HERI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON CANADIAN HERITAGE
COMITÉ PERMANENT DU PATRIMOINE CANADIEN
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le jeudi 18 mai 2000
Le président (M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.)): Le Comité permanent du patrimoine canadien
[Français]
se réunit aujourd'hui pour continuer son étude du projet de loi C-27,
[Traduction]
Loi concernant les parcs nationaux du Canada.
Avant que nous ne commencions, je tiens à souligner que la semaine a été très difficile pour la plupart des membres du comité étant donné nos longues heures de séance et je tiens à remercier les députés pour la grande collaboration dont ils ont fait preuve. J'inclus aussi dans mes remerciements Peter ainsi que le personnel et tous ceux qui ont organisé les séances. Elles ont été longues, et les députés ont été très assidus. Merci beaucoup à tous.
Nous sommes heureux d'accueillir aujourd'hui divers témoins qui sont venus de loin pour nous présenter leur point de vue. Nous accueillons, de l'Association for Mountain Parks Protection and Enjoyment, M. Brad J. Pierce, président; du Comité municipal de Jasper, M. Richard Ireland, président; de la Wasagaming Tenants Association, M. Derek Booth; et de l'Alliance de la fonction publique du Canada, M. Ed Cashman.
Monsieur Cashman, je vous invite à prendre place à la table. S'il y en a d'autres qui souhaitent prendre la parole quand ce sera à votre tour, nous les inviterons à prendre place à la table à ce moment-là. Pour l'instant, nous nous attendons à ce qu'il n'y ait qu'un porte-parole par organisme, pour tenir compte des contraintes de temps.
Nous allons suivre la formule de la table ronde. Chaque organisme prendra la parole pendant une dizaine de minutes, et nous aurons ainsi du temps pour que les députés puissent poser des questions. Nous avons un autre engagement. Nous devons nous rendre au Musée de la nature après la réunion, si bien que nous devrons lever la séance à l'heure, c'est-à-dire à 11 heures. Je demande donc la collaboration de tous et chacun; je vous invite à être concis et à respecter le temps alloué.
Qui veut commencer? J'ai M. Pierce en premier sur ma liste. Aimeriez-vous commencer, monsieur Pierce?
M. Brad J. Pierce (président, Association for Mountain Parks Protection and Enjoyment): Je veux bien, monsieur le président.
Le président: Très bien.
M. Brad Pierce: Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, je m'appelle Brad Pierce. Je suis président de l'Association for Mountain Parks Protection and Enjoyment. Notre association, connue sous le sigle d'AMPPE, est heureuse de pouvoir présenter un exposé au comité sur le projet de loi C-27.
Depuis sa création en 1994, l'AMPPE participe de façon active à l'élaboration des politiques gouvernementales concernant l'utilisation et la jouissance responsables des parcs de montagne du Canada par le public tout en préservant leur environnement fragile. L'AMPPE appuie entièrement la mission de conservation des parcs de montagne du Canada, mais elle estime également que les parcs doivent aussi être utilisés pour l'enrichissement des connaissances et l'agrément des Canadiens, comme l'indiquent la loi actuelle et l'énoncé d'objet du projet de loi.
Outre quelques points techniques dont je parlerai plus tard, nos inquiétudes au sujet du projet de loi C-27 ne portent pas tant sur le contenu de projet de loi qui, globalement, représente un renforcement des amendements précédents, mais plutôt sur ses lacunes. Nous constatons notamment le manque de mécanismes assurant un équilibre des pouvoirs du ministre et de Parcs Canada et garantissant que les parcs seront des lieux voués à la fois à la nature et au public. Sans l'ajout de tels mécanismes, nous croyons que de fortes pressions provenant de l'intérieur de Parcs Canada, du cabinet du ministre et de puissants groupes environnementalistes vont tendre à une «renaturalisation» des parcs et restreindre indûment les intérêts du public à l'égard des parcs.
• 0910
Au cours des dernières années et depuis la réalisation de
l'étude Banff-Vallée de Bow, on a imposé de nombreuses restrictions
aux visiteurs des quatre parcs des Rocheuses.
Il y a eu entre autres des restrictions sur le développement, y compris le développement de la ville de Banff; l'élimination d'installations physiques, comme le camp des cadets de l'Armée, à Banff; la fermeture de sentiers et d'autres infrastructures des parcs; des restrictions sur les types d'activités et l'utilisation des parcs, y compris des restrictions imposées aux capacités des installations de ski; une augmentation des droits et des coûts pour les activités menées dans les parcs, y compris une hausse spectaculaire des baux pour les titulaires de domaines à bail.
Tout comme la majorité de nos membres, la plupart des observateurs conviennent que certaines restrictions s'imposaient et que ces restrictions représentent un changement contribuant à préserver l'intégrité écologique des parcs. Ce qui nous ennuie dans les mesures adoptées, et c'est également la principale source de controverse, c'est qu'on s'est peu soucié des intérêts légitimes du public dans l'utilisation des parcs. À notre avis, cela tient au fait que ces restrictions ont été élaborées, approuvées et mises en oeuvre en fonction des seuls critères et préoccupations des biologistes de la conservation, sans égard à leurs impacts sociaux ou économiques. Pour reprendre une image utilisée ailleurs, le ministre et Parcs Canada ont oublié de poser une patte de leur tabouret, et ont ainsi compromis l'équilibre des parcs.
Nous constatons la même tendance dans le récent rapport du groupe d'experts sur l'intégrité écologique, qui a recueilli peu d'avis, s'il en est, aux points de vue social ou économique. En outre, nous n'avons relevé aucune indication quant à l'impact de ses recommandations sur les plans social ou économique.
Selon certaines estimations, le coût de mise en oeuvre des recommandations du groupe d'experts se chiffre dans les milliards de dollars. De telles sommes portent à réfléchir.
C'est là que se situent nos principales inquiétudes au sujet du projet de loi C-27. Nous croyons que ce projet de loi accordera encore davantage de pouvoirs au ministre et à Parcs Canada, leur permettant ainsi de prendre des mesures pour protéger l'intégrité écologique sans égard à leur impact sur l'utilisation des parcs par les visiteurs ou sur les économies régionales.
À notre avis, tel qu'il est proposé, le projet de loi comporte peu ou pas de mécanismes limitant le pouvoir du ministre, de Parcs Canada ou des groupes environnementalistes d'empêcher indûment les Canadiens d'exercer les activités qu'ils pratiquent actuellement dans les parcs, ce qui causerait un tort grave et irréparable à des éléments importants du secteur touristique canadien.
Il est nécessaire d'intégrer au projet de loi des mécanismes de contrôle offrant aux utilisateurs des parcs un moyen de faire contrepoids aux pressions incessantes visant à limiter plus qu'il n'est nécessaire l'utilisation des parcs par le public.
C'est pourquoi nous portons à votre attention les propositions suivantes.
Il s'agit, entre autres, d'ajouter un paragraphe 8(3), qui se lirait comme suit:
-
Le ministre tiendra compte de l'agrément et de l'enrichissement des
connaissances que procurent les parcs aux visiteurs et atténuera
l'impact des mesures prises pour en maintenir l'intégrité
écologique.
Nous estimons que cette disposition imposera au ministre et à Parcs Canada l'obligation positive de prendre en compte l'impact social et économique des actions prises dans le but de préserver l'intégrité écologique en tant que priorité première dans les parcs.
Deuxièmement, nous pensons qu'il faut ajouter au projet de loi une disposition prévoyant un examen par un organisme indépendant ou un appel des décisions prises en vertu du projet de loi à l'égard du zonage des parcs et de leur utilisation par les visiteurs, à l'égard des résiliations, rétrocessions et renouvellements ou non- renouvellements des baux et des permis d'occupation, à l'égard des évaluations environnementales et examens environnementaux préalables, des mesures d'atténuation des dommages à l'environnement et des plans communautaires et plans de gestion des parcs.
Il conviendrait, à tout le moins, d'appliquer une norme concernant le caractère équitable et raisonnable de ces pouvoirs ainsi que des règles de justice naturelle dans ces prises de décisions.
Une des préoccupations immédiates que nous entretenons à cet égard est le sort qui sera réservé aux 3 000 baux accordés aux services commerciaux périphériques et à d'autres installations situées dans des parcs, qui arriveront à échéance au cours des prochaines années. À cause des nouvelles directives et restrictions recommandées par la Commission d'examen de l'OCA et de l'augmentation substantielle du coût des baux, bon nombre d'exploitants ont indiqué qu'ils ne pourraient poursuivre leurs activités.
Faut-il comprendre que ces gens n'ont aucun recours et vont perdre leur gagne-pain, sans parler de la disparition de quelques- uns des principaux attraits des parcs? Le projet de loi doit comporter des mécanismes permettant à ces personnes de demander un examen indépendant de ce type de décisions qui touchent des droits fondamentaux.
Nous reconnaissons que les règlements et les politiques de Parcs Canada prévoient une forme minimale de droit d'appel en ce qui concerne les baux, mais nous estimons que ce droit devrait être intégré explicitement dans la loi afin de garantir le maintien de ces obligations et de ces droits. Malheureusement, le temps ne nous a pas permis de formuler en détail la mise en oeuvre de ce droit, mais je tenais à en parler tout de même.
• 0915
Troisièmement, bien que cette proposition ne soit peut-être
pas du ressort du comité—et peut-être faudrait-il qu'elle figure
dans notre première suggestion—nous pensons qu'il conviendrait
d'accorder à Parcs Canada, par règlement ou tout autre moyen, le
pouvoir de créer un secrétariat des visiteurs ou un poste
d'ombudsman des visiteurs; il faudrait donner à cet organe des
ressources suffisantes et le charger de veiller à ce que les
intérêts du public, y compris les intérêts sociaux et économiques,
soient considérés équitablement avant toute décision relative à
l'intégrité écologique des parcs. Apparemment, une personne
responsable de l'intégrité écologique sera nommée dans chaque parc:
il nous semble juste de traiter de la même manière les intérêts du
public en ce qui concerne les parcs.
Quatrièmement, nous estimons qu'une des principales raisons pour lesquelles les intérêts du public à l'endroit des parcs ont été mis de côté au cours des dernières années tient en bonne partie au fait que les ressources affectées à Parcs Canada ont été largement utilisées en fonction de considérations écologiques. Deux aspects de cette question retiennent notre attention.
Tout d'abord, il apparaît clairement à tous les observateurs que Parcs Canada ne dispose pas de ressources lui permettant de remplir son mandat et qu'il serait nécessaire d'augmenter considérablement son budget et ses ressources.
Deuxièmement, depuis quelques années, Parcs Canada n'a que peu—ou pas—investi dans des questions autres que les aspects écologiques. L'affectation de ressources devrait être plus équilibrée, de sorte que, outre les sciences biologiques, une recherche sociale solide nous permette de mieux comprendre les implications des mesures de gestion visant à préserver l'intégrité écologique des parcs. Encore ici, nous estimons que le projet de loi devrait comporter des dispositions explicites assurant que Parcs Canada recevra des ressources suffisantes et les affectera de façon à remplir son mandat.
Enfin, les paragraphes 15(2), (3) et (4) du projet de loi nous posent quelques inquiétudes sur le plan technique. Les paragraphes 6(4) et (5) de la loi actuelle établissent clairement que la Loi sur l'expropriation s'applique lorsque le ministre entend exercer le pouvoir accordé par le gouverneur en conseil d'acquérir par expropriation des terres ou des intérêts situés dans un parc.
Aux termes du projet de loi, le ministre est clairement autorisé à mettre fin aux baux et aux permis d'occupation et il est également prévu que si les terres domaniales cessent d'être utilisées aux fins visées par la concession, les droits ou intérêts retournent à la Couronne. En outre, le projet de loi ne se réfère pas à l'application de la Loi sur l'expropriation pour l'acquisition de terres ou d'intérêts situés dans les parcs.
Notre inquiétude vient du fait que le pouvoir du ministre de mettre fin aux baux et aux permis d'occupation, qui sont des intérêts sur les terres, et l'article prévoyant le retour de ces intérêts à la Couronne vont permettre la prise de possession de ces intérêts en l'absence de la protection offerte par les recours et la compensation prévus par la Loi sur l'expropriation.
Lors de brèves discussions que nous avons eues avec les rédacteurs du projet de loi, ceux-ci nous ont indiqué que ce n'était pas l'intention de la loi et que, si tel en avait été le sens, il aurait été formulé clairement. Malgré cela, nous continuons de craindre, en raison du changement évident par rapport à la loi précédente et de la nouvelle notion prévoyant le retour à la Couronne des terres domaniales qui cessent d'être utilisées aux fins visées par la concession, que ces dispositions n'abrogent les droits existants.
S'il est évident que ce n'est pas là l'intention du projet de loi, nous estimons que cela devrait être indiqué clairement de façon à ce que les titulaires de domaine à bail des parcs aient l'assurance que leurs droits ne seront pas abrogés en l'absence des recours et de la compensation accordés à tous les autres Canadiens.
En terminant, nous ne demandons pas au comité d'apporter à la loi des changements qui atténueraient l'importance prioritaire accordée à la conservation du patrimoine naturel de nos parcs. En raison de la forte attention portée à ces aspects ces dernières années, les parties intéressées aux parcs nationaux, en particulier aux parcs de montagne, sont parfaitement conscientes de l'importance de l'intégrité écologique et de la nécessité que chacun fasse sa part pour la préserver.
