INST Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON INDUSTRY, SCIENCE AND TECHNOLOGY
COMITÉ PERMANENT DE L'INDUSTRIE, DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le jeudi 25 octobre 2001
La présidente (Mme Susan Whelan (Essex, Lib.)): Je déclare la séance ouverte.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous étudions le processus d'évaluation par les pairs.
Nous avons le plaisir d'accueillir trois témoins ce matin. M. Michael Piva, qui est membre du comité de direction de l'Association canadienne des professeures et professeurs d'université, est avec nous.
On dirait bien que vous êtes seul, monsieur Piva. C'est vrai?
M. Michael Piva (professeur et membre, Comité de direction, Association canadienne des professeures et professeurs d'université): En effet.
La présidente: D'accord.
Nous avons aussi avec nous le président de l'Association canadienne d'administrateurs de recherche universitaire, M. Wayne Marsh, ainsi que le président et chef de la direction de l'Association des collèges communautaires du Canada, M. Gerald Brown.
Je propose que nous commencions par écouter les déclarations préliminaires de chacun des témoins, après quoi nous leur poserons nos questions à tous les trois. Si une question ne vous est pas adressée, mais que vous voulez la commenter, vous n'avez qu'à me faire signe et je vous donnerai la parole, parce que nous aimons bien les discussions intéressantes.
• 0905
Je vais commencer par vous, monsieur Piva.
M. Michael Piva: Je veux d'abord vous remercier de nous avoir invités. Tom Booth, le président de l'ACPPU, ne pouvait pas être ici aujourd'hui; il m'a donc demandé de venir représenter le comité de direction de l'Association canadienne des professeures et professeurs d'université.
Nous allons discuter aujourd'hui du processus d'évaluation par les pairs pour l'octroi des subventions de recherche. L'ACPPU voit ce processus selon deux grandes perspectives. Il faut à notre avis viser deux objectifs principaux. Premièrement, le processus d'octroi des subventions de recherche doit être juste et équitable; et deuxièmement, les critères universitaires ou savants doivent demeurer prioritaires dans le processus de décision.
Nous tenons évidemment à la liberté universitaire, que nous définissons comme la libre poursuite du savoir et la dissémination de ce savoir. Nous estimons que cette liberté universitaire exige que chacun de nous, dans le milieu universitaire, dans la communauté des chercheurs, prenne cette responsabilité au sérieux et que nous exercions cette liberté de façon responsable. L'évaluation de la recherche est à nos yeux une composante essentielle de ce processus. Nous nous fondons sur l'évaluation par les pairs à toutes les étapes du processus, comme nous l'avons toujours fait, pour nous assurer que la liberté universitaire est effectivement exercée de manière responsable.
Nous avons recours à l'évaluation par les pairs à toutes les étapes, non seulement au début, pour l'examen des demandes de subventions, mais également à la fin—et nous insistons beaucoup là-dessus—quand les résultats de la recherche sont examinés en vue de leur diffusion dans des publications.
Nous sommes convaincus que l'évaluation par les pairs a fait ses preuves depuis longtemps. Nous continuons d'y voir un élément essentiel du processus. En fait, nous n'avons encore jamais trouvé d'autre solution qui fonctionnerait mieux à notre avis.
L'autre objectif, évidemment, est celui de la justice et de l'équité. Sur ce point, la première chose à considérer, c'est que le débat ouvert est essentiel à la recherche, à l'exercice de la liberté universitaire, à la poursuite du savoir. Un engagement actif dans ce processus est indispensable pour progresser.
Cet engagement actif implique que les gens ne sont pas toujours d'accord; il faut donc que le processus d'évaluation par les pairs se déroule à plusieurs niveaux, si vous voulez. Nous ne nous fions pas à l'évaluation d'une seule personne. La variable la plus importante, à cet égard, c'est que les mécanismes mis en place doivent permettre plusieurs évaluations de manière à ce que les demandes de subventions de recherche, par exemple, soient envoyées à plus d'un examinateur. Par la suite, les évaluations de ces examinateurs sont passées en revue par des comités de discipline qui doivent s'assurer qu'il n'y a pas eu de partialité et que le débat ne se fait pas au détriment du demandeur de subvention. Nous croyons qu'il y a des mécanismes en place à cette fin et nous sommes tout à fait prêts à discuter des moyens à prendre pour les améliorer.
Sur la question de l'équité, nous estimons qu'il peut y avoir un financement ciblé dans certains domaines. Il y a à cet égard des préoccupations légitimes dont il faut tenir compte. Quand nous affirmons que les critères universitaires ou savants doivent être prioritaires, nous ne voulons pas dire qu'ils doivent être exclusifs. Nous croyons qu'il y a parfois des problèmes de distribution régionale et qu'il faut les corriger. Il peut aussi y avoir à l'occasion des problèmes de répartition entre les chercheurs des deux sexes, et il faut également les corriger. Dans ce contexte, il est parfaitement raisonnable de viser des objectifs précis grâce à un financement ciblé. Mais, à notre avis, si ce financement ciblé vise à résoudre un problème de distribution régionale, l'évaluation par les pairs demeure essentielle pour la répartition des sommes disponibles, tout comme les critères universitaires.
Nous sommes donc d'avis que le système d'évaluation par les pairs a fait ses preuves, tant pour l'examen et l'évaluation des demandes de subventions que pour la diffusion des résultats de la recherche. Nous appuyons ce système. Nous sommes prêts à chercher des moyens de l'améliorer, mais nous pensons qu'il nous a bien servis jusqu'ici.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Piva.
Nous allons maintenant entendre M. Wayne Marsh, qui est président de l'Association canadienne d'administrateurs de recherche universitaire.
M. Wayne Marsh (président, Association canadienne d'administrateurs de recherche universitaire): Bonjour et merci.
• 0910
Je suis ici comme porte-parole de l'Association canadienne
d'administrateurs de recherche universitaire, l'ACARU, une
organisation regroupant près de 400 administrateurs de recherche
qui s'occupent au jour le jour de tous les aspects de
l'administration de la recherche dans environ 115 universités,
hôpitaux affiliés et collèges, de même que plusieurs grandes
organisations subventionnaires et des ministères fédéraux et
provinciaux. En tant que président de l'ACARU, je suis heureux de
comparaître devant le comité. J'ai seulement quelques brefs
commentaires à vous faire.
Les membres de l'ACARU ont tout intérêt à assurer la santé de la recherche dans les universités et collèges du Canada. Nous appuyons par conséquent sans réserve le rôle que joue votre comité pour aider le Canada à atteindre cet objectif.
Je voudrais pour commencer réitérer le principal message que mon organisation a déjà transmis à votre comité au cours de comparutions précédentes. Je veux parler de l'importance vitale du soutien aux coûts indirects des établissements. Je pense que cette question a une incidence sur celle de l'évaluation par les pairs.
Comme je viens d'une université de taille moyenne, où on retrouve une communauté de chercheurs très active, je constate personnellement le dilemme auquel doivent faire face les universités, qui doivent composer à la fois avec un nombre accru d'inscriptions et avec la complexité croissante des programmes de soutien à la recherche, de la reddition de comptes qui s'y rattache et des exigences réglementaires touchant la recherche sur des sujets humains, des animaux et des matières présentant des risques biologiques. Si le gouvernement fédéral décidait de rembourser aux universités les coûts indirects de la recherche financée par les organismes subventionnaires, ce serait un grand pas en avant.
J'ai remarqué que, dans leur rapport du mois de juin, les membres du comité se disaient préoccupés par le déséquilibre dans la répartition régionale des sommes accordées dans le cadre de certains programmes fédéraux de soutien à la recherche. Je ne crois pas que la solution consiste à exiger que ces sommes soient distribuées sur une base régionale. L'évaluation des projets de recherche par d'autres spécialistes du domaine demeure la méthode la plus appropriée pour déterminer l'intérêt de ces projets. Encore là, je me fais l'écho de ce qu'a dit M. Piva il y a quelques minutes.
Cela dit, cependant, nous croyons qu'il faudrait prendre des mesures pour renforcer la capacité de recherche des petits établissements afin de leur permettre de participer pleinement à nos activités de recherche et d'innovation, et de faire profiter leur milieu et leur région des retombées de ces activités.
Premièrement, il faudrait prendre des mesures pour tenir compte des coûts indirects de la recherche, d'une manière qui reconnaisse que les petits établissements ont à la fois des coûts de base plus élevés que les autres et une moins grande souplesse sur le plan budgétaire.
Deuxièmement, un programme de subventions globales spéciales serait également très utile pour aider à renforcer la capacité de recherche, en fournissant des fonds de démarrage en vue de nouvelles activités de recherche, et pour promouvoir la collaboration avec d'autres partenaires régionaux. Par l'entremise de l'AUCC, les universités ont soumis une proposition en ce sens au comité, et l'ACARU les appuie. Encore une fois, je me fais l'écho des commentaires de M. Piva au sujet de la nécessité de s'assurer que l'évaluation par les pairs joue un rôle dans la répartition de ces fonds.
Enfin, les programmes fédéraux pourraient se montrer plus sensibles aux besoins de renforcement de la capacité de recherche. L'exemption accordée par la FCI, la Fondation canadienne pour l'innovation, au sujet de la contrepartie de 60 p. 100 exigée pour le financement de l'infrastructure dans le cas des subventions versées aux petits établissements, dans le cadre du Programme des chaires de recherche du Canada, est un exemple de ce qui serait possible en ce sens. Il faudrait chercher à profiter de possibilités semblables pour les autres programmes.
