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NDVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 13 mai 2003




¿ 0910
V         Le président (M. David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.))
V         M. George Lindsey (Institut canadien des affaires internationales)

¿ 0915

¿ 0920

¿ 0925
V         Le président
V         M. George Lindsey
V         Le président
V         M. George Lindsey

¿ 0930
V         Le président
V         Mme Cheryl Gallant (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Alliance canadienne)
V         M. George Lindsey
V         Mme Cheryl Gallant
V         M. George Lindsey
V         Mme Cheryl Gallant
V         M. George Lindsey

¿ 0935
V         Mme Cheryl Gallant
V         M. George Lindsey
V         Mme Cheryl Gallant
V         M. George Lindsey
V         Le président
V         M. Dominic LeBlanc (Beauséjour—Petitcodiac, Lib.)
V         M. George Lindsey

¿ 0940
V         M. Dominic LeBlanc
V         M. George Lindsey
V         M. Dominic LeBlanc
V         M. George Lindsey

¿ 0945
V         M. Keith Greenaway (Institut canadien des études stratégiques)
V         Le président
V         Mme Elsie Wayne (Saint John, PC)

¿ 0950
V         M. George Lindsey

¿ 0955
V         M. Blair Seaborn (Institut canadien des études stratégiques)
V         M. David Kirkwood (Institut canadien des études stratégiques)
V         Mme Elsie Wayne
V         M. George Lindsey
V         Mme Elsie Wayne
V         Le président

À 1000
V         M. Keith Greenaway
V         Le président
V         M. Keith Greenaway
V         Le président
V         M. Keith Greenaway
V         Le président
V         M. George Lindsey

À 1005
V         M. Keith Greenaway
V         Le président
V         M. George Lindsey
V         M. Clayton Beattie (Institut canadien des études stratégiques)
V         M. David Kirkwood
V         Le président
V         Mme Cheryl Gallant

À 1010
V         M. George Lindsey

À 1015
V         Mme Cheryl Gallant
V         M. Blair Seaborn
V         Mme Cheryl Gallant
V         M. Blair Seaborn
V         Mme Cheryl Gallant
V         M. Blair Seaborn
V         Le président

À 1020
V         M. George Lindsey
V         Le président

À 1025
V         M. George Lindsey
V         Le président
V         M. George Lindsey
V         M. Robert Edmonds (ancien président, Section de la Capitale nationale, Institut canadien des affaires internationales)

À 1030
V         Le président
V         M. Robert Edmonds
V         Le président
V         M. Robert Edmonds
V         Le président
V         Mme Elsie Wayne
V         M. George Lindsey

À 1035
V         Mme Elsie Wayne
V         Le président
V         M. Dominic LeBlanc
V         M. George Lindsey

À 1040

À 1045
V         Le président
V         M. Dominic LeBlanc
V         M. George Lindsey
V         M. Keith Greenaway
V         Le président
V         Mme Cheryl Gallant

À 1050
V         M. George Lindsey
V         Mme Cheryl Gallant
V         M. Clayton Beattie
V         M. George Lindsey
V         M. Dwight Fulford (Institut canadien des études stratégiques)
V         Le président
V         Mme Cheryl Gallant
V         Le président
V         M. George Lindsey

À 1055
V         Le président
V         M. George Lindsey
V         Le président
V         M. George Lindsey
V         M. Robert Edmonds
V         Le président
V         M. George Lindsey
V         Le président
V         M. George Lindsey
V         Le président










CANADA

Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants


NUMÉRO 026 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 13 mai 2003

[Enregistrement électronique]

¿  +(0910)  

[Traduction]

+

    Le président (M. David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.)): La séance du Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants est ouverte.

    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous poursuivons notre étude sur la coopération pour la défense entre le Canada et les États-Unis et sur d'autres questions.

    À titre de témoin, nous accueillons aujourd'hui M. George Lindsey, agrégé supérieur de recherche à l'Institut canadien des études stratégiques.

    Monsieur Lindsey, au nom du comité, j'aimerais vous souhaiter la bienvenue plus formellement ici aujourd'hui. Vos observations sont d'un très grand intérêt pour nous. De toute évidence, la question de la défense contre les missiles balistiques est à l'avant-scène aujourd'hui. Je crois savoir que vous allez nous parler de cette question; alors, pourquoi ne pas vous céder immédiatement la parole et vous laisser faire votre exposé.