Les solutions qui se sont avérées efficaces dans les parcs de montagne et dont le groupe d'experts sur l'intégrité écologique recommande l'adoption dans les autres parcs, n'ont vu le jour qu'à la suite et que par le biais de la tension dynamique qui intervient entre les parties intéressées. Nous demandons de prévoir un moment de réflexion, un mécanisme de sûreté permettant une pleine évaluation de toutes les conséquences des mesures prises ou proposées par le ministre ou Parcs Canada en vue de préserver l'intégrité écologique des parcs, afin que ceux-ci puissent demeurer un lieu voué à la nature et aux gens.
Merci d'avoir écouté notre exposé.
Le président: Merci, monsieur Pierce.
J'invite maintenant M. Richard Ireland à s'exprimer au nom du Comité municipal de Jasper. Monsieur Ireland.
M. Richard Ireland (président, Comité municipal de Jasper): Merci, monsieur le président. Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité.
Je suis président du Comité municipal de Jasper. Je suis accompagné de M. Legget qui en est le vice-président. Nous comparaissons ensemble devant vous au nom du Comité municipal de Jasper et au nom des résidents de Jasper, et je vous remercie sincèrement en leur nom de nous donner cette occasion de vous faire part de nos opinions sur cette mesure législative importante.
Nous vous avons fait parvenir un mémoire détaillé. Nous vous remercions d'avoir reporté notre comparution. Cela nous a permis entre autres choses de pouvoir faire traduire notre mémoire, et j'espère que vous en avez tous un exemplaire dans les deux langues officielles. Est-ce bien le cas?
Le président: Oui, c'est bien le cas.
M. Richard Ireland: Merci, monsieur.
Je n'ai pas l'intention de lire le mémoire au complet. Je signale à votre attention le résumé de nos sujets de préoccupation, qui figure à la page 7 du mémoire, ainsi que notre énoncé de recommandations et de conclusions, à la page 12.
Je voudrais en commençant essayer de vous faire connaître d'une manière très générale notre collectivité et les questions qui la préoccupent.
Je me considère comme un représentant de notre collectivité, mais pas seulement en raison de ma position comme représentant élu. Je suis né à Jasper. Mon père a été mécanicien de locomotive—un «conducteur», comme on les appelle—à Jasper pendant environ 35 ans. M. Legget est aussi conducteur de locomotive. J'ai épousé une fille de Jasper. Nous avons deux fils qui représentent la quatrième génération de notre famille à vivre à Jasper.
Je suis allé à l'université pendant quelques années, mais je suis retourné ensuite à Jasper principalement parce que je voulais donner à mes fils la possibilité de grandir dans cette collectivité, dans cet environnement et dans ce parc auxquels je suis très attaché. C'est à cause de mes fils et de leur avenir, ainsi que de l'avenir de leurs amis, des parents de leurs amis et de bien d'autres gens comme eux, que je comparais devant vous aujourd'hui.
Jasper, c'est chez nous. Nous aimons notre ville. Nous en sommes fiers. Nous voulons la préserver. Nous voulons la protéger ainsi que le parc qui l'entoure. Nous voulons également faire mieux fonctionner la ville, dans l'intérêt de ses résidents et dans l'intérêt du parc, ainsi que dans l'intérêt des générations futures de Canadiens et d'autres personnes qui auront la chance de profiter de sa tranquillité et de sa beauté.
Certains d'entre vous sont déjà allés à Jasper. D'autres en auront entendu parler ou auront lu quelque chose à son sujet. Vous avez peut-être lu ou entendu dire que Jasper était une collectivité de villégiature. Eh bien, ce n'est pas le cas. C'est une véritable collectivité, qui n'est peut-être pas tellement différente de la vôtre ou des environs de chez vous.
Une collectivité de villégiature est un endroit où les résidents changent aussi souvent que les saisons, et peut-être même encore plus souvent. Ils n'ont pas de liens fixes et permanents avec la collectivité. Ce sont les appartements à multipropriétés qui définissent plus que toute autre chose, à mon avis, les collectivités de villégiature. Les gens y viennent en visite, pour un bref séjour, puis ils retournent chez eux.
Ce n'est pas le cas de Jasper. Jasper est un endroit de résidence permanente. C'est chez nous. C'est chez nous pour moi et environ 5 000 de mes concitoyens. Je vous assure qu'à titre de collectivité et de particuliers, nous partageons la conviction qu'il faut préserver la ville et le parc. Nous sommes déterminés à servir nos visiteurs et à présenter nos maisons et nos voisinages aux Canadiens et aux autres touristes d'une manière qui rend hommage à notre histoire tant naturelle qu'humaine.
Notre conviction se reflète dans l'énoncé de vision de la collectivité de Jasper. Le texte complet de cette vision est inclus dans notre mémoire, à partir du bas de la page 4, et je vous invite à prendre le temps de lire ce texte. C'est une vision qui est endossée, comme vous le verrez, par Parcs Canada. Son représentant l'a signé. C'est une vision dans laquelle nous disons aspirer à voir la collectivité et Parcs Canada travailler de concert à la réalisation d'objectifs communs.
Dans notre mémoire, vous pourrez lire que notre collectivité veut être habilitée. Notre vision à cet égard ne doit pas être perçue comme une menace. L'habilitation de la collectivité ne signifie pas une perte de pouvoir pour Parcs Canada. Elle prévoit plutôt que la collectivité assumerait des fonctions, des obligations et des responsabilités qui retomberaient autrement sur Parcs Canada, ce qui libérera Parcs Canada et lui permettra de relever ses principaux défis sans être encombré par ce fardeau. Comme nous sommes partenaires en vue de l'atteinte d'un but commun, notre habilitation renforcera Parcs Canada. Elle libérera Parcs Canada qui pourra s'occuper des grandes questions relatives aux parcs et qui sont l'essence même de son mandat et de son expertise.
Nous voulons gérer les affaires municipales dans un cadre conçu et accepté par Parcs Canada pour pouvoir nous occuper des questions d'ordre local de manière directe, efficace et responsable, et de manière à ce que Parcs Canada puisse appliquer ses ressources quelque peu limitées à des questions d'ordre plus général concernant le parc.
Nous reconnaissons qu'il y aura des secteurs de chevauchement. Nous pourrons trouver des accommodements dans ces cas-là. Nous reconnaissons que Parcs Canada doit exercer le contrôle sur l'utilisation et l'aménagement du territoire. Nous reconnaissons que Parcs Canada doit exercer le contrôle ultime en matière d'intégrité écologique et d'environnement. Nous pouvons tenir compte de tout cela si l'on commence par reconnaître que la collectivité est une alliée et qu'on peut être certain qu'elle se consacrera à la réalisation d'objectifs communs et au respect des intérêts purement locaux seulement d'une manière compatible avec la politique sur les parcs nationaux et les valeurs qui la sous-tendent.
• 0925
En dépit de ce qui s'est passé ailleurs, ou de la façon dont
on voit ce qui s'est passé ailleurs, Jasper et ses résidents ne
constituent pas une menace pour le parc national. L'énoncé de notre
vision, il est important de le noter, a été élaboré et rédigé sans
la participation de Parcs Canada—autrement dit, nous avons pris
l'initiative de rédiger l'énoncé de vision, que Parcs Canada a par
la suite endossé—et cela, en dépit de notre dossier à titre de
comité consultatif. Tout cela confirme nos valeurs et notre
engagement à respecter ces valeurs.
Nous ne sommes pas venus pour dénigrer Parcs Canada. Ses administrateurs peuvent avoir la volonté nécessaire, mais ils n'ont pas les outils, les ressources, l'expertise ou le temps requis pour être des administrateurs municipaux. Cette réalité est confirmée dans un document de Parcs Canada, que nous citons à la page 4 de notre mémoire. Je vais vous en lire une partie. C'est un extrait de l'Examen opérationnel no 29, qui est un rapport sur les collectivités des parcs nationaux. Je pense qu'il a été déposé en juillet 1994.
-
Sur les plans administratif et politique, le fait de se baser sur
ce qui est, essentiellement, une législation de gestion de parc
s'est avéré lourd, limitatif sur le plan des besoins municipaux et,
en général, beaucoup moins satisfaisant que les lois provinciales.
Je poursuis:
-
Ces faiblesses du système actuel, à quelques exceptions près, se
traduisent par une réglementation utilisée pour administrer des
collectivités (affichage, construction, développement, etc.) qui
découle d'applications nationales, est invariablement dépassée et
ne tient aucunement compte des conditions et circonstances locales.
De plus, elle coûte cher à modifier par un processus de décret. La
nécessité d'obtenir un consensus national avant de la modifier est
frustrante, prend du temps et, parfois, s'avère impossible.
C'est un extrait d'un document provenant de Parcs Canada.
Notre collectivité a la volonté, le temps et l'intérêt nécessaires pour éliminer ces faiblesses, et il s'agit de faiblesses du côté du processus et non des personnes. Il nous faut cependant l'autorisation voulue et les outils nécessaires.
Nous ne voulons aucunement usurper ou compromettre l'autorité ultime de Parcs Canada. Nous reconnaissons que Parcs Canada est et doit demeurer garant de l'intérêt général. Je répète que nous pouvons répondre à nos besoins mutuels grâce à de la bonne volonté des deux côtés et en reconnaissant que nous travaillons ensemble dans le but d'assurer le respect de valeurs partagées. Nous pouvons trouver un moyen de le faire.
Le président: Merci beaucoup.
M. Richard Ireland: Je suis désolé...
Le président: Je suis désolé, monsieur Ireland. Je croyais que vous aviez terminé.
M. Richard Ireland: Nous avons suggéré des modifications possibles au projet de loi afin qu'il puisse répondre à nos besoins d'une manière qui permettra de satisfaire aussi à ceux de Parcs Canada. Nous n'avons pas proposé de libellé spécifique pour modifier des articles du projet de loi. Nous ne sommes pas spécialistes de la rédaction législative. Nous essaierons de vous fournir des propositions d'amendements détaillées si vous le demandez, mais nous disons premièrement qu'il faut reconnaître dans la loi que l'habilitation de la collectivité est légitime, souhaitable et réalisable dans l'intérêt général du parc. Le projet de loi ne doit pas nécessairement définir le modèle précis ou général d'administration locale de Jasper. Il doit cependant confirmer en termes clairs et nets que l'établissement et l'habilitation d'une forme d'administration locale, limité comme il se doit, sont autorisés.
Peut-être ai-je été trop long.
Le président: Non, pas du tout.
M. Richard Ireland: Notre mémoire, tout comme mes propos d'ailleurs, veulent tout simplement souligner le fait qu'il s'agit là de questions qui interpellent profondément notre collectivité. Je ne peux certes pas tout aborder, mais je me félicite néanmoins de pouvoir répondre à vos questions et je vous remercie de m'avoir écouté.
Le président: Merci à vous. Je pense que vous avez exposé très clairement votre position.
M. Booth sera notre témoin suivant.
J'ignore si vous appartenez à la Wasagaming Tenants Association, mais je sais que vous la représentez.
M. Derek Booth (conseiller juridique, Wasagaming Tenants Association): En effet. Je vous remercie, monsieur le président.
Wasagaming est le lotissement urbain du Parc national du Mont- Riding, qui est le seul parc national en activité au Manitoba, et qui l'est d'ailleurs depuis le début des années 30. J'en représente toutes les parties prenantes.
Je n'ai pas l'intention de vous lire les neuf pages de mon mémoire, mais j'aimerais néanmoins y apporter un rectificatif.
En haut de la page 4, il faut lire à la ligne 11: «les articles 19, 20, 21 et 22 du projet de loi C-27».
Le président: Pourriez-vous répéter plus lentement, je vous prie?
M. Derek Booth: À la onzième ligne, il convient de lire: «les articles 19, 20, 21 et 22», et non pas «les articles 20 et 2».
Ensuite, au sommaire qui figure à la page 8, il faut lire à la deuxième ligne du troisième paragraphe «l'article 19» plutôt que «l'article 2». À la même page, au paragraphe 4.a), il faut lire «l'alinéa 17(3)b)» plutôt que «l'alinéa 18(3)b)».
Je vais rapidement évoquer certaines parties du mémoire, sans toutefois entrer trop dans le détail technique. J'aimerais vous parler de ce qui, à nos yeux, se passe dans notre parc, et probablement aussi dans d'autres parcs.
Ce parc est essentiellement un parc saisonnier. Nous n'y sommes que sept mois par an, après quoi seuls les fonctionnaires peuvent y rester. Ceux-là y sont à l'année longue, mais nous, nous devons l'évacuer.
La situation a évolué. À l'origine, les parcs ont été créés pour ceux que cela intéressait—les touristes—que j'appelle le peuple. C'était là l'intention poursuivie, et je vous renvoie à ce sujet à la première page de mon mémoire où nous disons ceci, et je cite:
-
Les parcs sont créés à l'intention du peuple canadien [...] Les
divers éléments du parc font partie du patrimoine national de tous
les Canadiens.
C'est là une notion qui à mon avis a été oubliée. Au lieu d'être là pour le peuple canadien, les parcs sont plutôt devenus une énorme organisation destinée principalement à servir les fonctionnaires.
