FINA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent des finances
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 2 mai 2002
¿ | 0930 |
M. Keith Peterson (président, Association des municipalités du Nunavut) |
¿ | 0935 |
¿ | 0940 |
La présidente |
Mme Winnie Cadieux (maire de Enterprise; directrice (communautés à charte/hameaux/établissements), Association des municipalités des Territoires du Nord-Ouest) |
La présidente |
Mme Winnie Cadieux |
¿ | 0950 |
La présidente |
M. Glen Everitt (maire de Dawson; président, Association of Yukon Communities) |
¿ | 0955 |
À | 1000 |
La présidente |
M. Whit Fraser (conseiller politique, Inuit Tapiriit Kanatami) |
À | 1005 |
À | 1010 |
Le président |
Mme. Veronica Dewar (présidente, Pauktuutit Inuit Women's Association) |
À | 1015 |
À | 1020 |
À | 1025 |
La présidente |
Mme Veronica Dewar |
La présidente |
Mme Veronica Dewar |
La présidente |
À | 1030 |
M. Charlie Penson (Peace River, Alliance canadienne) |
La présidente |
M. Keith Peterson |
La présidente |
M. Glen Everitt |
À | 1035 |
La présidente |
Mme Winnie Cadieux |
La présidente |
M. Charlie Penson |
Mme Winnie Cadieux |
À | 1040 |
M. Charlie Penson |
Mme Winnie Cadieux |
La présidente |
M. Charlie Penson |
La présidente |
M. Charlie Penson |
La présidente |
M. Charlie Penson |
La présidente |
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe--Bagot, BQ) |
La présidente |
M. Keith Peterson |
À | 1045 |
La présidente |
M. Glen Everitt |
La présidente |
Mme Winnie Cadieux |
La présidente |
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.) |
La présidente |
M. Bryon Wilfert |
À | 1050 |
M. Glen Everitt |
M. Bryon Wilfert |
M. Glen Everitt |
M. Bryon Wilfert |
M. Glen Everitt |
La présidente |
M. Shawn Murphy (Hillsborough, Lib.) |
La présidente |
M. Keith Peterson |
M. Glen Everitt |
À | 1055 |
M. Shawn Murphy |
M. Glen Everitt |
La présidente |
M. Keith Peterson |
La présidente |
Mme Winnie Cadieux |
Á | 1100 |
La présidente |
Mme Maria Minna (Beaches—East York, Lib.) |
La présidente |
M. Keith Peterson |
Á | 1105 |
La présidente |
M. Glen Everitt |
La présidente |
M. Glen Everitt |
La présidente |
M. Whit Fraser |
La présidente |
Mme Winnie Cadieux |
La présidente |
Mme Maria Minna |
La présidente |
Á | 1110 |
M. Yvan Loubier |
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.) |
La présidente |
M. Yvan Loubier |
La présidente |
M. Yvan Loubier |
La présidente |
M. Whit Fraser |
La présidente |
Mme Veronica Dewar |
M. Yvan Loubier |
M. Whit Fraser |
M. Yvan Loubier |
Á | 1115 |
La présidente |
M. Glen Everitt |
La présidente |
Mme Winnie Cadieux |
La présidente |
M. Roy Cullen |
Á | 1120 |
La présidente |
Mme Veronica Dewar |
La présidente |
Mme Winnie Cadieux |
La présidente |
M. Keith Peterson |
Á | 1125 |
M. Glen Everitt |
La présidente |
M. Whit Fraser |
Á | 1130 |
La présidente |
CANADA
Comité permanent des finances |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le jeudi 2 mai 2002
[Enregistrement électronique]
¿ (0930)
[Traduction]
La présidente (Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.)): Bonjour, mesdames et messieurs. Bienvenue à tous. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous tenons aujourd'hui des discussions prébudgétaires.
Nous accueillons un certain nombre de témoins. Au cours des deux prochaines heures, nous entendrons nos témoins et les membres du Comité des finances leur poseront des questions.
Nous souhaitons la bienvenue aux témoins suivants: le maire Glen Everitt, de l'Association des communautés du Yukon, dont il est le président; M. Whit Fraser, conseiller politique de l'Inuit Tapirit Kanatami of Canada—merci de venir nous rencontrer; Mme Veronica Dewar, présidente de l'Inuit Women Association; la mairesse Winnie Cadieux, de l'Association des municipalités des Territoires du Nord-Ouest—je crois qu'elle se joindra à nous un peu plus tard; M. Keith Peterson, président de l'Association des municipalités du Nunavut.
Qui souhaite commencer? Keith, vous voulez être entendu en premier? Vous avez un maximum de dix minutes.
M. Keith Peterson (président, Association des municipalités du Nunavut): Madame la présidente, je vous remercie de votre invitation à participer à cette discussion sur les questions relatives au Nord. C'est pour moi un honneur de comparaître de nouveau aujourd'hui devant votre comité. En octobre dernier, votre comité s'était réuni à Edmonton. Nous avions présenté un bon exposé et vous nous avez invités à Ottawa. Évidemment, vous nous aviez également demandé d'inviter un grand nombre de députés au Nunavut. Je suis sûr qu'après cette semaine, ils seront nombreux à venir chez nous.
Nous sommes heureux que le Comité permanent des finances ait convoqué cette réunion la semaine où les maires du Nunavut sont réunis ici pour leur assemblée générale annuelle. Bon nombre d'entre eux sont venus ici aujourd'hui à titre d'observateurs, et j'en profite pour leur souhaiter la bienvenue.
Je m'appelle Keith Peterson et je suis le maire de Cambride Bay, une localité située au-dessus du cercle polaire, dans la région Kitikmeot du Nunavut. L'Association des municipalités du Nunavut représente 27 communautés et 28 000 habitants du Nunavut.
Madame la présidente, nous nous sommes rendu compte, après notre dernière comparution devant votre comité qu'il était essentiel pour nous d'exercer des pressions auprès des politiciens fédéraux pour leur faire connaître les problèmes qui confrontent les municipalités du Nunavut. Il est rare que tous les maires d'un territoire viennent à Ottawa pour rencontrer des politiciens fédéraux. Pour votre comité, c'est une bonne occasion d'en apprendre davantage sur le Nunavut, et nos maires espèrent apprendre comment Ottawa prend les décisions qui touchent notre territoire.
Le simple fait d'être ici cette semaine est pour nous un apprentissage. L'autre jour, nous avons visité la Chambre des communes. Nous avons également rencontré le ministre des Finances et expliquer certaines de nos préoccupations. Malheureusement, il ne nous a pas donné de chèque. J'ai appris par la suite que c'est vous qui en êtes chargés.
La dernière fois où j'ai comparu devant vous, nous avions déclaré que les investissements fédéraux au Nunavut ne constituent pas un flux de capitaux à sens unique. Par la suite, nous avons chargé la firme KPMG d'entreprendre une analyse des effets que le Nunavut a eus sur le reste du Canada en 1999 et en 2000. Vous avez déjà reçu des exemplaires de cette étude, je crois.
KPMG s'est fondée sur les renseignements de Statistique Canada pour préparer son étude. Celle-ci démontre que la quasi-totalité des sommes investies au Nunavut par le gouvernement fédéral a des effets exceptionnellement importants pour le reste du Canada. Par exemple, en l999 le gouvernement fédéral a transféré 610 millions de dollars au gouvernement du Nunavut. Notre gouvernement a rassemblé 10 p. 100 de ce montant de ses propres sources. D'après cette étude, on estime que le Nunavut dépense 450 millions de dollars au Sud.
Madame la présidente, nous savons tous qu'il faut 601 millions de dollars pour faire fonctionner notre territoire. Mais cet argent ne disparaît pas dans un trou sans fond. Malheureusement, les contribuables du sud du Canada disent souvent que l'argent investi dans le nord disparaît; ce n'est pas le cas. Cet argent revient dans bon nombre des provinces sous forme de dépenses pour l'achat d'aliments, de véhicules, de bois d'oeuvre et de matériel.
D'après les résultats de notre étude, chaque année, en 1999 et en 2000, de 4 000 à 9 000 années-personnes d'emploi à l'extérieur du Nunavut venaient directement des importations par le Nunavut en provenance du reste du pays. Chaque année, en 1999 et 2000, on peut également estimer que le reste du Canada a retiré de 300 à 400 millions en valeur ajoutée qui provenaient des importations faites par le Nunavut. Madame la présidente, ces chiffres montrent bien, comme je l'ai dit, que le Nunavut n'est pas un fardeau pour le gouvernement fédéral.
Lors de la dernière réunion, vous aviez proposé qu'on vous explique ce que le gouvernement fédéral peut faire pour aider le Nunavut. Je vais commencer par l'infrastructure. Le Nunavut est très déçu et déconcerté de n'avoir reçu que 2 millions de dollars sur un montant total national de 2 milliards de dollars affecté au programme canadien d'infrastructure. On ne peut pas utiliser une formule d'allocation par habitant au Nunavut. Cela ne peut pas marcher. Notre population de base ne compte que 28 000 habitants, ce qui nous désavantage. Les besoins de notre infrastructure municipale dépassent largement le montant qui nous a été alloué. Quand j'ai rencontré le ministre des Finances, l'autre jour, je lui a présenté une liste dont le total est d'au moins 250 millions de dollars.
La semaine dernière, notre association a effectué un sondage auprès de 16 communautés du Nunavut et a demandé à celles-ci de nous fournir leur liste de travaux nécessaires. Ces localités ont besoin d'usines de traitement des eaux, d'usines de désalinisation, de routes et d'écoles—des choses de base dont les gens du sud ont également besoin.
Madame la présidente, le ministre fédéral des Finances a annoncé en décembre la création de la Fondation pour l'infrastructure stratégique, laquelle recevra une dotation de 2 milliards de dollars. Elle ne vise que les grands projets stratégiques. J'ai appris que ce programme est conçu en fonction des grands projets urbains du sud du Canada dont la facture est d'au moins 50 millions de dollars. Il peut s'agir entre autres de projets comme le système de métro léger sur rail à Toronto, le nettoyage du port de Halifax et, peut-être, un centre des congrès à Vancouver. Je le répète, madame la présidente, cela ne nous sera d'aucun secours au Nunavut.
¿ (0935)
Ce programme d'infrastructure ne répondra pas mieux aux besoins des communautés du Nunavut, que le programme canadien d'infrastructure. Avant qu'on mette la touche finale à ce programme, il est impératif que le gouvernement fédéral veille à ce que les critères soient adaptés au Nunavut, ou encore qu'il conçoive un programme destiné aux régions rurales—je crois savoir que les critères n'ont pas encore été fixés, qu'on est encore en train de les élaborer—puisque, madame la présidente, en nous fournissant l'infrastructure de base dont nous avons besoin au Nunavut, pour que nos habitants puissent jouir d'une qualité de vie à peu près semblable et aussi abordable que pour les autres Canadiens, cet investissement dans l' infrastructure de base stimulera le développement économique, la création d'emplois et les possibilités de formation des habitants de notre région.
Le gouvernement fédéral a créé quatre agences de développement économique régionales pour diverses régions du Canada. Ces agences visent à combler les disparités économiques entre les régions du Canada, disparités qui sont démontrées par les écarts entre les taux de chômage, la participation de la main-d'oeuvre active et le revenu des particuliers. Je parle bien sûr de la diversification économique de l'Ouest, de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique, de l'Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec et de la FedNor, dans le nord de l'Ontario. Ces quatre agences de développement régionales visent plus particulièrement le développement économique et encouragent l'adoption de solutions précisément adaptées aux régions qu'elles desservent.
Les activités entreprises par ces agences visent à renforcer les économies régionales, à exploiter les meilleurs éléments du potentiel économique des régions et à contribuer au renforcement général de l'économie nationale. Nos ententes de développement économique sont des contrats de partenariat entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux en vue de stimuler le développement économique dans ces provinces ou territoires. Et pourtant, madame la présidente, le Nunavut—et en fait tout le Nord—ne possède pas d'agence de développement économique ou d'entente de développement économique. Nous ne disposons pas de certains des outils de croissance économique que possède le reste du Canada, outils qui pourraient nous aider à stimuler le développement économique ainsi qu'à créer de la richesse et des emplois dans notre territoire.
Il n'existe pas de cadre fédéral-territorial qui permettrait de favoriser le développement économique général dont ont besoin le Nunavut et tout le Nord. Les municipalités du Nunavut dépendent à peu près entièrement des paiements de transfert du gouvernement. Nous avons désespérément besoin d'investissements considérables dans l'infrastructure de base, de politiques qui stimulent les investissements, d'allégements fiscaux et de stratégies de développement économique. Dans une telle situation, il est impossible à un territoire de créer de la richesse pour sa population.
Un certain nombre d'autres facteurs compromettent également le développement économique du Nunavut, entre autres les coûts élevés du transport, de la construction, la distance qui nous sépare des marchés, et le fait que notre population est jeune et croissante. On dit que les jeunes sont notre avenir, mais que pouvons-nous leur offrir vu les pénibles conditions que nous connaissons actuellement?
Dans 60 p. 100 du Nunavut environ, on manque de cet accès Internet efficace et abordable que les gens du Sud tiennent pour acquis. Il n'existe pas de modems de câble à grande vitesse ni de ligne de transmission par fibre optique au Nunavut. Nous devons avoir recours au service interurbain pour cela. Cela entrave notre développement économique, l'enseignement à distance et les soins médicaux à nos habitants.
À cause des coûts du transport dans le Nord, il est à peu près impossible à nos entreprises d'être concurrentielles ou aux particuliers et aux familles de voyager. Un billet aller-retour de Cambridge Bay à Edmonton coûte plus de 2 000 $. Pour venir ici, j'ai dû débourser plus de 4 000 $. Il m'en coûte 4 500 $ pour aller par avion de Cambridge Bay à notre capitale, Iqaluit. Il nous est difficile de voyager et nous ne pouvons compter que sur le transport aérien pour nous déplacer au Nunavut.
Le Nunavut a un potentiel économique énorme que les gouvernements du reste du Canada doivent reconnaître et favoriser. Chez nous, il y a des ressources minérales partout. Il y a deux nouvelles mines de diamant dans les Territoires du Nord-Ouest et les négociations en vue de construire un oléoduc-gazoduc ont eu une influence économique capitale dans ce territoire. Les possibilités de tourisme sont excellentes, de même que les possibilités d'exploitation de ressources renouvelables. L'assainissement du réseau DEW pourrait susciter une période de prospérité économique dans bon nombre de nos communautés.
Ces dernières veulent sortir du cycle de dépendance financière et faire un apport significatif à l'économie du Canada. En investissant dans le Nord grâce à des politiques et des programmes fédéraux adaptés à nos besoins, on obtiendra des dividendes sous forme d'impôts et d'augmentation du produit intérieur brut au Canada et au Nunavut. En outre, de telles mesures stimuleraient notre propre sens de l'autonomie. Sans ces investissements, nos communautés continueront de lutter à contre-courant pendant encore des décennies.
Madame la présidente, nous demandons à votre comité de nous aider en veillant à ce que le Nunavut et le Nord puissent se prévaloir d'initiatives, de politiques et de programmes importants de développement, y compris d'une entente de développement économique et d'une agence de développement régional. Entre autres, la dévolution de programmes et de pouvoirs fédéraux au gouvernement territorial sera avantageuse à bien des égards pour le Nunavut et représentera une étape marquante dans l'évolution d'une territoire, comme cela a été le cas pour le Yukon.