Permettez-moi pour finir de faire un bref commentaire sur deux questions émergentes concernant le financement de la recherche universitaire. Premièrement, même si l'ACARU reconnaît que la création de la Fondation canadienne pour l'innovation a grandement contribué à répondre aux besoins critiques des universités, des collèges et des hôpitaux en matière d'infrastructure de recherche, il est important de souligner que les budgets des conseils subventionnaires fédéraux sont soumis à des pressions de plus en plus insistantes dans le sens de l'appui aux chercheurs afin de financer les coûts du personnel hautement qualifié, en plus des coûts opérationnels de la recherche. En même temps, le moment est venu d'après nous de remédier au sous-financement chronique du CRSH, le Conseil de recherches en sciences humaines. Encore une fois, ce conseil joue un rôle particulièrement important auprès de nombreux petits établissements de recherche du pays, et lui et l'AUCC ont décrit ces problèmes en détail dans leurs mémoires.
Madame la présidente, je suis heureux d'avoir pu vous faire ces commentaires et je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
La présidente: Merci beaucoup.
Je laisse maintenant la parole à M. Gerald Brown, de l'Association des collèges communautaires du Canada.
[Français]
M. Gerald Brown (président et chef de la direction, Association des collèges communautaires du Canada): Merci beaucoup, madame la présidente, de nous avoir invités à cette consultation.
[Traduction]
Madame la présidente, merci de nous avoir invités à cette table ronde du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie sur le processus d'évaluation par les pairs.
Les 150 collèges, cégeps et instituts de technologie que représente l'Association des collèges communautaires du Canada, l'ACCC, sont heureux de cette occasion de discuter avec vous et votre comité, premièrement, du rôle crucial de ces collèges et instituts dans la recherche appliquée, les transferts de technologie et le développement de produits; et surtout, deuxièmement, de l'urgente nécessité d'une reconnaissance officielle, tant par le gouvernement fédéral que par les conseils subventionnaires, de l'importance croissante de ces établissements dans les activités d'innovation au Canada. Bien que cette question déborde jusqu'à un certain point le cadre du débat de ce matin, nous profitons de l'occasion pour la porter à votre attention et vous sensibiliser à notre situation.
• 0915
La capacité, pour les collèges et instituts du Canada, d'être
d'importants moteurs d'innovation dans l'économie canadienne
demeure sous-estimée. En tant qu'établissements communautaires, ces
collèges et instituts ont développé un certain savoir-faire dans le
domaine du soutien industriel aux petites et moyennes entreprises
au chapitre des transferts de technologie, du développement des
produits et de la commercialisation.
Un nombre croissant de collèges et d'instituts de tout le Canada ont créé des centres de technologie spécialisés en réponse à un besoin exprimé par les entreprises émergentes de leur localité et de leur région. Au Québec, par exemple, les 23 centres de transferts de technologie ont pour mandat de favoriser le développement économique par la recherche innovatrice et la transmission de leur savoir aux entreprises locales. Ces centres couvrent de nombreux secteurs, des matériaux composites à l'aérospatiale en passant par les textiles et les technologies de l'environnement. En Alberta, le collège Olds administre actuellement 31 projets de recherche pour le compte d'organisations comme Imperial Oil, Parcs Canada et la ville d'Edmonton. Et en Ontario, le Centre for Advanced Visualization du collège Niagara est un chef de file dans l'évolution des techniques de réalité virtuelle.
La décision de rendre les fonds de la Fondation canadienne pour l'innovation accessibles aux collèges est un excellent point de départ vers la reconnaissance et l'augmentation de la capacité de recherche des collèges. Cependant, vous admettrez que les 15 millions de dollars investis dans les collèges depuis deux ans représentent un très faible pourcentage des millions qui sont disponibles. Le fait que les collèges ne soient pas visés par l'annonce relative au Programme des chaires de recherche du Canada a été une profonde déception pour nos établissements parce que nous serons dans l'impossibilité de présenter des demandes dans le cadre de ce programme; or, encore une fois, les 15 millions investis dans les collèges et instituts sont bien minimes en comparaison des 900 millions consacrés aux chaires du millénaire.
Le fait que les collèges et instituts ne puissent pas demander de subventions du CRSNG s'ils ne sont pas associés à une université est un autre point qui nous préoccupe beaucoup. C'est aussi avec une certaine appréhension que nos collèges et instituts ont appris la décision de la Fondation canadienne pour l'innovation de supprimer le Fonds de développement de la recherche dans les collèges et de combiner tous les programmes de subventions aux universités, aux collèges et aux organismes sans but lucratif dans un fonds pour l'innovation. Il est clair qu'aucun des organismes subventionnaires ne se consacre uniquement au financement et à la coordination de la recherche appliquée au niveau collégial.
Dans le processus d'évaluation par les pairs, les collèges et instituts passent souvent en deuxième en raison de la place primordiale qu'y occupent les universités. Ce processus est fondé uniquement sur des critères universitaires, ce qui signifie pour nous que c'est loin d'être une évaluation par des pairs. Il est clair que les collèges et instituts n'ont rien à y gagner.
Le signal que nous a envoyé le gouvernement en prenant ces décisions, volontairement ou non, c'est qu'il continue de marginaliser l'importante contribution des collèges aux besoins des entreprises, de l'industrie et des organisations communautaires en matière d'innovation, de recherche et de transferts de technologie. Par conséquent, les collèges et instituts doivent se débrouiller pour créer eux-mêmes l'infrastructure et les mécanismes de soutien nécessaires à la recherche. Sur le plan pratique, la participation des professeurs de niveau collégial à la recherche appliquée a toujours été et demeure extrêmement difficile, en raison de leur charge d'enseignement déjà lourde.
Nous n'avons toujours pas compris pourquoi la reconnaissance et le financement dont nous bénéficions n'étaient pas proportionnels à l'ampleur, à la profondeur et aux retombées économiques de la recherche appliquée qui se fait dans les collèges. Les établissements collégiaux se demandent aussi pourquoi ils demeurent sous-représentés au sein des organismes fédéraux, ainsi que des comités de sélection et d'évaluation par les pairs des organismes subventionnaires comme le CRSNG et le CRSH.
Pour tirer le meilleur parti possible des efforts consacrés à l'innovation à l'échelle nationale, il est impératif que tous les participants soient reconnus. Les collèges et instituts du Canada doivent être considérés comme une composante essentielle de la communauté des chercheurs du niveau postsecondaire, qui contribue à la prospérité et au bien-être de tous les Canadiens. Si le Canada souhaite vraiment améliorer sa performance en matière d'innovation, il doit ouvrir plus grandes ses portes aux demandes de subventions de recherche venant des collèges communautaires et des instituts.
Pour terminer, nous invitons le comité à prendre note de notre énoncé de position sur la mise en place d'un programme unique en son genre, le Programme d'innovation et d'assistance technique à l'intention des collèges du Canada. Nous évoquons dans ce document de travail la nécessité d'initiatives comme des chaires d'innovation, un fonds pour l'incubation d'entreprises, des réseaux d'excellence à l'innovation au sein des collèges et de l'industrie, et un programme de bourses et de stages pour nos étudiants.
Nous remercions le comité de nous avoir invités à exprimer nos opinions et nos préoccupations, et nous nous ferons un plaisir de répondre à toutes vos questions.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Brown.
Je donne maintenant la parole à Mme Desjarlais. Avez-vous des questions?
Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Je suis très honorée d'être la première.
J'ai une question à poser, et j'apprécierais vos commentaires.
Monsieur Brown, ma question porte sur le nombre d'étudiants; savez-vous comment il se compare entre les collèges et les universités?
M. Gerald Brown: Il est à peu près le même. Nous avons un demi-million d'étudiants à plein temps et un million et demi d'étudiants à temps partiel répartis dans 150 établissements, dans 900 communautés.
Mme Bev Desjarlais: D'accord, et c'est à peu près la même chose dans les universités.
De toute évidence, vous n'êtes pas satisfaits du processus d'octroi des subventions. Dans les notes que nous préparent nos attachés de recherche, une des questions proposées porte sur votre opinion au sujet de l'évaluation par les pairs et de divers autres éléments. Il est assez évident que vous n'êtes pas satisfaits. Et je dois dire que vous avez raison.
Je n'en reviens pas. Je suis relativement nouvelle au Comité de l'industrie, et dans le domaine des sciences, de la recherche et de la technologie. Je n'avais pas vraiment conscience d'un tel écart entre les deux niveaux. Nous devrons certainement faire tout notre possible pour réduire cet écart.
Pour ce qui est du processus lui-même, êtes-vous à l'aise avec le processus d'évaluation par les pairs, à part le fait que les collèges n'y jouent pas un rôle aussi actif que vous le voudriez?
M. Gerald Brown: Oui—et je pense qu'il est important de vous dire également que nous ne sommes pas ici pour nous plaindre de ce que les universités reçoivent. Nous pensons que ce qu'elles ont est important. C'est une contribution importante aux efforts d'innovation au Canada. Nous disons simplement qu'il existe un bassin énorme et inexploité—je veux parler des collèges et instituts—qui pourrait probablement faire beaucoup de choses pour compléter ce qui se fait déjà. J'imagine que nous sommes à l'autre bout de l'échelle de la recherche, puisque nous faisons de la recherche appliquée par opposition à la recherche pure.
En ce qui concerne l'évaluation par les pairs, cependant, comment pouvons-nous soutenir la concurrence quand tous les critères de sélection sont fondés sur les modèles et les normes universitaires? Nos enseignants sont trop occupés à enseigner pour pouvoir publier. Déjà là, il y a un problème. Ils participent à des programmes de recherche, mais ces programmes ne correspondent peut-être pas aux critères et aux normes de qualité sur lesquels se fondent les comités d'évaluation par les pairs, qui s'intéressent surtout aux universités.
L'autre problème, c'est que nos gens ne sont pas là pour participer à l'évaluation par les pairs. Notre travail est évalué par des gens d'un autre secteur de l'éducation, qui passent des jugements sur notre type d'enseignement à partir de leurs critères à eux.
Mme Bev Desjarlais: Si vous aviez des requêtes précises à formuler au sujet des choses qui devraient changer, qu'est-ce que ce serait?