+-

    M. George Lindsey (Institut canadien des affaires internationales): Merci.

    Mes observations ce matin représenteront un sommaire de certaines des discussions qui ont été menées au cours des dernières années par un groupe d'étude de la section de la capitale nationale de l'Institut canadien des affaires internationales.

    Presque tous les membres de notre groupe ont pris leur retraite après de nombreuses années de service auprès du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international ou du ministère de la Défense nationale. Ils ont gardé un vif intérêt pour les relations canado-américaines et les rôles militaires les plus appropriés que le Canada pourrait choisir de jouer pour assurer la défense de la sécurité de l'Amérique du Nord. Nous aimons croire que nous sommes un exemple de la façon dont les ONG ou, du moins, certaines ONG peuvent aider le gouvernement à trouver des solutions à des problèmes nationaux d'importance.

    Lorsque nous avons commencé nos travaux, les plans américains relatifs à un système national de défense antimissile suscitaient beaucoup d'intérêt dans le public, et c'est pourquoi nous avons consacré environ la première année de notre étude à cette question. Après les attentats terroristes contre le World Trade Center et le Pentagone, nous avons étendu nos discussions pour inclure la défense de l'Amérique du Nord contre le terrorisme. Ces deux questions mobiliseront l'attention du gouvernement canadien et exigeront des décisions de sa part au cours des prochaines années, mais la question qui semble avoir la priorité aujourd'hui semble être celle de la défense contre les missiles balistiques. Je vais donc me concentrer sur les réflexions de notre groupe d'étude sur cette question, mais si nos discussions ce matin devaient s'orienter vers le terrorisme également, je serai également heureux de résumer notre pensée sur cette question. Un compte rendu de nos conclusions sur le terrorisme, ainsi que sur la défense contre les missiles balistiques, est contenu dans le document qui a été préparé à l'intention de votre comité.

    Il est bon de se rappeler comment le Canada et les États-Unis ont fait face aux problèmes liés à la défense de l'Amérique du Nord pendant la période de la guerre froide. Avec cette dernière est apparue la menace des armes nucléaires transportées par des bombardiers à long rayon d'action décollant de l'Union soviétique. Les routes les plus courtes que pouvaient emprunter ces bombardiers pour atteindre des cibles dans les 48 États centraux des États-Unis, ainsi qu'au Canada, passaient par l'Atlantique Nord, l'Arctique et le Pacifique Nord, et au-dessus du territoire canadien.

    La priorité en matière de défense était de se doter d'un système d'alerte avancée pour nous prévenir d'une attaque imminente de manière que les bombardiers du commandement des forces aériennes stratégiques puissent prendre l'air avant d'être détruits au sol. Pour donner l'alerte, on a construit le réseau de radars d'alerte avancée (DEW) s'étendant de l'Alaska jusqu'au Royaume-Uni en traversant la limite septentrionale du Canada, le Groenland et l'Islande.

    La seconde priorité était d'assurer une défense active par l'utilisation de chasseurs intercepteurs, de missiles surface-air et de canons antiaériens, distribués le long de la partie sud du Canada et partout aux États-Unis. L'alerte, la répartition et le contrôle de ces armes étaient assurés par les radars de la ligne Mid-Canada, installés le long de la partie centrale du Canada et un réseau continu de radars de contrôle installés dans la partie sud du Canada, le réseau Pinetree, et partout dans les 48 États centraux des États-Unis.

    Ce système étendu a été intégré au Commandement de la défense aérienne de l'Amérique du Nord (NORAD), organisme véritablement international dans lequel la frontière canado-américaine n'avait aucune importance. Il s'agit de l'un des meilleurs exemples de relations canado-américaines mutuellement satisfaisantes que nous puissions trouver et ces relations ont permis aux Canadiens d'avoir accès à de l'information et à une planification qu'il leur aurait autrement été impossible d'obtenir.

    Ensuite, la menace des bombardiers a été supplantée par celle des missiles balistiques. Cela comprenait les missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) à lanceur terrestre et les missiles balistiques à lanceur sous-marin.

