandes. Il s'agissait d'armes à feu sur lesquelles les agents de police dans tout le Canada avaient attiré notre attention. Grâce à une recherche interne, nous avons réussi à retrouver les propriétaires de 314 armes à feu, par rapport aux 656 qui faisaient l'objet de demandes de recherche. Dans les autres cas, nous avons dû nous adresser à des organismes étrangers, soit en Europe, soit dans d'autres pays du monde, pour qu'on nous aide à identifier les armes à feu, nous avons dû demander le concours des autorités américaines chargées du contrôle de l'alcool, du tabac et des armes à feu.
Donc, nous avons accès à toutes sortes de possibilités quand il s'agit de retrouver les propriétaires d'armes à feu.
M. Jack Ramsay: Est-ce qu'il me reste du temps, madame la présidente? J'ai une dernière question à poser.
La présidente: Allez-y.
M. Jack Ramsay: Merci.
Je comprends tout cela, et je comprends que vous avez d'autres possibilités en dehors du système actuel d'enregistrement des armes de poing et des armes prohibées, mais je vous demande en réalité si ce système d'enregistrement est bien utile s'il ne permet même pas d'identifier une arme à feu non vérifiée parce qu'une erreur s'est glissée dans le système.
J'ai posé cette question hier, et je vais vous la poser également. Si on trouve une arme à feu sur le lieu d'un crime—ou si on la trouve tout court—et si votre recherche dans ce système ne donne rien, allez-vous présumer que cette arme à feu n'est pas enregistrée, ou l'inverse?
Sdt Mike Buisson: Nous présumons qu'elle est enregistrée, monsieur Ramsay, et nous continuons à chercher tant que nous n'avons pas éliminé toutes les pistes, comme je viens de vous l'expliquer. Je ne vais pas répéter tous ces détails. Disons que nous continuons nos recherches jusqu'à ce que nous puissions déterminer qu'elle n'est pas enregistrée, et à partir de là, nous commençons à faire des recherches à l'étranger et auprès des détaillants et des manufacturiers.
M. Jack Ramsay: Très bien. Êtes-vous donc en train de me dire qu'une carte d'enregistrement délivrée à un propriétaire d'arme à feu dont le numéro de série ne cadre pas avec le numéro de série qui figure sur l'arme à feu est une carte d'enregistrement valable et que cette arme à feu est en fait enregistrée? C'est bien cela que vous nous dites?
Comm. adj. John L'Abbé: Je peux peut-être répondre à votre question. Cette carte dont vous parlez serait une carte non vérifiée...
M. Jack Ramsay: Est-ce qu'elle suffit pour enregistrer l'arme à feu?
Comm. adj. John L'Abbé: Pardon?
M. Jack Ramsay: S'agit-il d'une preuve légale d'enregistrement d'arme à feu, aux termes de la loi?
Comm. adj. John L'Abbé: À condition que cette personne n'ait pas d'intention criminelle en ne consignant pas le bon numéro de série sur le formulaire; c'est-à-dire que s'il s'agit d'une erreur commise de bonne foi...
M. Jack Ramsay: Non, ce n'est pas ma question. Je ne veux pas savoir s'il est coupable ou non en vertu d'une disposition particulière de la loi. Je me demande simplement si cette arme à feu serait considérée enregistrée aux yeux d'un tribunal.
Comm. adj. John L'Abbé: Je ne sais pas si je peux vraiment répondre à cette question. Ce serait au tribunal d'en décider.
Et si je vous posais la même question, monsieur Ramsay? Mettons que vous faites immatriculer votre véhicule, parce que vous voulez vous conformer à la réglementation provinciale dans ce domaine, et que vous commettez une erreur. À votre avis, votre véhicule serait-il immatriculé ou non?
M. Jack Ramsay: Mais là n'est pas la question. Il s'agit de savoir si cette arme à feu est légalement enregistrée, aux termes de la loi.
Comm. adj. John L'Abbé: Je ne peux pas vraiment vous répondre.
La présidente: Il estime ne pas pouvoir répondre à la question, mais à mon avis, la réponse, en l'absence...
M. Jack Ramsay: Ne me proposez pas de réponse à moins que vous ne soyez disposée à...
La présidente: Je fais ce que j'ai envie de faire. C'est moi qui préside ce comité.
M. Jack Ramsay: Si vous voulez vous mettre à la place du témoin, allez-y.
La présidente: J'essaie simplement de vous faire comprendre qu'en l'absence d'une intention criminelle, cette arme à feu est jugée enregistrée au sens de la loi. C'est ce qu'il vous a répondu.
M. Jack Ramsay: Mais comment peut-elle être enregistrée si le numéro de série sur l'arme à feu proprement dite n'est pas le même? Ça n'a rien à voir avec l'intention du propriétaire.
La présidente: Merci, monsieur Ramsay.
Monsieur Bellehumeur, avez-vous des questions? Vous disposez de 10 minutes.
[Français]
M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Moi aussi, je vous remercie pour les explications que vous nous avez données au sujet de ces règlements.
Selon vous, quel pourcentage des armes à feu utilisées pour la perpétration de crimes sont entrées au Canada par effraction ou n'ont tout simplement pas été déclarées?
Par exemple, on sait que les armes que possèdent les bandes de motards criminalisés ne sont pas légales ici. On sait qu'il y a un commerce et de la vente d'armes; on sait tout cela.
Disposez-vous de statistiques indiquant quel pourcentages des armes à feu utilisées au Canada pour perpétrer des crimes auraient été enregistrées avec une loi semblable?
Comm. adj. John L'Abbé: Je crois que le ministère de la Justice a examiné ces données. Je n'ai pas de statistiques à ce sujet devant moi aujourd'hui, mais je crois pouvoir affirmer que la plupart des motards n'enregistrent pas les armes à feu qu'ils achètent.