M. Gerald Brown: Il faudrait certainement modifier le processus d'évaluation par les pairs. Il faut que nos gens y participent. Ces gens comprennent comment fonctionnent nos systèmes, nos établissements, et ce qu'ils cherchent à réaliser. Les critères devraient également refléter ce que nous faisons dans nos établissements et le travail que nous accomplissons avec les petites, moyennes et grandes entreprises. C'est le genre de recherche dont ces gens-là ont besoin, et c'est le genre de critères dont nous avons besoin. Et c'est sans compter le fait que ce serait bien si nous avions un programme bien à nous. Si nous avions notre propre programme, avec suffisamment d'argent, nous pourrions le structurer avec nos propres mécanismes d'évaluation par les pairs et tous les autres outils nécessaires.
Mme Bev Desjarlais: Est-ce que les deux autres témoins sont à peu près du même avis?
M. Wayne Marsh: Je ne peux pas commenter la situation des collèges puisque je travaille dans une université. Je ne peux pas faire de commentaires non plus sur la structure des comités puisque ce sont les organismes subventionnaires qui décident.
Je reconnais cependant—tout comme notre organisation—le rôle de plus en plus important des collèges dans le milieu de la recherche au Canada. Le fait que la FCI ait étendu ses critères d'admissibilité aux chercheurs de niveau collégial et que le CRSNG—qui considère peut-être les gens des collèges comme inférieurs d'une certaine façon—les ait rendus partiellement admissibles à ses subventions représente un progrès.
En fait, je voudrais souligner entre parenthèses que, lors de sa dernière assemblée annuelle, notre propre organisation a modifié son règlement administratif afin de permettre aux administrateurs de recherche des collèges de devenir membres à part entière de l'ACARU, parce que nous reconnaissons qu'il se fait de plus en plus de recherche dans les établissements de niveau collégial. Ils pouvaient adhérer à l'association jusque-là, mais seulement en tant que membres associés. Ils peuvent maintenant en être membres à part entière.
Mme Bev Desjarlais: D'accord, merci.
La présidente: Merci, madame Desjarlais.
Monsieur Bagnell.
M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): Merci.
Ma première question s'adresse à Gerald. Je l'ai déjà posée quand les gens des conseils de recherches étaient ici, mais en même temps qu'une foule d'autres questions. Je n'ai pas vraiment eu de réponse, et je me demande si vous pourriez me renseigner.
La moitié de la masse territoriale du Canada se trouve au nord du 60e parallèle. Je sais qu'il n'y a pas d'universités là-bas, mais il y a des collèges. Savez-vous quelle proportion des subventions de recherche accordées par les conseils subventionnaires va à vos membres au nord du 60e parallèle?
M. Gerald Brown: D'abord, vous avez tout à fait raison. Nous avons tout un réseau d'établissements au nord du 60e parallèle, par exemple le collège du Yukon, le collège de l'Arctique, le collège du Nunavut et le collège de l'Atlantique Nord. Je ne connais pas les chiffres exacts, mais je devine que si notre secteur ne reçoit que 15 millions, sur un total de près d'un milliard, il n'y a pas grand-chose qui va au nord du 60e parallèle.
M. Larry Bagnell: Au sujet des incubateurs d'entreprises, le gouvernement fédéral s'est brûlé les doigts il y a bien des années, et il s'est retiré de ce secteur. Je ne suis pas très porté vers ce genre de chose.
Pour ce qui est des différents systèmes, je prends bonne note de votre commentaire sur le fait que vos gens devraient siéger aux conseils. C'est bien. Mais il ne s'agit pas uniquement de recherche. Si nous voulons faire de la recherche sur une nouvelle valve cardiaque ou quelque chose du genre, qu'elle soit faite par un collège communautaire ou par une université, est-ce que le groupe chargé d'analyser le projet ne choisirait pas tout simplement la meilleure proposition, d'où qu'elle vienne?
M. Gerald Brown: Tout dépend des critères sur lesquels le comité se fonderait; or, certains des critères ont à voir avec le genre de faculté en cause et avec ses réalisations passées, tout autant qu'avec la qualité de la proposition. Une bonne partie de la recherche à laquelle nous participons se fait en étroite collaboration avec l'industrie. Elle se fait aux étapes de l'application et de la commercialisation, mais il semble que les conseils subventionnaires s'intéressent le plus souvent davantage à la première étape, celle de la recherche pure.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Bagnell.
Monsieur Drouin.
[Français]
M. Claude Drouin (Beauce, Lib.): Merci, madame la présidente, et merci à nos trois témoins de leur témoignage de ce matin.
Monsieur Piva, dans votre présentation, vous avez parlé des critères académiques qui étaient importants au niveau de la distribution régionale. Ai-je bien compris que vous avez dit que c'était nécessaire ou fonctionnel, comme c'est présentement? Est-il nécessaire d'avoir une distribution plus régionale? J'aimerais mieux saisir.
[Traduction]
M. Michael Piva: Pour le moment, je dirais que c'est nécessaire. De temps en temps, les problèmes peuvent se régler. Ce que je voulais vous faire comprendre, c'est qu'il faut suivre ces subventions sur une certaine période et essayer de déceler les problèmes potentiels. Et si des problèmes surviennent, il faut les régler.
Pour ce qui est des subventions du CRSNG par opposition à celles du CRSH, je ne suis pas en mesure de vous dire s'il y a une certaine répartition régionale. L'ACPPU est plus préoccupée par la distribution régionale dans le cadre du Programme des chaires de recherche du Canada, par exemple. Je n'ai pas apporté les chiffres exacts, mais si vous regardez la proportion de ces chaires qui sont allées à l'Université de Toronto, par exemple, comparativement à celles qui ont été accordées à l'ensemble des provinces Maritimes, vous verrez qu'il y a un problème de distribution régionale qu'il faudra probablement régler.
Je ne dirais pas que le problème est grave pour le moment. Mais il faut surveiller la situation. Il faut examiner les questions comme la répartition selon le sexe, la distribution régionale et la répartition entre les disciplines, pour s'assurer que l'argent du CRSNG ne va pas en totalité aux ingénieurs électriciens alors que les ingénieurs civils n'ont rien, par exemple. Je pense qu'il faut surveiller la situation et que, s'il survient un problème, il faut le régler.
Pourrais-je revenir à votre question au sujet du pourcentage des sommes qui va au nord du 60e parallèle? Les chiffres que j'ai obtenus sur le site Web du CRSNG montrent que le montant total des subventions était de 494 millions de dollars. Les chiffres sont ventilés par province; donc, je présume que le «reste du Canada» désigne les territoires, pour lesquels le total est de 17 millions. Pour ce qui est des IRSC...
M. Larry Bagnell: Excusez-moi; ces 494 millions ont été versés au nord du 60e parallèle?
M. Michael Piva: Non, 494 millions, c'est le total que j'ai trouvé sur le site Web, et le montant indiqué pour le reste du Canada est de 17 millions.
Dans le cas des IRSC, les dix provinces sont énumérées, encore là, et il y a aussi des catégories pour les «autres» et l'«extérieur du Canada». Je présume que les «autres», ce sont les territoires, et le chiffre que j'ai à cet égard est de 4,9 p. 100.
Les chiffres ne sont pas ventilés de cette façon pour le CRSH; ils sont indiqués par région, et il n'y avait rien au sujet du Nord sur le site Web. Il y était question des provinces de l'Atlantique, du Québec, de l'Ontario, des Praires et de la Colombie-Britannique, mais je n'ai pas de chiffres pour le Nord.
[Français]
La présidente: C'est tout?
M. Claude Drouin: Merci, madame la présidente.
Monsieur Marsh, vous avez dit que les coûts indirects étaient très élevés. J'aimerais que vous élaboriez sur cela pour que je puisse comprendre quelle est la dynamique, la problématique qui entraîne des coûts indirects, si possible. Merci.
M. Wayne Marsh: Je pense que le gros problème, c'est le manque d'argent—et laissez-moi vous donner des exemples.
Au cours des quelques dernières années, les programmes de financement de la recherche se sont compliqués énormément. Prenez la Fondation canadienne pour l'innovation. La présentation de demandes à cet organisme nécessite énormément d'efforts, des partenariats et une approche interdisciplinaire. Presque toutes les universités qui présentent de nombreuses demandes à la FCI ont dû, pour pouvoir le faire, augmenter le personnel de leurs services administratifs de recherche. À l'heure actuelle, la seule façon de payer tout cela, c'est de prendre de l'argent ailleurs dans le budget de l'université.
Il y a de plus en plus d'exigences réglementaires. Par exemple, il y a deux ou trois ans, les trois conseils subventionnaires ont adopté une série de principes pour la recherche se rapportant à des sujets humains. Personne ne peut contester le fait qu'ils ont eu raison de le faire, mais cette décision a entraîné des coûts administratifs supplémentaires pour les universités. Encore une fois, elles se sont aperçues qu'il leur fallait embaucher de nouveaux employés. Encore une fois, elles n'avaient pas d'argent pour le faire de sorte qu'elles ont dû le trouver ailleurs dans leur budget.
Le problème est encore plus grave pour les plus petites universités, parce que lorsqu'il faut embaucher quelqu'un, le coût est le même qu'on soit un petit ou un grand établissement. De toute évidence, l'incidence sur le budget est plus grande pour le plus petit établissement.
Il y a des coûts qui sont reliés à l'exploitation et à l'entretien d'un équipement toujours plus complexe de même qu'à la rénovation des locaux pour ce nouvel équipement. Les installations qu'il faut aménager dans les universités sont un autre exemple. La responsabilité comptable pour les bourses s'est accrue. Personne ne peut contester l'obligation de rendre des comptes, mais cela veut souvent dire qu'il faut du personnel financier supplémentaire. Là encore, si on n'a pas les fonds nécessaires pour couvrir ces coûts, il faut les trouver ailleurs dans l'établissement.