    Encore une fois, la priorité absolue allait à un système de détection rapide du lancement de missiles soviétiques de sorte que les missiles intercontinentaux américains puissent être lancés avant d'être détruits dans leurs puits de lancement.

¿  +-(0915)  

    De nouveaux radars puissants ont été installés, mais cette fois en Alaska, au Groenland et en Angleterre pour former ce qu'on appelle le Système de détection lointain des missiles balistiques, ou BMEWS. Ces radars pouvaient suivre les missiles en route vers l'Amérique du Nord dans la première partie de leur trajectoire.

    Par la suite, le BMEWS a été remplacé par des satellites placés en orbite géostationnaire, capables de détecter le lancement des missiles balistiques n'importe où sur une très grande partie de la surface terrestre.

    Pendant un long moment, les États-Unis ont lancé plusieurs grands programmes visant à élaborer des systèmes permettant d'intercepter les missiles balistiques intercontinentaux : Nike Zeus, Sentinel, Safeguard, et l'Initiative de défense stratégique. Aucun des ces systèmes n'avait besoin, ni pour l'alerte ni pour la défense active, d'éléments déployés au Canada. Un seul de ces systèmes a été déployé et encore, pendant une période de quelques semaines seulement.

    Ainsi, durant la guerre froide, la défense de l'Amérique du Nord contre la menace aérienne exigeait un système intégré dans lequel le territoire canadien et les Forces armées canadiennes jouaient un rôle crucial dans la protection des 48 États centraux des États-Unis, mais contre la menace des missiles balistiques, le territoire canadien et la collaboration canadienne n'étaient pas nécessaires à la protection des États-Unis.

    Avec la fin de la guerre froide, il ne semblait pas y avoir une grande nécessité de défendre l'Amérique du Nord contre les attaques à grande distance par des missiles balistiques à lanceur terrestre ou sous-marin, ou par des bombardiers. Mais pour les activités outre-mer, les missiles balistiques à courte portée (SRBM) ont commencé à constituer une menace croissante; ils ont été employés dans les conflits entre l'Iran et l'Irak, entre la Russie et l'Afghanistan et dans les guerres du golfe Persique.

    De nos jours, de nombreux pays qui semblent être des opposants vraisemblables dans le genre d'opérations outre-mer entreprises par les forces armées américaines et canadiennes possèdent un grand nombre de SRBM.

    Les États-Unis ont entrepris plusieurs programmes de R-D parallèles pour accroître la capacité de certaines de leurs armes anti-aériennes, pour leur permettre d'intercepter des missiles balistiques à courte portée. Des progrès intéressants ont été réalisés avec les systèmes Patriot et THAAD—il s'agit de Theater High Altitude Aerospace Defense—de l'Armée de terre, le système Theatre-Wide de la marine et le Laser aéroporté de l'aviation. Ce dernier système est conçu expressément pour la défense contre les missiles balistiques, plutôt que d'être simplement le prolongement d'une capacité anti-aérienne.

    La plupart de ces systèmes sont prometteurs en ce sens qu'avec un peu plus de développement, ils seront en mesure d'intercepter non seulement les missiles balistiques à courte portée, mais probablement aussi les missiles intercontinentaux en début et en fin de trajectoire.

    Pendant que se poursuivait le développement de ces systèmes de défense contre les missiles balistiques à courte portée, et pour des raisons qui n'ont jamais été expliquées de manière convaincante, les États-Unis se sont mis à craindre la possibilité d'une attaque de l'Amérique du Nord par des missiles balistiques intercontinentaux armés avec des armes de destruction massive lancés par ce qu'ils ont décrit comme des « États voyous », comme la Corée du Nord, l'Iran ou l'Irak.

    Les Américains ont lancé un programme majeur visant à élaborer un système pour intercepter tout ICBM à mi-parcours de sa trajectoire intercontinentale.

    Pour atteindre les hautes altitudes auxquelles se trouve un ICBM à mi-parcours et réussir l'interception, le missile intercepteur doit atteindre des vitesses très élevées, être doté d'un système de guidage extrêmement précis et être capable de manoeuvrer dans le vide de l'espace. Il s'agit de conditions très exigeantes, qui vont bien au-delà de celles qui sont nécessaires pour l'interception des missiles balistiques à courte portée. Il s'agit peut-être du projet d'ingénierie le plus ambitieux jamais entrepris dans le monde. Ce n'est pas une mince tâche.

