HUMA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 19 mars 2002
Á | 1105 |
La présidente (Mme Judi Longfield (Whitby--Ajax, Lib.)) |
Mme Monique Guay (Laurentides, BQ) |
M. Abbott |
Mme Marie Frawley-Henry (directrice des Affaires internationales, Assemblée des Premières nations) |
Á | 1110 |
Á | 1115 |
Á | 1120 |
La présidente |
La greffière du comité |
La présidente |
Mme Skelton |
Mme Marie Frawley-Henry |
Mme Skelton |
Mme Marie Frawley-Henry |
Mme Skelton |
Á | 1125 |
Mme Marie Frawley-Henry |
Mme Skelton |
Mme Marie Frawley-Henry |
Mme Skelton |
Mme Marie Frawley-Henry |
Mme Skelton |
Mme Marie Frawley-Henry |
Mme Skelton |
Mme Marie Frawley-Henry |
Á | 1130 |
La présidente |
M. Alan Tonks (York South—Weston, Lib.) |
Mme Marie Frawley-Henry |
M. Alan Tonks |
Mme Marie Frawley-Henry |
M. Alan Tonks |
Mme Marie Frawley-Henry |
M. Alan Tonks |
Mme Marie Frawley-Henry |
Á | 1135 |
M. Alan Tonks |
Mme Marie Frawley-Henry |
M. Alan Tonks |
Mme Marie Frawley-Henry |
La présidente |
Mme Monique Guay |
Á | 1140 |
Mme Marie Frawley-Henry |
Mme Monique Guay |
Mme Marie Frawley-Henry |
Mme Monique Guay |
Mme Marie Frawley-Henry |
Mme Monique Guay |
Mme Marie Frawley-Henry |
Á | 1145 |
Mme Monique Guay |
Mme Marie Frawley-Henry |
Mme Monique Guay |
La présidente |
M. Joe McGuire (Egmont, Lib.) |
Mme Marie Frawley-Henry |
M. Joe McGuire |
Á | 1150 |
Mme Marie Frawley-Henry |
M. Joe McGuire |
Mme Marie Frawley-Henry |
M. McGuire |
Mme Marie Frawley-Henry |
M. McGuire |
La présidente |
M. Larry Spencer (Regina--Lumsden--Lake Centre, Alliance canadienne) |
Mme Marie Frawley-Henry |
M. Larry Spencer |
Á | 1155 |
Mme Marie Frawley-Henry |
M. Larry Spencer |
Mme Marie Frawley-Henry |
 | 1200 |
La présidente |
M. Spencer |
La présidente |
M. Joe McGuire |
Mme Marie Frawley-Henry |
La présidente |
M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, Alliance canadienne) |
Mme Marie Frawley Henry |
 | 1205 |
La présidente |
Mme Skelton |
La présidente |
Mme Monique Guay |
La présidente |
 | 1210 |
Mme Joanne Green (directrice des ressources humaines, Assemblée des chefs du Manitoba) |
 | 1215 |
 | 1220 |
La présidente |
M. Gerald Morin (président, Ralliement national des Métis) |
 | 1225 |
La présidente |
Mme Skelton |
Mme Joanne Green |
Mme Skelton |
Mme Joanne Green |
Mme Skelton |
Mme Joanne Green |
Mme Skelton |
Mme Joanne Green |
Mme Carol Skelton |
Mme Joanne Green |
Mme Skelton |
 | 1230 |
M. Gerald Morin |
Mme Skelton |
M. Gerald Morin |
Mme Skelton |
M. David Chartrand ( président, Manitoba Métis Federation) |
Mme Skelton |
M. Alan Tonks |
Mme Joanne Green |
 | 1235 |
M. Gerald Morin |
M. Alan Tonks |
M. Gerald Morin |
M. Alan Tonks |
M. Gerald Morin |
 | 1240 |
La présidente |
Mme Monique Guay |
M. Gerald Morin |
 | 1245 |
Mme Monique Guay |
M. David Chartrand |
Mme Monique Guay |
M. David Chartrand |
Mme Monique Guay |
 | 1250 |
La présidente |
Mme Joanne Green |
M. Gerald Morin |
La présidente |
M. Martin (Winnipeg-Centre) |
M. Gerald Morin |
M. Martin (Winnipeg-Centre) |
 | 1255 |
M. Gerald Morin |
M. Martin (Winnipeg-Centre) |
M. David Chartrand |
M. Martin |
La présidente |
Mme Joanne Green |
La présidente |
M. Joe McGuire |
M. David Chartrand |
· | 1300 |
M. Joe McGuire |
M. David Chartrand |
M. Joe McGuire |
M. David Chartrand |
La présidente |
M. David Chartrand |
M. Joe McGuire |
M. David Chartrand |
M. McGuire |
M. Gérald Morin |
· | 1305 |
M. Joe McGuire |
Mme Joanne Green |
M. Joe McGuire |
Mme Joanne Green |
M. Joe McGuire |
Mme Joanne Green |
M. Joe McGuire |
La présidente |
M. Larry Spencer |
Mme Joanne Green |
M. Gerald Morin |
M. Larry Spencer |
M. Gerald Morin |
M. Larry Spencer |
M. David Chartrand |
· | 1310 |
M. Larry Spencer |
La présidente |
M. David Chartrand |
Mme Joanne Green |
La présidente |
M. Alan Tonks |
Mme Joanne Green |
M. Alan Tonks |
Mme Joanne Green |
M. Alan Tonks |
Mme Joanne Green |
M. Alan Tonks |
Mme Joanne Green |
M. Alan Tonks |
Mme Joanne Green |
M. Tonks |
Mme Joanne Green |
La présidente |
Mme Monique Guay |
M. Gerald Morin |
· | 1315 |
Mme Monique Guay |
Mme Joanne Green |
La présidente |
M. David Chartrand |
La présidente |
Mme Monique Guay |
· | 1320 |
La présidente |
CANADA
Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mardi 19 mars 2002
[Enregistrement électronique]
Á (1105)
[Traduction]
La présidente (Mme Judi Longfield (Whitby--Ajax, Lib.)): Je déclare la séance ouverte.
Nous entamons la 55e réunion du Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées. Seul un des trois groupes qui devaient comparaître aujourd'hui est présent. Mme Frawley-Henry est ici. Elle est assise à la table et je ne crois pas qu'il serait juste de la faire attendre.
Nous allons commencer par votre exposé. Je pense que le greffier vous a dit que vous aviez droit à cinq ou six minutes. Nous allons ensuite passer aux questions.
Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Où sont les autres? Ils ne viendront pas?
La président: Ils ne sont pas encore arrivés. Nous espérons qu'ils vont venir.
Madame Frawley-Henry.
Mme Marie Frawley-Henry (directrice des Affaires internationales, Assemblée des Premières nations): Je m'appelle Marie Frawley-Henry. Je représente l'Assemblée des Premières nations. J'ai l'habitude aussi de me présenter sous mon nom traditionnel. [Le témoin s'exprime dans une langue autochtone.]
Je me suis présentée dans la langue de mon peuple, la première nation d'Anishnaabe, qui est la première nation de Nipissing et le clan auquel j'appartiens. Voilà pour l'introduction.
Je tiens à remercier les membres du comité d'être venus me rencontrer. Je tiens également à vous remercier de m'avoir invitée ici aujourd'hui. Cela prouve que l'on tient compte de l'avis des Premières nations. J'espère que l'on tiendra compte également de l'avis de mes autres collègues.
On nous a demandé de parler des questions que soulève, pour les Premières nations, l'examen de la loi fédérale sur l'équité en matière d'emploi. Je compte vous offrir des suggestions et des solutions de rechange constructives qui vous aideront à tenir compte des priorités et des objectifs en matière d'équité d'emploi des Premières nations.
Je suis ici aujourd'hui à titre de directrice des Affaires internationales de l'Assemblée des Premières nations. Les ressources de l'APN étant plutôt limitées, d'autres dossiers sont venus se greffer récemment à mes tâches quotidiennes: l'équité en matière d'emploi, l'égalité des sexes et les activités de financement. Je suis donc fort occupée, puisque je ne peux compter sur l'aide d'aucun employé de soutien.
L'APN est l'organisation nationale qui défend les intérêts politiques et les aspirations des Premières nations au Canada. Comme l'indiquait le discours du Trône prononcé à l'ouverture de la 37e législature, le Canada doit aborder le défi d'améliorer sa relation avec les Autochtones:
«Les Autochtones, plus que quiconque, doivent avoir accès aux possibilités nouvelles. Ils sont trop nombreux à vivre encore dans la pauvreté, dépourvus des outils nécessaires pour se donner un meilleur avenir, à eux-mêmes et à leurs communautés.»
«Il veillera en outre à répondre aux besoins fondamentaux dans le domaine de l'emploi, de la santé, de l'éducation, du logement et de l'infrastructure. Le gouvernement fera en sorte que chacune de ses priorités reflète cet engagement.»
Ces mots peuvent, à tout le moins, être perçus comme une garantie que le gouvernement continuera de favoriser l'équité en matière d'emploi. Toutefois, en tant qu'organisation de défense des intérêts de quelque 633 communautés de Premières nations au Canada, l'Assemblée des Premières nations a récemment vu son budget être réduit de près de 55 p. 100 par le gouvernement du Canada. Plus de 70 personnes ont été mises à pied. Par conséquent, j'ai dû ajouter plusieurs tâches à ma charge de travail.
Cette réduction a entraîné une hausse du taux de chômage chez les Premières nations, et fait perdre plusieurs millions de dollars aux économies locales des communautés des Premières nations. Les Premières nations affichent déjà le taux de chômage le plus élevé au Canada.
Plus grave encore, cette réduction empêche l'Assemblée des Premières nations de fournir des services essentiels comme le programme d'équité en emploi, programme qui a été suspendu à la suite des récentes réductions budgétaires.
Depuis la mise en oeuvre de la Loi sur l'équité en matière d'emploi, la représentation des Autochtones a légèrement augmenté. Voici ce que dit, en substance, le rapport 2001 sur la Loi sur l'équité en matière d'emploi.
En 2000, la représentation des Autochtones est demeurée inchangée par rapport à 1999. Toutefois, à 1,5 p. 100, il s'agit encore du niveau le plus élevé depuis 1987, alors qu'il n'était que de 0,7 p. 100.
Le principal obstacle demeure le lieu de travail—ce qu'on appelle le double ou le triple désavantage. Ce problème s'observe chez les personnes qui appartiennent à plus d'un groupe désigné et qui font par conséquent l'objet d'une plus grande discrimination. La Loi sur l'équité en matière d'emploi identifie les Autochtones et les personnes handicapées comme étant deux des quatre groupes désignés qui sont victimes de discrimination ou qui sont défavorisés sur le marché du travail. Chez les Premières nations, les Indiens inscrits qui sont handicapés sont doublement défavorisés par les obstacles qui existent au sein de la société et qui les empêchent de trouver un emploi, étant donné qu'ils font partie de ces deux groupes.
Pour ce qui est des femmes autochtones handicapées, leurs possibilités d'emploi au sein du secteur privé ou public ne sont guère encourageantes. Nous avons analysé les données sur les progrès réalisés par les groupes désignés, et voici ce que nous avons constaté en ce qui a trait aux Autochtones handicapés.
Il n'existe pas de données précises sur les membres des Premières nations ou les Autochtones handicapés, et sur leur taux d'emploi correspondant au sein des secteurs public ou privé. Les données, qui sont regroupées sous la rubrique «personnes handicapées» ou «Autochtones», ne fournissent pas une bonne idée de la situation.
Á (1110)
La représentation des personnes handicapées, tant dans le secteur privé que public, n'a augmenté que légèrement—de 2,3 p. 100 à 2,4 p. 100 dans le secteur privé, et de 4,6 p. 100 à 4,7 p. 100 dans le secteur privé. Les personnes handicapées n'ont pas pu bénéficier des possibilités d'embauche qui se sont présentées dans les secteurs privé et public. En fait, leur représentation dans le secteur public a accusé une baisse dans 19 des 40 ministères fédéraux.
Par ailleurs, les Autochtones sont le groupe démographique qui augmente le plus rapidement au pays. La proportion d'enfants et de jeunes est supérieure à celle de l'ensemble de la population canadienne. Cela ajoute à l'urgence de trouver une solution ayant une incidence sur les jeunes autochtones qui entrent sur le marché du travail.
Plus du tiers des jeunes autochtones étaient au chômage en 1996. Le taux de chômage chez les jeunes femmes autochtones était environ 2,1 fois plus élevé que chez les jeunes femmes non autochtones. Le taux de chômage chez les jeunes hommes autochtones était environ 2,3 fois plus élevé que les jeunes hommes non autochtones.
En ce qui concerne les femmes des Premières nations, elles ont, dans plusieurs sociétés amérindiennes, contribué à établir une approche équilibrée. Il était important, pour les Premières nations, que les femmes participent au processus décisionnel. Les institutions et les politiques d'oppression imposées par la colonisation ont entraîné la disparition des coutumes et des lois égalitaires, et l'adoption de la règle de droit patriarcale. Les diverses politiques et institutions ont contribué pour beaucoup à exclure les femmes des Premières nations des processus décisionnels.
En ce qui a trait à la sous-utilisation, l'étude réalisée en 1997 par Voyageur a révélé l'existence de plusieurs problèmes et obstacles dans le secteur privé, dont certains existent peut-être dans la fonction publique fédérale. L'étude a notamment permis de constater que les travailleurs autochtones étaient, pour la plupart, plus scolarisés et mieux formés que leurs collègues, sauf qu'ils étaient sous-utilisés. Il y avait là un paradoxe: les Autochtones avaient réussi à obtenir un emploi grâce à leur niveau d'instruction, mais ils occupaient des postes inférieurs qui les empêchaient de mettre à profit leurs compétences et connaissances. D'après l'étude Voyageur, bien que l'éducation occupe une place importante dans le milieu de travail, l'avancement des travailleurs autochtones laisse à désirer. Il faut sensibiliser les gestionnaires et les travailleurs aux obstacles auxquels font face les Autochtones.
L'Assemblée des Premières nations recommande que le gouvernement du Canada continue d'appliquer la Loi sur l'équité en matière d'emploi. En effet, le principe de l'équité en matière d'emploi demeure l'un des rares leviers législatifs qui permet aux Autochtones d'avoir accès à des emplois dans l'économie canadienne. La loi oblige les employeurs à avoir recours à des pratiques d'embauchage justes. En l'absence de cette loi, l'équité en matière d'emploi ne serait plus considérée comme un objectif prioritaire, comme c'est le cas actuellement.
De nombreux programmes en la matière ont connu un succès limité. Certains, toutefois, ont donné des résultats positifs. Ce qui nous intéresse surtout, ce n'est pas la loi en tant que telle, mais plutôt les améliorations qui pourraient y être apportées. La plupart des initiatives jugées nécessaires sont déjà en place. Il faut maintenant les rendre plus efficaces. Le taux de roulement élevé observé chez les Autochtones, en raison d'un milieu de travail peu amical ou peu adapté à la réalité culturelle, pourrait être réduit au moyen de programmes de mentorat, de mesures d'adaptation culturelle et de divers autres services de soutien.
Si nous voulons mettre un terme aux fluctuations observées dans les taux de recrutement, de promotion et de cessations d'emploi, nous devons accroître le nombre de postes permanents offerts aux Autochtones, et non pas simplement les cantonner dans des emplois temporaires, saisonniers ou instables.
Il faut sensibiliser les gestionnaires et les travailleurs aux obstacles particuliers auxquels font face les Autochtones afin d'éviter le sous-emploi. Les Autochtones doivent se voir offrir des emplois qui leur permettent de mettre à profit les compétences et les connaissances qu'ils ont acquises.
Dans l'ensemble, l'application du principe d'équité en matière d'emploi dans les secteurs public et privé exige que l'on fasse des efforts particuliers et que l'on apporte des modifications à la Loi sur l'équité en matière d'emploi en vue d'accroître les niveaux de recrutement, de maintien en poste et de promotion pour les peuples des Premières nations, et d'améliorer les possibilités de formation qui leur sont offertes.
