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AANR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand Nord et des ressources naturelles


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 1er mai 2003




¾ 0800
V         Le président (M. Raymond Bonin (Nickel Belt, Lib.))
V         Le président
V         M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD)
V         Le président
V         M. Maurice Vellacott (Saskatoon—Wanuskewin, Alliance canadienne)

¾ 0840
V         M. Warren Johnson (sous-ministre adjoint, Services fonciers et fiduciaires, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien)

¾ 0845
V         Le président
V         M. Charles Hubbard (Miramichi, Lib.)
V         Le président
V         M. Maurice Vellacott
V         Le président
V         M. Maurice Vellacott
V         M. Warren Johnson
V         Le président
V         M. Maurice Vellacott

¾ 0850
V         Le président
V         M. Pat Martin
V         Le président
V         M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ)
V         The Chair
V         M. Yvan Loubier
V         Le président
V         M. Pat Martin

¾ 0855

¿ 0900
V         Le président
V         M. Yvan Loubier

¿ 0905

¿ 0910
V         Le président
V         M. Charles Hubbard
V         Le président
V         M. Pat Martin

¿ 0915

¿ 0920
V         Le président
V         Le président
V         M. Yvan Loubier
V         M. Pat Martin

¿ 0925

¿ 0930
V         Le président
V         M. Yvan Loubier

¿ 0935

¿ 0940
V         Le président
V         M. Pat Martin
V         Le président

¿ 0945
V         M. Pat Martin
V         Le président
V         M. Pat Martin
V         Le président
V         M. Pat Martin
V         Le président
V         M. Pat Martin
V         M. Warren Johnson

¿ 0950
V         M. Andrew Beynon (avocat général, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien)
V         M. Pat Martin
V         M. Andrew Beynon
V         M. Pat Martin
V         M. Andrew Beynon
V         M. Pat Martin
V         M. Andrew Beynon

¿ 0955
V         Le président
V         Le président
V         M. Pat Martin
V         Le président
V         M. Pat Martin
V         Le président
V         M. Pat Martin

À 1000

À 1005
V         Le président
V         M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.)
V         M. Andrew Beynon
V         M. John Godfrey
V         M. Andrew Beynon
V         M. John Godfrey
V         M. Andrew Beynon

À 1010
V         M. John Godfrey
V         M. Andrew Beynon
V         M. John Godfrey
V         M. Warren Johnson
V         M. John Godfrey
V         Le président
V         M. Yvan Loubier

À 1015

À 1020
V         Le président
V         M. Pat Martin

À 1025

À 1030
V         M. Yvan Loubier
V         M. Pat Martin
V         Le président
V         Le président
V         M. Pat Martin

À 1035
V         Le président
V         Le président
V         M. Pat Martin

À 1045
V         Le président
V         M. Charles Hubbard
V         Le président
V         M. Charles Hubbard
V         Le président
V         M. Yvan Loubier

À 1050

À 1055
V         Le président
V         M. Pat Martin

Á 1100

Á 1105
V         Le président

Á 1110
V         M. Charles Hubbard
V         M. Paul Salembier (avocat-conseil, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien)
V         Le président
V         Le président
V         M. Yvan Loubier

Á 1125
V         Le président

Á 1130
V         M. Pat Martin
V         Le président
V         M. Pat Martin

Á 1135
V         Le président

Á 1140
V         M. Charles Hubbard
V         Le président
V         M. Charles Hubbard
V         Le président
V         M. Yvan Loubier
V         Le président
V         M. Yvan Loubier
V         Le président
V         M. Yvan Loubier
V         Le président
V         M. Charles Hubbard
V         Le président
V         M. Yvan Loubier

Á 1145
V         Le président
V         M. Yvan Loubier
V         Le président
V         M. Yvan Loubier
V         Le président
V         M. Yvan Loubier

Á 1150
V         Le président
V         M. Pat Martin

Á 1155

 1200
V         Le président

 1205
V         M. Yvan Loubier

 1210
V         Le président

 1215
V         M. Charles Hubbard
V         Le président
V         Le président
V         M. Charles Hubbard

 1220
V         Le président
V         M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD)

 1225

 1230
V         Le président
V         M. Yvan Loubier

 1235

 1240
V         Le président
V         M. Charles Hubbard
V         Le président

 1245
V         Le président
V         M. Charles Hubbard
V         Le président
V         M. Charles Hubbard
V         Le président
V         Le président










CANADA

Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand Nord et des ressources naturelles


NUMÉRO 067 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 1er mai 2003

[Enregistrement électronique]

¾  +(0800)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Raymond Bonin (Nickel Belt, Lib.)): Il est 8 heures, mais vu que nous n'avons pas le quorum, je vais suspendre la séance pendant 15 minutes.

¾  +-(0802)  


¾  +-(0835)  

+-

    Le président: Bonjour tout le monde. Nous sommes ici réunis pour examiner le projet de loi C-7, Loi concernant le choix des dirigeants, le gouvernement et l'obligation de rendre compte des bandes indiennes et modifiant certaines lois. Nous en sommes à l'amendement CA-36.

    Monsieur Vellacott.

    Oh, excusez-moi. M. Martin invoque le Règlement.

+-

    M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): J'aimerais simplement demander, monsieur le président, que vous vérifiiez que toutes les personnes ici présentes ont véritablement le statut de membre remplaçant en bonne et due forme au comité.

+-

    Le président: Monsieur Vellacott.

    (Article 16—Textes législatifs à des fins locales)

+-

    M. Maurice Vellacott (Saskatoon—Wanuskewin, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président. Alors que nous abordons cette question, je tiens à souligner que c'est un domaine très critique qui mérite qu'on en traite comme il se doit. Nous tentons d'apporter ici quelque aide en vue de faire avancer les choses. Je sais que la question des biens réels matrimoniaux a été étudiée pour les femmes et les hommes vivant en réserve. Je suppose que cela touche plus souvent les femmes—en tout cas, cela peut sensiblement leur nuire si elles ont des enfants. Je sais qu'il s'est fait du travail de consultation conjoint au cours des dernières années. Nous avons discuté avec un certain nombre de femmes membres des Premières nations et certains de leurs groupes officiels nous ont eux aussi indiqué qu'ils ont quelques inquiétudes quant à cette question des biens matrimoniaux et de la nécessité pour les Premières nations d'avoir des lois cohérentes—pour leur protection et pour la protection de leurs enfants et petits-enfants.

    Je serais porté à croire que les personnes des deux sexes, hommes et femmes, voudraient être justes en la matière. Ce que nous proposons est que le projet C-7, à l'article 16, soit modifié par adjonction, après la ligne 38, page 11, d'un nouveau texte. L'on n'enlève en fait rien, si vous regardez attentivement l'enchaînement. Je constate que la version imprimée du texte anglais du projet de loi est très instructive. Il s'y trouve toute une partie en blanc. Je pense que les députés d'en face auront relevé cela et que Stan est au courant. C'est également le cas de Dominique ainsi que de Gérard. Il y a donc là un espace en blanc qui semble être une invitation à le remplir. Il y a une lacune—en quelque sorte un trou—qui doit être comblée comme il se doit.

    Cela étant, nous avons interprété cet indice comme signifiant que nous pourrions peut-être y faire quelque chose, possiblement dès aujourd'hui.

    En vertu de cet article, la bande est autorisée et encouragée à intervenir dans certains de ces domaines, et c'est ce que certaines auront peut-être en fait déjà fait, allant de l'alinéa a) jusqu'à et y compris l'alinéa o)—de a) à o)—selon lesquels le conseil d'une bande peut prendre des textes législatifs concernant la santé, la résidence, les dommages matériels, les activités dans un lieu public, les ouvrages locaux, les services publics, le zonage, les incommodités, la construction, la location à des fins d'habitation, la circulation, la réglementation d'activités commerciales, la garde d'animaux sauvages et domestiques, l'observation de la loi et le maintien de l'ordre, l'interdiction de la vente ou du troc de liquides—mélanges susceptibles de consommation humaine—, la délivrance de permis, et ainsi de suite.

    Nous pensons qu'il convient d'y faire un ajout comme suit «l'échec des mariages ou des unions de fait dans la réserve et la séparation des biens matrimoniaux, d'une façon compatible avec les principes législatifs de la province visée». Pour expliquer les choses simplement, dans la langue du profane, ce autant pour moi-même que pour quiconque écoute, ainsi que pour obtenir l'appui des députés d'en face—j'ose espérer que nous pourrons obtenir leur appui pour cet élément très critique—il s'agit de prévoir la prise de textes législatifs en matière de biens réels matrimoniaux de façon à ce qu'il y ait équité et justice en cas d'éclatement d'une relation conjugale, ce afin d'éviter qu'une personne ne se retrouve sans abri, sans toit sur sa tête.

    Nous proposons que les bandes puissent exercer des pouvoirs en cas d'échec de mariage dans la réserve, et cela engloberait les unions de fait. Il s'agit ici surtout du partage des biens matrimoniaux et du respect des normes entourant les principes des lois provinciales respectives.Je pense qu'il va sans dire que les femmes doivent pouvoir avoir le droit de conserver le foyer conjugal, surtout lorsqu'elles ont des enfants, et il faut en tout cas que cette question soit tranchée de façon juste. J'estime que ce sera une occasion manquée si nous ne nous occupons pas de cet aspect plutôt plus tôt que plus tard.

    J'ose espérer que si cet amendement n'est pas adopté aujourd'hui l'on pourra rapidement et avec célérité—mais non pas une célérité bousculée, car je sais que beaucoup de travail a été fait—combler cette lacune très critique, car cela a une incidence si directe et peut avoir des conséquences si négatives que l'on ne peut pas se permettre de laisser cela de côté. J'ai eu des discussions—et j'espère qu'elles n'ont pas été aussi fréquentes que je suis à l'occasion amené à penser—dans le cadre desquelles des femmes membres de Premières nations m'ont dit que lors de la rupture d'un mariage ou d'une relation, elles se retrouvent à la porte. Elles sont déplacées; elles doivent quitter leur logement. Elles ont par la suite beaucoup de difficultés à se trouver un logement.

¾  +-(0840)  

    Je pense que serait une occasion manquée et j'estime que tous les partis, et pas seulement l'Alliance canadienne, voudront promouvoir cela et encourager les collectivités autochtones à élaborer des codes plus appropriés en matière de biens matrimoniaux.

    Dans le contexte actuel, les intérêts en matière de biens réels matrimoniaux ne sont pas toujours partagés de façon juste, équitable et opportune. Encore une fois, si les choses traînent, l'on ne peut pas parler de vraie justice, et parfois cela traîne pendant trop longtemps, pendant plusieurs années, et parfois même cela ne se règle jamais.

    J'en attribuerais le crédit à d'autres partis qui songent à la même chose, mais je sais que nous autres membres de l'Alliance canadienne tenons à faciliter l'élaboration par les bandes de codes en matière de biens matrimoniaux, ce de veiller à ce que les deux conjoints bénéficient d'une protection égale. J'ai laissé entendre que cela nuit peut-être plus souvent aux femmes des Premières nations lorsqu'il n'y a pas disposition et partage adéquats des biens matrimoniaux, mais cela joue dans les deux sens et nous souhaitons assurer une protection aux personnes des deux sexes.

    J'en ai terminé avec mon plaidoyer mais je vous implore, sur la base des propos que je viens de vous tenir, d'envisager sérieusement l'adoption de cet amendement.

    M. Johnson pourrait peut-être nous fournir rapidement quelques renseignements historiques. Je n'ai fait qu'effleurer ou qu'évoquer, je suppose, certains des travaux qui ont été faits, et si cette question n'était pas couverte ici aujourd'hui, j'aimerais lui demander comment nous pourrions au mieux régler dans les jours qui suivent cette question fort importante.

+-

    M. Warren Johnson (sous-ministre adjoint, Services fonciers et fiduciaires, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien): Merci.

    Comme vous l'avez mentionné, cette question revêt une importance énorme. Lors des consultations au sujet de la LGPN, ce fut, aux côtés de la question de la participation des femmes autochtones et de leur capacité générale de chercher recours, s'agissant des affaires de leur gouvernement de bande, l'une des plus importantes questions que les femmes autochtones ont tenu à soulever.

    Pour ce qui est de cette question-ci, c'est un petit peu plus large, en ce sens que l'on parle réellement de tout genre de différend familial en la matière, la véritable question étant que les lois d'application générale s'appliquent généralement en réserve, exception faite de tous ce qui concerne les terres. Étant donné que les différends familiaux sont du ressort du système judiciaire provincial, il y a ici des contraintes, pour ce qui est de l'application de lois provinciales, tant en matière d'échec de mariage qu'en matière de violence conjugale, ce qui est au moins tout aussi important.

    En conséquence, ces aspects des décisions judiciaires touchant des biens réels en réserve, qu'il s'agisse de la disposition de biens par suite de l'échec d'un mariage ou d'ordonnances intérimaires de cours provinciales qui traitent souvent de l'occupation de la maison en cas de problèmes de violence familiale, de la protection des enfants, et d'autres choses du genre, ne s'appliquent pas parce qu'elles concernent des biens réels en réserve.

    Il s'agit d'une question très importante, d'une question d'une importance énorme pour la National Aboriginal Women's Association, pour d'autres femmes autochtones et pour d'autres intervenants dans tout ce processus.

    Pour toutes ces raisons, la question des biens réels est importante et complexe. L'on commence ici à aborder des questions fiduciaires, étant donné le rôle et les responsabilités du gouvernement fédéral en la matière. Par conséquent, en dépit de son importance—et je pense que le ministre s'est prononcé publiquement là-dessus dans le cadre de diverses tribunes—nous avons hésité, surtout parce qu'il avait été recommandé qu'il y ait des consultations détaillées sur la question, étant donné son importance et sa complexité, en dépit de l'urgence que tout le monde y attachait, convaincus qu'il fallait en traiter le plus rapidement possible, mais qu'il n'était peut-être pas opportun—et c'est là la question que doit se poser le comité—de l'inclure dans la Loi sur la gouvernance des Premières nations.

    D'après ce que j'ai compris, des discussions sont présentement en cours au Sénat relativement à une étude sénatoriale spéciale de cette question, et il serait question de discussions plus poussées et d'un ordre de renvoi du ministre et du Sénat. Je ne suis malheureusement pas tout à fait à jour quant aux initiatives prises jusqu'ici. Ils sont en train de discuter de la rapidité avec laquelle ils pourront se pencher sur cette question, étant donné son urgence.

    Un certain nombre d'études et de rapports qui avaient été commandés ont été rendus publics lors de récentes conférences portant sur cela et sur des questions connexes—et je veux dire par là tout récemment, c'est-à-dire depuis Noël—ce dans le but de favoriser le dialogue et la discussion publics au sujet de cette question au sein des collectivités des Premières nations.

    Le seul domaine dans lequel les choses bougent est celui de la mise en oeuvre par les Premières nations de la Loi sur la gestion des terres des Premières nations—question dont nous avons discuté hier soir—parce que c'était une question très importante pour les femmes autochtones désireuses d'intervenir relativement à la Loi sur la gestion des terres des Premières nations. C'était je pense également un point clé dans les discussions tenues et à la Chambre et au Sénat au sujet de la Loi sur la gestion des terres des Premières nations. Au moins là, étant donné que les Premières nations assumaient le contrôle de leurs propres fonctions et que cela n'intéressait pas directement le gouvernement fédéral du fait que ses obligations fiduciaires ont changé, ils vont immédiatement commencer à bouger là-dessus. Voilà ce qui se passe en vertu de la Loi sur la gestion des terres des Premières nations.

¾  +-(0845)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Vellacott.

    Monsieur Hubbard.

+-

    M. Charles Hubbard (Miramichi, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Je pense que M. Johnson a soulevé les principaux points que je voulais mentionner. Je sais que cela a une grande importance, mais je ne suis pas certain que nous puissions en traiter ici.

    Deuxièmement, je ne suis pas convaincu que cela s'inscrirait logiquement dans ce qui a été regroupé ici. L'on parle de construction; l'on parle de la garde d'animaux sauvages et domestiques, de circulation, d'activités commerciales. J'estime que le concept des biens matrimoniaux ne s'inscrit pas vraiment dans l'actuel libellé de l'article 16.

    Merci, monsieur le président.

+-

    Le président: Quelqu'un d'autre? Monsieur Vellacott, auriez-vous des remarques à faire en guise de conclusion?

+-

    M. Maurice Vellacott: Il est question ici des pouvoirs législatifs du conseil—du pouvoir de faire des lois—alors je ne vois pas très bien à quel autre endroit cela pourrait s'insérer. Mais si M. Hubbard a un amendement amical visant l'insertion de cette question à un meilleur endroit dans le projet de loi, j'y serais bien sûr bien disposé. Charlie voudra peut-être y réfléchir pendant les quelques minutes dont je dispose ici.

    L'autre question, pour revenir à ce que vous disiez à la fin de votre intervention, monsieur Johnson—j'essaie de me rappeler de ce que j'allais dire à ce sujet—est celle de la violence qui peut, comme vous l'avez dit, survenir également en cas de situation d'échec conjugal. Si je vous ai bien compris, c'est là une autre question qui me préoccupe tout autant et je devine que ce que vouliez laisser entendre est que les injonctions ou ordonnances d'interdiction de communiquer et autres choses du genre ne peuvent pas être exercées lorsque la situation se présente en réserve, ce qui est quelque peu troublant également.

    J'ose espérer que si nous ne nous occupons pas de cette question particulière ici aujourd'hui, nous saurons le faire très rapidement par la suite. L'on peut avoir beaucoup de discussions et beaucoup d'études, et vous savez que le processus ici au Parlement est quelque fois plutôt long. Cela est en partie dû à nos délibérations très détaillées, mais il arrive également que certaines autres choses entravent nos travaux. Entre-temps, c'est la dévastation dans la vie de gens—familles, femmes, hommes—partout au pays dans les réserves des Premières nations.

    C'est ce qui m'afflige et c'est pourquoi nous proposerions que l'on s'attaque à cette question le plus rapidement possible. Des vies sont en train d'être gâchées et détruites et de grands torts peuvent être causés du fait de l'impossibilité de résoudre cette question. Et il est vrai, je le reconnais, que cela tourne autour de cette question des terres communes, partagées.

    J'aimerais savoir si M. Johnson pourrait faire quelque commentaire au sujet de cet espace laissé en blanc. Je remarque que c'est à peu près tout juste la place qu'il faudrait pour insérer mon petit amendement. Trouvez-vous que ce serait instructif? Je ne suis pas convaincu que vous êtes prêt à vous prononcer sur le fait qu'il y a ici cet espace en blanc—un espace qui correspond très exactement à la place qu'occuperait mon alinéa. Est-ce là une indication de quelque chose?

+-

    Le président: Monsieur Vellacott, j'aimerais simplement apporter une petite précision. S'il y a cet espace, c'est parce que le français est plus long; voilà qui explique ce blanc.

+-

    M. Maurice Vellacott: C'est plus long en français? Oh la la!

+-

    M. Warren Johnson: C'aurait été ma réponse aussi, monsieur le président.

+-

    Le président: Ce n'aurait pas été la mienne, mais ce l'est devenu grâce à mon coach.

+-

    M. Maurice Vellacott: Eh bien, merci beaucoup, monsieur le président. Cela a été très instructif.

    A priori, nous acceptons cette réponse, mais j'ai tout de même le sentiment que nous étions ici en présence de grands pouvoirs qui étaient à l'oeuvre en vue de m'offrir cette occasion et d'inscrire quelque chose d'essentiel dans le projet de loi.

    Je vais vous laisser mettre cela aux voix, mais je vous demande que si nous ne réglons pas cette question aujourd'hui, l'on en fasse alors par la suite un examen plus vaste, plus approfondi et plus exhaustif. En bout de ligne, il ne s'agit pas de prendre votre libellé ou un autre, de prendre du temps, d'avoir des études sans fin au Sénat et des ébauches et des études savantes sans fin; il s'agit d'avoir quelque chose sur papier qui n'est peut-être pas tout beau et tout parfait mais qui est néanmoins une tentative honnête et sérieuse de satisfaire des besoins qui nous ont été exposés, et ce très clairement par des femmes des Premières nations.

    Elles ont fait ressortir cela de façon tout à fait claire. Ce n'est pas du tout une question partisane. Je pense que nous tous devrions être d'accord là-dessus : le Parti libéral, le Bloc, le NPD, l'Alliance canadienne et les progressistes-conservateurs. C'est une question qui se situe bien au-dessus de la mêlée et de questions partisanes. C'est la vie des gens qui est en jeu ici. Les femmes des Premières nations ont été très claires, et j'aurais tendance à croire que les hommes partageraient leur point de vue, désireux d'être justes—dans l'intérêt des familles, dans l'intérêt des enfants, dans l'intérêt de toutes les personnes concernées—face à la très triste situation de l'échec des mariages : comment faire pour amener réconciliation et résolution, en tout cas dans toute la mesure du possible, en vue de satisfaire les besoins des gens.

    Voilà quel est l'objet de mon coeur, de mon esprit et certainement de l'Alliance canadienne, et je pense que la même chose vaudrait pour tous les autres partis également. Ainsi se termine donc mon plaidoyer, et je demande aux membres du comité de se pencher sérieusement sur l'article dont nous sommes saisis.

¾  +-(0850)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Vellacott.

    Monsieur Martin, pour un rappel au Règlement.

+-

    M. Pat Martin: Monsieur le président, j'invoque le Règlement.

    Compte tenu de circonstances échappant à mon contrôle, j'ai raté l'occasion d'intervenir au sujet de cet article, mais j'aimerais dire quelque chose. J'aimerais demander le consentement unanime pour qu'on m'accorde une certaine marge de manoeuvre et qu'on m'autorise à faire une brève intervention avant que l'on ne procède au vote.

+-

    Le président: Ai-je le consentement unanime des membres du comité?

    Des voix: Non.

    M. Par Martin: Mille fois merci.

    Le président: Nous passons donc tout de suite au vote.

[Français]

+-

    M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur le président, j'ai aussi un rappel au Règlement.

[Traduction]

+-

    The Chair: Monsieur Loubier, pour un rappel au Règlement.

[Français]

+-

    M. Yvan Loubier: Monsieur le président, c'est la même chose pour moi. Lorsque je considère les questions soulevées par M. Vellacott...

    Le président: En quoi consiste votre rappel au Règlement?

    M. Yvan Loubier: J'aimerais obtenir le consentement unanime...

    Le président: Bon, c'est cela. Allez-y.

    M. Yvan Loubier: J'aimerais avoir le consentement unanime de mes collègues afin de pouvoir faire une brève intervention portant sur cette question. Les arguments donnés dans la deuxième partie de l'intervention de M. Vellacott m'ont davantage convaincu.

+-

    Le président: Merci.

[Traduction]

    Ai-je le consentement unanime des membres du comité?

    Des voix: Non.

    Le président: Nous allons donc procéder à un vote par appel nominal sur l'amendement CA-36, page 128.

    (L'amendement est rejeté par 7 voix contre 2)

    Le président: Nous passons maintenant à l'amendement NDP-35, page 129.

    Monsieur Martin.

+-

    M. Pat Martin: Monsieur le président, j'étais tout à fait prêt à intervenir au sujet de l'amendement précédent, et cela me déçoit que je n'en ai pas eu l'occasion, car je pensais pouvoir faire une contribution qui aurait été utile à tout le monde. Je suis donc déçu du manque de souplesse manifesté par les députés du parti au pouvoir ainsi que par leur refus de se montrer arrangeants, voire même de ne faire qu'entendre une contribution légitime qui aurait pu enrichir ou élargir la discussion au sujet de ce projet de loi.

    Monsieur le président, il y a un problème ici avec tout le format. Il y a très peu de volonté d'élaborer ici un bon projet de loi, car il n'y a aucun échange. Cela me ramène à ce que je disais tout à l'heure. Cela constitue une violation des responsabilités et obligations fiduciaires qui nous reviennent en notre qualité de députés et qui sont telles qu'il nous faut faire tout notre possible pour que le projet de loi soit le meilleur possible. Et si vous allez bloquer l'intervention et la participation légitimes des députés de l'opposition, alors cela va en soi à l'encontre de notre obligation de veiller à ce que le projet de loi soit le meilleur possible.

    Les suggestions que nous aurions faites pour que l'amendement de M. Vellacott soit significatif et éloquent auraient cadré avec ce qui se passe au Sénat. Ce que nous avons fait ici c'est céder notre pouvoir décisionnel à la chambre non élue qu'est le Sénat, car c'est lui qui est en train de s'occuper de cette question de biens, d'échec du mariage, de biens réels et d'unions de fait. C'est notre Sénat non élu qui se penche là-dessus.

    Nous avons été chargés d'élaborer le projet de loi C-7, mais voici que nous avons sous-traité ce travail. Le ministre est allé au Sénat et lui a offert tout un tas d'argent pour faire une étude approfondie sur cette même question et pour en soumettre les résultats d'ici juin. Le Sénat est donc en train de faire notre travail en parallèle, exactement en même temps que nous. Les sénateurs sont en train de se réunir en même temps que nous dans une autre pièce; or c'est nous qui sommes les représentants élus. Qu'est-ce qui cloche là-dedans? Le Comité sénatorial des droits de la personne s'est vu accorder des fonds afin de soumettre pour le compte du ministre des recommandations traitant précisément de la question qu'a soulevée M. Vellacott.

    Le comité des droits de la personne a par ailleurs sous-traité cela au comité des peuples autochtones, et cela va lui demander jusqu'en mars 2004 pour soumettre une résolution au sujet de cette question. Il est donc peu probable que cela vienne s'inscrire dans le projet de loi C-7 ou dans la nouvelle Loi sur la gouvernance des Premières nations.

