SRID Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Sous-comité des droits de la personne et du développement international du Comité permanent des Affaires étrangères et du commerce international
Temoignages du comité
TABLE DES MATIÈRES
Le mercredi 30 janvier 2002
[Enregistrement électronique]
¹ | 1540 |
La présidente (Mme Beth Phinney (Hamilton Mountain, Lib.)) |
M. Stephen Randall (doyen, Faculté de sciences sociales, Université de Calgary) |
La présidente |
M. Stephen Randall |
La présidente |
M. Stephen Randall |
¹ | 1545 |
¹ | 1550 |
¹ | 1555 |
º | 1600 |
La présidente |
M. Stephen Randall |
La présidente |
M. Stephen Randall |
º | 1605 |
La présidente |
M. Elley |
La présidente |
M. Reed Elley |
M. Stephen Randall |
M. Reed Elley |
M. Stephen Randall |
º | 1610 |
La présidente |
M. Antoine Dubé (Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, BQ) |
M. Stephen Randall |
M. Antoine Dubé |
M. Stephen Randall |
º | 1615 |
M. Antoine Dubé |
M. Stephen Randall |
La présidente |
M. Irwin Cotler (Mont-Royal, Lib.) |
M. Stephen Randall |
º | 1620 |
M. Irwin Cotler |
M. Stephen Randall |
M. Irwin Cotler |
M. Stephen Randall |
º | 1625 |
La présidente |
Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce--Lachine, Lib.) |
M. Stephen Randall |
Mme Marlene Jennings |
º | 1630 |
M. Stephen Randall |
La présidente |
M. Stephen Randall |
La présidente |
M. Stephen Randall |
La présidente |
M. Stephen Randall |
º | 1635 |
La présidente |
M. Antoine Dubé |
M. Bill Casey (Cumberland--Colchester, PC/RD) |
M. Stephen Randall |
M. Bill Casey |
M. Stephen Randall |
La présidente |
M. Bill Casey |
M. Stephen Randall |
La présidente |
M. Elley |
M. Stephen Randall |
º | 1640 |
La présidente |
M. Stephen Randall |
La présidente |
M. Stephen Randall |
La présidente |
M. Stephen Randall |
La présidente |
Stephen Randall |
La présidente |
CANADA
Sous-comité des droits de la personne et du développement international du Comité permanent des Affaires étrangères et du commerce international |
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l |
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l |
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Temoignages du comité
Le mercredi 30 janvier 2002
[Enregistrement électronique]
¹ (1540)
[Traduction]
La présidente (Mme Beth Phinney (Hamilton Mountain, Lib.)): C'est la 18ème séance du Sous-comité des droits de la personne et du développement international du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international.
Au cours de notre première heure aujourd'hui, nous entendrons M. Stephen Randall, doyen de la Faculté de sciences sociales de l'Université de Calgary. Je suis navrée, monsieur Randall, que nous n'ayons pu vous voir la première fois que vous êtes venu.
M. Stephen Randall (doyen, Faculté de sciences sociales, Université de Calgary): J'aime toujours Ottawa.
La présidente: Bien.
Au cours de la deuxième heure, nous entendrons à huis clos des fonctionnaires du ministère.
M. Randall est venu nous parler de la Colombie. Nous vous remercions encore une fois d'avoir pris le temps de venir témoigner ici aujourd'hui. Certains d'entre nous se rendront en Colombie dans une dizaine de jours, si bien que nous avons hâte d'entendre vos commentaires en vue de notre voyage et en vue du rapport que nous devrons tous rédiger.
J'aimerais mentionner à tous les membres que M. Randall a d'excellents états de service pour le travail qu'il effectue depuis longtemps sur la Colombie, et également en Colombie, je pense. N'est-ce pas?
M. Stephen Randall: Oui.
La présidente: Oui, en Colombie et dans les Amériques de façon plus générale. Il a été honoré pour son travail en Colombie par le gouvernement colombien.
Allez-y, monsieur Randall.
M. Stephen Randall: Merci beaucoup, madame la présidente.
Permettez-moi d'enchaîner sur votre dernier point, parce que je crois que la crédibilité est si souvent un élément important. Je me suis installé pour la première fois en Colombie en 1967, et j'y ai vécu, en fait, quelques années, pendant lesquelles j'enseignais à l'université nationale et dans un centre binational, où j'effectuais des travaux de recherche et de rédaction, et j'ai continué d'y séjourner pendant pas mal de temps au cours des années.
Je crois qu'il est important de comprendre que j'ai vraiment séjourné dans pratiquement chaque partie du pays. J'ai travaillé avec presque toutes les classes et tous les secteurs de la société. Contrairement aux Américains, les universitaires et les citoyens canadiens ordinaires peuvent faire beaucoup de choses en Colombie. Il y a des endroits qui sont beaucoup plus faciles d'accès aux Canadiens qu'aux Américains. Hier, à un déjeuner, j'étais assis avec quelqu'un du Département d'État qui me disait à quel point les Américains de l'ambassade estiment vraiment vivre dans une sorte de vase clos, qui limite vraiment leur expérience et, à mon avis, le genre d'informations qu'ils obtiennent au bout du compte. Je pense que lorsque vous vous rendrez en Colombie, vous serez beaucoup mieux en mesure d'obtenir un excellent échantillon d'opinions de la part de la société colombienne, des ONG, des fonctionnaires du gouvernement et des militaires. Je crois comprendre que vous rencontrerez des fonctionnaires de la défense. Il est extrêmement utile et important d'obtenir cette très vaste perspective.
J'aimerais aborder quelques sujets. La Colombie est nettement une société très troublée, plongée dans une très grave récession qui, au dire de la plupart des économistes, est aussi grave sinon plus grave que la Crise de 1929 pour ce qui est des niveaux de chômage. Quand on y ajoute la situation relative aux stupéfiants, les conflits internes liés tant aux stupéfiants qu'aux mouvements de guérillas, et le haut niveau de migration interne des populations déplacées, il ne fait aucun doute que le pays traverse une crise depuis de nombreuses années. Je déteste me montrer pessimiste, mais je ne vois aucune solution à court terme, ni d'amélioration à court terme de la situation. Je reviendrai à la question des élections prévues au printemps—du moins notre printemps—dans quelques minutes.
Quelques points doivent vraiment être soulignés. Le premier, c'est qu'en apparence du moins, pour ce qui est des structures et des processus officiels, la Colombie est l'une des plus anciennes démocraties d'Amérique latine. Il est important de le comprendre. Les Colombiens sont extrêmement fiers de leur héritage démocratique. Certes, il y a eu des conflits et des dissensions, non seulement au cours de la période qui a suivi l'assassinat à la fin des années 1940 de Jorge Eliécer Gaitan, le principal candidat libéral de gauche, par un individu qui ne travaillait pas pour quelqu'un d'autre, en dépit des théories de conspirations communistes et ainsi de suite. Mais la Colombie a été une société démocratique, même si nous savons que la démocratie ne se résume pas au simple accès à la boîte de scrutin lors d'élections régulières. Il y a, au niveau des revenus et de la richesse, énormément de disparité qui a été exacerbée par le sous-emploi et le chômage.
