CIMM Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON CITIZENSHIP AND IMMIGRATION
COMITÉ PERMANENT DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le jeudi 25 octobre 2001
Le président (M. Joe Fontana (London-Centre-Nord, Lib.)): Bonjour, chers collègues.
Nous allons avoir une assez longue journée. Comme vous le savez, nous allons commencer ce matin par une séance d'information sur la sécurité aux frontières. Je vous avertis d'avance que nous ne parlerons pas du projet de loi C-11. Nous le ferons à 15 h 30 cet après-midi avec la ministre, dans la pièce 253-D; ce sera télévisé. Les gens du ministère seront là, avec la ministre, pour répondre à nos autres questions sur la politique à cet égard.
• 0910
La séance de ce matin nous permettra de préparer nos
déplacements de la semaine prochaine dans le cadre de nos travaux
sur la sécurité aux frontières. Elizabeth, Tony et Beverley vont
nous faire un survol de la situation.
Jacques, est-ce que les cahiers sont prêts ou s'ils seront distribués plus tard?
Le greffier du comité: Ils ont déjà été distribués.
Le président: D'accord, vous avez vos cahiers.
Pour commencer, Elizabeth, vous pourriez parcourir rapidement une partie des cahiers avec nous et nous présenter l'information dont vous disposez. Nous aurons évidemment des questions, et nous pourrons partir de là.
Je dois aussi préciser aux membres du comité qui m'ont demandé si nous irions à Washington la semaine suivante que je n'ai pas encore de réponse ferme à ce sujet-là. Le greffier a communiqué avec les gens des Affaires étrangères pour savoir si la semaine du 5 novembre convient toujours.
Comme vous le savez, la situation à Washington demeure plutôt changeante. Nous espérons vous donner la réponse le plus tôt possible, parce que nous avons tous des dispositions à prendre, évidemment. Si nous n'allons pas à Washington, nous pourrions entendre quelques témoins à notre retour le mardi matin, par exemple les représentants du syndicat des agents des douanes, qui ont fait une présentation au Sénat, et ceux du Syndicat de l'emploi et de l'immigration du Canada. Nous verrons s'il y a aussi d'autres témoins que nous pourrions recevoir.
La semaine suivante, bien sûr, est une semaine de relâche puisque c'est celle qui suit le Jour du Souvenir; il est donc peu probable que nous voyagions à ce moment-là, ce qui veut dire que nous nous rendrions à Washington la semaine d'ap«ès, à moins que vous préfériez autre chose. Nous pourrons en reparler un peu plus tard. Après notre séance d'information, nous pourrons prendre quelques minutes pour discuter de nos travaux futurs.
Alors, je propose que nous écoutions d'abord l'information que les gens du ministère ont à nous communiquer, après quoi nous pourrons discuter d'autre chose s'il nous reste du temps.
Elizabeth, merci et bienvenue.
Mme Elizabeth Tromp (directrice générale, Direction générale de l'exécution de la loi, Citoyenneté et Immigration Canada): Merci. Je suis heureuse d'être ici encore une fois.
Je suis accompagnée aujourd'hui de Tony Smith, qui est responsable des points d'entrée ici à Ottawa, et j'ai aussi le grand plaisir d'avoir à mes côtés Beverley Boyd, la directrice intérimaire chargée de la conception et de l'élaboration des programmes des voyageurs à l'Agence des douanes et du revenu du Canada.
En gros, je vais vous présenter ce matin des renseignements pratiques sur le fonctionnement de notre système aux points d'entrée. Je vais vous fournir pas mal d'information de base, et nous pourrons répondre aux questions à mesure ou à la fin de notre présentation.
Premièrement, un petit survol de la situation: il y a environ 350 points d'entrée au Canada, et les services d'immigration sont présents dans 46 d'entre eux. Cela inclut neuf aéroports internationaux, 33 postes-frontières terrestres et quatre ports de mer: ceux de Halifax, de Vancouver—on me dit que vous allez vous rendre là-bas—, de Sept-Îles et de Trois-Rivières.
Notre personnel compte 561 personnes, ce qui inclut 426 agents d'immigration travaillant à plein temps à ces points d'entrée. De son côté, Douanes Canada a environ 3 600 employés à ces endroits-là. Les inspecteurs des douanes exercent les mêmes pouvoirs que les agents d'immigration en ce qui concerne le premier interrogatoire au point d'entrée; je vous en reparlerai.
En 2000, plus de 105 millions de voyageurs sont arrivés au Canada; à peu près la moitié étaient des citoyens canadiens ou des résidents qui revenaient au pays. Environ 19 millions sont arrivés par nos aéroports internationaux. Donc, les autres—la vaste majorité—sont passés par nos postes-frontières terrestres, et un petit nombre ont débarqué dans les ports de mer.
Douanes Canada autorise 98 p. 100 de ces voyageurs à entrer au pays après le premier interrogatoire au point d'entrée. Environ deux millions, soit 2 p. 100, sont dirigés vers les services d'immigration pour un interrogatoire complémentaire. Donc, nous voyons seulement les 2 p. 100 qui nous sont envoyés.
Le président: Avant que vous continuiez à nous citer toutes ces statistiques passionnantes, j'aimerais savoir si elles se trouvent dans les cahiers ou si vous allez nous fournir toute cette information statistique du plus haut intérêt?
Mme Elizabeth Tromp: Je ne sais pas exactement ce qui se trouve dans les cahiers, mais nous pouvons certainement préparer quelque chose et vous fournir un résumé de ma présentation d'aujourd'hui, si cela peut vous être utile.
Le président: Nous allons prendre vos papiers avant que vous partiez, c'est certain.
M. Elizabeth Tromp: Ou un peu plus tard.
Le président: Merci.
Mme Elizabeth Tromp: Ça suffit pour les statistiques. Passons maintenant au processus. Je vous ai parlé du premier interrogatoire au point d'entrée, ou PIAP, et de l'interrogatoire complémentaire. Comme vous le savez, quand il arrive au Canada, chaque voyageur est d'abord interrogé par un inspecteur de Douanes Canada. Cet inspecteur décide, à partir des questions qu'il a posées et des vérifications qu'il a faites, s'il doit admettre le voyageur au Canada ou l'envoyer subir un deuxième interrogatoire.
Pour ce qui est de la façon dont la décision est prise, l'admission des voyageurs après le premier interrogatoire est laissée à la discrétion des agents des douanes, qui doivent cependant respecter une liste de renvois obligatoires. Cette liste inclut notamment les personnes considérées comme non admissibles; celles qui—à part les Canadiens, évidemment—ont été accusées ou reconnues coupables d'un acte criminel; celles dont les services d'immigration ont expressément demandé le renvoi; celles qui demandent asile ou qui revendiquent le statut de réfugié; et celles qui comptent rester au Canada plus de six mois.
Il y a toutes sortes de gens qui nous sont envoyés. Nos agents ont un rôle de facilitation et d'application de la loi, si vous voulez, ce qui apparaît clairement quand on considère les types de personnes que nous voyons pour les interrogatoires complémentaires. Par exemple, il arrive qu'elles se fassent tout simplement poser quelques questions supplémentaires et qu'elles soient ensuite admises au Canada. Elles peuvent aussi se faire remettre des documents comme une fiche de visiteur, ou encore un permis de séjour pour étudiant ou un permis de travail. Il peut s'agir d'immigrants qui arrivent au Canada ou qui y ont reçu le droit d'établissement. Il peut également s'agir de personnes déclarées non admissibles, ou autorisées à retirer leur demande.
Il arrive que nous fassions des arrestations, et les motifs de détention sont évidemment les mêmes partout, que ce soit aux points d'entrée ou ailleurs. Nous pouvons placer des gens en détention si nous avons des doutes sur leur identité et que nous devons l'établir avec certitude, si nous estimons qu'ils présentent un risque sur le plan de la sécurité, s'ils constituent un danger pour le grand public ou s'ils risquent de ne pas se présenter à une audience ultérieure.
Encore une fois, nos agents jouent à la fois un rôle de facilitation et d'application de la loi, et ils peuvent être appelés à procéder à des arrestations dans ce contexte-là.
Vous vous demandez combien de temps tout cela prend. Eh bien, cela dépend beaucoup des gens que nous avons devant nous et de ce qu'ils viennent faire ici, de même que de l'information dont nous disposons sur eux quand ils arrivent. Par exemple, beaucoup d'entre eux ont déjà été vus à l'étranger par un agent des visas. Nous possédons donc certains renseignements sur eux et nous voulons simplement la confirmer. Mais, dans d'autres cas, il faut un travail plus intensif.
J'aimerais vous donner encore quelques statistiques sur le processus de détermination du statut de réfugié et les demandes que nous recevons en ce sens aux points d'entrée. En 2000, le Canada a reçu 37 800 demandes de gens qui arrivaient au Canada ou qui étaient déjà ici. En tout, 54 p. 100 de ces demandes ont été présentées à un point d'entrée, par des gens qui venaient d'arriver. De ce nombre, 64 p. 100 arrivaient des États-Unis. Donc, au total, il y a environ 40 p. 100 des gens qui nous arrivent des États-Unis quand ils nous présentent une demande, ce qui signifie qu'ils arrivent soit par un poste-frontière, soit à bord d'un avion en provenance des États-Unis.
En 2000, environ 54 p. 100 des gens qui ont réclamé la protection du Canada en tant que réfugiés ont présenté leur demande à un point d'entrée. Les 46 p. 100 restants ont présenté leur demande du Canada même, ce qui signifie qu'ils étaient déjà au pays. Ils avaient les documents nécessaires quand ils sont arrivés. Ils peuvent avoir eu des documents légitimes, ou peut-être—nous l'ignorons—de faux documents, mais ils ont présenté leur demande plus tard dans un bureau intérieur. Il y en a cependant 54 p. 100 qui ont fait leur demande à un point d'entrée.
Le président: J'aimerais avoir une précision. Vous avez dit que 54 p. 100 des demandes avaient été présentées à un point d'entrée. Et vous avez ajouté que 64 p. 100 des personnes en cause venaient des États-Unis.
Mme Elizabeth Tromp: C'est exact. Encore une fois, pour ce qui est des chiffres globaux, il y a un certain nombre de personnes qui n'ont pas les documents nécessaires quand elles arrivent, et il y en a beaucoup qui n'en ont pas du tout. Je vais vous parler un peu plus longuement dans un instant de la procédure que nous appliquons dans les cas de ce genre.
En fait, ce que nous avons toujours fait dans ces circonstances, c'est prendre les empreintes digitales, prendre des photos et remplir la paperasse préliminaire. S'il y a clairement un risque sur le plan de la sécurité, nous consultons les autorités compétentes et nous plaçons les gens en détention au besoin.
Ce que nous faisons depuis quelque temps—en fait, nous avons émis le 3 octobre des instructions à nos gens sur le terrain pour qu'ils mettent en place un processus plus complet de sélection préliminaire pour tous les revendicateurs du statut de réfugié au moment de leur arrivée. Cela signifie que l'examen personnel détaillé de tous les revendicateurs du statut de réfugié qui arrivent au Canada, afin de déterminer s'ils sont admissibles, est maintenant un élément clé de ce que nous allons faire—et de ce que nous faisons déjà. Nous allons prendre les empreintes digitales et des photos comme nous l'avons toujours fait.
Le président: Pour que nous comprenions bien ce qui se passe, pourriez-vous nous dire exactement, en quelques minutes, ce que vos agents faisaient avec les gens qui revendiquaient le statut de réfugié avant le 3 octobre, avant cette sélection préliminaire dont nous avons tous entendu parler et dont il est question dans le projet de loi C-11? Pouvez-vous nous dire aussi—pour mettre les choses en contexte—comment la directive du 3 octobre a changé tout cela?
Mme Elizabeth Tromp: Je pense qu'il est important de vous dire, pour commencer, que la différence dépend notamment du point d'entrée. À certains des points d'entrée où nous traitons des volumes très importants, le processus d'entrevues était souvent plus court qu'ailleurs. Nous prenions toujours les empreintes digitales et les photos, et nous recueillions toujours de l'information de base. La personne partait avec un questionnaire détaillé à remplir plus tard, et la longueur de l'entrevue initiale variait selon le point d'entrée.
Ce que nous avons mis en place, donc, c'est une entrevue détaillée obligatoire dès le début, pour recueillir de l'information—il y a une série de questions—sur l'admissibilité de la personne. Évidemment, en fonction des réponses à ces questions, l'agent peut décider d'aller plus loin et de poser des questions supplémentaires, par exemple sur la possibilité que des crimes aient été commis.
Ces questions visent à recueillir l'information fondamentale servant à établir le bien-fondé de la demande. Nous cherchons à savoir pourquoi cette personne craint de retourner dans son pays. Que la personne réponde ou non, cette information est recueillie et versée dans le dossier, qui est ensuite transmis à la CISR. C'est une recherche, une enquête, un examen beaucoup plus approfondi à l'arrivée.
Le président: Et c'est maintenant la norme à tous les points d'entrée?
Mme Elizabeth Tromp: C'est la norme partout. À certains endroits, nous avons quelques problèmes opérationnels, tout simplement parce que nous n'avons pas l'espace et l'infrastructure nécessaires pour faire face au volume des demandes. Mais nous y travaillons et, malgré ces difficultés opérationnelles, c'est maintenant la politique que nous appliquons partout.
M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Alliance canadienne): Pourrais-je poser une question complémentaire sur ce point précis?
Le président: Certainement.
M. Paul Forseth: Au moment de cette collecte d'information, est-ce que la personne en cause a le droit d'être représentée par un avocat?
Mme Elizabeth Tromp: Non.
M. Paul Forseth: D'accord. Est-ce que toute l'information recueillie peut être présentée plus tard ou s'il y en a une partie qui est jetée à la poubelle parce que les gens n'avaient pas le droit de se faire représenter par un avocat?