Par ailleurs, si nous voulons améliorer les occasions d'emploi offertes aux Autochtones, nous devons modifier la loi afin qu'elle s'applique également aux secteurs industriel et commercial.
L'Assemblée des Premières nations recommande que des modifications soient apportées à la loi et aux règlements, et que des mesures spéciales soient prises pour faire en sorte que les jeunes des Premières nations, dont le nombre de cesse de croître, aient accès au marché de travail.
Les femmes des Premières nations doivent, de manière générale, participer à la vie économique du pays. La loi doit promouvoir le leadership économique chez les femmes. Elle doit les aider à développer leur esprit d'entreprise, à prendre part de façon plus active à l'essor économique de leur communauté, des nations, des intérêts globaux.
Á (1115)
Par ailleurs, il faudrait compiler des données sur le taux d'emploi chez les Autochtones handicapés. Ces données devraient également faire état du taux d'emploi chez les femmes handicapées des Premières nations.
Il importe de souligner que ces données ne refléteraient pas vraiment la situation d'emploi des Autochtones handicapés au Canada, étant donné qu'il existe des variantes dans les possibilités d'emploi qui sont offertes à l'intérieur et à l'extérieur des réserves. Il faudrait que les données compilées fassent une distinction entre les taux d'emploi à l'intérieur et à l'extérieur des réserves, et entre les communautés rurales et urbaines. Grâce à ces renseignements, nous pourrons élaborer des stratégies qui tiennent compte des différentes conditions de vie des Autochtones handicapés.
Les données sur le taux d'emploi chez les Autochtones handicapés nous permettront également de déterminer quels sont les programmes qui fonctionnent et quels sont ceux qui ne fonctionnent pas, et de cerner les obstacles qui empêchent les Autochtones handicapés de trouver un emploi.
Comme il faut de toute urgence s'attaquer au problème des possibilités d'emploi offertes aux membres des Premières nations, l'Assemblée des Premières nations recommande que l'on donne suite à l'ensemble des recommandations qui figurent dans le rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones, lesquelles englobent les recommandations sur l'équité en matière d'emploi.
Les programmes d'équité en matière d'emploi ne constituent qu'une petite partie de la solution aux problèmes économiques auxquels les Autochtones sont confrontés. Si nous voulons appliquer de manière efficace le principe d'équité en emploi aux membres des Premières nations, nous devons d'abord réduire les taux de chômage très élevés observés chez les communautés des Premières nations. Plus de 80 p. 100 des communautés des Premières nations sont situées dans des régions isolées où les ressources naturelles abondent. Or, les membres des Premières nations manquent de travail et de sources de revenu. Le taux de chômage chez les communautés des Premières nations atteint 28,7 p. 100. Toutefois, d'après la Commission royale sur les peuples autochtones, le taux réel de non-participation au marché du travail se situe entre 80 et 90 p. 100.
La Commission a en effet cerné les causes profondes à l'origine de la marginalisation économique des Autochtones. Elle a indiqué que les disparités entre les Autochtones et les autres Canadiens continueront de s'accentuer si les politiques ne sont pas modifiées de façon radicale.
La Commission a insisté pour dire qu'il fallait consacrer nos ressources et nos énergies à la création d'emplois pour les Autochtones, et aider ces derniers à acquérir les compétences voulues pour qu'ils puissent les occuper. Elle a proposé qu'on entreprenne un programme intégré axé sur le marché du travail en vue d'aider les Autochtones à trouver des emplois durables, et qu'on favorise aussi la création d'emplois au sein de l'économique canadienne.
Si nous voulons améliorer la qualité de vie des Autochtones et accroître leur participation à la vie économique canadienne, nous devons reconnaître leur droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. Comme la Commission l'a clairement indiqué, la reconnaissance du droit inhérent à l'autodétermination implique une réorganisation en profondeur des pouvoirs et des institutions au sein de l'État canadien.
À l'échelle internationale, les Nations Unies ont noté, récemment, que le Canada ne respectait pas les engagements qu'il avait pris à l'égard des peuples autochtones. Il s'agit du problème le plus urgent en matière de droits de la personne auxquels sont confrontés les Canadiens. Le Comité des droits de l'homme des Nations Unies s'inquiète du fait que le Canada n'ait pas encore mis en oeuvre les recommandations de la Commission royale sur les peuples autochtones. Il insiste pour dire, tout comme l'a fait la Commission, qu'en l'absence d'un plus grand partage des terres et des ressources, les institutions gouvernementales autonomes des Autochtones ne pourront survivre.
Le Comité s'inquiète du lien direct qui existe entre la marginalisation économique des Autochtones et la dépossession continue, par les peuples autochtones, de leurs terres, ainsi que l'a indiqué la Commission royale sur les peuples autochtones. Il appuie la recommandation de la Commission, à savoir que l'État doit mettre un terme aux politiques qui violent les obligations découlant des traités et qui favorisent l'extinction, le transfert ou la cession des droits et des titres ancestraux. Le Comité déplore le fait que les recommandations de la commission n'ont toujours pas été mises en oeuvre, malgré l'urgence de la situation.
Ce sont là les conclusions du Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations Unies.
Le plan d'action 2002 de l'Assemblée des Premières nations part du principe que le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale existe, que ce droit est reconnu par la Constitution. À partir de cela, auatre grands changements s'imposent: la reconstruction de la nation, la redistribution des terres et des ressources, la mise en oeuvre des traités et l'établissement de nouvelles relations fiscales.
Le Canada doit s'engager à aider les Premières nations à développer leurs capacités. Les Canadiens reconnaissent le fait que les Premières nations ont le droit de participer pleinement à la vie économique canadienne. Le développement économique et le renforcement des capacités constituent la pierre angulaire de l'autonomie gouvernementale. Par conséquent, le gouvernement fédéral doit prendre des mesures qui permettront d'assurer l'accès aux terres et aux ressources conformément aux traités et aux droits ancestraux, de favoriser le développement des entreprises, et de respecter l'engagement fondamental qu'il a pris d'améliorer la prestation de services d'éducation aux Autochtones et l'accès à ceux-ci.
Á (1120)
Alors que la plupart des Canadiens quittent leur emploi pour prendre leur retraite, les Autochtones arrivent au terme de leur jeunesse et vont se joindre à la main-d'oeuvre; en effet, plus de la moitié des Autochtones sont âgés de moins de 25 ans et ils vont donc représenter un large segment de la main-d'oeuvre canadienne de l'avenir. La pénurie de main-d'oeuvre spécialisée au sein de la population autochtone aura un impact négatif de plus en plus grand sur l'économie canadienne, sauf si les Premières nations et le Canada travaillent ensemble pour faire face dès maintenant à ces réalités.
Je vous remercie beaucoup d'avoir pris le temps de m'écouter.
La présidente: À titre d'information pour les membres du comité, je précise que nous vous avons accordé beaucoup de temps étant donné que certains témoins ne se sont pas présentés. Nous venons tout juste d'apprendre qu'en ce qui concerne les témoins du Congrès des peuples autochtones, certains événements les empêcheront de se joindre à nous. Nous essayons présentement de communiquer avec l'Interprovincial Association on Native Employment.
La greffière du comité: Le représentant a transféré son courrier électronique et nous n'avons pas son numéro de télécopieur. Il doit avoir oublié la séance, et son bureau est à Saskatoon. Il aurait certainement aimé être présent, mais... Il nous avait pourtant confirmé sa présence par écrit et verbalement, mais...
Donc, il nous reste un témoin à entendre, et deux autres à 12 h 30.
La présidente: Heureusement que nous avons un excellent témoin; le comité utilisera donc son temps à bon escient. Les témoins doivent se présenter à 12 h 30 nous viennent du Manitoba, et il est difficile de les rejoindre pour leur demander d'arriver plus tôt. Je m'excuse auprès des membres du comité, mais nous avons certainement une bonne représentation à la table des témoins, et je crois que les questions seront intéressantes. Je sais que les membres du comité sauront apprécier vos réponses.
Sans plus tarder, nous allons passer à la première ronde de questions. Madame Skelton, vous pouvez commencer.
Mme Carol Skelton (Saskatoon--Rosetown--Biggar, Alliance canadienne): Madame Frawley-Henry, nous vous remercions beaucoup de nous rendre visite aujourd'hui. Je suis désolée de ne pas bien prononcer votre nom, qui est très beau. Que signifie-t-il?
Mme Marie Frawley-Henry: Ce nom m'a été donné après plusieurs années. C'est pour cette raison que j'aime travailler avec les jeunes. Le nom que vous recevez a une grande signification et décrit qui vous êtes, ainsi que votre mission, votre but dans la vie et les tâches que vous accomplirez. C'est un nom rituel qui signifie femme de l'eau sacrée. Il nous relie à la terre, aux enseignements et aux traditions.
Mme Carol Skelton: Donc, il vous convient parfaitement.
Mme Marie Frawley-Henry: Oui, puisque je peux flotter...
Des voix: Oh, oh.
Mme Marie Frawler-Henry: Oui, je peux le faire.
Mme Carol Skelton: J'aimerais vous poser une question. Les témoins nous ont très souvent parlé d'insensibilité aux réalités culturelles, mais personne ne nous a vraiment expliqué ce que cela signifie. Pouvez-vous me donner une définition de ce que représente pour vous l'insensibilité aux réalités culturelles?
Á (1125)
Mme Marie Frawley-Henry: Pour vous résumer cela, je peux vous dire qu'il existe deux visions du monde. Ma mère était Autochtone et mon père était Irlandais, et toute ma vie j'ai été exposée à ces deux visions du monde. J'ai vu comment ma mère, dans sa langue maternelle, et comment mon père... J'ai été constamment exposée à ces deux visions du monde. Ma mère a élevé ses enfants de manière holistique, linéaire et complètement différente de celle de mon père. Mais j'ai pu marier ces deux visions du monde, ce qui me permet de réussir ma vie.
Dans ce contexte, votre question... Quel est le terme que vous avez utilisé?
Mme Carol Skelton: Insensibilité aux réalités culturelles. Nous l'avons très souvent entendu, mais personne ne nous a jamais expliqué de quoi il s'agissait.
Mme Marie Frawley-Henry: Il est important de comprendre ces deux visions du monde afin d'être sensibilisé aux réalités culturelles. C'est un autre sujet sur lequel je travaille pendant mes temps libres. Depuis sept ans, je rédige des récits sur l'histoire spirituelle des Autochtones de l'Amérique du Nord afin de sensibiliser les jeunes. Cette histoire doit établir un parallèle avec la vision judéo-chrétienne européenne du monde pour qu'on puisse avoir deux sons de cloche et ainsi, sensibiliser les jeunes aux réalités culturelles.
Je crois que tout est une question d'éducation et de sensibilisation; nous pourrons alors nous regarder en face et comprendre qu'il existe d'autres réalités et d'autres visions du monde selon les divers groupes de la société. La sensibilisation a aussi un rôle à jouer pour que... Il suffit de regarder ce qui se passe sur le marché du travail et dans les relations interpersonnelles, comme je l'ai fait. Je crois d'ailleurs qu'un nombre de plus en plus grand de jeunes en prennent conscience. Grâce à la mosaïque multiculturelle caractéristique de notre pays, les jeunes apprécient la diversité et entretiennent des relations avec différents groupes en faisant preuve d'une plus grande ouverture et d'une plus grande sensibilité aux réalités culturelles.
Mme Carol Skelton: Notre fédération en Saskatchewan fait partie de l'Assemblée des Premières Nations, n'est-ce pas?
Mme Marie Frawley-Henry: La Federation of Saskatchewan Indians?
Mme Carol Skelton: Oui.
Mme Marie Frawley-Henry: Oui.
Mme Carol Skelton: Elle fait partie de l'Assemblée des Premières Nations. La population autochtone est énorme.
C'est vraiment difficile. Nous parlons de cette insensibilité aux réalités culturelles, mais comment pouvons-nous, en tant que députés, essayer de mieux comprendre ce concept? Ne faisant pas partie des Premières nations, comment puis-je...
Mme Marie Frawley-Henry: Il faut briser cette barrière.
Mme Carol Skelton: ...oui, comment?
Mme Marie Frawley-Henry: Il y a eu quelques essais positifs. Par exemple, je ne sais pas si vous le savez, mais le ministère des Affaires indiennes a créé un établissement qui s'appelle la Kumik Lodge et qui accueille des employés du ministère des Affaires indiennes et d'autres personnes de l'extérieur. C'est un pavillon circulaire qui respecte les valeurs culturelles et qui permet aux anciens et aux chefs spirituels traditionnels de faire de la sensibilisation, d'instaurer un dialogue et des discussions avec ceux qui sont sur le marché du travail afin de les éduquer et de les sensibiliser aux réalités culturelles.
Mme Carol Skelton: Est-ce que votre organisme a utilisé ce lieu à cet effet?
Mme Marie Frawley-Henry: En fait, dans le cadre de mon travail auprès d'organismes autochtones nationaux différents, et surtout auprès des jeunes, j'ai régulièrement utilisé cet établissement. Comme je travaille maintenant un peu plus loin, je ne peux pas y avoir accès aussi souvent que je le voudrais, mais je garde des liens. J'ai moi-même fréquenté ce lieu pendant de nombreuses années où j'ai pu tirer profit de l'enseignement des anciens et absorber toutes les connaissances qu'ils pouvaient me transmettre. Donc, je crois qu'un tel modèle est une très bonne idée.
Á (1130)
La présidente: Monsieur Tonks, c'est à vous.
M. Alan Tonks (York South—Weston, Lib.): Merci, madame la présidente.
Encore une fois, nous vous remercions de votre présence.
Au début de votre exposé, vous avez mentionné que le budget de l'Assemblée des Premières Nations avait été comprimé. Vous nous avez dit que le fait d'avoir mis à pied des employés a également diminué votre capacité en matière de surveillance de l'équité en matière d'emploi, et vous avez mentionné un certain nombre de secteurs qui vous causaient des préoccupations. En même temps, dans vos recommandations, vous appuyez très fortement la Loi sur l'équité en matière d'emploi.
Quelles raisons vous ont été données pour que votre budget soit comprimé de manière aussi radicale?
Mme Marie Frawley-Henry: Voulez-vous dire les raisons qui nous ont été données par le ministère?
M. Alan Tonks: Oui. Cela me semble très contradictoire avec l'objet et le fond de votre rapport; c'est d'ailleurs la même chose en ce qui concerne d'autres intervenants.
Mme Marie Frawley-Henry: C'est vrai. Apparemment, nous manquons de vision: ce sont les raisons qui nous ont été données. L'Assemblée des Premières Nations a un plan et le ministère des Affaires indiennes, une initiative d'autonomie et pourtant il ne semble y avoir aucune façon de communiquer, de travailler ou de dialoguer.
J'ai participé à la Conférence mondiale contre le racisme où j'ai travaillé avec le chef national. Nous nous étions engagés à dire la vérité et à révéler que les mesures législatives adoptées ne peuvent qu'entraîner les peuples autochtones—les peuples des Premières nations—vers l'extinction. J'ai aussi travaillé sur des programmes pour les femmes et l'équité entre les sexes, et je sais que dans moins de 10 ans, certaines collectivités n'existeront plus à cause des mesures législatives et des politiques adoptées. Nous parlons ici de l'extinction et de l'extermination des peuples indigènes.
Je crois qu'on a voulu nous punir parce que nous avons fait ressortir certaines vérités sur la réalité au Canada et sur certaines conditions du tiers monde qu'on y retrouve.
M. Alan Tonks: Si je me souviens bien, vous êtes le premier organisme à avoir parlé du rapport de la CRPA relatif au droit à l'autonomie gouvernementale et à certaines de ses incidences. Je vous en remercie, parce que cela était relativement nouveau pour moi et que je ne m'étais pas rendu compte que de votre point de vue, la collectivité établit un lien étroit entre l'autonomie gouvernementale et le renforcement des capacités, ainsi que l'intégration des programmes, tant dans le secteur de l'éducation que dans celui de l'encadrement.