Au cours des derniers mois, l'Association des municipalités du Nunavut a déposé trois nouvelles résolutions lors des réunions nationales du conseil de direction de la Fédération canadienne des municipalités. Ces résolutions portaient sur une nouvelle formule d'affectation des fonds destinés à l'infrastructure municipale, sur la nécessité de signer une entente de développement économique et de mettre en oeuvre un processus de dévolution. Notre Forum du Nord, qui regroupe toutes les communautés situées au nord du 55e parallèle, a appuyé ces résolutions—d'ailleurs, mon collègue Glen Everitt, le maire de Dawson City, au Yukon, est le président du Forum du Nord.
¿ (0940)
Même s'il peut-être ardu de répondre aux besoins en infrastructure matérielle du Nunavut, c'est du moins un projet quantifiable et nous pouvons fournir au ministre des Finances une estimation des coûts. À titre de maire, je puis assurer à votre comité qu'il est infiniment plus difficile de répondre aux besoins du Nunavut en matière de développement social. Comment peut-on quantifier ces problèmes? Par où commencer? Le défi est de taille. Le niveau de scolarité et la qualité des soins de santé sont des éléments importants de ce projet. Les habitants du Nunavut doivent pouvoir obtenir les mêmes services médicaux et le même enseignement que tous les autres Canadiens; mais ce n'est pas le cas à l'heure actuelle.
Pour régler nos problèmes sociaux, il faut d'abord trouver par où commencer. Le point de départ le plus concret serait peut-être d'élaborer une stratégie de développement économique pour le Nunavut. Cette stratégie, conjuguée à une amélioration des normes de soins de santé et d'enseignement, améliorera progressivement notre qualité de vie au Nunavut et nous mènera à l'autonomie.
Il faut bien noter, madame la présidente, qu'il n'existe pas à mon avis de stratégie de développement économique du Nord entre le gouvernement fédéral et le gouvernement du territoire du Nunavut, non plus que dans le reste du Nord. Il faut que les municipalités puissent participer à l'élaboration de la liste des priorités qui nous touchent tous. Ces priorités doivent être présentées de façon suffisamment efficace et coordonnée pour pouvoir influer sur la politique de développement à l'échelle nationale.
Avant de conclure, madame la présidente, permettez-moi d'inviter le Comité permanent des finances à se réunir quelque part au Nunavut, peut-être à Cambridge Bay, à Rankin ou à Iqaluit. Amenez-y tout le comité, de 15 à 20 députés. Nous serons heureux de vous accueillir. Vous pouvez venir à n'importe quel moment de l'année.
Une voix: Nous pourrions venir en juillet.
M. Keith Peterson: En juillet? Tout le monde vient en juillet. Ce sera bon pour le secteur de la pêche.
Une voix: Et en janvier, alors?
M. Keith Peterson: Ce serait bien en janvier aussi.
La présidente: Merci beaucoup.
Nous accueillons maintenant Mme Winnie Cadieux, directrice de l'Association des municipalités des Territoires du Nord-Ouest.
Madame Cadieux, voulez-vous commencer votre exposé, s'il vous plaît? Vous avez un maximum de 10 minutes.
Mme Winnie Cadieux (maire de Enterprise; directrice (communautés à charte/hameaux/établissements), Association des municipalités des Territoires du Nord-Ouest): Je dois avouer que je suis très nerveuse.
La présidente: Vous n'avez pas lieu d'être nerveuse. Tout le monde ici est très gentil.
Mme Winnie Cadieux: C'est pour moi un grand honneur de venir vous rencontrer.
Avant de venir ici, j'ai dit à mon mari que j'étais nerveuse, et il m'a conseillé de faire comme si vous étiez des clients de mon entreprise. Malheureusement, mes clients sont des camionneurs et il est donc possible que je vous raconte une blague peu intéressante, par exemple.
Bonjour, mesdames et messieurs. Je m'appelle Winnie Cadieux et je suis la mairesse d'une toute petite localité des Territoires du Nord-Ouest, Enterprise. Je suis également directrice de l'Association des municipalités et des Territoires du Nord-Ouest. Au nom des communautés des Territoires du Nord-Ouest que je représente ici aujourd'hui, je tiens à vous remercier de votre invitation à venir témoigner devant vous.
Pour ma part, je suis enthousiasmée de voir que notre association participe à ces discussions. Les soins de santé, l'enseignement, la qualité de l'eau, les projets d'exploitation des ressources, les impôts, le développement durable, tout cela nous touche également.
Nos communautés connaissent les mêmes problèmes que toutes les autres du Canada. Les soldats canadiens qui se battent au front en Afghanistan reçoivent les mêmes hommages à Enterprise ou à Fort Simpson qu'à Edmonton ou à Ottawa. Je suis très fière d'être canadienne et, chacun à notre façon, avons aidé le Canada à obtenir le titre prestigieux de pays où il fait le meilleur vivre au monde. Si nous sommes ici, c'est pour faire notre part pour que le Canada conserve ce titre.
Comment peut-on favoriser la créativité de notre population? À mon avis, les communautés des Territoires du Nord-Ouest apportent à la société canadienne une culture distincte incroyable. La plupart des gens croient que les Territoires du Nord-Ouest se limitent à Yellowknife ou Inuvik. Ce sont nos plus grandes localités et elles sont de grandes ambassadrices du Nord. Cependant, le Nord se caractérise essentiellement par le côté mystique de sa nature, et même si les petites localités ne jouissent pas des mêmes niveaux de service, elles entretiennent une relation tout à fait florissante avec la terre. Au Canada, mais surtout dans le Nord, la relation des gens avec la nature et ses réalités constitue un mode de vie. C'est en veillant à toujours faciliter le développement durable de localités nordiques fortes et saines, que nous ferons notre part pour aider le Canada à garantir la meilleure qualité de vie possible à tous ses habitants.
Permettez-moi de vous parler un peu de l'organisme que je représente. L'Association des municipalités des Territoires du Nord-Ouest, également connue sous l'acronyme AMTN-O, existe depuis 35 ans. Notre mandat est de promouvoir et de faciliter les échanges d'information entre les communautés des Territoires du Nord-Ouest. En tant que Fédération canadienne des municipalités, nous représentons des localités de tous les TN-O, dont nous sommes le porte-parole collectif. Grâce à notre composition, nous représentons la plupart des personnes et des organismes qui oeuvrent à l'échelle communautaire. Le fait que nos membres, soit les dirigeants élus des administrations communautaires nous permet d'avoir directement accès à des voies et à des réseaux de communication efficaces avec à peu près toutes les communautés des Territoires du Nord-Ouest. Bureaucrates, professionnels, politiciens ou entrepreneurs privés, nous avons des liens avec tous et nous offrons à tous des services directs ou indirects.
Les administrations locales sont chargées des loisirs, des services policiers, des routes, de l'enlèvement des déchets, de l'approvisionnement en eau, du service de protection contre les incendies, des aéroports, des questions relatives à la santé publique, des mesures relatives à la construction et au développement, de l'octroi de licences d'exploitation aux entreprises, et du transport public, entre autres choses. Par extension, les organismes professionnels et bénévoles créés dans ces domaines à l'échelle locale, régionale et territoriale participent également à nos réseaux. Notre association a développé un véritable partenariat avec le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et nous travaillons de concert avec ce gouvernement pour mettre en place des communautés viables dans tout le territoire.
Je vais maintenant aborder deux sujets: la prospérité économique dont jouissent à peu près tous les Canadiens et la façon dont nos gouvernements peuvent garantir à tous une qualité de vie la meilleure possible vus dans un contexte nordique. Ces deux sujets nous amènent à examiner plusieurs des principes fondamentaux de gouvernement. Les négociations actuelles entre le gouvernement fédéral, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et nos gouvernements autochtones locaux n'ont pas encore permis de déterminer clairement quelles seront les fonctions futures du gouvernement de notre territoire. Mais nous sommes toutefois certains d'une chose: l'économie actuelle des Territoires du Nord-Ouest, axée sur la mise en valeur des ressources, continue de faire son chemin, que nous soyons prêts ou non.
L'exploitation des mines de diamant est maintenant une industrie bien établie dans le nord. D'ici 2005, le Canada devrait avoir trois mines de diamant en exploitation dans les Territoires du Nord-Ouest. Ces mines produiront environ 12 p. 100 de toutes les pierres de qualité gemme au monde—ce qui représente 1,6 milliard de dollars par an, principalement en exportations. Une fois établi, le pipeline qu'on projette de construire dans la vallée du Mackenzie sera un des principaux fournisseurs de gaz naturel en Amérique du Nord. Au cours des 20 prochaines années, les projets de mines de diamant et d'exploitation pétrolière promettent à eux seuls de rapporter quelque 57 milliards de dollars au produit intérieur brut—d'après une étude réalisée à l'Université de Calgary—de créer 294 000 années/personnes d'emploi dans tout le pays et de rapporter environ cinq milliards de dollars en recettes fiscales à l'échelle du Canada.
Ces investissements récents par le secteur privé ont provoqué une croissance spectaculaire à court terme de l'économie dans les Territoires du Nord-Ouest. Néanmoins, c'est tout le Canada qui profitera des investissements faits dans le potentiel économique astronomique des Territoires du Nord-Ouest. Les populations du Nord ne suffiront pas à combler tous les emplois directs et tous les débouchés commerciaux qui découleront de nos secteurs croissants d'exploitation des ressources non-renouvelables. Les machines, l'équipement, le matériel et les biens de consommation devront provenir de fournisseurs du Sud des principaux marchés canadiens.
Ces activités d'exploration des ressources ont créé de nombreuse possibilités d'emploi et d'affaires, cependant notre infrastructure actuelle est utilisée au maximum étant donné la pression causée par la construction du gazoduc et l'exploitation des mines de diamant. Actuellement, dans les Territoires du Nord-Ouest, le gouvernement fédéral fixe le niveau, et garde 100 p. 100 des redevances perçues sur les projets d'exploitation des ressources non-renouvelables, et 100 p. 100 des droits d'exploration perçus auprès des entreprises qui ont acquis ces droits—par exemple, les frais de permis pour le pétrole et le gaz. Les entreprises s'attendent à ce que le secteur public fournisse les services essentiels nécessaires, tels que des routes carrossables, des terres abordables et viabilisées pour la construction des maisons, et les systèmes d'approvisionnement en eau et en égouts. Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest estime qu'il faudra peut-être injecter 120 millions de dollars pour maintenir en bon état et améliorer les routes et les aéroports actuels, et 80 millions de dollars pour développer l'infrastructure municipale au cours des quatre prochaines années. Le manque de ces services publics essentiels décourageront peut-être les compagnies d'investir à l'avenir alors qu'elles auraient été prêtes à le faire.
Les communautés des Territoires du Nord-Ouest ne disposent pas de toutes les ressources nécessaires pour aider à préparer et mettre en position les résidents et les entreprises afin qu'ils puissent participer aux activités de développement. La viabilité des communautés dans les Territoires du Nord-Ouest peut être réalisée en parvenant à équilibrer les effets des grands projets de ressources et en protégent l'énergie créatrice des gens de la région.
Lorsqu'une communauté fait face à un avenir incertain, elle doit envisager toutes les options. L'esprit de la collectivité doit être pris en compte, et c'est dans cet esprit que nous trouvons l'essence même de notre identité canadienne. C'est dans nos écoles et non pas dans nos assemblées légilatives que réside notre esprit communautaire. Il faut l'alimenter de même que l'enthousiame de nos peuples et nous devons essayer de nous exprimer de façon plus holistique. Les principes populaires élaborés par la Fédération des municipalités canadiennes—comme,par exemple, le système d'évaluation de la qualité de vie, qui tient compte de plus que nos indices de croissance économique pour mesurer notre productivité; et le guide en dix points pour bâtir des communautés viables—sont d' excellents exemples de la façon dont nous pouvons nous pencher sur ces questions. Toutes les communautés du Canada ont rédigé ces déclarations. Ces principes trouvent un juste équilibre entre le développement et la croissance.
L'investissement du Canada permettra aux Territoires du Nord-Ouest de créer un climat qui attire l'industrie, gère le développement de façon efficace, et assure que le Nord, et aussi tout le Canada, bénéficie de la mise en valeur des ressources. À notre avis, cet investissement dans les Territoires du Nord-Ouest est un investissement pour tout le Canada.
Merci.
¿ (0950)
La présidente: Merci beaucoup.
Nous allons poursuivre avec l' Association des communautés du Yukon, et son président, le maire Glen Everitt.
M. Glen Everitt (maire de Dawson; président, Association of Yukon Communities) Merci beaucoup, madame la présidente.
En ma qualité de maire de Dawson, de président de l'Association des communautés du Yukon et de président du Forum nordique de la FCM, qui représente toutes les communautés au nord du 55e parallèle, je suis heureux et honoré d'être ici pour m'adresser à cet important comité.
Pour aider à créer une certaine stabilité économique au Yukon, nous devons accepter le fait qu'il faut dépenser de l'argent pour construire et remplacer des infrastructures dans tout le territoire. Le Yukon est actuellement aux prises avec un énorme marasme économique. Ce marasme résulte de nombreux facteurs. La faiblesse des prix des minerais en est un exemple. Un autre est l'absence de vision du gouvernement pour assurer la diversification économique. Troisièmement, ce sont les lois environnementales qui continuent de négliger l'équilibre entre la protection environnementale et le développement économique.
Lorsque ces trois facteurs sont en présence l'un de l'autre, le mélange offre le risque de donner lieu à une stagnation et à un rétrécissement de la population, à une augmentation des faillites et à un climat dans lequel les investissements semblent risqués. Aujourd'hui, les municipalités de tout le Yukon connaissent cette situation. Les populations diminuent, les magasins, s'ils ne ferment pas carrément, réduisent les heures d'ouverture; l'industrie du tourisme est dévastée depuis les attentats du 11 septembre; les infrastructures ont un besoin urgent de réparation d'envergure; et les créances continuent d'augmenter à mesure que les contribuables trouvent de plus en plus difficile de joindre les deux bouts et de payer leurs impôts. Les gens cherchent des réponses, des solutions et de l'espoir au moment où la capacité de se tourner vers des paliers gouvernementaux supérieurs devient de plus en plus difficile.
Parmi toutes les communautés que je représente, j'ai beaucoup entendu parler de familles qui se scindent du fait qu'un des parents se sent forcé de quitter le territoire en quête de travail afin de pouvoir envoyer de l'argent à la maison. Dès lors, il s'agit de savoir: que pouvons-nous faire, dans quels délais, et qui peut le faire?
Il est temps qu'entre le gouvernement fédéral et les gouvernements municipaux du Nord les relations s'améliorent. En ma qualité de membre du conseil de la Fédération canadienne des municipalités, ayant 12 ans d'expérience dans les gouvernements municipaux, je suis très au courant des diverses initiatives de partenariat qui ont été négociées ou élaborées entre nos niveaux respectifs de gouvernement. L'exemple le plus récent est celui d'une série de programmes d'infrastructure municipaux.
Il est important que le gouvernement se rende compte que beaucoup de ces programmes, bien que fructueux, ne fonctionnent pas pour les municipalités du Yukon ou pour les petites localités des régions septentrionales. Les ententes de financement des immobilisations laissent les territoires dans une situation gênante. Le montant est insignifiant: le Yukon reçoit 2,5 millions de dollars sur 2 milliards, et cela ne permet même pas d'asphalter trois milles de route. N'oublions pas non plus le fait que nombre des territoires et des localités nordiques ne peuvent pas se permettre de verser la contribution d'un tiers des frais qui est exigée. Certaines de ces localités n'ont même pas la capacité de présenter une demande de financement.