    Si donc nous nous efforçons de régler cette question de façon satisfaisante, alors nous venons bien franchement de manquer notre occasion, car j'avais à faire une contribution qui aurait, je pense, pu modifier, par voie de sous-amendement, la proposition de M. Vellacott à la satisfaction de toutes les personnes ici. Et nous aurions été aux commandes quant à l'élaboration d'amendements au projet de loi C-7, au lieu que ce soit l'autre chambre qui en ait la responsabilité. Personne n'a élu les sénateurs pour qu'ils s'occupent de questions relatives à la Loi sur la gouvernance des Premières nations.

    Je suis donc déçu, et je devine que cela donne le ton pour la journée. S'il était demeuré quelque optimisme quant à la possibilité d'une certaine collaboration, je suppose que nous sommes encore une fois partis du mauvais pied.

    J'ignore ce qu'entend le secrétaire parlementaire lorsqu'il dit que nous devons nous appuyer sur les témoignages. Nous nous appuyons sur les interventions en provenance de toutes les sources. Et M. Vellacott a raison lorsqu'il dit que nous avons maintes et maintes fois reçu au comité des interventions au sujet de cette question. Il est donc irresponsable que le comité invite des témoins à comparaître, les entende, puis ignore ce qu'il a entendu ou en tout cas n'y consacre pas le temps requis pour en traiter comme il se doit, renvoyant cela au Sénat non élu, sous-traitant cela à un autre groupe de personnes de l'autre côté du couloir qui, bien franchement, n'ont pas la même autorité que nous du fait qu'elles n'aient pas été élues pour faire ce travail. C'est nous qui avons été élus.

    L'échéancier m'inquiète. Si le ministre pensait qu'il y avait un besoin urgent de bouger là-dessus, pourquoi n'a-t-il pas demandé au comité d'y consacrer davantage de temps et d'attention? Il ne le pouvait en réalité pas, car le parti au pouvoir a recouru à l'attribution du temps pour décider du temps que le comité pourrait consacrer à toute question. Le sujet qui nous occupe ici mérite une attention toute spéciale et un examen attentif, et voici qu'on l'abandonne de nouveau.

¾  +-(0855)  

    Toujours à l'article 16, le NPD a un autre amendement à proposer, l'amendement NDP-35. Ici encore, il est question du fait que les collectivités autochtones craignent beaucoup que le projet de loi C-7 porte atteinte aux droits ancestraux et issus des traités.

    C'est pour leur compte et pour résoudre ces problèmes que le NPD et le Bloc, ainsi que l'Alliance, ce sont vigoureusement débattus pour obtenir un libellé qui protégerait ces droits ou en tout cas qui éclairerait les juges ou les arbitres futurs qui seraient amenés à interpréter le projet de loi, de façon à ce que rien dans celui-ci ne puisse porter atteinte aux droits existants ancestraux ou issus de traités des peuples autochtones.

    Monsieur le président, nous avons de bonnes raisons d'être inquiets lorsqu'une clause de non-dérogation est sciemment et délibérément omise d'un projet de loi déposé au comité.

    Nous savions très bien que le libellé original du projet de loi contenait une clause de non-dérogation avant d'être envoyé pour lecture et examen au ministère de la Justice. Un signal d'alarme a été donné et le ministère de la Justice a averti les rédacteurs du projet de loi que celui-ci étant un champ de mines; il est rempli de problèmes potentiels.

    D'après les renseignements dont nous disposons, le ministère de la Justice a averti que le projet de loi empiète sur, porte atteinte à, etc.... attaque les droits ancestraux et issus des traités.

    Il a lancé un avertissement aux rédacteurs leur disant : si vous insérez ici ce libellé et ces diverses choses que vous voulez réaliser, il vous faudra faire une chose ou l'autre, ou changer les articles offensants ou supprimer la clause de non-dérogation. Et il semble que le gouvernement ait retenu la deuxième solution.

    Dans l'incarnation finale du projet de loi livré au comité, la clause de non-dérogation n'était plus. Croyez-moi, les gens ne sont pas stupides. Ceux et celles qui ont lu le projet de loi ont tout de suite relevé cela et ont commencé à saisir toutes les occasions qui se présentaient pour parler de la non-dérogation. Sous le titre «Objet de la loi» à l'article 3, et dans presque tous les articles pertinents du projet de loi, nous aimerions expliciter que l'article ou le libellé en question ne devrait jamais porter atteinte aux droits existants, ancestraux ou issus de traités des peuples autochtones.

    La situation doit être frustrante pour ceux et celles qui ont parcouru des centaines et des milliers de milles dans certains cas pour venir témoigner et faire cette mise en garde. Je constate qu'il y a ici un schéma, une tendance. Certains intervenants sont des militants de deuxième génération qui ont fait du lobbying auprès de ce comité pour que celui-ci fasse quelque chose au sujet de l'équité de la Loi sur les Indiens. J'ai remarqué hier soir qu'il y avait dans l'assistance des personnes qui avaient lutté en 1968 et en 1969 contre le Livre blanc. Ces mêmes personnes étaient revenues ici en 1982 pour veiller à ce que la Constitution rapatriée tienne compte du fait que la responsabilité fiduciaire de la Couronne devait être transférée à ce nouveau document, si la Constitution devait être rapatriée au Canada. Et cette lutte a fait l'objet d'un énorme débat plein de rancoeur.

    Nous avons ici aussi des anciens combattants qui ont participé à cette lutte. Nous avons en fait dans l'assistance aujourd'hui des parents qui sont venus ici en 1947.

    J'aimerais rendre ici hommage au sergent Tommy Prince. Il est l'ancien combattant le plus décoré du Canada, et il se trouve qu'il est Autochtone, originaire du Manitoba. J'aurais en fait une histoire intéressante à vous raconter. Ce n'est que tout récemment que l'on a racheté ses décorations et médailles pour les rapatrier au Canada. Elles avaient été vendues à un collectionneur à l'étranger. Tout un mouvement a été lancé à Winnipeg par Jim Bear, l'ancien directeur de l'Aboriginal Council of Winnipeg, qui a été des nôtres aujourd'hui. C'est lui qui a mené la campagne pour que ces médailles reviennent au Canada afin qu'on puisse les montrer et les traiter avec le respect qu'elles méritent à la mémoire de Tommy Prince.

    En 1947, le sergent Tommy Prince est venu...

¿  +-(0900)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Martin.

    Monsieur Loubier.

[Français]

+-

    M. Yvan Loubier: À l'instar de mon collègue Martin, j'aurais aimé discuter de la motion de M. Vellacott. J'aimerais qu'à l'avenir, monsieur le président, vous demandiez clairement s'il y a d'autres interventions et ce, sans marmonner. J'ai même demandé à l'interprète, mais on n'a pas entendu lorsque vous avez demandé, avant que M. Vellacott intervienne, s'il y avait d'autres interventions. J'ai donc, moi aussi, été pris de court.

    J'aurais aimé faire une intervention au sujet de la motion de M. Vellacott, bien que je ne sois pas tout à fait d'accord sur l'ensemble de son libellé. Il reste que M. Vellacott a soulevé la question de la non-discrimination envers les femmes en cas de conflits matrimoniaux, de divorce ou de séparation. Il s'agit là d'un principe d'une grande importance.

    L'intervention de M. Johnson a souligné davantage l'importance de cette question. Or, il y a aussi plusieurs autres questions liées au statut des femmes dans les réserves et à l'extérieur de celles-ci, ainsi qu'à celui des femmes qui ont des conjoints non autochtones ou des enfants nés de ces unions qui, dans certains cas, n'ont pas de droits liés à leur statut d'Indien.

    Les représentantes de l'Association des Femmes Autochtones du Québec, lorsqu'elles ont comparu devant le comité, ont vraiment mis en exergue les problèmes qu'on retrouve dans les réserves et à l'extérieur de celles-ci. Elles ont souligné la nécessité de modifier la Loi sur les Indiens ou le processus de négociation portant sur l'autonomie gouvernementale des autochtones pour y inclure ces considérations, étant donné qu'elles sont très importantes pour l'avenir des communautés.

    Or, lorsqu'on parle de principes législatifs de la province visée, il y a un petit problème. D'une nation à l'autre, il peut y avoir des différences. Dans certains cas, des régimes matriarcaux ou d'autres formes d'organisation et de pensée culturelle prévalent en ce qui concerne les unions. Le fait de considérer la compatibilité avec les législations provinciales peut avoir pour effet d'aller en contradiction avec les façons de faire des autochtones ou avec l'avenir qu'on dit vouloir promouvoir pour eux, c'est-à-dire un avenir qui évoluerait sous le signe de l'autonomie gouvernementale. On parle ici de la capacité des nations autochtones de légiférer dans des domaines comme la politique familiale, par exemple.

    Par contre, il y aurait peut-être une façon--et si j'avais eu l'occasion de poser la question à M. Johnson, je l'aurais fait--de parler d'harmonisation si la législation était déterminée par les nations autochtones ainsi que par les autorités provinciales et fédérales liées à la politique familiale, à la séparation de biens et ainsi de suite. Je crois que cette question est en train de devenir fondamentale et incontournable. À toutes les époques où on a fait des consultations sérieuses sur l'avenir des nations autochtones, dans le cadre de la Commission Erasmus-Dussault, par exemple, cette préoccupation a resurgi. Les femmes autochtones sont de plus en plus organisées et veulent qu'on règle cette question.

    Pratiquement, on ne peut inclure nulle part, dans le projet de loi C-7--et M. Johnson avait raison de le souligner--, ce genre de considération, pour la simple raison que le projet de loi en lui-même ne vaut pas le papier sur lequel l'encre est couchée.

    On parle de s'engager sur une nouvelle voie et d'encourager les nations autochtones à se réorganiser en fonction de leur culture, de leur régime et de ce qu'elles étaient par le passé, avant que les Européens arrivent et démolissent tout. Pour ce faire, il faut considérer que la question de la politique familiale est fondamentale.

¿  +-(0905)  

    Notre nation a évolué au cours des années, et nous avons élaboré des codes et des chartes qui nous servent bien, quelquefois. Je dis quelquefois parce que sans la clause nonobstant, dans certains cas, des droits collectifs seraient bafoués. Ces chartes nous servent toutefois, de façon générale, assez bien.

    Les nations autochtones ont le droit de se donner les mêmes chartes et les mêmes droits, d'adopter les mêmes mesures pour faire échec à la discrimination basée sur le sexe ou le statut matrimonial et décider du statut des enfants nés d'unions mixtes ou autres. Mais il faut faire attention lorsqu'on dit que cela doit entrer dans le moule des législations provinciales. Je pense que la question est beaucoup plus complexe, et la solution doit venir des nations autochtones, qui sont les seules à être en mesure de savoir ce qu'elles sont et de quelle façon elles peuvent résoudre ce type de problème.

    Il me semble que les groupes de femmes autochtones ont fait suffisamment de représentations, au cours des 15 dernières années en particulier, pour qu'on puisse régler les questions de discrimination dans le cadre d'un vrai projet de loi ou dans le cadre d'une vraie négociation sur l'autonomie gouvernementale.

    Hier, M. Comartin, le collègue de M. Martin, mentionnait l'importance de se référer à la Charte des droits et libertés. J'abonde en ce sens et je rajoute que non seulement il est important qu'un vrai projet de loi--je parle ici bien sûr d'un projet de loi qui s'inspirerait du rapport Erasmus-Dussault--fasse non seulement référence à la Charte canadienne des droits et libertés, mais aussi qu'il fasse référence à la charte autochtone des droits et libertés et qu'il fasse en sorte que les deux chartes soient aussi compatibles que possible.

    J'ai pris conscience de cela l'année dernière lorsque j'ai analysé le projet d'entente avec la nation innue au Québec. Partout où il était question d'autonomie ou du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale de la nation innue, il était écrit que les représentants de la nation innue tenteront d'harmoniser le plus possible leurs propres lois et leurs propres règlements avec les lois et les règlements de nature provinciale ou fédérale, ou bien tenteront de définir une charte qui leur est propre étant donné ce qu'ils sont, et en tentant aussi de faire en sorte qu'il n'y ait pas trop de chocs entre la Charte canadienne des droits et libertés, par exemple, la Charte québécoise des droits et libertés de la personne et la charte autochtone comme telle.

    On visait par là à en arriver à une certaine harmonie, à une harmonie entre voisins, tout en respectant l'autonomie de chacune des entités.

    Je reviens à cette motion dont je n'ai pas eu l'occasion de discuter parce qu'on m'a refusé de le faire. Il aurait été intéressant de prendre en compte ce type de considération et de faire adopter un sous-amendement. Nous en aurons peut-être l'occasion plus tard; je l'ignore parce qu'il est difficile de prévoir ce que vont faire les libéraux. On aurait pu adopter un sous-amendement qui se serait lu à peu près comme ceci: Que toute la question de la discrimination liée au sexe, soit au niveau du partage des biens matrimoniaux ou au niveau d'autres questions fondamentales comme le statut des femmes autochtones et des enfants d'unions mixtes, fasse l'objet d'un traitement particulier tout en respectant les façons de faire qui nous seraient présentées par les nations autochtones et tout en respectant la Charte des droits et libertés que pourrait rédiger un gouvernement autonome de nations autochtones.

    Je signale que nous reconnaissons uniquement dans le préambule de la loi le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. On aurait pu faire cette nuance au lieu de tenter de faire entrer les autochtones dans le moule d'une politique provinciale ou fédérale sur la famille. On aurait pu être plus nuancé. Si nous respectons le principe de cette autonomie gouvernementale et reconnaissons qu'il y a des régimes ancestraux et matriarcaux différents chez les nations autochtones, régimes que l'on tente de reconstruire dans plusieurs des communautés autochtones, il faut être nuancé lorsqu'on veut faire concorder ces régimes avec les lois provinciales ou fédérales.

    J'aurais été plus enclin à adopter cette approche, mais comme M. Johnson l'a mentionné avec justesse--il faut rendre à César ce qui revient à César--, ce projet de loi n'était peut-être pas le cadre idéal pour ce genre de considération.

¿  +-(0910)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Loubier.

[Traduction]

    Monsieur Hubbard.

+-

    M. Charles Hubbard: Monsieur le président, nous avons entendu beaucoup d'explications, mais pas au sujet de l'amendement. L'honorable député se plaint de la présidence, mais j'ai le sentiment que le gros problème est que le député ne regarde pas le président, ne se tourne pas vers lui ni vers les autres membres du comité. Ce n'est pas nous qu'il est en train d'essayer de convaincre, mais plutôt un autre auditoire, en dehors du comité. Il s'adresse au public.

    Monsieur le président, sauf tout le respect que je dois à l'honorable député, au lieu de suivre les directives données par la présidence, il semble vouloir prendre... Je tiens à lui dire que s'il souhaite que la présidence s'occupe des réunions, alors il devrait faire attention au président et non pas aux autres personnes dans la salle.

    Merci, monsieur le président.

+-

    Le président: C'est en effet, j'en conviens, une difficulté pour la présidence, mais nous avançons.

    Monsieur Martin, si vous voulez bien conclure.

+-

    M. Pat Martin: Monsieur le président, l'amendement que je propose à l'article 16 s'appuie sur un principe plus grand. Le libellé peut paraître simple et clair, mais le principe plus grand est que l'article 16 établit qu'une bande peut prendre des textes législatifs à des fins locales, et il esquisse les textes législatifs dont il peut être question. Ce peut être des lois traitant de santé, traitant de la prévention de dommages matériels, traitant d'activités exercées dans un lieu public.

    Le ton laisse entendre que cet article autorise les bandes et les Premières nations, si vous voulez, à prendre des textes législatifs dans ces domaines comme si cette autorisation n'existait pas déjà, comme si cette autorisation devait maintenant être transférée ou déléguée du gouvernement fédéral aux Premières nations. Cela laisse entendre que ce droit n'existait pas avant que l'article du projet de loi en fasse état. C'est la théorie de la boîte pleine versus la boîte vide, leur boîte de droits de faire des choses étant vide tant et aussi longtemps qu'on ne leur a pas accordé ces droits.

    Le principe en cause ici est que ces droits existent déjà. Sont déjà reconnus dans notre Constitution leurs droits inhérents à prendre des règles, des règlements, des textes législatifs et des codes de gouvernance avant d'y être nécessairement autorisés par le gouvernement fédéral.

    Ce que nous cherchons donc à ajouter à cet article c'est... Nous n'avons aucune objection particulière quant à la liste des choses qui pourraient être réglementées et des textes législatifs qui pourraient être pris par la bande, mais nous tenons à veiller à ce que les droits des bandes de prendre des textes législatifs ne soient pas limités aux seules choses qui se trouvent dans la liste. Voilà pourquoi j'ai ajouté un alinéa qui dit que le pouvoir législatif conféré au conseil d'une bande par le paragraphe (1) «n'a pas pour effet de limiter les pouvoirs dont le conseil de la bande peut être investi en vertu du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale d'un peuple autochtone». En d'autres termes, cela laisse la porte ouverte. Il se pourrait que d'autres choses soient ajoutées à la liste ou fassent partie de la liste de choses qu'une bande ou qu'un conseil peut intégrer, pourra intégrer et intégrera peut-être dans ses propres règles et textes réglementaires. C'est là, je suppose, la différence fondamentale, la différence philosophique sur laquelle nous attirons sans cesse l'attention, à une échelle plus grande, à une échelle macro.

    J'ai commencé à vous raconter une histoire au sujet de l'argument qui nous occupe en tant que militants depuis aussi longtemps que je me souvienne. Il a été mentionné qu'il y a 56 ans, le sergent Tommy Prince, le héros de guerre le plus décoré du Canada—l'ancien combattant le plus décoré du Canada, Autochtones et non-Autochtones confondus—est venu à Ottawa pour soumettre ces mêmes arguments au Comité permanent des affaires indiennes d'alors, en juin 1947. Cela fait presque exactement 56 ans, à un mois près. Il disait alors qu'il fallait supprimer la Loi sur les Indiens et honorer les traités. En d'autres termes, arrêtez de jouer avec la Loi sur les Indiens et revenez au processus de négociation de nation à nation en vue de la mise en oeuvre du détail du processus des traités.

    C'est ce dont nous devons sans cesse rappeler le comité : il nous faut investir les énergies et les ressources du gouvernement fédéral dans cette noble poursuite, au lieu de contrarier les gens avec ces amendements à la Loi sur les Indiens.

    Je pense que ce qui avait motivé le sergent Tommy Prince à son retour au pays en tant que héros de guerre le plus décoré du Canada—traité comme un être humain à part entière, sur les champs de bataille et par la suite, en étant, comme je le disais, reconnu pour son service avec plus de médailles que n'importe quel autre soldat—c'est qu'il a constaté qu'il n'était pas une personne. Il n'avait pas le droit de voter; il n'avait pas le droit d'aller dans une taverne; il n'avait pas le droit de posséder de l'immobilier; il n'avait pas le droit de recruter un avocat. De fait, avant les amendements apportés en 1951, un avocat pouvait se voir imposer des mesures disciplinaires s'il agissait pour le compte d'un Indien. Un avocat pouvait perdre son droit d'exercer s'il représentait un Indien. C'est incroyable.

    À l'époque—et cela ne remonte que 56 ans en arrière... En un sens, beaucoup trop de temps s'est écoulé parce que le changement et les progrès ont été très lents.

¿  +-(0915)  

    Mais je tenais à citer ce cas. Ces thèmes que je rabâche tout le temps—et je sais que cela ennuie certains que j'y revienne toujours—n'ont, je pense, pas de résonance chez les personnes ici, et je veux parler des objectifs fondamentaux du projet de loi. Ce ne sont pas les nuances et le détail d'une ligne, ou l'emplacement d'un paragraphe ou le fait d'y ajouter ou non une phrase; c'est le principe fondamental voulant que fonctionnant de la sorte, ces droits n'existent pas, les bandes et les conseils n'ont pas le droit de faire ces choses à moins qu'on les y autorise expressément dans la loi. Cela est fondamentalement faux, et cela a été jugé ainsi, non seulement dans le contexte de notre Constitution, mais également dans des décisions répétées de la Cour suprême du Canada.

    Je vous demande d'examiner sérieusement cet amendement. La première partie de l'amendement que j'ai proposé englobe une clause de non-dérogation. Étant donné que nous avons eu gain de cause et obtenu qu'une clause de non-dérogation soit inscrite ailleurs au projet de loi, l'alinéa a) de notre amendement est peut-être inutile. Je serais prêt à envisager un sous-amendement en ce sens.

    Cependant, l'alinéa b) de ce que je propose ici dans cet amendement à l'article 16 est d'une importance critique, car il établit clairement que bien qu'il y ait une liste de domaines dans lesquels un conseil de bande peut prendre des lois locales ou à des fins locales, cela ne se limite pas à ce qui figure sur cette page. En fait, la boîte est pleine de droits. Ceux qui sont reconnus dans la loi peuvent ou non être nécessaires, mais cela ne limite aucun pouvoir pouvant être conféré à la bande en vertu du droit à l'autonomie gouvernementale d'un peuple autochtone.

    Si l'objet du présent exercice inclut le renforcement et la reconnaissance du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, alors il devrait y avoir tout au long du projet de loi un même thème et celui-ci devrait ressortir au fil des différentes rubriques du projet de loi.

    Nous entrons dans un tout nouveau domaine sous la rubrique «Pouvoirs du conseil». Nous avons traité de la capacité juridique de la bande à l'article 15. À l'article 16, on traite des pouvoirs législatifs du conseil. Eh bien, j'arguerais que ces pouvoirs législatifs ne font ni commencer ni finir avec ce qui est englobé dans l'article. Ces pouvoirs législatifs sont expansifs et existent en fait, sous réserve de négociations, je présume, sous réserve de vérification qu'ils n'entrent pas en conflit avec d'autres domaines de compétence, mais ce qui est certain c'est que les conseils de bande n'ont pas besoin ici d'un libellé prescriptif pour exercer ces pouvoirs législatifs et pour rendre ceux-ci pertinents pour leurs communautés locales.

    Le principe ici n'est pas de conférer ce droit. Il ne s'agit pas d'une délégation de pouvoir, comme ce qui existe, par exemple, lorsque le gouvernement fédéral cède à une province la compétence en matière de formation pour le marché du travail. Il s'agit là d'un transfert légitime de pouvoirs juridictionnels d'un palier de gouvernement à un autre. Ce n'est pas le cas ici. Nous ne transférons pas la compétence en matière de pouvoirs législatifs aux bandes et aux conseils. Ces pouvoirs juridictionnels existent déjà. C'est le gouvernement qui juge qu'il est nécessaire de formaliser cet arrangement dans le cadre d'une loi, au lieu de tout simplement reconnaître la pratique actuelle. Nous estimons que c'est une erreur de laisser de côté une référence au droit inhérent à l'autonomie gouvernementale.

    Cela étant dit, je demande aux membres du comité d'examiner sérieusement cet amendement et d'envisager de l'appuyer.

    Merci.

¿  +-(0920)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Martin.

    Êtes-vous prêts à voter sur l'amendement NDP-35, page 129? Un vote par appel nominal?

    (L'amendement est rejeté par 7 voix contre 2)

+-

    Le président: Nous passons maintenant à l'amendement NDP-36, page 130.

    Monsieur Martin.

+-

    M. Yvan Loubier: Un autre bon amendement du NPD.

+-

    M. Pat Martin: Merci, monsieur le président, et merci, monsieur Loubier, pour ce vote de confiance. Il s'agit ici encore d'un amendement auquel nous tenons fermement.

    Encore une fois, avant d'en finir avec l'article 16, avant de mettre fin à la discussion au sujet des pouvoirs législatifs et des lois que le conseil de bande pourra prendre à des fins locales, applicables à la réserve de la bande, nous tenons à dire que nous croyons fermement que l'article 16 devrait être modifié par suppression des lignes 39 à 43, page 11—c'est le paragraphe 16(2)—qui traite d'un point très important qui a été soulevé par l'un de nos invités, qui est en fait ici présent encore aujourd'hui. L'actuel libellé du projet de loi dit que les dispositions de toute loi fédérale ou d'un règlement pris en vertu de celle-ci l'emportent sur les dispositions incompatibles d'un texte législatif pris en vertu du présent article.

    Il s'agit ici encore d'un article qui saute carrément aux yeux de tout tiers qui s'intéresse à l'équité ou qui surveille les discussions ou les travaux du comité.

    La pratique actuelle veut que si un règlement ou un code de bande va à l'encontre de la Loi sur les Indiens, alors c'est cette dernière qui doit l'emporter. Mais si un tel règlement ou code n'est pas compatible avec un quelconque autre texte législatif du Parlement, alors ce règlement ou code de gouvernance du conseil de bande l'emporte.

    Ce qui est proposé ici diminuerait sérieusement, franchement, la capacité d'une Première nation d'adopter des lois sérieuses intéressant une collectivité des Premières nations. Cela constitue en soi un empiétement sur le droit à l'autonomie gouvernementale, car à quoi bon...

    [Applaudissements]

    M. Pat Martin: Monsieur le président, on m'a demandé de traiter tout particulièrement de cet article et de souligner encore plus que ne le fait notre amendement ce pourquoi cela est si important. Si nous allons reconnaître le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, alors comment pouvons-nous alors dire aux bandes qu'elles ont le droit de se gouverner, mais que si elles font quelque chose qui est de quelque façon contraire à une quelconque autre loi au pays, alors ce texte législatif de la bande est frappé de nullité et les lois du pays l'emporteront?

    Même la Constitution canadienne fournit des précisions quant à la primauté lorsqu'il y a incompatibilité de lois. Ces choses sont convenues, et il y a dans certains cas compétence partagée. Mais dans le cas qui nous occupe, c'est une déclaration générale. L'on n'a même pas la politesse de dire que dans certains domaines les règles de la bande l'emporteront et que dans d'autres cas ce seront les lois fédérales qui l'emporteront. C'est une déclaration générale, une vaste limitation qui vient réduire les pouvoirs des bandes et vous ne pouvez en fait pas arguer que cela ne déroge pas au statu quo. Cela aggrave les choses pour les Premières nations s'agissant de leur liberté de déterminer leurs propres codes de gouvernance.