Le deuxième point que j'aimerais souligner est qu'il s'agit d'un conflit, peu importe ce qu'on pense de la nécessité d'accroître le développement socio-économique, de réduire la disparité de revenu ou d'améliorer des questions comme la redistribution et la réforme foncière, etc., qui est alimenté non pas tant par les besoins socio-économiques de la base que par les stupéfiants. Sans l'industrie des stupéfiants, il y aurait un conflit, mais il ne serait en aucun cas comparable à ce qui existe actuellement—je m'écarte du texte écrit parce que je suppose que tout le monde ici est capable de le lire. Je reviendrai au texte écrit dans un moment. Je pense qu'il est extrêmement important de comprendre que ce n'est pas un conflit qui pourrait subsister sans les stupéfiants et, conséquemment, autant j'ai de sérieuses réserves au sujet du plan Colombia et au sujet d'un rôle militaire pour les États-Unis dans le contexte colombien, je dois dire qu'il n'y aura pas de solution au conflit en Colombie à moins que l'on puisse écarter les groupes paramilitaires et les groupes de guérillas de l'industrie des stupéfiants.
¹ (1545)
J'ai rajouté au texte écrit que je vous ai fait parvenir le 29 novembre des commentaires au sujet des liens qui existent entre les FARC et certaines autres organisations terroristes internationales; il y a le Hezbollah, l'IRA et un certain nombre d'autres, y compris des groupes d'al-Qaïda. Le Hezbollah fournit le gros du soutien logistique pour le trafic de stupéfiants et d'armes. Il existe un lien avec Israël et avec la Jordanie. Tout cela est documenté par des sources de renseignements américaines. Le Département d'État américain a qualifié les FARC de plus dangereux groupe terroriste dans l'hémisphère occidental.
J'ai lu tous les témoignages qu'a entendus le comité, et certains sont d'une remarquable naïveté. Les FARC ne sont pas une organisation démocratique sociale, mesdames et messieurs, c'est une organisation terroriste. Plusieurs générations de personnes ont grandi au sein des FARC. Elles sont mieux payées, elles gagnent de meilleurs revenus que les soldats colombiens, et autant sur le plan idéologique on est résolu à procéder à d'importantes réformes dans la société colombienne, étant donné le pouvoir de levier qu'elles possèdent actuellement, si elles étaient vraiment intéressées à réformer la société colombienne, elles entameraient de véritables négociations. Elles ne l'ont pas fait. Les FARC ont tout à perdre s'il y a négociations, elles ont tout à perdre s'il y a la paix, et elles ont tout à perdre si elles sont coupées de l'industrie des stupéfiants.
Mais la même chose est vraie pour ce qui est des paramilitaires. On ne peut rien en dire de positif non plus, si ce n'est que tant que l'État colombien, et je veux dire le gouvernement, ne sera pas suffisamment fort pour assurer à ses citoyens une protection telle que nous la concevons dans le contexte canadien, soit par le biais de la police nationale ou des autorités locales ou militaires, il n'y aura pas de paix au pays et les paramilitaires continueront à gagner des adhérents, comme ils le font depuis les deux dernières années. Le nombre de leurs membres est actuellement à un niveau comparable aux FARC, du moins d'après les calculs officiels—autour de 13 000 à 14 000 membres. Au cours des dernières années, leur croissance a été astronomique. D'organisations qui étaient vraiment d'autodéfense, elles sont devenues, sous Carlos Castano, une véritable armée indépendante qui entretient des liens, directement ou indirectement, avec les militaires colombiens.
Permettez-moi d'expliquer ce dernier point, parce que je crois que c'est important. Je vais vous relater une anecdote, afin d'illustrer ce que je veux dire—je vais essayer de ne pas mentionner de noms.
Il y a environ un an et demi, le président Pastrana avait envisagé, très publiquement, d'attribuer à l'ELN une partie du territoire de la vallée de la basse rivière Magdalena, entre Bogota et la mer des Caraïbes, qui aurait été plus petite que la zone démilitarisée actuellement détenue par les forces armées révolutionnaires de Colombie, les FARC, tout en étant néanmoins comparable. Quand elle a eu vent de ce projet, Ecopetrol, la société pétrolière d'État, a découvert qu'un certain nombre de ses installations se trouvaient dans la région qui serait attribuée à l'ELN. Elle n'avait pas été consultée à ce sujet. Il se trouvait également dans cette région d'importants investissements étrangers dans les mines d'or et d'autres activités. Quand les représentants d'Ecopetrol ont demandé à la présidence d'expliquer pourquoi ce territoire était réservé à l'ELN, ils ont appris que c'étaient les militaires colombiens qui en avaient fait la recommandation parce que les paramilitaires étaient extrêmement puissants dans cette région, tout comme l'ELN. Du point de vue des militaires, donc, c'était un moyen fort commode d'amener les paramilitaires et l'ELN à s'affronter pour ce territoire, sans avoir à combattre directement avec l'ELN.
Ce n'est donc pas principalement que les militaires colombiens financent les paramilitaires, ce n'est pas qu'il existe nécessairement, bien que cela ait été le cas dans le passé, un lien direct avec les militaires et les paramilitaires, mais certains segments du bras militaire considèrent les paramilitaires comme un véhicule très commode pour réaliser les objectifs qu'ils devraient réaliser eux-mêmes. Je crois qu'il est très important que nous le comprenions.
¹ (1550)
Les paramilitaires sont financés essentiellement de la même façon que les guérilleros. Ils le sont par le biais de l'extorsion, mais encore plus, par le biais de l'industrie des stupéfiants. Encore une fois, sans cette industrie, je ne pense pas que le conflit pourrait persister, certainement pas du côté des FARC. Si vous songez aux ramifications internationales de l'industrie des stupéfiants et aux liens avec le terrorisme international et la criminalité, je crois que c'est un très grave problème.
J'ai un peu enjolivé mon exposé original pour vous faire remarquer dans quelle mesure la mafia russe a maintenant fortement partie liée avec les FARC. Des avions cargo russes transportent des armes et d'autres fournitures dans la zone démilitarisée et ils assurent le transport des stupéfiants à partir de cette zone. Donc, quand on ajoute la mafia russe au Hezbollah, à l'IRA et à d'autres organisations terroristes auxquelles les FARC sont liées, je crois que le danger d'une déstabilisation dans la région andine, y compris au Venezuela, en Colombie, en Équateur, au Brésil et, éventuellement au Pérou, est extrêmement grave. Il est évidemment dans l'intérêt de la sécurité du Canada d'essayer de s'y attaquer. Les migrations humaines, le trafic des stupéfiants et une déstabilisation dans la région sont toutes des questions qui devraient préoccuper le Canada pour ce qui est de la sécurité nationale.
