PACC Réunion de comité
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STANDING COMMITTEE ON PUBLIC ACCOUNTS
COMITÉ PERMANENT DES COMPTES PUBLICS
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le jeudi 28 mai 1998
[Traduction]
Le président (M. John Williams (St. Albert, Réf.)): Bonjour, mesdames et messieurs.
Conformément à l'alinéa 108(3)e) du Règlement, nous entreprenons l'étude du chapitre 3 du Rapport du vérificateur général du Canada, avril 1998, intitulé «Équiper et moderniser les Forces canadiennes».
Aujourd'hui, nous entendrons, du Bureau du vérificateur général du Canada, M. David Rattray, vérificateur général adjoint; M. Peter Kasurak, directeur principal des opérations de vérification. Du ministère de la Défense nationale, nous accueillons M. Jim Judd, sous-ministre; le général Baril, chef d'état-major de la Défense; et M. Pierre Lagueux, sous-ministre adjoint, Matériel.
Je donne maintenant la parole à M. Rattray.
M. David Rattray (vérificateur général adjoint, Bureau du vérificateur général du Canada): Merci, monsieur le président.
Nous sommes heureux d'avoir l'occasion de rencontrer le comité pour discuter du chapitre 3 du Rapport d'avril «Équiper et moderniser les Forces canadiennes». Comme vous l'avez dit, je suis accompagné aujourd'hui de Peter Kasurak, le directeur principal responsable de ce chapitre.
Nous nous sommes penchés sur les défis qui se posent à la Défense nationale, qui doit veiller à ce que les Forces canadiennes restent une force moderne et apte au combat. Vous vous rappelez sans doute que le Livre blanc de 1994 sur la Défense souligne que les Forces canadiennes doivent pouvoir se battre aux côtés des meilleurs, contre les meilleurs. Bien entendu, cela ne veut pas dire que nos forces couvriront toute la gamme des activités militaires, mais il est raisonnable de s'attendre à ce qu'elles disposent des composantes dont elles ont besoin pour maintenir leurs capacités essentielles.
Toutefois, le Livre blanc ne définit pas les engagements que les Forces canadiennes prendront, et cela nous inquiète. Nous nous attendions à ce que les priorités et les plans de la Défense nationale aient permis aux Forces canadiennes d'être équipées et d'être prêtes à donner suite, si elles le devaient, aux engagements prévus par la politique de défense. Nous avons toutefois constaté que les Forces canadiennes n'acceptent actuellement d'engagement que si la tâche n'exige pas plus que les capacités de l'équipement qu'elles possèdent.
Comme nous l'indiquons dans notre chapitre, le sous-chef d'état-major de la Défense examine la capacité des Forces canadiennes de déployer des forces d'intervention comme l'exige le Livre blanc. Il est encourageant de constater que le ministère cherche à évaluer une telle capacité, mais son examen ne porte que sur la situation actuelle.
• 1535
Il est tout aussi important d'examiner les perspectives à long
terme des Forces canadiennes, de même que la capacité et le
rendement des forces militaires auxquels les Canadiens doivent
pouvoir s'attendre. Le ministère s'attaque aux lacunes d'équipement
lorsqu'il dispose de fonds. Toutefois, il a éprouvé de la
difficulté à trouver le juste équilibre entre les dépenses en
capital à l'achat d'équipement et les dépenses liées au personnel,
aux opérations et à l'entretien.
Au cours des dernières années, nous avons constaté que les dépenses en capital ont diminué de manière à ce que la Défense nationale puisse satisfaire aux exigences de coûts en matière de personnel, d'opérations et d'entretien. Si la tendance se maintient, les dépenses en capital pourraient chuter à un niveau inacceptable—comme ce fut le cas au début des années 70 alors que le vieillissement de l'équipement était devenu un grave problème.
[Français]
Trois options s'offrent au ministère. Il peut maintenir le statu quo qui mine sa capacité de se moderniser; il peut rectifier les réductions des dépenses en capital en augmentant ses niveaux de référence et en réalisant des gains d'efficience; enfin, il peut, s'il reçoit une orientation adéquate, réexaminer la capacité et la structure à long terme des Forces canadiennes.
Pour l'instant, le ministère préfère l'option qui prévoit la hausse du financement pour les biens d'équipement. Mais pour faire en sorte que cette option refoule la tendance à la baisse des dépenses en capital et que le Canada retrouve une force de défense moderne et bien équipée, il faut accorder plus d'attention à la planification et aux priorités à long terme, de même qu'au rendement des forces militaires.
Le Parlement peut jouer un rôle important, voire crucial, pour aider à orienter la capacité et le rendement de la défense. En effet, en 1994, le Comité mixte spécial sur la politique de défense au Canada a demandé au Parlement de s'engager davantage dans les questions de défense. Il a entrevu la nécessité de procéder à un examen régulier de la politique de défense et de soulever des questions liées au budget et à l'approvisionnement.
Le Comité mixte spécial a fait plusieurs suggestions qu'on pourrait maintenant envisager de mettre en oeuvre. À notre avis, de ses recommandations découleraient l'orientation et la surveillance nécessaires dont nous faisons mention dans notre chapitre.
Notre première recommandation appuie les efforts que la Défense nationale déploie pour examiner son cadre de développement des forces. Nous croyons que ce cadre de planification est essentiel si l'on veut que les Forces canadiennes utilisent leurs ressources de la meilleure façon. Il faut encourager le ministère à poursuivre cet effort et à mettre l'accent sur l'avenir, particulièrement sur les ressources dont il aura besoin pour faire son travail.
Le Comité mixte spécial a souligné que le Parlement pourrait contribuer à ce processus de planification. Nous sommes d'accord pour dire que la surveillance accrue recommandée par le comité, laquelle pourrait s'exercer dans le cadre d'un examen annuel exhaustif ou d'un examen approfondi du Budget principal des dépenses de la Défense, aiderait à orienter les dépenses du ministère.
Pour envisager l'avenir, la Défense nationale doit élargir sa présente perspective. Les plans ne couvrent actuellement qu'une période de cinq ans. Or, on prévoit que l'équipement durera au moins 30 ans. Ce que la Défense nationale achète maintenant aura des répercussions sur son fonctionnement à long terme. Le ministère doit être en mesure de répondre aux questions fondamentales concernant la nature des capacités qui doivent être maintenues, les ressources nécessaires et les risques auxquels les militaires seront exposés.
[Traduction]
L'orientation sur ces questions provient de la politique de défense qui indique ce que les Forces canadiennes doivent faire. Le Comité mixte spécial a incité le Parlement à suivre de près les futurs examens de la politique de défense et demandé la tenue d'un débat annuel sur celle-ci. Nous croyons qu'une telle surveillance est nécessaire pour déterminer la mesure dans laquelle les Forces canadiennes sont en mesure de mettre en oeuvre la politique de défense du Canada.
Notre deuxième recommandation vise à améliorer l'information communiquée au Parlement. En effet, une meilleure information sur les plans d'immobilisations et les priorités en matière de défense aiderait le Parlement à surveiller les dépenses et les budgets de défense. Nous signalons dans notre chapitre que la Défense nationale a réussi jusqu'à un certain point à élaborer son cadre de mesure du rendement mais qu'il reste un important travail à faire. Des indicateurs de rendement utiles doivent donc être élaborés. Selon nous, la Défense nationale devrait établir un lien entre ce qu'elle dépense et les capacités et le rendement des forces militaires qu'obtiennent les Canadiens en contrepartie.
Si la Défense nationale pouvait améliorer l'information qu'elle communique sur ses capacités et son rendement, le Parlement pourrait faire un meilleur examen de son Budget principal des dépenses. La Défense nationale nous a dit qu'elle aura de l'information utile sur le rendement d'ici deux ans. À ce moment-là, le comité pourrait vouloir surveiller la tendance prévue des dépenses de la défense.
En fin de compte, nous espérons que le ministère connaîtra les mêmes succès que d'autres pays rencontrent déjà. Ces pays parviennent à mieux assortir leurs ressources de défense aux objectifs de leur politique en ce domaine. En d'autres mots, le ministère devrait dire au Parlement s'il est en mesure de faire ce qu'on lui demande de faire avec les ressources qu'on lui accorde. Le Parlement devrait savoir ce que le ministère peut faire et ce qu'il ne peut pas faire.
D'autres pays ont pris les devants et obtenu des résultats positifs. Le Canada s'engage sur la même voie qu'eux en mettant en oeuvre un système de comptabilité d'exercice et en élaborant un système de communication d'information sur le rendement. Ces initiatives sont encourageantes et nous croyons qu'elles amélioreront l'information sur la défense. Mais d'autres pays examinent aussi la défense à des niveaux très élevés; dans certains cas, ils ont signé des ententes sur les produits à livrer. Nous sommes d'accord avec le Comité mixte spécial pour dire qu'un tel examen de haut niveau serait profitable pour le Canada.
Monsieur le président, la Défense nationale amorce une période au cours de laquelle elle renouvellera ses principaux systèmes d'armes, au fur et à mesure qu'elle pourra se le permettre. Vous avez sans doute entendu parler, par exemple, des décisions récentes d'acquérir des hélicoptères de recherche et de sauvetage ainsi que des sous-marins. Le comité peut aider à orienter les efforts du ministère de manière à ce que celui-ci fasse la meilleure utilisation des ressources accessibles et mette l'accent sur les attentes à long terme.
Ceci met fin à nos commentaires, Monsieur le président. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
Le président: Merci, monsieur Rattray. Je donne maintenant la parole à M. Judd pour sa déclaration liminaire.
Monsieur Judd, s'il vous plaît.
M. Jim Judd (Sous-ministre, ministère de la Défense nationale): Merci, monsieur le président.
Tout d'abord, permettez-moi de vous remercier, ainsi que les membres du comité, de m'avoir invité à participer à la discussion sur l'importante question de l'équipement et de la modernisation des Forces canadiennes.
Monsieur le président, le ministère de la Défense nationale et les Forces canadiennes respectent l'engagement qu'ils ont pris d'exécuter la politique de défense assignée par le gouvernement. Ils sont en mesure d'exécuter cette politique et de mettre en service des forces modernes, plurifonctionnelles et aptes au combat pour défendre le Canada, ainsi que les valeurs et les intérêts canadiens, tout en contribuant à la paix et à la sécurité internationales.
[Français]
Je suis au ministère depuis relativement peu de temps, mais j'ai quand même eu l'occasion de constater le dévouement, l'énergie et le talent des membres du ministère et des Forces canadiennes dans la poursuite de leur mission et j'en suis fort impressionné.
Bien sûr, ils ont fait preuve de toutes ces qualités pendant une période de profonde transition. Le ministère de la Défense nationale et les Forces canadiennes ont en effet vécu de grands changements en raison de la guerre au déficit et des bouleversements de l'après-guerre froide.
Nous avons adopté un grand nombre de mesures visant à rationaliser la prestation des moyens de défense, à réduire les frais généraux et à faire en sorte que les ressources décroissantes soient axées sur des capacités opérationnelles essentielles.
[Traduction]
En adoptant ces mesures, l'objectif primordial du ministère a été de maintenir, à un prix raisonnable, des forces plurifonctionnelles et aptes au combat. L'atteinte de cet objectif est vitale si l'on veut répondre aux attentes du gouvernement et des Canadiens à notre égard.
Le vérificateur général a formulé des recommandations fort utiles que nous prendrons en considération tout en continuant à améliorer notre façon de procéder.
Bien que le vérificateur général ait abordé plusieurs questions au Chapitre 3 de son dernier rapport—et vos questions à ce sujet sont les bienvenues—, je voudrais parler brièvement de ses propos au sujet du «vieillissement».
• 1545
Je me permets de le citer textuellement:
-
En 1996, à la suite d'une série de réductions budgétaires, le
ministère s'est engagé à ne pas répéter l'expérience du début des
années 70, alors que le vieillissement de l'équipement était devenu
un grave problème.
Nous n'avons pas perdu de vue cet objectif. Nous avons énuméré des défectuosités de matériel qui, à l'avenir, pourraient restreindre quelques-unes des capacités opérationnelles. Nous y remédions, mais certains achats pourraient être rajustés, retardés ou réexaminés, vu les ressources limitées dont nous disposons. Il s'agit là d'un processus continu.
L'acquisition d'immobilisations étant une activité à long terme, nous ne pouvons envisager le pourcentage des dépenses en capital pour une année seulement. La planification des achats doit se faire en fonction d'un financement stable et prévisible s'étalant sur une période de 10 à 15 ans. Nous devons sans cesse rajuster les priorités en matière de financement pour nous assurer que les forces armées disposent des outils qui leur sont indispensables.
Ceci dit, nous admettons que les Forces canadiennes n'ont pas toujours besoin d'équipement ultramoderne ou sophistiqué pour remplir leur mandat et pour répondre intelligemment, efficacement et avec souplesse aux missions que le gouvernement leur confie.