Mme Elizabeth Tromp: Non. Quand nous procédons à un interrogatoire à un point d'entrée—et les tribunaux l'ont confirmé—, premièrement, les gens n'ont pas le droit absolu à la représentation par avocat. Et le genre de questions que nous posons, pour déterminer si ces gens sont admissibles, se rattachent directement à la Loi sur l'immigration et aux pouvoirs que nous avons pour poser ces questions et recueillir cette information. Quant à savoir si cette information peut être contestée plus tard par le client... Je ne vous dirai pas que cela n'arrive jamais, mais cela fait partie de l'information que nous sommes parfaitement autorisés à recueillir.
M. Paul Forseth: Donc, à un moment donné, le demandeur peut voir l'ensemble du dossier parce qu'il a le droit de contester la décision au cours d'une audience.
Mme Elizabeth Tromp: Absolument. Tout ce que les gens disent... Il arrive souvent que leur histoire évolue entre le moment où ils se présentent au point d'entrée et celui où se tient leur audience, par exemple parce qu'ils avaient peur, parce qu'ils étaient stressés ou pour toutes sortes d'autres raisons. Il est certain que l'information que nous recueillons pour savoir s'ils sont admissibles nous aide à déterminer s'il s'agit de personnes que nous devrions garder en détention, qui pourraient présenter un risque quelconque, qui refusent de coopérer ou qui ne nous disent peut-être pas toute la vérité sur leur identité et sur la façon dont ils sont entrés au pays—autant d'indices qui peuvent nous laisser soupçonner autre chose. C'est cette information qui compose le dossier individuel résultant de l'évaluation initiale.
Mais vous avez raison. Toutes les décisions prises, par exemple au sujet de la détention de quelqu'un, toutes les décisions qui mènent à un rapport permettant de déclarer une personne non admissible—que ce soit à la suite d'une demande de reconnaissance du statut de réfugié ou dans un autre contexte, mais certainement pour des raisons comme la criminalité, par exemple—sont soumises à un arbitre.
Les demandeurs doivent aussi remplir un formulaire relativement détaillé, qui est ensuite transmis au SCRS pour qu'il fasse une vérification de sécurité complète. Encore là, comme vous le savez, c'est nouveau parce que, jusqu'à tout récemment, le SCRS effectuait une vérification de sécurité seulement lorsqu'une personne avait été acceptée comme réfugié et demandait le droit d'établissement. Comme nous l'avons déjà dit, cela a aussi été ramené au début du processus. Donc, nous allons recueillir cette information et la transmettre au SCRS beaucoup plut tôt dans le processus.
Une voix: Combien de temps faut-il pour recueillir cette information à l'intention du SCRS?
Le président: J'accepte les questions complémentaires, mais nous pourrions peut-être... Jerry, vous êtes le premier sur ma liste de toute façon. Alors, après...
D'accord, allez-y, Elizabeth.
Mme Elizabeth Tromp: J'allais demander à Beverley de vous parler brièvement des systèmes que nous avons aux points d'entrée et qui sont à la disposition des agents des douanes pour le premier interrogatoire. Ce n'est pas la même chose dans les postes- frontières terrestres et dans les aéroports, et c'est pourquoi j'ai pensé qu'il serait utile que vous sachiez de quelle information les agents disposent, sur place, pour les aider à décider s'ils doivent admettre les arrivants ou les envoyer subir un interrogatoire complémentaire.
Le président: Certainement.
Mme Beverley Boyd (directrice, Conception et élaboration des programmes des voyageurs, Agence des douanes et du revenu du Canada): Tout d'abord, je voudrais vous dire en guise de préface que nous prenons extrêmement au sérieux nos rôles et nos responsabilités d'agents d'immigration. En fait, nos agents sont formés par le ministère de l'Immigration, et c'est le genre de questions que nous posons d'abord et avant tout au moment du premier interrogatoire au point d'entrée.
Quand un voyageur qui veut entrer au Canada arrive dans un aéroport, nous devons lui demander une déclaration écrite; cela fait partie des exigences relatives à l'importation de marchandises. En fait, tous les voyageurs doivent remplir une formule E311 à bord de l'avion. Cette formule permet de recueillir des renseignements comme leur nom, leur date de naissance et leur citoyenneté, et de savoir s'ils ont quelque chose à déclarer. C'est le même genre de questions que celles que nous posons aux postes- frontières terrestres, où nous n'utilisons pas ce document.
Donc, en gros, quand vous arrivez au Canada, vous rencontrez d'abord des agents des douanes, à qui vous devez remettre votre E311. Ils vous demandent ensuite vos papiers comme preuve de citoyenneté. Nous avons aux points d'entrée, dans les aéroports, des lecteurs de documents dans lesquels nous pouvons faire passer votre passeport, votre carte d'identité avec photo, votre certificat de naissance ou tout autre document que vous nous fournissez comme preuve de citoyenneté, pour déterminer si le document est en règle et si votre nom, votre date de naissance et tous les autres éléments sont exacts.
Nous comparons ensuite cette information avec notre Système intégré de gestion de la ligne d'inspection primaire pour voir si—que ce soit dans notre système ou dans celui des services d'immigration, auquel nous sommes reliés en temps réel—pour voir, donc, si vous faites l'objet d'un avis de signalement pour des motifs touchant l'immigration, ou s'il existe une raison pour laquelle nous devrions vous interroger ou vous diriger vers les services d'immigration.
• 0930
Nous avons aussi accès au Système intégré d'exécution des
douanes. Donc, encore là, si nous apprenons que vous faites l'objet
d'un avis de signalement grâce aux renseignements que nous recevons
de nos autres partenaires—par exemple les douanes américaines, les
services d'immigration américains ou un corps policier—, nos
agents peuvent se fonder sur cette information pour décider de vous
envoyer subir un interrogatoire complémentaire.
Tout cela est relié à nos systèmes pour le premier interrogatoire au point d'entrée. Donc, nos agents peuvent aussi se fonder sur ces données électroniques pour prendre leurs décisions. Ils posent également des questions aux voyageurs. Ils peuvent vérifier leurs papiers pour savoir depuis combien de temps ils sont partis, dans le cas des résidents qui rentrent au pays; s'ils ont des marchandises à déclarer; et, dans le cas de non-résidents qui arrivent au Canada, quel est le but de leur visite. Encore là, leurs réponses aux questions de ce genre permettent de déterminer s'ils doivent ou non subir un deuxième interrogatoire. S'ils sont ici pour affaires, nous allons leur demander si c'est pour travailler ici ou s'ils sont simplement en voyage. Selon leur réponse, encore une fois, nous déterminerons si nous devons les diriger vers les services d'immigration ou les envoyer subir un deuxième interrogatoire des douanes.
Comme je l'ai dit, si un des systèmes—le système électronique ou le lecteur de passeports—ne fonctionne pas, nous pouvons aussi inscrire les noms manuellement dans le système. Les vérifications de sécurité se font alors automatiquement.
Le président: Sur le plan technologique, Beverley, vous dites que ce lecteur de passeports est directement relié à notre base de données, ici au Canada, et à celle qui pourrait exister aux États- Unis?
Mme Beverley Boyd: Non, il est relié à nos bases de données. Mais si les services d'immigration américains ont lancé un avis de signalement, il figure dans la base de données du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration; donc, nous le savons.
Le président: D'accord. Et s'il n'y a rien, de toute évidence, c'est qu'il n'y a pas d'avertissement particulier.
Mme Beverley Boyd: En effet.
Le président: D'accord.
Mme Beverley Boyd: Comme Elizabeth l'a mentionné, le processus est un peu différent dans les postes-frontières terrestres parce que nous n'exigeons pas de déclaration écrite à l'avance. Donc, quand vous arrivez à un point d'entrée, le douanier préposé au premier interrogatoire devra vous poser les questions suivantes: Quelle est votre citoyenneté? Où habitez-vous? Quel est le but de votre visite si vous n'êtes pas résident? Nous demandons tous ces renseignements.
En même temps, ce que nous avons là pour soutenir nos systèmes, c'est un lecteur de plaques d'immatriculation. C'est ce que nous appelons le Système automatisé de surveillance à la ligne d'inspection primaire. C'est un système qui permet de lire les plaques d'immatriculation des véhicules. Une fois les renseignements qui vous concernent—par exemple votre nom de famille et vos initiales—entrés dans notre système, les vérifications se font là encore automatiquement. Le système va consulter notre Système intégré d'exécution des douanes pour savoir s'il y a un avis de signalement à votre sujet. Il va également se connecter au Système de soutien aux opérations des bureaux locaux, le système de Citoyenneté et Immigration. Encore là, s'il y a un avis de signalement ou s'il faut vous faire subir un deuxième interrogatoire pour toute autre raison, les agents le voient à l'écran. Comme je l'ai déjà dit, ils peuvent poser des questions complémentaires et, à partir de vos réponses à ces questions, ils déterminent s'ils doivent vous diriger vers les services d'immigration ou vers un deuxième interrogatoire des douanes.
Donc, nous n'avons pas de lecteurs de documents aux postes- frontières terrestres.
Le président: Est-ce que vous vérifiez absolument toutes les plaques d'immatriculation dans les longues files d'attente aux frontières?
Mme Beverley Boyd: Oui. En fait, nos agents ont reçu l'ordre...
Le président: Vous devez avoir de très bonnes caméras.
Mme Beverley Boyd: Oui.
Le président: Je me suis déjà trouvé dans des files de ce genre. Je ne savais pas que vous lisiez ma plaque.
Mme Beverley Boyd: Si le système ne peut pas lire votre plaque d'immatriculation pour une raison ou pour une autre, le douanier doit inscrire le numéro manuellement.
Le président: Évidemment, puisque la plupart des gens qui arrivent au Canada viennent des États-Unis, il doit bien y avoir un lien avec le système d'immatriculation américain. Autrement, si quelqu'un du Michigan ou de l'État de New York entre au Canada, comment pouvez-vous lire ses plaques?
Mme Beverley Boyd: Nos lecteurs sont programmés pour lire les plaques de tous les États, ou plus particulièrement celles des États frontaliers. Encore une fois, si vous arrivez à un poste- frontière à Niagara et que vous venez du Texas, notre lecteur ne pourra pas lire votre plaque automatiquement. Il n'est pas programmé pour cela. Le douanier devra inscrire manuellement votre numéro de plaque.
Mme Elizabeth Tromp: Excusez-moi, je voulais conclure notre déclaration préliminaire.
Il est évident que les services des douanes et de l'immigration travaillent en très étroite collaboration et qu'ils doivent entretenir des liens suivis à tous les niveaux pour que le système fonctionne. Comme l'a dit Beverley, nous offrons une formation à tous les agents des douanes. Il y a beaucoup d'initiatives pour bâtir des liens aux points d'entrée et pour continuer à fournir aux agents des douanes de l'information sur les tendances, les choses à surveiller, et ainsi de suite. C'est une relation à laquelle nous consacrons beaucoup d'énergie, et nous allons continuer à le faire.
Le président: D'accord. Nous allons maintenant passer aux questions.
Paul.
M. Paul Forseth: J'en ai une seule, et elle sera brève.
Le président: Je propose un rapide tour de table plutôt qu'une séance de questions structurée de dix minutes par député. Nous pourrons poser plus de questions.
M. Paul Forseth: Les agents des douanes ont fait beaucoup de commentaires. Ils veulent changer l'organisation à laquelle ils appartiennent. J'imagine que vous l'avez entendu dire, notamment de la part des représentants syndicaux.
Est-ce que les agents d'immigration ont des préoccupations du même genre, en ce qui concerne la possibilité de changer l'organisation pour qu'elle soit orientée davantage vers l'application de la justice, ou même de regrouper en un genre d'unité opérationnelle les agents des douanes et de l'immigration qui travaillent en première ligne? Pouvez-vous commenter les déclarations qui ont paru dans les médias?
Mme Elizabeth Tromp: Pas vraiment. Les choses fonctionnent de cette façon-là depuis 1967, je pense. Les douaniers procèdent à l'interrogatoire primaire, et les agents d'immigration s'occupent des interrogatoires complémentaires.
Il est certain que les agents d'immigration, comme je l'ai déjà dit, jouent un double rôle aux points d'entrée. Ils ne sont pas là seulement pour appliquer la loi; ils doivent aussi faciliter l'entrée au Canada, accueillir les gens chez nous. Nous sommes fiers de notre tradition d'accueil des immigrants, des réfugiés et des visiteurs. C'est un élément important du travail qui se fait aux points d'entrée, en plus du travail touchant les personnes non admissibles.
Je sais qu'il y a eu des commentaires. Nous continuons à écouter nos employés et à travailler avec eux pour régler certains problèmes.
Tony, avez-vous quelque chose à ajouter?
M. Tony Smith (directeur, Gestion des points d'entrée, Direction générale de l'exécution de la loi, Citoyenneté et Immigration Canada): Oui, merci.
Permettez-moi tout d'abord de me présenter. Je m'appelle Tony Smith et je suis responsable des points d'entrée et des postes- frontières pour CIC. En fait, je suis ici dans le cadre d'un échange avec les services d'immigration britanniques. J'apporte au débat une trentaine d'années d'expérience dans le domaine de l'immigration et de la gestion des frontières, dont une seulement au Canada; j'ai fait le reste de ma carrière au Royaume-Uni. Avant de venir ici, j'ai été notamment directeur de l'aéroport de Heathrow.
Vous faites bien de poser la question des rapports entre Douanes Canada et Immigration Canada. Nous y travaillons très fort. J'ai été frappé de constater qu'il s'agissait d'une question à laquelle nos agents, aux points d'entrée, accordaient une importance primordiale. Nous avons tenu l'an dernier une conférence sur les points d'entrée, un peu après mon arrivée ici, et nous avons demandé aux agents de nous faire part de leurs préoccupations. Cette question en faisait partie. Beverley et moi avons participé régulièrement à des rencontres entre les deux organisations.