    Je serais intéressé d'entendre tout argument contraire, mais je ne vois pas ce que l'on pourrait avancer. Si l'on cherche des exemples de cas où le projet de loi C-7 empiète sur les droits existants des Premières nations, voire même les supprime, alors c'en est un. Le droit à l'autodétermination est ici remis en question. Le droit à l'autodétermination se fait éteindre ici, car vous ne jouissez du droit à l'autodétermination que tant et aussi longtemps que cela cadre parfaitement avec les normes fixées par les autres, et ces normes fixées par les autres ne sont même pas fixées par des organes élus.

    Il y a un comité du Sénat qui est en train d'élaborer pour notre compte une loi portant sur les biens matrimoniaux, et ainsi de suite, ce que je trouve offensant, mais là n'est pas notre propos ici.

    Ce qui bondit de la page aux yeux de quiconque lit cet article est que celui-ci présuppose également l'issue de toute contestation. Nous devrions toujours hésiter ou nous opposer à mettre en place quelque loi qui limite la liberté d'un arbitre ou d'un juge dans une affaire future dont pourraient être saisis les tribunaux ou limite quelles peuvent en être les conclusions, peu importe l'équité de la question.

¿  +-(0925)  

    Nous n'avons pas discuté de façon suffisamment approfondie de cela pour pouvoir dire que dans tous les cas, s'il y a conflit entre un texte législatif pris en vertu de cet article et une loi du Parlement, alors c'est la loi fédérale qui l'emportera toujours. Cela revient à prédéterminer l'issue d'une audience ou d'une plainte qui pourrait être faite, mais ce n'est pas à nous, assis autour de cette table, qu'il revient de trancher, surtout lorsqu'on ne s'y est même pas penché sérieusement. Nous n'avons pas discuté de cette question, et je suis limité à dix minutes pour plaider ma cause. Il s'agit ici d'une très grosse question et pas un seul témoin n'est venu nous demander cela ni même, franchement, dire que c'était une priorité pour les Premières nations. Nous ne comprenons pas pleinement pourquoi le gouvernement pousse en ce sens. Il vous faut vous demander si le problème est suffisamment grave pour justifier ce qui constitue clairement et manifestement un empiétement sur des droits inhérents à l'autonomie gouvernementale déjà existants.

    Si nous embrassons et endossons le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale—et le ministre a récemment exprimé cela publiquement, et le préambule du projet de loi l'affirme aussi—alors comment pouvons-nous inscrire dans le projet de loi un article qui est si contraire à l'esprit de cette déclaration et qui dit que les dispositions de toute loi fédérale ou d'un règlement pris en vertu de celle-ci l'emportent sur les dispositions incompatibles d'un texte législatif pris en vertu du présent article? Cela revient tout simplement à offrir d'une main une reconnaissance du droit inhérent à l'autonomie politique et à l'enlever de l'autre, avant même d'en être arrivé à la moitié du projet de loi. Avant même d'en avoir terminé avec 16 articles d'un document qui en compte 57, nous avons déjà éliminé tout espoir d'une véritable autodétermination et d'une jouissance véritable du droit à l'autonomie gouvernementale.

    Je serais donc intéressé d'entendre ce qu'ont à dire d'autres députés à ce sujet et comment nous pouvons justifier cela, car c'est là l'élément qui fait défaut ici. Il n'a été donné aucune justification. Si l'intention du gouvernement est de diminuer des droits des traités existants ou le droit à l'autonomie politique ou d'empiéter sur ces droits, alors quelle en est la justification? Quelle est l'explication, autrement que de dire que c'est plus pratique si tout le monde, y compris les gens dans les réserves, se plie non seulement aux lois fédérales mais également aux règlements découlant de lois fédérales, règlements au sujet desquels neuf fois sur dix nous n'avons pas eu notre mot à dire? Les représentants élus n'élaborent pas les règlements. Il est rare que nous ayons même l'occasion de participer à l'élaboration de règlements. Or, voici que ce projet de loi donnerait plus de poids et plus d'autorité à des règlements élaborés par des bureaucrates qu'à des lois élaborées par une Première nation indépendante et souveraine. C'est une insulte.

    Moi en tout cas, je serais insulté. Cela m'offense, même si cela ne me touche pas personnellement. Je ne peux pas m'imaginer comment je me sentirais si j'étais l'un de nos invités ici aujourd'hui et si je voyais adopter un libellé comme celui-ci, que nous jugeons susceptible de miner la capacité d'une Première nation de prendre des textes législatifs importants. Quel message cela envoie-t-il, s'agissant de reconnaître des traditions, us et coutumes, traditions culturelles et autres? Si un quelconque texte va de quelque façon à l'encontre d'une loi fédérale ou d'un règlement pris en vertu de celle-ci, boom, il n'est plus pertinent; il ne fait pas partie du code de gouvernance de la Première nation.

    Monsieur le président, je demande que l'on se penche sérieusement sur cette question. J'estime qu'elle mérite plus que les dix minutes allouées à chaque intervenant. Nous pourrions facilement consacrer le reste de la journée à cette seule question très vaste. Cela devrait faire l'objet d'une longue analyse et d'un débat approfondi avant d'aboutir dans la loi.

    Avant même que le gouvernement ne dépose le projet de loi, s'il allait y avoir une tentative de consultation sérieuse, alors cet article aurait pu faire l'objet d'une vaste discussion. En effet, si nous étions honnêtes, ceci aurait été soumis aux Premières nations bien avant l'élaboration du projet de loi.

    Je ne comprends pas comment le JMAC a pu traiter en profondeur de cette question pour ensuite ne rien y faire, étant donné à quel point cela est flagrant. Cela est mis en relief sur ma copie de la loi, mais cela n'est aucunement nécessaire pour que cela saute aux yeux de quiconque. C'est là, dans toute sa splendeur, en contradiction flagrante avec le préambule du projet de loi, avec l'objet de loi et avec tout ce que l'on sait quant à la reconnaissance et au respect du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale.

¿  +-(0930)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Martin.

    Monsieur Loubier.

[Français]

+-

    M. Yvan Loubier: Monsieur le président, moi aussi, je suis très gêné par ce paragraphe 16(2) sur la prédominance de la législation fédérale par rapport à l'exercice législatif qui pourrait être accordé aux conseils de bande. Je suis d'autant plus gêné que lorsque je regarde les activités où les conseils de bande seraient habilités à légiférer, donc à exercer leur pouvoir législatif, je me rends compte, coup sur coup, que toutes les matières qui sont là-dedans sont des matières municipales. Ce sont des matières qui sont normalement, dans notre société à nous, de juridiction municipale, et je n'avais pas compris cela de cette façon-là lorsqu'on parlait de créer un troisième ordre de gouvernement. J'avais évalué qu'un troisième ordre de gouvernement autochtone était lié, dans toutes les nations, au droit inhérent à l'autonomie gouvernementale en tant que nation et qu'on ne transformait pas les communautés autochtones, les premières nations, en grosses municipalités. Ce n'est pas comme cela que je l'avais conçu.

    Quand j'ai vu la liste des pouvoirs législatifs des conseils de bandes qui étaient là, je me suis référé au Livre blanc de 1969 et, finalement, quand l'actuel premier ministre était ministre des Affaires indiennes, la tentative de 1969 était justement de municipaliser les territoires des premières nations, d'en faire des municipalités au même titre que les autres. Là, en plus de cela, on voit en fait que si les dispositions des législations des nations autochtones dans les domaines de juridiction municipale ne sont pas réalisées correctement, selon ce que le gouvernement fédéral en pense et selon les lois fédérales qui pourraient, au gré des humeurs du gouvernement fédéral, changer pour faire en sorte que les lois autochtones ne puissent pas être opérationnelles dans des domaines municipaux, alors ce sont les lois fédérales qui l'emportent.

    C'est très fâcheux de voir des choses comme ça, parce que cela ne peut pas être vu autrement que comme une mauvaise volonté du gouvernement fédéral de faire progresser la cause des nations autochtones et surtout d'appliquer ce que les cours de justice ont jugé, dans les 30 dernières années, être des droits tout à fait acquis aux nations autochtones, entre autres celui de se gouverner elles-mêmes en fonction de ce qu'elles sont et en fonction de leurs ambitions aussi.

    Moi, je n'ai rien contre les municipalités. Il ne faut pas penser que j'ai quelque chose contre les municipalités ou contre les gens qui travaillent à la gestion des municipalités. J'ai moi-même travaillé comme économiste à la municipalité de Montréal, dans les évaluations des investissements publics, et je trouve que la tâche de gérer au jour le jour les problèmes, par exemple les questions des aqueducs, des égouts, les ouvrages locaux liés à tout bon gouvernement municipal, l'habitation à prix modique, les règlements municipaux concernant le commerce est une tâche tout à fait noble. Mais ce n'est pas ce que les nations autochtones veulent. Elles ne s'attendent pas à avoir des pouvoirs municipaux; ce n'est pas ce qu'elles veulent. Elles veulent vraiment exercer des pouvoirs de nations souveraines, de nations qui ont un droit inhérent à l'autonomie gouvernementale.

    Alors, en plus de leur «céder», entre guillemets parce qu'on ne leur cède rien puisqu'elles ont déjà ce pouvoir de s'autodéterminer, en plus de dresser des listes d'activités municipales qu'on pourrait leur permettre de gérer et dans lesquelles on pourrait leur permettre de légiférer, le gouvernement fédéral arrive avec ses gros sabots et leur dit qu'il leur cède ces grands pouvoirs-là, qui sont en fait des pouvoirs municipaux, mais que si jamais leurs lois sont incompatibles avec les siennes, ce sont les siennes qui vont l'emporter. C'est encore ce vieux réflexe de dominant-dominé.

¿  +-(0935)  

    Je n'arrive pas à comprendre pourquoi mes collègues libéraux ne peuvent pas faire un raisonnement sur ce qu'est véritablement l'avenir des relations entre le gouvernement fédéral et les nations autochtones. On dit toujours que le poids de l'histoire peut peser sur les décisions du gouvernement. Je commence à me demander si le poids de l'histoire n'est pas en train de peser non seulement sur les épaules des élus fédéraux, mais aussi sur les neurones des élus fédéraux, qui n'arrivent plus à voir clair et à réfléchir correctement face au projet qu'on leur présente depuis un an, et aussi face aux représentations qu'ils ont depuis un an concernant le projet de loi C-7. Est-ce que le poids de l'histoire les écrase à ce point qu'ils sont incapables de réfléchir, qu'ils ont une vision brouillée, parce que le cerveau doit aussi s'occuper de la bonne vision oculaire? Est-ce qu'on est à ce point aveuglés par le poids de l'histoire qui, indirectement, pèse sur les neurones, donc qui peut ombrager la réalité qu'on voit lorsqu'on essaie de se projeter dans l'avenir, ou bien est-ce carrément de la mauvaise volonté?

    Moi, je suis persuadé qu'on est tous aussi intelligents les uns que les autres, mais que c'est carrément de la mauvaise volonté face à une véritable négociation sur l'exercice du droit inhérent des nations autochtones à l'autonomie gouvernementale. Il faudrait écrire dans un projet de loi les matières dont on a convenu qu'elles relevaient de la responsabilité d'un troisième ordre de gouvernement, qu'on est en droit de s'attendre d'avoir. Ce troisième ordre de gouvernement devrait pouvoir légiférer dans les matières de son choix, parce que ce sera un gouvernement autochtone.

    Je suis d'accord sur l'amendement de M. Martin parce que je trouve que la formulation de ce paragraphe 16(2), bien qu'il soit question d'une liste de pouvoirs municipaux, perpétue une espèce de colonialisme à la moderne quand on parle de la prédominance des lois fédérales ou provinciales en cas d'incompatibilité. On peut retrouver cela dans des textes de nature commerciale comme les ententes bipartites, tripartites ou multilatérales, par exemple à l'OMC, mais ça n'a pas sa place lorsqu'il est question de déterminer de nouvelles relations entre nos nations et les nations autochtones. On ne peut pas dire que si elles légifèrent et que leurs décisions sont contraires aux nôtres, c'est nous qui avons raison. C'est du colonialisme, c'est de l'apartheid. On ne peut pas appeler ça autrement, et ça fait quelques années que l'apartheid en Afrique du Sud est terminé. Qu'on se mette au diapason des nouvelles réalités démocratiques internationales.

    Alors, il est certain que je vais appuyer l'amendement de mon honorable collègue et maintenant frère honoraire, du moins selon l'hommage qu'on nous a rendu hier et que j'ai l'impression qu'on doit mériter encore, jusqu'à la fin. Il faut gagner ce combat-là. C'est sûr que je vais appuyer votre amendement, M. Martin. Je vois que vous en avez d'autres qui sont excellents, qui ont vraiment une portée très positive.

    Mais le problème est le même que celui qu'on retrouve depuis le début avec tous les amendements que nous avons proposés. Cela améliore certaines choses, cela enlève même des propos violents qu'on peut retrouver à l'intérieur du projet de loi, cela enlève des éléments de provocation par rapport aux nations autochtones que le gouvernement fédéral a mis dans son projet de loi, mais globalement, la provocation demeure entière et globale, et elle nie tout à fait que les nations autochtones ont des droits, dont le droit fondamental donné par ce qu'on appelle le Créateur, qui n'a pas à être défait ni enlevé et que vous n'avez pas le droit de modifier comme législateurs, qui est le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. On n'en retrouve pas l'expression, mais pas du tout, dans le projet de loi.

    Alors, j'appuie très certainement l'amendement de M. Martin avec enthousiasme, en tentant de sauver l'honneur de certains qui pourraient ne pas l'appuyer.

¿  +-(0940)  

[Traduction]

+-

    Le président: Merci, monsieur Loubier.

    Quelqu'un d'autre souhaite-t-il intervenir?

    Je ne vois pas de signe venant de M. Martin. Souhaitez-vous la parole, monsieur Martin?

+-

    M. Pat Martin: Si vous m'accordez le mot de conclusion, je...

+-

    Le président: Oui, monsieur, mais j'aimerais que les choses soient claires. Vous devez me faire savoir que vous souhaitez utiliser ce temps. Je veux être équitable envers vous, mais j'ai besoin de vos signaux.

    La parole est à vous, monsieur Martin.

¿  +-(0945)  

+-

    M. Pat Martin: Merci, monsieur le président.

    Je pense que vous pouvez toujours considérer que je veux le mot de la fin, en l'absence de... Peut-être faudrait-il inverser le fardeau de la preuve : je vous ferai signe si je ne veux pas la parole.

+-

    Le président: Très bien. Cela me va, mais je ne veux pas devoir faire de supposition. Donc, souhaitez-vous que je vous rende toujours la parole?

+-

    M. Pat Martin: Je pense que nous pouvons nous en tenir à cela, monsieur le président...

+-

    Le président: D'accord. C'est difficile lorsque je dois faire des suppositions.

+-

    M. Pat Martin: ... vous pouvez toujours supposer que je veux le mot de conclusion.

+-

    Le président: Vous avez la parole.

+-

    M. Pat Martin: Merci, monsieur le président.

    Je suis déçu que davantage de membres ne souhaitent pas intervenir dans ce débat. Je pense que c'est un débat légitime et qu'il soulève des questions. Un certain nombre de témoins ont mis en question les motifs du gouvernement relativement à ce projet de loi. On se demande ce que le gouvernement cherche réellement à accomplir. D'aucuns soupçonnent qu'il s'agit beaucoup moins de renforcer et reconnaître les droits autochtones que de les réduire.

    Ceci est l'une des dispositions dont nous pensons qu'elle a attiré l'attention du ministère de la Justice lorsque le texte lui a été soumis et c'est son existence qui a amené le ministère à vous conseiller de retirer la clause de non-dérogation, car les deux ne sont pas conciliables.

    Je sais que la pratique actuelle veut que si une bande et un conseil font des lois à des fins locales et qu'il y a une contradiction inconciliable entre cette loi et une loi du Parlement—en l'occurrence la Loi sur les Indiens—la Loi sur les Indiens a préséance.

    Le projet de loi C-7 élargit cette notion de façon à ce que s'il y a un conflit entre tout texte législatif pris par la bande et le conseil et une loi ou un règlement fédéral, ce dernier l'emporte.

    J'aimerais demander à nos conseillers, dans ces conditions, de nous parler de l'historique de cette question et qu'ils nous disent peut-être quels arguments sont invoqués par le gouvernement ou ce que l'on vise à réaliser avec cette disposition, si toutefois les fonctionnaires sont autorisés à communiquer ces renseignements au public.

+-

    M. Warren Johnson: Oui, je pense que toute l'information est déjà publique, ayant été donnée soit dans l'intervention du ministre, soit dans nos réponses aux questions antérieures.

    Je n'ai connaissance d'aucune discussion ou analyse du ministère de la Justice qui indiquerait qu'il y a là un terrain miné ou un empiétement manifeste. Au contraire, je pense que le ministre et mon collègue, en réponse à des questions antérieures, ont tous deux indiqué que la difficulté était que, au cours de la période d'étude de ce projet de loi avant son dépôt à la Chambre, divers projets de loi de la Chambre et du Sénat qui comportaient une clause de non-dérogation—selon diverses appellations—ont donné lieu à de longs débats parlementaires quant au libellé approprié à utiliser dans différentes circonstances, à tel point que la décision a été prise d'étudier de façon plus large—et mon collègue pourra apporter des précisions si nécessaire—ce qu'il convient de faire de manière générale à cet égard.

    Pour cette raison, et cette raison seule, et au lieu d'ajouter un autre sujet de débat en ayant une clause de non-dérogation dans ce projet de loi-ci, on a pensé qu'il valait mieux lancer le processus d'étude en comité en déposant le projet de loi avant la deuxième lecture et sans clause de non-dérogation, dans l'espoir que tout ce processus débouchera sur une solution dans un avenir très proche, étant donné le nombre de projets de loi, actuels ou récents, déposés à la Chambre et au Sénat soulevant ce même problème.

    Il s'agissait donc d'étudier la question plus avant et de dégager un consensus plus large sur le type de libellé qu'il faudrait utiliser pour une telle clause, le cas échéant.

    Mon collègue voudra peut-être ajouter un mot à cela.

¿  +-(0950)  

+-

    M. Andrew Beynon (avocat général, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien): La précision que je puis apporter est que ces dispositions, à partir du paragraphe 16(2) indiquent expressément la hiérarchie entre les lois. C'est une modification par rapport à la Loi sur les Indiens car cette dernière, dans son article 81 traitant du pouvoir de prendre des textes législatifs, restait silencieuse sur la relation de ces derniers avec les lois ou règlements fédéraux. Il a fallu que les tribunaux suppléent à cette absence.

    Ce paragraphe précise expressément la relation entre les textes législatifs des bandes pris en vertu de cette loi et les lois et règlements fédéraux. Le critère est différent pour les articles 17 et 18.

+-

    M. Pat Martin: C'est très clair, Andrew. La relation est claire : les lois des bandes sont au bas de l'échelle. En cas de contestation en justice, elles sont automatiquement perdantes.

+-

    M. Andrew Beynon: C'est juste, dans le cas du paragraphe 16(2), toute loi ou tout règlement fédéral l'emporte. Mais la préséance aux articles 17 et 18 et plus restreinte.

    Mais on a soulevé la question de textes législatifs pris en vertu d'un droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. Nous considérons cela comme un cas différent du pouvoir législatif statutaire visé ici. Ici il est question de textes législatifs pris en vertu de cette loi, et la relation de ces derniers avec d'autres lois et règlements fédéraux. Si une collectivité souhaite exercer ce qu'elle estime être un droit inhérent, les textes législatifs résultant de l'exercice de ce droit ne seront pas pris en vertu de cette loi-ci mais en vertu du droit inhérent et la relation ne sera pas la même.

    Cela reprend donc encore le préambule, qui établit une distinction entre le droit inhérent à l'autonomie et cette législation.

+-

    M. Pat Martin: Le problème est que nous avons ce dialogue seulement maintenant. J'apprécie que vous cherchiez à donner une réponse aussi claire que possible, et je crois en comprendre presque toute la teneur, mais cela ne fait que mettre en évidence le fait que nous ne sommes pas équipés, en tant que parlementaires, pour réellement juger si cette disposition est une bonne ou une mauvaise chose. Nous n'avons pas assez d'expérience ni le temps d'acquérir cette dernière.

    On m'a expliqué que, pour beaucoup de Premières nations, les coutumes, les traditions, les arrêtés et les lois ne sont pratiquement qu'une seule et même chose. Que se passe-t-il lorsque les coutumes et traditions sont la loi—par exemple, en matière de choix du chef—et en contradiction avec quelque autre loi provinciale ou fédérale, par exemple la Loi électorale ou même maintenant, je suppose, des règles édictées par ce projet de loi-ci? Il est alors évident que la pratique coutumière que représente la loi en matière de choix du chef, si elle n'est pas déjà abrogée par les codes électoraux imposés par ce projet de loi, serait certainement invalidée par le paragraphe 16(2). L'exemple que j'ai donné était l'histoire où les hommes n'étaient pas autorisés à voter. Ce genre de chose ne pourrait plus se produire.

    Je ne m'exprime pas très clairement, car, franchement, nous sommes tous épuisés par le rythme que nous suivons ici, mais j'espère avoir été assez clair.

+-

    M. Andrew Beynon: Je peux peut-être indiquer que vous avez raison, nombre de collectivités vont bien entendu chercher à refléter dans les textes législatifs leurs coutumes et traditions, et c'est tout à fait approprié.

    Une question se pose concernant le choix des dirigeants lorsque la collectivité a déjà une méthode coutumière et traditionnelle : comment pourra-t-on la concilier avec les dispositions correspondantes de cette loi?

+-

    M. Pat Martin: Et quelle contradiction pourrait-il y avoir avec d'autres lois et règlements fédéraux?

+-

    M. Andrew Beynon: Et quelle serait l'interaction avec des lois et règlements fédéraux, dont celle-ci? Mais je pense que c'est une question distincte s'agissant des paragraphes 16(1) et 16(2), car le second n'établit que la relation avec les textes législatifs pris en vertu des pouvoirs du paragraphe 16(1) et non pas avec les pouvoirs législatifs relatifs au choix des dirigeants.

    Encore une fois, le choix des dirigeants relève de l'article 5 du projet de loi, et il se pose la question de l'interaction entre celui-ci avec les droits ancestraux ou inhérents—ou même d'ailleurs issus de traités. Mais le paragraphe 16(2) énonce uniquement la règle statutaire relative à la hiérarchie des lois dans les domaines considérés. Encore une fois, la plupart des avocats représentant les Premières nations vous diront que les pouvoirs législatifs ou droits ancestraux à l'autonomie sont distincts de ce pouvoir statutaire-ci et sujets à des règles de relation différentes avec les lois et règlements fédéraux.

¿  +-(0955)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Martin.

    Nous procédons au vote sur l'amendement NDP-36, page 130, vote par appel nominal.

    (L'amendement est rejeté par 8 voix contre 2)

+-

    Le président: NDP-37, page 131, monsieur Martin.

+-

    M. Pat Martin: Monsieur le président, puis-je suggérer que nous... Non, laissez faire.

+-

    Le président: Dans ce cas je suppose que c'est non.

+-

    M. Pat Martin: Je sais ce qui se passe lorsque je fais cela.

    Monsieur le président, je confesse être réellement fatigué. Je ne sais pas ce qu'il en est pour vous, mais je n'ai pas très bien dormi hier soir. Lorsque nous travaillons jusqu'à minuit et n'avons que quelques heures de sommeil et revenons ici faire la même chose dès 8 heures du matin, nous ne rendons justice à aucun de ces enjeux, pour vous dire la vérité. Je suis extrêmement fatigué et je commence à devenir grincheux. Je vous mets en garde.

+-

    Le président: Et nous ne sommes même pas à mi-chemin, monsieur Martin.

+-

    M. Pat Martin: Notre désir d'amender le paragraphe 16(2) du projet de loi tient à certaines des raisons que j'ai déjà indiquées. Le paragraphe 16(2), à mon sens, exige que nous adoptions un libellé... Si l'on va indiquer quel projet de loi ou règlement ou texte législatif du conseil de bande a préséance, alors je pense qu'il faut prêter attention à certaines des interventions que nous avons entendues. Plusieurs des témoins qui ont comparu devant le comité ont donné une analyse assez détaillée de cette disposition particulière.

    Cette question a été évoquée assez fréquemment et dès le début. L'une des toutes premières réunions à laquelle j'ai assistée était celle de Nanaimo, où le vice-chef régional de l'Assemblée des premières nations a attiré notre attention sur l'article 16.

    Il y a eu toutes sortes de discussions, en particulier sur les catégories de sujets dans lesquels un conseil ou une bande peuvent prendre des lois à des fins locales et que le fait de préciser cela implique qu'il n'aura pas déjà ce droit puisqu'il faut attendre qu'il lui soit conféré par cet article ou ce projet de loi. Je fais valoir que c'est contraire à l'article énonçant l'objet ainsi qu'au préambule de ce projet de loi et même contraire à ce que les Premières nations ont été amenées à croire qu'il résulterait de tout cet exercice.

    Dans les premières présentations que nous avons entendues, les témoins trouvaient insultant de donner à entendre que la boîte du droit à l'autodétermination est vide aussi longtemps que la bonne volonté et la bienveillance du gouvernement ne viennent pas la remplir avec des droits spécifiques, et que les Premières nations ne jouissent d'aucun droit tant qu'il ne leur est pas octroyé. Autrement dit, tant que ce n'est pas dit dans une loi du gouvernement fédéral, un conseil et une bande pourraient ne pas avoir le droit de prendre de textes législatifs concernant a) la santé des personnes; b) la prévention des dommages matériels; c) les activités exercées dans un lieu public, etc.

