TRAN Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
STANDING COMMITTEE ON TRANSPORT
LE COMITÉ PERMANENT DES TRANSPORTS
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 16 novembre 1999
Le président (M. Stan Keyes (Hamilton-Ouest, Lib.)): Bonjour, chers collègues. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous reprenons notre étude sur l'avenir de l'industrie aérienne au Canada.
Nous accueillons ce matin comme témoins, à la réunion de 9 heures, les représentants du Conseil des aéroports du Canada. Nommément, nous avons le directeur général du Conseil des aéroports du Canada, M. Neil Raynor; le président du conseil et président- directeur général de l'Administration aéroportuaire de Winnipeg, M. Sigler; quant à M. Paul Benoit, qui est vice-président du conseil et président-directeur général de l'Administration aéroportuaire d'Ottawa, il n'a pas pu venir ce matin, et il est donc remplacé par M. Hopkins. Monsieur Hopkins, vous êtes...
M. J.A. Hopkins (président du conseil, Administration aéroportuaire de Winnipeg, Conseil des aéroports du Canada): Je suis président du conseil de l'Administration aéroportuaire de Winnipeg.
Le président: Merci beaucoup.
Messieurs, je vous souhaite la bienvenue au Comité permanent des transports. Nous vous accordons de 10 à 12 minutes pour faire un exposé, après quoi nous passerons aux questions. Vous avez donc la parole et vous pouvez commencer quand vous voulez.
M. R. Neil Raynor (directeur général, Conseil des aéroports du Canada): Merci, monsieur le président.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité permanent, au nom du Conseil des aéroports du Canada, je voudrais dire que nous sommes très heureux aujourd'hui d'avoir l'occasion de comparaître devant le comité pour vous entretenir de la position favorable à la concurrence de l'industrie canadienne des aéroports. Je signale par ailleurs que c'est la première fois que le Conseil des aéroports du Canada présente un mémoire devant le comité, et c'est donc un événement particulièrement important pour chacun d'entre nous.
Je sais que le texte de notre mémoire a été distribué et je n'ai pas l'intention de le lire intégralement; de toute façon, nous avons de 10 à 12 minutes seulement pour notre exposé, après quoi nous serons évidemment à votre disposition pour répondre aux questions. Je vais donc me contenter de mettre en relief les éléments qui nous semblent particulièrement importants et dont les membres du comité permanent devraient prendre connaissance.
Ce que nous avons à offrir, en tant que porte-parole des aéroports du Canada, c'est une perspective tout à fait différente.
[Français]
Bien que notre présentation d'aujourd'hui ait été rédigée en anglais, nous vous avons soumis une version française de notre mémoire.
[Traduction]
Je vais passer directement au vif du sujet et vous donner d'abord quelques renseignements sur notre organisation, le Conseil des aéroports du Canada, qui représente les aéroports locaux, régionaux et nationaux d'un bout à l'autre du pays, depuis St-Jean de Terre-Neuve jusqu'à Victoria, en Colombie-Britannique, et dans tout le Nord du pays, y compris les Territoires du Nord-Ouest. Le conseil regroupe des aéroports de toutes tailles, depuis celui de Grande Prairie, en Alberta, jusqu'à l'Aéroport international Lester B. Pearson, à Toronto. En fait, plus de 95 p. 100 de tous les voyageurs intérieurs transitent par un aéroport membre du conseil pour effectuer leurs voyages en toute sécurité.
Monsieur le président, le conseil est la voix des aéroports du Canada.
Le CAC représente des aéroports de différentes tailles, comme je viens de le dire, qui en sont à diverses étapes de leur développement, et qui ont des perspectives de croissance diverses. Il est évident qu'il n'existe pas de solution unique répondant à tous les besoins. Le CAC encourage le comité permanent à tenir compte de ces différences locales et à chercher à obtenir le point de vue des administrations aéroportuaires en élaborant les solutions dont nous discutons ici aujourd'hui. Nous pouvons toutefois dire dès le départ, de façon absolument catégorique, que les aéroports membres du CAC sont en faveur de la concurrence, à cause des avantages que la concurrence apporte aux collectivités et aux voyageurs desservis.
• 0910
La question dont le comité permanent est saisi aujourd'hui
fait l'objet d'un débat non seulement au Canada, mais aussi aux
États-Unis et en Europe. Comme je l'ai dit, nous reconnaissons que
les aéroports ont un rôle à jouer pour promouvoir la concurrence à
la fois sur le plan des lignes aériennes qui desservent les
localités et rue le plan des autres services connexes qui sont
offerts aux voyageurs. Les dirigeants des aéroports et leurs
équipes prennent ces responsabilités très au sérieux.
Je suis accompagné aujourd'hui d'un dirigeant d'un grand aéroport du Canada, M. Murray Sigler, qui est également le président du conseil du CAC, et pour donner un point de vue communautaire, ce qui vous donnera peut-être l'occasion de poser des questions à ce niveau, je suis aussi accompagné de M. Sandy Hopkins, qui est le président du conseil de l'Administration aéroportuaire de Winnipeg.
Il y a un peu plus de sept ans que les premiers grands aéroports du Canada ont été commercialisés. La cession des aéroports du Canada a été une grande initiative de plusieurs gouvernements canadiens successifs. D'après notre expérience, les administrations aéroportuaires servent mieux leurs collectivités parce qu'elles sont préoccupées d'abord et avant tout par la situation locale et qu'elles rendent des comptes localement. Ces mêmes collectivités appuient d'ailleurs avec enthousiasme les aéroports à titre de moteurs économiques de leur région.
Le principal but des administrations aéroportuaires, à savoir maintenir la sécurité tout en renforçant l'efficacité et en offrant des services à un bon rapport coût-efficacité, a été réalisé à un degré remarquable en une très brève période de temps. Les compagnies aériennes ont aujourd'hui, de leur propre aveu, une plus grande influence sur les investissements en capital et reconnaissent que la gestion des aéroports est centrée sur leurs besoins, plus que jamais auparavant. La seule ombre au tableau—et j'insiste pour dire que, globalement, c'est un grand succès, le processus de cession des aéroports a été couronné de succès—la seule ombre au tableau est le rendement financier que le gouvernement fédéral extrait du système, ce qui pose des problèmes.
Transports Canada s'est retiré de la gestion des aéroports, ce qui lui permet d'économiser 100 millions de dollars chaque année. Le Trésor fédéral reçoit maintenant plus de 200 millions de dollars de loyer chaque année, et un simple calcul permet de voir qu'il y a donc un écart de 300 millions de dollars qui s'est creusé en cinq à sept ans, et que cet écart va probablement s'élargir. Mais ce loyer, s'il est un avantage budgétaire pour le gouvernement fédéral, représente une augmentation considérable des coûts pour les utilisateurs des aéroports.
En examinant la question dont le comité est saisi aujourd'hui, nous sommes d'accord avec beaucoup de points de vue que vous avez entendus, en particulier celui du Bureau de la concurrence, qui dit que pour assurer un service concurrentiel les nouveaux transporteurs doivent avoir un accès raisonnable aux créneaux d'atterrissage et à l'infrastructure des aéroports, comme les billetteries, les systèmes de manutention des bagages, les portes et les passerelles. Notre mémoire explique de façon détaillée notre position sur ces questions, et je voudrais donc m'attarder très brièvement sur chacun de ces points avant de dégager des conclusions et de faire nos recommandations.
Sur le premier point, le contrôle des créneaux, ce contrôle est exercé de façon absolument quotidienne dans les grands aéroports des États-Unis, mais peut-être que cela commence à changer là-bas aussi. À l'heure où les autorités chargées du contrôle aérien réglementent la circulation aérienne de façon efficace, le contrôle des créneaux est souvent considéré comme un moyen utilisé par les transporteurs en place pour renforcer leur position aux dépens des nouveaux arrivants, et je pense que nous devons en prendre bonne note. C'est pourquoi ce mécanisme est souvent perçu aux États-Unis comme monopolistique. Au Canada, le contrôle des créneaux se fait seulement à l'aéroport Pearson, bien que toute compagnie aérienne qui en fait la demande se fasse octroyer un créneau.
Nous voulons faire deux observations au sujet des créneaux. Premièrement, du point de vue de nos aéroports, les créneaux sont un bien public, et non pas privé. À notre avis, ils ne devraient pas être la propriété des compagnies aériennes. Les compagnies aériennes ne devraient pas pouvoir se les échanger entre elles.
Deuxièmement, nous croyons que l'attribution des créneaux devrait être fondée sur des principes clairs, et nous en énumérons trois dans notre mémoire. Nous croyons que les créneaux devraient être attribués avec pour objectif de favoriser la concurrence, et les compagnies devraient être tenues de les utiliser, au risque de les perdre, et leur attribution doit aussi refléter les obligations internationales du Canada.
• 0915
Au sujet de la deuxième question, nommément les installations
aéroportuaires, après des années de sous-financement, les nouvelles
administrations aéroportuaires doivent financer un nombre
disproportionné de programmes d'immobilisations à l'échelle du
réseau. L'ouverture des marchés transfrontaliers a renforcé ce
besoin d'investissement. Le fardeau financier créé par ces projets
d'immobilisations essentiels, qui tiennent compte des besoins et
des souhaits des compagnies aériennes, a été en partie financé par
une augmentation modeste des coûts assumés par les compagnies
aériennes, des coûts qui sont encore, en toute objectivité, loin de
pouvoir être qualifiés d'importants. D'après leurs propres
chiffres, je veux dire les chiffres de l'ATAC, ces coûts ne
représentent pas plus de 3 p. 100 de leurs coûts totaux. Il en
coûterait donc moins de 3 p. 100 pour tous les aéroports du Canada.
J'espère que cela met les choses en perspective.
Les aéroports d'un bout à l'autre du Canada travaillent en étroite collaboration avec l'Association du transport aérien du Canada et avec les compagnies aériennes en vue de conclure des ententes, notamment des ententes avec Air Canada et Canadien, permettant aux compagnies aériennes de percevoir directement des passagers des frais d'amélioration de l'aéroport. C'est utilisé comme source de financement pour assurer l'avenir de cette infrastructure essentielle qu'il faut mettre en place.
Au sujet de ces ententes, permettant la perception de frais d'amélioration, nous croyons que les intérêts des utilisateurs sont assez bien représentés et que leurs points de vue, je veux dire les points de vue des compagnies aériennes, sont bien pris en compte dans la planification et l'exploitation des aéroports canadiens, en particulier en ce qui a trait aux mesures de planification des immobilisations.
Je voudrais maintenant aborder la question de la viabilité des petits aéroports. Le CAC a régulièrement alerté le gouvernement fédéral de ses préoccupations au sujet de la viabilité financière des petits aéroports du Canada. Nous le faisons constamment depuis deux ou trois ans à l'occasion de nos rencontres avec des représentants du ministère.
Les effets précis de la rationalisation—c'est ce dont nous discutons aujourd'hui—dépendront de la mesure dans laquelle les services actuels des compagnies se chevauchent, à supposer qu'elles ont déjà des concurrents, et de la taille et de la structure d'exploitation d'un aéroport donné, du nombre de passagers discrétionnaires et non discrétionnaires, de la proportion des voyages pour affaires ou pour les loisirs, et de la disponibilité d'autres modes de transport.
Il y a donc beaucoup de paramètres qu'il faut prendre en compte pour établir l'effet probable sur les petits aéroports. Mais nous avons des recommandations à faire au sujet des petits aéroports, et j'y reviendrai dans un instant.
Enfin, point très important, bien que cela ne soit pas immédiatement évident, le niveau des loyers versés à la Couronne influe de façon marquée sur la capacité des aéroports de remédier aux problèmes de concurrence. Les loyers versés au gouvernement fédéral influent nettement sur la viabilité financière des administrations aéroportuaires et sont perçus, notamment parmi la communauté internationale du transport aérien, comme une taxe cachée et dénoncée comme telle par des organisations comme IATA.
Toutes ces questions sont abordées de façon assez détaillée dans notre mémoire. Je me ferai un plaisir de répondre aux questions, mais compte tenu des contraintes de temps, je voudrais quand même énoncer nos conclusions.
Le gouvernement fédéral et les députés ont raison de s'inquiéter de la possibilité qu'une compagnie aérienne dominante abuse de ses obligations contractuelles pour nuire à la concurrence. Mais nous sommes d'avis, et ce point de vue est partagé par l'ATAC, que la réglementation, nouvelle ou non, n'est pas la solution à envisager pour régler les problèmes actuels des compagnies aériennes.
Les administrations aéroportuaires sont prêtes à participer à la résolution des problèmes de restructuration du secteur des compagnies aériennes. La cession des aéroports a créé les conditions propices pour que les aéroports puissent, de façon proactive, faciliter une transition sans heurt et, dans la mesure du possible, veiller à ce que le consommateur obtienne le meilleur service au meilleur prix.
Nous faisons donc les recommandations suivantes.
Le fardeau locatif des aéroports doit être réduit à un niveau raisonnable, et nous croyons que le gouvernement fédéral devrait prendre des mesures immédiates. Premièrement, Transports Canada doit reconnaître qu'il a un rôle à jouer pour renforcer la capacité financière des aéroports afin de créer un contexte favorable à la concurrence. Pour marquer sa bonne foi, nous croyons que Transports Canada devrait bloquer tous ces loyers, qui se chiffrent actuellement à environ 200 millions de dollars, aux niveaux de 1999. Transports Canada devrait faire participer l'industrie à l'élaboration d'un ensemble de principes clés afin de fixer un niveau juste et adéquat de loyers à payer au gouvernement fédéral.
• 0920
Au sujet des petits aéroports, question qui, je n'en doute
pas, préoccupe vivement les membres du comité, nous croyons que les
services essentiels doivent être garantis aux petits aéroports.
Nous croyons que la réglementation, dans l'éventualité où elle est
imposée, ne doit pas donner un monopole de droit ni limiter la
concurrence réelle à un aéroport, quelle qu'en soit la taille. Le
gouvernement fédéral doit relever le niveau et élargir la portée du
programme d'aide aux immobilisations de ces petits aéroports.
Au sujet des créneaux, s'il est nécessaire de contrôler les créneaux aux aéroports canadiens, et je dis bien «si», ceux-ci doivent rester propriété publique et être gérés par l'administration aéroportuaire. Si l'on dispose de règles claires pour régir l'attribution des créneaux, il n'y a aucune raison de créer un mécanisme réglementaire, et il serait préférable de laisser à l'administration aéroportuaire appropriée le soin de régler cette question.
Enfin, au sujet des installations dans les aéroports, l'utilisation commune des installations permet d'abaisser les dépenses d'immobilisations et les coûts d'exploitation et contribue directement à réduire les coûts des compagnies aériennes dans les aéroports et à renforcer la concurrence. Par contre, les compagnies aériennes aiment avoir l'exclusivité de ces installations parce que cela leur donne un avantage concurrentiel.
Si le gouvernement fédéral accepte le principe d'une compagnie intérieure dominante, cette compagnie devrait être tenue d'abandonner ses droits de participation majoritaire dans le cadre des accords actuels et de remettre aux administrations aéroportuaires ses droits à l'utilisation des installations, qui seraient alors converties en vue d'une utilisation commune, notamment les portes, les passerelles d'embarquement, les billetteries, les systèmes de manutention des bagages et les systèmes d'affichage.
Le CAC croit que si l'on accorde les encouragements voulus pour faciliter la chose, par exemple une réduction du loyer versé à la Couronne, un plus grand nombre d'aéroports adopteront de telles politiques relativement à ces installations. Ils auraient alors la capacité financière de mener à bien cette tâche.
Monsieur le président, cela met fin à notre exposé. Nous sommes prêts à répondre aux questions.
Le président: Merci, monsieur Raynor, pour votre exposé au comité.
À titre d'information, je me demande si vous pourriez passer rapidement en revue le processus et nous dire comment on détermine qui peut obtenir un créneau à un aéroport donné. Nous avons entendu bien des choses au comité, surtout de la part des compagnies aériennes qui veulent faire directement concurrence à un transporteur dominant, dans l'éventualité où il y en aurait un. Ils nous ont évidemment fait part de leur désir de pouvoir obtenir des créneaux, surtout en période de pointe à Pearson ou à Vancouver.
M. Neil Raynor: M. Sigler va répondre à cette question.
M. Murray Sigler (président du conseil et président-directeur général de l'Administration aéroportuaire de Winnipeg, Conseil des aéroports du Canada): Premièrement, au Canada, il n'y a pas vraiment de contrôle des créneaux, sauf à Pearson, et il faut donc replacer dans son contexte toute la scène canadienne.
Dans tous les aéroports où il existe des services aériens commerciaux, il y a un comité d'exploitation dont font partie toutes les compagnies aériennes qui utilisent l'aéroport. Ce comité se réunit deux ou trois fois par année et discute des changements d'horaires afin de tenter de dégager une entente entre les membres quant à l'attribution des créneaux relativement aux portes et aux installations dans les aéroports, en particulier les installations d'utilisation commune. S'il y a le moindre problème, si les compagnies n'arrivent pas à s'entendre, alors l'administration aéroportuaire ou l'exploitant de l'aéroport est l'arbitre.
Dans le cas de Pearson, où l'attribution des créneaux a posé certains problèmes aux heures de pointe, davantage que dans les autres aéroports, on a mis en place un processus formel d'attribution des créneaux. Il y a une entité d'attribution des créneaux. En fait, c'est une seule personne qui est chargée de cette tâche par les compagnies aériennes. De même, si les compagnies n'arrivent pas à s'entendre, on s'en remet à l'administration aéroportuaire selon le modèle d'aujourd'hui.
• 0925
Dans tous les cas, on a assez bien réussi à s'entendre. La
question se pose lorsqu'un nouveau transporteur qui ne fait pas
partie du groupe à un aéroport donné veut un créneau. La compagnie
arrive dans le portrait et doit se joindre à ce comité et essayer
d'y avoir accès. Elle en devient rapidement membre, et, en fait,
dans tous les aéroports du Canada, même à Pearson, on a réussi à
s'entendre.
Le président: À quel moment fait-on intervenir l'IATA dans cette équation? Apparemment, c'est l'IATA qui s'occupe de ce protocole relativement aux créneaux.
M. Murray Sigler: Tout cela relève de l'IATA. Le mécanisme a été mis en place par les transporteurs sous l'égide de l'IATA. Il y a des règles qui régissent les obligations internationales, lorsque les vols internationaux ont priorité pour respecter les obligations aux termes des traités. Donc, aux termes des règles d'attribution des créneaux ou des portes, les vols internationaux ont la priorité, et les vols intérieurs viennent ensuite.
Il y a tout un ensemble de règles qui priorisent leur attribution à Pearson. Nous pouvons obtenir ces informations pour le comité si vous le croyez utile, monsieur le président. Nous pourrons vous obtenir aujourd'hui un texte sur le fonctionnement du mécanisme de Toronto.
Le président: Cela serait apprécié. Merci beaucoup.
Monsieur Dromisky.
M. Stan Dromisky (Thunder Bay—Atikokan, Lib.): Ma première question concerne votre préoccupation relativement à la déréglementation ou à la réglementation. J'ai la certitude que vous connaissez tous parfaitement bien les cinq principes qui animent la politique que le ministre a présentée à la Chambre. Dans ce cadre, si ces principes deviennent opérationnels dans toute situation qui pourrait se présenter à l'avenir, ils auront un effet direct ou indirect sur vos activités. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
Ma deuxième question porte sur les 700 et quelques pistes d'atterrissage que nous avons dans notre pays. Bon nombre d'entre elles ont un usage commercial, un usage passager, et vous réclamez 105 millions de dollars pour ces aéroports. J'ai un gros point d'interrogation à ce sujet au vu des besoins que nous connaissons dans bon nombre de ces aéroports. J'aimerais savoir ce que vous pensez de cela aussi, s'il vous plaît.
M. Murray Sigler: La première question est de savoir comment nous pourrions être touchés par la ligne aérienne existante?
M. Stan Dromisky: Je signale à titre de clarification, monsieur le président, que ces cinq principes pourraient être traduits en règlements précis.
M. Murray Sigler: Nous sommes d'accord avec les cinq principes que le ministre a énoncés. Ils sont fondés sur le bon sens. Je pense que tous les intervenants dans le processus devraient donner suite à ces cinq principes. Ils ont été bien pensés. Ces cinq principes ont toujours été partie intégrante de la gestion des aéroports et des lignes aériennes dans notre pays. Il n'y a rien de nouveau de ce côté, mais ils ont été bien énoncés, et ce sont de bons points de repère qui nous permettront d'examiner toute proposition précise.
Les aéroports sont à l'avant-plan de cette guerre des lignes aériennes. C'est sur notre terrain qu'on livre bataille, et c'est nous aussi qui par la suite après devons démêler tout cela au niveau des installations.
Nous sommes des organisations communautaires. Nous sommes des instances publiques même si nous ne sommes pas des entreprises à but lucratif. Nous représentons nos localités, et nous devons gérer ces installations. Nous devons aussi vivre avec les hostilités qu'il peut y avoir entre les employés des lignes aériennes et autres dans la foulée d'une fusion, et cela touche les services généraux de nos aéroports.
Je pense que nous avons de la chance au Canada d'avoir mis en place ce modèle d'administration aéroportuaire avant que se fasse cette restructuration de l'industrie du transport aérien. Nous avons en place une structure qui a été conçue dans l'intérêt public, qui rend des comptes au niveau communautaire et qui est assujettie aux critères des aéroports nationaux au niveau de la reddition des comptes et, afin de protéger les divers intérêts en cause. Et tout cela se fait au niveau communautaire ou régional plutôt qu'au niveau national. Je crois donc que nous sommes sincèrement acquis à l'idée de concurrence, et c'est à nous qu'il appartiendra de démêler tout cela si restructuration il y a.
Pour ce qui est des localités plus petites et du montant de fonds publics qu'il nous faudra pour assurer leur viabilité, je vais m'en remettre à Neil.
M. Neil Raynor: Je vous remercie d'avoir posé cette question.
Comme je l'ai dit au cours de mon exposé, nous avons saisi à plusieurs reprises, au cours des deux ou trois dernières années, le gouvernement fédéral de nos préoccupations relativement à la viabilité financière des petits aéroports du Canada. Nous n'apprenons donc rien de neuf au ministère.