[Français]
Le vieillissement de l'équipement, même technologique, n'est pas synonyme d'inutilité. Même si l'équipement n'est plus adapté à son rôle d'origine, il peut remplir d'autres rôles. Par exemple, nos vénérables réactés CT-133 ne sont plus utiles pour l'entraînement des pilotes, mais ils peuvent jouer un rôle d'appui au combat et ils le font à un sixième du prix qu'il en coûterait pour exploiter dans le même rôle un chasseur CF-18 plus moderne.
En ce qui concerne le type d'opérations qui seront probablement entreprises au cours des prochaines années, les Forces canadiennes sont en effet en assez bonne posture.
[Traduction]
Des projets, tel que celui du système tactique de commandement, de contrôle et de communication, ont été amorcés dans le secteur critique du commandement et du contrôle afin de nous doter de systèmes de pointe.
La force aérienne possède un hélicoptère efficace, le Griffon, et elle étudie les moyens de moderniser ses CF-18, ses Aurora et ses Hercules, afin de les rendre plus efficaces. Et, bien entendu, nous aurons bientôt le nouvel hélicoptère de recherche et de sauvetage, puisque le gouvernement a décidé d'acquérir cette capacité.
En ce qui concerne l'armée de terre, nous sommes en possession du nouveau véhicule de reconnaissance Coyote, qui suscite l'admiration de bien des forces armées. Par ailleurs, nous acquérons actuellement de nouveaux transports de troupes blindés et nous en modernisons d'autres. Le Projet d'habillement du soldat, entre autres, offre un nouvel équipement individuel à nos militaires.
Enfin, monsieur le président, de nouvelles frégates, de nouveaux navires de défense côtière et de nouveaux sous-marins renforceront notre marine pendant de longues années à venir. Comme l'a récemment annoncé le ministre au Comité de la défense nationale et des anciens combattants, nous étudions la possibilité d'acheter de nouveaux hélicoptères maritimes.
Somme toute, en matière d'équipement et de modernisation de celui-ci, les Forces canadiennes sont en assez bonne posture. Nous savons cependant qu'elles devront faire face à de nouvelles contraintes et que nous aurons à faire des choix difficiles pour qu'elles disposent des outils dont elles ont besoin afin d'accomplir leurs tâches efficacement à l'avenir.
Avec votre permission, monsieur le président, je cède maintenant la parole au général Baril.
Le président: Merci.
Général Baril, nous allons maintenant entendre votre allocution d'ouverture. Sauf erreur, c'est la première fois que vous venez devant notre comité en tant que chef d'état-major de la Défense. Je vous souhaite donc la bienvenue au nom de tous les membres du Comité des comptes publics.
Le général J.M.G. Baril (chef d'état-major de la Défense, ministère de la Défense nationale): Merci beaucoup.
[Français]
Merci, monsieur le président. Membres du comité, je vous remercie de m'avoir invité à vous entretenir de l'équipement et de la modernisation des Forces canadiennes.
Permettez-moi d'abord de vous présenter la situation d'un point de vue militaire. Pour être moderne et efficace, une force armée doit être dotée de l'équipement approprié, recevoir l'instruction nécessaire, être bien dirigée et bénéficier de bonnes conditions de service ou, si vous préférez, d'une bonne qualité de vie.
Ces quatre éléments constituent un ensemble. Ils présentent chacun, à certains moments, des exigences différentes et nous devons, autant que possible, assurer un équilibre entre ces éléments. Toutefois, on ne peut ôter un élément de l'ensemble sans nuire à la capacité de combat des forces armées. Bref, chaque élément doit atteindre une norme minimale.
[Traduction]
Le ministre de la Défense précédent manifestait des préoccupations à l'égard de la norme de leadership, ce qui a entraîné la préparation d'un rapport à l'intention du premier ministre sur le leadership et l'administration dans les Forces canadiennes. Le gouvernement se penche actuellement sur les conditions de service, et c'est pourquoi vos collègues du Comité permanent de la défense nationale et des affaires des anciens combattants étudient la qualité de la vie des militaires. Le vérificateur général se préoccupait de la qualité et de l'état de notre équipement et il a présenté son rapport.
En fin de compte, nous aurons des besoins dans tous les secteurs—qu'il s'agisse d'équipement, d'instruction, de leadership ou de conditions de service—et tous ces secteurs se disputeront les rares ressources disponibles. Mais, comme je l'ai dit aux membres du CPDNAC il y a quelques semaines, les compromis sont inacceptables. Car l'efficacité des forces armées exige un équilibre entre les divers éléments.
On ne résout pas le problème en fonctionnant avec un élément qui n'atteint pas la norme exigée pour permettre à un autre de l'atteindre. Que les militaires soient heureux dans des chars d'assaut défectueux ou malheureux dans de magnifiques hélicoptères, la force armée n'en devient pas plus efficace. Il est donc impossible de parler d'équipement et de modernisation sans tenir compte des autres facteurs.
De plus, il faut prendre en considération les réalisations des Forces canadiennes.
[Français]
Les Forces canadienne veillent à la mise en oeuvre de la politique de défense de notre pays. Nous assurons la protection du Canada, nous collaborons avec les États-Unis à la défense de l'Amérique du Nord et nous contribuons au maintien de la paix et de la sécurité sur la scène internationale.
Les Forces canadiennes ont maintenu leurs engagements envers le NORAD et l'OTAN. Elles ont participé à de nombreux déploiements clés de l'OTAN, tout en continuant de prêter assistance aux Canadiens dans le cadre d'activités telles que le secours aux sinistrés et les opérations de recherche et de sauvetage courantes.
Je suis fier du fait que les Forces canadiennes continuent de s'acquitter de chacune des tâches que le gouvernement leur attribue et nous serons encore en mesure de le faire dans un avenir prévisible. Il serait faux de dire le contraire.
[Traduction]
Grâce aux programmes d'acquisition d'équipement mis en oeuvre récemment, les Forces canadiennes sont maintenant plus aptes au combat qu'elles ne l'étaient au début de la décennie.
Pendant la guerre du Golfe de 1991, par exemple, les navires envoyés par le Canada ont dû être dotés de nouvel équipement afin d'être capables de fonctionner sous la menace qui prévalait à l'époque. Il a donc fallu retarder leur déploiement.
Par contre, lors de la dernière crise contre l'Iraq, la nouvelle frégate de patrouille canadienne NSCM TORONTO s'est déployée sans délai. En fait, elle était déjà en mer avec la Force navale permanente de l'Atlantique de l'OTAN; elle n'a même pas eu à revenir au Canada. Elle possédait la capacité requise, tout comme les avions ravitailleurs tactiques Hercules qui l'ont accompagnée.
Nos chasseurs CF-18 sont aussi mieux équipés qu'ils ne l'étaient pendant la guerre du Golfe. Ils sont aujourd'hui dotés de munitions à guidage de précision ou, si vous préférez, de «bombes intelligentes», comme on les appelle communément.
Mais il ne suffit pas d'avoir l'équipement, il faut savoir s'en servir. C'est ce que nous avons fait dans le golfe Persique, où le NCSM TORONTO a opéré efficacement avec un groupe aéronaval de la Marine américaine et où nos deux Hercules ont ravitaillé une foule de chasseurs modernes. Nous avons aussi mené à bien des opérations dans l'est du Canada pendant la tempête de verglas et nous continuons de le faire en Bosnie, ainsi que dans le cadre des missions menées par l'ONU dans le monde entier.
Nous avons quelques lacunes sur le plan de l'équipement, nous ne pouvons pas le nier. Nous sommes en train de les combler, tout en essayant d'améliorer nos méthodes d'acquisition. Mais vous ne devez pas perdre de vue notre but ultime: créer une force moderne, polyvalente et apte au combat.
Nous avons prouvé plus d'une fois que nous satisfaisons à cette exigence.
[Français]
Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Le président: Merci, général Baril.
Monsieur Mayfield, vous avez huit minutes, s'il vous plaît.
M. Philip Mayfield (Cariboo—Chilcotin, Réf.): Merci, monsieur le président.
Je vous remercie d'être venus aujourd'hui pour discuter avec nous du Rapport du vérificateur général.
Je ne crois pas exagérer en disant que les Canadiens sont très fiers de leurs forces armées, de ces hommes et de ces femmes qui représentent le Canada d'une manière toute particulière, non seulement à l'étranger, mais aussi dans des situations difficiles dans notre propre pays.
Pour commencer, je souhaiterais, général, que vous nous disiez en quelques mots comment vous comprenez la mission des forces armées canadiennes.
Gén J.M.G. Baril: C'est une très vaste question, et le président vient de dire que c'est ma première comparution.
M. Philip Mayfield: Je ne vous permettrai pas une réponse très vaste. J'ai dit «en quelques mots».
M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Prenez huit minutes!
Gén J.M.G. Baril: Ma tâche est certainement de veiller à ce que la politique canadienne en matière de défense, telle qu'énoncée en 1994, soit menée à bien, avec les capacités dont nous disposons actuellement. Il m'incombe de veiller à ce que les atouts dont nous disposons, tant dans les forces régulières que dans la Réserve, soient en mesure d'accomplir le mandat avec les ressources qui nous ont été accordées.
Je dois admettre que si nous n'avions pas ces contraintes matérielles, la tâche serait facile et agréable, mais vu ces contraintes... comme je l'ai dit dans ma déclaration d'ouverture, il est très difficile et très délicat de jongler avec tant de balles à la fois.
M. Philip Mayfield: Permettez-moi de vous interrompre, monsieur. Ce que je voudrais savoir, c'est comment vous voyez—peut-être en trois ou quatre grandes lignes—le rôle des forces armées au Canada et à l'étranger, puisque le gouvernement et le peuple canadien vous ont confié ce mandat. J'aimerais savoir comment vous le comprenez. Qu'attendons-nous de nos forces armées?
Gén J.M.G. Baril: Des forces armées ou du Canada? Ce que l'on attend de nous...
M. Philip Mayfield: Quelles sont d'après vous ces attentes que vous essayez de satisfaire?
Gén J.M.G. Baril: Je crois que la première, c'est de défendre le pays. C'est certainement une tâche aux multiples facettes, que je ne décrirai pas ici. Notre première priorité a toujours été l'assistance aux autorités civiles et la défense du territoire au sein de l'alliance que nous avons avec nos voisins du sud, par notre participation à la sécurité internationale, dans le cadre d'alliances avec des pays étrangers et par les opérations de sécurité internationale et de coalition avec les Nations unies.
M. Philip Mayfield: En 1994, un livre blanc essayait de définir la mission de votre ministère. Vous avez dit que les compressions budgétaires vous rendent la tâche plus difficile. À ce propos, j'aimerais vous poser trois questions auxquelles je vous demanderais de répondre succinctement.
1. J'aimerais savoir quels sont les besoins prioritaires de votre ministère.
2. Quelles recherches faites-vous pour vous assurer que vous achetez le bon équipement?
3. Il y a des divergences d'opinions entre le vérificateur général et vous sur divers sujets, notamment sur la gestion du risque et des systèmes d'examen de l'équipement avant l'achat.
Pourriez-vous, s'il vous plaît, donner votre point de vue sur ces questions.
Gén J.M.G. Baril: Permettez-moi de faire appel aux experts de la Défense nationale. Vous posez des questions très précises et complexes.
Pour ce qui est de la priorité en matière d'équipement, il y a certainement une procédure établie, mais c'est aussi une priorité au sein du ministère, tant pour le sous-ministre que pour le ministre.
En ce qui concerne la recherche et le risque, je vais plutôt demander à un SMA de vous répondre.
M. Jim Judd: Puis-je essayer de répondre?
M. Philip Mayfield: Oui, avec plaisir.
Le président: Monsieur Judd.
M. Jim Judd: Pour ce qui est de la priorité des besoins, je dois dire que c'est essentiellement une méthode itérative, en ce sens que nous devons tenir compte d'une part de l'environnement dans lequel se déroulent nos opérations au niveau international en évaluant les menaces ou notre vulnérabilité de ce point de vue...
M. Philip Mayfield: Procédez-vous de manière relativement objective, en faisant appel à des experts professionnels, ou avez-vous des systèmes en place qui permettent de tenir compte de tous ces facteurs et d'arriver à une conclusion rationnelle?
M. Jim Judd: Si vous vous demandez s'il existe une boîte noire magique dans laquelle nous introduisons toutes les données et qui nous donne la bonne réponse, je dois vous dire que ce n'est pas le cas. Mais nous faisons appel à des experts-conseils pour nos évaluations, notamment aux conseils du chef d'état-major de la Défense et de ses collègues pour ce qui est de ces opérations, des capacités, des exigences militaires, et ainsi de suite.
