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HAFF Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON PROCEDURE AND HOUSE AFFAIRS

COMITÉ PERMANENT DE LA PROCÉDURE ET DES AFFAIRES DE LA CHAMBRE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 3 novembre 1999

• 1544

[Traduction]

Le président (M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.)): La séance est ouverte. Nous avons le quorum. Nous continuons notre examen de la Loi électorale du Canada, le projet de loi C-2.

• 1545

Je dois d'abord m'excuser d'avoir retardé la séance du comité. J'ai été retenu à la Chambre pour des questions qu'il m'était impossible de déléguer. Je devrai trouver moyen d'éviter que cela se reproduise. Mes excuses aux témoins et à mes collègues.

Nous accueillons aujourd'hui d'importants témoins de partis du Canada qui sont enregistrés mais qui n'ont pas par ailleurs de représentant à la Chambre des communes. Nous accueillons le Parti vert du Canada, le Parti de l'Héritage Chrétien du Canada et le Parti marxiste-léniniste du Canada.

Si nous sommes au complet, nous ferons comme hier et demanderons à chaque parti de présenter un exposé qui ne devra pas dépasser dix minutes; nous ferons preuve de souplesse, mais nous avons un objectif de dix minutes, que vous devriez respectés. Après chacun des exposés, nous passerons à une ronde de questions de la part des membres du comité. Si cela vous convient, nous pouvons commencer.

Je vais suivre la liste des partis tels qu'ils figurent sur cet avis. Si quelqu'un se pose des questions au sujet de l'ordre de présentation des partis sur la liste, parlez-en plus tard à la greffière. Quoi qu'il en soit, je suivrai cet ordre-ci.

Pour commencer, le Parti vert du Canada. Je vois M. Julian West. Si quelqu'un vous accompagne, vous pouvez nous le présenter. Autrement, vous avez la parole.

M. Julian West (Parti vert du Canada): Sauf votre respect, monsieur le président, je propose que le Parti de l'Héritage Chrétien du Canada commence, puisque c'est ainsi que nous pensions que se dérouleraient les choses.

Le président: Bien. Si mes collègues n'ont pas d'objection, nous sommes d'accord.

Monsieur Ron Gray, du Parti de l'Héritage Chrétien du Canada.

M. Ron Gray (chef national, Parti de l'Héritage Chrétien du Canada): Merci de cette occasion de m'adresser au comité.

Quatre des cinq petits partis fédéraux enregistrés ont exprimé des préoccupations communes au sujet du projet de loi C-2, et trois d'entre eux sont présents aujourd'hui. Les autres ne pouvaient pas venir, mais le Parti action canadienne a envoyé un message que je vous lirai tantôt.

Lorsque le ministre a déclaré, récemment, que la démocratie au Canada faisait l'envie du monde entier, ceux qui étudient sérieusement la science politique ont dû être bien ébaubis. En vérité, la soi-disant démocratie du Canada a dégénéré presqu'en une oligarchie impériale, et à peu près tout le monde le sait.

Beaucoup de nos problèmes, comme l'accumulation du pouvoir entre les mains d'un seul homme, ne peuvent être corrigés par ce projet de loi, mais trois graves lacunes peuvent être comblées. Au nom du Parti de l'Héritage Chrétien, je vais donc attirer votre attention sur des lacunes particulières du projet de loi C-2.

La première, c'est la nécessité de la représentation proportionnelle.

La deuxième, c'est l'utilisation à mauvais escient du pouvoir par les élus pour se maintenir au pouvoir. Cette deuxième préoccupation a deux volets. D'une part, l'attribution des fonds publics pour rembourser la moitié des dépenses électorales des candidats est de 22,5 p. 100 des dépenses électorales des partis, s'ils récoltent 15 p. 100 au plus du vote populaire. Le deuxième, c'est la répartition inéquitable du temps d'antenne gratuit.

Parlons d'abord de la représentation proportionnelle.

Le Canada et les États-Unis sont actuellement les seules démocraties industrialisées qui n'ont pas encore pris de mesures pour intégrer une forme de proportionnalité à leur régime électoral. Même la Grande Bretagne a adopté la représentation proportionnelle pour l'élection de ses représentants au Parlement européen, aux Assemblées d'Irlande du Nord et du pays De Galles et au nouveau Parlement écossais. Le premier ministre Blair a parlé d'intégrer la représentation proportionnelle au modèle des Parlements.

En juin de l'an dernier, un éditorial du Globe and Mail rappelait que le premier ministre Chrétien avait déclaré en 1985 que s'il devenait un jour premier ministre, sa priorité serait d'instaurer la représentation proportionnelle. Il est clair qu'à l'époque, le premier ministre reconnaissait les vertus de la représentation proportionnelle.

Aux dernières élections, les Conservateurs et les Réformistes ont obtenu environ le même nombre de voix, mais l'un des partis a eu trois fois plus de sièges que l'autre.

• 1550

Comme seulement 38 p. 100 des électeurs de 1997 ont voté pour le parti actuellement au pouvoir, c'est comme si on avait détruit tous les autres bulletins de vote, soit 62 p. 100, en disant que les votes de ces Canadiens ne comptaient pas, puisque le parti qui a obtenu 38 p. 100 de la faveur populaire a 100 p. 100 du pouvoir réel à la Chambre des communes.

On voit là l'avantage de la représentation proportionnelle: la capacité de veiller à ce que chaque électeur sente que son point de vue est exprimé au Parlement. Aux élections de 1997, un électeur sur 3 n'a pas voté, probablement parce que beaucoup d'entre eux estimaient ne pas pouvoir vraiment influencer le résultat. Mais il y a d'autres avantages, qui expliquent peut-être pourquoi le reste du monde adopte la représentation proportionnelle.

Pour commencer, elle permet de remplacer le débat législatif de nature confrontationnelle par des discussions valables et par une collaboration dans la recherche de l'intérêt de la nation. Nous avons donc été étonnés de constater que le projet de loi C-2 ne proposait rien pour répondre au grand besoin que nous avons de cette réforme électorale.

Bien entendu, il y a divers types de représentation proportionnelle. Nous sommes convenus de ne pas en proposer une forme particulière pour l'instant, et simplement d'exhorter le Parlement à envisager les avantages d'une forme de représentation proportionnelle adaptée aux besoins du Canada, en reconnaissant les besoins régionaux, linguistiques et autres.

Si vous le permettez, maintenant, le chef du Parti action canadienne, l'honorable Paul Hellyer, qui ne pouvait être ici, m'a demandé de lire une déclaration au nom de son parti. Il n'y a qu'une phrase: «Le Parti action canadienne appuie les propositions du Parti de l'Héritage Chrétien sur la représentation proportionnelle.»

Deuxièmement, j'aimerais vous exprimer notre préoccupation au sujet de l'abus des pouvoirs des élus, dans le but de se maintenir au pouvoir. C'est un problème au Canada depuis l'époque du tristement célèbre Pacte de famille. Il importe d'étouffer ces abus dans l'oeuf.

La plupart des députés actuels ne sont pas coupables de cette corruption qui est entrée dans le processus électoral—je crois depuis 1974—mais vous qui êtes à la Chambre des communes avez cette occasion unique, avec le dépôt du projet de loi C-2, de corriger la situation en remédiant à ces abus. Permettez-moi de vous en décrire quelques-uns.

Le plus grand scandale est peut-être l'emploi des fonds publics pour remplir les futures caisses électorales des candidats élus—il s'agit de la disposition du paragraphe 435(2), permettant le remboursement de 22,5 p. 100 des dépenses électorales des partis, au-delà d'un certain seuil; et de l'article 464, visant le remboursement de 50 p. 100 des dépenses électorales des candidats aillant obtenu plus de 15 p. 100 des votes.

Pensons aux effets de cette loi. À la fin de chaque élection, les candidats élus reçoivent le remboursement de la moitié des dépenses admissibles. Pour l'élection partielle et qui a lieu dans ma circonscription, Hull—Aylmer, c'est une somme d'environ 32 000 $. À la prochaine élection, ce candidat ou ce parti aura déjà une caisse électorale à moitié pleine. Ce ne sont pas les dons des partisans qui la remplissent, mais l'argent des contribuables, perçus grâce au pouvoir de coercition de loi de l'impôt sur le revenu.

Thomas Jefferson a écrit qu'il est tyrannique d'obliger des gens à payer pour la promotion d'idées qu'ils ne partagent pas. Il avait raison. C'est pourtant exactement ce que fait cette loi. Elle oblige les contribuables à soutenir des partis dont les politiques vont à l'encontre des principes qu'ils défendent.

Je vous signale que si l'on s'y oppose pour des motifs moraux ou religieux, il faut dire que cette loi enfreint les droits conférés par la Charte au paragraphe 2(a), au sujet des droits religieux et de la liberté de conscience des contribuables. En outre, elle enfreint leurs droits à la liberté d'opinion et d'expression, conférés à l'article 2(b). L'obligation de soutien peut aussi être interprétée par les tribunaux comme une atteinte aux droits conférés par l'article 3. Si le projet de loi C-2 est adopté dans sa forme actuelle, vous pouvez certainement vous attendre à une contestation en vertu de la charte.

De nombreux autres partis qui sont représentés ici ont leurs propres idées quant à la façon d'y remédier. Permettez-moi de vous décrire la solution que nous proposons.

• 1555

Au lieu de cet appui forcé, si le Parlement croit vraiment que le processus démocratique exige des fonds publics, il faudrait que la contribution soit volontaire. Par exemple, nous proposons d'inclure une case, à la fin de la déclaration d'impôts, disant que 10 $, par exemple, de vos impôts serviront à soutenir le processus démocratique au Canada et voici les partis politiques enregistrés auxquels vous pouvez attribuer ces 10 $. Si aucun parti n'ait indiqué, vos 10 $ serviront à couvrir les frais de fonctionnement direct et indépendant d'Élections Canada.

De cette façon, pas un sou de l'argent des contribuables ne servira à financer un parti politique à moins que ce contribuable ne l'ait demandé. Mais surtout, les deniers publics ne serviront pas à maintenir au pouvoir ceux qui y sont déjà. En améliorant cette loi, vous êtes en mesure de remédier à un abus de pouvoir qui est aussi déplorable que l'était l'ancien Pacte de famille.

Le projet de loi C-2 perpétuerait également une autre injustice, celle selon laquelle le temps d'antenne gratuit est attribué au parti en fonction du nombre de sièges qu'ils occupaient dans la législature précédente. C'est une mauvaise politique et cela à deux égards.

D'abord et avant tout, elle vise à utiliser le temps d'antenne gratuit dans l'intérêt des partis alors qu'elle devrait le faire dans l'intérêt des électeurs. Une démocratie requiert un électorat bien informé. Le but du temps d'antenne gratuit est de permettre aux électeurs d'obtenir l'information dont ils ont besoin pour faire un choix éclairé et non pas de conférer à un parti un avantage sur un autre.

Je vous exhorte à cesser de chercher comment attribuer le temps d'antenne dans l'intérêt des partis et à le faire plutôt pour servir les intérêts de l'électorat.

Deuxièmement, en période d'élections, aucun parti n'a de siège. Il faudrait considérer que tous les partis sont susceptibles d'obtenir autant de voix et autant de sièges. Si l'on attribue la part du lion du temps disponible au parti qui était au pouvoir dans la législature précédente, c'est encore une fois un abus de pouvoir et c'est ce que je voulais dire quand j'ai parlé d'oligarchie. Par conséquent, cela viole le droit à l'égalité des citoyens et des candidats que reconnaît la Charte et pourra certainement faire l'objet d'une contestation judiciaire si l'on n'y remédie pas.

Notre parti suggère, par exemple, de diviser également entre tous les partis le temps d'antenne sur le réseau national et de répartir le temps d'antenne local ou régional entre les candidats de la région.

Je tiens à répéter que le projet de loi C-2 confère aux députés l'occasion de perpétuer 25 années d'abus de pouvoir et de corruption ou de faire leur marque dans les annales du Parlement canadien en mettant enfin un terme à ces abus et en commençant à rétablir une véritable démocratie.

Je vous remercie.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Gray. Vous êtes dans les limites de temps. Je vous en remercie de même que pour la concision de votre exposé.

Monsieur West, voulez-vous être le prochain, au nom du Parti vert du Canada.

M. Julian West: Merci.

[Français]

Merci, monsieur Gray, de ces remarques. Je constate que M. Gray est actuellement le candidat de son parti dans le comté de Hull-Aylmer, tout près d'ici. Nous lui souhaitons donc bonne chance.

M. Ron Gray: Merci.

M. Julian West: Nous espérons qu'il se classera bien, peut-être deuxième après notre excellente candidate Gail Walker.

[Traduction]

Et je continue.

Tout amateur de hockey comprend la façon dont ce fait le repêchage à LNH, chaque année. On donne aux équipes qui se classent en dernière place—et j'ai le regret de dire que, ces dernières années, cela comprend les Canucks de Vancouver—le premier choix pour le repêchage l'année suivante afin qu'elles aient la chance d'obtenir de meilleurs joueurs et de rehausser leur classement. La ligue a intérêt à le faire parce qu'elle a intérêt à équilibrer les choses. Vous ne voulez pas que la même équipe gagne chaque année.

Pour les élections canadiennes, nous faisons le contraire. Le parti qui gagne une année a le droit d'établir toutes les règles du jeu pour les prochaines élections en s'arrangeant pour que cela lui confère un avantage sur les autres.

• 1600

Les partis qui perdent n'établissent pas les règles du jeu et en fait, ils ne sont même pas vraiment consultés étant donné que l'on ne tient généralement pas compte de nos suggestions. Je veux parler ici non seulement des très petits partis, mais même des grands partis d'opposition à la Chambre des communes.

Il est vrai que le gouvernement cherche à donner l'impression qu'il s'agit d'une initiative non sectaire. Tous les partis sont consultés. On nous dit de soumettre des mémoires, de comparaître devant les comités, etc. Mais je peux vous dire que notre participation au processus a été extrêmement insatisfaisante jusqu'ici.

On nous a demandé de soumettre un mémoire par écrit, il y a deux ans. Nous avons limité nos observations à six grandes questions et nous avons pensé avoir été assez convaincants en ce qui concerne chacune d'elles. Nous avons fait des suggestions semblables à celles de M. Gray. Nous estimions que certaines dispositions ne survivraient pas à une contestation judiciaire. Entre temps, une décision des tribunaux nous a donné raison. Nous pensions que le seuil de 15 p. 100 fixé pour le remboursement des candidats, qui ferait que certains candidats récupéraient la totalité de leur dépôt tandis que d'autres n'y auraient pas droit, serait jugé inconstitutionnel. Et tel a été le verdict. Le gouvernement l'a accepté et ne fait pas appel. Ce changement se retrouve dans la loi.

Nous avions raison sur ce point et nous pensons avoir raison sur bien d'autres. Nous croyons également que notre rapport n'est pas pris très au sérieux. Les quelques suggestions que nous avons faites et qui ont survécu à l'étape du comité ont été rapidement rejetées. Les gens ont posé des questions à leur sujet. Par exemple, nous estimions qu'il fallait faire quelque chose pour que les partis aient davantage accès aux médias et empêcher la presse de dire, par exemple, en période électorale: «Les chefs des cinq partis étaient tous en train de faire campagne aujourd'hui». Ce genre de commentaires incite les électeurs à croire qu'il n'y a que cinq partis et qu'ils n'ont que cinq choix alors qu'il y a dix partis enregistrés.

Lorsque nous avons fait cette suggestion au comité, quelqu'un a demandé: «Le Parti vert s'oppose-t-il à la liberté de la presse?» Mais de toute évidence, cette personne n'avait pas lu notre rapport. Personne d'autre au comité n'a répondu: «Non. C'est dans son rapport. Le Parti vert appuie la liberté de la presse, mais croit que le gouvernement devrait veiller à ce que l'électorat soit bien informé».

Nous avons suggéré non pas de museler la presse, mais simplement d'envoyer dans tous les foyers un feuillet d'information résumant sur une page la description de chaque parti, son programme électoral, les partis qui participent aux élections afin que les gens sachent quelles sont toutes les possibilités.

Cela se fait couramment ailleurs. J'ai apporté quelques exemples. Voici ce qui a été envoyé lors du référendum au Québec par

[Français]

le directeur général des élections du Québec. Cela comprenait le Oui et le Non, afin que tout le monde sache ce qu'impliquaient à la fois le Oui et le Non.

[Traduction]

Ce feuillet-ci a été envoyé à Vancouver: «Vancouver Votes». On indique aux électeurs qui sont les candidats et quels sont leurs programmes.

C'est ce que nous avons proposé. Le comité n'en a même pas vraiment discuté parce que nous n'avons pas été invités à comparaître en personne. Les membres du comité n'ont donc pas pu nous demander de défendre notre position.

On nous a finalement invités, mais je réside dans l'île de Vancouver et c'est seulement jeudi qu'on m'a demandé si je pouvais venir à Ottawa mercredi avec un mémoire dans les deux langues officielles. Je l'ai fait, mais à la hâte, comme vous pouvez l'imaginer.

Dans son mémoire, le parti de l'Héritage Chrétien a présenté une proposition en trois points sur laquelle tous les petits partis sont d'accord. Nous l'appuyons entièrement. Ces trois points sont: s'orienter vers une représentation proportionnelle; modifier les règles en ce qui concerne l'accès aux médias et changer la structure du financement public des partis politiques.

À propos de la représentation proportionnelle, c'est un très grand changement et nous croyons savoir que le comité ne va pas en recommander la mise en oeuvre avant les prochaines élections. Nous ne croyons d'ailleurs pas que ce soit faisable avant les prochaines élections. Ce qui nous reporte aux élections suivantes. Il faut informer la population, concevoir un système approprié pour le pays, et s'occuper de tout le reste.