C'est à ce genre de choses que je pensais quand j'ai parlé de l'incidence sur les universités du manque de fonds pour les coûts indirects.
[Français]
M. Claude Drouin: Pour les petites universités, je peux comprendre que c'est un peu plus problématique. Pour les autres universités, vous nous parlez beaucoup des inconvénients, mais il y a sûrement des avantages à faire de la recherche. C'est probablement avantageux pour ces universités-là, quand elles embauchent des gens, de le faire. Je comprendrais mal que les universités s'inscrivent pour faire de la recherche si ce n'était pas avantageux.
[Traduction]
M. Wayne Marsh: Oui, je suis d'accord, c'est avantageux—et permettez-moi de reprendre l'exemple de la FCI.
Il est évident que lorsque le programme de la FCI a vu le jour... et je vais être très explicite. Prenons mon université, l'université de Guelph, comme exemple. L'occasion s'offrait à nous d'apporter des améliorations importantes à notre infrastructure de recherche. Les budgets pour les subventions d'équipement du CRSNG et du CRM, qui a été remplacé par les IRSC, étaient loin d'être suffisants pour permettre aux chercheurs universitaires de remplacer l'équipement vieillissant et d'acheter du nouvel équipement.
Manifestement, ce nouveau programme était une excellente occasion pour nous. Cela dit, tout se fait toujours par voie de concours. Il faut présenter une demande et qu'elle soit acceptée. Si nous voulons qu'elle le soit, nous devons faire de notre mieux pour présenter les meilleures propositions possibles. Cela veut dire qu'il faut investir le genre de ressources dont j'ai parlé.
Oui, c'est vrai. Les universités ont tout à gagner. Elles reçoivent de l'argent pour acheter de l'équipement et pour améliorer leurs installations de recherche, mais à un moment donné... et nous avons presque atteint ce point. Nous avons réussi à réunir des fonds qui provenaient de toutes parts afin de pouvoir couvrir les coûts que supposent ces demandes. À vrai dire, nous ne pouvons plus continuer à le faire. À un moment donné, nous allons arriver au point où, même si on nous promet monts et merveilles, nous ne pourrons plus nécessairement nous mettre sur les rangs, parce que nous n'en aurons plus les moyens. Si nous le faisions, ce serait aux dépens de l'effectif des classes qu'il faudrait augmenter, des frais de scolarité qu'il faudrait augmenter, ou peu importe, parce que nous n'avons pas tellement de sources de financement.
La présidente: M. Piva aimerait répondre lui aussi.
M. Michael Piva: Oui, j'aimerais ajouter quelque chose à ce sujet, parce que je pense que c'est avantageux pour les universités. C'est avantageux en raison des revenus supplémentaires qu'elles peuvent aller chercher grâce aux ententes de partenariat et à ce genre de recherche.
Mais je pense qu'il y a quelque chose de plus fondamental ici, du moins du point de vue du corps professoral, et c'est notre vision de la nature de l'institution et notre vision de la nature de notre travail. Nous comprenons que notre travail consiste à offrir une éducation postsecondaire. Nous croyons qu'au niveau de l'éducation postsecondaire, la recherche est essentielle à la qualité de l'enseignement. On ne peut pas offrir un enseignement de qualité à ce niveau si on ne fait pas de recherche. Ce ne sont pas uniquement les revenus ni les avantages qu'on peut tirer directement de la recherche qui comptent. Il faut aussi reconnaître qu'il y a des avantages supplémentaires pour l'établissement à maintenir la qualité de l'enseignement.
Les transferts budgétaires internes peuvent rompre un équilibre qui est très précaire. Nous sommes tout à fait d'accord pour dire que cette quête de fonds pour la recherche exerce des pressions énormes sur les budgets universitaires, parce que c'est une source de revenu de plus en plus importante étant donné que les subventions provinciales n'ont pas cessé de diminuer depuis sept ou huit ans. Mais nous avons peur que cela mène à la bifurcation d'une profession au sein de laquelle certains d'entre nous ont de plus en plus de difficulté, surtout dans les plus petites universités, à avoir accès à la recherche qui est nécessaire pour maintenir la qualité de l'enseignement.
Le prix n'a pas à voir avec la recherche uniquement. Il a à voir avec la nature même de l'institution. À cet égard, l'Association canadienne des professeurs d'université compte des collèges parmi ses membres, et nous sommes tous conscients des problèmes qui se posent pour les collèges. Nos membres des collèges—les collèges qui font partie de l'ACPU se trouvent presque tous en Colombie-Britannique—travaillent fort pour s'assurer qu'ils ont accès à une recherche adéquate et qu'ils peuvent poursuivre une carrière qui leur offre la possibilité de marier la recherche à l'enseignement. Je le répète, c'est parce que nous croyons que la recherche est absolument essentielle si nous voulons maintenir la qualité de l'éducation et pouvoir former et éduquer la prochaine génération. C'est là que se trouve le véritable avantage. C'est là le résultat de l'investissement.
La présidente: Très brièvement, monsieur Drouin.
[Français]
M. Claude Drouin: Merci, madame la présidente.
Je veux juste vous dire quelque chose très rapidement, monsieur Marsh—et je suis d'accord avec M. Piva—sur les avantages ou les éléments qu'on doit rechercher au niveau du financement. Chez nous, en Beauce, dans mon comté, il y a le Centre intégré de mécanique industrielle de la Chaudière, qui est secondaire, collégial et universitaire, et où les trois paliers de gouvernement, c'est-à-dire le fédéral, le provincial et le municipal, travaillent ensemble avec le secteur privé pour aller chercher le financement nécessaire pour couvrir les coûts indirects, dans un premier temps, afin qu'on soit capable de faire de la recherche. Ils donnent des applications importantes, et on a vu un résultat dernièrement: des jeunes ont été choisis au niveau provincial pour l'aspect environnemental, ce qui est très, très important. Je pense qu'il s'agit de travailler ensemble avec les différents paliers et de s'associer le secteur privé. Il ne faut pas avoir peur d'associer le secteur privé pour avoir le financement nécessaire.
Merci, madame la présidente.
[Traduction]
La présidente: Merci.
Avez-vous des commentaires à faire, monsieur Marsh?
M. Wayne Marsh: Je suis tout à fait d'accord. En fait, au cours de la dernière année financière, les fonds que nous avons reçus du secteur privé pour la recherche ont dépassé ce que nous avons reçu du CRSNG, par exemple, ce qui montre que c'est une source très importante de soutien à la recherche pour mon université.
Je suis tout à fait d'accord au sujet des partenariats avec les gouvernements provinciaux également. Comme vous le savez peut-être, le gouvernement de l'Ontario a adopté l'année dernière un programme de soutien des coûts indirects à l'intention des universités, fondé encore une fois sur le financement provincial de la recherche. C'était un important pas en avant. Bien sûr, il y a encore d'énormes sommes qui sont versées aux universités par des organismes fédéraux, mais qui souvent ne sont pas suffisantes pour couvrir les coûts indirects.
La présidente: Monsieur Brown.
[Français]
M. Gerald Brown: Essentiellement, je vais donner mon appui à ce que vous dites parce que c'est vraiment la réalité dans les collèges et les cégeps. C'est ce qu'on fait. Le Cégep Beauce-Appalaches est exactement l'exemple que vous avez avancé. Je pourrais vous donner un paquet d'exemples de collèges. Le succès que nous avons, surtout au niveau de la recherche appliquée, nous l'obtenons toujours en coparticipation avec les entreprises. Les défis auxquels les petites universités font face sont les mêmes que ceux des collèges.
La présidente: Merci, monsieur Drouin.
Monsieur Lastewka.
M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Merci, madame.
Monsieur Brown, j'aimerais que vous me répétiez pourquoi il est difficile pour les collèges d'avoir accès au système de R-D.
M. Gerald Brown: La FCI est le premier exemple qui me vient à l'esprit. La FCI a un énorme budget, mais nous n'avons pu obtenir grosso modo que 15 millions de dollars au cours des deux dernières années. Nous pensons que cela a beaucoup à voir avec le fait que les critères et l'évaluation par les pairs ne sont pas favorables aux types de projets que nous proposons.
Nous ne pouvons pas présenter de demandes au CRSNG en tant que collège. Nous devons le faire en tant que sous-ensemble d'une université.
Ce sont là les deux exemples qui me viennent à l'esprit à brûle-pourpoint. En fait, il y a là une énorme somme d'argent, mais à laquelle nous réussissons très rarement à puiser.
M. Walt Lastewka: J'aimerais pousser un peu plus loin la question. Il arrive souvent qu'il y ait d'un côté les collèges et de l'autre les universités qui, bien des fois, ne veulent même pas se parler. Ne serait-il pas possible d'avoir plus de partenariats?
M. Gerald Brown: Absolument, quoique je ne sois pas tout à fait d'accord avec vous pour dire que les collèges et les universités ne se parlent pas. En fait, pour ce qui est de se parler, l'Ontario est probablement la seule province où un problème se pose. Si vous allez dans les autres provinces, vous verrez que la plupart des collèges et des universités ont conclu des ententes d'articulation des programmes pour faciliter la mobilité des étudiants. En ce qui concerne la recherche, je ne suis pas certain que nous avons eu autant de succès, mais je ne pense pas que ce soit nécessairement parce que nous ne voulons pas nous parler.
M. Walt Lastewka: Pourquoi est-ce que c'est comme cela en Ontario? Je suis d'accord avec vous pour dire que de nombreux arrangements ont été conclus et que de nombreux projets conjoints sont en cours ailleurs qu'en Ontario.
M. Gerald Brown: D'un point de vue national, il y a de quoi s'interroger. Toutefois, je ne pense pas qu'il convienne pour moi ici de montrer qui que ce soit du doigt. Je pense qu'il y a en Ontario deux fondements très distincts sur lesquels le système collégial, les Collèges d'arts appliqués et de technologie, et le système universitaire reposent, et on voudrait bien que rien ne change, surtout au niveau universitaire.
