INST Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON INDUSTRY, SCIENCE AND TECHNOLOGY
COMITÉ PERMANENT DE L'INDUSTRIE, DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 30 octobre 2001
La présidente (Mme Susan Whelan (Essex, Lib.)): La séance est ouverte. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous allons étudier les répercussions sur l'économie canadienne des attentats terroristes du 11 septembre 2001.
Nous sommes réunis ici ce matin parce que le comité a invité des intervenants de l'industrie qui nous décriront au cours des quelques prochains jours les circonstances particulières dans lesquelles ils se trouvent et les nouveaux problèmes auxquels ils se heurtent, les solutions qu'ils proposent à court et à long terme et les mesures que les gouvernements fédéral, provinciaux et municipaux devraient prendre, selon eux.
Nous croyons que les participants aideront le comité à définir le cadre de son étude. C'est pourquoi nous sommes heureux d'accueillir ce matin l'honorable Brian Tobin, notre propre ministre de l'Industrie, qui nous donnera certaines informations pour commencer et certains conseils.
Monsieur le ministre.
L'honorable Brian Tobin (ministre de l'Industrie): Merci beaucoup, madame la présidente, et merci à vous tous, mesdames et messieurs les membres du comité, de l'occasion de comparaître devant le Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie qui examinera de très près la situation économique au Canada au cours des jours et des semaines à venir.
Manifestement, au lendemain des événements du 11 septembre, tous les gouvernements du monde, et certainement le gouvernement du Canada, ont dû s'accorder un temps d'arrêt pour réfléchir à leurs priorités à moyen et à long terme, mais surtout à court terme. D'abord et avant tout, tous les gouvernements doivent veiller à la sécurité de nos citoyens et veiller également à la sécurité de nos frontières. Mais cette sécurité ne doit pas être obtenue au détriment de ce qui est important pour les gouvernements partout dans le monde ni porter atteinte à la nature même de notre société ou à nos libertés individuelles.
[Français]
Aujourd'hui, je veux vous parler de la situation économique au Canada et aux États-Unis, et de la façon dont le gouvernement du Canada a répondu aux événements du 11 septembre. Je veux aussi vous parler de ce qui doit être fait pour assurer la vitalité des industries canadiennes.
Avant le 11 septembre, l'économie du Canada avait commencé à ralentir, comme celle des États-Unis. Toutefois, nos données économiques de base étaient solides.
[Traduction]
Les prévisionnistes nous ont annoncé une contraction de l'économie américaine au cours du premier semestre de 2001, et la reprise en 2002—cela semble être le consensus—devrait être lente. Pour le Canada, les prévisions ne sont pas aussi nettes. Comme nous le savons tous, le ministre des Finances présentera sous peu les perspectives du gouvernement.
À la fin de l'été, les marchés boursiers canadiens et américains avaient diminué d'environ un tiers depuis qu'ils avaient atteint leur sommet. Ils ont chuté au lendemain des attentats, mais ont repris depuis la plus grande partie du terrain perdu. Bien sûr, nous avons été témoins hier d'une autre réaction du marché aux événements qui se sont produits.
L'industrie canadienne s'est dite préoccupée par la situation à la frontière entre le Canada et les États-Unis et presque tous les membres du comité ont exprimé, comme vous, madame la présidente, des craintes à propos du bon fonctionnement de notre frontière.
Les préoccupations relatives à la congestion aux postes frontaliers se sont accrues au fil des ans parallèlement au volume du commerce. Le commerce bilatéral est passé de 189 milliards de dollars en 1991 à 563 milliards de dollars en 2000.
C'est l'alerte de niveau un aux États-Unis. Au départ, il y a eu d'importants délais qui ont été réduits étant donné que les Américains ont ajouté de nouvelles ressources. Les délais d'attente aux postes frontaliers sont presque les mêmes qu'avant le 11 septembre, mais il y a des pointes. Les États-Unis consacrent plus de ressources aux vérifications.
• 0840
Le trafic commercial aux États-Unis est presque le même
qu'avant le 11 septembre. Il faut avouer que le trafic passager a
diminué de 35 p. 100. La question est de savoir si les délais
d'attente augmenteront lorsque le volume reviendra à des niveaux
plus habituels. Il ne fait aucun doute qu'une des raisons pour
lesquelles les délais d'attente sont presque normaux, c'est que les
volumes ont baissé de plus d'un tiers.
Il est prioritaire pour le gouvernement de s'assurer que la frontière ne représente pas un obstacle au commerce et à l'investissement, et c'est une question qui intéresse toutes les régions du Canada, parce qu'elles sont toutes touchées. La présidente du comité m'a écrit pour m'exprimer vos préoccupations à propos des problèmes de congestion à la frontière de même qu'à mon collègue, l'honorable Martin Cauchon, qui a communiqué avec vous et avec d'autres membres du comité, parfois tous les jours.
Nous devons profiter du travail que nous faisons avec les États-Unis en vue de l'adoption de nouvelles mesures de sécurité pour trouver de nouveaux moyens de faciliter le commerce. Autrement dit, nous devons reconnaître qu'un problème existait à nos frontières avant le 11 septembre. Le problème se posait déjà, un problème que de nombreux députés avaient soulevé à de nombreuses reprises il y a déjà assez longtemps.
Compte tenu du fait que les échanges bilatéraux entre le Canada et les États-Unis ont augmenté considérablement au cours des dix dernières années et qu'une bonne partie de l'infrastructure et des systèmes en place ont été construits pour une autre époque, une autre ère, les entreprises de toutes les régions du pays, en fait, les travailleurs de toutes les régions du pays, veulent qu'on leur envoie un signal clair que le problème des frontières sera réglé et que la solution retenue réglera non seulement les problèmes qui se posent depuis le 11 septembre en raison de la nécessité d'une sécurité accrue, mais aussi la question plus fondamentale de la libre circulation entre le Canada et les États-Unis.
[Français]
Le gouvernement du Canada a pris les mesures nécessaires pour assurer la circulation des biens à nos frontières. Le premier ministre a rencontré le président Bush pour en discuter. Mon collègue l'honorable John Manley a aussi rencontré Tom Ridge, directeur de la sécurité intérieure.
Avant le 11 septembre, le gouvernement du Canada avait déjà pris des mesures importantes pour créer un régime fiscal propice à la croissance économique et à l'amélioration de notre qualité de vie.
[Traduction]
Les importantes réductions d'impôt annoncées par mon collègue, l'honorable Paul Martin, de même que d'autres mesures financières et d'ajustements annoncées après le 11 septembre, comme celles qui concernent l'infrastructure et le programme d'aide de 160 millions de dollars pour l'industrie du transport aérien, joueront un rôle important dans la relance de l'économie à moyen terme. Il y a aussi eu la prise en charge pendant une durée de 90 jours des coûts d'assurance des compagnies aériennes et des aéroports et, bien sûr, il y a quelques jours, une garantie de prêt de 75 millions de dollars pour Canada 3000. En fait, il se pourrait fort bien que d'autres transporteurs aériens cherchent à obtenir l'aide du gouvernement du Canada; nous l'avons reconnu.
De plus, depuis le 11 septembre, la Banque du Canada a réduit ses taux d'intérêt directeurs de 125 points de base, ce qui porte la réduction totale à 300 points de base depuis le début de l'année. Les intérêts ont ainsi été ramenés à leur niveau le plus bas depuis 1961—en 40 ans. Ces réductions visent à stimuler l'économie en renforçant la confiance des consommateurs et des entreprises. Il ne fait aucun doute que le moment n'a jamais été aussi propice depuis longtemps et qu'il pourrait ne pas l'être avant longtemps pour profiter des taux d'intérêt très favorables au Canada.
Depuis le 11 septembre, le gouvernement a annoncé de nouvelles mesures antiterroristes dont le coût s'élève à 290 millions de dollars, ce qui porte le total de nos nouveaux investissements dans les services de police, la sécurité et le renseignement à 1,8 milliard de dollars depuis le budget 2000.
• 0845
Ces mesures incluent ce qui suit:
[Français]
une loi antiterroriste, le projet de loi C-36; le gel des avoirs terroristes dans les banques canadiennes; des mesures de sécurité aux aéroports et aux points d'entrée.
[Traduction]
En outre, l'ADRC doit accélérer l'échange de renseignements avec le United States Customs Service et, bien sûr, le premier ministre a créé le comité spécial du Cabinet chargé de la sécurité.
[Français]
Les trois industries les plus touchées par les événements du 11 septembre sont l'industrie aérienne, l'industrie aérospatiale et l'industrie du tourisme. Avant le 11 septembre, l'industrie aérienne avait déjà des difficultés.
[Traduction]
L'industrie s'attend à des pertes de revenu à l'échelle du Canada de l'ordre de 20 à 25 p. 100 d'ici la fin de l'année, et à une modeste amélioration seulement en 2002. Des coûts plus élevés seront engagés pour la sécurité dans les aéroports, les assurances et les dépenses aéroportuaires. Comme je l'ai dit, le gouvernement a accordé à Canada 3000 des garanties de prêt de 75 millions de dollars. D'autres transporteurs ayant un solide plan d'entreprise présenteront leur demande au gouvernement qui l'étudiera en fonction de ses mérites.
Des réductions d'emploi sont néanmoins prévues dans l'industrie du transport aérien et elles toucheront chaque région du Canada. Des réductions majeures d'emploi dans l'industrie aérospatiale à l'échelle internationale ont été annoncées et d'autres sont prévues.
[Français]
Boeing et Bombardier ont réduit leur production et
annoncé la mise à pied de 30 000 et de 6t
[Traduction]
Airbus a décidé de réduire sa production, ce qui aura des
répercussions pour certains de ses fournisseurs au Canada. Il
pourrait cependant peut-être y avoir de nouvelles possibilités
d'affaires dans le domaine de la défense, de l'entretien des
aéronefs et des ventes d'aéronefs privés.
Les hôtels, les centres de villégiature, les compagnies
aériennes, les organisateurs de croisières, les entreprises de
location automobile et les entreprises de divertissement ont tous
été durement touchés dans toutes les régions du pays. L'Association
canadienne des agents de voyages prévoit une baisse de 30 à
40 p. 100 des activités de ses membres au cours des trois prochains
mois. L'industrie du tourisme de l'Ontario, la plus importante au
Canada, évalue à près de 100 millions de dollars les conséquences
à la fin de l'année. D'autres régions enregistreront des pertes de
revenu proportionnelles.
On observe des signes de reprise, mais la faiblesse devrait se
prolonger jusqu'en 2002, surtout pour les voyages long-courriers et
les entreprises associées aux transporteurs aériens—par exemple,
les agences de location d'automobiles et les hôtels d'aéroport.
Le mois dernier, peu après les attentats terroristes, j'ai
rencontré mes homologues provinciaux et territoriaux responsables
du tourisme pour parler de l'établissement d'un partenariat plus
efficace afin d'appuyer la croissance continue de l'industrie
touristique canadienne. Nous devons nous rappeler que quelque
550 000 Canadiens travaillent dans cette industrie dont les revenus
ou les ventes s'élèvent à quelque 54 milliards de dollars par
année. C'est un volet important de l'économie du Canada et s'il y
a un canari dans l'économie pour mesurer rapidement et efficacement
l'impact d'un ralentissement, c'est bien le secteur du tourisme.
Après avoir consulté mes collègues de tous les gouvernements
provinciaux, je suis heureux d'annoncer aujourd'hui que le
gouvernement du Canada accordera à la Commission canadienne du
tourisme 20 millions de dollars de plus que prévu pour le marketing
afin d'encourager les Canadiens à voyager au Canada et d'attirer
les Américains, surtout des États limitrophes.
Les ventes d'automobiles sont demeurées stables en raison des
promotions offertes. En fait, j'ai rencontré Maureen Kempston
Darkes hier qui m'a dit que malgré une chute spectaculaire des
ventes qui n'avait rien de surprenant dans les jours qui ont suivi
le 11 septembre, à cause des très généreuses offres de chacun des
fournisseurs et d'une campagne de marketing très agressive et, bien
entendu, d'un mode de financement très attrayant, en fait, le mois
d'octobre a été un mois record pour les ventes dans l'histoire de
l'industrie. Cela m'a surpris, mais ce sont de très bonnes
nouvelles.
• 0850
Il faut féliciter l'industrie automobile d'avoir pris le
taureau par les cornes et d'avoir obtenu des résultats aussi
remarquables en sachant relever les défis et en se montrant à la
hauteur des circonstances.
L'industrie a fabriqué un nombre record de véhicules en 1999
et 2000, soit trois millions. On s'attendait à ce que la production
retombe aux niveaux de 1998. Les prévisions établies après le
11 septembre montrent encore une production de 2,5 millions de
véhicules. Il pourrait s'agir cette année d'une troisième année
record.
Le ralentissement économique mondial a déjà entraîné une
réduction de la demande d'énergie. Le déclin marqué des voyages par
avion depuis le 11 septembre a affaibli la demande. La baisse
prévue de la demande mondiale de pétrole est évaluée à un million
de barils par jour. Par conséquent, les prix du brut ont diminué de
plus de 20 p. 100 depuis le 11 septembre. Les économies qui sont
répercutées sur les consommateurs pourraient avoir l'effet de
relance voulu sur les dépenses des ménages et soutenir les finances
des entreprises.
Les activités militaires accrues et un élargissement du
conflit, si jamais cela se produisait, pourraient entraîner des
hausses spéculatives des prix. Nous pouvons nous attendre à ce que
les marchés pétroliers mondiaux demeurent instables.
À long terme, les États-Unis voudront s'assurer d'avoir accès
à une source sûre d'énergie, d'où une augmentation de leur désir de
s'approvisionner au Canada. Cela pourrait entraîner de nouveaux
investissements dans les sables bitumineux et l'infrastructure du
gazoduc du Nord.
Les événements du 11 septembre ont ébranlé un secteur
manufacturier déjà affaibli au Canada et aux États-Unis. En
septembre, il y avait déjà 44 000 emplois de moins qu'au début de
l'année dans le secteur canadien de la fabrication. Cela n'inclut
pas les retombées des événements du 11 septembre.
Si nous arrivons à rétablir la confiance—et je pense que nous
progressons rapidement dans cette voie pour ce qui est de nos
frontières—la plus grande préoccupation pour la plupart des
fabricants et des détaillants demeurera la mesure dans laquelle les
récents événements peuvent s'aggraver. Cela pourrait prolonger le
ralentissement qui se fait déjà sentir. Il vaut la peine de
mentionner encore une fois que les délais à la frontière sont un
grave sujet de préoccupation pour à peu près toutes les industries
et non pas seulement celle de l'automobile.
Les institutions financières canadiennes risquent moins d'être
directement touchées puisque le BSIF s'est aperçu de la nécessité
de surveiller les prêts aux entreprises des secteurs les plus
vulnérables.
Je suis heureux de pouvoir vous dire que la Banque de
développement du Canada offre aux clients admissibles, surtout ceux
des secteurs des exportations, du gros, du transport et du
tourisme, la possibilité de reporter les remboursements de capital
pendant une période pouvant aller jusqu'à quatre mois. Je dois dire
que le secteur privé a déjà réservé un très bon accueil à
l'initiative qui permet de reporter jusqu'à quatre mois le
versement des paiements de capital.
Dans le secteur des technologies des communications et de
l'information, les attentats ont eu un impact immédiat puisque les
réseaux ont été surchargés. Les attentats ont fait naître des
préoccupations à propos de la sécurité et certains ont demandé
qu'il y ait un contrôle plus strict de l'accès et de l'utilisation
des systèmes de communications. Un avantage de la tragédie pour ce
secteur aura peut-être été la possibilité d'un recours accru aux
technologies de communications, comme la vidéoconférence.
Je pourrais vous donner un bref aperçu de l'impact sur les
régions, si vous me le permettez.
C'est dans les secteurs du transport aérien et du tourisme que
l'impact immédiat au Canada atlantique, comme dans le reste du
Canada, s'est fait sentir le plus fortement. Cependant, le fait que
la haute saison touristique était déjà terminée au Canada
atlantique a un peu atténué cet impact.
[Français]
Le Québec est touché par les mises à pied chez Air Canada,
chez Air Transat et dans l'industrie aérospatiale. Une
baisse de l'activité touristique a aussi lieu.
[Traduction]
En Ontario, les conséquences directes les plus notables se
sont fait sentir dans les secteurs du transport aérien et de
l'aérospatiale, de même que dans celui de l'automobile. Étant donné
sa forte dépendance à l'égard du commerce avec les États-Unis, et
notamment l'importance du secteur de l'automobile, l'Ontario est
très sensible à un ralentissement prolongé aux États-Unis. Cette
dépendance est particulièrement évidente dans les régions du
sud-ouest et du centre-sud de la province.
• 0855
Dans le secteur pétrolier, la baisse récente des prix du
pétrole pourrait avoir des conséquences sur les plans
d'investissement et entraînera sûrement une baisse des recettes du
gouvernement. Nous l'avons déjà constaté. Je pense cependant qu'à
long terme ce secteur profitera vraisemblablement de l'intérêt
accru aux États-Unis de l'accès à une source sûre
d'approvisionnement en énergie en Amérique du Nord. Je crois que
les réalités politiques auront une incidence positive tant dans
l'Ouest du Canada qu'au large de la côte est. Nous espérons que ce
sera le cas également pour la production de gaz naturel dans le
Nord du Canada.
L'intégration Nord-Sud de l'économie en Amérique du Nord s'est
traduite par des flux commerciaux des deux côtés de la frontière
d'une valeur de 1,9 milliard de dollars par jour. L'intensification
rapide du commerce bilatéral a exercé des pressions sur les gens,
les pratiques et l'infrastructure à la frontière. Le Canada et les
États-Unis ont uni leurs efforts pour régler les problèmes qui se
posent. Nous devons maintenant accélérer nos efforts. Étant donné
l'adoption à grande échelle d'un système de stockage et de gestion
au moment adéquat par la plupart des industries, y compris
l'industrie agro-alimentaire, des délais à la frontière peuvent
avoir de graves répercussions, y compris une augmentation des
coûts.
Je le répète, les problèmes à la frontière n'ont pas commencé
le 11 septembre. Les nouvelles mesures de sécurité que ces
tragiques événements nous obligent à prendre exigeront que nous
examinions d'un oeil nouveau toutes les solutions possibles.
[Français]
Le gouvernement est déterminé à trouver des solutions
novatrices qui vont répondre à nos besoins de
sécurité et qui vont encourager le commerce entre le
Canada et les États-Unis.
Les événements du 11 septembre ont eu un impact
direct sur quelques industries, mais toutes seront
touchées par un ralentissement général. La question
des frontières est une des priorités du gouvernement.
Nous devons continuer à soutenir le développement
d'une économie canadienne innovatrice.
[Traduction]
Madame la présidente, en conclusion, les événements du
11 septembre ont fait ressortir les défis que suppose le maintien
de nos relations commerciales avec les États-Unis, qui sont à bien
des égards la pierre angulaire de notre économie.
Nos échanges ont augmenté considérablement au cours de la
dernière décennie par suite de l'Accord de libre-échange, l'ALENA.
En fait, ils ont à peu près triplé dans l'ensemble. Les chiffres
sont impressionnants. Nous avons depuis longtemps déjà de la
difficulté à assurer la libre circulation des marchandises, des
services et des personnes.
Les événements du World Trade Centre n'ont fait qu'aggraver
ces problèmes. Le rôle et le défi du gouvernement consistent à se
pencher sur les questions relatives à la frontière afin de trouver
une solution permanente pour que nous ayons une frontière sûre et
efficace de même qu'un périmètre sûr et efficace.
Merci, madame la présidente.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur le ministre.
Il y a un certain nombre de personnes qui aimeraient vous
poser des questions. Je tiens à rappeler aux membres du comité que
le ministre sera avec nous jusqu'à 9 h 50 environ. Puis, il a une
autre réunion.
Je vais commencer par M. Penson.
M. Charlie Penson (Peace River, Alliance canadienne): Merci,
madame la présidente. Je vous souhaite la bienvenue au comité ce
matin, monsieur le ministre, de même qu'à vos représentants qui
sont ici.
Je suis heureux que le comité ait décidé de tenir des
audiences pour discuter de l'importance des événements du
11 septembre pour l'économie et de leurs répercussions sur les
entreprises canadiennes et les Canadiens ordinaires. Ce sera
l'occasion pour les entreprises et les industries canadiennes de
témoigner devant le comité et de lui faire part de leurs priorités.
À mon avis, toutefois, monsieur le ministre, l'économie était
déjà chancelante lorsque les événements du 11 septembre sont
survenus. Même à ce moment-là, l'industrie nous avait indiqué que
sa priorité était d'essayer de faire en sorte qu'il y ait
renforcement des facteurs économiques fondamentaux, que les taux
d'imposition diminuent et que la position concurrentielle des
entreprises canadiennes s'améliore en attirant l'investissement.
Selon moi, même à ce moment-là, vous étiez tout à fait hors
jeu pour ce qui était de votre approche des priorités. Vous
essayiez de faire valoir l'idée de subventions aux entreprises, de
subventions à PTC et d'un plan d'action pour l'innovation axé sur
les communications à large bande. Vos projets ne soulevaient
vraiment aucun enthousiasme.
• 0900
Je dois dire que vous semblez continuer à avoir besoin
d'importantes sommes gouvernementales pour des projets, comme celui
du plan d'action pour l'innovation et les services à large bande,
que personne ne semble appuyer au Canada à un moment où nous avons
besoin d'argent pour resserrer les contrôles à nos frontières de
manière à apaiser les préoccupations des États-Unis en matière de
sécurité, de même que les nôtres; à un moment où les priorités des
entreprises canadiennes sont de toute évidence d'avoir en place un
nouveau protocole frontalier pour protéger le type d'activité dont
vous avez parlé tout à l'heure.
Les Canadiens ordinaires comprennent très
clairement—peut-être plus clairement que vous—que le fait de ne
pas avoir accès à la frontière américaine pourrait influer sur leur
niveau de vie si nous n'arrivons pas à ériger le périmètre de
sécurité que voudraient avoir les États-Unis. Je vous ai posé des
questions à la Chambre et d'autres vous en ont posé aussi. Il est
difficile d'obtenir une réponse de vous.
Je sais que vous menez aussi d'autres campagnes, mais il me
semble que vous devriez renoncer aux politiques erronées que vous
défendez et mettre plutôt l'épaule à la roue pour assurer l'accès
des Canadiens à l'économie américaine.
Je vous ai demandé aujourd'hui de vous engager envers les
Canadiens à abandonner votre campagne au leadership. Arrêtez de
vous intéresser aux tunnels, à l'infrastructure et aux ponts. Ce
qu'ils veulent, c'est la sécurité à la frontière, l'accès au marché
américain. Suspendez votre campagne et faites votre devoir de
ministre de l'Industrie du Canada.
M. Brian Tobin: Monsieur Penson, une des merveilles de la
télévision—et j'espère que la séance est télévisée—c'est que
lorsque quelqu'un fait le genre de discours superficiel et imbu
d'esprit de parti que vous venez tout juste de faire, les Canadiens
peuvent tout de suite savoir ce qui l'intéresse vraiment. Ce qui
vous intéresse, ce n'est pas l'économie du Canada, ce n'est pas la
sécurité de nos frontières, ce n'est pas l'avenir de ce pays...
M. Charlie Penson: Mais je ne fais pas une campagne au
leadership.
M. Brian Tobin: Je vous ai écouté poliment. C'est très
clair. Votre parti ne recueille que 7 p. 100 des voix selon les
sondages; vous ne pourriez remporter aucune campagne pour le
moment.
Je dois vous dire en toute honnêteté que je ne pense pas que
les Canadiens, à cette étape-ci du jeu, soient très impressionnés
par ce genre d'approche au petit bonheur en espérant que quelque
chose va marcher quelque part. Le fait est que lorsqu'on rejette
l'innovation, comme vous venez de le faire au nom de votre
parti—disons donc que c'est là la position officielle de
l'Alliance—vous devriez peut-être prendre le temps de réfléchir...
M. Charlie Penson: Et les communications à large bande?
M. Brian Tobin: Laissez-moi reprendre tous vos points.
Commençons par le premier. Lorsque vous rejetez l'innovation—c'est
vous qui avez soulevé la question—laissez-moi vous dire ce que
vous rejetez. Vous rejetez toutes les mesures prises par le
gouvernement actuel au cours de la dernière décennie, soit depuis
1993, pour réinvestir dans nos universités, nos centres
d'excellence, les sciences et la technologie de même que la
recherche et le développement; offrir des bourses à de jeunes
hommes et de jeunes femmes de talent; accorder une aide pour des
études de troisième cycle; fournir du travail et un soutien aux
étudiants du niveau de doctorat; appuyer l'élaboration et
l'application de nouvelles technologies et de nouvelles
connaissances qui sont commercialisées pour enrichir le Canada.
Vous avez rejeté PTC, mais laissez-moi vous donner en exemple
un prêt qui a été fait par PTC—et soit dit en passant, c'était
avant mon temps. Ce programme existait déjà depuis longtemps à mon
arrivée. J'aimerais bien m'en attribuer le mérite, mais je ne le
peux pas. J'ai hérité de tous ces programmes que vous avez rejetés
de mon prédécesseur, John Manley, et des gouvernements qui ont été
au pouvoir depuis 1993—chacun d'entre eux. Je n'ai inventé aucun
nouveau programme, monsieur Penson, pas un seul.
