Passer au contenu
;

FAIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain

STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE

COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 29 mai 2001

• 1532

[Traduction]

Le président (M. Bill Graham (Toronto-Centre—Rosedale,Lib.)): Chers collègues, la séance est ouverte.

Comme cette séance est télévisée, ce qui est rare pour l'étude d'un projet de loi article par article, je vais me permettre de présenter brièvement la procédure que nous allons suivre, pour que le public comprenne nos travaux.

Nous en sommes à la dernière étape de notre étude du projet de loi C-6, Loi modifiant la Loi du Traité des eaux limitrophes internationales, et il s'agit de l'étape où le comité examine chaque article du projet de loi, l'un après l'autre, afin de l'adopter tel qu'il est présenté ou d'y proposer des modifications, avant de renvoyer le projet de loi devant la Chambre pour la troisième lecture.

Le comité a consacré cinq séances à ce projet de loi, ce qui lui a permis de recueillir un large éventail d'opinions sur l'importance de ce texte qui délimitera les eaux limitrophes en tant que ressource ne pouvant être extraite de son bassin de drainage. Au Canada, le contrôle des eaux est une compétence partagée entre les gouvernements fédéral et provinciaux.

Le projet de loi n'est que l'un des éléments, mais il est essentiel, d'une stratégie à trois volets retenue par le gouvernement fédéral pour collaborer avec les provinces afin d'empêcher l'exportation d'eau en vrac du Canada.

[Français]

Les représentants du gouvernement nous informent que la plupart des provinces et territoires ont adopté la législation nécessaire pour mettre en vigueur un accord dans tout le Canada à cette fin. Et maintenant, nous devons faire notre part au niveau fédéral.

[Traduction]

Quand nous aurons fini l'examen article par article, et s'il nous reste assez de temps, nous nous pencherons sur une motion que M. Obhrai souhaite présenter au sujet des décisions récentes des Taibans d'Afghanistan, et je pense que nous aurons assez de temps pour ce faire.

• 1535

Avant d'entreprendre l'étude du projet de loi article par article, je tiens à attirer votre attention sur un mémoire qui nous a été adressé par la Première nation Tlingit. Le secrétariat du comité vous a envoyé des exemplaires de ce mémoire émanant d'un groupe autochtone important du nord de la Colombie-Britannique. Comme nous avons reçu ce mémoire assez tardivement, il ne nous a pas été possible de convoquer ces témoins pour les entendre en personne. Toutefois, vous constaterez que le mémoire expose les préoccupations de la Première nation concernée quant à la gestion des ressources se trouvant sur son territoire, notamment ses préoccupations quant à ce projet de loi et à son souci d'être consultée. Je demanderai donc dans un instant à M. Ruddock de nous faire part de ses réactions à ce mémoire.

Nous avons reçu jusqu'à présent quatre propositions d'amendements, une de l'Alliance, deux du NPD et une du Bloc. Je rappelle aux membres du comité que ce projet de loi nous a été adressé après la deuxième lecture, ce qui veut dire que les seuls amendements acceptables sont ceux qui touchent le principe et la portée du projet de loi.

Je rappelle aussi aux membres du comité que ce projet de loi est assez inhabituel dans la mesure où il ne comporte que deux articles. L'article 1 contient 16 dispositions différentes qui seront ajoutées à la Loi du Traité des eaux limitrophes internationales. De plus, si je comprends bien, les dispositions 11, 12 et 13 sont les plus importantes de cette série. Donc, quand je demanderai «L'article 1 est-il adopté?», ceux d'entre vous qui ont des amendements à proposer devront le faire à ce moment-là, et je passerai ainsi à l'examen des dispositions individuelles de l'article 1.

Cela vous convient-il?

Avant de passer à cela, je demande à M. Ruddock s'il peut nous parler du mémoire reçu du groupe de la Colombie-Britannique. Monsieur Ruddock.

M. Frank Ruddock (directeur adjoint, Direction des relations transfrontalières avec les États-Unis, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Merci, monsieur le président.

J'ai vu ce mémoire brièvement à la fin de la dernière séance. Je ne l'ai pas lu mais il porte sur une question que je connais très bien, tout comme notre ministère, étant donné qu'elle est soulevée depuis 1998.

À titre d'explication, elle concerne la mine du Chef Tulsequah, qui est un projet d'exploitation minière de la province de la Colombie-Britannique sur la rivière Taku. La rivière Taku est un cours d'eau transfrontalier qui s'écoule de la Colombie-Britannique vers l'Alaska. Le problème qui a été soulevé, pas seulement par la Première nation Tlingit mais par plusieurs autres groupes, ainsi que par l'État de l'Alaska, touche la pollution éventuelle de ce cours d'eau transfrontalier qui traverse le territoire américain. Il ne s'agit pas ici d'une question d'extraction d'eau en vrac ni de construction d'un barrage. Il ne s'agit pas non plus d'une question d'inondation, qui relèverait de l'article III ou de l'article IV du Traité. La question posée n'est donc tout simplement pas pertinente eu égard au projet de loi C-6 dont vous êtes saisis.

Cela dit, c'est une question importante et je peux dire que les préoccupations exprimées au sujet de la mine de la rivière Taku par la Première nation Tlingit et par d'autres groupes sont prises en considération à deux paliers. Tout d'abord, une évaluation environnementale harmonisée fédérale-provinciale est en cours. Elle a été relancée il y a un an par la Cour suprême de la Colombie-Britannique, à la demande des Tlingits, afin d'examiner un aspect très restreint du projet minier. Outre le gouvernement fédéral, par le truchement du MPO et d'Environnement Canada, l'État de l'Alaska et le gouvernement fédéral des États-Unis participent à cette évaluation.

En outre, il y a eu des discussions bilatérales entre le ministère des Affaires étrangères et le Département d'État américain, et d'autres agences fédérales des deux côtés de la frontière, au cours des trois dernières années, pour examiner les préoccupations américaines à ce sujet. Les États-Unis ont demandé au Canada d'accepter le renvoi du dossier devant la Commission mixte internationale, au titre de l'article IX du Traité, qui est celui en vertu duquel la Commission donne un avis non exécutoire au gouvernement. Autrement dit, cet article diffère des articles III et IV en vertu desquels la Commission mixte internationale et le Canada détiennent des pouvoirs d'approbation ou de rejet. L'article IX concerne les renvois visant à solliciter l'opinion de la CMI, les gouvernements étant parfaitement libres d'accepter ou de rejeter cette opinion, en tout ou en partie.

• 1540

Voilà donc où nous en sommes pour le moment. La question fait l'objet d'une évaluation environnementale, les préoccupations soulevées font l'objet d'une ordonnance de la Cour suprême de la Colombie-Britannique, et nous poursuivons également nos discussions avec les États-Unis.

Le président: Merci beaucoup.

Quelqu'un a-t-il des questions à poser sur le mémoire des Tlingits? Non? Très bien. Je tiens à leur indiquer publiquement que nous serons très heureux à l'avenir de recueillir leur témoignage de vive voix.

Nous allons maintenant passer à l'étude article par article.

(Article 1 proposé)

(Les articles proposés 10 à 15 sont adoptés avec opposition)

[Français]

(Article 16 proposé—Licence)

Le président: Il y a une proposition d'amendement présentée par le Bloc québécois.

Madame Lalonde.

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Mon amendement, que vous avez devant les yeux, se lit comme suit:

    16.1 Malgré l'article 16, le ministre peut émettre des licences portant uniquement sur des utilisations, obstructions ou dérivations...

Ce sont les mots du traité.

    ...qui sont assujetties à l'application du traité et qui ont préalablement été autorisées conformément aux articles III et IV du traité.

L'intention de cet amendement est de s'assurer qu'on ne profite pas de cette revue de la mise en oeuvre pour élargir la capacité d'agir du ministre. Il y a bien d'autres choses qui ne font pas notre affaire, mais il nous semble que cet amendement apporterait au moins une amélioration quant aux pouvoirs dévolus au ministre, qui sont démesurés. Plusieurs témoins en ont fait état, monsieur le président.

[Traduction]

M. Stan Keyes (Hamilton-Ouest, Lib.): J'ai une question, monsieur le président.

Le président: Monsieur Keyes puis monsieur O'Brien.

M. Stan Keyes: Monsieur le président, les témoins pourraient-ils nous indiquer s'il est nécessaire ou non, comme le souhaite le Bloc, que le ministre obtienne une approbation conformément aux articles du Traité avant de passer à l'action?

M. Frank Ruddock: Monsieur le président, comme nous avons reçu cela il y a trois minutes, pourrions-nous avoir 60 secondes?

Le président: Certainement.

Voulez-vous en discuter, pendant que les fonctionnaires se consultent?

[Français]

M. Denis Paradis (Brome—Missisquoi, Lib.): C'est une question que je me pose, monsieur le président. J'essaie de comprendre le sens de l'amendement du Bloc.

L'article 16, tel qu'il est proposé dans le projet de loi original, si j'ose dire, parle de licences pour les activités visées aux paragraphes 11(1) et 12(1). Ce sont vraiment des licences qui portent sur les activités d'obstruction, comme il s'en permettait auparavant, et certainement pas des licences qui permettent l'exportation de l'eau ou les prélèvements d'eau.

Donc, je trouve important que les licences décrites aux paragraphes 11(1) et 12(1) soient limitées, dans le corps de l'article 16, à ce qui se pratique depuis 1909, et ne permettent certainement pas ce qui touche à ce qu'on appelle le prélèvement massif d'eau. Pourriez-vous m'éclairer là-dessus?

• 1545

Mme Francine Lalonde: Ce dont on veut s'assurer, c'est que le ministre ne puisse pas profiter de cette modification à la loi de mise en oeuvre pour aller plus loin. Or, les points III et IV du traité portent sur les mêmes sujets que les articles 11 et 12. Ce sont les articles 11 et 12 dont il est question. Ce n'est pas l'article 13.

M. Denis Paradis: C'est 11 et 12.

Mme Francine Lalonde: C'est 11 et 12. Or, les témoignages que nous avons entendus, entre autres celui de M. Ruddock, indiquaient que le ministère attendrait que la Commission mixte internationale se soit prononcée. On craignait qu'il se tienne, par exemple sur une demande de dérivation, des audiences dans une province, que le ministre ait ses propres exigences et qu'ensuite on ait l'avis de la Commission mixte internationale. Nous demandons donc que le ministre, comme l'avait dit M. Ruddock d'ailleurs—je me suis servi de ce témoignage-là—attende que la Commission mixte se soit prononcée. En même temps, cela nous assure que les utilisations, obstructions et dérivations sont bien celles qui sont prévues au traité.

M. Denis Paradis: Monsieur le président, puis-je poursuivre ma discussion avec Mme Lalonde?

Madame Lalonde, si je lis l'article 16 tel qu'il est proposé, le ministre peut «sur demande»—donc, il faut qu'il y ait une demande—«délivrer, renouveler ou modifier une licence pour les activités visées aux paragraphes 11(1) ou 12(1)». Il est donc important, à mon humble avis, que ces paragraphes apparaissent ici de façon à se rapporter aux articles 11 et 12, qu'on vient d'adopter et qui ne comprennent en aucune façon le prélèvement massif. Je pense qu'il est important qu'il n'y ait pas de licence pour le prélèvement massif.

Mme Francine Lalonde: On s'entend là-dessus.

M. Denis Paradis: On s'entend là-dessus. Alors c'est très clair. Le ministre peut aussi «l'assortir des conditions qu'il estime indiquées». Je trouve très clair le libellé actuel de l'article 16 proposé, qui stipule qu'à un moment donné le ministre peut émettre des licences, mais pour des choses qui se faisaient dans le passé. Dans le passé, il y avait consultation, tenue d'audiences, etc., de la commission et des gouvernements, lesquels déterminaient qu'un projet pouvait être mis en oeuvre. Maintenant, les choses vont se faire de façon légalisée, sous forme d'octroi de licences pour des barrages ou autres choses du genre, mais certainement pas, et je ne le voudrais absolument pas, pour associer ces licences au prélèvement de l'eau.

Mme Francine Lalonde: Si c'était dans un amendement apporté à l'article 16 proposé, on pourrait être d'accord.

[Traduction]

M. John Harvard (Charleswood St. James—Assiniboia, Lib.): Que disent les experts?

M. Jason Reiskind (conseiller juridique, Section du droit international et des activités internationales, ministère de la Justice): Nous avons deux remarques à formuler au sujet de cette proposition. La première concerne l'expression «qui sont assujettis à l'application du traité». Cette expression est inutile dans cet article étant donné que toute la loi porte sur la mise en oeuvre du traité. Si l'on examine le reste de la loi, qui continuera d'exister après l'adoption de ce projet de loi, on y parle d'une «loi concernant la création de la Commission mixte internationale en application du Traité des eaux limitrophes du 11 janvier 1909». En outre, le titre abrégé de la loi est «Loi du Traité des eaux limitrophes internationales». Donc, le but unique de cette loi est d'assurer la mise en oeuvre du traité de 1909. C'est clairement expliqué dans toute la loi. Il n'y a donc vraiment aucune nécessité d'ajouter dans le projet de loi qu'il s'agit de l'application du traité, étant donné que l'application du traité est la raison d'être de cette loi.

Je voudrais faire une autre remarque au sujet de la proposition disant que

    le ministre peut émettre des licences [...] qui sont assujetties à l'application du traité et qui ont préalablement été autorisées conformément aux articles III et IV du traité.