Je dois dire, cependant, que la nouvelle charte que la province a adoptée pour ses collèges et le travail qui se fait actuellement entre les collèges et les universités vont changer bien des choses. Nous commençons à voir un grand nombre d'ententes sur l'articulation des programmes entre les établissements de l'Ontario.
La présidente: Monsieur Marsh, voulez-vous avoir la chance de répondre?
M. Wayne Marsh: Je devrais peut-être juste ajouter quelque chose à ces commentaires.
Notre université et le collège Humber ont récemment signé une entente de partenariat. En ce qui concerne la recherche et en ce qui concerne plus précisément la FCI encore une fois, il y a un projet qui a été lancé par l'université Western Ontario et qui englobait, à part elle, l'université Guelph, l'université McMaster, l'université Wilfrid Laurier, l'université Windsor, deux plus petits établissements, le Collège Fanshawe de London et un autre établissement dont le nom m'échappe pour le moment. Ils ont présenté ensemble une demande de financement d'une initiative en informatique à haute performance à la FCI qui l'a agréée. Ce sont là deux des exemples que je peux vous donner pour mon propre établissement d'enseignement.
M. Walt Lastewka: Mais n'est-ce pas là un obstacle que nous commençons à peine à essayer de surmonter en Ontario? Je sais que certains collèges ont conclu des ententes avec des universités américaines parce qu'ils n'étaient pas arrivés à en conclure avec des universités canadiennes.
M. Gerald Brown: Le fait est qu'un certain nombre de collèges de l'Ontario ont conclu des ententes d'articulation des programmes avec à peu près toutes les universités du Canada, sauf celles de l'Ontario. Je pense que Wayne avait toutefois raison de dire que la façon de voir a beaucoup changé ici.
M. Walt Lastewka: L'autre question que j'ai toujours voulu soulever, c'est la capacité de transférer sur le marché les résultats de la recherche universitaire. Lorsque nous discutons librement avec des pairs examinateurs, il arrive souvent que nous constations une certaine répugnance à pousser la recherche universitaire. Avez-vous des commentaires à faire? Pourquoi les universités canadiennes ne mettent-elles pas les résultats de leur recherche en marché?
M. Wayne Marsh: Je ne peux pas faire de commentaire général, mais je dirais que les universités canadiennes en sont venues à des activités de commercialisation plus tard, disons, que les universités américaines. Mais je dirais que presque toutes les universités canadiennes, quelle que soit leur taille, toutes celles qui font des recherches d'une certaine importance, en commercialisent les résultats elles-mêmes à l'intérieur de leurs murs ou le font collectivement en partenariat avec des universités situées à proximité. Ce n'est cependant pas ce qui détermine l'orientation de la recherche. En fin de compte, la direction dans laquelle la recherche s'oriente dépend des intérêts des membres du corps enseignant. Manifestement, la disponibilité de fonds peut aussi orienter la recherche.
Mais, à Guelph, pour reprendre l'exemple de mon propre établissement, nous sommes très conscients de l'importance de surveiller les possibilités de commercialisation. Nous avons eu pas mal de succès en ce sens au cours des quelques dernières années. Cela rapporte des redevances assez intéressantes. À moins que je me trompe—ce n'est pas mon domaine de spécialisation—cela rapporte entre 1 million et 2 millions de dollars par année à l'université. Cette somme est divisée entre les inventeurs et l'établissement, mais les choses vont bon train.
Il y a aussi eu des fonds disponibles ces dernières années. Le CRSNG a un programme de financement de transfert de technologie dans les universités canadiennes. Et, dans ce cas-là aussi, les plus petits établissements d'enseignement peuvent conclure des ententes de partenariat ensemble ou avec de plus grosses universités.
M. Walt Lastewka: N'est-ce pas là que les universités américaines ont une longueur d'avance sur nous? Il y a eu plus de transferts de recherche à l'extérieur des universités de sorte qu'elles disposent de plus de fonds pour faire d'autres recherches. Nous avons du retard actuellement. Vous voudriez avoir plus d'argent et je me dis que s'il y avait eu plus de transferts de recherche, il y aurait plus d'argent qui entrerait dans les coffres des universités.
M. Wayne Marsh: Mais je pense que la commercialisation donnera des résultats inégaux d'une université à l'autre. Elle sera axée principalement sur les sciences appliquées. De manière générale, les plus petits établissements auront un défi plus grand encore à relever, parce que leurs programmes sont beaucoup plus concentrés en sciences sociales, beaucoup moins dans le domaine médical et moins dans le domaine des sciences naturelles.
Le transfert technologique demeure un art. Il faut décider dans quoi investir, parce que les coûts en cause sont très élevés. Il en coûte entre 10 000 $ et 15 000 $ par pays pour un brevet, par exemple. Il faut donc choisir les possibilités très soigneusement. Là encore, nous nous trouvons dans une impasse. Il y a des choses que nous ne pouvons pas faire si nous n'avons pas les budgets qu'il faut pour les financer, parce qu'il nous faudrait soustraire de l'argent à d'autres activités de l'établissement pour pouvoir les financer.
Mais je suis d'accord pour dire que les universités du Canada ont du retard sur leurs homologues des États-Unis, quoique je pense que nous sommes en train de les rattraper.
M. Gerald Brown: J'aimerais me servir de votre question pour illustrer ce que je crois être la différence fondamentale entre la recherche qui se fait dans les collèges et la recherche universitaire. Je dois tout d'abord m'assurer que le comité sait ce que sont au juste les collègues communautaires. Leur nom le dit bien: ce sont des établissements à caractère communautaire. Parce que ce sont des établissements à caractère communautaire, ils répondent aux besoins sociaux, économiques et, dans bien des cas, culturels de la communauté. Quels que soient les besoins de la communauté, qu'il s'agisse de l'industrie forestière, de l'industrie minière, de l'industrie de la pêche ou du centre-ville de Toronto, nous essayons de trouver des moyens d'y répondre.
Nous nous occupons de formation technique, de perfectionnement des compétences, de recyclage, et j'en passe, de sorte que nous avons une très forte allégeance à l'industrie. J'ai été directeur d'un collège et j'avais un conseiller industriel pour chacun de mes programmes. Il n'y a pas un seul programme pour lequel nous n'avions pas un représentant de l'industrie pour nous aider à élaborer le curriculum afin qu'il soit à la fine pointe, parce que ce que l'industrie veut, c'est un produit clé en main. Elle recherche une main-d'oeuvre qualifiée qu'elle peut mettre à profit de sorte qu'elle a un intérêt en jeu. Cet intérêt va dans le sens de l'intérêt que nous avons comme établissement d'enseignement à offrir un curriculum qui soit à la fine pointe.
• 0950
Mais ces liens se sont développés au fil d'une trentaine
d'années au point où l'industrie se tourne aujourd'hui vers les
collèges et leur pose des questions du genre: «Et si...» C'est
ainsi que les choses se font dans nos collèges. Et nous avions
cette machine ou ce prototype, et si nous pouvions examiner des
moyens d'essayer de l'adapter? C'est le genre de recherche que nous
faisons. Elle est financée par l'industrie qui utilise les
ressources de l'établissement pour la faire. Tout cela débouche sur
un réinvestissement dans la communauté et sur le développement
économique de cette communauté.
Ce que nous essayons de dire au gouvernement fédéral, c'est que cela se fait dans les 150 collèges que nous avons un peu partout au Canada, dans 900 communautés. Si nous pouvions trouver une aide quelconque ici, l'effet de levier pourrait être énorme. Mais c'est une approche tout à fait différente de celle que nous avons toujours adoptée à l'égard de la recherche.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Lastewka.
Monsieur Penson, s'il vous plaît.
M. Charlie Penson (Peace River, Alliance canadienne): J'aimerais poursuivre dans le même ordre d'idées, monsieur Brown, mais tout d'abord permettez-moi de m'excuser de mon retard. Vous avez peut-être déjà répondu à certaines des questions que je vais vous poser.
Le Collège régional de Grande Prairie est dans ma circonscription. Et le problème pour cette école s'explique en partie par le fait qu'elle ne décerne pas de diplômes dans des matières comme le génie. Les gens doivent aller à Edmonton ou à Calgary pour en obtenir un.
J'ai remarqué dans votre mémoire que vous parliez de la nécessité de la recherche appliquée, et vous venez juste de mentionner les besoins communautaires. Je suis d'accord avec vous. Est-ce que la FCI a un parti pris en ce sens que cela fait partie du problème pour ce qui est de la recherche appliquée versus la recherche pure? Est-ce que les pairs examinateurs ne s'aperçoivent pas que c'est important?
M. Gerald Brown: C'est exact. C'est un des points que j'ai fait valoir dans l'introduction. Nous devons essayer de trouver une définition beaucoup plus vaste de la recherche dans notre pays. Si nous élargissions notre approche, nous aurions un programme d'innovation beaucoup plus vaste que celui que nous avons actuellement.
La plupart du temps, le Collège de Grande Prairie conclut des ententes avec le Northern Alberta Institute of Technology à Edmonton ou le Southern Alberta Institute of Technology à Calgary. Mais vous avez tout à fait raison. Quand ce collège présente une demande, il n'a aucune chance, parce qu'il ne satisfait pas aux critères que nous utilisons ici pour examiner les projets de recherche. Mais il pourrait se faire beaucoup de travail à Grande Prairie pour aider au développement économique de cette région.
M. Charlie Penson: Bien sûr, le secteur forestier occupe une place importante dans cette région; donc, la recherche appliquée est très importante. Je sais qu'il s'en fait.
Est-ce qu'il ne serait pas possible que les étudiants en génie qui font d'abord deux années d'études au collège avant de transférer... Est-ce qu'il pourrait y avoir des liens, disons, avec l'Université de l'Alberta et certains des projets auxquels elle travaille et auxquels le collège pourrait participer afin que les étudiants puissent poursuivre jusqu'au bout?