    Eh bien, nous ne sommes pas nécessairement d'accord avec la limitation de cette liste, par exemple la liste des choses sur lesquelles une bande et un conseil peuvent dorénavant légiférer en vertu de cette loi, car nous pensons que ce droit existait auparavant; ce droit a toujours existé. Nous l'avons admis et reconnu dans notre propre Constitution.

    On constate un libellé très prescriptif qui décrit en grand détail les sujets sur lesquels une bande et un conseil peuvent légiférer, l'un deux étant l'alinéa l), la garde des animaux sauvages et domestiques, sauf les poissons. J'aimerais réellement avoir plus de temps pour passer en revue cette liste, car ce n'est pas nous qui l'avons dressée.

    C'est là un énorme problème sur la côte ouest de la Colombie-Britannique, où l'aquaculture devient la forme dominante d'exploitation du poisson. Donc aujourd'hui, expressément, le gouvernement du Canada a déterminé dans sa sagesse—ce n'est certainement pas le comité car nous-mêmes n'en avons jamais parlé—ou bien le ministre a décidé que le conseil d'une bande peut faire des lois intéressant la garde des animaux sauvages et domestiques, mais pas du poisson. Il ne peut pas réglementer le poisson alors même que, franchement, sur le plan du développement économique, cette industrie nouvelle qu'est l'aquaculture acquiert une envergure... c'est une activité nouvelle dans l'environnement marin et qui va aller croissant, et même en eau douce. Et les activités liées à la garde du poisson échapperont au pouvoir d'une bande et de son conseil.

    Que cela nous apprend-il sur le droit d'utiliser les terres et les ressources si l'on va distinguer des aspects sur lesquels les Autochtones peuvent adopter des règles et des codes et des lois et d'autres où ils ne le peuvent pas? Le gouvernement fédéral semble être celui qui décide de ces choses, passant outre à l'autodétermination de cette collectivité.

À  +-(1000)  

    Nous critiquons de nombreux éléments de l'article 16 mais les amendements que nous avons proposés à cet égard ont malheureusement été rejetés et nous n'avons maintenant plus que la possibilité d'amender le paragraphe 16(2).

    Par conséquent, au lieu du libellé actuel du paragraphe 16(2) qui prévoit que dans l'éventualité où des dispositions incompatibles existent la loi ou le règlement l'emporte, je propose plutôt le texte suivant :

Tout conflit insurmontable entre un texte législatif pris en vertu du présent article et une loi fédérale ou un règlement pris en vertu de celle-ci est résolu au moyen d'un mécanisme de résolution des conflits négocié entre la bande et le ministre.

    Autrement dit, on va s'arranger. Dans l'éventualité d'une impasse sur la question de savoir qui a juridiction, on traitera le conflit de la même façon que lorsqu'il met en jeu d'autres niveaux de gouvernement. Il y aura donc négociation entre la bande et le ministre ou son délégué.

    Pourquoi cette prédisposition absolue de qui a raison? Le paragraphe actuel, le paragraphe 16(2) présuppose que le gouvernement a toujours raison et la bande toujours tort et donc il attribue la préséance dans tous les cas de figure. Dans tous les cas et toutes les circonstances, le gouvernement gagne. Voilà ce que dit ce paragraphe. Il dit que le gouvernement gagnera toujours et la bande perdra toujours. C'est ainsi que Dieu l'a ordonné, je suppose, dans cette vision du monde.

    Dans notre scénario au moins, on reconnaît que des conflits peuvent parfois se produire surtout lorsque davantage de bandes se lanceront dans des activités de développement économique. Des conflits peuvent ainsi se produire et, le cas échéant, les deux parties décideront d'un mécanisme de résolution, qu'il s'agisse d'un arbitrage contraignant ou d'une intervention de quelque tierce partie restant à déterminer car nous, autour de cette table, n'avons pas la sagesse ni la boule de cristal pour anticiper toutes ces choses.

    C'est l'un des exemples les plus flagrants que j'ai vus où l'on utilise ce projet de loi comme cheval de Troie de façon à remplir des objectifs secondaires sous le déguisement de la reddition de comptes et de la transparence. Il est tout sauf transparent, car il cherche à gagner par avance les contestations judiciaires futures, ou à les éviter, en déclarant à l'avance qui sortira gagnant.

    [Applaudissements]

    M. Pat Martin: Nous avons entendu les questions, et celle-ci en est une soulevée par l'Indigenous Bar Association. Ce projet de loi a-t-il ou va-t-il avoir un effet ou impact sur les causes judiciaires actuellement en instance de jugement ou les contestations futures des Autochtones? Eh bien, je leur réponds que leurs craintes sont bien fondées car, dans ce cas-ci, il y a impossibilité de saisir la justice dans l'éventualité d'un conflit car le résultat est déterminé d'avance par ce paragraphe.

    Dans l'intérêt de la justice, les députés d'en face ne peuvent-ils reconnaître qu'il y a là quelque chose qui ne va pas, et pourquoi est-on si réticent à laisser jouer l'équité et à défendre le conseil de temps en temps, au lieu de toujours se ranger dans le camp du gouvernement?

    C'est ce que j'entendais en parlant de responsabilité fiduciaire. Nous, les membres de ce comité, avons l'obligation d'agir dans l'intérêt des Autochtones et non du parti au pouvoir. Nous oublions nos obligations de députés en nous rangeant derrière ce que le ministre actuel veut faire afin de se débarrasser de quelques sources d'irritation, soit les contestations judiciaires en cas de conflit, en déterminant le résultat par avance et en disant que dans tous les cas...

À  +-(1005)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Martin.

    Monsieur Godfrey.

+-

    M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.): Monsieur Beynon, j'ai deux questions. La première est cette notion d'un mécanisme de résolution des conflits dans le contexte d'une contradiction entre des lois concurrentes. Connaîtriez-vous un précédent en droit canadien où les conflits seraient réglés de cette façon, par un mécanisme de règlement, plutôt que de déclarer quelle loi a préséance sur l'autre?

+-

    M. Andrew Beynon: Il faudrait que je fasse des recherches un peu plus poussées, mais la réponse est non, je ne connais aucun exemple. Habituellement, ce qui se passe dans le contexte de l'autonomie gouvernementale ou d'une négociation sur les revendications territoriales, c'est que l'on négocie la relation entre les lois. Ensuite, cet ordre de préséance est précisément énoncé, comme c'est le cas ici. On ne s'en remet pas pour cela à des négociations futures, au cas par cas, car cela engendrerait l'incertitude. Au moment où les législateurs d'une Première nation adopteraient ou promulgueraient des textes législatifs, ils ne sauraient pas quelle est la règle tant qu'une négociation ultérieure ne l'aura pas précisée, ce qui peut prendre très longtemps après la prise du texte législatif.

    Encore une fois, dans les arrangements de revendications territoriales et d'autonomie gouvernementale, on détermine avec précision la hiérarchie des lois afin que le législateur, qu'il soit fédéral, provincial ou autochtone, sache par avance ce qu'il en est.

    Comme je l'ai dit précédemment, la Loi sur les Indiens est actuellement silencieuse à ce sujet. Elle souffre de l'absence d'indications claires quant à la hiérarchie des lois. Cette hiérarchie est précisée ici afin que tout le monde—les Premières nations comprises—sachent d'avance ce qu'il en est.

    Encore une fois, pour répéter ce que j'ai déjà dit, les droits inhérents à l'autonomie gouvernementale ou les droits ancestraux à l'autonomie gouvernementale résultent de la common law. Ils ne dépendent pas d'un octroi ou d'une expression de la Couronne. Ils se situent en dehors du contexte de cette loi.

    Quelle est la relation entre ces lois? Nous ne nous prononçons ici sur le rang d'aucune loi qui peut être prise conformément à un droit inhérent et être en contradiction avec une loi ou un règlement fédéral.

+-

    M. John Godfrey: Lorsqu'on laisse subsister une ambiguïté en droit quant à ces relations, est-ce que cela augmente ou diminue la probabilité d'un contentieux ultérieur?

+-

    M. Andrew Beynon: Si l'on laisse subsister une ambiguïté quant à la hiérarchie entre des lois, cela accroît la probabilité d'une action en justice. Une règle spécifique la diminue.

    Si vous le permettez, pour souligner ce point, plusieurs affaires ont été jugées, et encore récemment, portant sur la relation entre des arrêtés pris en vertu de la Loi sur les Indiens et des lois et règlements fédéraux, précisément parce que la Loi sur les Indiens n'est pas claire.

+-

    M. John Godfrey: Ma troisième et dernière question est la suivante : si nous adoptions cet amendement, est-ce que cela signifierait que du fait de cette ambiguïté, les bandes se retrouveraient souvent sujettes à davantage de contentieux juridiques? Du fait de l'ambiguïté, leur autonomie, leur capacité à gérer leurs affaires et à dépasser les règles édictées dans la loi seraient compromises. D'autres pourraient demander le recours aux mécanismes de résolution des conflits en raison de ce manque de clarté, au lieu de simplement laisser l'autonomie de la bande s'exprimer par le biais de ses textes législatifs.

+-

    M. Andrew Beynon: Il est difficile de spéculer à ce sujet, mais je pense pouvoir dire que du point de vue d'un gouvernement, d'une tierce partie et d'une Première nation, une clause laissant cette affaire être un sujet de négociation future, sans aucune certitude quant à la règle qui prévaudra si les négociations échouent, fera probablement qu'un tribunal finira par devoir trancher les différends, ayant été saisi soit par la Première nation elle-même soit par des tierces parties contre une Première nation.

À  +-(1010)  

+-

    M. John Godfrey: Je ne veux pas vous placer de mots dans la bouche ni porter votre spéculation plus loin que vous ne le souhaitez, mais ce pourrait en réalité être une conséquence perverse de l'amendement. Celui-ci pourrait entraîner exactement l'inverse de ce que M. Martin souhaite, soit réduire l'autonomie future d'une bande et sa capacité de fonctionner à l'intérieur de règles claires.

+-

    M. Andrew Beynon: Oui, vous essayez de placer des mots dans ma bouche, je suppose. Tout ce que je puis dire c'est que la négociation de ces relations est appropriée lorsque vous avez une structure comportant des négociations—autrement dit, lors de négociations sur l'autonomie ou les revendications territoriales. Il s'agit justement de régler ces points avant même de promulguer des lois.

    Vous avez raison pour ce qui est de l'inconvénient ici. Les Premières nations, les gouvernements, les tierces parties—tout le monde serait dans l'incertitude. Des textes législatifs seraient pris, ensuite on serait obligé de courir après sa queue pour voir quel résultat risque d'être négocié. C'est là l'inconvénient.

+-

    M. John Godfrey: Merci.

+-

    M. Warren Johnson: Si je puis ajouter ce qui peut être un point important—veuillez m'excuser s'il a déjà été évoqué, j'ai dû quitter la salle un instant. Ce pourrait également être en conflit avec le but déclaré de cette loi telle que modifiée par le comité, à savoir diminuer, plutôt qu'augmenter l'intervention du ministre dans ces affaires. La négociation ici mettrait en jeu le ministre, ce qui accroîtrait la latitude ou l'autorité du ministre.

+-

    M. John Godfrey: Merci beaucoup.

+-

    Le président: Merci, monsieur Godfrey.

    Monsieur Loubier.

[Français]

+-

    M. Yvan Loubier: Monsieur le président, je vais d'abord commencer par commenter trois assertions sur lesquelles je ne suis vraiment pas d'accord et qui résultent de l'échange qu'a eu mon collègue libéral avec un de nos experts.

    Premièrement, cela m'a fait rire d'entendre dire qu'une clause traitant d'un mécanisme de résolution de conflits pouvait mener à de la chicane, à un monde totalement à l'envers où dorénavant, on ne verrait plus les premières nations poursuivre le gouvernement fédéral pour le non-respect de leurs droits, mais le fédéral poursuivre les premières nations pour avoir outrepassé leurs droits de législateurs. C'est surréaliste. Cela revient à nier le poids de l'histoire et à oublier les 30 dernières années que de penser à poursuivre le troisième ordre de gouvernement que l'on vient de créer en concertation avec les premières nations. Je suis complètement à l'envers en pensant que certaines personnes pourraient penser ainsi.

    Deuxièmement, on semble croire au départ que les négociations pourraient échouer sur un mécanisme de résolution des litiges. Si on met de l'avant une idée--qui a déjà été mise de l'avant ailleurs; j'y reviendrai plus loin--et que l'on croit au départ qu'elle va échouer, il est certain qu'elle va échouer. Tout est question d'énergie et d'attitude positive. Si l'on n'est pas positif et que l'on n'a ni l'énergie ni la volonté de régler une chose, il est sûr que l'on va échouer.

    On ne demande pas à un boxeur de monter sur le ring en pensant qu'il va perdre, parce qu'alors, il va nécessairement perdre. Le boxeur doit avoir le bon état d'esprit. Je pense que vous avez un problème d'énergie. Je vous suggère de recharger vos piles; ce serait une bonne idée.

    Troisièmement, il n'y a pas de précédents que je connaisse qui ressemblent à cela. Il faudrait étudier la question. Des précédents, il y en a plein, à commencer par ceux créés dans le cadre de l'accord de libre-échange avec les États-Unis, l'ALENA, l'Accord de libre-échange nord-américain avec les États-Unis et le Mexique, et de l'OMC, anciennement connu sous le nom de GATT. Leurs mécanismes de résolution de conflits fonctionnent extrêmement bien. Ils ont bien servi le Canada, dans le cas de l'ALENA et de l'accord de libre-échange avec les États-Unis en particulier. Ils fonctionnent bien parce qu'on a mis en place une structure qui évalue objectivement une situation.

    Prenons l'exemple de l'accord de libre-échange avec les États-Unis. Les États-Unis nomment une personne qui va faire partie du panel, le Canada nomme une deuxième personne, et la troisième personne est nommée par les deux parties. Donc, le panel est objectif. Il est indépendant des gouvernements et rend une décision qui peut être contestée à d'autres niveaux. Si une décision rendue par ce panel de l'ALENA ne fait pas l'affaire du Canada, il a toujours le loisir de présenter le cas à l'OMC. On ne peut pas dire qu'il n'y a pas de précédents au niveau de la résolution des conflits; il y a plein de précédents. Je n'en ai nommé que trois. Je pense que c'est bien assez.

    Je trouve qu'il est excellent de dire que si on réalise l'autonomie gouvernementale liée au droit inhérent des nations autochtones, donc au droit qu'elles possèdent déjà, il faut des mécanismes de résolution de conflits, puisqu'on vit dans le même voisinage et souvent sur des territoires qui se recoupent. Qu'on n'y ait pas pensé est un autre problème. Je vais donc appuyer cet amendement.

    J'aimerais maintenant revenir à la liste des pouvoirs pour les nations autochtones dont il est question à l'article 16. Je répète que je suis estomaqué par la liste des pouvoirs que le projet de loi C-7 réserve aux municipalités. Ils constituent des pouvoirs de gouvernement. Quand j'ai lu le projet de loi C-7 pour la première fois, je suis tout de suite allé voir ce qu'il prévoyait au niveau des pouvoirs. Je me suis alors dit que cela n'avait aucun sens. Les municipalités ont des pouvoirs de nations, de nations reconnues par l'ONU et auxquelles les tribunaux ont donné raison au cours des 30 dernières années.

    Il y a des précédents ici aussi. L'accord avec la nation crie de la Baie-James et ce qu'on a appelé la Paix des braves l'an passé ne donnent pas le pouvoir de créer des aqueducs, des égouts et d'adopter des réglementations commerciales sur le territoire municipal. Ce n'est pas ce qu'on a fait. Lisez quels sont les pouvoirs d'un vrai gouvernement et vous verrez que c'est ce qui a été négocié. C'est ainsi que les Cris ont réalisé leur droit inhérent à l'autonomie gouvernementale.

À  +-(1015)  

    Écoutez bien cela. Les Cris ont la juridiction, sur leur territoire, de la justice, de l'environnement, du développement économique, de la culture, de la famille, du transport, de la taxation, du développement des ressources humaines, de l'aménagement des terres, du développement social et même des affaires internationales.

    Si vous allez voir le projet d'entente avec les nations innues, au Québec encore une fois, vous trouverez tous ces mêmes domaines dévolus à un troisième ordre de gouvernement--un vrai; ce ne sont pas des choses futiles comme on en trouve dans le projet de loi C-7--, mais en plus, les Innus ont aussi une souveraineté partagée sur le territoire qu'on appelle le Innuassi, c'est-à-dire le territoire de chasse, de pêche et de trappage traditionnel. Il y a un partage, non pas de juridiction mais un partage au chapitre de la réglementation s'appliquant à l'un ou à l'autre selon que ce chasseur, ce trappeur ou ce pêcheur appartienne à la communauté québécoise ou à la communauté innue. La réglementation qui s'applique à un Innu est celle de la loi déterminée par le gouvernement innu. La loi qui s'applique à un pêcheur québécois relève de la législation québécoise. On tente un processus d'harmonisation entre deux ordres de gouvernements souverains pour faire en sorte qu'il n'y ait pas de chicane, mais il reste que les lois et les règlements déterminés par la nation innue s'appliquent pour les Innus, et ceux déterminés par la nation québécoise s'appliquent pour les résidents québécois.

    C'est la même chose pour le partage des recettes de redevances. Quand vous avez un territoire commun que vous avez partagé historiquement, mais qui était la propriété des premières nations avant que les Européens n'arrivent, vous devez négocier le partage des recettes. C'est comme les recettes des redevances sur les ressources naturelles dans les territoires qu'on appelle Innuassi, les territoires traditionnels occupés par la nation innue. Il faut un partage de ces recettes-là.

    Les redevances annuelles qui sont payées par les sociétés minières, par exemple, ne doivent pas aller uniquement dans les coffres du gouvernement québécois. On a négocié avec la nation innue, qui a un droit sur ce territoire-là, une partie des recettes de redevances. Si on ne négocie pas cela, c'est parce qu'on a une mauvaise volonté. En effet, comment voulez-vous qu'un gouvernement autonome autochtone, comme celui des Innus, puisse financer ses activités de gouvernement souverain s'il n'a pas de ressources financières pour alimenter cette machine gouvernementale? C'est ridicule.

    Alors, si on dit qu'on n'a pas besoin de mécanisme de résolution des conflits, que ce sont les lois fédérales qui priment et qu'on se fout carrément du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale des nations autochtones, c'est une autre histoire, mais qu'on arrête d'alambiquer un projet de loi sous le couvert de la modernité, en prétendant que ces clauses-là sont des clauses normales. Quand on est face à un ordre de gouvernement inférieur--ça, c'est l'idée du gouvernement fédéral--, il faut faire en sorte que s'il y a conflit entre les actions du gouvernement inférieur et le gouvernement supérieur, qui est le gouvernement fédéral, qui a la vérité inculte, ce soient les lois fédérales qui priment. Alors, si on a cette idée-là, c'est différent, mais qu'on arrête de nous raconter des histoires ici en nous renvoyant toujours au fichu préambule, qui est un délire lyrique qui n'apparaît même pas dans le corps de la loi. Il ne faut pas prendre les gens pour des imbéciles.

    Je ne veux pas faire d'attaque personnelle, mais on dit qu'on a une expertise sur ce que devrait être la continuité d'Erasmus-Dussault, puis on nous présente une chose comme celle-là. On municipalise le pouvoir des gouvernements autonomes des autochtones et on nous fait croire qu'on vient de céder quelque chose, alors qu'on n'a rien cédé du tout. De toute façon, on n'a rien à céder parce qu'ils ont déjà ces droits-là. Qu'on arrête de dire qu'on fait des concessions incroyables, qu'on va vers un gouvernement autonome, qu'on respecte les jugements de cour et qu'on respecte aussi les nombreuses critiques faites sur le plan international sur le fait que le gouvernement fédéral poursuit la domination qui a été inscrite, il y a 130 ans, dans la Loi sur les Indiens.

    Il ne faut pas prendre les gens pour des imbéciles. Au fur et à mesure qu'on informe la population sur le contenu de ce projet de loi-là, même la population non autochtone commence à en avoir marre des tergiversations du gouvernement fédéral.

    Lorsqu'on a commencé le débat sur les nations innues et sur la Paix des braves au Québec, la population était sceptique jusqu'à ce qu'on explique le contenu du traité, qu'on explique que les nations autochtones ont des droits qu'on ne leur concède pas, mais qu'elles ont déjà au départ. Ce que nous devons faire, nous, c'est négocier l'exercice de ce droit-là.

    Quand la population a compris cela, on a obtenu le résultat qu'on a eu à mon congrès de parti il y a trois semaines. Une résolution a été votée à la quasi-unanimité des 550 délégués, moins deux personnes, en appui à ces ententes....

À  +-(1020)  

[Traduction]

+-

    Le président: Merci, monsieur Loubier.

    Monsieur Martin, le mot de conclusion.

+-

    M. Pat Martin: Merci, monsieur le président.

    Ceci est la deuxième tentative que nous faisons de modifier le paragraphe 16(2). L'amendement qui vient d'être rejeté tentait de modifier l'article 16 en supprimant le paragraphe (2), le passage qui donne absolue priorité au gouvernement chaque fois qu'il y a conflit entre une loi fédérale et une loi d'une bande.

    Ce que je propose avec cet amendement est en fait une approche moins tranchée, un moyen plus doux de régler le même problème. Nous proposons d'amender le paragraphe 16(2) de telle façon que, dans l'éventualité d'un conflit entre un texte législatif pris par le conseil de bande sous le régime de cette loi et une loi fédérale, ce conflit serait réglé au moyen d'un mécanisme de résolution négocié entre la bande et le ministre. Cela semble être une façon civilisée, contemporaine—pas seulement contemporaine, mais consacrée par l'histoire, de sortir d'une impasse lorsqu'un différend surgit.

    Le texte actuel du projet de loi présuppose que le gouvernement a toujours raison et la bande toujours tort, si bien que le gouvernement l'emporte invariablement en cas de contestation et la bande perd toujours. Je sais que c'est ce que le ministre souhaite, c'est sa vision d'un monde parfait : il gagne à tous les coups. C'est l'idéal. Et je suppose que si vous pouvez faire avaler cette pilule, vous voudrez imposer par la loi ce genre de pouvoir absolu. C'est inacceptable pour nous.

    Si le gouvernement avait demandé à quiconque, s'il avait consulté qui que ce soit à ce sujet, il aurait entendu ce que souhaitent les Premières nations, elles qui sont censément un partenaire dans ce processus. Lorsque ce problème a été porté à notre attention, des recommandations raisonnables ont été formulées. Bon nombre de Premières nations, bien que condamnant le projet de loi C-7 dans son intégralité et rejetant toute la notion que le gouvernement fédéral définisse ce qu'est l'autonomie gouvernementale... nombre d'entre elles ont néanmoins estimé nécessaire, à tout le moins, de proposer des amendements pour tenter de désamorcer certaines des sources de friction contenues dans ce projet de loi.

    Cette disposition en particulier a été signalée comme problématique. Quantité de témoins dans tout le pays ont attiré l'attention sur l'article 16. Ce n'est pas moi qui ai rédigé l'amendement que je propose. Il nous a été soumis par le vice-chef régional de l'Assemblée des premières nations de Colombie-Britannique, qui a effectué une analyse détaillée et commandé une opinion juridique et analyse détaillée de ce projet de loi.

    Il nous a mis en garde contre l'article 16. Il est hautement litigieux et eux et beaucoup d'autres Premières nations considèrent qu'il représente la tentative du gouvernement de définir ce que sera l'autonomie gouvernementale. C'est de mauvaise foi et contraire à la notion d'autonomie gouvernementale, telle qu'elle existe déjà et telle qu'elle sera façonnée.

    Certains témoignages à ce sujet étaient très importants. Je crois que l'un émanait du professeur Brad Morse, une autorité très respectée en la matière. Il a particulièrement déploré l'article 16. Il trouvait pratiquement incroyable qu'un domaine clé comme l'éducation n'était pas englobé dans la liste des compétences des bandes.

    De tous les domaines, c'est bien celui-là qui devrait relever de la compétence exclusive des Premières nations, en raison de leurs traditions, de leurs cultures et de leurs langues et patrimoines qui déterminent tellement qui ils sont. La compétence exclusive en matière d'éducation devrait leur revenir.

    Je sais que mon honorable collègue du Bloc québécois, M. Loubier, a cité des pouvoirs que l'Assemblée nationale du Québec a déjà reconnus aux Premières nations—et l'éducation y figure en bonne place, à côté de l'environnement et de la justice.

    Les Premières nations sont fières à juste titre de la singularité de leur système de justice, très différent du système judiciaire colonial. Elles ont en effet pu constater, face à des résultats choquants et déplorables, que notre système judiciaire ne marche pas bien avec les Autochtones. C'est évident. Il n'est pas besoin d'autre preuve que la surreprésentation des Autochtones dans nos prisons. On ne peut tout de même pas enfermer toute une génération d'un peuple.

À  +-(1025)  

    [Applaudissements]

    M. Paul Martin:Je suis tombé sur une statistique choquante en faisant des recherches sur cet article particulier, qui indique qu'à une certaine date pendant les années 70, le pourcentage des femmes autochtones à la prison des femmes de Kingston était de... devinez combien. Je pensais que 50 p. 100 serait horrible, étant donné leur faible proportion de la population et que 70 p. 100 serait excessif. Eh bien, c'était 100 p. 100—la totalité. Chacune des détenues était autochtone. Certes, c'était une aberration momentanée, mais cela illustre bien l'incapacité de notre système judiciaire par rapport aux Premières nations.

    Dans ces conditions, pourquoi la justice ne figure-t-elle pas dans la liste des domaines où le gouvernement fédéral va laisser les bandes prendre des textes législatifs d'application locale?

    Le professeur Brad Morse n'était pas seul. D'autres témoins ont cité l'éducation, la justice, les transports, la famille, la culture, les ressources humaines. C'était là les éléments dont mon collègue a dit qu'ils étaient sujets de débat. Et ils sont sujets sans cesse à des négociations fédérales-provinciales.

