SINT Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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SUB-COMMITTEE ON INTERNATIONAL TRADE, TRADE DISPUTES AND INVESTMENT OF THE STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE
SOUS-COMITÉ DU COMMERCE, DES DIFFÉRENDS COMMERCIAUX ET DES INVESTISSEMENTS INTERNATIONAUX DU COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 21 avril 1998
[Traduction]
Le président (M. Bob Speller (Haldimand—Norfolk—Brant, Lib.)): Je souhaite la bienvenue à mes collègues qui reviennent de deux semaines de congé à l'occasion de Pâques et je souhaite la bienvenue à M. Jonathan Fried, sous-ministre adjoint de la politique commerciale et économique au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international.
Sachez, Jonathan, que pendant le week-end j'ai participé à une réunion avec des fonctionnaires du Commerce international qui ont fait votre éloge et qui ne savaient même pas que vous alliez comparaître ici aujourd'hui. C'est sorti dans le courant de la conversation; ils ont dit que votre nomination avait été un coup de maître et que vous étiez d'un grand secours pour les organisations non gouvernementales et les gens d'affaires.
Notre mandat, chers collègues, est d'examiner l'Organisation mondiale du commerce. Comme nous le savons tous, l'année 1999 approche à grands pas. Dans ma circonscription, comme dans celle de beaucoup d'autres membres, j'en suis sûr, en particulier dans les régions rurales, je reçois un grand nombre de coups de téléphone de groupes intéressés, comme les groupements de producteurs spécialisés ou de produits soumis à la gestion des approvisionnements, qui se préparent au prochain cycle de négociation de l'OMC.
En vue de notre étude, j'ai pensé que nous pourrions commencer par une séance d'information des gens du ministère, ceux qui vont établir la position du Canada. Cela nous donnera l'occasion au cours des prochaines semaines et des prochains mois de nous mettre au courant grâce aux consultations avec divers groupes agricoles intéressés et avec le secteur tertiaire pour savoir ce qu'ils pensent de la position du Canada.
Si vous vous souvenez du dernier cycle des négociations à l'OMC, le gouvernement s'est engagé à négocier, mais a aussi dit qu'il y aurait sur place des représentants de divers groupes touchés par les négociations. Et, effectivement, beaucoup d'entre eux étaient à Genève pour donner des renseignements à jour.
Notre objectif sera d'obtenir le plus vaste éventail possible de renseignements, non seulement des dirigeants des groupements de producteurs spécialisés et des leaders des divers secteurs, mais aussi de simples citoyens que le dossier intéresse.
Au fil des années, tous en conviendront, je crois, le commerce extérieur et les investissements—nous venons d'achever une étude sur l'AMI—sont devenus des dossiers de plus en plus publics. Auparavant, seuls s'en occupaient quelques avocats spécialisés en droit commercial et une poignée de fonctionnaires, mais aujourd'hui le débat est sur la place publique. Dans les mois qui viennent, notre objectif sera d'obtenir l'avis de citoyens et de le transmettre à des gens comme vous, Jonathan, pour vous aider à mieux comprendre l'effet de ce que vous faites sur les citoyens et ce qu'ils pensent des négociations.
• 1535
Je vous remercie d'être venu aujourd'hui. Je crois savoir que
vous vouliez nous faire un exposé de quelques minutes. Nous
passerons ensuite aux questions et observations des membres du
comité.
M. Jonathan Fried (sous-ministre adjoint, Politique commerciale et économique, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Merci, monsieur le président, et en particulier pour vos mots aimables du début. Vous avez placé encore plus haut la barre que je dois atteindre si je veux être à la hauteur de vos attentes.
J'ai pu discuter de ma comparution ici aujourd'hui avec le ministre Marchi. Il s'en réjouit et appuie tout à fait ma participation, dès le début, à votre examen du prochain plan d'action commercial. Sous sa direction et avec votre bénédiction, monsieur le président, j'aimerais que l'on considère la rencontre d'aujourd'hui comme une séance d'orientation de part et d'autre. Je suis ici pour vous aider à faire le point sur le prochain plan d'action commercial.
En contrepartie, vous pourrez nous aider, au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, à mieux nous orienter en fonction de vos sujets de préoccupation et de vos intérêts particuliers. J'espère sincèrement que cette comparution ouvrira un dialogue permanent entre nous. Le ministre, moi-même et mes collaborateurs accordons du prix à vos avis et à l'occasion qui nous est donnée d'avoir un échange de vues permanent avec vous et les membres du comité.
Je vous suis donc très reconnaissant de l'occasion qui m'est donnée, au nom du ministre Marchi, de vous présenter ce tour d'horizon.
Je voudrais aussi vous présenter mes deux collègues, qui sont ici pour m'aider à répondre aux questions plus précises que vous pourrez nous poser.
M. Claude Carrière est le directeur des droits de douane et de l'accès aux marchés. Il a joué un rôle de premier plan dans les préparatifs aux négociations de la zone de libre-échange des Amériques. Il est le négociateur en chef du Canada dans le dossier de l'adhésion de Taïwan à l'OMC et porte aussi plusieurs autres casquettes.
M. Philip Stone, que le ministère a réussi à arracher à Agriculture Canada il y a quelques années, est le coordonnateur à la Direction de la planification commerciale, et c'est sur lui que nous compterons tous pour avoir bien à l'esprit une vue d'ensemble de tous les dossiers, qu'il s'agisse de l'OCDE, de la réunion des ministres du Commerce de la Quadrilatérale ou du plan d'action de l'OMC.
Devrait se joindre à nous dans un instant M. John Gero, directeur général, politique commerciale - services, investissement et propriété intellectuelle et information et technologie. Il est actuellement en compagnie du ministre Marchi, et je m'excuse à l'avance de son retard.
Avec votre permission, monsieur le président, j'aimerais vous résumer l'état de la situation sur chaque continent avant d'aborder à proprement dit la question de l'Organisation mondiale du commerce.
Ma toile de fond sera l'environnement économique mondial en général. Si l'on considère la situation dans le monde, on constate des efforts de plus en plus vigoureux en faveur d'une plus grande libéralisation des échanges dans le monde, sur le plan régional et multilatéral, et aussi bien dans l'hémisphère sud que dans l'hémisphère Nord.
L'Europe, par exemple, comme certains membres du comité le savent pour s'y être rendus dernièrement, poursuit sa marche vers un marché unique amélioré, et même une monnaie commune. L'Union européenne envisage de prendre de l'expansion vers l'Est et vers le Sud. Dans notre hémisphère, au niveau sous-régional, nous savons que les pays du cône sud cherchent à consolider l'union douanière du MERCOSUR. Les pays d'Amérique centrale accélèrent leurs travaux en vue de réaliser l'union douanière. Le pacte andin et le marché commun des Caraïbes sont en cours de révision, et même en Asie, malgré la crise financière actuelle, les pays de l'Asie du Sud-Est se sont à nouveau dit désireux d'ouvrir le commerce et les investissements.
Dans ce contexte, la politique commerciale canadienne, je crois, manifeste certaines constantes, que le ministre Marchi a confirmées à plusieurs reprises. Notre mission à nous, qui le représentons, est assez simple. Elle est de favoriser les exportations canadiennes, de favoriser les investissements et d'ouvrir l'accès que nous avons à tous les marchés du monde.
• 1540
Nous vous avons fait parvenir à vous—et le ministre Marchi
vous a peut-être fait parvenir à vous ou au moins à votre bureau,
plus tôt—un exemplaire d'une publication intitulée Ouvrir des
portes sur le monde: priorités du Canada en matière d'accès aux
marchés internationaux 1998. Ce document illustre les efforts
concentrés que nous déployons en permanence pour ouvrir des portes,
comme le dit le titre, pour les entreprises canadiennes à
l'étranger, mais aussi pour mettre en relief les problèmes que nous
rencontrons sur de nombreux marchés étrangers, ce qui constitue en
quelque sorte le plan des choses qui restent à faire.