M. Gerald Brown: Je ne peux pas vous le dire en toute certitude, mais l'Alberta a assurément été une des provinces les plus progressistes pour ce qui est des ententes sur l'articulation des programmes conclues entre ses établissements et les universités. J'imagine—et je tiens à le souligner—qu'une bonne partie des recherches entreprises dans des établissements comme le Mount Royal College, Grande Prairie, le NAIT et le SAIT le sont dans le cadre de projets conjoints avec l'Université de l'Alberta ou l'Université de Lethbridge. Par exemple, il y a des efforts en ce sens du côté de l'Université de Lethbridge et du Collège de Lethbridge à Medicine Hat.
M. Charlie Penson: Merci, monsieur Brown.
Monsieur Marsh, au sujet des questions posées par M. Lastewka concernant la commercialisation de la recherche, au cours d'autres séances du comité, on nous a dit qu'une des difficultés découle de l'absence du capital de risque nécessaire pour exploiter ces idées et les commercialiser. Avez-vous quelques suggestions à proposer au comité afin d'améliorer cet état de choses?
M. Wayne Marsh: J'aimerais bien vous proposer des idées, mais je n'en ai pas. Ce n'est pas un secteur dans lequel je travaille directement. J'ai eu connaissance des activités de notre association dans ce domaine, je connais les enjeux principaux, mais je ne suis pas en mesure de vous donner des précisions à ce sujet.
M. Charlie Penson: Mais êtes-vous au courant que cela constitue un problème?
M. Wayne Marsh: Tout à fait. De fait, une compagnie dédoublée que nous avions lancée il y a quelque temps a dû cesser ses activités, car elle était incapable de continuer à trouver du capital de risque. Je soupçonne les attentats du 11 septembre de ne pas être étrangers à cette situation, mais même si l'on fait abstraction de ces événements, il est clair que le manque de capital de risque au Canada a été et demeure un réel problème.
M. Charlie Penson: Je m'adresse maintenant à tout le groupe présent ce matin. Ne pensez-vous pas que les personnes chargées de l'évaluation par les pairs devraient s'intéresser de manière un peu plus positive à la recherche appliquée? En effet, ce type de recherche entraîne la participation de l'industrie qui l'utilise à des fins commerciales.
M. Wayne Marsh: J'aimerais revenir à un commentaire formulé un peu plus tôt auquel je n'ai pas réagi sur le moment, mais, puisque l'occasion se présente, j'aimerais donner mon point de vue.
Je vais encore prendre l'exemple du CRSNG, puisque c'est le conseil que je connais le mieux—et celui avec lequel nous travaillons le plus. Ce conseil a un assez important programme de partenariat entre l'université et l'industrie. De fait, le processus de demande amène le ou les partenaires de l'industrie à financer au moins la moitié du coût du programme de recherche. En conséquence, ce type de recherche sera obligatoirement appliquée, puisque les travaux porteront directement sur les problèmes que rencontre l'industrie. Cependant, cette recherche est toujours soumise à l'examen par les pairs. Le fait qu'une entreprise soit prête à financer la moitié des coûts de la recherche ne garantit pas automatiquement son succès. Le programme est malgré tout soumis à l'évaluation par les pairs. Il faut en effet s'assurer que le programme s'appuie sur une base scientifique sérieuse. Mais évidemment, ce n'est pas nécessairement de la recherche fondamentale...
M. Charlie Penson: Je suis d'accord avec vous dans le cas du CRSNG, mais que pensez-vous du commentaire fait par M. Brown au sujet de la FCI et du montant très limité que les collèges peuvent obtenir, par exemple?
M. Wayne Marsh: Là encore, je ne peux pas me prononcer au nom de la FCI car je ne sais pas pour quelle raison elle a décidé d'une telle répartition ni ce qui l'a incitée à modifier les règles en vue d'éliminer...
M. Charlie Penson: Alors, peut-être que M. Brown peut nous éclairer.
M. Wayne Marsh: En ce qui a trait à l'attitude de la FCI à l'égard de la recherche fondamentale et de la recherche appliquée... Il est certain que la FCI a reçu et soutenu des propositions de recherche très appliquée: sur la sécurité alimentaire; l'atmosphère contrôlée; des aspects directement liés à des problèmes très précis; ou concernant la mise en place de l'infrastructure nécessaire pour appuyer la recherche portant sur des questions très précises. C'est pourquoi, le fait qu'il s'agisse d'applications à assez court terme n'exclut absolument pas que la FCI puisse jouer un rôle. Cependant, je vais encore laisser à Gérald le soin de commenter le processus de planification de la FCI.
M. Gerald Brown: Je viens à la rescousse de Wayne parce que je pense qu'il est injuste de lui demander de répondre au nom de la FCI. En fait, je n'ai pas l'intention de critiquer la FCI. Elle a fait des choses extraordinaires et une trentaine de nos établissements ont obtenu de bons résultats—au grand regret de certaines personnes, je dois le dire, qui étaient persuadées que ces établissements ne donneraient rien de bon. Nous avons obtenu de bons résultats en appliquant les critères de la FCI et le processus d'évaluation par les pairs de la FCI—c'est-à-dire des critères et un processus d'évaluation par les pairs ne relevant pas du réseau collégial. Nous avons obtenu de bons résultats et ce sont ces résultats obtenus à la FCI qui ont commencé à éveiller beaucoup d'organisations au potentiel que présentent les collèges.
La FCI existe et elle répond à un besoin particulier. Elle applique un processus d'évaluation par les pairs et nous n'avons rien à y redire. À mon avis, soit nous devons mettre en place un système différent qui reflète la mission de nos établissements et qui possède un processus d'évaluation par les pairs qui rendent possible l'application d'un tel système, soit nous devons changer les règles. Comme je ne pense pas que nous soyons prêts à changer les règles, nous devons peut-être penser...
M. Charlie Penson: Monsieur Brown, êtes-vous limité par un critère précis? Est-ce à ce critère que vous faites allusion lorsque vous commentez les demandes auprès de la FCI?
M. Gerald Brown: Oui.
M. Charlie Penson: Pensez-vous que vous auriez une meilleure chance si les projets étaient jugés en fonction de leurs mérites?
M. Gerald Brown: Je le pense, mais je ne crois pas que cela arrivera un jour, puisque dans ce pays, il y a une attitude mentale ancrée au sujet de ce qu'est la recherche. Je ne remets pas cette attitude en cause. Je dis tout simplement que si nous optons pour l'innovation ou pour autre chose, nous devons être plus universels.
M. Charlie Penson: J'essaie de comprendre quel est le problème pour vous. Est-ce que le problème est dû aux personnes chargées de l'évaluation par les pairs ou aux critères qu'applique la FCI?
M. Gerald Brown: Les deux.
M. Charlie Penson: Bon.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Penson.
Avant de passer au deuxième tour de questions, j'aimerais revenir à un commentaire formulé un peu plus tôt par M. Brown au sujet de la portée, de l'incidence et des répercussions économiques dont on ne tient pas compte. Je partage tout à fait ce point de vue. Selon moi, la répartition des crédits consacrés à la recherche au Canada ne révèle pas un problème au niveau du processus d'évaluation par les pairs, ni un manque de qualification des personnes qui prennent ces décisions. D'après moi, le problème est que l'on ne tient pas compte des réalités économiques de notre pays.
• 1000
Il y a un secteur très proche du mien, celui de l'automobile,
où les sommes investies ne sont pas énormes. Nous avons un
ministère de l'Agriculture et la recherche agricole bénéficie de
certains crédits. Nous avons un ministère des Pêches et Océans et
des crédits sont consacrés à la recherche dans ce domaine. De son
côté, le secteur automobile est plutôt négligé par le conseil
dispensateur et le processus de la FCI. Et pourtant, sans
l'automobile, notre pays ne pourrait pas survivre. C'est pourquoi,
j'ai du mal à comprendre...
Je ne sais pas exactement si cela tient au fonctionnement du processus d'évaluation par les pairs ou au fait que nous ne disposons pas de fonds réservés et que nous ne tenons pas compte de certaines réalités économiques de notre pays. Si l'industrie automobile n'existait pas au Canada, le débat que nous avons actuellement n'aurait pas lieu, parce qu'on ne disposerait pas de fonds pour la recherche. C'est la réalité.
Je ne sais pas comment nous conservons ce que nous avons tout en développant de nouveaux produits et réalisant de nouvelles découvertes. Être novateur ne signifie pas nécessairement tourner le dos au passé. L'innovation n'exclut pas la recréation du passé qui comportait lui-même sa part de démarches innovatrices. Cette situation m'inquiète vraiment... et le secteur de l'automobile n'est qu'un exemple, car il existe d'autres secteurs qui ont une incidence économique énorme dans notre pays. Il me semble que le processus d'évaluation par les pairs ou le mécanisme actuellement en place ne permet pas à ces secteurs d'obtenir suffisamment de fonds pour la recherche. Je ne sais pas si vous pouvez citer d'autres secteurs, mais c'est une situation qui m'inquiète beaucoup.
Les personnes qui ont présenté des demandes me disent que le processus d'évaluation par les pairs ne permet pas un débat complet et franc. Par exemple, le processus de la FCI ne permet de présenter que cinq ou six personnes je crois, dont un président d'université. Sa présence est obligatoire, même s'il ne s'intéresse pas précisément au secteur de la recherche. Il faut ensuite avoir telle et telle personne... Dans le cas des demandes importantes, il est impossible de réunir tous les intervenants autour de la table. Que vous fassiez une demande de subvention de 5 millions ou de 100 millions de dollars, le nombre de personnes que vous présentez est le même en vertu du processus de la FCI.