À notre avis, il y a un problème dans ce programme qu'on appelle le PAIA, soit le Programme d'aide aux immobilisations portuaires. Le PAIA ne vise que les installations entourant la piste; il ne s'applique pas aux installations au sol, comme les voies d'accès et autres. Il ne peut s'appliquer qu'aux mesures de sécurité côté piste.
• 0930
À l'heure actuelle, nous tâchons de nous débrouiller dans ce
cadre, et nous pensons que 105 millions de dollars suffiraient. À
l'heure actuelle cet élément, soit le financement en vertu du PAIA,
s'élève à 35 millions de dollars, et c'est clairement insuffisant
pour les besoins que nous avons à satisfaire. Nous croyons avoir
agi de manière proactive, et nous croyons que le gouvernement
fédéral a amplement les moyens de trouver cette contribution de
105 millions de dollars.
M. Murray Sigler: Je serais heureux de reprendre à partir d'ici, Neil.
Nous nous sommes adressés à chaque aéroport, et nous avons demandé à chacun de nous dire ce dont il a besoin. Bon nombre des localités plus petites ont l'impression que le programme actuel n'est pas suffisamment souple, et qu'il n'est pas suffisamment financé pour accepter les aéroports qui ne sont pas admissibles aujourd'hui. Dans les conditions actuelles, il faut avoir des services aéroportuaires programmés pour y être admissible, et nous croyons donc qu'il faut repenser aussi les critères d'admissibilité.
Au bout du compte, l'aéroport doit absorber des coûts d'immobilisations et d'exploitation. Nous ne croyons pas que les petits aéroports sont en mesure d'absorber tous les coûts d'immobilisations. Ils n'en sont pas capables. Ils peuvent probablement absorber les dépenses d'exploitation en imposant des droits aux usagers ou autre chose, mais ils n'ont rien pour les immobilisations. Quand il faut rebâtir une piste ou apporter des améliorations importantes à la piste, on parle de gros sous, et il s'agit de sommes qui ne peuvent être absorbées par le niveau d'activité actuelle qu'on retrouve dans les petits aéroports. Ce qui nous ramène au modèle dont nous parlons. S'il n'y a pas de fonds fédéraux pour eux dans le PAIA, l'aéroport doit s'adresser alors à la province ou à la ville ou à la municipalité qui se retrouve propriétaire et exploitante de l'aéroport.
Le président: Merci, monsieur Dromisky.
Madame Meredith.
Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Réf.): Merci, monsieur le président.
Je m'intéresse aux comptes que rend l'administration aéroportuaire. À qui rendez-vous des comptes pour les décisions que vous prenez relativement aux dépenses et aux montants que l'on dépense dans certains secteurs?
M. Murray Sigler: Nous rendons des comptes sur plusieurs fronts. M. Hopkins pourrait peut-être répondre à cette question.
M. J.A. Hopkins: Merci.
En réponse à la question telle que vous l'avez posée, je dirais qu'il y a dans les faits deux niveaux de reddition de comptes. Premièrement, la loi nous impose diverses exigences relativement à la reddition de comptes. Il y a aussi des dispositions en ce sens qui sont inscrites dans les baux que nous avons avec le gouvernement fédéral et dans notre règlement constituant. Nous devons aussi rendre des comptes au niveau local parce que les personnes qui siègent à notre conseil d'administration et au conseil d'administration des autres administrations aéroportuaires dans tout le pays sont nommées par des organisations communautaires, par des administrations municipales, etc.
La seconde partie de votre question portait sur la manière dont les dépenses sont gérées aux aéroports. Dans la plupart des cas, l'administration aéroportuaire et les lignes aériennes qui desservent l'aéroport en question concluent un accord. Le comité dont parlait M. Sigler il y a quelques instants gère également les exigences relatives aux immobilisations à l'aéroport.
Murray, vous voulez peut-être reprendre à partir d'ici et donner un peu plus de détails sur le déroulement de ce processus.
M. Murray Sigler: Pour ce qui est des droits d'amélioration des aéroports, M. Raynor a mentionné que Kelowna, Calgary et Winnipeg ont été les trois premiers aéroports à les créer. Onze ou douze aéroports en ont maintenant, et une quinzaine d'aéroports s'ajouteront bientôt. C'est presque devenu une norme. Lorsque des accords interviennent entre l'aéroport, l'ATAC et l'industrie du transport aérien, il existe un processus, une intervention officielle des lignes aériennes, et il y a des projets d'immobilisations ainsi que des freins et contrepoids. Du point de vue de l'administration aéroportuaire, c'est une bonne chose parce que cela permet de vérifier si les travaux d'immobilisations sont nécessaires. Du point de vue de la ligne aérienne, c'est une bonne chose parce qu'elle peut participer, et cela lui donne un certain contrôle, et ainsi elle n'a plus à craindre une administration aéroportuaire qui aurait perdu les pédales et qui jetterait de l'argent par les fenêtres sans aucune retenue.
En étroite collaboration avec l'industrie du transport aérien, l'ATAC, nous nous employons en ce moment à mettre au point un genre de mécanisme d'appel auquel une ligne aérienne pourrait s'adresser pour contester les tarifs d'une administration aéroportuaire. Au bout du compte, si la ligne aérienne était d'avis que le processus était injuste et qu'il n'était pas basé sur la comptabilité des coûts, qu'il n'était pas conforme aux principes de l'OACI, elle disposerait d'un mécanisme d'appel quelconque. Nous tâchons donc d'en arriver à un accord avec l'ATAC, et nous sommes sur le point de nous entendre sur une formule qui nous donnerait ce genre de mécanisme.
Mme Val Meredith: N'existe-t-il pas une certaine souplesse dans la gestion des administrations aéroportuaires de telle sorte qu'on ne retrouve pas le même esprit dans une ville de taille moyenne que dans un village? N'avez-vous pas une certaine souplesse dans la façon dont vous gérez vos affaires, dont vous percevez les droits d'aéroport, dont vous facturez vos usagers, de manière que vous puissiez vous adapter?
• 0935
Si vous avez un aéroport où atterrissent trois avions par
jour, je ne pense pas que l'on exigera la même qualité de services
que dans un aéroport où atterrissent 100 avions par jour.
M. Murray Sigler: Je pense que c'est là le principal avantage du système actuel. Du point de vue du gouvernement fédéral, la politique a réussi au niveau des objectifs. D'un point de vue communautaire ou régional, elle autorise une approche propre à chaque site. Les accords que nous avons avec les lignes aériennes sur les droits d'aéroport donnent une certaine uniformité à la ligne aérienne qui doit desservir diverses localités. Pour les passagers, il y a une certaine uniformité dans l'approche. En vertu de l'accord, il n'y a qu'un seul tarif pour les droits d'aéroport, si bien que les tarifs à 5 $, 10 $ ou 15 $ sont remplacés par un seul tarif. Il appartient à l'administration aéroportuaire et aux lignes aériennes de s'entendre sur le tarif qu'on exigera, disons, à Winnipeg, que ce soit 5 $ ou 10 $, mais il n'y a pas trois ou quatre tarifs différents. La méthode de perception est alors uniforme, et l'administration aéroportuaire n'est pas obligée d'avoir son propre tarif.
Pendant que nous y sommes, je dois signaler qu'il y a un lien direct entre le loyer que l'administration aéroportuaire doit payer au gouvernement fédéral et le montant du droit d'aéroport. Prenez le cas de Vancouver, qui va verser cette année environ 60 millions de dollars en loyer, et l'on perçoit 60 millions de dollars grâce aux droits d'aéroport. C'est la même chose à Ottawa ou à Winnipeg. Il y a une corrélation directe entre le loyer et le droit d'aéroport.
Mme Val Meredith: Sur quoi se fonde le loyer que vous versez au gouvernement fédéral? Est-ce que c'est fondé sur les droits d'aéroport que vous percevez, que le gouvernement reçoit alors directement de l'administration aéroportuaire?
M. Murray Sigler: Non, ça marche tout simplement comme ça parce que le mécanisme d'établissement du loyer a été fixé au moment où la gestion des aéroports a été transférée, et ce, en fonction des données d'activités historiques. Étant donné la croissance des aéroports, la croissance du trafic aérien à Vancouver, Calgary et aux autres aéroports du pays, cela s'est avéré un pactole pour le gouvernement fédéral. Si l'on excepte l'avantage sur le plan des immobilisations, cela a été un pactole sur le plan opérationnel. En fait, ce montant est celui que les administrations aéroportuaires doivent maintenant réunir grâce aux droits d'aéroport.
Mme Val Meredith: Mais comment le gouvernement fédéral perçoit-il son loyer? Sur quoi est-ce fondé? Comment le gouvernement détermine-t-il le loyer que Vancouver devra verser par rapport à celui que Calgary devra verser?
M. Neil Raynor: On procède en fait site par site. Ce n'est pas fait...
Mme Val Meredith: Est-ce fonction du volume du trafic? Est-ce fonction du volume de passagers?
M. Neil Raynor: C'est fondé sur les recettes prévues.
Honorables députés, je me suis joint récemment au Conseil des aéroports du Canada à titre de directeur général. Avant cela, j'étais directeur général de l'Administration aéroportuaire internationale de Halifax, et j'avais pour responsabilité de négocier les conditions financières du transfert. Ayant négocié avec Transports Canada, je peux vous dire qu'ils ont établi le loyer en fonction des données historiques. Le ministère a ensuite fait des projections et dit que si l'on devait gérer les aéroports pendant 60 ans—étant donné que les baux sont de 60 ans; c'est d'ailleurs 60 ans plus 20—combien d'argent allions-nous gagner? C'est ainsi qu'on a établi le loyer de base.
Le gouvernement fédéral a dit que s'il continuait de gérer ces aéroports, voilà combien il gagnerait. Il nous a dit alors qu'il exigerait cette somme des administrations aéroportuaires parce qu'il croit qu'elles peuvent faire mieux. Le gouvernement a dit également que si les administrations aéroportuaires font mieux, si leur budget—il faut se souvenir qu'il s'agit d'entités sans but lucratif—débouche sur des excédents, ces excédents sont réinvestis dans les programmes d'immobilisations dont M. Sigler parlait. Le gouvernement fédéral dit que si les administrations aéroportuaires ont des excédents qui dépassent les recettes du gouvernement, le loyer de base qu'on exige de l'administration, les recettes qu'il attend, le revenu pour le gouvernement fédéral, le gouvernement en profitera aussi. Cette participation peut se situer jusqu'à 35 p. 100, et cela peut imposer des coûts énormes aux aéroports à l'avenir.
M. Murray Sigler: Ce que les aéroports proposent, c'est de remplacer les mécanismes complexes actuels par une formule qui serait raisonnable, de telle sorte qu'essentiellement, ce serait une approche fondée sur la comptabilité des coûts en fonction de ce que le gouvernement fédéral a investi dans les aéroports au moment des transferts ou de leur valeur marchande à l'époque. Mais il faut que le rendement soit justifiable parce que les montants peuvent être excessifs.
Le montant total est de 1,3 milliard de dollars. Voilà ce que les autorités aéroportuaires auront versé en loyer dans la période de cinq ans qui a débuté en 1998. C'est tout un pactole. C'est très bien du point de vue des finances du gouvernement fédéral, mais cela draine énormément le système. Je ne peux en parler parce que nous n'en avons pas discuté au conseil qui réunit tous les aéroports, mais dans notre propre camp, si l'on abaissait notre loyer, les lignes aériennes en profiteraient directement sous forme d'économies. Je pense que ce serait le cas pour la plupart des aéroports.
Le président: Merci beaucoup, Val.
Monsieur Sekora, s'il vous plaît.
M. Lou Sekora (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, Lib.): Merci beaucoup. Pardonnez-moi si je suis arrivé un peu tard mais j'avais une réunion du caucus.
• 0940
Vous dites que les loyers sont trop élevés. Vous parlez des
100 millions et des 200 millions de dollars, et vous dites que
c'est trop. J'essaie de m'y retrouver. À votre avis, qu'est-ce qui
serait plus intelligent, plus raisonnable? De quels chiffres parle-
t-on?
M. Murray Sigler: Nous voulons que ce soit précis, fondé sur une valeur comptable quelconque des actifs dont il est question et sur un rendement économique raisonnable pour le gouvernement du Canada aussi. Nous voulons négocier cela avec Transports Canada. Au départ, cependant, nous ne croyons pas que si les loyers sont plafonnés au niveau d'aujourd'hui à environ 200 millions de dollars par année, ce serait un rendement équitable. Étant donné la façon dont les baux sont structurés aujourd'hui, le montant de 200 millions de dollars d'aujourd'hui va croître jusqu'à environ 280 millions de dollars au cours des trois ou quatre prochaines années, et les loyers ont déjà augmenté au cours des quelques dernières années. À tout le moins, on pourrait simplement les plafonner au niveau où ils sont aujourd'hui.
M. Lou Sekora: Quand vous dites qu'on les plafonnerait au niveau où ils sont aujourd'hui, vous signalez que les loyers sont en fait trop élevés, cela et quelques autres éléments. Vous dites cependant qu'il faudrait les plafonner au niveau de 1999. Si ce niveau est trop élevé, pourquoi le plafonner au niveau de 1999?
M. Murray Sigler: Dans un monde idéal, nous ne ferions pas cela, mais cela semble pratique dans la mesure où on peut absorber cela aisément. On peut mettre une telle mesure en oeuvre rapidement et cela nous donnerait à tout le moins une base de planification pour les aéroports et l'industrie du transport aérien. C'est une manière simple de commencer, et nous pourrions ensuite continuer de négocier la question plus complexe, c'est-à-dire la formule qui convient pour l'avenir. Idéalement, cependant, ce montant devrait certainement être réduit.
M. Lou Sekora: Mais le fait est que le niveau de 1999 est trop élevé, alors pourquoi voudriez-vous rester coincer avec le niveau de 1999 pendant encore deux ou trois ans avant qu'on trouve une formule qui ait de l'allure?
M. Murray Sigler: Je suis d'accord avec vous, mais à cause de la manière dont ça marche, si on ne plafonne pas ce montant maintenant, nous allons nous retrouver avec des montants plus élevés en 2000 et 2001. Avant qu'on ait le temps de se retourner, nous allons nous retrouver avec un niveau qui sera 50 p. 100 supérieur à celui que nous avons aujourd'hui.
M. Lou Sekora: Vous parlez tous des petits aéroports et de leur viabilité financière, et j'essaie de m'y retrouver. En Colombie-Britannique, d'où je viens, les aéroports qui ont une superficie de 600 acres sont transférés aux villes. Pourquoi est-ce qu'une ville accepterait cela? J'ai été maire pendant de nombreuses années, et j'aurais adoré avoir les 600 acres adjacents à l'aéroport pour y faire certaines choses. Je ne voudrais pas tout avoir parce qu'il y a certaines choses dont je ne voudrais pas, mais je pourrais sûrement y bâtir des installations industrielles et des logements. Pourquoi est-ce que ce ne serait pas un pactole pour une ville?
M. Neil Raynor: Je vais commencer à répondre à cette question.
Évidemment, beaucoup des villes et des petites collectivités qui ont repris ces aéroports voient ces possibilités. L'un des accords conclus avec le gouvernement fédéral stipule que, en tout cas pour l'avenir prévisible, disons 10 ans, le site demeurera un aéroport comme il l'était auparavant. Souvent, le transfert s'est effectué moyennant la somme d'un dollar, car il n'y avait pas de recettes sous-jacentes dans ces aéroports. La communauté va continuer à faire fonctionner cet aéroport, mais il y a aussi les possibilités de développement, que ce soit la mise en place d'une infrastructure industrielle légère ou peut-être la construction de logements à proximité de l'aéroport—encore que cette perspective ne m'enchante guère car cela pose toujours des problèmes: il suffit de voir ce qui se passe à Toronto.
Il y a cependant un équilibre ici. Dans certaines localités, les aéroports—et l'aéroport d'Ottawa en est un excellent exemple, il y en a aussi d'autres ailleurs en Ontario—ont été très durement frappés par les taxes foncières. C'est devenu la deuxième dépense de nombreux aéroports après le loyer fédéral, surtout en Ontario actuellement.
M. Murray Sigler: Je pense tout de même que vous avez raison. Les municipalités voient l'intérêt stratégique de posséder les sites des aéroports dans la perspective de la planification municipale et même régionale. Il est logique que ces municipalités reprennent ces propriétés aéroportuaires.
Le point positif, c'est que ces propriétés leur sont transmises par le gouvernement fédéral, mais elles représentent tout de même un fardeau financier. S'il n'existait pas un fort potentiel industriel, cette propriété devient un fardeau car il faut assumer tous les coûts de la sécurité et de la réfection des pistes. Pour la plupart des petites municipalités, c'est une grosse pilule à avaler, et je pense donc qu'elles essayent d'obtenir du gouvernement fédéral des allégements financiers pour pouvoir exploiter ces aéroports. Si elles réussissent à mettre en valeur les terrains environnants, les perspectives deviennent bonnes.
M. Lou Sekora: Donc j'imagine qu'avant, quand le gouvernement fédéral était propriétaire de ces aéroports, il versait à ces municipalités une subvention en guise de taxe, à un taux commercial quelconque. C'était beaucoup plus que les taux de taxe résidentielle, et c'est là tout le problème.
M. Neil Raynor: D'autre part, certains éléments de l'aéroport—par exemple les pistes dans le cadre du régime de subvention tenant lieu d'impôt foncier—ne faisaient normalement l'objet d'aucune évaluation, alors que c'est le cas maintenant. Cela crée d'importants problèmes, surtout en Ontario mais aussi dans le reste du pays. Les localités ont repris ces installations. Il ne faut pas les exploiter n'importe comment. Elles sont là, et elles peuvent être un facteur positif pour l'économie de la région. Mais beaucoup de ces petits aéroports ne dégagent pas suffisamment de recettes comparativement à leur coût.
M. J.A. Hopkins: Ces aéroports font l'objet d'une réévaluation à chaque fois.
M. Lou Sekora: C'est un problème pour tout le monde. S'il y avait un aéroport dans ma ville et que j'essayais de le taxer au taux résidentiel plutôt qu'à un taux commercial ou industriel, je sais que ma décision serait contestée devant les tribunaux et que je perdrais. C'est cela le problème. Je pense que le problème, c'est que les municipalités n'ont d'autre choix que les taxer au taux qui leur correspond.
M. Murray Sigler: Je crois que le problème est plus grave ici en Ontario qu'ailleurs.
Le président: Merci, monsieur Sekora.
Chers collègues, ma fonction de président m'oblige parfois de rappeler certaines choses. Bien que la discussion soit très intéressante, il faut que nous essayons de nous en tenir au mandat de notre comité. Le Conseil des aéroports essaye de glisser dans la discussion la question des redevances qu'il paie, etc. Les témoins mentionnent plus d'une fois dans leur exposé leur hostilité à un retour à la réglementation et aux créneaux. Mais nous devrions peut-être essayer de nous en tenir au mandat de notre comité pour essayer d'obtenir des renseignements qui nous aideront à rédiger notre rapport.
Monsieur Guimond.
[Français]
M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ): Monsieur le président, j'aimerais poser une question concernant les créneaux d'atterrissage qui est liée au mandat que le comité s'est donné. Mais avant de la poser, je ferai un commentaire que je vous livre de façon spontanée.
Dans vos propos, aussi bien à l'écrit qu'au verbal, vous vous comportez souvent un peu comme le roi Louis XIV, qu'on a appelé le Roi-Soleil, car le soleil ne se couchait jamais sur son empire. Je voudrais que vous vous rappeliez toujours—et vous semblez l'oublier—que les aéroports qui vous ont été cédés ont été payés, financés et développés par les contribuables canadiens.
Vous avez signé ce contrat de votre propre volonté. Personne ne vous avait mis un gun sur la tempe pour vous forcer à le faire. Je veux vous dire que vous ne me ferez pas pleurer ici et que je ne cherche pas à savoir si vous faites de l'argent ou pas. N'oubliez pas que vous avez reçu un bien des contribuables. Comme représentant démocratiquement élu d'une population, je crois qu'il est de mon devoir de replacer les choses dans leur contexte.
Je vais vous donner un exemple à l'écrit illustrant comment vous oubliez des choses. Dans la version française de votre document, qui n'est pas paginé, vous dites au sujet des installations aéroportuaires:
-
Quant aux nouvelles infrastructures, elles ont
généralement été construites en vue d'une utilisation
commune et financées par l'exploitant de l'aéroport.
À l'expression «financées par l'exploitant de l'aéroport», j'aurais aimé que vous ajoutiez «et par la taxe de 10 $ qu'ont payée les utilisateurs». Vous devriez démontrer que vous êtes—je ne veux pas employer le terme «honnête»—conscient que les passagers, au moyen de leur 10 $, ont contribué au financement. De toute façon, vous avez fait allusion à une taxe d'amélioration de l'aéroport. Ce sont des tels propos qui me font bondir de ma chaise. De plus, j'ai mauvais caractère et j'ai de la misère à me contrôler. Quand j'entends des affaires comme ça, comme on dit en français, ça me fait sauter un gasket. C'était mon commentaire.
• 0950
Je passe maintenant à ma question. Le comité a entendu les
représentants des transporteurs d'affrètement qui
offrent des vols nolisés.
Je crois que nous serons capables de
convenir que les transporteurs d'affrètement peuvent
représenter une solution au niveau du maintien de la
concurrence. Ils en sont conscients et nous l'ont
confirmé. Le comité en est également
conscient, et je crois que cela devrait faire partie de
ses recommandations.
Mais je vous mets tout de suite en garde: on ne sera pas capable de s'entendre si le gouvernement veut modifier la règle des 10 p. 100.
Les transporteurs d'affrètement nous ont dit que tous les transporteurs voulaient atterrir à Pearson à 8 heures, arriver à Dorval à 8 h 30, arriver à Vancouver en fin de journée, etc. Tout le monde veut voler, mais personne ne veut atterrir à l'aéroport Pearson à 11 h 30 ou 13 h 30.
Dans votre document, on lit: «Si l'on dispose de règles claires pour régir l'attribution des créneaux...». Je crois être d'accord sur ce point, mais puisque je suis encore à réfléchir et que je ne voudrais pas que ce soient des fonctionnaires ou des gens du cabinet du ministre qui, lors de la rédaction de notre rapport, nous suggèrent ces règles claires, j'aimerais que vous, les spécialistes des créneaux d'atterrissage, nous suggériez des règles claires. Que devraient être ces règles claires?