Cela pose pour problème que les fonctionnaires ont manifestement intérêt à ce que les parcs non seulement deviennent meilleurs, mais également plus gros et plus riches. Ces parcs ne sont plus là uniquement pour le peuple canadien, et ils acquièrent une vocation touristique internationale. On veut qu'ils soient reconnus dans le monde entier. Et dans le cas de Banff, nous n'en sommes pas loin. J'ignore si vous y êtes allés, mais les gens de l'endroit sont une petite minorité par rapport aux touristes qui viennent de tous les coins du monde, depuis l'Allemagne jusqu'au Japon. Par conséquent, avec toute cette clientèle qui y dépense beaucoup d'argent, il est devenu très difficile pour les Canadiens de profiter de ces parcs comme cela avait été prévu à l'origine.
Nous constatons qu'on est en train de créer un empire pour Parcs Canada. C'est un empire dont le moteur est le tourisme étranger et la volonté d'acquérir une réputation internationale, mais tout cela entraîne des frais. Cela suscite également des problèmes. Lorsque j'ai commencé à fréquenter le parc il y a plus d'un demi-siècle, il y avait là une poignée d'employés qui, essentiellement, y faisaient carrière. Il n'était alors pas nécessaire de prétendre faire de la consultation publique, mais j'y reviendrai plus tard. C'était là, c'était automatique. Le directeur du parc connaissait tout le monde par son prénom et vice versa, et il en allait de même pour les autres employés. Le directeur savait donc ce qui se passait et ce dont il avait besoin. Il en allait de même pour les touristes. Les employés du parc étaient à leur disposition et c'étaient toujours les mêmes.
Maintenant, ce sont des fonctionnaires qui vont et qui viennent. Je vois que John Low est ici ce matin. Il a travaillé dans je ne sais combien de parcs au Canada. Pendant ces deux années à Wasagaming, j'ai appris à le connaître un peu. Ainsi, les fonctionnaires comme lui vont et viennent. Ils s'intéressent moins à la gestion du parc dans lequel ils travaillent qu'à ce qui se passe au niveau d'ensemble à Parcs Canada et à la place qu'ils vont pouvoir occuper dans cette énorme organisation semblable à IBM. Voilà ce qui s'est passé.
• 0935
Ceux qui en souffrent, ce sont ceux qui utilisent les parcs,
c'est le peuple canadien.
Les employés des parcs ne sont pas tous mauvais, bien loin de là. Mais cette loi, et à tout le moins les articles que nous mentionnons, risquent d'aggraver la situation qui, je vous le dis, laisse à désirer. Pour ce qui est des employés des parcs, je pourrais vous citer un article qui a paru chez nous le 14 mai dans le Winnipeg Free Press.
Il y a cet excellent gardien de parc à la retraite, Ray Fetterly, qui a commencé à travailler en 1952. Il a écrit trois livres. L'un des articles de ce nouveau projet de loi veut censurer ce qui est publié. Qu'adviendra-t-il des histoires que M. Fetterly raconte au sujet du parc et de notre patrimoine? Elles seront censurées. Il y aura quelque part un bureaucrate qui va y jeter un coup d'oeil et lui dire: «Vous ne pouvez pas dire cela, nous allons devoir changer ceci.» Voilà donc un exemple des problèmes que cette nouvelle loi va encore exacerber.
Je voudrais parler de notre patrimoine et de ce qu'il représente pour le peuple canadien, mais aussi vous dire à quel point cette loi va nuire à ces deux valeurs. Le premier élément dont je voudrais vous parler se trouve à la page 2 de mon mémoire et concerne l'article 9.
Autant que je sache, cette administration locale est extrêmement utile pour les collectivités permanentes comme Jasper, représentée ici par M. Ireland. C'est également quelque chose qui est fort utile pour Banff, mais qui l'est beaucoup moins pour les gens comme nous qui ne sommes sur place que pendant sept mois. Lorsque le projet de loi a été déposé, j'ai fait quelques recherches. Parcs Canada a engagé un consultant indépendant qui devait lui recommander la meilleure façon de pouvoir profiter de la fiscalité foncière en plus de percevoir les loyers que Parcs Canada perçoit déjà ainsi que tous les autres frais d'utilisation que l'Agence impose déjà en ce qui concerne les services publics, l'enlèvement des ordures et ainsi de suite.
Sachant fort bien que cela serait extrêmement impopulaire—et aussi inopportun, dès lors que le projet de loi n'en fait maintenant plus mention—Parcs Canada suggère, dans le rapport de ce consultant, la création de conseils consultatifs ou de conseils communautaires qui seraient dotés de ce qu'on appelait un protocole d'entente ou encore d'une charte. De cette façon, les membres de ces conseils auraient l'impression de pouvoir diriger leurs destinées, mais l'une des dispositions indubitables et irrévocables de ce protocole d'entente concernait la fiscalité foncière. C'était donc là la formule qu'ils utilisaient et ce qu'ils semblent vouloir conserver avec l'article 9.
Ils ont accordé à Banff une autonomie quasi complète, hormis les cas qui ont fait les manchettes, lorsque l'honorable Sheila Copps est intervenue pour renverser certaines décisions. Mais les autres ne veulent pas d'administration locale dont elles n'ont nullement besoin. Si vous leur donnez une administration locale, donnez-la-leur et laissez-les s'administrer eux-mêmes, moyennant bien sûr les contrôles d'usage. C'est apparemment ce qui se passe dans le cas de Banff, et Jasper semble également vouloir quelque chose du même genre.
Mais les gens comme nous n'ont pas besoin d'une administration locale sept mois par année. Nous avons peur que cela soit encore une fois utilisé contre nous. Une fois de plus, le spectre des taxes foncières pourrait planer sur nos têtes.
• 0940
Je ne dirai pas grand-chose à propos de l'article 15 à la page
2 de mon mémoire. M. Ireland en a déjà parlé. Le fait qu'ils
veulent ce genre de dispositions qui leur permettraient de résilier
unilatéralement un contrat, un bail, une licence ou un permis, est
parfaitement répugnant non seulement du point de vue de la
démocratie, mais également de tous les principes de droit que nous
avons au Canada, à tel point que la simple présence de cette
disposition dans le texte de loi est le comble de l'arrogance. Cela
dit, c'est le genre de pouvoir que l'Agence semble vouloir obtenir.
Je vais maintenant passer à l'article 16 à la page 3 de mon mémoire. Ce qui s'est passé à Wasagaming, c'est qu'avec un pouvoir comme celui-là, ils ont réussi à faire des trucs merveilleux comme fermer l'entrée principale du parc en obligeant à contourner le secteur commercial. Le touriste qui arrive chez nous ne sait pas où se trouve le lac, ne sait pas où se trouve le secteur commercial, où se trouve l'embarcadère, où sont toutes les choses à voir, parce que l'administration a démoli la barrière d'origine, qui faisait pourtant partie du patrimoine, elle a remblayé...
Le président: Puis-je vous interrompre un instant?
M. Derek Booth: Certainement.
Le président: J'ignore combien de temps il va encore vous falloir pour conclure, mais vous avez déjà eu bien plus de dix minutes et nous devons donner aux membres du comité la possibilité de poser des questions aux témoins. J'aimerais donc savoir s'il vous serait possible de résumer votre réflexion, voire de sauter directement à vos conclusions en nous disant exactement...
M. Derek Booth: Certainement, monsieur Lincoln. Merci de me le rappeler.
Passons donc à la page 8 de mon mémoire qui est en fait le sommaire. J'ai déjà parlé des pouvoirs dictatoriaux et je vous ai donné un exemple pour vous montrer comment l'Agence a essayé d'obtenir encore plus de pouvoirs. Elle a toujours procédé sans guère donner de préavis et sans respecter les règles. Elle constitue des comités dont elle choisit les membres. Parcs Canada prépare les comptes rendus qui sont souvent remaniés. L'Agence veut pouvoir résilier des contrats et des baux encore en vigueur. J'ai parlé de censure. Avec l'article 16, Parcs Canada veut également pouvoir interdire la vente de souvenirs, les publications, etc.
J'ai dit au début qu'il y avait de bons fonctionnaires. À cet égard, je suis du côté de M. Lee. Lorsqu'il a comparu devant le comité le 11 mai, il a signalé à la page 3 du compte rendu dont j'ai copie, que Parcs Canada ne voulait pas davantage de pouvoirs, qu'elle ne voulait pas avoir des fonctions policières. Pourtant, avec l'article 19, Parcs Canada voudrait pouvoir créer une catégorie spéciale d'agents de surveillance qui auraient davantage de pouvoirs. Le 11 mai, M. Lee a reconnu qu'il avait déjà le pouvoir de dire si ces agents pouvaient ou non être armés. L'idée d'avoir sur place des étudiants sans aucune formation nous effraie. Si en plus on leur permet d'être armés, que le ciel nous vienne en aide.
L'article 17 crée une catégorie spéciale de gens en donnant aux Autochtones et à d'autres encore des droits particuliers dans le parc. À l'origine, on voulait que le parc profite à tout le peuple canadien. Je m'interroge donc sur l'opportunité de ce genre de chose.
Je dirais que les quelques articles dont j'ai parlé et dont mon mémoire fait encore état, exacerbent tous ces problèmes et devraient donc être supprimés, comme je le recommande dans mon mémoire.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Booth. J'ai constaté, pendant votre intervention, que vous avez appelé un fonctionnaire par son nom. Je ne vous ai pas rappelé à l'ordre parce que j'avais l'impression que vous vouliez simplement dire que M. Low était passé d'un parc à l'autre et que vous ne contestiez nullement ses qualifications. J'ai donc laissé faire. Je tiens toutefois à signaler aux témoins que lorsqu'ils citent nommément un fonctionnaire, celui-ci n'a pas le loisir de se défendre. Cela ne pose pas de problème du moment que la remarque faite à son propos est favorable.
M. Derek Booth: Je ne voulais nullement critiquer M. Low, monsieur le président, et je vous présente mes excuses si c'est l'impression que j'ai donnée. Il est probablement piloté par un mandarin plus haut placé que lui et ses allées et venues sont indépendantes de sa volonté. Par contre, j'ai parlé de M. Lee parce qu'il avait déjà été nommé auparavant et que c'est l'une des rares personnes qui se soient portées à la défense des parties prenantes.
Le président: Puisque vous aimez tellement les fonctionnaires, c'est une excellente entrée en matière pour notre témoin suivant.
Nous allons donc maintenant entendre M. Ed Cashman au nom de l'Alliance de la fonction publique du Canada.
[Français]
M. Ed Cashman (président national de l'Élément national, Alliance de la fonction publique du Canada): Monsieur le président et membres du comité, bonjour.
Nous sommes heureux d'avoir l'occasion de rencontrer les membres du Comité permanent du patrimoine canadien pour discuter du projet de loi C-27, Loi concernant les parcs nationaux du Canada. Nous souhaitons déclarer sans équivoque que le projet de loi C-27 nous semble être une bonne loi et que nous l'appuyons dans son ensemble.
Le but de ma présentation d'aujourd'hui est de vous indiquer les dispositions de la loi qui, selon nous, requièrent des modifications ou des changements. Nous voulons non seulement assurer la préservation et la conservation de nos parcs et de nos lieux historiques nationaux, mais aussi veiller à ce que les employés au sein de l'Agence Parcs Canada puissent s'acquitter pleinement de leurs responsabilités de manière consciencieuse et prudente, cela pour toutes les parties concernées: les employés, tous les clients de l'agence ainsi que le grand public.
Dans le projet de loi C-27, il y a des exigences précises quant à l'application de la loi, mais elles ne sont pas complètes quant à la question des responsabilités de l'agence envers certains employés, notamment les gardes de parc. Le projet de loi C-27 devrait être plus complet en ce sens qu'il devrait prévoir une mesure de sécurité et de prévention plus globale à l'intention des gardes chargés d'appliquer la loi et d'accomplir toutes les tâches et activités inhérentes à cette responsabilité.
Monsieur le président, avec votre permission et avec l'indulgence des membres du comité, j'aimerais céder ma place à un travailleur et à une travailleuse qui travaillent sur le terrain et qui pourraient mieux vous parler de leurs inquiétudes.
Le président: Oui, avec plaisir.
M. Ed Cashman: Je vous présente M. Doug Martin, un garde de parc qui est notre représentant syndical pour la province de l'Alberta et les Territoires du Nord-Ouest, et Mme Donna Crossland, une garde de parc qui représente les employés du parc de Kouchibouguac, au Nouveau-Brunswick.
[Traduction]
Le président: Oui, à la condition que votre groupe ne prenne pas plus de temps que nous en avons. Nous vous écoutons.
M. Doug Martin (vice-président adjoint, Alberta et Territoires du Nord-Ouest, Alliance de la fonction publique du Canada): Merci, monsieur le président, de nous avoir invités à vous parler de la sécurité des gardes de parc.
Je vous dirai simplement, à titre d'information, que les gardes de parc ont trois fonctions essentielles: la conservation des ressources, le maintien de l'ordre et la sécurité du public. Les gardes de parc sont des agents de la paix au sens où l'entend la Loi sur les parcs nationaux; ils sont chargés de faire respecter cette loi ainsi que de maintenir la paix publique dans les parcs nationaux. Les gardes de parc ont affaire à des personnes armées—et nous sommes ici pour parler de la sécurité des gardes—beaucoup plus souvent que les services policiers comme la Gendarmerie royale ou la police municipale. Nous avons affaire à des chasseurs qui sont armés. Nous avons affaire à des campeurs qui ont des haches. Tous les randonneurs sont munis de grands couteaux ou de gaz poivré pour éloigner les ours. Notre sécurité nous préoccupe donc au plus haut point.