    Les pouvoirs du gouvernement fédéral sont de plus en plus délégués aux gouvernements provinciaux, mais ce même concept de dévolution des pouvoirs ne s'applique pas s'agissant du droit inhérent à se gouverner que les Premières nations possèdent déjà.

    Ces droits ne leur sont pas conférés par le gouvernement fédéral, elles les possèdent d'emblée et il convient de les reconnaître et les affirmer. Rien de ce que nous faisons comme parlementaires ne devrait en rien diminuer ces droits ou empiéter sur eux ou chercher à les éteindre. C'est pourquoi il nous faut agir avec prudence.

    J'ai donc proposé ce que j'estime être un amendement raisonnable. Cet amendement prévoit la mise en jeu d'un mécanisme de résolution des conflits.

    L'un de nos conseillers techniques a indiqué qu'un des objectifs déclarés de ce projet de loi est de réduire l'influence ou la participation du ministre à la vie des Autochtones. Il a argué que l'érection d'un mécanisme de résolution des conflits entre la bande et le ministre élargirait en fait le rôle du ministre.

    Je prétends le contraire. Avec mon amendement, le rôle du ministre serait réduit par rapport à ce que prévoit l'article 16. Avec ce dernier, le ministre gagne toujours, chaque fois, obligatoirement. La loi impose sa victoire. Mon amendement au moins permet que, parfois, le gouvernement soit perdant et que la bande et le conseil gagnent si leurs arguments sont bons. Cela laisse au moins la possibilité qu'en cas de conflit, le gouvernement n'ait pas toujours raison et ne l'emporte pas invariablement.

    Je peux donner des exemples de cas où le gouvernement s'est trompé. Il n'est pas inhabituel que le gouvernement fasse erreur. Il existe quelques précédents très inquiétants.

À  +-(1030)  

+-

    M. Yvan Loubier: Ils refusent de le reconnaître.

+-

    M. Pat Martin: Ils ne veulent pas l'admettre.

    Je suis donc déçu par le ton de certaines interventions que j'ai entendues et la volonté de défendre ce que je considère être une tentative choquante et délibérée de réduire, d'entamer et même d'effacer les droits à l'autonomie gouvernementale avec cet article 16, et tout particulièrement son paragraphe (2).

    Je ne peux que m'interroger sur la motivation. Je peux presque percevoir les rouages de la pensée.

    Il y avait des gens et des représentants bien intentionnés au comité ministériel, le JMAC, dont on pourrait penser qu'ils auraient décelé le piège. C'était tellement évident et apparent aux yeux d'autres, comme le professeur Brad Morse et les avocats qui ont mené la recherche pour le compte du vice-chef de l'Assemblée des premières nations de Colombie-Britannique et cela nous a été expliqué si clairement... comment ceux ayant travaillé sur cette clause ont-ils pu ne pas voir l'importance du problème? Nous ne savons pas grand-chose du processus qui a été suivi pour la rédaction de ce projet de loi, il faut bien le dire.

    Nous avons demandé quels étaient la justification et le cheminement.

+-

    Le président: Merci, monsieur Martin.

    Nous aurons un vote sur appel nominal sur l'amendement NDP-37, page 131.

    (L'amendement est rejeté par 7 voix contre 2)

+-

    Le président: Monsieur Martin, vous avez raison d'être fatigué. Nous le sommes tous. Nous en sommes à notre 49e heure de séance, avec peu de pauses. Ceci est notre dixième semaine de travail presque à temps plein là-dessus et nous n'en sommes même pas à mi-chemin.

    Nous passons à l'amendement NDP-38 de M. Martin.

+-

    M. Pat Martin: Il y a une solution facile. Nous serions tous beaucoup plus reposés si l'on mettait simplement ce projet de loi de côté et reprenait tout à zéro.

    [Applaudissements]

    M. Pat Martin: Une grande partie de l'opinion autochtone est en faveur de tout arrêter. Beaucoup d'autres gens ont consacré leur semaine, eux aussi, à venir ici pour faire comprendre au gouvernement qu'ils ne veulent rien avoir à faire avec le projet de loi C-7. Ils ne veulent pas que nous travaillions là-dessus.

    En dépit du coût.... Même des observateurs n'ayant aucun intérêt propre dans ces travaux, seraient horrifiés par la somme d'énergie et de ressources consacrées à une entreprise parfaitement futile qui n'apporterait rien à personne et nous coûtera une fortune.

    Cela défie la raison et la logique de dépenser 550 millions de dollars pour tenter de forcer les gens à faire ce qu'ils ne veulent pas faire et que l'on sait que la tentative est vouée à l'échec. Nous avons pu constater partout dans le pays que l'opposition est en train de prendre forme et de fusionner en un mouvement de refus très puissant.

    Je rappelle, encore une fois, que dans la note du ministre au Cabinet, il mettait celui-ci en garde, en disant «il y a une opposition dans le pays, mais celle-ci est dispersée et ponctuelle et que l'on ne s'attend pas à ce qu'elle devienne coordonnée le moins du monde». Voilà quel était son argumentaire.

    Je ne pense pas que le Cabinet aurait donné le feu vert s'il avait su, à l'époque, à quel point l'opposition deviendrait coordonnée, car aujourd'hui elle n'est plus «dispersée et ponctuelle», c'est devenu un mouvement d'opposition généralisé.

    [Applaudissements]

    M. Pat Martin: Et bonne chance. Je ne sais pas où vous allez trouver le personnel, la main-d'oeuvre et les ressources pour essayer d'imposer quelque chose dont les Autochtones ont clairement fait savoir qu'ils ne veulent pas. Ils exprimeront leur opposition par tous les moyens légaux qu'ils connaissent et ils ont déjà donné préavis qu'ils ne coopéreront pas.

    Vous déclenchez des émeutes. Vous provoquez littéralement la désobéissance civile dans les campagnes. Qui voudrait laisser cela derrière lui, en héritage? Il semble que le premier ministre veuille achever un travail laissé en plan en guise d'héritage et il semble avoir trouvé un ministre prêt à faire le boulot. Mais je m'inquiète pour le nouveau ministre des Affaires indiennes.

    Nous savons que le futur premier ministre prononce des discours à travers le pays et annonce au compte-goutte les éléments de sa plate-forme. Nous savons que lorsqu'il se rendra à Edmonton cette fin de semaine, il parlera des questions autochtones. Si le premier ministre, Paul Martin, lâche un seul mot à l'effet qu'il n'approuve pas cette provocation des Premières nations, s'il dit le moindre mot à l'effet qu'il désapprouve le niveau d'animosité suscité dans la collectivité, croyez-moi, ce projet de loi va tomber en miettes du jour au lendemain. Lorsque nous reviendrons le lundi matin, ce projet de loi n'existera plus, car les martinistes du caucus vont le bloquer.

    C'est peut-être notre meilleur espoir. Quel nouveau premier ministre et quel ministre des Affaires indiennes voudraient inaugurer leurs nouvelles fonctions avec un tel degré d'acrimonie et d'animosité? Il faudrait être fou. Eh bien, il fallait déjà être fou pour lancer ce processus sans la participation et le soutien des Autochtones, mais il faudrait être encore plus fou pour poursuivre, en sachant ce que nous savons maintenant. On peut presque excuser la naïveté de ceux qui ont mis en marche le processus, mais en sachant aujourd'hui...

À  +-(1035)  

+-

    Le président: Monsieur Martin, pardonnez-moi de vous interrompre.

    Il nous faut l'engagement que l'appareil photo avec flash ne soit pas réutilisé; sinon l'appareil ou la personne devront quitter la salle. Nous allons suspendre la séance jusqu'à ce que ce soit fait.

À  +-(1037)  


À  +-(1040)  

+-

    Le président: Monsieur Martin.

+-

    M. Pat Martin: Monsieur le président, j'ai fait maintenant trois tentatives d'amender le paragraphe 16(2). Vu notre esprit de bonne volonté au début de la journée, j'ai déploré que le consentement unanime ait été refusé de rouvrir un article sur lequel je n'avais pas pu intervenir, mais je pense que nous avons bien montré maintenant à la présidence et à d'autres que cette disposition particulière nous préoccupe grandement ainsi qu'un grand nombre de représentants des Premières nations de tout le pays.

    La première motion qui demandait la suppression pure et simple du paragraphe 16(2) a été rejetée, et c'est pourquoi nous avons présenté un deuxième amendement à ce même paragraphe qui visait à mettre en place un mécanisme de résolution des conflits.

    Puisqu'ils n'étaient pas intéressés par aucune de ces deux options, peut-être seront-ils intéressés par un virage à 180 degrés, c'est-à-dire que dans l'éventualité d'un conflit entre un code ou un texte législatif d'une bande et d'un conseil et d'une loi fédérale, le texte législatif pris en vertu du présent article l'emporterait.

    Autrement dit, donnons le bénéfice du doute à la bande et au conseil, pour changer. Disons que dans l'éventualité d'un conflit, la préférence ou le préjugé sera en faveur du texte promulgué par la bande et le conseil. Cela serait peut-être plus attrayant aux yeux des députés. Ils semblaient bien vouloir un projet de loi qui dit que le ministre gagnera toujours. Eh bien, peut-être seraient-ils prêts à envisager l'inverse. Donnons le bénéfice du doute à la bande et au conseil dans l'éventualité d'un conflit, afin que ce soit toujours eux qui gagnent.

    Puisqu'ils ne semblent aimer aucune des deux autres options, en voici une troisième. Cela démontre à quel point nous considérons le paragraphe 16(2) important. Nous pensons que tout texte législatif pris par la bande et le conseil au titre de cet article devrait avoir préséance en cas de conflit sur toute autre loi. Voilà le type de disposition qu'il faudrait être prêt à explorer à cet égard—toutes les options.

    Au lieu de simplement avaliser tout ce que les bureaucrates nous présentent pour le compte du ministre, ce comité est censé délibérer et avoir des échanges sur les mérites ou avantages relatifs de différentes combinaisons de solutions.

    Mais même ainsi notre obligation ne s'arrête pas là. Nous avons aussi l'obligation de prendre en compte ce que nous avons entendu lors du processus de consultation, car comme je l'ai dit des centaines de fois, la consultation sans flexibilité,si nous refusons d'intégrer aucun de ces points de vue, n'est pas une vraie consultation.

    [Applaudissements]

    M. Pat Martin: Ainsi, si vous demandez aux gens ce qu'ils pensent et qu'ensuite vous ne tenez nul compte de ce qu'ils disent, vous n'avez pas réellement consulté, vous leur avez simplement donné la possibilité de se défouler.

    Donc, monsieur le président, je mets en garde le gouvernement et même ce comité au sujet du mécontentement qui grandit chez les Autochtones. Le malaise va croissant dans le pays et d'ailleurs les médias commencent à le remarquer. Les choses ne se déroulent pas comme elles le devraient. Ils remarquent qu'il y a une agitation en cours. Malheureusement, ils ne semblent pas s'intéresser aux affaires autochtones tant qu'il n'y a pas un barrage routier ou une séance de comité parlementaire qui se prolonge toute la nuit, ou quelque événement extraordinaire, parce que le public n'est pas exactement au fait de ces problèmes et les journalistes sont un peu lents, mais leur attention commence à s'éveiller.

    Voici le titre que l'on pouvait lire dans le Star Phoenix de Saskatoon : «Les Autochtones organisent une veille au Parlement : protestation contre la Loi sur la gouvernance des Premières nations». On commence à comprendre à travers le pays que nos objections sont légitimes.

    Je m'inscris en faux contre certains des éditoriaux que j'ai lus qui disent que les chefs et les conseils sont contre, mais que les Autochtones de la base à travers le pays... Si on a pu faire croire au public et aux médias qu'il y a un mouvement de la base réclamant ce projet de loi, où sont ces gens? Nous ne les avons pas vus au comité. Ils n'ont pas demandé à comparaître. Ils n'ont présenté aucun mémoire. Le mouvement de la base semble au contraire opposé à 100 p. 100 au projet de loi C-7, et est loin de frapper à la porte du gouvernement ou du ministre pour réclamer davantage d'ingérence dans la vie des Indiens. Nul ne tambourine à la porte du ministre pour supplier d'être régenté jusque dans le moindre détail et se voir dicter ce qu'il est possible de faire et ne pas faire. Je n'ai entendu personne réclamer ce genre de chose. Or, c'est cela que fait le projet de loi C-7.

À  +-(1045)  

    Je suppose que vous pouvez déceler dans mon ton que je suis frustré par le refus de consacrer le temps qu'il faut à l'article 16 et de prendre en compte les témoignages que nous avons entendus car on nous a bien dit que non seulement la liste des compétences d'une bande et d'un conseil laisse à désirer, mais qu'elle est carrément inadéquate puisqu'elle exclut des domaines tels que l'éducation et la justice.

    Et oui, comme quelqu'un vient de le dire, les questions fiscales sont complètement évacuées. La liste est inadéquate.

+-

    Le président: Merci, monsieur Martin.

    Monsieur Hubbard.

+-

    M. Charles Hubbard: Monsieur le président, je tâcherai d'être bref, mais M. Martin dans son discours a omis de dire...

+-

    Le président: Monsieur Hubbard, pourriez-vous le désigner par «mon collègue» ou «le député d'en face»?

+-

    M. Charles Hubbard: Oui. Mon collègue...

    Il y a eu des consultations poussées dans tout le Canada.

    Des voix: Non.

    M. Charles Hubbard: Le projet de loi a été introduit à la Chambre en juin dernier. Il a été déposé de nouveau en octobre et notre comité a commencé à l'étudier début 2003. Le comité a sillonné le Canada et a tenu des douzaines de réunions avec les Autochtones et, suite à cela, des amendements ont été déposés au comité. Tous les membres ont connaissance de ces amendements depuis plus de trois semaines et, de ce côté-ci de la Chambre, nous avons passé beaucoup de temps à les étudier.

    Il est de notre intention, nous les législateurs, d'améliorer le projet de loi. Or, depuis le tout début, mon collègue d'en face ne cherche qu'à le détruire.

    Nous avons donc des objectifs opposés. Nos motifs sont différents. Le motif de mon collègue est la destruction du projet de loi. Notre motif est de renvoyer au Parlement, au stade du rapport, le meilleur texte possible.

    Après l'étude de près de 200 amendements ici, la Chambre examinera d'autres amendements présentés par divers députés. C'est un processus long, mais nous sommes résolus à ramener le meilleur projet de loi C-7 possible à la Chambre au stade du rapport, et c'est là notre objectif.

    Vu les objectifs de mon collègue, il est pénible d'écouter ses discours, d'autant qu'il ne s'en tient pas à l'amendement qu'il défend. C'est pourquoi nous avons du mal à accepter ses motifs et à écouter sa rhétorique, ainsi qu'à voir les avantages des amendements qu'il présente au comité, de celui-ci comme de tant d'autres, et nous n'avons d'autre choix que de voter contre.

+-

    Le président: Merci, monsieur Hubbard.

    Avant de donner la parole à M. Bouvier, je rappelle aux membres de l'auditoire qu'une salle de comité est un prolongement de la Chambre des communes et que la même retenue y est de mise par respect pour le Parlement. Nous apprécierions que...

    Une voix: Où est le respect pour nous?

    Le président: Nous invitons les personnes dans l'assistance à respecter la dignité du travail qui se fait, ainsi que le Parlement.

    Monsieur Loubier.

[Français]

+-

    M. Yvan Loubier: Monsieur le président, je suis d'accord pour qu'on respecte la dignité du Parlement et la dignité du comité et de ses membres puisque c'est l'extension de la Chambre des communes, mais je suis d'autant plus préoccupé par le respect de la dignité des gens qui sont concernés directement par le projet de loi, et ce sont les autochtones. Cela me préoccupe beaucoup plus. Ça fait 10 ans que je suis député ici. J'ai toujours respecté ce Parlement et l'extension de cette institution que sont les comités, mais je m'aperçois qu'en dehors de ce respect des procédures et de l'institution, il y a le respect des peuples, qui va au-dessus du respect de toute institution puisque l'institution est l'instrument du peuple. Si à la base on n'est pas capable de respecter le ou les peuples, il est difficile pour les peuples concernés de respecter l'instrument qu'est l'institution. Je peux comprendre la réaction, parce qu'on enlève le droit de parole à ces gens-là et que ce sont eux qui devraient être ici, autour de la table, pour discuter du projet de loi C-7.

    Vous avez dit tout à l'heure que ça faisait déjà 49 heures qu'on discutait du projet de loi. C'est sûr qu'on est fatigués. On est tous fatigués, parce qu'en plus de discuter du projet de loi, on a tous des occupations comme députés et comme membres d'une famille, etc. Mais je trouve que 49 heures, c'est bien peu quand ça fait 130 ans que des peuples attendent qu'on respecte leur dignité et qu'on respecte ce qu'ils sont. Moi, je suis bien prêt à leur donner plusieurs mois sinon plusieurs années pour les aider et les épauler dans la recherche de ce qu'ils veulent être au cours des prochaines années, mais pas sur la base du projet de loi C-7, parce qu'un projet de loi de cette nature, ça n'a aucun bon sens. J'exhorte mes collègues libéraux à se réveiller.

    Comme le mentionnait M. Martin tout à l'heure, le gouvernement est entre deux gouvernances, justement. Le premier ministre actuel est un premier ministre en sursis puisqu'il s'en va dans quelques mois. Il peut avoir des ambitions comme ancien ministre des Affaires indiennes, motivées par je ne sais quelle réflexion, parce que ce projet de loi-là ne correspond pas à une oeuvre d'un ancien ministre des Affaires indiennes devenu premier ministre et qui veut laisser un héritage. Si c'est cet héritage-là qu'il veut laisser, c'est un bien piètre et désolant héritage qu'il veut laisser à ce Parlement. Il me semble que vous devriez comprendre qu'étant en sursis comme ça...

    Entre les trois candidats affichés maintenant, M. Manley, Mme Copps et M. Paul Martin, c'est probablement M. Paul Martin qui risque de prendre la relève. Si, premièrement, M. Paul Martin se prononce en fin de semaine--je n'ai pas souvent été d'accord avec lui; je l'ai même combattu comme critique aux finances parce qu'il prenait des décisions qui n'avaient pas d'allure quelquefois, mais lorsqu'il avait raison je l'appuyais, et vous pouvez vérifier--et s'il dit qu'il est prêt à mettre ce projet de loi C-7 à la poubelle et à recommencer sur la base des conclusions du rapport Erasmus-Dussault, si, deuxièmement, il dit aussi qu'il veut avoir de véritables consultations avec les premiers concernés, c'est-à-dire les leaders des nations autochtones, si, troisièmement, il dit que dans son esprit il n'y a pas d'autre façon que de respecter le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale et de négocier d'égal à égal, de nation à nation, si, quatrièmement, il accepte tout cela, il va avoir l'opposition avec lui. Je peux peut-être m'engager pour mon collègue du NPD. Si M. Martin appuie les nations autochtones, s'il laisse tomber C-7 et s'il repart le processus sur la base de ce que Erasmus-Dussault a présenté comme véritable chantier au cours des 20 prochaines années pour aider à reconstruire les nations autochtones, nous, de l'opposition, allons appuyer M. Martin dans cette recherche-là. J'en suis persuadé.

À  +-(1050)  

    Par contre, si M. Martin veut chausser les souliers de l'actuel premier ministre et poursuivre dans la voie du projet de loi C-7, nous ne serons pas derrière lui; nous serons devant lui pour nous opposer comme nous nous opposons à l'heure actuelle à ce projet-là qui n'a pas de bon sens, étant donné ce que les autochtones veulent avoir comme avenir et ce que les autochtones veulent faire comme reconstruction de leur nation dans le respect, dans la dignité et dans le désir de faire des choses pour les leurs. Il nous aura devant lui. On sera une espèce de mur de blocage. S'il veut commencer son mandat comme ça, c'est une bien mauvaise idée.

    Compte tenu de que j'ai compris tout à l'heure d'un collègue libéral que je ne nommerai pas et qui disait vouloir améliorer le projet de loi, j'ai des petites questions qui me viennent à l'esprit. Je ne les lui poserai pas parce que je ne peux pas le faire, mais comment peut-on améliorer quelque chose qui est innommable, inacceptable et dont personne ne veut, surtout que les premiers concernés n'en veulent absolument pas? Comment apporter une amélioration à une chose qui est pourrie à sa base? C'est la première question à poser.

    Deuxièmement, parmi les amendements qui ont été présentés par le gouvernement depuis le début, où sont ceux qui améliorent le contenu et qui correspondent à ce qu'on a eu comme critiques depuis le début des tournées et dans les mémoires? Quels sont les amendements de fond du gouvernement qui améliorent le projet de loi? C'est zéro. Il n'y a pas un amendement provenant du gouvernement qui améliore le contenu de ce projet de loi.

    Alors, on peut bien dire n'importe quoi, qu'on veut travailler dans la dignité et avec efficacité à améliorer le sort des nations autochtones, mais si les nations autochtones ont à améliorer leur sort, elles le feront à partir de leurs propres décisions, à partir de leur autonomie gouvernementale, à partir des décisions qu'elles prendront elles-mêmes.

    Nous, tout ce qu'on a à faire, c'est réparer les pots cassés depuis 130 ans d'application de la Loi sur les Indiens, répondre à leurs revendications globales, répondre à leurs revendications particulières--il y en a 500 en suspens à l'heure actuelle--, négocier rapidement l'assise territoriale sur laquelle les nations autochtones vont exercer leur juridiction, leur souveraineté comme nation, et leur offrir des compensations pour les préjudices qu'on leur a causés, les épauler comme ce fut le cas dans tous les projets qui ont connu du succès aux États-Unis et même ici, au Québec et au Canada, grâce à un épaulement du gouvernement fédéral, et non pas en les obligeant à faire des choses qu'elles ne veulent pas faire.

    À ce moment-là, on reparlera de l'amélioration des relations entre le gouvernement fédéral et les nations autochtones. Mais à l'heure actuelle, ne venez pas nous prendre pour ce qu'on n'est pas en nous disant que vous voulez travailler sereinement et avec efficacité à l'amélioration d'un projet de loi qui n'est pas améliorable, de toute façon.

    J'aimerais vous rappeler une vérité historique. Lorsque les premiers Européens sont arrivés ici, ils ont été accueillis à bras ouverts par les nations autochtones. Les chefs autochtones qui les ont accueillis ont accepté des pactes avec eux, des pactes de bienvenue. Ils leur ont prêté des territoires pour faire des activités de chasse, par exemple. Ils leur ont accordé des droits de passage sur leurs territoires. Ils ont fait des pactes de non-agression envers eux et les ont accueillis à bras ouverts. Lorsque vous accueillez un visiteur dans votre salon, est-ce que vous accepteriez qu'il change les meubles, qu'il change la couleur des murs et qu'il vous dise, au bout de quelques années, que vous pouvez sortir de votre maison parce que désormais elle lui appartient? On appelle cela du vol. Et c'est ce qu'on a fait lorsqu'on est arrivés. Tout ce qu'on doit faire, à l'heure actuelle, c'est restituer un tant soit peu une assise territoriale, respecter les nations autochtones, respecter le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, négocier de bonne foi de nation à nation l'exercice de cette autonomie gouvernementale, et non pas en arriver à dire que s'il y a des incompatibilités entre les lois adoptées par les nations autochtones, a fortiori dans des domaines municipaux, ce sont les lois fédérales qui primeront.

    Quelle différence y a-t-il entre cette attitude, que l'on retrouve dans ce projet de loi, et l'attitude qu'on a eue depuis les 130 dernières années, faisant en sorte de sortir le propriétaire de sa maison, de son salon, alors qu'il avait accueilli les Européens à bras ouverts lorsque ces derniers sont arrivés? Quelle différence y a-t-il? Quelle différence y a-t-il entre faire ça et donner supposément le pouvoir de législation aux nations...?

À  +-(1055)  

[Traduction]

+-

    Le président: Merci, monsieur Loubier.

    Monsieur Martin, vous avez la parole.

+-

    M. Pat Martin: Monsieur le président, il devient très clair à mes yeux que nous ne faisons pas notre travail dans ce comité, car nous ne prêtons pas à ces questions l'attention qu'elles méritent. Nous ne les soumettons pas à un débat exhaustif, et j'entends par là un échange. Il semble exister beaucoup d'opinions sur ces clauses d'un côté de la table et très peu de participation ou d'intervention venant de l'autre côté. Nous avons l'obligation, le devoir, de notre côté, d'au moins donner voix aux points de vue portés à notre attention par les Autochtones, car ils n'ont pas de siège à ce comité, ils sont exclus du processus.

    Nous n'avons même pas de participation des députés d'en face, même sur des sujets d'aussi grand poids et importance. Par exemple, je rappelle encore une fois que nous avons glissé sur la question soulevée par M. Vellacott, celle des droits de propriété matrimoniaux, etc. Nous avons sauté par-dessus. Le moment où l'on pouvait traiter de cet aspect est passé, rien n'est réglé et nous n'avons même pas eu un débat complet et libre. C'est précisément ce que souhaitait le ministre.

    Le ministre a envoyé une lettre au Comité sénatorial permanent des droits de la personne avec cette demande officielle. Il demande au comité d'entreprendre une étude de l'interaction entre la législation provinciale et fédérale s'agissant de la séparation des biens matrimoniaux, tant personnels qu'immobiliers, dans les réserves et plus particulièrement l'exécution des ordonnances judiciaires. Il lui demande d'examiner la pratique en matière d'attribution des terres et plus particulièrement les modes de répartition coutumiers. Il lui demande d'examiner la distribution des biens immobiliers à la dissolution d'un mariage ou d'une union de fait et de proposer des solutions susceptibles de concilier les intérêts individuels et communautaires. Il demande au Sénat de faire notre travail et de lui présenter un rapport au plus tard le 27 juin 2003.