Lors des saisies effectuées récemment, les caches d'armes qu'on a trouvées ne comprenaient pas que des revolvers et des pistolets, mais aussi des carabines et des fusils. On ne sait pas si ces armes ont été achetées légalement chez Canadian Tire ou chez Sears. On n'a pas de façon de le déterminer. La plupart des armes de ce calibre, tels des fusils et des carabines, sont manufacturées à l'extérieur du Canada. Grosso modo, on pourrait se servir de la Loi sur les douanes pour essayer de confirmer leur provenance. Cependant, le système que nous appuyons donnerait aux policiers la possibilité de déterminer si l'arme est enregistrée ou non.
Je sais que je ne réponds peut-être pas directement à votre question. Je n'ai malheureusement pas de statistiques, mais je sais que, tout particulièrement dans le cadre de nos liaisons avec le ATF, on a fait beaucoup de travail.
Par exemple, il y a six ou sept mois, nous nous sommes réunis avec nos collègues américains, qui nous ont fourni des détails sur des armes achetées aux États-Unis par des Canadiens. J'avais demandé à M. Buisson de faire une vérification de ces armes que se procuraient des Canadiens et qui n'étaient pas enregistrées. Quand on a fait la vérification du CIPC, on a découvert qu'il s'agissait de bandits et de trafiquants de drogue. Environ deux mois plus tard, munie de l'information que nous lui avions transmise, la police locale émettait des mandats de perquisition et trouvait certaines de ces armes. Cela nous donne des indices. On n'a pas que l'enregistrement, mais aussi des systèmes de vérification, comme le mentionnait M. Buisson.
Bien que je n'aie pas les statistiques, je suis assuré qu'il serait utile que le comité examine l'information contenue dans le rapport The Illegal Movement of Firearms in Canada publié par le Firearms Smuggling Working Group en avril 1995.
M. Michel Bellehumeur: Est-ce qu'on pourrait y lire les pourcentages?
Comm. adj. John L'Abbé: Je ne le sais pas.
M. Michel Bellehumeur: Tout est inclus là-dedans?
Comm. adj. John L'Abbé: Oui, il y a des pourcentages et des statistiques.
M. Michel Bellehumeur: Cela pourrait peut-être s'avérer intéressant pour moi qui n'ai pas siégé au comité qui a étudié la Loi sur les armes à feu. Ce rapport a-t-il déjà été déposé?
[Traduction]
La présidente: C'est possible.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Je vais tenter de le vérifier.
Le Bloc québécois appuie la Loi sur l'enregistrement des armes à feu, mais nous convenons que cette loi n'est pas tout. Je cherche une méthode qui nous permettrait d'améliorer le règlement. Qu'on ait la loi et les règlements qu'on veut, on est d'accord pour dire qu'il y a une série d'armes à feu qui seront utilisées pour des crimes. Il est impossible de les répertorier toutes à cause du commerce des armes qui se fait.
Ma dernière question portera sur l'enregistrement en tant que tel au niveau administratif. Je crois que cela s'avérera extrêmement difficile, comme cela a pu l'être au début, lorsqu'on a commencé à enregistrer les automobiles ou quoi que ce soit d'autre.
• 1155
Selon vous, est-ce que l'inscription sur le permis de
conduire des renseignements relatifs à la possession
d'armes ne serait pas pour
les provinces qui ont décidé d'appliquer cette
loi une façon de simplifier le suivi ou d'augmenter les
retombées de l'enregistrement?
Comm. adj. John L'Abbé: C'est une très bonne question, mais il faut faire attention de ne pas mélanger les pommes et les oranges. L'administration de l'enregistrement des véhicules et des permis est de compétence provinciale, tandis que le projet de loi C-68 relève du fédéral.
M. Michel Bellehumeur: Dans le cas du Québec, ce sera la contrepartie provinciale qui va l'appliquer.
Comm. adj. John L'Abbé: Ce serait difficile d'incorporer tous ces renseignements dans un document. Le permis de conduire n'équivaut pas nécessairement à un permis de possession d'armes à feu. Je pense qu'on se compliquerait pas mal la vie ainsi.
M. Michel Bellehumeur: D'accord.
Comm. adj. John L'Abbé: Ce serait une bonne idée, mais l'utilisation de cette information est bien différente. On doit se rappeler que l'information recueillie dans le cadre du projet sur les armes à feu ne doit pas être divulguée à tout le monde. Il en sera de même pour les règlements qui régissent le CIPC. On aura accès à l'information, mais il faudra en faire une utilisation uniforme—«a consistent use» comme on dit en anglais—pour mener des enquêtes et s'assurer que les armes ne tombent pas entre les mains de personnes qui ne devraient pas en avoir.
Comme policiers et comme citoyens, ne trouvons-nous pas qu'il y a assez de meurtres et assez de pertes de vies au Canada à l'heure actuelle? En voyageant dans le monde, on constate qu'il y a des armes partout, sauf au Canada. Il me semble qu'on a le devoir d'essayer de se protéger avec un système raisonnable. C'est cela qu'on essaie de faire. Je suis encore en train de prêcher et je devrais m'en excuser. Je ne veux pas prêcher; je veux simplement faire valoir mon point de vue.
M. Michel Bellehumeur: Sauf le dimanche.
Comm. adj. John L'Abbé: Sauf le dimanche. C'est cela, monsieur l'abbé, monsieur le curé.
Des députés: Ah, ah!
[Traduction]
La présidente: Merci, monsieur Bellehumeur.
Comm. adj. John L'Abbé: Monsieur Ramsay, il faut dire «vicaire» en français.
[Français]
J'espère que ça répond un peu à votre question.
[Traduction]
La présidente: Monsieur MacKay, vous avez 10 minutes.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Merci, madame la présidente.