Prenons PTC. PTC a accordé un prêt remboursable à une petite
entreprise qui avait une idée au sujet d'un appareil du nom de
BlackBerry. C'est une des innovations qui a connu le plus de
succès, une innovation qui a fait le tour du monde, rapporté des
sommes énormes au Canada et créé des milliers de nouveaux emplois
ici.
Vous venez tout juste de me dire que si vous aviez à prendre
une décision au sujet de ce petit investissement dans un prêt
remboursable—parce qu'il n'y a pas de subvention...
M. Charlie Penson: Une contribution remboursable.
M. Brian Tobin: ...lorsque cette entreprise avait besoin
d'une mise de fonds initiale pour prendre de l'expansion, répandre
son idée partout dans le monde et remporter un succès mondial,
vous, Charlie Penson, auriez dit non.
Eh bien, lassez-moi vous dire...
M. Charlie Penson: Laissez-moi dire ce que j'ai à dire...
M. Brian Tobin: ...que la politique gouvernementale
nécessite un petit peu plus d'imagination, un petit plus
d'équilibre.
Vous avez soulevé une deuxième question qui...
M. Charlie Penson: Je suis capable de dire ce que j'ai à dire.
Je veux savoir...
La présidente: Vous devrez attendre, monsieur Penson, parce
que vous avez épuisé votre temps.
M. Brian Tobin: Vous avez dit ce que vous aviez à dire et
je ne vous ai pas interrompu. Si vous trouvez la situation
intenable, vous n'avez qu'à vous en aller. Vous devriez partir.
• 0905
M. Charlie Penson: Allez-y.
M. Brian Tobin: ...que les Canadiens des régions rurales
et du Nord n'ont pas besoin d'ordinateurs...
Une voix: Quand même! Il vient du Nord du Canada.
M. Brian Tobin: ...qu'ils n'ont pas besoin d'un accès
efficace à Internet. Vous venez de dire que c'est un gaspillage de
temps et d'argent. Nous avons eu un groupe de travail du secteur
privé et tous les gouvernements provinciaux, y compris le
gouvernement de votre province...
M. Charlie Penson: Laissez-moi répondre.
M. Brian Tobin: Non, c'est vous qui avez posé la question.
M. Charlie Penson: Je représente...
La présidente: Un peu de silence, s'il vous plaît.
M. Brian Tobin: Vous m'avez posé des questions, je vais y
répondre.
M. Charlie Penson: Je représente une circonscription rurale...
La présidente: Silence, s'il vous plaît.
M. Brian Tobin: Monsieur Penson, je ne vous ai pas
interrompu.
La présidente: Monsieur Penson, vous aviez quatre minutes pour
poser vos questions...
M. Charlie Penson: Oui, je le sais.
La présidente: ...le ministre avait le droit d'y répondre et
vous n'avez pas arrêté de l'interrompre.
M. Charlie Penson: Mais je n'ai pas pris mes quatre minutes et
j'ai une autre question.
La présidente: Vous avez eu quatre minutes.
M. Charlie Penson: Non, madame la présidente.
La présidente: Je suis désolée, nous allons continuer.
M. Brian Tobin: Monsieur Penson...
M. Charlie Penson: Monsieur le ministre, je représente une
circonscription rurale du Nord...
M. Brian Tobin: ...je ne vous ai pas interrompu.
M. Charlie Penson: Leur priorité, aujourd'hui, c'est d'essayer
d'être assurés d'un accès à la frontière américaine.
M. Brian Tobin: Votre circonscription ne veut pas être sur
Internet. J'ai compris.
M. Charlie Penson: Nous avons Internet.
M. Brian Tobin: Nous allons vous mettre plus loin sur la
liste.
M. Charlie Penson: Nous ne sommes plus à l'ère des chevaux et
du télégraphe, monsieur le ministre.
La présidente: Silence, s'il vous plaît. Nous allons passer au
prochain questionneur.
M. Brian Tobin: Ne craignez rien, vous ne serez pas les
premiers.
La présidente: Monsieur St. Denis, s'il vous plaît.
M. Charlie Penson: Ça fait des années que nous l'avons. Vous
êtes tellement en retard et vous pensez que vous êtes en avance.
La présidente: Fermez le micro de M. Penson.
M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.): Merci, madame
la présidente.
Merci d'être ici, monsieur le ministre. Je vais essayer de
vous faire oublier les regrettables questions d'introduction de mon
collègue d'en face.
Vous avez parlé du BlackBerry. En fait, on a dit aux nouvelles
qu'au Point zéro à New York, c'était le seul moyen de communication
possible pour secourir les travailleurs lorsqu'un certain nombre de
tours pour les téléphones cellulaires ont été mises hors service.
Je pense donc que vos commentaires sur l'importance non seulement
de PTC, mais aussi de la contribution du gouvernement fédéral au
développement de l'industrie au Canada sont très pertinents.
M. Brian Tobin: Si vous me le permettez, j'ajouterai très
brièvement que tous les membres du Congrès américain ont maintenant
leur BlackBerry. M. Penson aura le sien un de ces jours. Je vais
essayer de lui en trouver un pour Noël.
M. Brent St. Denis: Dans quelques moments, nous pourrons
examiner la situation dans laquelle nous nous trouvons
actuellement—et nous devrions le faire—à court et à long terme.
À court terme, j'applaudis certes aux efforts déployés par notre
premier ministre et le Cabinet dans des circonstances très
difficiles. Mais nous devrons, en temps et lieu, faire face à ce
qui va arriver à long terme.
J'aimerais vous donner l'occasion, si vous le voulez, de
parler de l'initiative des communications à large bande dont vous
vous êtes fait le champion, je pense. Je viens d'une
circonscription rurale du nord de l'Ontario. Je suis d'accord avec
vous pour dire que les régions rurales et du nord du Canada
méritent d'entrer dans le XXIe siècle. Je me demandais donc si vous
pouviez nous dire quelques mots au sujet de ce qui nous attend à
long terme. Vous pourriez aussi nous faire des commentaires sur la
frontière, à long terme.
Pour terminer, je pense que l'annonce—et je vois que
M. Watson est là derrière—que la CCT recevra 20 millions de
dollars de plus aidera des circonscriptions comme ma propre
circonscription rurale du nord de l'Ontario.
Merci, madame la présidente.
M. Brian Tobin: C'est avec plaisir que je vous ferai part
de mes commentaires sur les services à large bande. La réalité,
c'est que dans le monde où nous vivons aujourd'hui, ceux qui vivent
dans une collectivité qui n'a pas accès à des services Internet
haute vitesse, sont très désavantagés en termes de soins de santé,
de télémédecine, d'accès à l'éducation et de téléapprentissage. Il
leur est aussi très difficile d'attirer des investissements dans
leur collectivité pour profiter de l'économie axée sur le savoir.
Les collectivités autochtones sont celles qui sont les moins
bien desservies du pays. Ce sont les collectivités que nous
devrions brancher en premier pour leur offrir l'occasion d'être
reliées au reste du monde, d'avoir accès à toute la technologie et
à toutes les possibilités offertes par Internet. Matthew Coon Come
a très bien su résumer la situation quand il a parlé des Canadiens
autochtones: «Nous avons manqué la révolution industrielle; nous
n'avons pas l'intention de manquer cette révolution-là.»
Pour ce qui est des coûts de la prestation de services à large
bande, je tiens à les replacer dans leur contexte, parce que les
gens ont tendance à faire des propositions bidons, comme M. Penson
vient juste de le faire, pour ensuite les démolir. Nous dépensons
au Canada plus de 10 milliards de dollars sous la forme
d'assurance-chômage, chaque année, pour venir en aide aux gens où
ils vivent. Nous nous servons du régime d'assurance-chômage pour
leur venir en aide parce qu'ils n'ont pas pu travailler toute
l'année ou qu'ils ont eu de la difficulté à se trouver du travail
durant une période donnée.
• 0910
Lorsque le réseau sera en place, il reliera tous les Canadiens
à leurs gouvernements, à leurs établissements d'enseignement et à
leurs établissements médicaux et leur offrira toutes sortes de
possibilités pour ce qui est du commerce électronique, du
développement économique, des loisirs et de l'éducation. Par
comparaison au budget total du gouvernement ou à notre budget
social total, ce n'est pas un gros investissement, mais les
conséquences seront énormes pour les collectivités qui auront été
branchées.
Je tiens à vous rappeler que cette mesure a été recommandée
par un groupe de travail du secteur privé. Ce n'est pas une
invention du gouvernement. Ce n'est pas une chose que j'ai
imaginée, monsieur Penson. Cette initiative faisait partie des
plans du gouvernement du Canada à une époque où j'étais encore
premier ministre provincial. Mais c'est une politique que je suis
heureux de promouvoir, parce que je pense qu'il s'agit d'une
politique gouvernementale qui contribuera au développement du pays.
Nous avons décidé à une époque d'installer des voies ferrées
dans toutes les régions du pays—même dans des régions où selon
certains nous n'avions aucune raison économique de le faire. Mais
en installant ces voies ferrées d'Ouest en Est, nous avons bâti un
pays. Pourquoi se contenter de moins à une époque où la technologie
définit notre capacité de développement d'un pays? Vous le pourriez
peut-être, mais pas ce gouvernement-ci.
La présidente: Merci beaucoup.
M. Brian Tobin: On peut faire deux choses en même temps,
monsieur Penson. C'est possible. Peut-être que ce n'est pas une
chose dont vous avez l'habitude de l'autre côté de la Chambre, mais
nous arrivons de ce côté-ci à accomplir plusieurs tâches en même
temps.
Merci, madame la présidente.
La présidente: J'aimerais bien que nous arrivions à limiter
les questions et les réponses à ceux qui sont censés en poser et à
ceux qui sont censés y répondre à mesure que nous avançons.
M. Brian Tobin: M. Penson m'a posé une question et je ne
suis pas habitué...
La présidente: Je comprends, monsieur le ministre, mais
j'aimerais bien que...
M. Brian Tobin: Vous êtes dure avec moi.
La présidente: ...nous concentrions tous notre attention sur
les questions à l'étude aujourd'hui.
[Français]
Monsieur Bergeron, s'il vous plaît.
M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ):
Merci, madame la présidente.
J'accueille avec beaucoup de plaisir cette première
occasion que nous avons d'échanger formellement
depuis ma nomination comme porte-parole du Bloc
québécois en matière d'industrie, de sciences et
de technologie. Je dois vous dire que je suis un petit
nouveau à ce comité, que c'est la première fois,
depuis que j'y participe, que la séance du comité
est télévisée, et que
c'est la première fois que je vois
le comité aussi animé.
J'espère qu'il n'y a pas de lien entre le fait
que le comité est télévisé et le fait qu'il est
animé.
Monsieur le ministre, je pense qu'il n'y
a absolument aucun problème à ce qu'un gouvernement,
dans cette nouvelle économie, veuille favoriser
l'innovation et le virage technologique, surtout pour
un pays qui faisait figure de parent pauvre en matière
de recherche et développement parmi les pays du G-7
depuis nombre d'années. En ce sens-là, j'appuie
entièrement les initiatives du gouvernement qui visent
à faire prendre au Canada le virage technologique.
Cela dit, puisque vous avez fait
allusion tout à l'heure au problème énergétique,
je m'étonne que ce gouvernement, qui se targue de
vouloir faire de l'innovation technologique sa
priorité, ait décidé de mettre
fin à la recherche sur la fusion nucléaire au Canada,
décision qui a occasionné la fermeture du plus
important projet de recherche et développement en
matière énergétique au Québec, le tokamak
de Varennes. Je pense qu'il y a une
certaine incohérence entre le discours
du gouvernement et ses actes concrets
sur le terrain.
Cela dit, puisqu'on parle d'énergie, monsieur le
ministre, vous avez fait une présentation
fort éloquente quant au fait qu'il y avait déjà des
signes évidents de ralentissement économique avant les
événements du 11 septembre dernier. Je pense que vous
avez bien mis en lumière également le fait que les
événements du 11 septembre dernier n'ont fait
qu'accentuer ces signes du
ralentissement économique.
Si on regarde objectivement le moment où les premiers
signes de ce ralentissement ont commencé à se faire
sentir au niveau des indicateurs, on constate
qu'étrangement, cela a fait suite, en termes de semaines
et de mois, à cette espèce de flambée des prix de l'essence.
Y a-t-il un lien direct ou indirect? Je
pense qu'il y a certainement un lien direct.
• 0915
Monsieur le ministre, puisque
vous êtes nouveau titulaire de la fonction par rapport
à votre prédécesseur, qui avait institué cette étude du
Conference Board, j'aimerais vous demander
si le gouvernement
entend faire quelque chose
de plus proactif pour
rendre l'énergie fossile
abordable pour les consommateurs et consommatrices canadiens,
sachant pertinemment que toute augmentation des prix de
l'essence pour les transporteurs a des conséquences
considérables, car les transporteurs vont imputer aux
producteurs cette augmentation, et les producteurs vont
nécessairement imputer aux consommateurs l'augmentation
qui leur a été transmise, ce qui contribue à
l'augmentation de l'inflation et, éventuellement, à un
ralentissement économique.
M. Brian Tobin: Merci beaucoup de
votre commentaire ou de votre déclaration sur le
programme d'innovation du Canada. C'est une
déclaration positive.
[Traduction]
Madame la présidente, pour ce qui est des prix de l'énergie,
je tiens tout d'abord à remercier mon collègue de ses commentaires
et je dois admettre que je suis d'accord avec lui pour dire que le
prix de l'essence ou de l'énergie a une incidence sur les choix des
consommateurs. Cela ne fait aucun doute.
Je pense que la question plus vaste est de savoir si je crois
moi-même ou si le gouvernement croit qu'il faudrait à ce moment-ci
créer une espèce d'organisme de réglementation qui établirait les
prix au Canada.
Vous avez fait allusion au rapport du Conference Board. Il est
arrivé à la conclusion qu'il ne pouvait pas recommander ce genre
d'approche.
Il y a eu de nombreuses études qui ont été faites, comme vous
le savez, un peu partout au Canada dont la plupart—à peu près
toutes sauf peut-être une ou deux—sont arrivées à la même
conclusion. En fait, à ma connaissance, il y a aujourd'hui en place
un organisme à l'Île-du-Prince-Édouard et il existe à Terre-Neuve
un mécanisme d'examen. Je ne pense pas qu'à part cela il
existe—mais il se pourrait que je me trompe—des organismes
ailleurs au Canada qui établissent les prix.
Je remarque, par exemple, qu'il n'y a pas au Québec
d'organisme qui fixe les prix arbitrairement pour l'essence, pour
le chauffage des maisons ni en fait pour l'hydro-électricité. Je ne
pense pas non plus que le gouvernement du Québec accepterait que
les prix soient fixés par le marché.
Je pense surtout aux énormes exportations d'énergie hydro-électrique du
Québec aux États-Unis. Je ne pense pas que le Québec
serait prêt à défendre la notion que les États-Unis devraient
maintenant établir—comme vous le proposez ici—des organismes et
fixer arbitrairement—pas en fonction du marché, mais dans leur
propre intérêt ou selon ce qui serait politiquement populaire à ce
moment-là—les prix pour les ventes d'hydro-électricité du Québec
aux États américains.
Laissez-moi vous dire ceci. Je comprends votre point de vue.
Mais si vous regardez ce qui s'est passé dernièrement, nous avons
été témoins d'une diminution importante des prix du brut. Nous
avons été témoins d'une réduction correspondante importante des
prix du pétrole et des autres combustibles.
Je pense que nous en sommes tous très heureux. Nous
reconnaissons tous—comme vous l'avez dit, que c'est bon pour le
consommateur. Pour répondre à votre question, je dirais que je
n'envisage pas pour le moment—et je ne pense pas que le ministre
des Ressources naturelles envisage lui non plus—la création d'un
organisme fédéral qui établirait les prix pour l'essence ou
d'autres combustibles ou encore les prix pour l'hydro-électricité.
La présidente: Merci.
[Français]
M. Stéphane Bergeron: Il n'était pas
nécessairement question...
[Traduction]
La présidente: Non, je suis désolée, monsieur Bergeron, nous
devons continuer. Nous avons très peu de temps pour les questions
et les réponses ce matin. Si chacun prend trois minutes et demie ou
quatre minutes, ça me va, mais je n'aurai assez de temps que pour
une seule réponse avant de passer à quelqu'un d'autre.
Permettez-moi de rappeler aux députés pourquoi nous sommes ici
aujourd'hui.
Monsieur Bagnell.
M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): Merci.
Monsieur le ministre, je tiens simplement à vous remercier
d'avoir dit que la construction du gazoduc pourrait être accélérée
dans les circonstances actuelles, parce que ce serait un immense
projet pour nous—le plus gros projet dans l'histoire du Nord.
Vingt milliards de dollars nous donneraient un gros coup de pouce.
• 0920
Toutes sortes d'activités sont en cours dans divers comités et
réunions et c'est merveilleux, parce que c'est une question
tellement importante à ce moment-ci. Peut-être la plus importante.
Tout le monde a fait et continue à faire un magnifique travail.
La dernière chose que je voulais dire—et vous pourrez
commenter tout ce que je viens de dire—c'est que je regardais la
télé hier soir et que c'était embarrassant. Je pensais être revenu
à l'âge des ténèbres lorsque quelqu'un parlait encore une fois des
services à large bande. C'est à croire que les ordinateurs ne sont
pas nécessaires de nos jours. On abandonne les régions rurales; on
abandonne le Nord. Nous vous savons vraiment gré de vous être fait
le défenseur du Nord. Les régions rurales du Canada se trouvent
elles aussi souvent laissées pour compte. Le Nord se sent souvent
privé de tout. Je sais que d'autres partis vous appuieront.
De toute évidence, l'ordinateur fait partie de l'économie
d'aujourd'hui. Nous apprécions vraiment votre aide. Continuez à
défendre le Canada rural et le Nord.
Merci.
M. Brian Tobin: Madame la présidente, cela me donne
l'occasion de faire observer—et je pense que c'est important—que
d'autres gouvernements, et pas seulement le gouvernement fédéral,
s'intéressent aux services à large bande et à haute vitesse.
J'ai rencontré le premier ministre Lord du Nouveau-Brunswick
il y a quelques jours. Il m'a dit que c'était une des plus grandes
priorités de son gouvernement. Il veut savoir quand la politique va
être mise de l'avant. Il veut que nous travaillions en partenariat
pour offrir des services haute vitesse à large bande au
Nouveau-Brunswick.
Le Yukon—la circonscription de mon ami, M. Bagnell—a été
l'un des gouvernements les plus progressistes au Canada et l'un des
plus visionnaires puisqu'il a dépensé son argent pour pouvoir
offrir des services haute vitesse à large bande aux résidents du
Nord. Il voudrait lui aussi devenir partenaire du gouvernement
national.
Le gouvernement de l'Alberta—qui est un gouvernement que vous
connaissez peut-être, monsieur Penson—a lui aussi inscrit les
services haute vitesse à large bande sur sa liste de priorité et
dépense de l'argent pour atteindre les objectifs qu'il s'est fixés.
Le nouveau gouvernement de la Colombie-Britannique a inscrit
les services haute vitesse à large bande parmi ses objectifs, il
est prêt à débourser et il voudrait conclure un partenariat avec le
gouvernement national.
Si vous parcourez le pays, vous verrez que les gouvernements
de toutes les régions, peu importe leur allégeance politique, sont
arrivés à la conclusion qu'il est essentiel que le Canada soit en
ligne, que tous les citoyens, peu importe où ils vivent, aient
accès à des services haute vitesse. J'ai de la difficulté à
comprendre pourquoi...
Soit dit en passant, nous avons tenu il n'y a pas tellement
longtemps à Québec une réunion des ministres des Sciences et de la
Technologie que j'ai coprésidée avec Pauline Marois, la
vice-première ministre du Québec. Nous avons émis une déclaration
unanime à cette réunion de tous les gouvernements du Canada, de
chaque province, peu importe l'allégeance politique—l'accès à des
services Internet haute vitesse est une des caractéristiques qui
définit une économie concurrentielle moderne et il fait partie de
l'infrastructure nécessaire.
Nous devons être plus réfléchis, avoir des vues plus mesurées
et nous montrer franchement plus intelligents dans nos commentaires
avant d'émettre des propositions bidons et de les démolir sans
penser à l'avenir du Canada. Notre travail ne s'arrête pas au
trimestre ou à l'an prochain; nous construisons un pays pour la
prochaine génération. Les étapes que nous franchissons maintenant
déterminent dans quelle mesure nous serons prospères et
concurrentiels plus tard.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Bagnell.
Madame Desjarlais, s'il vous plaît.
Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Nous avons les sports
sanguinaires de ce côté-ci et un love-in de l'autre. C'est une
matinée plutôt intéressante.
M. Brian Tobin: Je vais envoyer une carte de remerciements
à M. Penson avant que tout cela soit fini.
Mme Bev Desjarlais: Oui, je me suis bien amusée.
Revenons à la sécurité à la frontière. Il y en a qui pensent
que nous devrions avoir une grande frontière autour du Canada et
des États-Unis et oublier les douanes et toute autre forme
d'obstacle à la frontière, qu'en pensez-vous? Quelle est au juste
la position du gouvernement? Allons-nous avoir un périmètre de
sécurité au Nord?
M. Brian Tobin: Je vous remercie beaucoup de votre
question. Je pense que c'est une question extrêmement utile, parce
qu'elle me donne l'occasion de dissiper la confusion qui entoure
toute la question d'une frontière par opposition à un périmètre.
L'opposition officielle a posé des questions à la Chambre des
communes et se demandait si c'était possible ou non d'avoir un
périmètre de sécurité de sorte qu'il ne serait ainsi plus
nécessaire d'avoir une frontière.
Je pense qu'il faut préciser clairement que personne—et j'en
ai parlé par exemple avec l'ambassadeur Cellucci que je connaissais
déjà quand j'étais premier ministre et qu'il était gouverneur—ne
parle d'éliminer les frontières. Personne aux États-Unis ne serait
prêt à renoncer à ses frontières et encore moins à en promouvoir
l'élimination. La question est la suivante: en plus d'avoir une
frontière poreuse, efficace, à libre circulation et sûre,
pouvons-nous aussi prendre des mesures supplémentaires pour avoir
un périmètre commun ou conjoint sûr dans la mesure où nous avons
des frontières?
• 0925
On se demande aujourd'hui, par exemple, dans le cas des
conteneurs qui pourraient arriver par bateau du Canada, s'il
pourrait y avoir dédouanement préalable pour les États-Unis, ou
s'ils arrivent des États-Unis, s'ils peuvent être dédouanés
préalablement pour le Canada.
Donc, quand on parle d'un périmètre de sécurité, ce sont là
les considérations pratiques auxquelles on pense. Ce n'est pas une
question de sécurité à la frontière ou de périmètre de sécurité.
Nous avons besoin des deux. C'est dans notre intérêt économique
d'avoir les deux.
Mme Bev Desjarlais: Je suis très contente d'entendre cela,
parce qu'on se préoccupe beaucoup, surtout dans les collectivités
situées le long de la frontière en Ontario et un peu au
Nouveau-Brunswick aussi, de l'augmentation de la criminalité. Si la
frontière disparaissait, disons dans la région de Windsor, un
problème pourrait se poser parce que dix fois plus de crimes sont
commis du côté de Detroit que du côté canadien. Cette communauté ne
voudrait pas que les risques augmentent.
M. Brian Tobin: Les seuls que j'ai entendus défendre ce
genre d'approche—établissons un périmètre de sécurité et
débarrassons-nous des frontières—sont des membres de l'Opposition
officielle. Ce n'est pas la politique du gouvernement et, soit dit
en passant, ce n'est pas non plus la politique du gouvernement
américain. Tous ceux qui pourraient penser pendant un seul instant
que le gouvernement américain serait prêt à renoncer à ses
frontières ne comprend pas très bien le gouvernement américain.
Nous sommes tous d'accord pour dire que si nous pouvons
arriver à mieux contrôler que par le passé la façon dont les
marchandises, les services ou les personnes pénètrent dans nos pays
respectifs, et si nous avons confiance dans les mesures réciproques
que nous prenons, alors nous pourrons créer un environnement où
régnera une plus grande confiance pour nos citoyens, nos
entreprises et notre commerce.
Mme Bev Desjarlais: J'aurais un commentaire à faire sur
l'importance de l'innovation et du réseautage de toutes les régions
du pays. C'est une question importante. Pour quelqu'un qui vient
d'une région rurale éloignée, un membre des collectivités
autochtones, l'accès est important.
Vous avez aussi indiqué, et Matthew Coon Come l'a dit
lui-même, qu'il est important de pouvoir profiter des occasions qui
s'offrent.
Les collectivités autochtones ont souffert. Le gouvernement
n'a pas réussi au fil des ans à mobiliser suffisamment de
ressources pour toutes les collectivités au Canada, mais surtout
pour les collectivités autochtones, pour le logement,
l'approvisionnement en eau et les égouts, au point tel que,
franchement, la situation prend actuellement des proportions
catastrophiques. Il n'est peut-être pas aussi important d'avoir
accès à Internet que d'avoir un toit sur la tête et de l'eau à
boire.