Nous avons trouvé très excitant que le comité des finances mentionne les localités nordiques et de petite taille dans le contexte canadien. Nous avons trouvé encore plus excitant que l'honorable ministre des Finances, M. Paul Martin, déclare que les communautés nordiques sont confrontées à des problématiques différentes. Tous les jours, grâce à notre député à la Chambre des communes, nous apprenons des nouvelles encourageantes. Je suis d'ailleurs très impressionné de le voir assis ici, aujourd'hui. Je n'ai pas l'habitude de voir nos députés faire acte de représentation de façon aussi diligente, et je vous remercie donc d'être ici, Larry.
On effectue actuellement une étude au Yukon pour dresser une liste des besoins généraux en infrastructure, en mettant l'accent sur les besoins futurs et la diversification économique. On évalue à environ 160 millions de dollars le montant nécessaire pour que les localités du Yukon soient amenées à un niveau qui les rendent concurrentielles avec leurs voisins du Sud et du Nord. Ce n'est pas un énorme montant que nous demandons, et pourtant il permettrait de faire bien des choses qui répondraient non seulement au besoin d'activité économique mais aussi à la nécessité d'offrir de la formation aux jeunes et du recyclage aux adultes. Ce montant permettrait de remplacer beaucoup d'infrastructures essentielles, telles que les routes, les canalisations d' eau et les égouts, ainsi que l'installation de fibre de câble à haute vitesse. Cela permettrait également de construire un pont très utile qui traverserait le Yukon, au Klondike, de sorte qu'il y ait un lien solide dans tout le Nord entre le Yukon et l'Alaska.
Cet argent permettrait également de paver les aéroports. De nombreux documents de recherche montrent que, par habitant, il y a plus de petits avions dans l'État de l'Alaska que dans toute autre région administrative. Des sondages ont révélé que de nombreux habitants de l'Alaska se rendraient dans les localités du Yukon si nos pistes d'atterrissage étaient asphaltées.
D'autres localités profiteraient de la construction d'installations d'amarrage le long des rives et de réfection des installations culturelles et de loisir. Chose encore plus importante, cela permettrait qu'entre les gouvernements des Premières nations et les gouvernements municipaux s'établissent des partenariats, à mesure que les directives d'embauche et de formation sur place sont négociées.
¿ (0955)
La signature d'un accord de développement économique entre le Yukon et le gouvernement fédéral représente également une autre initiative nécessaire. Hormis les territoires, les autres administrations du pays disposent de ces accords, ce qui signifie que, depuis toujours, lors des élections, les gouvernements territoriaux font constamment campagne en se vantant de pouvoir obtenir un accord signé avec Ottawa. C'est devenu un dossier politique plutôt qu'une question axée sur le bon sens.
Je ne sais pas si vous le savez ou non, mais lors de la réunion du conseil de la Fédération canadienne des municipalités, en décembre dernier, on a adopté une résolution unanime selon laquelle Ottawa devrait poursuivre les négociations et signer des ententes de développement économique avec les territoires. En ma qualité de maire de Dawson,—et cela me ramène à l'invitation que vous a faite mon ami Keith Peterson—j'ai estimé qu'il était important que le conseil de la Fédération canadienne des municipalités vienne au Yukon, et particulièrement dans la région nordique du Yukon, en hiver et non en été, saison où, bien sûr, tout le monde aime bien venir jouer chez nous. Je voulais que ces gens voient ce que sont nos conditions de vie, et nous avons réussi à les amener chez nous en décembre dernier.
Par une température de 38 degrés sous zéro, des maires et des conseillers de toutes les régions du Canada sont venus à Dawson et ont vu les problèmes de déplacement auxquels nous sommes confrontés. Certains d'entre eux ont roulé sur nos routes et ont constaté les problèmes causés par le pergélisol avec lesquels nous sommes quotidiennement aux prises, du fait du réchauffement de la planète. Nos réseaux routiers connaissent ces gonflements un peu partout. Beaucoup de ces gens ont été choqués d'apprendre que, dans une localité si proche du cercle polaire arctique, Dawson est obligé d'installer des appareils de congélation pour maintenir le gel de certaines zones, parce que le pergélisol est en train de fondre en dessous.
Depuis cette visite à Dawson, toute la Fédération est unanime pour appuyer le Nunavut, les Territoires du Nord-Ouest et le Yukon pour que leurs problèmes soient résolus. Il est important que ce comité-ci connaisse ce type de situations; je vous invite donc également à venir au Yukon. Si vous vous rendez au Nunavut en juillet pour pêcher, je voudrais que vous veniez au Yukon au coeur de l'hiver pour voir ce à quoi nous sommes confrontés, parce que c'est une chose que d'en parler, et une tout autre chose que de le voir.
En ce moment même, on négocie un accord d'exploitation forestière avec les territoires. Toutefois, cette négociation, comme beaucoup d'autres négociations qui se déroulent dans nos régions, est assujettie à de nombreux problèmes du fait que la dévolution nous attend au tournant. Les groupes environnementaux modifient l'équilibre de la représentation au sein du comité des forêts et le Yukon Placer Authorization review board (Conseil d'examen des autorisations d'extraction d'or du Yukon), pour n'en nommer que deux. Ottawa doit prendre les moyens qui s'imposent pour que les groupes environnementaux ait un seul représentant aux négociations, et non quatre ou cinq sur sept. Les mineurs, les bûcherons, les pourvoyeurs, les pêcheurs, les trappeurs, les petits entrepreneurs, les exploitants de tours guidés, les rafteurs et les exploitants d'excursions en bateau n'ont pas l'argent nécessaire pour assurer que leurs voix soient entendues dans les nombreux examens actuellement en cours. Les groupes environnementaux ont à leur disposition des sommes infinies. Des ministères fédéraux, tel qu'Environnement Canada, par exemple, continuent de subventionner les déplacements et la représentation de groupes environnementaux dont l'objectif sous-jacent est manifestement de créer un immense parc au Canada, un parc qu'on appellerait le Yukon.
Pour nous, c'est une question très chatouilleuse. Nous sommes favorables aux principes environnementaux, mais avec un contrepoids économique. Ce n'est pas ce qui existe en ce moment. Il y a des réunions pour les mineurs, et les mineurs n'ont qu'un seul siège et ils doivent payer leur frais de déplacement. Par opposition, chaque groupe environnemental au Canada se fait payer pour aller participer aux travaux de ces groupes d'étude. Nous voyons les industries et les investisseurs s'éloigner du Yukon au moment où ils devraient être en train de célébrer parce que la dévolution doit se produire bientôt et nous aurons des pouvoirs semblables à ceux d'une province. Donc, même si je sais que le Nunavut et les Territoires du Nord-Ouest attendent avec impatience la dévolution, je les invite à faire preuve d'un peu de prudence et à voir comment cela va se dérouler dans notre territoire, parce que la situation est plutôt effarante pour l'instant.
En conclusion, je voudrais encore une fois vous remercier de m'avoir permis de prendre la parole ici pendant quelques instants. Cela me donne la possibilité de croire qu'il y a peut-être de la lumière au bout de tunnel. Dans notre territoire, beaucoup de gens attendent des nouvelles positives de ce comité ou du moins des recommandations positives. Je répète encore une fois qu'un accord d'infrastructure signé entre l'Association municipale et le gouvernement fédéral pour 160 millions de dollars sur les quatre prochaines années nous donnera les outils nécessaires pour réussir. Je fournirai un exemplaire du rapport complet, qui doit paraître le 30 juin, c'est-à-dire dans un mois. Chaque membre de votre comité en recevra un.
Merci beaucoup.
À (1000)
La présidente: Merci.
Monsieur Fraser, allez-y, s'il vous plaît.
M. Whit Fraser (conseiller politique, Inuit Tapiriit Kanatami): Merci, madame la présidente.
Je m'appelle Whit Fraser et je suis conseiller sur les questions de politique et de communications auprès de l'Organisation nationale inuit, l'Inuit Tapiriit Kanatami, qui signifie «Inuits unis du Canada». Vous connaissez sans doute l'ancien nom de cet organisme, l'Inuit Tapirisat du Canada.
Je dois dire, madame la présidente, que je suis ravi de voir un si grand nombre de maires et d'autres représentants du Nunavut réunis ici aujourd'hui, et j'en suis d'ailleurs un peu surpris. Je ne savais pas que cette séance allait coïncider avec leur visite. Évidemment, le Nunavut, comme vous le savez, n'est que l'une des quatre grandes régions représentées par l'Organisme inuit national.
L'Inuit Tapiriit Kanatami a changé récemment de nom pour mieux indiquer son engagement vis-à-vis du pays et j'espère que vous pardonnerez à notre président, Jose Kusugak, de n'avoir pu se libérer aujourd'hui pour s'adresser directement à vous. À l'heure actuelle, M. Kusugak règle les détails de dernière minute du lancement officiel d'un nouveau logo inuit, qui sera dévoilé aujourd'hui même dans les édifices du Parlement par M. Kusugak et par le député de Nunatsiaq.
Je suis certain que tous les députés considèreront favorablement l'image projetée par ce logo. Sans dévoiler de secret, je peux vous dire qu'il va montrer à tous la place qu'occupent dans le coeur des Inuits le Canada et son symbole national le plus précieux. Les Inuits disent qu'ils sont plus que des Autochtones ou des premiers Canadiens. Ils disent également qu'ils sont d'abord canadiens.
Malheureusement, tandis que les Inuits sont prêts à prendre un engagement solennel envers le Canada et envers toutes nos institutions, ils constatent trop souvent que les engagements de ce genre sont à sens unique. Ils remarquent que le gouvernement et la fonction publique ont de plus en plus tendance à adopter des solutions «taille unique» envers les peuples autochtones du Canada. De surcroît, du point de vue inuit, les programmes et les politiques sont trop souvent destinés aux Premières nations ou aux Indiens des réserves. Cette tendance se manifeste dans tous les programmes et ministères gouvernementaux, et si des exceptions existent, elles sont rares.
On a trop souvent tendance à ignorer le fait que les Inuits occupent plus de 40 p. 100 du territoire canadien, et que les droits autochtones des Inuits ont été reconnus et consacrés au même titre que les droits des Indiens et des Métis dans la Constitution canadienne de 1982.
Ces dernières années, les Inuits se sont efforcés de faire connaître aux Canadiens les liens culturels et géographiques particuliers qui les unissent au Canada. Les Inuits sont des contribuables canadiens à part entière, mais trop souvent, à cause de leur isolement et de leur éloignement, ils obtiennent moins de services que la plupart des autres Canadiens en contrepartie de leurs impôts et taxes.
Comme les autres peuples autochtones, les Inuits sont relégués aux extrémités des statistiques sociales canadiennes. Ils font face au coût de la vie le plus élevé, au plus faible revenu par habitant, au plus fort taux de chômage et de pauvreté, au plus mauvais état de santé et aux niveaux d'éducation les plus bas. Ajoutons à cela que le taux de suicide parmi les jeunes Inuits représente plus de 10 fois la moyenne nationale et l'on peut véritablement parler d'une crise sociale au Canada, qui permet de se demander légitimement pourquoi on ne prend pas davantage de mesures pour y remédier.
J'aimerais vous signaler brièvement quelques initiatives prises par les Inuits pour remédier à cette affreuse réalité. Les Inuits du Canada s'affairent activement au renouveau social et économique. Ces dernières années, ils ont réglé toutes leurs grandes revendications territoriales au Labrador, au Nunavut, au Nord du Québec et dans la partie occidentale arctique des Territoires du Nord-Ouest.
Les sociétés chargées des revendications territoriales ont investi l'argent reçu dans le cadre des accords dans l'économie locale, dans les transports, dans l'exploitation des ressources, dans l'immobilier, dans les ressources naturelles et dans le développement communautaire. Dans certaines régions, elles sont le plus gros employeur. Mais les accords sur les revendications territoriales constituent une indemnisation pour des territoires auxquels les Autochtones ont été contraints de renoncer. Les cessions n'ont pas été négociées ni conçues dans le souci de subventionner les Autochtones et de remplacer la responsabilité qu'assumait le gouvernement de leur assurer les services publics essentiels dont bénéficient tous les Canadiens.
À (1005)
Par l'intermédiaire de leurs représentants territoriaux, provinciaux ou régionaux, les Inuits travaillent à tous les niveaux pour améliorer leur qualité de vie. En examinant les activités de l'Inuit Tapiriit Kanatami, vous constaterez notre engagement à travailler avec de nombreux ministères pour trouver des solutions aux problèmes de santé, d'environnement et de statut socio-économique qu'affrontent les populations nordiques.
Pour satisfaire aux exigences croissantes et légitimes des Inuits en matière d'égalité sociale et économique, l'ITK considère qu'il doit établir un partenariat financier efficace et juste avec le gouvernement du Canada. La plupart des Canadiens sont surpris d'apprendre que sur le budget annuel de l'ITK, qui est normalement d'environ 4 millions de dollars par an, l'organisme ne peut compter que sur environ 8 p. 100 du montant promis par le gouvernement fédéral. Cela signifie que chaque année, notre personnel doit élaborer une bonne quarantaine de propositions de contrat avec différents ministères.
Pour survivre en tant qu'organisme national et répondre aux besoins des Inuits, l'ITK se voit contraint de s'aligner sur le programme du gouvernement et d'appliquer des programmes conformes aux directives et aux programmes du gouvernement. Il constate également que dans la création et l'application de ces programmes, le gouvernement applique une structure d'orientation unique qui répond aux intérêts et aux besoins des Premières nations, c'est-à-dire des Indiens. Cette formule «taille unique» n'est pas applicable aux Inuits, qui considèrent que la solution à la plupart de leurs difficultés sociales, économiques et sanitaires se trouve dans leurs propres communautés.
L'Inuit Tapiriit Kanatami sollicite l'établissement d'un partenariat avec le gouvernement fédéral pour qu'ils élaborent ensemble un plan d'action inuit réaliste axé sur les résultats, qui comporte un engagement à long terme précis de la part du gouvernement du Canada. Parallèlement à ce plan d'action inuit d'ordre général, l'ITK insiste sur le fait que le gouvernement fédéral doit adopter le principe d'un ensemble de programmes destinés spécifiquement aux Inuits, c'est-à-dire des programmes axés directement sur les besoins, la géographie, la langue et la culture des Inuits. Ce principe n'est pas nouveau pour le gouvernement fédéral, qui propose déjà toute une gamme de programmes régionaux tenant compte des particularités des régions du Canada, dans les domaines des pêches, de l'énergie, de l'agriculture et dans bien d'autres secteurs. Si l'on veut tenir compte des priorités des Inuits et de l'Arctique, il faut prévoir pour les peuples nordiques une formule spécifiquement inuite d'aborder les défis sociaux, économiques, sanitaires et environnementaux auxquels ils font face.
Dans ce contexte, les membres du comité se demandent peut-être où est le problème. Le dernier budget fédéral et le Discours du Trône ne comportaient-ils pas d' engagements visant la résolution de ces problèmes? Malheureusement, le budget de 2001 a fait davantage apparaître la propension du gouvernement fédéral à régler les problèmes des Premières nations plutôt que sa volonté de répondre aux préoccupations des Inuits.