Je me joins à mes collègues pour remercier ces messieurs d'avoir accepté de venir éclairer notre lanterne. Comme vous le savez, cette question va certainement susciter des controverses.
Je voudrais reprendre le thème soulevé par M. Bellehumeur. Je pars du principe que le principal objet de la loi et du système d'enregistrement plus particulièrement est d'enregistrer plutôt que de contrôler les armes à feu. D'autres lois qui ont précédé celle-ci étaient davantage axées sur la sécurité que sur l'enregistrement.
Ce système d'enregistrement va toucher les Canadiens qui emploient actuellement les armes à feu de façon illégale. Il y a cependant des clubs de propriétaires d'armes à feu, des clubs de tir, des chasseurs et d'autres personnes qui emploient leurs armes à feu pour des activités tout à fait légales. Ils ont raison de dire qu'on soit d'accord ou non, c'est à eux de décider. Cette réglementation va entériner un système d'enregistrement bureaucratique, et s'ils décident de ne pas s'y conformer, une activité précédemment jugée légale deviendra illégale et pourra faire l'objet de poursuites en vertu du Code criminel.
M. Bellehumeur a fait des remarques qui me semblent tout à fait appropriées et qui ne constituent aucunement un reproche à l'égard de la police. Je suis d'accord avec votre observation de tout à l'heure, selon laquelle 99,9 p. 100 des Canadiens respectent la loi. Mon grand-père disait que la criminalité est un peu comme la rouille; il va toujours en rester un peu. Elle ne vous empêchera pas de vous servir de votre pelle, mais elle sera toujours présente et ce n'est pas beau à voir. La police fait évidemment ce qu'elle peut pour combattre la criminalité, mais il va toujours en rester.
• 1200
Pour ce qui est de l'incidence de cette loi sur
l'utilisation des armes à feu, à mon sens, elle sera minime. Vous
avez dit vous-même, monsieur le commissaire adjoint que les
motards et les importateurs illégaux d'armes à feu ne vont pas se
précipiter sur vos bureaux pour enregistrer leurs armes. Cette
loi ne va pas régler le problème des armes à feu illégales qui
continuent de circuler, car qu'il s'agisse d'armes à feu qui ont
été transformées en armes à autorisation restreinte ou d'armes à
feu introduites au Canada qui sont par définition à autorisation
restreinte, ces armes-là ne vont pas être enregistrées.
Malheureusement, ce sont des armes qui vont servir à commettre
des crimes.
Je me rends compte que je vous sermonne un peu, mais je vous demanderais tout de même de réagir à ces quelques observations. J'estime que nous sommes en train de transformer des citoyens respectueux de la loi en criminels potentiels, surtout que l'enregistrement de ces armes n'aura aucun effet dissuasif direct sur les personnes qui décident de ne pas enregistrer leurs armes à feu parce qu'elles comptent s'en servir pour mener des activités illégales.
Comm. adj. John L'Abbé: Vous avez soulevé de nombreux points intéressants. Pour ce qui est de réagir à vos observations, monsieur MacKay, encore une fois, j'ai dit que la majorité des Canadiens respectent la loi. Mais il arrive également que des agents de police soient appelés à intervenir dans le cas de conflits familiaux. M. Ramsay, qui a fait ce genre de travail pendant longtemps quand il était agent de police, vous en dira autant, j'en suis sûr. C'est probablement l'une des situations les plus dangereuses auxquelles on peut être exposé.
Nous, dans les services de police, nous avons exercé des pressions pour obtenir cette loi. Comme vous le savez, l'ACCP et la GRC l'appuient et nous espérons que ce nouveau système—car il n'est pas encore tout à fait opérationnel; cela prend un certain temps—permettra aux agents de police de savoir que les protagonistes d'une querelle familiale pour laquelle ils ont été appelés peuvent posséder une arme à feu.
Je sais que notre cours de formation, et tous les cours de formation dispensés en Amérique du Nord, insistent sur le fait qu'il faut toujours supposer que l'autre individu a une arme à feu, ou une arme offensive d'un type ou d'un autre—peut-être un couteau—et par conséquent, nous sommes formés pour savoir réagir dans une telle situation. Mais supposons que vous arriviez sur le lieu d'une querelle familiale, que vous voyiez une arme à feu et que vous décidiez, pour protéger les personnes concernées, qu'il serait préférable de l'enlever pour le moment. Nous avions justement la possibilité de le faire en vertu des anciennes dispositions du Code criminel, et même la nouvelle Loi nous accorde une certaine marge de manoeuvre à cet égard. Imaginez que je sois en mesure, à titre d'agent de police, d'aller chez quelqu'un et de lui dire: écoutez, je constate que vous avez chez vous non seulement une carabine, mais deux fusils, une arme de calibre .22 et mettons une arme de poing.
Nous sommes déjà en mesure de prendre des mesures à l'égard des armes de poing. Le problème, ce sont les armes d'épaule—pour le moment, nous n'avons toujours rien. Si nous avons la possibilité de les enlever pour les mettre en lieu sûr, peut- être—et je dis bien peut-être—pourrons-nous aider quelqu'un. Peut-être serons-nous en mesure de prévenir des tragédies. Voilà donc une première chose que je voulais vous dire.
Je suis sûr que vous avez déjà entendu tout cela et vous êtes probablement en train de vous dire que ce système est loin d'être parfait à moins que les armes à feu soient enregistrées d'une façon ou d'une autre... Cela rejoint ce que disait M. Ramsay au sujet de l'exactitude de l'information, et pour ma part, je tiens à ce que les renseignements soient exacts. Nous ne pourrons jamais garantir qu'ils sont exacts à 100 p. 100, mais essayons de tirer le maximum du public canadien.