    Comment se fait-il que l'on sape notre autorité ou que l'on nous prive de nos fonctions, en ce sens que ce comité n'a exprimé nul intérêt pour ces questions de fond, alors même que nous avons été élus et placés dans ce comité par nos partis pour faire précisément cela? On sape notre autorité en nous contournant et en faisant faire le travail par des sénateurs non élus.

    D'ailleurs, le comité saisi a décidé qu'il était soit trop occupé, soit qu'il ne voulait pas faire le travail et s'en est déchargé. Il s'en est déchargé sur le Comité sénatorial des affaires indiennes et... Je ne me souviens pas du nom complet de ce comité des affaires indiennes.

    Il y a même un débat entre sénateurs sur la question de savoir s'ils devraient accepter ce mandat. Ils ne sont pas ravis de se retrouver avec ce fardeau sur le dos. Les uns disent qu'ils n'ont pas le temps, les autres qu'il s'agit d'une abrogation des responsabilités ailleurs. Le sénateur Kinsella a indiqué que les honorables sénateurs ont parfaitement conscience des énormes ressources dont disposent les ministères et dont les parlementaires sont démunis. Il dit que le budget du ministère des Affaires indiennes et du Nord est immense et que le ministère pourrait entreprendre ces études sans même l'égratigner.

    Le ministre, dans sa lettre, explique en grand détail les aspects qu'il aimerait voir étudiés, sur la base de l'étude effectuée par Mme Cornet dans le document de discussion intitulé «Les biens immobiliers matrimoniaux dans les réserves», soit le document même auquel nous allions accorder une attention spéciale dans ce comité.

    Je me demande dans ces conditions ce que nous faisons là, à part donner un aval automatique aux souhaits du ministre, puisque le moindre sujet controversé nous est enlevé et confié au Sénat afin qu'il s'amuse avec et, franchement, pour que le sujet sombre dans l'oubli car le 27 juin, le Parlement ne siégera même plus, ayant ajourné pour l'été.

    Avec un peu de chance, le Parlement aura même ajourné nettement plus tôt, car le premier ministre tend cette carotte à son caucus pour lui faire accepter le projet de loi sur les contributions financières électorales. Il sera intéressant de voir ce qu'il adviendra de ce projet de loi-ci, si tout d'un coup l'intérêt du premier ministre est transféré de ce projet de loi vers celui sur le financement des élections qu'il veut faire passer en force, s'il est obligé de soudoyer les députés de son propre caucus en leur promettant de les laisser partir plus vite s'ils ne retiennent pas le projet de loi sur les finances électorales. Si vous êtes sages, les vacances scolaires viendront plus vite.

Á  +-(1100)  

    C'est peut-être la meilleure chose qui pourrait arriver avec ce projet de loi aussi, car nous rentrerons chez nous pour l'été et d'ici que nous revenions à l'automne, le Parti libéral sera tellement occupé par sa campagne à la direction du parti que tout le monde aura oublié ce projet de loi. La durée d'attention de la Chambre des communes est tellement courte que l'on pensera à autre chose. C'est le mieux que l'on puisse espérer.

    Je demande aux membres de se demander s'il est bien approprié de prendre un aspect qui fait si manifestement partie de l'étude que nous effectuons concernant la Loi sur les Indiens et de le confier à des sénateurs non élus, qui vont s'en servir pour se faire mousser, et reviendront avec une recommandation. Celle-ci prendra-t-elle la forme d'un projet de loi distinct ou d'un sous-élément de cette loi?

    On commence à tronçonner les projets de loi—les projets de loi C-15A et C-15B—parce que dès qu'un aspect devient trop controversé, on le retranche, on l'envoie au Sénat qui réintroduit la mesure à titre de projet de loi «S». Eh bien, tout projet de loi qui commence par «S» au lieu de «C» est dénué de légitimité, à mon avis, car il est le fait de gens non élus, désignés.

    Je cite cela comme exemple de manquement à notre devoir de député, autour de cette table. Il y a d'abord l'incapacité à faire notre travail correctement, par manque d'information et de documentation. Nous n'avons pas les ressources voulues, en dépit de nos demandes. Lorsqu'on nous refuse l'information dont dispose le gouvernement, nous ne pouvons pas participer ni faire correctement notre travail.

    Je ne peux même pas dans ces conditions défendre les invités qui nous regardent. Ce n'est un secret pour personne que j'essaie d'être le véhicule pour amener les enjeux autochtones à cette table; c'est toute la raison d'être de ma présence à cette table. Mais je ne peux même pas faire ce travail correctement. Je ne peux adéquatement défendre les citoyens canadiens à cette table si je ne dispose pas des mêmes renseignements que d'autres.

    J'aimerais simplement qu'il y ait assez de membres autour de cette table qui aient le courage de faire ce qu'ont fait ceux du Comité des opérations gouvernementales en refusant de poursuivre leur étude du projet de loi C-25 jusqu'à ce que le gouvernement leur transmette toute la documentation et les avis juridiques pertinents.

    Nous devrions suspendre nos travaux. Nous devrions suspendre notre étude de ce projet de loi au moins jusqu'à ce que nous soyons complètement informés du contenu des avis juridiques donnés au gouvernement. Il est mal de continuer dans ces conditions. Cela ne fait que trivialiser le problème et c'est une atteinte à mon privilège en ce sens que l'on me refuse l'information dont j'ai besoin pour représenter mes électeurs. C'est une insulte.

    D'aucuns ont soulevé un autre problème encore concernant le coût connexe. Il est déjà irresponsable que nous envisagions de dépenser 550 million de dollars initialement, et de distribuer ensuite des chèques en blanc, à toutes fins pratiques, tirés sur l'argent du contribuable. Mais surtout, c'est de l'argent qui devrait servir à satisfaire les besoins fondamentaux des collectivités autochtones. Si cet argent va provenir du budget de base—et il semble que ce sera précisément la source, ce ne sont pas des crédits nouveaux—imaginez quels services on pourrait payer avec ces 550 millions de dollars. Peut-être faudrait-il donner priorité à une campagne pour doter toutes les collectivités autochtones de l'eau potable au lieu qu'elles soient obligées de faire bouillir leur eau comme les y engagent les ordonnances sanitaires que l'on voit proliférer à travers le pays.

    Qui sait ce que nous pourrions faire? Nous pourrions organiser une campagne d'éradication de l'épidémie de diabète qui frappe les Autochtones dans le nord de ma province. Ces 550 millions de dollars pourraient servir à un nombre infini de choses. Cette mesure n'en fait pas partie.

    [Applaudissements]

    M. Pat Martin: Nous avons l'obligation, en tant que parlementaires, d'examiner les avantages de toute dépense publique que nous décidons. Le temps que j'ai passé au Comité des comptes publics m'a enseigné une bonne leçon concernant notre obligation et notre devoir d'être les gardiens des deniers publics.

    Sur une simple lubie du ministre, nous allons dépenser 550 millions de dollars pour imposer et faire avaler de force ces mesures alors que les Autochtones ont dit très clairement qu'ils n'en voulaient pas et y sont totalement opposés. Qu'y a-t-il de plus condamnable moralement?

    Monsieur le président, puisque j'imagine que c'est le chant du cygne de ma motion cherchant à amender l'article 16...

Á  +-(1105)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Martin.

    Nous allons procéder au vote.

    Nous essayons de voter, je vous prie : vote par appel nominal sur l'amendement NDP-38, page 132. Tout le monde m'a-t-il entendu?

    (L'amendement est rejeté par 8 voix contre 3)

    Des voix: Honte! Honte!

    Le président: Nous en sommes à l'amendement G-7, page 133.

    Monsieur Hubbard.

Á  +-(1110)  

+-

    M. Charles Hubbard: Merci, monsieur le président.

    Très brièvement, l'amendement G-7 concerne l'élimination des déchets et...

    Cela amuse mon collègue.

    Lorsqu'on parle aux Autochtones, on constate que l'attitude de la plupart envers non seulement leur propre terre, mais tout l'environnement, figure parmi les plus exigeantes que l'on trouve dans ce pays. On a d'ailleurs souvent dit que ce qui compte le plus pour un Autochtone, s'agissant du territoire, n'est pas ce qu'il reçoit de ses parents, mais ce qu'il lègue à ses enfants.

    Avec l'amendement G-7, nous cherchons à assurer, s'agissant des textes législatifs pris en vertu de ce projet de loi—et nous parlons là de lois habilitantes sur divers aspects—que les intérêts des Autochtones soient protégés à long terme.

    Nous pouvons demander les explications de nos experts, mais sur le plan juridique, cet amendement précise que les règlements en vertu de la Loi sur les Indiens s'appliqueront jusqu'à ce que les conseils de bande édictent de nouvelles lois, c'est-à-dire que cette partie de la Loi sur les Indiens s'appliquera jusqu'à ce que les nouveaux codes soient ratifiés par le chef et le conseil.

    Peut-être Paul pourrait-il donner d'autres explications.

+-

    M. Paul Salembier (avocat-conseil, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien): Certainement. Pour compléter vos propos, qui sont importants...

+-

    Le président: Excusez-moi, monsieur Salembier.

    Je vais suspendre la séance jusqu'au rétablissement des règles de convenance dans cette salle.

Á  +-(1112)  


Á  +-(1121)  

+-

    Le président: Espérant que l'ordre est rétabli, nous reprenons avec M. Loubier.

[Français]

+-

    M. Yvan Loubier: Monsieur le président, je vous remercie de m'accorder la parole et d'avoir jugé que le décorum était revenu. Le décorum est disparu quelques fois, mais pas nécessairement à cause de l'assistance; c'était plutôt à cause de certaines personnes autour de la table. Mais je vous sais gré de nous aider à poursuivre nos travaux pour améliorer les dispositions du projet de loi C-7 qui sont dévastatrices pour les nations autochtones.

    Quand j'ai vu l'amendement G-7 du gouvernement, je me suis dit que c'était le premier amendement de fond que le gouvernement mettait sur la table, parce que depuis le début, c'était des amendements techniques, des amendements visant à améliorer l'anglais ou le français ou des choses comme ça. Je m'aperçois que c'est le premier amendement de fond. Ce qui me fatigue, cependant, c'est que le premier amendement de fond du gouvernement porte sur l'élimination des déchets. C'est incroyable. Le gouvernement, malgré tout ce qu'on a pu faire comme analyse des besoins des nations autochtones, de leur droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, propose comme premier et seul argument de fond, après avoir consulté les premières nations, selon ce qu'il dit, et après avoir pris acte de leurs besoins et de ce qui est nécessaire pour elles pour qu'elles puissent se reconstruire, un amendement de fond sur l'élimination des déchets.

    Je pense que la meilleure façon d'éliminer les déchets, dans le débat qui nous préoccupe, serait de jeter ce projet de loi à la poubelle. On éliminerait ainsi un déchet assez incroyable, en partant. Alors, si vous avez vraiment comme préoccupation d'éliminer des déchets, je vous propose de détruire le projet de loi C-7. Vous aurez déjà fait une belle contribution pour assainir le paysage politique et protéger l'environnement politique qui devrait nous conduire à de meilleures relations, à un véritable partenariat entre le gouvernement fédéral et les nations autochtones. Je pense que ce serait le meilleur amendement que vous pourriez apporter à l'environnement politique actuel, qui est vicié par une idée que vous vous faites d'une conception étriquée des relations qui doivent exister entre les nations autochtones et le gouvernement fédéral.

    J'entendais un collègue libéral que je ne nommerai pas parce que ce n'est pas dans mes habitudes, moi, de faire des attaques personnelles, qui disait que c'était un argument pour améliorer l'environnement. Voilà le désir du bon gouvernement libéral qui a toujours raison puisqu'il vote toujours contre nos amendements. Voilà la bonne idée du gouvernement fédéral qui se préoccupe de l'environnement, et c'est quelque chose qui a été véhiculé même par les membres des premières nations qui ont comparu devant nous. Mais si c'est si vrai qu'on se préoccupe de l'environnement des premières nations, alors pourquoi n'a-t-on pas négocié de bonne foi avec les premières nations leur autonomie gouvernementale, qui aurait pu contenir une pleine juridiction en matière d'environnement, plutôt que de dire des sornettes et de dire que cela démontre que le gouvernement fédéral est flexible et qu'il donne aux nations autochtones le pouvoir de protéger leur environnement? Donner des pouvoirs à un troisième ordre de gouvernement, c'est-à-dire parler des pouvoirs d'un troisième ordre de gouvernement en matière de protection de l'environnement, c'est écrire comme tel, dans une entente négociée de nation à nation, que dorénavant, puisqu'on doit respecter le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale des nations autochtones, ces dernières auront pleine juridiction en matière d'environnement sur leur territoire.

    Qu'on ne vienne pas nous dire que le fait d'avoir un amendement comme celui-là démontre qu'on se préoccupe de la juridiction des nations autochtones en matière de protection de l'environnement et qu'on répond ainsi à leur principale préoccupation.

    Il faut faire attention. Je crois que si c'est volontaire, c'est bien malhabile que de présenter les choses comme ça. Si c'est involontaire, c'est une autre histoire. Si on présente des choses comme ça de façon involontaire et que l'on prétend, sous le couvert d'arguments sérieux, que c'est ce qu'on veut faire, eh bien, il y a un problème plus profond, un problème d'incompréhension totale par rapport à ce que les nations autochtones veulent et ont le pouvoir de faire en vertu du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale confirmé par tous les jugements de cours des 20 dernières années.

Á  +-(1125)  

    Alors, si on dit que les nations autochtones ont un certain pouvoir en matière de gestion de l'environnement, ce qu'il faut écrire dans le projet de loi, c'est que les nations autochtones ont pleine juridiction à tous égards quant à la protection de l'environnement.

    Si c'est vrai qu'on veut leur donner l'autonomie gouvernementale en matière de développement économique... Premièrement, on ne leur donne rien, mais si on veut qu'elles exercent leur autonomie gouvernementale en matière de développement économique, il faut écrire dans une entente de nation à nation qu'elles ont pleine juridiction en matière de développement économique sur le territoire où elles sont souveraines.

    On dit qu'elles ont juridiction et qu'on se soucie de la culture autochtone. Si c'est vrai, cela veut dire que l'exercice de leurs compétences en matière de culture, comme troisième ordre de gouvernement, doit être entier, c'est-à-dire qu'elles doivent avoir pleine juridiction sur leur territoire et même en dehors, même sur la scène internationale, lorsqu'on parle de l'extension des compétences internes pour promouvoir leur culture. L'extension des compétences internes, la thèse de Gérin-Lajoie il y a quelques années, tient autant pour la nation québécoise que pour les nations autochtones. Si elles ont pleine juridiction sur leur culture à l'interne parce qu'elles ont un droit à l'autonomie gouvernementale qui leur est reconnu, elles peuvent exercer cette juridiction dans leurs champs de compétences à l'extérieur, pour faire la promotion de leur culture, pour faire la promotion de ce qu'elles sont et pour faire la promotion de leur langue, qui est une langue spirituelle qui est belle à entendre et qui constitue une richesse des nations, et non pas quelque chose qui devrait être mis de côté parce que les langues officielles sont le français et l'anglais. Les langues autochtones sont belles et sont une richesse culturelle.

    Si c'est vrai qu'on leur donne certains pouvoirs--d'ailleurs, il ne faut rien leur donner; elles ont le pouvoir--, si c'est vrai qu'on leur permet l'exercice de leur droit inhérent à l'autonomie gouvernementale en matière de famille, il faut écrire dans un traité dûment signé, dûment négocié entre nations souveraines, qu'elles ont pleine juridiction en matière de politique familiale sur le territoire où elles exercent cette autonomie gouvernementale, pas autrement. C'est la seule façon de procéder, la seule façon qui nous permettra de prétendre avoir de véritables ententes d'autonomie gouvernementale et un respect pour la dignité des nations autochtones.

    Si on dit aussi qu'elles vont avoir un pouvoir sur le transport, il faut que soit écrit dans l'entente que les nations autochtones ont pleine juridiction en matière de transport et qu'elles peuvent signer des accords avec le Canada, avec les États-Unis et avec d'autres en matière de transport et de passage sur leur territoire. C'est leur droit. Si on leur remet le territoire qu'elles revendiquent et si elles ont pleine juridiction en matière de transport, elles doivent exercer ces juridictions sans demander la permission au gouvernement fédéral. C'est là la base essentielle de l'exercice du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale.

    Si, selon vos dires, on doit leur concéder d'autres pouvoirs, alors qu'on n'a pas à leur concéder de pouvoirs puisqu'elles possèdent déjà ces pouvoirs, il faut les reconnaître maintenant. Si on doit traiter du pouvoir des nations autochtones sur le développement des jeunes sur leur territoire, ce qui est une catastrophe parce qu'on a laissé cela au gouvernement fédéral...

[Traduction]

+-

    Le président: Merci, monsieur Loubier.

    Y a-t-il quelqu'un d'autre?

    Monsieur Martin.

Á  +-(1130)  

+-

    M. Pat Martin: Monsieur le président, je remercie mon ami M. Loubier de ses propos. Il a une façon succincte de résumer le tableau d'ensemble et il le fait avec une telle économie de paroles, en sus. C'est un plaisir de voir quelqu'un présenter des arguments et des pensées complexes et abstraites en une présentation relativement courte qui saisit nombre des problèmes que ce projet de loi évacue.

+-

    Le président: Monsieur Martin, je n'ai pas souvent fait d'interjection, mais je voudrais aussi féliciter les interprètes, car ce sont leurs mots que vous entendez.

+-

    M. Pat Martin: C'est une observation très judicieuse, monsieur le président. Merci, vous avez raison. Il faudrait donner un prix aux traducteurs qui ont la tâche pénible d'essayer de suivre ce comité.

    Monsieur le président, j'ai essayé d'exprimer mon mécontentement concernant l'article 16. Nous avons essayé de proposer ce que nous pensions être des amendements judicieux, des amendements utiles pour répondre aux nombreuses préoccupations exprimées par les représentants des Premières nations. Je suis déçu que le gouvernement ait jugé bon de voter contre les amendements constructifs et judicieux que nous avons déposés, tout en présentant ses amendements propres à ce même article.

    Le gouvernement ne prétend donc pas que l'article 16 n'a pas besoin d'être amendé et revu, simplement qu'il va le faire à sa propre manière, sans se préoccuper de ce que pensent les autres. Cela devient réellement un exercice tellement unilatéral, monsieur le président, qu'il devient frustrant pour moi, un député et représentant du peuple, de participer plus avant à un simulacre aussi futile.

    Il semble que les députés de la majorité aient reçu leurs ordres. On leur a dit ce qu'ils devaient faire. Les députés du côté gouvernemental ne veulent pas entendre la raison, ni même l'avis de ceux qu'ils ont le devoir de représenter fidèlement. Autant je déplore que mes opinions ne soient pas appréciées par le comité, autant je suis indigné que les avis des nombreuses personnes qui ont pris la peine de comparaître soient aussi totalement négligés.

    [Applaudissements]

    M. Pat Martin: Nous avons des personnes ici aujourd'hui qui ont suivi nos travaux jusque tard dans la nuit d'hier et qui étaient de nouveau là à huit heures ce matin. Une personne que j'ai rencontrée récemment a fait neuf heures de route, par auto-stop, pour venir participer ici, à ses propres frais, et cette personne est toujours là dans l'espoir de pouvoir faire connaître ses opinions et que le comité en tiendra compte.

    Imaginez combien cela est décevant pour quelqu'un qui vient ici, en dernier recours et en pensant pouvoir participer au processus, de se voir débouter à chaque tournant par un gouvernement têtu qui suit un programme qui n'a rien à voir avec l'instauration de l'autonomie gouvernementale ou la reconnaissance des droits inhérents des peuples autochtones à se gouverner eux-mêmes.

    Des gens sont venus me dire que si le gouvernement veut parler de l'élimination des déchets, les Premières nations ne voudraient même pas chez elles dans leurs réserves du projet de loi C-7 car il est toxique. Ils le refuseraient comme déchet chez eux. Voilà quelle a été la réaction au projet de loi C-7 dans tout le pays. Il est devenu un point de ralliement, en fait.

    Ce projet de loi a réveillé un géant endormi, soulevant une vague de mécontentement et engendrant un consensus et une unanimité comme on n'en a pas vus depuis le Livre blanc de 1969. Il a suscité un niveau de rancoeur et d'animosité dont on n'est pas sûr de pouvoir les contenir, une fois déchaînés, et qui risquent de rendre tout véritable dialogue impossible pendant de nombreuses années.

    Je mets en garde les membres du comité. L'histoire nous a montré qu'une fois commis de tels dégâts, il faut une génération avant de pouvoir remettre le train sur les rails et avancer de nouveau vers l'émancipation du peuple autochtone, ce qui doit tout de même être notre objectif ultime ici.

    Aussi, sachant ce que nous savons maintenant, la seule chose responsable à faire serait de cesser d'essayer d'amender ce projet de loi et de tout simplement le retirer. Annulez le projet de loi. N'allez pas plus loin. Ne gaspillez pas un dollar de l'argent du contribuable pour essayer de mettre en oeuvre ces changements dont nul ne veut. Les gens se sont exprimés avec véhémence contre eux. Un problème secondaire est que ces changements coûteront des centaines et des centaines de millions de dollars, qui seront gaspillés. Autant jeter cet argent dans les toilettes et tirer la chasse d'eau, car il ne va servir à rien.

    Encore une fois, je suis déçu que le seul amendement à l'article 16 que je puisse voir adopté soit celui du gouvernement. Il a manipulé tout ce processus de la même manière qu'il a manipulé la rédaction du projet de loi lui-même, de telle façon que le ministre gagne à tous les coups car c'est lui qui rédige les règles du jeu.

Á  +-(1135)  

    Malheureusement, il m'est apparu à l'évidence il y a déjà bien longtemps qu'il n'y a aucun espoir de voir gagner la raison ou la logique dans ce débat, qu'il ne sert à rien de raisonner avec la partie gouvernementale et tenter de concevoir un projet de loi qui réponde réellement aux besoins, espoirs et aspirations des gens dans les communautés.

    Nous avons abordé ce travail avec espoir et optimisme, et même avec bonne foi. J'ai dit à quelques députés du côté libéral que lorsque le ministre s'est levé la première fois à la Chambre des communes pour déposer ce projet de loi, je me suis levé pour répondre et dire ma satisfaction devant cette occasion de participer pleinement. Je lui ai parlé en privé ensuite, disant que j'étais réellement ravi de voir ce projet de loi car c'est un sujet qui m'intéresse beaucoup. J'étais heureux à l'idée que nous allions pouvoir modifier la Loi sur les Indiens.

    Je n'avais pas encore vu le projet de loi alors. Imaginez ma déception, et imaginez la déception en pays indien. On rouvre la Loi sur les Indiens, pour la première fois depuis une génération, et voilà ce que l'on nous propose : non les mesures de fond demandées, mais des choses qui sont très loin sur la liste des priorités des Autochtones, qui n'apparaissent même pas à l'écran radar.

    Les meilleurs esprits du côté gouvernemental ont entamé une réflexion sur ce qui n'allait pas avec ce projet de loi. On nous avait aussi donné l'assurance, en quelque sorte, que nous pourrions apporter quelques amendements conséquents puisque ce projet de loi nous est envoyé en première lecture. Eh bien, les meilleurs esprits du côté gouvernemental, après avoir longtemps réfléchi aux lacunes de ce projet de loi, n'ont rien trouvé d'autre que ce détail mineur, sans conséquence, à l'article 16. Leur amendement n'a rien à voir avec les nombreuses sources de friction dans ce projet de loi que nous avons cherché à expliquer et que 191 témoins ont clairement décrites.

    Ils tripatouillent des choses mineures, des détails insignifiants. Sans vouloir trivialiser totalement le sujet, je suis sûr que l'élimination des déchets dans les réserves est une question d'importance, mais elle pâlit comparée aux problèmes prioritaires mis en lumière, non seulement par les nombreux témoins, mais par nous-mêmes, les députés de l'opposition.

    Nous sommes frustrés de voir que l'article 16 ne couvre pas des aspects conséquents tels que l'éducation et la justice, alors même que nous savons que des développements intéressants à cet égard sont en cours dans tout le pays. Dans la province du Manitoba, nous avons eu l'enquête minutieuse sur le traitement des Autochtones par le système judiciaire, suite au meurtre de J.J. Harper et à celui d'Helen Betty Osbourne, des affaires que les citoyens décents ne pouvaient plus ignorer et tolérer.

    La province elle-même s'est sentie obligée de mener une étude approfondie sur le traitement injuste infligé par le système judiciaire aux Autochtones. Le rapport contenait un grand nombre de recommandations intelligentes, donc certaines sont actuellement mises en oeuvre par le gouvernement néo-démocrate fraîchement élu de la province.

    Mais le projet de loi est aveugle à tous ces projets en cours et refuse de prendre en considération les solutions autochtones aux problèmes de justice. Ces pouvoirs devraient figurer dans la liste des pouvoirs législatifs énoncés à l'article 16.

    Je me souviens que lorsque j'habitais au Yukon, certaines des premières expériences en la matière ont été le fait du premier magistrat du Yukon, Edith Josie, d'Old Crow.

+-

    Le président: Je crains que nous n'en entendions pas plus sur votre vie au Yukon. Merci.

    Monsieur Hubbard, le mot de conclusion.

Á  +-(1140)  

+-

    M. Charles Hubbard: Très brièvement, monsieur le président, j'attendais d'apprendre, dans la péroraison de l'honorable député, s'il est ou non en faveur de cet amendement.

+-

    Le président: Souhaitez-vous une suspension de la séance? Si vous voulez poursuivre en dépit du bruit, nous pouvons le faire.

+-

    M. Charles Hubbard: Je pense qu'il vaut mieux continuer.

    Après avoir écouté pendant dix minutes pour le savoir, je ne sais toujours pas s'il est en faveur ou non de cet amendement, qui protège les terres des Premières nations. Mais nous le saurons peut-être lorsqu'il sera mis aux voix. Monsieur le président, je propose que vous procédiez au vote.