• 1550

L'octroi d'une licence est en soi un acte de mise en oeuvre des articles III et IV. Donc, la formulation qui est proposée prête à confusion. L'article III oblige le gouvernement du Canada à donner son approbation, et la Commission mixte internationale aussi, dans le cas de certains projets, ce qui veut dire que le gouvernement s'acquitte de ses responsabilités en vertu de l'article III, par exemple, lorsqu'il délivre une licence. La proposition d'amendement prête à confusion dans la mesure où elle parle d'émettre des licences qui ont d'abord été approuvées, alors que l'émission de licences constitue l'approbation contenue à l'article III.

Le président: Madame Lalonde.

[Français]

Mme Francine Lalonde: Je voudrais d'abord répondre à M. Paradis. Mon amendement ne remplace pas l'article 16 proposé. C'est un nouvel article 16.1. Donc, il fait référence à 16, qui ne parle que des articles 11 et 12. C'était ça, l'intention. J'en étais certaine.

Nous avons discuté ici des dédoublements que le fait d'accorder des licences pouvait créer. J'ai demandé ce qu'il arriverait si le ministre accordait une licence que la Commission mixte internationale récusait par la suite. En dernière analyse, même si le ministre dit oui—s'il dit non, il dit non—c'est quand même la commission qui décide. Donc, si la commission refuse, le ministre ne peut pas avoir préalablement autorisé une licence.

C'est donc pour s'assurer que ce projet de loi ne serve qu'à l'application du traité et non pas à lui donner une portée plus grande, ce qui arriverait si on donnait au ministre plus de pouvoirs qui ne soient pas basés sur le traité.

[Traduction]

Le président: Monsieur Reiskind, comme vous êtes le conseiller juridique du ministère, pourriez-vous répondre à la préoccupation de Mme Lalonde qui est que le ministre, en vertu de l'article 16 proposé, pourrait délivrer une licence pour faire quelque chose qui ne serait pas autorisé au titre des articles III et IV du traité—autrement dit, quelque chose qui déborderait du cadre du traité? Le but de la proposition semble être de limiter toute licence autorisée par le ministre à ce qui est indiqué aux articles III et IV du traité. Si vous pouvez donner l'assurance au comité que, du point de vue juridique, vous vous êtes penchés sur cette question et que l'article 16 proposé n'autorise pas le ministre à émettre une licence qui déborderait du champ d'application des articles III et IV du traité, je suppose que les membres du comité seraient satisfaits. Voilà la question à laquelle vous devez répondre.

M. Jason Reiskind: Je répète que la raison d'être de la loi est d'assurer la mise en oeuvre du traité, ce qui est clairement indiqué dans la loi. Si un ministre prenait une décision sortant du champ d'application du traité, celle-ci pourrait manifestement être contestée pour cette raison et, par conséquent, la décision prise en vertu de l'article 132 serait invalidée et l'action du ministre ne serait pas autorisée.

Il y a là un mécanisme de contrôle automatique dans la mesure où la portée de la loi correspond à la portée du traité et où son but est d'assurer la mise en oeuvre du traité par le truchement de l'article 132 de la Constitution, l'article touchant la mise en oeuvre d'un traité de l'empire. Si un ministre voulait aller au-delà du traité de l'empire, son action pourrait être contestée avec succès devant les tribunaux. Tel est le sens général de nombreuses lois.

Le président: Bien.

Monsieur Keyes, puis John.

M. Stan Keyes: Je dois dire, monsieur le président, que je sympathise un peu avec Mme Lalonde à ce sujet.

Monsieur Reiskind, vous pourriez peut-être nous résumer tout cela en quelques mots. Ce projet d'amendement dit que le ministre ne pourra émettre de licence qu'après avoir obtenu une approbation en vertu du traité, notamment des articles III et IV. La question qui se pose, à mon sens, est de savoir si le ministre pourrait émettre une licence qui n'aurait pas été approuvée en vertu du traité, notamment des articles III et IV.

• 1555

M. Jason Reiskind: Si le ministre tentait d'approuver un projet qui n'aurait pas été approuvé par la Commission mixte internationale, il agirait en infraction du traité et son action serait invalidée.

M. Stan Keyes: Donc, vous me dites qu'il peut le faire mais qu'il ne le ferait pas pour la raison que vous venez d'indiquer.

M. Jason Reiskind: Puis-je ajouter un mot? En fait, aucun projet ne peut aller de l'avant sans l'approbation de la CMI, d'une part, et du gouvernement canadien, d'autre part. Or, ces deux approbations sont totalement indépendantes. Si la CMI n'approuve pas un projet, celui-ci ne peut être réalisé.

M. Stan Keyes: Même si le ministre le souhaite?

M. Jason Reiskind: Oui.

M. Stan Keyes: Je m'attends à ce que Mme Lalonde retire donc son amendement, monsieur le président.

M. Frank Ruddock: Si un projet tombe dans le champ des articles III et IV, le ministre seul ne peut l'approuver étant donné qu'il faut obtenir aussi l'approbation de la CMI. Le ministre ne peut décider de lui-même d'approuver seul un projet car cela constituerait une infraction au traité et à la loi.

Le président: Monsieur Harvard.

M. John Harvard: Après avoir entendu les experts, monsieur le président, je pense qu'il y a déjà des garde-fous juridiques que le ministre serait obligé de respecter. Le simple fait d'établir un garde-fou juridique, comme le propose Mme Lalonde, pourrait peut-être amener un ministre à vouloir le contester, tout comme il pourrait vouloir contester le traité lui-même. J'estime que l'on a déjà toute la protection voulue. À moins que Mme Lalonde ne retire son amendement, je vous suggère de passer immédiatement au vote.

Le président: Très bien.

[Français]

Un dernier mot, madame Lalonde.

Mme Francine Lalonde: M. Reiskind a répondu en disant que, si le ministre voulait procéder et accorder une licence que la commission refuse, ce pourrait être, selon l'expression qu'on a entendue en anglais, «contesté». Mais combien faut-il de temps pour contester cela en cour?

Il me semble qu'il est important de ne pas percevoir ce régime de licences comme une nouvelle façon pour le gouvernement fédéral d'intervenir, de se donner une infrastructure pour faire des choses qu'il ne pouvait pas faire autrement. L'amendement a pour but d'assurer une restriction normale à l'utilisation des pouvoirs qui sont accordés en vertu de la Loi du traité des eaux limitrophes internationales.

Si vous voulez voter maintenant, vous pouvez le faire, mais je tiens à mon amendement.

[Traduction]

Le président: Chers collègues, il est clair que Mme Lalonde tient, pour plus de certitude, à s'assurer que le ministre ne pourra pas sortir des paramètres de la loi, mais il me semble, madame Lalonde, ceci dit très respectueusement, que l'on n'inclut généralement pas dans les lois des articles disant que les ministres ne doivent pas les enfreindre. On ne met généralement pas ça dans une loi.

Mme Francine Lalonde: Bien.

Le président: Or, si nous acceptions votre amendement, c'est fondamentalement ce que nous ferions. Je suis donc prêt à passer au vote sur cette question.

(L'amendement est rejeté avec opposition)

(Les articles proposés 16 à 19 compris sont adoptés avec opposition)

(Article 20—Accords avec les provinces)

Le président: Je crois comprendre qu'il y a deux propositions d'amendement à l'article 20, émanant de M. Casson. Pourriez-vous nous en parler, monsieur?

M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.

La première partie de cet amendement obligerait le ministre à déposer devant le Comité permanent des affaires étrangères et du commercial international tout règlement adopté en vertu de cette loi, dans les 15 jours suivant son entrée en vigueur. La deuxième partie obligerait le ministre à comparaître annuellement devant le comité pour faire le point sur toute question relative à la mise en oeuvre et à l'exécution de cette loi.

• 1600

Le président: Je vois qu'il y a des réactions. Monsieur Keyes, puis le secrétaire parlementaire.

M. Stan Keyes: En ce qui concerne la deuxième partie de l'amendement proposé, obligeant le ministre à comparaître devant le comité permanent à intervalles réguliers, le fait est qu'il comparaît déjà devant le comité permanent, plus d'une fois par an, à l'occasion des prévisions budgétaires et chaque fois que le comité est saisi d'un projet de loi. Or, si j'en juge d'après mon expérience au sein des comités, les ministres sont toujours disposés à répondre à toute question qui leur est posée lorsqu'ils témoignent sur leurs prévisions budgétaires, quel qu'en soit le thème. Donc, si M. Casson a des préoccupations particulières au sujet de la loi, il pourra poser ses questions au ministre lors de ses nombreuses comparutions devant le comité.

Pour ce qui est de la première proposition d'amendement, obligeant le ministre à déposer tout règlement devant le comité parlementaire, j'ose dire que la charge de travail actuelle des comités est telle qu'il leur est déjà impossible de répondre aux nombreuses demandes qui leur sont adressées. Si l'on commençait à déposer devant ce comité chaque règlement qui est adopté, dans les 15 jours suivant son entrée en vigueur, cela constituerait un dédoublement d'une fonction qui existe déjà et notre comité croulerait probablement sous une masse de papier telle qu'elle suffirait probablement à remplir cette pièce, surtout si d'autres comités souhaitaient aussi faire la même chose avec toute modification apportée aux textes réglementaires.

C'est tout ce que je voulais dire.

[Français]

Le président: Monsieur Paradis.

M. Denis Paradis: Monsieur le président, je ne veux pas reprendre toute l'argumentation de M. Keyes, mais je dirais un peu la même chose. Le ministre est toujours prêt, et il l'a démontré, à venir comparaître devant le comité.

Mais si le comité adressait un avis formel au ministre pour l'informer des dates, heures et lieux de ses comparutions au moins 15 jours à l'avance, surtout dans le cas particulier du ministre des Affaires étrangères, cela pourrait entraîner certaines complications. Ainsi, à l'heure actuelle, le ministre est dans les Balkans.

Étant donné que le ministre s'est montré disponible dans le passé, je ne vois pas l'utilité de cet article Comparution du ministre.

Deuxièmement, sur le dépôt des règlements, il existe un comité de la Chambre qui examine les règlements. C'est là que devraient être traités les règlements. De plus, on pourrait peut-être demander au greffier du comité de s'informer des règlements et de nous envoyer ceux qui nous touchent pour qu'on en prenne connaissance. Toutefois, il existe vraiment un comité dont le rôle est de s'occuper de cela.

[Traduction]

Le président: Monsieur Casson.

M. Rick Casson: Si j'en crois mon expérience au sein d'autres comités, je sais qu'il est arrivé que nous ne soyons pas autorisés à poser certaines questions à un ministre comparaissant au sujet des prévisions budgétaires. Quand nous avons voulu poser des questions sur d'autres sujets, le président du comité nous a coupé la parole. Nous voulons donc simplement avoir l'assurance que nous pourrons interroger le ministre sur la mise en oeuvre de cette loi.

Ce comité a peut-être une attitude plus positive que d'autres, mais telle a été mon expérience. Si le secrétaire parlementaire nous disait, au sujet du règlement, qu'il nous serait possible de faire cette demande et qu'il nous confirmait que cela se produirait, nous nous contenterions de cela. Cela dit, si le ministre est prêt à comparaître de toute façon, pourquoi s'opposer à l'amendement?

M. Stan Keyes: Parce que cela se fait déjà.

Le président: D'autres membres du comité souhaitent intervenir.

Monsieur Casson, puisque je préside ce comité, je précise que je n'ai jamais jugé une question irrecevable, quelle qu'elle soit, qui était posée au ministre à l'occasion des prévisions budgétaires.

M. Rick Casson: D'autres l'ont fait.

Le président: Au sein de ce comité, nous considérons qu'il s'agit là d'une occasion qui est offerte aux députés, notamment de l'opposition, d'interroger le ministre sur les politiques générales du gouvernement ainsi que sur les détails mêmes de son budget. Telle a certainement été notre pratique jusqu'à présent, et je suis sûr que M. Obhrai ne me démentira pas.

M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, Alliance canadienne): C'est parce que vous êtes un bon gars.

Le président: Mme Beaumier a présidé les deux dernières séances consacrées aux prévisions budgétaires et c'est elle qui...

Mme Colleen Beaumier (Brampton-Ouest—Mississauga, Lib.): J'ai présidé les dernières réunions. À cette occasion, monsieur Casson, alors que les deux ministres comparaissaient pour discuter de leurs prévisions budgétaires, il n'y a eu qu'une seule question, pour ces deux réunions, qui concernait les prévisions budgétaires. Les autres portaient sur tout sauf les prévisions budgétaires.

M. Deepak Obhrai: J'ai perdu ma chance.

M. Rick Casson: Je répète simplement que cela m'est arrivé dans d'autres comités. Les présidents de comités changent et...

Le président: C'est juste. Vous ne voulez pas que ce soit laissé à la discrétion du président et je suis tout à fait d'accord avec vous là-dessus.

Monsieur Obhrai.

• 1605

M. Deepak Obhrai: Si je ne me trompe, cela est arrivé au comité où il y avait le chef de l'opposition officielle. Le président a jugé de manière péremptoire...

Une voix: C'est vrai.

M. Deepak Obhrai: ... qu'on ne pouvait pas poser d'autres questions sauf...

M. Stan Keyes: Il est préférable de ne pas revenir là-dessus, monsieur le président, nous savons tous comment s'est déroulée cette séance. Il y avait bien d'autres choses en jeu et nous n'aurions pas assez de temps pour vider cette question ici.

M. Deepak Obhrai: Il n'en reste pas moins que ce que nous demandons ne se fait pas automatiquement. Nous ne voulons pas critiquer le président, les vice-présidents ou qui que ce soit d'autre. Ça n'a rien à voir. Nous essayons simplement d'établir un précédent, ou plutôt d'établir une procédure pour le jour où le président du comité aura changé. C'est simplement une garantie.