En fait, j'ai amené une équipe des services d'immigration à Surrey au mois de mai pour rencontrer le groupe de travail national de Douanes Canada sur la frontière terrestre. Nous sommes aussi allés rencontrer le groupe de travail de Douanes Canada sur les aéroports à Montréal. Et les gens de Douanes Canada ont assisté à la réunion de notre groupe national. Nous sommes par ailleurs en train d'élaborer un nouveau protocole d'entente. Le dernier remonte à 1983. Le nouveau devrait être signé sous peu. Il permettra de redéfinir nos rapports et de les préciser.
Il y a eu des investissements importants des deux côtés, aux niveaux national et régional, ainsi qu'au niveau des points d'entrée. Quand vous ferez la tournée des points d'entrée, j'ai l'impression que les agents des douanes et ceux de l'immigration voudront vous parler de cette question. C'est quelque chose qui se fait à peu près uniquement au Canada, pour ce qui est de la façon dont les mesures de contrôle sont structurées.
Au cours de la dernière année, nous avons réussi à resserrer considérablement notre coopération à tous les niveaux, que ce soit aux points d'entrée ou au niveau régional, ainsi qu'aux administrations centrales, et nous avons investi mutuellement dans le programme d'immigration. Nous allons continuer à travailler avec les gens des Douanes et à développer nos programmes pour voyageurs avec eux.
Le président: Naturellement, vous êtes venu du Royaume-Uni pour apprendre ce qui se fait de mieux au Canada et le rapporter chez vous.
Je suis déjà passé par Heathrow. Pouvez-vous nous donner une petite idée de ce qui se fait aux États-Unis, ou encore au Royaume- Uni, en termes de systèmes? Est-ce qu'il y a un système similaire? Est-ce que ce sont les agents des douanes qui commencent, et qui laissent ensuite la place à ceux de l'immigration? Vous pourriez peut-être nous expliquer rapidement quel pourrait être le système aux États-Unis ou au Canada.
M. Tony Smith: Oui, certainement, monsieur le président.
Je ne peux pas vous dire grand-chose sur ce qui se fait actuellement aux États-Unis. Je connais un peu les systèmes américains. Nous avons des groupes de travail qui sont en relation avec les services d'immigration américain.
Quant au système britannique, il est fortement influencé par les dispositions des lois européennes sur la libre circulation des biens et des personnes. Par exemple, le Royaume-Uni souscrit depuis le début des années 70 au principe de la libre circulation des biens en Europe. Par conséquent, la nécessité d'un contrôle douanier primaire est beaucoup plus limitée.
Pour ce qui est des personnes, le Royaume-Uni reconnaît que les citoyens européens sont libres de circuler en Europe. Donc, si vous étiez un citoyen européen arrivant à Heathrow, vous trouveriez probablement le contrôle très léger. Vos papiers seraient examinés très rapidement au contrôle d'immigration, et c'est tout. Ce sont les services d'immigration qui procèdent au premier interrogatoire au Royaume-Uni.
Le contrôle douanier se fait par voie d'auto-évaluation, grâce à ce que nous appelons la file rouge et la file verte. Vous faites votre déclaration avec vos pieds, si on peut dire, en vous plaçant dans la file verte si vous n'avez rien à déclarer aux douanes, ni marchandises autorisées, ni objets de contrebande. Mais si vous en avez en votre possession et que vous vous faites prendre dans la file verte, vous serez immédiatement considéré comme quelqu'un qui n'a pas respecté le règlement.
Les mesures de contrôle et les volumes sont très différents là-bas. L'aéroport de Heathrow est le plus occupé au monde, et les volumes y sont importants. Je pense que, si le Royaume-Uni décidait d'adopter le système canadien, ou même le système américain, et d'interroger tous les voyageurs qui arrivent, l'aéroport serait très rapidement immobilisé. La principale différence, c'est la dimension européenne, c'est-à-dire le fait qu'une forte proportion des voyageurs sont européens.
Pour ce qui est des citoyens nord-américains—canadiens ou américains—qui arrivent au Royaume-Uni, ils doivent être interrogés par un agent des services d'immigration britanniques, qui ont leur propre système de signalement. Mais leurs questions portent strictement sur les questions d'immigration. Ils vérifient les passeports, et demandent aux voyageurs combien de temps ils doivent séjourner au Royaume-Uni et pour quelle raison. Et ils les laissent généralement entrer ensuite sans autre vérification.
Au-delà de cet examen primaire, les agents d'immigration chargés de l'examen secondaire s'occupent seulement des gens dont le cas semble douteux ou préoccupant sur le plan de l'immigration. C'est pour cette raison qu'on les envoie subir un examen secondaire de l'immigration. Le contrôle douanier arrive un peu plus tard dans le processus. Je pense que c'est la principale différence.
Je suis désolé, monsieur le président, mais je ne peux pas vraiment vous dire grand-chose d'utile au sujet du système américain. Aux États-Unis, ce sont les services d'immigration qui sont en première ligne. Je suppose que c'est la principale différence. Le contrôle douanier est aussi très rigoureux aux États-Unis. Il y a des douaniers américains à certains des points d'entrée terrestres, qui procèdent à l'interrogatoire primaire aux côtés des agents d'immigration. Je dirais que le système américain est probablement plus proche du système canadien que du système européen.
Merci.
Le président: Merci beaucoup, Tony. Vos explications sont très utiles.
Art, vous voulez poser une question?
M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Alliance canadienne): Merci d'être venus rencontrer le comité.
Je suis toujours intéressé. Quand on se rapproche du terrain, évidemment, on obtient toujours un point de vue différent de celui, par exemple, des...
Le président: Des supérieurs hiérarchiques.
M. Art Hanger: ... des supérieurs hiérarchiques qui donnent les directives.
• 0945
Un des membres de notre parti se trouvait à un poste-frontière
il y a quelques semaines et il a vu une note de service ordonnant
aux agents de première ligne de ne parler à personne de leurs
préoccupations. En fait, on y disait très clairement qu'ils ne
devaient pas faire part de leurs opinions aux députés, et surtout
pas à ceux de notre parti, qui forme l'opposition.
J'aimerais bien savoir pourquoi une directive comme celle-là a été rédigée. Cette question a d'ailleurs été posée à la ministre pendant la période des questions. Mais je serais curieux de savoir pourquoi une directive de ce genre a pu être distribuée, compte tenu du fait que la sécurité préoccupe tout le monde et que, s'il y a un problème, il faut essayer de le régler plutôt que de le cacher. J'aimerais bien savoir ce que vous avez à répondre à ce genre de directive.
Mme Elizabeth Tromp: Je vous répondrai pour commencer que je ne sais pas exactement de quelle directive vous voulez parler...
M. Art Hanger: Elle est datée du mois d'août et a été distribuée aux agents des douanes.
Mme Elizabeth Tromp: C'est peut-être une des raisons pour lesquelles je n'en ai pas eu connaissance personnellement. Beverley, vous n'avez pas entendu parler de cette directive non plus?
Nous devons nous excuser, mais nous allons certainement vérifier.
Le président: En avez-vous un exemplaire?
M. Art Hanger: Je ne l'ai pas ici, personnellement, mais je pense que nous pourrions en obtenir un. Myron Thompson en a un. Vous aimeriez le voir?
Mme Elizabeth Tromp: Oui.
Le président: J'aimerais bien le voir moi aussi.
Passons à la question suivante.
M. Art Hanger: J'aimerais avoir une petite précision. Environ 2 p. 100 des voyageurs sont dirigés vers les services d'immigration, ce qui fait vraiment pas mal de monde quand on pense qu'il y a—combien de voyageurs? Un million et demi? Est-ce que cela inclut tous ceux qui revendiquent le statut de réfugié?
Mme Elizabeth Tromp: Oui.
M. Art Hanger: Et cela inclut aussi tous les voyageurs dont les papiers soulèvent des interrogations?
Mme Elizabeth Tromp: En effet.
M. Art Hanger: J'aimerais que nous parlions des réfugiés. Il y a eu 37 800 demandes de reconnaissance du statut de réfugié en 2000. Je présume que c'était à nos points d'entrée?
Mme Elizabeth Tromp: C'est le nombre total. Comme je l'ai déjà expliqué, 54 p. 100 de ces demandes ont été présentées aux points d'entrée. Je sais que j'ai le chiffre quelque part.
M. Art Hanger: Alors, où les autres...
Mme Elizabeth Tromp: Les autres ont présenté leur demande alors qu'ils se trouvaient déjà au pays. Autrement dit, ils se sont présentés à un de nos bureaux intérieurs et ont dit qu'ils voulaient présenter une demande, ou alors ils ont téléphoné pour dire qu'ils revendiquaient le statut de réfugié au Canada.
M. Art Hanger: Et qu'en est-il des réfugiés parrainés par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés? Combien le Canada en reçoit-il?
Mme Elizabeth Tromp: Je pense que nous en recevons autour de 7 000 à 8 000 par année.
Le président: Ils sont parrainés par le gouvernement, ce qui veut dire que nous faisons les vérifications nécessaires à l'étranger.
Mme Elizabeth Tromp: C'est exact.
M. Art Hanger: Je connais la différence.
Le président: J'aimerais avoir une précision sur une question qu'Art vous a posée. Vous avez dit que 54 p. 100 des 37 800 demandeurs avaient présenté leur demande à leur arrivée à un point d'entrée: un aéroport, un port ou un poste-frontière. Les 46 p. 100 restants ont présenté leur demande alors qu'ils étaient déjà au Canada...
Mme Elizabeth Tromp: C'est exact.
Le président: ... et ils étaient entrés ici pour une autre raison, par exemple comme touristes ou parce qu'ils avaient un visa quelconque. C'est du moins ce qu'on peut supposer, et par la suite... Ils peuvent être ici depuis une semaine, une journée, un an, ou peut-être six mois ou trois mois, après quoi ils arrivent tout à coup à un bureau intérieur et disent qu'ils veulent obtenir le statut de réfugié. C'est bien ça?
Mme Elizabeth Tromp: C'est bien ça.
M. Art Hanger: Merci, monsieur le président, c'était une précision importante.
Alors, je suis curieux. Sur ces 37 800 personnes, combien y en a-t-il qui n'avaient pas de papiers?
Mme Elizabeth Tromp: Autour de 40 p. 100, en fait.
M. Art Hanger: Un peu moins de la moitié, donc. Sur ces 37 800 personnes, il y aurait à peu près 20 000, ou plutôt 18 000 sans papiers?
Mme Elizabeth Tromp: C'est beaucoup, et c'est un problème important, bien sûr.
M. Art Hanger: Oui. Je vois que vous avez beaucoup de problèmes sur les bras puisque vous n'avez que 426 agents d'immigration. Est-ce que c'est aux frontières?
Mme Elizabeth Tromp: Oui, c'est aux points d'entrée.
M. Art Hanger: Donc, cela concerne strictement le ministère de l'Immigration?
Mme Elizabeth Tromp: Oui.
M. Art Hanger: Mais, même pour vérifier le cas de tous ces gens—il y en a 2 p. 100 qui se retrouvent devant les agents d'immigration, après l'interrogatoire primaire dont vous nous avez parlé?
Mme Elizabeth Tromp: En effet. Cela représente environ deux à trois millions de personnes.
M. Art Hanger: Où prenez-vous la main-d'oeuvre nécessaire, et comment pouvez-vous mener une enquête approfondie sur ces gens-là? Je ne comprends pas comment vous pouvez y arriver. Mais vous pouvez le faire?
Mme Elizabeth Tromp: Je pense que oui. Il est certain que les ressources posent toujours un problème, tout comme les délais d'attente avant que les gens puissent être vus. À certains points d'entrée particulièrement occupés, c'est souvent là que nous prenons des raccourcis quand les choses se précipitent, mais je dirais que oui. Je vous signale cependant que la ministre a annoncé l'ajout de 100 agents aux points d'entrée à la suite des événements du 11 septembre. Ce sont des agents qui s'ajouteront à notre contingent et qui nous aideront beaucoup pour la sélection de première ligne dont je vous ai parlé tout à l'heure. Encore une fois, il s'agit d'une entrevue assez fouillée, qui prend beaucoup de personnel de première ligne.
Le président: Art, pouvez-vous attendre une petite minute?
M. Art Hanger: Certainement. Allez-y.
Le président: Jerry, et puis Madeleine.
M. Jerry Pickard (Chatham—Kent Essex, Lib.): Je voulais que nous parlions aussi des réfugiés, parce qu'il a souvent été question au cours des quelques dernières semaines de ce que nous pourrions faire grâce à nos nouveaux règlements, de ce que nous devons faire pour ce qui est du sort des réfugiés et de ce qui se passe dans ces cas.
La discussion a souvent porté sur les avions, sur le fait que les gens sont munis de papiers quand ils montent dans l'avion. Quelque part à bord de l'avion, les documents disparaissent. La personne qui n'a plus de papiers lorsqu'elle descend de l'avion alors qu'elle en avait lorsqu'elle y est montée avait de toute évidence des raisons de s'en débarrasser, ce qui nous amène à nous poser encore plus de questions au lendemain des événements du 11 septembre. J'aimerais savoir ce que vous faites dans ces cas-là.
Ma deuxième question est la suivante. Lorsqu'une personne arrive au Canada, différentes choses peuvent lui arriver si elle réclame le statut de réfugié. Après l'entrevue détaillée, une décision est prise. On pourrait décider de détenir l'intéressé, de ne pas l'autoriser à entrer au Canada ou encore de le laisser aller. La question que je me pose, c'est que si on décide qu'une personne n'est... Et je sais qu'en vertu de la nouvelle législation, la ministre aurait le droit de refuser à un demandeur l'entrée au Canada sans plus attendre si elle le jugeait nécessaire. Du moins, je crois comprendre que la ministre peut prendre une décision lorsqu'une personne arrive au Canada.