Permettez-moi maintenant de passer aux élections présidentielles à venir dont entendront beaucoup parler ceux d'entre vous qui vous rendront en Colombie dans quelques jours. J'aimerais me montrer optimiste et dire que j'avais l'impression qu'un changement à la présidence, un changement de gouvernement, allait avoir une incidence considérable sur la situation actuelle. Je ne peux pas le dire. Je ne crois pas que le passé nous ait donné des raisons de croire qu'un changement à la présidence entraînerait des changements importants. Le président Pastrana est arrivé au pouvoir, à mon avis, avec la très sincère intention d'engager des négociations ouvertes avec les FARC et l'ELN, mais cela n'a pas marché. Quatre ans de négociations par intermittences n'ont mené nulle part.
Comme vous le savez, il y a une semaine, le président Pastrana a mobilisé des forces autour de la zone démilitarisée et enjoint les FARC de reprendre les négociations, et avec la participation de notre ambassadeur, de l'ambassadeur de la France et de plusieurs autres, on a au moins réussi à obtenir une période de réflexion. Mais le président Pastrana partira sous peu et je ne vois pas, quel que soit celui qui lui succédera, comment la politique actuelle ou la situation actuelle pourrait véritablement changer. Encore une fois, à mon avis, les FARC ont beaucoup trop à perdre de réelles négociations pour s'engager d'une façon significative dans cette direction.
Permettez-moi maintenant de vous parler très brièvement de certains des candidats et de leurs vues sur ces questions. Encore une fois, j'ai signalé dans le texte que le vice-président, comme c'est le cas depuis 1994, sera également élu au scrutin populaire en mai 2002.
Je crois qu'il est important de comprendre que les élections présidentielles colombiennes des dernières décennies ont été généralement serrées, nécessitant fréquemment un second tour, comme on le voit en France et ailleurs, en raison d'un grand nombre de candidats, de candidats indépendants de même que de candidats du parti officiel. Si vous prenez par exemple les dernières élections, en 1998, bien que le président Pastrana ait gagné au second tour avec 50,3 p. 100 du vote populaire, au premier tour, il n'a remporté que 34 p. 100 des voix contre Horacio Serpa, qui devrait remporter les prochaines élections—mais, qui sait? Serpa n'avait remporté lui aussi que 34 p. 100 du vote populaire, et il était le candidat officiel du Parti libéral. Fait à noter, une autre candidate importante—cette fois-ci, à mon avis—Noemi Sanin, la candidate de l'Option Vie multipartite, qui s'était prononcée en faveur d'une réconciliation nationale, a obtenu environ 26 p. 100 du vote populaire au premier tour avant, bien sûr de se retirer. Mais elle jouissait de l'appui non négligeable d'Alfonso Lopez Michelson, un ancien président et le fils d'un ancien président dans les années 30 e 40 et une figure très influente, le père, bien entendu, de l'ex-ambassadeur de la Colombie au Canada également.
¹ (1555)
À la dernière élection, Pastrana s'est présenté sous la bannière «La grande alliance pour le changement», et il a réussi à attirer un très grande nombre de libéraux indépendants et même de libéraux traditionnels, et c'est en grande partie pour cette raison qu'il a remporté la victoire. Il est arrivé au pouvoir avec la détermination d'entamer des négociations avec les FARC et avec l'ELN.
Je décris brièvement dans le mémoire les élections parlementaires ainsi que certains des partis politiques, et j'aimerais vous parler un peu des principaux candidats, que vous aurez peut-être l'occasion de rencontrer à Bogota.
Horacio Serpa est le candidat officiel du Parti libéral. C'est lui qui domine en ce moment, et certains ont dit qu'il allait remporter cette élection s'il ne commet pas d'erreur. Je crois que son parti l'appuie sans réserve, sauf quelques indépendants. À l'instar de Pastrana, il a promis de poursuivre les négociations avec les chefs de la guérilla. Par ailleurs, le discours de Sanin à l'élection de 1998 l'a impressionné et je pense que sa campagne a été influencée par le plaidoyer de celle-ci en faveur de la réconciliation nationale et surtout en faveur d'un virage fondamental dans la politique colombienne pour que l'on s'attaque de façon plus résolue aux problèmes sociaux et économiques. Serpa a toujours eu un penchant populiste, mais je crois que le plaidoyer de Sanin en 1998 l'a poussé encore plus à suivre cette orientation. C'est ainsi qu'aujourd'hui, il représente non seulement le choix libéral traditionnel, mais aussi une tendance populiste très marquée, s'étant prononcé très clairement en faveur de l'action sociale, de la réforme agraire et de mesures de cette nature.
Noemi Sanin, qui, je le répète, a remporté 26 p. 100 des voix à la dernière élection, représente dans cette élection le mouvement «Oui Colombie», «Si Colombia», et est toujours attachée aux mêmes objectifs qu'elle a articulés en 1998. Elle représente une position modérée ou une position du centre, je dirais, entre Serpa, d'une part, et Uribe, dont je vous parlerai dans un instant. Même si elle a dit très publiquement qu'elle s'oppose à une solution militaire dans l'affaire des FARC et des autres mouvements de guérilla, elle a également affirmé qu'elle n'hésiterait pas à employer la force militaire si les guérilleros ne négocient pas de bonne foi et n'abandonnent pas leur utilisation du terrorisme et de la violence.
La position de Alvaro Uribe Velez, un jeune conservateur très brillant et plein d'esprit d'entreprise qui représente le mouvement politique «Primero Colombia», «La Colombie en premier», est bien connu dans la population pour son intransigeance à l'égard des guérilleros. Il est un grand partisan du développement économique et il représente très clairement l'extrémité de l'éventail politique opposée à Serpa. Uribe n'a vraiment pas pris la peine de définir un programme de développement social, mais il faut dire—et j'ai déjà eu l'occasion de m'entretenir avec lui lorsqu'il occupait un autre poste politique—qu'il connaît un succès remarquable et il est l'un des meilleurs administrateurs publics que j'ai rencontrés. Il mènerait avec un main de fer et, à mon avis, son gouvernement serait très conservateur, et je dirais qu'il adopterait une approche très musclée à l'égard aussi bien des narcotrafiquants que des guérilleros. Quant à savoir si c'est là une bonne chose ou non, les avis sont bien sûr partagés.
José Serrano est un candidat très intéressant. Il se présente comme indépendant et on a dit de lui, avec raison je crois, qu'il est un véritable outsider dans cette élection. Il a été autrefois chef de la Police nationale de la Colombie, qui jouit d'une réputation fort positive, aussi bien en Colombie qu'à l'étranger. J'ai eu l'occasion de le rencontrer. Il est très impressionnant. On disait beaucoup de bien de lui aux États-Unis lorsqu'il dirigeait la Police nationale de la Colombie et il est considéré comme étant un des meilleurs policiers au monde. Mais c'est un outsider. Ses opinions politiques ne sont pas très bien connues. On ignore quelle est son attitude à l'égard de la réforme sociale et économique. Il n'a pas été très ouvert de ce côté-là. Mais c'est un outsider intéressant.
Juan Camilo Restrepo est le candidat officiel du Parti conservateur. Son mouvement de «Salut national» est une sorte de version conservatrice de l'approche de réconciliation nationale de Noemi Sanin, et on ne sait trop au juste quelles sont ses convictions, à part le désir d'être élu.