Est-ce que votre organisme a participé au volet philosophique de la formulation du gouvernement autonome des Premières nations ou est-ce que vous avez plutôt participé à la prestation du programme, par exemple, en faisant de l'encadrement et en recueillant des données et ainsi de suite? Est-ce que l'APN était le groupe de revendication ou était-elle le fournisseur de services?
Mme Marie Frawley-Henry: Je vais essayer de répondre du mieux que je le peux, mais je ne peux pas parler au nom de mes collègues. Je sais que l'Assemblée des Premières Nations est le groupe national de revendication, mais certains membres de notre personnel effectuent aussi des recherches, établissent des statistiques et recueillent des données, etc. Donc, nous ne participons pas seulement au volet philosophique, nous agissons concrètement. Je dirais que nous sommes autant actifs dans un secteur que dans l'autre.
M. Alan Tonks: Puisque votre budget central a été comprimé, vous ne pouvez plus le faire.
Mme Marie Frawley-Henry: Non. Nous faisons ce que nous pouvons, mais nous ne sommes certainement pas aussi efficaces. Je suis responsable de quatre dossiers, dont le dossier du financement, qui devrait être la responsabilité d'une seule personne. J'ai préparé un rapport du mieux que je le pouvais, et j'espère que... Je crois simplement que nous devons saisir cette occasion et que nous devons maintenant définir nos priorités.
Á (1135)
M. Alan Tonks: Vous nous avez exposé très brièvement l'accumulation de faits historiques qui ont produit, je crois que vous avez utilisé cette expression, une absence de droits matriarcaux. On nous a entre autres expliqué que lorsque nous offrons des programmes à la suite les uns des autres d'équité en matière d'emploi aux Autochtones, l'érosion, si je puis m'exprimer ainsi, est plus marquée chez eux. Vous avez parlé du programme d'encadrement et du système de soutien en milieu de travail qui pourraient avoir un effet sur la stabilisation du personnel. Est-ce que les groupes affiliés de l'association peuvent appuyer des programmes d'encadrement auprès de leurs collectivités? Est-ce qu'ils le font présentement?
Mme Marie Frawley-Henry: D'accord. Laissez-moi comprendre votre question. Vous voulez savoir si l'Assemblée des Premières Nations...?
M. Alan Tonks: Est-ce qu'ils font un suivi du nombre de programmes d'encadrement susceptibles d'aider les femmes à réussir, qu'elles soient handicapées ou qu'elles fassent seulement partie des groupes désignés? Est-ce qu'ils font un suivi de ce qui se passe au gouvernement fédéral pour connaître, par exemple, le taux de succès? Lors de notre dernière séance, le ministère des Pêches nous a dit que la représentation autochtone des groupes désignés en termes de statistiques était assez bonne. Est-ce que vous faites un suivi pour vous assurer qu'il n'y a pas de dérapage, et est-ce qu'il y a des programmes qui...
Mme Marie Frawley-Henry: L'Assemblée des Premières Nations ne fait pas de suivi en ce moment, mais je sais qu'on a déjà essayé, avant les restrictions visant le programme d'équité en matière d'emploi, d'établir un système de surveillance auprès de la fonction publique. Je ne sais pas où on en est, mais on a essayé de rédiger un mémoire d'entente pour la mise en place d'un tel système. Nous aurions besoin du personnel et des ressources pour... On ne peut pas faire plus avec... Je serais très heureuse de vous présenter cette information, mais les ressources requises n'existent plus.
La présidente: Madame Guay.
[Français]
Mme Monique Guay: Merci, madame la présidente.
Bienvenue à notre comité. Je suis tout à fait désolée de l'absence des autres groupes autochtones parce que leurs présentations nous auraient été des plus utiles. Je ne sais pas s'il sera possible de les réinviter. On verra ce qu'on peut faire. C'est dommage qu'on ne puisse pas avoir le point de vue de chacune des nations qui sont absentes aujourd'hui.
Vous avez parlé tout à l'heure d'équité en matière d'emploi pour les autochtones, lesquels auraient connu une légère augmentation. Vous n'avez pas donné de chiffre. Vous n'avez sans doute pas l'information entre les mains. Vous dites qu'elle a été à peu près au niveau de 1999. Si je comprends bien, la loi existante n'aurait pas permis que l'emploi pour les autochtones progresse.
Á (1140)
[Traduction]
Mme Marie Frawley-Henry: J'ai raccourci mon exposé et je pense que j'ai dû enlever des chiffres, mais je pourrai vous les donner plus tard.
[Français]
Mme Monique Guay: Il serait intéressant que vous les ayez et qu'ils soient transmis à notre greffière afin qu'on puisse en tenir compte lors de la rédaction de notre rapport. Ce serait fort utile.
Vous avez parlé de coupures et mon collègue Alan Tonks vous a demandé pour quelle raison vous en aviez subi. Est-ce que je peux avoir une idée du montant de ces coupures et des endroits exacts où elles se sont appliquées? Pour moi, ce n'était pas clair. J'ai dû sortir de la salle, ce dont je m'excuse, et j'ai peut-être manqué cet élément d'information. Est-ce que vous avez subi des coupures en rapport avec l'application de la loi?
[Traduction]
Mme Marie Frawley-Henry: En fait, les réductions affectent l'ensemble du budget central de l'organisation, qui a été amputé à 55 p. 100. Résultat : 70 mises à pied et 25 emplois supplémentaires menacés, ce qui porte à environ 90 le nombre de postes qui...
[Français]
Mme Monique Guay: Donc, vous avez besoin de beaucoup de personnes pour pouvoir fonctionner et faire appliquer cette loi dans les différentes régions.
Il y a toute une autre question, assez importante, qui se pose aussi pour nous. Selon les entreprises, il y a des quotas, ou du moins ce qui ressemble à des quotas, pour les différents groupes visés. En Ontario, il existe un certain nombre de groupes autochtones. Cependant, il y a des provinces où il y en a vraiment beaucoup plus. Dans ce cas, il devient difficile d'appliquer une règle qui limite le nombre d'autochtones dans les entreprises. Les autochtones devraient peut-être être plus nombreux à travailler dans les entreprises.
Est-ce que la façon dont c'est appliqué actuellement vous semble équitable?
[Traduction]
Mme Marie Frawley-Henry: Pourriez-vous répéter votre question? Devrions-nous limiter le nombre d'Autochtones dans...?
[Français]
Mme Monique Guay: Non. Ce que je veux dire, c'est qu'actuellement, les groupes autochtones sont beaucoup plus nombreux dans certains endroits au Manitoba et dans d'autres provinces qu'en Ontario ou au Québec. Or, la loi est très stricte et une entreprise qui compte 100 employés ou plus doit engager un ou deux autochtones. Je ne connais pas le nombre exact. Est-ce qu'on ne devrait pas modifier ça pour que, dans un lieu donné, on doive engager plus d'autochtones parce que les autochtones qui y résident sont plus nombreux que dans d'autres régions, où les besoins sont peut-être plus limités?
[Traduction]
Mme Marie Frawley-Henry: Eh bien, comme je l'ai dit, il faut s'intéresser sérieusement aux besoins des Autochtones et des membres de la collectivité des Premières nations qui sont de plus en plus nombreux à intégrer le marché du travail. Il faudra envisager des mesures spéciales pour offrir de nouveaux débouchés aux jeunes autochtones, une population qui croît à un rythme rapide. Donc, oui, il faut adopter des mesures spéciales qui prennent ces éléments en considération.
Á (1145)
[Français]
Mme Monique Guay: On a aussi parlé d'une certaine promotion qui devrait être faite pour informer la population des possibilités d'emploi. Est-ce que cela se fait auprès des autochtones? Avez-vous senti qu'une publicité avait été faite pour les informer qu'ils ont des droits à de l'emploi, qu'une loi les protège et qu'ils peuvent faire une demande d'emploi dans les entreprises qui doivent respecter cette loi-là?
[Traduction]
Mme Marie Frawley-Henry: J'ai dit qu'il était important de sensibiliser les gens à ce problème et je crois qu'il incombe également au gouvernement fédéral de travailler avec les peuples des Premières nations pour favoriser cette prise de conscience. Je trouve qu'il n'en fait pas assez.
J'ai été embauchée en 1994-1995, à l'époque où le programme régional d'équité en matière d'emploi était en vigueur. J'avais pour mission d'informer et de sensibiliser les entreprises, les gouvernements, les écoles et les collectivités des Premières nations. Je me suis d'abord concentrée sur nos communautés puis je me suis étendue à l'ensemble de la société.
Dans les autres travaux et projets que j'ai entrepris par la suite, j'ai continué de croire que la sensibilisation et la prise de conscience étaient essentielles pour supprimer les barrières.
Je vous remercie de m'avoir posé cette question et je crois que le gouvernement du Canada doit travailler côte à côte avec les peuples autochtones pour résoudre ce problème.
[Français]
Mme Monique Guay: Merci.
[Traduction]
La présidente: Monsieur McGuire.
M. Joe McGuire (Egmont, Lib.): Merci, madame la présidente.
J'aurai deux ou trois questions. La première est assez générale; elle porte sur le ministère lui-même, un énorme ministère, l'un des plus gros du gouvernement du Canada. J'aimerais savoir si vous considérez que le budget de ce ministère est dépensé à bon escient. Autrement dit, l'argent va-t-il aux personnes que le ministère est censé aider?
Il me semble que les temps sont meilleurs qu'ils ne l'étaient pour les Autochtones au chapitre des programmes, de l'enseignement et du développement des affaires. Les Autochtones ont franchi beaucoup de frontières, et je crois que la situation s'est légèrement améliorée depuis 10 ans.
Mais le budget alloué est-il dépensé correctement? Y a-t-il suffisamment d'Autochtones au sein du ministère? Y en a-t-il assez dans des postes clés, capables d'influencer autant qu'ils le peuvent les politiques?
Prenez tout le temps qu'il vous faudra pour répondre à ces questions.
Mme Marie Frawley-Henry: J'imagine que vous parlez du ministère des Affaires indiennes.
M. Joe McGuire: Oui, celui des Affaires indiennes et du Nord canadien.
Á (1150)
Mme Marie Frawley-Henry: Très bien.
Bien sûr, pour agir sur les politiques et influencer les décisions, il faudrait que les Autochtones occupent des postes de gestionnaires et de cadres supérieurs. Évidemment, ils devraient prendre part davantage au processus décisionnel au sein du gouvernement fédéral et dans les autres sphères des secteurs public et privé. Cela favoriserait l'éducation et la sensibilisation et permettrait de faire valoir des points de vue tout à fait valables et différents dans le milieu de travail.
Pour en revenir à votre question, à savoir si le financement est approprié et s'il est utilisé au maximum pour les Premières nations, je dirais que dans les circonstances il ne l'est pas. Je ne sais pas combien de temps encore le ministère devra s'occuper des collectivités autochtones qui en ont besoin. Seul l'avenir le dira. Ce qui est certain, c'est que l'argent n'est pas utilisé efficacement.
M. Joe McGuire: Nous parlons d'équité en matière d'emploi dans un ministère qui s'occupe des affaires autochtones. On pourrait penser qu'il y a dans ce ministère un grand nombre d'employés plus sensibles à la culture autochtone que ne le seraient les Blancs. Où sont-ils? En attend-on d'autres? À votre avis, ont-ils de l'influence?
Mme Marie Frawley-Henry: Au départ, j'avais des statistiques et des données sur le ministère des Affaires indiennes, mais je ne les ai plus car j'ai dû réduire beaucoup mon exposé. Il est vrai que le nombre d'employés autochtones travaillant de ce ministère est très important, c'est d'ailleurs le plus élevé.
M. Joe McGuire: Connaissez-vous le pourcentage d'employés autochtones qui y travaillent?
Mme Marie Frawley-Henry: Là encore, j'ai les chiffres au bureau. La compilation de ces données exige beaucoup de recherches, mais je ne manquerai pas de vous fournir cette information également.
J'ai demandé l'aide du ministère des Affaires indiennes au chapitre de l'équité en matière d'emploi, mais jusqu'à présent je n'ai obtenu aucune réponse. C'est presqu'un boycott de l'Assemblée des premières nations.
Si on veut agir efficacement et travailler avec l'Assemblée des premières nations afin que les Autochtones reçoivent des services appropriés, le ministère des Affaires indiennes et l'Assemblée des premières nations doivent s'entendre. Nous ne pouvons même pas offrir de services sur l'équité en matière d'emploi, ni faire de suivi ou aider efficacement les collectivités autochtones qui, dans certains cas, accusent un taux de chômage de 90 p. 100.
M. Joe McGuire: Je vous remercie.
La présidente: Monsieur Spencer.
M. Larry Spencer (Regina--Lumsden--Lake Centre, Alliance canadienne): Merci, madame la présidente.
Je vous remercie d'être venue. Vous nous avez évidemment beaucoup éclairés et vous nous auriez certainement appris beaucoup plus si vous aviez eu en main toute l'information, je n'en doute pas.
J'aimerais maintenant que nous prenions une orientation un peu différente, à la lumière de ce que vous venez de dire. Pourriez-vous tout d'abord nous expliquer... Vous avez dit que l'une des recommandations, l'une des choses que vous jugez importantes, serait de continuer à appuyer la Loi sur l'équité en matière d'emploi pour les Premières nations. Pourquoi est-ce si important pour vous?
Mme Marie Frawley-Henry: Cela fait plusieurs années déjà que je parle avec un certain nombre de personnes, des membres des Premières nations ou des Autochtones qui travaillent sur l'équité en matière d'emploi. Ils disent que la Loi sur l'équité en matière d'emploi ne défend pas leurs intérêts.
Comme je travaille aussi à l'échelle internationale, j'ai eu l'occasion d'assister à une réunion à laquelle différents pays examinaient le modèle canadien d'équité en matière d'emploi. J'ai besoin de savoir jusqu'à quel point ce modèle est efficace au Canada et s'il fonctionne suffisamment bien pour que d'autres pays s'en inspirent.
Pour en revenir à la première partie de votre question, si on veut embaucher des Autochtones ou des membres des Premières nations, il faut adopter des mesures législatives sinon, les gens ne peuvent compter que sur la générosité ou la bonne foi d'employeurs potentiels pour trouver un travail. On a mis certains programmes en place, mais beaucoup reste à faire.
La loi doit être plus musclée, tout le monde vous le dira. Il y a encore beaucoup de chemin à parcourir et nous devons recourir à d'autres méthodes pour rendre la loi plus efficace pour les Premières nations.
M. Larry Spencer: J'ai une autre question, et je vous demanderais d'être un peu patients car je dois examiner deux ou trois points. Je vous en dirai plus après.
À la question concernant le problème de la sensibilisation aux particularités culturelles, vous avez répondu que l'une des solutions possibles serait que nous recevions une éducation spirituelle dans une de ces huttes, etc. Comment pensez-vous pouvoir justifier que dans vos traditions l'enseignement spirituel est tellement important ou encore qu'il puisse être important pour nous qui venons de l'extérieur? En sachant combien il est difficile pour d'autres de donner une dimension spirituelle aux choses, comment pensez-vous y arriver?
Á (1155)
Mme Marie Frawley-Henry: Actuellement, je commence à apprendre la langue de mes ancêtres. Lorsque j'étais enfant, j'entendais ma mère la parler, mais maintenant je veux vraiment la maîtriser. Cette langue décrit tout. Elle présente une conception du monde totalement différente et est très éloignée de l'anglais. Elle est animiste; tout est vivant. Vous ne pouvez pas séparer la spiritualité de la vision du monde que se font les Autochtones et les peuples des Premières nations. Chaque chose a un esprit.
Cela se traduit surtout par l'attachement à la terre. Vous ne pouvez pas dissocier les gens de leur terre. Je pense que c'est une leçon importante que l'humanité entière devrait retenir en ce moment. Il ne s'agit pas de l'imposer à qui que ce soit, mais vous ne pouvez pas les séparer, ils ne font qu'un.