Nous tenons compte aussi, bien sûr, de l'élément politique. Nous procédons à une évaluation politique générale de la situation à laquelle nous devons faire face. Bien entendu, comme nous l'avons vu le mois dernier, la situation mondiale peut parfois changer assez rapidement.
C'est donc une démarche itérative et permanente qui consiste à jongler divers facteurs internes et externes, comme ceux que je viens de mentionner. Il faut aussi tenir compte de ce que le gouvernement attend de nous et des ressources disponibles.
M. Philip Mayfield: Comme il ne me reste qu'une minute, je vais insister là-dessus. Vous avez dit que les circonstances peuvent changer très rapidement. Une phrase inquiétante dans le Rapport du vérificateur général indique qu'il peut falloir des mois avant que l'équipement et le personnel ne soient prêts pour une opération donnée. Je me demande comment vous pouvez accepter, alors que vous êtes prêts à vous battre avec les meilleurs et contre les meilleurs, de ne pas pouvoir vous y préparer plus rapidement?
Avant de terminer, monsieur le président, je tiens à signaler aux représentants du vérificateur général que j'ai l'intention de leur poser des questions plus tard pour approfondir un peu la discussion.
Mais, monsieur Judd, pourriez-vous répondre, s'il vous plaît.
M. Jim Judd: Permettez-moi de vous donner rapidement deux réponses.
Notre personnel est en train de procéder à un examen interne de nos méthodes de préparation. Nous espérons que cette étude sera terminée cette année. De manière plus générale, l'état de préparation dépend énormément de l'environnement. Depuis la fin de la guerre froide, l'environnement a énormément changé, du point de vue des menaces pour le Canada. Cela a fait diminuer la nécessité d'une capacité de réaction immédiate et générale. Le plus souvent, notre état de préparation dépend de l'analyse que nous faisons de la situation mondiale.
Dans les opérations où nous avons déployé des forces récemment, le préavis était généralement amplement suffisant pour nous permettre de répondre adéquatement, car souvent—en fait, toujours—les opérations auxquelles nous avons participé étaient des opérations d'alliance ou de coalition qui nécessitaient d'importantes consultations entre les participants, afin de savoir qui allait faire quoi, qui allait arriver quand. Nous avons généralement été en mesure de respecter les délais même pour ces opérations spécifiques.
Le président: Merci, monsieur Judd.
Monsieur Laurin, huit minutes, s'il vous plaît.
[Français]
M. René Laurin (Joliette, BQ): Je suis convaincu que je n'aurai pas le temps de poser toutes les questions que j'aimerais vous poser, mais je vais commencer par celle-ci.
Monsieur le sous-ministre, dans votre déclaration d'ouverture, vous disiez: «La force aérienne possède un hélicoptère efficace, le Griffon, et elle a étudié les moyens de moderniser ses CF-18».
Par contre, dans son rapport, le vérificateur général semble avoir une opinion différente sur l'hélicoptère Griffon. Il affirme que le Griffon ne peut satisfaire aux exigences initiales de l'armée de terre en ce qui concerne la capacité d'emport et le matériel de communication. Il déclarait aussi que très souvent, les Forces armées canadiennes disposent d'équipement qui ne satisfait pas aux besoins pour lesquels on l'avait acheté. Quelle est votre réaction? Il semble y avoir une contradiction entre l'opinion du vérificateur général, qui dit que le Griffon ne répond pas aux exigences pour lesquelles on l'a acheté, et vous qui dites que c'est un hélicoptère efficace.
[Traduction]
M. Jim Judd: Je ne crois pas qu'il y ait de véritables différences entre le vérificateur général et nous sur ce point, sinon que nos perspectives sont très différentes quant à ce que l'on attendait de l'hélicoptère.
Je crois—et M. Lagueux connaît beaucoup mieux cet hélicoptère—que le Griffon a été acheté pour répondre à un certain nombre d'exigences précises, et il y satisfait. Le point de vue du vérificateur général, c'est que l'hélicoptère n'est pas en mesure de faire un certain nombre de choses pour lesquelles il n'a pas été acheté.
On me reprendra si je fais erreur, mais je crois pouvoir dire qu'il y a en gros quatre types d'hélicoptères qui peuvent avoir des utilisations militaires différentes: la reconnaissance, le transport de matériel léger, le transport de matériel lourd et l'attaque. Lorsque nous avons acheté le Griffon, nous cherchions un hélicoptère capable de remplir le plus grand nombre possible de fonctions dont nous pensions avoir besoin pour les opérations de l'armée de terre.
Avec votre permission, je vais demander à M. Lagueux s'il a quelque chose à ajouter.
M. Pierre Lagueux (Sous-ministre adjoint, Matériel, ministère de la Défense nationale): Merci, monsieur Judd.
[Français]
Monsieur Laurin, comme vous le savez, le Griffon est un hélicoptère que nous avons acheté de Bell Helicopter à Montréal. C'est un hélicoptère à base commerciale qui a remplacé trois modèles d'hélicoptères qu'utilisaient auparavant les forces armées. C'est donc un hélicoptère multirôle, ou comme on le dit en anglais, a utility role helicopter.
J'aimerais soulever deux points.
M. René Laurin: N'accaparez pas mes huit minutes; j'aimerais bien que vous me répondiez, mais j'ai aussi d'autres questions.
M. Pierre Lagueux: Je vais essayer, monsieur Laurin. Excusez-moi. En réponse aux commentaires du vérificateur général, j'aimerais d'abord souligner que ce projet consiste à acquérir non seulement 100 hélicoptères, mais aussi beaucoup d'autre équipement, et qu'il n'est pas encore terminé. Donc, bien que les hélicoptères aient été livrés, il reste encore beaucoup d'autres choses à faire dans le cadre du projet. Nous pourrons procéder à une évaluation du rôle de l'hélicoptère quand le projet sera terminé.
Deuxièmement, vous avez aussi soulevé la question de la capacité de l'hélicoptère de soulever certaines charges. Encore une fois, il faut bien comprendre en quoi consiste exactement le besoin opérationnel pour l'hélicoptère. On avait auparavant établi ce besoin à entre 5 000 et 10 000 livres, 10 000 étant le besoin optimal, bien qu'on s'accorde maintenant à dire que la charge de quelque 3 100 livres que peut soulever l'hélicoptère répond aux besoins opérationnels actuels de l'armée. Il faut vraiment examiner le rôle actuel de l'hélicoptère et se demander s'il répond aux besoins actuels et est accepté par le commandant de l'armée et le commandant de l'aviation.
M. René Laurin: Monsieur Lagueux, en lisant les remarques du vérificateur général et en écoutant vos paroles, j'ai l'impression que l'armée se contente de moins de peur de ne rien avoir. Cela m'étonne un petit peu parce que dans sa déclaration d'ouverture, lorsqu'il comparaissait devant le Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants il y a quelques semaines, le général Baril avait dit que les compromis étaient inacceptables. Quand l'armée a besoin d'une voiture de course pour compétitionner, que le ministère lui offre une voiture de promenade et qu'elle l'accepte de peur que les sommes d'argent ne lui permettent pas d'obtenir mieux, il me semble qu'il y a là un compromis. Si c'est inacceptable, je suis surpris que des militaires acceptent l'inacceptable. On ne peut pas s'inscrire en Formule I avec une voiture de promenade, et j'ai l'impression qu'avec le Griffon, c'est ce que vous faites.
• 1610
Vous nous dites que vous avez accepté un
hélicoptère commercial alors que l'analyse des besoins
originaux avait démontré que vous aviez besoin de
plus. Comment expliquer cette attitude des dirigeants militaires?
Avez-vous agi par peur de perdre une occasion, même si
vos budgets étaient insuffisants, et en espérant
pouvoir plus tard les transformer?
Je ne suis pas sûr qu'on économisera de
l'argent. C'est cela que je voudrais qu'on
m'explique. Bien que M. le général ait dit que
les compromis était inacceptables, il me semble qu'on en
a quand même accepté un. J'aimerais vous entendre là-dessus.
[Traduction]
Le président: Général Baril, allez-vous répondre à cette question? Puis-je vous demander d'être assez bref? Je vous en serai reconnaissant.
[Français]
Gén J.M.G. Baril: Quand je parlais de compromis, je parlais d'un compromis entre la qualité de la vie et le rendement opérationnel. Vous parlez maintenant d'une comparaison entre un véhicule qu'on conduit lors d'une course de Formule I et un hélicoptère, lequel ne représente qu'un élément d'un très gros groupe d'éléments qui rendent nos forces opérationnelles ou pas.
En fait d'hélicoptères pour les opérations au Canada, on aurait pu acquérir mieux et payer plus cher. Mais le choix le plus équilibré et le plus avantageux au niveau de nos hélicoptères de reconnaissance, compte tenu de leur utilité, de leur portée et des sommes d'argent dont nous disposions alors, était cet hélicoptère.
Quand on prend des décisions relatives à l'acquisition d'équipement ou à la structure d'une force, il y a toujours un certain risque. Notre profession est risquée dès le début. Si on se sert de ces hélicoptères dans le cadre des plans de l'OTAN, ce ne seront pas les seuls hélicoptères qui seront en place. Des hélicoptères de transport lourds, des hélicoptères d'attaque et d'autres hélicoptères de reconnaissance seront aussi disponibles. Nous aurons une niche très spéciale grâce à nos hélicoptères qui sont rapides, qui pourront se rendre à des endroits où des hélicoptères plus lourds n'auront pas accès et qui utiliseront peut-être moins de pétrole pour se déplacer.
On ne parle donc pas ici de compromis du même ordre. On parle des risques qu'on prend lorsqu'on achète de l'équipement, et l'hélicoptère en est un. On aurait sûrement pu se doter d'une flotte beaucoup plus importante de moyens et de petits hélicoptères. C'est ce qu'on avait auparavant. Maintenant, le risque qu'on prend, c'est celui d'avoir seulement une flotte qui peut en faire beaucoup plus.
M. René Laurin: Général, si demain matin...
Le président: Thank you, Mr. Laurin.
M. René Laurin: Avec votre indulgence, monsieur le président, je poserai une courte question. Si le Canada décidait demain matin d'intervenir dans la crise que traverse le Pakistan...
[Traduction]
Le président: Je vous redonnerai la parole plus tard, monsieur Laurin.
Monsieur Grose, huit minutes, s'il vous plaît.
M. Ivan Grose (Oshawa, Lib.): Merci, monsieur le président. Comme d'habitude, je n'utiliserai probablement pas tout mon temps et je céderai la parole à mes collègues.
J'aimerais dire quelques mots aux représentants du ministère de la Défense et, en particulier, au général. Soit dit en passant, je vous admire d'avoir accepté cette responsabilité. Je n'en voudrais pas pour un million. Et je ne crois pas qu'on vous paye autant.
Vous êtes ici avec des amis. Pourriez-vous répondre à nos questions? Le comité, y compris les collègues d'en face, font partie du gouvernement. Si nous vous avons roulé, dites-le-nous.
Notre comité est chargé de surveiller les fonds qui ont été attribués et la manière dont ils ont été dépensés. D'après ce que j'ai entendu jusqu'ici, et surtout hier, lors de la séance d'information, il est très difficile de répondre à la question: «L'argent a-t-il été bien dépensé?» Comme vous l'avez dit, monsieur Judd, l'hélicoptère s'acquitte des tâches que l'on en attendait au moment de l'achat. Mais celles-ci correspondent à ce que cherchaient les forces armées au départ? Je ne le crois pas.
Je connais assez bien cet hélicoptère. J'ai appartenu, il y a bien, bien des années, à l'escadron qui l'utilise. Ils m'ont demandé, en confidence: «Qu'est-ce que nous sommes censés faire de cette chose?»
Le président: Ceci n'est pas en confidence, monsieur Grose.
Des voix: Oh, oh!
M. Ivan Grose: Je le sais, mais je voulais que cela figure au procès-verbal, pour que nous puissions en parler.
Je me demande si nous ne nous leurrons pas en disant aux forces armées: «Vous pensez peut-être avoir besoin de ceci, mais nous allons vous donner cela.» Au bout du compte, je sais, pour avoir eu ma propre entreprise, qu'un camion bon marché finit par coûter plus cher. Je me demande si ce n'est pas ce que nous faisons en essayant d'adapter les besoins des forces canadiennes à des paramètres que nous avons fixés d'avance, avant qu'elles puissent nous dire qu'elles étaient leurs besoins.
J'aimerais que vous nous répondiez honnêtement. Si nous faisons des économies de bouts de chandelles et que cela va finir par nous coûter de l'argent, au nom du ciel, dites-le-nous. Soyez honnêtes. Nous ne sommes pas ici à un point de presse. Vous ne répondez pas à des journalistes. Nous sommes des gens responsables, y compris mes collègues d'en face. Alors dites-nous si nous sommes en train de nous rendre un mauvais service, ainsi qu'à vous.