Permettez-moi de revenir brièvement sur les chiffres qui composent l'enveloppe autochtone de 185 millions de dollars. Sur ce montant, 25 millions de dollars sont consacrés à la lutte contre le syndrome d'alcoolisme foetal dans les réserves. Les Inuits ne vivent pas dans des réserves, mais leurs enfants connaissent le même sort que les jeunes des réserves. On a réservé 60 millions de dollars aux enfants autochtones des réserves présentant des besoins particuliers, et 100 millions de dollars aux programmes d'aide préscolaire aux Autochtones.
Les Inuits auraient dû trouver de bonnes nouvelles dans ce budget; or, ils s'en sont senti exclus. La situation socio-économique des collectivités nordiques est aussi grave que celle des réserves, sinon pire. Toutes les collectivités autochtones du Canada ont besoin d'aide, en particulier d'aide à la petite enfance en particulier en matière d'éducation, de santé et de développement préscolaire.
L'organisme national des Inuits s'inquiète également du fait qu'après le budget, M. Kusugak a écrit au ministre des Finances pour lui demander si les Inuits devaient supposer que ces programmes ne s'appliqueraient pas à eux. M. Kusugak n'a toujours pas reçu de réponse à ce sujet.
Comme les membres du comité préparent leurs recommandations concernant le prochain budget, je voudrais leur signaler un thème qui a été oublié en février dernier. Les régions nordiques attendent avec une grande impatience le lancement d'une initiative concernant les communications à bande large. Il convient d'aborder cette question dans une perspective sinon nationale, du moins dans celle des régions rurales, éloignées et autochtones. Les avantages potentiels de la bande large en matière de télé-enseignement et de télémédecine sont considérables. Il s'agit non pas de savoir si le pays peut se permettre un tel investissement, mais bien si le Canada peut se permettre de ne pas prendre l'initiative d'un service à bande large destiné à l'Arctique.
Lorsque les Inuits ont lancé leurs revendications territoriales et se sont interrogés sur leur relation future avec le Canada il y a une trentaine d'années, ils ont implicitement envisagé un retour à l'autosuffisance et ils ont obtenu par la suite des résultats remarquables dans ce domaine. Mais ils ont aussi indiqué clairement que la voie vers l'autosuffisance n'avait été franchie qu'à moitié. Le reste du voyage promet d'être long et il va nécessiter un investissement national, des engagements, un travail acharné et des partenariats. Les Inuits adressent le message suivant au gouvernement fédéral: ne nous abandonnez pas à mi-parcours. Nous vous prions instamment de satisfaire les besoins de tous les peuples autochtones, sans oublier les Inuits au passage.
Merci.
À (1010)
Le président: Merci beaucoup.
Veronica Dewar, nous vous écoutons.
Mme. Veronica Dewar (présidente, Pauktuutit Inuit Women's Association): Qujannamiik. Merci.
Pour commencer, j'aimerais remercier la présidente et les membres du comité de nous permettre d'exprimer les besoins et les priorités des femmes inuites du Canada. C'est la première fois qu'on nous donne l'occasion de vous rencontrer depuis la création du Pauktuutit en 1984.
Je m'appelle Veronica Dewar et je suis présidente du Pauktuutit Inuit Women's Association. Je suis née à Coral Harbour, une petite collectivité inuite de la région de Kivalliq, au Nunavut. J'ai vécu et travaillé à Rankin Inlet pendant plusieurs années, mais j'habite Ottawa avec ma famille depuis mon élection à la présidence du Pauktuutit en 1998.
Le Pauktuutit est l'organisme national qui représente toutes les femmes inuites du Canada. Nous sommes leur représentant officiel au niveau national et nous représentons leurs intérêts notamment en matière sociale, culturelle, économique, sanitaire et politique. La portée de notre travail est reconnue au niveau international et nous a valu d'obtenir le statut consultatif aux Nations Unies. Malheureusement, nous obtenons trop rarement la même reconnaissance de la part du gouvernement canadien.
Nos priorités de femmes sont axées autour de la santé et du bien-être de nos familles et de nos collectivités. Nous considérons qu'en investissant dans la santé, la sécurité et le bien-être de chacun, on garantira un avenir fructueux et productif à tous les Inuits.
Nous sommes de fières citoyenness et contribuables du Canada. Nous avons toujours accepté aussi bien les responsabilités que les avantages de notre citoyenneté.
Les Inuits habitent six régions du Canada arctique, de l'Arctique occidental au Québec arctique puis à la côte nord du Labrador, en passant par le Nunavut. Notre culture et notre langue sont uniques. Nous parlons l'inuktitut; c'est l'une des trois seules langues autochtones du Canada qui ait une chance de survie. Nous assistons à une résurgence de la fierté envers notre culture et notre langue, qui sont les pierres angulaires du développement du nouveau territoire du Nunavut.
Les Inuits ont eu plus de succès que les autres peuples autochtones du Canada en matière de règlement des revendications territoriales et d'autodétermination. Pourtant, les Inuits n'ont pas tous accès aux programmes, aux services ou à l'enseignement qui sont considérés comme normaux dans le Sud du Canada. Notre population compte de nombreuses personnes vulnérables, qui sont souvent des femmes dont les besoins ne sont pas pris en compte et donc pas satisfaits. Nous pensons qu'il est essentiel que les opinions, les besoins et les priorités des femmes inuites soient pris en considération dans la planification budgétaire ainsi que dans la planification et l'exécution des programmes de service.
Malgré l'égalité des sexes consacrée par la Charte canadienne des droits et libertés, et bien que plusieurs ministères fédéraux appliquent désormais des politiques officielles d'analyse comparative entre les sexes, nous constatons trop souvent que ces engagements et ces obligations ne débouchent pas dans la pratique. Je me vois contrainte de demander instamment au gouvernement canadien de veiller à honorer ses engagements nationaux et internationaux en matière d'égalité entre les sexes.
Je suis très heureuse de pouvoir aborder les deux thèmes de votre consultation, à savoir ce que peut faire le Canada pour que les niveaux élevés de prospérité économique soient largement partagés par tous les Canadiens, et que peut faire le gouvernement pour garantir à tous la meilleure qualité de vie. Pour les Inuits, il s'agit d'appliquer des règles uniformes fondées sur la notion d'égalité substantive, c'est-à-dire qu'il faut donner aux Inuits la possibilité et les moyens d'obtenir les mêmes résultats que les autres Canadiens en matière d'enseignement postsecondaire, de soins de santé et de perspectives de développement économique.
À (1015)
Pour nous, l'accès à l'enseignement postsecondaire signifie généralement qu'il nous faut quitter notre collectivité pour aller au collège ou à l'université. L'accès aux études universitaires nous oblige à quitter définitivement l'Arctique pour fréquenter les établissements du sud du Canada. Le départ d'une petite collectivité de l'Arctique provoque un choc culturel et familial important. Même les plus intelligents et les mieux adaptés des jeunes Inuks ont des points de référence tout à fait différents de ceux des jeunes Canadiens du Sud. Il ne faut pas en déduire pour autant que nous sommes incapables de terminer des études postsecondaires. En revanche, il se peut que nous ayons besoin de mesures de soutien et de services différents, aussi bien dans le Nord que dans le Sud.
Nous savons que les Inuits ont une espérance de vie inférieure à celle des Canadiens. Nous vivons dans une grande pauvreté et nous sommes exposés à des niveaux élevés de violence physique et sexuelle. C'est parmi nos jeunes que l'on trouve les taux les plus élevés de suicide au Canada. L'annonce d'un suicide est un événement quasi quotidien dans nos collectivités. Les effets du suicide sont très profonds et ils ébranlent les individus et les collectivités jusqu'au tréfonds. Je n'insisterai pas sur les nombreuses causes apparentes de cet épouvantable taux de suicide. Nous savons que c'est notamment un manque de perspectives d'avenir dans les collectivités, un manque de choix, un manque de modèles, un manque d'accès aux programmes et aux services essentiels, et enfin, la pauvreté. Je préfère vous parler aujourd'hui de ces questions en parlant de leurs résultats et de l'absence d'attitude préventive.
La réalisation de l'égalité substantive pour les femmes inuites pose un défi. Depuis 1984, la prévention de la violence a été l'une des priorités essentielles des femmes inuites. Depuis les années 50, nous avons subi les effets du démantèlement culturel, qui résonne encore en nous aujourd'hui. Nous avons connu les relocalisations forcées et l'éloignement forcé de nos enfants qu'on envoyait dans des pensionnats. Pendant des décennies, nous avons connu ces événements dramatiques et trop souvent, on nous mettait dans l'incapacité d'y faire face par des solutions spécifiquement inuites. Heureusement, nous sommes sortis de cette période lugubre et nous savons ce dont nous avons besoin, mais il va falloir que le gouvernement nous aide à mettre en oeuvre nos solutions. Que nous soyons Inuits ou non, nous avons tous intérêt à faire en sorte que les Inuits, peuples autochtones et citoyens du Canada, bénéficient de la meilleure qualité de vie.
Les femmes et les enfants inuits continuent de supporter le fardeau des effets de notre histoire récente. Après avoir consulté les femmes inuites du pays, nous savons que l'incidence de la violence physique et sexuelle contre les femmes et les enfants inuits est très élevée et qu'elle augmente à un rythme alarmant. Il est très difficile de recueillir des statistiques à ce sujet, compte tenu de la nature des actes de violence en cause et de la réticence à en parler, en particulier avec des étrangers. Les études et les statistiques sont certainement nécessaires et souhaitables, mais les femmes inuites n'ont pas eu accès aux ressources financières ou humaines nécessaires pour réaliser de telles études ou pour recueillir des statistiques.
Il y a plusieurs années, le Centre de recherche sur la violence contre les femmes et les enfants a essayé de chiffrer le coût financier de la violence contre les femmes. Les auteurs et les chercheurs ont examiné le coût des soins d'urgence, des interventions, des services de réadaptation de longue durée, de l'administration de la justice et des conséquences en matière d'emploi. Ils ont constaté que ces coûts n'étaient pas chiffrables à cause des effets diffus de cette violence. Comment en mesurer les conséquences à long terme sur la santé mentale des victimes et de leurs enfants, ou comment chiffrer le coût financier du fossé intergénérationnel dans le temps? Ce que l'on sait, c'est que la violence a un coût réel très élevé et que la prévention doit être un élément essentiel des solutions qu'on veut y apporter.
À (1020)
Les chercheurs ont estimé de façon très conservatrice le coût des niveaux actuels de violence contre les femmes à 4 milliards de dollars par an. Il faut toutefois noter que cette étude ne tient pas compte du coût de la violence à l'égard des femmes inuites—coût qui serait inévitablement supérieur.
Nous savons que la violence influe considérablement sur la vie de nos jeunes. Il y a très peu de services dans nos localités pour les enfants victimes d'exploitation sexuelle, qu'il s'agisse d'intervention immédiate ou de thérapie à long terme. Or cela détruit des vies. Cela mène trop souvent au suicide. Comment peut-on imaginer mettre un prix à cela?
Pour ce qui est des services de santé, nous n'avons pas accès aux services élémentaires de diagnostic et de prévention tenus pour acquis dans le sud du Canada. Par exemple, dans tout le Nunavut, il n'y a qu'un appareil de mammographie pour toutes les femmes de 26 localités isolées. Le taux de cancer parmi les femmes inuites est très élevé et l'accès au traitement dans le Sud coûte extrêmement cher. Le coût humain pour les femmes inuites qui vivent avec le cancer et pour leurs familles est encore plus grand et ne serait pas toléré par la population du Sud. Le pire, c'est que beaucoup de femmes ne sont pas diagnostiquées pour beaucoup de cancers spécifiques aux femmes avant qu'il ne soit trop tard pour leur sauver la vie.
Le manque d'information accessible aux femmes inuites en matière de santé, pour elles et pour leurs familles, joue un rôle important dans ces diagnostics tardifs. C'est pourquoi Pauktuutit commence à publier une série de livrets facilement compréhensibles, en anglais et en inuktitut, pour donner aux femmes inuites des renseignements pertinents et utiles sur les signes précoces de certaines de ces maladies et sur les moyens de prévention face à d'autres maladies comme les maladies du coeur et l'ostéoporose, dans le contexte de notre culture, de notre régime et de nos styles de vie. Nous espérons que ces livrets publiés avec un budget très modeste, aideront les femmes inuites à mieux veiller à leur santé.
Nous avons montré l'exemple pour ce qui est de la prévention du VIH/sida parmi les Inuits mais nos efforts sont freinés par la difficulté que l'on a à accéder à des budgets durables sans chiffres précis. Il est extrêmement difficile de réunir des renseignements sur le VIH/sida dans le Nord et bien que nous ayons invité Santé Canada à utiliser les nombreuses études qui examinent les indicateurs de risque de comportement à risque, tel que les taux alarmants de maladies sexuellement transmissibles, cela n'a pas encore été fait. Les taux de grossesse parmi les adolescentes et de maladies sexuellement transmissibles sont beaucoup plus élevées que dans le Sud et il est clair que ce n'est qu'une question de temps avant que le VIH et le sida ne dévastent la population inuite. Tout Inuk vivant avec le VIH ou le sida dans l'Arctique doit quitter son milieu pour se faire traiter par un spécialiste. Avec des évaluations trimestrielles et des traitements qui coûtent jusqu'à 1 500 $ par mois, le coût financier sera astronomique, pouvant atteindre 100 000 $ par personne et par an. Les coûts humains pourraient menacer considérablement l'avenir des Inuits.
Les Inuits sont parmi ceux qui fument le plus au pays. Depuis 1984, nous travaillons avec Santé Canada à l'élaboration de matériel de prévention et d'information pour et par les Inuits, afin d'expliquer les dangers du tabagisme et d'offrir des moyens de lutter contre ce phénomène dans les localités. Nous n'avons pas de renseignements quantifiés quant à la réduction du taux de tabagisme parmi les Inuits mais nous savons, parce que nous l'avons entendu dire, que ce que nous faisons donne des résultats. L'un de ces résultats est que la ville d'Iqaluit discute d'arrêtés municipaux interdisant de fumer, analogues à ceux de villes comme Toronto et Ottawa. Nous concentrons beaucoup de nos efforts à essayer que les enfants inuits ne commencent pas à fumer.
À (1025)
Pour avoir accès à ces initiatives, on a surtout mis l'accent sur la formation et l'acquisition de compétences afin que les Inuits de l'Arctique puissent entreprendre des projets de promotion de la santé et de prévention de la maladie dans les communautés ou y participer. La plupart des documents ont été élaborés dans le Sud pour des populations non inuites et sont à peu près inutiles ou sans pertinence pour les Inuits et leurs collectivités. Nous avons toutefois appris, grâce aux évaluations approfondies que nous avons faites de notre projet sur l'abandon du tabagisme et la prévention du VIH/sida, que notre approche en matière de renforcement des capacités donne de bons résultats. C'est un modèle que nous avons progressivement élaboré et redéfini. Aujourd'hui, nous avons toutefois accès à des ressources humaines et financières durables grâce à notre partenariat avec le gouvernement canadien.
La présidente: Pourriez-vous conclure?
Mme Veronica Dewar: D'accord, j'ai presque terminé.
Je veux également parler de la quantité et de la nature du financement offert à Pauktuutit pour son travail. Nous recevons un financement de base par le truchement du ministère du Patrimoine canadien, mais cette somme de 226 000 $ par an ne défraie pas tous les coûts de fonctionnement de base de notre très petit bureau. Je vais enfin rencontrer le ministre des Affaires indiennes et du Nord pour en discuter avec lui.
Mon temps de parole est presque épuisé. Je suis toujours la dernière à terminer, mais j'aimerais que vous me permettiez au moins au moins de vous lire ce qui se trouve sur cette dernière page.