Je regrette beaucoup cette méconnaissance de plusieurs secteurs et de leur contribution au moment où l'on décide de la répartition des subventions. Il est possible cependant que l'on en tienne compte. Vous pouvez peut-être nous expliquer pourquoi vous pensez que le processus d'évaluation par les pairs fonctionne si bien, alors que je crains que nous ne perdions certains secteurs économiques faute de réinvestir dans ceux-ci.
M. Michael Piva: La question est difficile, mais je vais commencer par une observation. Je pense que le problème fondamental est qu'il n'y a pas suffisamment de R-D dans notre pays. Le Canada fait pâle figure si l'on compare les montants totaux qu'il consacre à la recherche par rapport à ceux des autres pays du G-7. Ce n'est pas aux universités de combler cette lacune. Certaines recherches relèvent véritablement des universités, mais celles-ci ne sont pas bien équipées pour répondre à certains besoins de recherche. D'autres établissements seraient mieux en mesure de répondre à ces besoins—par exemple, il faut faire la distinction entre la recherche appliquée et la recherche fondamentale, entre le réseau universitaire et le réseau des collèges.
Le problème que vous soulevez tient peut-être au fait que les universités ne sont pas équipées pour répondre à cette question. Je ne suis pas certain que les universités puissent répondre à ce besoin. Ce qui m'inquiète, c'est que l'on réoriente les crédits pour répondre à cet autre besoin. À mon avis, il faudrait augmenter les fonds consacrés à l'ensemble des activités de recherche dont les universités ne représentent qu'une des facettes.
Le système d'évaluation par les pairs accomplit extrêmement bien la mission pour laquelle il a été conçu, c'est-à-dire qu'il s'applique à l'éducation postsecondaire, aux bourses et à la recherche fondamentale. Je crois que la recherche appliquée est tout aussi importante, mais je ne pense pas qu'il y aurait beaucoup de recherche appliquée si la recherche fondamentale n'existait pas. J'ai une approche plus globale, mais je ne pense pas que tous les établissements peuvent assumer tous les rôles.
Le problème tient peut-être au fait qu'il faudrait investir plus de fonds dans la recherche dans certains secteurs de base tels que l'industrie automobile—je suis plutôt d'accord avec vous là-dessus—mais on ne pourra peut-être pas améliorer la situation en modifiant le processus d'évaluation par les pairs du CRSNG, du CRSH ou des IRSC. Il y a peut-être d'autres façons d'aborder le problème. Vous avez parlé des pêches. Il y a un secteur de recherche qui se consacre aux pêches et je pense qu'il est urgent d'effectuer des études dans ce domaine.
À mon avis, le vrai problème n'est pas une question de redistribution des crédits ni de mettre le doigt sur les problèmes du processus qui seraient à l'origine d'autres problèmes. Je pense que le problème est que l'on ne consacre pas suffisamment de fonds à la R-D au Canada.
M. Wayne Marsh: Je suis tout à fait d'accord avec vous. Encore une fois, je ne peux pas vous dire pourquoi la FCI a adopté une telle approche. Cependant, en l'absence de fonds accordés dans un secteur particulier—que ce soit le secteur de l'automobile ou un autre—par la FCI ou tout autre organisme subventionnaire, la première question que je me pose, c'est de savoir combien de propositions sont présentées dans ces secteurs. S'il n'y a pas de propositions, le manque de fonds n'est pas imputable au processus d'évaluation par les pairs. Par contre, si des propositions sont soumises, puis rejetées, alors on peut se poser des questions au sujet du processus d'évaluation par les pairs.
Dans le cas du secteur de l'automobile, si je me souviens bien, je crois qu'il a bénéficié d'un des plus récents réseaux de centres d'excellence. AUTO 21 finance la recherche dans ce secteur. Je ne peux pas en dire plus, tout simplement parce que nous ne faisons pas de recherche dans ce secteur à Guelph.
La présidente: Ne le prenez pas mal, parce que je pense qu'AUTO 21 et les réseaux de centres d'excellence sont de bons programmes, mais le budget dont dispose AUTO 21—environ 20 millions de dollars sur une période cinq ans, je crois—est très minime par rapport à l'importance de l'industrie de l'automobile au pays. Par exemple, je suis très déçue par le fait que l'on ait refusé à deux reprises des subventions pour la recherche à l'Université de Windsor et à DaimlerChrysler, alors que cette entreprise avait annoncé il y a un an en septembre qu'elle allait consacrer 500 millions de dollars supplémentaires à la recherche au Canada.
Nous savons tous que l'industrie de l'automobile traverse une période difficile et que les enjeux sont énormes. Il y a 60 ou 80 usines de construction automobile en trop dans le monde. C'est à peu près le nombre d'usines que nous avons au Canada. Nous pouvons nous orienter dans d'autres secteurs que l'industrie automobile, mais je peux vous dire que si le secteur automobile n'existait pas au Canada, nous ne serions pas actuellement en train de débattre de ce sujet, puisque notre situation économique serait terrible. Nous n'aurions pas les moyens d'augmenter les fonds consacrés à la recherche. Voilà ce qui me préoccupe.
Nous disposons peut-être d'un processus d'évaluation par les pairs qui nous paraît donner de bons résultats, mais des ingénieurs provenant de différentes universités me disent que leurs confrères ne sont pas assez nombreux dans les jurys d'évaluation, que ces jurys sont constitués de scientifiques et que le processus d'évaluation par les pairs fonctionne de cette manière. Cela me préoccupe énormément.
Les Canadiens seraient horrifiés de constater que nous avons rejeté certaines demandes, dont une en particulier qui ne portait pas uniquement sur les aspects techniques, mais qui concernait les enfants. Au Canada, la cause principale de décès et de blessures des enfants n'est pas la maladie—nous consacrons fort justement beaucoup de fonds à la recherche dans ce secteur—mais plutôt les accidents automobiles. La demande portait sur l'installation d'un centre de sécurité et sur des études de comportement. C'était un projet très vaste qui comportait beaucoup de facettes. Je suis très déçue qu'il n'ait pas été retenu car je ne sais pas comment on va pouvoir y revenir. Une société internationale comme DaimlerChrysler revient rarement à la charge lorsqu'elle s'est fait rejeter à plusieurs reprises. Si le gouvernement ne se montre pas intéressé, DaimlerChrysler va tout simplement s'installer ailleurs. De ce point de vue, j'estime que le processus d'évaluation par les pairs ne fonctionne pas bien. Il me paraît tout à fait déconcertant que les membres du jury d'évaluation aient signifié à deux reprises à la même société que ses capitaux n'étaient pas importants pour notre pays et lui aient donné deux fois des réponses différentes—j'ai consulté moi-même les rapports.
Je suppose que le processus d'évaluation par les pairs fonctionne bien du point de vue des candidats chanceux. Pour les autres, je crois qu'il ne fonctionne pas bien. Je ne sais pas exactement où est le juste milieu. Je crois que nous devons réfléchir à la façon d'obtenir, par l'intermédiaire du processus d'évaluation par les pairs, l'excellence dans la recherche—comme c'est le cas dans beaucoup de secteurs au pays. Comment s'assurer que le processus d'évaluation par les pairs permette de répartir les fonds entre tous les secteurs de l'économie du pays? Doit-on affecter des fonds à des fins particulières? Est-ce la seule solution? Doit-on exiger que les fonds que nous accordons soient consacrés à des recherches particulières et demander que la FCI ou les conseils dispensateurs octroient tant de millions de dollars à tel secteur de recherche? Est-ce la seule manière de fonctionner? Voilà ce qui me préoccupe.
M. Gerald Brown: Si vous êtes déçue par le sort réservé à la proposition provenant de l'Université de Windsor et Chrysler, vous pouvez imaginer combien nous sommes déçus lorsque nous devons affronter plusieurs fois les mêmes processus d'évaluation par les pairs.
• 1010
Prenons le cas de Durham College et de sa collaboration avec
General Motors. Prenons les travaux de Sheridan College avec
Oakville. Prenons les travaux du St. Clair College avec Chrysler.
Ils ont tout simplement décidé d'aller de l'avant, de poursuivre
leurs recherches. Ils ont établi leurs propres centres de recherche
et leurs centres d'excellence. Les collèges se sont unis et ont
créé un centre d'excellence au Georgian College à Barrie. C'est
plutôt ironique comme choix, mais au moins, le système est en
place.
J'en arrive à la conclusion au sujet de votre question précédente. Je ne suis pas certain que nous obtiendrons l'appui du processus d'évaluation par les pairs et c'est sans doute pourquoi nous présentons des projets de recherche beaucoup plus ciblés ou que nous mettons sur place notre propre processus d'évaluation par les pairs.
La présidente: J'aimerais ajouter, monsieur Brown, que ce ne sont pas seulement les collèges qui ont de la difficulté à obtenir des subventions de recherche. Selon le personnel des établissements de recherche universitaire—j'ai entendu ce genre de commentaire plusieurs fois—il y a un ordre hiérarchique parmi les différents scientifiques. Il y a un ordre de préséance. Voilà ce que les gens pensent et voilà ce qu'ils me disent.
Cet automne, j'étais en voyage sur la côte Est. On m'a rapporté le cas d'une demande présentée par un collège de médecine vétérinaire au CRSNG. Parmi les membres du jury d'évaluation par les pairs, il n'y avait aucun spécialiste de cette discipline. N'est-ce pas aberrant?
On me dit que je ne suis pas une scientifique et que je ne comprends pas la science. C'est ce que m'ont dit plusieurs ministères et plusieurs scientifiques à Ottawa. Si je ne suis pas une experte dans ce domaine et que je ne peux pas comprendre lorsque je pose des questions qui me paraissent raisonnables, comment une université, un collège ou l'auteur d'une demande peuvent-ils espérer avoir une évaluation équitable et appropriée lorsqu'aucun spécialiste du domaine ne siège au jury?