Nous devons également mentionner que même les méchants prennent des vacances et visitent nos parcs nationaux. Voilà pourquoi il est si important de discuter de la sécurité de gardes de parc.
Pour faire le tour du problème, Parcs Canada a commandé quatre études. On a entrepris en 1993 une étude sur les gardes de parc du Québec et le travail qu'ils accomplissent en matière de maintien de l'ordre. Les auteurs de cette étude ont recommandé que les gardes de parc reçoivent une formation complète en maniement de matériel de sécurité. Il s'agit ici de formation aux armes de poing, un moyen de défense que nous devons savoir utiliser, et c'est ce qui inquiète tant de gens.
La GRC a étudié nos fonctions et constaté que nous sommes les mieux placés pour faire respecter la loi à l'intérieur des parcs nationaux étant donné notre formation en matière de conservation des ressources, de sécurité publique, et étant donné notre association avec les parcs.
• 0950
En 1997, une étude semblable à celle du Québec a été
entreprise dans l'ouest du Canada. Cette étude a également fait
valoir que les gardes de parc devaient être formés et équipés dans
la mesure où la loi le permet aujourd'hui. Enfin, l'automne
dernier, un comité mixte syndical-patronal a fait la même
recommandation.
Il est question ici de la diligence appropriée. Au Canada, aujourd'hui, les agents de conservation dans neuf des dix provinces sont formés et équipés selon cette règle de la diligence appropriée. Terre-Neuve, qui fait encore exception, s'apprête à équiper et protéger ses agents de conservation selon cette même norme. Il est essentiel d'assurer la sécurité de nos gardes de parc.
Nous allons vous faire aujourd'hui des suggestions qui vous permettront d'améliorer le texte de loi dont vous êtes saisis. Comme Ed l'a dit, nous sommes d'accord avec ce projet de loi. C'est un très bon texte de loi. Mais nous croyons que de petits ajustements sont nécessaires. À notre avis, l'article renfermant les définitions devrait définir les termes «serment», «sens du devoir» et «autorité». Nous pensons qu'il faut élargir la définition du garde parce qu'à notre avis, la loi doit bien dire que ses fonctions comprennent la mise en oeuvre de la Loi sur les parcs nationaux. Cela est essentiel pour les gardes de parc.
Les gardes de parc ont rencontré la haute direction de Parcs Canada, et ils se sentent menacés. La haute direction a dit que si nous continuons de réclamer ces mesures devant assurer la sécurité des gardes de parc, elle va retrancher de nos fonctions l'aspect maintien de l'ordre. Aux réunions où l'on nous a dit cela, nous nous sommes sentis menacés. Voilà pourquoi nous voulons que cela figure dans la loi.
Nous voulons également que la loi dise, comme c'est le cas pour les parcs nationaux américains, que le maintien de l'ordre à l'intérieur des parcs nationaux sera assuré uniquement par les gardes de parc. Cela est essentiel. Et c'est ce qui se fait dans les parcs nationaux américains. Nous ne demandons rien de neuf; c'est ce qui se fait au sein de notre agence soeur des États-Unis.
En outre, nous proposons d'autres dispositions qui disent que, exception faite du maintien de l'ordre, le directeur ou le ministre peut bien sûr administrer la loi. Nous n'essayons pas de contrôler ou de modifier quoi que ce soit.
Nous proposons également que la loi dise explicitement que les gardes de parc peuvent être munis d'armes de poing, un moyen de défense qui est nécessaire.
Notre avant-dernière proposition—et tout cela figure dans notre mémoire—, c'est que nous voulons que la loi définisse l'autorité qu'ont les gardes d'arrêter des véhicules, qu'il s'agisse d'une automobile, d'une embarcation ou d'un aéronef, afin d'inspecter les espèces sauvages, des parties de ces espèces, le poisson ou les armes à feu. Tout cela doit être défini dans le cadre de la loi pour protéger les gardes.
Je peux vous citer un exemple personnel à ce sujet. Je suis en ce moment poursuivi en justice parce que j'ai fait mon service à titre de garde de parc. J'avais pris part à une vérification routière en compagnie d'agents des pêches fédéraux. Nous avons arrêté un juge. Ce juge poursuit maintenant le ministère, et il m'a nommé.
C'est une chose simple. On retrouve cette disposition dans les lois provinciales qui font mention des agents de conservation. C'est une chose fondamentale. C'est un outil que nous devons avoir si nous voulons faire notre travail et bien le faire.
Enfin, nous croyons que la loi doit faire état de l'intégrité écologique ou de quelque chose de semblable. Nous croyons que l'atténuation des torts à l'environnement doit être un élément essentiel de la loi, et que la loi doit faire expressément mention de la dégradation de l'environnement.
Ce sont de simples recommandations. L'essentiel, pour nous, c'est que nous voulons pouvoir faire notre travail en toute sécurité et dans le respect de la règle de diligence appropriée comme cela se fait dans les autres agences de conservation des ressources au Canada.
Merci, monsieur le président. Je cède la parole à ma collègue.
Le président: Soyez brève, s'il vous plaît.
Mme Donna Crossland (membre, Alliance de la fonction publique du Canada): Je suis moi aussi garde de parc et agente de la paix, et je travaille en ce moment au parc national Kouchibouguac, au Nouveau-Brunswick. J'accomplis des fonctions très variées, mais je suis surtout chargée de la formation; je suis également formatrice en techniques d'intervention. En clair, je suis instructrice en sécurité. Je suis ici aujourd'hui pour vous faire part de certaines expériences que j'ai vécues à titre de garde de parc.
• 0955
En septembre 1998, par exemple, j'ai pris part à une opération
visant à intercepter deux personnes qui pêchaient illégalement dans
le parc. Je me suis rendue dans le secteur à bord d'un bateau,
accompagnée d'un collègue garde et du caporal Emery de la
Gendarmerie qui s'était muni d'une arme pour l'occasion. Peu après
notre arrivée sur les lieux, avant même de bien comprendre ce qui
se passait, les deux individus se sont vite montrés violents. Le
caporal Emery a été frappé à plusieurs reprises au visage avec un
seau de métal. J'ai dû m'écarter du même agresseur pour éviter le
même sort.
Ce jour-là, tous les moyens défensifs dont j'avais été équipée n'ont servi à rien. J'ai d'abord essayé de protéger le caporal Emery en me servant de mon gaz poivré. Je m'en suis servie deux fois, atteignant l'agresseur en plein visage, mais sans résultat. L'agression s'est poursuivie. La bagarre a continué. Quelques moments plus tard, je me suis servie de mon bâton de défense, chose que j'avais espéré n'avoir jamais à faire au cours de toute ma carrière. Et j'ai frappé le principal agresseur de plein fouet, à deux reprises, et encore là sans le moindre résultat.
La bagarre s'est poursuivie jusqu'à ce que mon collègue, le garde Daigle, réussisse à maîtriser le principal agresseur et à le menotter. Pendant qu'on le menottait, le deuxième agresseur m'a donné un coup de poing au visage. La force du coup nous a projetés dans l'eau, mon collègue garde et moi-même. Tout l'incident s'est déroulé dans l'eau qui nous arrivait à peu près à mi-jambe. Avant que l'incident ne prenne fin, le principal agresseur a menacé de mort le garde Daigle et le caporal Emery.
Pour finir, ces deux individus ont fait un séjour en prison, un mois et demi pour l'un et quatre jours pour l'autre. Le jour où leur sentence a été rendue, ils ont juré de revenir et de commettre la même infraction. Je ne sais pas quand je vais revoir ces deux individus dans le parc.
Si je vous ai raconté cet incident, c'est pour que vous compreniez que même si nous avions un très bon programme d'application de la loi pour cette opération et que nous pensions avoir atténué certains des dangers auxquels nous pouvions être confrontés, les choses changent rapidement là-bas. On ne peut jamais prévoir le comportement des individus que l'on peut rencontrer dans le parc. Nous ne pourrons jamais prévoir de façon certaine comment ces sujets que nous rencontrons pourrons réagir. La plupart d'entre eux ne sont pas du tout agressifs, naturellement, mais à l'occasion ils peuvent l'être.
Personnellement, à titre de garde de parc qui travaille sur le terrain, j'estime que la seule façon d'améliorer ma sécurité sur le terrain consiste à me fournir une arme à feu de poing.
Je ne suis pas certaine d'avoir le temps aujourd'hui de vous faire part d'autres incidents.
Le président: Peut-être au cours de la période de questions. En toute équité envers les membres du comité, ces derniers voudront vous poser des questions. Je pense que vous nous avez donné une idée du contexte. Si cela intéresse les membres du comité, je suis certain qu'ils vous poseront d'autres questions.
Mme Donna Crossland: Une conclusion peut-être?
Le président: Certainement.
Mme Donna Crossland: Merci, monsieur le président.
En conclusion, je veux qu'il soit parfaitement clair que la plupart des incidents qui se sont produits quand je travaillais comme garde dans un parc national et où je me suis senti considérablement menacée, c'était lorsque je faisais respecter la Loi sur les parcs nationaux, lors d'infractions aux termes de la Loi sur les Parcs nationaux. Il y a par ailleurs eu des incidents où avant d'intervenir nous avions fait une bonne planification de l'application de la loi. Cela n'a cependant pas toujours été suffisant pour réduire le risque.
Je veux tout simplement être en mesure de protéger adéquatement la population et de me protéger adéquatement moi-même lorsque je dois appliquer la loi, protéger nos ressources naturelles et protéger la population. Je veux être en mesure de rentrer à la maison retrouver ma famille à la fin de mon quart de jour ou de mon quart de nuit sachant que j'ai pu travailler en toute sécurité.
Merci.
Le président: Merci.
Nous allons maintenant passer aux questions. Nous allons commencer par M. Mark.
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.
Permettez-moi tout d'abord de vous remercier tous d'être venus nous rencontrer et de vous souhaiter la bienvenue à notre comité. Certains d'entre vous sont venus de très loin.
Ce que j'entends ce matin est certainement un sentiment de frustration quant à la façon dont les décisions sont prises relativement à la gestion des utilisateurs des parcs. J'aimerais poser deux questions. La première concerne toute la question du modèle de gestion et du processus décisionnel, et l'autre porte sur l'obligation de rendre compte.
• 1000
Pour ce qui est de Jasper, il s'agit certainement là d'une
situation unique. À ma connaissance, il n'existe nulle part au pays
un corps élu par la population qui ait aussi peu de pouvoirs. Je
sais que nous avons des types semblables de modèles municipaux,
notamment les districts d'administration locale qui ressemble
beaucoup à votre district d'amélioration, mais ils ont certainement
beaucoup plus de pouvoirs que vous, même si vous représentez les
gens dans votre collectivité.
Vous avez dit que ce n'était pas les gens que vous critiquiez, mais plutôt le processus. J'aimerais que vous me donniez tous des exemples de ce qui ne va pas au sujet du processus. Qu'est-ce qui ne va pas?
Le président: À qui adressez-vous la question?
M. Inky Mark: Ils peuvent tous y répondre. Qu'est-ce qui ne va pas dans le processus? Donnez-moi des exemples.
M. Richard Ireland: Si vous me permettez de répondre le premier à cette question, et je vous en remercie, eh bien il y a plusieurs choses. Vous avez utilisé le mot «unique» dans votre question, vous avez dit que notre collectivité était unique. C'est en fait la source de la plupart des problèmes. Nous devons composer avec une loi nationale tout en répondant aux besoins propres à la collectivité. Les caractéristiques, les besoins, les circonstances des différentes collectivités où se trouvent les parcs nationaux sont toutes différentes, mais nous n'avons qu'une loi. Il s'agit de la Loi sur les parcs nationaux et de son règlement qui ne répondent pas aux besoins locaux. Voilà en quoi consiste l'un des problèmes.
Un autre problème, c'est qu'il y a des vides. Les règlements pris en vertu de la Loi sur les parcs nationaux ne sont pas aussi précis et détaillés que le seraient les règlements municipaux dans une autre collectivité, de sorte qu'il y a tout simplement des lacunes.
Un autre problème est le temps qu'il faut pour réagir à quelque situation que ce soit; encore faut-il que la loi permette de le faire. Pour quelque chose d'aussi simple que le stationnement à Jasper—nous avons un problème de stationnement, tout le monde le dit—la municipalité n'a aucun pouvoir et ne peut rien faire. Nous recommandons certainement qu'on nous donne un certain pouvoir en matière de stationnement afin que nous puissions régler le problème.
Encore une fois, je dis qu'il s'agit d'un problème lié au processus, non pas aux gens, et vous l'avez remarqué. Cependant, Parcs Canada n'a pas réussi en neuf ans à mettre en place une direction du stationnement. On m'a avisé qu'ils avaient embauché quelqu'un à Ottawa qui devait s'occuper de transporter des documents entre les ministères afin de tenter de résoudre ce problème, mais cela ne semble pas se faire. Ce n'est pas parce qu'il n'y a pas de volonté de faire quelque chose, mais il semblerait que la portée de la loi soit trop générale et trop nationale pour régler ce problème en particulier.
Voilà un exemple. Il semble peut-être mineur, mais cela vous montre simplement quel est le problème.
Le président: Monsieur Ireland, pourriez-vous s'il vous plaît accélérer.