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Guimond. Votre question a duré exactement cinq minutes.
Monsieur Raynor, vous voulez répondre?
M. Neil Raynor: Permettez-moi de répondre à vos remarques, qui étaient judicieuses et dont je vous remercie.
Nous n'avons pas cessé de dire que nous savons bien que ces installations ont été construites et payées par les contribuables canadiens, dont nous faisons partie. Le gouvernement fédéral a fait un travail extraordinaire quand il a amorcé le système à une époque où l'industrie ne pouvait pas le faire elle-même, et il est important de le souligner. Nous le reconnaissons.
Nous reconnaissons aussi qu'il faut payer un loyer pour ces installations, à moins de privatiser complètement le système. C'est une autre discussion, et ce n'est pas notre propos aujourd'hui. Nous reconnaissons qu'il faut payer un loyer. Ce que nous disons, c'est que ce loyer devrait être équitable, et nous pensons qu'il ne l'est pas. Le taux de ces loyers actuellement est un taux usuraire. Voilà ce que nous disons, mais nous ne contestons pas une bonne partie de vos commentaires.
Si je peux maintenant parler de la question des créneaux, ce que nous disons dans notre document, c'est que le principe fondamental à respecter si l'on détermine des règles pour l'attribution de ces créneaux, s'il faut vraiment établir des créneaux dans les aéroports canadiens, c'est que cette réglementation doit favoriser la concurrence. Si, à la suite de la rationalisation de l'industrie aéronautique, nous voyons apparaître un transporteur dominant qui va reprendre un autre transporteur, il faut veiller à imposer à ce transporteur de se dessaisir des créneaux qui viendraient avec la compagnie absorbée.
M. Murray Sigler: Si je peux vous interrompre un instant, Neil, c'est exactement la situation que nous avons actuellement. Canadien et Air Canada dominent à eux deux l'ensemble des aéroports de notre pays. À supposer qu'Air Canada absorbe Canadien d'une façon ou d'une autre, si Air Canada reprenait tous les baux et les engagements de Canadien, les autorités aéroportuaires ne pourraient plus mettre leurs installations à la disposition d'autres compagnies aériennes éventuelles. Ce ne serait plus une question de pourcentage du marché contrôlé par Air Canada. La compagnie dominerait et contrôlerait la totalité des aéroports du pays. Il faut donc s'occuper de cette question. Actuellement, les dispositions contractuelles sont différentes pour chaque aéroport.
M. Neil Raynor: Quand nous parlons de créneaux, il s'agit de créneaux d'atterrissage, mais si vous voulez élargir la définition, il faudrait y inclure les choses dont a parlé M. Sigler et dont nous parlons dans le document, par exemple les comptoirs d'enregistrement. Si tous les comptoirs d'enregistrement de votre aéroport appartiennent à une seule compagnie aérienne, où va s'installer la nouvelle compagnie qui va arriver? Elle n'aura pas de place. Il faut donc revoir tous ces baux dans le cadre du processus d'ensemble.
Le président: Merci, monsieur Raynor.
Monsieur Jackson.
M. Ovid L. Jackson (Bruce—Grey, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vais m'en tenir à l'intérêt public et au moyen de servir au mieux cet intérêt public. Je pense que c'est une question d'équilibre. Toutes ces discussions opposent des gens qui se font concurrence pour acquérir plus de ressources, et je pense qu'il est important qu'un groupe regarde ce que fait l'autre pour voir qui gagne de l'argent et comment il est possible de mettre la main dessus.
• 0955
Ce qui est curieux, c'est que quand le gouvernement perd
100 millions de dollars, on dit qu'il est idiot, et quand il en
gagne 200 millions de dollars, on dit que c'est de l'escroquerie.
Les gens de la navigation aérienne nous disent que si on les
privatise, tout va bien aller. Ensuite, ils ont le droit de grève
et ils peuvent tout bloquer et tout contrôler. En plus, le
1,3 milliard de dollars qui était censé se répercuter sur le
consommateur ne lui parvient pas.
Nous avons entendu ce matin les représentants de l'ATAC. Ils nous ont dit par exemple que nous leur imposions des redevances d'atterrissage qui sont une véritable escroquerie à chaque fois qu'un avion se pose. Il n'y a aucune réglementation, et tout d'un coup les tarifs peuvent grimper de 75 $ à 500 $.
On nous compare parfois aux États-Unis. Si vous voulez vous comparez aux États-Unis sur le marché mondial, il faut bien savoir qu'ils contrôlent 47 p. 100 du marché; les Japonais, entre 11 et 13 p. 100, les Européens, 26 p. 100, alors que nous n'en contrôlons que 2 p. 100. Nous produisons 3 p. 100 de la base de connaissances du monde, des choses comme cela. Donc quand on parle au Canada de nos impôts et du montant que nous payons, il faut tenir compte de notre population, de notre vaste superficie et de la qualité de vie dont nous jouissons. Il paraît qu'elle est excellente. Nous sommes numéro un dans le monde sur ce plan.
Donc il va falloir limiter la croissance. On ne peut pas continuer à croître indéfiniment, à avoir de plus en plus d'avions qui vont encombrer le ciel. Cela va devenir un problème. On n'aboutit donc à ces alliances, à ces créneaux, à ces petits aéroports qui alimentent les gros, et ce sont les gros qui font de l'argent. Les municipalités qui ont de gros aéroports... Prenons Mississauga, par exemple, où se trouve Pearson. Il y a là à peu près 20 000 employés au moins. Donc ces municipalités profitent de ces aéroports.
Le président: Pourriez-vous conclure, monsieur Jackson?
M. Ovid Jackson: Oui. Voici ma question, monsieur le président. Je crois qu'il faudrait que ces autorités aéroportuaires nous disent exactement d'où proviennent leurs recettes. S'il y a des dispositions en matière de sécurité, par exemple, ou comment on transporte les gens, ou quelles sont les installations de radar, etc. J'aimerais voir ce que vous faites, pour savoir... parce que beaucoup de gens disent que vous répercuter sur la clientèle des quantités de coûts superflus.
Le président: Monsieur Sigler.
M. Murray Sigler: Nous sommes une organisation sans but lucratif, notre comptabilité n'a rien de secret et nous divulguons totalement toutes nos informations financières, non seulement aux compagnies aériennes mais aussi aux collectivités. Nous nous ferons un plaisir de vous communiquer les informations financières que vous souhaitez pour n'importe laquelle de nos autorités aéroportuaires, et vous pourrez alors en tirer vos propres conclusions.
Mais il est exact que c'est une question d'équilibre. Si l'on veut avoir une industrie aérienne compétitive, il faut avoir l'infrastructure aéroportuaire nécessaire pour desservir ces compagnies aériennes, et pour cela il faut travailler en collaboration étroite avec Transports Canada. C'est vrai, il faut trouver un équilibre.
M. Ovid Jackson: Monsieur le président, je voudrais juste faire une petite remarque. Le gouvernement paie pour les dégâts causés à l'environnement. C'est le gouvernement qui paie pour la sécurité—parfois on fait appel à la GRC.
Le président: Non, ce n'est pas exact, monsieur Jackson.
M. Ovid Jackson: Bon, mais ils nous demandent aussi de construire de petits aéroports. D'où vient cet argent?
Le président: Monsieur Sigler.
M. Murray Sigler: Tous ces domaines relèvent justement des autorités aéroportuaires. C'est nous qui devons assurer la sécurité et la police dans les aéroports. Ce sont les autorités aéroportuaires qui sont responsables de l'environnement. Tout cela fait partie de l'opération éminemment rentable qu'a effectuée le gouvernement fédéral en se déchargeant de ses obligations dans ces domaines et de ses responsabilités financières.
Le président: Pour vous rendre justice à tous deux, disons que nous en sommes encore au stade de l'apprentissage. Nous n'en sommes qu'au tout début de ce processus de cession des aéroports et vous ne faites que commencer à voir comment cela va pouvoir fonctionner.
M. Murray Sigler: Certes, monsieur le président, et une étude est actuellement en cours justement. Si nous examinons tous ces problèmes, ce n'est pour esquiver nos obligations contractuelles, comme on a pu le laisser entendre. C'est parce qu'il y a actuellement une étude à laquelle nous participons, de même que l'ATAC et les collectivités.
Le président: Merci, messieurs.
Madame Desjarlais.
Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): J'ai deux ou trois questions, et les remarques de M. Jackson portaient justement sur le même sujet. On aurait dit que nous changions complètement de monde en arrivant à cette réunion. L'un et l'autre se renvoient la balle, et en fin de compte, tous les deux estiment que le gouvernement ne devrait pas faire payer l'utilisation du service.
Mais les aéroports américains—car nous nous comparons souvent aux États-Unis—combien paient-ils en loyer?
M. Neil Raynor: Le modèle américain est très différent, car en général les aéroports y sont exploités par les municipalités. C'est un coût direct pour la municipalité, donc ce n'est pas du tout le même modèle.
M. Murray Sigler: Mais pour de nouveaux aéroports comme celui de Denver, celui qu'on est en train de construire aux États-Unis, les taux sont exorbitants. Je ne sais pas si nous pourrons remettre la main sur les chiffres, mais c'est beaucoup, beaucoup plus cher que ce que l'on paie pour les nouvelles installations de Pearson ou de Vancouver.
M. Neil Raynor: Mais pour revenir à votre question sur le montant du loyer versé à la municipalité, ou à l'État américain ou...
Mme Bev Desjarlais: Quels types de loyer les autorités versent-elles à...
M. Neil Raynor: Il s'agit du loyer, pas de...
M. Murray Sigler: Ils n'ont pas le même modèle. Les aéroports appartiennent à la municipalité.
M. Neil Raynor: Oui, c'est un modèle complètement différent.
Mme Bev Desjarlais: Bon. En gros, c'est avec l'argent du contribuable qu'on fait fonctionner l'aéroport.
M. Neil Raynor: Aux États-Unis? Oui, absolument.
M. Murray Sigler: Mais il existe aussi un programme fédéral qui s'adresse à tous les aéroports pour subventionner...
Mme Bev Desjarlais: Bon. Donc il y a aussi de l'argent fédéral...
M. Murray Sigler: C'est un gros programme fédéral. C'est complexe, mais c'est un régime complètement différent.
Mme Bev Desjarlais: Donc quelle que soit la façon de voir les choses, le gouvernement aux États-Unis, que ce soit au niveau municipal, au niveau de l'État ou au niveau fédéral, verse de l'argent aux aéroports. Et c'est pour cela dans certains cas qu'on va s'apercevoir que cela coûte moins cher d'aller dans ces aéroports, ou dans le cas de Denver, que cela coûte plus cher à cause des travaux considérables qu'ils y font.
M. Murray Sigler: Le coût élevé de ces travaux est répercuté sur les consommateurs, mais il y a un programme de frais de supplément de services, comme on l'appelle aux États-Unis, qui est l'équivalent de notre AIF, qui est supervisé par le gouvernement fédéral.
Mme Bev Desjarlais: Je voulais vous poser une autre question, mais je la cherche.
Vous dites qu'à Vancouver, par exemple, on verse 60 millions de dollars, et je crois que le montant est assez élevé à Toronto. À votre avis, un montant équitable, ce serait combien? Si vous regardez la totalité du terrain couvert par l'aéroport, les pistes et tout le reste de l'infrastructure, si vous deviez acheter ou louer l'aéroport de Toronto, combien à votre avis vaudrait cette terre et ces infrastructures?
M. Murray Sigler: Le loyer pour Toronto cette année va frôler les 120 millions de dollars.
Mme Bev Desjarlais: Mais en ville, à Toronto, vous paieriez combien?
M. Neil Raynor: Je suis désolé, nous n'avons pas ces données. Tout ce que nous disons, pour en revenir au loyer, c'est que nous sommes d'accord pour payer un loyer équitable...
Mme Bev Desjarlais: Comment pouvez-vous dire que vous devez payer un loyer équitable alors que vous n'êtes même pas capable de me dire quelle est la valeur foncière de cette propriété en ville à Toronto?
M. Neil Raynor: C'est parce que je n'ai pas ces détails...
Mme Bev Desjarlais: Alors comment pouvez-vous dire que...
M. Neil Raynor: ...mais nous pourrions le savoir...
M. J.A. Hopkins: Il y a un principe essentiel qui a été oublié dans cette discussion sur le loyer.
Comme nous l'avons dit plusieurs fois, nous souscrivons sans réserve au principe, à savoir que les autorités aéroportuaires doivent payer un loyer car les installations que nous avons reçues au moment de la cession ont été payées par le contribuable et qu'il faut que cet investissement rapporte quelque chose.
Mais si vous souscrivez au principe, vous reconnaissez aussi qu'à partir du moment de la cession, ce sont les autorités aéroportuaires qui font tous les investissements requis constamment pour la maintenance et l'évolution des installations... Le gouvernement fédéral ne verse plus un sou. Donc à un moment donné, il aura été entièrement remboursé—le contribuable aura récupéré intégralement le montant de son investissement au moment où l'aéroport a été cédé. Et le remboursement de cet investissement, les autorités aéroportuaires l'auront effectué au moyen des excédents de leurs recettes sur leurs dépenses.
Or, la formule de loyer telle qu'elle est conçue prévoit un accroissement de la part du gouvernement dans le temps et non une diminution. Donc le principe économique du loyer est inversé. Au lieu de suivre les principes du marché, on fait le contraire, voilà notre argumentation.
Mme Bev Desjarlais: Pour revenir à ce que disait M. Guimond, vous saviez bien cela quand vous avez signé votre contrat, non?
Vous dites maintenant que vous payez un montant excessif, mais vous ne pouvez même pas me dire en quoi consisterait un montant équitable à Toronto. Donc, j'ai dû mal à croire que vous avez vraiment étudié toute la question; j'ai plutôt l'impression que vous n'êtes pas contents d'être obligés de payer.
M. Murray Sigler: La valeur nette inscrite dans les registres de Transports Canada, et qui a été utilisée à l'époque de la négociation de la cession, était d'environ 300 millions de dollars pour Toronto. Je vous ai donné le montant du loyer qui va être versé pour cette année. Vous pouvez en tirer vos propres conclusions.
Nous ne disons pas que nous n'allons pas respecter les ententes que nous avons conclues. Ce que nous disons, c'est que nous avons au Canada une industrie aéronautique en difficulté. Les compagnies aériennes disent qu'elles n'ont pas les moyens pour faire face aux frais qu'on leur impose. Elles disent qu'elles ont besoin d'allégement. Ce que nous disons, c'est qu'on presse tout le citron. Le gouvernement fédéral a remplacé sa subvention par une opération juteuse. Il faut revoir toute la structure économique du système.
M. J.A. Hopkins: C'est le pouvoir de l'argent. Nous sommes des organisations communautaires, des organismes sans but lucratif. Donc, ce n'est pas notre argent que nous nous plaignons de perdre.
Le président: C'est fini, madame Desjarlais; vous avez épuisé votre temps.
Monsieur Comuzzi.
M. Joe Comuzzi (Thunder Bay—Superior-Nord, Lib.): Merci et bonjour messieurs. On nous a dit que la plus grosse subvention de l'industrie aéronautique canadienne, c'était le loyer que l'on fait payer aux aéroports ou aux compagnies aériennes pour fonctionner. Donc, quand j'entends toute cette discussion sur la structure des redevances ou des loyers, monsieur le président, je dois vous dire que cela nous laisse plutôt froid de ce côté-ci du comité. Peut-être devrions-nous dans notre étude nous pencher sur le Conseil des aéroports pour voir s'il ne vaudrait pas le restructurer lui aussi.
Je n'ai pas été satisfait du tout de votre réponse à Mme Meredith au sujet de votre obligation de rendre compte. Quand on a transféré les aéroports, on a constitué des autorités aéroportuaires locales, et nous pensions que vous seriez responsables auprès des collectivités locales. On me dit, et je le sais personnellement, que ce n'est pas le cas. Vous n'avez aucun compte à rendre sous quelque forme que ce soit aux collectivités locales que vous êtes censés représenter. Je tenais à le dire, et j'aimerais que vous répondiez à cette remarque avant la fin de la séance.
Nous avons deux programmes différents. D'un côté, il y a une industrie aéronautique qui, me semble-t-il, se préoccupe plus de la vision mondiale des choses et s'intéresse surtout à transporter des voyageurs entre les grandes plaques tournantes du monde; je crois que c'est cela leur motivation. C'est la même chose pour Air Canada et pour Canadien. Mais nous avons aussi un comité qui essaye, me semble-t-il, d'être équitable et juste pour les voyageurs canadiens. Nous sommes donc à l'opposé des uns des autres.
Ce qui nous préoccupe, c'est le voyageur canadien, et non le marché mondial. J'aimerais avoir votre point de vue. Êtes-vous là pour essayer d'offrir quelque chose d'équitable aux voyageurs canadiens ou pour montrer aux compagnies aériennes que vous faites ce que vous pouvez pour améliorer leur situation mondiale?
Voici mon autre question: D'où vient votre argent? Je voudrais savoir d'où proviennent vos recettes et comment vous déterminez les redevances payées dans certains aéroports, les montants qui doivent être versés pour utiliser certains aéroports alors que ces redevances n'existent pas dans d'autres aéroports.
Merci. Ce sont là toutes mes questions.
M. Murray Sigler: Pour ce qui est de la responsabilité des autorités aéroportuaires, le gouvernement actuel a présenté après les élections de 1993 ce qu'il a appelé la politique nationale des aéroports. Il a repris la politique qui avait été lancée par le gouvernement précédent et a examiné la question de la responsabilité. Les principes entourant l'obligation de rendre compte sont clairement exposés dans la nouvelle politique nationale des aéroports: ces principes stipulaient que les autorités aéroportuaires devaient rendre des comptes aux communautés dont dépendait l'aéroport. C'est donc bien l'objectif de la politique.
Il y a différentes manières de l'appliquer. Il y a tout d'abord la politique elle-même, qui énonce les exigences en matière de communication des renseignements, de tenue de réunions publiques et de participation du public. Les entités qui nomment les membres du conseil de l'autorité aéroportuaire sont les organisations communautaires. Ce sont en gros les municipalités, le gouvernement provincial et aussi le gouvernement fédéral.
La responsabilité existe donc par le biais de ces entités qui nomment les conseils. Nous n'avons pas d'actionnaires; nous sommes nommés par des groupes qui sont tous des organismes publics.
Vous pourriez aussi examiner notre responsabilité sous l'angle des conventions de location que nous avons avec Transports Canada, avec Sa Majesté. Cela représente quelque 1 200 pages de documentation; dans une grande mesure, il s'agit là encore de compte à rendre. Il y a beaucoup de formules financières, mais il y a aussi toutes sortes de règles et de restrictions que l'on impose aux autorités aéroportuaires.
Nous sommes aussi constitués en personne morale en vertu de la Loi sur les sociétés par actions, une autre loi fédérale qui nous impose de divulguer un certain nombre de choses. Nous devons respecter les exigences de la loi en matière de déclaration et de communication de renseignements.
• 1010
En outre, les aéroports du pays ont à peu près tous adopté les
directives de la Bourse de Toronto en matière de déclarations
d'entreprise. Bien qu'il ne s'agisse pas de sociétés par actions,
ces aéroports ont tout de même adopté les directives du TSE.
L'Administration de l'aéroport international de Vancouver a joint à son rapport annuel un document sur la communication des renseignements. À Winnipeg, nous produisons les mêmes déclarations qu'une société cotée en bourse. Il y a donc de toutes parts communication de renseignements et obligation de rendre compte, et je dirais même que nous rendons beaucoup plus de comptes au public et aux collectivités qu'à l'époque où ces aéroports relevaient de Transports Canada. Nous rendons beaucoup plus de comptes maintenant.
Il y a aussi beaucoup plus de participation du public, des consommateurs et des compagnies aériennes à la planification et au développement de tous les aéroports. C'est un modèle beaucoup plus efficace du point de vue de la reddition de comptes au public. Nous rendons beaucoup plus de comptes que n'importe quelle compagnie aérienne au Canada.
Il y a autre chose que j'aimerais souligner. Quand une compagnie aérienne qui domine 65 p. 100 du marché vient nous parler de rendre des comptes aux collectivités que nous desservons, je crois qu'il y a là quelque chose d'un peu insultant pour des organismes communautaires. Vous dites qu'il faut revoir la structure des autorités aéroportuaires parce que nous n'avons pas de comptes à rendre. Nous ne sommes pas des organismes privés. Nous sommes des organisations communautaires.
M. Joe Comuzzi: Revenez à la question suivante.
M. Murray Sigler: J'ai répondu à votre première question.
M. Joe Comuzzi: Oui, merci.
M. Murray Sigler: La deuxième question concernait les recettes. Là encore, cela dépend des endroits, mais dans l'ensemble je pense que 60 à 65 p. 100 des recettes proviennent des compagnies aériennes, sous forme de redevances d'atterrissage et de frais d'utilisation des installations. En général, c'est à peu près cela. Je pense qu'actuellement, 25 à 30 p. 100 des recettes proviennent des redevances d'amélioration des aéroports qui sont consacrées aux projets d'investissement. Il y a ensuite les concessions, les concessions de terrains de stationnement, les recettes des activités de commerce au détail dans les aéroports, et dans certains aéroports, il y a aussi des initiatives de mise en valeur des terrains. Encore une fois, il y a toutes sortes de choses, et nous nous ferons un plaisir de vous communiquer les états financiers de chacun des aéroports si vous voulez les examiner.
Le président: Merci.
Monsieur Casey.
Non, votre temps est expiré. Vous pourrez leur dire directement quel aéroport vous intéresse.
M. Joe Comuzzi: Ils m'intéressent tous.
M. Murray Sigler: Nous vous donnerons les informations concernant tous les aéroports pour lesquels nous avons ces informations, et s'il y en a d'autres qui vous intéressent, nous nous ferons un plaisir de vous faire parvenir aussi les informations concernant ceux-là.
Le président: Monsieur Casey.
M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Bonjour. J'ai une question au sujet des aéroports régionaux, qui ont toujours été ma marotte car je viens d'une région du Canada où il n'y a pratiquement que des aéroports régionaux.
Dans les cinq principes qu'il a énoncés, le ministre a précisé que le service aérien régional devait être protégé.