Si le ministre comparaît, comme vous l'avez tous dit... et je peux bien le confirmer aussi. Il comparaît de temps à autre devant le comité et nous sommes tous très heureux de la manière dont nous avons tous coopéré jusqu'à présent, avec tous les autres membres du comité, mais cela ne veut pas dire que nous n'avons pas besoin de la garantie que nous réclamons.

L'argument de mon collègue est qu'on peut fort bien adopter cet amendement puisque le ministre vient de toute façon témoigner. Je ne vois rien de mal à ça. C'est simplement une garantie pour l'avenir.

Le président: Monsieur Patry.

[Français]

M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.): Très brièvement, monsieur le président, je vous dirai que je suis d'accord sur les objections de mes collègues du Parti libéral. Du strict point de vue technique, selon moi, on ne peut pas inclure dans un projet de loi ou dans une loi le fait que cette loi, devant le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international...

Il y a quelques années, il n'y avait pas de Comité des affaires étrangères et du commerce international; il n'y avait qu'un Comité des affaires étrangères. Les comités relèvent de la Chambre comme telle, du Président, avec l'accord de tous les partis politiques. Donc, si on insérait cette appellation à l'intérieur d'une loi, cela voudrait dire qu'il devrait toujours y avoir un comité des affaires étrangères et du commerce international. Pour moi, c'est redondant.

Le ministre peut venir aussi souvent qu'il le veut entendre les députés, et ceux-ci peuvent se faire entendre par lui aussi souvent qu'ils le veulent. Pour moi, c'est redondant; on ne met pas des choses comme ça dans un projet de loi. C'est aussi simple que ça.

[Traduction]

Le président: Monsieur Harvard.

M. John Harvard: Ma question concerne le deuxième amendement qui est proposé, celui destiné à ajouter l'article 20.2. Je ne serais pas très à l'aise avec le précédent que cela établirait. Je ne pense pas que les comparutions des ministres doivent être régies par des dispositions législatives. Je pense qu'il y a d'autres méthodes pour ce faire. Exiger dans une loi qu'un ministre comparaisse devant un comité me semblerait tout simplement... Si on commence avec ça, où va-t-on arrêter?

Je pense qu'il y a d'autres solutions à ce problème. Je comprends que M. Obhrai se préoccupe de l'avenir et souhaite obtenir certaines assurances quant aux comparutions des ministres, et je suis tout à fait prêt à discuter de ça avec lui, mais je ne pense pas que cela doive être explicité dans une loi comme son parti le propose.

[Français]

Mme Francine Lalonde: L'amendement 20.1 me paraît important parce que ce court projet de loi, en réalité, confère au ministre, par règlement, le moyen de contredire tout ce que contiennent les articles. Ainsi, aux paragraphes 13(3) et (4) proposés, on dit que, par règlement, on peut changer la description des bassins hydrographiques. C'est vraiment quelque chose. Cela peut avoir des conséquences très sérieuses dans les décisions qui suivront. On peut aussi, par règlement, apporter des exceptions à 13(1).

Alors, quand une loi qui se veut une mise en application affirmative du traité comporte les moyens de le contredire par règlement, il me semble que c'est important. Il aurait été intéressant que le ministre vienne avant que les règlements soient adoptés.

Sur ça, je ne sais pas si mes collègues veulent demander un vote scindé, mais il me semble important que ce nouvel article 20.1 soit adopté. Sur les autres, je suis prête à faire davantage confiance au ministre, mais 20.1, pour moi, c'est important.

Le président: D'accord.

[Traduction]

Monsieur O'Brien et monsieur Obhrai.

M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.): Monsieur le président, je suis d'accord pour qu'on n'oblige pas le ministre à comparaître une fois par an juste sur cette question, mais je suis assez favorable à l'idée d'un examen annuel. Je fais depuis longtemps partie de comités—et M. Casson pourra me corriger si je me trompe—où cela est exigé dans la loi.

Je ne vois donc aucun problème avec cette proposition d'examen annuel après l'entrée en vigueur de la loi. D'ailleurs, il n'est peut-être pas nécessaire de préciser que ce serait le ministre, il pourrait s'agir de ses fonctionnaires. Si le comité tient à ce que ce soit le ministre, il pourra également lui demander de venir avec ses fonctionnaires, et j'ai peine à croire qu'un ministre sérieux puisse refuser de comparaître.

• 1610

Donc, s'il s'agit d'un examen annuel, je n'ai personnellement aucune difficulté avec ça mais je suis d'accord avec mes collègues qui disent qu'on ne devrait pas exiger de comparution obligatoire du ministre lui-même.

Le président: Monsieur Obhrai.

M. Deepak Obhrai: C'est bien beau pour mes collègues de dire que le ministre se présentera et qu'il n'est donc pas nécessaire d'inclure cette disposition dans la loi, puisque le comité a le pouvoir de convoquer le ministre chaque fois qu'il le souhaite. Toutefois, quand on est dans l'opposition, on n'a pas ce pouvoir. Le pouvoir appartient au parti du gouvernement. Il serait donc très difficile, si nous avions vraiment besoin du ministre, de le convoquer.

Je pense que nous sommes prêts à voter.

Le président: Personnellement, j'estime que, s'il est vrai que notre comité n'adopte pas beaucoup de projets de loi, le précédent qu'il établirait, si cela était ajouté à tous les projets de loi—sur l'OMC, etc.—garantirait que nous aurions beaucoup de comparutions successives de ministres sur chaque projet de loi.

L'argument de la pente glissante est qu'il n'y a rien qui empêche que ce qui arrive ici de se répande ailleurs, et c'est toujours un problème, de ce point de vue. Je pense que M. Harvard y faisait allusion.

Je vois que certains collègues aimeraient que l'on vote séparément sur chaque proposition. Donc, au lieu de voter sur les deux en même temps, je vais passer au vote sur la proposition visant à ajouter les nouveaux articles 20.1 et 20.2.

(Les amendements sont rejetés avec opposition—Voir le Procès-verbal)

Le président: Il est donc proposé que l'article 20 soit adopté avec opposition?

M. Bernard Patry: Il y a un autre article 20.1 qui est proposé.

Le président: C'est vrai, veuillez m'excuser.

Monsieur Comartin.

M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD): Monsieur le président, cet amendement et celui concernant l'ajout d'un nouvel article 21.1 vont dans le même sens, qui consiste à reconnaître que, lorsque cette loi fut adoptée à l'origine, on ne pensait pas particulièrement à consulter les Premières nations. Il s'agirait donc simplement d'actualiser la loi à ce sujet.

L'article 20 qui est proposé obligera le ministre à consulter les gouvernements provinciaux et il semble tout à fait logique d'en déduire qu'il devrait faire de même avec les Premières nations et avec les autres organisations mentionnées dans cette proposition d'amendement.

Le président: Avant de passer aux déclarations et aux questions, peut-être pourrions-nous demander aux représentants du ministère quelle est la pratique actuelle en matière de consultation des Premières nations?

M. Jason Reiskind: M. Ruddock pourra vous expliquer les consultations qui se sont tenues pour élaborer le projet de loi.

M. Frank Ruddock: Nous avons évidemment tenu de larges consultations pour rédiger le projet de loi. En outre, le projet de loi d'origine—le projet C-15 de novembre 1999—avait été communiqué à toutes les provinces, aux territoires, aux parties prenantes, aux groupes écologistes, aux groupes de droit de l'environnement et aux groupes des Premières nations. Les mêmes informations ont été à nouveau fournies pour ce projet de loi-ci. Autrement dit, nous avons répété l'exercice.

La consultation est en fait l'un des fleurons de ce processus depuis le début. Et nous continuons de consulter les provinces, les territoires et d'autres au sujet des règlements.

Le président: Monsieur Keyes.

M. Stan Keyes: À première vue, monsieur le président, le député, M. Comartin, avait presque recueilli mon adhésion. Toutefois, quand on lit le texte de plus près, on voit que le ministre serait tenu de consulter «les gouvernements autochtones, les entités constituées dans le cadre d'accords sur des revendications territoriales, etc.». Je suis d'accord avec la prémisse de M. Comartin mais il ne faudrait pas que la loi devienne un piège mortel.

• 1615

Pouvez-vous imaginer un instant qu'un ministre, quel que soit le parti au pouvoir, entreprendrait vraiment de négocier des ententes sans la coopération de la province ou des groupes autochtones, et sans les consulter? Je ne peux le concevoir. Je ne suis donc pas d'accord avec M. Comartin là-dessus.

La deuxième partie de votre amendement, monsieur Comartin, concerne «les autres personnes et organismes intéressés». De combien de personnes ou d'organismes s'agit-il? Quelle est votre définition de «personnes intéressées»? Pendant combien de temps cela pourrait-il durer? Jusqu'où faudrait-il aller, du point de vue des consultations, pour vous donner satisfaction?

Le problème est qu'il n'y a pas de définition à ce sujet. L'idée qu'un ministre consulterait, mais ne consulterait pas largement, surtout en ce qui concerne des ententes autochtones ou des accords de revendications territoriales, fait perdre tout son sens à cet amendement.

Merci, monsieur le président.

Le président: Vous voudrez peut-être répondre à ces remarques, monsieur Comartin, mais, avant cela, je vais faire un tour de table. De cette manière, vous pourrez répondre à toutes les remarques en même temps.

Monsieur Paradis.

[Français]

M. Denis Paradis: Monsieur le président, le ministère consulte déjà les autochtones, mais quand on en fait une obligation dans un texte de loi comme celui-ci, si quelqu'un se lève et dit qu'il pas été consulté, qu'arrive-t-il, à ce moment-là, de l'obligation légale qui serait créée avec cet amendement? C'est une obligation légale envers des groupes qu'on n'a pas mentionnés. S'agit-il des chambres de commerce, des municipalités, du groupe anti-pauvreté? Des groupes qui pousseront pourront dire, à un moment donné, qu'ils attaquent la décision ministérielle, la licence émise parce qu'ils n'ont pas été consultés.

Je pense que c'est trop large, monsieur le président. Il faut s'en tenir à l'action du gouvernement qui dit, à un moment donné, qu'il ne fera pas ça tout seul, mais en consultation avec l'ensemble de la population.

Le président: Merci, monsieur Paradis.

[Traduction]

Monsieur Harvard.

M. John Harvard: Je pense que M. Comartin a le coeur à la bonne place et je suppose qu'il propose cet amendement pour éviter qu'un ministre ne veuille à l'avenir imposer sa volonté aux Autochtones ou à qui que ce soit d'autre. Par contre, je ne suis pas convaincu que la solution proposée soit la bonne.

Par exemple, si vous aviez un ministre qui n'était pas tout à fait franc, comment pourriez-vous l'obliger à «consulter»? Quelle est la définition de «consulter»? Est-ce une réunion, six réunions ou 100 réunions? Comment consultez-vous plusieurs groupes de Premières nations ou beaucoup? Je ne vois pas comment vous pourriez protéger ces gens contre un ministre qui se ficherait éperdument des Autochtones ou d'autres personnes.

Certes, vous avez le coeur à la bonne place, comme je l'ai dit, mais vous savez bien qu'en matière de chose publique, il faut s'en remettre un peu à la politique et à la pression publique. On ne peut pas tout prévoir dans la loi. Si vous aviez un ministre irresponsable qui se moque de tout, vous devriez faire face au problème à ce moment-là.

Je ne pense donc pas que ce type d'amendement ait beaucoup de valeur.

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Obhrai et madame Lalonde. Ensuite, je demanderai à M. Comartin de conclure et nous passerons au vote.

M. Deepak Obhrai: Je saisis bien le fond de l'amendement de M. Comartin. Mes collègues de l'autre côté, quand ils parlent de menotter le ministre, ont beaucoup trop recours à des arguments de type juridique.

Ce que je ne comprends pas, et M. Comartin pourra peut-être me l'expliquer, c'est en quoi le simple fait de dire «le ministre consulte» pourrait forcer la main au gouvernement. À mon avis, ce n'est pas du tout le cas. Tout ce qu'on veut ici... Quand on dit qu'il doit consulter, on veut dire qu'il doit parler au groupe plus large. Je n'accepte pas du tout l'argument où l'avocat est sujet... Il doit rencontrer 20 personnes, il doit rencontrer une personne, il ne doit rien faire du tout. C'est aussi large que cela. Quand on y pense, ça donne énormément de latitude au ministre.

• 1620

Ça ne dit rien. Tout ce que ça dit, et c'est l'essence même du message, c'est qu'il doit tenir de larges consultations auprès du public. Je ne vois rien de mal à ça et j'ai donc du mal à accepter l'argument disant qu'on va forcer la main au ministre. Je pense que c'est en fait excellent du point de vue de la transparence.

[Français]

Le président: Madame Lalonde.

Mme Francine Lalonde: Monsieur le président, il me semble impossible qu'on n'adopte pas cet amendement. Je pense que vous avez vous-même dit qu'on avait reçu cette soumission à la fin et qu'on aurait pu, d'ailleurs, consulter les groupes autochtones qui sont susceptibles d'être touchés. Ce dont on parle n'est pas, pour les autochtones, une petite chose. C'est possiblement une dérivation de rivière, avec toutes les conséquences que cela peut avoir. C'est possiblement la création d'un barrage, à l'article 12, avec une certaine inondation. C'est aussi le captage massif d'eau. On connaît le lien qui unit les autochtones au territoire et à la ressource. Qu'on reconnaisse ce lien et qu'on les consulte. Il me semble que c'est indispensable.