Si l'arme n'est pas enregistrée, nous pourrons au moins commencer à prendre des mesures évidentes. Il m'est arrivé d'arrêter des véhicules et de trouver des armes à feu dans le coffre, mais je n'étais pas en mesure de déterminer si ces personnes en étaient les propriétaires ou non. Quand on leur demandait si ces armes à feu leur appartenaient, même s'il s'agissait de voleurs, elles disaient toujours qu'elles en étaient les propriétaires. Comment pouvais-je savoir si c'était vrai ou non? Je n'en savais rien. Nous espérons par conséquent que ce nouveau système, même si des erreurs sont commises de temps à autre, va nous aider de ce côté-là.
M. Peter MacKay: Donc, en ce qui vous concerne, la participation des gens est assurée. Vous partez du principe que la majorité des Canadiens vont s'y conformer. Vous qui êtes agent de police savez certainement que tous les jours au Canada, des citoyens respectueux de la loi, c'est-à-dire des témoins innocents qui se présentent devant un tribunal à titre de témoins, se lèvent, mettent leur main sur la bible et disent des mensonges.
Si vous partez du principe que tout le monde y participera, que l'information sera exacte et que le véritable objet de ce système est d'assurer la protection du public et de sauver des vies lors de conflits familiaux et autres, eh bien, je suis tout à fait en faveur. Mais je n'en suis pas encore complètement convaincu.
• 1205
Est-ce que les crédits qui vont y être consacrés—pour
éliminer l'élément humain...? Je vous demande de répondre au nom
de votre organisation. Si ce nouveau système va vraiment coûter
85 millions de dollars, et non 400 millions de dollars, ne
vaudrait-il pas mieux consacrer cet argent au service d'analyse
d'empreintes génétiques, à l'amélioration du système du CIPC et à
l'amélioration des services de recherche d'enfants disparus? À
mon avis, ce système va alourdir les tâches administratives des
agents de police, au lieu de les laisser libres pour combattre la
criminalité dans les rues. Vu sous cet angle, pensez-vous
toujours qu'il est préférable de consacrer ces fonds à
l'enregistrement des armes à feu?
Comm. adj. John L'Abbé: Mon espoir, en tant que contribuable et membre de la GRC, c'est que nous tirons le maximum de chaque dollar que nous dépensons. Personnellement, je n'aurais jamais appuyé cette initiative—ni la GRC non plus, à mon avis—si j'avais été convaincu que c'était une perte d'argent.
J'estime sincèrement que s'il est appliqué correctement et raisonnablement, il va permettre de sauver des vies.
Vous voulez éliminer l'élément humain? Nous traitons tous les jours avec des êtres humains. Nous ne traitons pas avec des objets, mais avec des êtres humains. Je vois difficilement comment on peut éviter l'élément humain. Qu'est-ce qu'elle vaut, une vie humaine?
M. Peter MacKay: Je n'ai jamais dit qu'il faut éliminer l'élément humain.
Comm. adj. John L'Abbé: Je respecte votre opinion, monsieur MacKay, je tenais à vous expliquer la raison de ma décision. Elle peut être bonne ou mauvaise—je n'en sais rien, mais voilà les facteurs dont j'ai tenu compte.
M. Peter MacKay: Pour ce qui est des agents de police qui sont sur la première ligne, vous dites que la très grande majorité d'entre eux soutiennent cette initiative.
Tout d'abord, j'aimerais que vous me disiez pour quelles raisons vous en êtes si convaincu. Deuxièmement, ne va-t-il pas en résulter une charge de travail accrue pour ces agents? Est-ce qu'on a tenu compte de cela en calculant les coûts?
Songez un instant à ce que les agents de police vont désormais être tenus de faire, à la formation qu'ils devront recevoir, et au travail supplémentaire que va entraîner l'application de ce système. Va-t-il en résulter une augmentation du nombre de demandes de mandat? Va-t-il falloir augmenter le nombre de juges de la paix pour composer avec cette avalanche de demandes de mandats de perquisition que je prévois ?
Comm. adj. John L'Abbé: D'abord, en ce qui concerne le degré de soutien de cette initiative par les policiers, je mentionnais tout à l'heure que l'Association canadienne des chefs de police et la direction supérieure de l'organisation ont participé à l'élaboration et au dépôt de la loi et des règlements d'application antérieurs et actuels. Ils sont donc tout à fait conscients des coûts qui peuvent en découler.
À mon avis, personne n'a jamais voulu accroître la charge de travail des agents de police. Vous savez bien que le travail d'un policier consiste surtout de nos jours à gérer de l'information afin d'assurer la sécurité du public et se protéger lui-même.
Quand nous avons étudié la question... il est vrai que dans certains cas, cela pourrait créer plus de travail pour les agents de police. Dans d'autres régions où nous faisons appel à des membres civils—nous essayons justement de recourir à des membres civils dans les provinces de l'Ouest qui ont opté pour la non- participation—c'est-à-dire l'Alberta, la Saskatchewan, le Manitoba, et les Territoires du Nord-Ouest—nous nous efforcerons de faire appel à eux le plus possible pour éviter d'alourdir le fardeau des agents de police qui travaillent sur le terrain.
La technologie peut d'ailleurs nous aider. Je pense que le ministère de la Justice et nos autres partenaires examinent de nouveaux moyens technologiques qui nous aideront à éliminer ce fardeau. Il y a quelque chose de très positif dans tout cela. Il ne faut jamais l'oublier. Qui vivra verra.
Pour ce qui est des agents individuels, je peux évidemment parler avec cinq agents différents et obtenir cinq opinions différentes.
Je fais du tir à la cible. J'ai des armes de poing dont je me sers pour faire du tir de combat. Je suis également chasseur. J'ai un fusil et deux carabines. Cela ne me dérange pas d'avoir à payer...
Je les garde dans une armoire qui est fermée à clé. Je les garde toujours en lieu sûr, comme je suis censé le faire. Pourquoi? Parce que cela me semble plus prudent. C'est pour empêcher les gens de mettre la main dessus et de se faire mal.