• 1615
Général, votre tâche est extrêmement difficile. Je le sais. Je
vous ai vu patiner lorsque vous avez répondu à la dernière question
en disant que l'équipement était tout à fait satisfaisant, que nous
avons un rôle au sein de l'OTAN, et que les autres partenaires
pourront assurer les transports lourds. Mais qu'est-ce que nous
devrions faire? Était-ce votre premier choix ou avez-vous dû
accepter le deuxième ou le troisième, pensant que le temps ferait
le reste? Peut-être que nous devrions assurer les transports lourds
et d'autres pourraient fournir les hélicoptères économiques et
légers. Je n'en sais rien. Dites-le-moi.
Gén J.M.G. Baril: La situation montre que nous avons choisi d'avoir cette capacité au Canada. Si vous me demandez: est-ce que nous avons assez de ressources ou non, je dois vous dire qu'il serait bien plus agréable de ne pas avoir à se montrer aussi prudent avec les dollars canadiens. Il nous incombe d'être extrêmement prudents avec l'argent que nous avons, et avant de dire qu'il nous en faut davantage, nous devons nous assurer d'avoir tiré tout ce que nous pouvons des ressources qui nous ont été données. Voilà où en est la situation.
Non seulement attendons-nous de l'équipement très coûteux, et devons-nous assurer l'entretien de ce que nous avons... Ce qui m'inquiète le plus, c'est la qualité de vie et les conséquences que cela aura sur la qualité de vie.
M. Ivan Grose: Merci, monsieur le président. Je laisse la parole à un de mes collègues.
Le président: Il vous reste quatre minutes, monsieur Grose. Nous allons donc passer à M. Myers.
Monsieur Myers, quatre minutes.
M. Lynn Myers: Merci, monsieur le président. Je voudrais tout d'abord remercier les témoins d'être venus aujourd'hui et des renseignements qu'ils nous apportent.
Général, j'aimerais commencer par vous. Il y a quelques minutes, vous reconnaissiez qu'il y avait des lacunes dans l'équipement et vous disiez que l'on s'en occupe et que l'on examine également les procédures d'achat. Pourriez-vous nous en dire un peu plus long sur les procédures. Cela m'intéresse.
Gén J.M.G. Baril: Je cède la parole à mes experts.
M. Jim Judd: En ce qui concerne la procédure d'approvisionnement, comme nous l'avons dit dans notre réponse au Rapport du vérificateur général, nous acceptons certains de ces commentaires quant à notre gestion interne. Je tiens à dire également que nous entendons commencer dès maintenant, dès cet été, à réexaminer la procédure que nous suivons pour arriver à nos décisions d'achat. Non seulement la procédure qui nous amène à choisir un élément d'équipement précis, mais aussi celle par laquelle nous établissons nos priorités entre les différents services des forces, et aussi sur les marchés eux-mêmes.
Jusqu'ici, notre procédure d'acquisition était plutôt longue. Il fallait de nombreuses années entre le moment où la décision était prise et l'achat de l'équipement. Nous essayons actuellement de la raccourcir. Nous cherchons de nouvelles méthodes de financement, comme nous l'avons fait avec les sous-marins Upholder, par exemple. Nous avons signé un contrat de location-bail de huit ans, plutôt que d'acheter le matériel.
En résumé, pour répondre à votre question, nous voulons réexaminer comment nous établissons nos priorités lorsqu'il s'agit d'exercer des choix entre les trois services. Nous voulons réexaminer la procédure même, dans le but de la raccourcir. Nous avons reçu des suggestions de l'industrie canadienne pour rationaliser nos procédures. M. Lagueux participe à un groupe d'étude interministérielle—avec lequel il doit d'ailleurs travailler demain, je crois—groupe qui cherche à resserrer la procédure d'acquisition elle-même. Enfin, nous cherchons différentes méthodes de financement.
• 1620
Permettez-moi d'ajouter sur ce dernier point que nous ne
sommes pas les seules forces armées au monde à le faire. Les
Britanniques, par exemple, examinent la possibilité de signer un
bail pour l'équipement qui remplacera leurs Hercules. Nous pouvons
donc apprendre beaucoup de choses, que ce soit dans le Rapport du
vérificateur général ou en regardant ce que font nos alliés. En
tant que sous-ministre, je veux m'assurer que nous aurons examiné
toutes les possibilités.
M. Lynn Myers: J'ai quelques questions, mais j'y reviendrai plus tard.
Le président: Monsieur Grewal, quatre minutes, s'il vous plaît.
M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Réf.): Merci, monsieur le président.
Je souhaite, bien sûr, la bienvenue à la délégation, mais j'aimerais des réponses précises, car nous avons très peu de temps.
Nous en sommes maintenant à quatre minutes, n'est-ce pas?
Le président: C'est exact, quatre minutes.
J'aimerais rappeler aux témoins d'être brefs car les députés n'ont pas beaucoup de temps. Soyez précis, concis et directs.
M. Gurmant Grewal: En ce qui concerne l'équipement et la modernisation des Forces armées canadiennes, je ne vois pas que le vérificateur général... et moi-même, après avoir lu le rapport... Je ne vois pas très bien quels sont les priorités et les objectifs.
À quel étalon mesurez-vous le rendement? En particulier, j'aimerais que vous nous parliez du fait que le vérificateur général signale que le ministère n'a pas de système financier lui permettant de faire des rapports en fonction des divers secteurs d'activités, qu'il s'agisse de la défense du territoire national ou de la défense internationale, ou encore des dépenses en équipement pour l'OTAN.
En tant que député, quand pourrais-je voir les conclusions financières et les évaluations de performance que permettra de donner le système financier? Voilà la première question, assez générale.
Deuxièmement, le budget de la défense augmente, tandis que le financement des immobilisations devrait diminuer; en termes absolus, il va en sens inverse. On cite votre ministère disant qu'il y aura des choix difficiles à faire et que des mesures seront prises. J'aimerais savoir ce que vous entendez par «choix difficiles». Ces choix difficiles mettent-ils en péril votre mission principale?
M. Jim Judd: En ce qui concerne les systèmes financiers, nous sommes en train d'en mettre en place un nouveau.
M. Gurmant Grewal: Quel est votre échéancier?
M. Jim Judd: Le système sera en place en l'an 2001. Dans le cadre de ce nouveau système, qui comprend le remaniement de nos méthodes administratives, nous espérons pouvoir donner suite aux observations du vérificateur général.
En ce qui concerne le financement, de façon générale, à propos des choix difficiles, nous avons fait un certain nombre de choses dans ce domaine, et nous continuons d'en faire. Il faut apprendre à faire les choses différemment. Je peux vous donner en exemple la coopération avec le secteur privé à Moose Jaw pour la formation des pilotes de chasse, que nous sommes essentiellement en train de privatiser.
Deuxièmement, nous...
M. Gurmant Grewal: Est-ce de la sous-traitance ou de la privatisation?
M. Jim Judd: De la sous-traitance.
M. Gurmant Grewal: Bon.
M. Jim Judd: Nous réexaminons constamment tous les secteurs du ministère et des forces armées en vue d'accroître au maximum l'efficience, sans pour autant mettre excessivement en péril les opérations des Forces canadiennes.
Nous examinons notamment les méthodes alternatives de services, afin de voir comment nous pouvons nous acquitter différemment de nos tâches non essentielles, par la sous-traitance ou la privatisation, et en révisant les services secondaires ou subsidiaires qui n'ont pas d'incidence directe sur le fer de lance, si je puis dire.
M. Gurmant Grewal: Merci, monsieur le président.
Le président: Merci, monsieur Grewal.
Monsieur Laurin, je crois que vous avez d'autres questions.
[Français]
M. René Laurin: Oui, mais je vais changer mon plan d'action parce qu'il y a beaucoup de choses que je veux savoir.
Général Baril, pouvez-vous nous dire si le rôle que le gouvernement veut faire jouer à son armée est actuellement suffisamment clair pour que vous puissiez dire à votre ministère: Compte tenu du rôle que l'on veut nous faire jouer, voici les instruments et l'équipement dont nous avez avons besoin et voici le plan d'acquisition de cet équipement pour les 5, 10 ou 15 prochaines années? Le rôle que le gouvernement vous confie est-il actuellement suffisamment clair pour que vous puissiez établir des budgets qui vous permettront d'avoir une armée équipée comme elle l'entend dans 5 ou 10 ans?
Gén J.M.G. Baril: Oui. Il serait toutefois trop facile de dire qu'on sait exactement où on en sera dans un an, dans cinq ans ou dans 15 ans. Comme on l'a mentionné au début, la situation change et il faut donc effectuer continuellement des ajustements dans notre système d'acquisition. Il y a des changements au niveau des risques et également des menaces qui existent partout dans le monde qui nécessitent un rajustement.
Mais je réponds oui à la question que vous me posez. De fait, je suis en mesure de dire au gouvernement chaque jour, lorsqu'il me présente telle ou telle demande, si je suis capable d'y répondre ou non parce que j'ai ou n'ai pas l'équipement nécessaire.
M. René Laurin: Avez-vous aussi préparé et déposé un plan auprès du ministère pour que le gouvernement sache que vous avez besoin de tel équipement? Si oui, serait-possible que nous en prenions connaissance éventuellement?
Gén J.M.G. Baril: Il faudrait que je demande où sont nos plans d'acquisition à long terme. Certains sont probablement classifiés, mais ils peuvent être déclassifiés pour le gouvernement. Mais notre plan d'acquisition est connu à court terme et à long terme.
M. René Laurin: Par exemple, on achète actuellement des sous-marins d'occasion. Il est probable qu'à l'origine, ce n'était pas ce que vous aviez demandé.
Gén J.M.G. Baril: Dans nos plans de 1967, ou plutôt de 1987, vous auriez vu des sous-marins nucléaires.
M. René Laurin: Ne remontez pas trop loin; je n'étais pas au monde à ce moment-là.
Gén J.M.G. Baril: En 1987? Ces sous-marins répondent aux besoins de notre marine et de la défense de notre pays.
M. René Laurin: Faites-vous votre planification d'acquisition d'équipement en fonction d'éventualités ou en fonction de l'expérience passée?
Gén J.M.G. Baril: Mon collègue pourrait peut-être vous répondre.
Le président: Monsieur le sous-ministre.
[Traduction]
M. Jim Judd: C'est à la fois basé sur l'expérience et les projections. Comme je l'ai dit plus tôt, nous devons tenir compte de la situation internationale, des éventuelles exigences, et essayer, à partir de là, de développer...
[Français]
M. René Laurin: Je m'excuse de vous interrompre, monsieur le sous-ministre. Le ministère de la Défense prévoit dépenser 6,5 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années. Comment avez-vous établi cette somme?
[Traduction]
M. Jim Judd: C'est ce qu'a conclu le vérificateur général à propos de notre budget. J'hésiterai beaucoup à me prononcer sur les budgets futurs, car nous ne savons pas ce que le gouvernement décidera ou non.
Le président: Monsieur Rattray ou monsieur Kasurak, voulez-vous répondre?
M. Peter Kasurak (Directeur principal, Direction générale des opérations de vérification, Bureau du vérificateur général du Canada): Oui, monsieur le président. J'aimerais simplement rappeler au comité que les chiffres que nous présentons dans notre rapport sont tirés des plans d'activités du ministère. Ils ont été approuvés à un palier hiérarchique relativement élevé. Ce ne sont donc pas des estimations que nous avons faites nous-mêmes; ce sont des compilations des propres devis du ministère. J'aimerais simplement préciser que si cela n'est pas tiré du plan d'équipement à long terme, lequel se base sur le budget actuel du ministère, c'est cependant une évaluation des besoins approuvés à un niveau hiérarchique relativement élevé.
Le président: Merci, monsieur Kasurak.
Monsieur Pagtakhan, quatre minutes.
M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord—St. Paul, Lib.): Merci, monsieur le président, et merci à tous d'être venus.
Dans sa présentation, si j'ai bien compris, le Bureau du vérificateur général a relevé trois grandes recommandations. Ma question à l'intention des fonctionnaires du Bureau est donc la suivante. D'après ce que vous avez entendu jusqu'ici, les représentants du ministère ont-ils bien répondu aux trois inquiétudes que vous avez mentionnées: la nécessité d'un cadre de développement, l'amélioration des informations communiquées au Parlement et la correspondance entre les ressources de défense et les objectifs politiques en ce domaine?
M. Peter Kasurak: Si je comprends bien ce que le ministère a présenté, nous sommes heureux d'apprendre du sous-ministre qu'il s'efforce vigoureusement d'améliorer le cadre dans de nombreux secteurs clés que nous avons mentionnés. Je n'ai pas entendu mentionner les scénarios de conflit, mais je crois que le ministère travaille aussi. Je dirais donc que le ministère a répondu au comité pour cette partie-là de nos recommandations. Je n'ai encore rien entendu quant aux deux autres.