Par ailleurs, quant à la crainte que cette consultation doive ne pas s'achever, il me semble que la vie politique qui se pratique dans ce pays ne nous a pas habitués à des consultations à l'infini. C'est plutôt le contraire. Comme on parle d'un projet, on peut faire une ou deux rencontres et inviter tout le monde. On parle des gouvernements autochtones, des entités et d'autres personnes qui auraient quelque chose à dire sur un projet d'importance. Il me semble que la majorité pourrait condescendre à adopter un amendement.

[Traduction]

M. Stan Keyes: Pour que tout soit clair...

Une voix: Pourquoi ne pas...

M. Stan Keyes: Non, il importe de le dire.

Tout d'abord, M. Obhrai affirme que l'un d'entre nous aurait prétendu que cela forcerait la main au ministre. Ce n'est pas du tout ce que nous avons dit. En fait, nous avons dit exactement le contraire.

M. Deepak Obhrai: Non, je n'ai pas dit ça.

M. Stan Keyes: Si, vous l'avez dit.

L'autre problème de l'argument de Mme Lalonde est qu'elle donne l'impression que ce comité est la seule tribune où l'on pourrait tenir des consultations si l'on décidait, par exemple, de construite un barrage ou de détourner un cours d'eau.

Monsieur le président, elle a probablement comme moi l'expérience de consultations qui se sont tenues au titre de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. Il y a toutes sortes d'examens et de procédures à suivre quand on veut construire un barrage. On ne peut pas construire un barrage n'importe où. Si on veut construire un barrage, il faut respecter toutes sortes de règlements sur l'environnement et tenir toutes sortes de consultations. Ce n'est donc pas seulement ici que tout cela doit se faire. Il y a toutes sortes de possibilités de consultation si l'on veut construire un barrage, détourner un cours d'eau ou faire n'importe quoi.

Le président: Avant de donner la parole à M. Comartin, je vais poser une question à M. Ruddock car je pense que M. Keyes a soulevé un point important.

Je suppose qu'il y aurait aussi des consultations de la Commission mixte internationale car, en vertu des articles III et IV, le projet ne pourrait être réalisé sans l'approbation de la CMI. Il y aura donc des consultations de la CMI et des consultations environnementales locales, et je vous demande de me confirmer si tel est le cas, avant de donner la parole à M. Comartin pour la conclusion.

M. Frank Ruddock: Merci, monsieur le président. Je vais peut-être pouvoir aider le comité à prendre sa décision.

Même si le traité a été rédigé il y a de nombreuses décennies, le fait est qu'il était largement en avance sur son temps. On y trouve en effet une obligation de consulter, à l'article XII. C'est l'une des caractéristiques remarquables de ce que doit faire la CMI pour donner son approbation. Par exemple, en ce qui concerne le rapport jalon qu'elle a produit sur la protection des Grands Lacs, elle a tenu deux fois des audiences publiques dans tout le bassin, du côté américain et du côté canadien.

• 1625

La consultation du public est l'une des obligations incontournables que doit satisfaire la CMI chaque fois qu'elle prend une décision. Donc, outre les consultations que nous avons tenues au ministère—au sujet de ce projet de loi, par exemple—la CMI aussi recueille l'opinion du public en vertu des articles III ou IV. C'est déjà prévu dans le traité.

Merci.

Le président: Merci beaucoup.

[Français]

[Note de la rédaction: Inaudible]

Mme Francine Lalonde: ...

Ce n'est pas pour l'application de ça.

[Traduction]

Le président: Peut-être pourriez-vous conclure votre réfutation des remarques, monsieur Comartin?

M. Joe Comartin: En réponse à MM. Keyes, Paradis et Harvard, respectivement, je pense que leurs arguments au sujet du fait que cela ne serait pas un carcan pour le gouvernement aurait beaucoup plus de valeur s'ils ne faisaient pas exactement la même chose.

Je fais partie du Comité de l'environnement qui est actuellement saisi du projet de loi sur les espèces en péril. Le mot «consulte» doit figurer au moins une demi-douzaine de fois dans ce projet de loi. Et il n'y est pas plus défini que dans ma proposition. Donc, votre gouvernement s'oblige à tenir des consultations dans un autre projet de loi concernant les groupes autochtones, les Premières nations, etc.

De fait, quand on réfléchit à l'incidence potentielle d'un projet comme un barrage, monsieur Keyes, elle risque d'être beaucoup plus profonde sur un groupe autochtone et le gouvernement que la Loi sur les espèces en péril. Malgré cela, vous ne voulez pas inclure ici une disposition obligeant le ministre à tenir des consultations, alors que vous semblez tout à fait prêts à le faire dans un autre texte de loi.

Pour ce qui est des remarques que vous avez faites au sujet de la Loi sur l'évaluation environnementale, monsieur Keyes, je fais moi aussi partie de ce comité. En ce qui concerne les amendements proposés, vous êtes en train de restreindre la portée de cette loi, en essayant de rationaliser et d'harmoniser la procédure—et ce projet de loi est actuellement en deuxième lecture devant la Chambre. Il est donc impossible de savoir quelle sera sa forme finale et s'il y aura dans ce texte de loi quoi que ce soit qui assure une protection particulière au sujet des barrages. Voilà pourquoi il nous appartient d'inclure ce type de disposition ici.

Pour ce qui est de la CMI et de sa protection, les remarques de M. Ruddock sont tout à fait justes mais je précise qu'il s'agit là de la responsabilité de la CMI, pas du ministre. Et l'autre problème de la CMI est que, considérant la manière dont son budget est amputé depuis sept ou huit ans, je ne suis pas sûr qu'on puisse compter sur elle pour tenir des consultations exhaustives avec ce type d'organisations.

Merci, monsieur le président.

(L'amendement est rejeté avec opposition—Voir le Procès-verbal)

(L'article 20 proposé est accepté avec opposition)

(Article 21 proposé—Règlements)

Le président: En ce qui concerne l'article 21 proposé, nous avons un autre amendement de M. Comartin. Avant d'en parler, j'aimerais poser une question à M. Ruddock sur les consultations.

Il est arrivé pendant les audiences quelque chose qui a retenu mon attention. L'un des témoins a laissé entendre que le gouvernement américain n'avait pas été particulièrement consulté, ou que les autorités américaines ne l'avaient pas été pendant la formulation de ce projet de loi. Pourriez-vous nous donner des précisions à ce sujet, car je pense qu'il importe d'indiquer publiquement quelles consultations le ministère a pu tenir avec les États-Unis pour préparer ce projet de loi, étant donné que les États-Unis sont à l'évidence nos partenaires dans la gestion des eaux limitrophes, en vertu du traité.

M. Frank Ruddock: Merci, monsieur le président.

Avant de faire une brève remarque à ce sujet, je tiens à souligner que nous parlons évidemment ici d'une loi du Parlement du Canada. En conséquence, si nous parlons de consulter les États-Unis, il ne s'agit aucunement de leur demander leur permission. Il appartient au Parlement du Canada de modifier ses propres lois et, quand nous parlons de cela aux Américains, nous le faisons plus pour leur dire ce que le Canada veut faire et pour connaître leur avis. Il est cependant parfaitement clair que c'est le Parlement...

Le président: Bien sûr.

M. Frank Ruddock: ... qui modifie les lois du Canada.

Depuis la préparation de ce projet de loi, en 1999, nous sommes restés en contact étroit avec les États-Unis de façon à ce qu'ils soient parfaitement conscients de ce que le Canada a l'intention de faire et de l'incidence que pourrait avoir l'action du Canada. Les Américains ont donc tout simplement pris note de ce que nous faisons et ils n'ont formulé aucune remarque négative que ce soit.

Le président: Nous pouvons donc en conclure qu'ils appuient notre politique concernant l'interdiction de retirer de l'eau en vrac des bassins limitrophes.

M. Frank Ruddock: Disons tout simplement qu'ils n'ont fait aucune remarque négative. Ils ont pris acte de notre décision. Je pense qu'ils sont... c'est une loi canadienne.

• 1630

Le président: Merci beaucoup.

Nous allons donc maintenant passer à l'amendement proposé par M. Comartin à l'article 21 proposé. Voulez-vous en parler?

M. Joe Comartin: Oui. Merci, monsieur le président.

Encore une fois, cette disposition figure dans le projet de Loi sur les espèces en péril, dans la Loi sur Parcs Canada ainsi que dans plusieurs autres textes législatifs, si je ne me trompe. Elle ne figure pas dans la loi dont nous parlons, évidemment, parce que ces questions n'étaient pas jugées assez importantes à l'époque. Toutefois, elles sont manifestement importantes aujourd'hui, suite à l'évolution des revendications des Premières nations et aussi à cause de certains arrêts de la Cour suprême, notamment des arrêts Sparrow, Marshall et Delgamuukw.

Encore une fois, monsieur le président, ma position est qu'il s'agit là d'une disposition standard. On commence à la trouver très couramment dans les textes de loi et je ne vois pas pourquoi elle ne figurerait pas aussi dans le projet dont nous sommes saisis.

[Français]

Le président: Monsieur Paradis.

M. Denis Paradis: On parle déjà de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Le texte qui est ici reprend en gros l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Si on reprend le texte ici, on peut se demander ce que cela ajoute. La première fois que vous regardez cela, vous vous demandez ce que cela vient ajouter ou en quoi c'est différent de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Je pense que c'est encore plus fort si on laisse la Constitution parler, si on laisse l'article 35 là où il est, dans la Loi constitutionnelle, plutôt que de le reproduire ici. Si on le reproduit ici, on se demande ce qu'on veut changer par rapport à cela ou ce qu'il y a de différent. Je pense qu'on ne clarifie pas le dossier en ajoutant un nouvel article 21.1 qui reprend les termes de l'article 35 de la Loi constitutionnelle. Bien au contraire, cela soulève des questions.

[Traduction]

Le président: Monsieur Keyes.

M. Stan Keyes: Quand on parle de la Loi constitutionnelle, il est sans doute utile de demander des précisions aux fonctionnaires.

Êtes-vous tous des avocats ou seulement l'un d'entre vous? Jason, vous êtes un avocat, n'est-ce pas? Très bien.

Y a-t-il une abrogation ou une dérogation quelconque de la protection des droits autochtones ou des droits ancestraux dans cette loi? Ces droits sont-ils déjà protégés? En fait, les Autochtones du Canada bénéficient déjà d'une protection en vertu de la Loi constitutionnelle de 1982, n'est-ce pas? Est-il donc nécessaire d'ajouter une autre protection dans ce projet de loi, simplement par souci d'orthodoxie politique?

Vous n'avez pas à me répondre en ce qui concerne l'orthodoxie politique, puisque vous êtes un bureaucrate, mais vous pouvez me dire si les Autochtones sont protégés ou non par la Loi constitutionnelle de 1982 en ce qui concerne l'objectif visé par le député?

M. Jason Reiskind: Vous avez parfaitement raison, monsieur Keyes, ils sont protégés par la Loi constitutionnelle. Je sais que c'est l'opinion générale dans mon ministère. Quand on voit apparaître des dispositions particulières comme celle qui est proposée, on se demande quel est leur objectif. S'agit-il d'accorder une protection additionnelle? Si tel n'est pas le cas, ce genre de disposition risque d'engendrer de la confusion étant donné qu'il y a déjà une excellente protection dans la Constitution.

M. Stan Keyes: Merci, monsieur.

J'ai une autre question pour M. Comartin. Si la Loi constitutionnelle de 1982 accorde déjà une protection aux peuples autochtones à l'égard de tout ce qu'un ministre ou un gouvernement pourrait faire pour abroger ou déroger à une certaine situation, ma préoccupation concerne le mot que vous employez ici, «existants».

M. Joe Comartin: Ce n'est pas mon mot, monsieur Keyes, c'est celui de votre gouvernement.

M. Stan Keyes: Mais c'est votre amendement.

M. Joe Comartin: C'est le terme qu'on trouve dans plusieurs autres textes de loi.

M. Stan Keyes: Peut-être bien, mais je ne parle pas des autres textes de loi, monsieur Comartin. Je parle de l'amendement que vous avez signé et que vous proposez au comité. Que cela figure ailleurs ou non, c'est un mot qui me pose problème. Personne ne l'a peut-être repéré et nous serons peut-être les premiers à ne pas l'inclure dans un nouveau texte de loi.

Quoi qu'il en soit, monsieur Comartin, quand vous parlez des «droits existants—ancestraux ou issus de traités—», pourquoi devrions-nous soudainement nous limiter, avec cet amendement, à ne protéger que les droits autochtones ou ancestraux existants alors que nous avons déjà une Constitution qui protège nos peuples autochtones pour tout ce qui est prévu dans les traités ou les accords autochtones?

• 1635

Ces droits autochtones ou issus des traités pourraient changer dans un an, dans cinq ans ou dans dix. Si tel était le cas, nous devrions revenir sur ce projet de loi et y apporter une modification, parce que nous ne voulons pas qu'il s'applique seulement aux droits autochtones existants mais à tout autre droit autochtone futur. Je pense—et le ministère vient de vérifier—que les Autochtones sont déjà protégés par la Constitution.

M. Joe Comartin: Encore une fois, monsieur le président, je ne suis pas sûr de devoir répondre à cette question car c'est en fait la terminologie qui est déjà utilisée dans d'autres textes de loi.

En tant que juriste, monsieur Reiskind, je sais que vous essayez d'assurer une certaine cohérence, pas seulement dans le cadre de ce projet de loi mais aussi avec toutes les autres lois adoptées par la Chambre, et ce n'est pas ce que nous faisons ici. Si vous rejetez cet amendement, vous votez en fait pour l'incohérence étant donné que cette disposition figure partout ailleurs. On la retrouve dans les autres projets de loi de votre gouvernement.