C'est la deuxième fois que nous publions une liste mondiale de nos priorités. C'est aussi une sorte de point de repère pour le gouvernement pour mesurer dans quelle mesure il a atteint ses objectifs annuels. Le document de cette année comprend une évaluation de la mesure dans laquelle nous avons réussi au cours des 12 derniers mois à vaincre les obstacles que nous avions recensés l'an dernier. Le rapport jouit d'une grande diffusion. On peut le trouver au site Web du gouvernement et du ministère. Il reflète bien les avis que nous avons reçus des entreprises canadiennes intéressées et de la société civile en général concernant les marchés étrangers.
Si nous arrivons effectivement à ouvrir des portes—et je crois que l'évaluation que l'on trouve dans le document est positive—l'autre volet du ministère, les Affaires étrangères, a pour mission de faire franchir le seuil aux entreprises par ses activités de promotion des exportations et des affaires. Vous êtes au courant du succès remporté par les missions d'Équipe Canada—et certains d'entre vous y ont participé—et c'est une formule que nous avons tout à fait l'intention de conserver.
Mais je passe maintenant à la politique commerciale et au programme des négociations commerciales. Je sais bien que vous vous intéressez plus particulièrement aux négociations difficiles qui auront lieu à la fin de 1999, mais d'ici là nous avons un programme complet de négociations dont vous pourriez peut-être discuter en attendant au fur et à mesure de vos délibérations.
Vous aurez lu dans les journaux que le Sommet des Amériques à Santiago, qui vient de prendre fin, a amorcé le processus de négociation pour un libre-échange dans les Amériques. Ce n'est pas tout; les 33 autres pays qui ont participé à ce sommet ont donné un vote de confiance au Canada en choisissant le président du processus de négociation du libre-échange dans les Amériques pour les 18 prochains mois et en choisissant le Canada comme pays d'accueil pour la réunion des ministres du Commerce de l'hémisphère qui aura lieu en 1999.
Les ministres du Commerce des pays de l'APEC qui se sont rencontrés à Montréal en juin dernier et à Vancouver en novembre dernier se rencontreront encore une fois en juin en Malaisie—la Malaisie préside cette année le processus de l'APEC. Le programme de la réunion reprend ce qui a été commencé à Vancouver, c'est-à-dire un exercice destiné à voir s'il est possible de profiter de ce qu'on appelle une libéralisation sectorielle anticipée volontaire, la réduction et l'élimination des barrières tarifaires dans certains secteurs clés, y compris certains secteurs qui intéressent particulièrement les exportateurs canadiens, comme celui du poisson et des produits du poisson, le secteur forestier, y compris les pâtes et papiers, etc.
Les journaux ont également annoncé ou confirmé aujourd'hui que le Canada avait amorcé des discussions sur des ententes de libre-échange possibles avec les pays de la ZELE, la Zone européenne de libre-échange, c'est-à-dire la Norvège, la Suisse, l'Islande et le Liechtenstein. Cela pourrait donner au Canada un accès à des marchés assez riches.
En mai, le premier ministre doit rencontrer le premier ministre Blair du Royaume-Uni en sa qualité de président de la Communauté européenne. Il y aura également le commissaire en chef Santer, et ils se pencheront, entre autres choses, sur les questions de commerce bilatéral et sur l'élaboration d'un plan d'action pour favoriser le commerce entre le Canada et l'Union européenne.
Pour boucler la boucle, nous assisterons à Genève à une réunion ministérielle de l'OMC immédiatement après le sommet de Birmingham, du 18 au 20 mai. C'est la deuxième réunion ministérielle régulière dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce, la première ayant eu lieu à Singapour en décembre 1996. Certains d'entre vous ont dû avoir le plaisir d'y participer.
• 1545
Lors de cette réunion, les participants pourront faire le
point, voir où nous en sommes pour ce qui est du programme intégré
élaboré en prévision des nouvelles négociations dont vous avez
parlé, monsieur le président.
Évidemment, sous-jacente à toutes ces discussions, il y a toujours une constante dans nos relations commerciales, c'est-à-dire nos relations avec les États-Unis, qui représentent 82 p. 100 de notre commerce extérieur, c'est-à-dire le tiers de notre produit intérieur brut. Évidemment, nous suivons ces relations bilatérales de façon quotidienne, mais j'ajoute que dans le cadre de l'ALENA les ministres du Commerce des trois pays, le Canada, les États-Unis et le Mexique, doivent se rencontrer à la fin du mois pour passer en revue les récents développements dans le cadre de l'ALENA.
À part cela, monsieur le président, j'ajoute que les différends auxquels nous nous heurtons parfois nous tiennent passablement occupés. Le bois d'oeuvre est un dossier dont on parle périodiquement; le Canada a pris l'offensive et décidé d'ouvrir de nouveaux marchés. Par exemple, nous avons contesté les restrictions à l'importation de saumon canadien imposées par l'Australie.
Parfois nous sommes également sur la défensive. Les États-Unis et la Nouvelle-Zélande, par exemple, ont contesté un des aspects de notre système de mise en marché des produits laitiers: la mise en commun des prix et les catégories spéciales de lait pour les exportations.
Voilà donc un programme chargé d'activités bilatérales, régionales et multilatérales. Certains vous diront que nous touchons à tout et qu'il n'est pas logique de nous disperser autant. J'aimerais vous expliquer ma position et celle de notre ministère: dans toutes ces activités, il y a des principes qui sont très constants.
Premièrement—et nous pensons qu'il ne faut surtout pas oublier cela—les ententes commerciales individuellement ne sont pas une fin en soi. Nous ne les signons pas pour le simple plaisir d'avoir quelque chose à annoncer. Ces ententes sont des outils, des instruments et des vecteurs qui nous permettent de défendre les intérêts économiques et commerciaux des Canadiens. Après tout, en favorisant la santé économique de nos compagnies et en augmentant nos ventes à l'étranger nous favorisons la croissance économique et nous créons des emplois ici même. Évidemment, en ouvrant notre propre marché, nous attirons des investissements et nous favorisons les efficiences à cause des échanges technologiques et de la concurrence accrue et des importations qui stimulent notre économie.
Deuxièmement, quand nous réussissons à signer des accords avec diverses régions du monde, c'est que nous avons d'abord réussi à mettre en place un système de règles. On peut dire qu'en tant que puissance moyenne le Canada profite toujours beaucoup plus d'un système fondé sur des règles que d'un système qui dépend des leviers économiques.
Troisièmement, dans la mesure où nous pouvons créer un cadre cohérent fondé sur des règles, les compagnies canadiennes et les investisseurs à l'étranger peuvent pénétrer librement sur les marchés étrangers de biens, de services et d'investissements. En nous taillant une place dans ce système, nous attirons les investisseurs étrangers.
Quatrièmement, si l'on compare les efforts régionaux et les efforts internationaux (OMC) nous sommes fermement convaincus que nos initiatives régionales complètent parfaitement nos efforts sur le plan multilatéral. Cela est dû à un certain nombre de raisons. Presque toutes nos ententes régionales respectent des règles multilatérales fondamentales auxquelles nous tenons beaucoup: non-discrimination et traitement national. Comme on le voit dans les accords que nous avons signés avec les États-Unis, puis le Mexique, le Chili et Israël, nous atteignons des résultats plus rapidement en signant des accords régionaux qu'en signant des accords multilatéraux.
Par conséquent, les initiatives régionales fournissent souvent un encouragement à l'action multilatérale. Par exemple, nous avons apporté des innovations importantes en améliorant le système de règlement des différends dans le cadre de l'ALENA. Cet accord a été publié en 1992 et est entré en vigueur en 1994. Un grand nombre de ces améliorations—délais, dates limites automatiques, etc.—ont été empruntées par le reste du monde et figurent aujourd'hui dans les dispositions de l'OMC. C'est devenu universel. Par conséquent, en commençant au niveau régional, nous pouvons souvent ouvrir la voie pour le multilatéral.
• 1550
Évidemment, nous sommes conscients de la nécessité d'aligner
nos initiatives régionales et celles des autres pays sur les
réalités multilatérales. C'est une des raisons pour lesquelles le
Canada a participé à la création d'un nouveau comité de l'OMC, le
Comité des ententes commerciales régionales, qui suit de près les
centaines d'ententes régionales qui sont conclues un peu partout
dans le monde pour s'assurer qu'elles ne portent pas atteinte au
système international. C'est un comité dans lequel nous sommes très
actifs.