C'est pourquoi je crois que la priorité pour le moment devrait
être de veiller à ce que les gens aient accès à une eau potable, à
un logement et aux services nécessaires. Même si notre parti est en
faveur de la recherche et de la technologie et trouve que
l'innovation est importante, la priorité pour le moment, soit dit
sans vouloir vous offenser, doit être de faire en sorte que le
gouvernement fasse quelque chose avec l'infrastructure de notre
pays.
M. Brian Tobin: Je suis d'accord avec vous pour dire que
c'est prioritaire. Il est prioritaire d'avoir un toit sur la tête,
d'avoir la chance de faire des études, d'être en bonne santé—c'est
évident. Une des priorités, sûrement, pour nos Autochtones est
d'avoir les moyens de s'élever au-dessus de leur condition pour
cesser de dépendre de la gouvernance. Nous devons aussi partager
avec eux nos chances de succès sur le plan commercial. Tous les
dirigeants autochtones à qui j'ai parlé voudraient que la
communauté soit davantage en mesure de répondre à ses propres
besoins, de se gouverner et de créer des richesses. Les communautés
autochtones veulent participer à la vie économique, ne pas être des
pupilles de l'État, mais plutôt contribuer à l'économie et être
maîtres de leur propre destinée. Je pense que nous pouvons tous
comprendre cela.
La présidente: Monsieur Volpe, s'il vous plaît.
[Français]
M. Joseph Volpe (Eglinton—Lawrence, Lib.): Merci,
madame la présidente.
Je n'ai pas de présentation à faire parce que c'est
vous qui devez la faire, mais j'ai des questions.
D'abord, je vous adresse mes compliments pour la
stratégie qui vise le futur.
[Traduction]
Pardonnez-moi de vous ramener à ce que je croyais être notre
sujet de discussion aujourd'hui, c'est-à-dire les répercussions sur
l'économie canadienne des attentats terroristes du 11 septembre. Je
vais demander à tous mes collègues d'être indulgents et prêcher
pendant un moment pour ma propre paroisse.
• 0930
Le plus gros impact du 11 septembre a été une diminution du
transport par camion.
Vous avez dit dans votre exposé que les délais d'attente sont
presque revenus à la normale, grâce en partie à une réduction de
30 p. 100 de la circulation. Je sais que vous avez une série
d'initiatives. Vous nous avez donné une idée d'un grand nombre
d'importantes initiatives à long terme.
Étant donné que j'ai décidé de prêcher pour ma paroisse, je
vais vous demander ce que vous entendez faire à court terme. Que
faisons-nous pour nous assurer que l'écoulement du trafic aux
frontières—à Windsor, Fort Erie et Niagara Falls, surtout dans la
partie ouest de la province, et ailleurs aussi—répondra aux
exigences de l'industrie des deux côtés de la frontière pour ce qui
est de recevoir leurs produits dans les délais fixés de manière à
ne pas décourager l'investissement dans 6, 8 ou 12 mois d'ici?
M. Brian Tobin: Madame la présidente, je tiens à remercier
le député de sa question, parce qu'elle touche au coeur même de la
question que nous étudions ici aujourd'hui. Il s'agit du maintien
de la confiance pour ce qui est non seulement de notre activité
économique actuelle, mais aussi des décisions futures en matière
d'investissement. C'est la principale préoccupation du ministère de
l'Industrie.
Pour mettre les choses au point, et je n'ai peut-être pas été
assez clair, quand j'ai parlé d'une diminution de 35 p. 100 du
trafic, je voulais parler d'une diminution de 35 p. 100 du nombre
de personnes qui franchissent la frontière. Actuellement, la baisse
pour le trafic commercial, et je pense que c'est le chiffre le plus
récent, est à peu près de l'ordre de 5 p. 100.
Globalement, si on considère l'état de l'économie et la
contraction dont nous avons tous parlé, la circulation à la
frontière est presque revenue à la normale. Une des raisons pour
lesquelles les délais sont à peu près les mêmes qu'ils l'étaient
avant le 11 septembre, c'est que le nombre de visiteurs qui
traversent la frontière a diminué du tiers à peu près. En fait, la
circulation commerciale est presque la même qu'avant.
Quant à savoir ce que nous faisons, à tous les niveaux, les
ministres responsables, surtout le ministre Cauchon, ont rencontré
leurs homologues aux États-Unis. Ils ont établi un protocole qui
est compris des deux côtés de la frontière et ils ont essayé
d'instaurer la confiance dans les mesures supplémentaires que
chacun des deux pays a prises.
Comme vous le savez, plus de gens et une nouvelle technologie
seront utilisés. Il y aura d'importants investissements. Au total,
jusqu'à maintenant, le Canada s'est engagé à dépenser plus de
200 millions de dollars. Tous ces investissements technologiques ne
peuvent pas se faire du jour au lendemain, comme vous le savez
sûrement, mais l'engagement est là.
Les programmes et la technologie qui conviennent seront
utilisés dans les aéroports et aux frontières. Les aéroports font
tout autant partie de la libre circulation des marchandises, des
personnes et des services entre le Canada et les États-Unis. Nous
devons le reconnaître. C'est pourquoi nous avons décidé d'accorder
notre aide à l'industrie du transport aérien. C'est pourquoi le
Cabinet a décidé d'accorder des garanties de prêt de 75 millions de
dollars à Canada 3000 pour assurer le maintien de la concurrence au
Canada.
• 0935
Bref, le gouvernement du Canada prendra toutes les mesures
nécessaires, monsieur Volpe, pour que les échanges bilatéraux
évalués à 1,9 milliard de dollars se fassent le plus efficacement
possible à la frontière étant donné que 87 p. 100 de tout ce que
nous exportons est destiné aux États-Unis.
La présidente: Merci. Merci beaucoup, monsieur Volpe.
Monsieur Strahl, s'il vous plaît.
M. Chuck Strahl (Fraser Valley, PC/RD): Merci, monsieur le
ministre pour votre présence et pour votre exposé plutôt exhaustif.
Vous avez parlé de l'état de l'économie, de la sécurité, de
l'avenir de nos programmes sociaux. À côté de moi, on pouvait
entendre toutes sortes de répliques. On croyait entendre un
ministre des Finances prenant fait et cause pour les pauvres. Je
crois que vous avez fait du bon travail.
M. Brian Tobin: Merci beaucoup. Je prends tout cela comme
un compliment, monsieur Strahl.
M. Chuck Strahl: J'ai quelques questions à vous poser. Pour
commencer, j'aimerais savoir pourquoi le ministre a été exclu du
comité spécial du Cabinet sur la sécurité, étant donné que le
secteur de l'industrie est concerné, surtout après les événements
du 11 septembre. Il me semble qu'à l'époque de C.D. Howe, c'est le
ministre de l'Industrie qui menait les affaires, étant donné les
répercussions que ce type de situation de guerre a sur l'ensemble
de la population canadienne. Voilà pour ma première question.
Ma deuxième question, monsieur le ministre, porte sur votre
choix des priorités. Si vous repassez la bande d'enregistrement,
vous vous apercevrez que toutes les questions que vous avez
évoquées—le logement des Autochtones, l'accès à large bande,
l'accès frontalier, le programme d'infrastructure—constituent des
priorités pour vous. Or, vous ne pouvez pas avoir d'aussi
nombreuses priorités. Toutes sont importantes. Toutes, espérons-le,
se réaliseront. Mais lorsqu'on a des priorités, surtout à une
période de diminution de l'enveloppe budgétaire, il faut choisir
quelles sont les plus importantes.
La question que l'on se pose ici ce matin, selon moi, ce n'est
pas de savoir si l'accès à large bande est important, puisque ça
l'est dans les perspectives économiques à long terme pour le
Canada. La question est de savoir si c'est la priorité la plus
importante. À mon avis, l'accès frontalier est peut-être plus
important à l'heure actuelle. C'est pourquoi les premiers ministres
Harris, Landry, Campbell et Lord, même s'ils sont très intéressés
par l'accès à large bande, parlent surtout de l'accès aux
frontières américaines. C'est leur priorité, comme celle de
74 p. 100 des chefs de direction, ainsi que le révélaient les
titres de la presse hier. Selon eux, c'est actuellement une
priorité extrêmement importante.
Je sais que l'on peut faire plus d'une chose à la fois, mais
j'espère qu'au moment de fixer les priorités, vous vous souviendrez
que la chose la plus importante, comme vous l'avez dit dans le
journal hier, en parlant de la sécurité périmétrique, c'est
l'infrastructure pour le passage de la frontière. Voilà le genre de
questions qui préoccupe les gens. Si j'habite à Peace River, je
peux bien être en faveur de l'accès à large bande mais je ne serais
pas plus avancé si je ne peux pas brancher mon ordinateur, faute de
pouvoir payer ma note d'électricité parce que je ne peux pas vendre
mon blé, je ne peux pas vendre mon pétrole et mon gaz, je ne peux
pas traverser la frontière, je ne peux pas livrer mon bois. Aussi,
l'accès à la frontière est une priorité et j'aimerais savoir si
vous considérez cette question comme une priorité.
Je passe maintenant à ma dernière question. Les choses se
bousculent dans le secteur de l'industrie et je pense que votre
ministère va être très sollicité. J'aimerais demander au ministre
comment il va éviter les conflits d'intérêts, puisqu'un article
révèle qu'une vingtaine d'invités conviés à un dîner spécial ont
promis de consacrer 25 000 $ par an à la campagne à la direction du
ministre...
La présidente: Monsieur Strahl.
M. Chuck Strahl: ...comment le ministre va-t-il s'y prendre
pour éviter les conflits d'intérêts avec ses fonctions de ministre
de l'Industrie?
La présidente: Monsieur Strahl, cette question n'est pas
pertinente.
M. Brian Tobin: Madame la présidente, je suis ravi une
fois de plus que la séance soit filmée par les caméras de
télévision, puisque la réponse à cette question me paraît évidente.
C'est sans doute un autre exemple de la culture dont vous avez
héritée du Parti de l'alliance canadienne, même si vous appartenez
maintenant à la Coalition conservatrice démocratique.
Une voix: C'est le PC/RD.
M. Brian Tobin: Excusez-moi, je n'ai pas bien compris le
nom. Quelqu'un essaie de m'indiquer le sigle du parti.
• 0940
M. Chuck Strahl: Merci.
M. Brian Tobin: Mais une fois que l'on est parvenu à la
conclusion qu'il est important de protéger le travail des
Canadiens, vous pouvez extrapoler que le Canada ne doit
s'intéresser à aucun autre dossier. C'est un point de vue tout à
fait légitime, je suppose, que peut adopter la Coalition
conservatrice démocratique et selon lequel on ne devrait
s'intéresser à rien d'autre qu'aux questions frontalières. Et selon
votre liste, l'appui aux peuples autochtones et au logement n'est
pas important; on ne peut rien faire dans ce domaine si l'on
accorde la priorité à la sécurité aux frontières...
M. Chuck Strahl: Ce n'est pas ce que j'ai dit. Je voulais
savoir tout simplement quelle était votre priorité.
M. Brian Tobin: Excusez-moi. Permettez-moi de prendre sur
mon temps pour vous demander quels sont les éléments de votre liste
que vous voulez éliminer.
M. Chuck Strahl: Je n'ai pas demandé de les «éliminer». J'ai
tout simplement voulu m'assurer que l'accès aux frontières était
une priorité et je remercie le ministre de me l'avoir confirmé.
M. Brian Tobin: Je vous remercie de confirmer que vous
reconnaissez qu'il est possible de poursuivre d'autres dossiers
utiles au Canada, même si la priorité la plus importante pour le
Canada est la frontière—c'est ma plus importante priorité. Est-ce
que vous reconnaissez cela?
M. Chuck Strahl: J'ai tout simplement demandé au ministre de
ne pas se fixer cinq priorités, mais s'il en fait sa priorité
principale, nous pouvons aussi nous intéresser aux autres aspects.
M. Brian Tobin: Je tiens à vous poser la question pour que
votre réponse figure au compte rendu. En effet, vous êtes ici
également pour répondre au nom de votre parti: acceptez-vous que
nous puissions avoir d'autres priorités?
M. Chuck Strahl: Oui. Nous sommes d'accord sur les priorités.
Je pense que vous...
M. Brian Tobin: Que le compte rendu mentionne donc que ce
nouveau parti a d'autres priorités.
La présidente: Merci beaucoup.
Nous allons passer à Mme Torsney, et je rappelle aux membres
qu'il nous reste peu de temps. Le ministre doit nous quitter vers
9 h 50.
Madame Torsney, s'il vous plaît.
Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Merci.
Par bonheur, je sais que le ministre peut marcher tout en
mâchant de la gomme et je sais que vous pouvez manier à la fois les
buts à court terme et les buts à long terme.
La frontière est une de mes préoccupations. De nombreuses
entreprises de ma circonscription affirment que les temps d'attente
sont plus longs à la frontière, mais que la Garde nationale
facilite la circulation commerciale de l'autre côté de la
frontière. Je crois qu'elle va quitter cette semaine et qu'il est
prévu d'augmenter le contingent de gardes à la frontière
américaine. Mais j'espère que vous aurez l'occasion, monsieur le
ministre, de parler aux gouverneurs des États voisins de la
frontière, l'État de New York et celui du Michigan, afin qu'ils
prennent des mesures intérimaires pour maintenir la Garde nationale
ou disposer de ressources humaines appropriées du côté américain.
C'est une préoccupation majeure pour les gens de ma circonscription
et je sais que beaucoup d'autres députés autour de cette table se
sentent également concernés.
Je pense que c'est l'occasion pour nous de mettre en
application du matériel de haute technologie et d'autres moyens de
contrôler les camions et les conteneurs transportés par bateau et
par chemin de fer, et je me demande où l'on peut trouver cette
technologie. Nous avons chargé certaines de nos entreprises
canadiennes de fournir cette technologie, en particulier grâce aux
subventions PTC—qui ne sont pas véritablement des subventions,
mais des investissements—afin de nous assurer de mettre en place
les meilleures technologies.
D'autre part, les entreprises qui exercent leurs activités de
part et d'autre de la frontière ont pris des décisions à long terme
et elles ont besoin de connaître les possibilités existantes. Les
entreprises qui ont pignon sur rue au Canada essaient de vendre
leurs produits dans le monde entier. Elles font concurrence à
d'autres sociétés pour obtenir des contrats de recherche. La
question de la frontière n'est pas la seule, mais si elle pose
problème, il faut vraiment l'examiner de près. J'aimerais savoir
quelles sont les mesures de coordination que prend le Cabinet à ce
sujet?
Les membres de ma chambre de commerce me posent des questions
concernant l'accès aux soins médicaux. C'est un problème dans ma
circonscription. Est-ce que vous en parlez avec vos homologues?
Est-ce que vous faites en sorte que tout le reste de
l'infrastructure donne la possibilité aux entreprises ou filiales
canadiennes de concurrencer leurs homologues américaines? Les
entreprises sont prêtes à collaborer, mais nous savons qu'aux
États-Unis les impressions passent parfois pour la réalité et que
si l'on entend constamment parler de la frontière, en particulier
dans les interventions à la Chambre, les entreprises vont se
détourner du Canada et vont préférer investir au Tennessee. Je sais
que ce serait là une décision tout à fait erronée et j'aimerais
savoir quelles sont les mesures de coordination que prend le
Cabinet à ce sujet.
M. Brian Tobin: Tout d'abord, la coordination est très
étroite. J'aimerais revenir à un commentaire antérieur.
Il y a une semaine, j'ai présenté un exposé sur l'état de
l'économie canadienne au comité de sécurité du Cabinet. Les
différents ministres collaborent très étroitement. C'est
actuellement la priorité du Cabinet canadien. Cela demeurera la
priorité du Cabinet et du gouvernement du Canada et certainement de
notre caucus pendant un certain temps.
Je constate comme vous que certains font des déclarations
alarmistes, des deux côtés de la Chambre, dans le but de retirer
quelque avantage politique ou de faire les manchettes, ou tout
simplement pour attirer l'attention. J'essaie d'être aussi
équilibré que possible. En fin de compte, ce sont nos propres
électeurs qui en payent le prix.
La présidente: Absolument.
M. Brian Tobin: Je pense que l'attitude non partisane ou
très peu partisane que l'on a pu constater chez nos voisins
américains nous offre un meilleur modèle de réaction en période de
crise que le comportement que nous avons noté aujourd'hui chez
certains membres de l'opposition.
Nous ne devons jamais perdre de vue que les États-Unis sont la
plus grande machine économique, un colosse dans l'histoire de
l'humanité. Vingt-cinq pour cent de toutes les exportations des
États-Unis sont destinées au Canada. Ce n'est pas uniquement dans
notre intérêt que nous voulons garantir un fonctionnement efficace
de la frontière. Les États-Unis y ont aussi un intérêt, un grand
intérêt.
J'ai récemment eu des entretiens avec l'ambassadeur Cellucci.
Je ne vais pas le citer, mais j'ai été très encouragé par son
analyse de la situation, en tant qu'ancien gouverneur de la côte
Est, et par sa volonté de maintenir l'efficacité des échanges à la
frontière et sa volonté, au nom de son gouvernement, de faire en
sorte que la frontière fonctionne de manière plus efficace que
jamais. Cela implique l'introduction de certaines technologies.
Est-ce que nous nous penchons sur la technologie? La réponse
est oui. Bien entendu, le ministre le mieux placé pour parler en
détails des mesures prises est sans doute le ministre Cauchon.
Nous savons que le programme NEXUS a été suspendu pendant un
certain temps dans le cadre des mesures de sécurité renforcée.
NEXUS et la prochaine génération technologique est sans aucun doute
l'orientation que nous devons adopter si nous voulons être en
mesure de laisser circuler librement les marchandises et les
personnes de la manière la plus efficace possible à la frontière.
C'est pourquoi l'idée d'étendre le périmètre me paraît appropriée.
Nous avons déjà appliqué certaines mesures.
L'instauration d'un périmètre de sécurité ne signifie tout
simplement pas supprimer la frontière. C'est une idée dont nous
devons absolument nous débarrasser. Ce n'est pas une proposition
qui vient du gouvernement américain. Ce n'est pas une proposition
du gouvernement canadien. Elle vient de l'opposition. Ce n'est pas
une option qui s'impose.
Prenons des mesures pour que la frontière soit sûre, efficace,
fluide et ouverte. Établissons conjointement le périmètre le plus
large possible. C'est dans l'intérêt de nos deux pays et c'est
l'option que nous choisirons.
La présidente: Merci.
Merci beaucoup, madame Torsney.
Monsieur le ministre, avec votre permission, je vais accorder
une minute à M. Rajotte, puis une minute à M. Speller. Vous pourrez
répondre par la suite.
M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne):
Merci, madame la présidente. Merci, monsieur le ministre.
Avant tout, j'aimerais dire que je suis heureux que vous ayez
indiqué clairement aujourd'hui que l'accès de la frontière est
votre plus grande priorité. Je suis très encouragé par votre
déclaration. J'aurais aimé vous l'entendre dire plus tôt, mais je
suis très encouragé.
M. Brian Tobin: Je l'ai dit à plusieurs reprises. Je suis
content que vous m'ayez écouté pour la première fois aujourd'hui.
M. James Rajotte: J'ai une question très rapide. Pouvez-vous
nous indiquer précisément ce que vous avez fait pour répondre aux
préoccupations de l'industrie? Par exemple, vous avez indiqué que
le premier ministre a rencontré le président. Vous avez dit que
John Manley a rencontré Tom Ridge. Avez-vous rencontré votre
homologue américain? Avez-vous rencontré le secrétaire au Commerce?
Dans l'affirmative, quels ont été les résultats de ces entretiens?
Pouvez-vous nous indiquer avec précision les mesures que vous
avez prises depuis le 11 septembre pour répondre aux préoccupations
de l'industrie?
M. Brian Tobin: Tout d'abord, le secrétaire au Commerce a
parlé de ces questions avec mon homologue, ou plutôt mon collègue,
le ministre Pettigrew. Le solliciteur général a rencontré son
homologue. Le ministre des Affaires étrangères a rencontré son
homologue. Le premier ministre a rencontré le président.
M. Charlie Penson: Et vous?
M. Brian Tobin: Charlie, je sais que vous voulez
absolument marquer un point avant la fin de la journée.
M. Charlie Penson: Non. Je me serais attendu à ce que vous
preniez part vous aussi à ces rencontres.
M. Brian Tobin: J'apprécie l'effort. J'ai siégé moi aussi
pendant de nombreuses années dans les rangs de l'opposition.
M. Charlie Penson: Vous y retournerez peut-être.
M. Brian Tobin: Je peux vous assurer que je me levais un
peu plus tôt le matin pour préparer mes questions.
J'ai rencontré récemment l'ambassadeur américain pour discuter
des questions frontalières. J'ai rencontré tous mes collègues du
Cabinet. J'ai participé à la réunion du comité de sécurité du
Cabinet. Nous avons pris toutes les mesures relevant de notre
responsabilité.
• 0950
La présidente: Merci.
Monsieur Speller, s'il vous plaît.
M. Bob Speller (Haldimand—Norfolk—Brant, Lib.): Merci,
monsieur le ministre. Je tiens à vous remercier d'avoir adopté une
position ferme en matière d'accès au marché américain.
L'industrie de l'acier est présente dans ma région. La prise
de mesures antidumping et compensatoires par les États-Unis est une
autre façon de fermer la frontière. L'acier semble occuper une
place importante dans les priorités nationales des Américains.
Quelles mesures le gouvernement du Canada prend-il pour
maintenir l'accès de l'industrie de l'acier? Avez-vous déjà
rencontré les représentants de l'industrie de l'acier? Est-ce que
vous les aidez à pénétrer sur le marché américain?
M. Brian Tobin: Je peux répondre à votre question par
l'affirmative. J'ai moi-même, avec d'autres membres du Cabinet,
rencontré tout récemment des représentants du secteur canadien de
l'acier. Je pense que nous étions cinq ou six ministres à assister
à cette réunion, il y a quelques soirs.
Le ministère des Finances, le ministère du Commerce et le
ministère de l'Industrie travaillent en étroite collaboration
aujourd'hui avec le ministère des Affaires étrangères afin
d'examiner les répercussions des récentes décisions, en particulier
sur le secteur de l'acier au Canada.
Pour le moment, je ne peux pas vous en dire plus. Le Cabinet
a été saisi de cette question qui est actuellement débattue. Je
peux vous dire que nous nous sommes penchés sur la situation
actuelle de l'industrie canadienne de l'acier. Nous comptons
préciser dans quelques jours les mesures que nous jugerons
approprié de mettre en place pour venir en aide à l'industrie de
manière à faciliter l'accès à la frontière américaine et à la
protéger contre toute tentative déraisonnable de pénétrer notre
marché selon des méthodes commerciales qui ne seraient pas
équitables et libres.
La présidente: Merci.
Merci beaucoup, monsieur Speller.
Monsieur le ministre, nous tenons à vous remercier d'être venu
témoigner aujourd'hui. Nous vous remercions d'avoir souligné que le
Canada accorde la priorité à l'accès de la frontière par
l'industrie canadienne.
J'aimerais me faire l'écho des préoccupations soulevées par un
certain nombre de membres de notre comité relativement à
l'importance d'assurer la libre circulation à la frontière et de
renforcer la sécurité pour répondre à un certain nombre de ces
préoccupations.
J'aimerais également vous demander de prendre en compte les
commentaires de Mme Torsney et de présenter des observations au
gouvernement du Michigan. La garde placée à la frontière doit
quitter Detroit à compter de jeudi. Cela paraît étrange, car il
semble que c'est grâce à elle que la circulation commerciale
s'écoule normalement au point d'entrée de Detroit. La circulation
automobile progresse extrêmement lentement, compte tenu du fait
qu'elle a diminué de 35 à 60 p. 100 dans les tunnels et donc
qu'elle est moins dense que d'habitude.
Je vous demande donc de continuer à collaborer avec vos
collègues des États-Unis et à faire les observations qui
s'imposent. Nous vous remercions énormément d'être venu
aujourd'hui.
M. Brian Tobin: Merci, madame la présidente.
Je peux vous dire que nous allons surveiller la situation...et
que nous apprécions le travail qu'effectue le comité en invitant
de nombreux secteurs de l'économie canadienne à venir exposer, en
ce moment tout à fait opportun, l'état de la situation dans leur
secteur et à présenter des avis et des recommandations à
l'intention du gouvernement sur les mesures à prendre pour répondre
aux problèmes qui se posent.
Je vous félicite, vous et tous les membres du comité, pour
votre initiative à ce chapitre.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur le ministre.
Nous allons prendre cinq minutes de pause pendant le
changement de témoins. Nous invitons les représentants du secteur
de l'automobile à venir prendre place à la table.
Nous prenons une pause de cinq minutes.
La présidente: Nous allons reprendre nos travaux. Monsieur
Volpe, vous voulez faire un rappel au Règlement?
M. Joseph Volpe: Oui, j'aimerais apporter une précision pour
toutes les personnes intéressées.
Maintenant que pratiquement tous les fonctionnaires
d'Industrie Canada ont quitté la salle, de même que les médias—ils
sont tous retournés à leurs postes—je pense que c'est probablement
un des mouvements les plus dynamiques pour reprendre conscience et
assurer à la population que nos sentinelles sont de retour à leurs
postes.
La présidente: Très bien monsieur Volpe, mais je peux vous
dire que des représentants du ministère de l'Industrie sont restés
pour observer les travaux et que nous sommes télévisés, si bien que
les journalistes peuvent nous voir à distance.