Par exemple, vous ne pouvez pas simplement dire voici l'histoire spirituelle du peuple, en raison des relations sacrées qu'entretiennent les Autochtones avec les éléments, la nature et leurs frères et soeurs aux quatre coins du monde. Donc, il n'y a aucune séparation. Cela fait partie de la sensibilité culturelle qui les unit tous.
M. Larry Spencer: Très bien, je vous concède que cela fait partie de la sensibilité, mais je ne l'appellerais pas culturelle; je dirais que c'est une différence spirituelle. Je ne veux pas m'étendre sur le sujet maintenant, mais je pourrais parler de cela avec vous pendant des heures.
Permettez-moi de pousser l'analyse un peu plus loin. Le monde évolue, il change partout et il s'est transformé depuis le 11 septembre. Bien sûr, les peuples des Premières nations qui ont vécu l'intrusion du reste du monde sur leurs terres ont subi aussi de grands bouleversements. Cela a duré très, très longtemps, mais, à prime abord, ce n'est pas quelque chose dont souffrent les Autochtones d'aujourd'hui, et pourtant ils veulent toujours changer les choses.
Maintenant, pour vous aider à comprendre un peu mieux d'où je viens, sachez que j'ai un fils autochtone d'origine crie; nous l'avons adopté lorsqu'il avait trois ans. Nous l'avons accompagné dans sa démarche pour tenter de savoir qui il était et d'où il venait. Il désirait profondément connaître ses origines. Quand il y est parvenu, il s'est rendu compte que ce n'était pas ce qu'il voulait; il a fait demi-tour sans même chercher à rencontrer sa famille biologique.
Maintenant, essayez d'établir un lien entre cela et tout ce dont nous venons de parler—c'est-à-dire la dimension spirituelle. À votre avis, pour que la Loi sur l'équité en matière d'emploi donne des résultats, devons-nous regarder en arrière ou nous tourner vers l'avenir?
Mme Marie Frawley-Henry: Les deux. Je pense qu'il est tout simplement fondamental de donner à tout le monde les mêmes chances de trouver sa place dans la société, que ce soit au travail ou dans les loisirs. Malheureusement, nous avons dû recourir aux lois pour faire comprendre aux gens qu'il est important que tout le monde puisse prendre part au processus.
 (1200)
La présidente: Vous avez largement dépassé votre temps de parole.
M. Larry Spencer: Comment se fait-il que le temps passe si vite?
La présidente: Monsieur McGuire, une question très rapidement.
M. Larry Spencer: Je venais à peine de commencer.
La présidente: Eh bien, peut-être que M. Fitzpatrick pourra poursuivre grâce aux quelques minutes de parole que je vais lui accorder.
M. Joe McGuire: C'est une autre question d'équité en matière de non-emploi et elle a à voir avec l'arrêt Marshall. J'aimerais savoir si vous pensez que cet arrêt a favorisé les Autochtones et s'il a eu l'effet escompté.
Mme Marie Frawley-Henry: J'aimerais vraiment pouvoir vous répondre. Je connais beaucoup de domaines, mais je n'ai pas les compétences requises pour répondre adéquatement à cette question.
La présidente: Monsieur Fitzpatrick, une petite question.
M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, Alliance canadienne): Marie, je viens tout juste de lire dans le journal ce matin qu'environ deux tiers des Autochtones ne vivent pas dans les réserves et qu'ils ont vraiment tendance à les quitter pour aller vivre ailleurs. Je viens moi-même d'une région rurale de la Saskatchewan et j'estime que ce phénomène s'observe d'un bout à l'autre du pays. Les collectivités rurales s'effritent et peu importe le nombre de compétences que vous avez, et ainsi de suite, il est difficile d'y avoir un avenir prometteur.
J'ai été professeur et j'ai enseigné une courte période à des Autochtones il y a assez longtemps de cela. J'ai aussi été avocat et j'ai beaucoup travaillé à mes heures pour l'aide juridique, ce qui m'a permis de rencontrer des Autochtones qui avaient maille à partir avec la justice.
Je me suis rendu compte, et vous pouvez en penser ce que vous voulez, que beaucoup de ces personnes ne possédaient pas les compétences dont elles avaient besoin pour s'intégrer à la société. Je ne sais pas trop pourquoi il y a des gens qui ne peuvent pas lire et ne possèdent pas les connaissances de base en mathématiques, des compétences sociales et ainsi de suite. Je considère qu'il s'agit d'un problème énorme qui perdure.
Je veux vous dire que lorsque je regarde le Canada j'y vois des gens aux antécédents culturels très différents, originaires d'Asie et d'Afrique qui, pour ainsi dire en une génération, et certainement avec leurs enfants, s'intègrent parfaitement à la société dans son ensemble et y fonctionnent sans problème. Beaucoup de ces gens étaient encore plus désavantagés que nos Autochtones. Ils s'en sont sortis et ne semblent pas y être parvenus grâce à des programmes de promotion sociale ou d'égalité d'accès.
Je me demande pourquoi des gens qui émigrent au Canada en provenance de pays d'Afrique ou d'Asie, ou de certains véritables pays du tiers monde, parviennent en une génération, ou certainement en deux, à s'intégrer à notre société—deviennent des membres des professions libérales, bien instruits et bien intégrés à la société—alors que cela ne semble pas fonctionner avec les Autochtones. Ils semblent tout simplement enlisés dans une situation et nous ne semblons pas être en mesure de vaincre les obstacles qui les empêchent de s'intégrer à notre société.
Mme Marie Frawley Henry: C'est une autre raison pour laquelle je m'intéresse à ce film expliquant cette l'histoire. Il s'agit de toute évidence d'une situation très complexe. Dans la partie est de l'Amérique du Nord, on parle de 500 ans d'oppression et dans la partie ouest, une centaine d'années peut-être. C'est pourquoi il est intéressant de se pencher sur ce projet de loi et sur certaines des politiques qui ont été mises en place comme l'expérience des pensionnats.
Dès le tout début, lorsque les deux visions du monde se sont affrontées, les sorciers, les guides spirituels ont été éradiqués. On s'est donc débarrassé de ces personnes. Il y a eu une façon très intéressante de penser à la façon de travailler avec un peuple. Les guides spirituels ont été tués. On a tenté de détruire son mode de vie qui comportaient des cérémonies et qui revêtent de l' importance pour lui.
Dans les 20 dernières années on a repris certaines de ces cérémonies, de ces enseignements et de ces chants, qui suscitent l'histoire orale, le lien des gens avec ce qu'ils sont. Ce dont nous parlons ici c'est de l'identité d'un peuple, de son sentiment d'appartenance, et d'une race qui a été opprimée. Et vous parlez d'un peuple opprimé depuis maintes générations. L'expérience des pensionnats a grandement contribué à détruire les relations humaines au sein des familles. C'est ainsi que des parents dysfonctionnels ne savent plus comment élever leurs enfants. Cette période de pensionnats a comporté cinq étapes.
Je peux parler de nombreux autres aspects. Il y a aussi d'autres mesures législatives, comme le projet de loi C-31, qui ont victimisé les femmes qui n'ont pu transmettre leur histoire, leurs enseignements et qui, du jour au lendemain, ont perdu leur statut.Il y a donc un État qui vous dit qui vous êtes, et cela continue et...
Vous avez ensuite des institutions comme les établissements pénitentiaires où on retrouve une majorité d'Autochtones. Vous avez ensuite ces autres institutions qui ne font que compliquer les choses. Vous avez donc un peuple qui n'a plus de sentiment d'appartenance et qui cherche à s'intégrer à la société.
 (1205)
La présidente: Au nom des membres du comité, je vous remercie de votre exposé, madame Frawley-Henry. Nous sommes très heureux que vous ayez pu vous joindre à nous.
Je remarque que les membres du comité ont demandé des renseignements supplémentaires, surtout des chiffres et ainsi de suite. Faites les parvenir à la greffière pour qu'elles puisse les distribuer aux membres du comité. Ces documents seront ensuite consignés au compte rendu et nous nous en servirons lorsque nous discuterons des changements à apporter à la Loi sur l'équité en matière d'emploi.
Je vous remercie encore d'être venue aujourd'hui.
À titre d'information pour les membres du comité, nous sommes parvenus à joindre les deux groupes qui devaient comparaître à 12 h 30. Comme, ils sont ici nous allons les entendre.
En ce qui concerne la planification d'une nouvelle séance pour les autres groupes, un d'entre eux a annulé sa comparution à la dernière minute. Il nous a simplement fait savoir qu'il avait eu un contretemps. Comme notre calendrier nous laisse très peu de marge de manoeuvre relativement aux travaux en cours, nous avons suggéré à ce groupe de nous faire parvenir son mémoire qui sera consigné aux fins du compte rendu.
Mme Carol Skelton: Pouvons-nous passer maintenant à la motion, madame la présidente?
La présidente: Nous pouvons en discuter très brièvement, mais nous n'avons pas suffisamment de membres pour constituer un quorum. Je pourrais peut-être demander à la greffière pendant que de nouveaux témoins viennent nous rejoindre... J'ai rédigé une lettre qui aborde cette question. Je n'ai pas besoin de l'approbation du comité, mais ce serait bien à tout le moins de savoir que le comité apprécie ce que je fais et cela peut respecter l'esprit de la motion.
Mme Monique Guay: Nous discuterons de la motion à la fin de la séance n'est-ce pas?
La présidente: Nous allons essayer de le faire, mais le fait est que nous allons tenter de lever la séance vers 13 h 30 plutôt qu'à 14 heures. Si nous avons le quorum nous pourrons examiner la motion, mais j'aimerais envoyer la lettre.
L'autre lettre est adressée à Mme Caplan et elle porte sur l'invalidité, les questions relatives à la pension. Je crois qu'à la dernière réunion nous étions quelque peu outrés que les choses ne se passent pas comme elles le devraient. Le moment est probablement opportun pour clarifier la situation. M. Johnston avait parlé d'elle et il veut qu'il soit consigné au compte rendu qu'il faisait alors allusion non pas à Mme Stewart mais à Mme Caplan.
Pendant que vous lisez cette lettre, je vais demander à Joanne Green, qui représente les chefs du Manitoba, de venir nous retrouver.
Joanne, nous accordons normalement aux témoins cinq à six minutes pour l'exposé oral et nous passons ensuite aux questions des membres du comité. Si vous avez d'autres renseignements dont vous n e pouvez nous faire part pendant le temps qui vous a été imparti, vous pouvez nous les transmettre et nous les consignerons au compte rendu.
Madame Green, je vous cède le micro.
 (1210)
Mme Joanne Green (directrice des ressources humaines, Assemblée des chefs du Manitoba): Bonjour, mesdames et messieurs les membres du Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées. Je m'appelle Joanne Green. J'occupe le poste de directrice des ressources humaines auprès de l'Assemblée des chefs du Manitoba.
J'ai pour mandat, aujourd'hui, de vous soumettre les recommandations de l'Assemblée des chefs du Manitoba. L'Assemblée représente 63 premières nations des territoires visés par les traités 1, 2, 3, 4, 5, 6 et 10, et aussi les quatre nations Dakota. Il s'agit d'une tribune politique où les chefs du Manitoba discutent de stratégies et de questions d'intérêt commun, et mettent en oeuvre des initiatives dans les domaines juridique, politique et social en vue de promouvoir et de protéger les droits issus de traités, de même que les titres et droits ancestraux.
Les chefs sont heureux d'avoir l'occasion de présenter au comité permanent leurs vues sur la Loi sur l'équité en matière d'emploi. L'ACM est consciente des progrès qui ont été réalisés depuis la mise en oeuvre de la loi. Toutefois, elle estime que des améliorations doivent être apportées à la loi de 1995 et à son règlement d'application en ce qui concerne l'élimination des analyses typologiques, le remplacement de la prise de «mesures raisonnables d'adaptation» par «l'obligation de prendre des mesures d'adaptation» pour les personnes handicapées, les mesures touchant les femmes autochtones membres des Premières nations, les mécanismes d'application et d'exécution, l'auto-identification, les ressources humaines et financières.
On prévoit qu'il aura, d'ici 2011, plus d'un million de travailleurs autochtones sur le marché du travail. La main-d'oeuvre disponible passera de 4,2 p. 100 à 5,4 p. 100 d'ici 2011. Il faut donc inclure dans la Loi de 1995 sur l'équité en matière d'emploi des dispositions exhaustives et exécutoires qui nous permettront de composer avec cette situation.
L'ACM milite pour une représentation équitable des Premières nations et des Autochtones au sein de la population active depuis 1990. En effet, l'Assemblée des chefs du Manitoba a, cette année-là, déposé 51 plaintes contre des ministères fédéraux et des entreprises du secteur privé, au motif que leurs pratiques d'embauche et leurs procédures d'avancement étaient discriminatoires. Grâce à ce geste, l'Assemblée des chefs du Manitoba a contribué à faire modifier la Loi de 1995 sur l'équité en matière d'emploi, et aussi à faire en sorte que la Commission canadienne des droits de la personne veille à l'application de la loi.
À la suite de ces plaintes, l'ACM a créé un comité de l'équité en matière d'emploi chargé de négocier des solutions et d'assurer le suivi des plaintes. Au total, 36 ententes ont été conclues: 15 plaintes ont fait l'objet d'une entente-cadre négociée par l'entremise de la Commission canadienne des droits de la personne, et 21 ont fait l'objet d'ententes distinctes.
Les recommandations de l'Assemblée des chefs du Manitoba s'inspirent des discussions qu'elle a eues avec les 51 signataires des ententes. Le Rapport d'évaluation de l'Assemblée des chefs du Manitoba de juin 2001 indique que les ententes sur l'équité en matière d'emploi conclues par l'ACM ont abouti à des «résultats positifs dans le cas des ministères fédéraux, mais négatifs dans le cas des employeurs du secteur privé.»
Les facteurs à l'origine de cette situation sont les suivants: le suivi dont font l'objet les ententes, leur observation et leur non-observation par les employeurs, et l'absence de législation complémentaire pour assurer l'application de la Loi de 1995 sur l'équité en matière d'emploi.
Le rapport recommande surtout l'adoption de mesures législatives visant à assurer l'application de la loi, l'élaboration de critères et de directives pour l'auto-identification des Autochtones, la prestation de ressources adéquates pour assurer le suivi des ententes, et la participation de l'ACM à l'examen de 2002 de la Loi sur l'équité en matière d'emploi.
Vous allez trouver, dans les documents qui vous ont été distribués, un résumé, y compris des statistiques sur les taux de conformité et de suivi observés tant dans le secteur public que privé. Vous trouverez également dans le mémoire que j'ai déposé une étude comparative.
L'Assemblée des chefs du Manitoba propose entre autres, en réponse au document d'étude sur l'examen législatif de la Loi sur l'équité en matière d'emploi, l'élimination des analyses typologiques. L'approche typologique, qui sert de base à l'analyse de concentration, se veut inadéquate en ce qu'elle n'aborde pas la question des obstacles. Elle ne permet pas non plus de recueillir des données qui sont exactes.
L'ACM propose qu'on élargisse la portée de ces analyses afin qu'on puisse bien évaluer les données recueillies, de même que l'impact des procédures et des pratiques d'avancement sur les catégories professionnelles qui s'appliquent de façon particulière aux membres des Premières nations ou aux Autochtones. Il faut inclure dans celles-ci une analyse comparative entre les sexes, un examen de la parité salariale, des taux de recrutement, de promotion, de maintien en poste et de cessation d'emplois, une étude sur l'équivalence des compétences des aînés, et l'établissement d'une catégorie propre aux jeunes.
 (1215)
Nous recommandons en outre, à la partie B, de remplacer la prise de «mesures raisonnables d'adaptation» par «l'obligation de pendre des mesures d'adaptation» à l'égard des personnes handicapées. L'absence de conformité de la part des employeurs et les mécanismes d'exécution peu efficaces au sein de la loi elle-même, font qu'il est difficile pour les personnes handicapées de tirer parti de tout ce que leur offre la loi.