Maintenant, monsieur le président, après cette vue d'ensemble de la situation, on peut parfaitement dire qu'en dépit de toutes ces activités connexes le principal outil des Canadiens qui veulent ouvrir de nouveaux marchés dans le reste du monde est l'Organisation mondiale du commerce.
Évidemment, nous sommes passés au travers de l'Uruguay Round, qui a été long et exhaustif. La presse populaire a tendance à penser que l'OMC fonctionne par cycles: nous avons terminé l'Uruguay Round en 1994, il ne se passe plus rien, il faut maintenant attendre les nouvelles négociations en 1999 ou en l'an 2000.
En fait, c'est tout à fait le contraire. L'OMC, ce n'est pas seulement une série de négociations; c'est également une série d'ententes avec un processus de contrôle et de surveillance permanent. Nous restons donc vigilants, nous veillons à ce que les autres pays du monde appliquent pleinement les dispositions de l'OMC et respectent leurs obligations, et, si nécessaire, nous faisons appel au processus de règlement des différends.
Comme je l'ai dit au sujet des activités de M. Carrière, nous voulons également élargir l'influence de l'OMC en rendant cet organisme plus universel. Nous considérons que l'entrée de partenaires commerciaux particulièrement importants comme la Chine, la Russie, l'Ukraine, le Vietnam, l'Arabie saoudite et quelque 20 autres pays qui sont candidats, est d'une importance toute particulière.
Monsieur le président, comme vous l'avez observé, après l'Uruguay Round, et aux termes de ce programme intégré, les membres de l'OMC se sont déjà engagés à reprendre les négociations à la fin de 1999 et à discuter de l'agriculture et des services.
Il a été question non seulement dans la presse, mais aussi dans les discussions des ministres du Commerce du monde—et Sir Leon Brittan, de la Communauté européenne, l'a même dit publiquement—que d'autres questions feraient l'objet de discussions dans le cadre de ces négociations.
Sir Leon Brittan a réclamé ce qu'il appelle des négociations commerciales d'envergure en prévision du nouveau millénaire.
D'après les déclarations récentes faites par les représentants des États-Unis, il semblerait que les États-Unis préféreraient des négociations sectorielles: ils partent du principe que si une question intéresse suffisamment de pays, il devrait être possible de faire en sorte que les négociations ne durent pas sept ans.
Le ministre Marchi pense qu'on pourrait peut-être en arriver à un compromis et ouvrir des négociations sur une poignée de questions. Si une ronde de négociations du millénaire risque d'être trop longue et trop difficile et si les Américains veulent s'en tenir aux questions sectorielles qui les intéressent directement, il serait peut-être possible de regrouper certaines questions pour que la tâche ne semble pas démesurée et dans l'espoir que les négociations ne soient pas interminables.
En résumé, on commence à peine à discuter de cette possibilité. On décidera au cours des 12 prochains mois des questions qui pourraient être ajoutées à la liste des questions liées à l'agriculture et aux services qui font l'objet de négociations. Les ministres discuteront à fond du sujet lors de la prochaine réunion ministérielle de l'OMC prévue en mai. Ils chargeront alors sans doute le conseil général de l'OMC, soit l'assemblée permanente qui représente les ministres, d'étudier la question pendant le reste de 1998 et en 1999 et de leur soumettre, lors de leur prochaine réunion, qui aura sans doute lieu à la fin de 1999, une liste des questions qui pourraient être abordées dans le cadre des négociations sur l'agriculture et les services.
• 1555
Les ministres se penchent sur quatre principales questions.
Premièrement, il est question de réduire davantage les obstacles traditionnels au commerce, comme les tarifs, les contingents et les restrictions à l'importation, ainsi que les mesures à la frontière qui rendent le commerce plus difficile au lieu de le faciliter. C'est une question classique.
Deuxièmement, à mesure que les obstacles tarifaires diminuent, le Canada et d'autres membres de l'OMC ainsi que les milieux d'affaires se préoccupent de plus en plus de l'incidence de ce qu'on appelle les obstacles non tarifaires, comme les exigences en matière d'étiquetage, les normes techniques et les mesures sanitaires et phytosanitaires, soit toutes les mesures prises soi-disant pour des raisons légitimes qui peuvent en fait constituer des obstacles cachés au commerce.
Troisièmement, comme vous l'avez mentionné, monsieur le président, l'OMC comprend maintenant, outre le GATT, l'Accord général sur le commerce des services, ou l'AGCS, et l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, ou l'ADPIC. Comme vous l'avez également souligné, les membres de l'OMC se sont déjà engagés à élargir l'AGCS dans le cadre des négociations qui débuteront en l'an 2000. L'accord sur l'agriculture prévoit également de nouvelles négociations sur des questions agricoles au début du siècle.
Quatrièmement, à Singapour, les ministres ont ajouté certaines questions à la liste des questions à l'étude dans le domaine du commerce et de la concurrence, du commerce et des investissements et de la transparence dans les marchés publics, ce qui revient à ajouter certains éléments à l'accord sur les services, des éléments touchant la réglementation économique interne dans le domaine des investissements, de la concurrence et des marchés publics.
Pour résumer les questions sur lesquelles les ministres vont se pencher et sur lesquelles le comité se penchera aussi sans doute, je pense qu'on peut dire qu'on s'intéresse moins aux obstacles frontaliers et plus aux obstacles internes parce qu'au lieu de se pencher maintenant seulement sur la question des tarifs et des obstacles commerciaux à la frontière, nous nous penchons maintenant aussi sur les normes, les procédures d'octroi des permis et d'approbation des produits, l'étiquetage, l'homologation des produits et l'accréditation professionnelle. En fait, on s'intéresse de façon plus globale à la réglementation commerciale.
À cela s'ajoutent les efforts que nous déployons au sein du Fonds monétaire international pour contrer les effets de la crise financière en Asie. Les membres du FMI s'entendent dans l'ensemble pour dire que le problème qui s'est posé n'est pas attribuable à la libre circulation des capitaux. Ils soutiennent plutôt qu'on peut l'attribuer à l'absence d'un cadre de surveillance ou d'une réglementation adéquate. Dans certains pays, le problème a été exacerbé par l'existence de procédures loin d'être transparentes qui régissent l'approbation des ententes commerciales ou des ventes de produits.
Compte tenu de l'importance attachée aux obstacles non tarifaires, aux services, à la concurrence et aux investissements ainsi qu'au cadre réglementaire et à la transparence, on peut en déduire que les négociations commerciales futures porteront autant sur le renforcement que sur l'ouverture des marchés. Les questions de l'heure seront la réforme de la réglementation, l'honnêteté des gouvernements et la création d'une structure de surveillance stable, prévisible et transparente qui crée un milieu répondant aux besoins des commerçants et des investisseurs, mais aussi des consommateurs.
Autrement dit, il n'est pas question d'éliminer la réglementation. En fait, il est plutôt question de renforcer la réglementation et le rôle des gouvernements.
• 1600
Comment se prépare-t-on, au moins au sein du gouvernement,
pour ces nouvelles négociations, qui porteront notamment sur les
services agricoles?
Nous devons évidemment participer au maximum aux travaux des divers comités préparatoires. Il vaut mieux que le Canada participe à l'établissement de l'ordre du jour de ces discussions pour qu'il reflète ses intérêts au lieu de s'en remettre à cet égard à d'autres pays.
Il en découle qu'il faut d'abord voir si un consensus se dégage sur les intérêts canadiens. Étant donné la portée de l'ordre du jour que je vous ai décrit, il incombe certainement au ministère de collaborer avec les autres ministères afin d'établir l'ensemble des conséquences de ces négociations pour la réglementation interne.
Certaines des questions qui seront abordées appartiennent à des domaines de compétence provinciale exclusive. Comme en témoigne le fait que le ministre Marchi a reçu en février ses homologues provinciaux, nous devons redoubler nos efforts afin de collaborer avec nos collègues provinciaux afin d'établir la liste des questions qui revêtent un intérêt national.