M. Richard Ireland: Très bien. Je ne vous donnerai pas toute une série d'exemples, mais si vous regardez un extrait de l'Examen opérationnel numéro 29 que je cite dans mon mémoire, Parcs Canada a déjà identifié les lacunes du système actuel, et nous sommes d'accord avec cela.
Le président: Qui d'autre voudrait répondre à M. Mark?
M. Derek Booth: Brièvement, monsieur Mark, monsieur le président, je vais vous donner quelques exemples. À Wasagaming, on a augmenté le coût de nos loyers de 400 p. 100 sans consultations. Le coût des services publics, notamment pour l'eau, pour les égouts là où ce service est disponible, les ordures, etc., a augmenté de la même façon sans consultations. Comme je l'ai déjà mentionné brièvement, toute l'infrastructure physique, les routes, etc., a été changée sans consultations préalables. Ils ont reconnu qu'ils avaient commis une erreur en agissant de la sorte. Ils se rendent maintenant compte qu'ils ont détruit un point d'entrée au patrimoine et ils ont maintenant de la difficulté à le trouver. Je peux leur dire où il se trouve, mais ils l'ont détruit il y a 20 ans sans nous consulter.
Ce genre de choses se produit régulièrement chaque fois que les bureaucrates semblent vouloir planifier quelque chose. Je ne veux pas critiquer ceux qui sont là à lutter contre les braconniers et ainsi de suite. De façon générale, ils font un excellent travail. Je ne veux tout simplement pas voir un grand nombre de gens non formés qui se promènent avec des armes et des matraques.
Le président: Je crois que vous partagez votre temps avec M. Breitkreuz, n'est-ce pas?
M. Inky Mark: Je viens tout juste de commencer, il y a à peine quelques minutes.
Le président: Vous devez alors décider entre vous, car par souci d'équité envers les autres...
M. Derek Booth: Permettez-moi de vous donner encore un autre exemple pendant que vous décidez.
Le président: Une seconde, monsieur Booth, si je vous laisse...
Très bien. Monsieur Breitkreuz. Nous vous redonnerons la parole, monsieur Mark.
M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.
Bonjour à tous, et encore une fois bienvenue à notre comité. Vous nous avez certainement tous présenté des exposés très intéressants.
Monsieur Booth, j'imagine que vous exprimez sans doute le sentiment de frustration du résident typique qui vit dans nos parcs nationaux, car j'entends souvent ce genre de commentaire.
M. Mark a mentionné le processus, et j'aimerais moi aussi aborder cette question, plus précisément en ce qui a trait à l'élément consultations. Je vis en Alberta, et cette province n'a même pas été consultée même si 60 p. 100 de tous les parcs qui se trouvent dans des provinces au Canada se trouvent en Alberta: le Parc national Banff, le Parc national Jasper, le Parc national des Lacs-Waterton, le Parc national Elk Island et le grand, l'énorme parc qui s'étend dans les Territoires du Nord-Ouest et en Alberta. Notre ministre a tenté à plusieurs reprises sans succès de rencontrer la ministre du Patrimoine canadien. Même le premier ministre a reconnu qu'il y aurait dû avoir des consultations entre les autorités provinciales et la ministre du Patrimoine, mais ces consultations n'ont pas eu lieu.
Je me demande, monsieur Ireland ou monsieur Legget, si vous avez été consultés dans le cadre de la rédaction de ce projet de loi en particulier, étant donné que vous représentez une région énorme en plus de l'un des rares parcs où vit une collectivité importante? Le ministère du Patrimoine vous a-t-il consultés?
M. Richard Ireland: Sauf pour cette comparution officielle, à ma connaissance, nous n'avons pas été consultés officiellement. Nous avons des échanges continuellement avec Parcs Canada sur un certain nombre de questions. Je n'ai aucune idée si au cours de ces échanges il y aurait eu des consultations au sujet de la rédaction du projet de loi. On ne nous a certainement pas demandé de présenter des observations ou un mémoire concernant l'ébauche du projet de loi, sauf dans le cadre de notre témoignage ici aujourd'hui.
M. Cliff Breitkreuz: La question est certainement une question importante pour vous, et naturellement le projet de loi à l'étude fait en sorte qu'il est presque impossible d'avoir une question locale.
Je conclurai en disant aux députés ministériels que l'article 35 devrait être modifié de façon à ce que les collectivités comme Jasper puissent mettre sur pied leur propre administration locale. Il est tout à fait ridicule qu'Ottawa tente d'organiser une administration municipale notamment sur le plan du service des incendies et ce genre de choses, quand cette municipalité se trouve à 2 000 milles d'Ottawa. Cela n'a tout simplement aucun sens.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Breitkreuz.
[Français]
Monsieur de Savoye.
M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Je suis très sensible aux propos que vous avez tenus parce que si on veut que les collectivités à l'intérieur des parcs puissent être en harmonie avec la bureaucratie de l'agence, il doit y avoir une meilleure concertation et l'établissement d'un certain nombre de partenariats, ce que le projet de loi que nous avons devant nous ne permet pas. On n'y indique pas de façon claire que cette concertation et ces partenariats peuvent être mis en place. D'autres en ont parlé avant moi et d'autres en parleront après moi.
J'aimerais parler aux deux représentants qui sont gardiens de parc. Je me permets d'espérer que vos tâches quotidiennes ne ressemblent pas à ce que vous venez de nous raconter sept jours par semaine, parce qu'à votre place, je changerais de métier.
• 1010
Cela dit, je ne crois pas qu'il y ait quoi que ce
soit dans
le projet de loi qui interdise à l'Agence Parcs Canada de
prendre la décision de vous donner une arme
pour exercer vos fonctions. J'aimerais donc
savoir pourquoi vous présentez
aujourd'hui cette problématique au comité.
Désirez-vous que le projet de loi précise que vous
pouvez être armés?
Ma deuxième question est totalement différente. Vous n'y avez pas touché, bien que vous soyez probablement en mesure d'y toucher. Nous avons eu le plaisir hier de rencontrer des représentants des premières nations qui nous ont fait part d'un certain nombre de difficultés et aussi d'espoirs qu'ils entretiennent face à l'Agence Parcs Canada. Vous travaillez à l'intérieur des parcs et vous avez peut-être, dans l'exercice de vos fonctions, l'occasion d'interagir avec des autochtones. J'aimerais entendre votre point de vue, vous qui êtes sur le terrain, afin que vous puissiez éclairer le comité sous un autre angle. Je vous laisse la parole.
Mme Donna Crossland: Je vais demander à mon collègue Doug Martin, qui est garde de parc, de répondre à votre première question et je répondrai par la suite à votre deuxième question.
[Traduction]
M. Doug Martin: Merci, monsieur le président.
Je vous remercie de la question.
Tout d'abord, les gardes de parc sont très professionnels et ils ont reçu une formation poussée. Les recrues reçoivent une formation de sept semaines à l'École de la GRC de Regina afin d'acquérir des compétences, et par la suite, tous les cinq ans, ils doivent suivre un cours de recyclage au sujet de l'application de la loi.
Nous voulons que cela soit inclus dans la loi, car nous croyons que le ministère est très peu disposé à fournir aux gardes de parc tout le matériel de sécurité—l'outil ultime étant une arme de poing—et la formation nécessaires. Nous avons tenté de rencontrer ses représentants à plusieurs reprises et j'ai par ailleurs mentionné les études qui ont été faites à partir de 1993 jusqu'à présent, même la dernière à l'automne dernier, qui était une étude patronale-syndicale, et le ministère est toujours peu disposé à le faire. Nous demandons par conséquent d'inclure dans la loi que la ministre spécifie que les gardes de parc doivent recevoir une série d'outils complète pour leur protection. Cela ne devrait pas être laissé au ministère, car aujourd'hui il ne réagit même pas à ses propres études internes.
Voilà pourquoi nous demandons tout cela. Et si vous lisez les six premiers points, ils portent exactement sur cette question.
[Français]
Mme Donna Crossland: Je ne suis pas en mesure de répondre de façon très précise à votre deuxième question au sujet des autochtones parce que je ne travaille que comme garde de parc sur le terrain. Je puis toutefois vous dire que les relations sont très harmonieuses au parc Kouchibouguac et qu'on songe à consacrer plus de temps à faire de l'éducation, y compris à expliquer les fonctions d'un parc national, ce qu'on a peut-être un peu a oublié dans le passé. Je sais que certains employés de l'Agence Parcs Canada travaillent en vue de trouver des solutions aux conflits qui existent entre les autochtones et l'agence.
M. Pierre de Savoye: Je vous remercie.
Monsieur le président, combien de temps me reste-t-il?
Le président: Il ne vous en reste que très peu.
M. Pierre de Savoye: Dans ce cas-là, je reviendrai au prochain tour. Merci.
Le président: D'accord, merci. Je vais passer à M. Bélanger,
[Traduction]
M. Shepherd suivi de M. Stoffer, de l'honorable M. Stoffer, et de Mme Bulte.
[Français]
M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.): Monsieur le président, je vais essayer d'être bref. Quant à la question de la consultation, qu'ont soulevée nos collègues,
[Traduction]
je voudrais déposer un document à l'intention des membres du comité. Il s'agit du résumé d'une consultation publique récente en Alberta, à partir de l'étude de la Vallée Bow jusqu'au plan de gestion du parc national Banff, en passant par la Commission d'examen des LCP, le plan de gestion et le plan communautaire du parc national des Lacs-Waterton, le plan communautaire de la ville de Jasper, le plan de gestion des parcs nationaux Jasper, Kootenay, Yoho et des Lacs-Waterton, le plan communautaire du Lac Louise jusqu'aux lignes directrices pour les pistes de ski, etc., incluant toute une série de séances publiques, une série de rencontres avec des fonctionnaires provinciaux de l'Alberta.
Vous avez laissé entendre que la ministre ne voulait pas rencontrer le ministre responsable des parcs, son homologue, en Alberta. Eh bien, je vous répondrai que la ministre a écrit qu'elle voulait le rencontrer, sauf que si j'ai bien compris, quelqu'un a insisté pour que ce soit strictement un ministre responsable du tourisme qui la rencontre. Et cela n'était pas dans les cartes.
Je voulais donc m'assurer que les faits sont effectivement mis sur la table, non pas seulement des insinuations.
• 1015
J'ai écouté attentivement ce qui a été dit au sujet de la
résiliation des baux. J'aimerais faire certaines observations à ce
sujet, et si vous le voulez, vous faire part de ma réaction.
Il ne faut pas oublier que les relations contractuelles commerciales au Canada sont régies par les lois du pays et même si Parcs Canada voulait se soustraire à ces lois, je dirais qu'à moins d'avoir l'autorisation spécifique de le faire, il ne le pourrait pas.
Par ailleurs, nous avons déterminé hier que pas un seul bail résidentiel n'avait été résilié. Ils ont tous été renouvelés. Ce n'est que dans de très rares cas qu'on a mis fin à des baux commerciaux, et ce pour des raisons de non-observation.
Cela étant dit—et nous examinerons le projet de loi, et notre comité songe à dire non à cela—peut-être que la loi devrait prévoir que la résiliation n'est possible que dans les cas de non-observation, par exemple, ou sur le plan de la non-observation, si cela se fait dans un autre contexte, on devrait sans doute aborder la question de l'indemnisation.
Je vous dis que nous tenons compte de vos commentaires ici. Si ce genre d'approche était reflétée dans la loi, est-ce que cela répondrait à vos préoccupations?
M. Brad Pierce: Je pense que cela nous aiderait considérablement, peut-être parce que j'ai été l'une des personnes à soulever la question.
Ce qui nous préoccupe, ce n'est pas que la ministre ait le pouvoir d'exercer ses droits aux termes des contrats, c'est-à-dire que si une partie ne respecte pas ses obligations prévues dans le bail, alors elle a le droit légitime d'y mettre fin. Ce qui nous préoccupe, c'est l'exercice de ces droits de façon arbitraire, sans que les gens aient l'occasion de se faire entendre et de faire valoir les raisons pour lesquelles ils devraient être indemnisés. Donc, si quelque chose de ce genre était proposé, je pense que cela conviendrait tout à fait.
Quant à vos observations au sujet des consultations qui ont eu lieu—car j'étais malheureusement l'une des personnes qui a sans doute le plus participé à ces dernières—il s'agit d'une étape positive et à la décharge de Parcs Canada, je pense que les consultations ont été bien menées et que les gens qui ont été consultés étaient largement représentatifs. Mon problème, c'est que dans bien des cas, il semblerait que l'on n'ait pas tenu compte des résultats de ces consultations à Ottawa.
Je vais vous donner deux exemples. Prenons d'abord le plan communautaire de Banff où les consultations reflétaient un certain niveau maximum de développement commercial sur lequel s'étaient entendus tous les intervenants au cours de la consultation et qui s'établissait à environ 600 000 pieds carrés. Quand la ministre a annoncé quelle serait la limite, cette dernière avait été ramenée à quelque 300 000 pieds carrés, ce qui était en deçà de l'entente par consensus.
Un autre exemple est celui des lignes directrices concernant les pistes de ski, une initiative des centres de ski dans le parc national Banff afin de tenter d'élaborer des lignes directrices environnementales claires en ce qui a trait à l'entretien courant et à l'amélioration des installations des pistes de ski. Il y a eu 18 mois de consultations sur la question et les plafonds qui ont été imposés par Ottawa relativement à la capacité des pistes de ski n'avaient rien à voir avec le résultat des consultations.