M. Rey Pagtakhan: Bon, alors, le général Baril et les représentants du ministère pourraient-ils nous donner leurs réponses à ces recommandations du vérificateur général—plus précisément en ce qui concerne l'amélioration des informations communiquées au Parlement, la nécessité de mettre en place de véritables indicateurs de rendement et la correspondance entre les ressources et les objectifs de la politique de défense? Quelle est la meilleure façon d'y parvenir, quel est votre plan, et êtes-vous disposés à en faire part au comité?
M. Jim Judd: En ce qui concerne les informations au Parlement, et plus précisément les indicateurs de rendement qui seraient utiles, je crois que mon prédécesseur s'était engagé à les produire dans deux ans, c'est-à-dire en 1999.
Deuxièmement, en ce qui concerne la correspondance entre les ressources et les objectifs de défense, c'est précisément le but du processus de planification opérationnelle que nous avons mis en marche, comme d'ailleurs la plupart des autres ministères, cette année. Je dois dire que ce sera très difficile pour nous. Ce ne sera pas facile. Je crois que nous allons devoir travailler en étroite collaboration avec le Conseil du Trésor, et parler probablement aussi à nos alliés et amis qui, selon le vérificateur général, ont beaucoup plus d'avance que nous dans ce domaine. C'est le cas de la Nouvelle-Zélande et des États-Unis.
Nous allons nous y mettre cette année. Nous espérons nous améliorer continuellement. Nous espérons pouvoir venir l'an prochain faire état de nos progrès sur ces deux fronts.
M. Rey Pagtakhan: Ma question s'adresse aux porte-parole du vérificateur général. La promesse de mettre en place les indicateurs de rendement dans un délai de deux ans—d'ici 1999—vous paraît-elle raisonnable, de votre point de vue?
M. Peter Kasurak: C'est un problème que notre bureau signale presque tous les deux ans, depuis 1984. Je suis donc déçu que ce ne soit pas encore fait. Du point de vue des témoins que nous avons ici aujourd'hui, et vu leur point de départ, il y aurait peut-être moyen de hâter un peu la chose, mais 1999 est probablement une estimation réaliste et qu'on ne pourra pas améliorer de beaucoup.
J'aimerais ajouter toutefois que la préparation de ce chapitre nous a fait comprendre qu'une meilleure communication au Parlement ne dépend pas absolument d'un système d'information global. Nous incitons certainement le ministère et le comité à envisager d'autres moyens, tout en attendant la mise en place d'un système d'information. Il est possible d'améliorer la situation dans l'intervalle.
C'est tout, monsieur le président.
Le président: Merci, monsieur Pagtakhan. Nous vous donnerons un autre tour.
• 1635
Général Baril, le rapport du vérificateur général est assez
critique en ce qui concerne l'équipement et la modernisation des
Forces armées canadiennes. Toutefois, en écoutant la déclaration
liminaire du sous-ministre, j'ai détecté un ton plutôt optimiste.
Vous êtes chargé de diriger les forces armées dans leur rôle de
maintien de la paix et, éventuellement, Dieu nous en garde, sur le
champ de bataille. En tant que chef de l'état-major de la Défense,
vous sentez-vous à l'aise à la tête des forces armées avec
l'équipement et le plan de modernisation que nous avons
actuellement?
Gén J.M.G. Baril: Monsieur le président, comme je l'ai dit dans le mot d'ouverture, les forces armées sont mieux équipées, mieux entraînées et probablement mieux dirigées aujourd'hui qu'elles ne l'étaient auparavant. Je suis absolument convaincu que la marine a l'équipement le plus moderne. Il y a des améliorations à faire pour les forces aériennes, mais elles sont néanmoins en meilleure posture qu'il y a sept ou huit ans.
Le président: Mais pensez-vous pouvoir diriger les troupes?
Gén J.M.G. Baril: Certainement, mais compte tenu des limites de nos forces armées en 1998, qui avaient aussi des limites il y a 10, 15, 20 ou 30 ans. Quelles que soient ces limites, j'en suis informé et j'en informerai le premier ministre et les autorités du pays.
Le président: Dans votre allocution d'ouverture, vous avez dit qu'il y a quatre éléments: l'équipement, l'instruction, le leadership et les conditions de service. Vous avez dit qu'il y aurait des besoins dans tous ces secteurs, ce qui montre que vous n'avez pas tout ce qu'il faut actuellement. Pouvez-vous vous arranger avec les ressources dont vous disposez actuellement en matière d'équipement, d'instruction, de leardership et de conditions de service?
Gén J.M.G. Baril: Le niveau est certainement acceptable. Nous avons toujours besoin d'améliorer l'équipement. La technologie évolue rapidement, ce qui explique que nous ayons un plan d'acquisition aussi coûteux. Mais pour ce qui est des attentes découlant de la politique en matière de défense, et sachant que si nous entrions dans un conflit, ce serait avec une coalition, oui, je me sens tout à fait à l'aise.
Le président: Monsieur Judd, vous avez dit dans votre allocution d'ouverture que vu «le type d'opérations qui seront probablement entreprises au cours des prochaines années, les Forces canadiennes sont, en fait, en assez bonne posture». Il y a deux semaines, l'Inde faisait exploser de nombreux engins nucléaires, et le Pakistan en a fait autant aujourd'hui. Le monde peut changer très rapidement.
Sur quoi vous fondez-vous pour dire que nous sommes en assez bonne posture pour faire face aux situations qui pourraient se présenter au cours des quelques prochaines années?
M. Jim Judd: Monsieur le président, j'ai dit cela parce que d'après notre évaluation actuelle, et malgré les événements récents sur le sous-continent indien, la situation générale sur la scène internationale nous paraîtrait différente de ce qu'elle était il y a dix ans...
Le président: Mais est-elle différente de ce qu'elle était il y a trois semaines?
M. Jim Judd: Comme la plupart de nos amis et alliés des pays industrialisés, nous en sommes encore à analyser très attentivement ce qui s'est passé ce mois-ci dans le sous-continent indien. Nous n'avons pas encore terminé d'analyser ce que cela peut signifier pour nous en termes politiques et militaires. En parlant d'opérations, je parlais du type d'opérations auxquelles nos forces participent, ont participé et participeront dans un avenir prévisible.
Le président: Nous ne voulons surtout pas penser que nous allons devoir faire la dernière guerre. Parfois, la situation est différente. Si je regarde le paragraphe 3.16 du Rapport du vérificateur général, il dit que depuis 1984, il a «formulé... des inquiétudes à propos des dépenses consacrées à la modernisation de l'équipement», et il donne des exemples. Au paragraphe 3.17, on parle de faiblesses constatées en 1984 dans le processus adopté par le ministère pour établir un lien entre la politique et l'équipement requis pour appliquer celle-ci. En 1992, il avait des inquiétudes qui sont formulées au paragraphe 3.18 et 3.20:
-
[...] en 1996 [...] certaines pièces de l'équipement de l'armée de
terre, surtout pour le maintien de la paix, n'étaient pas à la
hauteur des missions et des tâches entreprises.
Depuis 1984, c'est-à-dire depuis 14 ans, le vérificateur général a critiqué dans divers rapports la capacité des forces armées à s'acquitter de leurs obligations éventuelles. Quelle garantie pouvez-vous nous donner que les choses vont désormais être différentes?
M. Jim Judd: Le général Baril voudra peut-être intervenir là-dessus également, puisqu'il est le commandant en chef, mais je ne suis pas sûr de partager le point de vue que nous ayons mis nos forces en position...
Le président: J'ai simplement dit que le vérificateur général avait été critique dans nombre de ces rapports, et c'est le cas aussi de celui que nous avons maintenant sous les yeux. Je vous demande donc quand nous pouvons espérer que le vérificateur général nous dise qu'il a constaté des progrès importants pour s'assurer que nous ayons l'état de préparation que nous jugeons nécessaire?
Quand pouvons-nous espérer un changement d'attitude au ministère de la Défense nationale, pour nous assurer que nous soyons à la hauteur?
M. Jim Judd: Je ne sais pas si je vivrai assez longtemps pour voir un jour un rapport du vérificateur général qui dise que tout va bien. J'espère vivre assez longtemps.
En tout état de cause, pour répondre à votre question, il faut dire, je crois, que le général et moi-même appartenons à une organisation qui, comme je l'ai dit dans mon allocution, a subi une importante transformation.
Le président: Ce que nous essayons de faire... Le vérificateur général nous a signalé—et M. Grose l'a fait remarquer, j'espère que vous savez que vous êtes ici avec des amis.
Si je regarde le paragraphe 3.32, j'y lis:
-
Dans le Guide de développement de la force terrestre de 1994,
—j'imagine que c'est une de vos propres publications—
-
l'armée affirmait que, sur le plan opérationnel, elle ne s'était
pas tenue à la fine pointe de la technologie pour la modernisation
de son équipement, le rendant ainsi vulnérable dans des opérations
de faible et de moyenne envergure.
C'est là votre propre évaluation interne que nous signale le vérificateur général, indiquant que vous êtes maintenant vulnérables dans les opérations de faible et de moyenne envergure.
-
Son infanterie et ses blindés pourraient en effet être repérés,
engagés et défaits bien avant que l'on ne soit même conscient d'une
présence ennemie.
Général Baril, que dites-vous de cette analyse faite par votre propre ministère?
Gén J.M.G. Baril: Cela correspond certainement à certaines lacunes que nous avions par le passé, et il en restera probablement dans l'avenir. Mais de manière générale, la modernisation de l'équipement a permis de régler le problème. Un équipement ancien n'est pas nécessairement inutile. Il peut être revalorisé et tout à fait utile. C'est le cas de l'équipement que nous utilisons actuellement.
Le président: Vous continuez de dire que vous allez revaloriser l'équipement. Depuis 1984, le vérificateur général nous répète que vous êtes toujours en mode de rattrapage. Maintenant vous nous dites que vous parviendrez au but un jour. Atteindrons-nous un jour le point où vous vous sentirez à l'aise?
Gén J.M.G. Baril: Je me sens à l'aise maintenant. Quand nous engageons nos effectifs, j'ai confiance qu'ils sont protégés et en mesure d'accomplir leur mission.
Le président: Monsieur Rattray, voulez-vous intervenir?
M. David Rattray: Comme je suis de ceux qui sont en poste depuis 1984 et responsables de la vérification du ministère de la Défense nationale depuis en fait 1982, je crois que nous pouvons dire être à l'origine d'un certain nombre d'initiatives qu'a lancées le ministère. Elles concernent les scénarios de planification, l'orientation. Elles traitent de nouveaux principes, de meilleures informations au Parlement, de meilleurs indicateurs de rendement, de nouveaux systèmes d'information financière, et ainsi de suite.
Nous aimerions maintenant voir davantage de plans de mise en oeuvre, avec des échéanciers, des produits livrables, etc. On a fourni un énorme effort pour restructurer la procédure d'approvisionnement, dont nous parlerons j'en suis sûr dans le cadre du chapitre suivant et dont nous avons déjà traité dans le passé. Cela a énormément contribué à rationaliser l'achat des fournitures, des articles moins chers.
Le ministère d'apprête à entreprendre une restructuration ou une refonte en profondeur de sa procédure d'acquisition des immobilisations majeures, mais il n'en est encore qu'à l'étape de la planification. Nous essayons d'obtenir des dates, des échéances, des engagements afin de pouvoir évaluer les progrès dans de nombreux domaines. Au bout de 15 ans, nous aussi, nous sommes frustrés.
Le président: Merci, monsieur Rattray.
Monsieur Mayfield.
M. Philip Mayfield: Merci beaucoup, monsieur le président.
J'avais conclu en disant que je souhaiterais que les porte-parole du vérificateur général, M. Rattray et M. Kasurak, nous donnent leur point de vue sur l'échange que nous avons eu concernant l'évolution de la situation mondiale et la capacité des forces armées à déterminer l'équipement dont elles ont besoin face à cette situation. Je me demandais si vous souhaitez dire quelques mots là-dessus, au-delà de ce que vous avez déjà dit, puisque j'avais conclu en disant que je vous inviterais à intervenir.
M. Peter Kasurak: De notre point de vue, l'un des principaux éléments manquants, c'est la définition et la publication des scénarios de conflit. Nous savons tous que nous vivons dans un monde incertain où il est impossible de prédire avec aisance quel sera le prochain conflit auquel nous pourrions être mêlés.
Différentes forces armées ont essayé de régler ce problème—et je crois que les Forces canadiennes ont aussi commencé—en élaborant des scénarios de conflit qui correspondent à un ensemble d'événements probables, d'éventualités vraisemblables auxquelles il faudrait se préparer. Ces scénarios sont ensuite présentés au Parlement ou aux gouvernements en disant: «Voici ce que nous sommes prêts à faire, et voici comment notre structure et notre équipement actuel s'y prêtent. Nous sommes peut-être suréquipés de certains points de vue et sous-équipés pour d'autres, et voilà comment nous entendons équilibrer la situation.»