Comme les débats récents sur l'Accord multilatéral sur l'investissement et la sécurité des aliments l'ont démontré, certains intervenants commencent à se demander si le gouvernement sait exactement où il va.
Pour certains, l'objet des négociations devrait être d'ouvrir les marchés. Les groupes qui représentent les consommateurs et certains groupes du domaine de la santé se demandent cependant si on ne va pas trop loin dans ce domaine et si on n'oublie pas l'importance de l'innocuité des aliments.
Si j'ai bien compris ce que j'ai lu, les politicologues nous diraient qu'un «déficit démocratique» sous-tend ces préoccupations. Autrement dit, qui doit rendre des comptes à l'égard des décisions qui sont prises touchant la réglementation dans tous les domaines qui intéressent les citoyens?
Lorsqu'il est question de souveraineté et d'imputabilité, c'est surtout parce qu'on se préoccupe de la transparence du processus décisionnel.
Comme j'ai tâché de le souligner dans ma déclaration liminaire, monsieur le président, les discussions commerciales porteront surtout sur la transparence, la démocratisation des gouvernements et l'adoption d'un processus d'imputabilité plus inclusif dans tous les pays membres de l'OMC. Outre qu'il compte collaborer avec les autres ministères et les provinces, le ministre Marchi collaborera certainement aussi avec le milieu des affaires ainsi qu'avec l'ensemble des citoyens pour faire mieux connaître les objectifs canadiens dans le domaine commercial.
Nous avons amélioré nos communications avec tous les Canadiens parce qu'à notre avis la libéralisation du commerce et des investissements repose sur les valeurs, les normes, la culture et la réglementation canadiennes. Il n'est pas du tout question de compromette la souveraineté du Canada. Au contraire, le fait de participer à ces discussions préparatoires nous permet de mieux protéger les valeurs, les programmes et les intérêts canadiens.
Nous avons donc un défi de taille à relever. Nous devons nous préparer en conséquence. Il est essentiel, pour nous préparer aux négociations commerciales tant régionales que multilatérales, que nous consultions le comité et que nous entamions avec lui un dialogue et que nous fassions la même chose avec l'ensemble des Canadiens.
Comme je l'ai dit au début, monsieur le président, nous nous réjouissons de collaborer de façon continue avec vous en vue de préparer ces discussions.
Ma déclaration liminaire a été un peu longue, mais comme il s'agit de la première réunion de ce qui sera sans doute une série de réunions portant sur les questions qui feront l'objet de négociations commerciales futures, j'ai voulu vous donner un aperçu assez complet des défis auxquels nous faisons face.
Comme je l'ai dit au début, nous sommes tous prêts à répondre à vos questions.
Le président: Merci, monsieur Fried. Votre exposé était très complet. Je suis certain que les députés auront tous des questions à vous poser.
Monsieur Penson.
M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Merci, monsieur le président.
Je vous souhaite la bienvenue, John, ainsi qu'à MM. Carrière et Stone. J'ai beaucoup apprécié votre tour d'horizon. Toutefois, il suscite certaines questions, comme le président l'a dit. Plus encore, vous avez identifié certaines mesures qui doivent être prises pour mieux appuyer ici au Canada les progrès futurs de notre programme de commerce.
Le commerce et les investissements ont été très avantageux pour le Canada, mais ce n'est pas un avis que partagent tous les Canadiens. C'est peut-être en partie parce qu'ils ne comprennent pas en quoi cela les touche.
Le président—Bob—et moi avons assisté récemment à une conférence en compagnie de représentants des Congrès américain et mexicain. Un représentant du Missouri y a déclaré qu'il avait discuté avec des travailleurs d'une usine de son État. Il leur avait demandé ce qu'ils pensaient de l'ALENA et de l'Accord de libre-échange. Les commentaires des travailleurs étaient très négatifs, ainsi que leur attitude. Pourtant, la plupart des marchandises produites dans cette même usine sont vendues au Canada et au Mexique.
À mon avis, il faut faire davantage. Notre ministère du Commerce devrait faire les recherches nécessaires pour nous aider à démontrer à tous les Canadiens que le libre-échange est très profitable.
Il faudrait à tout le moins faire une évaluation. J'estime pour ma part que le libre-échange est très profitable, et c'est ce que permettra de démontrer notre recherche. Si ce n'est pas profitable, nous devrions peut-être nous abstenir de participer à de tels accords.
Pour faire des progrès dans ce domaine, pas seulement au Canada, mais aussi aux États-Unis, il faudra pouvoir démontrer au public que ces accords de libre-échange sont à notre avantage. La surprise que nous a réservée l'AMI était un peu due à cela.
Les gens craignent la mondialisation. Comme vous l'avez dit, chaque fois que nous signons un accord international, il y a des gens pour croire qu'il s'agit d'une attaque à notre souveraineté. Mais si nous perdons un peu de notre souveraineté, la population en bénéficie en échange; pour la plupart des gens, c'est une bonne chose.
Il me semble donc que le gouvernement a un rôle à jouer, et qu'il peut évaluer les avantages de ces accords pour les consommateurs. Les entreprises peuvent peut-être faire leur propre évaluation des effets que ces accords ont eus pour elles. Mais pour pouvoir faire d'autres progrès, nous devrons d'abord obtenir l'appui du public. Je me demande ce que vous pensez d'une telle idée.
M. Jonathan Fried: Monsieur le président, permettez-moi de répondre au nom du ministre. Je ne saurais être en désaccord avec cette idée. Négocier la position du Canada à l'étranger, cela revient à défendre les intérêts des Canadiens. Dans une société démocratique comme la nôtre, il faut pour défendre les intérêts des Canadiens tenir compte de ce qui constitue un consensus national.
Si nous n'avons pas l'appui de notre population, notre position internationale s'en trouve affaiblie. C'est au gouvernement qu'il incombe d'informer la population et de favoriser un tel consensus. Nous essayons constamment de transmettre de l'information et de faire connaître les résultats de nos études et de nos évaluations portant sur les avantages de la libéralisation des échanges commerciaux et des investissements. Nous nous sommes engagés à faire davantage.
Comme je l'ai déjà dit, cette tâche n'incombe pas seulement au ministère du Commerce. Par exemple, l'agriculture touche d'autres ministères et d'autres ordres de gouvernement. Il nous incombe à tous de poursuivre nos efforts pour expliquer le lien direct qui existe entre les emplois et la croissance, d'une part, et la participation du Canada au bon fonctionnement du commerce et des investissements internationaux, d'autre part.
M. Charlie Penson: Il y a une autre question de ce premier tour de table pour laquelle je voudrais que vous m'aidiez... vous pourriez en fait m'aider pour toutes les questions. Je suis sûr que Sam voudra également s'en mêler.
Dans notre document, on dit qu'il faut ouvrir nos portes au monde. Il y a pourtant certains secteurs qui sont encore en butte à bien des obstacles. C'est le cas de l'agriculture, surtout en ce qui concerne les subventions européennes. Il n'y a foncièrement aucune subvention ni droit de douane au Canada à l'égard de nos secteurs des céréales, des graines oléagineuses et du bétail. Et pourtant, ces denrées n'ont pas accès à certains marchés, surtout en Europe. Plus encore, les subventions européennes—qui permettent aux Européens de brader leurs denrées sur les marchés mondiaux afin de se débarrasser de leurs surplus—font diminuer, d'une façon générale, les prix des denrées.
• 1610
Comment pouvez-vous élaborer une position qui tienne compte de
la nécessité d'aider les producteurs de céréales à avoir accès aux
marchés, dans la prochaine ronde de négociations de l'OMC?
Également, il y a la question de la gestion de l'offre. Est-il
possible de séparer ces deux questions?
Si le gouvernement gère l'offre en ne modifiant pas les tarifs des douanes, ne nuit-il pas à la capacité du secteur agricole—auquel ne s'appliquent ni subvention, ni droit de douane—de pénétrer d'autres marchés, dans d'autres parties du monde?