º (1600)
Ingrid Betancourt, qui est membre du Congrès, est une personnalité éminente et elle se présente comme candidate indépendante. C'est en fait une candidate marginale, mais je pense qu'elle sera quand même importante au premier tour. Elle se présente sous la bannière du mouvement «Une nouvelle Colombie», et elle préconise énergiquement elle aussi la poursuite des négociations avec les guérilleros.
Il n'y a guère de différence, si bien que je pourrais facilement arrêter à cette étape. Désolé.
La présidente: D'accord. Vous allez passer à vos recommandations. Pourriez-vous abréger un peu? Nous voulons donner l'occasion à chacun de vous poser des questions.
M. Stephen Randall: Bien sûr. Je vais donc m'en tenir à un seul aspect dans mes remarques de clôture.
La présidente: Parfait.
M. Stephen Randall: Je m'excuse de m'être éternisé ainsi.
Pour en venir à mes recommandations, je dirais que le gouvernement du Canada fait exactement ce qu'il devrait faire, bien que moi-même et bien d'autres pensions que beaucoup plus d'aide publique au développement par le biais de l'ACDI et d'autres initiatives est souhaitable. La collaboration avec les ONG de la Colombie et des instances internationales est une approche très positive. La promotion des droits de la personne est une approche extrêmement positive. La collaboration avec d'autres représentants internationaux et notamment avec la Communauté européenne est à mon avis précisément ce que le Canada devrait faire, en concertant son action plus généralement avec la Communauté européenne mais aussi avec les divers pays d'Europe.
Je répète qu'à mon avis, l'ambassadeur actuel, Guillermo Rishchynski, a fait un travail remarquable pour jeter des ponts entre les nombreux groupes en Colombie ainsi qu'avec la communauté internationale. Nous devons travailler très fort je pense pour continuer à renforcer les institutions juridiques là-bas, pour promouvoir la professionnalisation de l'appareil militaire, pour apporter un contrepoids à l'approche militariste des États-Unis à ce conflit et aussi pour préconiser, dans le milieu militaire colombien, le contrôle civil des processus judiciaires afin de protéger les droits de la personne.
Je vais m'en tenir à cela.
º (1605)
La présidente: Très bien. Je vous remercie. Je suis sûre que les questions vous permettront de dire tout ce que vous avez à dire.
Monsieur Elley, nous nous réjouissons d'apprendre que vous serez des nôtres pour ce voyage. Voulez-vous poser les premières questions?
M. Reed Elley (Nanaimo--Cowichan, Alliance canadienne): Je vous remercie infiniment, madame la présidente. Je tiens à remercier M. Randall de son témoignage aujourd'hui.
Comme la présidente vient de le mentionner, je vais participer à ce voyage, étant donné que je remplace notre porte-parole en la matière, Deepak Obhrai, de Calgary, qui a dû renoncer au voyage parce qu'il est censé se faire opérer au coeur. Je suis donc un peu pris au dépourvu, parce que j'essaie de me mettre le plus rapidement possible au courant des événements en Colombie. Il se peut donc que mes questions soient un peu naïves et reflètent ma grande ignorance de toute la situation.
La présidente: Voulez-vous être le premier, ou préféreriez-vous...
M. Reed Elley: Non, ça va, je pense, d'abord que les gens le savent et soient indulgents.
Je pense que vous nous avez donné un bon aperçu et que vos conclusions nous sont très importantes maintenant que nous nous préparons à aller là-bas et à rencontrer des gens. Vous nous avez décrit en deuxième lieu l'économie de la Colombie. Il faut en déduire qu'elle est bien pire que l'économie du Canada.
M. Stephen Randall: C'est certain.
M. Reed Elley: Je suis sûr qu'il n'y a pas de commune mesure. Nous sommes portés à nous inquiéter énormément de notre propre économie, mais c'est sûr que là-bas...
S'il y a selon vous des domaines précis où les Canadiens devraient concentrer davantage sur le plan des partenariats et de l'aide à fournir pour l'économie, et pour son amélioration, quels seraient en fait ces domaines précis?
M. Stephen Randall: C'est une très bonne question. Comme vous le savez, Petro-Canada a collaboré très étroitement à un moment donné avec Ecopetrol, mais Petro-Canada, à l'époque où elle s'appelait Petro-Canada International Management Systems, pensait que Ecopetrol en Colombie jouissait essentiellement d'une capacité autosuffisante pour ce qui est de ses compétences dans le domaine de la mise en valeur des ressources naturelles, surtout du pétrole et du gaz naturel.
Il y a des entreprises canadiennes qui font des affaires là-bas. Elles ne font pas autant d'affaires qu'elles le pourraient s'il y avait plus de stabilité et s'il y avait moins de danger lorsque leurs travailleurs doivent circuler dans le pays. C'est un peu comme la question de l'oeuf et de la poule. Les domaines où nous devrions être actifs sont ceux où il nous est difficile d'être plus actifs à cause de la situation sur le plan de la sécurité. Nous sommes très actifs dans les télécommunications, avec Bell et d'autres entreprises, Northern Telecom, etc.
Je pense ici aux types de projets qui vont vraiment créer des emplois, tels que les projets d'infrastructures, les projets de développement rural sous l'égide de l'ACDI. Il y a un besoin impérieux—et ce n'est pas nécessairement sur le plan du développement—de s'occuper des deux millions de personnes placées dans le pays, qui non seulement sont en chômage ou sont sous-employées, mais aussi qui sont sans abri et doivent le plus souvent vivre dans des camps de réfugiés ou d'autres conditions encore pires.
Je veux insister sur deux choses sur le plan économique. Premièrement, la Colombie a une économie remarquable par sa diversité et il y a là-bas un énorme potentiel pour qu'elle retrouve un climat plus stable si l'on parvient à une solution sur le plan de la sécurité. La Colombie est l'un des pays qui n'a pas connu les problèmes d'endettement massif de la récession des années 1980, contrairement au reste de l'Amérique latine. Elle a toujours respecté ses contrats, si bien que les investissements étrangers n'ont rien à craindre là-bas, et ce pays n'a jamais non plus interrompu le remboursement de sa dette internationale. Ce n'est pas du tout comme l'Argentine.
Ce qui a surtout provoqué la récession actuelle, c'est la violence, combinée au fait que le rapatriement des narcodollars ne se fait plus comme dans les années 1980 et la plus grande partie des années 1990. À cause des interventions du gouvernement de la Colombie et des organismes bancaires internationaux, beaucoup de cet argent ne peut simplement plus être blanchi pour revenir dans l'économie colombienne, et cette situation s'est répercutée de façon très négative sur l'expansion des infrastructures, le secteur du bâtiment et tout le reste. Ce que je viens de dire peut sembler contradictoire. Je ne dis pas que les narcodollars devraient être blanchis pour revenir dans l'économie colombienne, je ne fais que décrire l'un des facteurs qui expliquent la récession des dernières années.