Premièrement, si une personne n'est pas autorisée à entrer au Canada, que faites-vous d'elle? Deuxièmement, qu'arrive-t-il si vous vous apercevez que l'intéressé n'a pas de papiers? Je pense que par le passé nous n'avons pas automatiquement détenu ces personnes, mais est-ce qu'on n'insiste pas plus là-dessus en ce moment pour que le public sache bien à quel point la sécurité est importante? Dans ce cas, j'imagine qu'il faut examiner soigneusement d'autres mesures.
J'aimerais donc que vous me disiez ce qui se passe quand les documents ont disparu, ce que vous faites lorsque vous doutez de l'admissibilité du demandeur au statut de réfugié.
Le président: Je pense que ce sont là des questions très pertinentes, mais vous pourriez les reprendre une à une, et peut-être que Beverley ou Tony ou vous-même voudrez nous éclairer. Parmi ces gens, 40 p. 100 arrivent actuellement sans documents. Pouvez-vous assurer le comité que tous ceux qui arrivent sans documents vont en fait non seulement à la première entrevue, mais aussi à la deuxième entrevue? Donc, parmi les 2 p. 100 dont Art a parlé, voulez-vous dire que tous ceux qui ne sont pas munis de papiers vont au moins à cette entrevue, à cette entrevue détaillée?
Mme Elizabeth Tromp: Absolument.
Le président: Vous pourriez peut-être commencer par cela, parce que je pense que Jerry a soulevé certaines questions.
M. Jerry Pickard: Je les ai soulevées, parce que bien des gens ont dit, et vous le savez comme moi, que des demandeurs arrivent ici, détruisent leurs papiers ou se les font enlever, se présentent dans nos centres, passent une entrevue et sont mis en liberté dans nos rues. C'est ce que certains ont affirmé et ce que d'autres ont contesté, et je pense que nous devons avoir une réponse.
• 0955
C'est à cela que je veux en venir. Voyons ce qui se passe—ce
que nous pouvons faire et ce que nous avons comme moyens d'action.
Si des changements s'imposent, nous verrons en quoi ils consistent
d'après les commentaires qui auront été faits.
Le président: Commençons par le moment où une personne se présente devant les collègues de Beverley sans aucun document. Où sont passés les documents? Le comité a discuté pendant des heures jusqu'à l'écoeurement des documents et de la façon dont ils semblent disparaître entre le moment où l'intéressé monte à bord de l'avion et celui où il en descend. Je sais qu'il est question dans notre projet de loi de la documentation et des documents falsifiés de même que de la possibilité d'exiger des compagnies aériennes et des navires—les transporteurs—qu'ils assument une certaine responsabilité. Mais prenons une personne qui n'est munie d'aucun papier. Quel genre de questions lui pose-t-on?
Mme Elizabeth Tromp: D'accord. J'aimerais cependant revenir un peu en arrière. Je sais que ce qui vous intéresse, c'est le point d'entrée, mais je pense qu'il est important de le replacer dans un contexte plus vaste—ce qui se passe outre-mer avant que l'intéressé monte à bord de l'avion...
Le président: Quand même.
Mme Elizabeth Tromp: ... parce que c'est une question importante, bien sûr. C'est une question importante pour nous et pour d'autres pays. Ce phénomène est en grande partie relié au trafic de migrants et s'explique par le fait qu'on dit aux gens, que ce soit dans l'intention de nuire ou non, que c'est ainsi qu'ils devraient procéder: ils ne devraient rien dire de la façon dont ils sont arrivés ici et cacher leurs documents.
Mais la présélection commence outre-mer. Nous avons, comme vous le savez, un très bon programme d'interception. Nous avons à l'étranger des contrôleurs de l'immigration qui travaillent avec les compagnies aériennes. Les compagnies aériennes passent les passagers au crible avant qu'ils montent à bord des avions à destination du Canada. Nous interceptons chaque année des milliers de passagers—et je peux vous donner le chiffre exact—qui ne sont pas munis des documents exigés et qui ne peuvent donc pas monter à bord des avions en partance pour le Canada.
Si, comme vous le dites, un passager arrive à destination sans être muni des documents exigés, c'est la compagnie aérienne qui est responsable. Elle est passible de droits et elle est responsable du renvoi de cette personne du Canada si celle-ci, après s'être soumise à la procédure, est déclarée inadmissible. Il y a donc en place des mécanismes de vérification. Des dispositions sont prévues afin que les compagnies de transport puissent être tenues responsables dans pareilles circonstances. Nous travaillons en collaboration très étroite avec les transporteurs à tous ces égards.
Maintenant, pour ce qui est de la personne qui arrive sans documents, il peut y avoir un problème non seulement parce qu'elle ne peut pas prouver qui elle est au premier interrogatoire au point d'entrée, mais aussi parce qu'elle peut refuser de dire d'où elle vient. Pour nos besoins, pour déterminer quel transporteur aérien est responsable et pour des raisons de sécurité, il est normal que nous voulions savoir comment la personne en question est arrivée jusque là.
C'est pourquoi nous avons des contrôles au débarquement dans tous nos grands aéroports. Cela veut dire que nous avons des équipes qui vont à la rencontre de l'avion. Au moment où les passagers débarquent de l'avion ou parfois même quand ils sont à bord de l'avion, l'équipe demandera à voir leurs documents. Donc, s'ils se sont débarrassés de leurs documents avant de monter à bord de l'avion, nous saurons au moins avec quel transporteur aérien ils ont voyagé ou, s'ils ne s'en sont pas encore débarrassés, nous pourrons les empêcher de le faire avant le premier interrogatoire au point d'entrée. Nous avons donc pris différentes mesures pour essayer de régler le problème.
Et, franchement, cela fonctionne bien dans nos aéroports. Bien entendu, le défi est plus grand lorsque quelqu'un se présente à un point frontalier ou fait une demande au Canada même sans être muni des documents nécessaires. Mais nous faisons d'énormes progrès dans le cas de nos aéroports.
La personne arrive au premier interrogatoire au point d'entrée sans documents, demande ou non le statut de réfugié et subit immédiatement un deuxième interrogatoire de l'Immigration. À ce moment-là, elle rencontrera un agent qui lui fera passer un examen pour voir si elle peut être admise au Canada. Sa demande sera déclarée inadmissible si elle ne dit pas craindre pour sa vie ou pour sa sécurité. Elle n'a pas les documents qu'il faut pour entrer au Canada. En fait, lorsque les choses sont aussi claires, l'agent d'immigration supérieur peut déterminer que cette personne ne peut pas être admise au Canada. Elle est donc frappée d'exclusion du Canada. Une ordonnance d'expulsion, qui est une sorte d'ordonnance de renvoi, est rendue contre elle. On peut la renvoyer à bord du prochain vol de retour disponible. Le transporteur aérien a la responsabilité de ramener cette personne. Elle ne peut pas revendiquer le statut de réfugié.
Le président: Si nous ne renvoyons pas ces personnes à bord du prochain avion, est-ce que nous les détenons?
Mme Elizabeth Tromp: Elles sont souvent détenues brièvement jusqu'au prochain vol, oui.
Le président: D'accord.
M. Jerry Pickard: Est-ce qu'elles sont autorisées à circuler librement dans nos rues? C'est l'accusation qui a été portée à maintes et maintes reprises. Est-ce qu'un grand nombre de ces personnes sont libérées?
Mme Elizabeth Tromp: Étant donné les brefs délais d'exécution, je dirais que non. Ces personnes sont détenues très brièvement jusqu'à ce que nous soyons en mesure de leur trouver un avion et de les renvoyer. Je le répète, nous ne parlons pas ici des revendicateurs du statut de réfugié pour qui la situation est différente. Nous parlons des personnes jugées inadmissibles à leur arrivée à un point d'entrée sans les documents exigés. Ces personnes ne sont pas autorisées à entrer au Canada et la vaste majorité d'entre elles sont renvoyées dans de très brefs délais.
M. Jerry Pickard: Qu'est-ce qui arrive aux revendicateurs du statut de réfugié?
Mme Elizabeth Tromp: De toute évidence, nous n'avons pas les mêmes mesures à notre disposition dans le cas des demandeurs du statut de réfugié. Si une personne dit craindre d'être persécutée, nous ne pouvons pas la refouler et la renvoyer dans un pays où elle pourrait être persécutée. Lorsque quelqu'un demande à être protégé comme réfugié, nous sommes obligés d'examiner sa demande. Tant que nous n'avons pas examiné soigneusement cette demande, le Canada ne peut pas renvoyer son auteur.
Dans ces circonstances, comme je l'ai dit tout à l'heure, nous ferions passer une entrevue—une entrevue très détaillée—à chaque revendicateur du statut de réfugié. Nous demanderions à chacune de ces personnes, si elle n'a pas de documents, comment elle est arrivée ici, qui elle est et ainsi de suite. Nous lui demanderions de nous fournir ce qu'elle peut. Nous lui poserions des questions sur ses antécédents et ainsi de suite. Nous prendrions ses empreintes digitales et sa photographie. Nous nous servirions de ces documents pour déterminer si cette personne nous est connue, peut-être parce qu'elle a déjà revendiqué le statut de réfugié et qu'elle s'essaie de nouveau, ou qu'elle est connue de la GRC parce qu'elle a déjà commis un crime ou pour d'autres raisons. C'est là le but de l'entrevue.
Après cette entrevue, un agent doit décider s'il faut libérer cette personne et à quelles conditions. C'est ce que les agents font tous les jours; ils prennent ce genre de décision. Ils sont toujours sur le qui-vive et disposent des renseignements les plus à jour sur ce qu'ils doivent surveiller ou sur ce qui devrait les préoccuper. S'ils ont des doutes ou ont l'impression que quelque chose cloche, ils font appel au SCRS ou à la GRC qui soumettront l'individu à des interrogatoires plus poussés.
Cette collaboration étroite nous aide à identifier les personnes à risque élevé. Ce n'est pas le cas de la majorité. Je pense que c'est quelque chose que nous comprenons tous. Nous devons nous assurer que nous posons suffisamment de questions assez poussées pour que les agents puissent prendre une décision en toute connaissance de cause. Est-ce quelqu'un qu'il faut détenir jusqu'à ce que son identité ait été confirmée? Y a-t-il des risques possibles? Avons-nous des raisons de croire que cette personne ne comparaîtra pas? Peut-être que s'il s'agit de quelqu'un qui nous est connu, qui s'est retrouvé ici de nombreuses fois déjà, qui a l'habitude de ne pas comparaître aux audiences ou de se soustraire à la procédure de renvoi, nous pourrions aussi être portés à croire qu'il faut détenir cette personne. Toutes ces choses ressortiraient. Puis, une décision serait prise.
Le président: Madeleine est la prochaine, à moins que cela ait à voir avec la même question.
M. Jerry Pickard: Tout à fait. Ma question avait avoir avec les réfugiés.
Le président: D'accord, allez-y, pour une question supplémentaire.
M. Jerry Pickard: Prenons un réfugié—en supposant encore une fois qu'il y a trois solutions possibles. Il est arrivé sans papiers et a demandé le statut de réfugié. Il est arrivé à un point d'entrée et ses documents ont disparu quelque part.
Mme Elizabeth Tromp: D'accord.
M. Jerry Pickard: Nous nous sommes laissé dire que plus souvent qu'autrement un tel réfugié est libre d'aller et venir. Vous savez qu'il a décidé de cacher quelque chose étant donné que ses papiers ont disparu. Avez-vous une idée du pourcentage? Un grand nombre de ces demandeurs se présentent à nos frontières ou à nos points d'entrée sans papiers. Nous avons la responsabilité de nous assurer qu'ils sont en sécurité. Je ne trouve rien à redire à cela. Mais je m'interroge sur le sort qui est réservé à ces demandeurs. Un certain nombre d'entre eux sont détenus, un certain nombre sont renvoyés et un certain nombre sont libérés. Avez-vous une idée des chiffres?
Mme Elizabeth Tromp: Eh bien, je peux vous dire que dans le contexte de la revendication du statut de réfugié, la détention n'est pas la décision qui est prise dans la majorité des cas. C'est la solution qui est retenue dans une toute petite minorité des cas.
M. Jerry Pickard: Je ne parle que des demandeurs qui n'ont pas les documents voulus. Je suis préoccupé par la question des documents dans les cas où on sait que quelqu'un a fait quelque chose qui n'est pas très catholique: se débarrasser des documents entre le point de départ et le point d'entrée.
Mme Elizabeth Tromp: Oui. Comme je vous l'ai expliqué, nous agissons selon le cas, nous examinons tous les facteurs et toute l'information qui a été recueillie durant l'examen, qui permettraient à l'agent de prendre ce genre de décision. Nous n'avons pas de directive générale qui nous oblige à détenir tous ceux qui se présentent sans documents. L'agent procède à une évaluation des risques au cas par cas et recueille toute l'information nécessaire avant de prendre une décision.
Encore une fois, si quelqu'un n'a pas de documents et se montre récalcitrant—peu obligeant—nous pourrions être portés à croire qu'il a quelque chose d'autre à cacher. Cela nous ferait peut-être opter pour la détention dans ce cas—du moins jusqu'à ce que nous connaissions l'identité de la personne, que nous pensions ou non que quelque chose d'autre pourrait entrer en jeu.
Je peux vous dire que nous ne prenons aucun risque s'il s'agit de quelqu'un qui peut présenter un risque pour la sécurité. Je n'ai pas de détails... Avons-nous des chiffres précis sur la détention aux points d'entrée?
Nous pourrions vous fournir plus de détails sur ces chiffres.
Le président: Ce serait utile.
Madeleine.
[Français]
Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): J'ai quatre questions. La première concerne la formation.
Il est évident que les relations entre les agents des douanes et les agents de l'immigration doivent être essentiellement des relations de collaboration. Dans le processus de formation, est-ce que ces deux groupes de professionnels reçoivent une formation conjointe? C'est ma formation de pédagogue qui m'incite à poser cette question-là.