M. Jonathan Fried: Monsieur le président, permettez-moi de parler d'abord du passé, avant de parler de l'avenir. À notre avis, l'Uruguay Round nous a permis dans une grande mesure de discipliner les pays européens en matière de subventions et de contrer d'éventuelles guerres de subventions. Pour la première fois, l'accord relatif à l'agriculture comportait davantage de règles traitant expressément des subventions à l'exportation des produits agricoles. Nous avons des formules qui nous permettent de calculer l'aide globale et de limiter les subventions nationales. Ces formules nous permettent également d'éviter les distorsions du marché tout en conservant dans chacun de nos pays une agriculture prospère. À la fin des négociations, les pays ont reconnu que c'était un bon point de départ, mais qu'il faudrait quelques années pour évaluer si ces nouvelles règles très rigoureuses seraient efficaces.
Dans les nouvelles négociations qui débuteront à la fin de 1999, nous aurons l'occasion de poursuivre nos efforts pour corriger certaines pratiques appliquées à l'étranger—pas seulement en Europe—, des pratiques commerciales qui peuvent être déloyales.
Pour ce qui est de la position qu'adoptera le Canada dans ces nouvelles négociations, je ne saurais faire davantage que le ministre Vanclief. À plusieurs occasions, il a déclaré publiquement qu'il veut s'assurer que la position canadienne représente bien la position du pays et représente bien les intérêts des agriculteurs de tout le Canada. Cela ne s'applique pas seulement aux producteurs, mais également à tout le secteur de la valeur ajoutée. Il ne prendra aucune position tant qu'il n'aura pas d'indications claires de ce que veulent les agriculteurs de tout le pays.
Le ministre Marchi appuie cette idée et l'a répété. Il s'est dit prêt à travailler en étroite collaboration avec le ministre Vanclief à cet égard.
C'est pour cette raison qu'on a prévu de rédiger des documents d'étude et de tenir un certain nombre de colloques, d'ateliers et de séances de discussion. Certains documents ont déjà été distribués. Certains ateliers ont déjà été tenus. Au ministère des Affaires étrangères, nous avons collaboré avec Agriculture Canada et certains gouvernements provinciaux pour mettre sur pied d'autres ateliers.
L'automne dernier, l'un de ces ateliers, parrainé par les deux ordres de gouvernement, a été tenu en Saskatchewan. On prévoit en tenir d'autres, dont un au Québec en février et un autre en Alberta plus tard cette année.
Vous avez posé la bonne question. Je dépends de deux ministres pour y répondre. C'est un sujet important, et il faudra tenir des consultations dans tout le pays pour élaborer ce qui correspond vraiment à la position du Canada.
M. Charlie Penson: Pour terminer, monsieur le président, je dirai que je suis certes d'accord sur le fait que de grands progrès ont été réalisés, même si l'agriculture n'était assujettie à aucune règle avant l'Uruguay Round du GATT. Ces nouvelles règles constituent un énorme progrès. Mais vous conviendrez avec moi, j'en suis sûr, que le problème est loin d'être réglé si l'on fixe le niveau des subventions aux niveaux de 1986, moins 15 p. 100.
J'aime bien l'idée d'inclure d'autres mesures dans une négociation générale quelconque. Toutefois, je ne crois pas qu'il sera facile d'améliorer l'accès des produits agricoles aux marchés ou de convaincre les Européens d'éliminer progressivement leurs subventions agricoles, à moins qu'ils n'aient l'impression d'y trouver également leur compte.
• 1615
Mais pour ce qui est des différents secteurs agricoles, je
puis vous dire que le secteur canadien des céréales a réduit ses
subventions beaucoup plus rapidement que ne l'exigeait notre
formule, sous le régime du GATT. Cela est dû en grande partie aux
subventions en matière de transport, mais certaines subventions de
programme ont également été éliminées. Le secteur des céréales est
à peu près sans subvention. Des producteurs ont maintenant des
attentes très élevées, et ils soufrent énormément des prix très bas
de leurs denrées sur les marchés mondiaux à l'heure actuelle.
Je vous encourage donc à faire de votre mieux pour obtenir l'accès aux marchés dont nous avons besoin. Si les subventions européennes pouvaient être diminuées d'un dollar par boisseau, le prix du blé canadien augmenterait du même montant du jour au lendemain. Il faudra faire de grands efforts pour obtenir ce genre d'accès.
Le président: Madame Bulte.
Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): J'ai plusieurs questions à poser, monsieur le président.
Pour commencer, laissez-moi dire que je suis d'accord avec M. Penson sur l'importance, pour notre gouvernement, de faire valoir les avantages des accords et des investissements internationaux. Dans les discussions sur l'AMI, on a dit à maintes reprises qu'il s'agissait d'une occasion de rouvrir tout le dossier du libre-échange. Si nous pouvions avoir ces renseignements, afin de ne pas toujours être en butte à cette critique... car elle a été répétée très souvent. On a dit que c'était une excuse pour rouvrir ce dossier.
Deuxièmement, vous avez parlé de l'importance d'obtenir un consensus national. J'ai remarqué que la prochaine réunion des ministres des pays de l'APEC sera tenue en Malaisie. Les pays de l'APEC ont également entrepris des consultations dans le cadre desquelles sont tenues des réunions ministérielles sur la condition féminine. L'OMC a-t-il un organisme comparable au réseau des femmes leaders, qui participe aux consultations économiques de l'APEC? J'ai assisté à la réunion du réseau des femmes leaders des pays de l'APEC, en septembre dernier. Il était très intéressant de voir comment le commerce et les investissements influent sur la vie des femmes partout dans le monde. Voilà pour ma première question.
Quant à la seconde, elle porte sur les achats du gouvernement. Je crois savoir qu'il existe déjà un accord général à ce sujet. Envisage-t-on de modifier cet accord?
Ma troisième question porte sur les obstacles non tarifaires. Si je parle de cela, c'est qu'on a récemment publié dans les journaux des articles sur les aliments biologiques. Par contre, il y a aussi la question de l'étiquetage des aliments génétiquement modifiés. Je sais qu'il y a eu bien des discussions à ce sujet dans l'Union européenne. Je crois savoir, d'après ce que m'ont dit des gens de notre ministère de la Santé, que cela fait également partie des priorités du ministère.
Dans le cas de l'étiquetage, ce qui importe, c'est d'informer les consommateurs... Je m'inquiète de ce que l'on envisage d'éliminer ces obstacles non tarifaires. Comment cela influera-t-il... Que peut-on faire pour mettre cette question au premier plan?
Vous m'excuserez de m'éparpiller autant, mais vous nous avez fourni énormément d'informations.
M. Jonathan Fried: Je vais essayer de répondre à chacune de vos questions.
Pour ce qui est de l'APEC, j'ai le plaisir de vous signaler que, dans le cadre du libre-échange panaméricain, nous avons créé officiellement une structure de consultation plus vaste sur divers aspects de la société civile. L'APEC dispose d'un conseil consultatif commercial et du réseau des femmes, et il en est de même dans le contexte du libre-échange panaméricain. Le ministre Marchi a encouragé ses collègues à tenir des consultations officielles auprès de la société civile dans le cadre des négociations. Ceux-ci ont accepté.
L'OMC n'a pas officiellement de conseil consultatif ou de liens avec le secteur privé et la société civile. Contrairement aux Nations Unies, elle n'a pas d'organisations qui aient officiellement le statut d'observateur. Par contre, comme le Canada l'a préconisé, l'OMC entretient des relations assez ouvertes avec toutes les organisations non gouvernementales, qu'il s'agisse d'entreprises ou d'organismes non commerciaux ou à but non lucratif.
À la réunion de Singapour, par exemple, à laquelle participaient 120 ministres du Commerce, 350 organisations non gouvernementales différentes, commerciales et non commerciales, étaient inscrites et pouvaient discuter avec les ministres. Il en sera de même à la prochaine réunion des ministres, mais il n'existe en fait aucune structure parallèle à l'OMC. Dans le même ordre d'idées, on estime que chaque gouvernement devrait s'assurer de favoriser un tel dialogue à l'échelle nationale afin que les points de vue transmis à l'OMC représentent bien toute la gamme des opinions exprimées dans chaque pays.