M. Stan Keyes: Pourquoi?

M. Joe Comartin: J'ai deux réponses à vous proposer, et deux seulement.

Premièrement, la Cour suprême du Canada a indiqué très clairement que nous devons entériner ces droits. En conséquence, je suppose que le gouvernement a adopté comme politique d'intégrer de telles dispositions dans ses projets de loi.

Deuxièmement, monsieur le président, j'ai rédigé cet amendement de cette manière en tenant compte de la législation qui a déjà été proposée par le gouvernement. Il existe en fait une autre formulation que les collectivités des Premières nations préféreraient, très honnêtement, et qui porte précisément sur la remarque que vous venez de faire, monsieur Keyes, au sujet des droits «existants». L'autre formulation est destinée à protéger les droits des Autochtones sans préciser qu'il s'agit des droits «existants». Très franchement, c'est ce que préfèrent les peuples autochtones mais, dans l'espoir d'obtenir une réponse positive de votre côté de la table, j'ai repris la formulation du gouvernement, pas celle que préféreraient les Premières nations.

[Français]

Le président: Monsieur Paradis, et ensuite M. Harvard.

M. Denis Paradis: Monsieur le président, ce sera très court.

[Traduction]

Je veux simplement attirer l'attention du comité sur l'article 35 de la Constitution de 1982, qui dispose que:

    Les droits existants—ancestraux ou issus de traités—des peuples autochtones du Canada sont reconnus et confirmés. [...] Dans la présente loi, «peuples autochtones du Canada» s'entend notamment des Indiens, des Inuits et des Métis du Canada.

C'est bref mais ça dit tout.

Si l'on veut ajouter l'article 21.1 et dire qu'il n'y a rien dans cette loi qui aille à l'encontre de cela, qu'est-ce que ça veut dire? Cela suppose qu'il y a quelque chose dans cette loi qui va à l'encontre de la Constitution. L'article 36 de la Constitution de 1982 parle également de «promouvoir l'égalité des chances de tous les Canadiens dans la recherche de leur bien-être». Allons-nous ajouter un autre article disant que rien dans cette loi ne nous empêche de faire la promotion de l'égalité des chances de tous les Canadiens dans la recherche de leur bien-être?

M. Stan Keyes: Quand allez-vous arrêter?

M. Denis Paradis: Et quand allez-vous arrêter—voilà la question. Cela ajoute-t-il quelque chose, monsieur le président? À mes yeux, non.

Le président: Bien.

Monsieur Harvard.

M. John Harvard: J'ai une brève question à poser à M. Comartin.

M. Comartin a déjà parlé de la soi-disant cohérence des textes de loi mais croit-il vraiment que des amendements comme celui-là ont un sens réel dans le monde réel? Croyez-vous que votre amendement va rehausser d'une manière quelconque la valeur de l'article 35 pour les peuples autochtones du Canada? Si vous dites oui, comment?

M. Joe Comartin: Si vous prenez au sérieux la reconnaissance de leurs droits, vous devez inclure cela dans chaque texte de loi. Tout ce que cela fait, c'est que cela confirme la position du gouvernement et confirme qu'il prend très au sérieux la reconnaissance de ces droits.

M. John Harvard: Si nous prenons cela au sérieux, monsieur Comartin, n'est-ce pas déjà fait par l'article 35? Combien de fois va-t-il falloir le répéter?

M. Joe Comartin: Je n'en sais rien. Votre gouvernement décidera peut-être qu'il l'a déjà fait assez souvent mais il est important que le message soit diffusé. Ça ne doit pas se faire uniquement au niveau politique. Ça doit se faire à tous les échelons de la fonction publique, pour qu'il soit bien clair que nous croyons vraiment qu'ils ont ces droits, que nous avons l'obligation légale de les protéger et que nous voulons transmettre ce message à tout le monde.

M. John Harvard: Comme la Constitution est notre loi fondamentale, ce message est déjà fondamentalement adressé aux Canadiens.

• 1640

Le président: Je vais donner la parole à Mme Lalonde, puis à M. Keyes, et nous passerons ensuite au vote.

[Français]

Mme Francine Lalonde: Je voudrais poser une question à nos experts.

Est-ce que la demande de M. Comartin ne vise pas à faire en sorte que le Canada ne puisse pas utiliser la priorité de ses obligations internationales sur la reconnaissance des droits des autochtones? Je pose cette question parce qu'on peut dire que les provinces ont aussi des pouvoirs constitutionnels. S'il y a conflit entre les deux... On voit qu'à l'article 14 proposé, on dit:

    14. Les articles 11 à 13 lient Sa Majesté du chef du Canada ou d'une province.

[Traduction]

M. Jason Reiskind: J'en ai parlé aujourd'hui à nos spécialistes des Affaires autochtones. Si je comprends bien, leur position est qu'ils préfèrent que cela reste limité à la Constitution étant donné qu'ajouter une telle disposition, qui reflète déjà ce qu'il y a dans la Constitution, risquerait d'être une source de confusion.

M. Stan Keyes: Pas si vite, John.

Faisons un peu marche arrière. Où avez-vous trouvé cette formulation, monsieur Comartin?

M. Joe Comartin: Dans la Loi sur les espèces en péril.

M. Stan Keyes: Cette formulation existe-t-elle dans d'autres types de lois ou...

M. Joe Comartin: On la trouve aussi dans la Loi sur Parcs Canada.

M. Stan Keyes: La Loi sur Parcs Canada. C'est la seule loi où figure actuellement cette disposition?

M. Joe Comartin: Ce sont les deux seules que je connais mais je crois comprendre qu'il y en a peut-être d'autres. Je n'ai tout simplement pas eu le temps de vérifier.

M. Stan Keyes: C'est important, monsieur le président, et nos fonctionnaires... Je n'ai pas de difficulté à inclure une telle disposition dans un projet de loi, si cela permet en fait de rendre les choses plus claires, étant donné notre travail au sujet des droits autochtones et des droits issus des traités. Si c'est une disposition standard qu'on trouve dans chaque texte de loi depuis janvier, je n'ai pas de problème.

Cela dit, les fonctionnaires ont vérifié avec le ministère des Affaires indiennes, ce qui est très bien, de bureaucrate à bureaucrate. J'aimerais savoir quelle est la position du gouvernement et celle du ministre sur le fait qu'une telle disposition pourrait ou non être incluse dans ce texte de loi—et sur la raison pour laquelle elle ne devrait pas l'être, dans le cas contraire.

Quelqu'un peut-il répondre à cette question?

Le président: Je vais demander conseil au secrétaire parlementaire.

Je ne m'exprime pas vraiment en tant que président. Monsieur Comartin, vous nous dites que vous avez tiré cela d'un autre texte de loi et il est donc évident que c'est quelque chose que le gouvernement a déjà fait dans le passé.

Je suis tenté de m'en tenir au raisonnement de M. Reiskind, qui affirme que cela ne fait que répéter l'évidence—et que la Constitution prime sur toute incohérence éventuelle des textes de loi. C'est la nature même d'une Constitution. C'est sa raison d'être. Donc, vous dites que ce projet de loi ne peut aller à l'encontre de la Constitution. Nous le savons fort bien. Aucune loi ne peut aller à l'encontre de la Constitution car c'est précisément le fondement même d'une Constitution.

Cela dit, si la pratique du gouvernement consiste à inclure cette disposition dans les textes de loi, pour les raisons que vous avez indiquées—c'est-à-dire pour réitérer le fait que la politique du gouvernement consiste à reconnaître le caractère sacré des droits autochtones et des droits issus des traités—c'est un objectif sensiblement différent. J'aimerais savoir si c'est vrai ou non.

Je ne sais pas si quelqu'un peu nous donner un avis à ce sujet. Vous-même, monsieur Reiskind, vous avez dit que le ministère a certaines réserves car cela risque d'engendrer de la confusion. Pourriez-vous cependant nous dire si, malgré ce problème, cette disposition a été adoptée ou non dans un autre texte de loi? Et n'a-t-elle été adoptée que dans des circonstances où il aurait pu y avoir un problème?

• 1645

Cette législation me semble parfaitement claire. Elle ne soulève peut-être pas de problèmes similaires à ceux qu'on a pu identifier dans d'autres lois. Savez-vous si la disposition que M. Comartin nous dit être standard a été adoptée par le gouvernement dans d'autres projets de loi? Si tel est le cas, je pense que les membres du comité devraient en être clairement informés avant de s'y opposer.

M. Jason Reiskind: Je sais, par exemple, qu'on la trouve dans la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie mais, quand j'en ai discuté avec les gens qui s'occupent de législation autochtone, aujourd'hui, ils m'ont dit qu'ils préféreraient que l'on n'adopte pas de telles dispositions car elles sont une source de confusion. Je peux donc simplement en conclure que leur préférence est de ne pas inclure de telles dispositions dans les lois.

Le président: Monsieur Comartin.

M. Joe Comartin: Je sais personnellement que cela n'est pas vrai. On trouve cette disposition dans la Loi sur les parcs nationaux et dans le projet de loi sur les espèces en péril. C'est donc une pratique courante. L'information que M. Reiskind vient de vous donner n'est pas exacte.

Le président: Vous dites qu'on la trouve dans deux autres textes de loi.

M. Joe Comartin: Oui.

Le président: Je vais m'adresser à M. O'Brien, puis au secrétaire parlementaire, pour essayer d'obtenir des éclaircissements sur la position du gouvernement. Ensuite, nous pourrons passer au vote. Les membres du comité pourront voter pour ou contre, selon leur opinion personnelle, étant donné l'importance que cela peut avoir.

Monsieur O'Brien.

M. Pat O'Brien: Sans répéter ce que vous avez dit, monsieur le président, cette disposition est manifestement superflue, mais je sympathise quand même avec M. Comartin. Si elle est incluse délibérément dans d'autres textes de loi pour réitérer notre engagement envers les peuples autochtones, je voudrais le savoir.

Je dois vous dire, monsieur Comartin, que le fait qu'elle se trouve dans deux projets de loi ne produit quand même pas une tendance très forte, considérant tous les projets de loi que nous adoptons, mais il nous faut quand même une réponse.

Nous avons examiné assez de textes de loi—même si la plupart d'entre nous ne sommes pas des avocats—pour savoir que chaque projet de loi a ses propres objectifs, nuances et raisonnement. Voilà pourquoi nous étudions chaque projet de loi article par article.

Je me demande dans quelle mesure on peut vraiment parler de tendance mais je vais attendre l'intervention de mon collègue, le secrétaire parlementaire.

M. Stan Keyes: Qui a intérêt à nous donner une réponse.

Le président: Le secrétaire parlementaire...

M. Stan Keyes: Vous allez gagner votre argent, maintenant, Denis.

Le président: ... responsable des tendances législatives.

[Français]

M. Denis Paradis: Monsieur le président, tout le monde s'est un peu exprimé. Comme presque tout le monde, je suis d'avis que ce n'est certainement pas contraire au sens de l'article 35 de la Constitution, car ça reprend l'article 35 de la Constitution.

C'est aux membres du comité de choisir. On a mentionné plus tôt que cela s'était fait dans deux ou trois cas. C'est aux membres du comité de choisir. Monsieur le président, je n'ai pas de direction à donner à cet égard. Je ne dirai pas qu'on doit l'approuver ou qu'on ne doit pas l'approuver. Si on l'approuve, on va suivre le trend et si on ne l'approuve pas, on ne suivra pas ce trend, mais il n'y a pas d'objection fondamentale à ne pas l'approuver.

[Traduction]

Le président: Bien. C'est donc clair, du point de vue politique, comme vient de le dire le secrétaire parlementaire. Nous avons entendu qu'un avocat a des réserves à ce sujet, mais nous avons aussi entendu des collègues nous dire que c'est une disposition qui figure couramment dans d'autres textes de loi.

Je vais donc maintenant vous demander si vous souhaitez suivre la pratique adoptée avec les autres textes de loi, c'est-à-dire si vous pensez que cette disposition est nécessaire ici, étant donné que la loi est relativement simple et claire et que ce n'est peut-être pas nécessaire, ou pas autant que dans d'autres textes de loi. Je vais donc vous demander tout simplement de voter selon votre opinion.

Qui est en faveur de l'amendement proposé?

[Français]

Madame Lalonde, êtes-vous en faveur de cet amendement?

Mme Francine Lalonde: Oui.

[Traduction]

Le président: Qui est contre?

Je vois cinq pour et un contre. Il me semble que la tendance prévaut et que l'amendement de M. Comartin est adopté.

(L'amendement est adopté—Voir le Procès-verbal)

(L'article 21 proposé est adopté tel que modifié, avec opposition)

• 1650

(Les articles proposés 22 à 26 compris sont adoptés avec opposition)

Le président: Merci. Dois-je maintenant simplement passer à l'article 1?

[Français]

Madame Lalonde.

Mme Francine Lalonde: J'ai une question pour nos experts. Les cartes qui nous ont été passées l'ont-elles été seulement à titre indicatif? Pour le Québec, le tracé est insatisfaisant.

Le président: Voulez-vous incorporer New York ou une partie de l'Ontario? Vous envisagez Toronto maintenant, madame Lalonde?

Mme Francine Lalonde: Le tracé des bassins hydrographiques contrôlés par ce projet de loi est inadéquat.

Le président: D'accord. La carte ne fait pas partie de la loi.

Monsieur Ruddock.