Je ne peux vous en dire plus sur ce que nous devrions faire sur le plan économique. Selon moi, il devrait y avoir un plus grand nombre d'entreprises canadiennes de mise en valeur des ressources naturelles qui sont en activité là-bas dans le secteur privé. Ce n'est pas un milieu rassurant, mais c'est un milieu très sûr sur le plan contractuel. Les contrats sont respectés. Toutefois, là-bas, il faut deux fois plus de temps pour mettre en valeur un gisement de pétrole ou de gaz naturel que dans les autres parties du monde. Tout cela prend beaucoup de temps, mais il y a des possibilités là-bas pour l'investissement étranger, et c'est une bonne chose d'encourager l'investissement étranger, d'abord que l'on puisse lui garantir un milieu sûr.
º (1610)
La présidente: Nous devons passer à l'intervenant suivant, M. Elley.
Avant de donner la parole à M. Dubé, j'aimerais signaler à ceux qui ne participeront pas au voyage que nous avons ajouté une journée à ce voyage, pour nous permettre de visiter une base militaire. L'autorisation de visiter une base militaire est une chose très rare là-bas. Nous verrons un peu la formation provenant des États-Unis et ainsi de suite. Je tenais à vous donner cette précision.
Monsieur Dubé.
[Français]
M. Antoine Dubé (Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, BQ): Merci, madame la présidente.
Monsieur Randall, je ne doute pas du fait que vous avez plus de connaissances que la plupart d'entre nous et que moi, sûrement, sur la Colombie. Vous ne nous invitez pas beaucoup à être optimistes, car quand on lit votre deuxième page, vous semblez dire qu'il n'y a pas de changement à court terme que l'on puisse espérer. Vous dites, et je vous cite:
Oui, les droits de la personne sont souvent violés, mais je peux vous assurer que le gouvernement n'est pas le principal responsable même s'il y a eu au fil des ans de graves violations de la part des Forces armées. Il n'y a pas de démocratie ni de liberté dans la zone occupée par les FARC. |
Ça, c'est un deuxième point.
Certains des témoins que l'on a entendus ont quelque peu mis en doute cette affirmation voulant que le gouvernement lui-même soit peut-être en violation des droits de la personne. J'aimerais que vous défendiez un peu votre affirmation parce que c'est quelque chose que l'on n'a pas souvent entendu ici.
[Traduction]
M. Stephen Randall: Quand je dis que le gouvernement n'est pas le principal responsable des violations des droits de la personne, je suis très sérieux, les FARC ne forment pas une organisation démocratique. C'est là une réalité incontournable. La zone démilitarisée, que les FARC contrôlent et qui est à peu près grande comme la Suisse, est devenue pour les FARC une base de formation de terroristes, une base de formation militaire et un moyen d'agrandissement des terrains d'aviation qu'aujourd'hui de gros porteurs russes puissent atterrir avec des armes. Je ne vois là rien de démocratique, franchement, et je pense que ce serait très naïf de penser le contraire. Quiconque ne partage pas les vues politiques des FARC et ne se conforme pas généralement à leur idéologie ne peut pas survivre à l'intérieur de la zone démilitarisée.
[Français]
M. Antoine Dubé: Vous passez tout de suite au deuxième sujet dont je voulais vous entretenir, soit les FARC. S'il est vrai que les FARC sont une organisation terroriste, comment peut-on alors accepter le fait que le gouvernement négocie avec des forces terroristes? Cela me semble presque inconcevable. Si le gouvernement colombien le fait, c'est sûrement qu'il considère, comme vous d'ailleurs, que ce n'est pas une organisation terroriste. À première vue, il me semble que cela n'a pas de sens.
[Traduction]
M. Stephen Randall: Je pense que vous avez raison, il y a une incohérence dans ce cas, mais la perception était, d'après moi, lorsque Pastrana et ses prédécesseurs ont pris le pouvoir, qu'une solution militaire au problème était impossible et qu'il fallait négocier. Je suis d'accord avec vous qu'en négociant ils donnent à l'organisation légitimité et crédibilité, mais vous constaterez également, dans ce que je vous ai remis, que les sondages d'opinion publique indiquent que 95% des Colombiens n'ont aucune sympathie pour les FARC. C'est donc un dilemme. Je pense que vous avez tout à fait raison à ce sujet.
La communauté internationale a aussi donné une certaine légitimité aux négociations en dépêchant un représentant officiel des Nations Unies là-bas, que l'on vient de remplacer comme vous le savez. Il s'agit là de la seule solution de rechange à un affrontement militaire qui, du point de vue de la plupart des observateurs internationaux, et aussi je pense des autorités colombiennes, ressemblerait beaucoup à un autre Vietnam. C'est une guerre im possible à remporter, même si les FARC constituent une organisation relativement petite. Le conflit s'éterniserait tout simplement. Voilà pourquoi je ne suis pas très optimiste quant à une résolution.
º (1615)
[Français]
M. Antoine Dubé: Vous parlez de candidats possibles. On voit qu'un certain nombre d'entre eux continuent à privilégier la voie de la négociation avec les FARC principalement, mais aussi avec les autres paramilitaires. J'ai entendu beaucoup de témoins dire ici que, finalement, ce que l'on constate, ce n'est pas qu'ils se méfient du gouvernement, mais qu'ils ne croient pas que le gouvernement actuel réussira à régler le problème. Ne trouvez-vous pas que cela aussi, c'est un paradoxe?
[Traduction]
M. Stephen Randall: Vous avez tout à fait raison, c'est un autre paradoxe. D'après mois, tout ce que les négociateurs, le gouvernement colombien, ont à faire, c'est de trouver une carotte suffisamment grosse et alléchante pour réintégrer les FARC dans la société colombienne. Qu'est-ce que ce serait? Si c'était un projectile magique, nous n'aurions aucun problème, mais il n'y a pas de solution unique. Voilà le problème. Les FARC ont beaucoup trop à perdre en déposant leurs armes. Les membres, tout autant que les dirigeants, ont beaucoup trop à perdre. S'ils voulaient se réintégrer à la société colombienne, ils pourraient le faire sur le plan politique, mais lorsque l'Union Patriotica a présenté des candidats à la fin des années 80, environ 1 000 d'entre eux ont été tués.
Il y a aussi un véritable problème du côté des paramilitaires, parce que lorsque les FARC ont essayé—et je leur donne tout le crédit à ce sujet—ou lorsque le mouvement M-19 a essayé de passer au courant normal de la politique colombienne, des représentants de l'extrême droite, groupes extrémistes, paramilitaires et autres, les ont tués ou harcelés d'autres façons. Comme vous le savez sans doute, c'était particulièrement vicieux à la fin des années 80.
La présidente: Monsieur Cotler, avez-vous une question? Vous avez cinq minutes.
M. Irwin Cotler (Mont-Royal, Lib.): Vous avez mentionné dans vos remarques quelque chose dont vous venez de parler, mais j'ai pensé que je pourrais le formuler de toutes façons, que certains témoignages entendus par notre comité étaient en quelque sorte empreints de naïveté. Je me demande si vous pourriez préciser.