Mme Sarmite Bulte: Je crois savoir qu'il y aura, en octobre prochain, une réunion ministérielle spéciale de l'APEC—pas seulement de la société civile—sur la condition féminine. Vous dites qu'il n'en existe pas d'équivalent au sein de l'OMC.
M. Jonathan Fried: Non, et il est intéressant de noter que dans ses objectifs l'APEC n'est pas seulement orienté vers les politiques, mais aussi vers le développement commercial et l'élaboration de réseaux qui lui permettront de mieux connaître les cultures de chacun de nos pays, de chaque côté du Pacifique.
Pour ce qui est du développement des entreprises, vous savez sans doute que le ministre Marchi a dirigé une mission de femmes entrepreneures à Washington et dans les États du centre du littoral de l'Atlantique. Nous sommes très actifs pour ce qui est d'établir des réseaux de femmes dans le domaine du développement d'entreprises, de la promotion commerciale, du réseautage, etc. Le programme de l'OMC constitue en lui-même une politique; je ne voudrais pas laisser entendre que toutes les questions de politique posent des défis particuliers aux femmes et doivent être examinées sous cet angle. Ces questions intéressent également toutes les entreprises et tous les secteurs de la société.
Mme Sarmite Bulte: Nous en discuterons plus tard en privé.
M. Jonathan Fried: Pour ce qui est des achats des gouvernements, on a souvent dit que l'OMC est un engagement unique et que tous les membres se sont engagés à respecter toutes ses obligations. En fait, il existe peu d'exceptions à cette règle, et l'Accord sur les achats des gouvernements est l'un des rares accords qui aient été signés de façon distincte. Même si l'OMC compte actuellement 130 membres, cet accord n'a été signé que par 16 pays dans le monde.
Les pays qui ont choisi de ne pas signer cet accord se sont dit inquiets de ce que l'accord les priverait de leurs droits de faire affaire avec leurs entreprises locales préférées. Plus particulièrement dans les pays en développement, on estime qu'il s'agit d'un outil de développement important. À Singapour, nous avons appuyé le programme de travail sur la transparence, car nous étions persuadés que nos entreprises pourraient être compétitives même si ces pays choisissaient d'accorder leur préférence à leurs firmes locales. L'important était de connaître les règles. Tant que les choses sont divulguées et transparentes, tant que les règles sont suffisamment objectives, il est possible d'exercer une concurrence équitable.
Le programme de transparence ne vise pas tant à revoir l'accord actuel sur les achats des gouvernements qu'à appliquer certains principes fondamentaux de soumission et d'appel d'offres équitables et d'aider d'autres pays à traiter leurs achats gouvernementaux de façon équitable, dans un système transparent, sans avoir pour autant à mettre fin à des pratiques d'achat peut-être moins objectives.
Pour ce qui est des mesures non tarifaires, vous avez défini exactement le problème auquel est confronté le monde du commerce. Ce problème est bien traité dans les accords de l'Uruguay Round. Il s'agit de l'Accord sur les obstacles techniques au commerce et de l'Accord sur l'application des mesures sanitaires et phytosanitaires.
L'OMC veille à ce que chaque gouvernement puisse défendre légitimement et sans entrave l'intérêt des consommateurs et ses intérêts en matière de sécurité, qu'il s'agisse d'éviter les fraudes, de fournir de l'information légitime ou de bien informer les consommateurs. Par contre, il ne permet pas aux pays de se servir de la protection des consommateurs comme prétexte pour abuser de ce droit et de s'en servir comme obstacle artificiel au commerce.
• 1625
Par exemple, le Canada exporte depuis longtemps des pétoncles
en Europe, surtout en France. Il y a quelques années, la France a
adopté un nouveau règlement sur l'étiquetage qui permettait de
vendre dans les épiceries les pétoncles pêchés dans les eaux
européennes sous l'appellation de coquilles Saint-Jacques.
Toutefois, les pétoncles canadiens devaient porter l'appellation de
pétoncles.
Au Canada, le terme pétoncle s'applique normalement à tous les pétoncles vendus dans nos épiceries. Mais en français de Paris, le mot pétoncle est assimilable au mot bernacle. Devinez ce que choisissait le consommateur français lorsqu'il avait le choix entre des bernacles et des coquilles Saint-Jacques au rayon des produits congelés.
Les Français ont dit que leur seul but était d'informer les consommateurs. Ils avaient, semble-t-il, demandé à leurs scientifiques d'étudier les pétoncles, et, d'après eux, l'une des espèces provenant des eaux canadiennes différait légèrement de celles des eaux européennes. Nous avons demandé à nos scientifiques d'examiner également la question. Ils ont confirmé que les espèces sont effectivement différentes du point de vue biologique, mais que pour ce qui est du goût, de leur effet dans l'estomac, de leur utilisation et de tous les autres aspects concevables, il n'existait pas de différence.
Par conséquent, même si la France prétend que son but est de bien informer les consommateurs, il peut arriver que l'étiquetage nutritionnel et l'étiquetage informatif soient poussés à l'extrême afin d'exercer délibérément une discrimination commerciale qui n'a rien à voir avec l'intérêt légitime des consommateurs. Nous avons fini par résoudre ce différend avec la France après avoir entrepris une procédure de règlement des différends.
Les produits agricoles modifiés ou améliorés génétiquement et les produits alimentaires transformés donnent lieu aux mêmes discussions. Ceux qui souhaitent voir ces produits étiquetés disent que leur but est d'informer les consommateurs afin qu'ils aient le choix entre des produits purement naturels et d'autres qui ont été modifiés scientifiquement. Les opposants à l'étiquetage disent qu'il devrait alors s'agir uniquement d'étiquetage informatif légitime décrivant l'utilisation du produit et ses caractéristiques inhérentes.
Il n'y a pas encore eu de règlement à cet égard. L'Europe a déjà rédigé certains projets de règlements qui pourraient s'appliquer aux produits du canola, du soja et du maïs. Les pays européens sont également inquiets au sujet de toute une gamme de produits qui pourraient contenir du suif de boeuf. Cette crainte est due au problème de l'ESB. Les produits touchés pourraient aller des bougies jusqu'aux produits pharmaceutiques, puisque le suif est utilisé dans la fabrication de la gélatine.
Les principaux exportateurs américains de certains de ces produits en Europe ont entamé des discussions avec ces pays. Les fonctionnaires du commerce, nos scientifiques et des vétérinaires gouvernementaux essaient de comprendre comment ces questions doivent être abordées. Mais comme dans le cas de l'OMC, l'objectif ultime est de voir à ce que tous les renseignements nécessaires soient fournis aux consommateurs, d'une part, tout en évitant une discrimination injuste, d'autre part.
Le président: Monsieur Reed.
M. Julian Reed (Halton, Lib.) Merci, monsieur le président.
Mme Bulte a posé la question que je m'apprêtais à poser, mais j'ajouterai néanmoins quelque chose. Ma question porte sur les obstacles non tarifaires ou les subventions cachées, si l'on veut; à vous de choisir le terme. Dressons-nous un inventaire de ces obstacles qui existent, croyons-nous, dans d'autres pays? Existe-t-il un inventaire complet de ces choses-là?
M. Jonathan Fried: Oui.
M. Julian Reed: D'accord. Très bien. Je l'apprécie.
Une autre question en passant. Il s'agit des produits améliorés génétiquement. Dans bon nombre de cas, il n'est pas possible d'établir scientifiquement la différence entre ces produits et le produit naturel correspondant. C'est impossible. Je mets au défi les hommes de science de distinguer, dans un mélange de canola, lequel est amélioré génétiquement et lequel ne l'est pas.
• 1630
Il faut également tenir compte de ce que l'amélioration
génétique existe au Canada depuis bien des années. Elle fait
actuellement l'objet d'un peu de publicité, mais si vous étudiez
l'histoire des céréales, par exemple, l'amélioration génétique n'a
rien de nouveau. C'est là, je suppose, que se situe le défi.
Comment traitez-vous cela dans le contexte du commerce?