La présidente: Les députés ont déjà vos documents sous les yeux. Il reste une heure pour nos membres, et vous pourrez donc le faire en répondant à leurs questions.
Mme Veronica Dewar: Oui, mais pour conclure, permettez-moi de dire qu'au nom de tous les Inuits du Canada, je demande que des ressources financières suffisantes soient affectées de façon à ce que, par le truchement des organismes qui nous représentent, nous ayons accès aux ressources et aux possibilités qui sont essentielles pour nous permettre d'atteindre nos objectifs.
Merci de m'avoir écoutée. J'espère que je serai entendue en premier la prochaine fois pour pouvoir avoir le temps de dire tout ce que j'ai à dire.
La présidente: Ici, tous disposent du même temps. Merci beaucoup.
Monsieur Penson, à vous la parole.
À (1030)
M. Charlie Penson (Peace River, Alliance canadienne): Merci, madame la présidente.
Je tiens à remercier les témoins d'être venus nous rencontrer et de nous avoir fait part des idées et des problèmes particuliers à leur région. Je viens moi aussi de cette région géographique du pays. Ma circonscription de Peace River n'est pas située dans le Grand Nord, mais elle est néanmoins au nord du 55e parallèle. Les deux principales routes d'approvisionnement vers le Yukon et l'ouest de l'Arctique traversent ma circonscription à Grande Prairie et Peace River. Nous avons donc une certaine idée de l'activité économique dans ces régions, à partir des voies d'approvisionnement qui s'y rendent.
Madame Cadieux, je sais que l'exploitation des mines de diamant est en train de prendre de l'expansion dans le Nord, dans votre région des Territoires du Nord-Ouest. Je sais que cela offre certaines possibilités de développement économique. Et c'est en fait ce sur quoi porte ma question. À mon avis, les possibilités de développement économique ont été entravées, et je crois que M. Everitt l'a d'ailleurs fait remarquer. Je suis allé au Chili, il y a quelques années, et j'ai constaté qu'une grande partie de notre secteur minier avait quitté le Canada pour aller s'établir là-bas. En fait, les investissements des sociétés minières canadienne au Chili représentaient quelque 8 milliards de dollars. Quand j'ai posé des questions à ce sujet, on m'a répondu qu'on ferait d'énormes investissements dans votre territoire mais que ces investissements étaient vulnérables parce qu'on ne savait pas ce qui se passerait au chapitre de l'utilisation des terres. Les projets d'exploitation minière étaient assujettis à des revendications territoriales et à des questions environnementales. Si ces sociétés souhaitent investir des millions et des milliards de dollars, il me semble qu'une telle incertitude peut nuire à ces possibilités d'investissement. Il y a un lien entre cela et les témoignages que nous avons entendus ce matin.
Madame Dewar, vous avez parlé de la nécessité de créer des emplois et des problèmes d'alcoolisme, de toxicomanie et de violence au sein de votre population. Lorsque les gens ont un emploi, ils acquièrent une certaine estime d'eux-mêmes. Ils font vivre leurs familles et ils prennent leurs responsabilités très au sérieux. Mais s'il n'y a pas de possibilités d'emplois, cela entraîne un tas de problèmes dans notre société, surtout dans le Nord pour ce qui est de l'alcoolisme, de la toxicomanie et de la violence aux femmes et aux enfants. À mon avis, nous devons autant que possible essayer de déterminer quels sont les obstacles à ce développement économique qui pourrait fournir de tels emplois dans vos collectivités.
En plus de ce qu'ils ont dit dans leurs témoignages, j'invite nos témoins à examiner ce qu'on pourrait faire de plus pour pouvoir éviter ces obstacles et faciliter le développement économique dans le Nord.
La présidente: Nous allons commencer par M. Peterson.
M. Keith Peterson: Merci, madame la présidente.
Au Nunavut, nous avons un accord sur une revendication territoriale qui nous offre une certaine stabilité. La Nunavut Tunngavik a déclaré qu'elle était prête à relever ses manches, comme toutes les associations régionales inuites. Dans la région de Kitikmeot, l'une des trois régions de notre territoire, nous collaborons avec le secteur de l'exploitation minière grâce à la Kitikmeot Corporation de la Kitikmeot Inuit Association. Nous entretenons des partenariats avec des sociétés minières.
Nous sommes actuellement en train de négocier un partenariat. Nous avons reçu 3 millions de dollars du MAIN et 500 000 $ du gouvernement du Nunavut. Nous avons également recueilli 1,5 million de dollars entre nous. Nous faisons des études de base de deux ans en génie environnemental et nous tenons des consultations publiques. Nous sommes donc déjà à l'oeuvre.
Il y a quelques années, nous avons établi quelques modèles économiques et nous avons constaté que la réalisation d'un projet—la construction d'une route et d'un port—créerait un minimum de 17 000 années personne d'emploi, pas seulement au Nunavut mais aussi dans le reste du Canada.
Nous prévoyons que ces analyses et rapports seront prêts d'ici 2003, et nous sommes en train de présenter des demandes de permis. Notre prochain défi sera d'obtenir 210 millions de dollars pour construire une route et un port praticables en tout temps qui nous permettront d'avoir accès aux ressources minérales de la province géologique Slave. Ce projet sera avantageux également pour les Territoires du Nord-Ouest, pour tout le nord et tout le Canada.
Nous travaillons de concert et nous avons produit des idées novatrices. Cela ne signifie pas que nous n'avons pas nos propres idées, mais nous travaillons avec d'autres. Nous souhaitons que le secteur de l'exploitation minière investisse dans le Nord et il le fera si les gouvernements et les municipalités oeuvrent ensemble pour leur en donner l'occasion.
La présidente: Monsieur Everitt, avez-vous quelque chose à ajouter?
M. Glen Everitt: Oui.
Les revendications territoriales étaient une question importante au Yukon sur le plan de l'investissement. J'ai parlé à de nombreux investisseurs qui attendaient en raison de l'incertitude. La question est presque réglée. Ils ont négocié la plupart des revendications territoriales.
Je viens d'une région du Yukon où il y a d'importants gisements gaziers et pétroliers, mais il est impossible de les exploiter. C'est un problème. Le pipeline, qu'il passe par le delta du Mackenzie ou par l'Alaska, ou par les deux, n'aura aucun impact sur les réserves qui se trouvent en fait dans le nord du Yukon. Il n'est toujours pas possible de les acheminer vers le pipeline.
L'un des problèmes auxquels nous devons faire face--et peut-être que votre comité pourrait en recommander l'examen--c'est qu'il y a un groupe de gens, de particuliers et de professionnels à Ottawa, qui sont embauchés pour nous représenter. Bon nombre d'entre eux ne sont jamais allés au Yukon, dans les Territoires du Nord-Ouest ou au Nunavut. Ils adoptent des lois environnementales ou d'autres projets de loi et tentent de faire en sorte que cela s'applique à tout le pays, mais ces lois ne peuvent fonctionner là où il n'y a pas de population ou presque.
C'est le ministère de l'Environnement qui crée le plus d'incertitude pour les investissements, avec le ministère des Pêches et Océans. Il y a des gens qui se rendent dans des petites exploitations minières et qui, armés d'un pistolet, ferment les mines car ils pensent qu'il pourrait y avoir des thymallus qui nagent dans le bassin des résidus. Le plus gros problème pour l'industrie, c'est l'application.
En ce qui concerne les effluents d'eaux usées secondaires ou les autres rejets d'effluents, il y a un seul critère pour tout le Canada qu'on appelle un LC50. Les gens sont tenus de respecter cette norme, il y a des entreprises et des collectivités qui doivent fermer dans le Nord parce qu'elles ne respectent pas la norme. Elles rejettent des effluents dans certains des plus grands cours d'eau et des plus grandes rivières d'Amérique du Nord, mais le critère a été conçu pour ici, pour un petit lac ou un petit bassin.
Il faudrait faire un examen de la loi fédérale, car on se rend compte que le Canada est un grand pays et que le centre du pays ne devrait pas dicter la loi partout ailleurs sans tenir compte de l'impact que cette loi peut avoir sur chaque région et voir si elle fonctionne. J'espère que la dévolution déclenchera ce processus.
À (1035)
La présidente: Madame le maire Cadieux, vous aviez quelque chose à dire.
Mme Winnie Cadieux: Ce que je voudrais dire, c'est que les grandes industries dans les Territoires du Nord-Ouest, au Nunavut ou au Yukon, n'empêchent pas nécessairement les communautés d'être propères, d'avoir un développement durable ni de régler leurs problèmes. Il doit y avoir une façon d'acheminer des fonds à ces communautés afin de faciliter les petits projets de développement économique qui y créeront de l'emploi pour les personnes qui ne travaillent pas dans les mines, qui ne veulent pas quitter leur famille pour deux semaines, quatre semaines ou plus. Comment peut-on s'y prendre? Je ne le sais pas.
Les petites collectivités ont le même problème à traiter avec les divers paliers de gouvernement que nous avons. Nous connaissons notre potentiel et nous connaissons nos problèmes. Mais un palier de gouvernement supérieur prend parfois des décisions pour nous sans même nous consulter ou nous demander ce dont nous avons besoin. Les solutions pourraient être très simples. Il pourrait s'agir dans certains cas tout simplement d'augmenter le budget d'infrastructure accordé à nos collectivités, ou de laisser les collectivités décider comment cet argent devrait être dépensé et quelles sont leurs priorités, plutôt que d'établir un objectif pour tout le pays et de s'attendre à ce que les plus petites collectivités respectent cet objectif.
Il y a un bon exemple dans les Territoires du Nord-Ouest. Une partie du budget d'infrastructure pour le Nord doit servir à la sécurité incendie et aux questions environnementales. Dans notre collectivité, nous avons peut-être besoin d'une école, mais le budget d'infrastructure ne le prévoit pas. Une école est une priorité pour nous. Nous avons déjà un camion incendie qui répond à certains de nos besoins et nous n'avons pas beaucoup de problèmes. On ne répond cependant pas à nos besoins prioritaires.
La présidente: Merci.
M. Charlie Penson: Madame Cadieux, pourriez-vous nous dire ce que vous pensez du projet de pipeline dans la vallée du Mackenzie. Nous savons qu'il existe des réserves et des ressources importantes dans les Territoires du Nord-Ouest, de nouveaux développements dans le nord et dans l'ouest du Yukon et dans la région de la vallée Nahanni. Nous savons qu'on a besoin de gaz naturel dans le sud, plus particulièrement pour valoriser une bonne partie du pétrole lourd dans le nord-est de l'Alberta, dans la région de Cold Lake et Fort McMurray.
Sur le plan de l'utilisation du sol, entrevoyez-vous des obstacles au développement de ce projet?
Mme Winnie Cadieux: Il y a sans doute des obstacles car on est en train de négocier certains procédés à l'heure actuelle. Je ne crois pas cependant que ces obstacles puissent stopper la production, la mise en valeur ou le progrès. Il faut suivre un certain processus, et lorsque les deux parties se seront rencontrées pour en parler de façon juste et équitable, le projet ira de l'avant. Mais tant que les engagements des contrats et des traités ne sont pas respectés...
À (1040)
M. Charlie Penson: J'ai posé la question car je pense que cela a vraiment un rapport avec ce dont vous parliez relativement au besoin de développement durable. Si les réserves ne peuvent atteindre le marché, elles ne sont pas mises en valeur. Par conséquent, il faut trouver une façon d'expédier ce produit, et les emplois connexes seront ainsi créés. Donc, je demande tout simplement s'il y a quoi que ce soit que nous puissions faire pour aider à accélérer le processus.
Mme Winnie Cadieux: Je ne sais pas. Le processus prendra le temps qu'il faudra. Je ne sais pas ce que l'on pourrait faire pour accélérer les choses si ce n'est que de continuer de se rencontrer pour parler des besoins du processus et des peuples autochtones. Je ne crois pas qu'il soit pour cela nécessaire de stopper le renforcement des capacités des collectivités. Les collectivités elles-mêmes n'ont pas besoin d'être freinées parce qu'on parle du pipeline, des mines de diamant ou de quoi que ce soit d'autre.
La présidente: Il ne vous reste plus de temps.
M. Charlie Penson: Oui, mais je disais...
La présidente: Il ne vous reste plus de temps.
M. Charlie Penson: ...madame Cadieux, c'est que...
La présidente: Je vais recommencer à être stricte, monsieur Penson.
M. Charlie Penson: ...que s'il n'y a pas ouverture, vous n'aurez pas l'occasion de créer ces emplois.
La présidente: Veuillez éteindre son micro. Il ne lui reste plus de temps.
À ceux qui aimeraient intervenir, je demanderais d'attendre. Vous aurez l'occasion d'exprimer votre point de vue aux fins du compte rendu lorsque d'autres personnes vous poseront des questions.
Monsieur Loubier, vous avez la parole pour 10 minutes.
[Français]
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe--Bagot, BQ): Merci, madame la présidente.
Je vous remercie d'être ici aujourd'hui parce qu'on apprend beaucoup à vous recevoir comme ça. On a beau dire n'importe quoi autour de cette table, mais on connaît très mal les territoires que vous occupez. On les connaît tellement mal qu'on a de la difficulté à pouvoir évaluer la politique gouvernementale en fonction de vos besoins spécifiques. Ce que vous avez dit tout à l'heure, monsieur Peterson, c'est très symptomatique du problème qu'on éprouve ici, comme législateurs. Il y a 28 000 personnes au Nunavut. Alors lorsqu'il y a des politiques gouvernementales qui prévoient des subventions par habitant, vous êtes tout à fait privés des bénéfices qu'on peut obtenir de ces politiques. Alors, je suis très heureux que vous soyez ici parce qu'on apprend beaucoup.
Moi, je relève votre invitation. Je vais aller visiter vos régions prochainement parce que je trouve que, comme législateur, que c'est un manque flagrant de connaissance de ce territoire-là. On ne peut pas faire notre job correctement si on ne connaît pas cette partie du grand territoire que vous représentez. Donc, je relève votre invitation et je vais y aller volontiers, même dans les pires conditions, comme celles dont M. Everitt nous a fait part plus tôt. En plein hiver, je vais le faire. Le Nord québécois est aussi un territoire dur à apprivoiser, mais quand même, il y a des choses à faire et des possibilités.
Contrairement à mon collègue de l'Alliance, je ne crois pas que le développement économique du Nord-Ouest, du Nunavut ou du Yukon soit compromis par le fait qu'il y a des négociations territoriales. Il y en a au Québec, en ce qui me concerne, depuis le milieu des années 1970, et les revendications territoriales des nations cries, par exemple, ont fait en sorte que non seulement on a pu progresser sur le plan économique, mais on a connu un bond spectaculaire au niveau de la gestion territoriale et des retombées économiques pour les nations cries. C'est souvent le contraire qui se produit. S'il y a des revendications territoriales, s'il y a une prise en main par les communautés autochtones de leur territoire et de leurs richesses, ça se solde par une augmentation de la croissance économique.
J'ai une question à vous poser. De façon générale, quel est votre pouvoir de taxation? Quelle est la partie des redevances, par exemple, que vous touchez sur les richesses naturelles qui sont sur votre territoire? Bref, quelles sont les autres sources de revenu dont vous disposez sur une base autonome, en plus des subventions gouvernementales? Ça vaut pour toutes les régions.
[Traduction]
La présidente: Monsieur Peterson, vous pouvez répondre en premier.