M. Stephen Randall: Il y a deux points auxquels je pense vraiment. Tout d'abord, la tendance qu'on a d'essayer d'attribuer des pourcentages très explicites des assassinats aux groupes, gouvernement, paramilitaires, militaires, FARC, ELN. C'est une chose que vous ne pouvez pas faire. Il est tout simplement impossible de savoir avec précision le pourcentage des atrocités à l'endroit des droits de la personne qui sont commises par tel groupe. Ils sont tous coupables, nous le reconnaissons, et à moins de traiter cela de façon holistique et d'essayer que tout le pays examine les problèmes liés aux droits de la personne, par opposition à faire porter le blâme aux militaires colombiens ou encore au gouvernement colombien ou aux FAC ou à l'ELN, nous n'irons nulle part, il me semble.
De toute évidence, les paramilitaires sont tout aussi coupables que les FARC, et le gouvernement colombien n'a pas réussi à mâter les paramilitaires. Ce qui nous ramène également à votre question, je pense. La condition indispensable pour les FARC a toujours été de mâter les paramilitaires et de leur faire déposer les armes. Un État légitime doit être suffisamment responsable pour désarmer les organisations comme les paramilitaires. C'est une responsabilité fondamentale de l'État. C'est quelque chose que nous ne tolérerions pas dans la société canadienne. À un niveau, c'est une condition indispensable du point de vue des FARC, et je pense également du point de vue de la communauté internationale.
Pour ce qui est de votre question, monsieur Cotler, je pense que le premier aspect est ce dont je viens de parler, mais j'ai oublié le deuxième. Je suis désolé, j'ai perdu le fil de mes idées.
º (1620)
M. Irwin Cotler: Elle portait sur le fait que vous aviez trouvé une partie des témoignages empreints de naïveté.
M. Stephen Randall: Le deuxième élément était une tendance de considérer les activités des FARC comme si elles découlaient uniquement de problèmes d'ordre socio-économique, d'écarts dans les revenus, et tout le reste. C'était dans une centaine mesure vrai à la fin des années 50 et au début des années 60, au moment de la création des FARC; la guerre civile s'est terminée en 1959. Mais si vous regardez ce qui s'est passé, le sort des FARC, en 1972-1973 ils ne comptaient plus que quelques centaines de membres. Ils étaient devenus une entité presque négligeable dans la société colombienne. Ce n'est pas avant l'important essor de la cocaïne comme produit international pour les Colombiens, et encore plus récemment, évidemment, le transport de l'opium, que les FARC ont observé une forte augmentation de leurs membres et de leur pouvoir et, par voie de conséquence, de leurs liens avec des organisations terroristes internationales et des organisations criminelles comme la mafia russe. Voilà pourquoi je dis qu'il est essentiellement naïf de penser que les FARC sont une organisation axée uniquement sur les instincts humanitaires et socio-démocratiques. J'ai lu beaucoup de cela dans certains des témoignages de votre comité.
M. Irwin Cotler: Ce qui m'amène à ma deuxième question. J'ai déduit d'après vos propos que l'importance du trafic des stupéfiants pour les collines de Colombie, et que c'est dans une grande mesure pour cette raison qu'il est difficile de prévoir qu'il puisse y avoir une solution à court terme, ou même une amélioration. Avez-vous des recommandations quant à la façon de régler le problème du commerce des drogues, soit à l'échelle internationale, soit pour ce que le Canada pourrait faire?
M. Stephen Randall: Je pense que nous faisons déjà des choses qui ont trait à l'interdiction, etc. Si nous faisons en sorte qu'il soit impossible pour les groupes de fonctionner, nous progressons, mais regardez les nombres incroyables de saisies, de cocaïne en particulier, tant à l'échelle nationale qu' internationale, à l'extérieur de la Colombie. Les niveaux de production n'ont pas diminué de sorte que nous ne pouvons pas envisager une solution simple à cet égard.
Permettez-moi de répondre à votre question, puis d'examiner la situation sous un angle légèrement différent. Ce que nous devons faire, je pense, c'est de travailler avez les autorités colombiennes et avec la communauté internationale pour promouvoir des activités économiques de rechange. Il n'y aucune autre solution. Si vous avez un campesino qui cultive des cocas, en partie pour faire de l'argent et en partie parce que les trafiquants lui mettent une arme contre la tempe, la seule façon de les faire se retirer de cette culture c'est de leur donner une autre source de revenu comparable à ce qu'ils pourraient faire autrement. Les campesinos ne vivent pas terriblement bien de ce travail. Ce n'est pas là que se retrouve la plus grande partie de l'argent, comme nous le savons.
Donc, le développement économique est d'une importance cruciale. Le programme de remplacement des cultures n'a connu jusqu'ici qu'un succès marginal. La culture du yucca, du maïs et du caoutchouc et autres plantes n'engendrera pas les profits individuels que les agriculteurs retirent de la vente de cocaïne à demi traitée. La solution n'est pas facile à cet égard.
L'autre commentaire que j'aimerais faire a trait à votre question sur ce que nous pouvons faire. Ce n'est pas nécessairement une solution économique. Une des choses qui sont survenues en Colombie au cours des 20 dernières années, c'est que ce qui constituait un problème international de narcotiques est devenu un problème de plus en plus national concernant la consommation et l'abus des narcotiques. La marijuana était très répandue dans les années 60 et 70, comme dans bien d'autres endroits, mais il est maintenant nécessaire de mettre sur pied des programmes destinés aux enfants des écoles primaires pour composer avec la consommation de cocaïne. J'assistais à un programme sur la drogue et l'alcool à Medellin il y a quelques années, et un écolier pouvait acheter une ligne de cocaïne pour quelques cents dans les rues de Medellin. Compte tenu de cette situation, la consommation, en particulier chez les enfants défavorisés, est devenue très forte au cours de la dernière décennie. Ce n'était pas le cas auparavant.
º (1625)
La présidente: Merci.
Marlene.
Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce--Lachine, Lib.): Merci, madame la présidente. Merci beaucoup pour votre exposé, monsieur Randall. Je l'ai vraiment beaucoup aimé, en particulier vos commentaires au sujet de la façon dont certains témoignages que nous avons entendus de la part de différents témoins au sujet de la Colombie sont empreints d'une incroyable naïveté—je pense que j'utilise vos termes exacts. Je n'irais peut-être pas jusqu'à...
M. Stephen Randall: C'est un peu trop fort, mais néanmoins...
Mme Marlene Jennings: ...mais je dirais certainement qu'ils sont empreints de naïveté.
Essentiellement, j'ai trois points. Il est évident qu'il n'est pas dans l'intérêt des FARC de conclure la paix, parce qu'elles font des sommes considérables d'argent grâce au commerce des stupéfiants. Les FARC contrôlent une région complète. Ce n'est pas une organisation démocratique, ce qui est évident, et elle n'a aucun intérêt, comme vous l'avez dit, à ce qu'il y ait vraiment une paix durable. Il est également évident que les paramilitaires ont un rôle précis à jouer dans la déstabilisation des pourparlers de paix et pour empêcher de bâtir sur la démocratie qui existe déjà en Colombie. Concernant les élections présidentielles, vous avez dit qu'il importait peu, essentiellement, de savoir qui gagne en réalité, que cela ne changera rien à la situation en Colombie telle qu'elle est en ce moment et telle qu'elle est depuis un certain temps.