Si les aéroports régionaux ne peuvent pas survivre, comment le ministre peut-il imposer aux compagnies aériennes régionales de protéger le service régional? Qu'en pensez-vous?
M. Neil Raynor: Je pense que cela a quelque chose à voir car aucune des compagnies aériennes ne peut fonctionner sans l'infrastructure existante. Nous devons garantir deux choses. D'une part, pour ces aéroports, leur viabilité économique à long terme, et d'autre part, que les compagnies aériennes continuent de les desservir et que ces petites localités ne soient pas abandonnées pour des raisons de rationalisation. C'est la position que nous adoptons.
M. Bill Casey: Un témoin qui a comparu plus tôt évalue à 10 ou 15 le nombre d'aéroports qui ne sont pas viables actuellement au Canada et ce même avant qu'on prenne en compte des considérations de baisse des recettes et l'application des nouvelles normes en matière d'intervention d'urgence. Est-ce le cas? Y a-t-il actuellement de 10 à 15 aéroports qui ne sont pas viables?
M. Neil Raynor: Je dirais qu'il y a 10, 15, 20 aéroports qui ne sont pas viables, et les collectivités devraient adopter une vue plus large de ce que les aéroports... Strictement sur le plan de l'exploitation, ces aéroports ne sont pas viables, mais de façon plus globale et vu ce que cela signifie pour la collectivité... J'ai déposé, à votre intention, un document sur l'impact économique des aéroports canadiens et je vous encourage à en prendre connaissance.
Vous pourrez mesurer de façon plus globale les avantages que ces aéroports offrent à une région, le nombre d'emplois générés à l'aéroport même et dans le voisinage, les recettes fiscales—municipales, provinciales et fédérales—que l'on tire de ces aéroports. Certaines localités estiment que les avantages, l'effet bénéfique d'ensemble, justifieraient peut-être une subvention d'exploitation.
M. Bill Casey: Autrement dit, pour une petite localité où l'aéroport n'est pas viable, il y aurait sans doute moyen de le rendre tel, sinon la collectivité doit décider de son sort, même si le ministre est d'avis que le service régional doit être maintenu. Dès lors, il incombe à la localité elle-même de le maintenir. Selon vous, est-ce la seule façon d'en poursuivre l'exploitation?
M. Murray Sigler: Il faut dire avant tout qu'aujourd'hui au Canada il existe une variété de propriétaires dans le cas des petits aéroports. Certains sont encore la propriété de Transports Canada, qui les exploite. Dans certains cas, ce sont les gouvernements provinciaux ou les municipalités qui en sont propriétaires et qui les exploitent. Tout examen de la situation financière de ces aéroports doit prendre en compte qui en est le propriétaire et l'exploitant, car à mon avis c'est un aspect important. Au niveau local, on pourrait songer à absorber les dépenses d'exploitation grâce à des droits d'atterrissage, mais il faudra une aide pour les immobilisations. Cela se résume ainsi.
M. Bill Casey: Les mêmes principes ne peuvent pas être appliqués à un aéroport très achalandé et à un autre qui l'est moins, car dans ce dernier cas, les débouchés qu'offrent Calgary et Vancouver sur le plan du développement économique, n'existent pas. Il faut donc une formule différente dans le cas des aéroports régionaux, des petits aéroports.
Quel volume de trafic faut-il pour qu'un aéroport fasse ses frais? Le volume doit-il atteindre 100 000, ou est-ce moins?
M. Neil Raynor: On calcule cela d'habitude suivant le nombre de voyageurs qui empruntent l'aéroport et il y a aussi les aéroports où le trafic est tout à fait différent car il s'agit de marchandises. On constate en règle générale que de 800 000 à un million de passagers constitue la barre. Cela dit, il n'existe pas de règle immuable. J'ai connu un aéroport de la Colombie- Britannique qui accueille 800 000 passagers par année et qui est très prospère dans cette situation alors que d'autres, qui sont de plus gros aéroports, sont chancelants. Comme le disait M. Hopkins et M. Sigler, il faut procéder au cas par cas.
M. Bill Casey: M. Sigler a rappelé que certains aéroports n'avaient pas été cédés. C'est le cas de certains. Les traite-t-on différemment de ceux qui l'ont été par Transports Canada?
M. Murray Sigler: Non. Pour l'aspect technique, c'est-à-dire la réglementation et la sécurité, les frais d'utilisation sont perçus équitablement et tous les aéroports sont logés à la même enseigne. Le gouvernement fédéral a haussé énormément les droits d'atterrissage et les frais pour opérations terminales dans les aéroports qu'il continue d'exploiter.
M. Neil Raynor: L'ennui est que ces frais ont augmenté plus vite dans les aéroports exploités par le gouvernement fédéral que dans les aéroports gérés par une administration aéroportuaire.
M. Murray Sigler: C'est aussi vrai dans le cas des impôts perçus.
Le président: Merci, monsieur Casey.
Monsieur Fontana.
M. Joe Fontana (London-Centre-Nord, Lib.): Merci, monsieur le président.
Vous l'avez dit parfaitement. Manifestement, la politique adoptée il y a quelque temps est la bonne. Il faut ajouter que nous traversons tous une période d'apprentissage. Un gouvernement qui autrefois devait verser 150 millions de dollars pour tous les aéroports en tire désormais un peu plus que ce montant en recettes. Autrefois, ce sont Vancouver, Pearson et Calgary, je pense, qui payaient pour la totalité du fret au Canada et désormais, ce sont les usagers qui paient. Nous pouvons imaginer ce que seront les aéroports de demain grâce à l'examen auquel nous procédons actuellement, et je sais que le Conseil des aéroports fait de son mieux de son côté.
Voici ce qui m'agace cependant. Vous ne pouvez pas vous dérober à vos responsabilités quand ça chauffe et essayer de blâmer quelqu'un d'autre. On nous l'a bien dit, les choses vont chauffer. L'ATAC est plutôt mécontente de vous. Des consommateurs pensent que vous êtes en train de construire des mausolées. En fin de compte, pour le prix élevé des billets, ils blâment les compagnies aériennes, les administrations aéroportuaires, le gouvernement fédéral à cause des impôts et ils blâment aussi les gouvernements municipaux. En fin de compte—et Ovid l'a bien dit—il faut se demander quelle est la raison d'être de tout cela, et on en revient au consommateur, à celui ou celle qui paie pour le fret. Le consommateur ne sait pas comment on répartit l'argent de son billet et c'est cela qui devrait être le point de départ.
Il faut faire baisser les coûts pour que le consommateur paie moins. Nous devons tous faire quelque chose—le gouvernement fédéral, les administrations aéroportuaires, tous. Il faut faire baisser les prix car les Canadiens commencent à s'impatienter. Nous pouvons travailler ensemble à mon avis.
Voyons de quoi il s'agit ici. Si la restructuration se fait, et je pense que vous l'avez dit, si nous avons désormais un transporteur dominant, il sera pour ainsi dire très puissant dans les aéroports—les petits comme les gros, et les aéroports régionaux. Ce transporteur sera très musclé. En réalité, il pourra sans doute mener le bal, contrairement à la situation actuelle, dans un bon environnement concurrentiel. Nous savons que la concurrence existe actuellement. Nous voulons la stimuler en maintenant les compagnies régionales indépendantes. Mais s'il y a un transporteur dominant, qu'adviendra-t-il de l'assiette dont vous tirez vos revenus dans certains de vos aéroports, car la situation financière de certains sera peut-être encore plus précaire? Qu'adviendra-t-il de la concurrence et de vos coûts? Au total—et on nous l'a dit—dans une situation où il y aurait un transporteur dominant, des considérations de concurrence, de protection du consommateur et d'intérêt public auraient une énorme incidence sur vos aéroports car vous pourriez très bien, face à l'augmentation des coûts, commencer à fixer des droits d'atterrissage et des redevances pour les commerçants dans vos aéroports, n'est-ce pas?
• 1020
Sous quel angle devrions-nous aborder la question selon vous?
Que devrions-nous prévoir pour stimuler la concurrence? Nous
voulons qu'elle se répande. S'il y a un transporteur aérien
dominant, ce sera néfaste pour vous car en l'absence de
concurrence, vous ferez face à d'énormes difficultés. Comment
pouvez-vous nous aider à les résoudre afin que la restructuration
que nous envisageons stimule la concurrence en évitant une flambée
des prix?
M. Murray Sigler: À long terme, si la structure est concurrentielle, c'est l'économie qui va dicter le niveau de service aérien. Il y a aura une corrélation directe. Toutefois, nous craignons qu'à court terme, un transporteur jouissant d'une position super dominante, ayant dès lors le contrôle de tous les aéroports, entrave le jeu de la concurrence, et c'est à la lumière de ces possibilités qu'il faut examiner la situation.
Aux États-Unis, cette question est préoccupante depuis un certain nombre d'années car là-bas il est fréquent qu'une compagnie aérienne s'approprie pour ainsi dire une plaque tournante. Les aéroports ne sont pas partagés entre trois ou quatre compagnies aériennes. Il y a une compagnie aérienne dominante à Dallas-Forth Worth et une autre à Denver. On a donc dû examiner les règles concernant les programmes d'immobilisation dans les aéroports en toute justice pour tous les transporteurs, afin de ne pas consacrer et accentuer la position dominante d'un seul transporteur, et c'est là qu'interviennent des clauses sur les intérêts majoritaires et autres.
Les compagnies aériennes doivent avoir leur mot à dire dans les programmes d'immobilisation aux aéroports, mais quel pourcentage des votes une compagnie aérienne doit-elle détenir pour pouvoir donner son assentiment à l'administration aéroportuaire dans le cas d'un programme quelconque? Si ce sont les deux tiers des votes, un transporteur dominant peut alors très certainement supplanter tous les autres transporteurs. Voilà donc un aspect de la chose.
Vient ensuite l'accès aux installations une fois qu'elles sont construites. Comment déterminer l'accès à l'infrastructure? C'est alors qu'il faut imposer des règles sur la répartition des portes d'embarquement. Au cas où il surgirait des différends entre les compagnies aériennes, il faut une entité juste, neutre et respectueuse du maintien de la concurrence pour les régler.
Voilà pourquoi je dis que nous avons de la chance au Canada de pouvoir compter sur les administrations aéroportuaires qui peuvent régler ce genre de conflit car comme M. Raynor l'a dit tout à l'heure, ces administrations sont des ferventes de la concurrence car la promotion de la croissance économique de leurs localités fait partie de leur mandat.
M. Joe Fontana: Pour reprendre...
Le président: Soyez bref, monsieur Fontana.
M. Joe Fontana: Volontiers. Pour reprendre ce que Bill Casey disait, quel que soit le scénario retenu, il y aura des gagnants et des perdants, dans les aéroports comme dans les localités. Tout compte fait, notre comité souhaite que les localités soient desservies et que la concurrence régionale soit maintenue car il ne s'agit pas uniquement de la viabilité des aéroports mais de celle des localités qui en dépendent.
Advenant que nous devions repenser la politique en matière de concurrence pour garantir que l'existence d'un transporteur dominant ne menace pas la concurrence à l'échelle nationale, que proposeriez-vous pour ce qui est des coûts dans les aéroports? Il faut trouver une façon de réduire vos coûts pour que les transporteurs régionaux prospèrent. Les nouveaux arrivants sur le marché national risquent de vouloir prendre de l'expansion et livrer une concurrence serrée, mais les représentants de l'ATAC nous ont bien dit—et je ne sais pas qui on doit tenir responsable—que vos coûts étaient trop élevés.
M. Murray Sigler: Nous en convenons.
M. Neil Raynor: Nous en convenons et il faut dire que ce qui coûte le plus cher aux administrations aéroportuaires, c'est le loyer versé au gouvernement fédéral.
Deuxièmement...
M. Joe Fontana: Je sais, mais vous avez négocié de bonne foi et voilà que vous voulez renégocier.
Le président: Ne nous lançons pas dans un débat.
M. Neil Raynor: Nous le reconnaissons absolument, mais je répondais à votre question. La chose essentielle qu'il faut faire, c'est garantir l'accès car c'est grâce à ce moyen que la concurrence existera et c'est ainsi que les localités desservies par ces aéroports obtiendront leurs services à meilleur compte.
Le président: Merci, monsieur Raynor.
M. Bailey et M. Hubbard poseront leurs questions et nous passerons ensuite au témoin suivant.
Monsieur Bailey.
M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Réf.): Merci, monsieur le président.
Nous sommes arrivés un peu en retard. En effet, plus de la moitié des membres du comité assistaient à un petit-déjeuner en compagnie des représentants de l'Association du transport aérien du Canada et comme vous le savez sans doute, ils nous ont donné leur son de cloche concernant leurs coûts. Comme l'oeuf et la poule. Cela n'en finit plus. Leurs coûts d'exploitation ont augmenté de façon épouvantable, nous ont-ils dit. Vous dites que le loyer que vous versez est démesuré et ils disent que leurs coûts sont trop élevés. Ensuite, les agents de voyage et les gens que nous représentons, les voyageurs, disent que cela coûte trop cher. C'est un cercle vicieux.
• 1025
Je tiens toutefois à vous féliciter de la déclaration que vous
avez faite. Vous vous êtes montrés très positifs en affirmant que
quelle que soit l'issue de cette restructuration, quel que soit le
sort des compagnies aériennes, vous avez l'intention de coopérer.
Je n'ai aucune raison de douter de votre bonne foi mais je tiens à
dire que votre coopération est d'une importance capitale car sans
une telle attitude de la part des administrations aéroportuaires,
les choses pourraient traîner en longueur et le public voyageur au
Canada pourrait en souffrir. J'espère donc que vous tiendrez
parole.
Je voudrais revenir sur la question de la location. Vous avez un bail avec le gouvernement fédéral et si je ne m'abuse, il s'agit d'un document touffu. Dans quelles conditions ce bail pourrait-il être résilié par vous-mêmes ou par le gouvernement fédéral?
M. Murray Sigler: Je ne sais pas si je peux vous répondre brièvement car le document du bail est très long.
M. Roy Bailey: Je me contenterai d'une brève réponse. Il y a des modalités...
M. Murray Sigler: Essentiellement, s'il y a défaut de paiement ou manquement à la politique nationale concernant les aéroports.
M. Roy Bailey: Je me demande si vous conviendriez avec moi que vos relations publiques avec la collectivité—notamment dans le cas de mon patelin—n'ont pas été excellentes en ce sens que vous n'avez pas très bien su faire comprendre au public la raison d'être de la nouvelle administration aéroportuaire? Il semble que la plus grande confusion règne à cet égard. Je ne sais pas si la tâche incombe aux chambres de commerce, à vous-mêmes, aux autorités municipales ou à quelqu'un d'autre, mais je pense que si vous faites actuellement un examen de conscience, vous auriez tout intérêt selon moi à redresser cela d'abord et avant tout.
M. Neil Raynor: Excellente remarque et j'en prends bonne note. Merci, monsieur.
M. Murray Sigler: Selon moi, cela est primordial car l'administration aéroportuaire doit jouir de l'appui de la collectivité. C'est sont assise. On a pu constater lors de l'examen de la situation un appui inconditionnel de la part des collectivités à l'échelle du pays. Ainsi, nous avons pu confirmer l'existence d'un appui solide à l'égard des administrations aéroportuaires.
M. Neil Raynor: M. Hopkins qui est président de l'administration aéroportuaire de Winnipeg a peut-être quelque chose à ajouter là-dessus.
M. J.A. Hopkins: Merci.
À Winnipeg, par exemple, je peux affirmer, et c'est facile à vérifier, que nous bénéficions de relations remarquables avec la collectivité, avec ceux qui nomment les membres de notre groupe, avec le public voyageur et le grand public. Il en est ainsi parce que notre organisation est totalement ouverte.
Permettez-moi de vous donner un exemple tangible et pratique de la façon dont nous rendons des comptes à Winnipeg. Il se peut que cela soit vrai dans le cas d'autres localités. Récemment, nous avons entrepris un processus de planification stratégique. Il nous avait fallu un an pour le concevoir. S'il a fallu tant de temps, c'est parce que nous avons consulté des représentants de tous les groupes d'intéressés imaginables, même des gens que vous ne songeriez pas à entendre lors de vos délibérations. Nous avons rencontré tous nos principaux clients, les transporteurs aériens, nos locataires, et des membres du grand public. Nous avons formé un comité consultatif communautaire qui représente tous les intérêts de notre collectivité. Nous leur avons expliqué la situation et ils nous ont donné leurs réactions en retour. Nous avons entendu par exemple des représentants des chambres de commerce et d'autres organisations à qui importe au plus haut point la viabilité financière et le développement économique de notre collectivité. Forts de tous ces renseignements, nous avons mis au point un plan stratégique.
L'un des résultats de ce plan stratégique est qu'il nous faut refaire notre plan cadre, ce qui est en cours. Nous suivons le même genre de processus public qui encourage la consultation avec pratiquement toutes les composantes de la collectivité et toutes les organisations qui s'y trouvent et qui s'intéressent à l'aéroport. Je puis vous dire sans hésitation aucune que le processus que nous avons suivi dans ces deux cas, mais également dans bien d'autres que je pourrais vous citer, va beaucoup plus loin que ce que n'importe quel transporteur aérien canadien ait fait, beaucoup plus loin même que tout ce qu'a pu faire une société d'État au Canada. Nous avons donc été beaucoup plus loin que les seuls principes de responsabilisation que le gouvernement fédéral a fait inscrire dans notre bail et dans nos statuts afin précisément que la collectivité puisse faire valoir son point de vue à n'importe quel moment devant l'administration aéroportuaire.
Le président: Merci, monsieur Bailey.
Monsieur Hubbard, je vous prie.
M. Charles Hubbard (Miramichi, Lib.): Monsieur le président, nous semblons passer l'essentiel de notre temps à parler des aéroports du NAS.
Dans votre mémoire, vous nous dites que votre conseil représente les aéroports locaux, régionaux et nationaux, et je pense que nous devrions, monsieur le président, solliciter l'opinion de nos témoins en leur demandant comment ils voient la situation des aéroports locaux et régionaux qui ne font pas partie de ce système national qui en comporte 26. Nous avons entendu, et je le sais pertinemment, que certains de ces 26 aéroports craignent pour leur avenir. Je pense que le NAS doit se pencher sur le cas de certains de ceux-là. Certains d'entre eux n'ont pas encore été cédés, d'autres se plaignent d'un avenir qui ne leur semble pas prometteur. Dans le droit fil de ce que nous pourrions entendre de votre part ce matin, pourriez-vous nous dire quelques mots au sujet des aéroports locaux et régionaux et de la façon dont ils voient leur propre avenir par rapport à l'évolution de l'industrie du transport aérien?
M. Neil Raynor: Je commencerai par un commentaire d'ordre général, après quoi je repasserai les trois éléments que nous faisons valoir dans notre rapport à propos des petits aéroports.
Pour commencer, je dois vous dire que le Conseil des aéroports du Canada, le CAC, représente les aéroports que j'ai signalés au tout début, des aéroports de toutes les catégories. L'un de nos comités les plus actifs est celui des aéroports que nous appelons de niveau deux, les petits aéroports. C'est un groupe extrêmement actif et qui se fait entendre.
Je dois également vous dire que je passe le plus clair de mon temps au siège national à m'occuper des dossiers intéressant les petits aéroports. En effet, ce sont eux qui ont besoin d'aide. Bien franchement, les Winnipegs de notre monde ont les ressources nécessaires pour se défendre eux-mêmes. En revanche, les petits aéroports ne peuvent se permettre ce niveau de représentation.
C'est un dossier que nous suivons de très près avec l'ATAC. Je voudrais également vous dire, incidemment, que nous travaillons sur un grand nombre de dossiers en étroite collaboration avec l'Association du transport aérien du Canada, et je pense que nous en bénéficions beaucoup. L'un de ces dossiers est celui des services d'intervention d'urgence, les SIU, qu'on envisage d'implanter dans les tout petits aéroports. Il y a quatre ou cinq ans, ce système a été éliminé lorsque Transports Canada a cédé ces aéroports aux administrations locales. Le gouvernement fédéral a maintenant mis sur la table une proposition de réimplantation de ce service, ce qui coûterait énormément d'argent. Cet énorme élément de coût doit être absorbé par l'aéroport qui le répercute sur les compagnies aériennes, et c'est le consommateur qui paie en fin de compte.
Nous travaillons donc en étroite collaboration avec les collectivités, les petits aéroports, mais également avec les compagnies aériennes, pour trouver des solutions à ces nombreux dossiers.
Ici encore, je le répète, je consacre facilement les trois quarts de mon temps à des dossiers comme celui-là. Ce que nous affirmons, et cela est la résultante directe de ces dossiers plus mineurs, c'est qu'ils estiment qu'il faut mettre quelque chose en place pour assurer le maintien des services essentiels aux collectivités desservies par les transporteurs aériens. Quelle que soit la structure qui se dégagera de ce processus de restructuration, les petits aéroports tiennent vraiment à ce que, quelle que soit la réglementation qui sera mise en place—et nous avons fait valoir notre opposition à la réglementation ou au retour de la réglementation—si tant est qu'il y en ait une, elle ne devrait pas créer un monopole qui empêcherait les compagnies aériennes concurrentes de se servir de ces petits aéroports.
Le dernier cas en date a été le programme d'investissement destiné à aider précisément ces petits aéroports à assurer leur avenir.
M. Murray Sigler: Tous les petits aéroports ont des craintes au sujet de leur viabilité financière, tout particulièrement pour ce qui est des grands travaux d'équipement, comme nous vous l'avons déjà dit. Ces aéroports avaient déjà des craintes avant même la restructuration, et ces craintes sont encore plus fortes aujourd'hui. C'est cela que je peux vous faire valoir.
Certains d'entre eux nous ont dit que, lorsqu'ils entendent que la promesse a été faite que les services qu'ils offrent doivent impérativement être maintenus, ils se demandent qui va payer la facture. C'est cela qu'ils craignent, le coût du maintien des services. Je ne doute pas que les compagnies aériennes s'en soucient également. Les aéroports eux aussi se demandent qui va devoir payer les frais. Lorsque vous transposez cela au niveau des petits aéroports, il est certain qu'ils n'ont guère de ressources propres pour le faire. Bien souvent, même les municipalités dans lesquelles ils sont situés... La municipalité non plus n'a pas suffisamment d'argent pour prendre cela en charge. C'est donc une préoccupation tout à fait légitime, et chaque municipalité a la sienne.