La loi actuelle oblige les employeurs à prendre «des mesures raisonnables d'adaptation» en faveur des membres des groupes désignés. Cette disposition, en plus d'être vague et imprécise, ne protège pas adéquatement les personnes handicapées qui ont besoin, dans leur milieu de travail, de mesures d'adaptation qui répondent à leurs besoins.
Le document intitulé AMC First Nations People With A Disability Needs Assessment Survey Findings—A Profile of Manitoba First Nations People With A Disability, publié le 7 mars 2001, formule plusieurs recommandations sur les politiques et les programmes qui doivent être examinés de toute urgence.
Pour bien protéger les personnes handicapées, l'ACM propose qu'on modifie la Loi sur l'équité en matière d'emploi et qu'on remplace la prise de «mesures raisonnables d'adaptation» par «l'obligation de prendre des mesures d'adaptation non susceptibles de causer un préjudice injustifié».
L'Assemblée recommande également que les employeurs, de même que les organismes de financement, fournissent, sur les lieux de travail, des ressources éducatives adéquates qui répondent aux besoins des Autochtones handicapés.
La partie C propose des recommandations qui s'appliquent aux femmes des Premières nations et aux femmes autochtones. La sous- représentation de celles-ci à tous les niveaux dans les secteurs public et privé exige qu'on apporte des modifications à la Loi et au règlement sur l'équité en matière d'emploi et qu'on mette en oeuvre des processus ayant force obligatoire. La majorité des femmes des Premières nations et des femmes autochtones occupent des postes de premier échelon qui sont faiblement rémunérés et qui n'offrent presque pas de possibilité d'avancement, sinon aucune.
L'Assemblée des chefs du Manitoba propose qu'on apporte des modifications à la Loi et au règlement sur l'équité en matière d'emploi pour faire en sorte que les femmes aient droit à la parité salariale et aient accès à des possibilités d'avancement dans les postes à la fois traditionnels et non traditionnels.
En ce qui a trait aux mécanismes d'application et d'observation, le cadre actuel de la Loi sur l'équité en matière d'emploi sert de «principe directeur», en vertu duquel des mesures d'exécution ne sont prises qu'en dernier lieu. Le processus actuel laisse à désirer puisqu'il n'indique pas vraiment aux employeurs comment mettre en oeuvre un plan d'équité en matière d'emploi. La loi ne prévoit pas de mécanisme d'observation à la fois adéquat et exécutoire. Le processus d'examen, lui, est trop long.
L'Assemblée des chefs du Manitoba recommande donc qu'on modifie la loi, ou le principe directeur, de manière à prévoir un processus plus rapide qui a force obligatoire.
L'Assemblée des chefs du Manitoba propose en outre qu'on élargisse le mandat du tribunal en vue de lui conférer des pouvoirs et des autorités d'exécution, lesquels comprennent le pouvoir d'obliger les employeurs des secteurs public et privé à se conformer à la loi, et le pouvoir de prendre des mesures correctives en cas de non-conformité.
D'après l'Assemblée des chefs du Manitoba, les accords d'équité en matière d'emploi, aussi bien actuels que futurs, devraient tous prévoir des mécanismes qui permettent d'assurer un suivi plus poussé des mesures de conformité et de non- conformité, et ce, dans le but d'améliorer l'efficacité des accords et la gestion des bases de données, et afin de faire en sorte que les employeurs établissent et mettent en oeuvre des plans d'équité en matière d'emploi et assurent le suivi de ceux-ci.
L'Assemblée des chefs du Manitoba propose que l'on renforce les mesures d'exécution actuelles en vue d'améliorer la conformité à la loi.
Au chapitre de l'auto-identification, l'enquête sur l'effectif et le système de données permettent aux personnes appartenant à un groupe désigné de s'identifier volontairement. L'Assemblée des chefs du Manitoba recommande la création d'un comité mixte chargé d'examiner le processus actuel d'auto-identification. Il propose en outre la mise sur pied d'un mécanisme pour faciliter l'élaboration de critères et de principes directeurs clairs.
Pour ce qui est des ressources humaines et financières, les employeurs, l'organisme de surveillance et les organismes ont besoin de telles ressources pour assurer et surveiller la conformité à la loi. L'Assemblée des chefs du Manitoba propose que l'on fournisse des ressources pour mener des recherches et élaborer des politiques sur l'équité en matière d'emploi. Elle recommande que des fonds soient débloqués pour qu'on puisse réaliser, au cours du prochain exercice financier, une étude de suivi et de contrôle sur la participation des Premières nations et des Autochtones aux processus d'examen de la législation et des politiques.
Nous voulions vous fournir d'autres documents d'appoint, mais je crois comprendre qu'ils ne seront pas distribués au comité parce qu'ils ne sont pas traduits. Je les ai remis au greffier.
Pour terminer, au nom de l'Assemblée des chefs du Manitoba, je tiens à vous remercier de nous avoir donné l'occasion de formuler des recommandations sur ce processus très important. Merci.
 (1220)
La présidente: Merci, madame Green.
Nous accueillons maintenant le Ralliement national des Métis, qui est représenté aujourd'hui par Gerald Morin et David Chartrand.
Messieurs, vous avez droit à cinq ou six minutes pour présenter votre exposé. Après quoi, nous passerons aux questions. C'est à vous décider qui prendra la parole et qui répondra aux questions.
Je vous souhaite la bienvenue. Nous vous écoutons.
M. Gerald Morin (président, Ralliement national des Métis): Merci. Au nom du Ralliement national des Métis, je tiens à remercier le comité permanent de nous donner l'occasion d'exposer nos vues sur cette question très importante.
Le premier thème que je voudrais aborder est celui de l'auto-identification, un thème très important pour les Métis.
Comme vous le savez, le Canada compte trois groupes autochtones: les Indiens, les Inuits et les Métis. Nous représentons les Métis de l'Ouest du Canada. La question de l'auto-identification nous pose problème. Je n'ai pas l'intention de m'éterniser là-dessus, mais le gouvernement fédéral a nié l'existence de notre peuple et de nos droits. Nos membres font l'objet de discrimination institutionnelle depuis de nombreuses années.
Par exemple, on ne procède à aucun recensement pour dénombrer les citoyens de la nation métisse. Le gouvernement fédéral ne dispose pas de mécanisme qui permet à nos membres de s'identifier, de dire: «Voici ma carte. Je suis un citoyen de la nation métisse. Je peux donc, en vertu de la Loi sur l'équité en matière d'emploi, me prévaloir des mesures prises au nom des Autochtones.» Il s'agit là d'un problème réel, un problème qui nous préoccupe beaucoup.
D'après notre expérience et d'après les nombreux renseignements que nous avons recueillis, il y a des gens qui s'identifient comme des Métis, alors qu'il n'existe aucun moyen de le confirmer. Par conséquent, il peut y avoir de nombreux cas où des gens s'identifient comme des Métis parce qu'ils prétendent être d'ascendance autochtone. Ils affirment être des Métis et peuvent donc se prévaloir des mesures prévues par la Loi sur l'équité en matière d'emploi. Ce sont là des abus.
Nous avons reçu des informations anecdotiques selon lesquelles, par exemple, des gens vont s'identifier... C'est presque devenu une pratique courante. Une sous-culture a vu le jour au sein de la fonction publique: il y a des gens qui, aux fins de l'équité en matière d'emploi, s'identifient comme des Autochtones ou des Métis. Ils bénéficient donc des mesures que prévoit la Loi sur l'équité en matière d'emploi, alors que ces personnes ne seraient même pas reconnues comme des Métis en vertu de nos propres critères de citoyenneté.
Cette question nous tient à coeur. Si nous voulons que les objectifs de la loi soient atteints et que le principe d'équité en emploi s'applique à notre peuple, nous devons mettre en place des mécanismes. Par exemple, nous sommes le Ralliement national des Métis. Nous représentons les Métis de l'Ouest du Canada. Nous constituons un des trois peuples autochtones visés par la Constitution. Nous comptons cinq organisations membres en Ontario, dans les Prairies et en Colombie-Britannique. Elles ont toutes des critères et des règles d'appartenance, de même que des cartes de membre. Le gouvernement fédéral, le RNM et ses organisations membres devraient unir leur efforts et établir un processus leur permettant de confirmer que les personnes qui se prévalent des dispositions de la Loi sur l'équité en matière d'emploi sont effectivement des citoyens de la nation métisse, que nous représentons.
Cette question nous préoccupe. Les abus qui sont commis risquent de gonfler les chiffres pour ce qui est du pourcentage de personnes qui travaillent effectivement dans la fonction publique fédérale. Si l'on supprimait ces abus et que l'on comptait uniquement les personnes qui sont véritablement des Métis, les chiffres seraient moins élevés.
Les documents que nous avons examinés nous ont permis de constater, entre autres, que la grande majorité des personnes embauchées par le gouvernement fédéral se retrouvent à l'emploi du ministère des Affaires indiennes qui, bien entendu, a le mandat de s'occuper des Premières nations ou des Autochtones au Canada. Or, nous ne sommes pas représentés par le ministère des Affaires indiennes et nous ne sommes pas visés par la Loi sur les indiens. Nous ne disons pas que nous voulons l'être, mais cette situation fait que, parmi la grande majorité des Autochtones qui sont embauchés par le ministère des Affaires indiennes, probablement une minorité seulement sont des Métis. La grande majorité sont des membres des Premières nations ou peut-être des Inuits.
Nous appuyons la Loi sur l'équité en matière d'emploi et ses objectifs, ceux-ci étant d'accorder un traitement identique aux membres de la nation métisse qui travaillent au sein de la fonction publique fédérale. Toutefois, il doit exister des moyens plus efficaces de régler le problème de l'auto-identification. Nous devons peut-être collaborer à ce chapitre avec nos organisations membres.
 (1225)
Je voudrais maintenant vous parler de l'application et de l'observation de la loi. Bien entendu, les ministères, organismes fédéraux, sociétés d'État, ainsi de suite, sont tenus d'atteindre les objectifs quantitatifs fixés dans la Loi sur l'équité en matière d'emploi. Or, comment peut-on appliquer la loi et assurer son observation? Est-ce que des sanctions sont prévues en cas de non-observation de la loi? Si aucune mesure concrète ou sévère n'est prise à l'égard d'un ministère qui n'atteint pas les objectifs quantitatifs ou qui ne s'efforce pas d'atteindre les objectifs de la Loi sur l'équité en matière d'emploi, pourquoi se donner tant de mal?
Nous devons trouver des moyens d'assurer une meilleure application et observation de la loi. Nous savons que la Commission canadienne des droits de la personne est chargée d'assurer le suivi et le contrôle de la loi, et je suis certain qu'elle fait de l'excellent travail. Toutefois, son rôle ne se limite pas à cela, puisqu'elle a un mandat beaucoup plus vaste. Vous pourriez envisager, par exemple, de nommer un commissaire indépendant qui ferait rapport au Parlement au moins tous les ans, et qui effectuerait régulièrement des vérifications auprès des ministères, organismes, sociétés d'État et entreprises du secteur privé visés par la loi. Ce commissaire pourrait déposer des rapports annuels sur les progrès qui ont été réalisés. Vous pourriez également remettre tous les ans, aux ministères, des rapports écrits et verbaux pour faire en sorte qu'ils s'attachent à atteindre les objectifs de la loi sur l'équité en matière d'emploi. Ce n'est là qu'une proposition parmi d'autres.
Voilà donc les deux questions que nous jugeons très importantes, à savoir l'auto-identification et l'application et l'observation de la loi.
La présidente: Merci, monsieur Morin.
Nous allons maintenant passer aux questions. Les noms inscrits sur la liste sont les suivants: Mme Skelton, M. Tonks, Mme Guay, M. McGuire et M. Spencer.
Mme Carol Skelton: D'abord, je tiens à vous remercier d'avoir comparu devant nous aujourd'hui. Nous sommes heureux de vous rencontrer.
Ma première question s'adresse à Mme Green. Est-ce que votre association offre un programme d'aide à l'emploi?
Mme Joanne Green: Oui.
Mme Carol Skelton: Est-ce qu'il répond à vos besoins?
Mme Joanne Green: À l'interne, oui.
Mme Carol Skelton: On a beaucoup insisté sur la nécessité d'avoir des programmes qui sont adaptés aux différences culturelles. Vous l'avez dit vous-même. J'aimerais bien avoir une copie du programme. Est-ce possible?
Mme Johanne Green: Oui.
Mme Carol Skelton: Je trouve cela fort intéressant.
Est-ce que vous embauchez des personnes handicapées?
Mme Joanne Green: Nous avons un service qui s'occupe des personnes handicapées au sein notre organisme.
Mme Carol Skelton: Est-ce que vous offrez des services de soutien?
Mme Joanne Green: Oui. Nous avons effectué des aménagements pour qu'elles puissent entrer et sortir de l'immeuble sans difficulté.
Mme Carol Skelton: Combien de personnes handicapées travaillent pour l'association?
Mme Joanne Green: Nous avons deux employés handicapés, plus un comité composé de 12 personnes qui sont toutes handicapées.
Mme Carol Skelton: Félicitations. C'est très bien. Je suis heureuse de l'entendre.
Mme Joanne Green: Merci.
Mme Carol Skelton: Monsieur Morin, est-ce que votre association offre un programme d'aide à l'emploi?
 (1230)
M. Gerald Morin: Non.
Mme Carol Skelton: Je devais peut-être vous demander si vous comptez un grand nombre d'employés.
M. Gerald Morin: Premièrement, le Ralliement national des métis est formé de cinq organismes provinciaux, et il compte probablement 12 employés, donc je ne suis pas certain que nous ayons besoin d'un tel programme.
Cependant, nos organismes membres sont formés de... Vous savez, ils ont beaucoup plus de programmes en place et ils ont beaucoup plus d'employés qui travaillent pour eux. Ce que je veux dire, c'est que le problème, lorsqu'on parle d'invalidité... En raison de la dénégation du gouvernement fédéral, bien peu de choses ont été faites, sauf dans le secteur de la formation et de l'emploi avec Développement des ressources humaines Canada. Il y a eu peu d'interaction avec nous et très peu de transfert des responsabilités en matière de programmes.
Au cours des deux ou trois dernières années, je crois que nous avons réussi à obtenir certains fonds du gouvernement fédéral, de DRHC et de la Fondation pour la guérison des Autochtones. Pour la première fois de notre histoire, nous avons pu nous attaquer aux questions touchant l'invalidité. Donc, pour nous, les Métis, le travail dans ce domaine ne fait que commencer.
Nous avons établi un groupe de référence sur l'invalidité au sein du Ralliement national des métis, qui est formé de représentants des organismes membres, et ce groupe existe depuis deux ou trois ans. Ce qu'ils ont fait... Nous n'avons pas fait circuler ces documents, parce qu'ils n'ont pas été traduits. Nous les laisserons donc à la greffière pour que tous puissent les consulter. Le premier document publié s'intitule The Key to Better Living for Métis People with Disabilities, qui a été rédigé par le groupe de référence. Le deuxième document s'intitule Métis People with Disabilities and the Capacity to Heal.
Ces documents n'étudient pas en particulier la question de l'équité en matière d'emploi ni les questions touchant DRHC; ils s'attaquent plutôt à une vaste gamme de questions, étant donné que le travail dans ce domaine ne fait que commencer. Nous allons remettre ces deux documents à la greffière pour qu'ils vous soient distribués plus tard.
La vice-présidente (Mme Carol Skelton (Saskatoon--Rosetown--Biggar, Alliance canadienne)): Merci beaucoup.
M. David Chartrand ( président, Manitoba Métis Federation): J'aimerais faire quelques commentaires puisque mon organisme est membre affilié du Ralliement. Je suis le président de la Manitoba Métis Federation, qui compte plus de 200 employés, et nous nous efforçons... En fait, nous sommes très prudents en ce qui concerne la question de l'embauche exclusive de Métis au sein de notre organisme. Nous ne respectons peut-être pas d'autres règles que nous ne connaissons pas bien, mais nous essayons certainement de respecter les règles en matière d'invalidité et d'équité.