Ma question, en tant que parlementaire canadienne, en tant que représentante d'un gouvernement qui consacre des fonds au développement international en Colombie, pour des projets de gouvernance, pour des projets qui visent à consolider la société civile, afin que la société civile puisse combler le vide qui existe là-bas, est la suivante: que pouvons-nous faire? C'est ma première question.
Ma deuxième porte sur les paramilitaires. Vous avez tout à fait raison. Il incombe à l'État soit de traduire devant les tribunaux les paramilitaires qui se trouvent sur son territoire souverain, soit de les éliminer. Y a-t-il des candidats à la présidence, qu'ils aient ou non, à votre avis, une chance de l'emporter, qui présentent un programme dans le cadre duquel ils feraient effectivement des efforts véritables pour éliminer l'existence des paramilitaires, le contrôle qu'ils exercent et leur pouvoir?
Mon troisième point—et j'espère que je n'accapare pas trop de temps—a trait à la question de la société civile. Nous avons entendu des témoignages, et j'ai en réalité examiné certains témoins. Je trouvais que c'était incroyable, parce que j'ai fait quelques suggestions selon lesquelles, d'après ce que vous dites, il semble que vous ne pouvez pas vous fier aux FARC ni aux paramilitaires pour assurer une gouvernance quelconque, et le gouvernement ne semble pas, toujours selon votre témoignage, vous protéger à cet égard; donc, est-ce que vous nous dites qu'en réalité il faudrait que ce soit vos organisations ou un autre mécanisme? Certains ont en fait répondu oui. D'après moi, c'est le contraire de ce que vous soulevez ici: la Colombie est une démocratie. Malgré tous ses problèmes, malgré toutes les difficultés qu'elle a rencontrées par le passé, c'est une démocratie.
Donc, comment, en tant que comité et en tant que gouvernement, composons-nous avec le fait que vous ayez des représentants et des organisations de société civile en Colombie, mais aussi au Canada, qui sont en fait, dans une certaine mesure, naïves au sujet de la situation et qui semblent refuser de reconnaître qu'une démocratie peut être une démocratie, peu importe qu'elle vive une crise grave?
º (1630)
M. Stephen Randall: Je me rends bien compte que vous disposez de peu de temps, madame la présidente, de sorte que je serai bref.
La présidente: Nous avons commencé en retard; nous avons amplement de temps.
M. Stephen Randall: Je vais commencer par votre dernière question qui est très intéressante. J'imagine que je suis conservateur à certains égards, et en particulier au sujet des liens entre la société civile et le gouvernement, car je pense que le gouvernement canadien a la responsabilité fondamentale de travailler avec les institutions publiques de la Colombie, les élus et les organisations officielles.
Aider les institutions officielles, les organes de l'État, est je pense la voie la plus constructive à suivre pour nous. Il semble condescendant et paternaliste de vouloir consolider les institutions publiques, leur venir en aide, parce que la culture de ce pays est vaste et raffinée, comme vous le savez bien, mais nous devons aider les Colombiens à protéger les droits de la personne et à procéder à des réformes juridiques, par exemple, ce qu'ils souhaitent, et aussi veiller à ce que les militaires respectent les droits de la personne. On a considérablement changé les lois militaires au cours des dernières années pour essayer d'éliminer les violations des droits de la personne, qui sont sûrement caractéristiques du milieu militaire. Les tribunaux militaires posent toujours un problème, d'où une des recommandations que j'ai formulée.
Je pense donc que nous avons d'abord la responsabilité fondamentale de travailler avec les institutions et les organismes publics. Cela ne veut pas dire que nous ne travaillons pas avec les ONG et, dans un sens plus large, la société civile qui oeuvrent tous activement de diverses façons dans les communautés locales pour promouvoir les droits de la personne ainsi que le développement social et économique. Je pense que le Canada a la très bonne habitude de travailler avec des organismes communautaires dans le monde, parce qu'ils rejoignent le citoyen moyen. Je favorise donc une approche à deux niveaux qui, je pense, est compatible avec la politique et la pratique en vigueur au Canada.
En deuxième lieu, vous avez parlé des paramilitaires. Y a-t-il un candidat présidentiel qui réussira à les réprimer? Cela m'a peut-être tout simplement échappé, mais je n'ai lu aucune déclaration claire de l'un ou l'autre candidat indiquant qu'il agirait immédiatement pour mettre fin aux activités des paramilitaires; je n'ai rien vu à ce sujet. Cela m'a peut-être échappé, mais je n'ai rien vu en ce sens. On laisse entendre qu'ils sont dangereux, mais personne n'a dit que ce serait sa priorité. Ce ne sera pas un objectif d'Uribe qui, à certains égards, a encouragé les paramilitaires, étant donné que l'État est tellement chancelant. Serpa ne le fera pas non plus, parce que ce n'est pas sa façon de procéder. Il veut négocier, il prône le développement social et économique; il ne veut pas la guerre, et désarmer les paramilitaires suppose une intervention militaire, il n'y a pas de doute là-dessus.
En premier lieu, vous avez demandé ce que le Canada peut faire, et je pense y avoir répondu au début.
Merci, madame la présidente.
La présidente: J'aimerais que vous précisiez un peu ce que vous venez de dire. Pensez-vous que les militaires sont en mesure de tenir les paramilitaires en échec?
M. Stephen Randall: Oui.
La présidente: S'ils le voulaient, ils auraient la capacité de le faire? De son côté, le gouvernement en a-t-il la capacité?
M. Stephen Randall: Avec les nouvelles ressources en provenance des États-Unis, on compte un peu plus de 80 000 militaires. Normalement, un ratio de 10 contre 1 permet de faire face aux actions des guérillas, et donc les forces militaires manqueraient un peu de personnel. Elles devraient probablement doubler la taille de leurs effectifs pour lutter contre les mouvements de guérilla et les paramilitaires mais elles n'en ont pas manifesté la volonté. Il faudrait pour cela choisir la solution militaire, mais il faut bien sûr se rappeler que ni les narcotraficants ni les FARC ne disposent d'hélicoptères actuellement. Ils ont accès à des avions pour le transport des stupéfiants, des armes et le reste, mais ils n'ont pas encore d'hélicoptère d'attaque, et c'est le seul réel avantage dont bénéficient les forces militaires colombiennes par rapport aux FARC, à l'ELN ou aux paramilitaires.
Ont-elles la capacité militaire voulue à ce moment-ci? Non, je ne le pense pas.
º (1635)
La présidente: Quelqu'un a-t-il d'autres questions à poser? Nous avons presque écoulé notre temps.
[Français]
M. Antoine Dubé: Je cède mon tour à une personne qui n'a pas encore posé de questions.
[Traduction]
M. Bill Casey (Cumberland--Colchester, PC/RD): J'aimerais avoir quelques explications. Je ne sais pas à quoi correspondent l'ELN et les FARC par rapport aux paramilitaires. Je ne comprends pas qui ils sont.