M. Charles Hubbard: Puisque les questions de sécurité et de visibilité sont maintenant sur la table, votre organisme en est-il vraiment conscient et allez-vous intervenir au nom des petits aéroports dans ces deux dossiers?
M. Murray Sigler: Dans l'ensemble, c'est ce que nous faisons, et nous le faisons en collaboration avec l'industrie du transport aérien.
Pour ce dont vous parliez au début de votre question concernant l'ATAC, le seul point noir au palmarès collectif des aéroports, c'est qu'ils ne sont pas vraiment bien parvenus à communiquer avec les compagnies aériennes prises collectivement, ni à travailler de concert avec elles. J'en conviens totalement, et nous essayons de remédier à cela. Cela vaut aussi pour les petits aéroports, du moins pour l'élément technique. Nous sommes également en partenariat avec Transports Canada dans ce dossier.
• 1035
Nous ne voudrions toutefois pas vous laisser sur l'impression
que les relations entre les aéroports et Transports Canada sont
hostiles, bien au contraire. Transports Canada est toujours à
l'écoute de nos interventions, et nous parlons de tous ces dossiers
avec les responsables des politiques les plus hauts placés au
ministère.
Ce n'est donc pas une relation d'hostilité, et je ne voudrais pas que vous ayez cette impression. Nous essayons tous ensemble de trouver des solutions à ces problèmes.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Hubbard.
Messieurs, certains de nos collègues vous ont demandé, ou vous demandent peut-être encore, certains renseignements concernant telle ou telle question connexe. Vous pourriez peut-être faire parvenir cette information au greffier du comité afin qu'il la transmette à tous les membres.
Nous allons maintenant devoir passer au témoin suivant.
Monsieur Raynor, monsieur Hopkins et monsieur Sigler, merci beaucoup de nous avoir fait cet exposé et d'avoir répondu à nos questions ce matin.
Chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux pendant cinq minutes.
Le président: Nous reprenons nos travaux.
Je voudrais commencer par demander aux photographes de baisser les armes.
• 1045
Notre témoin suivant sera le Groupe Aviation régional Inc.,
représenté ce matin par son président-directeur général, M. Robert
J. Deluce, son vice-président exécutif, M. André Lizotte, et un des
administrateurs de Newcourt Capital, M. Gordon Thompson.
Messieurs, bienvenue au Comité permanent des transports. Nous sommes impatients d'entendre votre exposé qui ne devrait pas durer plus de 10 à 12 minutes. Après votre présentation, mes collègues vont vous poser leurs questions.
Veuillez donc commencer à votre convenance, monsieur Deluce.
M. Robert J. Deluce (président-directeur général, Groupe aviation régionale Inc.): Je vous remercie.
Mesdames et messieurs, bonjour. Je m'appelle Robert Deluce, et je suis le président et directeur général de Regional Airlines Holdings Inc. Au nom de mes associés, je voudrais remercier le comité de nous avoir invités à déposer devant lui pour lui faire part de notre vision de l'avenir de l'industrie canadienne du transport aérien. Je suis accompagné aujourd'hui par M. André Lizotte, le vice-président exécutif du consortium, et par M. Gordon Thompson, un des administrateurs de Newcourt Capital.
Notre industrie connaît des transformations sans précédent. Nous ne savons pas encore quel en sera le résultat, mais nous dressons l'hypothèse que dans un proche avenir pourrait naître un seul transporteur national, qui se concentrerait surtout sur les longs courriers intérieurs et les trajets internationaux.
Dans ce contexte de situation en devenir, nous vous exposons aujourd'hui notre vision et notre proposition, et nous croyons qu'elles sont réalistes, rentables, et qu'elles auraient sur le marché un effet favorable et proconcurrentiel. Il est également important de rappeler que nous sommes prêts à aller de l'avant si l'actuel processus de restructuration aboutit à la naissance d'un transporteur national unique et si le gouvernement consent à imposer certaines conditions à toute fusion qui interviendrait.
Dans notre proposition, nous envisageons la formation d'un transporteur aérien indépendant de propriété canadienne et à vocation régionale, qui desservirait les collectivités du marché secondaire canadien et offrirait des choix concurrentiels aux voyageurs canadiens. Notre proposition, en plus de préserver les services destinés aux collectivités du marché secondaire de notre pays, les améliorerait en offrant aux gens d'affaires et aux vacanciers canadiens plus de choix et des destinations intérieures transfrontalières et internationales pratiques et fiables.
Le Groupe Aviation régionale Inc., une entreprise récemment formée, s'occuperait de l'acquisition, du financement, de la restructuration, de la gestion et de l'expansion des services des transporteurs régionaux subsidiaires d'Air Canada, c'est-à-dire Air Ontario, Air Nova et Air B.C., ainsi que ceux des Lignes aériennes Canadien, à savoir les Lignes aériennes Canadien régional Limitée. Cette option, nous en avons la certitude, s'inscrirait parfaitement dans le schéma d'action du gouvernement fédéral. Elle repose sur un modèle commercial aux finances saines. Si le contexte de réglementation est optimal, nous sommes certains qu'elle est gage de succès, et qu'elle aura un impact favorable pour tous les intervenants, incluant les consommateurs, les régions secondaires et les employés des transporteurs régionaux.
Le modèle d'entreprise que nous avons créé est basé sur l'expansion du service régional. Et dû à cette croissance attendue, nous ne croyons pas qu'il y aura des pertes d'emploi. En fait, les employés auront de meilleures chances d'avancement à l'intérieur de cette ligne aérienne en expansion, particulièrement parce que notre intention est d'introduire plus d'aéronefs basés sur la technologie moderne, y compris des avions de transport régional à réaction.
Toutefois, avant d'entrer dans les détails, j'estime important de donner quelques explications sur ce que nous sommes. Ma famille et moi sommes dans le secteur des transports aériens régionaux depuis près d'un demi-siècle. J'ai commencé ma propre carrière à la fin des années 60, travaillant pour l'entreprise de transport aérien de mon père, transportant les pêcheurs et les chasseurs vers leurs destinations et en les en ramenant. En bref, nous avons été propriétaire exploitant d'un certain nombre de transporteurs régionaux en Ontario, au Manitoba et au Québec, et notamment Air Ontario, Air Alliance, Air Manitoba, Great Lakes Airlines, Air Creebec, Superior Airlines, Austin Airways, et White River Air Services.
J'ai également été président et actionnaire des Lignes Aériennes Canada 3000 Limitée, l'un des plus importants noliseurs du Canada.
[Français]
M. André Lizotte (vice-président exécutif, Groupe aviation régionale Inc.): Je m'appelle André Lizotte et je suis l'un des exploitants du transporteur aérien possédant le plus d'expérience au Canada. Je suis le fondateur de Pro-Can Aviation et j'ai auparavant été président et chef de la direction de Nordair Ltd., Québécair, ainsi qu'administrateur et président du comité de vérification d'Air Alliance. J'ai également été, de 1989 à 1992, membre du Groupe de travail ministériel fédéral sur l'aviation.
M. Robert Deluce: Quant à Gord, la Newcourt Capital est un meneur mondial reconnu du financement de l'aérospatiale régionale qui a injecté plus de 14 milliards de dollars américains dans des solutions de financement d'avions régionaux. La Newcourt Capital fait partie de la société de financement commercial inscrite en bourse la plus grande au monde, et qui possède plus de 93 milliards de dollars d'actifs.
Grâce à nos nombreuses années d'expérience, André et moi saisissons pleinement l'importance des voyages par avion pour les Canadiens vivant dans les municipalités de moindre importance. Nous savons qu'ils comptent, autant que ceux qui vivent à Montréal, Toronto ou Vancouver, sur des services aériens pour mener leurs affaires, prendre leurs vacances, aller à l'école ou simplement rendre visite à leur famille ou à leurs amis.
Loin de nous l'idée de laisser entendre que les collectivités secondaires canadiennes ne sont pas bien desservies par les transporteurs aériens, non plus que les services offerts aux régions diminueront lorsque naîtra un transport national unique.
Nous voulons rappeler que nous possédons la compétence, l'expérience et les connaissances voulues pour offrir et accroître ces services de meilleure façon et plus efficacement, tout en permettant au nouveau transporteur national de se concentrer sur ce en quoi il excelle. Ainsi, tandis que le transporteur national se concentrera sur les services à destination de Londres en Angleterre, notre projet sera de desservir London, en Ontario, Saskatoon plutôt que Sao Paulo, Timmins—où j'ai passé presque 14 ans de ma vie—plutôt que Tokyo au Japon.
Par la création, sous propriété indépendante, d'un réseau concurrentiel de transporteurs correspondants, il y aurait une nouvelle société de transport aérien, que j'appellerai dès à présent Regco, qui offrirait des services concurrentiels sur les parcours régionaux et des services de correspondance et de trafic subsidiaire ou d'apport.
Elle aurait une mission bien précise et elle miserait sur son expertise et son expérience des services régionaux qu'elle comprend si bien.
Elle serait flexible dans ses ententes de partage de dénominations avec le transporteur national et d'autres transporteurs intérieurs. Ainsi, par exemple, un voyagiste pourrait être à même d'offrir un forfait voyage complet de Sudbury à la Barbade, au lieu de baser ses tarifs et services sur des arrivées et départs dans des grands centres urbains comme Toronto.
Elle concentrerait ses services sur les marchés de moindre densité et les courts trajets, peu intéressants pour les grands transporteurs et les transporteurs économiques exploitant des gros porteurs. En même temps, elle offrirait de meilleurs services d'apport dans les plaques tournantes des partenaires avec lesquels elle aura conclu des ententes de partage de dénominations.
Elle offrirait aux employés la meilleure formation possible, plus de responsabilités décisionnelles et une participation financière au rendement global de l'entreprise.
Pour réaliser sa croissance, elle s'efforcerait de trouver de nouveaux débouchés commerciaux, c'est-à-dire de nouveaux trajets et de nouvelles alliances, et développerait et intégrerait ces liaisons et alliances à ses activités actuelles. Élément plus important encore, elle s'efforcerait d'améliorer constamment les services offerts aux consommateurs dans un nombre grandissant de collectivités dans l'ensemble du Canada.
[Français]
M. André Lizotte: Sur le plan structurel, le nouveau transporteur aérien desservirait les Canadiens, peu importe l'endroit où ils se trouvent dans notre vaste pays. Il donnerait du travail à quelque 5 000 spécialistes du transport aérien et exploiterait une flotte combinée de plus de 125 aéronefs d'une capacité allant de 19 à 70 passagers.
L'entreprise comporterait deux divisions: l'une située dans l'Est du Canada et l'autre dans l'Ouest, avec des réseaux de destination construits sur des services fréquents de point à point, reliant les grands centres urbains, les collectivités du marché secondaire et diverses destinations aux États-Unis.
• 1055
L'entreprise fonctionnerait en outre à la fois dans le
triangle de l'Ouest canadien, c'est-à-dire Calgary,
Edmonton et Vancouver, et le triangle de l'Est, soit
Toronto, Ottawa et Montréal.
Elle mettrait en place de nouveaux réseaux de service dans
chaque région, notamment à Calgary, Regina et Winnipeg.
Nous parviendrons à maximiser—et je répète
«maximiser»—l'utilisation de nos ressources par une utilisation
fréquente des aéronefs, une figuration optimale de
trajets, notamment l'expansion des activités
transfrontalières, et en permettant aux employés
de jouer des rôles multiples.
[Traduction]
M. Robert Deluce: Nous croyons que notre proposition est saine sur le plan financier, de même que rentable et, si les conditions sont favorables, nous réussirons. Toutefois, il est évident que parvenir à la rentabilité financière et à un effet proconcurrentiel sur ce marché, ce qu'offre notre proposition, dépendra de la présence d'un environnement réglementaire approprié.
Il est essentiel que les aspects que j'énoncerai plus loin fassent partie des conditions d'approbation intégrées par le ministre des Transports dans toute recommandation au gouverneur en conseil et puissent être appliquées si un transporteur national unique voit le jour.
Les engagements volontaires ou promesses non exécutoires ne suffiront pas à surmonter le risque financier associé à une éventuelle inexécution sans recours de la part d'un transporteur dominant.
M. Gordon Thompson (administrateur, Newcourt Capital, Groupe aviation régionale Inc.): Notre groupe estime que les conditions qui suivent, chacune devant être reconnue avant l'approbation d'un quelconque scénario de transporteur national unique, faciliteront notre entrée concurrentielle sur le marché tout en protégeant les intérêts du public voyageur canadien.
Tout d'abord, le nouveau transporteur national doit se départir de ses lignes aériennes régionales subsidiaires et se voir interdire de revenir dans ce secteur pendant 10 ans.
Deuxièmement, le nouveau transporteur national pourrait également être tenu de conclure des accords intercompagnies et de partage de dénominations avec Regco, exclusivement pour le trafic subsidiaire ou d'apport.
Troisièmement, les dispositions ayant trait à la portée incluses dans les conventions collectives d'Air Canada doivent être supprimées afin que les transporteurs régionaux puissent prendre de l'expansion. Cela permettrait aux transporteurs régionaux d'utiliser des aéronefs de technologie moderne et notamment des moyens-courriers.
Quatrièmement, la Regco doit être autorisée à conclure d'autres accords commerciaux et de partage de dénominations avec d'autres transporteurs canadiens et étrangers dans des villes canadiennes et américaines.
La Regco doit avoir accès à un nombre suffisant de créneaux proches du transporteur dominant et des autres grands transporteurs aériens et à d'autres installations aéroportuaires, par exemple les comptoirs et les zones de bagages. La Regco doit également se voir réserver un nombre suffisant de créneaux et de portes d'embarquement dans les grands aéroports au Canada et à La Guardia (New York) et O'Hare (Chicago) au cours des périodes de plus grand achalandage.
Sixièmement, les règles du jeu doivent par ailleurs être égales pour Regco dans ses rapports avec les agents de voyages et les autres canaux de distribution, et il ne doit y avoir rien qui fausse les règles dans les systèmes de réservation par ordinateur, non plus que de structures discriminatoires de commissions.
Enfin, toute ordonnance de consentement autorisant la création d'un transporteur national unique doit être assortie de la condition que, si le nouveau transporteur ne respecte pas l'une des conditions nécessaires de dessaisissement, il serait frappé de sanction.
M. Robert Deluce: Le transport aérien est un secteur d'activité intéressant. Présent dans cette industrie pendant toute ma vie d'adulte, je crois que si les conditions appropriées sont en place, de grandes perspectives nous attendent.
La proposition que nous venons de vous exposer vise à favoriser un plus grand dialogue sur l'avenir d'un secteur économique en pleine mutation, celui de l'industrie canadienne du transport aérien, tout en répondant spécifiquement aux besoins des consommateurs régionaux. Nous croyons que notre proposition répond directement aux cinq principes fondamentaux exposés par le ministre des Transports et qu'elle offre les meilleures possibilités de concrétiser la vision du gouvernement d'une industrie canadienne du transport aérien sécuritaire et financièrement saine, capable de faire concurrence aux meilleurs et aux plus gros transporteurs de par le monde, tout en desservant toutes les régions du pays à des tarifs équitables, une entreprise dirigée par des Canadiens pour les Canadiens.
L'expérience de notre équipe de gestion, qui repose sur un solide dossier comme bailleur de fonds et propriétaire exploitant de transporteurs aériens régionaux, alliée à un cadre d'action proconcurrence tel qu'exposé par le gouvernement fédéral, nous permettra d'offrir une autre entreprise commerciale rentable que le principal transporteur établi au Canada.
• 1100
Les Canadiens des collectivités du marché secondaire auront
davantage de choix et d'options de service lorsqu'ils voyageront
dans leur pays ou à l'étranger, grâce au service d'apport offert
par Regco au nouveau transporteur national et à d'autres
transporteurs.
Nous espérons travailler étroitement avec le gouvernement fédéral et les transporteurs nationaux et régionaux, ainsi qu'avec les employés et leurs syndicats, afin d'établir l'environnement optimal pour concrétiser notre vision d'une entreprise autonome de transport aérien. En comptant sur une participation limitée du gouvernement au départ, pour l'établissement des règles, cette solution canadienne et privée offrira des avantages importants à tous les intervenants canadiens dans l'ensemble du pays, y compris les consommateurs, les communautés régionales et les employés des transporteurs régionaux.
Je vous remercie de votre attention.
Le président: Messieurs, merci pour cet exposé franc et direct que vous avez fait au comité. Je suis maintenant impatient de passer aux questions.
Madame Meredith, je vous prie.
Mme Val Meredith: Merci monsieur le président, et merci à vous monsieur Deluce, pour cette perspective intéressante que vous nous avez livrée au sujet de la restructuration de l'industrie du transport aérien au Canada.
Je vais vous poser deux ou trois questions, en commençant par celle-ci: N'existe-t-il pas un parallèle entre ce que vous essayez de faire et ce qu'ont fait les Lignes aériennes Canadien International, et qu'est-ce qui vous porte à penser que vous réussirez mieux qu'elles en faisant concurrence à un transport aérien national dominant?
M. Robert Deluce: Si vous me permettez de répondre à cette question, la proposition de Regco est un concept à caractère régional, notre vision étant essentiellement que si un transporteur dominant venait à apparaître, nous regrouperions sous une seule ombrelle les compagnies aériennes régionales qui font partie des réseaux d'Air Canada et de Canadien régional, et ce nouveau transporteur régional axerait ses activités sur les marchés qui ne devraient normalement pas intéresser les autres.
Nous pensons que ce concept fondamental aurait énormément de retombées favorables pour les collectivités régionales intéressées qui bénéficieraient d'un meilleur service et, probablement aussi, de meilleures potentialités. Comme notre plan d'entreprise envisage l'introduction d'appareils technologiquement plus récents, et notamment des moyens-courriers à réaction, cela serait une amélioration. Il y aura forcément un gros impact économique sur certaines des collectivités intéressées, et je pense qu'il y a une différence très nette entre ce que Canadien a essayé de faire et ce que nous nous proposons de faire. Notre pôle d'intervention sera essentiellement régional.
Sans m'étendre trop longuement sur la question, je pense que l'autre élément ici est que, comme je vous le disais au début, nous travaillerons surtout pour London en Ontario plutôt que pour Londres en Angleterre, surtout pour Saskatoon plutôt que pour Singapour. C'est cela qui fera la différence.
Mme Val Meredith: L'autre élément que vous abordez dans votre exposé et qui mérite à mon avis d'être examiné de plus près est l'une des conditions, la condition no 2, qu'a fait valoir M. Thompson. En l'occurrence, il faudrait que le nouveau transporteur national soit tenu de conclure des accords intercompagnies et de partage de dénominations avec la Regco exclusivement pour le trafic subsidiaire ou d'apport. Je remarque, au nombre des compagnies régionales que vous entendez regrouper, certaines absentes. Lorsque vous parlez d'un arrangement exclusif, entendez-vous un monopole pour les intercorrespondances entre le transporteur régional et le transporteur dominant, ce qui laisserait sur la touche InterCanadien, First Air et certains des autres transporteurs régionaux existants dont vous ne semblez pas vouloir prendre le contrôle?
M. Robert Deluce: Permettez-moi de vous parler pour commencer de First Air et peut-être aussi de Canadian North parce que ces deux compagnies font partie d'une seule catégorie et aussi parce que nous ne pensons pas que notre modèle d'entreprise puisse avoir un effet sur elles. Ces deux compagnies devraient pouvoir continuer à travailler comme elles le font aujourd'hui avec le transporteur dominant et partager avec lui la même dénomination, ou encore de le faire avec nous, ou encore une combinaison des deux. Mais en tout état de cause, cela ne devrait pas avoir d'impact sur ces deux compagnies.
Pour ce qui est d'InterCanadien, le modèle Regco pourrait, selon nous, attirer cette compagnie. Je pense que notre solution pourrait effectivement donner une place à InterCanadien. Nous en avons déjà discuté avec certains responsables de la compagnie, et même si rien de définitif n'en est ressorti, nous pensons qu'il existe des options que nous voudrions eux et nous approfondir à ce sujet. Il y aurait donc une nette possibilité que l'intégration d'InterCanadien puisse se faire.
Mme Val Meredith: Comment pourrais-je donc définir quelque chose de façon exclusive? Vous semblez me dire que Canadian North et First Air pourraient continuer à fonctionner comme elles le font actuellement, avec des échanges intercompagnies et une présidence conjointe. Si InterCanadien est un cas à part, cela ne me semble pas vraiment être un cas très à part.
M. Robert Deluce: Si, pour ce qui est des liaisons qu'elle assure actuellement et ses intercorrespondances avec le transporteur dominant. Il faudrait que le transporteur dominant prenne cet engagement transitoire avec le transporteur régional ainsi qu'avec le réseau que nous espérons pouvoir acquérir et élargir par la suite.
Si vous regardez la situation générale au Canada, les marchés le plus lucratifs, sur le plan intérieur et sur le plan international, n'ont pas été suffisants pour assurer la prospérité de deux transporteurs principaux. Si vous prenez le cas des marchés régionaux, ceux-là sont plus fragiles encore. Il est donc presque inconcevable de penser qu'il puisse y avoir plus d'un seul transporteur sur certains de ces marchés régionaux. Il faut donc absolument, de la part du transporteur dominant, un genre d'engagement transitoire à l'endroit de ce nouveau groupe de transporteurs correspondants, les compagnies aériennes régionales.
Le président: Merci, Val.
Monsieur Fontana, s'il vous plaît.
M. Joe Fontana: Merci, monsieur le président. J'aimerais souhaiter la bienvenue à Ottawa à un preux compatriote de Timmins et un habitant de London. C'est un plaisir de vous voir, monsieur Deluce, monsieur Lizotte et monsieur Thompson.
Dans cette apparence de crise qui nous occupe aujourd'hui, il y a parfois certaines potentialités qui surviennent en présence d'une solution dynamique émanant du secteur privé. Ceci pourrait fort bien être une de ces potentialités pour le comité dès lors que nous envisageons une restructuration de notre industrie du transport aérien et de la position du transporteur dominant.
Il y a toute une série de scénarios, et je pense que vous les avez bien circonscrits. Même le Bureau de la concurrence en a parlé. Que se passe-t-il s'il n'y a plus qu'un seul transporteur aérien dominant? D'aucuns ont dit que ce serait un monopole qui risquerait d'imposer une camisole de force aux prix et aux services, surtout dans le cas des collectivités régionales, les petites villes qui dépendent énormément des services aériens.