Cela étant dit, nous avons un très important secteur de
l'économie devant nous, à savoir l'industrie automobile. Nous
sommes très heureux d'accueillir aujourd'hui M. Mark Nantais,
président de l'Association canadienne des constructeurs de
véhicules, M. Doug Jure, conseiller spécial de DaimlerChrysler
Canada; et M. Michael Sheridan, directeur des relations
gouvernementales à la compagnie Ford Canada Limitée.
Nous entendrons également M. Robert Armstrong, président de
l'Association des fabricants internationaux automobiles du Canada;
M. Stephen Beatty, vice-président, Affaires corporatives de Toyota
Canada Inc.; et M. Art Thomas, premier gestionnaire, Affaires
corporatives de Honda Canada Inc.
Nous avons aussi le plaisir d'accueillir l'Association des
fabricants de pièces automobiles en la personne de son président
M. Gerald Fedchun.
Je propose à chacun d'entre vous de présenter une déclaration
préliminaire, puis nous passerons aux questions. Sans plus
attendre, je vais donner la parole à M. Mark Nantais.
M. Mark Nantais (président, Association canadienne des
constructeurs de véhicules): Merci, madame la présidente, et merci
aux membres du comité de nous donner la possibilité de témoigner
aujourd'hui.
J'ajoute également que c'est pour nous un grand plaisir de
nous associer à d'autres membres du secteur de l'automobile dans le
cadre de ce groupe d'experts.
Pour ceux d'entre vous qui ne seraient pas au courant, l'ACCV
est l'association nationale des plus grands fabricants
d'automobiles au Canada. Nous comptons parmi nos membres
DaimlerChrysler Canada, la compagnie Ford, General Motors du
Canada, l'International Truck and Engine Corporation et le
constructeur Volvo.
Les présents travaux ont pour but d'évaluer les répercussions
économiques de la tragédie du 11 septembre aux États-Unis sur les
secteurs de notre économie. Nous savons tous que les attaques
terroristes ont profondément ébranlé notre économie, mais surtout
notre sentiment de sécurité.
Je crois qu'il est important de souligner que l'industrie de
l'automobile a fait l'objet d'une rationalisation complète en
Amérique du Nord en 1965, avec la signature du Pacte de
l'automobile. Cette rationalisation a permis aux usines de produire
des véhicules vendus dans les deux pays, des pièces détachées et
des véhicules traversant la frontière canado-américaine sans
pratiquement aucun délai.
L'intégration de l'industrie s'est encore plus renforcée avec
la signature de l'Accord de libre-échange canado-américain en 1989,
puis avec l'Accord de libre-échange nord-américain en 1994.
Actuellement, les produits du secteur de l'automobile représentent
environ 25 p. 100 du commerce bilatéral entre le Canada et les
États-Unis, soit à peu près 300 millions de dollars des échanges
quotidiens—je souligne qu'il s'agit bien d'échanges
quotidiens—qui se chiffrent à 1,3 milliard de dollars. C'est une
donnée très importante. Depuis plus de 35 ans, le secteur de
l'automobile des deux pays compte sur la libre circulation des
pièces détachées et des véhicules à la frontière pour assurer la
bonne marche de l'industrie dans les deux pays.
Toutes nos sociétés membres ont perdu une part importante de
leur production au Canada, en conséquence directe des événements du
11 septembre et elles ont toutes réduit par la suite leur
production de véhicules en raison de la diminution des ventes aux
États-Unis.
• 1005
On prévoit que la production de véhicules au Canada tournera
autour de 2,45 millions d'unités par comparaison à environ
3 millions au cours de chacune des deux dernières années. Cette
différence équivaut à la production annuelle de deux usines
moyennes d'assemblage de véhicules.
Pour ce qui est du marché intérieur, même si le Canada a connu
une année record l'an dernier avec des ventes de près de
1,6 million d'automobiles et de camionnettes, il a fallu 12 ans au
Canada pour dépasser son record antérieur de ventes de 1988, et ce
record de ventes en l'an 2000 est dû en grande mesure à
l'application d'incitatifs très coûteux qui ne pourront être
maintenus à long terme.
En effet, le Canada est le seul pays de l'OCDE à ne pas avoir
vendu plus de véhicules dans les années 90 que dans les années 80.
Ce constat est illustré par l'âge moyen des véhicules au Canada qui
est d'environ 8,3 ans par comparaison à 7,2 aux États-Unis.
Le fait qu'au Canada le revenu disponible soit une
considération majeure au moment de l'achat d'un nouveau véhicule ou
d'un autre important bien de consommation est une préoccupation
pour nos membres.
Si les ventes de véhicules déclinent, il sera tout simplement
impossible de renouveler l'ancien parc par des véhicules équipés de
dispositifs antipollution et des systèmes de sécurité les plus
modernes. Cela risque de retarder les progrès en matière de
protection de l'environnement, de la santé et de la sécurité du
public.
Le problème devient évident lorsqu'on compare le prix moyen
d'achat d'un véhicule vendu au Canada et aux États-Unis avec le
revenu personnel disponible. Pour acheter un nouveau véhicule au
Canada en 1991, un consommateur devait investir 105 p. 100 de son
budget personnel disponible. Un consommateur américain ne devait y
consacrer que 98 p. 100. En 2000, il fallait y consacrer 146 p. 100
du revenu personnel disponible au Canada, par comparaison à
96 p. 100 aux États-Unis. Telle est la comparaison, en dépit du
fait que les véhicules sont beaucoup moins chers au Canada, en
moyenne 3 100 $ environ, sur une base monétaire commune.
Malgré les événements du 11 septembre, on prévoit que les
ventes de véhicules légers au Canada varieront de 1,49 à
1,51 million. Ce sera malgré tout une assez bonne année, mais je
répète que ces ventes sont le résultat de coûteux programmes
d'incitation mis en oeuvre par les fabricants.
Vous savez peut-être également que les processus de
fabrication de nos membres reposent sur le système de livraison
juste à temps des pièces détachées à nos usines canadiennes. Les
systèmes de livraison juste à temps permettent d'augmenter
l'efficience et par conséquent de réduire les coûts d'exploitation
en réduisant les stocks que devraient sinon conserver les usines.
Pendant les jours qui ont suivi le 11 septembre, la production
des usines automobiles a été perturbée par les délais de livraison
des pièces dont la circulation a été ralentie à la frontière
canado-américaine. Cette perturbation a été ressentie de part et
d'autre de la frontière. Les pièces détachées fabriquées au Canada
ne pouvaient être livrées aux États-Unis et pareillement, les
pièces fabriquées aux États-Unis ne pouvaient parvenir aux usines
canadiennes.
Les chutes imprévues de production dues à la pénurie de pièces
détachées coûtent environ 1 million à 1,5 million de dollars de
l'heure, soit environ 25 000 $ la minute aux usines de fabrication.
Afin de répondre aux retards rencontrés à la frontière,
certains fabricants ont décidé d'augmenter de 5 p. 100 leurs stocks
de pièces dans leurs usines, mais cela implique des coûts
supplémentaires importants. Ces coûts sont désormais considérés
comme des coûts de base que les usines canadiennes ne devaient pas
assumer auparavant et représentent un des nombreux facteurs qu'il
faudra prendre en considération lors des prochaines décisions
d'investissement.
Le Canada et les États-Unis ont négocié des ententes
commerciales en tenant pour acquis que le passage de la frontière
ne ralentirait pas le commerce qu'ont facilité ces ententes. Le
Canada doit s'efforcer de prendre les mesures nécessaires pour que
le passage de la frontière ne soit pas ralenti; faute de quoi, la
viabilité à court et à long terme des industries hautement
intégrées telles que l'industrie automobile canadienne risque
d'être compromise.
Nous estimons qu'il est dans l'intérêt de la sécurité
nationale du Canada et des États-Unis de maintenir une frontière
sûre, mais aussi une économie forte qui ne peut exister sans un
commerce transfrontalier fluide.
L'engorgement de la frontière canado-américaine a
considérablement diminué depuis les tragédies du 11 septembre, mais
cela est dû en grande partie à l'augmentation du personnel et à une
diminution de 15 à 20 p. 100 de la circulation de camions de
l'industrie automobile à la frontière.
Au moment où les économies américaines et canadiennes
commencent à rebondir, il est indispensable d'adopter une approche
coordonnée et stratégique de la gestion de la frontière. Nous
appuyons une approche coordonnée des questions de sécurité
périmétrique. À la frontière canado-américaine, en particulier pour
le transport de surface, nous devons prendre plusieurs mesures
importantes visant à faciliter la circulation des marchandises à
faible risque qui sont susceptibles d'avoir d'importantes
répercussions économiques et à concentrer les ressources sur les
activités à plus haut risque.
Nous pensons en particulier qu'il faudrait prendre les mesures
suivantes.
La sécurité des Canadiens et des Américains est fondamentale.
La sécurité économique de notre pays repose sur le commerce, mais
à notre avis, la promotion de la sécurité et la facilitation du
commerce ne sont pas nécessairement contradictoires.
• 1010
Peu de temps après les tragédies du 11 septembre, des
ressources supplémentaires ont été affectées aux points de passage
terrestres les plus fréquentés, en vue d'optimiser l'infrastructure
existante des douanes.
Nous approuvons l'octroi par les États-Unis de ressources
supplémentaires dans leurs crédits pour faire en sorte que les
points d'engorgement à la frontière continuent d'être dotés d'un
personnel suffisant.
L'accréditation préalable des chauffeurs et des voyageurs
réguliers, sur une base coordonnée, et la mise en liaison des bases
de données faciliteraient le mouvement efficace des marchandises et
des voyageurs à faible risque.
Les personnes et les marchandises préautorisées pourraient
emprunter des voies réservées. La mise en commun des bases de
données permettrait de faciliter et d'accélérer le passage de la
frontière en autorisant le dédouanement électronique automatique
des marchandises et des personnes à faible risque.
Nous devrions approfondir nos connaissances et explorer la
façon d'utiliser la technologie du transpondeur afin de faciliter
le mouvement des marchandises commerciales à faible risque mais à
haute valeur ajoutée.
Certaines initiatives sont très utiles. C'est le cas par
exemple du programme d'autodédouanement qui vise à faciliter le
mouvement de marchandises provenant de sociétés qui traversent
fréquemment la frontière.
L'autodédouanement permet, dans certaines conditions
spéciales, d'obtenir des privilèges de dédouanement avant l'arrivée
et d'évaluer soi-même les droits de douane à payer. Les données
recueillies dans le cadre du programme d'autodédouanement au sujet
de l'importateur, du chauffeur et du transporteur permettent de
considérer certaines cargaisons comme des marchandises à faible
risque.
Malheureusement, l'application du système d'autodédouanement
a été retardée et plusieurs des modifications prévues qui lui ont
été apportées ont rendu le processus inutilement complexe et
potentiellement coûteux.
Nous poursuivons notre collaboration avec l'ACDR afin de
remédier à ces anomalies pour que le processus fonctionne de
manière aussi efficace que prévu à l'origine.
La congestion à la frontière a toujours posé problème. À moyen
terme, il est essentiel d'optimiser la capacité existante de
l'infrastructure frontalière, mais, à plus long terme, nous devons
aussi prévoir améliorer et étendre l'infrastructure à certains
points clés, de part et d'autre de la frontière.
Nos problèmes à la frontière existaient avant le 11 septembre,
et il n'y a aucune solution simple et facile pour les résoudre. Au
contraire, ils exigent une approche globale, stratégique et
bilatérale. Puisqu'il est question de ces problèmes sérieux à la
frontière, nous tenons à dire combien nous apprécions les efforts
permanents entrepris par le gouvernement fédéral en faveur de notre
économie nationale et de nos intérêts en matière de sécurité.
Le ralentissement de l'économie aux États-Unis et dans une
moindre mesure au Canada s'est accentué depuis les événements
tragiques du 11 septembre. Aujourd'hui plus que jamais, il est
nécessaire de prendre des mesures pour stimuler l'industrie
canadienne, augmenter l'abordabilité des biens de consommation
comme les automobiles et accroître la productivité des usines
canadiennes.
Nous aimerions également profiter de notre présence ici pour
féliciter et remercier le gouvernement fédéral d'avoir pris des
mesures proactives en vue de réduire les impôts au Canada. La
réduction des impôts sur le revenu des particuliers mise en oeuvre
l'année dernière s'est avérée très efficace pour stimuler la
consommation à une période de ralentissement économique. Nous
encourageons le gouvernement fédéral à maintenir cette tendance à
l'avenir.
Mis à part les questions relatives à la frontière, que
recommandons-nous d'un point de vue financier? Nous pensons que le
gouvernement devrait se pencher sur les questions suivantes.
L'impôt des grandes sociétés qui, par sa nature même, est un
impôt sur le capital, a une incidence disproportionnée sur les
sociétés qui nécessitent de gros investissements, telles que les
entreprises manufacturières comme les fabricants d'automobiles qui
doivent faire d'importants investissements en capital-actions.
Étant donné que l'impôt des grandes sociétés s'applique à toutes
les entreprises, quelle que soit leur rentabilité, il représente un
coût financier annuel pour les sociétés qui investissent au
Canada—et augmente inutilement le coût de location et de
financement des véhicules par les consommateurs. L'impôt des
grandes sociétés constituant un coût important et inutile pour les
sociétés qui font affaire au Canada, nous recommandons tout
simplement son élimination.
Beaucoup de pays dans le monde autorisent les groupes de
sociétés à transférer les pertes fiscales entre leurs filiales à
100 p. 100, permettant ainsi de rationaliser le processus de
planification fiscale du point de vue de la société. Au Canada,
cette pratique n'est pas autorisée, ce qui augmente les frais
d'administration et met en place une structure fiscale non
concurrentielle.
L'ACCV recommande que le gouvernement fédéral adopte des
modifications afin de mettre en place un système simple et
efficient qui permettrait aux entreprises canadiennes de transférer
leurs pertes fiscales entre les filiales d'un même groupe de
sociétés et qui placerait le Canada en bonne position pour attirer
les investissements internationaux.
En ce qui a trait aux impôts retenus sur les intérêts, la
convention fiscale actuelle signée par le Canada et les États-Unis
réduit les taux des retenues à la source à un maximum de 10 p. 100
lorsque l'intérêt obtenu dans un pays est payé à un habitant d'un
autre pays.
• 1015
Passons maintenant au crédit d'impôt à l'investissement
manufacturier. Le secteur manufacturier est un important employeur
de l'économie canadienne. Les investissements se font à l'échelle
mondiale et la lutte pour les obtenir est plus féroce que jamais.
Les gouvernements des États-Unis et des autres pays membres
continuent à baisser les impôts des sociétés de manière à attirer
de nouveaux investissements. En conséquence, il est important que
le gouvernement prenne les mesures nécessaires pour être un pays
attrayant pour les investissements après impôt.
Nous sommes en faveur des crédits d'impôt à la R-D, afin
d'encourager les investissements dans les emplois de la haute
technologie et d'ouvrir de nouvelles perspectives d'avenir, mais
les investissements dans le secteur manufacturier créent des
emplois plus nombreux pour les Canadiens moyens à l'heure actuelle.
Compte tenu de la période d'incertitude que nous traversons
actuellement, nous estimons que le gouvernement du Canada devrait
envisager d'adopter un crédit d'impôt à l'investissement
manufacturier afin d'encourager les entreprises à créer des emplois
chez nous. Un crédit d'impôt de 5 p. 100 à l'investissement pour
les nouveaux équipements manufacturiers permettrait de conserver et
d'élargir l'infrastructure manufacturière canadienne, de créer des
emplois connexes et d'entraîner d'autres retombées économiques.
Par ailleurs, il faudrait éliminer les taxes sur les
nuisances, les taxes existantes sur les automobiles, par exemple la
taxe sur l'air climatisé, et cesser d'envisager l'application de
nouvelles taxes qui ne font qu'augmenter le prix des véhicules et
retarder le renouvellement du parc automobile. Comme je l'ai
mentionné précédemment, le renouvellement plus lent du parc
automobile ne fait que s'opposer à l'application de meilleures
normes de protection de l'environnement et de sécurité au profit de
l'ensemble de la population canadienne.
En terminant, madame la présidente, j'aimerais rappeler les
différents points que j'ai abordés aujourd'hui. Nous pensons que le
gouvernement fédéral doit, maintenant plus que jamais, faciliter
l'instauration d'un environnement commercial propice à la
croissance économique. Cela nécessite l'application à la frontière
canado-américaine d'une politique qui permette au Canada de
conserver sa place dans une économie nord-américaine intégrée et
d'un régime fiscal qui assure aux consommateurs et aux
investisseurs la confiance nécessaire pour continuer à faire
tourner notre industrie.
Comme nous aimons à le dire, c'est l'automobile qui fait
rouler le Canada. Nous espérons que le gouvernement du Canada
partage notre volonté de conserver une industrie automobile
dynamique.
Une fois encore, je remercie le comité de m'avoir donné la
possibilité de venir témoigner et je me tiens à votre disposition
pour répondre aux questions que vous voudrez bien me poser.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Nantais.
Nous allons maintenant donner la parole à M. Armstrong.
M. Robert J. Armstrong (président, Association des fabricants
internationaux d'automobiles du Canada): Madame la présidente, je
tiens d'abord à vous remercier, vous et les membres du comité, de
nous donner la possibilité de vous présenter aujourd'hui notre
point de vue sur les conditions du marché dans notre secteur de
l'industrie et de partager la table avec mes deux collègues de
l'ACCV et de l'AFPA.
Afin de vous situer un peu notre association, je vous dirai
pour commencer que l'AFIAC compte 14 sociétés membres. Nous
représentons 50 p. 100 des ventes de véhicules de tourisme,
20 p. 100 des ventes de camionnettes et 20 p. 100 de la production
automobile au Canada.
Bien que les sièges sociaux de nos entreprises membres soient
situés à l'extérieur de l'Amérique du Nord, c'est-à-dire en Europe,
au Japon ou en Asie, la majorité de nos membres produisent leurs
véhicules dans d'autres endroits situés à l'intérieur de la région
visée par l'ALENA.
Cela nous ramène évidemment aux inquiétudes concernant la
frontière. Nous ne nous contentons pas de transporter des produits
et des pièces détachées entre le Canada et les États-Unis, comme
Gerry vous le dira plus tard; nous facilitons l'expédition et nous
transportons des produits entre nos usines du Canada et celles des
États-Unis et du Mexique, et également dans le sens inverse. Par
conséquent, ce sont d'importants échanges dans les deux sens.
Nos membres qui produisent au Canada exportent 90 p. 100 de
leur production aux États-Unis et au Mexique et même jusqu'au Japon
et à l'Extrême-Orient.
Deux de nos sociétés membres, Honda et Toyota, ont lourdement
investi dans leurs installations canadiennes depuis quelques années
et elles prévoient augmenter leur production totale de plus du
double entre 1998 et 2003.
Comme l'a dit Mark, l'industrie automobile canadienne a un peu
ralenti depuis quelque temps, après plusieurs années de croissance
ferme. À la fin du mois d'août, l'industrie dans son ensemble
n'avait pas lieu de se réjouir. Au 31 août de cette année, les
ventes de véhicules légers avaient chuté de près de 8 000 unités,
soit 7 p. 100, par rapport à la même période en 2000.
Ces résultats révélaient de meilleures perspectives à court
terme pour le Canada, étant donné que le chiffre d'affaires de
l'industrie était nettement meilleur qu'au sud de notre frontière.
Cependant, en raison du ralentissement de l'économie américaine, la
production de véhicules légers au Canada a accusé une diminution de
42 000 unités, soit 16,3 p. 100, un déclin important sur 12 mois
que l'on peut principalement attribuer à la diminution des ventes
sur le marché américain.
• 1020
Les événements du 11 septembre n'ont évidemment fait
qu'aggraver l'effet négatif sur la confiance des consommateurs et
cet effet cumulatif s'est greffé aux préoccupations existantes
concernant la faiblesse de l'économie. La clé de l'avenir est de
protéger les investissements déjà faits dans les installations
canadiennes afin de pouvoir conserver les emplois canadiens jusqu'à
ce que le marché nord-américain retrouve sa confiance et que l'on
assiste à une reprise des dépenses de consommation.
Depuis le 11 septembre, notre industrie a connu des résultats
divers. Comme l'a indiqué le ministre ce matin, certains fabricants
ont eu la chance de lancer de nouveaux produits qui ont contribué
à augmenter la fréquentation des salles d'exposition chez les
concessionnaires, produisant ainsi une augmentation à court terme
des ventes. D'autres constructeurs ont eu recours à de nouveaux
incitatifs financiers toujours plus attrayants qui auront à leur
tour une grande incidence sur la rentabilité à long terme de chaque
entreprise.
Par conséquent, les préoccupations à court terme de l'économie
canadienne portent sur la production. En effet, puisqu'un emploi
sur sept est lié au secteur de l'automobile, nous sommes évidemment
un secteur vital pour l'économie du pays et sans aucun doute le
plus grand secteur de l'industrie à offrir des emplois de haute
qualité commandant de bons salaires. Nous ne souhaitons pas que les
constructeurs doivent réduire les périodes de travail, les heures
supplémentaires ou, pire, éliminer certaines usines à cause des
répercussions négatives sur l'économie. Nos sociétés membres ayant
obtenu d'excellents résultats au cours des dernières années, rien
ne semble indiquer que des fermetures d'usines ou des réductions
des périodes de travail seront nécessaires dans un avenir proche.
Ce sont les perspectives de développement du réseau canadien
d'approvisionnement qui nous préoccupent. Nos membres peuvent vous
dire que rien ne rend une région plus attrayante qu'une source
locale fiable de pièces détachées de haute qualité et à coût
concurrentiel. Le Canada qui offre une telle situation en plus
d'une main-d'oeuvre industrieuse et efficiente, a été un endroit
attrayant pour nos membres qui y ont fait de nouveaux
investissements commerciaux au cours de la dernière décennie et
nous souhaitons que cette tendance se maintienne.
Par ailleurs, nous avons bénéficié, depuis quelques années,
d'augmentations favorables des ventes dans toute l'Amérique du Nord
et cette augmentation de la production intervient dans la région
visée par l'ALENA. Poursuivant sur notre lancée, nous voulons nous
assurer que notre gouvernement maintiendra un climat commercial
favorable au développement des constructeurs déjà installés au
Canada et attrayant pour les constructeurs automobiles en expansion
qui cherchent à ouvrir de nouvelles usines de production. Nous
espérons que le Canada saura retenir leur attention.
Tournons-nous maintenant vers la frontière. Je ne sais pas
combien de membres du comité ont eu l'occasion hier de voir
l'intervention télévisée en direct du président Bush.
Personnellement, je l'ai vue au cours de la réunion du comité de
sécurité intérieure. Il a fait une déclaration extrêmement
importante qui a capté notre attention. Il a dit clairement dans sa
déclaration que les États-Unis tenteront de rendre compatibles et
d'harmoniser leurs procédures d'immigration et de douanes avec
celles du Mexique et du Canada. Cela peut avoir des conséquences
positives et négatives, mais il a dit clairement que les États-Unis
allaient viser l'harmonisation et la compatibilité.
C'est un objectif que nous avons toujours recherché, à savoir
laisser le monde des affaires fonctionner de la même manière dans
les trois pays. Les usines canadiennes qui importent des pièces
détachées des États-Unis bénéficient d'un système de dédouanement
assez efficient. Nous ne rencontrons pas beaucoup de problèmes dans
ce domaine, mais, depuis le 11 septembre, nous avons de la
difficulté à exporter nos produits vers les États-Unis. Le problème
est de taille, puisque 90 p. 100 de nos exportations vont vers le
sud. Par conséquent, les Américains pourraient se pencher sur ce
problème.
Gerry et moi en particulier, et Mark également, examinons
cette question depuis deux ans. Nous examinons les préoccupations
relatives à l'infrastructure de la frontière canado-américaine.
Nous avons rencontré des représentants de la province de l'Ontario,
des États du Michigan, de l'Ohio et de New York, ainsi que des
représentants des gouvernements fédéraux des deux côtés de la
frontière. Depuis deux ans, les entretiens ont été nombreux. La
situation était prévisible par tous. À l'occasion d'un congrès au
Mexique, Gerry et moi-même avons indiqué que nous allions faire
face à de graves problèmes et que la solution ne serait pas dans la
construction d'un nouveau pont ou d'un autre tunnel.
Par conséquent, il faut privilégier l'efficience. C'était bien
agréable d'entendre le ministre Tobin déclarer ce matin que le
gouvernement du Canada en faisait une priorité. Nous voulons nous
assurer que le gouvernement collabore étroitement avec nous dans le
secteur de l'industrie et avec les représentants des douanes des
deux pays. Puisque le président Bush l'a confirmé au sujet du
Mexique, nous devons nous aussi les attirer dans l'équation. Nous
voulons que la frontière reste ouverte afin de permettre un
mouvement efficient et fluide des marchandises à faible risque.
Nous devrions essentiellement bénéficier d'un traitement
spécial. L'industrie de l'automobile est un secteur à faible risque
et nous devrions bénéficier d'un traitement privilégié de la part
des trois gouvernements. La technologie devrait nous permettre
d'assurer la circulation des marchandises. Mark a soulevé certaines
questions dans son exposé. Ce qu'il nous faut avant tout, c'est
l'assurance que la frontière restera ouverte.