M. Peter MacKay: Le fait que vous soyez tenu en vertu de la loi de les garder dans une armoire fermée à clé et de mettre les munitions à part n'a rien à voir avec ce système d'enregistrement. L'exigence de les garder en lieu sûr ne fait pas partie de cette réglementation.
Comm. adj. John L'Abbé: Elle m'oblige à enregistrer mon fusil et mes carabines. Je vous dis simplement qu'en tant que particulier, cela ne me dérange pas tellement de le faire.
M. Peter MacKay: Un dernier point concernant la collecte d'information. M. Bellehumeur proposait tout à l'heure que cette information figure éventuellement sur le permis de conduire, par exemple. Je crois comprendre que cette information demeure confidentielle. Elle sera emmagasinée dans un ordinateur central.
Je voudrais savoir, cependant, s'il va y avoir des renvois au système du CIPC. Si vous interrogez l'ordinateur du Centre d'information de la police canadienne, va-t-il vous fournir les données suivantes: l'existence d'un casier judiciaire, le propriétaire de l'arme à feu, et les armes à feu qui sont enregistrés au nom de cette personne? Est-ce prévu, et jusqu'où ça peut aller? Au départ, les numéros d'assurance sociale ne devaient servir qu'à une chose. Mais ils sont devenus un moyen très courant d'identifier des individus. Est-ce qu'on peut s'attendre un jour à ce que la carte d'assurance sociale porte une mention indiquant qu'on est propriétaire d'armes à feu?
Comm. adj. John L'Abbé: Ce n'est pas prévu. Mais je ne peux pas vous parler de l'avenir.
M. Peter MacKay: Oui, bien sûr. Ce serait au gouvernement de prendre une telle décision.
Comm. adj. John L'Abbé: Pour le moment, il s'agit d'une recherche limitée. Autrement dit, si l'agent de police a une raison d'interroger le système pour voir si vous avez des armes à feu, il va procéder à une interrogation spécifique sur John L'Abbé, mettons. Il cherchera à savoir si John L'Abbé possède ou non des armes à feu. Ce sera donc une recherche spécifique.
Dans le cas où vous avez affaire à des criminels qui se servent d'armes à feu et où que vous voulez vous renseigner sur eux, vous procéderez peut-être à un interrogatoire automatique, en passant par le SARC, ou un autre système de même genre. Le SARC est le système automatisé de renseignements sur la criminalité mais dans des cas bien précis. Vous n'allez pas faire ça pour une opération normale. Si on vous arrête pour une infraction au code de la route, l'agent fera peut-être une recherche sur le CIPC, mais pourquoi va-t-il chercher à savoir si vous avez une arme à feu, à moins d'avoir des motifs raisonnables et probables de croire que vous possédez une?
M. Peter MacKay: Mais cette information sera disponible par l'entremise du CIPC?
Comm. adj. John L'Abbé: Oui, elle l'est déjà.
M. Peter MacKay: Voilà leur motivation.
Comm. adj. John L'Abbé: Le CIPC représente l'outil qu'utiliseront les policiers pour accéder à cette information.
La présidente: M. DeVillers est notre prochain intervenant.
M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord, Lib.): Je n'ai pas vraiment de questions à poser. C'est plutôt un rappel au Règlement.
La présidente: Allez-y.
M. Paul DeVillers: Je ne veux pas interrompre M. MacKay pendant qu'il interrogeait le témoin, et ce, pour plusieurs raisons. D'abord, je suis un type sympa, et deuxièmement, je me doutais bien que les témoins fourniraient des réponses tout à fait satisfaisantes.
Il reste que toutes ces questions, sauf la dernière, concernaient la loi et non pas la réglementation dont nous sommes actuellement saisis. Je sais qu'on a dit hier qu'une séance d'information sera présentée, et je me rends compte également que la présidente essaie de nous donner autant de latitude que possible, mais j'estime que nous devrions nous concentrer sur la réglementation quand des témoins sont convoqués devant le comité à cette fin.
M. Peter MacKay: Je ne me rendais pas compte qu'on avait donné l'ordre de nous bâillonner en comité, madame la présidente.
La présidente: Calmez-vous.
M. Paul DeVillers: Il n'est pas question de vous bâillonner. Nous sommes là pour discuter de la réglementation.
M. Peter MacKay: Je pensais qu'on était là pour participer à une discussion libre avec des témoins qui sont en mesure de nous renseigner sur cette loi.
M. Paul DeVillers: C'est justement pour cela que je ne vous ai pas interrompu.
M. Peter MacKay: Dans ce cas-là, que cherchez-vous au juste?
M. Paul DeVillers: J'estime simplement que nous devrions parler de la réglementation et non pas de la loi. À moins que le gouvernement ne soit défait dans quatre ans et que les partis conservateur et réformiste le remplacent, nous allons devoir nous conformer à cette loi. Cette décision a déjà été prise, alors occupons-nous de la réglementation.
M. Peter MacKay: Mais cette discussion ne nuit à personne, non?
M. Paul DeVillers: C'est exact. C'est bien ce que j'ai dit. Je savais que les témoins seraient en mesure de vous fournir des réponses tout à fait suffisantes, mais pour faire avancer le travail du comité, il convient de s'en tenir à l'essentiel de notre mandat.
La présidente: Je vais vous donner la parole, monsieur Lee, mais je voudrais tout d'abord dire ceci:
Votre suggestion me semble bien utile, car nous devrions effectivement nous intéresser à la réglementation. Si M. MacKay veut utiliser son temps de parole pour parler de politique générale, c'est à lui de décider de la façon d'employer ses 10 minutes. Il peut faire ce qu'il veut, mais il est vrai que cela ne nous permet pas de faire avancer notre travail, qui est d'examiner la réglementation. À mon avis, M. DeVillers essaie simplement d'être utile.