L'occasion de le faire nous est offerte par un député du Nouveau Parti démocratique, M. Lorne Nystrom. Il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire visant à créer une commission royale—une commission publique certainement—qui se déplacerait dans tout le pays, qui consulterait les Canadiens, trouverait le meilleur système de sélection pour les Canadiens et le soumettrait à la population dans le cadre d'un référendum. Les Canadiens n'auraient donc pas un système qu'ils n'auraient pas conçu ni en faveur duquel ils n'auraient pas voté.

• 1605

Actuellement, aucun citoyen n'a son mot à dire dans la conception de ce système. Il a été conçu pour nous au Royaume-Uni au XIXe siècle, à partir d'un système hérité du XVe siècle.

Je ne vois pas comment on peut s'opposer au projet de loi de M. Nystrom. Je pense qu'il serait bon que le comité fasse savoir qu'il existe un vaste appui de tous les partis en faveur de son adoption. Le projet de loi devrait être mis aux voix et devrait être généralement accepté.

En ce qui concerne l'accès aux médias, il me semble que le changement minimal qui serait approprié pour l'instant consisterait à examiner la législation concernant l'attribution du temps d'antenne pendant les campagnes électorales. Nous avons également des problèmes en matière d'accès aux médias entre les campagnes électorales, mais pendant celles-ci il existe dans la loi une certaine formule concernant le nombre de minutes de temps d'antenne—temps d'antenne gratuit et payé—que les partis obtiennent. Nous obtenons normalement trois minutes, selon cette formule.

Cette formule n'est pas utilisée depuis des années, et si elle l'a jamais été, parce qu'il existe un arbitre de la radiodiffusion qui chaque année nous accorde plus de temps que cela. Il dispose d'une formule modifiée et il se sert de la même formule depuis 1993. Nous avons une série de réunions, les partis ne s'entendent pas et l'arbitre à la radiodiffusion attribue le même temps d'antenne une année après l'autre.

Nous suggérons que le comité reconnaisse que c'est la pratique courante. La formule modifiée de l'arbitre sert d'année sur l'autre et elle devrait être adoptée dans la loi. Disons simplement que c'est maintenant le seuil garanti pour les petits États. Nous considérons que la formule employée par l'arbitre à la radiodiffusion constitue la formule légale.

Enfin—et je vois que je n'ai plus que quelques minutes—j'aborde la question la plus importante, celle du financement des partis. Nous aimerions qu'on modifie de fond en comble la structure du financement des partis, selon ce que Démocracie en surveillance vous a proposé dans son mémoire; et selon les propositions de la Commission Lortie, ainsi que du directeur général des élections dans Consolider les assises. Tous s'accordent pour dire que le remboursement devrait être effectué, non pas tant en fonction des sommes d'argent qu'on peut recueillir ou de la richesse des donateurs, mais plutôt en fonction de l'appui qu'on recueille auprès des Canadiens. L'appui financier devrait donc être proportionnel à l'appui qu'on recueille auprès du public. Le remboursement devrait être effectué en fonction d'un certain montant par voix, et non pas en fonction des dollars que nous dépensons. C'est ce que nous souhaitons.

Encore là, il s'agit d'un changement fondamental. Nous pensons qu'il serait réaliste d'envisager tout simplement un seuil de 15 p. 100 en ce qui concerne le financement public. Tous les candidats des grands partis—c'est-à-dire tous les candidats libéraux à l'exception de neuf—se voient rembourser 50 p. 100 de leurs dépenses, comme le disait M. Gray. Nous n'obtenons rien. Nous demandons tout simplement d'obtenir un montant proportionnel à l'appui que nous recevons. Je propose qu'on envisage ce seuil de 15 p. 100. Tout comme les tribunaux ont déjà proposé un seuil de 15 p. 100 pour ce qui est du remboursement du dépôt, nous devrions proposer ce seuil de 15 p. 100 pour le remboursement des dépenses. Si l'un est jugé anticonstitutionnel, il en sera certainement de même pour l'autre. Le même raisonnement s'applique.

Ce qu'on fera une fois éliminé ce 15 p. 100, c'est à vous d'en décider. Le Parti de l'Héritage Chrétien et le Parti réformiste aussi je crois appuient l'élimination du remboursement, pour tous. Autrement dit, le Parti vert n'obtiendrait rien, mais les Libéraux n'auraient pas les 6 millions dollars qu'ils empochent, non plus. C'est une solution qui me convient. Je peux accepter cela. Mais je préférerais que tous soient remboursés.

J'ai des tableaux dont nous pourrons reparler plus tard, si cela vous intéresse, qui montrent que cela ne coûterait pas beaucoup d'argent. Ça ne serait qu'une faible part des deniers publics et ne servirait qu'à rendre le jeu plus équitable pour tous. Nous ne demandons que ce que les autres Partis ont l'habitude d'obtenir.

Je dirais au ministre que s'il fait quelque chose pour structurer le financement public en éliminant simplement le seuil de 15 p. 100, il aura notre appui. Le ministre devrait avoir pour objectif que tous les partis prennent position et contribuent à ce projet de loi; c'est un projet de loi non sectaire. Il devrait pouvoir ajouter que les partis ont été non seulement consultés, mais qu'ils sont venus s'adresser au Parlement à Ottawa et qu'on les a écoutés. Nous vous demandons donc de nous écouter, aujourd'hui.

Merci.

Le président: Merci à vous aussi, monsieur West, d'avoir respecté l'horaire et d'avoir prononcé un très bref exposé.

Nous passons maintenant au Parti marxiste-léniniste du Canada. Nous accueillons Mmes Di Carlo et Morten.

Mme Anna Di Carlo (Parti marxiste-léniniste du Canada): Je représente le Parti communiste du Canada, marxiste-léniniste, qui pour des fins électorales est enregistré comme le Parti marxiste-léniniste du Canada.

• 1610

Il y a trois principaux points dont je veux vous parler aujourd'hui. Tout d'abord, le projet de loi C-2 doit être intégralement rejeté. Je vais vous expliquer pourquoi.

Deuxièmement, j'aimerais proposer des mesures à prendre immédiatement pour modifier la Loi électorale du Canada.

Troisièmement, je veux proposer la rédaction d'une nouvelle Loi électorale en présentant les principes démocratiques sur lesquels elle reposerait, les droits démocratiques qui y seraient inscrits et qu'elle ferait respecter, et le moyen d'y arriver.

Dès le départ, je veux qu'il soit consigné au compte-rendu que notre mémoire intitulé «Examen du système électoral canadien et d'élections Canada» présenté au comité permanent par notre chef national, Sandra Smith, le 28 janvier 1998, demeure notre proposition globale au sujet de la nouvelle Loi électorale qui moderniserait le régime électoral et politique tout en respectant les exigences d'une démocratie moderne.

Ce que nous présentons aujourd'hui fait le lien avec ce qui s'est passé depuis—en particulier, avec la nouvelle Loi électorale, le projet de loi C-2, qui n'a vraiment rien de nouveau.

Je vais commencer par le premier point: pourquoi le projet de loi doit être intégralement rejeté.

Monsieur le président, nous l'estimons complètement inacceptable, pour ce qui est des responsabilités qui incombent aux législateurs nationaux, et il est même intenable que la nouvelle Loi électorale ait été rédigée en préservant essentiellement l'ancienne loi. Il n'y a rien de mal en soi à maintenir une loi ancienne lorsqu'un examen est nécessaire. Ce qui suscite des objections, c'est que la nouvelle loi, comme l'ancienne, va complètement à l'encontre des principes de la démocratie moderne. On continue de violer les droits des Canadiens d'élire et d'être élus, tout en bafouant les droits à la liberté de conscience, d'association, d'expression, à l'égalité des citoyens devant la loi ainsi que le droit à une protection égale de la loi. Beaucoup de ces droits sont garantis par la Charte.

Comme vous avez pu le lire dans notre mémoire précédent, notre parti s'oppose à la domination du régime politique et électoral par des partis politiques et par le régime des partis et considère qu'il est anachronique pour notre système de refuser tout pouvoir aux citoyens et de les écarter du processus politique.

Ces audiences mêmes, je dois le dire, témoignent de la marginalisation grave des Canadiens. Qui peut honnêtement accepter que des questions aussi fondamentales pour le fonctionnement politique que l'élection d'un gouvernement, que l'établissement d'un programme gouvernemental pendant une campagne électorale, que le choix des candidats, et que les questions se rapportant aux dépenses visant à influencer l'opinion politique publique, soient entre les mains d'un petit nombre de partis politiques qui représentent moins de 3 p. 100 de la population canadienne. Pire encore, il faut bien dire qu'au bout du compte, se sont les partis à la Chambre des communes, et plus précisément le parti au pouvoir, qui prendront les décisions.

Nous ne sommes pas très encouragés par les divers amendements dont on nous a parlé. Par exemple, on nous a dit que le ministre Boudria affirme que l'un des amendements qu'il aimerait voir, c'est le financement des partis politiques, avec des fonds supplémentaires s'ils choisissent des femmes comme candidates. Oublions un peu l'attitude paternaliste et chauviniste de ce genre de méthode; cette proposition n'est qu'une autre mesure pour plaire à l'élite. Cela n'a rien à voir avec le problème de la marginalisation d'un grand nombre de Canadiens.

Le problème fondamental, auquel ne remédie aucunement le projet de loi C-2, dans notre démocratie non représentative... rien n'est changé. Par exemple, on a fait des concessions au sujet de la participation d'autres organisations et associations désignées comme les tiers, qui ne font que souligner les problèmes qui ont émergé, puisque ce système électoral est fondé sur la domination du processus électoral par les partis politiques. On croit rêver, quand on entend, par exemple, qu'on réglera le problème de la liberté d'expression en permettant aux tiers partis de dépenser de 3 000 $ à 150 000 $. Dès que ces limites seront fixées, on peut parier qu'il y aura d'autres contestations judiciaires par ceux qui les trouvent injustes.

• 1615

Cela ne règle pas les problèmes de contestation judiciaire, ni celui du rôle de l'argent pendant les élections. On se trompe en pensant qu'on peut régler les problèmes de corruption financière, électorale et politique, et créer des règles semblables pour tous en fixant des plafonds de dépenses. C'est croire que tous les citoyens ont des tonnes d'argent dont ils peuvent disposer pour exercer leurs droits politiques, et que tout sera juste pour tous, si on restreint la quantité d'argent que chacun peut dépenser.

C'est revenir à une période de la démocratie où seuls des hommes propriétaires de biens pouvaient voter. Et cela nous amène immédiatement à d'autres questions, par exemple: comment garantit-on l'égalité des citoyens devant la loi lorsque des partis politiques peuvent dépenser plus d'argent que d'autres organisations, et qu'ils ont aussi le droit d'émettre des reçus donnant à des crédits d'impôt, alors que d'autres organisations ne le peuvent pas?

Ne parlons pas pour l'instant de la marginalisation des citoyens par la partitocratie. Même avec le système partitocratique majoritaire à un tour actuel, le projet de loi C-2 ne créé pas des règles égales pour tous pendant les élections, comme Julian West et Ron Gray l'ont très bien expliqué. Je tiens à dire que je suis d'accord avec eux là-dessus.

En examinant tous les détails du projet de loi C-2 se rapportant à la divulgation financière, comme les modifications exigeant que les partis politiques dévoilent leurs fiducies, etc., la seule conclusion que l'on puisse tirer, c'est qu'en ce qui concerne les élections au Canada, et les lois électorales qui les régissent, il s'agit davantage d'une question d'argent que d'une question de processus permettant aux membres d'une société de délibérer sur des questions économiques, sociales, politiques, et culturelles, pour décider collectivement les orientations de la société.

Nous tenons à insister sur le fait que les partis politiques à la Chambre des communes jouent un jeu dangereux. Continuer à s'imaginer que ces questions ne sont pas ancrées dans de graves problèmes du régime, et à agir comme si tout allait pour le mieux, à part quelques petits problèmes d'ordre technique et administratif, comme le disait le ministre Boudria, nous mènera à une situation désastreuse.

Le mécontentement et le désintérêt vis-à-vis de la politique n'a jamais été aussi fort au Canada et le fait que le parti qui gouverne actuellement le pays s'est fait élire avec à peine 38 p. 100 des voix en est la preuve. Il y a bien d'autres aspects de la crise politique dont je ne parlerai pas. Je vais passer à mon deuxième point.

Ce que nous proposons c'est de rejeter le projet de loi C—2 et d'apporter immédiatement les modifications suivantes à la loi électorale du Canada.

Tout d'abord, il faudrait appliquer la décision rendue par le juge Molloy concernant l'enregistrement des partis politiques. Cela réglerait les problèmes qui ont été portés devant les tribunaux en ce qui concerne la liberté d'association et la liberté d'expression. À cet égard, nous trouvons très regrettable que le gouvernement libéral ait décidé d'en appeler de la décision du juge Molloy. Cela montre le bien-fondé des arguments que madame la juge a invoqués pour expliquer pourquoi elle ne renvoyait pas la question au Parlement. Elle a souligné que rien ne prouvait que la réforme de la loi avait pour effet de permettre à plus de citoyens d'enregistrer un parti politique et que les circonstances étaient mal choisies pour différer un processus de prétendue réforme gouvernementale.

En deuxième lieu, il faudrait remédier à la violation du principe de l'égalité en modifiant les dispositions concernant la répartition du temps d'antenne aux partis politiques. Il est curieux que l'on se serve de l'argument de l'équité pour justifier une répartition inégale de ce temps d'antenne. Les partis politiques représentés à la Chambre des communes considèrent que l'équité qui, normalement, est assurée par un ensemble de lois qui visent à corriger les inégalités sociales, signifie qu'il faudrait accorder la préférence à ceux qui ont le plus de pouvoir et de privilèges.

Troisièmement, il faudrait mettre un terme à la violation de la liberté de conscience et aux principes de l'égalité devant la loi en cessant immédiatement d'utiliser les deniers publics pour financer les partis politiques. Tant que l'État financera certaines organisations politiques et non pas toutes et certaines plus que d'autres, on continuera de violer les droits politiques.

Quatrièmement, il faudrait donner suite à la proposition de M. Kingsley qui consiste à mettre fin à la nomination partisane des agents électoraux.

Pour ce qui est du troisième point, les changements que nous proposons pour remédier à cette grossière violation des droits politiques et civils ne suffiront évidemment pas à donner aux Canadiens une nouvelle loi électorale qui tiendra compte des exigences d'une démocratie moderne.

• 1620

Nous proposons que l'on commence immédiatement à élaborer une nouvelle loi. Cette nouvelle loi doit reposer sur des principes reconnaissant les libertés et les droits fondamentaux des Canadiens, tels qu'exprimés dans la Charte canadienne des droits et libertés. On doit aussi veiller à ne pas enfreindre d'autres droits de la personne et à ce que les droits individuels et collectifs soient en harmonie avec l'intérêt général de la société.

Il conviendrait de faire précéder la rédaction de cette nouvelle loi d'une vaste consultation populaire, afin de s'assurer d'une participation maximale des citoyens à la formulation de ses dispositions. Le processus électoral doit donner aux citoyens le pouvoir d'orienter la politique, non pas aux partis politiques qui ne les représentent pas.

À cet égard, je pense qu'il faudrait, au départ, tenir compte de la question de la représentation proportionnelle dans le processus de rédaction de la nouvelle loi. Beaucoup de travail a déjà été accompli et les conditions justifient qu'on se mette immédiatement à la tâche. Néanmoins, la décision finale revient aux électeurs. C'est à eux de décider quelle loi électorale ils veulent pour le XXIe siècle.

Pour conclure—et je sais que j'ai dépassé le temps qui m'était imparti—je crois extrêmement important que nous entrions dans le prochain millénaire en renforçant la démocratie. S'il est vrai que le Canada est le meilleur pays au monde, que nous avons la démocratie la plus avancée, si les défauts du processus démocratique qui conduit à une dictature des partis ne sont non seulement préservés mais consolidés, la crise politique actuelle va sans doute s'aggraver au Canada.

Personne ici ne parle de jeter le bébé avec l'eau du bain, mais si vous conservez l'eau du bain alors qu'elle est souillée par la corruption et le mécontentement, vous courrez au désastre. Si l'on ne reconnaît pas le bébé, si on ne l'aide pas, si on ne lui donne pas la possibilité de grandir et de devenir un adulte, ceux qui prennent ces mesures en paieront le prix.

Merci.

Le président: Merci.

Chers collègues, nous allons maintenant passer aux questions. Je vais commencer par M. White pour un tour de cinq minutes, après quoi je donnerai la parole à M. Bergeron, pendant cinq minutes puis ce sera au tour d'un représentant du gouvernement, pendant cinq minutes. On m'a prévenu que M. West devait nous quitter vers cinq heures. Les autres témoins peuvent rester un peu plus longtemps. Je suis donc prêt à vous laisser adresser des questions à M. West avant son départ. Ainsi, il aura largement l'occasion de répondre.

Oui, monsieur White.

M. Ted White (North Vancouver, Réf.): Monsieur le président, je précise que j'ai une question pour M. West et aussi pour les autres. Ainsi nous sommes d'accord, si nous avons des questions à poser à M. West, peut-être pourrions-nous le faire rapidement au premier tour et passer ensuite aux autres témoins.

Le président: Est-ce d'accord? Oui? D'accord, monsieur White.

M. Ted White: J'ai une ou deux brèves questions à vous poser, monsieur West. La première porte sur l'idée que vous avez proposée pour le remboursement. Vous dites qu'il faudrait l'accorder en fonction du nombre de suffrages obtenus, à raison d'un certain montant par voix au lieu de se baser sur l'obtention d'un certain pourcentage à partir duquel vous avez droit à un montant forfaitaire de 50 p. 100. L'un des partis à la Chambre serait-il d'accord pour apporter un amendement de ce genre à la loi?