Je vais aussi vous poser mes autres questions tout de suite. Cela vous permettra peut-être d'en préparer les réponses.
Il est clair qu'il y a beaucoup de réfugiés qui se présentent au Canada et qui n'ont pas de papiers. Comparativement aux autres pays qui reçoivent un nombre assez important de réfugiés, est-ce que le Canada reçoit à peu près la même proportion de gens sans papiers que ces autres pays ou en reçoit-il beaucoup plus? Si tel est le cas, il faudrait s'interroger afin de déterminer pourquoi il en est ainsi.
Dans le cas de réfugiés qui ne parlent ni le français ni l'anglais, comment pouvez-vous aller chercher l'information dont vous avez besoin?
J'ai une dernière question. Vous avez fait allusion à un certain nombre de demandeurs de statut qui font leur demande seulement après avoir séjourné au Canada depuis un certain temps. Les cas les plus connus sont, bien sûr, les athlètes qui viennent pour des manifestations internationales. À la rigueur, il y a peut-être aussi des artistes qui font de même. Il y a sûrement d'autres personnes qui font ainsi. Est-ce que ce phénomène se produit aussi dans les autres pays qui reçoivent des réfugiés? Si tel est le cas, est-ce que ce phénomène se produit dans la même proportion qu'au Canada?
[Traduction]
Mme Elizabeth Tromp: Je pense que je vais laisser Tony répondre à votre première question au sujet de la formation conjointe, parce qu'il peut vous fournir plus de détails que moi.
M. Tony Smith: Oui, merci.
Pour ce qui est de la formation, comme Beverley l'a dit tout à l'heure, les agents d'immigration donnent une formation aux agents des douanes dans le cadre du cours d'initiation qui leur est offert. Une semaine de ce cours est consacrée précisément au programme d'Immigration et à ses exigences. Et une formation complémentaire est offerte en fonction du point d'entrée, sur laquelle vous obtiendrez plus de détails lorsque vous irez aux points d'entrée, où nous continuons à offrir ce genre de formation sur place, si vous voulez.
• 1010
Quant à la formation des agents d'immigration, ces agents
suivent un cours intensif de dix jours au départ. À part cela, la
formation est vraiment conçue en fonction du point d'entrée où ils
vont travailler. Il y a un programme de formation complémentaire
pour chaque agent, qui comporte un élément orientation,
surveillance et supervision, et il y a aussi une formation
particulière qui dépend des besoins.
Par exemple, l'accès au CIPC pour procéder à des vérifications exige des connaissances particulières de sorte que les agents d'immigration suivent un cours de deux jours sur le CIPC et la façon d'effectuer des vérifications. La formation plus générale offerte au ministère l'est aussi à nos agents d'immigration. Je pense à la formation sur la diversité en milieu de travail, la formation en sensibilisation et la formation sur l'investissement dans les gens.
La formation qui est offerte pour les points d'entrée oblige les agents, qu'ils travaillent pour les Douanes ou l'Immigration, à suivre certains cours d'initiation avant d'être autorisés à travailler à un point d'entrée. L'agent continuera à recevoir la formation nécessaire à son perfectionnement tout au long de sa carrière au point d'entrée, en fonction des types d'activités auxquelles il participera.
Le président: Elizabeth, pour ce qui est des autres questions relatives à la documentation dans d'autres pays ou à ceux qui revendiquent le statut de réfugié dans d'autres pays après y avoir séjourné, pouvez-vous nous dire s'il vous plaît quelle est notre expérience?
Mme Elizabeth Tromp: Je peux vous dire—et j'essayais de voir si j'avais quelque chose de plus précis, mais non—que le phénomène des demandeurs du statut de réfugié sans papiers préoccupe tous les pays qui accueillent des réfugiés. C'est un problème auquel nous nous heurtons et auquel se heurtent tous les pays. Ce n'est pas un phénomène qui est propre au Canada.
C'est la même chose dans le cas des demandeurs de statut qui font leur demande seulement après avoir séjourné dans un pays. Nous avons pu constater et nous avons entendu dire que d'autres pays aussi ont été témoins d'une augmentation des demandes présentées après un séjour—et ce n'est pas un phénomène qui touche uniquement les athlètes qui ont une plus grande visibilité, c'est un phénomène qui se répand. Ce phénomène se produit non seulement au Canada, mais ailleurs également.
Vous avez aussi demandé ce qui arrive dans le cas des réfugiés qui ne parlent ni le français ni l'anglais. Je vais répondre très brièvement. Évidemment, nous devons travailler avec des interprètes, ce qui une fois encore présente un défi sur le plan de la logistique quand il faut faire passer une entrevue détaillée à un point d'entrée à des personnes qui ne parlent pas la langue. Nous avons, aux principaux points d'entrée, des interprètes qui sont présents ou en disponibilité. Il arrive aussi que l'entrevue se fasse par téléphone, que l'interprète fasse son travail au téléphone.
Il y a différentes façons de s'y prendre. Mais vous avez soulevé là un défi opérationnel, un défi logistique que nous devons arriver à relever. C'est là la façon dont nous nous y prenons.
Le président: Merci, Madeleine et Elizabeth.
Yvon, puis ce sera à Inky.
[Français]
M. Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.): Au débarquement de l'avion et avant d'arriver au poste comme tel, quels pouvoirs particuliers ont les personnes que vous envoyez?
[Traduction]
M. Tony Smith: Je pourrais peut-être aider le comité, monsieur le président, en lui présentant le point de vue d'un agent d'immigration ou encore celui d'un migrant clandestin éventuel.
Les principaux objectifs d'un migrant clandestin seraient, premièrement, de cacher son identité et, deuxièmement, de cacher le point d'où il est arrivé sur le territoire. Ce serait ses deux buts principaux s'il souhaitait avoir de bonnes chances de demeurer dans le pays de destination. Cela, parce que tous les pays qui administrent un programme d'immigration en vertu duquel quelqu'un ne serait pas admissible en fin de compte à demeurer dans le pays doivent avoir un programme quelconque de renvoi.
• 1015
Pour pouvoir renvoyer quelqu'un, un pays doit habituellement
savoir tout d'abord qui il est, parce que l'État que le recevra
voudra le savoir. Il doit également savoir d'où il vient, parce que
le transporteur qui l'aura pris à son bord devra le ramener.
L'important, du point de vue de l'immigration, c'est de faire en sorte que la personne conserve ses papiers. C'est ce que nous essayons de faire.
La position à l'arrivée à l'aéroport est très semblable. Cette situation n'est pas unique au Canada; elle existe aussi dans d'autres pays. Il est très difficile de contrôler ce qui se passe entre le moment où un migrant débarque de l'avion et celui où il arrive au point où son passeport sera examiné, parce que les aéroports sont grands et qu'il y a de nombreux endroits où on peut aller avant d'arriver au préposé au premier interrogatoire à qui on est censé montrer son passeport.
Si vous examinez la situation du point de vue du migrant clandestin éventuel, vous constaterez qu'il est dans son intérêt d'essayer d'en profiter pour remettre ses papiers à quelqu'un d'autre ou s'en débarrasser et se soustraire le plus longtemps possible à la bureaucratie de l'aéroport afin que les agents d'immigration aient encore plus de difficulté à savoir qui il est ou d'où il vient.
C'est pourquoi nous avons mis sur pied un certain nombre d'équipes dans les aéroports ici au Canada, les équipes de débarquement et de surveillance, comme Elizabeth vous l'a dit. Leur travail est d'aller à la porte qui conduit à l'avion pour s'assurer que les personnes qui en sortent ont leurs papiers afin que nous sachions au moins, même si elles ont pu détruire leurs papiers en vol ou avant le vol, à bord de quel avion elles sont arrivées.
Nous travaillons très fort pour essayer de nous assurer—tout au long du processus, pas seulement dans les aéroports d'entrée, mais aussi, comme Elizabeth vous l'a précisé, avant l'embarquement—que les passagers à destination du Canada ont leurs papiers et les gardent afin que nous puissions les examiner, parce que la seule façon de préserver l'intégrité de tout programme d'immigration, c'est de s'assurer d'avoir accès aux documents de voyage officiels d'une personne. C'est ce que nous essayons de faire, monsieur le président.
Le président: Avez-vous autre chose?
Mme Elizabeth Tromp: Cela a à voir avec les pouvoirs qui sont accordés. Lorsqu'on trouve quelqu'un qui n'a pas de papiers... [Note de la rédaction: Inaudible]... je suppose, au premier interrogatoire au point d'entrée, avec les Douanes, et au deuxième point de contrôle où il y aurait un examen complet.
Le président: Yvon.
[Français]
M. Yvon Charbonneau: C'est ce dont je voulais m'assurer, c'est-à-dire que si la personne ne montre pas ses documents à ce moment-là, elle est au moins assurée de se rendre au premier poste. Elle n'est pas immédiatement reconduite à l'avion.
Mme Elizabeth Tromp: Non, elle n'est pas reconduite à l'avion.
M. Yvon Charbonneau: Ma deuxième question porte sur le cas d'une personne qui demande le statut de réfugié. Cette personne subit d'abord un premier examen et passe ensuite une entrevue en profondeur. Même si elle n'a pas de documents, je comprends que, dans certains cas, elle peut être admise au Canada. Qu'est-ce que vous lui donnez à ce moment-là? Est-il vrai que vous lui donnez un chèque, des cartes pour la sécurité sociale, le droit de travailler et d'étudier? Quel est précisément son statut une fois qu'elle a franchi ces étapes? Je voudrais avoir l'heure juste à ce sujet-là.
[Traduction]
Mme Elizabeth Tromp: Les personnes qui ont présenté une demande de statut de réfugié ne sont pas techniquement admises au Canada en vertu de la loi. Une ordonnance de renvoi conditionnel est rendue contre elles. Le renvoi est conditionnel et, en fait, il y a suspension de l'ordonnance de renvoi pendant l'examen de la revendication.
Si ces personnes étaient relâchées au lieu d'être détenues, nous leur donnerions des documents qui les autoriseraient dans la plupart des cas à demander un permis de travail ou de l'aide sociale. Nous mettrions le processus en branle pour elles à ce moment-là, mais nous ne leur remettons pas de chèque.
M. Yvon Charbonneau: Leur donnez-vous le droit de travailler et d'étudier?
[Traduction]
Mme Elizabeth Tromp: Oui. Nous leur accordons le droit de travailler.
[Français]
M. Yvon Charbonneau: Leur donnez-vous aussi accès aux avantages du système de santé?
[Traduction]
Mme Elizabeth Tromp: Ces gens auraient accès aux avantages du système de santé, oui.
[Français]
M. Yvon Charbonneau: Leur donnez-vous aussi un numéro d'assurance sociale?
[Traduction]
Mme Elizabeth Tromp: Je n'en suis pas certaine, mais je ne le pense pas.
M. Art Hanger: Un numéro spécial?
Mme Elizabeth Tromp: Oui, un numéro d'assurance sociale spécial, temporaire.
Le président: Mais tout cela, c'est pour les gens qui... font l'objet d'une ordonnance de renvoi conditionnel.
Mme Elizabeth Tromp: C'est exact. Il s'agit d'un renvoi conditionnel.
Le président: Jusqu'au moment où il y a eu détermination du statut de réfugié et où le processus a pris fin.
Mme Elizabeth Tromp: C'est exact. Une fois que le processus est terminé, si ces gens-là n'ont pas été admis au Canada, à ce moment-là, l'ordonnance de renvoi n'est plus conditionnelle. Ils sont obligés de quitter le Canada et cessent d'avoir accès à ces avantages.
M. Yvon Charbonneau: J'ai une dernière question.
[Français]
Quand une personne demande le statut de réfugié et qu'elle est déboutée en sa demande, que sa demande est rejetée après avoir franchi toutes les étapes et qu'en dernière instance il y a rejet de sa demande, que se passe-t-il entre vous et la GRC quant à l'exécution de l'ordre d'expulsion?
J'ai posé cette question aux gens de la GRC lorsqu'ils se sont présentés ici devant le comité. J'ai cité en exemple des cas où des mois s'étaient écoulés entre le jugement et l'expulsion. Ils m'ont répondu que cette question devait être posée au ministère plutôt qu'à eux, qu'ils ne faisaient qu'exécuter les ordres du ministère. Pourquoi se passe-t-il parfois plusieurs mois entre l'expulsion et le dernier jugement? Quelles sont vos relations avec la GRC?
[Traduction]
Le président: Elizabeth, nous parlons ici de la sécurité à la frontière. Si vous voulez répondre à cette question, allez-y, mais nous pourrions très bien la poser à la ministre ou à ses représentants cet après-midi. La réunion de ce matin porte plus précisément sur les décisions qui sont prises à la frontière et sur la sécurité à la frontière. Si vous voulez essayer d'y répondre, ne vous gênez pas, Tony et Elizabeth, allez-y. Tout ce que je dis, c'est que c'est une très bonne question pour la ministre et ses représentants qui vont se joindre à nous cet après-midi.
Mme Elizabeth Tromp: En fait, c'est...
Le président: C'est ce que vous alliez dire?
Mme Elizabeth Tromp: À peu près.
Le président: Mon petit doigt me l'a dit.
[Français]
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: C'est une question qui va être annoncée d'avance à la ministre. Elle aura donc une bonne réponse.
[Traduction]
Le président: Je pense qu'elle peut s'y attendre.
Inky.
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, PC/RD): Merci, monsieur le président, et permettez-moi de vous remercier tous les trois d'être ici ce matin.
Je tiens tout d'abord à dire en ce qui concerne les réfugiés qu'il est malheureux qu'il suffise d'une brebis galeuse pour contaminer tout le troupeau. C'est une chose qui nous préoccupe tous.
J'aimerais poursuivre dans le même ordre d'idées que M. Pickard.