M. Wayne Marsh: Cela se produit également dans les collèges et toutes les propositions que nous présentons au CRSNG ne sont pas acceptées. Il est important de savoir que le jury lui-même qui présente la recommandation au conseil de la FCI ou à celui du CRSNG en vue d'une subvention particulière, est le point focal du processus, mais il ne réunit pas seulement les personnes impliquées dans le processus. Il va recruter... il est impossible qu'un ensemble de comités de dimensions pratiques puisse regrouper des experts de tous les différents secteurs. Le jury d'évaluation va s'intéresser aux aspects généraux et s'appuyer sur des évaluations externes réalisées par des experts du domaine. Un peu plus tôt, dans sa présentation, je crois que M. Piva a rappelé qu'il était important de disposer d'un nombre suffisant de spécialistes.
Je pense qu'une partie des difficultés que rencontre le processus—je suppose que les conseils dispensateurs en ont parlé la semaine dernière—tient au fait que les chercheurs sont extrêmement sollicités. Il est de plus en plus difficile d'obtenir de bonnes évaluations critiques auprès des experts dans le domaine. Par conséquent, il est clair qu'il est plus difficile de rendre une décision en s'appuyant sur un nombre d'avis restreint.
La présidente: Cela m'amène à ma deuxième question qui concerne le découragement qui peut frapper les auteurs des demandes. On m'a dit que les gens sont déçus et qu'ils n'ont pas l'énergie, les compétences, le temps, ni l'argent nécessaires pour présenter une nouvelle demande. Comme vous l'avez déjà mentionné, l'argent semble jouer un rôle important dans le processus de demande. Comment régler ce problème? Est-ce que nous finançons la rédaction de demandes? Est-ce que nous en refinançons un certain pourcentage? Est-ce que cela encourage les demandeurs? Je n'en suis pas certain.
Dans vos remarques préliminaires, vous avez dit que le processus d'évaluation par les pairs fonctionne bien et pourtant, je sais que certains secteurs ne sont pas financés et on me dit que le découragement est un grave problème. Combien de fois peut-on s'attendre à ce que l'auteur d'une demande recommence le processus? Combien de fois les auteurs de demandes peuvent-ils réécrire leur projet en tenant compte des conseils qu'on leur a donnés? Parfois, ils n'obtiennent aucun commentaire et c'est aussi décourageant.
M. Wayne Marsh: Je suis tout à fait d'accord avec vous. Je pense qu'il est important de disposer d'un nombre suffisant d'évaluateurs et d'obtenir des commentaires valables. Mais, comme l'a signalé Michael, il y a quelques minutes, le problème fondamental, c'est le manque général de financement dans les conseils dispensateurs en particulier. Il peut donc arriver que des demandeurs rédigent d'excellentes propositions à plusieurs reprises et qu'ils n'obtiennent jamais de financement. Tout cela parce que, de l'avis des membres du jury, leur recherche n'est pas valable, qu'elle est classée trop bas dans l'échelle et qu'il n'y a pas suffisamment de fonds pour y investir.
• 1015
Oui, les demandes sont fastidieuses. J'en parle toujours au
personnel enseignant de mon établissement. C'est à cette époque-ci
de l'année que l'on rédige bon nombre des demandes. Écrire une
bonne proposition exige beaucoup de temps et d'énergie et c'est
très décourageant lorsqu'on se heurte plusieurs fois à un refus.
Beaucoup abandonnent.
La présidente: Mais, trouvez-vous que vous recevez suffisamment d'information?
M. Wayne Marsh: Ce n'est jamais pareil. Dans certains cas, les auteurs des demandes reçoivent des commentaires qui leur permettent d'améliorer leur proposition et de faire accepter leur demande une prochaine fois. Dans d'autres cas, les informations ne sont pas aussi utiles qu'elles devraient l'être. Je suis certain que cela reflète en partie les pressions qu'exerce le personnel auprès des organismes subventionnaires pour obtenir des commentaires. La situation est particulièrement difficile lorsqu'une ou deux évaluations de l'extérieur sont très positives, mais que la décision du jury est négative. Il est alors impossible de savoir que faire pour améliorer la proposition.
Je répète que je ne prétends pas que le système d'évaluation par les pairs soit parfait. Je dis tout simplement que c'est le meilleur système que nous ayons.
La présidente: Pour le moment.
Monsieur Piva.
M. Michael Piva: Ce qui m'intéresse, c'est la cause du problème qui touche le processus d'évaluation par les pairs. Vous avez raison de dire qu'il y a beaucoup de frustration. Il est vrai également que le processus ne fournit pas beaucoup de rétroaction pour aider les demandeurs à améliorer leurs demandes. Voilà les problèmes, mais je ne pense pas que le processus d'évaluation par les pairs en soit la cause.
Depuis plusieurs années, lorsque la crise du financement était à son comble, tout au moins dans les universités, les taux d'acceptation de premières demandes de subvention au CRSNG ont chuté considérablement. Lorsque les taux d'acception tombent à 25 p. 100, il y a de graves répercussions négatives sur la carrière de beaucoup de monde. C'est le cas par exemple des jeunes professeurs qui veulent obtenir leur permanence et qui ont besoin de ces subventions pour poursuivre leur carrière et acquérir le statut d'universitaires.
La majorité de ceux qui n'ont pas obtenu de subvention sont très mécontents. Il y a beaucoup de tensions et beaucoup de déceptions au sujet du processus d'évaluation par les pairs et du type de commentaires que reçoivent les demandeurs. Cependant, ce n'est pas le processus d'évaluation par les pairs qui pose problème, c'est le manque de fonds. Il faut être clair là-dessus. Cela étant dit, j'estime que le processus d'évaluation par les pairs fonctionne bien. Je ne dirais pas qu'il est parfait, parce qu'il est cause de certaines frustrations.
Je vais mentionner quelques-uns des moyens que mettent en oeuvre les universités pour tenter de pallier le découragement. Les universités réorientent certaines de leurs ressources internes des services du vice-doyen et du vice-président pour la création de postes d'agents de recherche. Le travail de ces agents de recherche consiste à faciliter le processus de demande, d'aider les demandeurs à améliorer leur proposition. C'est une initiative interne qui n'émane pas des conseils, mais elle est révélatrice des pressions budgétaires dont nous avons déjà parlé. Elle révèle le déplacement des ressources auxquelles se livrent les universités pour tenter d'obtenir des fonds, de présenter de meilleures demandes et d'obtenir de meilleurs résultats de la part du système. Cependant, c'est très lourd pour les budgets des universités et cela pose d'autres problèmes pour les établissements.
Je ne vais pas discuter des problèmes que vous avez soulevés. Ce sont à mon avis des problèmes que les conseils devraient surveiller. Il est très possible que certains secteurs n'obtiennent pas le financement qu'ils méritent. Si les conseils décèlent certains problèmes dans l'octroi des subventions, je pense qu'il faudrait leur proposer une solution, mais je ne crois pas que le processus d'évaluation par les pairs soit à l'origine du problème. Il faut chercher la cause ailleurs et ce n'est pas en changeant le système d'évaluation par les pairs que l'on réglera le problème.
M. Wayne Marsh: Je ne sais pas si c'est pertinent, mais je me demande si vous avez pu lire le récent rapport que la Société royale du Canada a consacré à la FCI. Elle a commenté précisément le processus d'évaluation par les pairs et a confirmé ce que Michael vient de dire: à savoir que c'est encore le meilleur processus et que la FCI a probablement fait plus que tout autre organisme important pour obtenir l'avis d'experts indépendants, de personnes de l'extérieur du pays n'ayant pas d'a priori en raison de liens avec les auteurs d'autres demandes.
• 1020
Aussi, je répète que j'approuve complètement les commentaires
qui viennent d'être faits.
La présidente: Je suis trop bien renseignée sur un cas particulier pour me ranger à votre opinion. En effet, dans le cas auquel je pense, il y avait des experts du Canada et un ministère est sur le point d'entreprendre la même recherche qui devait être financée en partie par le secteur privé. En tant que Canadienne, je trouve cela très déconcertant.
Cependant, je vais en rester là pour le moment et vous préciser tout simplement que le comité va sans doute rencontrer les représentants d'autres pays afin d'examiner les processus d'évaluation par les pairs qu'ils appliquent chez eux pour pouvoir éventuellement améliorer notre façon de procéder; pour examiner la répartition des crédits que nous consacrons à la recherche; et afin de préciser les préoccupations des Canadiens lorsque certains secteurs de l'économie ne sont pas suffisamment financés en matière de recherche, lorsque certains secteurs ou plus petits établissements font face à des défis énormes.
La concurrence est positive, à condition qu'elle soit ouverte à tous. Par contre, c'est très décourageant pour un chercheur de ne pas même pouvoir rédiger une demande parce que son université n'en a pas les moyens. Cela veut dire que le meilleur chercheur ne peut éventuellement même pas participer au processus, parce qu'il ne travaille pas nécessairement dans le plus grand établissement du pays.
Je crois que nous devons également nous pencher sur les préoccupations soulevées par M. Brown. Passons-nous à côté d'un important secteur de recherche au Canada? C'est peut-être la recherche appliquée. Nous savons comment les collèges procèdent avec leurs demandes, et nous savons ce qu'ils font. À mon avis, il faudrait établir des liens plus étroits entre les différentes façons de faire au pays.
Ce domaine me paraît très fascinant et je vous remercie pour la franchise dont vous avez fait preuve aujourd'hui. Nous vous reverrons peut-être avant la fin de nos travaux. Merci beaucoup.
Avant de vous laisser aller, je vais préciser aux membres du comité que nous enverrons aujourd'hui un avis aux médias concernant les travaux que nous entreprendrons la semaine prochaine à compter de mardi matin. Le ministre de l'Industrie sera notre premier témoin mardi matin à 8 h 30.
M. Gerald Brown: Merci.
M. Wayne Marsh: Merci.
La présidente: La séance est levée.