+-

    Le président: Êtes-vous prêts à voter à main levée?

    (L'amendement est adopté)

    Le président: L'article 16 modifié est-il adopté?

[Français]

+-

    M. Yvan Loubier: Écoutez, c'est juste un rappel au Règlement.

+-

    Le président: Un rappel au Règlement.

+-

    M. Yvan Loubier: Quand vous parlez uniquement en anglais et rapidement comme ça, avant que j'aie l'interprétation en français, vous avez déjà agi. Je n'ai pas encore eu l'interprétation française que vous commencez à voter. Cela n'a aucun sens. Je vais vous demander de procéder lentement pour que j'aie le droit, comme francophone, de savoir que je peux vous demander encore un vote par appel nominal. Cela fait plusieurs fois que vous me faites le coup; vous ne me le referez pas une autre fois.

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur Loubier, je laisse le temps, mais par courtoisie, les autres membres me font signe qu'ils acceptent un vote par appel nominal. Nous allons donc tenir un vote par appel nominal. Mais auparavant...

[Français]

+-

    M. Yvan Loubier: J'ai un rappel au Règlement, monsieur le président. Vous venez de me dire, comme francophone, qu'on perd notre temps à traduire en français ce que vous dites en anglais. C'est ce que vous êtes en train de me dire? Vous m'enlevez mes droits.

[Traduction]

+-

    Le président: Coupez-lui son microphone, je vous prie. Nous aurons un vote par appel nominal.

    Des voix: Honte! Honte!

    Le président: Ce sera un vote par appel nominal sur l'article 16 modifié.

    (L'article 16 modifié est adopté par 7 voix contre 2)

    Le président: Monsieur Hubbard, avez-vous un rappel au règlement?

+-

    M. Charles Hubbard: Je propose de lever la séance aujourd'hui après les délibérations sur l'article 17.

+-

    Le président: J'ai une motion d'ajournement après l'article 17.

    (La motion est adoptée)

    (Article 17—Textes législatifs pour les besoins de la bande)

    Le président: Amendement BQ-32. Monsieur Loubier.

[Français]

+-

    M. Yvan Loubier: J'essaie de faire avec cet amendement ce que j'ai essayé de faire avec tous les autres amendements que j'ai présentés depuis le début de l'analyse de ce projet de loi qu'on dit vouloir améliorer de l'autre côté de la Chambre, mais je m'aperçois que même lorsqu'on propose des améliorations notoires, les libéraux sont complètement bouchés. Ils ont les oreilles complètement bouchées et ne voient pas plus loin que le bout de leur nez puisqu'ils votent toujours contre des motions de fond qu'on présente justement pour améliorer le projet de loi. On nous dit d'un côté qu'on veut l'améliorer, mais lorsqu'on présente des amendements en ce sens, rien n'est accepté.

    Ce que j'essaie de faire avec cet amendement, c'est qu'on reconnaisse, dans le coeur du projet de loi C-7 qu'on nous présente, la première assise de l'expression de l'autonomie gouvernementale des autochtones, c'est-à-dire le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale des autochtones et tout ce qui en découle. Nulle part dans le coeur du projet de loi, à un autre endroit que dans le préambule, on ne reconnaît le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. Et a fortiori, si on avait reconnu ce droit inhérent à l'autonomie gouvernementale à l'intérieur des articles du projet de loi, on aurait été obligé de dire que ce qu'on doit concéder, ce ne sont pas des demi-pouvoirs, mais des pouvoirs qui sont entiers et qui sont dévolus à un troisième ordre de gouvernement, et non pas une tentative de municipaliser les premières nations comme on tente de le faire avec le projet de loi C-7.

    Tout à l'heure, j'ai entendu certains collègues dire que plus loin, il y avait justement...

Á  +-(1145)  

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur Loubier, souhaitez-vous continuer avec tout le bruit, ou bien préférez-vous suspendre la séance jusqu'à ce que le silence soit rétabli?

[Français]

+-

    M. Yvan Loubier: Oui, bien sûr, je veux continuer.

[Traduction]

+-

    Le président: Si vous voulez continuer avec le bruit, je vous en prie.

[Français]

+-

    M. Yvan Loubier: Non, non, monsieur le président. Je ne veux pas continuer avec du bruit, je veux continuer pour qu'on me comprenne.

[Traduction]

+-

    Le président: Pourrais-je demander aux personnes de l'auditoire de respecter M. Loubier pendant qu'il parle? Je crois savoir qu'il est maintenant un parent. Vous pouvez lui faire cette courtoisie.

[Français]

+-

    M. Yvan Loubier: Vous voyez, on peut s'amuser quelquefois au comité. Ce n'est pas toujours la chicane.

    Tout à l'heure, d'une oreille distraite, j'entendais dire qu'on allait voir plus loin qu'il y avait des pouvoirs vraiment dévolus à un troisième ordre de gouvernement qui ne sont pas des demi-pouvoirs. Or, on arrive à l'article 17, et en regardant les pouvoirs, je me dis que la protection et la conservation des ressources commencent à ressembler un peu à la protection de l'environnement et à la protection des ressources des territoires des nations autochtones.

    Je me mets à regarder chacun des objets et non seulement j'ai des surprises à toutes les énumérations, mais j'ai une surprise globale à la fin, lorsqu'on dit que les dispositions de toute loi fédérale ont préséance, encore une fois, sur la législation que l'on pourrait adopter sur le territoire autonome où les premières nations exercent leur droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. Il y a un hic. Ce hic, c'est que si la législation va à l'encontre de celle du gouvernement fédéral, c'est celle du gouvernement fédéral qui primera, encore une fois. Donc, de façon générale, peu importe ce qu'on peut concéder comme pouvoirs, c'est toujours le fédéral qui a le dernier mot. Donc, in extenso, c'est le gouvernement fédéral qui va gérer le processus législatif.

    Si c'est l'intention des premières nations, qu'on dit dotées d'un droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, de prendre un texte législatif qui va dans un certain sens parce que c'est le désir des membres des premières nations de ce territoire-là d'aller dans ce sens-là, il va falloir, nécessairement, que l'on consulte le gouvernement fédéral pour s'assurer qu'il n'existe pas de lois fédérales qui pourraient contrevenir au désir des premières nations. Alors, là, ça ne marche pas. On ne peut pas donner une pleine autonomie gouvernementale, reconnaître le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale et, en même temps, dire qu'il faut que cela soit conforme à nos lois et à nos visions, conforme à ce que l'on présente dans différents domaines, dont ceux de la protection des ressources, du transport et autres.

    Le deuxième gros problème que l'on retrouve un peu partout dans ce qu'on dit vouloir concéder en matière législative dans des secteurs particuliers... Je vous donne juste un exemple. L'alinéa 17(1)a) dit:

17. (1) Le conseil peut prendre des textes législatifs pour les besoins de la bande concernant:

a) la protection et la conservation des ressources naturelles dans la réserve, ainsi que leur disposition,

Mais écoutez bien ce qui suit:

...à l'exception de la faune et des poissons ou de celles dont il ne peut être disposé qu'en conformité avec une cession faite en vertu de la Loi sur les Indiens...

    Donc, on concède quelque chose, mais on leur enlève ce quelque chose dans les lignes suivantes. On leur dit qu'il y a des exceptions en ce qui concerne la faune et les poissons. Quand il y a des activités traditionnelles à pratiquer, comme on a pu le voir dans le dossier des négociations avec les Innus, si vous enlevez la souveraineté des nations autochtones sur des territoires de chasse et de pêche, qu'est-ce que vous leur laissez comme souveraineté pour pouvoir se livrer à leurs pratiques ancestrales?

    Un autre exemple. À l'alinéa 17(1)c), on dit que le conseil peut prendre des textes législatifs pour les besoins de la bande concernant:

c) la préservation de la culture et de la langue de la bande;

    Encore une fois, si les premières nations avaient attendu après le gouvernement fédéral pour préserver leur langue et leur culture, cela ferait longtemps qu'elles auraient tout perdu. Elles auraient tout perdu au départ. Mais ce n'est pas là que le bât blesse. C'est que la préservation de la culture et de la langue de la bande est assujettie aussi au paragraphe 17(2), à la fin, où on dit:

(2) Les dispositions de toute loi fédérale ou d'un règlement pris en vertu de la présente loi ou de la Loi sur les Indiens l'emportent sur les dispositions incompatibles d'un texte législatif pris en vertu du présent article. 

    Qu'est-ce que cela veut dire? Cela veut dire que même si une première nation adopte une mesure législative pour préserver sa langue et sa culture, il faut que cela soit vraiment fait en conformité avec les lois fédérales parce que sinon, elle ne peut exercer cette prérogative en matière de préservation de la culture.

    Mais il y a un autre problème quant à cet article particulier, et cela découle justement du fait qu'en partant, à l'article 17, on n'a pas reconnu le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, qui est essentiel à toute compréhension, à tout ce qui découle aussi au niveau des négociations, des pouvoirs, de l'exercice des pouvoirs des premières nations en fonction de ce droit. Il ne faut pas parler uniquement de la préservation de la culture et de la langue de la bande. Comme je le mentionnais plus tôt, toute culture et toute langue, a fortiori la culture des nations autochtones, doit non seulement être préservée, elle doit aussi être apprise au reste du monde, parce que c'est une richesse incroyable dont l'humanité ne peut pas se passer.

Á  +-(1150)  

    Depuis des années, on a un long débat sur le plan international au sujet de la diversité culturelle. On dit qu'avec la mondialisation, la globalisation des marchés, on est en train de perdre des personnalités culturelles internationales, et là, parce qu'il y aurait un blocage au niveau de la promotion des langues et des cultures autochtones sur le plan international, on priverait les premières nations d'un pouvoir de préserver leurs langues et leurs cultures, chose qu'elles ont faite de peine et de misère parce qu'elles n'ont pas eu d'aide du gouvernement, mais pas du tout. Au contraire, on les a écrasées pour qu'elles oublient leurs langues et leurs cultures et entrent dans un moule de type européen. C'est ce qu'on a fait avec la Loi sur les Indiens depuis 130 ans.

    En plus, on dit qu'on est généreux, car on permet aux premières nations d'établir des textes législatifs pour préserver leur langue et leur culture. Il n'y a pas de générosité là-dedans. Ce qui est tout à fait non généreux de la part du gouvernement, c'est de ne pas faire preuve d'intelligence, de ne pas utiliser une partie des neurones dont le Créateur nous a dotés pour réfléchir au fait que la préservation doit s'accompagner de la promotion des cultures et des langues autochtones sur le plan international.

    Mais cela ne doit pas être uniquement une espèce de règlement assujetti à la conformité aux lois fédérales. Il faut que ce soit des textes législatifs tout à fait autonomes et dignes d'un troisième ordre de gouvernement.

    Il me semble que ce serait simple d'être généreux intellectuellement. Je ne parle pas d'être généreux avec les pouvoirs qu'on concède, parce qu'on n'a pas à être généreux à cet égard-là. Les nations autochtones ont déjà des pouvoirs liés au droit inhérent à l'autonomie gouvernementale qui sont reconnus par de nombreuses cours, dont la Cour suprême du Canada. Celle-ci s'est prononcée en faveur du respect du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. L'ONU a exigé du gouvernement fédéral qu'il permette l'exercice de ce droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. Cela fait des années que ça se fait. On a même dénoncé le gouvernement canadien à plusieurs reprises parce qu'il ne respectait pas les prémisses et les articles précis de la Charte internationale des droits de l'homme.

    Quand va-t-on cesser de bafouer ces droits et libertés en même temps qu'on a des représentants élus du Parlement fédéral, comme le premier ministre, qui vont faire la promotion de la paix sur le plan international? Comment peut-on être promoteurs de la paix et des libertés alors qu'à l'intérieur même du pays, on se fait dénoncer à tour de bras par des organismes internationaux, par le Conseil de l'Europe aussi, parce qu'on n'est même pas capables de permettre l'exercice d'un droit reconnu par les cours de justice, qui est le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale donné par le Créateur aux premières nations?

    Est-ce qu'à un moment donné, quelqu'un va pouvoir vous convaincre d'ouvrir vos oreilles et de comprendre cette analyse de base, qui n'est pourtant pas difficile à comprendre? C'est une question de respect des droits, de respect des libertés et de respect de la dignité des personnes.

    D'ailleurs, il est tout à fait indigne, je l'ai dit hier soir et je le répète aujourd'hui, que moi-même, en tentant de défendre le droit inhérent des premières nations à l'autonomie gouvernementale, en tentant d'exprimer, comme porte-voix, leurs préoccupations et leur indignation face à vos gestes, je sois ici à leur place pour vous expliquer ce qu'elles pensent. J'ai honte, parce que ce sont eux et elles qui devraient être devant vous pour vous l'expliquer.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci, monsieur Loubier.

    Monsieur Martin.

+-

    M. Pat Martin: C'est déjà mon tour. Comme vous êtes gentil.

    Merci, monsieur le président, de la possibilité d'intervenir de nouveau sur ce projet de loi.

    Et merci à mon frère du Bloc de son travail acharné sur cette question. M. Loubier a déployé des efforts très diligents d'améliorer ce projet de loi. Je remarque que c'est là le 32e amendement du Bloc québécois à ce projet de loi et nombre d'entre eux posaient des principes de haute importance.

    Nous pensons que l'article 17 met en jeu les principes fondamentaux du projet de loi. Encore une fois, le but du renvoi du projet de loi à ce comité au stade la première lecture était justement que nous puissions réfléchir aux principes du projet de loi. Il devrait donc nous être possible de formuler des recommandations qui donnent le ton de ce projet de loi et énoncent les principes fondamentaux que nous souhaitons asseoir avec le projet de loi.

    Je trouve donc approprié qu'à la première ligne, au tout début de cet article, M. Loubier propose d'ajouter les termes qui font l'objet de son amendement, à savoir : «le droit inhérent existant des Autochtones à l'autonomie gouvernementale comprend le pouvoir législatif pour les besoins de la bande» et on retrouve ensuite le texte actuel, avec la liste des domaines dans lesquels le droit inhérent des Autochtones à l'autonomie gouvernementale est reconnu et autorisé.

    La différence entre le libellé proposé par M. Loubier et celui du projet de loi est que le second, à la première ligne de l'article 17, se contente de dire «Le conseil peut prendre des textes législatifs pour les besoins de la bande...» Eh bien, nous avons appris, je pense, au fil de l'évolution de notre compréhension de ces questions, que même des termes comme «bande» et «conseil» sont des constructions de la Loi sur les Indiens. Ils ne sont pas synonymes de nations. Ils ne reflètent pas la sensibilité culturelle au fait que le conseil de bande est une création de la Loi sur les Indiens, un concept européen de ce que devrait être cette structure dans les collectivités, une notion qui n'existait pas avant le contact.

    La sensibilité que M. Loubier apporte à ce débat consiste à faire valoir que nous devrions, chaque fois que possible, dans tout ce projet de loi, faire référence aux droits inhérents des Autochtones, de façon à réaffirmer ces droits et à ne laisser place à aucun doute quant à l'intention et la manière dont ces questions doivent être réglées.

    Monsieur le président, je suis particulièrement désireux de traiter de ces questions de principe générales. Peut-être peut-on les qualifier de principes abstraits associés à ce projet de loi, car franchement ce sont les détails, les aspects prescriptifs du projet de loi qui indignent tellement les Premières nations qui sont intervenues ici.

    Il y a dans ce textes des oublis frappants. On ne cesse de nous répéter qu'il n'y a rien dans un texte de loi qui ne soit pas intentionnel, mais ce me semble être un oubli ou une omission de la part des rédacteurs de celui-ci de ne faire nulle référence aux droits inhérents des Autochtones à se gouverner, ne serait-ce que pour rassurer les intéressés et leur montrer que nous avons conscience de l'existence de ces droits.

    Les invités présents aujourd'hui et les centaines de milliers d'Autochtones doivent parfois se dire que nous n'avons pas conscience de ces sensibilités. Si l'on peut juger un gouvernement sur ses actes, les actes de celui-ci témoigne d'un refus de reconnaître ces principaux fondamentaux, car les actes parlent plus haut que les mots.

    Aussi fleuri que soit le préambule d'un loi, ce qu'il faut mesurer, pour en déterminer la réussite ou l'échec, c'est l'exécution, le résultat final et l'expérience concrète.

Á  +-(1155)  

    Je fais valoir que la Loi sur les Indiens elle-même et son application ont été un échec lamentable. En effet, quel que soit l'étalon social ou économique que l'on emploie, la Loi sur les Indiens n'a été rien d'autre qu'un désastre social tragique. J'en vois la preuve dans la surreprésentation des Autochtones dans les prisons, dans le poids à la naissance des enfants autochtones du centre-ville de Winnipeg, ma ville. Tous ces indicateurs sont des déterminants primordiaux de la santé et du bien-être et des conditions sociales des Premières nations.

    Lorsque nous choisissons un libellé comme celui-ci proposé par M. Loubier, nous faisons aux Premières nations la courtoisie, du moins de notre côté, d'une certaine garantie montrant qu'il n'est pas de notre intention d'ignorer, contourner ou entamer le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. De fait, nous affirmons et réaffirmons dans ce projet de loi, en répétant aussi souvent que nécessaire, que nous ne tolérerons pas les empiétements sur les droits des Premières nations ou leur extinction. Si nécessaire, nous continuerons à le répéter de nouveau jusque tard dans la nuit au fur et à mesure du déroulement de cette campagne d'obstruction que nous menons.

    Nous ne sommes pas seuls. Les Autochtones qui viennent ici pour témoigner de ces événements et devant ce tribunal, souvent au prix de grandes difficultés et en surmontant l'adversité, font preuve de courage. Je citerai comme exemple mon ami de l'île Manitoulin qui a dû faire ce long trajet en auto-stop, tout simplement parce qu'on leur a refusé des fonds pour l'envoi d'un observateur. Bien qu'il représente une collectivité de 6 000 personnes, il a été obligé de faire de l'auto-stop pour se rendre jusqu'ici et observer, dans ce cadre palatial, dans ce palais qu'est la Chambre des communes, ce qu'entreprend ce tribunal, avec tous les effets qui en résulteront sur la vie des siens, là haut.

    À son retour, il fera rapport à ces 6 000 Indiens. En tant que conseiller de cette collectivité, il relatera ce qui s'est passé à ce comité. Je ne peux rédiger ce rapport à sa place ni prédire quel en sera le contenu, mais j'ai une assez bonne idée de ce qu'il leur dira, s'agissant de l'attitude qu'il a observée lorsque nous traitions de ces sujets très sensibles.

    Je me félicite de la présence d'observateurs ici, car si je devais quitter cette salle et prendre la parole devant un groupe d'Autochtones, j'aurais du mal à expliquer et justifier ma participation à ce comité. Car, une fois que tout sera dit et fait et que ce projet de loi—il reste à voir s'il sera adopté ou non—sera promulgué et que les gens verront que mon nom y est associé, je veux pouvoir dire en toute clarté—et je veux que des témoins puissent en attester, que je n'ai rien à voir avec ce projet de loi en la forme actuelle. Que toute le monde le sache.

    Le secrétaire parlementaire m'a accusé de faire tout mon possible pour stopper le projet de loi. Eh bien, il a raison—nous le ferons. Nous utiliserons tous les moyens légaux et procéduraux à notre disposition pour soit rejeter ce projet de loi soit traiter à fond de chacun de ces aspects qui nous irritent, car c'est notre rôle. Donc, s'il m'a dit cela de manière accusatoire, me reprochant de perturber le Parlement, la seule chose que je perturbe, peut-être, c'est l'échéancier gouvernemental pour l'imposition de cette mesure. Je me réserve le droit de le faire et je pense parler en cela pour un large public, un public encore plus vaste que celui que le secrétaire parlementaire représente.

    Je n'ai donc pas à m'excuser, monsieur le président, de mettre en lumière les faiblesses de ce projet de loi. Je soutiens pleinement les efforts de mon collègue du Bloc québécois lorsqu'il tente d'introduire dans ce projet de loi un texte reflétant précisément ce que devrait être la relation du Canada avec les Premières nations si nous allons dépasser ce cycle de pauvreté chronique et interminable au profit d'un modèle d'indépendance, d'autosuffisance et d'autodétermination.

  +-(1200)  

    Dans ce contexte, monsieur le président, on ne peut parler de véritable indépendance et rupture du cycle de la pauvreté sans parler de la terre et des ressources et de la gestion de ces ressources. Cela est...

+-

    Le président: Merci, monsieur Martin.

    Monsieur Loubier.

  +-(1205)  

[Français]

+-

    M. Yvan Loubier: Depuis 51 heures, nous discutons de ce projet de loi et nous l'analysons article par article. Or, je ne peux pas dire que le débat ait vraiment progressé.

    Notre tâche première, en tant que parlementaires, est de débattre à fond d'un projet de loi, d'une question ou d'un article pour que, grâce au choc des idées, nous en arrivions au meilleur projet de loi comportant les meilleures dispositions possibles et ce, de façon à mieux servir ceux et celles que nous prétendons vouloir bien servir.

    Or, après 51 heures de débat, pratiquement aucune proposition de fond émanant de l'opposition et visant à améliorer le contenu des articles de ce projet de loi n'a été adoptée par la majorité libérale. Pis encore, en 51 heures de débat, les députés libéraux n'ont fait qu'un très petit nombre d'interventions. Je parle des interventions concernant des arguments de fond reliés aux propositions que nous avons présentées pour améliorer le projet de loi.

    Il y a trois conclusions qui me viennent à l'esprit lorsque je considère l'évolution du débat. Premièrement, il n'y a aucun désir de changer quoi que ce soit de substantiel dans ce projet de loi, introduit par Robert Nault et défendu par les membres libéraux qui se trouvent ici, et ce, malgré tout ce qu'on a pu faire comme tournées et comme examens des mémoires présentés par les témoins.

    Deuxièmement, en dépit de leur rôle de parlementaires responsables qui leur demande de débattre et de conclure ce débat en vue d'adopter la meilleure solution possible, les libéraux ne sont pas intéressés par les débats.

    J'en conclus, troisièmement, qu'il y a une mauvaise volonté affichée de la part du gouvernement libéral pour ce qui est de satisfaire vraiment les premières nations et d'en arriver à réaliser la prochaine étape liée aux conclusions apportées par la Commission royale sur les peuples autochtones.

    On se réclame du droit inhérent et des articles de la Constitution, mais lorsqu'il s'agit d'aborder des points précis et des aspects législatifs du projet de C-7, c'est-à-dire le coeur du projet de loi, on s'aperçoit que rien n'est en mesure de respecter le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. Or, on était en droit de s'attendre à ce que ce droit soit respecté, surtout depuis 1997, soit depuis que la Commission royale d'enquête a déposé ses conclusions. Cette dernière, rappelons-le, était constituée de sept commissaires: quatre autochtones et trois non-autochtones.

    On a fait consensus autour du rapport de la Commission royale, pour en arriver aujourd'hui à un projet ordurier qu'on devrait tout de suite brûler en effigie pour enseigner au gouvernement que voilà la chose à ne pas faire. Le projet de loi C-7 est une reproduction alambiquée de l'inféodation qui caractérisait la Loi sur les Indiens il y a 130 ans.

    Il me semble que nous sommes rendus beaucoup plus loin. On a souvent fait référence à la reconnaissance par le gouvernement du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale des premières nations et on a dit qu'elle se trouvait dans la loi. Où dans la loi? Dans le préambule. Écoutez, nous ne sommes pas nés de la dernière pluie. Nous sommes des législateurs. Dans la perspective où on devrait aller en cour concernant ce projet de loi, je tiens à préciser que les tribunaux peuvent quelquefois consulter le préambule pour déterminer quelle est vraiment l'intention du législateur. Mais si les intentions sont vraiment claires à l'intérieur du projet de loi comme tel et que la direction que veut emprunter le gouvernement fédéral à l'égard de chacune des matières abordées dans les 17 premiers articles que nous analysons depuis 51 heures est vraiment claire à l'intérieur du projet de loi comme tel et que ce dernier ne comporte ni ambigüité ni zones d'ombre, les tribunaux ne vont pas consulter le préambule.

  +-(1210)  

    Or, il est lyrique, ce préambule, parce qu'on dit à la fois qu'on reconnaît le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, mais on reconnaît cela comme étant un objectif à atteindre à un moment donné, et en même temps, on dit que ce projet de loi n'est pas là pour régler des problèmes, n'est pas là pour régler la question de l'autonomie gouvernementale des autochtones par la négociation. Alors, pourquoi présente-t-on dans un préambule lyrique le respect du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, alors qu'on dit en même temps que ce n'est pas là pour amorcer et finaliser des accords d'autonomie gouvernementale avec les premières nations? C'est gros comme constatation, surtout lorsqu'on se réfère à ce préambule.

    Il me semble qu'on n'a pas besoin de faire la démonstration que le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale doit conduire à autre chose qu'à l'attribution de certaines pratiques législatives que veut bien donner le gouvernement fédéral aux nations autochtones, dans un élan de générosité incroyable. Le droit à l'autonomie gouvernementale, c'est autre chose que cela. Le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, c'est d'abord d'accepter que nous n'avons rien à dire quant au droit inhérent à cette autonomie gouvernementale, que les nations autochtones ont ce droit à l'autodétermination, que les nations autochtones ont le droit de se doter d'un gouvernement, un droit reconnu non seulement par la Constitution, mais aussi par les nombreux jugements de tribunaux, par l'Organisation des Nations Unies, par d'autres instances internationales et nationales de pays étrangers. C'est ce qu'on doit faire. On doit respecter la dignité des nations autochtones et on doit leur permettre de se prendre en main. Or, la seule façon de se prendre en main, c'est par la dignité, c'est par l'expression de leur autonomie gouvernementale, pas par des projets de loi comme celui-ci, qui n'ont aucun sens, qui ne font rien avancer, mais qui foutent le bordel dans les relations entre le gouvernement fédéral et les premières nations.