Donc à la décharge de Parcs Canada, je dois dire qu'il y a eu de bonnes consultations mais le problème c'est ici à Ottawa—je ne veux pas critiquer, mais...
M. Mauril Bélanger: Je peux peut-être tenter d'expliquer ce qui arrive lorsqu'une décision est prise ici à Ottawa.
Une consultation ne se limite pas uniquement aux parcs et aux communautés où se trouvent les parcs; il y a une consultation générale partout au pays. On pourrait faire valoir, comme j'ai l'intention de le faire, que la décision qui est prise reflète la volonté de la population en général au pays de préserver nos parcs, non pas exclusivement pour ceux qui résident dans les parcs, en tenant compte de ceux qui y vivent... et c'est pour cette raison qu'il y a un plafond; on ne peut pas dire: «Vous devez partir, il y a une limite». La population souhaite que nous gardions écologiquement intacts pour les générations futures les parcs que nous avons créés ici au Canada. Avec tout le respect que je vous dois, je dirais que les résultats de cette consultation se reflètent très bien dans ce qui est proposé ici.
M. Brad Pierce: Très bien, je reconnais l'intérêt national et nous appuyons le mandat de conservation des parcs. Au niveau local cependant, je pense que les gens qui travaillent activement dans les parcs et dans l'ouest du Canada estiment avoir été entendus; seulement, parfois il semblerait qu'il y ait à un autre niveau un débat auquel nous n'avons pas l'occasion de participer.
• 1020
Voilà essentiellement ce que nous demandons: qu'il y ait des
ouvertures, mais aussi des freins et contrepoids afin que les
chances soient égales pour tous, car, honnêtement, les autres
groupes disposent de meilleures ressources que nous et sont plus
efficaces que nous sur cette tribune.
Merci.
Le président: Monsieur Shepherd.
M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Merci.
Monsieur Ireland, différents témoins nous ont parlé des restrictions qu'il faudrait imposer aux localités. Je ne connais pas bien le processus de planification communautaire comme vous. Il semble toutefois que ces plans se fondent généralement sur une superficie maximale. Prenons l'exemple du propriétaire d'un motel à Jasper d'une superficie donnée. Même compte tenu du libellé du plan communautaire, ne pourrait-il pas démolir le motel et le remplacer par un autre de deux ou trois étages? N'est-ce pas une façon d'assurer la croissance de la localité?
M. Richard Ireland: Merci de votre question.
En bref, non, ce n'est pas possible, même en l'absence d'un plan de développement communautaire comme celui qui est proposé. Nous n'avons pas encore vu la version finale de ce plan. À l'heure actuelle, de nombreux règlements régissent le développement commercial et les autres formes de développement à Jasper et, je présume, dans les autres parcs nationaux. Les enveloppes des bâtiments sont définies par différents documents. Les lignes directrices sur l'architecture précisent en détail la hauteur des immeubles, leur forme et leur superficie par rapport à la taille du terrain. Les règlements de zonage prévoient ce qu'on peut construire et où. Il existe des politiques qui exigent que l'on prévoie un nombre donné de places de stationnement lors de la construction d'un nouvel immeuble commercial. On exige aussi que soient prévus des logements pour le personnel qui s'ajouteront à la structure communautaire en raison du développement.
Autrement dit, le développement crée des emplois. On dotera ces emplois en personnel et ce personnel devra être logé quelque part. Il faut prévoir des habitations sur place avant de se lancer dans le développement commercial.
Il y a donc déjà diverses façons de limiter le développement commercial.
Ce projet de loi et l'ébauche de plan de développement communautaire proposent de limiter tout développement commercial futur en fonction de la superficie additionnelle. Le comité de notre ville appuie une croissance contrôlée, gérée et équilibrée au sein de notre localité. C'est ce que reflète notre énoncé de vision qui se trouve dans notre mémoire. C'est une position que nous avons adoptée il y a déjà un bon moment.
Toutefois, nous ne sommes pas d'accord pour limiter la croissance en fonction de la superficie. Nous estimons qu'il faut plutôt appliquer des principes qui régiraient la croissance commerciale. Prenons le cas de la densité résidentielle. S'il y a croissance, cela créera des emplois et la population s'accroîtra. Il faut d'abord déterminer où se logeront ces employés dans la localité. Déterminons si nous avons l'infrastructure pour répondre aux besoins de ces nouveaux habitants. Si tel n'est pas le cas, le développement ne devrait pas se faire.
Nous avons donc proposé des principes, y compris un règlement en matière de zonage et des exigences relatives à l'enveloppe et à la taille des bâtiments, ainsi qu'à la superficie des bâtiments par rapport à la grandeur du terrain, des principes que nous pouvons accepter et qui préserveront notre localité dans son état actuel, c'est-à-dire une localité où nous sommes à l'aise et où la densité est acceptable. Les habitants sont satisfaits de la densité résidentielle actuelle et ne veulent pas qu'elle augmente. Cela limite...
Le président: Monsieur Ireland.
M. Richard Ireland: Excusez-moi, monsieur, mais c'est très important. J'allais terminer.
La gestion de la croissance en fonction de principes est préférable à la gestion de la croissance en fonction de la superficie. Les principes sont toujours préférables à des chiffres arbitraires.
Le président: Monsieur Ireland, si vous voulez exercer de l'influence sur les députés, il serait bon que vous permettiez au plus grand nombre d'entre eux de poser des questions.
Monsieur Shepherd, une dernière question, brièvement.
M. Alex Shepherd: Ma question s'adresse aux gardes de parc. Dans les cas que vous nous avez décrits, je crois vous avoir entendu dire que vous étiez accompagné d'un agent armé. Je vous ai peut-être mal compris. Je ne voudrais pas que l'on s'attarde sur ce sujet.
Ce que je veux savoir, c'est si on a mené des études sur la fréquence des incidents violents dans les parcs. Les parcs sont-ils plus dangereux pour le grand public...? Compte tenu du très grand nombre de gens qui fréquentent les parcs, a-t-il été prouvé que les incidents violents sont plus fréquents dans les parcs qu'ailleurs?
M. Doug Martin: Des études ont été menées, pas dans les parcs mais ailleurs, auprès d'agents de conservation des ressources. Une étude a été menée auprès des agents de la Colombie-Britannique au début des années 90. On s'est penché sur le nombre de contacts qu'avaient les agents avec les personnes ayant un casier judiciaire. On a constaté que de 65 à 70 p. 100 des personnes avec lesquelles les agents avaient des contacts avaient un casier judiciaire. Pour les services de police ordinaires, cette proportion est d'environ 20 ou 25 p. 100, parce que les autres sont des gens irréprochables.
Nous avons tenté d'encourager les parcs à mener une telle étude, en vain. Il y a déjà plusieurs années qu'on prévoit de le faire, mais on n'y a jamais donné suite. Nous avons encouragé les parcs à mettre sur pied un système de rapports sur les incidents violents, et ce système est en voie d'élaboration. Au syndicat, nous sommes à concevoir notre propre système où seront consignés ces incidents.
Chacun d'entre nous pourrait vous raconter des histoires comme celle de Donna. Je viens de terminer une séance de formation à Regina. On a laissé entendre qu'il n'y avait eu que quelques incidents de ce genre ces deux ou trois dernières années. Or, un agent seul avait vécu plus d'incidents que tous ceux qui avaient été consignés. La fréquence importe peu; il suffit d'un seul incident de ce genre pour que je sois blessé. C'est ça qui compte.
On n'en finit plus d'étudier cette question. Nos voisins du Sud, qui portent des armes, sont conscients du problème mais n'ont pas trouvé de solution. Il n'y a pas d'autres solutions que de donner aux agents les outils et la formation dont ils ont besoin pour faire face aux incidents violents.
Comme je l'ai dit plus tôt, les gardes de parc sont instruits et très bien formés. Ils ont de très bonnes aptitudes verbales. À Banff, je tiens chaque année une séance de formation. Je donne aussi des cours sur l'usage de tactiques défensives. Notre formation est meilleure que celle de tous les détachements de la GRC, mais les incidents continuent de se produire. Nous pourrions vous raconter bien des histoires de guerre, mais ce n'est pas le nombre de ces incidents qui compte. Il suffit d'un seul incident pour que je sois blessé.
Le président: Merci.
Monsieur Stoffer.
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Merci, monsieur le président.
On vient de me dire que je dois aller à la Chambre. Je vous prie d'avoir l'indulgence d'écouter mes questions. Je devrai partir tout de suite après les avoir posées et j'espère que je ne vous semblerai pas trop impoli.
Si je me ferme les yeux quand je siège au Comité des pêches et des océans, j'entends les mêmes préoccupations des localités côtières du pays sur le processus de consultation et le désir d'être consulté. On souhaite que tout soit transparent, que tout soit public et que la contribution du public soit prise en compte; on ne veut pas aller à des réunions pour apprendre que les décisions ont déjà été prises et que l'on n'aura voix au chapitre que par la suite. C'est curieux, mais cela ressemble beaucoup à ce que vous dites.
Ma première question s'adresse aux gardes. Estimez-vous jouir de l'appui du gouvernement fédéral, mais aussi disposer des ressources dont vous avez besoin pour faire votre travail efficacement? Vous pouvez répondre par oui ou par non.
Mme Donna Crossland: Je vais vous répondre. Étant moi-même garde dans un parc, je n'ai pas l'impression de jouir du soutien de la haute direction de Parcs Canada; elle ne me donne pas tous les outils défensifs dont disposent les membres de presque tous les autres organismes d'application de la loi, ou, à tout le moins, les organismes de conservation et de protection. J'estime mériter le même niveau de protection que mes collègues qui sont aussi des agents de la paix au sein d'autres services.
M. Peter Stoffer: Vous dites essentiellement la même chose que les agents des douanes, ainsi que les agents de Pêches et Océans qui avaient des préoccupations semblables aux vôtres il y a quelques années.
J'ai une question pour M. Ireland.
Puisque le personnel des parcs s'acquitte de tâches municipales et de soutien, pourriez-vous nous donner des exemples de fonctions que remplissent à la fois les employés municipaux et les employés des parcs et du double emploi qui pourrait être éliminé pour réaliser des économies? Pourriez-vous nous donner des exemples de cela?
M. Richard Ireland: Oui. Je ne pourrais vous dire s'il y a recoupement exact des fonctions ni quelle somme on pourrait économiser précisément, mais certains de ces exemples sont assez évidents.
Chaque printemps et chaque automne, les jours d'école, bon nombre de gardes doivent aller chasser les wapitis des cours d'école. C'est un problème grave, mais qui pourrait fort bien être géré au niveau local. J'estime que c'est un gaspillage des ressources du parc national que de demander à des employés formés pour remplir les fonctions de gardes de parc d'aller chasser des wapitis des cours des écoles. Si nous avions des agents chargés de faire appliquer le règlement municipal, nous pourrions le faire nous-mêmes. Ainsi, les gardes de Parcs Canada pourraient servir à l'exécution du mandat premier de Parcs Canada, qui ne prévoit pas nécessairement la protection des écoliers. Nous pourrions très bien faire cela.
Comme nous avons peu de temps, je ne vous donne que cet exemple, mais je pourrais vous en trouver bien d'autres.
M. Peter Stoffer: Merci.
En ce qui concerne les décisions, la communauté des pêcheurs s'inquiète souvent de ce qu'on prenne les décisions qui les intéressent ailleurs, sans d'abord lui demander son avis. Pourriez- vous nous donner des exemples de décisions qui ont été prises, disons, à Ottawa et qui ont entraîné des problèmes pour Jasper?
M. Richard Ireland: Je peux vous en donner un exemple, mais j'ignore où la décision a été prise.
Il y a quelques années, quelqu'un, quelque part à Parcs Canada, a jugé que Jasper avait besoin d'un nouveau camion d'incendie. Le camion a été acheté, il est arrivé à Jasper mais on a constaté qu'il ne passait pas par la porte de la caserne. Il reste donc dans le stationnement. En hiver, les pinces de désincarcération et autres pièces hydrauliques doivent être entreposées à l'intérieur de la caserne, au chaud, pour qu'elles puissent servir mais lorsqu'il y a une urgence, on doit les recharger sur le camion avant de pouvoir se rendre sur les lieux de l'urgence.
C'est une chose bien simple. Quelqu'un aurait dû prévoir que ce camion ne pourrait entrer dans la caserne, mais parce que celui qui a pris la décision n'était pas sur place, voilà ce qui s'est produit.
M. Peter Stoffer: Ma dernière question s'adresse à vous, monsieur. Chaque fois que je vais dans un parc, j'entends les gens du parc et des localités parler de croissance. Les écologistes s'inquiètent beaucoup lorsqu'ils entendent le mot «croissance», car cela signifie habituellement la perte d'habitat faunique, la création d'un nouveau terrain de golf ou quelque chose de ce genre et, au bout du compte, les pressions qui s'exercent sur le parc même et sur ses ressources naturelles ne font que s'accroître. Que diriez-vous aux écologistes en ce qui concerne la croissance et le développement économique des localités se trouvant dans un parc? À cet égard, ne pourrait-on pas collaborer davantage afin de maintenir la diversité écologique dans les parcs tout en assurant leur valeur économique?