M. Keith Peterson: Je vous remercie pour votre question.
J'aimerais revenir un peu en arrière. Selon cette formule d'attribution, vous parliez des subventions par habitant. Nous avons recommandé au gouvernement du Canada que s'il accordait un montant de base de 1 p. 100 des 2 milliards de dollars à chaque province et territoire et s'il accordait ensuite un montant par habitant, ce serait équitable. Cela aiderait à notre développement.
Au Nunavut, de tous les fonds que nous recevons des divers paliers de gouvernement, je crois que 92 p. 100 proviennent du gouvernement fédéral aux termes de l'entente de financement préétablie, et je pense que les autres 8 p. 100 proviennent de nos propres sources de revenu, c'est-à-dire des taxes imposées par le gouvernement du Nunavut aux habitants du Nunavut.
Nous n'avons pas une très grande assiette fiscale. Nous devons développer notre économie pour créer de l'emploi. Nous avons besoin d'entreprises si nous voulons percevoir des taxes. Si nous pouvons mettre tout cela sur pied, alors nous pourrons commencer à faire payer des impôts à ces gens et réinvestir ces impôts dans notre territoire et dans nos collectivités.
La ville d'Iqaluit est la seule collectivité au Nunavut qui a le pouvoir de taxer. Les autres collectivités au Nunavut n'ont pas encore ce pouvoir.
À (1045)
La présidente: Monsieur Everitt, vous voulez ajouter quelque chose?
M. Glen Everitt: Chaque territoire a des pouvoirs différents de taxation. Au Yukon, les municipalités ont une grande marge de manoeuvre. Nous pouvons faire beaucoup de choses pour générer des recettes. Ainsi, au sujet d'Internet haute vitesse à bande large, notre municipalité a emprunté de l'argent à la banque, a fait installer des fibres optiques dans toute la localité et a ainsi pu donner à chaque foyer l'accès à Internet haute vitesse, alors que le CRTC a demandé aux contribuables dans le sud de subventionner Northwestel. Northwestel est l'entreprise de téléphone qui vient de se lancer dans Internet haute vitesse et qui fait concurrence à toute collectivité qui tente d'en faire autant. C'est une situation intéressante.
Mais nous avons une grande marge de manoeuvre en matière fiscale et pour générer des recettes. Cependant, certaines choses aussi simples que l'eau et les égouts, des besoins fondamentaux, devraient être assujetties à une norme, et je vous donne l'exemple de ma localité. Chez nous, les gens peuvent payer jusqu'à 1 700 $ par année pour ce service—et nous continuons de le subventionner.
Les sources de recettes sont néanmoins limitées. Ce qu'il nous faut, c'est ce que nous demandons ici: davantage de possibilités, davantage d'emplois, davantage de gens au travail. Nous avons tout essayé, et c'est ce que nous avons conclu.
Merci.
La présidente: Madame Cadieux, vous avez la parole.
Mme Winnie Cadieux: Dans les Territoires du Nord-Ouest, l'assiette fiscale ne suffit pas pour le développement qui est en cours ou qui devrait se faire. La plupart des localités des Territoires du Nord-Ouest ne disposent pas d'un pouvoir d'imposition.
Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest reçoit son argent du gouvernement du Canada; c'est un organe du gouvernement fédéral, mais celui-ci ne lui en donne pas assez compte tenu du développement qui se fait chez nous. C'est difficile pour nous, car le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest verse presque tout son argent à ces grands projets de développement économique. Les collectivités au bas de l'échelle en souffrent. Les localités qui s'en sortent mieux, comme Inuvik et Yellowknife, elles, profitent davantage du développement économique, car elles sont au coeur de ce qui se passe, parce qu'elles sont le centre du gouvernement ou là où se trouvent les ressources.
Toutes les autres collectivités souffrent car elles n'ont pas d'assiette fiscale et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest non plus. Nous comptons totalement sur l'argent que le gouvernement fédéral nous verse et qui, en fait, provient des ressources de notre territoire.
Comme l'ont déjà indiqué mes collègues, nous souhaitons que la façon dont les sommes sont versées aux provinces et aux territoires dans le programme d'infrastructure soit modifiée. Les programmes tels que le programme EDE seraient aussi bénéfiques. Dans notre propre petite collectivité, nous avons pu profiter du PAC, le programme d'accès communautaire, ni du Partenariat rural canadien; nous avons aussi joui de l'aide du gouvernement fédéral pour l'accès à Internet, parce qu'il aurait été coûteux et trop long pour nous d'attendre que Northwestel le fasse.
La présidente: Merci.
Pour la première série de questions, nous commençons par M. Wilfert, suivi de M. Murphy, pour les ministériels.
Je crois savoir que vous allez partager votre temps, monsieur Wilfert. Vous avez une courte question à poser, puis...
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Oui, ensuite, je dois partir.
La présidente: Vous n'avez quand même que 10 minutes.
M. Bryon Wilfert: J'aimerais d'abord souhaiter la bienvenue à tous les témoins.
À titre d'ancien président de la Fédération canadienne des municipalités, j'ai contribué à l'établissement du Forum nordique. J'y ai rencontré beaucoup de gens, y compris mon bon ami Larry Gagnell, bien entendu, ancien directeur exécutif de l'Association des collectivités du Yukon. J'y ai aussi fait la connaissance d'Yvette Bungay, de Kathy Watson et de bien d'autres.
J'aimerais faire deux observations. Premièrement, monsieur Fraser, je tenterai d'obtenir une réponse du ministre. J'ignore pourquoi cela s'est produit, mais je vais m'informer.
En ce qui a trait aux 160 millions $ sur quatre ans pour les infrastructures, pourriez-vous nous en dire plus long, brièvement? Je vous ai peut-être mal compris, mais je crois vous avoir entendu dire que vous mettez la touche finale à un rapport qui explique comment vous en êtes arrivé à cette somme, ainsi que la nature de l'entente que vous aimeriez conclure.
À (1050)
M. Glen Everitt: Lorsque le ministre Martin a annoncé la création du projet d'infrastructure, cela nous a beaucoup intéressés. Nous sommes venus à Ottawa du Yukon pour rencontrer les fonctionnaires de M. Manley et de M. Martin qui nous ont dit que, cette fois-ci, le financement ne serait pas calculé par habitant. Nous avons été ravis de l'apprendre. Puis, nous avons entendu dire que l'on se limiterait aux grands projets, ce qui excluait tous les projets du Nnord, car nous n'avons pas de projets de 50 ou de 60 millions de dollars. Nous avons alors demandé si nous ne pourrions pas regrouper tous nos projets de façon à en faire un seul «grand projet».
Le gouvernement du Yukon a offert aux municipalités les services d'un employé qui fait la recherche, avec les collectivités, pour déterminer nos besoins fondamentaux en infrastructure; le ministère des Finances fera ensuite une analyse des coûts de ces besoins. Le rapport devrait être terminé d'ici le 30 juin et j'ai promis aux adjoints de MM. Manley et Martin un exemplaire du rapport.
Notre association souhaite que ce dossier ne soit pas laissé aux politiciens des territoires. Nous avons déjà rencontré notre premier ministre, qui nous a accordé son appui total. Je sais que certains n'aiment pas que le gouvernement fédéral contourne les gouvernements des provinces. Parfois, ce sont les provinces qui constituent le principal problème des localités, les provinces qui veulent mettre la main sur l'argent et l'investir dans leurs propres priorités pour s'assurer d'être réélues—je le dis sans vouloir offenser qui que ce soit ici présent. Nous voulons contourner cet intermédiaire, car la loi qui crée les municipalités nous interdit les budgets déficitaires. Les conseils municipaux de toutes les régions du pays ont prouvé qu'ils sont les meilleurs gestionnaires financiers, comme vous le savez pertinemment, puisque vous avez été maire de Winnipeg, je crois, ou étiez-vous conseiller municipal?
M. Bryon Wilfert: J'étais conseiller à la municipalité de Richmond Hill à l'époque.
M. Glen Everitt: Richmond Hill? Excusez-moi.
Voilà donc notre proposition, et le rapport devrait être terminé d'ici la fin du mois de juin.
M. Bryon Wilfert: Je dois partir, mais je tiens d'abord à dire que je suis allé dans de nombreuses collectivités, petites et grandes, dans les trois territoires, et que ça vaut le coup. J'ai entendu beaucoup de commentaires positifs sur la réunion qui s'est tenue à Dawson en décembre dernier.
M. Glen Everitt: Tant mieux.
La présidente: Monsieur Murphy.
M. Shawn Murphy (Hillsborough, Lib.): Merci beaucoup, madame la présidente. J'aimerais faire suite à la dernière question qui a été abordée.
Rien n'indique que vous ne pourrez recevoir une part des 2 milliards de dollars prévus pour le programme d'infrastructure. Est-ce ce qu'on vous a laissé entendre? Je croyais qu'il y aurait un mécanisme spécial pour les localités nordiques.
La présidente: Allez-y, monsieur Peterson.
M. Keith Peterson: Merci, madame la présidente.
Nous avons vu le ministre des Finances récemment, qui disait que les critères n'étaient pas encore fixés.
Contrairement à la communauté de mon collègue Glen Everitt, la nôtre a préparé une liste de projets d'une valeur de 250 millions de dollars. Il ne s'agit pas de projets de 50 millions de dollars, mais de projets de 300 000 $, d'un million de dollars et peut-être quelques-uns de 4 millions de dollars. Regroupés, ils font au total 250 millions de dollars, et ce pourrait être davantage. Nous nous sommes adressés au bureau du vice-premier ministre ou on nous a dit, essentiellement, qu'il y aurait des mégaprojets dans chaque province et territoire, et que le montant minimal était de 50 millions de dollars. Nous recevons donc des informations contradictoires.
Notre visite à Ottawa nous a ouvert les yeux, puisqu'on voit que ce qui se fait ici, ce sont des visites, du lobbying. Mais des sources différentes nous disent que les critères sont en voie d'élaboration.
Nous avons écrit au vice-premier ministre immédiatement après cette rencontre, puisqu'il a la responsabilité d'Industrie Canada, soit le ministère responsable de la Fondation pour l'infrastructure stratégique. Nous lui avons demandé d'y réfléchir à nouveau, avant la décision finale. Nous ne savons donc pas ce qu'il en sera.
M. Glen Everitt: D'après l'information obtenue, on optera uniquement pour les grands projets. À la dernière réunion du conseil de la Fédération canadienne des municipalités, en mars, nous avons reçu un représentant du Conseil du Trésor, qui disait la même chose. J'ai été scandalisé d'entendre parler de ce grand centre de congrès de Vancouver, alors que des collectivités partout dans le Nord n'ont même pas encore l'eau courante. Mais cette déclaration a été faite à cette réunion, qui a déclenché la résolution dont on a parlé, adoptée à l'unanimité par les maires et conseillers municipaux de l'ensemble du pays: ces programmes d'infrastructure doivent être conçus en tenant compte du Nord.
Au Yukon, nous avons environ 29 000 habitants. Nous recevrons 2 millions de dollars. C'est plus que ce que nous pourrions obtenir dans le cadre de la méthode usuelle de financement par habitant. Mais on offre un minimum de 2 millions de dollars, et c'est tout ce que l'on reçoit. Cela ne suffirait même pas à payer l'asphalte d'une route. Ça ne nous mène pas bien loin. Il s'agit de petites collectivités ayant peu de possibilités d'expansion économique. Ces petites collectivités pourraient être près d'une route de service, et alors, mettre sur un pied une entreprise appartenant à la communauté et gérée par elle, qui créerait de l'emploi pour les jeunes. Mais ces collectivités ne peuvent rien demander. Elles n'ont pas accès à la contribution de l'autre tiers, soit celle du gouvernement territorial, qui affirme ne pas en avoir les moyens.
À (1055)
M. Shawn Murphy: Je comprends, et j'espère que nous demanderons ensemble qu'une exception soit faite pour les petites provinces et les petits territoires, dans le cadre du programme des infrastructures stratégiques. Je représente une petite province et je demande la même chose. Nous n'avons pas de projets de 50 millions de dollars à l'Île-du-Prince-Édouard, et nous voulons qu'on fasse une exception de ce genre.
Ma deuxième question porte sur un thème récurrent dans vos mémoires. Le besoin pressant d'une agence de développement du Nord, semblable aux quatre agences de développement existantes au Canada. Je ne vois pas pourquoi on ne le proposerait pas. Mais les intérêts sont-ils les mêmes? Le Yukon, le Nunavut et les Territoires du Nord-Ouest représentent une très grande région du Canada où se trouvent beaucoup d'intérêts différents et divers, ainsi que des grandes distances. Est-ce qu'il y a suffisamment d'intérêts communs pour la création d'une agence, ou cela sèmerait-il la confusion?
M. Glen Everitt: Je crois en effet qu'on risque de confondre. Je sais que mon collègue Keith Peterson a beaucoup travaillé sur l'idée d'une agence, mais j'entrevois des problèmes.
Votre bon ami Larry Bagnell, le député du Yukon, avait pour responsabilité la mise en oeuvre des ententes de développement économique. Jusqu'à ce que le gouvernement y mette fin, les ententes de développement économique relevaient du ministère de Larry. Il n'y en a plus. Il en sait beaucoup sur la question et pourrait vous parler des avantages des anciennes ententes, ou des problèmes qu'elles comportaient. Il pourrait vous parler de tous les problèmes qu'il a cernés et qu'on pourrait corriger.
Je sais que nous partageons des choses avec les territoires, mais nos administrations sont complètement différentes. Il faut que le gouvernement du Canada s'en rende compte. Il a lancé le Programme des collectivités ingénieuses, que vous connaissez peut-être. Quoi qu'il en soit, chaque province a reçu une formule de demande, mais une seule a été envoyée pour les trois territoires, ensemble. C'est une erreur. Nous avons trois gouvernements différents, chacun nos frontières, même si on a toujours tendance à nous regrouper. C'est un peu comme si on mettait en concurrence le Yukon, les T.N.-O. et le Nunavut. Nous estimons que nous aurions dû avoir chacun notre formule de demande, comme chacune des provinces. C'est un problème. Mais je ne sais pas si on peut appliquer la même critique à la création éventuelle d'un bureau régional pour les ententes de développement économique, ou quelque chose du genre.
La présidente: Nous allons écouter les commentaires de M. Peterson et de Mme Cadieux, avant de donner la parole à Mme Minna, qui aura 10 minutes.
M. Keith Peterson: Merci, madame la présidente.
J'ai parlé à des gens du Yukon et j'ai rencontré l'association des collectivités du Yukon et la Chambre de commerce du Yukon ainsi que le gouvernement territorial, en plus d'autres personnes de notre côté, au Nunavut, et des Territoires du Nord-Ouest. On s'intéresse beaucoup à la création d'un organisme d'expansion régionale pour le Nord. Ce n'est pour l'instant qu'un concept, mais on peut y travailler. Il en existe des exemples dans les Maritimes et dans l'ouest du pays. Ces régions ont des points communs et arrivent à collaborer pour obtenir des résultats. C'est le rôle des organismes d'expansion régionale: stimuler l'emploi, la formation et l'investissement.
Je sais que ces organismes ont des problèmes. C'est toujours le cas quand on est financé par le gouvernement, mais je pense qu'on peut tirer des leçons de ce qui se passe dans le Sud, et collaborer, dans le Nord. Notre administration est trop petite pour justifier que soit créé un organisme d'expansion régionale pour le Nunavut, mais pour l'ensemble du Nord, je crois que c'est possible.
La présidente: Madame Cadieux.
Mme Winnie Cadieux: Merci.