M. Frank Ruddock: Madame Lalonde, la carte a été distribuée à titre indicatif seulement. La carte n'a absolument rien à faire pour montrer les dispositions du projet de loi ou les règlements. C'est seulement une aide pour que, lorsqu'on mentionne un plan d'eau, on puisse le trouver.

Mme Francine Lalonde: Merci beaucoup, monsieur Ruddock. C'est sur les bleus.

Le président: Cette carte n'a aucune portée juridique.

[Traduction]

(L'article 1 tel que modifié est adopté avec opposition)

(L'article 2 est adopté)

Le président: Le titre est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le président: Le projet de loi tel que modifié est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Mme Francine Lalonde: Avec opposition.

Le président: Puis-je faire rapport du projet de loi modifié à la Chambre?

Des voix: D'accord.

Le président: Très bien. Merci beaucoup, chers collègues.

Je répète, pour l'édification des gens qui suivent cette séance à la télévision, que ce projet de loi est renvoyé devant la Chambre pour une troisième lecture.

Cela met un terme au travail de notre comité concernant le projet de loi modifiant la Loi du Traité des eaux limitrophes internationales pour interdire le prélèvement d'eau en vrac des bassins limitrophes. Cela fait partie d'un projet en trois volets du gouvernement du Canada visant à garantir que les gouvernements provinciaux et fédéral collaboreront pour protéger nos eaux, qui constituent une ressource naturelle précieuse.

Je tiens à remercier sincèrement les représentants du ministère qui nous ont aidés pendant nos travaux, soit M. Ruddock et les membres de son équipe, M. Cooper et M. Reiskind. Nous vous remercions sincèrement de votre coopération et je suis sûr que nous aurons l'occasion de vous revoir.

Maintenant, chers collègues, nous sommes saisis d'une autre question. M. Obhrai souhaite proposer une résolution concernant la situation qui règne actuellement en Afghanistan. Je crois savoir que le texte vous en a été distribué.

Vous l'avez tous sous les yeux? Parfait.

Nous allons faire une pause de deux minutes.

• 1654




• 1656

Le président: Nous reprenons nos travaux.

Chers collègues, M. Obhrai nous a remis un projet de résolution concernant la situation en Afghanistan et nous avons trois représentants du ministère qui vont nous présenter brièvement cette situation.

Je tiens à vous rappeler que les deux sonneries risquent de se déclencher à 17 h 15, pour sonner pendant 15 minutes. Nous devrons donc lever la séance vers 17 h 25. Je demande donc à tout le monde d'être assez bref.

Mme Marsden-Dole prendra la parole en premier. Merci beaucoup d'être venue, madame.

Veuillez m'excuser, monsieur Obhrai, nous devrions peut-être entendre d'abord les représentants du ministère, avant de passer à votre motion.

M. Deepak Obhrai: Je pense qu'il faudrait peut-être indiquer tout de suite les changements à la motion.

Le président: D'accord. M. Obhrai va nous indiquer quelques changements qu'il a apportés à sa motion.

M. Deepak Obhrai: Ce qui ne veut pas dire que ce sont des changements venant du ministère.

Le président: Certes, mais nous savons que vous travaillez dans un esprit de collaboration.

M. Deepak Obhrai: J'essaie. C'est difficile mais j'essaie.

Monsieur le président, la situation dont nous parlons est très grave. Quand on commence à identifier les minorités, cela risque d'avoir de graves conséquences.

La modification que je propose est celle-ci. L'expression «que le Canada parraine une résolution» serait remplacée par «que le Canada parraine, avec les pays partageant les mêmes vues, une résolution aux Nations Unies en faveur de la promotion et de la protection des droits de la personne, y compris de la liberté religieuse et du respect du droit humanitaire international en Afghanistan». De cette manière, on indiquerait que le Canada prendrait l'initiative d'une telle résolution.

L'expression antérieure «continue de coparrainer» est problématique dans la mesure où elle n'indique pas quel pays prendra l'initiative. Cette résolution indique clairement que le Canada doit prendre l'initiative de la résolution aux Nations Unies, en collaborant avec les pays partageant les mêmes vues. Est-ce possible?

Mme Patricia Marsden-Dole (directrice générale, Direction générale de l'Asie du Sud et du Sud-Est, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Puis-je répondre?

Le Canada n'est plus membre du Conseil de sécurité de l'ONU depuis fin décembre. En conséquence, nous sommes obligés de travailler avec d'autres pays. L'un des partenaires que nous pourrions envisager pour coparrainer une telle résolution pourrait être la Norvège.

M. Deepak Obhrai: C'est très bien. Tant que l'on indique que le Canada parraine la résolution, je suis satisfait. La version précédente, où l'on disait que le Canada «continue d'appuyer des résolutions» n'indiquait pas que le Canada serait le chef de file.

Je tiens à ce que le Canada soit le chef de file à cet égard. On pourrait dire «parraine» ou «coparraine».

Mme Patricia Marsden-Dole: «Coparraine».

M. Deepak Obhrai: «Coparraine» est parfait. Est-ce possible?

Mme Patricia Marsden-Dole: Je vais demander à mon collègue.

Le président: Permettez-moi de vous interrompre une seconde. Comme la séance est télédiffusée, il conviendrait d'expliquer ce que nous faisons aux téléspectateurs.

M. Obhrai a proposé une résolution condamnant le gouvernement des Talibans, en Afghanistan, parce qu'ils viennent d'obliger la population hindoue ou non musulmane à porter un insigne d'identification. Il a ensuite demandé au gouvernement du Canada de parrainer une résolution aux Nations Unies pour condamner cette violation des droits humains par les Talibans et pour demander au Canada d'isoler le gouvernement afghan s'il ne revient pas sur cette décision.

Voilà l'essence de la résolution. Nous allons maintenant ouvrir le débat.

Veuillez m'excuser de vous avoir interrompue, madame Marsden-Dole.

Mme Patricia Marsden-Dole: Monsieur le président, voulez-vous que je parle de la résolution elle-même ou de la situation générale en Afghanistan?

M. Pat O'Brien: Un rappel au Règlement.

Le président: Je vous en prie.

• 1700

M. Pat O'Brien: J'aimerais connaître exactement le texte de la résolution dont nous sommes saisis. Est-ce que le dernier paragraphe de la résolution du 25 mai reste tel quel?

M. Deepak Obhrai: Nous essayons de conclure le texte de manière adéquate. Parlez de la résolution.

M. Pat O'Brien: Mais j'aimerais bien savoir quel en est le texte exact.

Le président: Quel est donc le texte exact de la résolution?

M. Deepak Obhrai: Je vérifie avec le ministère car, si le Canada ne peut pas parrainer, il peut coparrainer, n'est-ce pas?

Le président: D'après la remarque de Mme Marsden-Dole, si le Canada voulait présenter une telle résolution aux Nations Unies, il devrait le faire par le truchement du Conseil de sécurité. Comme nous ne sommes plus membre du Conseil de sécurité, nous devrions obtenir qu'un autre pays parraine la résolution avec nous.

Mme Patricia Marsden-Dole: C'est cela, à moins que nous décidions d'attendre une occasion lors de l'Assemblée générale de l'automne.

Le président: Bien.

M. Deepak Obhrai: Pouvons-nous coparrainer?

M. Stan Keyes: Un rappel au Règlement, monsieur le président. Je ne veux pas passer mon temps ici à attendre que M. Obhrai rédige sa motion avec les représentants du ministère, et je suis sûr que mes collègues partagent mon avis. Qu'il aille donc rédiger sa motion comme il le souhaite et qu'il revienne ensuite devant le comité pour qu'on en discute.

M. Deepak Obhrai: Non, pas question. J'ai fait une déclaration publique. Si vous ne... Je ne suis pas prêt à la changer. Je la laisse telle quelle.

M. Stan Keyes: Monsieur Obhrai...

M. Deepak Obhrai: Comme ça, vous pourrez voter contre. Nous essayons de... Le chef de votre parti en Chambre est venu me voir, et votre gouvernement est venu ici, pour obtenir un consentement unanime à ce sujet. Mais si vous ne voulez pas, alors...

M. Stan Keyes: Non, monsieur Obhrai, j'ai tout le temps que vous voulez à vous consacrer...

M. Deepak Obhrai: Voici, voici...

M. Stan Keyes: Une seconde, une seconde, monsieur Obhrai.

M. Deepak Obhrai: C'est une question importante.

M. Stan Keyes: Qui a la parole?

Le président: Je tiens à vous signaler que les téléspectateurs ne seront pas ravis d'assister à cette dispute. Ce n'est généralement pas comme ça que le comité fait son travail. Laissons les gens s'exprimer.

Je tiens à faire respectueusement remarquer aux députés qu'il s'agit d'une question importante et qu'il ne nous reste pas beaucoup de temps. Si nous reportons ce débat, nous perdrons l'occasion d'adopter cette motion. J'invite les députés à prendre une décision claire au sujet du texte de la motion et de l'adopter cet après-midi car la Chambre va bientôt suspendre ses travaux pour l'été et il serait regrettable qu'on perde cette chance d'exprimer notre point de vue sur cette question internationale importante.

M. Stan Keyes: J'accède à votre demande, monsieur le président.

Le président: Merci. Toutefois, monsieur Keyes, je comprends qu'il nous faut un texte définitif. Je vais donc maintenant demander quel est le texte définitif, car ce n'est pas plus clair pour moi que pour les autres.

M. Deepak Obhrai: Monsieur le président, allons-nous mettre «coparraine» ou «parraine»?

Mme Patricia Marsden-Dole: Je vais demander à mon collègue, qui a réfléchi à la question.

Le président: Merci beaucoup.

M. James Junke (directeur, Division de l'Asie du Sud, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Il est peu probable que nous puissions faire adopter une résolution se limitant strictement à cette question. Quand la dernière résolution du Conseil de sécurité a été adoptée, en décembre, il s'agissait d'imposer d'autres sanctions aux Talibans, et ce sont les Russes et les Américains qui avaient été les chefs de file. Il y a d'autres questions qu'ils voudront prendre en considération, notamment des sanctions unilatérales imposées aux Talibans, mais pas sur le front uni luttant contre les Talibans, ce qui a l'appui des Américains, des Russes, des Iraniens et des Indiens.

Nous nous opposons à ça mais nous avons appuyé, par exemple, les résolutions portant sur le terrorisme et sur son parrainage par les Talibans, ainsi que sur le commerce international de la drogue, ce qui est un problème très grave. Nous avons aussi ajouté à la résolution nos propres préoccupations concernant la crise humanitaire très grave que traverse actuellement le pays, ainsi que la transgression des droits humains, notamment des femmes et des enfants.

Ce n'est donc pas comme si nous pouvions parrainer des résolutions strictement sur cet aspect. Nous pouvons dire que nous voulons coparrainer, s'il y a lieu, en association avec les autres pays partageant nos vues. Nous sommes tout à fait prêts à appuyer une telle formulation. Comme nous ne sommes pas membre du Conseil, nous devrons probablement oeuvrer avec la Norvège ou avec un autre pays similaire pour avoir gain de cause.

M. Deepak Obhrai: Bien. Voici donc le texte que je propose:

    coparraine une résolution aux Nations Unies en faveur de la promotion et de la protection des droits humains, notamment de la liberté de religion et du respect du droit humanitaire international en Afghanistan.

Considérant ce que vous venez de dire au sujet des préoccupations canadiennes en matière de questions humanitaires, je pense que nous pouvons ajouter ici:

    Considérant que la situation en Afghanistan est complexe et que la crise humanitaire s'aggrave, le Canada appuie le rapport d'avril 2001 du secrétaire général recommandant une approche globale des problèmes graves en Afghanistan et invitant les Talibans à coopérer.

• 1705

Nous ajouterons cette partie à la résolution. D'accord?

M. James Junke: Après coparrainer, nous aimerions ajouter «s'il y a lieu», ce qui nous donnerait la possibilité de négocier avec d'autres pays, ou avec d'autres agences, et de traiter avec les Américains et les Russes qui ont des objectifs différents de celui-ci.

Le président: Pour que les choses soient bien claires, nous sommes saisis d'un projet de résolution de M. Obhrai comportant quatre paragraphes introductifs. Je suppose que personne n'a de problème avec ceux-là: «Déplorant les conséquences sérieuses», «Reconnaissant que les Talibans continuent de bafouer les droits humains fondamentaux des citoyens du pays»; «Réitérant que la liberté religieuse est un droit fondamental»; le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international recommande que le gouvernement du Canada...». Jusque-là, personne n'a de problème, n'est-ce pas?

Monsieur O'Brien, avez-vous un problème quelconque avec ce que je viens de dire?

M. Pat O'Brien: Non, monsieur le président. J'aimerais toutefois poser une question si...

[Français]

Mme Francine Lalonde: On dit: «bafouer les droits humains fondamentaux». À cet égard, je pense qu'on ne peut pas ne pas ajouter: «en particulier ceux des femmes et des enfants», puisqu'on a été sensibilisés très récemment aux horreurs auxquelles sont soumis les femmes et les enfants, les jeunes filles qui n'ont pas le droit d'étudier, etc. La liberté de religion est une chose, mais la liberté des femmes est extrêmement importante.

[Traduction]

Le président: Je pense qu'il serait acceptable, au deuxième paragraphe, qui dit «Reconnaissant que les Talibans continuent de bafouer les droits humains fondamentaux des citoyens du pays» d'ajouter «notamment des femmes et des enfants».

[Français]

Mme Francine Lalonde: C'est ça.

[Traduction]

Le président: Cela vous convient-il, chers collègues?

[Français]

Mme Francine Lalonde: Oui. Il y a un texte du ministère qui...