Deuxièmement, vous avez émis une autre idée intéressante à savoir qu'un organisme électoral enverrait un feuillet d'information ou une brochure à chaque foyer pour lui faire connaître le nom des candidats et leur programme électoral. Vous avez cité un exemple à Vancouver. Les élections municipales ont lieu à date fixe et nous savons ainsi longtemps à l'avance quand elles doivent se dérouler. Cela permet aux gens de préparer ce genre de documentation. Il n'y a pas de date fixe pour les élections fédérales et nous ne savons donc pas quand elles auront lieu. Les campagnes électorales sont de très courte durée et je ne suis donc pas certain que ce système pourrait être mis en place. Préconisez-vous une date fixe pour les élections?

Telles sont mes deux questions.

M. Julian West: Ce sont d'excellentes questions et je vais essayer d'y répondre de mon mieux.

Un parti représenté à la Chambre des communes s'est-il engagé à appuyer ma suggestion? Je n'ai jamais entendu un parti proposer le remboursement en fonction du nombre de voix, mais c'est peut-être que je n'ai pas regardé au bon endroit. Cela figurait dans le rapport de la Commission Lortie, c'est dans Consolider les assises. C'est certainement pratique courante dans de nombreux autres pays. En Europe, c'est la façon dont procèdent la plupart des démocraties. J'ignore ce qu'il en est en Nouvelle-Zélande, mais c'est certainement ce qui se fait aussi en Australie.

• 1625

Il est facile de savoir quelles sont les partis qui en profiteraient le plus. Ce sont ceux qui ont obtenu énormément de voix, mais qui n'ont pas été remboursés. Je suppose que cela s'appliquerait au NPD. Je ne m'attends pas nécessairement à ce que les partis le proposent en raison de leurs propres intérêts, mais c'est une bonne idée. J'aurais aimé entendre leur point de vue à ce sujet, mais j'ignore ce qu'ils en pensent.

Quant aux dates d'élections fixes, je n'avais pas vu ce problème. Bien entendu, je m'imaginais que les partis pourraient préparer leur programme électoral et le soumettre d'avance au directeur général des Élections afin qu'on puisse simplement l'imprimer lors de l'émission du bref. Comme la liste électorale est déjà prête, ces documents pourraient être envoyés très rapidement. C'est leur compilation qui poserait sans doute un problème.

Mais vous avez parfaitement raison. Les autres pays que j'ai mentionnés tiennent leurs élections à dates fixes, comme de nombreux États américains. Les États-Unis sont un autre bon exemple étant donné que ce système existe dans certains États. J'aimerais pouvoir trouver mon exemple de la Californie car il est excellent. On le fait pour les élections au niveau de l'État de même qu'au niveau local. Bien entendu, les dates d'élections sont fixes.

Mon parti est pour des dates fixes. Comme de nombreux parlementaires, sans doute, j'ai un attachement sentimental envers le système parlementaire. C'est dans ce système que j'ai grandi et j'aime un bon nombre de ses caractéristiques. J'aime l'idée que le gouvernement puisse tomber à tout moment. Quand on se passionne pour les élections, c'est une chose qui vous tient en haleine. C'est une chose que j'aime, mais maintenant que j'ai vécu plusieurs élections comme membre d'un petit parti, je me dis qu'une date fixe présenterait des avantages énormes.

Il est difficile de recruter des candidats lorsqu'on n'a pas d'argent pour les soutenir ou financer leur campagne. Comme nous ne les finançons pas, en fait, nous demandons des bénévoles. Lorsque nous essayons de recruter les candidats en Saskatchewan, par exemple, les gens nous demandent quel jour les élections auront lieu, car c'est important pour l'agriculture. Nous leur disons que nous n'en savons rien car il n'y a pas de date fixe.

Il est donc difficile de recruter des candidats. Il est difficile de planifier, de financer une campagne électorale, de louer des locaux et de faire toutes ces choses lorsque vous ignorez quand auront lieu les élections. Une date fixe présenterait donc un gros avantage pour les petits partis. Ce n'est pas une chose que j'ai préconisée, mais nous serions pour.

M. Ted White: J'en ai terminé avec M. West, merci.

Le président: Monsieur Bergeron.

[Français]

M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Étant donné qu'on a fait allusion aux positions des différents partis sur la question, je veux signaler que, comme M. West, il m'apparaît important que l'État encourage la participation politique par un remboursement des dépenses électorales des formations politiques. La question est maintenant de savoir de quelle façon il faut le faire. Est-ce qu'on conserve la formule actuelle de 50 p. 100 pour les candidats qui obtiennent 15 p. 100 du vote et de 22,5 p. 100 pour les partis qui obtiennent 15 p. 100 du vote, ou devrait-on plutôt se diriger vers une formule comme celle que vous proposez? Je veux être certain de bien comprendre le mécanisme que vous proposez.

Est-ce à dire que dans chaque circonscription, les candidats seraient remboursés en fonction du pourcentage de votes qu'ils obtiendraient, d'une part, et qu'à l'échelle pancanadienne, les formations politiques recevraient un remboursement équivalant au pourcentage total des votes qu'ils auraient obtenus sur l'ensemble du territoire canadien? Ou est-ce que ce serait plutôt une moyenne par région? Comment pourrait-on fonctionner au niveau du remboursement des partis politiques par rapport au remboursement des candidates et candidats dans chacune des circonscriptions?

M. Julian West: On parle actuellement d'un remboursement partiel selon le nombre de votes. Je n'ai pas réfléchi pour voir s'il fallait rembourser à la fois les candidats et les partis. Il est possible qu'il faille que le remboursement s'effectue à un niveau ou à l'autre et que ce soit aux partis de voir comment cela serait divisé.

[Traduction]

Je vais passer à l'anglais, car ce sera plus rapide.

Je pense à la situation dans un pays comme l'Allemagne, par exemple, où il y a un remboursement par suffrage obtenu. Comme il s'agit d'un système proportionnel, le vote le plus important en Allemagne n'est pas le vote pour le candidat, mais le vote pour la liste du parti. Je suppose que les candidats n'obtiennent aucun remboursement et que tout l'argent est canalisé vers l'organisation centrale du parti.

Au Canada, les voix en faveur d'un candidat ont beaucoup plus d'importance dans les circonscriptions locales et il est donc peut-être plus logique de faire le remboursement également au niveau local. Je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas avoir les deux. Chaque candidat pourrait peut-être toucher un dollar par voix obtenue et le parti un deuxième dollar qui irait dans un fonds national.

• 1630

[Français]

M. Stéphane Bergeron: Actuellement, on utilise cette formule. Les candidats et les candidates dans les circonscriptions...

M. Julian West: Oui, oui.

M. Stéphane Bergeron: ...qui obtiennent au moins 15 p. 100 du vote obtiennent un remboursement de 50 p. 100 de leurs dépenses. Au niveau national, lorsqu'ils obtiennent au moins 15 p. 100 du vote, les partis obtiennent un remboursement de 22,5 p. 100 de leurs dépenses.

M. Julian West: Actuellement, les candidats doivent obtenir 15 p. 100 des votes dans leur circonscription pour être remboursés de 50 p. 100 de leurs dépenses. Au niveau national, il faut obtenir 2 p. 100 des votes nationaux ou 5 p. 100 des votes dans la totalité des circonscriptions où on présente des candidats.

M. Stéphane Bergeron: Ah, d'accord.

M. Julian West: Dans ce cas, c'est 22,5 p. 100. Il est possible d'avoir un remboursement plus équitable aux deux niveaux. On peut continuer à rembourser aux deux niveaux.

[Traduction]

Je devrais peut-être m'attarder un peu plus sur les systèmes de remboursement que nous avons proposés. Je me réjouis de pouvoir en parler avec le député, car c'est notre but ultime.

Dans mon exposé, j'ai surtout parlé du mode de remboursement que nous avons maintenant. Ce n'est pas bien bon pour notre parti étant donné que nous dépensons très peu d'argent alors que nous obtenons beaucoup de voix. Nous en obtenons plus par dollar dépensé que tout autre parti.

C'est une question que nous tenons à soumettre au Parlement à cette étape-ci de la réforme électorale. Il me semble plus réaliste, sur le plan politique et aussi plus utile de mettre l'accent sur des changements assez mineurs et que le ministre pourrait envisager. On pourrait être d'accord pour dire que le Parti libéral récupérera 50 p. 100 de ses dépenses aux frais du trésor public et que, dans ces conditions, pourquoi ne pas rembourser 50 p. 100 de ses dépenses au Parti vert au lieu de ne rien lui donner.

En fait, pour placer les choses dans leur contexte, je dirais que la presse nationale s'est beaucoup intéressée à l'idée qu'au lieu de 22,5 p. 100, le pourcentage pourrait peut-être être relevé à 30 p. 100 si un parti a suffisamment de femmes comme candidates. Qu'adviendra-t-il de nous si nous avons suffisamment de candidats du sexe féminin? Si nous avons 301 candidats donc 201 sont des femmes, allons-nous passer de 0 p. 100 a 7,5 p. 100? Cela montre simplement à quel point le gouvernement est dans les nuages. Il se demande si le parti au pouvoir devrait obtenir un remboursement de 22,5 p. 100 ou de 30 p. 100. C'est bien joli, mais il y a quand même cinq partis qui n'obtiendront pas un sou de remboursement.

En fait, je trouve très intéressant que les Marxistes-Léninistes se soient opposés à l'idée de rembourser un montant supplémentaire si l'on nomme des femmes comme candidates. Leur parti est celui qui a eu le plus fort pourcentage de candidatures féminines, soit 37 p. 100, suivi du NPD, avec 35 p. 100 et de nous, avec 33 p. 100.

Dois-je me limiter aux cinq minutes dont dispose le député?

Le président: Nous sommes très souples étant donné les circonstances.

M. Julian West: Vous êtes assez souples? Très bien.

J'attire simplement votre attention sur deux tableaux que j'ai inclus à la fin de mon mémoire, à la dernière minute. L'un d'eux illustre assez ce que je viens de dire. J'ai classé l'ensemble des candidats selon le montant d'argent qu'ils avaient dépensé, en commençant par celui qui avait obtenu le plus gros pourcentage de suffrages. Les 301 premiers candidats sur la liste sont ceux qui se sont faits élire, et les autres, ceux qui n'ont pas été élus.

Vous pouvez voir, d'après ce tableau, que les gens qui se fait élire ont dépensé beaucoup plus que les autres. Il y a quelques exceptions. Quelques candidats indépendants ont obtenu 1 p. 100 des suffrages en dépensant 40 000 $, mais cela entre dans la moyenne. Vous constatez que cet effet s'atténue. Ceux du haut sont les gens qui ont obtenu un remboursement tandis que les autres n'y ont pas eu droit. En fait, vous prenez aux pauvres pour donner aux riches.

En dessous du tableau, vous pouvez voir les montants totaux dont il est question ici. Vous voyez les 16 millions de dollars qui sont remboursés aux candidats. Il y a aussi les 2 millions supplémentaires dont j'ai parlé. Puis vous avez des tableaux indiquant comment cet argent serait divisé entre les partis. On voit que sur les 2 millions dont je parle, près d'un million de dollars vont au NPD et près d'un million au Parti conservateur étant donné que ces partis ont de nombreux candidats qui dépensent beaucoup d'argent, mais qui obtiennent moins de 15 p. 100 des voix. Ces personnes sont d'importants candidats pour leur parti. Les nôtres sont tout en bas et ne dépensent presque rien.

• 1635

Nous demandons seulement des dizaines de milliers de dollars pour notre parti et non pas un million de dollars. Nous disons seulement que si, le Parti libéral, obtient 6,6 millions et le Parti réformiste 3 millions, pourquoi ne pas nous accorder 22 000 $? C'est le genre de sommes dont nous parlons. C'est le montant d'argent que ce projet de loi a la mesquinerie de nous enlever.

J'ai seulement une chose à ajouter. Certaines personnes n'aiment pas l'idée que des candidats qui dépensent 40 000 $ puissent obtenir 2 p. 100 des voix et se font rembourser 20 000 $. Que vont-ils faire de cet argent? Ils ne vont jamais se représenter, n'est-ce pas?

Pour éviter cela, j'envisage d'imposer un plafond afin que ceux qui obtiennent moins de 15 p. 100 des voix soient quand même pénalisés d'une certaine façon. Ils obtiendront un remboursement de 50 p. 100, mais pas jusqu'au maximum de la limite de dépenses. Ils pourront dépenser jusqu'à la limite fixée, mais ils n'auront droit qu'à un remboursement moins important. Je suggère un plafonnement. Quiconque obtiendrait moins de 5 p. 100 des voix, ne récupérerait que 1 000 $; jusqu'à 10 p. 100, le remboursement serait de 5 000 $ et, jusqu'à 15 p. 100, il serait de 10 000 $. Si vous le faites, au lieu de coûter 2,5 millions de plus, cette mesure coûterait seulement un peu plus de la moitié.

C'est parce qu'il n'y aurait de plafond que pour les candidats dépensiers des gros partis et les indépendants, et que ce plafond ne s'appliquerait presque jamais aux plus petits partis. Ainsi, au lieu de donner un million de dollars supplémentaire aux Néo-démocrates et aux Conservateurs, ils auraient 500 000 $, et nous n'aurions toujours que nos 20 000 $, ou ce que nous demandons.

Je m'arrête ici.

[Français]

M. Stéphane Bergeron: J'aimerais faire un court commentaire, monsieur le président. Je voudrais remercier M. West d'avoir apporté une précision concernant le pourcentage requis au niveau national pour les remboursements. Je pense qu'il y a eu une petite méprise de ma part, un petit lapsus. Je voulais simplement indiquer que je trouve également intéressante l'idée que le directeur général des élections, dans un document très court, puisse informer la population des différentes options en présence.

Cela dit, il faudra peut-être faire attention dans les circonscriptions où ce ne sont pas tous les partis qui présentent des candidats: il faudrait que seuls les partis en présence soient présentés par le directeur général des élections. Comme vous l'avez bien indiqué, c'est déjà quelque chose qui est fait, notamment par le directeur général des élections du Québec. Je pense qu'il serait bon que la pratique soit étendue à l'échelle canadienne.

[Traduction]

Le président: Merci pour ce court commentaire.

Madame Parrish, une courte ronde de questions adressées à M. West.

Mme Carolyn Parrish (Mississauga-Centre, Lib.): Je veux qu'une chose soit bien notée dans le compte-rendu de nos délibérations: je ne veux qu'on me considère comme l'un des Libéraux qui dépense beaucoup d'argent. En effet, juste avant les élections de 1997—je ne savais pas que le premier ministre s'apprêtait à déclencher des élections—j'ai travaillé à une campagne de levée de fonds pour le cancer dans ma circonscription et j'ai fait appel aux plus généreux de mes donateurs. Et le premier ministre déclenche les élections. J'ai envoyé une lettre à tout le monde et j'ai réussi à recueillir environ 13 000 $. J'en ai dépensé 16 000 $. J'ai fait un budget en fonction de ce que j'avais et je n'ai pas dépensé un sou de plus.

Lorsqu'est arrivé le remboursement, il a été envoyé à mon association de comté. Elle l'a utilisé pour promouvoir ses intérêts politiques, comme pour se rendre à des congrès, participer à d'autres activités et aider financièrement les gens de notre circonscription qui ne pouvaient se le permettre.

Je n'aime pas qu'on donne l'impression que tous les Libéraux, tous les Conservateurs et tous les Néo-démocrates sont ceux qui dépensent beaucoup d'argent. C'est faux. Même si j'avais eu davantage d'argent, je ne l'aurais pas dépensé. Ce n'est pas mon genre.

Vous ne cessez de dire que vous obtenez une part des suffrages, que vous en avez obtenu X nombre au pays, que ces électeurs croient vraiment au Parti vert. Lorsque je rencontrais les gens, dans ma circonscription et que je leur demandais comment ils avaient voté aux élections fédérales, par exemple, beaucoup d'entre eux m'ont dit qu'ils avaient plus ou moins annulé leur vote, qu'ils avaient voté pour le candidat qui n'appartenait à aucun parti.

Que faites-vous de ceux-là? Nous rembourserions le Parti vert et le Parti Marxiste-Léniniste pour un tas d'électeurs qui se moquent tout à fait de savoir si vous existez ou pas. Ils vont au bureau de scrutin et ils ne font que... Une femme tient mordicus à voter, elle amène son mari en le tirant par l'oreille, puis il coche n'importe quelle case, sur le bulletin de scrutin. Allez-vous leur demander de préciser leur intention, lorsqu'ils vont voter? Je ne vois pas comment on pourrait le faire.

Vous affirmez que s'il y a un certain nombre de partisans du Parti vert, une certaine somme d'argent devrait aller aux candidats de ce parti. Sans vouloir vous appeler des partis accessoires, je crois que beaucoup d'entre vous obtenez bon nombre de suffrages parce que des électeurs sont mécontents de nous ou parce qu'ils ne comprennent pas les questions en jeu, et ils ne veulent pas choisir un des candidats des principaux partis, alors ils votent n'importe comment.

M. Julian West: Eh bien, je ne sais pas comment vous répondre. En fait...

Mme Carolyn Parrish: Je ne sais non plus comment répondre à beaucoup des exposés présentés ici aujourd'hui, parce que je n'arrive pas croire que des lobbyistes... c'est ce que vous êtes, aujourd'hui. Vous êtes ici pour nous aider à apporter de petits changements au projet de loi.

En passant, je suis d'accord avec vous, pour ce qui est de l'argent supplémentaire dans le cas des femmes candidats. Je n'aime pas cette idée. Ce n'est qu'un petit geste symbolique.