De notre point de vue, étant donné que les relations que nous entretenons avec le gouvernement du Canada sont en période de transition, nous avons un meilleur contrôle sur la prestation des programmes et nous pouvons maintenant embaucher des Métis. C'était un de nos objectifs, et nous l'avons atteint plutôt efficacement dans toute la province. Ce n'est que...cela ne tient pas compte des bureaux locaux de l'extérieur, en plus des 200 employés; nous avons donc de nombreux employés qui travaillent dans des secteurs différents d'emploi. Nous nous efforçons toujours de répondre à tous les critères définis.
La vice-présidente (Mme Carol Skelton): Merci.
Monsieur Tonks, la parole est à vous.
M. Alan Tonks: Merci, madame la présidente.
Nous vous remercions de votre visite aujourd'hui.
Monsieur Morin et madame Green, vous avez tous deux parlé de l'auto-identification et expliqué qu'un niveau plus élevé de surveillance s'impose pour atteindre les objectifs de la Loi sur l'équité en matière d'emploi pour les groupes désignés, en particulier pour le groupe des Métis.
Pouvez-vous m'aider à comprendre un peu mieux en quoi consiste l'auto-identification et quelles sont ses incidences si les objectifs visés ne sont pas atteints? Je crois que M. Morin a aussi parlé du processus d'inscription, et j'aimerais avoir de plus amples renseignements sur la manière dont ce processus pourrait être mis en place.
Mme Joanne Green: Nous recommandons qu'une analyse plus en profondeur de notre population soit effectuée. C'est pourquoi nous voulons qu'un processus d'auto-identification soit défini. Présentement, nous faisons tous partie du même groupe. Nous ne savons pas où se trouvent les barrières auxquelles se heurte la population autochtone des Premières nations. C'est pourquoi nous recommandons l'auto-identification; c'est une question d'analyse typologique.
 (1235)
M. Gerald Morin: Pour nous, c'est un problème majeur, pas seulement en ce qui a trait à la Loi sur l'équité en matière d'emploi, mais aussi dans nos relations avec le gouvernement fédéral parce que, je le répète, nous voulons collaborer avec le gouvernement fédéral pour qu'un recensement soit effectué. En ce qui nous concerne, lorsque nous parlons de recensement, nous pensons à l'ouverture d'un registre de la nation métisse au Ralliement national des métis et dans nos organismes membres afin de permettre ainsi le recensement des Métis.
Nous avons nos propres critères et procédés, ainsi que nos propres cartes de membre, mais nous devons établir conjointement avec le gouvernement fédéral un processus de recensement complet. Cependant, nos perspectives dans ce domaine doivent aussi être prises en considération. Cela pose beaucoup de problèmes...et cela ouvre grand la porte aux abus de la part de ceux qui veulent profiter de la Loi sur l'équité en matière d'emploi, des gens qui, dans d'autres circonstances, ne répondraient pas aux exigences d'appartenance à la nation métisse, la nation que nous représentons.
De plus, aucune statistique ne peut être recueillie. Vous dites qu'un certain nombre d'Autochtones ont été embauchés conformément à la Loi sur l'équité en matière d'emploi. Mais quel pourcentage de ces Autochtones sont des Métis? Nous ne le savons pas, parce qu'il n'y a simplement aucune façon d'identifier les Métis, du point de vue du gouvernement fédéral... Nous savons qui nous sommes et nous avons nos propres critères en matière d'appartenance, mais le gouvernement fédéral ne fait rien dans ce domaine et c'est ce qui crée ce problème.
Comme je l'ai dit plus tôt, et je le répète, autant que nous le sachions, les gens qui font des demandes d'emploi dans la Fonction publique fédérale sont au courant de la loi et de ses dispositions. Lorsqu'ils se présentent à une entrevue en vue d'un emploi, ils n'ont qu'à s'identifier comme Métis ou Autochtones. Mais c'est le seul lien qu'ils ont avec les Autochtones. Lorsqu'ils obtiennent l'emploi, ils n'ont plus aucun lien avec la communauté autochtone.
Le recensement est un aspect essentiel si nous voulons identifier qui sont les membres de notre population, du point de vue du gouvernement fédéral et, aussi, si nous voulons savoir combien de gens obtiennent des emplois conformément à la loi. De telles statistiques pourraient nous permettre de confirmer à nos membres que l'équité en matière d'emploi est bel et bien respectée.
Encore une fois, je crois que des relations de travail pourraient s'établir entre le gouvernement fédéral et nos organismes membres afin d'assurer la mise en place d'un quelconque processus de validation. Par exemple, la GRC a contacté nos organismes membres pour l'embauche éventuelle d'une personne en particulier. L'exemple que je vais vous donner est réel, mais je ne peux pas vous donner le nom de la personne en question. La GRC nous a expliqué qu'elle désirait embaucher cette personne qui affirmait appartenir à la nation métisse. La GRC a vérifié auprès de nous, et nous avons découvert que ce n'était pas le cas mais que son conjoint était peut-être un Métis. Cela ne faisait pas d'elle membre des Métis et elle ne pouvait pas profiter des avantages de la législation.
M. Alan Tonks: J'aimerais poser une autre question, madame la présidente.
Lorsque vous dites que le mandat de la Commission des droits de la personne était très vaste, cela veut-il dire que cette responsabilité en matière de surveillance et de conformité s'applique en particulier aux Métis? Est-ce que c'est votre recommandation: un commissaire affecté spécialement à cette tâche?
M. Gerald Morin: Non. Bien entendu, les gens peuvent avoir des points de vue différents, mais nous avons suggéré la création du poste de commissaire indépendan pour que la Loi sur l'équité en matière d'emploi tienne compte des peuples autochtones. Vous voudrez peut-être étudier ou recommander ce mécanisme ou ce processus au Parlement afin que la loi puisse atteindre plus efficacement ses objectifs.
M. Alan Tonks: En général. Ensuite, vous pourriez y rattacher les recommandations que vous faites à propos du ciblage et des Métis afin de définir le groupe de gens avec lequel vous travaillez.
M. Gerald Morin: Eh bien non. Je crois que cela serait plus ou moins distinct. Le commissaire indépendant que nous suggérons rendrait compte au Parlement une fois par an, effectuerait des vérifications régulières des ministères et des agences—de tous ceux concernés—et produirait un rapport annuel en vue d'assurer l'efficacité globale de la loi en tant que telle.
Lorsqu'on parle du registre et du recensement de la nation métisse, ce sont des promesses qui ont été faites par le gouvernement fédéral, y compris celui actuellement au pouvoir, des promesses de collaboration avec le Ralliement national des métis pour la tenue d'un recensement. Cela s'impose, tout simplement et une telle promesse doit être tenue.
Lorsque ce sera fait, nous pourrons utiliser ces chiffres, compiler des données et déterminer combien de Métis travaillent réellement dans la fonction publique fédérale. Nous contribuerons ainsi à en augmenter l'efficacité. Si nous sommes vraiment sous-représentés, il faudra évidemment entreprendre les démarches requises.
Entre temps, je suggère que le gouvernement fédéral, ses ministères et ses agences prennent l'habitude de travailler en collaboration avec nos organismes membres pour l'établissement d'un processus de validation dans les cas où des gens prétendent être des Métis. Si nous avions une carte de membre ou une lettre de confirmation de nos présidents provinciaux ou bien... On ne devrait pas pouvoir simplement affirmer qu'on est un Métis du Canada; il faudrait préciser si on est un Métis de St. Laurent, au Manitoba, ou de Green Lake, en Saskatchewan, et cela pourrait alors être vérifié auprès de l'organisme membre respectif. Nous savons qui sont nos gens, et nous avons des façons de le vérifier dans notre communauté.
 (1240)
[Français]
La présidente: Madame Guay.
Mme Monique Guay: Merci, madame la présidente.
Bienvenue au comité. Ça me fait plaisir de vous voir. Vous arrivez avec des idées tout à fait intéressantes.
Madame Green, merci pour vos recommandations. Elles sont très importantes pour nous et nous en tiendrons compte.
Monsieur Morin, vous parliez plus tôt du recensement. Ne pouvez-vous pas faire vous-mêmes un recensement de vos gens? Je ne comprends pas qu'on ne puisse pas trouver quelque part un terrain d'entente. Y a-t-il une description d'un Métis qui vous appartient et une autre description faite par le gouvernement? Je ne comprends pas. Pouvez-vous m'expliquer davantage ce qui se passe? Ce n'est pas normal que vous ne puissiez pas vous recenser.
[Traduction]
M. Gerald Morin: Je crois que nous ne pouvons pas effectuer un recensement efficace de nos gens, c'est parce que nous ne pouvons essentiellement pas nous le permettre. Nous n'avons pas les fonds requis. Aucun financement n'est accordé au Ralliement national des métis ni à nos organismes membres, qui pourrait nous permettre d'effectuer un recensement adéquat et efficace de la nation métisse.
En général, nous avons difficilement accès aux programmes, aux services et au financement du gouvernement fédéral pour renforcer nos capacités et pour offrir à nos gens des programmes et des services qui répondent à leurs besoins quotidiens, que ce soit en matière de développement économique, d'éducation ou de soins de santé dans nos collectivités. Selon les dires du gouvernement fédéral, environ 7,2 milliards de dollars par année sont versés. Environ 5 milliards de dollars de ces fonds proviennent du ministère des Affaires indiennes, mais rien de cela n'est attribuée aux Métis. Sur ce total de 7,2 milliards de dollars, une somme d'environ 50 millions de dollars—mais nous n'avons pas les chiffres exacts—est affectée à la nation métisse par le gouvernement fédéral.
Lorsqu'on examine le recensement de 1996, on constate que 26 p. 100 de la communauté autochtone est métisse. Cela représente un quart de la population autochtone du Canada, mais seulement 50 millions de dollars par année nous sont accordés sur un budget de 7,2 milliards de dollars.
Nous n'avons pas assez d'argent ni assez de programmes pour répondre aux besoins fondamentaux quotidiens des gens de notre communauté, encore moins pour effectuer un recensement efficace et adéquat. C'est une partie du problème auquel nous devons faire face.
Dans le premier Livre rouge qui a été publié, je crois que c'était en 1993, juste avant que les libéraux n'arrivent au pouvoir, on s'engageait à un recensement. C'était une promesse bien précise. Nous avons travaillé avec le gouvernement fédéral et c'est un engagement qui a été renouvelé et qui a été renforcé par la réponse du gouvernement fédéral à la Commission royale sur les peuples autochtones.
Nous avons eu des mésententes, surtout avec la bureaucratie du gouvernement fédéral, parce que nous interprétons différemment la manière dont ce recensement doit être effectué. Selon nous, il ne peut pas se faire de manière unilatérale par le gouvernement fédéral; ce doit plutôt être un exercice conjoint. Nous le voyons sous la forme d'un registre de la nation métisse, ce que le gouvernement fédéral n'a toujours pas accepté.
Un registre de la nation métisse... Premièrement, nous savons qui nous sommes, mais nous devons établir une définition nationale à l'intention des autres. Lors de notre dernière assemblée du RNM qui a eu lieu à Vancouver l'été dernier, nous avons rédigé une ébauche de la définition nationale, qui, nous l'espérons, sera ratifiée en tant que définition finale.
Essentiellement, c'est la situation actuelle. Il y a des difficultés réelles. Si nous avions les ressources, nous le ferions. Malheureusement, nous avons besoin des ressources du gouvernement fédéral pour que ce recensement se fasse de manière conjointe, et c'est ce que nous essayons d'obtenir auprès du gouvernement.
 (1245)
[Français]
Mme Monique Guay: Vous parlez d'une somme de 50 millions de dollars que vous recevez. Si je comprends bien, ça veut dire qu'ils ont évalué que vous étiez un certain nombre de Métis et qu'ils vous ont donné un certain montant d'argent en conséquence, parce qu'ils ne peuvent pas vous donner 50 millions de dollars juste comme ça. C'est comme ça qu'ils le voient. Non? Ce n'est pas ainsi?
[Traduction]
M. David Chartrand: En effet, c'est un peu comme cela que Développement des ressources humaines voit les choses. Pour distribuer les 320 millions dans l'ensemble du pays, on tient compte de neuf facteurs. Par exemple, au Manitoba, nous recevons 31 p. 100 de notre part, laquelle, une fois encore, est fondée sur des données de recensement précises. Par exemple, elle indique que la population métisse du Manitoba compte 39 000 personnes, ce qui est faux, comme nous le savons. On a dénombré plus de 30 000 électeurs inscrits au sein de notre organisation. Par conséquent, si vous ajoutez au moins un enfant pour deux adultes, vous devez multiplier ces chiffres par deux ou par trois.
Les universités ont déjà évalué à plus de 120 000 le nombre de Métis au Manitoba. Ce programme particulier se fonde sur ces données; il ne nous est donc pas favorable parce qu'il n'y a pas véritablement de dénombrement ni de registre pour notre collectivité.
Mme Monique Guay: Je vois.
M. David Chartrand: Le reste n'est composé que des miettes que nous recevons des différents programmes auxquels nous sommes admissibles.
[Français]
Mme Monique Guay: D'accord. Voilà qui clarifie beaucoup de choses pour moi.
Monsieur Morin, vous avez parlé d'un commissaire qui ferait rapport à la Chambre ou aux députés. J'ai déjà pensé à cela. Je trouve que c'est une idée extraordinaire, mais, pour qu'il puisse faire un bon boulot, il faudrait évidemment que ce commissaire soit quelqu'un d'indépendant et non pas quelqu'un de nommé. Je trouve votre idée géniale et j'espère qu'on la retiendra ici, en comité. Quelqu'un qui serait neutre, qui pourrait faire une enquête à chaque année et qui pourrait nous faire rapport de ce qui se produit pourrait vraiment nous aider.
Madame Green, je reviens à vous. Il y a aussi tout l'aspect des contractuels. Vous savez que les entreprises qui obtiennent des contrats du gouvernement et qui ont 100 employés et plus doivent se soumettre à la Loi sur l'équité en matière d'emploi. Sentez-vous que ce travail-là se fait? Ceux qu'on a entendus jusqu'à présent nous ont dit que ce n'était pas le cas. Les gens qui obtiennent des contrats du gouvernement ne respectent pas la loi dans son intégralité.
[Traduction]
M. David Chartrand: Je brûle d'intervenir à ce sujet.
Je crois qu'il y a de bons exemples d'engagement du secteur privé, mais je crois que le secteur privé a le sentiment que les gouvernements ne favorisent pas suffisamment les partenariats. Par ailleurs, il arrive aussi que des entreprises privées profitent de la situation pour utiliser les Autochtones à leur avantage, comme cela a été fait lors de la construction du barrage hydroélectrique de Limestone, au Manitoba. La société qui s'en occupait était obligée d'embaucher un certain nombre d'Autochtones, mais la plupart de ceux qui ont été engagés ne l'ont été que pour couper des arbres et arracher des broussailles, bref, pour faire le sale boulot. Aucun n'avait obtenu d'emploi à long terme.
Je pense qu'il faut trouver un équilibre dans ce processus, et c'est un problème auquel il faut s'attaquer à la base parce que beaucoup d'entreprises... Je donnerai même l'exemple d'Air Canada qui a signé des ententes pour embaucher des Autochtones. Jusqu'à présent je n'ai vu qu'un seul Autochtone travailler comme agent de bord. Dans les bureaux des compagnies aériennes, je n'ai jamais vu un seul Autochtone. Où sont-ils? Cette société s'était engagée publiquement à en recruter. Les paye-t-elle pour mettre des bagages dans les soutes? Je n'en sais rien, mais ce qui est certain, c'est que je n'en vois nulle part.
Je pense qu'il est essentiel de pouvoir constater que le secteur privé veut être notre partenaire, mais il faut aussi se rendre compte que beaucoup d'entreprises privées ne respectent pas la Loi d'équité en matière d'emploi comme elles le devraient.
[Français]
Mme Monique Guay: Merci.
 (1250)
[Traduction]
La présidente: Madame Green, voudriez-vous ajouter quelque chose en réponse à la question de Mme Guay?