Étant donné la diversité des cultures et des ressources de chaque territoire, je ne vois pas très bien ce que ferait un organisme d'expansion régionale qui mettrait dans le même sac tous les territoires du Nord. Mais pendant que ce groupe réfléchit à tout ce qu'il entend et à tout ce qu'il voit, une chose doit se produire: il faut que l'argent soit accordé à la base, aux collectivités. Si les collectivités ne reçoivent pas d'argent, elles ne seront pas viables. Leurs habitants déménageront dans les grands centres, par exemple, et ce n'est pas ce que nous voulons.
Tout vient d'en haut. Le gouvernement fédéral dit aux gouvernements territoriaux qu'il leur faut consacrer de l'argent à des mégaprojets ou à de grands projets, puis les gouvernements territoriaux disent à leur tour aux collectivités qu'ils ne peuvent financer de projets de moins de 100 000 $. Une collectivité de 80 personnes, sans grande assiette fiscale, ne peut pas financer un projet de 100 000 $. Nous arrivons à peine à financer des projets de 30 000 $. On ne répond pas à nos besoins parce que l'argent est retenu à des paliers supérieurs, et dépensé de trop de façons différentes.
Á (1100)
La présidente: Madame Minna, vous avez dix minutes pour les questions et pour les réponses.
Mme Maria Minna (Beaches—East York, Lib.): Merci, madame la présidente.
Je tiens d'abord à vous remercier d'être ici, vous m'avez beaucoup appris. Je n'ai vu que le Yukon et Yellowknife, et je dois retourner dans le Nord pour visiter plus à fond.
Il me semble évident que l'aspect le plus important du travail du gouvernement du Canada dans le nord, c'est d'assurer un sentiment d'appartenance, que les programmes et le développement soient gérés localement dans le Nord, chacun selon votre optique. Autrement, rien ne se fera. Rien ne marchera vraiment. Mais en agissant ainsi, on pourrait régler le problème qui a été soulevé plus tôt, au sujet des entreprises qui quittent la région à cause de normes environnementales qui ne sont pas applicables chez vous et qui n'ont pas d'utilité dans votre région. Cela, sans parler de la question de changement climatique, qui modifie le climat dans le Nord de manière sensible et qui touche votre mode de vie.
Je voudrais savoir ce que vous proposez, parce qu'à mon avis, on parle davantage d'expansion économique des collectivités que de mégaprojets, de projets interprovinciaux, etc., qu'on voit ailleurs au pays, comme Mme Cadieux vient de le dire. Elle parlait de programmes plus petits. Ils sont parfois plus gros, mais chacune des régions doit en être le moteur.
J'aimerais que vous me disiez comment devrait fonctionner l'organisme d'expansion régionale. Croyez-vous tous qu'il doit s'agir d'un organisme d'expansion régionale, ou devrait-il être structuré différemment, scindé? Dans ce cas, est-ce que ce serait une solution pour résoudre les problèmes dont on vient de parler, au sujet de l'expansion des communautés, qui doit être gérée par chacune des communautés, plutôt que par le Sud?
La présidente: Monsieur Peterson, vous avez la parole.
M. Keith Peterson: Merci, madame la présidente.
Comme je l'ai dit plus tôt, c'est à la fois très grand et tout petit. Le Nunavut n'a que 28 000 habitants, pour un territoire de deux millions de kilomètres carrés. Je ne connais pas les derniers chiffres de Statistique Canada, mais je crois qu'au Yukon, il y a 27 000 personnes, et 30 000, dans les Territoires du Nord-Ouest. Le gouvernement du Canada nous a dit que nous ne pourrions avoir un organisme d'expansion régionale par territoire, parce que chaque territoire est trop petit. Si nous collaborons ensemble, toutefois, il serait possible d'avoir un organisme. L'autre jour, le ministre des Finances a déclaré qu'il y réfléchirait.
Par le passé, nous avons eu des ententes de développement économique pour le Nord. Quand nous faisions encore partie des Territoires du Nord-Ouest, nous avions une entente de cinq ans. Elle semblait efficace, mais elle s'enlisait dans la bureaucratie et la lourdeur administrative. La moitié de l'argent qui y était consacré servait à l'administrer. Depuis l'été dernier, je parle au ministre Nault de l'entente de développement économique, et notre député, à la réunion de Cambridge Bay, a entendu le ministre affirmer que nous en aurions, mais qu'on ne savait pas encore quand. Je lui ai demandé ce que cela signifiait, et il m'a dit que nous devions convaincre ses collègues du Cabinet. Pour l'ensemble du Canada, le deux milliards de dollars de la Fondation pour l'infrastructure stratégique, ce n'est presque rien, mais c'est beaucoup pour nous, dans le Nord. Quand on nous dit que quelque chose s'en vient pour nous, comme l'entente de développement économique, qu'on en parle au Cabinet, qu'on prendra des décisions, pour eux, c'est peut-être le 200e point à leur ordre du jour, mais pour nous, c'est le premier ou le deuxième. Je pense que vous pourriez nous aider, dans le Nord.
Á (1105)
La présidente: M. Everitt voulait répondre.
Souhaitez-vous intervenir aussi, monsieur Fraser?
M. Glen Everitt: Je vais passer après M. Everitt.
La présidente: Très bien, merci.
M. Glen Everitt: Vous m'avez demandé si nous favorisons ce type d'approche. Il me semble qu'un bureau pour les ententes de développement économique se ferait suite à des négociations entre le gouvernement territorial et le gouvernement fédéral. Je serais tout à fait en faveur d'une organisation régionale qui s'occuperait des trois territoires, et peut-être aussi les régions au nord du Québec et du Labrador—et puisque j'ai déjà mentionné le Forum du Nord, je dois souligner que ce forum s'occupe de tout ce qui se trouve au nord du 55e parallèle, c'est-à-dire le Labrador, le nord du Québec, et les autres provinces en allant vers l'ouest.
Ceci dit, je suis à 100 p. 100 favorable à une entente de développement économique. Nous avons soumis une proposition au ministre des Finances pour donner un exemple d'une entente de développement économique dont les municipalités auraient la responsabilité. Ce type d'entente assurerait la participation active des collectivités au processus décisionnel.
M. Peterson a tout à fait raison. Lorsqu'on arrive aux échelons supérieurs—ou plutôt inférieurs; j'estime que les maires se situent au rang supérieur, en allant en décroissant vers le premier ministre, et les citoyens au sommet—on finit par dépenser des sommes énormes pour administrer les projets, ce qui limite grandement les possibilités de réalisation. Nous pouvons vous citer des cas où nos associations municipales ont la responsabilité d'administrer des fonds de formation, ainsi que d'autres budgets, avec une administration très limitée et libre de toute ingérence politique; nous avons, d'ailleurs, fait état de ces exemples. Et oui, effectivement, je suis favorable à une entente qui regrouperait toutes les régions du Nord.
La présidente: Monsieur Fraser.
M. Whit Fraser: J'ai souvent répété, en occupant plusieurs fonctions: le Canada n'a aucune stratégie cohérente pour le Nord. Si une telle stratégie a déjà existé, il y a longtemps qu'on n'en entend plus parler. Depuis les 30 ans que j'oeuvre dans le Nord, je n'en ai jamais connu. Nous dépensons des sommes énormes dans une vingtaine de ministères du fédéral, mais il n'existe aucune stratégie nationale pour régir ces dépenses. Les Inuits vous diraient qu'une stratégie nationale pour le Nord doit tenir compte des questions sociales, économiques et écologiques qui préoccupent à la fois les peuples autochtones ainsi que les Inuits; ils vous diraient clairement que le Nord doit figurer dans une stratégie nationale.
Il ne s'agit pas, pour moi, d'une question régionale, mais plutôt d'une question nationale. Le pays entier est impliqué, mais nous n'avons encore rien fait.
La présidente: Un dernier commentaire, madame Cadieux. Souhaitez-vous intervenir?
Mme Winnie Cadieux: Je crois que les territoires vont devoir se pencher ensemble sur la question afin de savoir si une seule entente régionale suffirait. Comme ont dit Glen et Keith, la proportion du budget consacrée à l'administration est telle que lorsqu'une collectivité songe à mettre sur pied un programme pour l'alphabétisation ou la santé ou le développement économique, il ne reste souvent pas beaucoup d'argent lorsque vient le temps de mettre ces programmes en marche. Moins il y a de niveaux pour administrer ces budgets avant que la population ne puisse s'en servir—cette population qui, d'ailleurs, justifie notre présence ici—mieux ça sera. L'idéal serait de trouver le moyen d'administrer ces budgets au niveau local, dans les collectivités, plutôt que de le faire passer par plusieurs niveaux de gouvernement; nous pourrions ainsi espérer que l'argent irait un peu plus loin que l'aéroport.
La présidente: Vous avez une minute pour faire une observation.
Mme Maria Minna: Ma dernière observation sera très courte. Essentiellement, elle est liée au fait que l'éducation et la santé constituent clairement les enjeux importants pour toute la région, surtout pour les femmes et les enfants.
Je n'ai qu'une seule observation—et peut-être nous pourrions en discuter davantage suite à cette réunion—en ce qui concerne la mise en valeur des ressources, les redevances et le genre de retombées que vous recevez grâce au développement de la région. Encore une fois, la région et les gens en tireraient davantage profit si ce développement était axé sur les besoins de la collectivité. Bien entendu, l'éducation constitue un enjeu fondamental de tout cela, parce que si les gens n'ont pas les compétences nécessaires, ils ne peuvent pas tirer profit de ces occasions d'affaires.
Je vous fais part de cette observation parce que je suis d'accord avec vous. Nous pourrions peut-être discuter de cette question suite à cette séance, puisqu'il ne me reste probablement plus de temps.
La présidente: Il nous reste encore 20 minutes. Je veux simplement vérifier qu'il ne reste que deux personnes sur ma liste, c'est-à-dire M. Loubier et M. Cullen, à moins qu'il y ait quelqu'un d'autre. Je comprends que nous avons deux députés du Nord ici, mais ils n'ont pas signé le registre. Cependant, nous sommes très heureux qu'ils aient pris le temps de venir ici entendre les témoins.
Étant donné que je ne vois plus d'intervenants, je vais accorder 10 minutes à M. Loubier et 10 minutes à M. Cullen.
Á (1110)
[Français]
M. Yvan Loubier: Madame la présidente...
[Traduction]
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Je pensais que M. Loubier était déjà parti.
La présidente: Eh bien, il s'agit maintenant du deuxième tour, et nous allons vous accorder 10 minutes plutôt que cinq. Je vous accorde cinq minutes de plus.
Allez-y, monsieur Loubier.
[Français]
M. Yvan Loubier: Ne soyez pas frustré, monsieur Cullen, vous aurez votre tour, vous aussi. Il n'y a aucun problème.
Ce ne sera pas long, madame la présidente.
[Traduction]
La présidente: Vous avez pris 20 secondes. Allons-y.
[Français]
M. Yvan Loubier: J'aimerais juste avoir une précision de la part de M. Fraser et de Mme Dewar.
Tout à l'heure, si j'ai bien compris vos propos, vous avez affirmé que lors du dernier budget, des montants supplémentaires prévus pour les communautés autochtones en matière d'éducation, de prévention de la polytoxicomanie, de l'alcoolisme foetal, etc. ne vous touchaient pas parce que vous êtes hors réserve. C'est bien ce que j'ai compris tout à l'heure, soit que le dernier budget était insuffisant, en termes de montant supplémentaire pour les autochtones, mais qu'en plus, la communauté inuit ne pouvait pas en bénéficier.
[Traduction]
La présidente: Monsieur Fraser.
M. Whit Fraser: Le discours du budget a été des plus clairs. Pour trois ou quatre secteurs, il a prévu des montants en disant que ces montants étaient consacrés aux Autochtones qui habitaient les réserves. Veronica pourrait vous parler des programmes précis et vous expliquer l'impact de ces programmes sur le travail qu'elle fait; cependant, nous croyons que le budget a envoyé un message clair au gouvernement fédéral et aux autres, que la priorité en ce qui concerne les Autochtones et les Indiens qui habitent les réserves. Le budget n'a pas parlé des Autochtones au Canada de façon générale; il a été très précis.
Comme je l'ai dit, M. Kusugak a rédigé une lettre demandant des précisions en ce qui concerne les Inuits. Est-ce qu'ils sont compris ou non? Malheureusement, il n'a pas reçu de réponse à sa lettre, mais l'un des députés vient de me dire qu'il va vérifier. Eh bien, tout cela s'est déroulé au mois de février, mais nous sommes surtout préoccupés par le message qu'il envoie. Il y a un besoin pour des programmes axés sur les besoins des Inuits.
La présidente: Madame Dewar.
Mme Veronica Dewar: Merci.
Je reprendrai l'exemple de Whit Fraser, je crois. Dans le cas du montant consacré aux effets et au syndrome de l'alcoolisation foetale, le programme inuit n'a rien reçu cette année. Tous les montants étaient acheminés aux Premières nations, et tous les programmes étaient axés sur les besoins des Premières nations. Parfois nous avons également des problèmes lorsqu'on veut mettre la main sur les montants consacrés à la lutte contre le VIH/sida, parce que rien n'est vraiment prévu pour les Inuits.
Parfois les Inuits doivent mener une lutte féroce pour obtenir l'argent nous permettant de composer avec des problèmes de santé importants. Étant donné que tout l'argent est consacré aux Premières nations et que tout est axé sur leurs besoins, nous sommes laissés pour compte. Et ça, c'est la vérité. Le ITK, le Pauktuutit et d'autres organismes réclament ces montants depuis belle lurette. Nous voulons de l'argent qui est consacré aux besoins précis des Inuits pour qu'on puisse obtenir notre part du gâteau et nous servir de cet argent dans l'intérêt des Inuits.
[Français]
M. Yvan Loubier: Combien de membres compte la communauté inuit au Canada?
[Traduction]
M. Whit Fraser: La collectivité inuite, dans son ensemble, compte environ 50 000 personnes au Labrador, au Nouveau-Québec, au Nunavut et dans les Territoires du Nord-Ouest.
[Français]
M. Yvan Loubier: J'aimerais juste faire un dernier commentaire par rapport à ce que vous avez dit. Vous gagneriez peut-être à communiquer avec nous aussi, les partis de l'opposition. Il y a le parti gouvernemental, mais il y a l'opposition aussi qui, dans une démocratie normale, gagnerait à être informée de votre situation. Si des informations de cette nature avaient été disponibles en décembre, on aurait pu, comme je vous le mentionnais plus tôt pour les territoires du Nord, évaluer le budget en fonction d'une nouvelle donnée, c'est-à-dire exiger en votre nom, parce que vous êtes les porte-parole inuits, que le gouvernement fédéral fasse sa part au niveau de la communauté inuit. Mais lorsqu'on ne connaît pas des informations, c'est difficile pour nous de pouvoir faire des pressions sur le gouvernement. C'est un jeu tout à fait normal de la démocratie que de venir nous informer aussi de vos revendications, de les confronter devant le gouvernement. C'est en confrontant des idées de cette façon que l'on arrive aux meilleures décisions possibles en bout de ligne. Alors, c'est une invitation que je vous fais de nous faire part de vos préoccupations.
Merci.
Á (1115)
[Traduction]
La présidente: Monsieur Loubier, avant que nous passions à autre chose, M. Everitt voulait répondre à votre intervention précédente.