• 1025
Bien entendu, il faut tenir compte de la question du
renforcement de la sécurité. Nous devons faire en sorte qu'elle ne
ralentisse pas la circulation des marchandises qui va certainement
augmenter. Les statistiques révèlent une accalmie, mais les ventes
vont reprendre dès que la confiance sera revenue et que les
consommateurs seront de retour dans les salles d'exposition
d'autos. Nos ventes sont à la hausse. Je peux vous dire qu'en
octobre, le chiffre d'affaires était à la hausse en Amérique du
Nord—pour diverses raisons, sans doute—mais il est à la hausse,
si bien que la production va reprendre et que la circulation des
marchandises va s'intensifier dans notre secteur. Nous avons besoin
de cette confiance.
Il ne suffit pas de retrouver un degré de fluidité comparable
à celui qui existait avant le 11 septembre. Tous les points
d'entrée canadiens, y compris ceux de la frontière américaine,
étaient déjà au maximum de leur capacité le 10 septembre. Il
fallait déjà augmenter le personnel et agrandir l'infrastructure
dans ces points clés et, désormais, nous devons faire face aux
défis et à l'obligation d'accroître l'efficience du passage des
marchandises à faible risque malgré le renforcement des mesures de
sécurité pour la protection des Canadiens et des Américains.
Je répète que l'industrie de l'automobile est énormément
tributaire des marchés internationaux, tant pour la vente de ses
produits que pour l'importation de matériel et de composants. Comme
je l'ai dit plus tôt, ces derniers proviennent de la région visée
par l'ALENA, mais également d'Europe et d'Asie. L'accès au
matériel, aux pièces détachées et aux fournisseurs de services est
particulièrement crucial pour les usines automobiles qui appliquent
couramment de nos jours des systèmes d'approvisionnement juste à
temps. Nous ne voulons pas que l'Amérique du Nord se transforme en
forteresse.
Il faut comprendre également qu'en cas d'application d'un
périmètre pour les procédures d'immigration et de police, il ne
faudrait pas empêcher la circulation des marchandises en provenance
et à destination du reste du monde. Incidemment, c'est vital pour
les Canadiens, parce que vous savez que nos échanges commerciaux
avec les États-Unis sont énormes. Mais, permettez-moi de vous faire
remarquer que notre pays a besoin d'accroître ses échanges
commerciaux avec le reste du monde. Par conséquent, assurons-nous
que notre gouvernement s'oppose à la transformation de l'Amérique
du Nord en forteresse.
Par ailleurs, les produits fabriqués au Canada doivent
atteindre ce marché plus tôt—je m'écarte un peu de mon texte...
La présidente: Monsieur Armstrong, puis-je vous demander...?
M. Robert Armstrong: Oui. Je voulais simplement terminer et
souligner ce point.
Je ne parlerai pas de l'imposition et des autres aspects
connexes, puisque nous appuyons les propos tenus par M. Nantais.
Pour terminer, je dirai que nous avons besoin d'une reprise de
la confiance des consommateurs. Nous ferons tout notre possible
pour que le consommateur soit content et qu'il reprenne ses achats.
Nous devons montrer aux Américains que nous sommes un pays sûr.
Nous avons besoin de quelques stimulants pour faire renaître
l'espoir et comme je l'ai dit, continuer à exercer des pressions
sur les États-Unis. Il faut que tous nos ministres collaborent et
qu'ils communiquent eux-mêmes avec leurs homologues de l'autre côté
de la frontière. Les actions isolées ne suffisent pas. Il faut
qu'ils se réunissent tous pour trouver une solution et faire en
sorte que la frontière soit et demeure ouverte.
Merci.
La présidente: Merci beaucoup.
Nous allons maintenant donner la parole à M. Gerald Fedchun,
le président de l'Association des fabricants de pièces
d'automobile.
M. Gerald Fedchun (président, Association des fabricants de
pièces d'automobile): Merci.
Madame la présidente est certainement au courant, mais au cas
où d'autres membres du comité l'ignoreraient, je précise que
l'Association des fabricants de pièces d'automobile représente
90 p. 100 des fournisseurs de pièces détachées et de services pour
les automobiles neuves—ou les nouveaux véhicules, puisque la
moitié de notre production au Canada est celle de véhicules légers.
Nous réunissons plus de 400 membres, 100 000 employés et, en 2001,
notre chiffre d'affaires est estimé à environ 32 milliards de
dollars. De cette production, les deux tiers sont exportés,
90 p. 100 vers les États-Unis, une grande partie vers le Mexique et
le reste dans divers pays du monde.
Il est important de noter que notre secteur est une industrie
très jeune. En 1965, notre production totale se chiffrait à un
demi-milliard de dollars et en 1991, notre chiffre d'affaires total
n'était que de 12,5 milliards de dollars. On constate donc que
notre secteur a connu une croissance extraordinaire et qu'une
partie de cette croissance est due à l'augmentation de nos ventes
à l'exportation. Comme on l'a déjà dit, la production
nord-américaine est désormais totalement intégrée. Les fabricants
nord-américains d'automobiles sont interdépendants.
• 1030
Les événements du 11 septembre exigent le renforcement des
mesures de sécurité. Tout cela est faisable. La technologie existe
et l'application intelligente des nouvelles technologies et
procédures peut permettre d'améliorer l'accès à la frontière et de
renforcer la sécurité.
Si notre frontière est ouverte, c'est grâce à
l'approvisionnement juste à temps. Je ne sais pas si on vous l'a
expliqué. Le fait est que nous n'avons pas de stock. Nous
construisons les pièces pour nos clients qui peuvent les utiliser
quelques heures plus tard. C'est tout. Les stocks que nous avons se
trouvent à bord du camion, de l'avion ou du train qui les
transporte. Nous ne conservons pas de stock et notre client non
plus.
Si nos livraisons sont retardées à la frontière, tout à coup
le besoin de conserver des stocks se fait sentir. Notre client nous
demande de garder des pièces en réserve, pour le cas où on en
aurait besoin; notre client nous demande d'ouvrir un entrepôt de
notre côté de la frontière, au cas où on en aurait besoin. Nous
devons désormais faire face à toutes ces dépenses. Par contre, nos
concurrents de l'autre côté de la frontière sont épargnés, si bien
que, lentement mais sûrement, nous devenons de moins en moins
concurrentiels. Nos clients craignent également une fermeture de la
frontière, si bien que notre approvisionnement n'est plus fiable.
Lentement mais sûrement, la part de notre production destinée à
l'exportation diminue et 66 000 emplois au Canada sont menacés. Il
est possible de prévenir une telle situation et nous recommandons
de l'éviter.
Nous avons plusieurs recommandations à faire pour éviter
qu'une telle situation ne se produise. Certaines de ces
recommandations ont déjà été mentionnées auparavant. La grande
priorité est que le périmètre de sécurité nord-américain contre le
terrorisme englobe le Canada. Cela est impératif, non pas dans
l'intérêt d'un autre pays, mais pour notre propre bénéfice. Je veux
que le Canada soit l'endroit le plus sûr en Amérique du Nord.
L'avantage secondaire d'un tel état de choses est que les autres
habitants d'Amérique du Nord seront également en sécurité.
Deuxièmement, le Canada doit appliquer de meilleures mesures
de contrôle le long de notre périmètre. Nos mesures de contrôle
doivent être les meilleures. Personne ne doit pouvoir nous accuser
de ne pas appliquer les normes les plus strictes dans ce domaine.
Il doit être évident que le système de contrôle canadien est aussi
bon ou même meilleur que n'importe quel autre et qu'on peut donc
lui faire confiance. On a pu laisser entendre—et certains médias
ont abondé en ce sens—que le système de contrôle canadien n'est
pas aussi bon qu'il devrait l'être. Je peux vous dire que j'ai
appris au fil des ans dans le commerce qu'une impression devient
réalité. Par conséquent, nous devons faire en sorte que notre
système de contrôle soit perçu comme le meilleur et que cela
devienne réalité.
À la frontière actuelle, nous devons étendre les formalités de
prédédouanement dans les deux pays, formalités qui seraient une
extension des contrôles préalables qui se pratiquent actuellement
dans les aéroports. Il ne s'agit pas d'appliquer de nouvelles
méthodes, mais tout simplement d'étendre le système actuellement
existant dans les aéroports. Cela pourrait s'avérer très utile. En
effet, le contrôle permet d'effectuer un tri avant de classer le
fret en fonction des éléments à haut risque et à faible risque,
afin de permettre la circulation plus rapide du fret et des
personnes à faible risque. Cela permettrait de disposer de plus de
temps pour inspecter de la manière appropriée le fret présentant
des risques élevés.
Il faut créer des laissez-passer de haute sécurité pour les
voyageurs réguliers, particuliers et employés des transports, afin
d'accélérer et de faciliter la circulation à la frontière des
personnes dont il a été déterminé au préalable qu'elles
présentaient un faible risque, et de disposer ainsi de plus de
temps pour inspecter les personnes et marchandises présentant un
risque élevé.
Nous avons besoin de mettre en place un système de traitement
électronique des formulaires de douane avant la frontière. C'est
tout à fait faisable. Lorsque le camion quitte l'usine, le
fournisseur canadien peut transmettre sous forme électronique au
point d'entrée toutes les informations devant entrer dans la
déclaration de douane. Lorsque le camion se présente à la
frontière, le prédédouanement a déjà eu lieu et il peut franchir
rapidement la frontière, muni de l'autorisation de sécurité
appropriée. La technologie existe déjà, il suffit de l'utiliser.
Pour que cela soit possible, nous devons disposer d'une
certaine infrastructure. Il faut disposer, aux points de passage de
la frontière, de gares de triage sûres où les marchandises peuvent
être inspectées afin de permettre un passage rapide de la
frontière. Il faut également une infrastructure améliorée pour le
passage de la frontière. C'est quelque chose que nous demandions
avant le 11 septembre. En réalité, nous avons besoin d'un nouveau
pont à Fort Erie, d'une nouvelle route dans le sud de l'Ontario
pour mener à ce pont et d'un nouveau pont à Windsor. Toutes ces
choses sont plus importantes maintenant qu'elles ne l'étaient
auparavant.
• 1035
Je vous remercie.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Fedchun.
Nous allons maintenant passer aux questions et nous allons
commencer par M. Penson.
M. Charlie Penson: Je remercie le groupe et je lui souhaite la
bienvenue aujourd'hui au comité.
Beaucoup d'entre nous comprenons l'importance de l'industrie
de l'automobile et des pièces de rechange pour le secteur
manufacturier canadien. Nous savons qu'elle produit des recettes
énormes et qu'elle contribue à une grande part de nos exportations.
Je crois que le groupe a présenté d'excellentes suggestions.
Voici quelques points que j'aimerais vous entendre commenter.
Votre industrie représente un risque faible sur le plan de la
sécurité et il est même possible de remédier à certains problèmes
de manière à diminuer encore les risques. Le Canada n'a pas
vraiment à se soucier de respecter les normes de sécurité
américaines. Si les Américains décident de se servir de la
frontière comme moyen de représailles pour nous punir de ne pas
collaborer avec eux, votre industrie risque d'en souffrir
énormément.
J'aimerais vous demander de nous préciser ce que cela implique
sur le plan des investissements. Je pense que Honda a soulevé la
question. Étant donné que vous exportez 90 p. 100 de votre
production aux États-Unis ou au Mexique, si la frontière vous pose
problème, pourquoi ne déménageriez-vous pas votre usine aux
États-Unis puisque c'est là-bas que se trouve votre marché?
Je crois que M. Fedchun nous a vraiment convaincus lorsqu'il
a dit que le Canada doit se trouver à l'intérieur du périmètre de
sécurité. Il est important que le gouvernement canadien comprenne
que c'est une nécessité absolue, compte tenu de la taille de votre
industrie. L'intégration est telle au sein de votre industrie que
les répercussions seraient lourdes pour vous.
Cela donne en fait deux questions. J'aimerais demander à
M. Thomas de présenter son point de vue sur les investissements.
M. Art Thomas (Association des fabricants internationaux
d'automobiles du Canada; premier gestionnaire, Affaires
corporatives, Honda Canada Inc.): Si j'ai bien compris vos
commentaires, la frontière est, de notre point de vue, aussi
cruciale pour nous que pour nos collègues. L'idée d'investir dans
des usines et dans des emplois au Canada est importante pour nous.
Une des raisons qui nous ont amenés à choisir le Canada,
indépendamment des avantages économiques, c'est la proximité par
rapport à notre clientèle.
Nous exportons un grand nombre de pièces détachées aux
États-Unis et dans 12 autres pays du monde, mais c'est ici que nous
fabriquons le modèle Civic qui est le véhicule de tourisme numéro
un au Canada. Nous voulons être proches de nos clients. Nous ne
voulons pas nous retrouver dans une situation où le gouvernement,
si je peux m'exprimer ainsi, nous dicterait certaines stratégies
d'investissement. C'est pourquoi, il est important pour nous que la
frontière soit ouverte et accessible.
Pour reprendre les commentaires de Bob, je m'inquiète de la
circulation nord-sud et sud-nord, mais également des échanges avec
les autres pays du monde, parce que non seulement nous exportons
dans beaucoup d'autres pays, mais nous importons également de
nombreux endroits différents.
J'espère avoir répondu à votre question.
La présidente: Je crois que M. Fedchun aimerait répondre, lui
aussi.
M. Charlie Penson: Auparavant, j'aimerais demander une
précision à M. Thomas. La plupart de vos produits sont exportés aux
États-Unis, n'est-ce pas?
M. Art Thomas: C'est exact.
La présidente: Monsieur Fedchun.
M. Gerald Fedchun: Si la frontière n'est pas totalement
ouverte et libre, notre industrie s'étiolera. Nous ne disparaîtrons
pas complètement parce qu'il y aura toujours une certaine
production ici, mais ce sera sans commune mesure avec ce que nous
avons connu dans les années passées.
C'est très simple. Prenons le cas d'une entreprise qui veut
installer une usine quelque part. La direction doit calculer tous
les coûts et choisir l'endroit qui lui permet d'obtenir les coûts
de production les plus faibles. Actuellement, notre système de
soins de santé constitue un gros avantage, et c'est la même chose
pour la valeur du dollar canadien. La formation de notre
main-d'oeuvre spécialisée représente aussi un gros avantage. Il y
a beaucoup d'autres éléments en faveur d'une importante production
ici.
Mais si tout à coup nous devons maintenir des plus grands
stocks, faire face à des retards à la frontière, nous serons moins
fiables et la qualité de nos produits sera remise en question à
cause de tout cela. Lentement mais sûrement, les fabricants vont se
rendre compte que le Canada n'est peut-être pas le meilleur endroit
pour leurs usines et qu'il serait peut-être préférable de les
installer plus près de leurs autres centres de production.
• 1040
M. Mark Nantais: Gerry a bien décrit la situation, mais
j'aimerais ajouter que pour éviter la menace dont vous avez parlé,
nos compagnies membres des deux côtés de la frontière interviennent
aux niveaux les plus élevés du gouvernement pour s'assurer que la
frontière ne fera pas l'objet d'un enjeu commercial destiné à nous
pénaliser. Nous travaillons très fort pour l'adoption d'une
approche stratégique bilatérale de gestion de la frontière et je
pense que c'est de cette manière que nous pourrons éviter la menace
que vous avez décrite.
M. Charlie Penson: Monsieur Nantais, vous étiez présent
lorsque le ministre a témoigné ce matin. Il a affirmé que la
circulation commerciale à la frontière était pratiquement revenue
à la normale. Ne pensez-vous pas que nous devons continuer à rester
vigilants, compte tenu de la déclaration faite par George Bush hier
et de la volonté des États-Unis de renforcer la sécurité à la
frontière si le Canada n'harmonise pas ses politiques d'immigration
et certains autres aspects avec les États-Unis? N'est-ce pas cela
le véritable danger?
M. Mark Nantais: Vous avez tout à fait raison, surtout si les
Américains renforcent les mesures de sécurité au point d'empêcher
la circulation de nos pièces détachées et de nos produits finis.
C'est la raison pour laquelle nous travaillons de part et d'autre
de la frontière pour éviter une telle situation.
Si nous prenons le cas de notre industrie, nous avons
bénéficié d'un climat commercial très favorable au Canada, mais je
pense que nous entrons actuellement dans une ère tout à fait
nouvelle. Le Pacte de l'automobile n'existe plus. Les fabricants ne
sont plus tenus de continuer à investir au Canada. Bien sûr, il y
a l'ALENA. Nous fonctionnons sur une base nord-américaine et
bientôt, peut-être, à l'échelle de tout un hémisphère. Il ne
faudrait pas que les ententes commerciales que nous concluons
soient dérangées d'une manière ou d'une autre, tout au moins en ce
qui a trait à la circulation nord-sud, par des obstacles à la
frontière.
M. Charlie Penson: Monsieur Nantais, prenez-vous part à des
rencontres organisées réunissant des groupes canadiens et leurs
homologues américains de manière régulière pour tenter de trouver
une solution à ce problème?
M. Mark Nantais: Vous savez, il y a beaucoup de groupes
différents, mais dans le secteur de l'auto, comme Bob l'a indiqué
au départ, nous travaillons en très étroite collaboration à
l'examen des questions qui touchent notre secteur. Nous avons aussi
des liens, par l'entremise des associations et des sociétés
membres, avec d'autres organisations qui s'intéressent également à
la question de la frontière.
Je le répète, la clé ici est une approche coordonnée, alignée
des politiques que nous appliquons au Canada, par comparaison aux
politiques américaines.
M. Charlie Penson: Merci.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Penson.
Monsieur McTeague, s'il vous plaît.
M. Dan McTeague (Pickering—Ajax—Uxbridge, Lib.): Je vous
remercie d'être venus aujourd'hui et je remercie madame la
présidente et le comité de donner la priorité à ce débat.
Monsieur Beatty, j'ai un intérêt très net pour votre
industrie. Vous direz bonjour à mon bon ami F. David Stone, de la
même compagnie, avec qui j'ai travaillé il y a de nombreuses
années.
J'ai quelques questions à poser à M. Nantais et aux autres
témoins. J'aimerais vous demander, en toute déférence, si vos
efforts auprès de vos homologues américains ont été couronnés de
succès lorsque vous avez tenté de leur faire comprendre le message,
compte tenu du fait que ces compagnies ont des intérêts communs
avec vous. Pouvez-vous nous donner un exemple?
Je sais, monsieur Beatty et monsieur Thomas, que vous avez des
usines ailleurs: à Sparta, dans le Kentucky, à Georgetown, ainsi
que des usines en Californie.
Vous pouvez peut-être nous dire dans quelle mesure vous êtes
parvenu à faire comprendre à vos homologues que le Canada
représente une partie importante de la fabrication et de la
commercialisation des automobiles à l'échelle nord-américaine. Vous
pouvez peut-être également nous donner des exemples de mesures de
renforcement de la sécurité dans vos propres compagnies étant donné
que beaucoup d'entre elles peuvent très bien représenter des
symboles auxquels des terroristes voudraient s'attaquer, et, par
voie de conséquence, dans vos usines au Canada.
M. Robert Armstrong: Je dirai tout simplement qu'une des
sources de préoccupation de notre industrie a été Washington.
Les hauts fonctionnaires américains n'ont pas été autorisés à
prendre part à la conférence que nous avons organisée la semaine
dernière sur les problèmes de la frontière. Mais le nouveau chef
des douanes m'a également informé qu'il ne pouvait pas envisager de
nous rencontrer, pas plus que nos homologues américains, avant le
15 novembre. C'est pourquoi nous tentons de faire progresser les
choses de notre côté.
Nous craignons qu'ils ne prennent toutes les décisions et qu'à
notre prochaine rencontre, ils nous exposent les nouvelles
procédures à suivre à la frontière et nous invitent, à ce
moment-là, à venir discuter avec eux.
Les deux prochaines semaines seront cruciales. C'est pourquoi
j'ai dit que la déclaration faite par le président des États-Unis
hier était assez claire quant au plan qu'il a l'intention de mettre
en place. C'est pourquoi nous demandons instamment au gouvernement
canadien principalement de faire en sorte que nous ayons une équipe
coordonnée qui puisse rencontrer l'équipe américaine, l'équipe de
sécurité intérieure, afin de trouver une solution pendant que de
notre côté, Mark, Gerry et moi-même ferons nos propres démarches
auprès de nos homologues de l'industrie américaine.
Malheureusement, ils n'ont pas pu rencontrer les gens de Washington
qui sont toujours absorbés par cette équipe de sécurité intérieure.
• 1045
M. Mark Nantais: Je crois que vous avez bien décrit la
situation. Je ne sais pas si les vice-présidents des compagnies ont
pu rencontrer des responsables à Washington. L'accès à quelques-uns
d'entre eux est tout simplement impossible à cause de la situation
actuelle à Washington. Je sais que les rencontres que nous avons
tenté d'obtenir ont été retardées plusieurs fois. Il s'agissait de
rencontres bilatérales avec des représentants du gouvernement
américain.
La situation est très difficile. Les temps sont très
difficiles à Washington et je ne suis pas certain que nous
puissions en faire reproche aux Américains, mais nous devons
poursuivre notre travail, et le plus tôt sera le mieux. Je crois
que nous devons persévérer jusqu'à ce que nous puissions nous
entendre sur une façon de procéder afin d'optimiser les échanges
commerciaux, sans compromettre la sécurité.
M. Michael Sheridan (directeur des relations gouvernementales,
Compagnie Ford Canada Limitée; Association des fabricants
internationaux d'automobiles du Canada): Chacun des Trois Grands
ont fait, de part et d'autre de la frontière, un travail
gigantesque en faveur du maintien d'une frontière ouverte.
Nous avons abordé le dossier de la frontière avec des
délégations des États. Nous avons fait une importante démarche à
Washington. Je peux dire que la délégation canadienne a fait un
excellent travail en faveur du maintien d'une frontière ouverte.
Elle a fait une excellente intervention à Washington pour faire
passer ce message. Chacun des Trois Grands s'est penché sur cette
question avant le 11 septembre, mais depuis, ils ont multiplié
leurs efforts.
M. Dan McTeague: Est-ce qu'il me reste du temps pour une autre
question?
La présidente: Je crois que M. Beatty souhaite répondre.
M. Dan McTeague: Monsieur Beatty, merci.
M. Stephen Beatty (vice-président, Affaires corporatives,
Toyota Canada, inc.; Association des fabricants internationaux
d'automobiles du Canada): Merci.
J'aimerais souligner également qu'il est clair qu'une
compagnie comme Toyota qui fait environ les deux tiers de son
chiffre d'affaires en Amérique du Nord, tente très activement, de
part et d'autre de la frontière, d'engager un dialogue avec ses
homologues de l'industrie et avec le gouvernement.
Mais, selon moi, la réalité est que les Américains ne sont pas
intéressés à examiner les répercussions économiques des événements
du 11 septembre; la seule chose qui les intéresse, ce sont les
incidences sur le plan de la sécurité. L'industrie et le
gouvernement doivent faire front commun au sujet des impressions
concernant la sécurité à la frontière. En effet, la sécurité est la
priorité numéro un des décideurs de Washington et des autorités
frontalières. Le fait que les préoccupations en matière de sécurité
ne soient pas nécessairement très fondées, ne change rien à
l'affaire; c'est une préoccupation tout à fait réelle actuellement.
C'est elle qui reçoit la priorité.
En tant que Canadiens, je pense que nous devons nous demander
ce que nous pouvons proposer aux Américains pour répondre à ces
préoccupations et leur trouver une solution.
Je peux vous dire que du point de vue des entreprises, il ne
s'agit pas d'un problème à court terme découlant des difficultés de
passage de la frontière et de leurs conséquences sur nos activités
quotidiennes, ni d'un problème à long terme, puisque des sociétés
comme Toyota sont tout à fait convaincues que le Canada est un bon
choix et que les investissements que nous avons faits ici ont été
de bonnes décisions. Le problème se situe plutôt à moyen terme et
dépendra de la décision des Américains d'imposer des mesures de
sécurité à la frontière.
Nous pensons que c'est là qu'il faudrait placer notre priorité
et c'est pourquoi nous cherchons à élargir notre partenariat avec
l'industrie et le gouvernement des deux côtés de la frontière. Nous
estimons qu'il faut se pencher sur ces questions.
La présidente: Monsieur McTeague, avant de poursuivre...
Monsieur Fedchun, s'il vous plaît.
M. Gerald Fedchun: J'aimerais préciser rapidement que nous
avons beaucoup d'alliés aux États-Unis. La Motor Equipment
Manufacturers Association, notre homologue américaine, travaille
également sur ce dossier.
En réalité, nous importons plus de pièces détachées des
États-Unis que nous en exportons du Canada, si bien qu'il y a aux
États-Unis un grand nombre d'entreprises et de personnes qui
partagent les mêmes intérêts que nous. Nous tentons de les
mobiliser dans un même groupe afin de nous assurer que toutes les
mesures seront prises pour montrer que la technologie peut
permettre de rendre la frontière plus sûre qu'elle ne l'a jamais
été et assurer la circulation rapide des marchandises que nous
voulons exporter ou importer.