Je sais que vous avez dit quelques mots des cinq principes. Vous n'avez pas précisé quels étaient les principes mis de l'avant par le ministre, mais ces principes visent à définir l'intérêt public et ce que nous essayons de réaliser ici. Vous avez dit que ce groupe serait à capitaux canadiens, serait administré par des Canadiens et ainsi de suite, que vous vous occuperiez des employés et que vous prendriez en compte l'intérêt des collectivités régionales. Nous pourrions peut-être approfondir un peu cela en parlant effectivement d'un régime qui assurerait en fin de compte la protection du consommateur.
Je voudrais que vous en parliez un peu plus longuement. Qu'est-ce que cela signifiera pour le consommateur? De toute évidence, c'est cela qui nous intéresse. Les Canadiens sont très chatouilleux sur la question des tarifs aériens. Il est évident qu'avec un transporteur aérien dominant, toutes sortes de scénarios semblent possibles, par exemple celui d'une tarification stratosphérique qui pourrait accompagner l'existence d'un monopole, avec des services qui seraient finalement limités à certaines régions.
Je voudrais vous demander de dire aux consommateurs canadiens ce que cela signifiera pour eux. Je pense que vous avez parlé de la question du service, mais dites-nous donc quelques mots aussi à propos des tarifs. Vous demandez au gouvernement canadien tout un tas de garanties qui assureraient votre viabilité, mais qu'est-ce que cela signifierait au juste pour le consommateur?
Deuxièmement, vous présentez cette proposition, mais puisque vous appartenez à l'industrie des transports aériens depuis tellement longtemps, que pensez-vous du scénario du transporteur dominant? Pensez-vous que ce serait dans l'intérêt du Canada qu'un transporteur dominant contrôle les transporteurs régionaux, crée une autre société aérienne offrant des tarifs à rabais et accapare essentiellement tous les créneaux d'atterrissage et de décollage dans les aéroports parce que tout le marché lui appartiendra? Devrions-nous accepter ce scénario?
• 1110
J'aimerais que vous commenciez par nous dire ce que vous
pensez de ce scénario et que vous expliquiez ce qu'il signifiera
pour les consommateurs de ce pays s'il se réalise.
M. Robert Deluce: Monsieur Fontana, voulez-vous que je réponde d'abord à la dernière question?
M. Joe Fontana: Si vous le souhaitez.
M. Robert Deluce: Je crois qu'il ne convient pas que nous nous prononcions sur la proposition d'Air Canada qui doit être évaluée d'après ses propres mérites.
Si l'on crée un transporteur dominant, nous comptons acquérir, financer, restructurer, gérer et élargir un réseau de transporteurs régionaux composé des divers transporteurs que j'ai mentionnés comme Air Nova, Air B.C., Canadian Regional et Air Ontario.
Compte tenu du fait que tout notre plan d'entreprise se fonde sur le service dispensé aux petites collectivités et régions, les consommateurs peuvent s'attendre à une amélioration du service dans ces régions.
Nous concentrerons nos services dans les régions et les petites collectivités. Nous ne songerons pas à assurer des liaisons internationales. Nous mettrons l'accent sur le service régional et non sur le service international, ce qui aura un impact positif sur les collectivités visées.
J'aimerais aussi signaler le fait qu'en grande partie en raison des très importantes contraintes qui découlent des conventions collectives actuelles, les transporteurs régionaux n'ont presque pas de marge de manoeuvre. Ils n'ont pas pu acquérir le matériel de pointe qu'offrent les transporteurs régionaux américains. Nous voulons pouvoir utiliser ce genre d'appareils, comme le prévoit notre plan d'entreprise.
M. Joe Fontana: Qu'est-ce que cela signifiera pour les prix et les consommateurs?
M. Robert Deluce: Le consommateur y gagnera également. Lorsqu'on fusionne un certain nombre de sociétés aériennes de cette taille, on réalise habituellement des économies d'échelle en ce qui touche notamment les frais d'exploitation généraux. Nous nous attendrions à ce que ces économies d'échelle se traduisent par une réduction des tarifs.
M. Joe Fontana: En l'absence de votre proposition, la seule proposition qui fait actuellement l'objet de discussions est celle qui repose sur le scénario d'un transporteur dominant qui contrôlerait les transporteurs régionaux. Ce scénario est perçu comme entravant la concurrence. Pensez-vous que ce soit sain?
M. Robert Deluce: Il ne convient sans doute pas que je me prononce sur la proposition d'Air Canada. Tout ce que je sais, c'est que ce que nous proposons...
M. Joe Fontana: Exception faite d'Air Canada, pensez-vous qu'il convienne du point de vue de la politique publique qu'on permette la création d'un transporteur aérien dominant qui contrôlerait toutes les liaisons régionales, nationales et internationales? Qu'en pensez-vous? Vous appartenez à l'industrie des transports aériens. Pourriez-vous survivre? Pourriez-vous créer une nouvelle société aérienne dans de telles circonstances sans devoir acquérir les transporteurs régionaux?
M. Robert Deluce: Notre proposition se fonde sur le scénario du transporteur dominant. Vous ne devez cependant pas oublier que ce que nous demandons est qu'on oblige le transporteur dominant à se défaire des transporteurs régionaux. C'est notre première exigence.
Par ailleurs, tout cadre de politique qui sera mis en place doit permettre à ce nouveau transporteur régional de se développer de façon commercialement viable. M. Thompson vous a expliqué dans quelles conditions cela serait possible. Je crois qu'il s'agit d'importantes considérations.
Le président: Je vous remercie, monsieur Deluce.
Monsieur Guimond, vous avez la parole.
M. Michel Guimond: Monsieur Deluce et monsieur Lizotte, comme vous le soulignez dans votre mémoire, dans le domaine du transport régional, vous avez du vécu et de l'expérience, et nous le reconnaissons. On ne saurait nier votre crédibilité.
Vous savez aussi bien que moi qu'en matière de transport aérien, les résidants et résidantes des régions recherchent essentiellement trois choses: un prix raisonnable, une fréquence et une qualité de service au moyen de certains types d'appareil. Votre mémoire n'en fait pas état suffisamment ou à peu près pas. Qu'avez-vous à dire au sujet des tarifs? Au début de cette étude, un propriétaire qui voulait faire une offre d'acquisition d'Air Canada est venu comparaître devant nous. Cette offre a par la suite été jugée illégale par la Cour supérieure du Québec. Enfin, ce propriétaire suggérait un gel des tarifs pendant cinq ans. On considère pourtant que les tarifs sont déjà suffisamment élevés. Geler un tarif abordable et raisonnable peut être intéressant, mais geler un tarif qui est déjà inacceptable ne le rend pas pour autant acceptable.
Au niveau de l'élaboration d'une politique publique, quels engagements notre comité devrait-il envisager au niveau des services aériens en région?
M. André Lizotte: Si vous me le permettez, je dirai tout simplement que vous avez relevé trois facteurs très importants: le tarif, la fréquence et la qualité. Notre organisation se concentre sur les régions et, conformément au cadre du plan d'affaires qu'elle établit avec elles, elle tente de leur fournir exactement ce dont elles ont besoin. Nous ne tenons pas compte seulement du tarif, bien que nous soyons conscients qu'il faille vraiment faire quelque chose à ce niveau. Nous croyons qu'il est important de travailler en très étroite collaboration. Que l'on fasse partie du conseil d'administration, des cadres supérieurs, des employés ou des syndicats, on essaie tous constamment de travailler en fonction des régions et de concert avec elles.
Comme vous le savez, les tarifs sont naturellement établis en fonction de la fréquence des vols et de la densité du trafic. Nous pourrions prendre l'exemple de la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean. S'il faut offrir six vols par jour pour suffire à la demande, on le fera. Nous avons pour but d'appuyer le développement économique des régions. Il peut tout simplement s'agir de donner un service ou d'offrir des promotions au niveau des tarifs.
M. Michel Guimond: Monsieur Lizotte, je ne veux pas me fâcher. Vous vous n'êtes quand même pas une entreprise philanthropique, une entreprise charitable. Avouez que vous recherchez la rentabilité de vos investissements. Ne nous dites pas que vous ne voulez qu'aider les régions.
Avec un certain type d'appareil, c'est la question de la poule et de l'oeuf qui se pose. Les passagers seront-ils intéressés à prendre un avion Beechcraft si d'autres possibilités s'offrent à eux? Lorsque j'ai rencontré Joe Randall, le président d'Air Nova, à Québec, je lui ai parlé du fait qu'il avait gardé des appareils Beechcraft peinturés aux couleurs d'Air Alliance. Je lui ai dit que je faisais 26 voyages aller-retour Québec-Ottawa par année et que si j'avais le choix, je préférerais probablement un vol sur un appareil ATR-42 d'Inter-Canadien à un vol sur un appareil Beechcraft de 19 passagers d'Air Alliance, où l'on n'offre pas de service à bord et où le copilote agit comme agent de bord, barre la porte et pilote à travers tout cela. Il faudrait quasiment qu'il soit une pieuvre ou ait trois ou quatre mains. C'est également une question d'offre. Lorsque Québécair vous avait offert les BAC-111... Bref, que devrait-on croire de votre proposition? En quoi devrait-on vous croire? Avez-vous une baguette magique qui va tout révolutionner?
M. André Lizotte: M. Deluce a dit tout à l'heure qu'il nous fallait des fonds, naturellement, pour standardiser notre flotte, ce qui est très important. Ce qui est très important pour la situation économique d'une société aérienne, c'est le coût de fonctionnement de la flotte. Disposer d'une flotte qui compte plusieurs types d'appareils devient très onéreux.
Vous avez parlé des Beechcraft, mais ce n'est pas à moi de faire des commentaires sur la flotte d'autres compagnies aériennes. Nous avons l'intention, afin de bien desservir les régions, de standardiser nos appareils pour réduire nos coûts. C'est ce qu'il faut faire. C'est réellement ce qu'il faut dans les régions. Nous avons l'intention de lancer un type d'appareil qui va suffire aux besoins de la région, suffire aux besoins des citoyens de la région, et de standardiser la flotte.
Je ne suis pas ici pour juger du Beech 1900D, du ATR ou du Dash 8. Nous ne sommes pas ici pour cela. Nous sommes ici pour vous dire tout simplement que nous voulons lancer une entreprise qui va penser aux régions. Monsieur, je vais vous dire sincèrement que notre mission est d'aider les citoyens des régions, qu'ils soient de l'Abitibi, de Rimouski, de Québec ou du Saguenay. Notre mission est de les aider et de travailler avec eux.
Naturellement, si on a un avion que je qualifierais d'économique pour desservir les régions, on sera en mesure de répondre aux besoins. Combien de sièges comportera-t-il? À quelle fréquence seront les vols? Je ne veux pas en parler aujourd'hui, mais on assurera un service qui répondra aux besoins des régions dans tout le Canada.
[Traduction]
Le président: Je vous remercie, monsieur Guimond.
Monsieur Comuzzi, vous avez la parole.
M. Joe Comuzzi: Bonjour, messieurs.
Comme vous le voyez, monsieur le président, certaines personnes célèbres viennent de Timmins.
Êtes-vous résigné au fait que nous nous retrouverons peut-être avec un seul transporteur dominant? Est-ce vraiment le seul choix qui s'offre aux voyageurs canadiens?
M. Robert Deluce: Notre vision repose certainement sur l'existence d'un seul transporteur dominant. Nous pensons d'ailleurs que c'est dans cette voie que nous nous dirigeons. À tort ou à raison, je crois que les Canadiens sont prêts à accepter que cela se produise. Ils ne l'étaient peut-être pas il y a cinq ou six ans, mais je crois qu'ils sont maintenant psychologiquement prêts à accepter l'existence d'un transporteur dominant. La politique fondée sur l'existence de deux transporteurs ne semble pas avoir fonctionné. Nous comptons créer cette société aérienne dans la perspective de la concrétisation du scénario du transporteur dominant.
Nous savons que notre proposition repose sur des fonds suffisants et qu'elle est solide. Notre équipe compte des gens d'expérience—je compte moi-même 32 ans d'expérience dans l'industrie—je pilote un avion depuis l'âge de 16 ans et j'ai obtenu mon permis à 17 ans—comme Newcourt Capital qui assure déjà une bonne part du financement des transporteurs régionaux. Notre équipe compte également André Lizotte de Montréal qui, pour sa part, compte plus de 30 ans d'expérience dans ce domaine. Il est aussi considéré comme l'un des grands spécialistes de la sécurité aérienne au pays. Ron Joyce fait également partie de notre équipe. C'est un entrepreneur canadien bien connu dont les affaires sont florissantes...
M. Joe Comuzzi: Monsieur Deluce, le président va me dire que mon temps est écoulé et vous avez répondu à ma question. J'en déduis de ce que vous avez dit que vous vous résignez à la disparition d'un des transporteurs nationaux, n'est-ce pas?
M. Robert Deluce: Notre plan d'entreprise repose sur l'hypothèse qu'il existera un transporteur dominant.
M. Joe Comuzzi: Nous allons donc nous retrouver au Canada, monsieur Deluce, avec un transporteur national dominant et—et c'est ce que vous proposez—un transporteur régional dominant, n'est-ce pas?
M. Robert Deluce: J'ajouterai que le transporteur régional mettra d'abord l'accent sur l'amélioration du service aux petites collectivités. Nous ferons ensuite concurrence dans les deux triangles à Domco, qui sera le transporteur national restant. Nous ferons concurrence à cette société dans ces triangles. Nous ferons aussi concurrence au transporteur national restant pour les liaisons transfrontalières. Nous subissons aussi la concurrence de sociétés comme WestJet et la concurrence des transporteurs de ce genre qui pourraient éventuellement être créés. À mon avis, notre proposition va dans le sens d'une industrie aérienne plus saine.
M. Joe Comuzzi: M. Fontana voudrait que je vous demande combien d'argent vous allez investir dans l'industrie du transport aérien au Canada.
M. Robert Deluce: Je peux vous assurer que nous ne manquons pas de capitaux.
M. Joe Comuzzi: Newcourt a retenu davantage l'attention de la presse ces temps-ci que l'industrie aérienne.
M. Robert Deluce: Je peux vous assurer que nous ne manquons pas de capitaux. Notre plan d'entreprise est solide. Je pense qu'il ne conviendrait pas pour l'instant de préciser une somme parce que nous n'avons pas eu de discussions directes avec le transporteur dominant. Les transporteurs régionaux comptent probablement environ 5 000 employés et ont des recettes de plus d'un milliard de dollars. Il s'agit donc d'un très important secteur économique.
J'oubliais aussi de mentionner que nous avons l'appui d'une autre importante institution financière dont je ne peux pas pour l'instant vous dévoiler le nom. Nous le ferons cependant en temps voulu.
Je crois qu'il importe aussi que vous sachiez que nous annoncerons bientôt la participation d'autres investisseurs à notre projet. Certains membres de la famille Deluce investiront aussi des capitaux dans ce projet parce qu'ils y croient et qu'ils veulent aussi améliorer le service aux collectivités.
Le président: Je vous remercie, monsieur Comuzzi.
Madame Desjarlais, vous avez la parole.
Mme Bev Desjarlais: J'ai quatre questions à poser et je tiens à les poser toutes.
À quand remonte votre création?
M. Robert Deluce: La compagnie a été créée au cours du mois dernier.
Mme Bev Desjarlais: Très bien. Vous avez dit ne pas vous intéresser aux marchés internationaux. Permettez-moi de vous citer la condition 4 à la page 5:
-
La Regco doit être autorisée à conclure d'autres accords
commerciaux et des vols en partage de codes avec d'autres
transporteurs canadiens et internationaux dans des villes
canadiennes et américaines.
Je considère les États-Unis comme un marché international.
Le président: Monsieur Deluce, qu'avez-vous à répondre à cela?
M. Robert Deluce: Voulez-vous que je réponde à ce que vous avez dit?
Mme Bev Desjarlais: Tout à fait.
M. Robert Deluce: Je considère aussi le marché américain comme un marché international, mais on parle souvent, dans le cas du marché américain, d'un marché transfrontalier plutôt que d'un marché international. Voilà pourquoi nous incluons le marché international dans cette énumération. Aux fins de cette présentation, il s'agit pour nous d'un marché transfrontalier. Mais vous avez raison de dire qu'il s'agit d'un marché international.
Mme Bev Desjarlais: Vous reconnaissez donc qu'il s'agit d'un marché international.
M. Robert Deluce: Oui.
Mme Bev Desjarlais: Quelle incidence le nouveau transporteur régional dominant aura-t-il sur Canada 3000 ou WestJet ou sur Canadian Regional, Calm Air et Bearskin offrant des vols à partir de The Pas? Quelle incidence ce transporteur national dominant aura-t-il sur ces entreprises?
Le président: Le transporteur national dominant ou le transporteur régional dominant?
Mme Bev Desjarlais: Le transporteur régional dominant. Je vous remercie.
M. Robert Deluce: Nous offrirons des services complémentaires à ceux des transporteurs de troisième catégorie. Nos services devraient compléter les leurs.
• 1130
En ce qui touche Canada 3000, c'est une entreprise que je
connais très bien parce que j'y ai travaillé pendant plusieurs
années. Le principal secteur d'intervention de cette société est
certainement le transport international et le transport intérieur
sur de longues distances. Par conséquent, je pense que nos services
seront complémentaires aux leurs. Nous ne pouvons évidemment pas
parler au nom de Canada 3000. À mon sens, nos services seront
cependant complémentaires aux leurs.
Mme Bev Desjarlais: Revenons à Canadian Regional, Calm Air ou Bearskin qui offrent des vols à partir de The Pas. Si vous devenez le transporteur régional dominant, vous contrôlerez Canadian Bearskin et une partie de Calm Air.
M. Robert Deluce: Il existe déjà une collaboration entre Calm Air et Canadian Regional et nous nous attendons à ce que cette collaboration se poursuive.
Mme Bev Desjarlais: Mais qu'est-ce qui assurera l'existence d'une concurrence au niveau régional?
M. Robert Deluce: Nous parlons d'une concurrence sur les liaisons transfrontalières. Nous songeons à améliorer le service offert dans les petites collectivités. Nous comptons non seulement acheminer des voyageurs vers le transporteur dominant restant, mais aussi vers d'autres transporteurs avec lesquels nous aurions des accords de vols en partage de codes. Il s'agit de quelque chose de nouveau. Grâce à ce genre d'accords, les sociétés d'affrètement offrant des vols nationaux pourront, pour la première fois, vendre un billet pour un vol allant de Vancouver à Timmins.
La seule chose que j'aimerais ajouter à ce que j'ai déjà dit est que nous avons vu que les marchés les plus lucratifs au Canada ne peuvent assurer la survie de deux transporteurs principaux, ou du moins n'ont pas pu le faire jusqu'ici. Les marchés régionaux sont encore plus précaires.
Mme Bev Desjarlais: On nous a pourtant dit que les transporteurs régionaux étaient très solides. C'est du moins l'impression que nous ont laissée leurs représentants.
Quoi qu'il en soit, je vous vois dominer le marché. Pour l'instant, vous ne le dominez pas puisque Canadian, Calm Air ou Bearskin offrent des vols vers The Pas. Pourquoi ne pas prévoir des règles pour empêcher que les loups ne se mangent entre eux et pour assurer une concurrence saine ainsi que le maintien du service?
M. Gordon Thompson: Comme M. Deluce l'a dit à plusieurs reprises, notre proposition vise plusieurs objectifs. Nous voulons d'abord créer une industrie aérienne régionale viable qui réponde aux besoins des petites collectivités au Canada. Comme nous le faisions observer à Joe, nous voulons aussi offrir un service de qualité aux voyageurs canadiens.
Mme Bev Desjarlais: Pouvez-vous honnêtement me dire que ce qui intéresse d'abord Newcourt, ce n'est pas de faire de l'argent?
M. Gordon Thompson: C'est évidemment ce qui intéresse avant tout Newcourt ou tout autre investisseur.
Mme Bev Desjarlais: Dans ce cas-là, dites-le honnêtement.
Le président: Très bien, Bev. Vous avez posé la question; permettez maintenant aux témoins d'y répondre. Nous passerons ensuite à un autre sujet.
Mme Bev Desjarlais: Vous avez raison. Que le témoin réponde à la question.
M. Gordon Thompson: C'est en étant économiquement viable que nous pouvons offrir ce genre de service.
Je voudrais revenir sur une question qui fait l'objet d'un malentendu. Je me souviens avoir comparu devant le comité une fois auparavant lorsque Reg Alcock en était le président. Il disait souvent: «Ne me parlez pas de la liaison Ottawa-Montréal ni de la liaison Toronto-Halifax. Parlez-moi de la liaison Wawa-Winnipeg.» L'équipe de M. Deluce essaye de régler le problème de la liaison Wawa-Winnipeg.
Au Canada, un service régional compétitif est possible sur de nombreuses liaisons. Il y a place, par exemple, pour plusieurs joueurs à l'intérieur des triangles, mais il y a aussi beaucoup d'endroits au Canada où une société aérienne ne peut pas survivre même si elle avait tout le marché pour elle. Nous voulons offrir un service qui permettrait de régler ce problème, un service qui non seulement serait rentable pour nous, mais serait aussi avantageux pour les petites collectivités. C'est ce qui nous distingue des autres.
Le président: Je vous remercie, monsieur Thompson.
Monsieur Sekora, vous avez la parole.
M. Lou Sekora: Je vous écoute aujourd'hui, mais moi ce qui m'intéresse, c'est que le prix des billets soit raisonnable, qu'on crée des emplois, qu'on évite les pertes d'emploi, et qu'on assure un service à toutes les collectivités du Canada.
Je me demande pourquoi vous n'êtes pas allés vous adresser à M. Benson de Canadien ou à M. Milton d'Air Canada. Pourquoi ne pas vous entendre pour que vous achetiez tous les transporteurs régionaux et qu'ils achètent tous les transporteurs internationaux. En avez-vous discuté avec eux? Y avez-vous réfléchi? Pourquoi êtes- vous ici en train de nous dire que vous voulez créer ce transporteur régional quand Air Canada et Canadien cherchent quelqu'un comme vous?