Sans ce document de référence, qui doit être disponible au Parlement, il nous sera très difficile de vraiment pouvoir répondre à la question. Nous continuons donc d'exhorter le ministère à poursuivre ses efforts en vue de préparer ces scénarios.
M. Philip Mayfield: Compte tenu de la discussion que nous venons d'avoir, général Baril et M. Judd, et compte tenu de ce que l'on vient de dire ici, j'aimerais vous demander si vous savez vraiment quel type d'opérations votre personnel aurait vraisemblablement à entreprendre au cours des prochaines années? Avez-vous des protocoles d'entente avec nos alliés concernant les capacités qu'il faudrait mobiliser rapidement ou à un certain rythme?
Et sinon, comment savez-vous quel genre d'équipement acheter? Est-il vrai que vous n'avez pas encore pleinement élaboré vos scénarios? Le cas échéant, encore une fois, comment décidez-vous quel équipement acheter et comment pouvez-vous évaluer l'équipement que vous envisagez d'acheter? Pourriez-vous répondre de manière concise, s'il vous plaît?
M. Jim Judd: En ce qui concerne les scénarios, monsieur, nous avons fait du chemin mais nous ne sommes pas encore au but. Nous espérons les avoir terminés cette année, car ils sont très importants pour nous, du point de vue de la planification et notamment, par exemple, pour savoir comment nous allons régler le problème informatique de l'an 2000.
En ce qui concerne la définition des engagements, oui, nous avons des engagements définis. Ils se trouvent dans le Livre blanc. Nous en avons aussi avec l'OTAN, pour ce qui est de l'apport de forces maritimes, aériennes et navales, et d'effectifs dans certaines circonstances. Nous avons également des engagements bien définis avec les États-Unis dans le cadre du système de défense aérienne de l'Amérique du Nord, qui précise non seulement le nombre et la qualité des avions que nous devons fournir, mais aussi le réseau des systèmes de détection, notamment.
Au-delà, pour ces opérations qui ne découlent pas d'engagements préalables, nous procédons essentiellement par négociation collective entre les participants à l'opération afin de déterminer qui fournira quoi et dans quelles circonstances, que ce soit dans le cas des opérations de l'OTAN, dans l'ancienne Yougoslavie ou, plus récemment, dans l'opération onusienne à laquelle nous avons participé en République centrafricaine. Nous faisons partie d'une force multinationale à laquelle nous contribuons environ 45 personnes qui assurent les communications pour l'ensemble de l'opération, qui elle est beaucoup plus importante que cela.
Le président: Merci, monsieur Judd.
Monsieur Myers, quatre minutes.
M. Lynn Myers: Merci, monsieur le président.
Mon cher ami et collègue, M. Grose, voulait parler en confidence. Quant à moi, je tiens beaucoup à ce que mes paroles figurent au compte rendu.
J'ai écouté le vérificateur général et j'ai écouté le général Baril, mais je dois vous dire qu'en tant que chef de l'état-major de la défense, général, lorsque vous dites que les forces armées sont plutôt en bonne posture et que vous êtes confiant de leur capacité, tout en étant conscient des faiblesses et des améliorations à apporter, j'écoute avec la plus grande attention. J'apprécie la confiance que vous avez exprimée aujourd'hui.
• 1650
Monsieur Judd, j'aimerais revenir à la planification des
acquisitions et des immobilisations à long terme. Vous avez dit que
vous ajustez périodiquement les priorités en matière de
financement. Pourriez-vous nous dire quand vous faites ces
ajustements. Annuellement? Comment?
M. Jim Judd: Je n'ai pas beaucoup d'expérience dans ce domaine; je ne suis là que depuis un peu moins de trois mois. En ce qui concerne la procédure pour les acquisitions, un examen était déjà en cours. Il porte sur la réforme générale de la procédure au sein du gouvernement. M. Lagueux y participe activement. Quand je suis arrivé, je voulais vraiment essayer de mettre en place un système d'établissement des priorités qui soit beaucoup plus ample et qui couvre tous les services, tous les éléments d'équipement et qui permettent d'arriver à des équilibres et de tenir compte des compromis. Tel que je l'imagine—car nous ne sommes pas encore très avancés dans ce processus—nous réviserions le plan annuellement.
L'un des gros problèmes que nous risquons de rencontrer a fait l'objet d'une série d'articles publiés au cours des derniers jours sur le thème de la révolution dans les affaires militaires, c'est-à-dire l'application de l'informatique aux systèmes de guidage de précision, qui donne une toute nouvelle génération d'équipement militaire ou d'équipement potentiel. La situation est très semblable à celle que l'on rencontre souvent dans la société civile, en ce sens qu'un nouvel ordinateur ou un nouveau logiciel arrive sur le marché tous les trois à six mois.
Pour nous, toute cette révolution dans les affaires militaires, avec les systèmes de guidage informatisés, par exemple, va énormément compliquer notre vie du point de vue des acquisitions. C'est pour cela qu'il faut, à mon sens, revoir les plans au moins une fois par an.
M. Lynn Myers: J'aimerais revenir à une chose qu'a dite le général. J'ai beaucoup apprécié ce qu'il a dit à propos de la nécessité d'un équilibre entre l'équipement, la formation, le leadership et la qualité de vie.
Comment évaluez-vous ces éléments et comment décidez-vous lequel est le plus important? Faites-vous ce type de jugement? La chose est-elle réfléchie, bien pesée? J'essaie en fait de comprendre comment vous planifiez et comment vous prenez ce type de décisions quand vous devez répartir de l'argent et des ressources.
M. Jim Judd: Comme je l'ai dit plus tôt, monsieur, nous n'avons malheureusement pas de boîte magique qui nous fournisse des réponses. Nous devons évaluer de notre mieux les besoins en fonction des circonstances et essayer de déterminer au mieux ce que le budget nous permet de faire.
En ce qui concerne le leadership, je ne crois pas me tromper en disant qu'environ 75 p. 100 de la hiérarchie civile et militaire du ministère et des Forces canadiennes date des 10 à 12 derniers mois, en commençant par le ministre. Le chef d'état-major est arrivé l'automne dernier avec les trois commandants des services, le sous-chef d'état-major et le vice-chef d'état-major. Je suis moi-même nouveau. Le juge-avocat général est nouveau. L'avocat civil est nouveau. Nous passons donc beaucoup de temps à faire connaissance. Toutefois, côté leadership, les choses se passent bien.
Sur la qualité de vie, vos homologues du CPDNAC ont entrepris une étude très fouillée de la question et présenteront un rapport à l'automne. Je crois d'ailleurs qu'il y a des audiences ici, à Ottawa, aujourd'hui même. Le comité est allé dans tout le pays et à l'étranger dans le cadre de son étude des forces, et il présentera un rapport très complet qui traitera probablement de la qualité de vie et de bien d'autres choses.
• 1655
Mais au bout du compte, en quelques mots, c'est une question
de jugement et d'évaluation de la part de l'administration et du
personnel militaire, et de nos maîtres politiques.
Le président: Merci, monsieur Myers.
Monsieur Pagtakhan, encore une fois, quatre minutes.
M. Rey Pagtakhan: Merci, monsieur le président.
Quand vous avez dit que beaucoup de choses avaient changé au ministère, cela m'a rappelé le principe sociologique selon lequel le leadership est fonction de l'époque. Autrement dit, nous avons répondu aux besoins de l'époque. La confiance que vous avez exprimée est la preuve de ce truisme.
Général Baril, face à vos trois missions—défense du Canada, défense de l'Amérique du Nord, paix et sécurité internationales—comment notez-vous cette confiance? Nous donnez-vous un A, A-plus, B, C, D, ou F?
Gén J.M.G. Baril: Si vous me demandez mon avis personnel, j'aurais tendance à donner la note la plus élevée, mais il faut être prudent. Nous ne savons pas quelle sera la menace à laquelle nous devrons faire face dans un, cinq ou dix ans. Nous avons cependant une assez bonne idée.
Au bon vieux temps de la guerre froide, nous savions exactement qui était l'ennemi, où il se trouvait et ce qu'il avait en main. Nous nous efforcions alors de pouvoir riposter le plus fermement possible avec les ressources dont nous disposions. Il est devenu très difficile de définir la menace, surtout dans l'avenir, car elle évolue énormément. Quelle sera la menace dans cinq ans? D'où viendra-t-elle?
Compte tenu de la menace que nous percevons actuellement, et des améliorations effectuées au sein des forces en matière de capacité, en collaboration avec nos alliés de la coalition et des traités dont nous sommes signataires, nous pouvons dire que la menace est plutôt faible. Mais les événements des trois dernières semaines sont bien sûr inquiétants.
M. Rey Pagtakhan: Monsieur le sous-ministre, si après avoir déposé votre budget le gouvernement vous offrait un milliard de dollars supplémentaires, le refuseriez-vous?
Le président: Vous parlez d'une augmentation de salaire?
Des voix: Oh, oh!
M. Jim Judd: Je crois que je serais obligé de céder aux pressions de mes collègues et de l'accepter.
M. Rey Pagtakhan: Je voulais dire par là que le budget que vous avez proposé est très réaliste et que, bien sûr, vous démontrez toujours la plus grande prudence avec les dollars canadiens, comme l'a dit plus tôt le général.
Ma question s'adresse aux porte-parole du vérificateur général. Après ce qu'a dit le président à propos des inquiétudes exprimées depuis 1984, nous restons sur l'impression que les problèmes n'ont pas été réglés. Mais il me semble qu'aucune de ces inquiétudes ne s'est concrétisée, que tout cela demeure au niveau conceptuel. Certaines de ces inquiétudes que vous avez formulées se sont-elles effectivement concrétisées?
M. Peter Kasurak: Excusez-moi, je ne comprends pas bien la question.
M. Rey Pagtakhan: Je vais peut-être prendre un exemple dans la médecine. Si nous ne prenons pas telle mesure, nous aurons une épidémie. Au bout de dix ans, il n'y a pas d'épidémie, pas de dommage. J'aimerais savoir ce qu'il en est dans ce contexte.
M. Peter Kasurak: Dans un contexte militaire, on ne peut jamais savoir, sauf si les événements se produisent. Bien que nous n'ayons pas fait de vérification là-dessus récemment, nous avions déposé en 1996 une vérification des opérations de maintien de la paix et nous avions conclu non seulement que le ministère n'appliquait pas comme il se devait son programme d'évaluation des exercices et de l'état de préparation des Forces canadiennes, mais qu'en plus, dans la grande manoeuvre prévue sous le nom Opération COBRA, les forces étaient très loin des objectifs fixés pour l'état de préparation.
On peut donc dire que les lacunes ont été démontrées. Mais ce qui est peut-être plus important, c'est que nous avons signalé au Parlement nos difficultés à procéder à des évaluations régulières.
• 1700
Les porte-parole du ministère pourront vous dire dans deux
secondes que tout a été réglé depuis 1996. À l'époque, nous
estimions qu'il y avait des lacunes importantes qui nous causaient
des inquiétudes. C'est la meilleure réponse que je puisse vous
donner, en me fondant sur le résultat de nos travaux.
Le président: Merci. Nous y reviendrons.
M. Rey Pagtakhan: Monsieur le président, cela me paraît très important.
M. Lynn Myers: Il est très important que nous entendions la réplique.
Le président: Bon.
M. Rey Pagtakhan: Comment M. Judd et le général répondent-ils aux commentaires du vérificateur général?
Gén J.M.G. Baril: Votre question est tout à fait intéressante. Les problèmes signalés ont-ils eu des conséquences? Des soldats canadiens sont-ils morts à cause des faiblesses de notre équipement? Il faudrait, pour vous répondre, passer par la commission d'enquête. Nous avons eu beaucoup de pertes, et beaucoup d'hommes et de femmes ont été blessés. Beaucoup de véhicules ont été frappés par toutes sortes de projectiles. Mais je ne crois pas que quelqu'un ait été tué à cause d'une déficience de l'équipement.
Je crois qu'aucune partie de la tâche confiée au gouvernement du Canada, aux Forces canadiennes, aux unités déployées alors ou maintenant... Je ne crois pas que c'était dû à une mauvaise formation ou à une insuffisance. Nous avons constaté des lacunes et nous avons tiré des leçons importantes.
Je crois que c'était dû à l'insuffisance de l'instruction avant le conflit, et nous avons été pris au dépourvu; nous n'étions pas préparés pour ce type de conflit. Nous attendions encore les Russes et nous avons été frappés autrement. Nous n'étions pas prêts.
J'espère que nous ne continuerons pas de faire de l'entraînement pour les conflits d'il y a trois ans, mais bien pour les conflits à venir. C'est pourquoi nous voulons améliorer l'équipement, le leadership et la qualité de vie de tous nos membres.