• 1640

Vous êtes ici pour nous aider. Croyez-le ou non, nous sommes à l'écoute. L'un de vous dit que c'est un projet de loi corrompu, un autre dit qu'il faut le rejeter complètement... jusqu'à il y a quelques minutes, vous étiez assez sensés. Vous êtes tous les trois venus ici vous en prendre à nous: supprimez ce projet de loi; vous êtes tous corrompus; vous faites tous un mauvais travail. Comment pouvez-vous vous attendre à ce que nous réagissions de manière rationnelle?

M. Julian West: Depuis quand ne suis-je plus sensé?

Mme Carolyn Parrish: Depuis quelques minutes.

M. Julian West: Vous voulez dire cinq minutes?

Mme Carolyn Parrish: Vous avez encore employé le mot «corrompu».

Nous ne sommes pas corrompus. Nous faisons de notre mieux.

M. Julian West: Sauf votre respect, je ne crois pas avoir employé le mot «corrompu».

Mme Carolyn Parrish: L'un d'entre vous l'a fait.

Mais bon, Julian, ne coupons pas les cheveux en quatre. Vous devenez plus agressif et vous laissez entendre que nous sommes injustes, que nous sommes méchants, que vous êtes opprimés, que vous êtes purs et beaux.

M. Julian West: Je suis désolé si j'ai semblé agressif, mon intention, en venant ici aujourd'hui, était certainement de me concentrer sur un certain nombre de petits changements au projet de loi que nous pouvions pouvoir obtenir. Je pense que nous pourrions avoir pour ces changements l'appui non seulement de l'opposition, mais aussi de députés ministériels.

Je veux vraiment travailler avec vous, mais sauf votre respect, il est vrai que nous sommes opprimés. Nous avons ce système qui handicape les petits partis. Si vous l'ignoriez, ça ne fait que montrer à quel point les problèmes des petits partis sont méconnus.

Mme Carolyn Parrish: Mais en 1993, ce système a donné tout le temps d'antenne aux Conservateurs, de même que beaucoup d'argent, de même que les directeurs de scrutin, et nous les avons tout de même balayés.

M. Julian West: Ils ont obtenu 19 p. 100 des voix.

Mme Carolyn Parrish: Nous les avons tout de même balayés.

M. Julian West: Ils n'ont obtenu que deux sièges parce que le système n'offre rien au parti qui obtient 19 p. 100 des voix, si elles sont disséminées d'un bout à l'autre du pays.

Mme Carolyn Parrish: Un résultat de 19 p. 100, c'est assez mauvais quand on avait droit à tous ces avantages.

M. Julian West: Écoutez, qu'un parti ait de bons ou de mauvais résultats aux élections n'a rien à voir avec le fait que certains partis sont tout simplement opprimés, pour reprendre votre expression.

En 1974, il n'y avait que quatre partis en lice. En 1993, il y en avait 14. Des gens fondent de nouveaux partis, qui croissent. Des partisans les alimentent pour qu'ils deviennent de plus grands partis. C'est ce qu'a fait le Parti réformiste. Il a commencé tout petit. Aux élections de 1988, les Réformistes ont séduit 5 p. 100 de l'électorat albertin et en 1993, ils étaient plus gros et ont continué de croître.

C'est ce que nous essayons aussi de faire, mais le système ne cesse de nous en empêcher. La preuve, à mes yeux c'est qu'on soit passé de 14 à 10 partis au Canada. Cinq d'entre-eux ont perdu leur enregistrement parce qu'ils ne se sont pas conformés à la Loi électorale. Ils veulent se présenter aux élections, mais ils ne peuvent satisfaire à la loi et se présenter aux élections. Ils peuvent avoir des partisans mais...

Mme Carolyn Parrish: Si vous permettez, monsieur le président...?

Pour reprendre votre argument, le Parti réformiste avait quelque chose qui a séduit bon nombre de gens—il se trouve que je ne suis pas d'accord avec eux—et ils n'avaient pas besoin d'être couvé. Ce parti a poussé sans engrais artificiel et sans arrosage. Il a su séduire l'électorat et maintenant, il se retrouve là, devant nous.

M. Julian West: Oui.

Mme Carolyn Parrish: Le parti a cru rapidement non pas parce que la Loi électorale le permettait, mais parce qu'il a trouvé l'étincelle qui a séduit les gens. Sans cette étincelle, vous n'aurez pas beaucoup de partisans.

M. Julian West: Bien, mais rappelez-vous que je ne demande pas une courte échelle artificielle pour me mettre sur la sellette, jusqu'à ce que nous faisions une percée. Tout ce que je demande, c'est que vous cessiez de travailler dans le sens contraire, que vous nous donniez les avantages que vous vous accordez à vous-même.

Vous rédigez un projet de loi qui dit que le Parti libéral devrait obtenir certaines sommes et que le Parti vert en obtiendra tant. Quelle que soit la mesure, vous vous accordez plus par vote qu'à nous.

Je suis abasourdi à vous entendre dire qu'on ne peut rembourser les partis en fonction du nombre de votes qu'ils obtiennent, parce que des gens pourraient aller voter pour un parti qu'ils n'appuient pas. On présume que si quelqu'un vote pour nous, il nous soutienne. Autrement, pourquoi tiendrait-on des élections? Je suis étonné de vous entendre parler ainsi, puisque cela laisse entendre que certains n'ont aucun respect pour le processus électoral, puisque des électeurs votent n'importe comment.

Mme Carolyn Parrish: Je n'ai pas dit «tous les électeurs». J'ai dit «certains électeurs» et j'ai dit qu'il ne faut pas récompenser...

M. Julian West: Et je pourrais vous dire qu'il y a bon nombre d'électeurs qui ont voté pour le Parti libéral, sans vraiment appuyé ce parti, mais simplement pour empêcher d'autres partis de se faire élire. Les gens votent de manière stratégique. Si j'avais un dollar pour chaque électeur qui m'a dit: «j'appuie le Parti vert, mais je ne vote pas pour vous»...

• 1645

Aux élections de 1996 en Colombie-Britannique, nous avons fait un sondage auprès de nos propres membres, auprès des gens qui contribuent à la caisse du parti. Sur ce nombre, 50 p. 100 nous ont dit qu'ils voteraient pour un autre parti, le jour des élections, parce qu'en votant pour nous, ça aurait certes un effet, mais ça ne permettrait l'élection de personne, et qu'il fallait qu'ils se servent de leurs voix de manière stratégique.

Je vous dirais donc qu'il y a beaucoup plus de votes de personnes qui nous appuient qui nous sont arrachées par le système, que de votes de personnes qui ne nous appuient pas et qui votent pour nous, par hasard—il y en a beaucoup, beaucoup plus.

Peut-être que si les électeurs savaient, comme c'est le cas en Allemagne, en Hollande ou dans tout autre pays européen, que s'ils votent pour un parti dont le candidat n'est pas élu, au moins, ce parti recevra 5 $, disons un dollar par année de la législature... C'est ce que l'on fait au Québec, en passant.

[Français]

C'est le cas au Québec et au Nouveau-Brunswick, où on a le remboursement par vote, je crois.

[Traduction]

Si les électeurs savaient que leurs votes représentaient un appui concret pour le parti, davantage de nos partisans iraient peut-être voter en se disant: «je vote pour le Parti vert. Mon vote n'aidera pas à le faire élire, mais au moins, il aura les cinq dollars».

Le président: Merci.

Mme Di Carlo a manifesté le désir d'intervenir, rapidement, puis nous passerons à M. Solomon, pour d'autres questions.

Madame Di Carlo.

Mme Anna Di Carlo: Je voulais simplement vous faire part de mon point de vue sur toute cette discussion qui vient d'avoir lieu.

Tout d'abord, je suis aussi très choquée que vous puissiez faire ce genre de déclaration—non pas que vous le disiez, puisque pour être bien honnête...

Le président: Je crains que cela tourne à une discussion à deux.

Mme Anne Di Carlo: Non, ce n'est pas une discussion.

Le président: Si vous le voulez, je vous invite à présenter une courte intervention se rapportant à ce que M. West a dit, et à le faire par l'intermédiaire de la présidence. Autrement, nous donnerons la parole à M. Solomon, pour d'autres questions.

Vous aurez largement l'occasion de présenter vos arguments.

Mme Anna Di Carlo: Je m'excuse; vous dites que je devrais m'exprimer au sujet de ce que M. West a dit?

Le président: J'ai su que vous aviez quelque chose à dire.

M. Julian West: Il ne me reste que 15 minutes, puis vous en aurez l'occasion.

Mme Anna Di Carlo: Oh, désolée. C'est bien.

M. Julian West: J'ai un avion à prendre.

Mme Anna Di Carlo: Bien sûr, je n'ai pas d'objection.

Le président: Mais je vous promets que je vous laisserai tout le temps nécessaire pour parler des questions qui ont été soulevées.

La parole est donc à M. Solomon pour une ronde de questions.

M. John Solomon (Regina—Lumsden—Lake Centre, NPD): Merci beaucoup.

Pour commencer, je tiens à dire à M. West et à ses collègues que leurs exposés étaient importants pour moi et pour mon parti aussi. Le Nouveau Parti démocratique est depuis longtemps l'un des petits partis à la Chambre des communes et il nous est toujours difficile de diffuser notre philosophie dans un si grand pays, alors que nous sommes si nombreux et que nous avons si peu de ressources.

Je pense que votre exposé, monsieur West, est juste.

Pour répondre un peu aux commentaires de Carolyn Parrish, il faut dire que s'il y a une participation de plus en plus faible, à chacune des élections, c'est en partie à cause de l'insatisfaction des Canadiens au sujet des choix qu'on leur offre. Ce n'est pas parce qu'il y a d'autres partis qui les attirent vraiment, mais ils sont très insatisfaits du statu quo. C'est la raison de la création du Parti réformiste. Il n'y a là rien de nouveau pour qui que ce soit, c'est un fait historique.

Si on veut apporter d'importants changements à la Loi électorale du Canada—c'est-à-dire qu'on la refonde pour la première fois depuis 1972, je crois—, il faudrait alors que ces changements tiennent compte de la réalité et de certains défis auxquels sont confrontés les parlementaires. L'un de ces défis, c'est d'augmenter la participation des gens dans le système électoral. Comment convaincre les gens de l'importance du système électoral et du Parlement, à une époque où cette pertinence est de moins en moins évidente.

J'aime beaucoup les propositions que vous avez faites, non pas parce que j'en ai moi-même fait la promotion, ni parce que mes collègues du parti ou que le parti lui-même les ont faites valoir promotion, mais parce qu'elles pourraient permettre de rendre le système plus juste.

J'ai deux questions. L'une se rapporte aux incidences financières et aux tableaux qui ont été déposés. Je vous en remercie. J'apprécierais aussi, monsieur West, que vous nous donniez, peut-être plus tard, par écrit, par l'intermédiaire de la greffière, des chiffres se rapportant à ces tableaux et peut-être une copie du tableau.

M. Julian West: [Note de la rédaction: Inaudible]

M. John Solomon: Nous avons ces tableaux? Je ne les ai pas.

Une voix: C'est à la dernière page.

M. John Solomon: Ah, oui, je les ai. Désolé. C'est à la fin. Bien alors vous avez répondu à cette question.

Voici mon autre question. J'aimerais connaître vos idées au sujet de la question de la radiodiffusion. Que proposez-vous pour donner des chances égales à tous, pendant une campagne électorale?

• 1650

M. Julian West: Il y a là pour moi beaucoup de matière dont je pourrais parler. Voyons si je peux tout dire.

Tout d'abord, vous dites qu'il ne faut pas avoir peur de modifier la loi de fond en comble, puisqu'on ne le fait que tous les 30 ans. Je suis tout à fait d'accord avec vous. Je pense qu'on aurait dû procéder à une réforme plus en profondeur de la loi électorale que ce qui a été fait. Je crois aussi qu'il faut être réaliste et que le gouvernement souhaite que cette loi soit en vigueur à temps pour des élections anticipées, si cela devait se produire. J'essaie donc de me concentrer sur des questions qui recevront l'aval du gouvernement, pour ne pas retarder indûment l'adoption du projet de loi.

Mais vous avez tout à fait raison, peut-être que si nous avions été là il y a deux ans, à la dernière ronde... L'une des recommandations que j'ai rédigées mais dont je n'ai pas parlé portait que les petits partis, ici présents, devraient peut-être être des participants à part entière dans ce processus. Au lieu de venir une seule journée, nous devrions peut-être être là tous les jours. Autrement, après deux ans d'examen de la loi, un des députés ici pourra dire qu'il ou elle est étonné que nous nous sentions si opprimés. Manifestement, cet étonnement provient du fait que vous ne nous parlez pas beaucoup. Nous nous sentons toujours comme ça.

Alors oui, vous avez absolument raison. Il ne faut pas craindre d'apporter de grands changements.

Ce n'est peut-être pas très pertinent, mais je vais parler d'un de ces changements, puisqu'il vient des Néo-démocrates. À la Chambre des communes, la semaine dernière, Nelson Riis a proposé qu'on abaisse l'âge de voter. Nous l'appuyons de tout notre coeur. Nous pensons que si une personne s'estime assez âgée pour voter, si elle est suffisamment informée pour voter, alors elle est en âge de voter. Au Canada, nous permettons à une personne de 16 ans de faire bien des choses—conduire une voiture, par exemple—et beaucoup d'entre elles ont des opinions, et ces opinions pourraient étonner des personnes plus âgées. Ces adolescents font parti du tissu social du pays et je crois vraiment qu'il faut les écouter.

Je sais que M. Harvey en a aussi parlé à la Chambre, et nous nous sommes vraiment réjouis de cette observation.

Je vais faire de mon mieux pour vous fournir d'autres documents écrits plus tard. En fait, à la suite de cela, j'ai préparé d'autres tableaux sur les dépenses, que je pourrai vous fournir plus tard et que vous pourrez distribuer au comité si vous le désirez. Je peux aussi décrire en détail le genre de choses que j'envisagerais pour utiliser plus efficacement le temps d'antenne. Vous le mentionnez de façon tout à fait opportune, car je m'entretenais avec l'un de vos collègues—il s'agit en fait d'un des adjoints parlementaires du Nouveau Parti démocratique—cet après-midi, et nous avons reconnu qu'il y aurait moyen de rendre beaucoup plus efficace la façon dont la publicité télévisée est présentée aux électeurs.

Je crois qu'auparavant au Canada au lieu de diffuser des annonces de 30 secondes réparties tout au long de la journée, il y avait un certain bloc de publicité certains soirs de la semaine pendant la campagne électorale où l'on pouvait pendant une demi-heure regarder des émissions à caractère loi électoral destinées à tous les partis, et beaucoup de Canadiens ne manquaient pas de le faire. Il serait beaucoup plus efficace d'avoir notre publicité radiodiffusée à un moment donné dans le cadre d'un programme publicitaire que les électeurs regarderaient précisément pour cette raison plutôt que de diffuser ces messages à trois heures du matin ou à trois heures de l'après-midi, quand nos partisans ne savent peut-être pas que ce serait le moment de nous écouter.

Je me trouvais au Royaume-Uni cet été juste avant les élections au Parlement européen, et l'on accordait gratuitement cinq minutes à chaque parti. Les cinq minutes étaient accordées en bloc, et le message passait à 20 heures, juste avant le bulletin de nouvelles du soir. La population surveillait ces messages et les journaux en parlaient le lendemain, pour vanter ou critiquer l'annonce.

Il se trouve que le Parti vert avait consacré beaucoup d'effort à la préparation de ces cinq minutes de temps d'antenne et que ce sont ses messages qui ont été les mieux reçus de tous. Les gens disaient que c'était là un nouveau parti aux idées fraîches.

C'était donc là un moyen de faire passer son message avec simplement cinq minutes de temps d'antenne. Au lieu de le répartir en petits segments de 30 secondes que les gens ne regardent pas ou ne voient pas, peu importe, on s'y prenait de façon très efficace. Votre collègue et moi en avons parlé, et nous estimons tous les deux que ce serait une excellente idée de revenir à des émissions d'une demi-heure une fois, deux fois ou peut-être trois fois au cours d'une période électorale, où l'on diffuserait des messages de tous les partis qui souhaiteraient participer et en utiliser ainsi leur temps d'antenne gratuit.

Ai-je répondu à toutes vos questions?

Une voix: Je crois.

M. Julian West: Très bien.

Le président: Vous m'avez éclairé.

M. Julian West: Très bien.

Le président: La parole est à M. Harvey. Il n'est pas nécessaire que vous adressiez vos questions exclusivement à M. West. Vous pouvez lui poser une question, mais veuillez...

• 1655

[Français]

M. André Harvey (Chicoutimi, PC): Monsieur le président, je me permettrai de souligner que je n'ai jamais aimé prendre le crédit qui ne me revient pas. Ce n'est pas moi qui ai fait la déclaration, mais un autre M. Harvey qui était député.

M. Julian West: Je m'excuse.

M. André Harvey: Cela n'aurait pas été gentil de ma part de ne pas le dire, n'est-ce pas?

M. Julian West: Je suis désolé, mais d'accord.

M. André Harvey: J'aimerais poser une petite question à M. West. Personnellement, la marginalité m'a toujours un peu impressionné. Je vois tout le travail qui est fait par des gens qui partent de zéro pour essayer de défendre des principes importants. On pourrait avoir une très longue discussion sur votre motivation, parce que vous n'avez pas choisi les véhicules les plus rapides pour atteindre vos objectifs et appliquer vos principes.

Monsieur West, qu'est-ce qui distingue tant le Parti vert du Canada qui fait qu'il n'utilise pas un parti déjà existant, peut-être le NPD ou un autre parti, pour faire valoir ses idées plus rapidement? Actuellement, vous vous battez très fort pour un jour, peut-être, oser espérer... J'aimerais connaître votre motivation.