M. Robert Deluce: Si vous me le permettez, je vais répondre à cette question. Nous comptons certainement créer ce réseau de transporteurs régionaux, mais si un transporteur dominant est créé, ce transporteur doit être tenu de se défaire de ces transporteurs régionaux. Nous ne pensons pas qu'il le fera si on ne l'y oblige pas. Il s'agit d'un élément essentiel de notre projet.
De fait, nous ne sommes probablement pas les seuls que cela intéresse; nous ne nous faisons pas d'illusions. Mais nous avons consacré pas mal de temps à ce plan et nous estimons qu'il repose sur des bases solides.
Deuxièmement, bien entendu, il faut établir le cadre stratégique qui accompagne le dessaisissement pour s'assurer qu'il existe une base solide qui favorisera la croissance et l'expansion du transporteur régional. Cela signifie nous occuper de certains des aspects que nous avons décrits dans notre déclaration concernant les créneaux de pistes, les portes d'embarquement, l'espace de comptoir, ainsi que le traitement équitable au niveau des agences de voyage, des systèmes informatisés de réservation, de l'affichage et ainsi de suite.
Le président: Monsieur Deluce, j'ai entendu la question de M. Sekora. Il serait peut-être utile que vous nous donniez une définition de ce que constitue un service régional par rapport à un service national. Bien entendu, nous savons ce que l'on entend par service international, mais après avoir entendu la question de M. Sekora, il serait peut-être utile de nous indiquer la différence entre un service national et un service régional.
M. Robert Deluce: Le transporteur aérien que nous proposons utilisera surtout au début des avions de 19 à 70 sièges. Je pense que nous exploiterons des tronçons de moins de 800 kilomètres. Cela signifie que nous desservirons les petites collectivités et que nous offrirons des routes à courtes distances. Cela signifie des triangles dans l'est et l'ouest du Canada. Cela signifie des liaisons aériennes transfrontières sur de courtes distances. C'est ce que nous considérons être un service aérien essentiellement régional.
M. Lou Sekora: Je viens de la Colombie-Britannique. En quoi votre service différerait-il du service aérien régional qui est assuré en Colombie-Britannique à l'heure actuelle? Quelles seraient vos activités? Y avez-vous songé?
M. Robert Deluce: Essentiellement, cela revient à la façon dont nous allons desservir ces collectivités. Notre plan vise l'expansion et l'amélioration des services. Comme je l'ai indiqué plus tôt, nous mettrons essentiellement l'accent sur Kamloops au lieu de Hong Kong; ce sera London, Ontario au lieu de Londres en Angleterre.
L'autre chose, bien entendu, c'est que notre plan de flotte envisage l'acquisition d'avions nouveaux, plus modernes, de haute technologie, y compris des jets régionaux, ce qui devrait être une initiative positive pour les collectivités visées et desservies à l'heure actuelle par des transporteurs régionaux.
M. Lou Sekora: Vous dites avoir 125 avions qui comptent de 19 à 70 sièges et emploient 5 000 professionnels. Je crois que dans l'industrie aérienne régionale, il y a probablement 7 000 employés, pas 5 000. Donc, êtes-vous en train de dire que vous allez éliminer 2 000 emplois?
M. Robert Deluce: Non. Le mot d'ordre de notre entreprise, c'est l'expansion et c'est pourquoi nous ne prévoyons pas de pertes d'emplois. En fait, nous aurons probablement besoin de plus de gens. C'est vraiment le principe que nous avons adopté et notre plan d'entreprise prévoit effectivement l'expansion de ces services, et nous estimons d'ailleurs que cela est possible.
Le président: Je vous remercie, monsieur Sekora.
Monsieur Casey.
M. Bill Casey: Tout d'abord, je tiens simplement à dire que j'aime que vous mettiez l'accent sur Timmins et Saskatoon plutôt que sur Heathrow et Rome, comme nous l'avons déjà entendu.
J'ai toutefois quelques questions. J'aimerais mettre l'accent sur cette question d'exclusivité du trafic d'apport. Par exemple, InterCanadian assure maintenant un service de Moncton à Halifax et est le transporteur subsidiaire de Canadian Airlines qui assure la correspondance de Halifax à Toronto. Si votre transporteur régional assure le même service et se voit garantir des droits exclusifs d'apport à l'unique transporteur dominant, qu'arrivera-t-il à InterCanadian et aux autres transporteurs indépendants? J'utilise cet exemple simplement parce que je connais assez bien la situation. S'il n'existe aucun autre transporteur à qui ils peuvent assurer un trafic d'apport, que leur arrivera-t-il?
M. Robert Deluce: Je pense que la situation d'InterCanadian est difficile. Ce transporteur traverse une période difficile à l'heure actuelle. Nous pensons que notre solution permettrait d'inclure ce transporteur et en fait nous y serions disposés. Nous avons discuté avec eux. Nous sommes en train d'étudier certaines options. Je crois qu'il est possible de trouver une solution.
M. Bill Casey: Cela soulève d'autres questions. Vous avez discuté avec les autres transporteurs aériens. Il ne fait aucun doute que d'une certaine façon cela va réduire la concurrence, car vous avez dit que leurs deux compagnies aériennes ne peuvent pas servir le même marché de façon viable. Avez-vous soulevé cette question auprès du Bureau de la concurrence? Faudrait-il une autre suspension de l'application de la Loi sur la concurrence pour permettre le déroulement de ce processus?
M. Robert Deluce: Je ne le crois pas. Nous partons du principe que nous n'avons pas à le faire. Nous n'envisagerions même pas une option de ce genre.
En ce qui concerne le Bureau de la concurrence, nous leur avons fait des présentations, de même qu'à Transports Canada. C'est la première présentation officielle que nous avons faite au gouvernement, mais nous avons eu des discussions de vive voix avec eux. Nous leur avons présenté ce que nous considérons être les conditions indispensables pour rendre viable un transporteur aérien semblable à celui que nous venons de décrire.
M. Bill Casey: Quand avez-vous fait votre exposé au Bureau de la concurrence?
M. Robert Deluce: Nous avons fait deux exposés au Bureau de la concurrence au cours des 30 derniers jours.
M. Bill Casey: Le Bureau a-t-il tiré des conclusions? Vous a- t-il indiqué ce qui serait nécessaire? Dans le rapport qu'il a préparé à notre intention, le Bureau a fait des recommandations très précises concernant l'existence d'un transporteur dominant. L'une de ces recommandations était d'avoir un transporteur de type régional appartenant à des intérêts canadiens. Votre plan répond-il à ces critères?
M. Robert Deluce: Il ne fait aucun doute que notre plan envisage la création d'un transporteur aérien indépendant, appartenant à des intérêts canadiens, axé sur le service régional et viable sur la plan commercial et dont le principal objectif est de desservir les petites collectivités et d'offrir une autre option concurrentielle aux voyageurs canadiens. Nous estimons qu'il cadre bien avec le rapport général du Bureau de la concurrence et qu'il est compatible avec le cadre stratégique présenté par Transports Canada. Je pense que notre plan correspond d'assez près à la définition envisagée ici pour l'industrie aérienne canadienne.
M. Bill Casey: J'ai peut-être mal compris, mais selon les propositions des principaux transporteurs dominants, j'ai eu l'impression que les routes régionales n'étaient pas viables mais leur servaient de trafic d'apport à leurs routes internationales. Mon impression est-elle exacte? Dans l'affirmative, comment pouvez- vous être viables lorsqu'ils disent que vous ne l'êtes pas? C'est ce que j'ai cru comprendre.
M. Robert Deluce: Je pense que nous pouvons être viables en améliorant notre efficacité et en réunissant tous ces transporteurs régionaux qui sont dispersés à l'heure actuelle. Nous pourrons ainsi mieux servir les petites collectivités et élargir les services qui leur sont offerts. De plus, je pense que certaines de ces routes sont viables à l'heure actuelle et certaines ne le sont pas, mais si nous avons l'équipement voulu en plus d'un personnel motivé et dévoué, je pense que ces initiatives seront très positives compte tenu du projet que nous envisageons.
M. Bill Casey: Cela implique beaucoup d'entreprises. Les avez- vous toutes consultées? Sont-elles réceptives à cette proposition ou s'agit-il d'une proposition qu'elles considèrent peu amicale?
M. Robert Deluce: Nous avons eu certaines discussions non officielles avec Air Canada, mais ils n'ont pris aucun engagement, et je ne m'attends pas à ce qu'ils le fasse pour l'instant.
Le plan que nous envisageons repose essentiellement sur l'hypothèse selon laquelle il y aura un transporteur dominant. Pour que ce plan devienne réalité, nous avons besoin que quelqu'un leur dise que pour qu'il existe un transporteur dominant, ils doivent se dessaisir de leurs transporteurs régionaux. S'ils le font, il faudra alors leur imposer certaines conditions qui permettront au transporteur régional de démarrer sur une base raisonnable afin qu'il soit viable et qu'il dispose au moins d'une certaine période de transition.
Le président: Je vous remercie, monsieur Casey.
Chers collègues, nous venons de terminer un tour.
Messieurs, nous nous trouvons à l'heure actuelle dans une situation où nous sommes appelés à déterminer ce que nous ferons dans l'éventualité où il y aura un transporteur dominant au Canada. Comment assurons-nous l'établissement des prix et le respect des cinq principes dont on a cessé de nous rebattre les oreilles?
Ce que vous nous proposez, c'est un transporteur aérien subsidiaire et dominant qui assure des services régionaux sur les marchés lucratifs pour alimenter le transporteur national dominant. Nous tâchons de trouver une solution qui permet de tenir compte des principes énoncés. Vous avez une excellente proposition commerciale, cela ne fait aucun doute. Je pense que tout le monde devrait vous féliciter de saisir l'occasion qui se présente. Bien entendu, cela repose entièrement sur le principe selon lequel nous aurons un transporteur, mais tout ce que nous avons entendu jusqu'à présent dans la presse et de la part de M. Robert Milton, c'est qu'ils sont fermement déterminés à ce que Canadien soit opérationnel et qu'il s'agisse d'une filiale à 100 p. 100, et ils envisagent des scénarios possibles qui tiennent compte de la présence de Canadien.
Donc, si Air Canada décide que Canadien sera une filiale à 100 p. 100 qui mène ses propres activités et qu'Air Canada mène les siennes, votre proposition ne verra jamais le jour.
M. Robert Deluce: Gord pourra peut-être répondre à cette question. Mais nous considérons Canadien comme une filiale à 100 p. 100 d'Air Canada qui demeure un transporteur dominant. Nous ne faisons pas de distinction entre l'acquisition par Air Canada de Canadien et la fusion de ces deux transporteurs ou son exploitation en tant que filiale séparée.
M. Gordon Thompson: L'une des choses dont nous avons discuté avec le Bureau de la concurrence entre autres, comme Bob l'a mentionné, et certainement avec des gens comme Bob et André qui connaissent très bien l'industrie... c'est que personne ne sait quelle sera l'issu de ce processus. Ce n'est pas forcément une question de bilan où on détermine comment régler le problème de la dette de Canadien. Il s'agit en fait d'un débat sur la politique gouvernementale, que la proposition de M. Schwartz a rendu beaucoup plus animé, d'ailleurs. Nous n'essayons pas de faire des suppositions sur la forme que finira par prendre l'ensemble de l'industrie. C'est une question qui relève probablement d'autres instances.
Nous sommes ici aujourd'hui parce que nous avons à mon avis une proposition très intéressante à présenter et nous pouvons dire, dans le contexte de la restructuration de l'industrie aérienne au Canada, qu'il existe un groupe de Canadiens très expérimentés qui sont disposés à présenter une proposition.
Le président: Monsieur Thompson, vous devez en fait faire des suppositions sur ce à quoi ressemblera la situation au bout du compte. Vous ne cessez de parler dans votre rapport de l'existence éventuelle d'un transporteur dominant... Donc, vous êtes en train de supposer qu'il pourrait n'y avoir qu'un transporteur dominant et c'est pourquoi vous présentez votre proposition concernant les services régionaux.
M. Gordon Thompson: Oui, je comprends.
Cependant, au-delà de ce type de discussion, l'un des aspects que nous avons abordés et dont nous n'avons pas eu l'occasion de parler ici, c'est qu'il est fort probable, une fois que les choses se calment, qu'il y aura dans l'industrie canadienne un transporteur dominant parmi les principales compagnies aériennes et un transporteur dominant parmi les transporteurs régionaux, mais qu'il y aura plusieurs autres transporteurs qui seront dominants sur les marchés d'où nous sommes absents, et nous sommes certainement en mesure d'exercer une concurrence dans les triangles clés.
Troisièmement, il serait possible que trois ou quatre affréteurs très importants dominent l'industrie de l'affrètement au Canada et aient des arrangements pour assurer le trafic d'apport aux transporteurs national ou régional.
Quatrièmement, il ne fait aucun doute qu'on se retrouvera avec au moins deux ou trois transporteurs à rabais très dominants dans ce pays tel que WestJet, Air Canada Light ou le transporteur de Hamilton.
Donc je pense que vous aurez trois paliers de transporteurs aériens qui exercent une concurrence au Canada. Chacun de ces paliers aura certainement, du moins nous l'espérons, un transporteur viable et dominant.
Le président: Combien rapporte le transporteur régional d'Air Canada?
M. Robert Deluce: Il est difficile pour nous de répondre à cette question, et je pense que nous ne ferions que des suppositions. L'une des difficultés dans ce genre de processus, c'est que nous avons un modèle commercial très solide. Nous travaillons à l'aide de notre plan d'affaires, et nous estimons qu'il est bien financé, mais...
Le président: Mais vous devez quand même savoir qu'Air Canada a un service régional et qu'il fait de l'argent, n'est-ce pas?
M. Robert Deluce: Nous savons que différents éléments ou certaines parties de son service régional font de l'argent mais nous ne pouvons pas vous en préciser le montant ni les éléments qui sont rentables. Le problème, c'est que nous n'avons eu accès à aucun renseignement sur la situation financière d'Air Canada ni sur celle des lignes aériennes régionales de Canadien, et jusqu'à ce que nous ayons ces renseignements, nous ne pouvons pas nous prononcer de façon définitive sur la forme que prendra le modèle commercial.
Le président: Notre comité a appris qu'Air Canada a un service régional qui marche très bien, et étant donné qu'Air Canada nous l'a dit, vous a-t-on donné des indications selon lesquelles Air Canada pourrait considérer qu'il s'agit d'une excellente idée et vous donne le feu vert; c'est-à-dire, Regco, assurez le service régional d'Air Canada? Avez-vous des indications de ce genre d'Air Canada? Pourquoi, de toute façon, Air Canada devrait-il y renoncer?
Troisièmement, comment vous proposez-vous de lui prendre ce service si Air Canada indique que cela ne l'intéresse pas, que ce service est rentable et qu'il lui permet d'alimenter sa propre flotte?
M. Robert Deluce: En ce qui concerne votre première question, nous n'avons eu aucune indication de la part d'Air Canada selon laquelle il serait prêt à nous vendre ses transporteurs subsidiaires ou, dans l'éventualité où il ferait l'acquisition de Canadien, le groupe de Lignes aériennes régionales Canadien.
Deuxièmement, notre plan envisage essentiellement l'acquisition de ces transporteurs aériens dans la mesure où il existe un transporteur dominant et dans la mesure où le transporteur dominant, comme condition d'approbation, est tenu de s'en dessaisir. Si tel est le cas, nous aurons alors un transporteur intéressé à discuter avec nous. Jusqu'à ce que nous sachions quelle est l'opinion du gouvernement concernant cette question particulière de dessaisissement, je pense que rien ne se fera jusque là...
Ce sont des suppositions jusqu'à un certain point, et je ne peux pas parler en leur nom, mais je pense que cela ne se produira pas tant qu'on ne leur dira pas.
Je suis désolé, quelle était votre dernière question?
Le président: Comment comptez-vous faire l'acquisition de ces transporteurs aériens s'ils disent ne pas être intéressés?
M. Robert Deluce: Je pense qu'il nous est impossible de faire l'acquisition des transporteurs aériens qui appartiennent à l'heure actuelle à Air Canada et à Canadien à moins qu'ils soient disposés à les vendre.
Le président: Je vous remercie.
Monsieur Dromisky.
M. Stan Dromisky: Merci beaucoup, monsieur le président. On a déjà répondu à certaines de mes questions. Mais ce modèle est très intéressant et m'indique que l'industrie est tout à fait saine, que quelqu'un est prêt à venir présenter un modèle différent.
Cependant, la réussite de votre modèle dépend d'un grand nombre de facteurs. On en a déjà abordé certains, mais j'aimerais simplement en examiner un et obtenir certains éclaircissements de votre part. Lorsque vous dites que vous voulez permettre aux employés de jouer des rôles multiples, de qui parlez-vous au juste? La plupart de ces employés font partie de syndicat, et les syndicats ont des stipulations très précises quant au genre de rôles qu'ils doivent exercer. J'aimerais avoir votre réaction à cet égard.
Ensuite, parlons des cinq conditions que vous avez énoncées. Si je les examine de façon générale, je constate, compte tenu du fait que vous avez déjà déclaré qu'il faut que ces conditions soient respectées pour assurer la concurrence, que ce que vous êtes vraiment en train de dire c'est que pour être concurrentiel, vous aimeriez avoir l'appui probablement du gouvernement et du transporteur dominant et d'autres intéressés pour éliminer la concurrence. Cela me semble contradictoire.
J'aimerais votre réaction à ces déclarations, surtout celle à propos des syndicats, et compte tenu de la condition numéro trois.
M. Gordon Thompson: Je pense que la meilleure façon de décrire la situation est la suivante: si demain matin Air Canada, ou si Canadien l'avait fait pendant cette lutte, décidait de vendre le transporteur aérien pour, disons, 300 millions ou 400 millions de dollars et négociait avec ce groupe ou n'importe quel autre groupe par conséquent pour acheter les transporteurs régionaux—et le faisait de sa propre initiative sans y être obligé—la plupart des conditions que vous voyez énoncées aujourd'hui dans ce document serait des points qui seraient négociés par ceux qui achèteraient ce transporteur régional, parce que personne n'achètera le transporteur régional d'Air Canada s'il n'obtient pas les portes d'embarquement, les créneaux et le trafic d'apport. Donc on n'achète pas des avions; on achète une franchise. C'est donc le contexte dans lequel cela se fait en négociant avec eux, quels qu'ils soient en bout de ligne. Par contre, s'ils ne sont pas prêts à le faire et si le gouvernement du Canada accepte qu'ils deviennent le transporteur dominant dans chaque aspect de l'industrie, alors très bien, nous ne sommes plus en lice. Autrement, c'est le processus que nous devrions suivre, c'est-à- dire négocier ces conditions.
Ainsi, les conditions sont là, qu'elles soient imposées par quelqu'un ou négociées par l'acheteur.
M. Stan Dromisky: Qu'en est-il des syndicats?
M. Robert Deluce: Permettez-moi de répondre d'abord à la question concernant les employés. Notre plan d'entreprise est essentiellement axé sur l'expansion et la croissance et nous croyons que ce sera une bonne chose pour les employés.
D'abord, comme c'est un plan axé sur l'expansion, nous ne prévoyons pas de pertes d'emploi.
Ensuite, en ce qui a trait aux clauses restrictives de l'actuelle convention des employés d'Air Canada, elles n'auront plus d'effet si les transporteurs régionaux sont vendus à une autre entité. Une fois ces clauses disparues, il est possible de mettre en service du matériel de pointe. À notre avis, cela ouvre de meilleures perspectives d'avenir pour les employés, y compris les pilotes, les agents de bord et les autres employés de ces sociétés alors que leurs horizons étaient très bouchés depuis quelque temps déjà.
Quant aux syndicats, nous savons qu'il existe de nombreux syndicats et nous avons l'intention de travailler avec les employés et leurs syndicats afin que nous puissions apporter les changements qui s'imposent si nous voulons assurer la rentabilité de l'entreprise. Nous croyons qu'un transporteur régional pour qui ses employés sont la priorité, pourra négocier beaucoup plus facilement avec ces employés et leurs syndicats que pour une société aérienne à vocation internationale qui rêve de Tokyo et de toutes ces destinations intéressantes.
Nous sommes aussi très conscients des intérêts divergents des principaux transporteurs et de ceux qui ont une vocation régionale. D'ailleurs, le Conseil canadien des relations industrielles est actuellement appelé à trancher certaines questions liées à la notion d'employeur commun.
Ainsi, nous croyons que ces problèmes disparaîtront et que la situation sera avantageuse pour Air Canada. Qu'ils le sachent ou non, ce sera avantageux pour eux et pour les employés. C'est un avantage pour cette nouvelle compagnie aérienne si les pourparlers aboutissent.
Le président: Monsieur Bailey, s'il vous plaît.
M. Roy Bailey: Merci.
Après un mois d'activité, vous venez ici et vous voudriez nous faire croire qu'il y a eu intervention divine en quelque sorte, mais je n'ai pas vu d'auréoles au-dessus de vos têtes. Votre plan est bien conçu.
Bien entendu, nous avons eu connaissance de certaines réactions. Vous aurez à traiter avec Air Canada, Canadien, les employés et tout le reste.
Vous faites au troisième paragraphe de la page 5 de votre exposé un commentaire qui me semble très intéressant:
-
Toutefois, il est évident que parvenir à la rentabilité financière
et à un effet proconcurrentiel sur le marché, ce que notre
proposition offre, dépendra de savoir s'il existe un environnement
réglementaire approprié.
Quand vous parlez d'un «environnement réglementaire approprié», voulez-vous dire que vous demanderiez au gouvernement de dire à Air Canada ou à Canadien, que notre plan est bon et qu'ils doivent négocier de bonne foi pour qu'il y ait un transporteur régional dominant? Est-ce à cela que vous pensiez quand vous avez rédigé cela?
M. Gordon Thompson: Oui, certainement. Il se peut que cela échappe au contrôle de tous les intervenants mais, si nous nous retrouvons en définitive avec un transporteur dominant, alors il est bien clair que les règles qui régissent toutes les entreprises de ce secteur devront être modifiées. À l'heure actuelle, ces deux transporteurs dominants contrôlent tous les créneaux et toutes les portes. Comment pouvons-nous espérer être compétitifs, peu importe à quel niveau, si de nouveaux règlements ne sont pas mis en place?