Le président: Merci.
Monsieur Grose, vous avez quatre minutes.
M. Ivan Grose: Merci, monsieur le président.
Je tiens à dire d'emblée que mon propos n'est pas de supplanter le Comité de la défense. Ce qui nous intéresse, quant à nous, c'est de savoir où va notre argent et si nous en avons pour notre argent.
Mes questions s'adressent au général. Seriez-vous en mesure de déployer un groupe-brigade avec la capacité d'approvisionnement, de soutien aérien... seriez-vous en mesure de le déployer presqu'immédiatement? Si c'était très loin du Canada, en quelques jours; je comprends que vous ne pouvez pas déplacer un groupe-brigade en 24 heures.
Deuxièmement, si la réponse est négative, que seriez-vous en mesure de déployer immédiatement, en n'oubliant pas que je cherche à savoir si nous vous avons donné les moyens de faire?
Gén J.M.G. Baril: Pour répondre à votre question de savoir si je suis en mesure d'employer un groupe-brigade demain, la réponse est non. Cela ne fait pas partie de notre mission de défense du Canada. On me donne 90 jours pour un tel déploiement. À la question de savoir si je suis en mesure d'effectuer un déploiement de grande ou de moyenne intensité en 90 jours, je réponds oui.
Nous avons préparé une brigade dans le cadre de l'exercice COBRA. Nous avons constaté des lacunes, que nous avons comblées. La semaine dernière, à Sofia, nous avons envoyé sur le terrain une brigade mécanisée complète, dans toutes les phases de guerre, y compris le tir réel.
Alors si la question est de savoir si j'ai une brigade prête, je réponds oui. Ses limites sont celles que nous avons mentionnées pour ce qui est de la capacité de combat. Elle ne dispose pas de lance-roquettes multiples; elle ne dispose pas d'hélicoptères d'attaque; et elle n'a pas le dernier modèle de char. Nous avons fait savoir à nos alliés que nous pouvons déployer en 90 jours. S'il me fallait 95 jours, je demanderais aux autorités canadiennes de m'accorder cinq jours de plus.
Votre deuxième question était de savoir si nous pouvions déployer en 48 heures, en sept jours? Nous avons un menu de capacité bien établi sur lequel nous nous sommes entendus et qui montre ce que nous pouvons offrir au Canada, aux alliés et aux Nations unies. Il est confidentiel, mais je peux vous donner une information très précise.
M. Ivan Grose: Je ne veux pas que vous me disiez des choses que je ne devrais pas savoir. Ce qui m'intéresse, c'est de savoir si nous avons préparé le créneau dans lequel nous pouvons opérer avec nos alliés?
J'aimerais ajouter une autre question à la première. L'équipement dont vous disposez est-il équivalent à celui qu'ont nos alliés ou l'ennemi auquel nous faisons face?
Gén J.M.G. Baril: Pour ce qui est de la marine, nos vaisseaux ont prouvé qu'ils sont de qualité supérieure et qu'ils peuvent fonctionner avec la coalition... Il en va de même pour nos avions. Ils sont revenus de Bosnie juste avant Noël dernier et ils ont montré qu'ils peuvent opérer avec les meilleurs et contre les meilleurs.
M. Ivan Grose: Pour l'appui aérien et l'appui au sol...?
Gén J.M.G. Baril: Oui, les deux. Ils sont armés. Les pilotes ont reçu une instruction polyvalente. Ils ont des bombes guidées à courte portée, ils peuvent être équipés de roquettes ou de canons, ou ils peuvent apporter une défense supplémentaire aux autres avions.
M. Ivan Grose: Ils n'avaient pas cette capacité durant la Guerre du Golfe?
Gén J.M.G. Baril: Si, mais elle n'était pas au même niveau qu'actuellement. Nous n'avions pas alors la bombe guidée. Nous avons maintenant cette capacité. Les avions sont en outre équipés d'autres appareils qui leur donnent une vision de nuit.
Dans les forces terrestres, nous avons amélioré la capacité de reconnaissance. Nous disposons probablement du meilleur véhicule de reconnaissance qui existe actuellement, le Coyote. Nous allons mettre en service un nouveau modèle de TTB. Tous nos véhicules ont en outre été blindés. J'ai pu moi-même constater comment ces véhicules soutiennent des tirs directs, et je sais qu'ils y résisteront.
Les choses s'améliorent également du côté des communications. En résumé, oui, nous avons une bonne capacité. Quant aux pièces qui nous manquent, nous pouvons partager avec les autres membres de la coalition, comme nous l'avons fait durant la Guerre du Golfe, et comme nous le faisons actuellement en Bosnie.
Le Canada n'a pas d'hélicoptères. Ce sont les autres membres de la SFOR qui les fournissent, tandis que nous apportons d'autres capacités, du service médical à la logistique.
M. Ivan Grose: Si mon scepticisme vous étonne, sachez que je viens d'une ville où le régiment de la Réserve était équipé de Cougar qu'il a emmenés en Bosnie où ils se sont bien entendu avérés insuffisants. L'équipement à Oshawa n'était pas suffisant, mais ce n'est plus le cas maintenant.
Gén J.M.G. Baril: Puis-je vous donner mon point de vue sur le Cougar?
Je suis rentré de Bosnie il y a dix jours à peine. Le Cougar est un drôle de véhicule. Il a une vingtaine d'années, mais il est encore très utile. Il est équipé d'un puissant canon qui est utile pour le genre de missions que nous avons. Nous avons amélioré le blindage, mais ce n'est pas le meilleur véhicule possible et nous allons le remplacer.
J'espère avoir le Coyote pour la prochaine rotation des troupes, non pas cet été, mais pour le prochain tour. Nos amis de la cavalerie ne peuvent plus attendre d'avoir cette arme à disposition. Vous seriez étonnés de voir combien il augmente la mobilité, la puissance de tir et, surtout, la capacité d'observation. Il a probablement le meilleur équipement électronique que l'on puisse avoir actuellement dans un véhicule de reconnaissance.
M. Ivan Grose: Merci, général. Vous avez très bien répondu à mes questions.
Le président: M. Kasurak voudrait dire quelque chose à ce propos.
M. Peter Kasurak: J'aimerais rappeler au comité les déclarations que nous avaient faites les porte-parole du ministère dans le cadre de la vérification.
Mon but n'est pas de contredire ce que viennent de nous dire les gens du ministère. J'aimerais cependant rappeler au comité que dans notre rapport, lorsque nous parlons des systèmes d'armement achetés, les gens du ministère nous ont souvent dit que l'équipement n'était pas prévu pour des conflits d'intensité moyenne. Ils sont surtout utiles dans les conflits de faible à moyenne intensité, ce qui est assez vague.
Merci.
Le président: Il ne fait aucun doute que nos forces armées sont redoutables, fait que nous apprécions beaucoup en tant que Canadiens.
Au paragraphe 3.36 du rapport, à propos des forces aériennes, le vérificateur général déclare:
-
La force aérienne est aux prises avec un sérieux risque de
désuétude et d'affaiblissement de ses capacités dans un certain
nombre de secteurs clés, comme on le signale dans le budget des
dépenses 1997-1999 de la Défense nationale.
Encore une fois, le vérificateur général se base sur les publications du ministère lui-même.
Il ajoute «La politique de défense exige que la force aérienne possède des capacités clés dans sept domaines», qu'il précise.
Au paragraphe 3.37, il affirme «À l'heure actuelle, la force aérienne ne s'estime pas entièrement compétente dans tous ces domaines essentiels...». Général Baril, j'aimerais avoir votre avis sur la capacité de la force aérienne à s'acquitter de sa mission, telle que vous la concevez, car elle semble très loin d'être à la hauteur.
Gén J.M.G. Baril: J'ai tout à fait confiance en la capacité de la force aérienne à l'heure actuelle. Le rapport précise que ces avions, les F-18 et les Aurora étaient ce qui se faisait de mieux lorsque nous les avons achetés au début des années 80, tout équipés. Il s'agit d'équipement électronique, de technologie de pointe, et nos alliés en changent très rapidement.
• 1710
J'ai dit à des gens au sein de la force aérienne que nous
devons moderniser nos CF-18, car ils sont équipés d'un
Commodore 64. Il nous faut quelque chose de plus puissant, et en
fait ce n'est pas vraiment une exagération. Ce qui était à la fine
pointe de la technologie en 1985-1986 est rapidement dépassé, et je
suis inquiet de la situation des CF-18 et de l'Aurora. Nous devons
les moderniser pour qu'ils puissent continuer de combattre avec nos
alliés—je ne crois pas que nous allions nous battre seuls—et de
s'intégrer à la capacité de combat des autres forces aériennes du
monde.
Le président: Vous dites que la situation des CF-18 et de l'Aurora vous inquiète. Quand pensez-vous que nous devrions les remplacer? J'imagine que vous souhaitez...
Gén J.M.G. Baril: Nous n'envisageons même pas de remplacer les cellules. Nous voudrions remplacer les systèmes de bord, du système de navigation au radar, en passant par les systèmes de contrôle de tir.
Le président: Quand devrions-nous le faire?
Gén J.M.G. Baril: J'aimerais pouvoir le faire dès demain, mais notre force aérienne reste tout à fait capable, si nous la modernisons graduellement. Elle peut probablement se défendre pendant encore cinq ans. Il faudra progressivement moderniser certains systèmes.
Le président: Pourrez-vous le faire en cinq ans?
Gén J.M.G. Baril: Je ne sais pas, je ne suis pas expert en...
Le président: Cela dépendra du budget.
Gén J.M.G. Baril: C'est toujours une question d'argent. Et si nous achetions tout ce qui est disponible aujourd'hui, nous devrions probablement moderniser à nouveau dans cinq ans.
Le président: À propos des hélicoptères maintenant, le vérificateur général affirme au paragraphe 3.35:
-
L'hélicoptère utilitaire Griffon, acheté récemment pour la force
aérienne, est capable d'effectuer du transport de troupes ainsi que
des opérations limitées de reconnaissance. Il peut transporter
l'artillerie légère de l'armée, mais sur de courtes distances
seulement.
Je prends cela comme une critique, mais monsieur Judd, dans votre déclaration liminaire, vous avez dit que le Griffon est un bon hélicoptère pour la force aérienne. Il semble y avoir une différence de perception. J'aimerais que M. Judd et M. Kasurak nous expliquent en quelques mots cette apparente contradiction.
M. Jim Judd: Le Griffon est entré en service pour remplacer trois types d'hélicoptères qui avaient des utilités différentes. Je crois qu'on a décidé d'acheter le Griffon parce qu'il pouvait servir à plusieurs fonctions. Son achat était justifié aussi parce qu'avec un type de véhicule au lieu de trois, on réalise à terme des économies dans l'entretien, l'instruction et les différents postes opérationnels.
Je crois que le général vous a parlé tout à l'heure des capacités de cet hélicoptère, et M. Lagueux également. Nous estimons que, dans l'ensemble, l'hélicoptère est suffisamment polyvalent pour que son achat soit justifié.
Le président: Je demanderais maintenant à M. Kasurak de nous expliquer les critiques formulées dans le Rapport du vérificateur général.
M. Peter Kasurak: Oui. Lorsque nous avons examiné non seulement les spécifications d'origine, mais aussi les études qu'a réalisées par la suite le ministère quant à l'adaptation de l'aéronef, nous avons constaté qu'il n'était pas adapté à toutes les tâches prévues sur la liste.
Nous avons décrit les lacunes dans ce chapitre ainsi qu'au chapitre 4. En ce qui concerne la capacité de transporter le canon, il est vrai que l'hélicoptère répond aux spécifications du contrat, puisqu'il peut soulever 3 100 livres. Malheureusement, le canon pèse quelques centaines de livres de plus. Par conséquent, il ne peut être transporté que sur 25 kilomètres sans qu'il soit nécessaire de refaire le plein. Or, selon le cahier de charges, on avait fixé à 200 kilomètres la distance raisonnable pour ce type de capacité.
Voilà ce qui nous inquiète. Ce n'est pas que les conditions stipulées au contrat n'aient pas été respectées. Ce n'est pas le fait que, ne pouvant en acheter qu'un seul, on n'a pas choisi le plus polyvalent, mais plutôt le fait que des capacités essentielles ont été négligées. Et s'il est vrai que les forces étrangères peuvent facilement compléter certaines capacités, ce n'est pas toujours le cas. L'appui aérien rapproché est un élément organique des forces armées mécanisées qui nécessite énormément d'instruction. Il y a donc là une lacune. En outre, certains équipements complémentaires, ou certaines modernisations, si vous préférez, ont une véritable capacité militaire.
• 1715
Au moment où nous avons fait notre vérification, on nous a dit
que tous les projets n'avaient pas été approuvés ou financés, et
l'on ne savait donc pas exactement quand l'équipement arriverait.