M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Pour aborder la question principale, ou plutôt pour essayer de nous y ramener, je voudrais vous poser une question au sujet de ces armes à feu que nous voyons ici. Nous sommes en passe d'adopter une série assez complète de règlements. Pourriez-vous nous dire si, une fois que les règlements seront en vigueur...? L'un d'entre vous a apporté ces armes à feu dans cette salle. L'un d'entre nous les possède. Vous ne les avez pas confiées à quelqu'un... Elles sont là-bas sur un présentoir.
La présidente: Puis-je vous interrompre une seconde...
M. Derek Lee: Bien sûr.
La présidente: ... pour informer mes collègues que la cloche sonne. On vient de signaler l'absence de quorum, donc il ne s'agit pas d'aller voter.
M. Derek Lee: Pourriez-vous me dire si les conditions de possession, de présentation et d'enregistrement de ces armes à feu vont être conformes à celles de la nouvelle réglementation dont nous sommes actuellement saisis? Je présume que votre organisme est tenu de se conformer à la réglementation. Vous vous y conformez déjà? Je suppose que non.
M. Murray Smith (expert scientifique en chef, Armes à feu, Laboratoire judiciaire central, Gendarmerie royale du Canada): Oui, bien sûr.
M. Derek Lee: Comment est-ce possible que vous vous y conformiez déjà? Non, ce n'est pas possible, puisque les règlements n'existent pas officiellement pour le moment. Et s'ils existaient, que feriez-vous pour vous y conformer?
M. Murray Smith: Les règlements exigent que les organismes publics enregistrent les armes à feu auprès du directeur. Ces armes à feu constituent une partie de la collection de référence du Laboratoire judiciaire central de la GRC. Elles sont effectivement inscrites auprès du directeur, et cette politique est d'ailleurs appliquée depuis au moins 10 ans. Donc, nous n'avons pas vraiment à changer notre façon de faire les choses pour nous conformer à la réglementation.
M. Derek Lee: Autrement dit, vous n'auriez rien de particulier à faire une fois que les nouveaux règlements seront en vigueur?
M. Murray Smith: Non. Pas pour ces armes à feu-là. Nous nous y conformons déjà. Notre politique interne nous impose des pratiques qui sont très très semblables à celles que prévoient les règlements.
M. Derek Lee: Et c'est vrai aussi pour les armes d'épaule.
M. Murray Smith: Oui, c'est exact.
M. Derek Lee: Serait-ce le cas de tout service de police qui déciderait de faire une exposition semblable?
M. Murray Smith: Je pense que la situation varie d'un service à l'autre. Le surintendant Buisson serait peut-être mieux en mesure de vous répondre.
M. Derek Lee: Si je pars du principe qu'un service de police décide de monter une exposition publique d'armes à feu comme celle-ci—ce n'est pas inhabituel—qu'aura-t-il à faire pour se conformer à la nouvelle réglementation dont nous sommes actuellement saisis?
Sdt Mike Buisson: Il serait tenu d'avoir quelqu'un qui soit nommé agent public par l'organisation ou qui ait le statut d'agent de la paix—l'un ou l'autre. Cela veut donc dire que si ce n'était pas un agent de la paix, ou si c'était quelqu'un qui travaille pour ce service de police, la municipalité ou la province, il aurait dû être désigné en vertu des lois et des règlements sur les agents publics. Il devrait se conformer aux exigences en matière d'entreposage et de sécurité, ces armes à feu devraient être munies de verrous, etc., et il devrait être accompagné d'une personne chargée de contrôler les armes à feu, comme c'est le cas aujourd'hui.
M. Derek Lee: Et qu'en est-il de l'enregistrement?
Sdt Mike Buisson: Les armes à feu appartenant aux services de police font partie d'une catégorie particulière aux termes de la loi actuelle. On dit qu'elles sont «inscrites». Elles ne sont donc pas enregistrées au nom des services de police.
Aux termes de la nouvelle loi, elles seront toujours inscrites. Des certificats d'enregistrement ne seront pas délivrés aux services de police, ni aux laboratoires judiciaires centraux. Là où des certificats d'enregistrement peuvent être délivrés ou versés temporairement au stock d'un service de police, c'est pour des armes à feu qui seraient saisies dans le cadre d'une enquête et que la police conserverait pour utiliser en cour. C'est quelque chose de temporaire. Elles doivent être utilisées uniquement en cour et ne doivent pas servir pour des expositions.
M. Derek Lee: Merci.
J'ai une dernière question. Elle a déjà été soulevée, d'ailleurs. Vu l'introduction de ces règlements et les dates de mise en vigueur qui sont prévues, je suppose qu'il y a des gens un peu partout qui possèdent des armes à feu qu'ils ne regardent plus depuis 20 ou 30 ans—mettons une petite arme à feu qui est entreposée dans une boîte ou une malle au sous-sol. Elle appartenait peut-être à un grand-père ou à un ancien combattant. Je parle donc de survivants, d'enfants ou peut-être même des veuves de ces personnes. Je présume qu'il n'est pas nécessaire de les enregistrer à ce moment-là. Il s'agit simplement d'une arme à feu qui n'est consignée dans aucun système. Que faut-il faire maintenant? Que doivent faire ces personnes pour se conformer aux nouvelles exigences avant les dates limites?
Sdt Mike Buisson: Vous parlez de la nouvelle loi, monsieur Lee?
M. Derek Lee: Je parle de la nouvelle loi et de la nouvelle réglementation. Que doivent-ils faire?
Sdt Mike Buisson: Comme cela a été mentionné hier en comité, des formulaires de demande seront disponibles dans différents lieux publics, comme vous l'avez suggéré, pour les aider à se conformer aux nouvelles exigences.