J'aimerais aussi demander à Mme Di Carlo comment se portent le Parti communiste et le Parti marxiste-léniniste dans le monde, en Russie ou ailleurs. J'aimerais aussi connaître la raison pour laquelle vous avez choisi le Parti marxiste-léniniste pour véhiculer vos idées ici, au Canada. Croyez-vous qu'un jour, vous serez en mesure d'assumer les responsabilités ultimes sur le plan politique au Canada? J'aimerais vous entendre à ce sujet. Il y a peut-être des notions historiques qui m'échappent, mais j'aimerais que vous me disiez quelle différence il y a entre le Parti communiste et le Parti marxiste-léniniste.

D'abord, monsieur West, pourquoi n'utilisez-vous pas un véhicule plus rapide pour atteindre vos objectifs sur le plan environnemental?

M. Julian West: Nous constatons...

[Traduction]

Je poursuis en anglais, car on me dit qu'on m'attend.

Pour nous, au sein du parti où nous avons choisi d'oeuvrer, nous avons un effet. En fait, j'ai rencontré quelqu'un—et je vais maintenant me montrer très aimable envers le gouvernement—un membre du caucus du parti au pouvoir ce matin disait que s'il était un environnementaliste aussi fervent, c'était parce qu'il était très impressionné par le candidat du Parti vert qui avait été son adversaire dans son comté. Il a adopté des idées de notre parti parce qu'il a été contraint de débattre de certaines questions avec lui, et ce ne serait pas le cas si nous n'avions pas un parti qui recueille un certain appui parmi le public—on se moquerait simplement de nous.

Maintenant, on ne nous ridiculise plus. En Colombie-Britannique, les sondages d'opinion révèlent que nous recueillons 7 ou 8 p. 100 de la faveur populaire, et nous serons un intervenant majeur au cours des prochaines élections provinciales; nous sommes même sur le point de faire élire des candidats dans de grandes villes, nous attendons cette percée. C'est la même chose qui motivait le Parti réformiste dans les années 80, les gens disaient—«Pourquoi ne pas adhérer au Parti progressiste-conservateur?» et c'est parce qu'ils avaient une autre vision des choses.

Nous avons une vision différente et nous allons en faire la promotion. Nous attendons avec impatience le jour où nous siégerons ici avec vous. J'ai un député qui nous représente. Nous avons recueilli 55 000 voix au cours des dernières élections, alors qu'est-ce qui m'amène ici aujourd'hui? C'est que je viens parler au nom de ces 55 000 électeurs. Cinquante-cinq mille voix c'est plus que quiconque d'entre vous n'en a obtenu pour se faire élire, c'est donc suffisant pour élire quelqu'un.

M. John Richardson (Perth—Middlesex, Lib.): Ne lancez pas de chiffres ainsi sans avoir l'assurance que nous n'avons pas obtenu davantage de voix que cela.

M. Julian West: Je suis désolé, mais c'est plus que le nombre de voix qu'on recueille en moyenne quand on remporte une élection. Je suis désolé.

Donc c'est à peu près ce qu'il faut pour faire élire quelqu'un. Selon des calculs effectués par le Globe and Mail au lendemain des élections, si nos 55 000 électeurs avaient tous résidé au même endroit à Vancouver, nous aurions réussi à faire élire quelqu'un. Mais le système en place fait que les électeurs doivent se concentrer dans une même ville et non pas être répartis un peu partout dans tout le pays.

Alors, oui, je me présente en tant que lobbyiste et j'agis au nom de 55 000 simples citoyens qui ont voté pour le Parti vert. Si j'étais ici en tant que lobbyiste au nom d'une grande société aérienne de 55 000 employés, je suis certain que vous m'écouteriez, que vous prendriez mon opinion très au sérieux et que vous demanderiez ce que le gouvernement peut faire pour nous.

Voici donc ma question: Que peut faire le gouvernement pour tenir compte de nous tous qui voulons voter pour de petits partis et qui voulons que nos voix ne soient pas perdues? Voilà la question. Je vous demande d'y réfléchir, car je dois rentrer à Vancouver. Je vous remercie beaucoup de m'avoir invité à comparaître.

Le président: Merci, monsieur West. Je vous remercie vous et votre parti d'avoir présenté votre mémoire dans les deux langues officielles.

Je donne maintenant la parole à Mme Di Carlo qui répondra elle aussi à cette question.

Mme Anna Di Carlo: Si j'ai bien compris la question, ce n'est pas l'endroit idéal pour moi pour y répondre. La différence entre le Parti communiste Marxiste-Léniniste du Canada et le Parti communiste du Canada n'est pas l'objet de notre propos. Je préférerais vous fournir une pile de documents que vous pourrez consulter à loisir.

• 1700

Le président: Monsieur Harvey.

M. André Harvey: Merci beaucoup.

Le président: Maintenant nous tenons absolument à entendre Mme Di Carlo et M. Gray. Je suis sûr que c'est ce qu'attendent tous nos collègues.

Monsieur Gray.

[Français]

M. Ron Gray: Je vous demande pardon parce que mon document n'a pas encore été traduit. J'ai été avisé de cette réunion seulement après mon retour de l'Alberta. Puis-je en distribuer des copies aux membres de ce comité?

[Traduction]

Le président: Oui, et j'en suis désolé, j'aurais dû ajouter quelque chose quand j'ai parlé à M. West.

Tout Canadien est libre de comparaître ici et de s'adresser au Parlement dans sa langue, en français ou en anglais. C'est toujours ainsi que nous traitons les citoyens. Si un mémoire nous est présenté dans l'une ou l'autre des deux langues officielles, vous êtes tout à fait libre de les distribuer et nous vous y encourageons, et le comité prendra les mesures nécessaires pour faire traduire le document dans l'autre langue officielle.

C'est la règle, le personnel du comité ne distribue pas de mémoires qui ne sont rédigés que dans une seule langue, mais les témoins sont encouragés à présenter des mémoires et à les distribuer. Je vais donc m'occuper de la traduction en temps opportun.

Pouvons-nous poursuivre la période de questions? Il n'y a personne d'autre, je vais donc donner la parole à M. White.

M. Ted White: Merci.

Monsieur Gray, je vous pose maintenant la question à vous. L'exposé du représentant du Parti Marxiste-Léniniste m'a beaucoup plu. Bien qu'il soit assez véhément, je suis vraiment tout à fait d'accord avec la plupart des observations qu'il renferme.

Monsieur Gray, j'ai quelques questions bien précises pour vous. Vous avez parlé de la nécessité d'une représentation proportionnelle et d'un certain processus pour y arriver. Vous savez peut-être que la Nouvelle-Zélande a eu recours à des référendums pour voir si la population acceptait cette idée. On a d'abord tenu un référendum pour demander à la population si elle voulait changer le système majoritaire à un tour. La réponse a été affirmative, et le corps électoral de la Nouvelle-Zélande a consacré un an à informer la population de toutes les autres solutions offertes et on a alors tenu un second référendum où l'on a choisi un autre système. C'est le MMP. Accepteriez-vous un processus de ce genre, pour aller vers la représentation proportionnelle?

Deuxièmement, pour ce qui est des remboursements aux candidats, vous avez entendu M. West proposer un système où l'on rembourserait un certain montant par suffrage obtenu. Au Parti réformiste, on veut tout simplement supprimer les remboursements. J'aimerais que vous nous disiez ce que vous pensez de ces deux propositions.

Enfin à propos de la formule de radiodiffusion, dont a parlé Mme Parrish, les sommes dépensées ne garantissent pas nécessairement de bons résultats: qu'on pense par exemple à la campagne pour le oui au moment de l'Accord de Charlottetown, ou à la campagne du Parti progressiste-conservateur aux élections de 1993. Alors, vraiment, quelle importance a l'argent qu'on dépense ou le temps d'antenne qu'on accorde? Je suis d'accord avec Mme Parrish à ce propos—est-ce que ce qui compte le plus n'est pas ce qu'on a à offrir aux électeurs?

M. Ron Gray: Je vais tâcher de répondre dans l'ordre, si j'arrive à me souvenir.

La première question avait trait à la représentation proportionnelle et aux moyens d'y arriver. J'accepterais tout processus qui nous rapprocherait d'un système où les électeurs n'auraient pas l'impression que leur opinion n'est pas prise en compte. Un électeur sur trois n'est pas allé voter aux élections de 1997, et j'ai l'impression que c'est sans doute parce qu'un grand nombre d'entre eux avaient le sentiment que cela ne servait à rien.

Dans les petits partis, nous sommes généralement d'accord pour dire que nous favorisons la représentation proportionnelle. Il y a bien d'autres systèmes en usage. Le VUT en est un et le système de circonscription plurinominale à scrutin proportionnel en est un autre. Les gens qui s'y opposent nous battent habituellement dans des pays comme l'Italie et Israël. En Israël, les marges sont bien trop faibles pour que ce soit possible, et je ne sais pas quel est le problème en Italie. Presque partout dans le monde on s'oriente dans cette voie dans le but bien simple de s'assurer que les gens ont l'impression d'être représentés par leurs assemblées législatives.

• 1705

Je pense qu'il est toujours vrai, bien sûr, que ce qu'on a à offrir importe plus que l'argent qu'on dépense. C'est pourquoi le tableau que Julian a montré incluait des gens qui avaient dépensé 40 000 $ sans grands résultats. Toutefois il importe aussi que ce qu'on a à offrir soit entendu. L'un des problèmes de notre parti, par exemple, tient au fait que les grands médias métropolitains et nationaux ne parlent tout simplement pas de nous. Je crois que la c'est parce qu'on a tendance à nous définir comme un genre de succursale canadienne de la droite religieuse américaine, ce qui est tout à fait faux. Nous nous inspirons de gens comme Groen van Prinsterer et Abraham Kuyper, qui les tout premiers ont apporté les régimes d'indemnisation des travailleurs, les pensions aux veuves et la sécurité de la vieillesse au début du siècle. Mais nous n'attirons pas facilement l'attention des médias.

Néanmoins, les tableaux que Julian vous a montrés indiquent aussi que ceux qui ont dépensé le plus ont été élus. Il existe une corrélation entre les montants qu'on dépense et le résultat qu'on obtient. Ce n'est pas une corrélation garantie toutefois. Cependant, la formule de remboursement qui fait qu'on accorde à ceux qui ont été élus la moitié de leur caisse électorale pour la prochaine campagne est tout à fait injuste. C'est contre quoi nous nous élevons.

Je regrette, mais il y avait un troisième point.

M. Ted White: À choisir entre les deux idées, je me demande si vous retiendriez l'idée de M. West, qui consiste à accorder un remboursement en fonction du nombre suffrages obtenus, un montant par suffrage, ou pensez-vous qu'il faille supprimer complètement les remboursements?

M. Ron Gray: M. West et moi en avons parlé, et nous comprenons la différence idéologique qui fait que nous ne nous entendons pas sur la façon de procéder. Il estime que tout le monde doit avoir le droit de participer au financement, pas simplement ceux qui paient des impôts. Nous estimons que le droit à la propriété privée, qui, hélas, n'est pas garanti par la Constitution, devrait s'étendre à l'argent qu'on gagne. Nous regrettons l'idée que les contribuables soient obligés de financer des choses qu'ils n'approuvent pas. Nous avons donc proposé une formule qui contournerait cette difficulté. Nous accepterions tout système que nous estimerions juste pour tous, mais le système actuel ne l'est pas.

Si vous me permettez de poursuivre dans la même veine, je crois que c'est moi qui le premier ai employé le mot «corrompu», et je regrette d'avoir ainsi offensé Mme Parrish. J'ai expressément exclu les parlementaires actuels de cette accusation. En fait, ce que je disais aux parlementaires du présent gouvernement, c'est qu'ils ont l'occasion de remédier à cette situation et de passer ainsi à l'histoire.

Le président: Je ne pense pas que Mme Parrish soit facilement offensée.

Quoi qu'il en soit, c'est à vous, monsieur Bergeron, si vous voulez prendre la parole.

M. Stéphane Bergeron: Non.

Le président: D'accord. La parole est à M. Solomon.

M. John Solomon: Ma question concerne une observation faite par Mme Anna Di Carlo. Elle a fait savoir qu'elle mettrait fin à l'utilisation des fonds publics pour le financement des partis politiques. Diriez-vous qu'on devrait faire de même pour ce qui est des candidats? Si tel était le cas, comment proposeriez-vous de financer les partis et les candidats?

Mme Anna Di Carlo: Notre proposition comporte différents aspects. Tout d'abord, comme vous le savez sans doute, nous ne pensons pas que la sélection des candidats devrait être confiée aux partis politiques. Nous estimons que le processus de sélection doit venir de l'ensemble des électeurs, ce qui veut dire, par exemple, qu'il pourrait se faire à l'université. Les gens à l'université désigneraient des personnes qu'ils connaissent parmi leurs pairs. Les travailleurs et les gens d'autres secteurs nommeraient des personnes qu'ils connaissent parmi leurs pairs. Que cette personne soit affiliée ou non à un parti politique n'importe pas. La légitimité de cette candidature tient à la collectivité dans laquelle cette personne vit. Nous avons proposé tout un mécanisme au moyen duquel s'effectuera ce processus de nomination.

• 1710

Nous estimons que le financement des élections ne devrait pas équivaloir au financement de candidats, au financement d'un parti politique, ni au financement de toute autre organisation du régime politique. Il devrait s'agit d'un financement pour mener les élections d'une façon telle que chaque citoyen obtienne l'information dont il a besoin pour prendre une décision éclairée. C'est pas mal dans le même esprit, sans être toutefois identique, que l'exemple cité par M. West où l'on a une publication financée par le gouvernement et qui présente toutes les options proposées. On y trouverait des documents de référence, de l'information de base et ainsi de suite. Ainsi, qu'un candidat dispose ou non de fonds n'aurait aucune importance. C'est le processus électoral en tant que tel qui serait financé. On tiendrait des réunions et on offrirait des publications. Toutes sortes de choses seraient prévues. Moi-même, en tant que candidate, je n'aurais pas un sou à débourser.

M. John Solomon: Il n'y aurait donc pas de panneaux sur les pelouses ni de feuillets qu'un parti ou un candidat pourrait distribuer.

Mme Anna Di Carlo: C'est une autre question. Pour l'instant il y a une limite de 3 000 $ imposée aux tiers partis, les limites électorales imposées aux candidats et d'autres limites encore. Nous estimons pour notre part en tant que parti politique qu'aucuns de ces fonds ne devraient servir à influencer l'opinion publique pendant les élections. Cela équivaut pour nous à une limitation de la liberté de parole.

Du même coup, toutefois, supposons que nous parvenions à apporter des changements au financement du processus électoral, et non pas des candidats ni des partis politiques. Tout électeur disposerait de toute l'information nécessaire. Si Bell Canada, par exemple—pour choisir une société—décidait de mener une grosse campagne, cela ne changerait rien, parce qu'en fin de compte les citoyens auraient toute l'information dont ils auraient besoin pour prendre une décision éclairée.

M. John Solomon: Vous n'auriez donc pas d'objection à ce que des tiers partis—c'est-à-dire des partis non politiques—dépensent sans compter.

Mme Anna Di Carlo: Je dis effectivement que cela nous pose un problème. Nous pensons que cela ne doit pas se faire au cours d'élections.

Nous avons une proposition en vue d'une commission nationale élue. Dans chaque circonscription, on élirait une certaine entité pour superviser le déroulement des élections, y compris la sélection des candidats, la publication de toute l'information nécessaire ainsi que l'accès à tous les médias dont on a besoin. Cela ne donnerait pas aux gens l'occasion de faire valoir leurs intérêts sectaires particuliers, ce qui n'est pas la même chose, mais concernerait en fait le déroulement des élections.

M. John Solomon: J'ai une dernière question à vous poser, si vous permettez, monsieur le président. Combien cela coûterait-il à comparer avec ce que cela coûte maintenant?

Mme Anna Di Carlo: Je suis persuadée que cela coûterait beaucoup moins, mais nous n'avons pas encore établi le montant exact. Les sommes qu'on dépense maintenant servent au financement de campagnes extrêmement coûteuses, notamment de grandes campagnes d'information publique et autres, ce qui serait alors exclu. Tous ces fonds seraient fournis par des membres privés de partis politiques. Ce ne serait pas...

M. John Solomon: Alors seuls les très riches pourraient mener des campagnes, dans ce cas.

Mme Anna Di Carlo: Vous revenez sans cesse là-dessus. Je parle de...

M. John Solomon: Je pose simplement des questions. Je ne vois pas bien.

Mme Anna Di Carlo: Mais, à mon avis, si nous ne concevions pas les élections comme elles se déroulent maintenant où les adversaires s'opposent les uns aux autres et s'il s'agissait plutôt d'une période où tous les électeurs pouvaient vraiment participer et débattre de ce qui se passe dans le pays—au lieu d'avoir un politicien qui vienne dire qu'il faut voter pour lui parce qu'il va mettre de l'ordre dans vos vies, ou qui dit qu'il faut voter pour lui parce qu'il va vous donner du travail—et où on aurait une discussion réfléchie sur ce qui se passe dans le pays et sur les problèmes de l'économie, les problèmes qu'ont les jeunes, les problèmes qui confrontent les travailleurs, alors on ne voudrait même pas avoir de grandes affiches publicitaires disant «votez pour moi parce que je parais bien».

• 1715

Je n'en reviens pas quand je vois certains documents de publicité électorale. On peut voir par exemple la photo de quelqu'un et une mention qui dit de voter pour cette personne. En quoi cela peut-il bien aiguiser ma conscience politique et m'éclairer sur la décision que je dois prendre eu égard aux affaires du pays?