M. Dan McTeague: À ce sujet, à supposer que les priorités
concernant la sécurité à la frontière seront définies, et compte
tenu du fait que les chefs de direction seront convaincus de la
nécessité de créer une frontière commune pour l'échange de biens et
services, comment vos organisations réagiraient-elles si, après
coup, elles constatent que les problèmes demeurent à la frontière,
en raison de l'appréhension des États-Unis? Quelle position vos
organisations adopteront-elles vis-à-vis de vos sociétés mères,
sous divers aspects, étant donné que vous aurez plus d'influence
que nous les députés, pour exposer l'argument que vous venez de
présenter?
M. Gerald Fedchun: Nous n'aurons pas d'autre choix que de nous
battre jusqu'au bout, car c'est une question de vie ou de mort pour
notre industrie et pour nos homologues américains. Nous ne pouvons
pas nous permettre de ne pas gagner; c'est aussi simple que cela.
C'est pourquoi nous gagnerons.
M. Dan McTeague: Merci.
Merci, madame la présidente.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur McTeague.
[Français]
Monsieur Bergeron, s'il vous plaît.
M. Stéphane Bergeron: Merci, madame la présidente.
Je dois vous dire qu'en tant que député québécois,
cette évocation des difficultés que rencontre
l'industrie automobile à la suite des événements tragiques
du 11 septembre dernier me laisse pour le moins
perplexe. Il n'y a qu'une
seule usine de fabrication d'automobiles située
sur le territoire du Québec, et c'est l'usine de GM à
Boisbriand. La
fermeture de cette usine a été annoncée avant le 11
septembre dernier.
Pourtant, on disait de cette
usine que c'était l'une des usines les plus
performantes en Amérique du Nord, selon une analyse
menée en 1998 par le cabinet du fiscaliste Yvon Cyrenne
pour le Comité de soutien de l'industrie
automobile dans les Basses-Laurentides.
On y indique que l'usine de GM était parmi les plus
concurrentielles du groupe américain.
Alors, il y a
lieu de se demander quelles sont les raisons
pour lesquelles GM a
décidé de mettre fin aux opérations de l'usine de
Boisbriand. Bien sûr, on a indiqué que les deux
véhicules qui étaient fabriqués à Boisbriand étaient
en perte de vitesse en termes de ventes. Le marché n'y
est plus, semble-t-il.
Peut-être est-ce là une illustration d'un certain
manque de vision ou de planification de la part de
l'entreprise, qui n'a pas su capitaliser sur une usine
performante pour prévoir l'intégration d'un nouveau
modèle.
Je sais également, ou je crois savoir que vous n'avez
pas été des plus favorables à la comparution devant ce
comité des gens de l'usine de Boisbriand. Vous
adressez ce matin un certain nombre de demandes au
gouvernement par rapport aux difficultés que vit
l'industrie à la suite des événements du 11 septembre, et je
pense que c'est légitime. Je crois que vous y avez
fait allusion également ce matin. Vous êtes, je
l'imagine,
fort conscient que vous devrez également mettre en
place un certain nombre de mesures pour faire face aux
effets des événements du 11 septembre.
Ma question
est la suivante.
Par rapport aux mesures que vous devez
mettre en place pour faire face aux événements du 11
septembre et compte tenu de la nouvelle conjoncture
qui a découlé des événements du 11 septembre, quelles
sont les prévisions de GM pour l'usine de Boisbriand
particulièrement?
Au moment où on en a annoncé la fermeture, on a
fait part d'un plan ou de prévisions ou, du moins,
d'intentions nobles à l'égard de l'usine de Boisbriand.
Est-ce que, d'une part, les événements du 11 septembre
remettent en question les engagements de GM par rapport
à Boisbriand? D'autre part, par rapport
aux événements du 11 septembre, qu'entend faire GM
pour demeurer un partenaire au Québec
au niveau de l'automobile?
[Traduction]
La présidente: Monsieur Nantais, je ne suis pas certaine que
vous ayez en main toute l'information nécessaire pour répondre à
cette question.
Je prie les membres du comité d'excuser l'absence des gens de
General Motors, qui n'ont pas pu venir eux-mêmes aujourd'hui. Mais
comme M. Nantais représente l'Association canadienne des
constructeurs de véhicules, nous allons le laisser répondre.
M. Mark Nantais: Merci, madame la présidente.
Il est certain que les gens de General Motors seraient mieux
placés pour répondre aux questions comme celle-là; malheureusement,
notre représentant de GM est à l'extérieur du pays et n'a pas pu
revenir à temps pour l'audience de ce matin.
Mais votre question reflète une réalité qui existe bel et bien
dans l'industrie automobile. Elle met en relief la fragilité de
cette industrie au Canada. Nous avons une surcapacité de 22
millions d'unités dans le monde entier, dont environ 35 p. 100 en
Amérique du Nord. Nous avons un marché très changeant, où les
préférences des consommateurs évoluent constamment en ce qui
concerne les véhicules sport et les autres types de véhicules. Bien
sûr, quand ces préférences changent, la demande relative à ces
véhicules peut augmenter ou diminuer. Donc, la décision a été
prise. Je ne peux pas parler au nom de GM, mais votre question
montre encore une fois que le marché change et qu'il y a une
surcapacité sur le marché nord-américain, comme sur le marché
mondial.
Vous avez tout à fait raison de dire, madame la présidente,
que je ne suis pas très bien placé pour répondre à ces questions-là. Mais
tout le monde doit comprendre que la situation est plutôt
fragile dans notre industrie. Il y a le Mexique et d'autres pays
qui sont en train de devenir beaucoup plus intéressants qu'avant
pour les investisseurs.
• 1055
La présidente: Merci.
Monsieur Beatty.
M. Stephen Beatty: J'allais justement dire qu'il appartient
aux gens de GM de vous parler des détails relatifs à l'usine GM.
Mais j'espère que M. Bergeron écoutera aussi les préoccupations que
nous exprimons aujourd'hui, au nom des autres constructeurs de la
province de Québec.
Par exemple, il y a au Québec des fabricants de pièces du
groupe Toyota qui sont touchés par les répercussions des
ralentissements à la frontière. Pour eux et pour les autres
entreprises liées à la fabrication de pièces dans la province,
c'est une question préoccupante. Nous espérons pouvoir bénéficier
de votre appui pour régler les problèmes à la frontière.
La présidente: Monsieur Fedchun.
M. Gerald Fedchun: Je voudrais simplement souligner que notre
association compte plus de 20 fabricants de pièces de la province
de Québec. Je ne sais pas exactement combien de travailleurs ils
emploient, mais je sais qu'ils sont plus nombreux que les
travailleurs de l'usine GM.
Au Québec, il y a un nombre croissant de fabricants qui
produisent des pièces en aluminium et en magnésium parce qu'ils y
ont facilement accès à l'aluminium, au magnésium et à
l'électricité, ce qui leur confère un avantage naturel. Il y a donc
une industrie de fabrication de pièces de plus en plus importante
au Québec.
L'ouverture de la frontière est essentielle au succès de ces
fabricants. Comme ce sont des nouveaux venus sur le marché, ils
doivent faire le nécessaire pour ne pas être désavantagés parce
qu'ils doivent prendre à d'autres entreprises leur part du marché.
Donc, s'il y a des obstacles en ce sens, c'est difficile pour eux.
[Français]
M. Stéphane Bergeron: J'ai indiqué tout à
l'heure que je pense
que les demandes que vous adressez au
gouvernement sont légitimes. Je me permets de le
rappeler simplement pour rassurer M. Beatty et M.
Fedchun, qui ont fait des interventions fort
pertinentes.
Je comprends les motivations de l'absence de General
Motors ce matin devant nous, mais j'ose espérer que
j'obtiendrai une réponse à la question que j'ai posée
ce matin. Je dois dire que moi-même et plusieurs
membres de ce comité, vraisemblablement, aurons pris
bonne note du commentaire de M. Nantais, qui disait que
du point de vue
de la législation, de la réglementation et du point de
des salaires également,
on voit, dans l'industrie de l'automobile, plusieurs
avantages à investir au Mexique, par exemple, plutôt
qu'au Canada.
[Traduction]
La présidente: Merci, monsieur Bergeron.
Madame Torsney, s'il vous plaît.
Mme Paddy Torsney: Merci.
Premièrement, c'est un plaisir d'entendre vos commentaires et
de discuter de certaines des questions qui vous intéressent au plus
haut point. Le secteur de l'automobile est certainement important
dans ma circonscription, et surtout celui des pièces.
Le ministre a mentionné que GM avait enregistré un chiffre de
ventes record en octobre, et j'espère que cela s'est répercuté
partout. Mais ces résultats ont été obtenus grâce à des mesures
incitatives. Je me demande combien de temps ça va continuer. Nous
pouvons peut-être encourager les gens qui nous regardent à
s'acheter une nouvelle voiture. Mais quel est le coût de ces
mesures pour l'industrie? Et est-ce qu'elles peuvent être
maintenues?
Ma deuxième question s'adresse à M. Nantais. Il a mentionné un
certain nombre de mesures fiscales. J'espère que, quand les
entreprises songent à investir au Canada ou à prendre de
l'expansion au Canada, elles ne décortiquent pas nécessairement
toutes les mesures fiscales différentes en disant «nous ne sommes
pas intéressés à cause de cet impôt ou de cette taxe», mais
qu'elles regardent l'ensemble du régime fiscal et le taux global.
Vous avez mentionné en particulier des encouragements fiscaux
pour le secteur de la fabrication. La première question qui m'est
venue à l'esprit, c'est celle du coût. Avez-vous calculé combien ça
coûterait? Est-ce qu'il y a une mesure comparable ailleurs? Nous
devons faire des comparaisons. Quels sont les avantages?
Enfin, ma dernière question porte sur un point pratique.
J'imagine que les pièces, par exemple, sont expédiées dans des
camions et des conteneurs de chemin de fer. Je ne comprends pas
très bien pourquoi il ne serait pas possible d'inspecter et de
sceller ces camions et ces conteneurs avant leur départ. Quand ils
traversent la frontière, je suppose qu'ils ne sont pas fermés, mais
je peux me tromper. Est-ce qu'on vérifie maintenant tous les
coffres, est-ce qu'on regarde sous le capot de tous les véhicules,
et ainsi de suite? Est-ce que c'est une des raisons des files
d'attente? Est-ce qu'il y a des moyens d'améliorer le passage de la
frontière? J'espère bien que l'industrie envisage d'utiliser des
machines à rayons X ou d'autres appareils pour les inspections à la
frontière, afin de s'assurer qu'il n'y a pas de gens cachés dans
les conteneurs, dans les coffres ou ailleurs.
• 1100
Voilà donc les différentes questions que j'avais à vous poser.
M. Michael Sheridan: Pour répondre à votre première question
sur les décisions d'investissement, il est clair que les
entreprises examinent l'ensemble des facteurs qui peuvent
influencer ces décisions. Le coût de la main-d'oeuvre est un
facteur important, mais il y a aussi l'aspect fiscal. Les taux
d'imposition des entreprises devraient baisser en deçà de ceux de
nombreux États américains; c'est donc un avantage, en fait. Les
entreprises le comprennent et le reconnaissent clairement quand
elles doivent décider où investir.
Il y a aussi le crédit d'impôt à la R-D, dont Mark a parlé
tout à l'heure. Le crédit d'impôt à l'investissement est un
avantage supplémentaire qui pourrait inciter des fabricants à
investir davantage au Canada. Encore là, le coût dépend vraiment de
l'importance de l'investissement puisque le crédit d'impôt
correspond à 5 p. 100 du montant investi.
Mais nous examinons ces facteurs dans leur ensemble. Il y a
notamment l'impôt sur le capital. Il est clair que cet impôt a un
impact disproportionné sur notre industrie. Nos entreprises sont
fortement capitalisées. La compagnie Ford, par exemple, a investi
8 milliards de dollars au Canada pendant les années 90, ce qui nous
désavantage très clairement du point de vue de l'impôt sur le
capital. C'est pourquoi, naturellement, nous avons demandé au
gouvernement de voir s'il ne pouvait pas le supprimer parce que
cela désavantage nettement les entreprises qui investissent au
Canada.
Mme Paddy Torsney: Mais l'incitatif fiscal accordé au secteur
manufacturier, les 5 p. 100... Le ministre des Finances n'acceptera
pas une recommandation du comité s'il n'a aucune idée de ce que ça
va lui coûter. Pouvons-nous retourner un ou deux ans en arrière
pour voir à combien s'élevaient en moyenne les investissements?
Pouvons-nous faire des projections pour l'avenir et essayer de voir
ce que vous aimeriez faire ou ce que vous pourriez faire? Pouvez-vous
garantir que vous allez investir dans l'équipement si vous
bénéficiez de cette mesure? Quelles sont les projections relatives
au coût d'une mesure de ce genre?
M. Michael Sheridan: Le problème, c'est qu'il y a un coût
seulement s'il y a des investissements.
Mme Paddy Torsney: En effet.
M. Michael Sheridan: Il n'y a aucun coût s'il n'y a aucun
investissement. Ces temps-ci, comme Mark l'a déjà mentionné, nous
sommes en situation de surcapacité et nous devons essayer de faire
concurrence à d'autres endroits en Amérique du Nord, principalement
pour attirer et retenir les investisseurs. Pour ce qui est de
retourner en arrière, j'ai bien l'impression que les niveaux
d'investissement ne seront pas les mêmes, pour les prochaines
années, que pendant la dernière décennie. Encore une fois, nous
allons essayer d'obtenir des mesures incitatives du gouvernement.
Je soupçonne que ce sera difficile du point de vue de l'industrie.
Bien sûr, le montant dépend des investissements. Cela ne coûte
rien si personne n'investit.
Mme Paddy Torsney: Vos chiffres de ventes pour octobre,
comparativement...
M. Michael Sheridan: Il y a certainement un problème à ce
sujet-là. Si nous étions encore en septembre, avant la crise...
Nous nous attendions tous à un ralentissement de l'industrie cette
année. Les événements du 11 septembre ont évidemment eu des
conséquences sur la confiance des consommateurs des deux côtés de
la frontière. Pour essayer de contrer cette baisse de confiance des
consommateurs, l'industrie a offert toutes sortes de choses pour
inciter les gens à acheter des véhicules. Ce qu'il faudra
déterminer, c'est si nous avons simplement devancé, en 2001, les
ventes que nous aurions réalisées en 2002 et si nous allons en
payer le prix l'an prochain. C'est la question que nous devons nous
poser. Les mois de septembre et d'octobre devraient être assez bons
pour cette année, mais ce qui nous inquiète, c'est que ce sont
peut-être des ventes de moins pour 2002.
La présidente: Monsieur Fedchun.
M. Gerald Fedchun: Je voudrais faire un commentaire sur ce que
vous avez dit au sujet des appareils qu'il serait possible
d'installer aux postes-frontières, par exemple de grosses machines
à rayons X pour radiographier des camions entiers. Cela fait partie
de l'infrastructure que nous avons recommandée. C'est évidemment
une décision que les gouvernements devront prendre des deux côtés
de la frontière, parce qu'ils seraient responsables de ces machines
et qu'ils devront approuver leur utilisation. Nous recommandons
aussi que les camions soient scellés, mais encore là, les
gouvernements devront adopter des lois pour que le niveau
d'inspection soit différent quand les camions sont scellés.
Nous approuvons toutes ces mesures. C'est le genre de méthodes
et d'équipement qui pourraient accélérer le passage de la frontière
tout en améliorant la sécurité.
La présidente: Monsieur Beatty.
M. Stephen Beatty: Merci.
• 1105
Ce qu'il faudrait faire des deux côtés, c'est examiner
l'environnement d'affaires global dans lequel nous fonctionnons et
faire les investissements nécessaires à long terme pour que le
Canada soit un endroit attrayant, non seulement pour vivre, mais
pour continuer à faire grandir nos entreprises.
C'est pourquoi, dans une large mesure, ce qu'il nous faut, ce
sont des programmes d'investissement dans l'infrastructure. Dans
certains cas, c'est lié à la question de ce qu'il en coûte
globalement pour faire des affaires au Canada, mais je ne suis pas
certain qu'il faille mettre l'accent sur les incitatifs plutôt que
d'examiner les éléments qui nous rendent compétitifs, comme pays et
comme entreprises, pour ce qui est de notre production ici au
Canada.
Si vous me permettez de suggérer une préférence au comité, je
choisirais ces investissements stratégiques plutôt que les mesures
incitatives, d'un côté comme de l'autre.
La présidente: Avant que vous poursuiviez, je vais donner la
parole à M. Jure.
M. Doug Jure (expert-conseil, DaimlerChrysler Canada;
Association canadienne des constructeurs de véhicules): Je voudrais
en revenir au passage de la frontière et à l'expédition de
marchandises de part et d'autre. Pour vous donner une idée de la
situation, je peux vous citer l'exemple de Detroit et de Sarnia, où
nous sommes un des principaux utilisateurs. Au total, nos
expéditions dans un sens ou dans l'autre s'élèvent à 1 480 par
jour. Et la valeur des véhicules que nous envoyons chaque jour aux
États-Unis par Sarnia et Detroit atteint 53 millions de dollars. La
majorité de ces expéditions se font par camion. Je peux vous
assurer que notre compagnie serait très intéressée à explorer
toutes les technologies permettant de faciliter les inspections à
la frontière.
Il y a aussi des questions relevant de la compétence des
provinces, par exemple les registres électroniques que nous devons
tenir quand nos camions circulent en Ontario; nous y travaillons.
Il y a une foule de questions qui se rattachent à tout ça, mais ça
vous donne une petite idée du trafic à la frontière.
Mme Paddy Torsney: Que se passe-t-il pour votre personnel en
ce qui concerne les formalités d'immigration? Est-ce qu'il y a des
retards? Est-ce que c'est un problème si vous voulez amener un
nouveau président qui vient d'ailleurs, ou est-ce que vos employés
éprouvent des difficultés quand ils doivent passer la frontière
canado-américaine?
M. Doug Jure: Il y a parfois des problèmes. Entre Windsor et
Auburn Hills, nous avons 400 employés qui traversent constamment la
frontière. Il y a des jours où ils ont du mal à entrer au Canada,
mais le lendemain, tout va bien.
Mme Paddy Torsney: D'accord.
M. Gerald Fedchun: Les choses ont été difficiles pendant un
bout de temps, mais c'est variable. Un des problèmes, du côté
américain, c'est que les agents d'immigration des États-Unis ont
beaucoup de latitude. Quand j'étais à ITT, un de mes vice-présidents a été
refoulé à la frontière un jour qu'il se rendait à
notre siège à social à Detroit parce qu'il n'avait pas répondu
correctement à leurs questions. Ce sont des choses qui arrivent,
mais en général, cela ne pose pas de problème grave.
Pour le moment, c'est simplement le volume—plutôt que les
questions posées—qui a ralenti considérablement le passage des
personnes. Il faut espérer que les ajouts de personnel du côté
américain vont aider à régler le problème. Depuis un mois environ,
c'est simplement un problème de main-d'oeuvre.
La présidente: Merci, madame Torsney.
Nous poursuivons.
Monsieur Strahl, s'il vous plaît.
M. Chuck Strahl: Merci, madame la présidente.
Je remercie les représentants de l'industrie d'être venus
aujourd'hui. Leurs présentations étaient intéressantes. Je pense
que vous nous avez tous donné une meilleure idée de l'urgence de la
situation, ce qui est important.
Le ministre a dit plus tôt ce matin que l'industrie du
tourisme était en quelque sorte le canari dans la mine et que les
problèmes allaient se manifester d'abord dans le secteur du
tourisme. Mais il est certain que, dans le secteur de la
fabrication, c'est vous qui faites office de canari. Tous vos
commentaires sont extrêmement importants pour nous, et nous tenons
à répondre le mieux possible à vos préoccupations.
Je me demande bien pourquoi le ministre de l'Industrie n'a pas
rencontré son homologue américain, surtout si, comme quelqu'un l'a
mentionné, l'administration américaine ne veut pas rencontrer les
représentants de la plus grosse industrie des deux pays. Je ne sais
pas ce que nous allons pouvoir faire avant le 15 novembre, à part
nous faire l'écho de ce sentiment d'urgence.
Je voudrais faire deux ou trois commentaires avant de poser ma
question.
Je vous encourage fortement à continuer à lier
l'assainissement de l'environnement à la vente de vos véhicules
neufs. C'est une question très importante en Colombie-Britannique.
Nous dépensons là-bas des dizaines de millions de dollars par année
pour vérifier les émissions des véhicules qui ont déjà une
vingtaine d'années et qui polluent dix fois plus que les véhicules
neufs.
• 1110
Pour ce qui est de la sécurité, il me semble que nous allons
voir diverses choses à ce sujet-là. Il y a les questions de
sécurité personnelle, par exemple la sécurité d'emploi, le
sentiment de sécurité, la sécurité des voyageurs. Ce sont des
choses personnelles. Il y a la sécurité économique de notre pays et
de votre industrie, qui est reliée au reste et qui est également
importante. Et il y a évidemment aussi la sécurité physique, ce qui
se rattache au périmètre de sécurité que le Président a évoqué.
Je pense que nous devons tous, dans toutes nos conversations,
faire bien comprendre que tout cela est relié. Nous devons nous
occuper de ce sentiment de sécurité. Il est autant psychologique
que réel, mais nous devons nous en occuper et relier toutes ces
choses.
Il y a deux points qui m'intéressent. J'aurais voulu parler de
la Loi sur la concurrence, mais nous avons réservé ça pour un autre
jour.
Il y a une chose que personne n'a mentionnée, et c'est la
ferveur patriotique qui anime les Américains en ce moment. Encore
une fois, que ce soit réel ou imaginaire, j'ai l'impression qu'il
y a des gens dans certaines industries—et je me demande si c'est
le cas dans la vôtre—qui craignent que les sociétés mères
rapatrient une partie de leurs activités aux États-Unis pour en
retirer en quelque sorte une prime au patriotisme et que le slogan
«produit des États-Unis»—qui est excellent, d'ailleurs, tout comme
«produit au Canada»—serve d'excuse pour ramener l'industrie aux
États-Unis.
J'aimerais savoir si vos sociétés mères ou si les membres de
votre industrie sont inquiets de cette éventualité parce que j'ai
l'impression que, même s'il y a une industrie nord-américaine de
l'automobile à laquelle nous sommes inexorablement liés, ce qui est
tant mieux, les sociétés mères pourraient bien se servir de ça
comme prétexte. Qu'est-ce que vous en pensez?
Deuxièmement, dans les industries qui appliquent la méthode
juste à temps, combien de temps faut-il pour que les gens fassent
des changements dans leurs investissements?
Monsieur Fedchun, vous avez dit par exemple que, si nous ne
réglons pas les questions liées au périmètre de sécurité,
l'industrie risque de dépérir. Je doute que ça se produise demain.
Mais ce que vous dites, c'est que les investissements, les efforts
de modernisation, et ainsi de suite seront mis de côté si nous ne
réussissons pas à nous organiser.
Combien de temps avons-nous? Jusqu'au 15 novembre? Encore six
mois? Ou alors, est-ce que ça va se faire graduellement? Est-ce
qu'il y a des dates clés pour l'industrie, à votre avis?
Il y a donc deux choses. Est-ce que les gens de votre
industrie s'inquiètent de ce sentiment patriotique, et que pouvons-nous
faire pour y remédier? Et qu'est-ce que si passe pour les
industries qui appliquent la méthode juste à temps?
M. Gerald Fedchun: Je peux répondre à votre deuxième question,
mais je ne suis pas qualifié pour répondre à l'autre puisque la
majorité des membres de mon association appartiennent à des
intérêts canadiens. Mais je peux répondre à votre question sur la
production juste à temps.
C'est lié aux changements de modèles, parce qu'il y a des
appels d'offres pour chaque modèle. Supposons par exemple que le
modèle 2004 de la Toyota Camry doive être redessiné. Votre
entreprise fait une offre et obtient le contrat. Il s'agit
maintenant de savoir où vous allez produire le nouveau modèle.
C'est alors que la question va se poser et, évidemment, ça se
passe... Nous avons des centaines de modèles produits en Amérique
du Nord. La question va se poser chaque fois qu'il y aura un appel
d'offres pour un nouveau modèle.
C'est pourquoi les choses vont se faire graduellement, parce
que 10 à 15 p. 100 des modèles sont changés chaque année; chaque
modèle dure en moyenne de trois à quatre ans avant d'être modifié
de façon significative. Ce sera donc un changement très graduel,
comme la marée qui se retire très lentement.
M. Stephen Beatty: Monsieur Strahl, je ne pense pas qu'il y
ait une seule et unique réponse à votre question.
Je suis ici aujourd'hui avec un collègue de notre usine,
Greig Mordue. Greig est en train d'aider à organiser la production
d'un tout nouveau modèle en janvier. Nous avons déjà annoncé que la
production de la Lexus se ferait maintenant au Canada.
Donc, nous sommes encore en phase d'expansion au Canada, et
les investissements vont se poursuivre un certain temps. Mais notre
entreprise n'en est pas à la même étape de son histoire que les
autres compagnies qui sont représentées ici.
• 1115
Comme je l'ai déjà dit, nous en sommes actuellement à une
belle étape dans l'histoire de notre croissance. Ce n'est pas le
cas de toutes les compagnies.
La présidente: Monsieur Sheridan.
M. Michael Sheridan: Merci.
Pour commencer, en réponse à votre premier commentaire sur le
message à saveur écologique dont se servent les fabricants pour
vendre leurs véhicules au Canada, c'est clairement une question
dont nous avons tenu compte dans l'industrie en général, et chez
Ford en particulier.