M. Roy Bailey: Votre groupe—et vous êtes les derniers arrivés sur la scène—tient-il à faire l'acquisition de Canadien et des lignes régionales d'Air Canada ou préfère-t-il faire l'acquisition des lignes régionales uniquement en laissant Canadien à son sort?
M. Robert Deluce: Nous demandez-vous si nous nous contenterions de faire l'acquisition des transporteurs partenaires d'Air Canada sans inclure les Lignes aériennes Canadien régionales Ltée?
M. Roy Bailey: Non.
M. Robert Deluce: Je suis désolé, je ne comprends pas la question.
M. Roy Bailey: Nous avons deux transporteurs dominants. Canadien est actuellement en difficulté. Votre proposition s'appuie sur l'existence d'un transporteur dominant. Vous voulez avoir accès aux transporteurs régionaux partenaires des deux grandes compagnies aériennes. Qu'adviendra-t-il des routes nationales de Canadien et à ce pan-là de ses activités si c'est l'option que vous choisissez?
M. Robert Deluce: Notre proposition s'appuie effectivement sur l'hypothèse d'un seul transporteur national. Qu'il s'agisse de l'entreprise issue d'une fusion, ce qui semble de plus en plus improbable, ou d'un transporteur qui posséderait le deuxième en filiale à 100 p. 100, reste que pour nous ce ne serait qu'un transporteur national unique. Nous n'avons pas cherché à savoir quel serait le sort de Canadien, puisque cela est étranger à notre proposition. Ce qui nous intéresse essentiellement, c'est le service régional. Les Lignes Canadien International nous ont brièvement intéressés mais nous les laissons maintenant à d'autres.
M. Roy Bailey: Merci.
Le président: Merci, monsieur Bailey.
Monsieur Hubbard, s'il vous plaît.
M. Charles Hubbard: Ça va.
Le président: Monsieur Comuzzi, s'il vous plaît.
M. Joe Comuzzi: Merci.
Vous avez été associé à Canada 3000. J'ai toujours été épaté de voir que ces gens-là, ceux chez Royal ou chez les autres transporteurs à services d'affrètement, réussissent à desservir certaines destinations en utilisant les mêmes avions et en fournissant parfois un service de meilleure qualité que les transporteurs nationaux et cela pour un tiers du prix. Personne n'a jamais su m'expliquer pourquoi.
Le président: Et pourtant nombreux sont ceux qui ont essayé.
Des voix: Ah, ah!
M. Joe Comuzzi: Mais je ne connais toujours pas la réponse.
Je vais parler franchement. Les tarifs des transporteurs régionaux sont excessifs. L'autre jour, j'ai pris un vol de 45 minutes partant de Thunder Bay et le billet aller-retour, le même jour, m'a coûté près de 600 $. J'aurais pu me rendre un peu plus loin au comptoir de WestJet et prendre un billet aller-retour pour Calgary pour environ 280 $.
Monsieur Deluce, pour ce qui est du service et des si belles choses dont vous nous avez parlé ce matin, parfois le prix du service équivaut à ne pas offrir le service, quand le prix est excessif. C'est un problème très généralisé dans les collectivités du Nord.
Que peut faire le comité pour faire baisser les prix pour les voyageurs des régions que vous prévoyez desservir? Comment pouvons- nous faire baisser le prix du service? Je ne veux pas entendre parler de la nécessité de pratiquer des prix élevés en raison de l'inflation, etc.. Il faut que les transporteurs régionaux de ce pays réduisent leurs tarifs.
M. Robert Deluce: Notre proposition vise essentiellement à regrouper quatre ou cinq transporteurs qui pourront réduire leurs coûts quand ils auront un réseau régional plus important. La réduction des coûts se traduit par un abaissement des tarifs. Et ce serait notre intention.
Par ailleurs, quand ces transporteurs régionaux peuvent offrir des correspondances intercompagnies et partager les dénominations avec des transporteurs autres que le transporteur dominant restant, cela avive déjà la concurrence. Pour la première fois il serait possible de faire des correspondances intercompagnies, et de prendre un vol de Canada 3000, de Royal ou de Transat assurant la liaison entre Vancouver et Toronto, puis de continuer, à Toronto, sur un vol du transporteur régional vers Timmins. Cette concurrence exercera des pressions à la baisse sur les tarifs dont le niveau élevé vous préoccupe manifestement.
M. Joe Comuzzi: Tous les habitants des petites collectivités s'en inquiètent. Il faut nous garantir que ces tarifs diminueront.
M. Robert Deluce: Vous avez tout à fait raison. J'ai déjà habité certaines collectivités du Nord.
M. Joe Comuzzi: Je le sais.
M. Robert Deluce: Notre feuille de route à cet égard est assez reluisante et l'équipe que nous avons réunie a de nombreuses années d'expérience dans le transport aérien; nous comptons parmi nos partenaires Newcourt Capital pour le financement. Il faut se donner des assises financières très solides et c'est ce que nous avons fait.
M. Joe Comuzzi: Monsieur Deluce, vos prix...
[Note de la rédaction: Inaudible]
...quand vous avez vendu à Air Canada. Vous exploitiez une assez bonne ligne aérienne, puis vous l'avez vendue à Air Ontario.
M. Robert Deluce: Je ne peux formuler de commentaires sur l'évolution des prix après la vente de l'entreprise.
M. Joe Comuzzi: Vous et M. Fontana savez patiner en donnant ces réponses.
M. Robert Deluce: Il serait inconvenant pour moi de formuler des commentaires sur l'évolution des prix après la vente de l'entreprise.
M. Joe Comuzzi: Merci.
Le président: Merci, monsieur Comuzzi.
[Français]
Monsieur Guimond.
M. Michel Guimond: Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Le président: Chers collègues, je vous rappelle qu'il est 12 h 06.
M. Michel Guimond: Comme le prochain témoin ne vient qu'à 15 h 30, nous avons encore du temps.
Le président: Si ça ne vous gêne pas de payer pour la salle de 12 h 00 à 15 h 30, monsieur Guimond.
[Français]
M. Michel Guimond: Monsieur le président. je vais essayer d'y aller rondement. Je vais même débiter mes questions en rafale. Les témoins pourront les prendre en note et je pourrai obtenir des réponses. Je veux vous dire que M. Casey a posé une des questions que j'avais en tête concernant Inter-Canadien.
Une première question s'adresse à M. Thompson. Notez-la pour y répondre un peu plus tard. J'aimerais en connaître un peu plus en ce qui concerne Newcourt Capital. Je pense que vous êtes maintenant une société cotée en Bourse. Son siège social se trouve-t-il au Canada ou aux États-Unis? J'aimerais en savoir un peu plus. Si vous avez votre rapport annuel, vous pourriez le faire parvenir à la greffière pour qu'on sache un peu mieux qui est Newcourt Capital.
Ma deuxième question s'adresse à M. Deluce. Vous parlez de créer deux divisions, une dans l'Est et une dans l'Ouest. J'aimerais savoir à quel endroit vous vous proposez de situer le siège social de cette société. Est-ce qu'il serait situé à London en Ontario, à Hamilton, à Timmins, à White River, à Montréal ou à Toronto? J'aimerais savoir où serait situé le siège social de votre société.
Quant à ma troisième question, elle est un peu plus difficile, Vous savez qu'au Canada, il existe un droit fondamental aussi important que le droit de parole, le droit d'expression ou le droit de libre association. On l'appelle le droit de propriété. Vous êtes des gens qui ont réussi en affaires, qui ont un passé. Je suis persuadé que vous avez encore de beaux projets et que vous avez encore un avenir. La vie ne s'arrête pas à 40 ans.
Lorsque vous proposez, dans votre plan, que le nouveau transporteur national se départisse de ses lignes aériennes régionales subsidiaires et se voie interdire de revenir dans ce secteur pendant 10 ans, êtes-vous conscients de ce que vous demandez?
En somme, vous demandez au gouvernement d'ordonner une certaine forme d'expropriation. Autrement dit, si vous n'êtes pas capable d'en venir à une entente avec la nouvelle direction d'Air Canada, Air Canada II, quant à une acquisition de gré à gré, vous dites que le gouvernement ou le comité devrait recommander au gouvernement d'adopter des mesures réglementaires obligeant Air Canada à se départir de ses lignes régionales et vous voulez qu'il soit même interdit à ce transporteur de revenir pendant 10 ans, contrevenant par là clairement au droit fondamental de propriété. J'aimerais avoir vos commentaires là-dessus.
[Traduction]
Le président: Monsieur Deluce, avez-vous des commentaires à ce sujet? Monsieur Thompson, peut-être?
M. Robert Deluce: Si je peux parler d'abord de l'exigence d'exclusion de 10 ans, je dirais que ce n'est pas une disposition inhabituelle. Nous connaissons bien les ententes de 10 ans. Nous en avons vues récemment; prenons l'exemple de l'accord décennal qui lie actuellement Air Canada et Star Alliance. Un accord décennal n'a rien d'inhabituel dans le contexte du financement des lignes aériennes. En outre, l'accord que nous avons conclu chez Air Ontario avec Air Canada en 1987 devait durer 10 ans. Ce n'est donc pas en dehors des normes. Nous pensons que c'est une chose nécessaire et d'une certaine façon, normale.
• 1210
Il y a ensuite une autre question se rapportant à
l'emplacement du siège social.
M. Michel Guimond: Parlez-moi de l'expropriation. Dans la première recommandation, vous dites que le nouveau transporteur national doit se départir de certains biens. C'est le genre d'expropriation que vous demandez au gouvernement. Je ne veux pas une réponse qui se rapporte uniquement à la période de 10 ans. D'abord, est-ce aller dans le sens du droit à la propriété, pour Air Canada, que de vouloir garder ses lignes régionales? Demanderez-vous au gouvernement de forcer la nouvelle société Air Canada à s'en défaire?
M. Robert Deluce: C'est à nos yeux l'une des conditions essentielles de notre vision, pour la ligne aérienne qui doit, à notre avis, avoir des liens avec ce réseau de transporteurs régionaux. Nous ne pensons pas qu'il y aura dessaisissement à moins que cela ne fasse partie des conditions d'approbation demandées en retour de la possibilité qu'il n'y ait qu'un seul transporteur principal.
On choisira d'aller dans un sens ou dans l'autre. Si vous voulez que la nouvelle entité possède non seulement le transporteur principal, mais tous les transporteurs régionaux ainsi que la nouvelle société Air Canada et tout ce qui bouge, c'est une idée à envisager. Mais si vous voulez qu'il y ait de la concurrence, notre plan d'entreprise simplifié prévoit qu'il y aura une nouvelle entreprise qui se concentrera en fait sur les marchés régionaux et sur les collectivités des petits marchés. Elle s'engagerait à fournir un autre choix aux voyageurs canadiens, ce qui est positif.
Le président: Merci, monsieur Guimond.
Monsieur Fontana.
M. Joe Fontana: M. Guimond doit savoir que le Bureau de la concurrence, au Canada, tout comme le ministère de la Justice aux États-Unis, dès qu'ils reçoivent une proposition dont ils sont saisis, comme l'OTC, peuvent très bien...
Le Bureau de la concurrence a déjà déclaré qu'un transporteur dominant devait faire certaines choses. C'est ce que notre comité et le gouvernement devront envisager, si Air Canada et Canadien s'entendent. Il faut voir si c'est dans l'intérêt public et le Bureau de la concurrence pourrait leur dire...
[Note de la rédaction: Inaudible]
Une voix: ...
M. Joe Fontana: J'ai dit que cela fera aussi partie du scénario. Le gouvernement ne va tout de même pas exproprier tout le monde, allons donc.
Le président: Bien, monsieur Fontana...
M. Joe Fontana: Puis-je poser une question? C'est très important.
Il y a encore beaucoup d'incertitudes, mais au sujet des investissements, pensez-vous que la règle de 25 p. 100 de propriété américaine est adéquate? Avez-vous une opinion à ce sujet, étant donné la façon dont vous obtiendrez du capital?
Deuxièmement, ferez-vous le partage des dénominations, par exemple, avec l'Alliance Oneworld ou avec des transporteurs américains, afin de faire profiter au maximum les Canadiens des collectivités qui... Comme vous le savez Canadien a un accord de partage de dénominations avec Oneworld et Air Canada, avec Star Alliance. Je crois que ce que vous demandez, c'est un partage maximal, avec tout un chacun, afin de donner le choix aux consommateurs.
Troisièmement, si certaines choses se produisent, notre comité devra décider si nous voulons ou non des transporteurs régionaux indépendants, plutôt que de transporteurs régionaux sous le contrôle d'un transporteur dominant. Au bout du compte, ce sera une décision difficile: il faudra déterminer si un transporteur indépendant, comme Regco, sera un meilleur choix pour les consommateurs qu'un autre, sous le contrôle d'un transporteur dominant.
Pourriez-vous au moins répondre au sujet des investissements et du partage des dénominations?
M. Gordon Thompson: Je vais parler d'abord de l'investissement, puisque je peux vous donner une courte réponse.
Pour nous, ce n'est pas un problème. Les gens qui investissent dans la ligne aérienne de M. Deluce sont pour la plupart des gens du secteur des services financiers. Il ne s'agit pas d'une autre ligne aérienne qui cherche à prendre le contrôle de celle-là. Nous respecterions donc les règles nationales, quelles qu'elles soient, à ce sujet.
M. Robert Deluce: Je pourrais toutefois ajouter que, dans notre mémoire au Bureau de la concurrence, nous avons signalé que nous n'avions aucune objection à la modification des règles relatives à la propriété étrangère, jusqu'à concurrence de 49 p. 100, et que nous y étions même favorables. Cela faisait partie de notre mémoire au Bureau de la concurrence.
• 1215
Au sujet de la question des alliances, il faudra bien entendu
envisager des alliances, un peu plus tard. Il est toutefois
prématuré pour nous de réfléchir au choix de notre partenaire. Nous
n'avons encore trouvé personne qui soit prêt à nous parler de
l'achat de ces lignes aériennes, c'est donc notre priorité.
M. Joe Fontana: Le partage de dénominations donne le même résultat. Partageriez-vous les dénominations avec United ou avec quelqu'un d'autre, comme USAir ou Delta? Chercheriez-vous à partager ces dénominations?
M. Robert Deluce: Sans nous joindre à une alliance particulière, nous estimons qu'il ne devrait pas y avoir de restrictions pour notre entreprise en ce qui concerne les partenaires que nous choisirions pour le partage des dénominations ou des accords commerciaux. C'est essentiel si l'on veut maintenir la concurrence.
M. Joe Fontana: Je suis bien d'accord.
Le président: Une courte question supplémentaire à laquelle je vous demande de répondre rapidement, monsieur Thompson, puisque vous êtes le financier. M. Deluce a répondu à la question au sujet des 25 p. 100. Qu'en est-il de la règle des 10 p. 100 pour la propriété individuelle? Devrait-on la faire passer à 15 p. 100, à 20 p. 100, ou supprimer ce plafond?
M. Gordon Thompson: La proposition qui vous a été remise tient compte de la règle des 10 p. 100, mais la réponse est assez semblable, c'est-à-dire que s'il fallait changer la règle, nous appuierions un plafond plus élevé. Mais ce n'est pas essentiel à notre proposition. Cette règle ne nous gêne pas.
M. Joe Comuzzi: La règle actuelle ne vous gêne pas?
M. Gordon Thompson: Non.
Le président: Mais vous ne vous opposeriez pas à ce qu'on augmente la limite.
Merci.
Bev.
Mme Bev Desjarlais: J'ai trois petites questions auxquelles vous pourriez sans doute donner trois courtes réponses.
Premièrement, à quelle date avez-vous présenté votre mémoire au Bureau de la concurrence?
Deuxièmement, ne pensez-vous pas que la limite de 10 ans représente pour vous une garantie d'accès exclusif au marché pour la même période?
Et troisièmement, en permettant aux employés d'être plus polyvalents, parlez-vous particulièrement des pilotes qui pourront prendre différents types d'aéronefs, ou plutôt, par exemple, des agents de bord qui pourraient nettoyer l'avion, entre autres choses? J'aimerais plus de précisions sur la possibilité pour eux d'avoir des rôles multiples.
M. Robert Deluce: Pour répondre à votre première question, sachez que nous avons présenté deux mémoires au Bureau de la concurrence le 1er novembre, puis auparavant, le 20 octobre ou quelque chose comme cela. Si c'est important pour vous, je peux évidemment vous faire connaître les dates exactes que je semble avoir oubliées. M. Thompson me confirme que nous avons effectivement comparu le 1er novembre.
Ensuite, pour ce qui est de la période de 10 ans, cette période correspond tout à fait à la période d'exclusion normalement imposée dans le cas d'achats comme celui que nous envisageons. C'est parce que l'on a évidemment besoin d'avoir quelques garanties au sujet de l'entreprise que l'on veut acheter, sans quoi il suffirait tout bonnement d'acheter de l'équipement et de lancer une nouvelle entreprise. Donc, cette disposition de 10 ans est tout à fait courante.
Quant à la concurrence, vous voulez savoir si cela nous place en quelque sorte en position de domination? Ce que nous disons, c'est que les First Air, Bearskin, Canadian North et autres de ce monde tels que WestJet, continueront à exister, et que nous aurons toujours à concurrencer directement le transporteur régional dominant dans les triangles aériens et sur certains trajets transfrontières. Nous ne demandons ni l'exclusivité ni qu'on s'engage à nous donner de façon transitoire les trajets transfrontières, car tout ce que nous demandons, c'est d'avoir accès aux trajets régionaux, là où le transporteur dominant ne fait face actuellement à aucune concurrence.
Mme Bev Desjarlais: Je vous ai également interrogé sur la possibilité que vos employés aient à assumer des rôles multiples.
M. Robert Deluce: Cela doit faire l'objet de discussions avec les employés et leurs syndicats. Nous ne sommes pas...
Mme Bev Desjarlais: Comme vous aviez spéculé là-dessus dans votre exposé, je voulais savoir à quoi vous songiez.
M. Robert Deluce: Ce que nous avions envisagé, en collaboration avec les intéressés, c'était un partage éventuel des rôles qui aurait permis certaines économies, et...
Mme Bev Desjarlais: Puisque vous l'avez mentionné dans votre exposé, j'imagine que vous avez quand même une petite idée de ce dont il retourne, et c'est pourquoi je vous demande des précisions.
M. Robert Deluce: Il serait prématuré et inconvenant que je précise quoi que ce soit de plus, puisque nous n'en avons pas discuté ni avec les employés ni avec leurs syndicats. Il faut tenir compte de nombreux facteurs, qui dépendent tous énormément des discussions que nous pourrions avoir avec les employés et avec leurs syndicats.
Mme Bev Desjarlais: Vous refusez de répondre, visiblement.
Le président: Merci, madame Desjarlais.
Monsieur Casey.
M. Bill Casey: Merci.
En fait, comme le signalait M. Fontana, n'oublions pas que l'objectif premier de notre comité est d'aider le ministre à élaborer une politique, faute de quoi vous avez bien peu de chances de réussir. Autrement dit, le gouvernement obligera-t-il le transporteur dominant à se dessaisir des lignes régionales, ou lui permettra-t-il plutôt de garder les lignes régionales?
Sauf erreur, il me semble qu'au début de toute cette affaire—je ne me rappelle plus quand exactement—le ministre a affirmé qu'il préférerait qu'il y ait dessaisissement des lignes aériennes régionales. Je ne me rappelle plus où il a affirmé cela, mais il l'a bel et bien dit. On n'en parle plus vraiment aujourd'hui, mais il en a été question au début.
Quel type de calendrier envisagez-vous? En supposant que le ministre propose bel et bien une politique sur les transports—ce qu'il n'a pas encore fait, mais en supposant qu'il le fasse—il vous faudrait alors négocier des ententes avec les Lignes aériennes Canadien ou Air Canada; puis, vous auriez ensuite à négocier avec First Air, InterCanadien et toutes les autres lignes aériennes régionales au Canada, pour tenir compte de leurs intérêts; et enfin, il vous faudrait négocier avec les syndicats. Quel laps de temps prévoyez-vous pour y parvenir?
M. Robert Deluce: Nous sommes prêts à avancer très rapidement. Nous avons l'argent, et notre stratégie est prête depuis déjà un certain temps. Le plus grand obstacle qui nous empêche de concrétiser notre vision, c'est, à notre avis, le dessaisissement des transporteurs régionaux par le transporteur dominant. Tant que cela ne sera pas fait, nous ne pouvons pas vraiment bouger.
Certaines des autres questions qui touchent les employés ainsi que les syndicats représentant ceux-ci seront traitées sur une plus longue période, au fur et à mesure que ces lignes aériennes seront intégrées. La seule chose positive que je puisse dire à cet égard, c'est que nous envisageons l'expansion dans notre plan d'affaires et que nous ne nous attendons pas à ce que des pertes d'emplois résultent de ce que nous proposons.
M. Bill Casey: Si on vous donnait le feu vert et que la politique du ministre force le dessaisissement des lignes aériennes régionales, quelle en serait l'incidence sur le plan d'Air Canada? Après tout, le plan d'Air Canada comprend trois volets et touche non seulement Air Canada, mais aussi les Lignes aériennes Canadien et une nouvelle ligne aérienne à bon marché. Quelle serait l'incidence de la politique ministérielle si Air Canada devait se départir de ses lignes régionales?
M. Robert Deluce: Je ne puis spéculer là-dessus, car Air Canada doit d'abord évaluer la situation et réagir. Je sais qu'Air Canada a longuement mûri son plan.
En bout de piste, il s'agit de se demander si on souhaite offrir un service amélioré à certaines des plus petites localités et si l'on souhaite laisser toute la place à la concurrence, à l'échelle nationale et internationale. Or, notre plan offre tout cela.
M. Bill Casey: Mais vous feriez concurrence aux transporteurs dominants sur certains trajets, comme sur la ligne Halifax- Montréal, n'est-ce pas?
M. Robert Deluce: C'est en effet ce qui est prévu.
M. Bill Casey: Bien, merci.
Le président: Merci, monsieur Casey.
Je remercie MM. Deluce, Thompson et Lizotte d'avoir comparu devant notre comité et d'avoir répondu à toutes nos questions. Si vous avez d'autres renseignements à nous envoyer, n'hésitez pas à les transmettre à la greffière du comité qui les distribuera à tous les membres du comité. Merci.
M. Robert Deluce: Merci beaucoup.
Le président: Mesdames et messieurs, nous nous retrouverons à 15 h 30. La séance est levée.