Je ne parle pas des campagnes électorales. Je parle de mener des élections où tous les électeurs peuvent participer aux affaires de la cité, depuis l'établissement du programme avant les élections—quelles devraient être les questions à l'étude—jusqu'au choix des candidats. Il est inadmissible que 2 p. 100 de la population assume la responsabilité de la décision des candidats. Et cette proportion de 2 p. 100, qui est citée par la commission Lortie, correspond aux périodes pour lesquelles les partis comptent le plus grand nombre de membres.

J'aimerais dire une dernière chose, si vous permettez, une chose sur laquelle je voudrais vraiment mettre l'accent. Nous ne sommes pas venus dire que nous sommes opprimés. Ce n'est pas ce que nous disons. Nous pensons que c'est un des problèmes qui donnent une certaine tournure au débat sur la réforme électorale. Il se pose de très graves problèmes concernant la façon dont la démocratie s'exerce au Canada. Il ne s'agit pas de savoir si oui ou non notre parti obtient une minute de plus de temps d'antenne qu'un autre parti politique. Nous ne sommes pas venus dans cet esprit.

Ce qu'on peut dire, c'est que le fait que les petits partis politiques au Canada sont considérés comme étant moins égaux que les autres partis politiques, révèle la façon dont tous les citoyens du pays sont traités, tous les électeurs. Vous ne pouvez pas me dire que les électeurs au Canada estiment qu'ils font partie du processus décisionnel dans ce pays. Oui, ils peuvent voter tous les trois ans, tous les quatre ans ou tous les cinq ans. Dès l'instant qui suit le vote, cependant, on se dit: «Mon Dieu, qu'est-ce que j'ai fait?»

Je suis tout à fait sérieuse. Vous-mêmes vous le dites. Madame Parrish, vous avez dit que vous croyez que beaucoup de gens votent pour un petit parti politique ou un candidat indépendant ou même gâtent leur bulletin de vote, parce qu'ils sont mécontents de ce qui se passe. Vous en déduisez que nous ne devrions donc pas obtenir de financement et non pas qu'il y a là plutôt quelque chose qui ne va vraiment pas du tout.

Je ne veux pas me lancer dans un débat, mais je voulais simplement préciser les choses pour dissiper toute confusion. Quand on parle de financement égal du temps d'antenne, c'est un principe tout à fait fondamental qu'un régime démocratique ne peut pas consacrer l'inégalité dans ses lois. Quand on nous dit que c'est parce que nous n'avons pas d'idées qui enflamment la population, est-ce que ça ne revient pas à dire qu'il est légitime d'avoir des lois qui sont discriminatoires en fonction de la couleur de la peau parce que peut-être que quelqu'un qui a cette couleur de peau n'est pas aussi brillant que quelqu'un d'une autre couleur? En quoi est-ce différent? En fin de compte, l'inégalité en vertu de la loi, c'est l'inégalité en vertu de la loi. On ne peut pas imposer qu'en toute conscience les idées d'un parti valent mieux que celles d'un autre.

Le président: Merci.

Je donne maintenant la parole à M. Pickard, puis à M. White, et ensuite à MM. Harvey et Richardson.

M. Jerry Pickard (Chatham—Kent Essex, Lib.): Merci, monsieur le président.

Tout comme Mme Parrish s'est étonnée, je me suis moi aussi étonné quand M. Gray et Mme Di Carlo ont évoqué la corruption du gouvernement. Ça ne fait pas l'affaire des membres du comité. Je ne pense pas qu'aucun de mes collègues fasse autre chose que ce qu'il estime juste, et ils font de leur mieux. Quoi qu'il en soit, je n'insisterai pas.

Madame Di Carlo, ce qui me trouble dans votre exposé plus particulièrement c'est votre disposition à restreindre une voix démocratique quelle qu'elle soit. Bien franchement, vous pouvez bien dire que vous élargissez la perspective, mais si je suis candidat dans une région et qu'il y a des gens auxquels j'essaie de parler de politiques, d'orientation, d'attributs, des messages que je désire transmettre, je ne pense pas vraiment qu'il soit acceptable que quiconque dans ce pays limite ma capacité de m'exprimer, sans compter le fait qu'on impose des limites aux dépenses que je peux engager pour le faire. Il existe des paramètres auxquels je dois me soumettre, et, encore une fois, je suis un candidat qui se présente en tant qu'individu. Chacun autour de cette table qui a été élu à la Chambre des communes a été élu en tant qu'individu qui défendait certaines idées politiques, certains attributs et qui a fait campagne pour les défendre.

• 1720

Je considère certainement le Parti réformiste comme responsable, et j'estime qu'il a défini des politiques et des orientations et qu'il a agi en ce sens. La population est bien informée de ces orientations et de ces politiques. Il en est de même pour le Bloc, de même pour le Parti conservateur, pour le Parti vert et le Parti de l'Héritage Chrétien ou votre parti. Nous avons tous l'occasion d'exprimer nos principes et nos préoccupations, mais laisser entendre que tout le monde doit être logé à la même enseigne et que tout le monde doit avoir le même temps d'antenne et exactement le même... Bien franchement, la population canadienne ne verra pas les choses sous cet angle non plus.

Je reviens aux campagnes et aux débats électoraux où chacun de vos partis, soit dit en passant, a été représenté et a eu l'occasion de participer à des débats publics et a eu la possibilité d'une participation à part entière. Bien qu'il devienne assez fastidieux pour des auditeurs ou pour tout auditoire de regarder sept ou huit ou dix partis présenter leurs vues—c'est un processus très difficile—il demeure qu'il est démocratique de permettre cette présentation.

Étant donné ce que vous proposez, j'en déduis que les initiatives dont font preuve les partis, les initiatives dont font preuve les simples candidats, ou les efforts déployés par ces derniers doivent être encapsulés et placés à l'intérieur de paramètres à l'intérieur desquels on ne sera plus aussi libre qu'on l'est au Canada aujourd'hui. Je pense qu'on limiterait ainsi la capacité qu'on peut avoir de présenter des idées, et j'aimerais que vous nous disiez ce que vous en pensez.

Mme Anna Di Carlo: Nous ne préconisons pas qu'il faille limiter la capacité d'un parti politique de présenter ses vues, pas du tout. Nous parlons des candidats. Si un parti politique fait campagne pour faire valoir ses opinions—et les partis politiques le font constamment, tout comme nous le faisons, si l'expression «faire campagne» ne vous gêne pas et ne vous paraît pas trop agressive—et qu'il présente ses vues, ce parti devrait le faire tous les jours de l'année. Il devrait présenter à la société la façon dont il conçoit l'avenir de cette dernière.

Nous pensons qu'il est excellent que des partis le fassent quotidiennement. Ils devraient recueillir tous leurs fonds auprès de leurs membres. Ils devraient avoir des organisations politiques très dynamiques. Ils devraient vraiment devenir ce que la commission Lortie a appelé des organisations politiques primaires. La commission Lortie a également constaté, toutefois, que les partis politiques au Canada—au moins ceux qui sont représentés à la Chambre des communes—n'existent qu'en tant que machines électorales. Dans l'étude que la commission a effectuée, je pense qu'on dit effectivement que si de simples citoyens décidaient d'adhérer au parti de leur circonscription dans leur comté, la plupart auraient bien du mal à le faire. C'est la commission Lortie qui l'a dit, pas moi.

La même chose vaut durant une campagne électorale. Les partis politiques devraient être complètement libres d'exposer leurs opinions politiques. Il ne s'agit pas de les empêcher de le faire. On ne peut cependant permettre que la loi électorale accorde au Parti libéral, par exemple, tant de temps de plus pour le faire que d'autres partis politiques sous prétexte qu'il a obtenu x nombre de sièges et x nombre de voix lors des dernières élections. Cela revient à inscrire une inégalité dans la loi. Voilà ce à quoi nous nous opposons. Nous nous opposons à ce qu'il y ait une inégalité incorporée à la loi. L'égalité devant la loi est un principe qui doit être respecté. C'est un principe pourtant simple à comprendre.

Le président: Nous pourrions continuer à débattre la question, mais le temps m'oblige à rappeler aux uns et aux autres de poser des questions brèves et de donner des réponses aussi brèves. L'audition de notre dernier témoin est prévue pour 17 h 30.

• 1725

Je vous accorde maintenant la parole, monsieur White, et je vous demande de bien vouloir préciser à quel témoin s'adresse votre question.

Monsieur White, suivi de M. Harvey et ensuite de M. Richardson.

M. Ted White: Je vais vous poser des questions précises, madame Di Carlo, qui appellent des réponses brèves.

Si l'on accepte pour l'instant l'existence des partis politiques en tant qu'organisations, la décision Molloy—à laquelle vous avez fait allusion—prévoit qu'un parti devrait s'en tenir à deux candidats. Comme vous le savez, le gouvernement propose de rétablir ou de mettre en oeuvre la règle limitant le nombre de candidats à 50. Si vous deviez choisir un chiffre, quel serait-il?

Ma seconde question cadre avec l'idée que vous défendez selon laquelle il convient de conférer des droits aux citoyens plutôt qu'aux partis politiques. Vous soutenez qu'il faut faire participer la population davantage au processus. Seriez-vous favorable à ce qu'on accorde aux citoyens le droit de présenter des initiatives populaires et de réclamer des référendums?

Mme Anna Di Carlo: Oui, nous appuyons l'idée de permettre aux citoyens de présenter des initiatives populaires et de réclamer des référendums. Nous ne pensons cependant pas que le fait d'inscrire ces droits dans notre système électoral permettrait vraiment de régler les problèmes de base auxquels nous faisons face.

Pour ce qui est des chiffres, en ce qui me concerne, deux personnes peuvent constituer un parti en vertu du principe de la liberté d'association. C'est l'une des complications qui découlent de la loi électorale actuelle puisque ce sont les partis politiques qui déterminent la façon dont se déroulent les élections. À l'heure actuelle, la loi électorale confère des droits aux partis politiques plutôt qu'aux citoyens. Il faut évidement reconnaître les mêmes droits à tous les partis politiques. Voilà l'un des défauts d'un système qui repose sur les partis politiques. Nous devons pallier les importantes lacunes de ce système si nous voulons que la situation change.

Le président: Je vous remercie.

Monsieur Harvey.

[Français]

M. André Harvey: J'ai une simple petite question, monsieur le président.

En mathématiques et dans beaucoup d'autres cas, il n'y a rien de mieux qu'un exemple pour comprendre les principes. Mme Di Carlo pourrait-elle me donner un exemple de situation où les principes du Parti marxiste-léniniste sont appliqués pour assurer une démocratie encore meilleure que celle qui existe au Canada? Assurément, j'aimerais bien le savoir. Est-ce que l'application des principes électoraux marxistes-léninistes existe dans un pays qu'on peut visiter et où on peut voir les effets d'une démocratie supérieure à la nôtre, en toute bonne foi?

[Traduction]

Mme Anna Di Carlo: Je ne pense pas que la question de la démocratie se pose. Je ne me permettrais jamais de dire que nos propositions reflètent l'idéologie marxiste-léniniste. La démocratie appartient à tous sans égard à leur idéologie. Comment ce système serait-il marxiste-léniniste plutôt que libéral? Il n'est ni l'un ni l'autre. C'est un système qui est issu d'un processus évolutif et qui reflète la façon dont une société a choisi de se gouverner. Nous ne disons pas qu'il s'agit d'un processus politique marxiste-léniniste. C'est un système qui reflète la façon dont la démocratie existe actuellement dans le monde entier.

[Français]

M. André Harvey: Merci beaucoup, madame.

[Traduction]

Le président: Monsieur Richardson.

M. John Richardson: Merci, monsieur le président.

J'adresse ma question à Mme Di Carlo. Vous nous avez décrit la façon dont un gouvernement devrait établir son programme électoral en prévision d'une campagne électorale. Vous proposez ensuite que ce programme fasse l'objet d'un débat public. Vous ai-je bien compris?

Mme Anna Di Carlo: En partie. Ce que nous proposons est de laisser le choix des candidats aux électeurs. Ce devrait aussi être aux électeurs de fixer le programme électoral. Les gens discuteraient de leurs préoccupations au même moment où ils choisissent leur représentant... Les questions qui seraient débattues pendant la campagne électorale seraient choisies dans le cadre de ce processus.

Cela répond-il à votre question?

M. John Richardson: Oui, c'est ce que j'avais cru comprendre, c'est-à-dire que le programme électoral et les questions à débattre lors de la campagne électorale seraient établis par les électeurs.

• 1730

Mme Anna Di Carlo: Permettez-moi de vous donner un exemple concret.

Supposons qu'un certain nombre de candidats seraient choisis par les étudiants. Les universités sont un bon exemple. Les étudiants ont des préoccupations particulières et ils s'intéressent à ce qui se passe dans la société. Lorsqu'ils choisiraient leurs candidats, ils établiraient les questions sur lesquelles devraient reposer le programme du gouvernement. Il ne s'agirait pas pour un parti politique d'imposer ses opinions.

M. John Richardson: Je vois.

Mme Anna Di Carlo: Le processus fonctionnerait de la façon inverse.

M. John Richardson: Le programme serait établi par la planification...

Mme Anna Di Carlo: Par les électeurs.

M. John Richardson: Très bien.

Le président: Je vous remercie.

J'ai une brève question à poser. J'espère que vous pourrez y répondre brièvement, mais peut-être que cela ne sera pas possible.

Le système actuel et celui que propose d'instaurer le projet de loi prévoit des mesures visant à aider les nouveaux partis. Le système prévoit notamment les conditions d'accès des nouveaux partis aux fonds publics et plafonne les dépenses politiques pouvant être engagées par les partis plus riches. Il suffit à ces nouveaux partis d'obtenir un pourcentage minimal des voix exprimées lors des élections. Sous réserve de cette condition, les nouveaux partis sont traités de la même façon que tous les autres partis. J'aurais donc cru que l'objectif du système était de favoriser la création de partis.

Qu'en pensez-vous?

M. Ron Gray: Permettez-moi de vous donner un exemple concret.

Je suis actuellement candidat dans l'élection complémentaire qui aura lieu dans la circonscription de Hull—Aylmer qui est la circonscription où je vis. J'ai recueilli environ 7 000 $ pour financer ma campagne électorale. Mon principal adversaire a commencé sa campagne électorale avec 32 000 $ en banque, somme qui représentait le remboursement accordé à ce parti qui a cherché à faire élire ce candidat au cours de la dernière campagne électorale. Comme Mme Parrish, nous ne dépensons pas de l'argent que nous n'avons pas et les fonds dont nous disposons sont assez modestes. Nous sommes parvenus à recueillir 7 000 $, mais cela a été assez long. On ne peut pas dire que le candidat qui dispose de 7 000 $ a autant de chance de se faire élire que celui qui commence la campagne en ayant 32 000 $ en banque.

J'ajouterai que j'appuie pour la même raison que M. White la tenue d'élections à dates fixes. J'ai cependant certaines réserves au sujet des mécanismes de démocratie directe comme les référendums. Je tends à croire comme Edmund Burke que le député ne doit pas simplement obéir à ses électeurs, mais mettre son intelligence, sa personnalité et son dynamisme à leur service. J'aimerais que M. Green soit encore ici. Je suis allé en Californie et j'ai vu comment cela se passait. On abat des forêts entières pour envoyer de la documentation aux électeurs.

Le problème à l'heure actuelle, c'est que le système ne traite pas tous les candidats de la même façon.

Le président: Vous ne pensez pas non plus qu'il est équitable?

M. Ron Gray: Non, je ne le crois pas.

Le président: Je ne pense pas que nous allons insister pour que tous les candidats des partis inscrits dans toutes les circonscriptions disposent de la même somme d'argent pour essayer de se faire élire. Pour l'instant, les Canadiens ont pensé qu'il suffisait de plafonner les dépenses pouvant être engagées par chaque candidat. Toutes sortes de raisons peuvent expliquer qu'un candidat dispose de plus d'argent qu'un autre. Il a peut-être eu de la chance, a travaillé fort ou a fait des économies. Vous ne pouvez pas dire que vous n'avez pas d'argent du tout.

M. Ron Gray: Oui, mais ce candidat n'utilise pas son argent, mais celui des contribuables.

• 1735

Je comprends qu'il y a 25 ans lorsque le Parlement a institué ce système, on voulait éviter que les deniers publics soient utilisés pour faciliter la diffusion d'information. Voilà pourquoi nous proposons que ce soient les contribuables qui déterminent comment leur argent va être utilisé et non pas une formule qui favorise le parti qui était au pouvoir. Au moment des élections, en théorie, on repart à zéro.

Nous proposons que ce soit aux contribuables de décider comment leur argent va être dépensé. S'ils souhaitent que l'argent soit envoyé à un candidat, c'est à eux de dire auquel des candidats cet argent sera envoyé. S'ils décident de ne pas envoyer d'argent à aucun candidat, cet argent devrait être réservé à des fins non partisanes.

Le président: Je suis sûr que vous reconnaîtrez, pour la forme, qu'Élections Canada n'a pas financé cette élection complémentaire. En donnant de l'argent à l'association de comté, c'est-à-dire au Parti libéral dans la circonscription où vous vous présentez, Élections Canada n'a fait que rembourser les dépenses engagées par le candidat qui s'est présenté lors de la dernière campagne électorale.

M. Ron Gray: Oui, mais il n'en demeure pas moins que la caisse du candidat est à moitié pleine dès le départ.

Le président: Cet argent doit servir à permettre à une personne qui aurait emprunté de l'argent pour financer sa campagne de rembourser son prêt. Dans ce cas-ci, le candidat n'avait pas contracté de prêt. Nous comprenons cependant votre point de vue.

Madame Parrish.