M. Derek Lee: S'ils ne veulent pas s'y conformer? C'est un peu comme si l'arme à feu n'avait pas de propriétaire. Personne dans la famille n'en veut, mais ils ne veulent pas non plus la jeter parce qu'elle appartenait à leur grand-père; donc, elle reste là. En réalité, ils devraient s'en débarrasser. Mais que faut-il faire au juste? Ils ne veulent pas l'enregistrer. Ils ne sont pas au courant des exigences concernant les armes à feu ou leur entreposage sécuritaire. Ils ne savent rien du tout. Ils ne lisent ce qui est écrit dans les journaux à ce sujet.
Comm. adj. John L'Abbé: Si vous me permettez de répondre, ce genre de situation surgit tous les jours. Le grand-père meurt, quelqu'un ouvre une malle et y trouve une arme à feu, mais préférerait s'en débarrasser. Ce qu'il faut faire, c'est la remettre à un service de police quelque part ou à un contrôleur des armes à feu, en indiquant simplement que vous n'avez plus envie de garder cette chose que vous avez trouvée dans la malle de votre grand-père.
Nous savons fort bien que les gens n'essaient pas de contourner la loi. Il s'agit simplement de s'adapter à cette réalité.
Les services de police vont prendre ces armes à feu et les vérifier afin de déterminer si elles ont été enregistrées ou utilisées dans un crime. Mais il y a de très fortes chances pour qu'elles soient détruites.
M. Derek Lee: Ça paraît logique, mais en vertu de la loi actuellement en place, quand ils vont prendre cette arme à feu qui est dans leur sous-sol et la mettre dans la voiture pour se rendre au poste de police est-ce qu'ils n'auront pas déjà commis une infraction? Voilà où je veux en venir: est-ce que le citoyen ordinaire, qui n'est pas criminel, qui n'essaie pas de contourner la loi et qui n'a aucunement l'intention de le faire, va être traité avec respect et pouvoir éviter des accusations s'il fait ce que vous dites?
Comm. adj. John L'Abbé: Je ne sais pas. Je suis agent de police depuis longtemps. J'ai porté des accusations contre de nombreuses personnes et j'ai témoigné dans de nombreuses causes. Je sais que nous avons des avocats et d'ex-procureurs de la Couronne à cette table qui en savent sans doute beaucoup plus que moi, mais il reste que l'intention est primordiale. Dans de telles circonstances, je ne déposerais pas d'accusations contre quiconque. Il faut tout de même être raisonnable.
Il faut faire preuve de prudence et de bon sens en appliquant cette loi. C'est une excellente loi. Elle nous donne des outils qui vont nous permettre de prendre des mesures contre ceux qui enfreignent la loi. Si mon grand-père meurt, en fait, mes deux grands-pères sont déjà morts. Mais supposons que je meure, que j'aie laissé quelque chose dans une malle, et que mon petit-fils ou ma petite-fille l'ouvre et décide de jouer avec. C'est possible, et il faut donc en faire quelque chose.
M. Derek Lee: Ces règlements comportent des dispositions visant les productions théâtrales où un acteur doit se servir d'une arme à feu dans une scène particulière. Faut-il également inclure des dispositions qui traitent du cas du citoyen ordinaire?
Comm. adj. John L'Abbé: Je pense que le Code criminel comporte déjà des dispositions traitant du cas de personnes qui trouvent des armes à feu, ou d'exécuteurs qui doivent éliminer des armes à feu. Si je ne m'abuse, c'est déjà prévu au Code criminel. C'est du moins ce que me dit mon collègue.
M. Murray Smith: Comme je n'ai pas le Code sous les yeux, je ne peux pas vous dire de quel article il s'agit, mais je sais que le Code actuel est la version qui sera modifiée par le projet de loi C-68 comporte une disposition visant à protéger l'exécuteur testamentaire ou quiconque prend possession d'une arme à feu, par l'effet de la loi, en vue de l'éliminer. De même, les personnes qui trouvent des armes à feu sont tenues d'en informer les autorités. Encore une fois, on peut supposer que cela englobe une protection suffisante pour la personne concernée. Malheureusement, je ne peux pas vous dire de mémoire de quel article il s'agit.
M. Derek Lee: Très bien. Merci.
La présidente: M. MacKay et moi sommes en train de discuter nous-mêmes de la question, et nous sommes tous les deux d'accord pour dire ce ne serait pas pour la possession. Vous ne voudriez pas intenter des poursuites pour cela, n'est-ce pas?
M. Peter MacKay: Non. Encore une fois, une intention particulière doit être présente, et comme vous l'avez signalé—et M. Lee en est certainement conscient—la police a depuis toujours un pouvoir discrétionnaire dans ce genre de situation. Tout dépendrait de l'interprétation de l'agent de police qui devrait croire que cette personne se contentait de la transporter au poste de police de la localité. J'imagine que l'agent tiendrait compte de l'ensemble des circonstances, demanderait à la personne en question de faire une déclaration, et mènerait une enquête en bonne et due forme. Comme 99 p. 100 des citoyens, 99 p. 100 des agents de police exercent ce pouvoir discrétionnaire à bon escient, mais votre argument est tout de même valable. Si l'on constate que cette personne possède une arme à feu, ce sera à l'agent de voir s'il faut la croire ou non.
M. Derek Lee: Jusqu'à ce que la Cour suprême soit appelée à se prononcer là-dessus.
M. Peter MacKay: Voilà.
Une voix: Et est-ce qu'elle va prendre la bonne décision?
La présidente: Ce sera peut-être le sujet d'un autre rapport.
Je tiens à vous remercier. Il est presque 12 h 30.
M. Peter MacKay: Madame la présidente, allez-vous lever la séance? J'ai une très brève question à poser.
La présidente: Allez-y.