Vous avez dit qu'un véhicule de dix ans était dix fois plus
polluant qu'un neuf. En réalité, il l'est 22 fois plus. C'est donc
encore plus important que vous le dites. Nous sommes très fiers
d'avoir mis sur le marché des véhicules peu polluants.
Sur la question du patriotisme, nous produisons 600 000
voitures et camions légers au Canada. Nous avons le mandat mondial
pour la production de la Windstar, de même que pour la Crown
Victoria et la Grand Marquee, pour la compagnie Ford. À l'usine de
camions ontarienne, nous produisons aussi les camionnettes de la
série F. Je ne pense pas que la ferveur patriotique que vous avez
évoquée aura des répercussions importantes sur nos usines. Nous
produisons aussi, à Windsor, en Ontario, 1,5 million de moteurs
destinés principalement au marché américain.
Nous sommes très fiers de notre présence au Canada. Et je ne
crois pas que le sentiment patriotique aura des effets
significatifs.
Un petit détail au sujet de la méthode juste à temps: quatre
heures après leur départ de Windsor, nos moteurs se retrouvent dans
un camion du Michigan. La frontière est donc extrêmement importante
pour nous. Encore une fois, nous expédions entre 1,1 et 1,2 million
de moteurs de Windsor vers les États-Unis, à destination de huit de
nos quinze usines d'assemblage. Ce délai de quatre heures est notre
point de référence. Quand il y a eu des problèmes à la frontière le
11 septembre, il y a des usines qui ont dû fermer des deux côtés de
la frontière parce qu'il était impossible de transporter nos
moteurs vers le marché.
En ce qui concerne les décisions d'investissement, il s'en
prend chaque jour. Nous investissons dans le monde entier, et dans
toute l'Amérique du Nord. Quand nous prenons ces décisions, nous
tenons compte des éléments et des facteurs qui nous touchent au
jour le jour. Il n'y a pas vraiment de fenêtre précise. C'est une
question cruciale qu'il faut régler le plus vite possible.
La présidente: Monsieur Fedchun.
M. Gerald Fedchun: Je voulais faire un commentaire au sujet du
patriotisme. Les gens n'oublient jamais qui sont leurs amis.
Si j'ai bien compris, le NCSM Vancouver vient de partir pour
le Moyen-Orient. Je pense que c'est le sixième navire canadien en
service là-bas.
Le 11 septembre, il y a environ 150 avions qui ont été
détournés vers le Canada. Les passagers ont été hébergés dans des
communautés de tout le pays, parfois même chez l'habitant. Il y a
une foule de gens qui ont parlé de cette hospitalité aux États-Unis. Elle
a reçu énormément de publicité. Je ne dirais pas que
c'est hors de proportion avec ce qui est arrivé; c'est
proportionnel aux sentiments d'amitié et d'hospitalité que les
événements ont suscités. Les Canadiens sont des gens généreux. Je
ne pense pas que ce soit oublié plus tard, quand chacun devra se
demander qui sont ses amis.
M. Chuck Strahl: J'espère que vous avez raison. Je suis
d'accord avec vous. À certains égards, je pense que nous devons
rebâtir certains des liens d'amitié que nous entretenions avec nos
partenaires américains. Bien franchement, je pense qu'ils ont
parfois été malmenés ces dernières années.
Je suis d'accord avec vous. Il est important que nous fassions
notre part, tant pour lutter contre le terrorisme que pour montrer
que nous sommes prêts à tenir compte des préoccupations du
Président, et aussi de celles de M. Harris, de M. Campbell et de M.
Landry, au sujet du périmètre de sécurité. C'est une question qui
touche particulièrement votre industrie, mais d'autres aussi.
Est-ce que j'ai le temps de poser une autre question?
Les décisions relatives aux investissements et aux efforts de
modernisation vont être cruciales pour l'avenir de l'industrie. Une
usine qu'on laisse dépérir est condamnée à mort. La modernisation
est importante, et le réinvestissement aussi.
Est-ce qu'un d'entre vous serait prêt à me dire à quel point
il est important que le Canada et les États-Unis harmonisent leurs
lois sur la concurrence? Il y aura probablement une entente
bilatérale une fois que cet examen sera terminé. Est-ce que c'est
un élément qui vous préoccupe? Pensez-vous que vous pourriez
devenir des victimes? Est-ce qu'il est possible, d'une manière ou
d'une autre, d'avoir une politique de concurrence harmonisée entre
le Canada et les États-Unis?
M. Gerald Fedchun: Je peux répondre. Je ne sais pas quelles
sont les différences. Je suis gêné de le dire, parce que j'ai une
maîtrise en droit et que j'ai étudié le droit de la concurrence
avec un spécialiste il y a vingt ans. Malheureusement, je ne
m'occupe plus de ce domaine depuis dix ans. Je savais où se
situaient les différences, mais je ne le sais plus. Mes collègues
sont probablement dans la même situation. Nous devrons trouver un
peu plus d'information avant de pouvoir vous répondre.
M. Chuck Strahl: Certainement.
Je vais donc conclure. M. von Finckenstein nous a montré un
exemple d'une éventuelle entente bilatérale entre le Canada et les
États-Unis. Dans le cas des industries qui appliquent la méthode
juste à temps, en particulier, je dirais qu'il est important que
vous soyez convaincus que cette entente répond à toutes vos
attentes. C'est une possibilité. Des lois antimonopoles, ou de
bonnes lois sur la concurrence, sont importantes pour les
industries comme la vôtre. Je dirais qu'il faut des dispositions au
sujet de la frontière, parce que c'est une possibilité. Tous les
moyens pourront être—et seront—utilisés contre vous, dans une
industrie aussi compétitive que la vôtre doit l'être.
Si vous avez le temps, et surtout si vous avez les
connaissances nécessaires, je vous incite fortement à y jeter un
coup d'oeil et à vous assurer que ça répond à vos attentes.
Merci.
La présidente: Monsieur Nantais, vous voulez répondre?
M. Mark Nantais: Je voudrais ajouter quelque chose, monsieur
Strahl. Premièrement, l'ACCV va présenter un mémoire au comité qui
étudie la Loi sur la concurrence.
Deuxièmement, vous avez soulevé une question très
intéressante. Nous allons examiner la chose et y réfléchir.
La présidente: Merci beaucoup.
Je dois préciser aux membres du comité que bon nombre des
entreprises sont membres du CCCE, qui a déjà comparu devant le
comité pour exprimer ses préoccupations sur certains aspects de la
question.
Nous allons maintenant passer à M. Volpe.
M. Joseph Volpe: Merci, madame la présidente. Je voudrais
poser quelques questions très brèves. Elles ne se rattachent peut-être
même pas précisément au sujet du jour.
Je voudrais d'abord vous remercier de la franchise et de
l'ouverture d'esprit dont vous avez fait preuve ce matin dans notre
discussion sur la frontière. Cela m'a certainement donné une
meilleure idée de la situation de l'industrie.
Je prends bonne note également du fait que M. Armstrong a
injecté un certain optimisme dans sa présentation en disant que les
ventes pourraient augmenter bientôt. Il s'y attend, et j'imagine
qu'il y travaille.
Je n'ai pas noté le même optimisme chez M. Nantais. C'est
peut-être parce qu'il n'a pas tout à fait mis l'accent sur les
mêmes choses.
Monsieur Nantais, quand vous nous avez présenté votre analyse
comparative des prix, je vous ai peut-être mal compris ou mal
entendu. Il me semble vous avoir entendu dire qu'il y avait une
différence d'environ 3 000 $, en faveur du Canada, pour un véhicule
moyen. Si j'ai bien compris ce chiffre, ça voudrait dire que les
consommateurs canadiens sont considérablement avantagés quand ils
veulent acheter un véhicule typique assemblé ou fabriqué en
Amérique du Nord, comparativement aux consommateurs américains.
Est-ce que je vous ai bien compris?
M. Mark Nantais: En fait, pour ce qui est du prix d'achat des
véhicules en fonction d'une devise commune, les Canadiens sont en
meilleure posture. Cependant, une fois qu'on ajoute les taxes et
tout le reste, c'est plutôt l'inverse.
Je tiens à préciser, au sujet de cette comparaison du prix
moyen des transactions par rapport au revenu personnel disponible,
que les Canadiens avaient besoin de 105 p. 100 de leur revenu
personnel disponible pour acheter un véhicule en 1991, alors qu'il
en fallait 98 p. 100 pour les Américains.
Tout au long des années 90, il est devenu de plus en plus
facile pour les Américains d'acheter un véhicule. Il ne leur
fallait plus que 96 p. 100 de leur revenu personnel disponible,
alors que c'est exactement le contraire qui s'est produit au
Canada. La proportion est montée jusqu'à 146 p. 100 du revenu
personnel disponible, pour un véhicule moyen, compte tenu des prix
des transactions et en dépit du fait que les Canadiens pouvaient,
en fonction d'une devise commune, acheter un véhicule pour 3 100 $
de moins en moyenne qu'aux États-Unis.
M. Joseph Volpe: Je sais que vous comparez des statistiques,
mais vous n'analysez pas—du moins, pas à mon avis—les raisons
pour lesquelles il en est ainsi. Mais je n'ai pas l'intention de
vous demander de le faire maintenant.
Est-ce que c'est une question de productivité du côté
canadien? Je sais que vous n'avez pas voulu dire que c'est
strictement à cause des taxes. En fait, est-ce que c'est parce
qu'au Canada, non seulement le revenu disponible, mais aussi le
revenu relatif ont diminué tandis que le revenu des Américains
augmentait?
• 1125
J'ignore si l'un ou l'autre de ces facteurs entre en jeu, mais
puisque vous avez dit quand nous parlions du passage de la
frontière que c'était un facteur très important pour attirer les
investisseurs du côté canadien de la frontière, j'ai pensé que je
pouvais soulever la question. J'aurais besoin de mieux comprendre
quelle pourrait être la dynamique à cet égard. Je ne le dis pas
dans un sens négatif, parce que je suis vraiment satisfait de la
façon dont vous avez tous abordé la question de la frontière ce
matin. Vos commentaires ont été extrêmement intéressants.
Je devrais peut-être reposer ma question à un autre moment,
quand nous nous pencherons sur autre chose, mais j'aimerais quand
même connaître vos réflexions à ce sujet-là.
M. Michael Sheridan: Je peux essayer.
Je pense qu'il faut aborder la question sous deux angles:
d'abord, le marché des véhicules au Canada, c'est-à-dire la vente
de véhicules aux consommateurs canadiens; et ensuite, la production
de véhicules au Canada, principalement en vue de leur exportation
vers les États-Unis, le Mexique et d'autres pays du monde.
Quand on regarde les ventes de véhicules aux Canadiens, on se
rend compte que, dans l'ensemble, pour tous les fabricants établis
au Canada, nous faisons des profits moins élevés sur les véhicules
que nous vendons aux consommateurs canadiens parce que les prix que
nous leur demandons sont plus bas qu'ils le seraient sur le marché
américain. Et, à mon avis, c'est tout simplement parce que les
consommateurs canadiens ont un revenu disponible moins élevé pour
s'acheter des véhicules.
Cela s'est manifesté de différentes façons. Par exemple, il y
a eu moins de véhicules vendus au Canada dans les années 90 que
dans les années 80. C'est tout à fait particulier à notre
industrie. Sur la plupart des marchés du monde, il s'est vendu plus
de véhicules dans les années 90 que dans les années 80, mais il
s'en est vendu moins au Canada, notamment parce que le revenu
disponible des Canadiens est resté stagnant pendant une bonne
partie des années 90. Il y a même eu un déclin entre 1990 et 1994-1995,
avant que les choses se rétablissent un peu vers la fin de la
décennie.
M. Joseph Volpe: Vous pourriez m'aider à comprendre un peu
mieux si vous me donniez une idée du nombre de voitures par
habitant au Canada comparativement aux États-Unis ou à la France,
par exemple.
M. Michael Sheridan: Eh bien, comparativement aux États-Unis,
où on compte en moyenne deux véhicules par ménage, il y en a
environ 1,6 au Canada.
Au Canada, la segmentation penche aussi en faveur des petits
véhicules. Les petites voitures ordinaires, par exemple, y occupent
près de 60 p. 100 du marché, comparativement à 30 p. 100 environ
aux États-Unis. Donc, la segmentation s'est déplacée, au Canada,
vers les véhicules plus petits, plus abordables, et le nombre de
véhicules par ménage est plus bas au Canada qu'aux États-Unis.
Je ne sais pas si ça vous aide.
M. Joseph Volpe: Oui, c'est intéressant; je vous remercie.
M. Stephen Beatty: J'aimerais ajouter qu'il y aussi des
répercussions, premièrement, sur les fabricants d'automobiles eux-mêmes
et, deuxièmement, sur l'économie en général.
De toute évidence, si nous avons des marges bénéficiaires plus
faibles au Canada, notre capacité de réinvestir notre argent est
limitée, et c'est pourquoi la question des prix abordables
préoccupe tout le monde dans le secteur de l'automobile depuis
quelques années. Je vous dirais également que, comme fabricants
d'automobiles, nous sommes évidemment en concurrence les uns avec
les autres sur le marché. Nous essayons tous désespérément de
repositionner nos véhicules de manière à ce qu'ils soient plus
abordables pour les Canadiens et qu'ils nous permettent de réaliser
des profits.
C'est la raison pour laquelle, par exemple, quand nous avons
lancé notre nouvelle Camry en septembre, nous avons offert un
véhicule qui, grâce à des baisses de prix et à un nouveau contenu,
permettait aux consommateurs d'en avoir 3 000 $ de plus pour leur
argent par rapport au modèle qu'il remplaçait. Mais il y a des
limites très concrètes à ce que nous pouvons faire et aux moyens
que nous pouvons prendre pour faire bénéficier les consommateurs de
ces améliorations de fabrication et de ces baisses de coût.
Donc, nous travaillons aussi fort et aussi vite que possible
pour offrir des véhicules abordables de notre côté. Mais c'est une
des questions économiques plus vastes sur lesquelles nous allons
devoir nous pencher si nous voulons assurer la santé à long terme
de notre secteur—des deux côtés.
M. Joseph Volpe: Je vais dire à mes enfants que nous ferions
mieux de commencer à viser la moitié inférieure de cette moyenne,
chez nous en tout cas.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Volpe.
C'est maintenant au tour de M. Rajotte, s'il vous plaît.
M. James Rajotte: Merci, madame la présidente.
Je tiens à remercier tous les invités qui ont comparu
aujourd'hui, pour leurs déclarations et en particulier pour les
recommandations très précises qu'ils nous ont présentées. Je leur
en suis très reconnaissant.
• 1130
Je voudrais poursuivre la discussion sur les questions
soulevées par M. Volpe, à savoir qu'il s'est vendu moins de
voitures au Canada dans les années 90 que dans les années 80. Si
j'ai bien compris, le Canada est le seul pays de l'OCDE où ça s'est
produit—ce qui m'a particulièrement frappé—et c'est lié au revenu
personnel disponible des Canadiens. La proportion est passée de 98
à 96 p. 100 aux États-Unis, et de 105 à 146 p. 100 au Canada,
n'est-ce pas?
Est-ce que vous, vos associations ou vos industries avez une
idée de la raison pour laquelle le revenu disponible a chuté à un
point tel au Canada?
M. Michael Sheridan: Tout au long des années 90, le revenu
disponible nominal n'a pas chuté; il a augmenté, en fait, mais pas
aussi rapidement qu'aux États-Unis. Comme Mark l'a dit tout à
l'heure, nous avons applaudi quand le gouvernement a annoncé
diverses initiatives visant à réduire les impôts au mois d'octobre
de l'an dernier—le moment était bien choisi pour notre industrie,
étant donné le ralentissement qui s'était amorcé en octobre.
L'augmentation du revenu disponible, grâce à l'amélioration de la
situation fiscale des Canadiens, nous a aidés à atténuer le déclin
prévu pour l'industrie en 2001. Donc, la question du revenu
disponible se rattachait en partie au problème de la fiscalité, qui
a été réglé dans une certaine mesure l'an dernier en octobre.
M. James Rajotte: Vous avez dit que la question se rattachait
«en partie» à la fiscalité. Et à quoi d'autre?
M. Michael Sheridan: Elle se rattache en partie aussi à la
croissance de l'emploi. Quand on compare le taux de chômage au
Canada et aux États-Unis, on constate que, même à 7 p. 100, il est
beaucoup plus élevé ici. La productivité est certainement un
facteur également.
M. James Rajotte: Est-ce que quelqu'un d'autre veut commenter?
Toujours sur ce point, dans ce cas, les baisses d'impôt qui
ont été recommandées touchaient surtout les entreprises. Comme vous
l'avez mentionné, il y avait des baisses d'impôt à la fois pour les
entreprises et pour les particuliers dans l'exposé budgétaire du
mois d'octobre. Évidemment, il y a des gens de ce côté-ci qui
pensent que nous devrions aller plus vite et plus loin dans le sens
de la réduction des impôts des particuliers, comme de ceux des
entreprises. Pensez-vous que ce soit nécessaire, compte tenu en
particulier des répercussions des événements du 11 septembre?
M. Gerald Fedchun: À mon avis, les réductions les plus
importantes pour les entreprises se rattachent—du moins de notre
point de vue—aux coûts de la recherche et du développement.
L'industrie s'est restructurée, ce qui fait que nos clients, les
autres constructeurs, confient plus d'activités de R-D aux
fabricants de pièces. Ces constructeurs impartissent non seulement
la production de pièces et de modules, mais également leur mise au
point technique.
Pour que l'industrie canadienne des pièces bénéficie de sa
juste part—ou plutôt, comme j'aime à le dire, pour qu'elle
obtienne plus que sa juste part—, nous devons faire plus de R-D.
Nous espérons donc que le gouvernement conservera le crédit d'impôt
à la R-D, et même qu'il l'améliorera. Je sais qu'il est déjà très
généreux.
AUTO 21 est une nouvelle initiative parrainée par le
gouvernement fédéral; nous l'attendions avec impatience parce que
c'est une autre façon de favoriser la R-D au Canada. Nous sommes
très contents de cette initiative, qui nous permettra de continuer
à assumer plus que notre juste part des activités de production et
des activités connexes de mise au point. Ces activités de mise au
point apportent aussi des emplois de grande valeur, et amènent des
travailleurs techniques bien formés et bien rémunérés.
M. James Rajotte: Sur la question du crédit d'impôt à la R-D,
j'ai eu l'occasion de visiter l'été dernier des entreprises de
technologie de tout le Canada. Les gens de ces entreprises m'ont
dit à peu près la même chose, à savoir qu'ils étaient tout à fait
en faveur du crédit d'impôt à la R-D. Une de leurs préoccupations,
c'est que le système utilisé au Canada pour appliquer ce crédit
d'impôt change souvent, tout comme les règlements qui s'y
rattachent, ce qui les oblige à s'ajuster chaque année. Ils ont
trouvé la situation très difficile de ce point de vue-là. Mais les
choses étaient alors moins stables, et il leur était plus difficile
de planifier les prochaines années à cause des modifications
apportées par le gouvernement à son crédit d'impôt. Avez-vous vécu
le même genre de chose dans vos industries?
M. Gerald Fedchun: En 1998, le ministre du Revenu de l'époque
a tenu un important séminaire sur le crédit d'impôt à la R-D à
Vancouver; ça nous a été très utile. Ce séminaire a donné naissance
à un comité conjoint de l'industrie et du gouvernement, et les gens
du secteur de l'automobile ont rencontré les représentants du
gouvernement pour leur dire: «Voilà comment nous faisons notre R-D.
Comment est-ce que ça concorde avec vos formalités
administratives?» Le gouvernement nous a beaucoup aidés. Nous avons
établi une nouvelle série de lignes directrices du côté de
l'industrie automobile, ce qui a rendu les choses plus prévisibles.
• 1135
M. James Rajotte: Merci.
La présidente: Claude Drouin.
[Français]
M. Claude Drouin (Beauce, Lib.): Merci, madame la
présidente. Merci à nos témoins de leurs
présentations devant le comité ce matin.
On est tous
conscients, à la suite des événements du 11 septembre
dernier, de l'importance de la sécurité et, en même
temps, de la problématique que ça peut causer au
niveau de la fluidité des passages aux frontières.
Vous avez mentionné, monsieur Fedchun, que nous
importions plus de pièces que nous en exportions, mais
dans votre introduction, vous mentionnez qu'on aurait
l'obligation d'ouvrir des entrepôts de l'autre côté.
Il me semble que ça devrait être la même chose pour les
Américains, qu'ils devraient avoir l'obligation, eux aussi,
d'avoir des entrepôts chez nous. Ils ont sûrement la
même problématique que nous.
[Traduction]
M. Gerald Fedchun: Vous avez tout à fait raison, et c'est
pourquoi nous avons des alliés importants aux États-Unis; nous
voulons être certains que la frontière restera ouverte. Notre
industrie est pleinement intégrée. Le Canada tire un bénéfice net
du secteur de l'automobile parce que nous importons plus de pièces
que nous n'en exportons, tandis que nous exportons beaucoup plus de
véhicules finis que nous n'en importons. La balance commerciale
avec les États-Unis penche donc en notre faveur pour l'ensemble du
secteur de l'automobile. Mais il y a bien des gens des deux côtés
de la frontière pour qui c'est une question très importante.
[Français]
M. Claude Drouin: Oui, je pense que c'est
important. Dans votre
présentation, vous avez mentionné
les nouvelles technologies et
la façon de faire pour faciliter le passage ou le transport
des pièces ou de l'équipement. Je pense que vous avez
à travailler avec nos compagnies américaines de l'autre côté
et à faire des propositions aux deux
paliers de gouvernement pour assurer que la
marchandise passe le plus rapidement possible la
frontière.
C'était mon commentaire, madame la
présidente.
[Traduction]
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Drouin.
Je voudrais revenir à quelques commentaires qui ont été faits
tout à l'heure. Mme Torsney a posé des questions sur le crédit
d'impôt à la fabrication et sur le coût de cette mesure incitative.
Je me demande ce qu'il en coûterait de ne pas adopter de mesure de
ce genre. Je ne sais pas si M. Jure pourrait nous en parler.
Je regarde ce qui s'est passé à Windsor, par exemple, où le
projet relatif à l'usine DaimlerChrysler a été mis de côté
temporairement en janvier. Il en coûte très cher pour construire ou
remettre en service une usine de ce genre, et pourtant ça a été mis
de côté. Il me semble que ce serait un incitatif qui permettrait de
créer ou de garder des milliers d'emplois au Canada. Je pourrais
peut-être avoir l'autre...
M. Doug Jure: Je pense que si vous regardez la situation de
DaimlerChrysler au troisième trimestre de l'an prochain... Depuis
notre restructuration, près de 5 000 de nos employés ont quitté la
compagnie, soit parce qu'ils ont pris une retraite anticipée, soit
parce qu'ils ont été mis à pied. Il y a deux usines qui ont été
fermées: l'usine de camions Western Star à Kelowna et l'usine
d'autobus Thomas Built juste au sud de London. Il y a aussi la
question de l'usine de Pillette, qui n'a toujours pas de mandat de
production.
Ce que ça veut dire pour nous, c'est que, comme pour la
question de la frontière, nous devons bénéficier de certains
incitatifs en tant que multinationale germano-américaine. Nous
sommes en concurrence avec différents États américains qui sont
assez généreux de ce côté-là, en particulier en ce qui concerne la
formation, les subventions et les autres mesures d'encouragement de
cette nature.
Donc, ce que nous recommandons au sujet de ces taxes, ainsi
que des mesures qui permettraient de faire des affaires au Canada
plus facilement et à moindre coût, fait partie des facteurs. Tout
ça a une influence. Comme l'a dit Michael, il se prend des
décisions chaque jour, et notre industrie a une énorme surcapacité.
Dans le cas du Freightliner, l'usine de Portland ne sera pas
fermée, mais celle de la Colombie-Britannique le sera. C'est peut-être une
indication de la présence que doivent avoir les
gouvernements, tant au fédéral qu'au provincial.
La présidente: Sur ce point, quand nous parlons des
répercussions des problèmes à la frontière et que nous examinons
les décisions prises, il est très difficile de savoir exactement ce
qui se passe.
J'ai écouté M. Beatty parler des projets pour les prochains
mois; il me semble—corrigez-moi si je me trompe—que l'industrie
automobile planifie pour les trois ou quatre années à venir. Il y
aura donc certains projets qui iront de l'avant parce que les
décisions ont déjà été prises, que les coûts sont déjà prévus dans
bien des cas et que les investissements ont commencé.
Quand l'économie américaine se redressera dans trois ans et
que nous chercherons à analyser rétrospectivement ce qui s'est
passé, je crains fort que les constructeurs d'automobiles... Il y
a des fabricants de pièces et de moules, dans ma circonscription,
qui s'inquiètent de voir que les clients ne viennent pas de ce
côté-ci. Donc, quand on entend parler de véhicules de tourisme et
de véhicules commerciaux, je pense qu'il y a un malentendu. Ces
véhicules de tourisme transportent aussi des gens d'affaires, pas
seulement des touristes.