M. Glen Everitt: Je voulais simplement apporter certaines précisions. On a parlé de la population inuite qui habite les différentes régions de l'Arctique. Le Yukon est habité par un peuple des Premières nations, mais ces habitants ne vivent pas dans des réserves non plus. Les Inuits ne sont pas les seuls à ne pas habiter dans des réserves. Les négociations relatives aux revendications territoriales du Yukon ne traitent pas des réserves. Les habitants du Yukon ne peuvent pas, eux non plus, bénéficier de ce genre de financement.
Juste avant que je quitte le Yukon pour venir à cette réunion, le ministre de la Santé et des Services sociaux m'a demandé de soulever cette question lors de ma comparution, parce qu'en vertu d'accords sur des revendications territoriales conclus avec Ottawa, certaines terres leur sont transférées. Cependant, comme il ne s'agit pas de terres dans des réserves, il est impossible d'obtenir des subventions pour la construction d'infrastructures parce que comme la population ne vit pas dans des réserves, elle n'y a pas droit.
Le Yukon est une autre région du Canada qui ne fait pas partie des territoires des réserves.
La présidente: Je veux signaler que nous avons invité l'Assemblée des premières nations à comparaître devant le comité aujourd'hui, mais ses représentants n'ont pu être présents, pour une raison que j'ignore. Nous les convoquerons de nouveau à un autre moment.
Madame Cadieux.
Mme Winnie Cadieux: Les Territoires du Nord-Ouest sont dans la même situation. Nous avons seulement deux réserves, qui n'abritent qu'une faible proportion de nos Autochtones. Tous les autres vivent à l'extérieur des réserves.
La présidente: Je vous remercie.
Monsieur Cullen, vous avez la parole.
M. Roy Cullen: Merci, madame la présidente. J'aimerais tout d'abord remercier les témoins d'être venus nous faire part de leurs préoccupations.
Avant de me lancer en politique, j'ai eu la chance de faire des affaires dans le Nord. Je ne suis jamais allé au Nunavut, mais j'entends bien y aller un jour. J'y allais aussi en vacances, pour pêcher l'omble-chevalier et l'ombre. Je vous inviterais vivement d'ailleurs, madame la présidente, à aller à la pêche dans cette région. Il est bon d'y aller en septembre, particulièrement si l'on veut pêcher l'omble-chevalier.
J'aimerais vous faire part d'un commentaire sur l'infrastructure, avant de vous poser une question sur le développement des ressources naturelles, et notamment des ressources gazières.
Monsieur Everitt, je vous comprends d'avoir ouvert grand les yeux lorsque vous avez appris que l'aide financière accordée en vertu de la Fondation pour l'infrastructure stratégique ne serait pas accordée en fonction du nombre d'habitants. Nous avons entendu le témoignage de représentants du Nunavut lorsque nous sommes allés à Winnipeg. Ils ont parlé du fait que les fonds d'infrastructure sont alloués en fonction du nombre d'habitants, formule qui ne favorise pas vos gens.
Si je peux me permettre de vous donner un conseil, il serait bon de présenter vos demandes en faisant valoir que le Nord est un actif stratégique dans lequel il faut investir. Vous devriez demander que certaines lacunes soient comblées. Si vous êtes capable de présenter votre dossier de cette façon, j'aimerais bien en recevoir un exemplaire. Je pourrai alors en discuter personnellement avec le vice-premier ministre, parce que je sais que le temps presse.
Ce programme d'infrastructure me semble quelque peu différent du précédent. Il n'englobera pas les petits projets, si bien que vous devez présenter un ensemble de demandes pour le Nord. Je serais alors tout à fait prêt à vous appuyer. Je pense que ces pourparlers vont évoluer plus rapidement que le rapport de notre comité si les membres du comité sont prêts à appuyer vos demandes par la suite. Voilà ce que j'avais à vous dire au sujet de l'infrastructure.
En ce qui concerne le développement dans le Nord, le gazoduc a beaucoup retenu l'attention dernièrement. J'ai eu l'occasion de travailler ave Dyavik Diamond Mines l'année dernière au moment où cette entreprise essayait d'expédier certaines provisions à temps de manière à pouvoir franchir la glace. En travaillant avec les dirigeants de cette entreprise, j'ai eu l'impression que chaque organisme ignore ce que font les autres. Nous avons cependant fini par obtenir les autorisations nécessaires et expédier les provisions à temps. Il me semble que dans le Nord tout particulièrement, il soit toujours difficile de trouver le juste équilibre entre le développement économique, d'une part, et la protection de l'environnement et des droits des Autochtones, d'autre part.
Supposons que le gazoduc du Nord passe par la vallée du Mackenzie. Y aurait-il un consensus dans le Nord sur la façon dont on devrait procéder? Madame Cadieux, vous avez dit que le processus d'autorisation doit suivre son cours, un point c'est tout. A-t-on déjà pensé, par exemple, à créer un organisme unique qui pourrait accélérer les choses? Permettez-moi de dire que j'emploie le mot «accélérer» avec beaucoup de circonspection, parce que je sais que nous devons tenir compte des questions environnementales et des droits des Autochtones.
D'après ce que je crois comprendre, beaucoup de travail a été fait pour la voie qui traverse l'Alaska et le Yukon; il pourrait donc être avantageux d'opter pour ce tracé-là. Cela dit, et en tenant compte de l'importance des questions relatives à l'environnement et aux droits des Autochtones, y a-t-il des moyens qui permettraient de faire avancer ce dossier plus rapidement?
Ma question a un deuxième volet. Et je l'adresse à tous les témoins. Je sais que le ministre des Finances et bien sûr le gouvernement veulent offrir aux peuples autochtones l'occasion de participer au développement économique de leur région. Cependant, lorsqu'il s'agit d'offrir de la formation, il faut toujours respecter un certain échéancier. Madame Minna a abordé cette question tout à l'heure. Comment doit faire le gouvernement pour garantir que si ces projets de développement vont de l'avant, les Canadiens d'origine autochtone, y compris les femmes inuites, pourront y participer pleinement? Mme Dewar pourra peut-être donner son avis sur la question des femmes inuites. Que pouvons-nous faire, au gouvernement fédéral, pour favoriser l'atteinte de ces objectifs?
Á (1120)
La présidente: Madame Dewar, vous avez la parole.
Mme Veronica Dewar: Merci.
L'association que je représente, Pauktuutit Inuit Women's Association, n'est pas reconnue comme les six autres organisations nationales. Contrairement à l'ITK, nous n'avons pas de contacts directs. Nous nous battons pour pouvoir siéger avec les autres organismes nationaux aux tables rondes afin de pouvoir participer à la prise de décisions et à l'établissement de l'orientation.
Nous jouons un rôle très important relativement aux questions liées à la santé et à la promotion des droits des femmes inuites. Cela est d'autant plus important que dans les communautés nordiques, les femmes jouent un rôle considérable au niveau communautaire. Mais dans bien des cas, on ne nous permet pas de bénéficier des fonds alloués pour la formation. Voilà pourquoi nous adressons nos revendications au gouvernement fédéral. Le peuple Pauktuutit doit siéger aux côtés des six autres associations nationales. Nous voulons être reconnus comme la septième association nationale et participer à tous les paliers de négociations; nous voulons aussi participer à la prise de décisions et à la répartition des fonds prévus pour la formation des femmes inuites. Selon que vous parlez aux chefs ou aux femmes des communautés, vous entendrez deux versions complètement différentes au sujet de l'exclusion spécifique des femmes.
La présidente: Madame Cadieux.
Mme Winnie Cadieux: Je ne suis pas d'accord pour qu'on donne toujours de la formation en fonction des grands projets. Les gens ne souhaitent pas toujours être formés en fonction de grands projets. Certains préfèrent peut-être qu'on investisse dans un projet d'énergie verte parce que cela créera des emplois dans leur localité et qu'ils pourront ainsi y demeurer et y faire vivre leur famille, plutôt que d'avoir à aller travailler ailleurs à ces grands projets.
Les grandes entreprises se tirent très bien d'affaire seules. Pourquoi n'investissent-elles pas dans la formation et des choses de ce genre? Pourquoi n'investit-on pas davantage pour aider nos écoles et le régime de soins de santé? Pourquoi ne permet-on pas aux investissements de percoler jusqu'aux localités ou même à une région afin qu'on puisse créer des programmes de formation qui seront vraiment efficaces? Des femmes veulent peut-être suivre des cours pour travailler dans les soins de santé, apprendre à cuisiner ou tout simplement à être de meilleurs parents.
Si on investit tout l'argent dans les grandes entreprises et le gazoduc, il en manquera ailleurs. En quoi cela profitera-t-il aux habitants des petites collectivités? Va-t-on seulement former quelques personnes qui vont avoir du travail pendant deux ans, et il n'y aura pas alors d'avantages résiduels dans les collectivités.
En tant que dirigeants communautaires dans une petite localité, c'est à nous qu'il incombe de voir à ce que nous puissions conserver une certaine qualité de vie et d'offrir ce qu'il y a de mieux à nos habitants. Mais nous devons toujours nous battre contre cette perspective plus élevée des grandes entreprises, d'amener nos travailleurs dans ces zones de développement. Eh bien, il y a sûrement des entreprises pour lesquelles on peut être formés et qu'on peut mettre sur pied dans une localité, qui peuvent être un atout pour ces grands projets sans que cela signifie nécessairement que la formation est donnée en fonction de ces projets.
La présidente: M. Peterson, suivi de M. Everitt.
Monsieur Fraser, vous vouliez également répondre à cette question? Non? D'accord.
M. Keith Peterson: Merci, madame la présidente.
Je ferai simplement remarquer à M. Cullen que la route dont vous parlez a été construite et est entretenue par une coentreprise inuite, Nuna Logistics. Nous la connaissons bien. Comme je l'ai déjà dit, nous avons entre autres produit la route et le port de Bathurst, praticables en toutes saisons.
Vous avez posé une question au sujet du pipeline. Dans notre cas, nous avons un Inuit à la tête de ce projet. En application de l'Accord définitif du Nunavut, c'est eux qui sont chargés des questions d'environnement et d'habitat, ainsi que des questions d'ordre social et culturel qui touchent les Inuits.
Nous élaborons ce projet en collaboration avec les sociétés minières et les collectivités afin de ne pas nuire au troupeau de Bathurst durant la saison de migration. Nous construisons une route praticable par tous les temps et, de cette façon, lorsque le lac Contwoyto sera gelé, l'hiver, nous fermerons la route et les caribous pourront migrer. Lorsque la glace du lac fondra, au printemps, nous fermerons la route et les caribous pourront se rendre vers leurs aires de mise bas.
Si l'industrie, les collectivités et le gouvernement peuvent travailler de concert dans un méga-projet de ce genre, les résultats devraient être positifs.
Pour revenir aux observations de Mme Cadieux, pour nous, un méga-projet, dans le contexte canadien, c'est quelque chose comme l'exploitation des sables bitumineux d'Athabasca. Dans le Nord, un projet de 300 ou 400 millions de dollars, c'est un méga-projet qui crée de 200 à 300 emplois. On peut envoyer des gens travailler à un projet de ce genre et les former. J'ai été l'un des négociateurs de la KIA. Nous avons négocié une entente relative aux avantages avec BHP Diamonds, Diavik Diamond Mines et une ou deux autres sociétés. Dans ces ententes, nous avons tenu compte de la formation, de l'emploi, de facteurs sociaux comme la scolarité, l'emploi et les possibilités de sous-traitance à des entreprises et des collectivités locales.
Les travailleurs ne veulent pas tous travailler dans une mine ou à un méga-projet, mais s'ils vont travailler ailleurs, ils ramèneront de l'argent dans leurs collectivités et cela stimulera le développement économique local. Ce qu'il faut, c'est que les gens ramènent de nouveaux capitaux d'ailleurs. Je ne suis pas économiste, mais tout le monde sait que lorsqu'on ramène un dollar dans une collectivité, ce dollar a probablement circulé trois, quatre ou cinq fois dans la collectivité pour aider d'autres entreprises.
Nous pouvons former des travailleurs. Dans notre région, il y a des gens qui le font. Au Nunavut, il y a des gens qui reçoivent de la formation pour travailler dans notre territoire.
Á (1125)
La présidente: Monsieur Everitt.
M. Glen Everitt: Je crois qu'on a demandé comment le gouvernement fédéral peut aider. Je ne peux vraiment pas répondre à cette question. Cependant, je peux vous dire ce que nous faisons actuellement.
À mon avis, la meilleure chose qui soit arrivée au Yukon a été le règlement des revendications territoriales en suspens. Cela a été un engin économique qui nous permet d'avancer. Mais il existe des lois au niveau municipal, au niveau territorial et au niveau des Premières nations, qui exigent le développement économique et des accords sociaux dans le cas de projets tels qu'un pipeline, qu'il s'agisse de la route de l'Alaska, d'un projet dans le delta du Mackenzie ou les deux. Notre région mise beaucoup sur le pipeline de Dempster pour transporter notre gaz naturel vers l'extérieur et se raccorder au pipeline d'une autre compagnie. Mais des accords socio-économiques sont nécessaires pour offrir des occasions de formation aux intéressés. Les Premières nations peuvent aussi recevoir des redevances lorsque ces pipelines traversent leur territoire traditionnel. Ces mesures sont prévues par la loi afin de garantir de leur exécution.
Le gouvernement fédéral participe à un projet pour qu'une compagnie du sud de la Colombie-Britannique--et c'est dit sans offense... Il s'agit d'un projet de 10 millions de dollars au Yukon mais, pour le Yukon, un projet d'un million de dollars est considéré important. Je sais que ce n'est rien dans le sud, mais pour le Yukon c'est un gros projet. Les retombées d'un projet d'un million de dollars sont énormes. Mais cette compagnie ne peut pas tout simplement s'installer au Yukon, amener ses propres employés, faire ce qu'elle veut et ensuite repartir et rapporter avec elle tous les avantages sans rien faire pour la collectivité. Moi, je ne vois aucun inconvénient à ce qu'on ait des exigences pour garantir que les localités tirent avantage de tels projets. En fait, c'est très important.
La présidente: Monsieur Fraser, vous avez changé d'avis.
M. Whit Fraser: Très brièvement, Glen a mentionné le règlement des revendications territoriales et son impact positif pour le Yukon. C'est le cas partout au pays lorsqu'il y a règlement d'une revendication territoriale globale, que ce soit au Labrador, dans le nord du Québec, au Nunavut, ou dans l'ouest de l'Arctique, où on investit beaucoup dans les pipelines, comme M. Cullen l'a dit. Cela a un impact économique positif.
Cependant, ce que je tiens à préciser c'est que le règlement de revendications territoriales n'est pas une fin en soi. Un tel règlement met en oeuvre un tout nouveau régime qui fonctionne bien et qui fait en sorte que tout le monde travaille ensemble pour l'amélioration des collectivités. Mais la mise en oeuvre des revendications territoriales ainsi que le règlement de questions qui ne figurent pas dans les revendications--les questions socio-économiques qui touchent la collectivité et qui relèvent du gouvernement--ne peuvent pas être incluses dans une revendication territoriale simplement parce que celle-ci est réglée. Il s'agit d'instruments différents qui exigent une attention différente, mais il est vrai qu'elles font en sorte que tout le monde prend alors une approche nouvelle et plus positive.
Á (1130)
La présidente: Merci beaucoup. Au nom de tous les membres du comité des finances, nous vous remercions des informations que vous nous avez fournies aujourd'hui. Nous apprécions également le fait que tout le monde a été ponctuel, et nous espérons vous revoir plus tard.
La séance est levée.