[Traduction]

Le président: Cet amendement vous convient-il, monsieur Obhrai?

M. Deepak Obhrai: C'est où, monsieur?

Le président: C'est à la ligne deux, «reconnaissant que les Talibans continuent de bafouer les droits humains fondamentaux des citoyens du pays, notamment des femmes et des enfants», suite à la proposition de Mme Lalonde.

Nous en avons donc fini avec les paragraphes introductifs. Nous allons maintenant passer aux recommandations.

Monsieur O'Brien, vous voulez poser une question.

M. Pat O'Brien: Tout d'abord, je suis très sensible à ce que M. Obhrai tente de faire. En revanche, comme je ne saisis toujours pas quel est le texte définitif de la résolution, je vais demander à ce qu'on prenne deux minutes pour que quelqu'un la lise.

En outre, comme je l'ai déjà demandé, le dernier paragraphe du texte du 25 mai fait-il toujours partie de la résolution ou non?

M. Deepak Obhrai: Nous allons devoir annuler ça. Vous avez raison, on l'a remplacé.

M. Pat O'Brien: Si tel est le cas, j'ai un problème avec le ton.

M. Deepak Obhrai: Ce paragraphe a été retiré suite aux changements que j'ai apportés.

M. Pat O'Brien: Un rapport au Règlement, monsieur le président. Si quelqu'un pense avoir compris le texte définitif de la résolution, peut-il nous le lire?

Une voix: C'est ce que nous faisons.

M. Pat O'Brien: Non, nous y allons morceau par morceau. Je voudrais qu'on me lise le texte au complet.

Le président: Bien. Je crois comprendre, madame Ahmed, que vous êtes en mesure de nous lire le texte définitif de la résolution puisque vous en avez discuté avec M. Obhrai.

Mme Roohi Ahmed (chargée de dossier, Division du Pakistan, de l'Afghanistan et de l'Asie du Sud, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Certainement. La résolution sur l'Afghanistan proposée par M. Obhrai est celle-ci:

    Déplorant les conséquences sérieuses de l'édit du 22 mai 2001 des Talibans d'Afghanistan pour obliger la population hindoue à porter un insigne indiquant sa religion;

    Reconnaissant que les Talibans continuent de bafouer les droits humains fondamentaux des citoyens du pays, notamment des femmes et des enfants [...]

Cela comprend les changements que nous venons juste d'intégrer.

Le président: Je regrette de vous interrompre mais l'un de nos collègues dit qu'il faudrait peut-être remplacer «femmes et enfants» par «femmes et filles», car ce sont les enfants sont masculins.

Mme Roohi Ahmed: D'accord.

Le président: Est-ce acceptable?

M. James Junke: Il y a le problème des enfants-soldats, de la main-d'oeuvre enfantine. Ce sont plus des garçons que des filles, donc ce sont les enfants.

Le président: Les enfants, bien. Merci de cette précision. Nous vous en sommes reconnaissants. Donc les femmes et les enfants.

Mme Roohi Ahmed: Nous sommes donc tous d'accord avec le deuxième paragraphe.

Le président: Oui.

• 1710

Mme Roohi Ahmed: Voici le troisième:

    Réitérant que la liberté religieuse est un droit humain fondamental;

    Le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international recommande que le gouvernement du Canada:

    Fasse immédiatement une déclaration pour condamner les mesures prises récemment par les Talibans en Afghanistan;

    Que le Canada continue de coparrainer, s'il y a lieu, des résolutions à l'intérieur du système des Nations Unies, en association avec les autres pays partageant ses vues, en faveur de la promotion et de la protection des droits humains, notamment de la liberté de religion et du respect du droit humanitaire international en Afghanistan.

Tout le monde a-t-il ce texte? Je peux le relire. C'est l'article modifié... l'article supplémentaire.

M. Pat O'Brien: C'est le texte définitif?

Le président: C'est la fin? C'est la dernière clause?

Mme Roohi Ahmed: Non, il y a un autre paragraphe.

Le président: Il y a un autre paragraphe. Pourriez-vous donc relire ce paragraphe et ensuite le dernier?

Mme Roohi Ahmed: Certainement.

Le président: Merci.

Mme Roohi Ahmed: Voici:

    Que le Canada continue de coparrainer, s'il y a lieu, des résolutions à l'intérieur du système des Nations Unies, en association avec les autres pays partageant ses vues, en faveur de la promotion et de la protection des droits humains, notamment de la liberté de religion et du respect du droit humanitaire international en Afghanistan.

Il y a un autre paragraphe après ça.

Le président: Puis-je demander une précision? S'agit-il là d'amendements amicaux, monsieur Obhrai...

M. Deepak Obhrai: Oui.

Le président: ... que vous avez rédigés avec le gouvernement?

M. Deepak Obhrai: Oui, nous avons rédigé cela ensemble. Mais j'ai une autre question. Quand vous dites «continue de coparrainer», coparrainez-vous déjà quelque chose?

Mme Roohi Ahmed: Oui, mais pas sur cette question.

M. James Junke: Dans la documentation que nous allons vous remettre, vous trouverez une liste de nos activités dans les diverses tribunes du système de l'ONU—Assemblée générale, Conseil de sécurité, Commission des droits de l'homme, UNESCO, etc. Nous sommes très actifs dans un certain nombre de tribunes.

Le président: Nous reviendrons là-dessus quand vous nous présenterez votre documentation et que nous nous serons entendus sur la formulation définitive.

Il y a un autre paragraphe. Je regrette de vous compliquer continuellement la vie mais je crois que le début... Veuillez lire les premiers mots de votre paragraphe. Ça commence par «le gouvernement du Canada continue...»

Mme Roohi Ahmed: «Que le Canada continue...».

Le président: Oui. Comme le paragraphe résolutif dit «le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international recommande que le gouvernement du Canada», vous voudrez peut-être retirer la référence au Canada à cette ligne puisqu'elle figure déjà plus haut.

M. James Junke: On commencerait donc par «continue».

Le président: Oui.

Mme Roohi Ahmed: Le dernier article, que M. Obhrai a aussi accepté, est donc:

    Considérant que la situation en Afghanistan est complexe et que la crise humanitaire s'aggrave, le Canada appuie le rapport d'avril 2001 du secrétaire général de l'ONU recommandant une approche globale de la crise grave en Afghanistan et invitant les Talibans à coopérer à la prestation d'une aide humanitaire d'urgence.

Le président: Parfait. C'est amical et utile.

Nous allons maintenant demander aux représentants du ministère s'ils ont des informations à communiquer au sujet de la situation actuelle, après quoi nous passerons au débat.

Madame Beaumier, voulez-vous commencer tout de suite?

Mme Colleen Beaumier: Je suppose. J'ai la même préoccupation que M. Obhrai mais j'ai le sentiment que cette résolution est très passive. Si l'on dit «continue de coparrainer», ça ne semble pas très proactif. Vous dites que vous ne coparrainez actuellement aucune résolution de ce type mais nous ne donnons pas au gouvernement l'instruction de chercher à coparrainer une résolution.

• 1715

Le président: Avant d'engager le débat sur la résolution, je voudrais donner quelques minutes aux représentants du ministère pour qu'ils fassent le point sur la situation. Nous reviendrons ensuite sur notre résolution.

Voulez-vous faire un rappel au Règlement?

[Français]

Mme Francine Lalonde: Le texte que vous avez lu est assez long et nous ne l'avons pas, celui-là. Je parle du dernier paragraphe.

Le président: Non, c'est nouveau.

Mme Francine Lalonde: Pour débattre de façon intelligente, il faudrait avoir le texte. Il faudrait que nous le donniez en dictée. Je suis habituée à prendre des notes. J'ai pris trois lignes en note, mais il m'en manque cinq.

[Traduction]

Le président: Vous pourriez peut-être relire le dernier paragraphe, madame Ahmed, puis madame Lalonde

[Français]

capter le sens de cela.

[Traduction]

Mme Roohi Ahmed: Avec plaisir.

[Français]

Vous parlez du dernier paragraphe?

[Traduction]

    Considérant que la situation en Afghanistan est complexe et que la crise humanitaire s'aggrave, le Canada appuie le rapport d'avril 2001 du secrétaire général de l'ONU recommandant une approche globale de la crise grave en Afghanistan et invitant les Talibans à coopérer à la prestation d'une aide humanitaire d'urgence.

M. John Harvard: Puis-je poser une question, monsieur le président?

Le président: Oui.

M. John Harvard: La première ligne de ce dernier paragraphe, «considérant que la situation en Afghanistan est complexe», me semble avoir pour effet d'adoucir la résolution. Est-ce qu'on ne pourrait pas simplement dire que la situation empire? Je pense que cette ligne atténue la résolution. Ce qui se passe dans ce pays est lamentable et je pense qu'il faut le dire avec plus de vigueur.

Le président: Je comprends. Je crois que c'était aussi la remarque de Mme Beaumier et de M. Keyes. C'est difficile à dire si nous n'avons pas le texte exact.

Nous pourrions peut-être prendre quelques minutes pour savoir ce que fait le gouvernement à ce sujet. Ensuite, pendant les 10 dernières minutes de la séance, nous pourrons décider de ce que nous faisons avec cette résolution.

Mme Patricia Marsden-Dole: Je vais résumer les notes que nous avons préparées à votre intention. Nous vous avons remis une documentation qui contient beaucoup de renseignements sur les diverses initiatives du gouvernement. Je vais résumer.

Comme vous connaissez la nature du problème, je dirais simplement que le Canada n'a pas de relations officielles avec les Talibans et que nous n'avons plus de relations diplomatiques avec l'Afghanistan depuis 1979. Toutefois, quand nous avons entendu parler de cette nouvelle mesure, notre haut-commissariat à Islamabad a entrepris une démarche urgente auprès de l'ambassadeur des Talibans à Islamabad, le 24 mai au matin, soit deux jours après notre information. Lors de cette rencontre, on nous a dit que l'édit des Talibans était destiné à protéger les Hindous. C'est ce qu'on nous a dit. Bien sûr, les Talibans estimaient que la presse avait donné une mauvaise interprétation de l'édit.

Malgré cela, nous avons confirmé notre position. Le ministre des Affaires étrangères a fait une déclaration déplorant cette mesure du gouvernement des Talibans. Nous pourrons vous en donner des exemplaires. Cette déclaration commençait par ces termes: «Le ministre Manley condamne l'identification des minorités religieuses par les Talibans».

• 1720

Le 26 mai, soit deux jours plus tard, le haut-commissariat d'Islamabad a rencontré les représentants du ministère pakistanais des Affaires étrangères qui nous ont dit que le gouvernement du Pakistan partageait nos préoccupations mais qu'il n'avait pas encore vu l'édit. À ce moment-là, personne ne l'avait encore vu parce que les autorités religieuses du régime taliban ne l'avaient pas encore signé.

Le gouvernement du Pakistan a attiré notre attention sur la déclaration officielle qu'il a faite le 24 mai au sujet de la Déclaration universelle des droits de l'homme, soulignant les droits reliés à la tolérance religieuse et à l'égalité des droits de tous les citoyens et précisant que cela correspondait parfaitement à l'islam.

J'aimerais attirer votre attention sur notre dernier paragraphe concernant l'aide humanitaire du Canada aux réfugiés. Vous y trouverez deux éléments, l'aide humanitaire et les droits humains, sur lesquels le Canada concentre ses efforts. De fait, nous continuons de concentrer nos efforts en Afghanistan sur les nombreux projets auxquels nous participons dans les domaines de la santé, de l'éducation, des mines terrestres et de l'aide alimentaire traditionnelle. Nous appuyons les efforts déployés par le HCR des Nations Unies pour aider les personnes déplacées à cause du conflit en Afghanistan.

À la dernière page de notre documentation, vous trouverez une liste des activités entreprises par le Canada dans diverses tribunes internationales pour exprimer notre position sur l'Afghanistan.

Le président: Il nous reste maintenant sept minutes. Cette résolution jouit-elle d'un appui suffisant, sous sa forme actuelle, pour que nous puissions l'adopter immédiatement ou pensez-vous que nous devrions lever la séance et en faire le premier sujet de notre prochaine réunion?

Monsieur Keyes.

M. Stan Keyes: Tout d'abord, monsieur le président, je ne pense pas que la résolution soit assez ferme. En outre, je n'en ai pas le texte définitif sous les yeux. Je ne peux voter sur quelque chose que j'ai simplement entendu.

Le président: Je comprends.

Monsieur Obhrai, nous allons lever la séance pour vous permettre de produire le texte définitif de votre résolution, avec l'aide du ministère.

M. Deepak Obhrai: Je suis profondément déçu. Je veux que ceci...

Une voix: Ah, écoutez...

M. Deepak Obhrai: Laissez-moi parler. J'ai la parole.

Je suis profondément déçu par ce qui vient de se passer parce que j'avais proposé une résolution très forte. Suite aux commentaires du gouvernement et du ministère, elle est atténuée. Il s'agit pourtant d'un problème urgent dont il convient de traiter immédiatement. Le député là-bas qui parle de toutes ces choses...

M. Stan Keyes: Nous disons qu'elle n'est pas assez ferme.

M. Deepak Obhrai: ... est à l'origine de tout cela. Peut-être devrait-il en parler à son gouvernement.

Le président: Collègues...

M. Deepak Obhrai: Nous voulons faire quelque chose.

M. Stan Keyes: Mais ce n'est pas assez.

M. Deepak Obhrai: Allez-y, demandez-leur. Nous voulons que ce soit fait. J'ai proposé la résolution pour que ce soit fait.

Le président: À l'ordre.