Le tourisme a été durement touché à Windsor, mais les affaires
également. Ces véhicules-là, qui ne viennent pas de ce côté-ci de
la frontière, appartiennent à des gens qui prennent des décisions
au sujet de l'achat de pièces ou de l'utilisation des installations
de fabrication de moules. Ils disent qu'ils ne peuvent pas venir au
Canada en ce moment; il y a bien sûr l'attente du côté canadien,
mais aussi le fait qu'ils ne savent pas combien de temps il leur
faudra pour rentrer aux États-Unis. Il y a toujours de longues
attentes pour les gens qui veulent entrer aux États-Unis dans des
véhicules de tourisme—parfois jusqu'à deux heures et demie, selon
l'heure de la journée.
Je m'inquiète beaucoup de ce qui va se passer jeudi et des
conséquences que ça pourrait avoir. Nous savons que les Américains
veulent autoriser l'embauche de personnel additionnel, mais il
faudra de neuf à douze mois de formation avant que ces gens-là
soient en poste à la frontière. Je ne sais pas très bien qui va
assumer le coût de la Garde nationale. C'est sur cette question que
porte le débat en ce moment aux États-Unis.
Les Américains se préoccupent de la sécurité autant que nous,
parce qu'il ne s'agit pas seulement d'avoir de l'équipement et de
savoir qui traverse la frontière. La sécurité dépend de la
viabilité économique. Les autorités, à Washington, ont beau se
concentrer actuellement—et à juste titre—sur l'actualité, sur les
menaces quotidiennes et sur le problème de l'anthrax, elles
reconnaissent aussi que leur viabilité économique est essentielle
à leur propre sécurité.
Nous devons chercher une solution ensemble et changer notre
message au sujet de la frontière. La frontière est une priorité
parce que c'est aussi une priorité en matière de sécurité. Ce que
je déplore, c'est qu'il est très difficile d'obtenir des
statistiques au sujet des décisions prises. Comme l'a souligné M.
Sheridan, il y a des investissements tous les jours. Je suis sûre
que M. Beatty partage les sentiments de M. Jure et de M. Thomas,
mais comment pouvons-nous obtenir ces chiffres? Et comment pouvons-nous
transmettre cette information jusqu'en haut de l'échelle,
jusqu'aux gens qui prennent les décisions au sommet? Nous essayons
de leur parler, de les influencer et de leur faire comprendre que
l'industrie automobile se trouve actuellement dans une situation
difficile à cause de la question de la frontière. Comment pouvons-nous
divulguer cette information alors que certaines des décisions
sont des décisions stratégiques en matière d'investissements, que
vous ne voulez évidemment pas mettre à la portée de vos
concurrents? Je ne sais pas vraiment comment fournir la bonne
information aux gens.
Y a-t-il des commentaires à ce sujet-là? Monsieur Jure.
M. Doug Jure: Tout d'abord, pour ce qui est de l'information
que je vous ai fournie tout à l'heure au sujet du trafic à la
frontière, je ne pense pas que les gens de Ford ou de GM soient
extrêmement surpris d'apprendre que nous sommes un des plus gros
utilisateurs du pont Ambassador. Vous n'avez qu'à regarder les
camions. Mais l'information à laquelle j'ai fait allusion a été
préparée à Washington et, comme nous l'avons dit tout à l'heure,
nos bureaux à Washington la transmettent aux différents échelons de
la bureaucratie américaine. Cela ne fait aucun doute. Et je pense
que cette information a aussi été transmise au ministre Manley
quand il est allé rencontrer le gouverneur Ridge à Washington.
Donc, nous faisons notre part de ce côté-là, puisque notre
multinationale participe à ces échanges d'information. Mais je
pense qu'il faut également définir en quoi consiste la sécurité. Il
y a différents niveaux de risque, et nous sommes au plus bas
niveau. La stratégie doit tenir compte de ce faible risque dans le
cas de notre industrie.
La présidente: D'autres commentaires? Monsieur Fedchun.
M. Gerald Fedchun: Vous avez parlé des gens qui traversent
souvent la frontière. Il me semble que nous pourrions leur
faciliter beaucoup la vie en utilisant un système de cartes de
haute sécurité pour les gens qui voyagent beaucoup, pour qu'ils
puissent avoir leur propre file d'attente et traverser la frontière
très rapidement. La mise en oeuvre d'un système de ce genre est une
de nos priorités parce que nous avons énormément de gens—des
ingénieurs et des vendeurs—qui traversent très souvent la
frontière puisque notre industrie est tellement intégrée. Pour
pouvoir vendre des produits de l'autre côté de la frontière, il
faut d'abord concevoir ces produits et les vendre, et c'est ce que
ces gens-là font.
La présidente: Monsieur Beatty.
M. Stephen Beatty: Madame la présidente, je voudrais faire
quelques commentaires. Dans notre présentation préliminaire, nous
avons évidemment déclaré qu'il fallait régler les questions de la
sécurité et du transport des marchandises au-delà de la frontière.
Mais la grande question, que vous avez soulevée d'ailleurs, c'est
de savoir où le Canada s'en va et quels seront les investissements
dans notre secteur à la lumière de ce qui s'est passé le 11
septembre et de la situation depuis lors. Je dirais qu'à bien des
égards, cela n'a rien changé aux décisions qui doivent se prendre
dans notre secteur. Il y a des restructurations dans tous les
grands secteurs économiques. Il y a des compagnies qui vont prendre
de l'expansion, et il y en a d'autres qui vont devoir annuler des
projets d'investissement.
Le défi pour le Canada—et je peux le dire au nom de Toyota et
de toutes les autres compagnies internationales qui s'intéressent
au Canada—sera de faire de notre pays le meilleur endroit au monde
pour investir, grâce à sa situation économique générale. Nous
sommes convaincus que le Canada est un pays où il fait bon vivre,
et c'est pourquoi nous fabriquons des produits ici. Je pense que
c'est un message que nous devons transmettre, non seulement aux
sociétés mères des entreprises qui sont présentes ici, mais à
beaucoup d'autres sociétés du monde entier; nous devons nous
montrer aussi dynamiques que possible, à la suite des événements du
11 septembre, pour essayer de faire comprendre aux investisseurs
potentiels que le Canada demeure un endroit sûr et économiquement
viable pour faire des affaires. C'est la véritable tâche qui nous
attend à la suite du 11 septembre; nous devons redoubler nos
efforts pour faire du Canada un endroit attrayant. Je le dis en
tant que Canadien, et non à titre de représentant d'une compagnie.
La présidente: Cela dit, il est très important pour
l'industrie automobile que les choses se déroulent efficacement à
la frontière. Les membres de la Bridge and Tunnel Operators
Association se sont réunis hier à Detroit; j'y étais. Ils s'étaient
déjà réunis dimanche et avaient dressé un plan en sept points, qui
prévoyait notamment une autorisation préalable obligatoire pour
tout le trafic commercial. Cette mesure aidera à assurer la
sécurité et facilitera le passage de la frontière. J'imagine que
les gens du secteur de l'automobile seraient d'accord avec cette
mesure.
M. Gerald Fedchun: Cette autorisation préalable est un des
aspects les plus importants pour nous. Un des problèmes de
sécurité, actuellement, c'est que les camions qui vont du Canada
aux États-Unis doivent traverser le pont Ambassador et qu'ils ne
sont pas inspectés avant d'être arrivés de l'autre côté. Donc, un
terroriste qui voudrait vraiment prendre le pont pourrait le faire
très facilement; personne ne l'arrêtera avant qu'il soit rendu sur
la structure même. Et, bien sûr, si la structure s'écroule, ce sera
la catastrophe.
Donc, ce qu'il nous fait réellement du point de vue de la
sécurité et des douanes, c'est une autorisation préalable avant que
les véhicules commencent à circuler sur les structures de ce genre.
La présidente: En fait, un des autres points qui font partie
de leur plan, ce serait d'inverser l'inspection et les formalités
de douanes, de sorte que les services des douanes et de
l'immigration américains seraient déplacés du côté canadien, et
vice-versa. Depuis hier, et d'ici mercredi si je comprends bien,
tous les ponts et les tunnels en Ontario fonctionneront selon un
système qui permettra d'éliminer les files d'attente sur les ponts
et dans les tunnels eux-mêmes; il faudra maintenant faire la queue
sur les places ou dans les rues, ce qui risque de créer des
problèmes dans les villes touchées. Nous devons donc prendre ces
mesures de façon beaucoup plus claire et plus rapide.
Je crois que la France et la Grande-Bretagne ont déjà pris des
mesures de ce genre, à savoir que les véhicules sont inspectés
avant d'entrer dans les tunnels.
M. Gerald Fedchun: En effet.
La présidente: Je ne pense pas que ce soit nouveau, mais c'est
probablement une mesure que le Canada et les États-Unis devraient
envisager pour assurer la sécurité de ces installations, de même
que des gens qui s'y trouvent et des marchandises qui y passent.
Je ne suis pas certaine que nous ayons d'autres questions. Je
ne pense pas, mais je voudrais que chacun de vous nous fasse un
dernier commentaire, si vous jugez que nous avons oublié un élément
dans notre discussion d'aujourd'hui ou si vous voulez ajouter
quelque chose pour terminer. Nous vous remercions d'être venus.
Nous croyons que la frontière a une importance vitale pour le
secteur de l'automobile, et je trouve aussi très important que nous
continuions à nous pencher sur certaines des questions que vous
avez soulevées, par exemple au sujet de la recherche et de la
nécessité d'investir.
AUTO 21 était un bon début, mais il y a évidemment beaucoup
d'autres choses que nous pourrions envisager et faire au Canada
dans le domaine de la recherche. Il y a aussi la question de
l'infrastructure qui mène à vos installations, par exemple le pont
de Windsor. Et il y a d'autres éléments que nous pourrions—et que
nous devrions—envisager.
Pour nous aider à dégager le message de la séance
d'aujourd'hui, je vous serais reconnaissante de nous faire part de
vos conclusions au nom du secteur de l'automobile.
• 1150
M. Gerald Fedchun: Je voudrais simplement dire que, si nous ne
continuons pas à accorder la priorité à la question de la
frontière, l'industrie pourrait facilement se retrouver très vite
au niveau où elle en était en 1991, soit à 12 milliards de dollars
seulement plutôt qu'à 32 milliards.
La présidente: Monsieur Nantais.
M. Mark Nantais: Ce que je veux vous dire avant de vous
quitter, c'est que nous ne devons pas nous reposer sur nos
lauriers. Nous ne pouvons pas tenir pour acquis... Notre industrie
cherche à s'assurer... Je ne voudrais pas être perçu comme indûment
négatif dans mes prévisions parce que je pense que notre industrie
est en assez bonne santé au Canada. Est-ce qu'elle sera toujours la
même, comme Gerry l'a souligné, dans cinq ou dix ans? Je soupçonne
qu'elle sera radicalement différente parce que les choses changent
et que nous devons continuer à regarder l'image globale. La
question de la frontière n'est qu'une de celles dont nous devons
tenir compte pour attirer de nouveaux investissements à l'avenir.
Ce sera tout.
La présidente: Monsieur Sheridan.
M. Michael Sheridan: La situation me rappelle les débuts du
Pacte de l'automobile, en 1965. Nous avons produit à l'époque
700 000 automobiles et camions légers au Canada, et nous en avons
vendu environ 700 000 au Canada. Les exportations et les
importations étaient minimes. Mais en l'an 2000, notre industrie a
produit près de 3 millions de véhicules au Canada et notre
population en a acheté environ 1,5 million; à peu près 85 p. 100 de
notre production a été exportée au sud de la frontière, ainsi que
dans 40 ou 50 autres pays partout dans le monde.
Donc, l'industrie a réussi grâce à une frontière transparente.
Et ce facteur a non seulement favorisé notre industrie, mais aussi
celle des pièces.
Comme Gerry l'a mentionné, nous avons commencé en 1965 avec
des ventes de pièces de 500 millions de dollars et nous avons
maintenant largement dépassé les 30 milliards; notre succès vient
donc en grande partie du fait que l'industrie automobile est
intégrée à l'échelle nord-américaine, ce qui exige une frontière
perméable dont le maintien devrait être un objectif à long terme.
La présidente: Monsieur Jure, avez-vous quelque chose à
ajouter?
M. Doug Jure: Je voudrais ajouter à ce sujet-là que la
question se rattache également à l'infrastructure, comme vous
l'avez mentionné. Il est certain que nous pouvons améliorer la
procédure à la frontière, mais s'il y a encore des files d'attente
parce que nos camions doivent traverser Windsor en passant par le
chemin Huron Line, c'est un secteur commercial et résidentiel qui
ne peut tout simplement pas soutenir toute cette circulation. Donc,
le gouvernement fédéral et celui de l'Ontario doivent envisager des
améliorations à l'infrastructure, qui s'imposent d'ailleurs depuis
longtemps.
La présidente: Merci.
Monsieur Armstrong.
M. Robert Armstrong: Je tiens à répéter que j'espère que notre
gouvernement dispose d'un groupe bien coordonné, d'une équipe qui
travaille avec les Américains parce que—même si j'espère me
tromper complètement—ce pourrait bien être le calme avant la
tempête.
La présidente: Monsieur Beatty.
M. Stephen Beatty: Merci. J'ai deux commentaires à faire.
Je voudrais d'abord vous remercier de nous avoir invités à
comparaître devant le comité pour échanger des idées avec vous.
Je voudrais dire aussi que tout le monde, à mon avis, partage
les mêmes préoccupations ou les mêmes opinions sur la nécessité de
régler les questions de la frontière et de la sécurité. Mais, d'un
autre côté, il ne faut pas réagir de façon exagérée. Les bases sont
encore très solides au Canada, et nous devons non seulement nous
rappeler comment les choses se passaient avant le 11 septembre,
mais aussi regarder vers l'avant et nous demander comment rebâtir
notre secteur et notre économie.
La présidente: Monsieur Thomas.
M. Art Thomas: Merci beaucoup.
J'aimerais vous mentionner que la compagnie Honda applique une
stratégie vraiment nord-américaine; la question de la frontière est
donc primordiale pour nous à bien des égards, évidemment. Mais en
même temps, notre croissance au Canada a été excellente et demeure
positive. Donc, l'augmentation des ventes, des exportations, de la
capacité de production—et, bien sûr, des impôts—a été une très
bonne chose. Nous encourageons le gouvernement à continuer à
chercher des moyens de créer au Canada un climat économique qui
permette de faire durer cette période de croissance pour nous et
aussi—il faut l'espérer—pour tous les membres de l'industrie.
Merci beaucoup.
La présidente: Merci à tous d'être venus nous rencontrer
aujourd'hui. Votre secteur est très important à nos yeux. Les
séances que nous tenons cette semaine sont évidemment très
importantes pour l'économie canadienne et la population du Canada,
et nous savons quel rôle vous jouez.
• 1155
Merci beaucoup. Nous allons suspendre nos travaux jusqu'à
15 h 15.
Je pense que cela devrait nous indiquer à tous que peu importe
la difficulté des défis ou des circonstances, la réaction qu'il
faut avoir à chaque niveau, ce n'est pas de se laisser porter par
le cours des événements, mais d'essayer plutôt de prendre le
contrôle de la situation.
L'ouest du Canada sera touché par les mises à pied chez Air
Canada et dans l'industrie aérospatiale. Le tourisme a beaucoup
diminué dans l'Ouest canadien. Le secteur forestier de la
Colombie-Britannique avait déjà souffert, comme nous le savons, à
cause du différend au sujet du bois d'oeuvre et de la baisse
générale de la demande.
Après le 11 septembre, monsieur le ministre, je dois dire
qu'étrangement, vous avez arrêté de parler d'un grand nombre de ces
questions. Je suis content que le ministère vous ait donné
l'information voulue sur les questions que vous avez soulevées
aujourd'hui. C'était un bon exposé et je suis heureux de le
constater.
Pour ce qui est du deuxième point, au sujet des services à
large bande, vous vous êtes levé et vous avez annoncé au nom de
l'Alliance canadienne—qu'on se le dise, c'est là la déclaration de
l'Alliance canadienne...
Nous dépensons des milliards de plus par l'entremise d'autres
paliers de gouvernement pour venir en aide aux gens qui ne sont pas
capables de réaliser leur plein potentiel. Nous parlons ici d'une
dépense ponctuelle de l'ordre de quelques centaines de millions de
dollars par année sur une période de quatre ans. Il suffit de
comparer cette somme aux 12 milliards de dollars dépensés chaque
année pour l'aide sociale sous une forme ou une autre.
Au sujet de la flambée des prix de l'essence, on
a senti que ce gouvernement avait réagi
avec une certaine apathie, pour ne
pas dire une certaine inertie. Alors même qu'un comité
du Parti libéral recommandait au gouvernement
d'intervenir énergiquement
dans le dossier des prix de l'essence,
le gouvernement s'est contenté de confier une étude au
Conference Board, sur lequel siègent d'ailleurs
les pétrolières, qui a rendu
public, en janvier dernier, un rapport
fort complaisant par rapport au problème de
l'augmentation des prix de l'essence.
Je tiens aussi à dire pour les gens qui sont ici et qui ne le
sauraient peut-être pas—parce que j'ai assisté à bien des réunions
auxquelles ils n'ont peut-être pas assisté—que l'attention
accordée, pas seulement par ce comité-ci et par les membres et la
présidente du comité et par vous-même, mais aussi par d'autres
ministres à la question des frontières a été merveilleuse.
Cela se fait déjà sous différences formes. Prenez le
dédouanement préalable. Il est possible de passer aux douanes au
Canada avant l'arrivée aux États-Unis. On peut aussi franchir les
douanes aux États-Unis avant l'arrivée au Canada.
La dernière fois que nous avons traversé une période de crise,
la région de Niagara, le Golden Horseshoe, a fini par se
désindustrialiser. C'est en partie parce que les Américains ont
commencé à prendre des décisions en matière d'investissement qui
n'incluaient pas la région autour de Toronto ni pour
l'investissement ni pour les fournisseurs. Un grand nombre de nos
usines ont fermé leurs portes et toute la technologie est déménagée
dans le nord de l'État de New York. Cette région a connu une
renaissance économique, tout comme certaines régions du Michigan et
de l'Ohio, et nous avons langui dans une récession pendant cinq ou
six ans.
En ce qui concerne la frontière, la question est aussi de
savoir quoi faire à long terme face au problème qui existait avant
le 11 septembre. Comme vous le savez, il y a un comité de travail
qui est présidé du côté canadien par le vice-premier ministre Herb
Gray, et qui réunit David Collenette, le ministre des Transports,
et des représentants du gouvernement de l'Ontario, du gouvernement
du Michigan de même que du gouvernement des États-Unis. Par
exemple, il y a la question du pont Ambassador à Windsor. Nous
voudrions que ce groupe de travail soit capable de travailler plus
rapidement avec une plus grande efficacité d'une manière qui
reflète l'urgence de la situation.
Franchement, il ne faut pas réfléchir beaucoup pour demander
si la sécurité à la frontière—le transport des biens et services
canadiens vers les États-Unis, qui représente 87 p. 100 de nos
exportations—est une plus grande priorité qu'un millier d'autres
choses... Je ne sais pas si vous vous êtes levé de bonne heure ce
matin pour concocter une telle question, mais il est clair que la
protection de l'accès pour le marché canadien devrait être la plus
grande de toutes les priorités. Notre première priorité est
d'assurer le fonctionnement du moteur économique du Canada.
Je vous ferai remarquer que d'autres ministres ont une
responsabilité directe en matière de sécurité. Ces ministres
exercent leurs obligations de manière excellente et efficace.
Au Canada, la production a diminué d'environ 15 p. 100 depuis
septembre par rapport à l'année dernière et, pour les membres de
l'ACCV, la chute de production atteint près de 20 p. 100.
Les meilleurs moyens d'appuyer les efforts visant à augmenter
la sécurité physique et faciliter le commerce transfrontalier
consistent à définir les risques que présentent les marchandises et
les personnes au passage de la frontière. Nous devons affecter nos
ressources collectives d'inspection et d'exécution aux expéditions
de marchandises et aux voyageurs présentant des risques élevés,
tout en assurant la libre circulation à la frontière des envois et
des voyageurs à risque faible.
Les États-Unis étant le principal partenaire commercial du
Canada, cette retenue d'impôt sur les intérêts fait figure
d'anomalie, puisqu'elle est inexistante dans les conventions
fiscales signées par les États-Unis avec d'autres pays développés.
Cette retenue est particulièrement préoccupante pour l'industrie de
l'automobile, étant donné que d'autres pays nous font sérieusement
concurrence pour les investissements dans ce secteur, peut-être aux
dépens du Canada.
Ces chiffres reflètent bien entendu le ralentissement de la
demande de produits fabriqués au Canada sur le marché
nord-américain, mais les attaques terroristes ont eu des effets
immédiats et spectaculaires. Nous avons constaté une diminution de
la clientèle chez nos concessionnaires de toutes les régions du
Canada ainsi qu'aux États-Unis. En septembre, les ventes de
véhicules de tourisme ont diminué de 9,3 p. 100 par comparaison à
septembre 2000. La production de véhicules légers a diminué de
43 000 unités, soit 18 p. 100 par rapport à l'an dernier.
La déclaration faite hier par le président paraît
intéressante, mais que signifie-t-elle? Nos appréhensions et nos
inquiétudes quant à la nature du plan américain sont au nombre des
raisons qui nous ont amenés à prendre la parole aujourd'hui. Nous
ignorons le degré de sévérité de ce plan. Madame la présidente,
vous avez dit ce matin que la Garde nationale se retirerait jeudi.
Cela nous préoccupe beaucoup, parce qu'elle a été d'un grand
secours pour assurer la circulation de nos camions. Nous devons
ouvrir l'oeil.
Avant le 11 septembre, le passage de la frontière occasionnait
peu de problèmes et de retards. Plusieurs solutions ont été
entreprises depuis quelques années. J'ai consulté de vieux
documents remontant à 1995. On y faisait l'annonce de nouvelles
formules telles que l'adhésion des États-Unis au système CANPASS
qui se trouvait à Sarnia. Ce système est suspendu pour le moment.
Si toutes ces mesures sont prises, la frontière
canado-américaine pourra demeurer très ouverte, plus ouverte
qu'elle ne l'a été par le passé pour les échanges commerciaux, mais
en fait plus étanche que jamais aux terroristes et aux
indésirables. La technologie nous le permet. Il nous faut tout
simplement prendre la décision de l'utiliser. Notre industrie sera
prête à faire sa part pour que cela soit possible.
C'est la simple réalité à laquelle il faut faire face en
économie. C'est pourquoi nous devons garder la frontière aussi
perméable qu'elle a toujours été afin d'éviter que des coûts
supplémentaires ne viennent alourdir le bilan lorsque nous
tenterons d'implanter de nouvelles usines au Canada.
Mark, avez-vous quelque chose à ajouter?
Je n'en dirai pas plus. Ce sont des questions qu'il faudrait
plutôt poser aux représentants de General Motors.
Je ne pense pas qu'il y ait eu beaucoup de discussions sur ces
possibilités ou sur ces mécanismes, et sur ce que nous pourrions
faire pour aider les entreprises canadiennes et faire en sorte que
ces méthodes soient appliquées à la frontière. C'est évidemment
important pour nous tous.
En réponse à votre question sur les incitatifs, je vais vous
faire part de mon opinion personnelle, qui n'est pas nécessairement
celle de l'industrie. Les incitatifs ne sont probablement pas une
bonne chose, qu'ils soient appliqués par l'industrie ou par le
gouvernement.
Je pense que c'est une bonne chose de continuer à insister sur
le fait que les véhicules neufs sont beaucoup meilleurs pour
l'environnement. C'est bon pour les ventes, mais aussi pour
l'environnement, et je vous encourage à continuer à faire ce lien
et à travailler fort pour construire des véhicules aussi peu
polluants que possible.
La réponse, je pense, c'est que les gens doivent prendre leurs
décisions d'investissement en temps réel, ce qui fait qu'il n'est
vraiment pas possible de remettre à plus tard notre réflexion sur
le cadre économique et commercial au Canada. Il se prend des
décisions continuellement. Et vous pouvez influencer les décisions
de l'industrie.
Il y a toutes sortes de facteurs. Il y a aussi, peut-être, que
la marge bénéficiaire est un peu plus tentante pour les fabricants
du côté canadien que du côté américain.
J'apprécie tout particulièrement leurs recommandations sur la
question de la sécurité et de l'accès à la frontière. Le fait que
vous ayez tous insisté fortement sur la nécessité de garder la
frontière ouverte et de permettre aux marchandises de continuer à
circuler, sur les questions comme les bases de données communes et
les cartes de sécurité pour les gens qui voyagent souvent...je
pense que ce sont d'excellentes idées auxquelles nous devrions
donner suite.
C'est un des rares cas où nous avons travaillé avec le
gouvernement et où nous avons obtenu de très bons résultats pour
l'économie canadienne. Ça a très bien marché, et nous en sommes
très satisfaits.
Monsieur Fedchun, vous avez quelque chose à dire?
J'ai accompagné le ministre Manley à Washington la semaine
dernière et je peux vous assurer que, lors de sa rencontre avec le
gouverneur Ridge, il a évoqué l'importance de notre frontière et de
notre sécurité aux postes-frontières pour le transport de nos
produits. Comme vous l'avez entendu plus tôt, le ministre Tobin a
dit très clairement à tout le monde que la question de la frontière
était une priorité pour notre gouvernement. Nous allons donc
continuer à travailler avec vous pour faire en sorte que
l'industrie automobile soit non seulement forte, mais en croissance
au Canada. C'est l'objectif de notre comité.