Mme Joanne Green: J'ajouterais que nous sommes également préoccupés par le fait que, en dépit des accords que nous avons signés, beaucoup d'Autochtones occupent des postes subalternes et ont peu ou pas de possibilités d'avancement.
M. Gerald Morin: J'aimerais répondre à Mme Guay.
Outre ce qu'a dit David, il est difficile pour nous, la nation métisse, d'isoler ou de décortiquer un problème particulier et de l'exposer, parce que cela finit toujours par avoir un lien avec notre statut politique et légal au Canada. Le gouvernement fédéral ni avant ni depuis la création de la Confédération n'a jamais reconnu l'existence de la nation métisse au Canada, et ce, même si la Constitution de 1982 reconnaît notre existence et nos droits. Par conséquent, il nie toute responsabilité, que ce soit pour effectuer un recensement, mettre des programmes et des services en place ou reconnaître notre droit à la revendication territoriale ou à l'autonomie gouvernementale.
C'est un handicap majeur quand vient le temps de s'attaquer à ce genre de problèmes. Si vous niez l'existence d'un peuple, s'il n'y a aucun registre ni recensement, comment pouvez-vous déterminer que les objectifs de la Loi sur l'équité en matière d'emploi sont atteints pour notre peuple? Il faut trouver une solution. C'est quelque chose qu'on ne peut pas ignorer lorsqu'on s'occupe des problèmes de la nation métisse.
Pour conclure, je parlerai de cet exposé que nous avons présenté devant le comité permanent des Affaires autochtones, le 31 mai 2001. Pat Martin, vous siégiez à ce comité, et je pense que vous étiez présent à cette séance. Cet exposé fournit des renseignements utiles et donne le contexte dans lequel évolue la nation métisse, en plus de présenter notre programme d'activités avec le gouvernement fédéral. Je donnerai cet exposé à la greffière, pour que vous puissiez y jeter un coup d'oeil; il pourra aussi être traduit, le cas échéant.
Je vous remercie beaucoup.
La présidente: Normalement, ce serait maintenant au tour de M. McGuire de prendre la parole, mais comme M. Martin vient d'entrer, même s'il n'a pas indiqué qu'il voulait intervenir à ce comité, je pense que nous pouvons lui permettre de le faire.
Je sais à quel point cette question vous intéresse.
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Je suis un intrus.
La présidente: Soit, mais je pense que nous avons même l'accord de M. McGuire pour que notre intrus pose quelques questions.
Monsieur Martin, je vous accorde cinq minutes.
M. Pat Martin: C'est très généreux de votre part, madame la présidente. Je remercie également l'ensemble du comité.
Je tiens à m'excuser auprès de vous tous pour mon arrivée tardive. En fait, j'ai assisté à la séance du comité permanent des Affaires autochtones qui se tient au moment où je vous parle. Je participe donc aux travaux de deux comités. Mais j'ai vu vos noms sur la liste et j'ai demandé à notre membre titulaire du comité si je pouvais la remplacer pour cette période, en partie à cause de la présence du député de l'Île-du-Prince-Édouard.
L'exposé fait par le représentant du Manitoba m'intéresse beaucoup étant donné que je suis député de cette province, et je m'intéresse aussi depuis très longtemps à la nation métisse. Puis-je vous poser deux questions?
Tout d'abord, je voudrais parler de la Commission des droits de la personne qui, tous les cinq ans, détermine quelles sont les entreprises ou les agences fédérales qui agissent en conformité avec la loi. Cent onze agences et contracteurs du gouvernement fédéral, ainsi que différents ministères, sont passés au crible. Le dernier examen a révélé que, de ce nombre, seulement deux se conformaient à la loi. Quatre autres pouvaient également obtenir la note de passage, à condition de corriger certaines lacunes d'ici à la fin de l'année.
C'est un résultat désastreux. Parmi tous les groupes visés par l'équité en matière d'emploi, les peuples autochtones étaient les derniers servis. Si vous n'avez pas déjà répondu à la question, et compte tenu du fait que j'en ai une autre très courte, j'aimerais savoir ce que vous recommanderiez pour accroître le niveau de participation des Métis et des peuples autochtones?
M. Gerald Morin: Je crois que le système fédéral doit par-dessus tout redorer son blason. Ce que nous avons proposé plus tôt, c'est la possibilité de créer, comme le disait Mme Guay...
M. Pat Martin: Oui, j'ai entendu.
M. Gerald Morin: ...un poste de commissaire indépendant qui ferait rapport au Parlement une fois par an. Je sais que les provinces, parfois, appellent des employeurs devant un panel pour qu'ils présentent leurs rapports. Peut-être seriez-vous intéressé à ce que nous procédions d'une façon semblable—soit verbalement, soit par écrit— sur une base annuelle. Étant donné les pouvoirs élargis dont jouit le commissaire indépendant pour émettre des recommandations, ces questions devraient être débattues au sein de la Chambre, une fois par an. Lire, dans un rapport qui paraît chaque cinq ans, que 109 agences sur 111 ne se conforment pas à la loi est loin d'être réjouissant. Si vous voulez faire quelque chose, agissez efficacement, sinon, laissez tomber.
M. Pat Martin: Seriez-vous prêt à imposer une amende? Seriez-vous disposé à pénaliser ceux qui manquent à leurs obligations?
 (1255)
M. Gerald Morin: Oui, nous avons parlé de cela également. Je sais que l'autre comité permanent vous demande beaucoup de travail, mais il faut trouver des solutions concrètes et efficaces. Les autres groupes de la société doivent subir les conséquences des erreurs qu'ils commettent. Ces mêmes principes devraient s'appliquer au gouvernement fédéral, s'il ne respecte pas la Loi sur l'équité en matière d'emploi.
M. Pat Martin: Absolument. Merci.
J'ai une autre question très brève, s'il me reste une minute. Même si on parle de vous dans le rapport de la Commission royale, depuis 1982, le peuple métis ne relève pas du ministre des Affaires autochtones, mais de l'intermédiaire, lequel partage cette responsabilité avec le ministre des Ressources naturelles. Maintenant, puisque le plan d'action consistant à Rassembler nos forces n'a permis que d'accumuler de la poussière sur les tablettes, comme nous le disons en plaisantant au comité des Affaires autochtones, je voudrais savoir si vous êtes allé voir le nouveau ministre et si vous lui avez posé la même question au sujet du financement d'un véritable recensement ou du dénombrement de la population métisse par vous-même?
M. David Chartrand: Bien, tout d'abord, notre organisation s'occupe d'une cause relevant de la charte et d'une affaire judiciaire. Actuellement, beaucoup d'entre vous ne réalisent peut-être pas que le ministre responsable est l'intermédiaire. Si vous examinez les attributions rattachées à la fonction de ce ministre, vous voyez qu'elles se limitent à organiser des réunions pour nous. Nous pouvons faire cela nous-mêmes. Voilà donc en quoi consiste l'essentiel du travail de l'intermédiaire.
Nous nous faisons l'écho d'un grand mécontentement. Le ministre responsable doit jouer un rôle beaucoup plus important. Une fois le problème juridique réglé, je pense que nous trouverons plus d'une occasion de travailler ensemble. Sans ce développement continu, nous resterons pris au piège. Nous cherchons vraiment un équilibre. Avec tout le respect que je dois aux Premières nations, je dois dire qu'ils ont un ministre qui s'occupe de leurs affaires, de leur santé et de leur éducation et de plein d'autres choses, mais nous, nous n'en avons pas. Notre intermédiaire ne s'occupe pas de nous. C'est une personne qui organise des réunions; ça s'arrête là.
J'aimerais maintenant vous donner notre analyse de la situation. Ce que nous avons conclu, d'après vos chiffres... Il est bon de connaître ces chiffres. Nous n'avions jamais su que seulement deux agences respectaient la loi. J'imagine que c'est parce qu'elles avaient toutes les excuses valables, pas parce qu'elles avaient vraiment trouvé des solutions au problème.
Je pense qu'il est important de le dire car les Métis sont des citoyens canadiens. Nous sommes nés et avons grandi dans ce pays. Si cette loi a pour but de nous respecter et de nous protéger, il faut faire quelque chose pour garantir que nous le soyons vraiment, parce qu'il n'y a aucun ministre responsable de nous protéger et de nous guider.
M. Pat Martin: C'est exact. Je vous remercie beaucoup.
La présidente: Madame Green, suite à votre évaluation, souhaiteriez-vous ajouter quelque chose?
Mme Joanne Green: Non. J'ai tout dit dans mon intervention et dans les recommandations que j'ai présentées.
La présidente: Merci.
Monsieur McGuire.
M. Joe McGuire: Merci, madame la présidente.
J'ai deux questions. L'un se rapporte au principe du mérite. Beaucoup de témoins de la Commission de la fonction publique disent qu'en dépit de ce que stipule la Loi sur l'équité en matière d'emploi, on applique le principe du mérite.
J'aimerais savoir comment vous percevez cela. Pensez-vous que le gouvernement ne s'engage pas suffisamment dans la formation et la préparation des groupes avant de les soumettre à une entrevue? Les collectivités autochtones sont-elles suffisamment bien préparées à travailler dans la fonction publique, au sein du gouvernement ou encore dans des agences du gouvernement ou des sociétés d'État comme Air Canada, par exemple?
M. David Chartrand: Il est indéniable que le gouvernement canadien essaie d'insérer des exigences précises dans n'importe quel appel d'offres qu'il lance. Il y aura toujours des critères d'embauche à respecter en ce qui a trait aux autochtones. Mais de toute évidence, en fin de compte nous sommes mis au défi de trouver une meilleure solution avec le secteur privé et les sociétés de la Couronne, de mettre en place un mécanisme commun qui nous permettra de respecter ce critère.
Le principe du mérite, serait bien sûr sensationnel si nous avions un commissaire. C'est une des choses dont nous avons parlé avant de venir ici. Un commissaire serait chargé non seulement de faire ressortir les défis que doivent relever les entités qui ne satisfont pas aux critères mais également celles qui les succès de celles qui y parviennent. Il faudrait les féliciter et faire part de leurs succès au reste du pays. Le principe du mérite serait ainsi sérieux.
Nous estimons que le gouvernement devrait accroître sa participation pour s'assurer que les institutions qui devront satisfaire aux critères d'équité en matière d'emploi prennent sans cesse de nouvelles initiatives. Au moment où l'on se parle, la seule réussite dont nous pouvons parler est l'entente fédérale sur le développement des ressources humaines autochtones. Il s'agit d'une très grande réussite. Nous avons créé des milliers et des milliers d'emplois d'un bout à l'autre du pays. Si nous avons réussi c'est qu'on nous a confié la responsabilité d'investir nous-mêmes les montants qui nous sont attribués. Nous n'avons plus à passer par l'intermédiaire d'une autre organisation bureaucratique étant donné que nous avons la nôtre. Notre pouvoir d'achat nous permet d'entrer dans ces entreprises et de nous assurer de participer à la formation de nos gens pour qu'ils y entrent.
· (1300)
M. Joe McGuire: Vous estimez donc que l'engagement n'est pas suffisant en ce qui concerne la formation et l'éducation des Autochtones?
M. David Chartrand: Certainement pour nous, en tant que Métis, vu qu'il s'agit du seul programme que nous avons. C'est plus que cela. C'est parce que le processus de transition est en place. Comme je l'ai dit, je crois que le gouvernement fait des tentatives, lorsqu'il intègre ces critères précis à n'importe quel processus d'appel d'offres... Je vais prendre l'exemple du programme de bourses d'études qui comporte un critère précis en ce qui concerne les Autochtones, même si la CIBC s'est retirée du processus. Une entreprise privée a déposé une offre mais elle a dû s'assurer le concours d'un associé autochtone ce qui, nous l'espérons, permettra de créer des emplois pour les Autochtones. Mais personne n'est là vraiment au sein de l'organisation bureaucratique de ces ministères ou de ces infrastructures pour s'assurer que le partenariat se poursuivra. C'est là où se trouvent selon nous beaucoup de pierres d'achoppement. Nous pouvons faire toute la formation que nous voulons, mais s'il n'existe aucun mécanisme pour s'assurer que les organisations bureaucratiques respectent le critère, nous ne parviendrons pas à créer ces emplois.
Si vous jetez un coup d'oeil à certaines des recommandations ou des conclusions, il y avait un engagement ou une plainte au sujet du maintien en emploi, à savoir que si les gens ne choisissaient pas de devenir cadre c'était parce que le taux de maintien en emploi était un fiasco. Jetons un coup d'oeil à ce taux. Je pense que si vous examinez la chose sous cet angle, s'il y avait collaboration au niveau de l'infrastructure, il n'y aurait aucun problème avec le taux de maintien en emploi.
Je vais vous donner un parfait exemple. La société Maple Leaf a ouvert une usine au Manitoba et a diversifié ses produits. Grâce aux fonds provenant de Développement des ressources humaines Canada nous sommes devenus partenaires. Cependant nous avons embauché une personne à plein temps pour venir en aide aux familles qu'il s'agisse de la transition du déménagement, de la recherche d'écoles pour les enfants. Les Métis ont le taux de maintien en emploi le plus bas de toute l'usine Maple Leaf. Nous en sommes très heureux, mais nous disposons constamment sur place de gens qui suivent les choses de près et de mécanismes permanents.
M. Joe McGuire: Voulez-vous dire le taux le plus bas ou le taux le plus élevé?
M. David Chartrand: Je m'excuse?
La présidente: Voulez-vous dire le taux le plus élevé? Je veux simplement que ce soit consigné au compte rendu.
M. David Chartrand: Oh, désolé, le taux de maintien en emploi le plus élevé. Je m'excuse. D'autres idées dont je voulais vous faire part me trottaient déjà dans la tête.
Mais il s'agit certainement d'une très grande réussite. Maple Leaf a garanti 100 emplois et nous avons comblé ces 100 postes. Dans le cadre de ce partanariat, nous avons réussi.
M. Joe McGuire: Constatant que vous êtes le groupe dont le nombre augmente le plus vite au pays, croyez-vous que les syndicats tant nationaux qu'internationaux en tiennent compte dans leurs négociations avec la direction pour ce qui est de l'embauche d'Autocthones?
M. David Chartrand: En ce qui concerne les syndicats et les Métis, nous sommes en désaccord en ce qui a trait à ce processus. Avec tout le respect que je dois aux syndicats—je crois qu'ils jouent un rôle dans l'évolution du processus d'emploi—nous craignons fort que les syndicats ne s'immiscent dans nos infrastructures étant donné qu'ils commencent ensuite à y fixer toutes ces règles et que du jour au lendemain ils ont un mot à dire à l'égard de toutes vos ressources. Je ne vois pas l'utilité de faire des pressions et de protester sur une grande échelle pour obtenir quelques dollars ici et là du gouvernement. Nous voyons donc un problème en ce qui concerne les mécanismes syndicaux. Je crois que les syndicats ont un rôle à jouer, mais je ne suis pas sûr de la mesure dans laquelle nous voudrions qu'ils s'immiscent dans notre infrastructure.
M. Joe McGuire: Monsieur Morin, avez-vous quelque chose à ajouter à cela?
M. Gérald Morin: Oui, c'est une question très intéressante.
Mon expérience en ce qui concerne les syndicats, et certainement en ce qui concerne les Métis de toute manière, c'est qu'une fois de plus ils sont considérés, si vous voulez, comme une institution créée par les Blancs, destinée à la population en général et comme un autre instrument d'oppression pour notre peuple. Il n'y a pas grand chose qui permet de penser que j'ai une affinité avec les syndicats d'après mon expérience, parce qu'ils se battent pour les travailleurs. D'après ce que j'ai vu, ils ne sont jamais vraiment intervenus en faveur des Autochtones ou de nos causes.