M. Brad Pierce: Je vous remercie pour cette question.
Je peux seulement parler des parcs de l'Ouest, mais compte tenu des plans directeurs et des limites qui sont en place aujourd'hui pour le développement commercial, même si on leur apporte de menus changements, il n'y aura plus de croissance. Ce qui m'inquiète, ce sont les pouvoirs qui sont confirmés dans ce projet de loi. À l'avenir, on ne discutera plus de croissance, mais plutôt de ce qui pourra rester et de ce qui devra disparaître.
Ma réponse aux groupes environnementaux est que l'on peut obtenir un gain net très important sur le plan de l'environnement avec une approche davantage axée sur la coopération, au lieu de dire qu'il faut fermer les installations commerciales parce qu'elles sont mauvaises du simple fait qu'elles sont commerciales. Des efforts de coopération et de partenariat peuvent permettre de progresser vers l'intégrité écologique si l'on tient compte du fait que ces entreprises doivent aussi être rentables si l'on veut qu'elles puissent continuer d'offrir les services auxquels s'attendent les visiteurs des parcs tout en respectant les normes les plus strictes en matière de protection de l'environnement. Voilà comment je réponds à cette question.
• 1035
Mais pour ce qui est de la croissance, il n'y en aura plus, du
moins dans les parcs de l'Ouest. C'est plafonné, il n'y en a plus.
Le problème est que quand nous atteindrons ce plafond,
malheureusement, nous allons transformer ces endroits à l'image de
Vail et d'Aspen plus rapidement qu'aucun promoteur immobilier ne
pourrait le faire et les Canadiens moyens se verront refuser
l'accès aux parcs.
Le président: Merci, monsieur Stoffer. J'espère que votre discours à la Chambre sera aussi éloquent.
M. Peter Stoffer: Comme toujours, mon ami. Merci.
Le président: Il nous reste 20 minutes et cinq personnes ont demandé à poser des questions; il va donc sans dire que les questions et les réponses doivent être brèves.
Je vais commencer par Mme Bulte, et ensuite M. Wilfert.
Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Merci, monsieur le président.
Merci à tous d'être venus témoigner devant le comité.
J'adresse mes questions aux collègues de M. Cashman, les gardes de parc. J'ai de sérieuses inquiétudes au sujet des armes à feu et je soutiens que l'exemple américain n'est pas un bon exemple à suivre. Notre culture est très différente de celle des États- Unis.
Avez-vous entendu parler de l'analyse de la question des armes à feu qui a été faite en 1999? Dans ce document, je constate qu'au chapitre des agressions, d'après ce document, en 1998, il y a eu cinq agressions, en 1997 il y en a eu une et, en 1996, il y en a eu deux. Dans presque tous les cas, la mesure que l'on recommande est de faire en sorte soit que le garde soit accompagné d'une autre personne, soit qu'il bénéficie d'un soutien armé additionnel. Pourquoi cela ne suffirait-il pas en l'occurrence?
Vous parlez d'armes de poing. J'ignore ce que c'est. Je ne connais pas très bien les armes à feu. De quel type d'arme parlez- vous? N'avez-vous pas déjà accès à des fusils de chasse?
M. Doug Martin: Vous avez posé plusieurs questions. Je vais commencer par la dernière.
Nous avons accès à des fusils de chasse seulement à des fins de conservation de la ressource. C'est-à-dire pour les animaux sauvages. S'il y a un animal blessé au bord de la route, je peux le tuer ou mettre fin à ses jours. Je n'ai pas le droit d'utiliser mon fusil de chasse à des fins d'application de la loi, à titre de garde de parc. En tant que citoyen canadien, je peux me défendre. Aux termes du Code criminel, en tant qu'agent de la paix, je peux me défendre et utiliser mon arme à cette fin, mais la politique de Parcs Canada m'interdit de l'utiliser pour faire appliquer la loi.
Vous avez absolument raison, les armes à feu et tout cela... L'exemple de nos voisins du Sud est un mauvais exemple...
Mme Sarmite Bulte: Mauvais, très mauvais.
M. Doug Martin: C'est un mauvais exemple. L'incidence de la violence au Canada est exactement la même qu'aux États-Unis. Les pourcentages sont les mêmes; c'est seulement les chiffres absolus qui sont différents. En tant qu'agents de conservation des ressources, nous traitons avec un groupe de gens... Ils ne sont pas tous mauvais; 90 p. 100 sont irréprochables. Mais à l'automne, j'ai tous les jours affaire à des gens qui sont armés. Si je consulte les statistiques compilées par d'autres organisations, je constate que beaucoup de ces gens-là sont violents et armés.
Mme Sarmite Bulte: Mais que pensez-vous de cette étude?
M. Doug Martin: J'ai dit par ailleurs que les incidents violents sont loin d'être tous signalés, faute d'avoir un système en place, de sorte qu'ils ne sont pas tous consignés dans ce document. En fait, très peu d'incidents sont signalés. C'est pourquoi nous, par l'entremise de notre syndicat, avons entrepris de mettre au point notre propre système afin de consigner tous les cas. Il y en a beaucoup qui ne sont pas pris en compte dans ce document.
Mme Sarmite Bulte: Une très brève question. Pourriez-vous nous en dire plus long au sujet de la sécurité et de la diligence appropriée des autres agents de conservation des ressources? Il se trouve que je suis aussi avocate—j'ai pratiqué le droit pendant 18 ans—et je ne sais pas de quoi vous voulez parler. Que voulez-vous dire par la diligence appropriée?
M. Doug Martin: Dans le domaine de l'application de la loi au Canada, le degré de diligence intervient dans le modèle d'intervention de la gestion des incidents. C'est un nouveau modèle qui est utilisé pour décrire le comportement du sujet et les niveaux de force appropriée correspondants, c'est-à-dire ce qu'un agent peut et doit faire dans tel ou tel cas. Le degré de diligence augmente en fonction de la menace, qui peut aller jusqu'aux coups et blessures. Pour se protéger contre une telle éventualité, il faut bien sûr une arme défensive quelconque, y compris une arme de poing. Une arme de poing, c'est un pistolet, ou un revolver ou un semi-automatique, selon le modèle.
Mme Sarmite Bulte: Un semi-automatique?
M. Doug Martin: C'est comme cela que ça s'appelle.
Mme Sarmite Bulte: Ce que vous demandez pourrait donc aller jusqu'à un semi-automatique?
Mme Donna Crossland: Les agents de la GRC ont tous un pistolet semi-automatique de 9 millimètres. C'est une arme de série. Cela veut seulement dire qu'il n'est pas nécessaire de l'armer avant de tirer.
Le président: Avant de passer au témoin suivant, ce que je n'arrive vraiment pas à comprendre dans votre exemple, c'est qu'il y avait là un agent de la GRC qui était armé de son arme de poing, automatique ou quoi que ce soit. Si vous soutenez qu'une arme de poing ferait une différence, alors son arme à lui n'a-t-elle pas aidé?
Mme Donna Crossland: C'est une très bonne question, monsieur le président.
Mais dans cet incident, ce jour-là, j'ai vu le caporal Emery se faire frapper à plusieurs reprises au visage. Il y avait un risque très réel que le caporal Emery se fasse blesser et mettre hors de combat. Si c'était arrivé ce jour-là, nous avions des raisons de croire, d'après l'expérience antérieure, que les actes de violence contre les deux gardes de parc, c'est-à-dire mon collègue et moi-même, auraient été encore pires. Et nous n'avons pas d'arme de poing pour nous protéger. Si le caporal Emery avait été mis hors de combat et que la situation avait dégénéré, je ne suis pas du tout certaine que j'aurais pu me protéger ou protéger mon collègue.
Le président: Pourquoi le caporal Emery n'a-t-il pas dégainé? N'est-ce pas le but de l'opération, quand on porte une arme?
Mme Donna Crossland: Bien sûr. D'après le modèle de gestion des incidents, nous n'avons pas le droit d'utiliser d'arme à feu à moins de craindre d'être grièvement blessé ou tué. Nous avons donc des hésitations. Je dis «nous», mais je ne suis pas encore dans cette situation. Mais je sais qu'il y a des agents armés qui hésitent à dégainer leur arme, à moins de se sentir vraiment menacé.
Je me suis lancée dans la carrière de garde de parc et je ne veux pas d'arme à feu. Je n'en veux vraiment pas. Si je pouvais trouver une autre manière d'atténuer les risques pour ma sécurité, je réclamerais autre chose, parce que je ne veux pas d'arme à feu. Je n'en ai pas à la maison. Je n'aime pas chasser. La plupart des gardes de parc avec qui je travaille ne sont même pas des chasseurs. Ils ne possèdent pas d'arme à feu. Mais nous savons que si nous voulons nous protéger, c'est le seul moyen qu'on a trouvé de le faire dans les autres organisations.
Le président: Monsieur Wilfert.
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Merci, monsieur le président.
Monsieur Ireland, dans ma carrière précédente, j'ai été président de la Fédération des municipalités canadiennes et j'ai eu des contacts avec les membres des conseils municipaux de Jasper et de Banff. Je connaissais bien bon nombre des dossiers dont ils s'occupaient. Si je comprends bien, la question tourne principalement autour de la fiscalité.
Banff peut percevoir des taxes. Aux termes du paragraphe 10(1), le ministre peut conclure des ententes. Vous avez donné l'exemple du stationnement. Même les municipalités qui, en théorie, ont le pouvoir qui leur est bien sûr délégué par les provinces aux termes de l'article 93...
Dans ma propre ville, nous avons vu une situation ridicule, c'est-à-dire que d'autres villes venaient déverser illégalement des ordures sur notre territoire. Nous avons dû faire adopter un projet de loi d'initiative parlementaire à l'Assemblée législative de l'Ontario parce que nous n'avions pas le pouvoir d'y mettre fin. C'était totalement absurde. Mais nous avons dû ensuite reconnaître que les administrations municipales ne sont malheureusement pas reconnues comme entités distinctes dans la Constitution.
Je voudrais comprendre les raisons de votre opposition au paragraphe 10(1). Si le ministre déclare qu'il va conclure des ententes, que ce soit pour la lutte contre les incendies, les égouts, l'eau potable ou même le stationnement, je suppose que votre raisonnement est que l'expansion et le développement ont suscité des inquiétudes à Banff. Ce modèle est évidemment... le maire de Banff lui-même, sauf erreur, est en faveur de l'imposition de limites au développement et n'est pas d'accord pour favoriser la croissance continue.
Pourquoi cela ne dissipe-t-il pas nos inquiétudes, monsieur Ireland, puisque c'est un fait que l'on peut conclure des ententes de ce genre, dossier par dossier?
M. Richard Ireland: Il y a deux problèmes.
L'article 35 supprime le pouvoir du ministre de conclure une entente fédérale-provinciale en vue d'établir une administration municipale à Jasper. Et nous comprenons l'inquiétude que cela soulève. Nous ne voulons pas du modèle de Banff. Nous ne voulons pas répéter l'expérience de Banff. Jasper ne veut pas devenir Banff et n'a aucunement l'intention d'imiter Banff. Et nous n'avons pas besoin du modèle de Banff. Mais après avoir éliminé toute possibilité de reproduire le modèle de Banff dans l'article 35, on se retrouve dans un vide juridique. Le paragraphe 10(1) stipule que le ministre peut conclure une entente, mais avec qui? Il y a un vide. Il faut que nous ayons un pouvoir quelconque pour créer quelque chose.
M. Bryon Wilfert: Monsieur le président, je cite:
-
Le ministre peut [...] conclure des accords avec des ministres ou
organismes fédéraux ou provinciaux ainsi qu'avec des
administrations locales ou autochtones ou des organisations non
gouvernementales.
M. Richard Ireland: C'est vrai, mais qui crée les administrations locales? On semble supposer que peut-être l'administration locale sera créée en conformité de la loi provinciale, mais nous aimerions savoir que c'est bien ce qu'envisage le ministre au gouvernement fédéral. À l'heure actuelle, c'est vrai, on dit que le ministre fédéral peut conclure un accord avec une administration locale, mais il n'y en a pas et qui va la créer? S'agira-t-il seulement d'une coquille vide? Quels en seront les pouvoirs?
Nous aimerions seulement qu'on reconnaisse les faits. Si c'est bien la province qui va créer l'administration, après quoi le ministre va conclure une entente avec celle-ci, alors c'est très bien, mais nous serions beaucoup plus rassurés si nous savions que telle est l'intention. Ce n'est pas clairement exprimé dans la loi.
Ce que nous attendons, dans un avenir immédiat, c'est une loi, un texte de loi habilitant, et non pas une loi qui va mettre des bâtons dans les roues. Si vous voulez éliminer le modèle de Banff, très bien, mais prévoyez une solution de rechange. Il n'y en a pas là-dedans. J'ai d'autres arguments sur l'article 10 et vous pouvez les lire dans le mémoire, mais il s'agit de l'objet: Quel est le but poursuivi? Il faut le préciser.
M. Bryon Wilfert: Je vous remercie de vos commentaires.
Je voudrais poser une brève question aux gardes de parc. En vous écoutant raconter l'incident dont vous avez parlé, je songeais moi aussi à l'agent de la GRC qui avait son arme à feu. À l'instar de tous les Canadiens, je déteste la situation actuelle, qui nous oblige à installer des systèmes d'alarme dans nos maisons, etc. Je n'aime pas du tout la façon dont les choses évoluent. Mais je comprends par ailleurs très bien que vous devez vous acquitter de vos tâches et responsabilités.