Pensez-vous que vous avez les mains liées en ce sens qu'il est difficile à cause du système d'éliminer les demandes frauduleuses? Je vais vous donner un exemple. Lorsque vous procédez à l'examen secondaire et que vous constatez que le demandeur a des antécédents criminels, préféreriez-vous pouvoir le détenir ou le renvoyer à ce moment-là?
Pourriez-vous aussi me dire comment le projet de loi C-11 va modifier la façon dont vous fonctionnez actuellement? Je pense que c'est ce à quoi nous essayons d'en venir: comment dépister ces brebis galeuses et les éliminer rapidement au moment du premier ou du deuxième contact?
Mme Elizabeth Tromp: Merci.
Je pense que certaines des questions que vous venez de poser seront probablement examinées plus en détail cet après-midi, à la lumière surtout du projet de loi C-11. Il serait peut-être utile de passer en revue l'évaluation faite au moment de l'examen secondaire de même que les facteurs qui entreraient dans la décision.
Si une personne a revendiqué le statut de réfugié et avait le droit de le faire, cela veut dire que 90 jours se sont écoulés depuis qu'elle a été renvoyée du pays après le rejet d'une demande précédente. Personne ne revient deux jours plus tard présenter une nouvelle demande. Personne n'aurait le droit de le faire à ce moment-là, et c'est une décision facile à prendre. La demande de cette personne peut être rejetée sans grande difficulté.
• 1025
Mais quelque chose de complexe nécessite la comparution devant
un arbitre. Il faudrait dans le contexte actuel qu'on soit d'avis
qu'une personne constitue un danger et qu'il y ait eu déclaration
de non-admissibilité pour qu'elle se voie refuser l'occasion de
présenter sa demande. Dans ces cas, nous ne sommes pas en mesure de
trancher immédiatement au point d'entrée et de renvoyer quelqu'un.
La situation est suffisamment grave—quelqu'un demande la
protection—et la question de savoir si cette personne a ou non un
casier judiciaire qui l'empêche de présenter une demande ne serait
pas tranchée au moment de l'examen au point d'entrée; il faudrait
que le processus se poursuive.
M. Inky Mark: C'est essentiellement là ma question. Avez-vous les mains liées dans les cas où de toute évidence des demandeurs ont commis des actes criminels?
Mme Elizabeth Tromp: Non, je ne pense pas que nous ayons les mains liées. Le système veut que nous prenions certaines mesures pour tenir compte à la fois des droits de l'individu et de l'information dont nous disposons. Tout dépend de la teneur de l'information—de la gravité de l'infraction et ainsi de suite—et l'étape suivante consiste à valider tout cela au moyen d'une détermination de l'admissibilité devant un arbitre.
Comme je l'ai dit, la question de savoir si une personne constitue un danger pour le public est une composante importante du processus et, je le répète, la décision ne peut pas être prise à un point d'entrée. Il ne serait probablement pas possible de prendre ce genre de décision à un point d'entrée. Le système comporte des mesures de sauvegarde pour protéger les individus de même que la société. Je le répète, nous avons les outils qu'il faut pour identifier ces individus de manière à les détenir si cela est nécessaire à la protection des Canadiens.
Le président: Je pense que la question d'Inky portait sur le projet de loi C-11 et qu'il voudra peut-être la poser à la ministre et à ses représentants.
De toute évidence, vous n'avez pas mis le projet de loi C-11 en application parce que la loi n'est pas encore entrée en vigueur. Le projet de loi C-11 renferme un certain nombre de dispositions pour resserrer la sécurité et est beaucoup plus strict en ce qui concerne l'admissibilité à l'étape de la présélection. Je trouve intéressant que vous ayez commencé le 3 octobre à faire ce que le projet de loi C-11 propose, c'est-à-dire une présélection et des entrevues plus détaillées.
Mme Elizabeth Tromp: C'est exact.
Le président: Avez-vous eu l'occasion d'examiner quelle sera l'incidence du projet de loi C-11 sur la sécurité à la frontière?
Mme Elizabeth Tromp: Monsieur le président, soit dit sans vouloir offenser le comité, je pense que c'est une question que vous voudrez probablement poser à la ministre parce que les mécanismes en place pour assurer l'équilibre sont assez différents. Comme vous le savez, le genre de personne à laquelle vous faites allusion—disons une personne qui a commis un crime grave—devra quand même être soumise à un processus selon le projet de loi C-11. Il s'agira d'un processus rationalisé, mais il y aura quand même une évaluation des risques avant le renvoi, par exemple, pour compenser en quelque sorte une déclaration de non-admissibilité. Il y aura quand même des étapes à franchir, mais il s'agira d'un processus rationalisé.
Le président: Nous laisserons Inky poser la question à la ministre cet après-midi.
Steve, Art, et ensuite Anita.
M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Monsieur le président et notre personnel, d'après mon expérience, je dirais que pratiquement tout le personnel que j'ai rencontré dans le monde, en Afrique, en Europe, aux États-Unis et au Canada, a confiance dans notre système et dans ce que nous faisons. J'ai l'impression que l'on ne travaille pas pour Immigration Canada si l'on adhère pas aux concepts et aux principes qui s'appliquent en particulier aux réfugiés.
Les visas de visiteurs, c'est autre chose. Nos taux de refus sont tout à fait phénoménaux puisqu'ils atteignent 70 p. 100 dans beaucoup de bureaux que j'ai visités. J'ai assisté à des entrevues de candidats que j'aurais moi-même acceptés, mais que l'agent d'immigration a refusés catégoriquement.
Le président: C'est ce qui explique que vous êtes ici et que ces agents travaillent là-bas.
M. Steve Mahoney: Exactement. La plupart des gens auraient aussi accordé un visa à ces demandeurs.
Je suppose que vous partagez ces valeurs et, si c'est le cas, vous devez nous aider à rétablir la situation. Il y a des gens qui prétendent, à la Chambre des communes et dans la presse... Je n'ai pas l'intention de m'en prendre à mes collègues, mais par contre je m'insurge contre quelqu'un comme Diane Francis qui accuse de manière outrancière le système d'immigration. Vous devez nous aider à lutter contre ce type d'absurdité et répondre clairement aux questions concernant la sécurité et la criminalité.
On peut ouvrir un débat politique sur le sujet, mais je veux obtenir le point de vue des personnes qui fréquentent quotidiennement le système et y travaillent. Vous n'allez pas croire un libéral et un libéral ne croira certainement un allianciste. Mettons-nous d'accord là-dessus et acceptons de ne pas croire l'autre. En revanche, nous pouvons croire ces gens lorsqu'ils disent la vérité.
Maintenant, j'ai quelques questions à poser. Qu'est-ce qui pousse quelqu'un à se présenter sans pièces d'identité? Pour quelle raison?
Mme Elizabeth Tromp: Les gens font cela lorsqu'ils veulent obtenir le statut de réfugié pour les raisons que j'ai tenté d'exposer et au sujet desquelles Tony nous a parlé. Les gens veulent cacher qui ils sont et d'où ils viennent, en partie—mais les raisons sont nombreuses—parce qu'ils ne veulent pas que l'on connaisse leur histoire. Ils ne donnent pas de renseignements, peut-être parce que l'histoire qu'ils racontent n'est pas entièrement vraie. Ou, au contraire, ils peuvent avoir une histoire tout à fait authentique et poignante à raconter, mais s'ils sont entrés clandestinement, les passeurs qui les ont aidés leur ont peut-être donné des documents pour arriver jusqu'ici, documents qu'ils ont peut-être dû remettre à un accompagnateur à bord d'un avion ou à quelqu'un d'autre. Il peut arriver également qu'on leur ait dit qu'il valait mieux détruire leurs pièces d'identité qui permettraient de remonter la filière de l'immigration clandestine. En effet, ces documents nous permettraient de savoir comment les passeurs ont amené les immigrants jusqu'ici.
Beaucoup de gens suivent les conseils des criminels sans scrupule qui les conduisent jusqu'à chez nous. Certains sont convaincus—comme ils nous l'avouent—que c'est la meilleure chose à faire.
Il est possible aussi que certains n'aient pas de papiers. Cela arrive également. Ils sont de bonne foi mais ils n'ont pas de papiers. Ils pensent que le seul moyen de pouvoir se rendre où ils veulent aller c'est de se procurer des fausses pièces d'identité.
D'autres encore hésitent beaucoup à fournir certains renseignements, parce qu'ils ne font pas confiance aux autorités en général. À cause des situations qu'ils ont vécues, il leur faudra sans doute un peu de temps avant de manifester un peu plus d'ouverture. Il y a toute sorte d'expériences humaines qui entrent en ligne de compte.
Mais, du point de vue de la sécurité ou de l'intégrité, puisque c'est sous cet angle que vous posez la question, je dirais qu'en effet beaucoup de candidats pensent qu'ils ont avantage à ne pas décliner leur identité. Ainsi, ils ont un peu plus de liberté pour bâtir l'histoire qu'ils nous racontent. Dans certains cas, ils peuvent vouloir cacher certains aspects peu reluisants de leur personnalité ou de leur passé.
M. Steve Mahoney: Pensez-vous que votre organisation dispose en général des moyens nécessaires pour détecter les personnes qui sont des criminels et des terroristes en puissance parmi les gens qui arrivent chez nous sans pièces d'identité pour une raison ou une autre, mais que l'on peut considérer comme des réfugiés légitimes? Si vous répondez par l'affirmative, vous pourrez peut-être donner des explications au comité. Comme Jerry l'a dit, même des gens raisonnables s'inquiètent des accusations selon lesquelles certains demandeurs du statut de réfugié risquent d'être jetés à la rue. Nous devons dénoncer ce mensonge—si c'en est un. Disposez-vous des moyens nécessaires pour repérer les mauvais sujets?
Le président: Tiens, comme c'est intéressant. Je viens tout juste de vous envoyer cette question il y a une seconde.
M. Steve Mahoney: C'était ça?
Le président: Oui, c'était ça.
M. Steve Mahoney: Alors vous n'êtes pas content et vous voulez que je retire ma question?
Le président: Merci.
Allez-y.
Mme Elizabeth Tromp: Nous avons des moyens, mais sont-ils parfaits? Ce sont de bons outils. Je pense que nos plus grands atouts ce sont notre personnel, leur professionnalisme et leurs compétences, parce que finalement, ce sont les bases de données qui nous fournissent des renseignements.
Nous cherchons continuellement à conclure des ententes d'échange de renseignements avec d'autres pays afin d'élargir le type d'information que nous avons à notre disposition, par exemple outre-mer, au moment de prendre des décisions. Nous collaborons constamment avec nos partenaires, que ce soit l'ACDR, la GRC, le SCRS ou d'autres organismes, afin de trouver des moyens de communication—par exemple des moyens techniques permettant d'assurer l'échange des informations les plus à jour de la manière la plus rapide possible. Nous essayons toujours d'améliorer ce genre de choses.
Je vous remercie pour les commentaires que vous avez faits au sujet de notre personnel et je peux vous dire en effet que nous avons confiance dans ce que nous faisons. Je crois vraiment que notre force réside aussi dans notre personnel qui s'assoit en face du demandeur afin de lui poser des questions et de prendre une décision fondée sur leur expérience et sur l'information qu'ils ont à leur disposition. Nous leur faisons tout à fait confiance et nous croyons qu'ils sont capables de prendre les bonnes décisions.
Oui, je pense que nous disposons des outils nécessaires. Nous aimerions améliorer ces outils et nous y travaillons avec nos partenaires. Cela soulève toutes sortes de questions techniques d'interopérabilité sur lesquelles nous nous penchons.
Le président: Il fait des compliments sur le personnel—et j'en ferais moi-même—parce qu'il se fait toujours arrêter à la frontière. C'est ça le problème.
M. Steve Mahoney: C'est presque comme un culte. Je m'incline quand je constate le travail que fait le personnel, en particulier celui du service extérieur. Je me demande ce qui pousse les gens à faire ce genre de travail. Ce n'est certainement pas l'argent.
Parlez-moi des tiers pays sûrs. Je pense que l'on peut à juste titre se poser la question suivante: pourquoi tant de gens viennent en provenance des États-Unis pour réclamer chez nous un statut de réfugié? Les États-Unis ont-ils une politique plus souple à l'étranger qui permet aux gens de se présenter aux États-Unis sans visa et ensuite de frapper à notre porte pour demander un statut de réfugié?
Est-ce que c'est une raison ou est-ce qu'il y a une autre explication à l'arrivée de 14 000 personnes ou en tout cas des quantités incroyables de demandeurs de réfugiés à notre frontière? C'est difficile à comprendre. Si l'on décide que l'on ne peut pas les accueillir au Canada une fois qu'ils ont franchi la frontière, pouvons-nous les renvoyer aux États-Unis? Que se passe-t-il lorsqu'un autobus arrive à la frontière et que l'on fait savoir aux autorités américaines que nous ne voulons pas de ces passagers?
Mme Elizabeth Tromp: Pour répondre à votre question, un tiers pays sûr est un pays—comme les États-Unis ou les pays d'Europe, où le réfugié est en sécurité. Ce sont des pays qui sont en mesure de protéger quelqu'un contre d'éventuelles persécutions. Par conséquent, les réfugiés qui proviennent d'un tel pays peuvent y être renvoyés parce qu'ils ont la possibilité de présenter là-bas une demande de statut de réfugié.
La loi nous permet de le faire, mais nous n'avons conclu avec aucun autre pays d'entente concernant les tiers pays sûrs. Aussi, pour le moment, lorsqu'un réfugié présente une demande à notre frontière terrestre, nous examinons cette demande.
M. Steve Mahoney: Mais les États-Unis ont-ils une politique plus ouverte? Comment ces gens-là peuvent-ils arriver aux États-Unis d'Amérique et se présenter à Niagara Falls pour déposer une demande? Comment ces personnes sont-elles arrivées aux États-Unis?