M. Jonathan Fried: Nous sommes tous d'accord pour dire que cela représente un défi, qu'il faut trouver un équilibre entre la sécurité des consommateurs et les barrières déguisées. On assure la sécurité des consommateurs en les informant par des étiquettes, par exemple, parce que dans notre pays nous sommes persuadés que les consommateurs ont le droit de savoir ce qu'ils consomment, de savoir si c'est un aliment, un ingrédient ou un additif.
Les principes qui sous-tendent les ententes sur les barrières techniques au commerce et sur les mesures sanitaires et phytosanitaires sont des principes scientifiques. Par exemple, récemment nous avons contesté l'interdiction des Européens visant le boeuf hormoné, qui représentait un problème pour nos producteurs. L'argument des Canadiens et des Américains était comme suit: il est vrai que certains de nos producteurs donnent des hormones à certains bovins, mais aucune étude scientifique n'a démontré que la viande qui en résulte a un goût différent, ou des caractéristiques différentes. Donc, cette viande devrait être aussi disponible pour les consommateurs que d'autres produits. Vous voyez que la science joue un rôle important.
La distinction qu'on fait entre la science d'hier et la science d'aujourd'hui est assez importante. Il y a cent ans, on a divisé des graines pour établir la lignée Red River numéro un. Mais aujourd'hui le débat porte sur la nature transgénétique de la recherche. On mélange des espèces. Je n'ai pas assez d'expertise en science vétérinaire ou en science botanique pour commenter là-dessus.
M. Julian Reed: Je suis d'accord et je comprends votre point de vue. Mais j'essaye de voir comment on pourrait faire le commerce du lait hormoné avec de la somatotropine bovine. Dans le produit final, il n'y a aucun moyen d'identifier les vaches qui ont reçu cette hormone. D'ailleurs, la somatotropine bovine n'est pas vraiment une hormone comme telle. Elle se trouve déjà dans l'animal; c'est seulement la quantité qui est augmentée.
M. Jonathan Fried: Évidemment, au Canada on traite ces questions comme étant des questions scientifiques et des questions intéressant les consommateurs. Santé Canada est encore en train d'effectuer une évaluation globale fondée sur de vastes quantités de preuves scientifiques concernant l'impact potentiel—ou le manque d'impact potentiel—de la substance STBr. Le ministère, si je comprends bien, est encore en train de faire la collecte et l'évaluation de ces données.
Dans un deuxième temps, nous sommes très conscients du fait que nous avons la responsabilité non seulement d'informer les Canadiens sur les avantages du commerce, mais aussi de les éduquer pour qu'ils soient des consommateurs informés, pour qu'ils comprennent le rôle important que joue la science dans l'amélioration de notre bien-être. Certains vont toujours préférer les produits biologiques. Mais Santé Canada et le gouvernement en général, y compris nos homologues provinciaux, ont la responsabilité d'expliquer que nous avons un système de réglementation efficace et sécuritaire, qui vous permet de vendre des produits sains et sécuritaires et qui vous permet d'expliquer si les produits contiennent des additifs, même si les ingrédients ne sont pas tous indiqués. L'éducation fait partie de notre rôle.
M. Julian Reed: Je n'insisterai pas là-dessus, mais si vous le permettez, monsieur le président, supposons que l'utilisation de la STBr est légalisée au Canada. Je suis convaincu qu'il y aurait, à cause de la demande des consommateurs, une demande de lait identifié comme ne contenant pas cette substance.
• 1635
Si un autre pays veut acheter du fromage provenant du Canada,
ou si nous voulons leur vendre du fromage provenant du Canada, et
si les producteurs agricoles de ce pays-là exercent des pressions
sur leur gouvernement pour ne pas permettre l'importation du
fromage provenant du Canada, un de leurs arguments serait que le
fromage contient du lait provenant de vaches traitées au moyen de
la STBr. Comprenez-vous? Ils vont dire qu'on ne peut pas distinguer
entre les deux sortes de fromage, et donc qu'il faut interdire
l'importation du fromage canadien pour ne pas courir de risques.
M. Jonathan Fried: Comme je l'ai déjà dit, monsieur le président, la commission qui se penche sur le boeuf hormoné démontre très clairement comment le système commercial réagirait à cette sorte d'interdiction. Une interdiction qui ne serait appuyée par aucune preuve scientifique ne serait pas acceptée par une commission de l'OMS.
Le défi qui se pose est différent, et on en discute avec nos propres scientifiques et avec les Européens, de façon un peu plus coopérative, je crois. Nous ne parlons pas d'interdiction, et nous ne parlons pas de situation où une compagnie déciderait volontairement d'étiqueter ses produits à sa façon. Que fera-t-on si le gouvernement exige non seulement que le produit soit étiqueté, mais que les livraisons soient séparées? Que feriez-vous si toute votre chaîne de livraison de canola obtenu par modification génétique devait être entreposée séparément, transportée séparément, mise en sac séparément et livrée séparément, parce que le consommateur veut avoir sa liberté de choix?
Nous avons l'impression qu'il s'agit plus d'une question de restrictions commerciales que d'une question légitime portant sur les informations données aux consommateurs. Au lieu d'avoir recours immédiatement au mécanisme de règlement des différends, nous préférons, bien entendu, trouver un terrain d'entente, par la voie de l'éducation et du dialogue, avec nos amis européens pour que le commerce continue librement, et c'est un sujet qui fait toujours l'objet de discussions entre nous, et avec nos amis américains.
Le président: Merci.
Monsieur Penson.
M. Charlie Penson: Il me reste encore deux questions à poser. Premièrement, vous avez sans doute abordé cette question dans votre déclaration préliminaire, mais j'aimerais obtenir une liste de toutes les questions, à part l'agriculture et les services, qui pourraient faire partie de l'ordre du jour de la prochaine série de négociations en l'an 2000. J'imagine que l'AMI va faire partie de cette série si cette entente ne progresse pas au sein de l'OCDE, mais je vous saurais gré de me soumettre une liste.
Deuxièmement, j'aimerais savoir s'il y a un débat ou une stratégie interministérielle en ce qui concerne les tarifs. Je pense plus précisément à des choses comme le tarif de 6,7 p. 100 qu'on impose à l'industrie automobile japonaise, un tarif que les Japonais essaient de faire enlever. Nous imposons toujours des tarifs sur leurs produits—notamment sur les voitures—et les Japonais veulent les faire enlever. Par contre, ils imposent toujours des tarifs importants sur des produits comme l'huile de colza, le bois... vous en connaissez la liste.
Il me semble que si ce secteur d'activité analyse la situation pour savoir si ces 6,7 p. 100 devraient être supprimés intégralement, les ministères devraient se concerter, car, à mon avis, c'est là l'un des rares avantages dont nous disposons pour essayer d'obtenir des gains avec des pays comme le Japon. Je me demande ce que vous en pensez.
M. Jonathan Fried: Pour ce qui est des autres sujets qui pourraient faire l'objet de négociations futures, la liste serait tout aussi importante que le programme de travail de l'OMC. Certains pays, dont les États-Unis, ont même proposé d'autres sujets de discussion, comme le commerce électronique, pour lequel aucune véritable règle multilatérale ne régit les échanges Internet à caractère commercial.
Comme je l'ai dit dans mon discours d'ouverture, il appartient en fait à chaque pays membre de l'OMC d'en arriver à une décision éclairée, au cours des 18 prochains mois, sur les sujets de discussion, le cas échéant, qui pourraient s'ajouter utilement aux négociations sur l'agriculture et les services déjà prévus. La question reste donc ouverte. En théorie, nous n'avons aucune préférence à l'avance; tout ce qui nous importe, c'est de servir au mieux les intérêts du Canada.
• 1640
Les droits de douane frappant les produits industriels ne
figurent toutefois pas au programme déjà établi, pas plus que dans
les travaux préparatoires aux accords où il a déjà été entendu
qu'une analyse et un échange d'informations se poursuivraient. Il
est intéressant de noter que dans tous les accords de l'Uruguay
Round, où il y a une étude de ceci ou un examen de cela ou des
travaux préparatoires à de nouvelles négociations, il n'existe
aucun programme de travail sanctionné par l'OMC visant à réduire de
nouveau les droits de douane frappant les produits industriels. Le
Canada a dit à maintes reprises lors de réunions quadrilatérales
des ministres du Commerce et dans d'autres instances qu'il serait
tout à fait logique que, lors de toute négociation future, de
nouvelles réductions des droits de douane frappant les produits
industriels soient envisagées.