C'est une question que nous devrions examiner, probablement au cas par cas, pour chaque parc. Je ne pense pas que la situation le justifie dans tous les parcs. C'est une question qu'on voudra peut- être examiner. Il peut exister certaines situations. Vous avez vous-même évoqué les divers degrés d'incidents. Le risque est peut- être plus élevé dans une région par rapport à une autre, je n'en suis pas sûr.
Quant à savoir si cela relève du Code du travail ou bien s'il faut le dire explicitement dans ce projet de loi, je ne pense pas que ce soit explicite, mais je suis personnellement d'avis qu'il faudrait y réfléchir davantage.
Je ne pense pas que l'on veuille mettre en danger la vie de quiconque simplement parce que cette personne s'acquitte de son devoir. Il y a des gens qui traversent les parcs, qui prennent des vacances et qui sont tout simplement mauvais, comme vous le dites, ou bien qui transportent des choses, et c'est donc important.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci.
Il reste 10 minutes et j'ai 3 intervenants sur ma liste. M. Mark, M. de Savoye et M. Limoges peuvent poser une autre question. Je vous prie d'être brefs.
M. Inky Mark: Monsieur le président, j'en reviens à la deuxième question que j'ai posée au premier tour, au sujet des dépenses et de la perception de taxes, mais cette fois-ci, je traiterai seulement des dépenses. Cette question fait toujours l'objet de débats dans toutes les collectivités des parcs de l'Ouest. À votre avis, les autorités des parcs utilisent-elles à bon escient votre argent, l'argent qu'elles prélèvent?
Le président: Vous souriez. Tout va donc très bien.
Des voix: Oh, oh!
M. Richard Ireland: Comment répondre brièvement?
Les parcs prélèvent de l'argent et le dépensent. La municipalité fonctionne d'une certaine façon. Il y a très peu de reddition de comptes. Nous avons de très graves problèmes d'infrastructure. Le gouvernement fédéral ne dirige pas Jasper, en tout cas, comme le feraient d'autres municipalités dotées de capitaux ou de fonds d'immobilisation, de sorte que l'infrastructure commence à se délabrer, les dépenses continuent d'augmenter et il n'y a pas d'argent disponible pour s'occuper des problèmes d'infrastructure alors qu'on sait très bien que celle-ci ne peut que se détériorer et doit être remplacée périodiquement.
Alors, l'argent est-il bien dépensé? Eh bien, il est consacré aux dépenses courantes, mais ce qui manque, c'est la planification communautaire que nous jugeons nécessaire et qui, d'après nous, est courante partout ailleurs au pays.
M. Derek Booth: Je peux vous donner un exemple éclairant. Les touristes et les locataires, les intervenants, sont dans le parc national du Mont-Riding sept mois par année. Il y a quelques centaines de fonctionnaires là-bas 12 mois par an et la lumière reste allumée en permanence pour eux et les services leur sont offerts. On n'éteint pas la lumière quand la majorité des gens s'en vont. L'argent qu'on a dépensé pour l'infrastructure, par exemple les égouts dans le secteur habité, a servi essentiellement aux immeubles gouvernementaux. Nous n'avons donc aucun contrôle sur les dépenses.
• 1050
Nous avons fait une étude quand cette affaire a été mise au
jour. Le budget que les fonctionnaires des parcs nous avait suggéré
était de 800 000 $ ou 900 000 $, un chiffre de cet ordre. D'après
nos études, le coût réel était de 400 000 $. Il y a des
municipalités immédiatement au sud du parc national du Mont-Riding
dont la population est plus nombreuse et qui se débrouillent avec
300 000 $ ou 400 000 $ par année.
[Français]
Le président: Monsieur de Savoye.
M. Pierre de Savoye: Monsieur Pierce, vous avez fait allusion dans votre mémoire à la notion d'un ombudsman pour les visiteurs. Pourriez-vous expliquer davantage cette notion?
[Traduction]
M. Brad Pierce: Le concept d'un ombudsman pour les visiteurs a été soulevé parce que nous avons constaté que ces dernières années, Parcs Canada mettait singulièrement l'accent sur le dossier de l'intégrité écologique, qui soulève des préoccupations considérables. La difficulté que nous voyons, c'est que les ressources qu'on a dépensées ces dernières années—encore une fois, malheureusement, je peux seulement parler des parcs de l'Ouest—ont été concentrées presque exclusivement sur les dossiers écologiques. Il en résulte que les questions qui ont trait aux intérêts des gens dans le parc, qu'il s'agisse de restreindre l'utilisation d'un sentier ou d'éliminer une installation, des choses de ce genre, ne sont pas justement prises en compte, du point de vue des gens. On aborde tout purement dans une optique de biologiste. C'est là qu'à notre avis un ombudsman pour les visiteurs pourrait être utile en faisant entendre un autre son de cloche, en étant la voix qui dit «Écoutez, il faut quand même tenir compte de tel ou tel intérêt». Et il doit pouvoir compter sur des ressources suffisantes. Voilà l'explication de cette suggestion.
M. Pierre de Savoye: Merci.
Le président: Merci beaucoup, monsieur de Savoye.
Monsieur Limoges, vous êtes toujours très patient.
M. Rick Limoges (Windsor—St. Clair, Lib.): Merci. Je serai bref. Nous approchons de la fin.
Je sais que nous avons beaucoup parlé des armes de poing, alors que cette question ne se rapporte pas directement au projet de loi, puisque de toute façon, elle ferait l'objet d'une décision administrative.
Mais je dois vous dire que j'ai fait partie de l'administration municipale de la ville de Windsor qui a une population d'environ 200 000 habitants et qui est voisine de Détroit. Vous comprendrez qu'à titre de membre de la Commission des services de police pendant sept années, j'ai eu l'occasion de parler des questions se rapportant à l'augmentation du recours à la force, par exemple. Je peux donc vous dire que beaucoup d'officiers de police qui portaient une arme n'ont pas eu l'occasion de la dégainer, Dieu merci, dans certains cas, pendant toute leur carrière d'une trentaine d'années. Voilà pour les bonnes nouvelles.
Avec l'augmentation du recours à la force, y compris de la force mortelle dans certains cas, il y a certainement des occasions où une force excessive est employée aussi par les agents de police.
Il y a différentes écoles de pensée à ce sujet et dans ce contexte, je me demande ce que vous diriez du fait que les personnes malveillantes qui pourraient circuler dans ces parcs sont au courant, par exemple, du fait que nos gardes de parc ne sont pas armés. À mon avis, s'ils apprennent ou craignent que les gardes de parc soient armés, le danger augmentera pour les gardes. En fait, dans certaines situations, ils pourraient braquer leur arme sur vous, simplement parce qu'ils craignent le danger que représente votre arme de poing. S'ils savent que vous n'en avez pas, franchement, c'est bien plus facile. Même s'ils braquent leur arme sur vous, ils veulent simplement quitter les lieux et non pas vous blesser.
Je peux vous dire que lorsque j'étais gérant de banque, pendant de nombreuses années, j'ai eu le triste honneur d'être deux fois victime d'un vol à main armée. Avant que j'arrive à la banque, les banquiers avaient des armes de poing cachées dans leurs bureaux, par exemple. On nous l'a interdit il y a des années, mais je peux vous dire que j'étais ravi qu'il n'y ait pas d'arme dans la banque au moment de ces vols, parce que je n'aurais pas voulu que le voleur craigne que je lui tire dessus.
Avez-vous des commentaires à ce sujet?
M. Doug Martin: Oui, merci, monsieur le président. Je répondrai volontiers à cette question.
La plupart des Canadiens croient que nous sommes déjà armés, parce que nous ressemblons à des policiers, avec nos véhicules équipés de gyrophares. Le nombre d'incidents violents au ministère des Pêches a baissé depuis que les garde-pêche sont armés.
Avec les nouvelles modifications à la loi, l'alourdissement des peines est très marqué. À cause de ces peines assez lourdes, les conséquences des poursuites sont aussi graves pour les agents d'application de la loi comme nous-mêmes, comme on l'a constaté dans toutes les autres compétences.
Les gens qui viennent dans nos parcs et qui sont associés à des activités criminelles qui nous intéressent se livrent aussi à d'autres activités, notamment le trafic de drogue. Dans les dossiers de braconnage que j'ai traités, les gens qui cherchaient des têtes de mouton et qui en obtenaient 50 000 $ faisaient aussi du trafic de drogue. Ils étaient aussi sur le marché de la drogue. Dans un dossier que j'ai traité, nous faisions la surveillance d'une maison et la police de la ville de Calgary a fait une descente dans cette maison parce que ceux qui l'occupaient, qui s'en prenaient à nos moutons, s'en prenaient aussi aux banques de la ville de Calgary.
Ces personnes avec lesquelles nous traitons ont plus d'une activité criminelle et bien honnêtement, quand nous les interrogeons, ils nous disent qu'ils nous croyaient armés.
Un incident s'est produit à Jasper, tout récemment. Sur la route 93 sud, un garde de parc a voulu aider un véhicule en panne. Dieu merci, il a demandé l'aide d'un autre garde. Arrivés sur les lieux, il y avait là deux hommes qui avaient agressé quelqu'un en Colombie-Britannique après avoir commis des vols qualifiés dans sept dépanneurs, avant d'arriver à Jasper. Ils étaient complètement drogués et prêts pour une fusillade avec les prochains policiers qui viendraient. Ils étaient prêts à tout, même à mourir. Ils étaient de l'autre côté de la route...
M. Rick Limoges: Mais dans ces cas-là, vous avez bien entendu...
M. Doug Martin: Nous n'avions pas d'armes à feu.
M. Rick Limoges: Vous n'aviez pas d'armes à feu, mais il va de soi que vous pouvez appeler la GRC ou d'autres corps policiers. Vous n'allez certainement pas sourire gentiment à ces gens-là, les saluer du chapeau et leur dire: «Rendez-vous».
M. Doug Martin: L'autre chose qu'il faut vous dire, c'est que les gardes de parc s'occupent d'un territoire de 2 700 milles carrés, pour le parc national Banff, par exemple. Nos renforts, ou la GRC, sont bien loin. Si je suis dans la partie nord, dans la région de Clearwater du parc national, je peux attendre les renforts pendant des jours et non pas des minutes.
Si quelqu'un avait une boule de cristal et pouvait me dire que dans telle situation, les choses vont mal tourner, je voudrais bien avoir cette boule de cristal. Personne, ni un policier, ni un agent de conservation de la faune, ne voudrait être impliqué dans un incident violent. On saurait ce qui risque d'arriver.
Mais nous ne pouvons pas dire ce qui va arriver. Des petits grains de sable deviennent rapidement des montagnes, et on perd le contrôle.
Mme Donna Crossland: Vous êtes parfois dans une situation dont vous ne pouvez vous sortir. Vous n'avez pas accès à des renforts, parce qu'ils sont trop loin.
L'automne dernier, je me suis retrouvée seule sur une île. J'y étais pour faire de la surveillance. Ce n'était pas un coin où il était censé y avoir du braconnage. Nous savions qu'il y avait du braconnage, mais ailleurs. Je me suis soudain retrouvée seule, sans arme, avec trois hommes armés qui ont passé toute la soirée à braconner des outardes.
Je ne sais pas si quelqu'un ici aurait voulu être à ma place, ce jour-là, mais je n'étais certainement pas à l'aise et je n'avais pas les moyens nécessaires pour me défendre, pour me permettre d'être à l'aise et pour m'assurer que je pouvais contrôler la situation.
Ces trois hommes armés ont été retrouvés plus tard. Ils ont été arrêtés et ont tous plaidé coupables pour le braconnage dans un parc national et pour diverses infractions relatives aux armes à feu.
Mais il y a de très nombreuses situations où nous allons nous retrouver, sans nous y attendre. On ne peut pas planifier une porte de sortie.
M. Rick Limoges: Mais dans la plupart de ces situations, vous ne dégaineriez pas. En fait, probablement...
Mme Donna Crossland: Probablement pas. Probablement jamais.
M. Rick Limoges: Je ne crois pas que vous soyez dans une situation où vous auriez fréquemment à dégainer votre arme.
Mme Donna Crossland: Dans mon parc, des gardiens se sont fait tirer dessus. On leur a tiré dessus.
M. Rick Limoges: Dans ces cas-là, faut-il dégainer et tirer à son tour?
Mme Donna Crossland: Cela signifie qu'il faudrait avoir les moyens de se défendre, ou de défendre un autre citoyen. Si vous campez à mon terrain de camping et qu'un homme vous court après avec une hachette, n'aimeriez-vous pas savoir que le garde de parc présent sur le terrain de camping pourrait vous protéger contre cet agresseur? Parce que les renforts... Croyez-moi, dans mon parc, la GRC prendra peut-être 20 minutes, peut-être 40 minutes, peut-être une heure ou encore, davantage.
M. Rick Limoges: Dans mon cas, ce serait plus probablement ma femme, armée d'une poêle à frire.
Des voix: Oh, oh!
M. Rick Limoges: Merci pour vos réponses.
Le président: Je pense que nous avons perdu M. Booth il y a quelque temps, et je le remercie quand même.
Merci beaucoup d'être venus de si loin, pour la plupart d'entre vous, nous présenter votre point de vue. Nous l'apprécions beaucoup. Bonne chance et bon retour.
La séance est levée.