    Je n'ai jamais senti autant d'agressivité chez les premières nations et le goût de faire autre chose que de traiter de ces questions ridicules dans un projet de loi comme le projet de loi C-7, alors qu'il y a 500 revendications qui sont laissées en suspens à l'heure actuelle. Cinq cents autres vont s'ajouter au cours des deux prochaines années, et le gouvernement fédéral ose dire, même dans le préambule, que cela ne règle rien au niveau des revendications et au niveau des négociations de l'autonomie gouvernementale.

    Il y a toujours une limite à prendre les gens pour des imbéciles et, au premier chef, à prendre les gens des nations autochtones pour des gens qui ne comprennent pas ce que vous êtes en train de faire. Vous êtes en train d'usurper leurs droits; c'est ce que vous êtes en train de faire.

    Alors, faites au moins preuve de bonne volonté, pour une fois, et posez un geste symbolique: acceptez la proposition que je vous fais de reconnaître au coeur de la loi le droit à l'autonomie gouvernementale. Si vous ne le faites pas, cela va juste confirmer que vous êtes prêts à mettre le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale à l'intérieur de vos discours--ça paraît bien, très, très bien, d'autant plus que le premier ministre est un ancien ministre des Affaires indiennes--, mais que vous n'êtes pas prêts, par exemple, dans les faits, à poser des gestes concrets et à faire en sorte que le vaste chantier que la Commission Erasmus-Dussault nous a invités à mettre en place et qui doit, au cours des 20 prochaines années, viser à construire et même à reconstruire les nations autochtones, à leur permettre d'exprimer cette autonomie gouvernementale, mène à ce droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, à ce rendez-vous historique que vous ne voulez pas voir se réaliser. Et si vous ne voulez pas qu'il se réalise malgré tout le consensus que nous avons obtenu il y a cinq ans avec Erasmus-Dussault, c'est parce que vous êtes tout à fait irresponsables lorsque vous présentez les choses comme vous les présentez aujourd'hui.

    Vous aurez à répondre de vos gestes devant l'histoire aussi. Il semble que cela ne vous dérange pas puisque vous supportez déjà le poids de l'histoire et l'odieux d'avoir appliqué pendant tant de décennies la Loi sur les Indiens. Cela ne semble pas vous faire un pli sur le dos ni même un rictus autour de la bouche. Cela vous laisse tout à fait indifférents. Alors, si le poids de l'histoire passée ne vous fait pas un pli, j'imagine que l'histoire qu'on est en train d'écrire ne vous fait pas un pli non plus. C'est vraiment dommage.

    Alors, dites-moi que j'ai tort, dites-moi que ce sentiment n'est pas vrai et votez en faveur de cet amendement-là comme preuve de votre bonne volonté.

+-

    Le président: Merci, monsieur Loubier.

  +-(1215)  

[Traduction]

    Nous procéderons directement au vote. Nous aurons un vote par appel nominal sur l'amendement BQ-32, page 135.

    (L'amendement est rejeté par 8 voix contre 2)

    Le président: Nous allons passer à l'amendement G-7.1, monsieur Hubbard.

    Des voix: Honte!

    Le président: Monsieur Hubbard, souhaitez-vous suspendre la séance?

+-

    M. Charles Hubbard: Je pense qu'il le faut, jusqu'à ce que l'ordre soit rétabli.

+-

    Le président: Je vais suspendre les travaux jusqu'à ce que j'aie l'assurance que nous pouvons reprendre en ayant de l'ordre dans la salle.

  +-(1215)  


  +-(1217)  

+-

    Le président: Puisque les choses sont devenues tranquilles dans la salle, nous allons demander à M. Hubbard de poursuivre.

+-

    M. Charles Hubbard: Merci, monsieur le président.

    L'amendement G-7 est un autre amendement technique et là encore le crédit en revient à M. Jim Aldridge, qui l'a suggéré à notre comité il y a quelques semaines. Il a fait valoir qu'il était quelque peu redondant à l'article 17 d'écrire «Le conseil peut prendre des textes législatifs pour les besoins de la bande concernant». Il a dit que la meilleure solution serait d'écrire uniquement : «Le Conseil peut prendre des textes législatifs concernant».

    Nous avons entendu pas mal de discussions ce matin et il semblerait que certains membres voudraient conserver la Loi sur les Indiens de 1876. Nous faisons valoir aux honorables députés d'en face qu'en 1876, le Canada était un pays très jeune. De fait, ce n'était que quelques années après que quatre provinces aient formé une fédération et, à ce stade, la province de l'Île du Prince-Édouard les avait rejointes, puis celle du Manitoba en 1870 et, avec l'assentiment général qu'un chemin de fer serait construit dans l'Ouest, la province de Colombie-Britannique.

    Il est intéressant de noter que l'un des premiers premiers ministres de la Colombie-Britannique était un jeune homme de Nouvelle-Écosse qui, en Colombie-Britannique, se faisait appeler Amor De Cosmos, un nom très flamboyant pour cette personne qui a fait entrer la Colombie-Britannique dans la Confédération, mais on s'est aperçu plus tard, lorsqu'on a découvert son nom réel, qu'il portait un nom très ordinaire en Nouvelle-Écosse.

    En 1876, bien entendu, le Canada venait de racheter la terre de Rupert à la Compagnie de Baie d'Hudson et cela a fait surgir le problème de ce que serait le visage de cette grande nation canadienne. C'était il y a 136 ou 137 ans que nos parlementaires, ici à Ottawa, ont rédigé un projet de loi, qui allait devenir la Loi sur les Indiens de 1876, et en même temps notre pays a connu une grande transformation. Le chemin de fer progressait vers l'Ouest. La grande migration vers l'Ouest n'avait pas encore commencé, par exemple, car c'était avant la grande période lorsque Laurier a ouvert l'immensité de l'Ouest à l'agriculture.

    Évidemment, avec le mouvement des Européens vers l'Ouest, des relations ont été nouées qui ont pris la forme de traités avec différents groupes à travers le pays. Mais je suis étonné que certains des députés d'en face voudraient que les peuples indigènes dans ces territoires et à travers ce grand pays, les premiers habitants que les Européens ont rencontrés... qu'ils voudraient continuer à leur imposer une loi qui a été rédigée avant l'invention de l'électricité, avant l'automobile, avant la télévision, avant toutes ces choses modernes—en fait, avant même que le Canada devienne une grande puissance mondiale.

    Lorsque nous écoutons leur discours, nous reconnaissons que la Loi sur les Indiens a certes été modifiée à plusieurs reprises depuis 1876, mais s'agissant de la possibilité d'opérer des changements, d'établir de meilleures relations entre les peuples de ce pays, nous avons aujourd'hui un texte appelé projet de loi C-7 et nous espérons que nous pourrons tous travailler de concert en tant que parlementaires. Nous avons entendu les consultations à travers le pays et nous proposons aujourd'hui d'améliorer le texte initial rédigé par le ministère de la Justice, en consultation avec la MAIN. Nous en avons là une grande possibilité, une énorme tâche en tant que parlementaire consistant à ramener à la Chambre des communes, au stade du rapport, des améliorations conséquentes à ce projet de loi qui a été introduit en juin dernier et réintroduit en octobre.

    Là-dessus, je propose l'amendement G-7.1 qui a mon approbation. Je sais que j'aurai l'appui de nombreux collègues car nous venons d'en adopter un similaire à l'article précédent et je préconise de passer au vote le plus vite possible.

    Merci.

  +-(1220)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Hubbard.

    Monsieur Comartin.

+-

    M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD): Je dois avouer que je suis surpris d'entendre le secrétaire parlementaire dire qu'il y a eu un processus de consultation ouvert à ce sujet, alors que l'inverse est vrai. Il est évident que les gens dans l'assistance réfuteront totalement cette affirmation.

    Cela nous ramène au tout début, lorsque nous avons tenté, en premier lieu, comme nous l'avons fait historiquement dans d'autres circonstances et d'autres comités, d'inviter des personnes pour aider le comité dans ses délibérations—en l'occurrence, demandant une représentation spécifique des Premières nations. Cela a été rejeté d'emblée, en dépit de l'excellente argumentation longuement présentée à l'époque par M. Martin. Cela a été un refus catégorique.

    Lorsqu'on semble souhaiter une attitude positive de la part des partis d'opposition, eh bien nous n'avons pas eu de réponse positive alors et très franchement nous nous sentons très mal à l'aise étant donné notre obligation fiduciaire en la matière, et M. Martin et M. Loubier l'ont bien rappelé. Le processus de consultation a été grossièrement insuffisant.

    L'un des exemples est certainement celui que je viens de donner, soit l'absence de représentation des personnes présentes dans cette salle qui pourraient participer, qui pourraient nous donner les réactions de première main, au lieu que ces mesures soient imposées d'en haut par une culture et une société qui, à bien des égards, est étrangère à la culture et à la société qui devrait se trouver ici à cette table pour nous aider dans ce travail.

    Ce n'est pas de ce côté-ci de la table que l'on va contester la nécessité de modifier la Loi sur les Indiens. Je me souviens, lorsque j'étais à la faculté de droit en 1969, ma première année de faculté de droit, d'avoir assisté à une conférence où des représentants de tous les côtés de l'échiquier politique parlaient de la nécessité de modifier la Loi sur les Indiens, d'en changer au moins le nom, même si on ne touchait à rien d'autre. Il n'y a donc pas contestation de la nécessité historique, dont nous sommes convaincus depuis au moins le milieu du siècle dernier, de reconnaître que la Loi sur les Indiens est gravement viciée. Il n'y a pas de contestation à ce sujet. Mais c'est le processus que nous ne pouvons tout simplement pas accepter.

    Vous ne pouvez donc pas vous attendre à ce que nous vous soutenions, même sur un amendement aussi technique que celui-ci. Il ne faut pas y compter.

    Encore une fois, lorsque nous avons tenté—et M. Martin en particulier a tenté de rendre le processus plus transparent étant donné la réponse que nous avons reçue du comité, il faut que les membres du gouvernement sachent bien, et j'y englobe la présidence... vous ne pouvez vous attendre à ce que nous vous laissions faire et collaborions avec vous alors que vous avez enfreint toutes les conventions appliquées dans cette Chambre et dans la plupart des comités depuis plus de 50 ans, depuis la Seconde Guerre mondiale.

    Alors que nous n'avons aucun recours et que vous nous dites que vous allez mettre fin au débat, je trouve cela insultant à mon endroit, en tant que député. Ce n'est pas la première fois que cela arrive dans ce comité.

    Je ne sais pas si les députés gouvernementaux se rendent compte de l'impact que produit ce que vous avez fait il y a quelques semaines en coupant ce débat. Je siège à d'autres comités. Je ne me fais traiter nulle part de cette façon, comme membre de l'opposition. Ce comité a enfreint nombre de conventions.

    Il est tout à fait clair à mes yeux que, lorsque je suis arrivé ici, on respectait certaines règles. Ce n'était pas des règles écrites. Ce n'était pas des règles contraignantes en ce sens que l'on pouvait en imposer le respect, mais nous avions tous plus ou moins convenu de les suivre, tant du côté du gouvernement que de l'opposition. Nous pouvions compter qu'elles seraient suivies des deux côtés de la table. Vous avez violé cette entente.

  +-(1225)  

    Je peux donc dire au secrétaire parlementaire que s'il s'attend à une coopération de notre part, il ne l'aura pas. En substance, la seule solution est d'annuler ce projet de loi et de tout recommencer. Si vous étiez prêts à faire cela, nous pourrions probablement trouver un terrain d'entente.

    Je vais consacrer encore une minute à cette question d'une convention. Nous en avons parlé dans notre parti et M. Loubier en a fait autant. Nous n'allons pas laisser faire. Que ce soit dans le cadre de la réforme de la procédure de la Chambre, cela prendra ce que cela prendra... Encore une fois, je ne sais pas si la majorité des députés en ont conscience. Nous n'allons pas laisser faire. Ce qui s'est passé ne doit jamais se reproduire.

    Soit nous allons respecter les conventions graduellement instaurées dans cette Chambre—je ne devrais pas dire cette Chambre seulement, car elles sont communes aux parlements de tout le Commonwealth et existent plus particulièrement en Angleterre—et ne pas les enfreindre dans des cas particuliers, ou bien nous n'allons plus accepter que ce soient de simples conventions et exigerons que ce soient des règles formelles de la Chambre de telle façon que tous les partis, tous les gouvernements—celui-ci et tous les suivants— soient obligés de respecter ces règles fondamentales. Nous ne pouvons fonctionner de façon démocratique autrement.

    Aussi, en tant que parti, nous allons mettre à profit tous les mécanismes que nous pourrons trouver pour que ces conventions soient honorées et imposées à ceux qui voudraient les enfreindre, ou alors nous allons devoir les transformer en règles contraignantes de la Chambre afin que celle-ci puisse fonctionner de manière démocratique.

    Pour en revenir plus particulièrement à cet amendement spécifique, monsieur le président, c'est un amendement technique. Si vous regardez de façon générale le contenu de l'article 17, il s'agit en réalité d'un gouvernement étranger qui impose sa volonté aux Premières nations. Vous ne reconnaissez pas le caractère inhérent; vous adoptez simplement une position très arrogante consistant à dire aux Premières nations, très franchement, peu nous importe les consultations, peu nous importe votre position, voici ce que vous allez avoir, c'est à prendre ou à laisser.

    Nous refusons d'être partie à cela. Nous l'avons fait savoir aussi fermement que possible. Nous continuerons à résister. Le Bloc, je crois, fera comme nous.

    Donc, je dis au secrétaire parlementaire que, non, vous n'aurez pas notre coopération, à moins de retirer ce projet de loi.

    Merci, monsieur le président.

  +-(1230)  

[Français]

+-

    Le président: Monsieur Loubier.

+-

    M. Yvan Loubier: Monsieur le président, c'est quand même étonnant de constater la façon dont le secrétaire parlementaire a présenté cet amendement-là. Il disait que c'était pour améliorer, faire de son mieux, do the best. Qu'est-ce qu'on améliore avec un amendement comme celui-là? Je me suis posé la question, j'ai regardé.

    Cela se lit peut-être mieux en français et en anglais; c'est plus court. On a enlevé «de la bande.» Les amendements du gouvernement sont comme ça depuis le début. Depuis le début, les amendements du gouvernement qui prétendent améliorer le contenu de ce projet de loi visent tout simplement à améliorer l'anglais à certains égards, le français à d'autres. Le seul amendement de fond a consisté à parler de la gestion des déchets.

    Ce n'est pas drôle. On est censés mettre la table pour négocier l'autonomie gouvernementale d'un troisième ordre de gouvernement, on est censés dresser la table à partir de tout ce qu'on a pu amasser comme expériences, comme analyses et comme directions consensuelles pour entreprendre les négociations avec les premières nations, et le seul amendement de fond que le gouvernement libéral a présenté jusqu'à présent, avec des discours incroyables sur do the best, sur le fait que le projet de loi n'est pas parfait mais qu'il continue à travailler pour améliorer les choses, est un amendement concernant la gestion des déchets dans les réserves.

    Je suis découragé, monsieur le président. Ça fait 51 heures et demie qu'on discute de ce projet de loi, qu'on l'analyse article par article et qu'on présente des amendements de part et d'autre et, en 51 heures et demie, il y a eu un seul argument de fond, et il traitait des déchets.

    On devrait être ici pour chercher des façons d'accélérer les négociations avec les nations autochtones afin de concrétiser l'expression du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale que les premières nations ont reçu du Créateur et qui est reconnu aussi par les cours de justice, y compris la Cour suprême du Canada. Au lieu de cela, on s'obstine sur la question de savoir si on devrait ou non enlever l'expression «de la bande» au début de l'article 17 du projet de loi C-7.

    Si on devait aller à ce rythme, avec des considérations aussi futiles de la part du gouvernement lorsque vient le temps de présenter des amendements pour améliorer un projet de loi qui est innommable et non améliorable, cela voudrait dire que M. Erasmus et M. Dussault ont commis une erreur incroyable en 1997, en disant que c'était un chantier de 20 ans qu'il fallait dresser pour réaliser le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale des nations autochtones. Car à ce rythme-là, et avec le degré de compréhension et d'évolution des libéraux, cela va prendre au moins 130 ans juste pour faire comprendre que le droit inhérent des premières nations à l'autonomie gouvernementale est un droit acquis, non négociable et qu'on doit s'empresser de réaliser.

    Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement s'acharne encore à vouloir débattre d'un projet de loi qui n'apporte rien, n'améliore rien, consacre certaines pratiques qui ont déjà cours dans plusieurs communautés des premières nations, au niveau de la gestion des fonds par exemple, de la tenue des conseils de bande publics, de la gestion de certaines matières. C'est déjà fait pour la plupart d'entre elles.

    Je comprends mal pourquoi on s'acharne à vouloir confirmer la bonne gestion des leaders autochtones. C'est cela que la vérificatrice générale a dit lorsqu'elle a comparu la dernière fois devant le Comité permanent des comptes publics et qu'elle a présenté ses remarques sur la gestion au niveau du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Ce n'est pas sur les communautés des premières nations qu'ont porté ses critiques, mais sur le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, qu'elle a accusé d'être inefficace au niveau de la gestion et de l'application de la Loi sur les Indiens.

  +-(1235)  

    À mon avis, c'est là où réside le problème; ce n'est pas dans les communautés des premières nations. Le ministère des Affaires indiennes nous présente un projet de loi en disant vouloir améliorer des choses que, dans certains cas, que ce soit au plan économique, social ou politique, les premières nations ont déjà réalisées. Cependant, on présente des articles de loi qui font croire que les choses vont mal au sein des conseils de bande, qu'il y a un manque de transparence et qu'il y a des lacunes en termes de reddition des comptes et de gestion. Je trouve cela très difficile à avaler. C'est une image fausse et une vision complètement offensante que véhicule le projet de loi C-7.

    Maintenant, on dit vouloir améliorer le projet de loi et ce, par l'entremise d'un amendement gouvernemental d'une profondeur peu commune. Il s'agit de retirer l'expression «la bande» de l'introduction de l'article 17 du projet de loi C-7. Quelle amélioration! Voilà qui fait avancer l'autonomie gouvernementale, le développement économique et social des premières nations. Voilà qui rehausse leur système d'éducation, qui fait en sorte qu'il y ait de l'eau potable sur des réserves et que les droits inhérents reconnus par les cours de justice se réalisent immédiatement. Retirons l'expression «la bande» de l'introduction de l'article 17 et le tour sera joué. C'est ce que le secrétaire d'État et le gouvernement--il s'agit en effet d'un amendement du gouvernement--nous proposent pour améliorer les conditions de vie des premières nations.

    C'est aussi ce qu'on nous demande d'adopter en nous disant qu'il s'agit là d'un argument de fond et d'un aménagement du projet de loi. Plusieurs personnes ont comparu devant nous et plusieurs mémoires, que nous avons lus, ont été déposés à ce comité. À tous ceux et celles qui ont eu le coeur de déposer un mémoire fort documenté et sérieux, comportant des revendications et des exigences précises, et à l'égard des critiques quasi unanimes émises à l'encontre de ce projet de loi, voilà ce que répond le gouvernement.

    Les premières nations nous ont dit clairement ce qu'elles voulaient. La plupart d'entre elles ont déposé des projets et des modèles d'expression du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. Elles ont précisé la façon dont elles voient leur propre gouvernement, de quels pouvoirs elles doivent disposer et dans quelle direction elles doivent aller. Or, la réponse supposément sérieuse que leur propose le gouvernement est de retirer le terme «la bande». Voilà la façon dont on répond à une préoccupation majeure des premières nations, qui s'opposent à ce projet de loi de façon fondamentale.

    Parlons du traitement des déchets dans les réserves, et nous aurons réglé la question du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale ainsi que celle du retour de la dignité des nations autochtones au Canada. Voilà ce que propose le gouvernement comme amélioration au projet de loi C-7. Après tout ce qu'on a entendu et lu, constater que c'est de cette façon qu'on répond à la critique est tout simplement inconcevable.

    La critique fondamentale, généralisée et quasi unanime exprimée à l'égard de ce projet de loi nous indique qu'on doit le déchirer et le jeter à la poubelle pour ensuite recommencer le travail en ne se basant sur rien d'autre que le rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones.

    La situation est décourageante. Je comprends la réaction qu'a eue mon collègue Martin. Par chance, son collègue du NPD, M. Comartin, qui a une vaste expertise en matière de questions constitutionnelles, a décidé de le remplacer pour quelques minutes; je comprends pourquoi. Depuis bientôt 51 heures et 41 minutes, nous faisons face à des propositions d'amendement du gouvernement qui ne sont que cosmétiques. Elles n'ajoutent rien à la démonstration, elles n'améliorent en rien le processus de négociation, elles ne contribuent pas à faire progresser les 500 causes reliées à l'autonomie gouvernementale qui sont en suspens et elles font fi des nombreux problèmes dont souffrent les communautés des premières nations au chapitre du développement économique, des assises territoriales, de l'éducation et même de l'eau potable. Cela peut sembler inconcevable, mais j'ai découvert que dans plusieurs réserves...

  +-(1240)  

[Traduction]

+-

    Le président: Merci, monsieur Loubier.

    Monsieur Hubbard, pour un mot de conclusion.

+-

    M. Charles Hubbard: Merci, monsieur le président.

    Malgré toutes les doléances concernant le temps de parole, je pense que nous reconnaissons tous que les deux députés d'en face accaparent le maximum de temps qui peut être alloué à chacune de leurs interventions. Je vais prendre moi-même un peu de temps, comme je l'ai fait la dernière fois.

    J'ai cru comprendre la dernière fois que plusieurs membres cherchaient à tirer quelques conclusions, s'agissant des amendements frivoles soumis au comité. Mais je suis un peu surpris—en fait, je ne suis pas surpris, monsieur le président, car l'intention a toujours été claire—de voir que les deux partis d'en face n'ont nulle intention d'expédier ce projet de loi et ne souhaitent même pas qu'il retourne à la Chambre. Voilà leur position.

    Cela dit, monsieur le président, j'aimerais mentionner brièvement l'objet de ce projet de loi. Je rappelle qu'il est le suivant :

a) d'offrir aux bandes des outils de gouvernance plus efficaces en attendant la négociation du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale et sa mise en oeuvre;

b) de leur permettre de satisfaire plus efficacement à leurs besoins et aspirations, notamment leur capacité de collaborer à certaines fins;

c) de leur permettre de concevoir et de mettre en oeuvre leurs propres régimes concernant le choix de leurs dirigeants, leur gouvernement, la gestion financière et l'obligation de rendre compte, tout en prévoyant des règles applicables aux bandes qui ne se dotent pas de leurs propres régimes.

    Donc, avec ce projet de loi, nous disons aux Premières nations qu'elles peuvent désormais se doter de leurs propres codes régissant la vie des leurs et le fonctionnement de leurs bandes.

    Le député d'en face, qui vient du Manitoba, a formulé diverses allégations. Et j'ai dit hier soir qu'il ne laisse pas les faits troubler sa rhétorique.

    Au Manitoba, bon nombre de bandes ont été placées sous tutelle administrative, et si nous pouvons leur suggérer des méthodes de reddition de comptes ou de gestion financière rationnelle... La chose la plus humiliante pour un chef et un conseil de bande est d'être placé sous la tutelle d'une tierce partie qui vient gérer les ressources et administrer les affaires de la Première nation.

    Le but de cette loi est de surmonter ces situations difficiles dans lesquelles se trouvent plongées tant de Premières nations. Aucun gouvernement n'est parfait. Le nôtre ne l'est certainement pas. Mais nous devons oeuvrer pour améliorer les méthodes par lesquelles les peuples sont gouvernés.

    Chaque année, chaque jour, nous venons en notre capacité de parlementaires ici à Ottawa. Nous le faisons pour améliorer la législation. Nous le faisons parce que nous espérons améliorer les méthodes par lesquelles les Canadiens et leur société sont régis et réglementés.

    Aussi, monsieur le président, nous avons entendu leur position. Nous connaissons celle des Canadiens. Nous savons, suite aux consultations menées à travers le pays, que les gens aspirent au changement. Ils ne veulent pas vivre sous le régime d'une loi rédigée en 1876. Ils veulent avoir la possibilité de se doter de leurs propres lois et, en tant que parlementaires, c'est ce que nous entendons faire ici aujourd'hui.

    Là-dessus, monsieur le président, accaparer et faire perdre autant de temps qu'ils l'ont fait ce matin, au sujet de deux petits mots, dont la soustraction a été suggérée par des Autochtones eux-mêmes afin d'améliorer cet article du projet de loi, est étonnant. Nous déplorons qu'il faille en passer par là, mais nous nous ferons une raison et nous continuerons nos délibérations afin de renvoyer ce projet de loi à la Chambre, où d'autres amendements pourront être apportés, de façon à présenter le meilleur rapport possible à la fin de notre deuxième lecture.

    Là-dessus, je demande le vote, monsieur le président.

+-

    Le président: Nous procéderons au vote par appel nominal sur l'amendement G-7.1, page 136.

    (L'amendement est adopté par 8 voix contre 2)

  -(1245)  

+-

    Le président: Avez-vous un rappel au règlement?

+-

    M. Charles Hubbard: Monsieur le président, je recommande aux députés d'en face de réévaluer leur position et de revenir...

+-

    Le président: Ce n'est pas un rappel au règlement. Avez-vous un rappel au règlement véritable?

+-

    M. Charles Hubbard: Je propose d'ajourner jusqu'à la semaine prochaine.

+-

    Le président: J'ai une motion d'ajournement jusqu'à la semaine prochaine.

    (La motion est adoptée)

-

    Le président: La séance est levée et nous reprendrons nos travaux lundi à neuf heures.