Mme Carolyn Parrish: J'aimerais cependant préciser, pour mémoire, que je ne voudrais pas que vous croyez, à tort, que la somme de 32 000 $ constitue un remboursement intégral. Les candidats qui se présentent pour le Parti libéral font don de la moitié de leur remboursement au parti pour lui permettre de mener une bonne campagne.

Par conséquent, si M. Massé a dépensé la somme maximale qu'il pouvait dépenser, soit environ 60 000 $, il n'aura pas reçu un remboursement de 32 000 $. Il aura sans doute reçu environ 15 000 $. Depuis la dernière campagne électorale, il aura tenu des levées de fonds. Les gens auront fait des dons à l'association de circonscription et non pas à lui personnellement. Si le nouveau candidat a la chance d'avoir la bénédiction de l'association de comté, l'association peut dépenser cet argent à chercher à le faire élire ou peut décider de ne pas le faire.

Je ne pense donc pas que ce candidat disposait au départ de 32 000 $. Si c'est le cas, une bonne partie de cette somme aura été recueillie par l'association de comté qui aura décidé de s'en servir pour essayer de faire élire ce candidat.

M. Ron Gray: Je fais cependant remarquer que ce sont les contribuables qui financent ce remboursement dont dispose ce candidat et pas les autres.

Mme Carolyn Parrish: Très bien.

Le président: Je veux remercier les deux témoins d'avoir bien voulu comparaître devant nous aujourd'hui. On vous a demandé, il y a une semaine, de comparaître devant le comité, mais ce projet de loi—et vous représentez des partis inscrits—a été présenté à la Chambre en juin. Nous vous remercions néanmoins d'avoir pu préparer en si peu de temps un mémoire à notre intention.

Je souhaite à M. Gray bonne chance dans sa campagne. Il a sûrement beaucoup de mains à serrer dans sa circonscription.

Je remercie Mmes Di Carlo et Morten d'avoir comparu devant le comité.

Notre prochain témoin est le ministre Boudria.

Monsieur le ministre, bienvenue. Nous vous remercions d'avoir bien voulu accepter de revenir comparaître devant le comité. Je sais qu'au moins l'un des membres du comité, et peut-être plus d'un, avait d'autres questions à vous poser, tant des questions d'ordre général que technique.

Deux collaborateurs vous accompagnent aujourd'hui. Je crois que nous les avons déjà rencontrés. Il s'agit de M. Peirce et de Mme Mondu qui ont plus tôt organisé une séance d'information à notre intention.

Monsieur le ministre.

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement de la Chambre des communes): Je vous remercie, monsieur le président et mesdames et messieurs.

• 1740

J'aimerais d'abord faire des observations qui répondront peut-être à certaines des questions qui ont été posées lors de la dernière réunion et j'aimerais aussi traiter de certaines questions qui ont été soulevées en public depuis lors par certains membres du comité. Si vous me le permettez, je commencerai par cela. S'il nous reste du temps, je répondrai aux questions qui me seront posées.

Je suis heureux de comparaître de nouveau devant le comité aujourd'hui, monsieur le président et mesdames et messieurs. Je veux d'abord vous féliciter de l'excellent travail que vous avez accompli jusqu'ici. Le processus a été long et il a été amorcé, je le répète, par le comité qui vous a précédé immédiatement après l'élection de 1997. Le projet de loi a été déposé à la Chambre en juin et nous sommes maintenant en novembre. Le dossier progresse bien que lentement. Je suis sûr que le comité examine à fond la question et je veux l'en féliciter.

Plusieurs questions ont été soulevées lors de ma dernière comparution devant le comité dont celle du système des répondants dans les milieux ruraux. Vous vous souvenez sans doute que M. Solomon a dit qu'il s'agissait d'une question importante dans les régions rurales. J'ai alors dit que j'étais prêt à étudier cette question et notamment à tenir compte du consensus qui se dégagerait à cet égard au sein du comité.

J'aimerais savoir si le comité serait d'accord pour permettre à un électeur de servir de répondant à un autre dans certaines régions s'il peut, sous serment, attester que la personne dont il se porte garant vit depuis la période prévue dans la loi, dans la section de vote depuis un certain temps.

Le système qui est proposé et que je vous invite à étudier—système que mes collaborateurs pourraient vous aider à étoffer—prévoit que la décision de permettre le recours à un répondant soit laissée au directeur général des élections. Il ne s'agirait donc pas de permettre ce système seulement dans les milieux ruraux.

Si nous songeons à ce genre de système, c'est qu'en 1997, Élections Canada a dû très rapidement trouver un moyen de permettre à un groupe de gens de pouvoir participer aux élections. Ces gens ne vivaient pas nécessairement dans un milieu rural. Je songe ici aux travailleurs de l'industrie diamantaire. Ces gens ne peuvent pas porter une carte d'identité sur eux lorsqu'ils vont au travail.

Pour des raisons de sécurité, ces travailleurs ne peuvent pas porter une carte magnétique sur eux lorsqu'ils vont au travail. Cela peut poser des difficultés s'ils souhaitent aller voter près de leur lieu de travail et peut-être même à la mine elle-même. Le même problème se pose peut-être dans d'autres industries.

Il serait peut-être donc préférable de ne pas faire une distinction entre les circonscriptions rurales et les circonscriptions urbaines, mais de permettre plutôt au directeur général des élections de désigner des régions où il serait possible d'avoir recours à un répondant. Je propose cette solution.

Ce système pourrait aussi être utilisé dans des collectivités autochtones, c'est-à-dire sur des réserves indiennes qui ne sont pas toujours en milieu rural. Bon nombre de ces réserves sont en milieu rural, mais pas toutes. Comme nos collègues du sud de l'Ontario le savent, certaines réserves indiennes se trouvent en milieu urbain ou du moins partiellement en milieu urbain.

Je propose que le comité examine le système proposé et établisse des critères auxquels le directeur général des élections serait tenu de se reporter pour établir s'il convient de recourir à des répondants, si le comité continue de croire que ce système serait utile.

La suggestion que je fais vise à répondre aux préoccupations exprimées par M. Solomon qui n'est sans doute pas le seul député d'une circonscription rurale que cette question intéresse.

[Français]

Le deuxième dossier que je voudrais aborder est celui des fiducies des candidats. Je pense que c'est vous qui l'aviez soulevé, chers collègues. Le projet de loi C-2 établit que, dans les cas où un parti enregistré constitue une fiducie pour une élection, son agent principal ou l'un des agents enregistrés dresse un rapport financier portant sur les opérations financières de celle-ci.

• 1745

Des membres du comité, plus particulièrement M. Bergeron, ont demandé pourquoi les mêmes règles ne s'appliquaient pas aux fiducies des candidats. Il y a quand même une différence, mais il y aurait peut-être une solution.

La première différence, c'est que les candidats, contrairement aux partis politiques, ne sont pas autorisés à recevoir des contributions en dehors des périodes électorales et qu'ils doivent remettre leur surplus à leur parti politique. D'ailleurs, celui qui m'a précédé en parlait. Donc, le candidat doit remettre cet argent au parti politique ou à l'association de la circonscription ou du district électoral où il s'est présenté.

Cela dit, selon certaines propositions, l'objectif visé est de s'assurer que le nom du donateur soit divulgué, quelle que soit la filière par laquelle l'argent est parvenu jusqu'au candidat. Si tel est l'objectif, et cela semble être le cas, il y a peut-être une solution, qui serait la suivante.

Le comité pourrait se pencher sur l'opportunité de modifier la loi de manière à préciser que l'agent officiel d'un candidat pendant la campagne électorale doit produire, dans les comptes de campagne électorale du candidat, les nom et adresse de chaque donateur qui a fait une ou plusieurs contributions d'une valeur totale de 200 $—puisque c'est le chiffre de divulgation que je propose ailleurs dans le projet de loi—à l'agent officiel, par l'intermédiaire d'une fiducie constituée par un candidat ou pour le bénéfice d'un candidat éventuel.

Si on établissait des règles s'appliquant à tous les éventuels candidats, eh bien, on pourrait aller dans la rue et identifier n'importe qui. Pratiquement n'importe qui peut être un candidat éventuel. Comment fait-on pour trier tout cela?

Je vous invite à penser à cette façon de faire. Si vous jugiez que c'était la bonne, je serais prêt à y travailler avec vous. Il y peut-être là un élément de solution, si vous pensez qu'une solution est nécessaire.

[Traduction]

M. White a soulevé la question du vote électronique. Je ne sais pas s'il l'a soulevée en comité, mais il l'a certainement soulevée lors d'une conversation avec moi. Cette conversation était d'ailleurs très intéressante. Je sais aussi qu'il a soulevé la question auprès du directeur général des élections lors d'une séance de ce comité.

J'ai revu la proposition qui est faite dans le projet de loi C-268 de modifier la loi électorale de manière à permettre le vote électronique par téléphone et pas seulement en personne au bureau de scrutin. Aux termes de la proposition de M. White, le directeur général des élections devra concevoir et mettre à l'essai un système de vote électronique qui pourrait être utilisé lors d'élections générales ou d'une élection complémentaire après décembre 1999.

Avant de songer à adopter le système qui est proposé, j'invite le comité à examiner quelles en seraient les conséquences au point de vue sécurité, coût et protection de la vie privée et quel serait aussi l'accueil qu'y réserverait le public.

Je sais évidemment que le recours au vote électronique est courant aux États-Unis, mais pas par téléphone comme le propose M. White. Peut-être a-t-on recours dans une certaine mesure au vote électronique par téléphone aux États-Unis, mais le plus souvent ils doivent voter de cette façon en personne au bureau de scrutin. À la fermeture des bureaux de scrutin, il suffit d'appuyer sur un bouton pour savoir quel est le résultat du vote.

On a recours à ce système aux États-Unis lors d'élections auxquelles peuvent se présenter jusqu'à 80 candidats. On évite ainsi de devoir imprimer un bulletin de vote long de trois pieds. Il n'y a jamais autant de candidats lors des élections fédérales.

Les candidats eux-mêmes pensent sans doute toujours qu'il y a trop de noms sur le bulletin de vote, mais c'est une autre affaire.

Le bulletin de vote n'est donc jamais très long au Canada. En outre, nous n'élisons jamais en même temps un député, un maire, un administrateur scolaire, un conseiller municipal ou un président de district régional. Nous n'élisons qu'un député.

• 1750

S'il est donc raisonnable de souhaiter et même inévitable que nous adopterons à un moment donné une certaine forme de vote électronique, je partage pour l'instant la préoccupation exprimée par Élections Canada dans son rapport:

    Le défi auquel font face les parlementaires et l'occasion qui se présente à eux est de s'assurer qu'on tire partie au Canada des avantages potentiels des nouvelles méthodes de scrutin sans compromettre l'intégrité du processus ni la confiance des Canadiens dans leur système électoral.

Je recommande donc que le comité étudie soigneusement cette proposition touchant le vote électronique avant de l'inclure dans la loi. Il s'agit peut-être d'une question à laquelle il devra consacrer plus de temps.

Au lieu d'adopter le vote électronique par téléphone, peut-être qu'une façon de mettre à l'essai le système serait d'abord, lors d'une élection complémentaire, de permettre aux gens qui se présenteraient à un bureau de scrutin de voter en appuyant sur le bouton d'une machine à voter. À la fermeture du bureau de scrutin, il sera alors possible d'établir immédiatement l'issue du vote. Je vous rappelle cependant qu'on ne met pas beaucoup de temps à l'heure actuelle à compter les votes lors d'élections fédérales.

Pour diverses raisons, on met beaucoup plus de temps à transmettre ces données au directeur de scrutin. Peut-être pourrait-on lui transmettre ces données par voie électronique afin d'accélérer le processus.

Pourquoi ne pouvons-nous pas envoyer par télécopie le résultat du vote au directeur de scrutin de la circonscription au lieu de demander à quelqu'un d'apporter la boîte de scrutin par voiture jusqu'au bureau principal? Cette personne peut être bloquée dans la circulation et mettre deux heures à s'y rendre. Nous avons tous vécu des cas semblables. Voilà une question liée au vote électronique qu'il serait sans doute plus facile à régler. Il ne serait sans doute pas nécessaire de modifier la loi. Il s'agirait simplement d'une décision administrative.

Pour ce qui est de l'inscription des partis politiques, M. White a proposé un projet de loi prévoyant qu'on reconnaisse à un parti politique le statut de parti inscrit lorsqu'il présente 12 candidats.

J'ai fait allusion à cette question lors de ma dernière comparution devant le comité. Je rappelle au comité qu'il a décidé l'an dernier lorsqu'il étudiait la question de la réforme électorale, de ne pas se prononcer sur les questions dont sont actuellement saisis les tribunaux. Je crois que c'est une sage décision.

Comme vous le savez, monsieur le juge Molloy a statué que le seuil actuel de 50 candidats était trop élevé et l'a fixé à deux. J'ai demandé que cette décision soit portée en appel au nom du gouvernement. Je pense que le tribunal s'est trompé. Comme je ne veux pas me prononcer sur une affaire qui est devant les tribunaux, je m'en tiendrai à cela.

J'aimerais maintenant parler des directeurs de scrutin. Cette question a été soulevée la semaine dernière je crois à la Chambre par deux députés. J'ai l'impression que je devrais sans doute vous en parler maintenant car quelqu'un va de toutes façons poser une question là-dessus.

Un député a présenté un projet d'initiative parlementaire visant à fixer des critères auxquels le directeur général des élections devra se reporter en ce qui touche le recrutement, le congédiement et le remplacement des directeurs de scrutin.

Je voudrais rappeler aux membres du comité que la Commission a conclu «qu'il serait plus avantageux et plus rentable d'améliorer la procédure de nomination actuelle plutôt que de la changer du tout au tout». C'est ce qu'on lit à la recommandation 2.3.6 du rapport de la Commission Lortie. Ce n'est pas moi qui ai fait cette recommandation.

Le comité n'a pas non plus recommandé de modifier à la procédure de nomination dans le rapport qu'il a déposé à la Chambre.

Je vous rappelle aussi que sept provinces canadiennes et la Chambre des communes ont le même processus. Huit Parlements au Canada utilisent donc le même processus.

• 1755

Certains membres des médias avaient la fausse impression que je pouvais, à titre de ministre responsable des élections, changer les directeurs de scrutin chaque fois qu'il y a une élection. Ce n'est évidemment pas le cas. Je n'ai absolument pas ce pouvoir.

Un directeur de scrutin occupe son poste pendant longtemps. Il ne cesse d'occuper son poste que s'il y a un remaniement de la carte électorale. Si les limites de circonscription ne changent pas même s'il y a remaniement, le directeur de scrutin demeure le même. Si 10 ou 12 directeurs de scrutin changent la même année c'est qu'ils ont remis leur démission, soit qu'ils sont morts. On ne peut démettre un directeur de scrutin sans motif valable et cela pourrait donner lieu à un litige devant les tribunaux. Contrairement à ce qu'on dit, il est très difficile de démettre un directeur de scrutin de ses fonctions.

Dans ma propre circonscription, le directeur de scrutin a été nommé par le gouvernement précédent lors du remaniement qui a eu lieu, si je ne m'abuse, en 1988. En 1993, il y a remaniement et le directeur de scrutin aurait pu changer. J'ai cependant recommandé qu'on donne ce poste à la même personne qui faisant de l'excellent travail même si elle avait été nommée par un gouvernement d'une autre allégeance que la mienne. Je suppose qu'on a procédé de la même façon dans beaucoup d'autres circonscriptions.

À propos des périodes d'interdiction, j'aimerais dire à l'intention du comité, mais aussi à l'intention des médias, comment la période d'interdiction des sondages s'appliquerait en cas d'élection. Peut-être que même cela n'est malheureusement pas trop bien compris ou peut-être que le projet de loi n'est pas suffisamment clair. Malgré tout, je pense que c'est assez clair dans la loi quand on prend la peine de bien la lire.

La période d'interdiction concerne les 48 dernières heures. Ce qui veut dire samedi soir, à minuit. En fait, la seule période d'interdiction dont nous parlons est celle du dimanche.

Un journaliste d'un journal qui ne publie pas le dimanche est venu me voir pour me dire que c'était injuste pour son journal. Je ne vais pas nommer ce journal, mais vous pouvez vous imaginer combien de journaux importants ne publient pas le dimanche.

C'est de la foutaise. Cela ne concerne aucun autre jour que le dimanche—autrement dit, le jour qui précède immédiatement l'élection. Même là, cela ne concerne que la divulgation des résultats du nouveau sondage. Même le dimanche, si dans l'article on fait mention d'un sondage qui a été fait le mardi d'avant, il n'y a absolument rien de mal à cela. Ce n'est donc pas quelque chose qui gêne terriblement un grand nombre de gens. C'est certainement une toute petite mesure qui permet d'assurer à la population canadienne qu'elle a le dernier mot.

Je suis disposé à répondre aux questions concernant tout aspect que j'ai soulevé ou tout autre sujet.

Le président: Merci, monsieur Boudria.

J'informe les membres qu'on nous a fait savoir qu'on doit apporter des changements à la salle vers 18 h 10. Pourrions-nous donc nous contenter de questions de 30 secondes? Est-ce possible?

M. White en a au moins une. Commençons par M. White et voyons ce que nous pouvons faire.

M. Ted White: Merci d'avoir comparu, monsieur le ministre.

Concernant les nominations des directeurs du scrutin, le DGE dans son exposé a employé le mot «essentiel—il est essentiel qu'il soit autorisé à nommer les directeurs du scrutin en fonction de leur mérite. Je me demandais donc si vous pouviez nous dire ce que vous pensez d'une proposition qui m'a été faite et selon laquelle à mesure que les actuels directeurs du scrutin se retireront, que ce soit à cause de leur décès ou par attrition, le projet de loi pourrait contenir une disposition par laquelle le directeur général des élections pourrait commencer à nommer les directeurs du scrutin en fonction de leur mérite—il n'est pas question du reste du personnel, mais seulement des directeurs du scrutin».