Quant aux droits de douane frappant les automobiles, c'est un élément qui, comme vous le savez, fait partie de l'analyse complète de la politique de l'automobile qu'entreprend actuellement le ministre Manley. Le ministère de l'Industrie a bien précisé, tant au début que pendant tout le processus, que cet examen doit tenir compte de tous les points de vue sur le sujet, et le ministère n'a pas ménagé ses efforts pour consulter tous les intéressés à l'échelle du pays. Cet examen, bien entendu, se poursuit. Je ne crois pas que le ministre Manley ait promis de déposer son rapport à une date précise.
M. Charlie Penson: Mais je vous demandais si le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international et le ministère de l'Industrie se sont concertés pour obtenir ce que nous voulons, pour obtenir la compensation qu'attendent les groupes canadiens?
M. Jonathan Fried: Permettez-moi de dire simplement: oui, il y a une stratégie. Nous travaillons en étroite collaboration avec le ministère de l'Industrie, pas seulement pour les autos, mais sur toutes les questions d'intérêt commun, y compris les liens intersectoriels.
Souvenez-vous, par exemple, de notre succès l'an dernier à Vancouver, où nous avons obtenu sous les auspices de l'APEC un programme de libéralisation sectorielle précoce et volontaire qui couvre, d'une part, beaucoup de nos intérêts industriels, et l'énergie pétrochimique et le secteur de l'équipement à valeur ajoutée, et, d'autre part, les pêches et la foresterie, où il y a de véritables obstacles au Japon. Donc, à l'intérieur du gouvernement, nous poursuivons un dialogue très serré avec Industrie Canada, et il est juste de dire qu'ils sont pleinement au courant de l'éventail des intérêts commerciaux du Canada avec le Japon, bien au-delà du secteur de l'automobile.
M. Charlie Penson: Pour revenir aux possibilités qui pourraient faire partie d'une ronde générale, est-ce que la politique internationale de concurrence ferait admettre des domaines que le Canada essaie d'y faire inclure aussi?
M. Jonathan Fried: Nous avons appuyé un programme d'étude au niveau de l'OMC sur le commerce et la concurrence, et le commerce et l'investissement.
Nous estimons que le commerce et la concurrence sont importants, parce qu'une réglementation axée sur le marché aide à faire en sorte qu'on continue de profiter de l'accès obtenu à la frontière. De par son mandat, le groupe de travail de l'OMC sur le commerce et la concurrence doit faire état des possibilités d'élaborer des règles internationales ou d'autres types de discipline dans ce domaine avant la prochaine réunion ministérielle, à la fin de 1999.
Il est un peu trop tôt pour dire si les négociations seront proposées. Nous ne nous précipitons pas pour dire: allons négocier maintenant. Nous demandons qu'il y ait un dialogue sain concernant le rapport entre le commerce et la politique de concurrence. Une fois que tout le monde comprendra mieux l'interaction entre les deux, nous serons beaucoup plus en mesure d'évaluer si des négociations devraient être entamées, ou s'il faudrait poursuivre d'autres travaux.
• 1645
Dans le même ordre d'idées, nous étions des partisans précoces
d'un programme de travail à l'OMC sur le commerce et
l'investissement qui permettrait de mieux comprendre les liens qui
existent entre la réglementation du commerce et la réglementation
de l'investissement. Notre expérience nous indique que le commerce
suit l'investissement, et que lorsque les sociétés canadiennes
investissent à l'étranger elles ont tendance à acheter plus de
produits canadiens, ce qui crée davantage de débouchés pour les
exportations. Et de l'autre côté, lorsque nous faisons du commerce
à l'étranger il y a parfois des retombées positives au niveau de
l'investissement. Il faut que le reste du monde comprenne ce lien.
Encore une fois, ce groupe de travail présentera un rapport dans les 18 prochains mois au sujet de travaux ultérieurs.
Nous sommes certainement d'avis que nos efforts à l'OCDE pour promouvoir un accord multilatéral sur l'investissement qui répond aux exigences de base du Canada devraient, à la longue, se trouver sous l'égide de l'OMC. Pourquoi? Parce que les investisseurs canadiens qui font affaire à l'étranger méritent d'avoir l'assurance que leurs investissements seront protégés non seulement dans les pays de l'OCDE, mais aussi à travers le monde. Et d'autre part, le Canada, en offrant les mêmes protections, resterait un lieu propice aux investissements. Comme le ministre Marchi l'a souligné, il ne s'agit pas d'un accord à n'importe quel prix. L'accord doit répondre aux critères de base du Canada, qu'il a définis dans son discours du 13 février.
Alors, pour répondre à votre question, ce sont là des sujets qui sont possibles, mais loin d'être certains, dans le contexte de négociations futures.
M. Charlie Penson: Une loi sur la concurrence serait certainement opportune en vue du fait que... si on essaye d'intégrer la Chine, avec toutes ses entreprises d'État, à l'OMC, il sera probablement nécessaire d'avoir certains paramètres concernant la concurrence.
Cela met fin à ce que je veux dire.
Le président: Monsieur Fried, pourriez-vous nous donner une mise à jour concernant les récentes discussions du Groupe de Cairns?
M. Jonathan Fried: Je vais demander à M. Carrière de vous donner un bref résumé de la dernière réunion du Groupe de Cairns.
M. Claude Carrière (directeur, Direction des droits de douane et de l'accès aux marchés, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Monsieur le président, comme vous le savez, les ministres du Groupe de Cairns se sont rencontrés les 1er et 2 avril. La réunion a été précédée par une réunion des chefs agricoles des pays du Groupe de Cairns. La discussion au Groupe de Cairns visait à trouver la meilleure solution possible pour les préparatifs des négociations sur le commerce agricole, non seulement pour la réunion ministérielle de l'OMC du mois prochain, mais également pour la réunion ministérielle de 1999 et le lancement des négociations agricoles qui aura lieu à ce moment-là.
Il y a dans le Groupe de Cairns un noyau qui est mené de façon très agressive par l'Australie et l'Argentine. Ces pays adoptent des positions sur des questions telles que l'élimination des subventions à l'exportation, sur laquelle nous avons des points de vue communs, mais en plus ils adoptent des positions claires et avancées de négociation sur des questions telles que le soutien intérieur, la réforme et l'accès aux marchés.
Comme M. Fried l'a mentionné plus tôt, le ministre Vanclief, en collaboration avec le ministre Marchi, essaie de mettre au point un processus étendu de consultation nationale avec les intervenants de l'industrie agricole et agroalimentaire, pour éviter d'adopter des positions finales avant la tenue de ces consultations.
Donc, à la réunion du Groupe de Cairns, le Canada cherchait à signaler que nous—et d'autres pays également—entreprenons des consultations importantes au pays. Nous estimons donc que le communiqué émis après la réunion du Groupe de Cairns et la déclaration reconnaissent que nous avons mis en place un processus qui nous mènera jusqu'aux négociations de 1999.
M. Jonathan Fried: Monsieur le président, nous serons heureux de vous donner, par l'entremise du greffier, des exemplaires du communiqué du Groupe de Cairns, et également le communiqué émis par le ministre Vanclief à la fin de la réunion.
Le président: Je vous remercie, messieurs, de nous avoir mis à jour concernant ces questions. Ce fut une séance d'information très complète.
Au fil des semaines et des mois à venir, nous allons continuer d'examiner cette question. Nous allons entendre des représentants d'autres ministères. Comme vous l'avez dit, le ministère de l'Agriculture va jouer un rôle important, tout comme Industrie Canada. Nous allons également convoquer des particuliers et des groupes de tout le pays qui s'intéressent à la question. À la fin de nos audiences, nous vous dirons ce que nous avons entendu. Nous espérons pouvoir faire des progrès pendant l'année à venir dans la mise au point d'une position canadienne.
La séance est levée.