Mme Elizabeth Tromp: Elles peuvent le faire de bien des manières différentes. Elles s'y prennent de la même manière que ceux qui viennent au Canada pour présenter une demande chez nous. Elles peuvent très bien arriver avec des papiers en règle. Parfois, elles nous fournissent ces papiers, mais beaucoup ne le font pas. Certains auraient pu bénéficier d'un statut de réfugié aux États-Unis et ont décidé de le demander chez nous. Certains ont peut-être pénétré frauduleusement dans le pays.
M. Steve Mahoney: Est-il vrai que certains citoyens américains ont fait une demande de statut de réfugié au Canada et l'ont obtenu?
Mme Elizabeth Tromp: Je n'ai pas connaissance de tels cas.
Le président: Pendant la guerre du Vietnam, il s'est produit toutes sortes de choses et, comme vous le savez...
M. Steve Mahoney: Non, ce sont des cas récents. C'est le genre d'affaires qui plaît aux médias. Je ne comprends pas qu'une personne qui a la citoyenneté américaine...
Mme Elizabeth Tromp: Vous avez tout à fait raison et je tiens à préciser que nous pouvons renvoyer une personne qui dispose d'un statut juridique dans un autre pays—qui bénéficie ailleurs d'une protection. Des personnes qui ont déjà obtenu un statut juridique aux États-Unis ne peuvent présenter une demande chez nous.
Le président: Le Canada possède un meilleur système de soins de santé, et...
M. Steve Mahoney: Mais si un citoyen américain se présente chez nous pour faire une demande de statut de réfugié, nous pouvons tout simplement le renvoyer et c'est probablement ce qui se passe, n'est-ce pas?
Le président: Ce n'est pas aussi simple que cela.
Mme Elizabeth Tromp: En effet.
Le président: Très bien.
M. Steve Mahoney: Sauf votre respect, ce n'est pas à vous que j'ai posé la question.
Le président: Excusez-moi, mais je connais la loi...
M. Steve Mahoney: C'est très bien, mais je tiens à poser la question pour qu'elle figure dans le compte rendu, de même que la réponse. Je préférerais que ce soit Elizabeth qui réponde, si vous n'y voyez pas d'inconvénient.
Mme Elizabeth Tromp: Nous accepterions d'examiner la requête d'un citoyen américain qui arriverait à la frontière pour présenter une demande. Bien sûr, on pourrait débattre de la crédibilité de cette demande, mais un citoyen américain peut le faire.
Par contre, nous n'accepterions pas la demande d'un citoyen américain contre un tiers pays, parce que cette personne bénéficie déjà d'un statut juridique aux États-Unis. Elle a un endroit sûr dans le pays qui lui a reconnu un statut juridique.
Le président: Pour l'information des membres du comité, je rappelle qu'il a été question des tiers pays sûrs, lors de l'examen du projet de loi C-11. Pour le moment, nous n'avons conclu aucune entente, mais nous sommes sur le point de le faire avec les États-Unis et d'autres pays ou tout au moins nous continuons à négocier, parce que c'est là une question très importante. Voilà une question très pertinente à poser à la ministre et à ses fonctionnaires cet après-midi.
M. Steve Mahoney: Monsieur le président, je pose rarement une question à laquelle je ne connais pas la réponse, et je...
Le président: Voilà qui est inquiétant!
M. Steve Mahoney: C'est vrai, mais je pose ces questions parce que je pense qu'il est important qu'elles figurent au compte rendu, qu'elles soient publiques et que nos fonctionnaires aient l'occasion de détruire le mythe voulant que nous rejetons les réfugiés...
Le président: C'est vrai.
M. Steve Mahoney: Ce n'est pas vrai. Vous voyez, il suffit de répéter quelque chose suffisamment souvent pour que cela paraisse être vrai.
Le président: Je suis d'accord.
M. Steve Mahoney: Voilà pourquoi je pose ces deux questions.
Le président: Merci. Je le sais.
Nous allons donner la parole à Art. Je suis certain qu'il va lui aussi poser des questions dont il connaît déjà la réponse.
M. Art Hanger: J'essaie toujours de comprendre le processus. Il me semble que le processus de détermination du statut de réfugié est si complexe qu'un agent d'exécution doit avoir de la difficulté à faire son travail.
Je suis vraiment sceptique quant à la capacité des agents d'exécution à gérer le mouvement de réfugiés et toutes les questions que soulève le processus de détermination du statut de réfugié. Je ne sais absolument pas comment ils peuvent y parvenir. Cela me paraît incompréhensible.
J'aimerais examiner certains autres points. Il faut beaucoup de temps et garder longtemps en détention une personne qui n'a pas de papiers si on décide de la soumettre à un examen approfondi au point d'entrée. Voilà la première chose. Et j'avoue franchement qu'en l'absence d'une période de détention, ou avec une détention très réduite, je ne sais pas comment l'agent peut faire correctement son travail.
Cela étant dit, un demandeur de statut de réfugié doit suivre la procédure—en passant par la CISR, la procédure d'appel et parfois la Cour fédérale—et maintenant la nouvelle loi va ajouter un autre niveau ou une procédure parallèle. Je ne sais vraiment pas comment cela va fonctionner...
Le président: Art, je vais vous dire que, pour le moment, le préambule ne concerne pas la sécurité à la frontière...
M. Art Hanger: Il s'agit précisément de sécurité à la frontière.
Le président: Nous sommes en plein dans le projet de loi C-11...
M. Art Hanger: Il s'agit précisément de sécurité à la frontière, puisque je me demande si le personnel de sécurité fait bien son travail au point d'entrée.
Le président: J'ai bien compris la première partie, mais vous avez commencé à parler du processus de détermination du statut de réfugié, du système d'appel. Cela ne relève pas de la sécurité à la frontière, mais de la Loi sur l'immigration.
M. Art Hanger: Je vais y revenir.
• 1045
Nous avons ici une agente d'exécution je crois. Elle a
travaillé dans ce domaine et ma question est tout à fait pertinente
si vous n'y voyez pas d'inconvénient, monsieur le président.
Le président: Très bien.
M. Art Hanger: Prenons le cas d'un demandeur de statut de réfugié dont la demande est jugée inadmissible ou rejetée. Que se passe-t-il dans ce cas-là? Est-ce que l'on prend des mesures d'expulsion ou de renvoi?
Les réfugiés se présentent à la frontière, leurs cas sont examinés par les tribunaux. Lorsque leur demande est rejetée, les tribunaux émettent des ordonnances. Parmi les 37 800 demandeurs, combien de personnes dont la demande a été rejetée font-elles face à des mesures d'expulsion et de renvoi?
Mme Elizabeth Tromp: Excusez-moi, je n'ai pas bien saisi la dernière partie, combien parmi les 37 800...?
M. Art Hanger: Parmi les 37 800 demandeurs, combien de personnes dont la demande est rejetée font-elles face à des mesures d'expulsion ou de renvoi? Je suppose que c'est au personnel d'exécution d'intervenir d'une manière ou d'une autre dans de tels cas.
Mme Elizabeth Tromp: Là encore, nous nous écartons un peu de ce qui se passe au point d'entrée et à la frontière, mais je peux vous décrire simplement ce qui se passe, à titre d'information. Je ne pense pas que j'ai avec moi un document concernant le sort réservé aux personnes dont la demande est rejetée, mais je vérifierai dès que j'aurai une seconde.
M. Art Hanger: Pourriez-vous nous donner des statistiques relatives aux cinq dernières années?
Mme Elizabeth Tromp: Tout à fait.
Le président: Nous allons poser la question à la ministre puisque le débat actuel porte sur le processus de détermination du statut de réfugié et non pas sur la sécurité à la frontière. C'est une très bonne question, Art, mais ce n'est pas...
M. Art Hanger: Que voulez-vous dire?
Le président: Pour le moment, ce n'est pas une question pertinente. Il s'agit de sécurité à la frontière. Vous voulez savoir combien de demandes de statut de réfugié ont été rejetées. C'est une question que nous pourrons poser cet après-midi à la ministre et à ses fonctionnaires.
Mme Elizabeth Tromp: Je peux parler des aspects techniques, c'est-à-dire des mesures de renvoi qui s'appliqueraient. Comme je l'ai dit au départ, lorsqu'un réfugié arrive et présente une demande, il est soumis à une mesure de renvoi conditionnel. Une fois le processus terminé et si la demande est rejetée, le renvoi n'est plus conditionnel. Dans presque tous les cas ou la plupart, on prend des mesures d'interdiction de séjour, ce qui veut dire que nous donnons 30 jours à la personne dont la demande a été rejetée, pour quitter volontairement le pays. Beaucoup d'entre elles le font, mais certaines refusent de partir. À ce moment-là, nous pouvons faire appliquer des mesures de renvoi.
Les personnes qui quittent le pays doivent confirmer leur départ. C'est une formalité qui a lieu au point d'entrée. Il peut arriver que certaines personnes quittent sans confirmer leur départ. Le système n'est pas infaillible, évidemment, et son fonctionnement est tributaire de l'attitude des personnes concernées. Ce qui peut les inciter à respecter la procédure, c'est qu'au bout de 30 jours, si nos dossiers n'indiquent pas qu'elles ont quitté le pays, la mesure d'interdiction de séjour se transforme en mesure d'expulsion présumée qui est bien entendu assortie de conditions tout à fait différentes.
En effet, une personne qui quitte le pays à la suite d'une mesure d'interdiction de séjour, peut revenir au Canada. Par contre, une personne qui a fait l'objet d'une mesure d'expulsion ne peut pas revenir au pays sans obtenir l'autorisation du ministre. Voilà la différence.
Le président: Dernière question, Art.
M. Art Hanger: À la frontière, un demandeur de statut de réfugié sans papiers se présente pour une entrevue et remplit ce formulaire. Est-ce qu'il doit présenter des photos et quelles sont les pièces qu'il doit fournir?
Mme Elizabeth Tromp: Nous prenons les photos.
M. Art Hanger: Vous prenez les photos.
Si après l'entrevue à la frontière, il s'avère que le réfugié ne présente aucun danger pour la société, on lui donne une carte fédérale de services de santé provisoires, je crois. Pouvez-vous le confirmer?
Mme Elizabeth Tromp: Je ne sais pas si on lui donne une carte à ce moment-là.
Le président: Cela existe, une carte fédérale de santé.
M. Art Hanger: Oui. Je crois que c'est après l'entrevue que l'on donne au réfugié sa carte fédérale de services de santé provisoires et qu'on le dirige vers une ville où il prendra part à une entrevue d'accueil. Pouvez-vous nous dire comment cela se passe?
Mme Elizabeth Tromp: Je ne sais pas si l'on délivre une carte ou un autre document, mais les formalités sont entamées.
M. Art Hanger: Appelons-la carte de santé provisoire.
Mme Elizabeth Tromp: Ce document leur permet de bénéficier provisoirement de soins de santé.
M. Art Hanger: Ces formalités sont donc faites lors de l'entrevue d'accueil, à la frontière.
Mme Elizabeth Tromp: C'est exact. On décide de l'admissibilité du demandeur et la documentation lui est donnée immédiatement au point d'entrée ou lui est expédiée peu de temps après à l'adresse qu'il a fournie. C'est un agent principal qui prend la décision. Dans certains cas, cela se fait sur-le-champ, mais parfois, la procédure est enclenchée plus tard. Les papiers nécessaires sont transmis au demandeur de statut de réfugié pour qu'il puisse bénéficier assez rapidement de services de santé, de services sociaux et autres.
Le président: Nous allons maintenant donner la parole à Anita, et ensuite Madeleine et Paul pourront chacun poser une brève question. Allons-y. Il est 11 heures. Chacun aura l'occasion de poser des questions. Anita.
Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.): Elizabeth, plusieurs de mes questions ont déjà été posées.
Je veux que ceci soit précisé dans le compte rendu et je tiens à confirmer les commentaires de Steve. Au printemps dernier, j'ai eu l'occasion d'accompagner la ministre en Asie du Sud-Est et je ne saurais dire trop de bien des hommes et des femmes qui travaillent là-bas pour Immigration Canada, qu'ils soient Canadiens ou citoyens des pays hôtes.
Nous avons été sensibilisés à la formation du personnel des lignes aériennes dont vous avez parlé et à celles des personnes qui traitent les dossiers des gens qui quittent le pays. Que pouvons-nous faire pour améliorer les renseignements qui proviennent du pays de départ au pays d'accueil, le Canada? Prenons le cas d'un réfugié qui embarque dans un avion avec des papiers et qui en sort sans aucune pièce d'identité. Il est clair qu'il s'est passé quelque chose pendant le voyage. Peut-on mettre en place des meilleurs processus? Devrait-on imposer de plus lourdes pénalités aux personnes qui embarquent avec les papiers nécessaires ou tout au moins suffisants pour voyager et qui débarquent sans rien?
Ma question suivante concerne le nombre de personnes venant des États-Unis qui se présentent sans papiers?
Mme Elizabeth Tromp: D'abord, pour ce qui est de savoir si nous envisageons de renforcer notre système, je peux tout de suite vous répondre par l'affirmative. Je répète que je ne veux pas aborder des questions que vous aurez l'occasion d'examiner cet après-midi, mais le projet de loi C-11, la nouvelle législation sur l'immigration, ainsi que la législation relative aux douanes nous donnent les moyens nécessaires pour obtenir auprès des lignes aériennes de l'information à l'avance sur les passagers. Cela nous permettra d'être mieux renseignés sur les personnes qui se trouvent dans l'avion et d'obtenir ces renseignements, dans l'idéal, avant que l'avion ne décolle. Nous serons ainsi mieux en mesure d'effectuer une partie des vérifications au départ, de sorte qu'à l'arrivée des passagers, nous saurons mieux quels sont les individus qui peuvent présenter des risques plus élevés.
Mme Anita Neville: Est-ce que je peux vous interrompre?
Mme Elizabeth Tromp: Allez-y.