Deuxièmement, en ce qui concerne le nombre de candidats, la règle des 50 candidats, je dirais qu'en tant que Parlement, si nous estimons que quelque chose ne va pas, nous n'avons pas besoin d'attendre une décision des tribunaux; nous pouvons immédiatement régler la question. Il me semble que ce chiffre de 50 est assez arbitraire et difficile à justifier, vraiment, compte tenu de la décision Molloy. Si donc le gouvernement ne peut accepter le seuil de deux candidats établi par la Cour de l'Ontario, est-ce que le seuil un peu plus logique comme celui de 12 ne serait pas plus approprié, puisqu'il est question de la Chambre et qu'il faut qu'il y ait 12 membres d'élus dans un parti?

• 1800

Ma dernière question et ma dernière observation concernent le vote électronique. Vous avez mentionné qu'en tant que comité nous devrions examiner la sécurité, les coûts, le respect de la vie privée, l'acceptation par le public et d'autres critères encore. Je vous dirais, monsieur le ministre, que le directeur général des élections a demandé l'autorisation de faire enquête et d'étudier les méthodes—c'est tout ce qu'il souhaite—afin de pouvoir établir ce qui est économique, quelles sont les mesures de sécurité en place, si l'on respecte le droit à la vie privée et si la population accepte bien ces mesures. Sauf votre respect, j'oserais aussi dire que le présent comité n'a pas la compétence pour faire cet examen. Nous ne sommes pas en mesure de le faire. Mais c'est là le travail du directeur général des élections qui agit de façon non partisane et c'est le travail de son personnel qualifié, qui est en mesure de remplir ces fonctions.

À nouveau, je vous demande si vous n'envisageriez pas d'insérer dans le projet de loi ce que le directeur général des élections a demandé, à savoir simplement le droit de faire enquête et d'évaluer, et quand il aura l'assurance qu'il peut respecter toutes ces conditions, peut-être pourra-t-on s'en servir dans le cadre d'une élection partielle, par exemple.

[Français]

M. Stéphane Bergeron: Monsieur le président, peut-on permettre à tous les députés intéressés de faire leurs commentaires et de poser leurs questions afin qu'on puisse accélérer les choses? Le ministre pourrait revenir à la fin. Certaines questions et certains commentaires vont probablement se recouper.

[Traduction]

Le président: Oui. Je crois que c'est une bonne suggestion et je l'accepte. Je ne voulais pas empêcher M. White d'obtenir les réponses désirées parce que je pensais qu'il aurait peut-être une question supplémentaire; je demanderais à ceux qui veulent poser des questions de le faire de façon succincte s'il vous plaît. Nous passerons maintenant à M. Bergeron pour les questions, et j'insiste, les questions.

[Français]

M. Stéphane Bergeron: Je vais faire exactement comme M. White, monsieur le président. Vous me permettrez de commenter les points qui ont été apportés par le ministre.

D'abord, je voudrais remercier le ministre d'avoir fait preuve d'ouverture aux différents commentaires qui ont été formulés et d'être revenu au comité avec certaines propositions.

Quant à la question de la distinction entre les électeurs des régions rurales et ceux des régions urbaines, je suis d'avis qu'il est un peu dangereux d'établir des distinctions entre les électeurs. Le fait que vous vouliez être prudent quant à la désignation de certains secteurs et vous assurer que le processus de désignation soit bien encadré m'apparaît intéressant. Je pense qu'on devra se pencher sur cette question. M. Siegel du Parti libéral disait dans sa présentation que, même dans la région de Toronto, il peut se produire des cas où on n'a pas les pièces d'identité nécessaires et où on a besoin de ce genre de recours pour bien identifier une personne, tout en faisant en sorte que ce processus d'identification soit bien encadré.

Sur la question des fonds en fiducie, encore une fois, je vous remercie de l'ouverture que vous avez manifestée. Vous avez raison de souligner qu'on ne sait pas nécessairement qui voudra être candidat. On sait, bien sûr, que les candidats n'ont pas le pouvoir d'émettre des reçus d'impôt en dehors des périodes électorales, mais on sait pertinemment que des candidats se constituent des fonds en fiducie et versent, au moment du déclenchement des élections, un montant qui apparaît dans le rapport d'élection comme provenant du Fonds des amis de Stéphane Bergeron ou du Fonds des amis de Don Boudria. Des gens contribuent un certain montant à la campagne sans qu'on sache quelle est la source de ce fonds en fiducie. Conformément à la recommandation du comité, l'important est de savoir d'où provient cet argent dans un souci de transparence, un principe sur lequel vous êtes en parfait accord.

Quant à la nomination des directeurs du scrutin, outre le fait que le directeur général des élections a fait cette recommandation à deux reprises et que tous les partis d'opposition à ce comité étaient d'accord sur cette recommandation, je vous signalerai qu'une recommandation du rapport Lortie semble aller dans le sens de votre intervention, mais il y a également une phrase fort importante du rapport Lortie que je me permettrai de vous citer:

    Dans tout système démocratique, il est essentiel que le processus électoral soit administré avec efficacité et la Loi électorale, appliquée avec impartialité. Le personnel électoral doit être indépendant du gouvernement du jour et à l'abri de toute influence partisane.

C'est tiré de la page 503 du rapport de la Commission royale sur la réforme électorale et le financement des partis. Le directeur général des élections a émis un certain nombre de préoccupations assez importantes, notamment sur son incapacité à démettre de leurs fonctions des directeurs du scrutin qui sont manifestement incompétents. Il éprouve des difficultés dans des cas comme ceux-là. Je pense qu'on doit nécessairement se pencher sur la question et adopter un certain nombre de mécanismes qui vont rendre le processus beaucoup plus transparent et beaucoup plus équitable.

• 1805

Voici un dernier commentaire, cette fois sur le vote électronique, monsieur le président. Je suis tout à fait d'accord avec vous, monsieur le ministre, que sur cette question, nous devons être prudents et agir avec circonspection, en prenant le temps de bien analyser les choses.

[Traduction]

Le président: Je devrais peut-être ajouter un point d'interrogation à la fin du commentaire de M. Bergeron pour que cela devienne une question.

Nous passerons maintenant à Mme Parrish qui a une petite question puis à M. Pickard.

Mme Carolyn Parrish: Monsieur le ministre, j'aime la façon dont vous avez donné suite à nos préoccupations ainsi qu'à celles de l'opposition. Cependant, les propositions touchant les répondants m'inquiètent sincèrement. Je crois qu'avec ces systèmes de répondants, ce sera tout ou rien.

En dépit de la petite histoire de M. Solomon sur le type qui conduit le tracteur sans avoir de pièces d'identité, je dois signaler que je connais beaucoup de femmes indiennes de ma circonscription qui n'ont jamais eu de cartes d'identité. Leurs maris s'occupent de toutes ces choses pour elles. Si vous entendez autoriser le système de répondants dans une région du pays, vous devez le faire à l'échelle nationale.

Je crois que bon nombre des députés des circonscriptions qui comptent beaucoup de membres de groupes ethniques vous feront le même commentaire. C'est très logique, et c'est parfaitement normal dans ces familles que les femmes n'aient pas de cartes d'identité.

Il faut être très prudent dans cette affaire. Je sais pourquoi vous voulez le faire. Je crois que nous essayons d'inclure tout le monde ici.

L'hon. Don Boudria: Je n'ai encore rien fait.

Mme Carolyn Parrish: Très bien. J'aime bien la petite histoire de M. Solomon sur celui qui se promène en tracteur; c'est assez imagé. Mais lorsque le type est monté à bord de son tracteur, et s'est rendu au bureau de scrutin, il devait avoir un permis de conduire ou il aurait été arrêté. En fait c'est comme si vous fermez les yeux sur un comportement illégal; à mon avis, il ne faudrait pas le faire.

Le président: Merci.

Monsieur Pickard.

M. Jerry Pickard: Merci beaucoup, monsieur le président.

Si j'ai bien compris, le directeur général des élections a suggéré qu'on exerce un contrôle sur les directeurs du scrutin qui, pour une raison ou pour une autre, sont incompétents. Je pense qu'il faudrait avoir une mesure en ce sens. Les gens peuvent avoir des accidents cérébrovasculaires. Ils peuvent avoir des problèmes physiques dont il faut tenir compte. Pour être honnête, je crois que c'est une préoccupation légitime.

Céder l'autorité simplement pour dire qu'on l'a fait ça c'est une autre histoire. Mais je crois qu'il faut se pencher sur ces préoccupations légitimes lorsque pour une raison ou pour une autre il y a un problème de compétence.

Merci.

Le président: Merci.

Monsieur le ministre, vous disposez de 30 secondes pour répondre à ces dix questions.

L'hon. Don Boudria: J'invite mes collègues à être patients, et à me donner une ou deux minutes, parce que les questions qui ont été soulevées sont fort importantes.

M. White a soulevé le problème de la nomination des directeurs du scrutin, et on a parlé de nomination en fonction du mérite. J'aimerais signaler que c'est actuellement ce qu'on fait.

Certains ne seront pas d'accord, mais la Commission Lortie a indiqué très clairement dans son rapport que les directeurs du scrutin faisaient du bon boulot. Nous n'avons aucune indication du contraire.

[Français]

Je suis tout à fait d'accord sur la notion de non-partisanerie dont on a parlé. Il faut faire en sorte que les gens, après qu'ils ont été nommé, demeurent non partisans à l'extrême. C'est très important. Cela est nécessaire à l'intégrité du système. Si on établit des modalités qui permettent de les démettre plus facilement de leurs fonctions, que ce soit par le gouvernement ou par le président des élections, et que les pressions exercées pour les démettre ne sont pas tellement fortes, le processus pourra être entaché. Il faut qu'il y ait des mécanismes pour démettre les incompétents de leurs fonctions, mais il faut quand même être prudent; il ne faut pas que ces mesures soient trop faciles à prendre.

[Traduction]

Une fois que vous aurez étudié le projet de loi, je crois que si vous jugez que les dispositions prévues pour la révocation d'un directeur du scrutin ne sont pas appropriées, nous pourrons nous pencher sur la question.

Il existe actuellement un processus visant la révocation du directeur du scrutin. J'attire votre attention sur la page 16 du projet de loi, à l'article 24. On y précise que le gouverneur en conseil nomme un directeur du scrutin pour chaque circonscription; il ne peut le révoquer que pour un motif valable prévu au paragraphe 24(7). Les motifs énumérés sont les suivants: le directeur est incapable, notamment pour cause de maladie ou d'incapacité physique ou mentale, de s'acquitter d'une manière satisfaisante des fonctions que lui confère la présente loi. En d'autres termes, il faut démontrer qu'on dispose des motifs valables pour le révoquer, comme c'est le cas pour un juge—peut-être pas tout à fait exactement comme c'est le cas pour un juge—mais pour révoquer une personne qui dispose d'une autorité semblable. Je crois qu'il importe que le seuil établi soit élevé pour que personne ne puisse exercer de pressions sur ces gens.

• 1810

Il y a aussi d'autres critères qui sont appliqués: défaut de s'acquitter convenablement de ses fonctions de directeur du scrutin, défaut de compléter les révisions, etc. Autrement dit, si le directeur du scrutin ne sait pas ce qu'il fait et ne fait pas bien son travail, il peut effectivement être démis de ses fonctions.

Après les dernières élections, j'ai entrepris des démarches pour faire démettre de leurs fonctions quatre directeurs du scrutin. Les quatre ont fini par démissionner d'eux-mêmes quand ils ont su que j'allais entamer la procédure visant à les faire démettre. C'est donc un total de quatre pour l'ensemble du pays.

Dans un cas, il s'agissait du directeur du scrutin dans la circonscription d'un député du Bloc québécois. J'ai consulté le député, qui a confirmé que la personne était absolument incapable de faire le travail ou qu'elle refusait de le faire convenablement. Nous étions d'accord sur la recommandation qui avait été faite par le directeur général des élections. Nous avons entamé la procédure, et la personne a démissionné parce qu'elle savait qu'elle serait congédiée de toute façon.

Il y en avait trois autres, qui étaient tous, si je ne m'abuse, dans les circonscriptions de députés libéraux, bien que je n'en sois pas absolument sûr. Je sais toutefois de façon certaine que, dans un cas, il s'agissait du directeur du scrutin dans la circonscription d'un député du Bloc québécois.

Peu importe, de toute façon, qui est député de la circonscription. Si le directeur du scrutin n'est pas bon, cela ne sert personne, et le directeur est congédié.

Il y a deux ou trois autres questions que je veux aborder avec vous. Pour ce qui est de fixer le nombre de candidats à 12 ou à deux, j'ai indiqué que je ne pouvais guère me prononcer là-dessus. À mon avis, le nombre minimal de 50 candidats qui s'applique à l'heure actuelle est celui qui devrait continuer à s'appliquer, et c'est pour cette raison que j'ai interjeté appel de la décision. Tant que l'appel n'aura pas été entendu, je ne me prononcerai pas sur quelque chiffre hypothétique que ce soit qui serait inférieur à celui qui est fixé à l'heure actuelle. Je vous encouragerais à faire de même. Bien entendu, vous êtes maîtres des travaux de votre comité.

Sur la possibilité que le directeur général des élections étudie la question du scrutin électronique, je suis d'avis qu'il peut le faire aux termes de l'actuelle loi et qu'il peut même le faire aux termes de la nouvelle loi.

Vous vous souviendrez qu'un député a posé une question au sujet du fait que le directeur général des élections participait à un processus d'éducation publique en organisant dans les écoles des élections simulées à l'intention des élèves, de concert avec les Nations Unies, et plus particulièrement avec le Fonds des Nations Unies pour les enfants, l'UNICEF, qui est le groupe responsable de cette activité.

À mon avis, le mandat du directeur général des élections est assez vaste pour lui permettre de faire cela. S'il y a lieu d'y apporter quelques précisions pour lui permettre, non pas de faire des essais en période électorale, mais de faire des simulations ou d'autres exercices de ce genre, je serais prêt à entendre les propositions à cet effet. Je suis toutefois convaincu que le mandat actuel est assez vaste.

Si vous voulez bien m'accorder encore une ou deux minutes, quelqu'un a soulevé la question, et j'aime autant la soulever maintenant, du droit de vote du directeur du scrutin en cas de partage des voix. Je crois savoir que la question est quelque peu controversée pour certains députés. J'ai expliqué que la dernière fois où l'on avait permis au directeur du scrutin de voter pour départager les voix, était en 1963. J'ai quelques informations supplémentaires sur le nombre de fois où cela s'est produit depuis la Confédération, sur le nombre de fois où le directeur du scrutin a effectivement voté pour départager les voix: 1887, 1891, bien qu'il n'ait pas eu à voter à la suite du recomptage qui a eu lieu, 1896, 1935 et 1963. Cela ne fait que cinq fois. Depuis la Confédération, il doit y avoir 100 000 personnes qui ont été privées de leur droit de vote à cause d'une règle qui a été appliquée cinq fois.

Enfin, tous ceux qui sont autour de la table, ou la plupart d'entre nous, se souviendront de ce qui est arrivé à Maurizio Bevilacqua et à M. O'Brien en 1988; il y a eu un grand nombre de recomptages, puis les tribunaux ont décidé que le résultat était si serré que personne ne pouvait dire qui était le vainqueur et ont ordonné la tenue de nouvelles élections—sauf qu'il n'y a pas eu d'élection deux semaines plus tard, comme je le propose dans le projet de loi. Un de nos collègues qui siège aujourd'hui à la Chambre des communes a connu un processus qui a duré deux ans et demi. Je vous le demande, est-ce mieux comme ça? Pensez-y. C'est l'expérience de certains d'entre nous et d'un de nos collègues en particulier—et il y a aussi tous ses adversaires qui se sont présentés dans des élections où le résultat a été semblable.

• 1815

Je ne crois pas que cela a beaucoup contribué à améliorer le processus démocratique. Avant d'être trop sévères à l'égard de cette proposition, je vous inviterais à examiner les solutions de rechange.

Quant à la question du vote féminin, eh bien, j'attends toujours vos conseils. Une députée, Mme St-Hilaire, m'a écrit à ce sujet. Elle a dit qu'elle aime ma proposition, mais elle croit qu'il vaut mieux prévoir un genre de seuil en fonction des élus féminins plutôt qu'en fonction des candidates féminines.

Comme vous le savez, j'ai attiré l'attention du comité sur la recommandation de la Commission Lortie et je vous ai invités à faire votre propre recommandation, soit cette recommandation-là ou une autre. Quelqu'un vient de faire une autre proposition. Ajoutez cette dernière recommandation à la gamme dont vous disposez déjà et faites une recommandation.

Si vous pensez que tout fonctionne très bien, eh bien, je suis certainement prêt à vous écouter, en tenant compte, toutefois, du fait que notre bilan par rapport aux autres démocraties élues n'est pas formidable. À l'heure actuelle, il y a 21 femmes qui siègent à notre Parlement national. Le taux de participation des pays tels que la Suède, le Danemark, la Finlande, la Norvège, les Pays-Bas, l'Allemagne, l'Afrique du Sud, la Nouvelle-Zélande, l'Argentine, l'Autriche, l'Islande, le Mozambique, les Seychelles, etc. est beaucoup plus élevé que le nôtre. Par conséquent, nous devrions réfléchir un peu plus à la question avant de la rejeter de revers de la main.

Merci.

Le président: Merci, monsieur le ministre, pour avoir répondu à ces questions. Si nous avons d'autres questions, je sais que vos fonctionnaires ne sont pas loin.

Chers collègues, on se verra dans 40 minutes. La séance est levée.