Je vais vous donner un exemple. J'ai été président de la Métis Nation of Saskatchewan. Nous avons un des établissements d'enseignement métis le plus grand et le plus performant du pays, l'Institut Gabriel Dumont affilié à la Métis Nation of Saskatchewan. Le syndicat de la fonction publique a été amené à participer entre autres au processus d'accréditation et a eu accès à tous les avantages que comporte la loi. Comme nous ne disposions pas de gens instruits et formés à l'époque dans notre propre établissement métis, nous avons dû embaucher beaucoup de personnes autres Métis. Mais lorsque nos gens ont commencé à se faire instruire et à être en mesure de reprendre ces postes, le syndicat a mis à profit le processus syndical afin de protéger les postes, surtout les postes de cadres, qui étaient occupés surtout par des personnes autres que Métis. Le syndicat a donc été utilisé comme instrument contre nous, dans nos propres institutions. Je le répète, d'après mon expérience, notre peuple considère les syndicats comme une institution destinée à la population en général, qui parle de toute façon au nom des Métis.
· (1305)
M. Joe McGuire: Madame Green, avez-vous quelque chose à dire à cet égard?
Mme Joanne Green: Je ne sais trop si vous voulez que je réponde à votre première question concernant la participation du gouvernement ou si vous voulez connaître mon point de vue sur les syndicats.
M. Joe McGuire: Votre point de vue sur les syndicats.
Mme Joanne Green: Les Premières nations partagent le même point de vue sur la participation des syndicats.
M. Joe McGuire: Donc, il s'agit principalement d'une objection à caractère culturel?
Mme Joanne Green: Je pense qu'il s'agit d'une question de prise de décision et de contrôle en ce qui concerne leurs employés.
M. Joe McGuire: Oui. Merci.
La présidente: Monsieur Spencer, l'honneur vous revient de poser la dernière question.
M. Larry Spencer: C'est bien, parce que j'allais manquer de questions étant donné que tout le monde a posé les miennes.
J'aimerais demander à M. Morin, mais je me suis mis à penser que Mme Green aimerait peut-être aussi répondre. Croyez-vous que la nation métisse est sous représentée dans la population active du Canada par rapport aux Premières nations ou est-ce simplement la même chose? Donnez-moi tous les deux vos points de vue.
Mme Joanne Green: Comme je l'ai dit plus tôt, il est difficile d'avoir une image précise étant donné qu'on nous met toujours dans le même panier. Comment pouvons-nous le savoir?
M. Gerald Morin: Comme je l'ai dit plus tôt, rien ne permet au gouvernement fédéral d'identifier les Métis au Canada. Aucun recensement n'a été effectué, et il n'existe donc aucune donnée empirique ou objective qui nous permette de déterminer quel pourcentage de la main-d'oeuvre fédérale est d'origine métisse. Il n'y a aucune façon de le savoir cela.
Je ne critique pas le ministère des Affaires indiennes parce qu'il embauche des Autochtones; c'est une bonne chose, et c'est le but visé. Mais si nous examinons les chiffres que j'ai vus quelque part dans la documentation, la grande majorité des Autochtones qui obtiennent des emplois auprès du gouvernement fédéral travaillent pour le ministère des Affaires indiennes.
Je suppose—mais je n'en ai aucune preuve concrète— que puisque le mandat du ministère vise les peuples des Premières nations, il ne vise pas la nation métisse. Je suppose aussi que la grande majorité des employés autochtones ne sont pas des Métis. D'après ce que j'ai vu et d'après notre expérience, je dirais qu'il n'y a pas beaucoup de Métis qui travaillent dans la fonction publique fédérale.
M. Larry Spencer: Donc, en réalité, vous demandez que des fonds distincts vous soient accordés en tant que groupe distinct. Si j'ai bien compris, vous voulez que la nation métisse soit traitée de façon distincte.
M. Gerald Morin: Oui. La nation métisse est une nation distincte des Premières nations et des Inuits. Lorsqu'on détermine le nombre de Métis par rapport au nombre de membres des Premières nations et ainsi de suite, ce caractère distinctif doit être reconnu et respecté par le gouvernement fédéral. Ainsi, vous pourrez obtenir des renseignements exacts.
M. Larry Spencer: Donc, vous n'avez aucune donnée vous indiquant si les gens de votre nation ont plus de difficulté à obtenir des emplois ou non par rapport aux gens des Premières nations.
M. David Chartrand: Nous pouvons dire que nous avons un défi à relever. Ce qu'il faut reconnaître, Larry, c'est que nous perdons beaucoup de jeunes loups et de jeunes louves, pour les nommer ainsi, c'est-à-dire des gens qui ont acquis de l'expérience et qui sont devenus des gestionnaires et des formateurs. Le gouvernement vient les chercher, et nous ne pouvons pas lui faire concurrence en matière de salaires. Pour nous, c'est une question de dissuasion; nous ne pouvons que regarder sans rien pouvoir faire.
Si je vous dis cela, c'est parce qu'il y a effectivement des employés du gouvernement qui sont des Métis, mais je vous défie d'en déterminer le nombre exact. Il y en a si peu qu'on pourrait les compter sur les doigts de la main. C'est un point de préoccupation; il semble que notre pays dans son ensemble et notre gouvernement, à cause de leur refus d'admettre... Même si notre Constitution est censée protéger tous les citoyens de manière égale, l'équité continue de nous échapper en tant que peuple parce qu'ils ne veulent pas admettre l'existence d'une responsabilité. S'ils ne veulent pas nous respecter en tant que Métis, ils devraient nous respecter en tant que citoyens canadiens et nous donner cette possibilité puisque nous sommes des citoyens métis.
Donc, sans aucun doute, il est difficile de répondre à votre question parce qu'il n'existe aucune donnée ni aucune information. J'ai soulevé la question de la concurrence des salaires parce que nous ne pouvons pas nous mesurer au gouvernement fédéral à cet égard; c'est absolument impossible.
· (1310)
M. Larry Spencer: Merci beaucoup d'être parmi nous.
La présidente: J'aurais une question à poser, si je peux me le permettre.
Vous dites que les Métis, les Inuits, etc. devraient être répartis en groupes distincts aux fins de l'équité en matière d'emploi. Suggérez-vous que l'on fasse la même chose dans le cas des minorités visibles, que la catégorie en vertu de la Loi sur l'équité en matière d'emploi soit aussi morcelée, et que l'on compte le nombre d'Indiens, d'Africains et autres dans le contexte de l'embauche des membres des minorités visibles?
M. David Chartrand: Je répondrais qu'il serait préférable de leur demander. Ce n'est pas juste de ma part de porter un jugement sur eux et il serait plus sage qu'ils le décident eux-mêmes. Si c'est mieux dans leurs cas, c'est parfait. Nous tentons de déterminer ce qui est préférable pour nous.
Mme Joanne Green: C'est aussi ce que je voulais répondre. C'est à eux qu'il faudrait poser cette question-là.
La présidente: D'accord.
Sans oublier que nous devons terminer à 13 h 30, M. Tonks et Mme Guay aimeraient prendre la parole. Monsieur Tonks, la parole est à vous.
M. Alan Tonks: Je n'avais encore jamais entendu cette description ni cette expression. Je me demande si Mme Green ne pourrait pas nous donner plus de précisions à ce sujet. L'expression a été utilisée à propos des femmes autochtones et des femmes des Premières nations ayant un handicap et de l'immense difficulté qu'ont ces femmes à être représentées, par l'entremise de l'équité en matière d'emploi, dans des postes au sein du gouvernement fédéral. Vous avez dit—si j'ai bien compris—qu'en vertu de la Loi sur l'équité en matière d'emploi, nous avons «l'obligation de mise en oeuvre de l'équité en matière d'emploi sans prendre des mesures susceptibles de causer un préjudice injustifié». Pouvez-vous m'expliquer quand cela s'applique?
Mme Joanne Green: C'est défini dans votre processus d'examen...
M. Alan Tonks: Très bien.
Mme Joanne Green: ...comme l'une des mesures d'application de la loi.
M. Alan Tonks: Vraiment?
Mme Joanne Green: Oui, dans la section sur l'application, on indique que les employeurs doivent se conformer sans que cela ne leur cause un préjudice injustifié.
M. Alan Tonks: Très bien, et vous croyez que la mise en application de la loi doit être plus stricte.
Mme Joanne Green: Oui.
M. Alan Tonks: D'accord.
J'aimerais terminer, madame la présidente.
Vous avez aussi indiqué que les femmes de ce groupe désigné sont très désavantagées non seulement en termes de nombres mais aussi en termes de parité salariale. Avez-vous des données à l'appui?
Mme Joanne Green: Vous voulez dire en ce qui concerne la parité salariale?
M. Alan Tonks: Oui.
Mme Joanne Green: Non. Ces renseignements sont fondés sur le processus de consultation que nous avons mené auprès des femmes des Premières nations de notre collectivité.
M. Alan Tonks: D'accord. J'aimerais seulement préciser que j'ai l'impression et le sentiment que...
Mme Joanne Green: Nous avons aussi demandé que cette question soit identifiée dans l'analyse parce qu'il ne s'agit pas d'une question touchant la parité salariale.
M. Alan Tonks: Oh, d'accord.
Mme Joanne Green: C'est une de nos recommandations.
M. Alan Tonks: C'est bien. Merci.
[Français]
La présidente: Madame Guay.
Mme Monique Guay: J'ai une inquiétude. Tout à l'heure, vous avez dit à mon collègue que vous souhaitiez être une catégorie distincte de celle des autochtones. Ça créerait un cinquième objectif à atteindre, si je comprends bien. Ça devient compliqué parce que vous nous dites que vous n'êtes pas recensés. Il est donc difficile d'identifier le nombre de Métis. Il y a des gens qui nous ont demandé de créer une catégorie pour les personnes âgées et une autre pour les jeunes, par exemple. Si on créait ainsi différentes catégories, n'y aurait-il pas un danger qu'on en ait trop ou que ça ne fonctionne pas? Je voudrais avoir votre avis là-dessus. Je ne sais pas comment vous percevez cela et comment on pourrait l'appliquer.
[Traduction]
M. Gerald Morin: Je ne crois pas que nous parlions d'établir des régimes distincts pour les Métis, les Premières nations et les Inuits. Tout ce que nous voulons, c'est que le gouvernement fédéral puisse clairement identifier qui sont les Métis. La triste réalité c'est qu'en ce moment, le gouvernement fédéral ne sait pas qui sont les Métis. Le gouvernement fédéral, depuis la Confédération, ne reconnaît pas existence. Comment pouvez-vous nous aider à réaliser nos aspirations au Canada si vous n'admettez pas que nous existons? C'est un fait évident.
Nous appuyons les objectifs d'équité en matière d'emploi pour les peuples autochtones, mais le gouvernement fédéral doit pouvoir clairement identifier les Métis de ce pays. Il n'y a aucune façon de le faire présentement. La tenue d'un recensement et l'établissement, avec notre aide, d'un registre de la nation métisse nous permettraient d'atteindre cet objectif, mais cela prendra probablement encore quelque temps.
Entre-temps, si vous voulez obtenir des renseignements plus exacts ou atteindre les objectifs de la loi, nous vous suggérons de travailler de façon provisoire avec nos organismes membres pour que nous puissions vous dire: «cette personne qui postule un emploi est, de notre point de vue, un Métis; elle répond aux exigences de votre loi ainsi qu'à celles relatives à l'appartenance à la nation métisse».
Il s'agit d'une mesure provisoire en attendant un recensement en bonne et due forme. Nous ne recommandons pas des régimes distincts. Tout ce que nous voulons c'est que vous travailliez avec nous pour que nous puissions clairement identifier la population métisse du Canada.
· (1315)
[Français]
Mme Monique Guay: Pour moi, cela a du sens.
[Traduction]
Mme Joanne Green: Je suis désolée, je n'ai pas entendu votre première question. Tout ce que j'ai compris, c'est que vous vouliez une explication à propos de tous les sous-groupes—les anciens et les jeunes. Je crois que cela se rapporte encore une fois à la question du regroupement. Comment pouvons-nous savoir, en tant que peuple des Premières nations, quel secteur doit être ciblé? Existe-t-il des problèmes en matière d'emploi pour les jeunes? C'est pourquoi nous voulions que les sous-groupes soient inclus dans l'analyse, afin de savoir où se posent les problèmes, où se retrouvent les barrières et pour quelles sont les catégories.
La présidente: Merci.
J'aimerais vous remercier d'avoir témoigné devant nous ce matin, d'avoir été aussi coopératifs et de vous être présentés un peu plus tôt que prévu. Nous avons eu des problèmes avec le premier groupe de témoins—certains d'entre eux n'ont pas pu se présenter. Nous sommes donc très heureux que vous ayez pu modifier votre horaire du temps très chargé afin de venir nous rencontrer.
Si vous voulez nous transmettre des renseignements additionnels sachez que nous allons travailler sur ce dossier pendant encore trois ou quatre semaines. Donc, vous pouvez encore nous transmettre des informations dont nous pourrons tenir compte dans la rédaction des rapports. Si vous transmettez vos renseignements à la greffière, elle veillera à ce que les documents soient traduits et distribués aux membres du comité.
Une fois de plus, au nom de tous les membres du comité, je désire vous remercier madame Green, monsieur Morin et monsieur Chartrand pour un exposé très instructif et pour les excellentes réponses que vous avez fournies aux nombreuses questions qui vous ont été posées.
M. David Chartrand: Nous aimerions vous remercier de nous avoir donné l'occasion de nous exprimer.
La présidente: Tout le plaisir est pour nous.
Maintenant, pour les membres du comité, il nous faut dix membres pour étudier une motion. Je ne crois pas que nous allons y arriver; pour ce faire, il va probablement falloir insister auprès de certains et les traîne jusqu'ici; je ne crois pas que cela vous rende service en ce moment, madame Guay.
En prévision des préoccupations que vous avez soulevées à ce sujet, je vous ai remis la lettre que je suis prête à envoyer à M. Serson, et j'ai aussi demandé qu'une autre lettre soit préparée à l'intention de Mme Robillard à ce sujet. Cette lettre serait semblable à celle adressée à M. Serson, mais j'indiquerais aussi à Mme Robillard que nous ne sommes pas satisfaits de ce qui s'est passé et que nous attendons une réponse. Si le comité est d'accord, je vais donc envoyer ces deux lettres.
Vous remarquerez que je n'ai pas mentionné que le comité m'a demandé de le faire, mais je suis prête à dire que vous insistez pour que j'envoie ces lettres en indiquant que nous attendons une réponse.
[Français]
Mme Monique Guay: Puis-je faire un commentaire, madame la présidente?
Je suis tout à fait d'accord quant à la lettre. Je crois que vous devez écrire à la ministre, car c'est sa responsabilité en tant que ministre. D'ailleurs, à une question que je lui avais posée vendredi, elle m'a confirmé qu'elle abolirait ce centre-là. Donc, il faut absolument la faire réagir avant le 31 mars.
Le but de ma motion est de l'amener ici pour la sensibiliser à l'absolue nécessité de ce centre-là. On ne peut pas le fermer. Madame la présidente, ne venez pas me raconter d'histoires. Une fois qu'il sera fermé, on ne va pas le rouvrir le lendemain. Ce sera fini, et on le sait très bien. Il nous reste une journée de séance, qui sera jeudi, et j'aurais souhaité qu'elle vienne jeudi pour qu'on puisse en discuter.
Si on n'a que la lettre, on va la lui envoyer, mais j'ai bien peur qu'on ait très peu de réaction à ce niveau-là.
· (1320)
[Traduction]
La présidente: Je le répète, je peux remettre cette lettre en main propre en précisant que nous trouvons la question très urgente et que nous demandons une réponse immédiate de sa part. C'est ce que je veux faire et je vais faire circuler la lettre en question. En ce qui concerne l'autre lettre, je voulais seulement m'assurer que la lettre adressée à Mme Caplan explique bien les préoccupations que nous avons entendues à la dernière séance et que le comité... Ces deux lettres seront envoyées, et lorsqu'elles auront été signées et expédiées, des exemplaires en seront remis à tous les membres du comité.
Aussi, le rapport que M. Bennett a préparé au nom du sous-comité sera déposé à la Chambre jeudi. D'accord? Ça va?
Merci. La séance est levée.