M. Peter MacKay: Je voudrais savoir si l'argumentation vise... disons des agents d'autres pays qui se déplacent au Canada, qu'ils soient membres de forces policières ou membres de la CIA ou de MI-5 qui sont ici pour protéger des personnages officiels? Il arrive souvent qu'ils transportent des armes à feu qui ne seraient même pas enregistrables au Canada. Est-ce que les règlements comportent des dispositions qui traitent de cette situation particulière?
Comm. adj. John L'Abbé: Oui, absolument.
Sdt Mike Buisson: Voulez-vous une réponse plus complète?
M. Peter MacKay: Oui, avec plaisir.
Sdt Mike Buisson: S'ils transportent des armes à feu qui ne seraient pas normalement autorisées au Canada, il existe justement un mécanisme qui a été établi en étroite collaboration avec le Cabinet du premier ministre qui permet à des membres de forces policières étrangères ou à des agents de service secret de demander une permission spéciale au commissaire de la GRC en indiquant les raisons pour lesquelles ils veulent être admis au Canada avec leurs armes à feu, et à ce moment-là, il est possible d'accorder à certaines de ces personnes un statut spécial, c'est- à-dire le statut de gendarme spécial surnuméraire pendant leur séjour au Canada.
Ainsi pendant qu'ils sont au Canada, ils sont autorisés à transporter leurs armes à feu comme s'ils étaient membres de la GRC. Ils sont donc protégés en vertu des dispositions actuelles du Code criminel en cas d'utilisation de ces armes à feu, sauf qu'ils doivent travailler en collaboration avec des membres de la GRC ou des agents de police qui assurent la sécurité, ils doivent disposer de pièces d'identité appropriées, et enfin, ils doivent respecter toute une série de règlements. Ils sont en effet tenus de respecter les mêmes règles que tout autre agent de police canadien—ni plus, ni moins.
M. Peter MacKay: Est-ce que la GRC doit à ce moment-là donner des instructions à ces personnes, qu'elles soient membres de service secret ou... j'ai en tête l'exemple du G-7 tenu à Halifax. Les représentants des services secrets de différents pays y étaient, par exemple, ceux qui accompagnaient le chancelier Kohl et le président Clinton, et d'autres, et tous étaient armés. Ces types-là portaient des armes que la plupart des gens n'ont vues au Canada jusqu'à présent.
Sdt Mike Buisson: Cela se fait par accord mutuel entre les deux pays, monsieur MacKay, et à la demande même de notre premier ministre. Quand nous allons à l'étranger pour protéger notre premier ministre, nous sommes très contents de bénéficier d'un traitement réciproque dans ces autres pays, de sorte que nos membres de la GRC puissent y assurer la protection de notre premier ministre.
Cette permission n'est pas accordée pour tous les pays, mais dans certains cas, oui. Ce n'est pas une permission permanente. Une demande doit être présentée à chaque fois. On donne également des instructions aux douaniers pour éviter toute possibilité d'embarras. La GRC suit de près la situation et donne des instructions inscrites aux représentants de ces organismes étrangers.
M. Peter MacKay: Il s'agit donc essentiellement de personnes spécialement déléguées qui ne seraient donc pas visées par la réglementation.
Sdt Mike Buisson: C'est exact.
M. Peter MacKay: Merci.
La présidente: Merci, monsieur MacKay.
Monsieur Ramsay, voulez-vous poser une dernière question?
M. Jack Ramsay: Dans votre mémoire, monsieur le commissaire adjoint L'Abbé, vous dites que la vérification «s'impose pour assurer la bonne marche de tout système d'enregistrement des armes à feu». Vous continuez en disant que «la possibilité que des erreurs se glissent dans les demandes de citoyens qui ne connaissent pas bien le classement des armes à feu est extrêmement forte».
Je tiens à vous remercier pour ces quelques observations. Elles me semblent tout à fait pertinentes et elles indiquent bien les difficultés que vous risquez de rencontrer en essayant de maintenir l'intégrité de votre système, car une bonne partie de l'information que vous y introduisez n'aura pas été vérifiée et peut le rester pendant des années. Cela met donc bien en évidence le problème que va vous poser le maintien de l'intégrité du système d'enregistrement.
Vous parlez ensuite du fait que le travail policier consiste dans l'ensemble à gérer de l'information. Si l'information n'est pas exacte ou si vous n'êtes pas sûr de son intégrité, à ce moment-là, à quoi bon la gérer?
Voilà la question que je veux vous poser: vous dites que «de nombreux propriétaires d'armes à feu attendront plusieurs décennies avant de procéder à la cession de leurs armes à feu». Que voulez-vous dire par là?
Comm. adj. John L'Abbé: Je vais demander à mon collègue, Murray Smith, de vous l'expliquer, parce qu'il l'a dit mieux que moi.
Murray, vous avez parlé du cas d'une personne de 18 ans qui achète une arme à feu.
M. Murray Smith: Ce dont parle M. L'Abbé, c'est la possibilité qu'une personne qui possède déjà une arme à feu ou qui en acquiert une pendant la période de transition et qui veut simplement garder l'arme à feu pour son propre plaisir sans la céder à quiconque, ne sera pas tenu de le faire. Elle pourra garder cette arme à feu pendant toute sa vie sans la remettre aux autorités à des fins de vérification.
Par exemple, une personne qui atteint l'âge de 18 ans en l'an 2002 pourrait conserver son arme à feu pendant très longtemps sans qu'elle soit jamais vérifiée, sous réserve, évidemment, de l'adoption d'autres mesures par des gouvernements futurs.
M. Jack Ramsay: Très bien. Vous venez de mettre le doigt sur le problème de la non-vérification de l'information qui sera entrée dans le système, problème qui va durer très longtemps.
Voilà. C'est tout.
La présidente: Merci beaucoup.
Nous reprenons notre examen cet après-midi à 15 h 30.
Merci infiniment pour votre présence et pour votre aide.