Donc, la situation générale était telle que nous étions inquiets
quant à la stratégie qui consiste à acheter des équipements bas de
gamme, à peine capables de s'acquitter de certaines tâches
essentielles.
Le président: Merci.
Monsieur Philip Mayfield, s'il vous plaît.
M. Philip Mayfield: Merci, monsieur le président. Permettez-moi d'attirer votre attention sur le Rapport du vérificateur général, au paragraphe 3.76, où l'on peut lire:
-
L'établissement de priorités à l'échelle du ministère incombe au
Comité de gestion de la défense. Outre le fait que le ministère ait
déclaré dans son Livre blanc qu'il verra à prolonger la durée de
vie de l'équipement et à maintenir les «capacités essentielles»,
nous n'avons trouvé aucune preuve indiquant quels étaient ces
critères. Selon le vice-chef d'état-major de la défense, il s'agit
d'un processus de confrontation qui se termine par des directives
qui émanent de la haute direction et permettent d'établir un
équilibre entre les besoins et la capacité financière.
J'aimerais savoir ce que l'on entend par «confrontation»? Quand j'applique le mot à mes collègues et à moi-même... Je me demandais si cela signifie que des hauts fonctionnaires du ministère se mettent à crier et que celui qui crie le plus fort obtient ce qu'il veut. Cela ne nous donne-t-il pas l'idée que les priorités ne sont pas établies en fonction d'un plan, mais bien autrement?
Peut-être pourriez-vous m'expliquer comment sont prises les décisions en réalité.
M. Jim Judd: Très brièvement, monsieur, je suis heureux de pouvoir vous affirmer que nous n'avons pas eu de blessés jusqu'ici dans ces discussions.
Dans une certaine mesure, on peut parler effectivement de processus de confrontation en ce sens que les gens se disputent des ressources limitées, des sommes limitées, et tous ont de merveilleuses idées, à leurs yeux, sur la meilleure manière de dépenser cet argent.
Je ne sais pas si notre processus tend davantage à la confrontation que celui d'autres organisations publiques ou privées. Mais pour en revenir à ce que je disais tout à l'heure, moi qui suis nouveau au ministère, j'ai l'impression que nous devrions réexaminer notre méthode, et chercher à établir nos priorités différemment, plus globalement. Je ne sais pas, toutefois, si cela diminuerait la confrontation.
Le président: M. Rattray souhaite rajouter quelque chose.
M. Philip Mayfield: Oui. Je voulais simplement demander... Vous deviez bien avoir quelque chose de précis en tête lorsque vous avez rédigé ce paragraphe et je...
M. David Rattray: Monsieur le président, j'aimerais étoffer un peu cette observation. Ce que nous avons essayé d'exprimer, c'est qu'avec des objectifs, des scénarios, des données sur le rendement, un système d'informations financières qui vous donne suffisamment de données et des objectifs plus clairs, des attentes mieux définies quant aux coûts et aux résultats, on peut mieux répartir les ressources qu'on ne peut le faire actuellement. En effet, le système actuel doit se fier au jugement individuel ou à une confrontation des intérêts.
• 1720
J'aimerais revenir à ce que disait M. Pagtakhan tout à l'heure
lorsqu'il m'a demandé «Si j'avais un milliard...». J'aimerais
pouvoir vous dire qu'avec un milliard de dollars, de bonnes
informations sur le rendement, de bons scénarios, et un bon calcul
des coûts, on pourrait se doter d'une meilleure capacité. Je crois
que c'est ce que souhaiterait le ministère.
Et c'est ce que nous essayons de montrer ici. Au lieu de prendre un milliard de dollars et de le répartir également entre tous, comme cela arrive parfois, on peut se demander: Où la capacité est-elle la plus faible? Où la faiblesse est-elle la plus criante? Où peut-on obtenir la plus forte amélioration des résultats avec l'argent disponible? C'est ainsi qu'il faudrait régler le problème des acquisitions.
M. Philip Mayfield: Peut-être pourrions-nous y revenir un peu plus tard, mais...
Le président: Vous n'aurez peut-être pas d'autre tour. Je vais donc vous accorder la question dès maintenant.
M. Philip Mayfield: Très bien.
Le président a mentionné que l'infanterie et les blindés pourraient être détectés, engagés et défaits avant même qu'on ait conscience d'une présence ennemie. J'en ai été choqué, surtout à la lumière de ce que nous a déclaré le sous-ministre, qui nous affirmait que nous sommes en assez bonne posture du point de vue de l'équipement et de la modernisation. Ce type d'affirmation m'inquiète.
M. Grose a dit «J'aimerais faire tout mon possible pour que vous puissiez faire au mieux votre travail, mais pour cela il faut que je sois au courant de ce qui se passe.» J'aimerais vous encourager en ce sens et je vous demanderais, très brièvement, de nous donner votre point de vue sur l'information que vous devez donner au Parlement. Il me semble qu'il y a là une lacune que je souhaite vivement voir comblée.
Le président: Voulez-vous une réponse de M. Judd ou du général Baril?
M. Philip Mayfield: Je souhaiterais que M. Judd me réponde.
M. Jim Judd: Nous nous efforçons d'améliorer la manière par laquelle nous transmettons l'information au Parlement et aux contribuables canadiens. Avons-nous atteint un niveau satisfaisant? Probablement pas, mais nous essayons de faire mieux.
Quant aux éléments précis de votre question en ce qui concerne la capacité de l'infanterie, je ne m'aventurerais pas à y répondre, car j'ai un officier d'infanterie juste à côté de moi, et je ne me permettrai pas de m'avancer sur son territoire. Il vaut mieux que je lui cède la parole.
Gén J.M.G. Baril: Je voudrais dire deux choses sur l'aspect technique. Tout dépend qui nous cherche, qui peut nous détecter et qui peut nous engager. Je peux vous assurer qu'en Bosnie personne n'est en mesure de nous détecter ou de nous engager avant que nous ne puissions le faire, sauf nos alliés.
Pour ce qui est des rapports au gouvernement, pour la première fois cette année, je crois, le chef d'état-major de la défense présentera un rapport annuel au ministre et il sera remis au gouvernement du Canada également.
Le président: Merci beaucoup.
M. Philip Mayfield: Bon, merci.
Le président: M. Pagtakhan, je ne suis pas sûr de pouvoir vous donner quatre minutes, mais...
M. Rey Pagtakhan: Non, pas quatre minutes.
Je suis heureux que vous puissiez nous rassurer. J'aimerais juste revenir brièvement sur une chose. Vous avez dit que dans l'une des premières phases de l'étude et de la vérification, on vous a indiqué ce que l'on attendait d'un équipement donné, et que l'on a fini par acheter un équipement qui, comme dans l'exemple qu'a mentionné le président, n'avait qu'une portée limitée. Vous avez donc exprimé des inquiétudes naturelles et légitimes. Encore une fois, j'aimerais savoir ce que vous répondez à cela? Comment cela s'est-il produit? La capacité est-elle vraiment mise en péril?
Monsieur Judd ou général Baril.
M. Jim Judd: Brièvement, monsieur, j'espère et j'ose croire que nous ne ferons jamais rien qui puisse augmenter le risque de nos effectifs, que ce soit par l'équipement ou par l'instruction que nous leur donnons, qu'il s'agisse d'une opération nationale ou internationale. Je ne sais pas si...
Gén J.M.G. Baril: Si la survie de la nation est en jeu, nous irons au combat tels que nous sommes maintenant. Mais si on nous demande de fournir des troupes pour défendre les intérêts du Canada, nous ferons savoir aux autorités ce que nous pouvons contribuer dans l'immédiat avec un niveau de risque acceptable. Si les dirigeants du pays souhaitent exposer nos soldats à des risques supplémentaires, ils le feront. Mais nous leur donnerons l'information.
Par exemple, quand le gouvernement du Canada a décidé de participer à la mission en Centrafrique, j'ai présenté une recommandation au gouvernement, mais pas avant d'avoir demandé à mon équipe de me dire quel était le niveau de risque et quel genre de capacité je pouvais recommander au gouvernement de déployer. Je n'ai présenté ma recommandation qu'après avoir eu une équipe en place pendant 48 heures pour évaluer le risque.
Le président: Merci, monsieur Pagtakhan.
Monsieur Grose, je crois que vous vouliez dire quelques mots de conclusion.
M. Ivan Grose: Oui. Merci, monsieur le président.
Je dois dire que je suis un peu plus rassuré aujourd'hui que je ne l'étais auparavant. Mais j'ai entendu qu'il y aura beaucoup de travail à faire. Ce qui me fascine probablement le plus, c'est la modernisation des systèmes électroniques de bord des CF-18.
J'aimerais que vous reveniez dans six mois nous dire ce que vous aurez accompli d'ici là. J'espère que vous aurez deux heures à nous consacrer à ce moment-là pour faire le point. J'espère que la situation se sera améliorée, mais si ce n'est pas le cas, vous nous expliquerez la raison.
Et si, pour dire les choses crûment, c'est strictement une question d'argent, c'est notre problème, et nous y verrons. Mais j'apprécierais beaucoup que vous veniez nous faire un rapport dans six mois pour que nous sachions exactement ce qui s'est produit dans l'intervalle. Si vous modernisez les chars, les avions, etc...
Le président: J'espère que nous pourrons inclure cela dans le rapport. Vous serez donc prévenus et armés, si vous me permettez l'expression, et vous saurez à quoi vous attendre.
Monsieur Rattray, avez-vous une conclusion?
M. David Rattray: Très brièvement, monsieur le président, j'aimerais simplement conclure sur ce que disait M. Grose, c'est-à-dire que les comités ont un rôle à jouer. Qu'il s'agisse de ce comité ou du Comité de la défense nationale et des anciens combattants, ou des recommandations issues du Comité mixte de la défense, qui a parlé de système de contrôle et de participation active.
Deuxièmement, nous sommes encouragés d'entendre le ministère dire qu'il continue de travailler à améliorer la communication au Parlement des informations sur le rendement afin que nous puissions avoir des discussions éclairées comme celles-ci, plus fréquemment encore à l'avenir. Nous continuerons donc de surveiller les progrès et j'espère que le Parlement pourra jouer un rôle plus actif, comme il l'a fait aujourd'hui, pour voir comment est dépensé l'argent dans l'acquisition de la capacité de défense, et déterminer quel genre de capacité le Canada peut offrir à ses alliés.
Le président: Merci, monsieur Rattray.
J'ai oublié de vous poser une question que je pose pourtant à chaque témoin. L'an 2000 approche. Nous y serons dans 19 mois. Général Baril, votre ministère et votre équipement sont extrêmement tributaires de l'électronique. Serez-vous prêts?
M. Jim Judd: Nous avons mis en place un programme qui, nous l'espérons, devrait assurer le maintien en fonction des systèmes essentiels aux missions, d'abord. Pour revenir à un point qu'a soulevé le vérificateur général, nous le faisons en fonction des divers scénarios que nous préparons. Nous procédons donc de manière séquentielle.
Le président: Serez-vous prêts?
M. Jim Judd: Je pourrai mieux vous répondre dans six mois. Pour le moment, je peux vous dire que nous avons bon espoir.
Le président: Que voulez-vous dire?
M. Jim Judd: Nous espérons certainement être prêts.
Le président: Bon.
Général Baril, partagez-vous ce point de vue?
Gén J.M.G. Baril: Oui.
Le président: Bon. Nous aurons donc une réponse plus précise dans six mois.
Messieurs...
M. Philip Mayfield: Monsieur le président, puis-je également poser une petite question?
Le président: Oui, très brièvement.
M. Philip Mayfield: Je serai très bref.
Nous avons parlé du Livre blanc de 1994. À votre avis, serait-il utile de le réviser ou d'en produire un nouveau? Soyez brefs, car nous arrivons à la fin de la journée, et je ne veux pas engager une nouvelle discussion.
Le président: Heureux de vous l'entendre dire.
Tout d'abord, le Livre blanc de 1994 est-il encore valable, ou faudrait-il le réviser?
M. Jim Judd: Je crois que les principes généraux, y compris l'évaluation de la situation internationale, sont encore valables dans l'ensemble. En 1994, nous étions déjà dans la période après la guerre froide. Les menaces et les éventualités avaient déjà changé.
• 1730
L'environnement est essentiellement le même actuellement, et
une bonne partie des mesures budgétaires qui ont été prises dans
les années suivantes étaient, sauf erreur, déjà prévues dans le
livre blanc à l'époque.
Le président: Merci.
Général Baril, voulez-vous ajouter quelque chose? Non?
Mardi prochain nous examinerons le chapitre 4. Nous nous retrouvons à la même heure, au même endroit, avec les mêmes participants. Nous vous retrouverons tous avec plaisir.
La séance est levée.