Voici la situation. Monsieur Obhrai, vous avez proposé une résolution et nous vous en félicitons. Toutefois, vous vouliez que le gouvernement l'appuie et je crois comprendre que les représentants du ministère ont fait tout leur possible, avec vous, pour présenter une résolution modifiée.

Les députés du parti gouvernemental ne disent pas qu'ils ne veulent pas adopter la résolution. Ils savent qu'elle est importante. En fait, Mme Beaumier et M. Keyes disent qu'elle n'est pas assez ferme. Nous sommes donc clairement de votre côté à ce sujet.

Si nous voulons prendre une décision adéquate, je crois qu'il importe de remettre le texte définit aux membres du comité pour qu'ils puissent voter.

Nous avons cette salle jusqu'à 18 h 30. Les membres du comité sont-ils prêts à revenir ici pour finir plus tard? D'ici là, quelqu'un pourra préparer le texte définitif de la résolution et nous le distribuerons aux membres du comité, après quoi nous pourrons voter. Nous reviendrons donc là-dessus tout à l'heure.

Tel est le voeu du comité. C'est parfait. Nous reviendrons après le vote.

Madame Lalonde.

[Français]

Mme Francine Lalonde: Monsieur le président, nous avons adopté une motion unanime sur l'Irak qui a été très importante parce que nous avons pris le temps de regarder les enjeux.

• 1725

Les talibans posent pour moi un défi encore plus grand. Je suis très heureuse que M. Obhrai ait proposé cela, mais je pense qu'il faut prendre le temps de bien faire cette proposition.

Le président: Oui, tout à fait. Vous opposez-vous à ce que nous revenions après le vote? Je crois qu'il y a un autre problème, celui du calendrier parlementaire. Si tout le monde est d'accord sur la portée de la résolution, il vaudrait mieux que nous l'adoptions aujourd'hui si possible.

M. Antoine Dubé (Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, BQ): Nous ne serons pas là.

Le président: D'accord.

[Traduction]

Nous reviendrons après le vote. Merci beaucoup.

• 1726




• 1802

Le président: Nous reprenons nos travaux.

Monsieur Obhrai, ai-je raison de penser qu'aucun changement notable n'a été apporté aux quatre premiers paragraphes?

M. Comartin est de retour et nous sommes sur le point d'avoir le quorum.

Monsieur Comartin, j'étais en train d'expliquer à tout le monde que nous allons faire le point sur la formulation définitive de la résolution, après quoi nous passerons à son adoption.

M. John Harvard: Êtes-vous en train de dire que nous allons encore modifier le texte?

Le président: Nous avons repris la séance officielle mais, avant de retourner à la télévision, je vais faire le point sur le texte avec vous.

M. John Harvard: Je voudrais faire une suggestion au sujet du dernier paragraphe.

Le président: Bien.

M. John Harvard: Puis-je y aller maintenant ou après M. Obhrai?

Dans le dernier paragraphe, où l'on condamne les Talibans pour ce qu'ils ont fait, notamment à l'égard de la population non musulmane, je pense que nous devrions exiger en plus qu'ils abrogent cette mesure.

Nous disons simplement dans le dernier paragraphe «à coopérer à la prestation d'une aide humanitaire d'urgence». C'est très bien, je n'ai rien à reprocher à ça, mais je pense qu'il faut aussi leur dire de cesser.

Le président: Je suis d'accord.

M. Obhrai vient de distribuer la troisième version, en plus petits caractères. Les caractères rétrécissent mais les idées grandissent. Je vous demande de remplacer celle que l'on vous avait donnée par celle-ci, qui commence par les mots «profondément troublé par».

Cela remplace «déplorant», et c'est manifestement plus ferme.

Et nous convenons que l'on dira ensuite:

    Reconnaissant que les Talibans continuent de bafouer les droits humains fondamentaux des citoyens du pays, notamment des femmes et des enfants;

Une voix: D'accord.

Le président: Voici le texte:

    Réitérant que la liberté religieuse est un droit humain fondamental;

Sommes-nous d'accord?

Des voix: D'accord.

Le président: On dit maintenant:

    Le comité permanent [...] recommande que le gouvernement du Canada:

    Fasse immédiatement une déclaration condamnant les actions récentes des Talibans en Afghanistan;

Des voix: D'accord.

• 1805

Le président: Et puis:

    Continue de coparrainer activement des résolutions, s'il y a lieu, dans le système des Nations Unies, en faveur de la promotion et de la protection de la liberté religieuse et du respect [...]

Mme Colleen Beaumier: Enlevez «s'il y a lieu».

Le président: En effet, je sais que vous ne ferez rien s'il n'y a rien lieu de faire. Le ministre ne ferait rien qui ne soit pas nécessaire.

Mme Diane Marleau (Sudbury, Lib.): Pourquoi dites-vous «continue»? Pourquoi ne pas dire que le gouvernement du Canada:

    Coparraine activement des résolutions dans le système des Nations Unies en faveur de la promotion et de la protection de la liberté religieuse et du respect du droit international en Afghanistan.

Une voix: Absolument.

Mme Diane Marleau: Point à la ligne.

Le président: Mais vous ne voulez pas indiquer que le gouvernement agit déjà?

Mme Diane Marleau: Non. Nous savons bien que le gouvernement fait déjà quelque chose mais nous voulons qu'il fasse autre chose.

Le président: Bien.

M. John Harvard: Je pense que le mot «continue» est tout à fait approprié car ce n'est pas la seule initiative. Il s'agit d'ajouter quelque chose à notre arsenal.

Une voix: Oui, mais c'est «s'il y a lieu» qu'ils veulent retirer.

Le président: Je voudrais obtenir votre accord officiel pour retirer «s'il y a lieu». D'accord?

Des voix: D'accord.

Le président: C'est pratiquement unanime. Parfait.

Il s'agit maintenant de savoir si nous allons laisser le mot «continue». Vous voudriez le retirer.

M. Deepak Obhrai: Je voudrais dire «coparraine des résolutions aux Nations Unies». C'est tout.

Le président: Bien. Qui veut laisser «continue» et qui veut...

Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Je pense qu'il est important de laisser «continue» étant donné que le paragraphe précédent dit «fasse immédiatement une déclaration condamnant». Cela souligne le caractère urgent de notre préoccupation et le fait que nous sommes profondément troublés, mais nous tenons à ce que le gouvernement continue de parrainer activement des résolutions à ce sujet.

Le président: Bien.

Mme Jean Augustine: J'aimerais donc laisser cela dans la résolution, étant donné qu'il y a «immédiatement» au paragraphe précédent.

M. Deepak Obhrai: Puis-je dire quelque chose?

Le président: Oui.

M. Deepak Obhrai: Je comprends ce que vous dites et je sais que le ministère agit déjà à ce sujet.

Le but de la résolution est de se focaliser précisément sur cette question. C'est pourquoi sa portée est plus limitée. Le ministère agit déjà. Il coparraine. Il fait beaucoup de choses. Laissons-le continuer et, de manière plus générale, dans le cadre de ce qu'il fait déjà, nous voulons que le comité lui recommande quelque chose sur cette question particulière. C'est le but de la résolution. Sinon, vous avez raison, nous allons perdre de vue l'objectif global. Mais je comprends ce que vous dites.

Mme Jean Augustine: Mais mon argument est que cela ouvre un peu plus grand la porte parce que vous avez inclus là-dedans pas seulement les droits humains fondamentaux ou les mesures récentes mais aussi la promotion, la protection, le respect. Il me semble que vous ouvrez la porte un peu plus grand, ce qui est l'une des raisons pour lesquelles je préférerais «continue».

Le président: Bien.

M. Deepak Obhrai: Je pense que «coparraine des résolutions» veut dire la même chose.

Le président: D'accord.

Monsieur Harvard.

M. John Harvard: Je voudrais revenir à l'avant-dernier paragraphe.

Le président: Pourrions-nous d'abord régler celui-ci, le dernier paragraphe, avant de retourner à l'avant-dernier?

M. John Harvard: D'accord.

Le président: Monsieur O'Brien, voulez-vous parler du dernier paragraphe?

M. Pat O'Brien: Oui. Je voudrais interroger les représentants du ministère étant donné l'importance que l'on accorde à chaque virgule à l'ONU. Préférez-vous «continue» et, si oui, pourquoi?

Mme Patricia Marsden-Dole: Cela répond à l'argument que nous présentions tout à l'heure—c'est-à-dire qu'il s'agit d'une campagne continue. Mais c'est à vous de choisir, c'est votre résolution.

Le président: Bien.

Mme Diane Marleau: C'est notre résolution, donc...

Le président: Oui.

M. Deepak Obhrai: Je comprends que c'est une action continue. Rien ici n'empêche que l'action continue. C'est une préoccupation continue et ça continue. L'intention de cette chose était ce qu'il y a et nous nous en occupons. Je ne vois pas pourquoi nous ne pouvons pas parler de cette question précise.

Si nous commençons à ouvrir trop largement les portes, nous allons alors dire, comme politique, que nous avançons dans cette direction sur les nombreuses questions de droits humains et beaucoup de choses. Mais je veux que cette chose soit précise sur cette question, sinon nous allons perdre l'objectif essentiel de tout ça.

Le président: Je pense que nous connaissons bien la position de tout le monde là-dessus. Faisons un bref sondage.

• 1810

Que ceux qui veulent supprimer «continue»...

M. Deepak Obhrai: C'est parce que ça passe à la télévision.

Le président: Bien, ceux qui sont en faveur de supprimer «continue», pour recommander seulement au gouvernement de «coparrainer activement des résolutions». Un, deux, trois, quatre.

Ceux qui sont contre supprimer «continue». Un, deux, trois, quatre. Vous êtes contre, madame Augustine, oui.

M. Stan Keyes: Je le veux.

Le président: Vous le voulez donc vous êtes opposé au retrait. C'est cinq contre quatre.

Une voix: Je pense que c'est un aspect mineur de la question.

Le président: D'accord. De toute façon, c'est cinq contre quatre...

M. Deepak Obhrai: Non, non, c'est ma résolution.

Le président: Oui, mais ça peut...

M. Deepak Obhrai: Non, vous pourrez voter contre ma résolution.

Le président: C'est votre résolution telle qu'elle est ici, vous avez raison.

M. Deepak Obhrai: Vous pourrez voter contre ma résolution.

Le président: D'accord.

M. Deepak Obhrai: Vous ne pouvez pas. Vous oubliez l'essentiel de toute cette chose. Je ne veux pas faire de politique, je veux l'essentiel de la chose.

Le président: Bien, attendez une minute...

M. Deepak Obhrai: Si vous voulez faire ça, ça va. Laissez simplement ma résolution, votez contre et fin du problème. Oubliez tout.

M. Stan Keyes: Ce n'est pas ce que nous voulons.

Le président: Non, non, non.

M. Deepak Obhrai: Je fais tout mon possible pour coopérer mais je veux préserver l'essentiel de toute la chose. Non, non, vous allez la changer.

Le président: En tant que président, je vais prendre une décision pour que nous sachions bien ce que nous faisons.

Monsieur Obhrai, vous nous avez soumis cette résolution et je suis en train de passer au vote. Vous ne pouvez pas dire maintenant que vous allez la modifier et vous mettre en colère contre eux parce qu'ils ne veulent pas accepter les changements que vous voulez faire. Nous avons votre résolution. C'est de cela que nous discutons. C'est votre résolution et donc, comme ils disent, vous êtes pris à votre propre piège.

[Note de la rédaction: La séance se poursuit à huis clos]

• 1822

[Note de la rédaction: La séance publique reprend]

Le président: Nous reprenons nos travaux après le vote et nous avons eu l'occasion de nous pencher sur la résolution révisée de M. Obhrai concernant les événements récents en Afghanistan. Je voudrais vous lire le texte sur lequel se sont entendues toutes les parties concernées, grâce à notre collaboration usuelle. La résolution se lit maintenant comme suit:

    Profondément troublé par l'édit du 22 mai 2001 des Talibans d'Afghanistan forçant la population hindoue à porter un insigne religieux dénotant sa foi;

    Reconnaissant que les Taliban continuent de bafouer les droits humains fondamentaux des citoyens afghans, notamment des femmes et des enfants;

    Réitérant l'importance de la liberté religieuse comme droit humain fondamental;

    Reconnaissant le travail continu du gouvernement du Canada dans ce domaine;

    Le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international condamne l'action récente des Talibans en Afghanistan et recommande au gouvernement du Canada de coparrainer activement des résolutions, s'il y a lieu, dans le cadre du système des Nations Unies, en faveur de la promotion et de la protection de la liberté religieuse et du respect du droit international en Afghanistan.

Monsieur Obhrai.

M. Deepak Obhrai: Vous avez ajouté un mot. Nous avions décidé de supprimer «s'il y a lieu».

Le président: Vous avez parfaitement raison. Mes excuses. Merci.

M. Obhrai propose donc une motion pour que sa résolution telle que modifiée soit adoptée sous forme de troisième rapport du comité adressé à la Chambre. Êtes-vous d'accord?

Des voix: D'accord.

Le président: Y a-t-il consentement unanime à ce sujet?

Des voix: Oui.

Le président: Suis-je autorisé à apporter tout changement orthographique ou typographique qui pourrait être nécessaire, s'il ne change pas le fond même du rapport?

Des voix: D'accord.

Le président: Je peux ajouter «s'il y a lieu» si j'estime qu'il y a lieu?

Des voix: Oh!

Le président: Merci beaucoup, chers collègues, et merci, monsieur Obhrai, pour une résolution très utile. Merci.

La séance est levée.

Haut de la page