Mme Anita Neville: Est-ce que la formation est la même dans les pays de départ? Dans les quatre pays que j'ai visités, j'ai noté que les mesures n'étaient pas les mêmes. Existe-t-il des lacunes qui pourraient être comblées dans la formation de certains pays et avez-vous les ressources et la capacité pour le faire?
Mme Elizabeth Tromp: Comme vous le savez, nous avons récemment agrandi notre réseau d'agents de contrôle de l'immigration et je crois que nous disposons actuellement de 44 agents. Ces agents qui sont répartis dans le monde entier seraient chargés de fournir cette formation. Ils sont souvent chargés de la formation dans une région. À partir de l'endroit où ils sont en poste, ils peuvent rencontrer ainsi régulièrement les partenaires des autres lignes aériennes et leur dispenser cette formation. La fréquence de la formation et l'intensité des relations de travail sur place varieraient en fonction du pays et de l'emplacement du poste de nos agents. La situation est différente selon que nous avons un agent sur place ou pas.
Pourrions-nous utiliser d'autres ressources? Je suppose que l'on pourrait toujours en utiliser plus. Mais nous pensons que nous avons un réseau très efficace qui fonctionne raisonnablement bien. Bien entendu, si notre service de renseignement nous révèle l'arrivée prochaine d'un groupe de réfugiés dans un certain aéroport ou, par exemple, un problème particulier avec une compagnie aérienne acceptant souvent des passagers voyageant avec des faux documents, nous serions en mesure d'intervenir auprès de cette compagnie afin de présenter une formation ciblée ou d'entamer un travail de liaison en vue d'améliorer la situation.
Le président: Une question, Madeleine.
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: [Note de la rédaction: inaudible] les Canadiens que les Québécois, c'est, bien sûr, le nombre de personnes qui n'ont pas obtenu le statut de réfugié et qui semblent perdues dans la nature. L'affaire Ressam, évidemment, n'a rien fait pour calmer les inquiétudes.
Est-ce que, selon vous, il y aurait moyen de s'assurer que ceux qui partent volontairement en informent nécessairement les autorités plutôt que de nous fier à leur bonne foi? Est-ce qu'il existe un tel moyen?
[Traduction]
Mme Elizabeth Tromp: L'idée d'imposer un délai de 30 jours, en particulier aux personnes qui sont au pays depuis quelque temps, a pour objectif de leur donner le temps de réunir leurs effets et de quitter le pays. Évidemment, nous préférons que les gens acceptent de quitter volontairement plutôt que d'avoir à prendre les dispositions nécessaires, à payer leur billet d'avion pour les faire quitter le pays.
Nous leur demandons de nous aviser de leur départ. Le système leur donne une telle latitude. En effet, s'ils ne nous préviennent pas, ils font face à une mesure d'expulsion. Un mandat de l'Immigration est posté au centre d'information de la police, le CIPC, si bien qu'en cas de contrôle par la police pour excès de vitesse ou autre infraction, le mandat s'affichera à l'écran. Le Centre de confirmation des mandats de l'Immigration qui fonctionne 24 heures sur 24, peut nous donner ces renseignements. L'individu peut ainsi se retrouver en détention en attendant son renvoi et se verra interdit de séjour en permanence au Canada. Par conséquent, il existe déjà des incitatifs et des moyens de suivre ces personnes en situation illégale. Je ne sais pas exactement ce que l'on pourrait faire de plus, sinon prescrire ce processus et inclure ces incitatifs, tout au moins au cours de la période initiale.
Le président: Paul, une question, s'il vous plaît et une question également pour Inky.
M. Paul Forseth: Pour revenir à ce qu'a déclaré Tony Smith un peu plus tôt, ma question porte sur la sacoche de bord. C'est tout à fait légal de l'utiliser et je crois que cela se fait déjà...
Le président: Vous avez parlé de «sacoche»?
M. Paul Forseth: Oui. C'est une pratique utilisée de temps à autre. Pourquoi le Canada n'appliquerait-il pas une mesure générale exigeant que les compagnies aériennes collectent les documents de tous les passagers non canadiens et de ceux qui n'ont pas le statut d'immigrant reçu afin de les transporter dans la sacoche de bord de l'avion et de les remettre au comptoir à l'arrivée? Je sais qu'à l'aéroport de Vancouver, le personnel est submergé lorsqu'un 747 arrive de Taipei, un autre de Beijing et un autre de Corée. Je pense que c'est même pire à l'aéroport Pearson. Les gens prévoient arriver en même temps que les autres vols, ce qui ajoute à la confusion. On pourrait résoudre une partie du problème en adoptant une mesure générale exigeant par exemple que les compagnies aériennes ramassent les documents de tous les passagers non canadiens. Pourquoi n'applique-t-on pas de telles mesures actuellement?
Le président: Notre comité s'était penché sur une telle mesure lors de l'examen du projet de loi C-11, à l'occasion du témoignage des représentants des lignes aériennes, mais je vais laisser Tony et Elizabeth répondre.
M. Steve Mahoney: Cette mesure s'appliquerait également aux Américains, aux Britanniques et aux Australiens.
M. Paul Forseth: On pourrait prévoir...
Le président: S'il vous plaît, laissez Tony répondre.
M. Steve Mahoney: On mettrait tout le monde dans le même sac.
Le président: Steve, je suis sûr que vous souhaitez entendre la réponse des fonctionnaires.
M. Steve Mahoney: Certainement monsieur le président. Merci de faire preuve d'autorité.
Le président: Je sais que vous connaissez la réponse Tony. Allez-y.
M. Tony Smith: Merci, monsieur le président.
Il y a beaucoup de mesures que nous pouvons prendre au sujet des lignes aériennes. L'une d'entre elle consiste à ramasser les documents dans la sacoche de bord. C'est une mesure que l'on n'applique pas de manière courante, parce qu'elle est extrêmement difficile à mettre en oeuvre dans la pratique. C'est possible, mais dans ce cas, tous les passagers à bord de l'avion doivent remettre leurs documents à une personne...
M. Paul Forseth: Ce n'est pas ce que j'ai dit.
M. Tony Smith: ... qui est chargée de garder ces documents et de nous les remettre de la manière appropriée à l'arrivée.
Cependant, nous examinons actuellement d'autres options. J'aimerais faire remarquer au comité que nous n'imposons pas ce genre de choses aux compagnies aériennes, mais que nous travaillons en collaboration avec elles. Nous employons plutôt la méthode de la carotte et du bâton.
Je pense que le Canada devrait être très fier du système que nous avons et du travail qui a été fait pour établir des relations de travail saines et sûres avec chacune des lignes aériennes desservant le Canada. Nous avons conclu avec elles des protocoles d'entente renouvelables tous les six mois. C'est un mécanisme très utile pour appliquer la méthode de la carotte et du bâton dans l'industrie du transport aérien.
• 1100
Nous examinons très attentivement avec elles diverses
solutions technologiques. Nous prenons part à de nombreuses
tribunes internationales. Celles de l'IATA et du Comité de travail
Canada-Asie en est une. C'est le groupe de travail des services de
contrôle de l'IATA qui rencontre l'industrie aérienne tous les six
mois.
Nous prenons part également à d'autres ateliers inspirés par l'IATA qui font appel à des fournisseurs techniques d'imagerie documentaire, de systèmes de vérification des documents qui permettent de prendre des images de bonne qualité des gens et des documents et de nous les transmettre avant l'arrivée de l'avion, en plus de certaines mesures qu'a mentionnées Elizabeth un peu plus tôt, les nouveaux pouvoirs du Canada pour exiger que les systèmes informatiques des lignes aériennes lui fournissent des renseignements qui nous sont transmis à un moment déterminé. Nous superposons les renseignements que nous possédons sur les données fournies par ces systèmes. Voilà quelles sont les nouveautés dans ce milieu en perpétuelle évolution.
Le recours à la sacoche de bord est une option qu'il est impossible d'écarter complètement, mais je mets beaucoup d'espoir dans certaines solutions technologiques et dans les nouvelles possibilités qui s'offrent à nous pour collaborer avec les lignes aériennes afin d'aboutir à une conclusion commune qui est de maintenir en tout temps le lien entre les passagers et leurs documents d'identité.
Merci.
Le président: Inky, une dernière question pour vous.
Quant aux autres membres du comité qui arrivent pour la prochaine séance, je leur conseille de se détendre, de prendre une tasse de café et une aspirine. On s'occupera de vous dans une minute.
M. Inky Mark: J'ai une question très brève. Sommes-nous toujours en mode de rattrapage depuis les compressions qui ont été effectuées en 1993 au ministère, malgré l'annonce de l'embauche de 100 nouveaux employés? Quand ces 100 nouveaux employés entreront-ils en activité?
Mme Elizabeth Tromp: La dotation de ces postes se fait très rapidement, mais pas de manière instantanée. Nous voulons nous assurer que les personnes que nous plaçons en première ligne sont qualifiées et qu'elles ont la formation nécessaire pour effectuer le travail. Je ne peux pas vous donner de date précise. Ce ne sera pas la semaine prochaine. Ce sera fait au cours du mois prochain.
Le président: Nous poserons la question à la ministre.
J'ai une question complémentaire au sujet des ressources. Il est clair que pour Art et les autres, la responsabilité est énorme, depuis les événements du 11 septembre. Au cours des entrevues, surtout dans le cas des personnes sans papiers, les lumières rouges doivent ou devraient s'allumer.
J'aimerais savoir combien de ressources seront nécessaires en plus de celles dont vous disposez déjà, pour faire ce que les Canadiens attendent de vous en matière de sécurité. Il est question d'une centaine de nouveaux agents, mais vous avez dit que seulement 46 des 350 points frontaliers sont desservis par l'Immigration.
J'aimerais avoir une idée et nous poserons peut-être la question à la ministre, puisque les ressources, les ressources humaines et technologiques, seront beaucoup plus sollicitées pour faire le travail du mieux possible—sans vouloir insinuer qu'il n'est pas bien fait actuellement, mais c'est une question importante. Je la poserai donc à la ministre.
Deuxièmement, Tony, vous m'avez donné matière à réflexion lorsque vous avez dit que le Canada et les États-Unis semblent donner la priorité au contrôle douanier avant les questions d'immigration et les déplacements de personnes. Autrement dit, nous semblons nous intéresser plus aux marchandises qu'aux personnes. Vous avez dit que depuis 1967, ce sont les douanes qui occupent le premier rang—et que les agents s'intéressent essentiellement aux marchandises qui entrent dans le pays, même s'ils ont également une responsabilité en matière d'immigration—mais les personnes viennent au second rang.
Je me demande s'il ne serait pas possible de renverser cet état de choses et de mettre plutôt l'accent en priorité sur l'immigration afin d'inspecter les gens qui entrent dans le pays et de s'inquiéter après s'ils apportent avec eux une bouteille d'alcool ou une cartouche de cigarettes. Vous nous avez dit qu'en Angleterre et peut-être en Europe, la situation est inversée. L'accord de libre-échange ou l'union douanière fait peut-être en sorte que l'on accorde moins d'attention aux marchandises et aux douanes qu'à l'immigration. Compte tenu de la nouvelle situation, c'est peut-être une option que l'on pourrait envisager.
Je me demande si vous avez d'autres informations à nous donner sur d'autres pays qui donnent la priorité aux douanes avant l'immigration ou qui mettent les deux dimensions en parallèle. Voilà qui nous amène peut-être au débat soulevé par certains employés qui affirment cumuler les fonctions d'agents d'immigration et d'agents des douanes.
M. Tony Smith: Merci, monsieur le président.
• 1105
C'est un débat fascinant, mais je ne veux pas vous laisser
l'impression que le Canada est le seul pays du monde à donner
priorité aux douanes.
Le président: Vous avez également parlé des États-Unis.
M. Tony Smith: Par exemple, en Australie et en Nouvelle-Zélande, les agents des douanes effectuent le premier interrogatoire au point d'entrée, alors que les services d'immigration se trouvent en deuxième ligne. En Europe, ce sont les services d'immigration qui se trouvent en première ligne, mais ce ne sont pas toujours des agents d'immigration qui sont en fonction. Dans certains pays, ce sont parfois des agents de police.
Cependant, je pense que l'essentiel, c'est le contrôle et non pas la personne qui l'exerce. Quel est l'objectif du premier interrogatoire d'immigration et quelle est son utilité pour les programmes d'immigration? C'est une question qui relève tout à fait de la législation internationale, de la communauté internationale, ainsi que des règlements et du cadre législatif dans lesquels on fonctionne.
Le président: J'en conviens, mais alors il faudrait peut-être changer notre terminologie et notre façon de faire. Si j'ai bien compris, un grand nombre de questions que le personnel de Beverley pose lors du premier interrogatoire sont des questions qui se rapportent à l'immigration—au sujet des personnes plutôt que des marchandises, même si l'intervenant est un agent des douanes. Aussi, je pense que ces notions de premier et deuxième interrogatoire, appliquées par les agents de douane et d'immigration, ne sont pas claires pour beaucoup de gens et peuvent inquiéter certaines personnes. Il faudrait peut-être préciser qu'il s'agit d'un système intégré de douane et d'immigration qui s'intéresse de près non seulement aux personnes qui traversent la frontière et à ce qu'elles sont susceptibles de transporter avec elles ou d'importer dans le pays, mais qui cherche essentiellement à savoir qui elles sont plutôt que ce qu'elles pourraient...
L'appellation que nous utilisons actuellement me dérange et je souhaiterais qu'on la modifie parce que, dès que vous en avez parlé, je me suis demandé si ce n'était pas plutôt l'inverse. Ne devrions-nous pas nous intéresser plutôt aux personnes qu'aux marchandises qui franchissent nos frontières?
De toute façon, je suis certain que nous vous demanderons de revenir pour nous fournir d'autres informations. Merci beaucoup.
Nous nous retrouverons à 15 h 30 dans la salle 253-D. La séance est levée.