M. Stephen Randall: Vous ne savez pas à quoi correspondent...
M. Bill Casey: Bien, vous pourriez nous redire qui ils sont.
M. Stephen Randall: Les FARC sont les Forces armées révolutionnaires de Colombie. Elles ont été constituées dans les années 1960. Ce sont l'activité du Parti communiste et la contestation socio-économique menées après la guerre civile qui a ravagé le pays de 1947 à 1959 qui en sont à l'origine. Quant à l'ELN, elle est issue essentiellement du même phénomène, un mélange de révolution cubaine, de révolution chinoise et d'activités du Parti communiste en Colombie. L'ELN réunit seulement quelques milliers de combattants tandis que les FARC comptent entre 15 000 et 20 000 hommes, en fait moins de 20 000, mais c'est de loin l'organisation la plus importante.
Il y a aussi l'EPL, qui est l'Armée de libération populaire, et le M-19, ou du moins ce qui en reste, qui était surtout un mouvement urbain qui n'a aujourd'hui pratiquement plus d'importance.
Les paramilitaires se sont organisés en réaction à l'apparente inaptitude de l'État à contrôler suffisamment la campagne, c'est-à-dire l'extérieur des villes. Ils se sont regroupés dans les années 1980 parce que les régions rurales étaient confrontées à la violence, que ce soit des assassinats, de l'extorsion, des enlèvements ou encore le massacre de bétail et de chevaux, qui existe encore, ou le racket de protection. Les paramilitaires se sont constitués avec l'encouragement des dirigeants locaux pour combler le vide laissé par l'absence du pouvoir et du contrôle de l'État.
Sans vous donner tout un cours sur l'histoire des mouvements de guérilla en Colombie, je ne peux pas vraiment vous en dire plus compte tenu du temps dont je dispose.
La présidente: Je pense qu'il en a déjà été question.
M. Bill Casey: Qui finance les paramilitaires?
M. Stephen Randall: À la fois l'industrie des stupéfiants, ou le trafic de la drogue, et les extorsions et les enlèvements. Ce sont surtout les stupéfiants dans le cas des paramilitaires et des FARC.
La présidente: Merci.
Monsieur Elley, vous poserez la dernière question.
M. Reed Elley: Merci.
Monsieur Randall, ma question sera brève. Je crois comprendre que, récemment, le gouvernement de la Colombie a sollicité une plus grande intervention militaire américaine. Je pense que les Canadiens collaborent toujours avec d'autres pays du monde en réponse à la volonté de notre voisin du sud de faire régner l'ordre sur la scène internationale. Savez-vous si la population de Colombie est largement favorable à l'intervention américaine, ou si c'est seulement le gouvernement qui la souhaite?
M. Stephen Randall: C'est une question très intéressante. Quelqu'un du département d'État me disait hier que les États-Unis n'avaient aucun intérêt à accéder à cette demande, ce qui est bien sûr important.
Depuis que je m'intéresse à la Colombie, j'ai constaté—ce qui rejoint mon commentaire précédent—une situation très paradoxale, une relation amour-haine avec les États-Unis. C'est seulement parce que la situation devient désespérée et que la classe moyenne trouve que ses propriétés perdent toute leur valeur, parce que les gens ne peuvent pas exploiter leurs ranchs, se rendre à leurs ranchs et à leurs plantations, qu'ils en sont peu à peu venus à envisager la possibilité d'une plus grande intervention militaire et d'une plus grande présence américaine pour aider à régler la situation. Ainsi, les Colombiens seraient plus favorables, si vous voulez—et je n'ai pas de sondages d'opinions à l'appui—à une solution militaire et à une présence américaine accrue, simplement pour que le problème se règle dans la mesure du possible. En même temps, on craint beaucoup qu'une guerre s'intensifie et ait des effets plus importants.
Ce qui est frappant, je pense, quand on va là-bas, c'est de constater que la guerre a eu assez peu d'impact sur les villes, comparé à l'économie. Il y a des actes isolés de violence, quelques voitures piégées et le reste, bien sûr, mais, en général, la violence individuelle, les vols et les actes du genre existaient bien avant les paramilitaires et l'industrie des stupéfiants. Ce qui se passe, cependant, c'est que les citadins souffrent beaucoup plus qu'avant de la situation, ce qui va changer l'opinion publique. Les Colombiens qui vivent maintenant à New York, au New Jersey, en Floride et ailleurs aux États-Unis, les Colombiens des classes moyennes et supérieures, voudraient vraiment rester en Colombie mais, compte tenu de la situation économique et de la violence qui règnent là-bas, ils ne le peuvent pas. Je ne vais pas vous raconter toutes sortes d'anecdotes, mais je pourrais le faire.
º (1640)
La présidente: En terminant, avant de vous remercier, vous avez dit que nous pouvons faire des choses que les Américains ne peuvent pas faire. Nous aimerions vraiment savoir de quoi vous parlez.
M. Stephen Randall: D'abord, les entreprises et les employés canadiens, y compris les dirigeants, peuvent circuler plus librement en Colombie que les Américains. Le fait que les FARC aient fait savoir que les Américains qui collaborent ou apportent un soutien logistique au Plan columbia et aux militaires colombiens méritent de se faire tuer nous donne un certain avantage, je pense, sur les dirigeants américains pour ce qui est de la liberté de circulation. Le fait que Lloyd Axworthy ait pu, il y a quelques années, marcher dans les rues de Bogota, alors que Madeleine Albright s'est fait escorter par des destroyers au large de Carthagène sur lesquels se trouvaient je ne sais plus combien de milliers de marines au cas où elle se ferait attaquer ou menacer montre bien que nous sommes perçus différemment des Américains.
Donc, oui, nous pouvons faire des choses. Nous pouvons agir au niveau communautaire. Nous pouvons aussi intervenir auprès du gouvernement colombien, des autorités colombiennes, et auprès de la communauté internationale sans être perçus comme étant aussi impérialistes, militaristes ou agressifs, simplement parce que nous n'avons pas autant de pouvoir. Nous pouvons aussi faire valoir notre rôle traditionnel de gardiens de la paix, de médiateurs internationaux et le reste. Ce que Gil Rishchynski ou tout autre ambassadeur canadien peut faire dans ses discussions avec les FARC ou d'autres mouvements de guérilla et dans ses démarches de conciliation est quelque chose qu'aucun dirigeant américain ne peut réussir.
La présidente: D'accord.
Merci beaucoup. Merci encore une fois d'être venu nous rencontrer. Je suis heureuse que nous ayons pu vous entendre aujourd'hui.
M. Stephen Randall: Je vous souhaite bon voyage. Je pense que vous découvrirez un très beau et très intéressant pays...
La présidente: Oui, j'y suis allée l'an dernier.
M. Stephen Randall: ... et des gens merveilleux.
La présidente Oui, les gens sont merveilleux.
Merci beaucoup.
Stephen Randall: Il n'y a pas de quoi. Merci.
La présidente: Nous allons prendre une pause de cinq minutes avant de poursuivre la deuxième moitié de notre réunion.
[Note de la rédaction: La séance se poursuit à huis clos]