    Le plan américain actuel pour le système national de défense antimissile prévoie le déploiement, au début, d'un petit nombre d'intercepteurs basés au sol en Alaska en 2004. Cependant, déçus par les résultats peu encourageants des premiers essais de ces intercepteurs basés au sol, les États-Unis ont étendu leur plan ultime pour le système national de défense antimissile.

    Il s'agira maintenant d'un système de défense multicouche qui comprendra des armes capables d'intercepter un ICBM dans les premières phases d'ascension et dans les dernières phases de descente, ainsi que des armes capables de faire l'interception à mi-parcours.

¿  +-(0920)  

    L'interception dans les premières phases d'ascension exigera que les intercepteurs soient situés assez près des sites de lancement des ICMB, peut-être à bord d'un navire ou d'un avion et loin de l'Amérique du Nord. L'interception pendant la phase de descente exigera que l'intercepteur des missiles soit situé à proximité des cibles des ICBM, surtout, on peut le supposer, des concentrations de villes américaines.

    Pour l'acquisition des cibles et la conduite du tir, il peut être nécessaire d'installer des radars et des moyens de relayer l'information bien au-delà des zones à protéger. Cela laisse supposer que certaines installations en territoire canadien pourraient devenir importantes pour la défense de certaines régions du nord des États-Unis, et c'est encore plus vrai si l'on doit assurer la protection de certaines villes situées dans le sud du Canada.

    Eh bien, voilà les fondements de notre pensée sur la situation mondiale.

    Quels sont les rôles suggérés du Canada? Eh bien, les voici, toujours selon notre groupe.

    Premièrement, le Canada devrait donner son accord de principe à une collaboration avec les États-Unis dans la planification de la défense de l'Amérique du Nord contre des attaques possibles par des ICBM, mais nous devrions nous concentrer sur deux moyens de collaboration particuliers—ceux sur lesquels nous préférerions concentrer nos efforts. Le premier consisterait à discuter avec les Américains des exigences pour ce qui est du choix de l'emplacement et de l'exploitation des installations nécessaires en territoire canadien et à voir ce qu'ils aimeraient que nous fassions. Le second, serait que le Canada entreprenne de participer activement au développement de systèmes d'armes mobiles conçus pour l'interception des avions, des missiles de croisière et des missiles balistiques à courte portée, et qu'il accorde une attention particulière à améliorer ces capacités de manière à les rendre capables d'intercepter les missiles à longue portée en début et en fin de trajectoire.

    Qu'est-ce que cela donnerait au Canada? Quatre choses.

    Premièrement, nous nous engagerions dans une collaboration avec les États-Unis en matière de défense antimissile continentale et, par conséquent, nous renforcerions la possibilité que nous puissions continuer de faire partie du NORAD, avec des responsabilités accrues et, espérons-le, dans les mêmes conditions que dans le passée et qui se sont avérées si avantageuses pour nous.

    Deuxièmement, nous apporterions notre contribution au développement d'une protection grandement nécessaire pour les opérations outre-mer auxquelles les Forces canadiennes sont fréquemment appelées à participer.

    Troisièmement, nous apporterions notre contribution au développement de systèmes capables d'intercepter des ICBM en fin de trajectoire. C'est le type de défense anti-missile balistique qui nécessitera le plus vraisemblablement des installations en territoire canadien.

    Et quatrièmement, cela offrirait des débouchés à l'industrie canadienne.

    Monsieur le président, voilà l'ensemble de nos observations concernant la défense contre les missiles balistiques. Si nous voulons parler de terrorisme plus tard, nous avons également des idées sur cette question.

¿  +-(0925)  

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur Lindsey.

    Vous avez derrière vous toute une brochette de distingués Canadiens et je pense que le comité gagnerait à les connaître. Êtes-vous d'accord pour nous les présenter?

+-

    M. George Lindsey: Mais j'en serais ravi. Renforts, en avant!

+-

    Le président: Peut-être—parce que je pense que nous commençons à manquer de place ici—, si certains voulaient se rapprocher de la table, nous allons avoir une réunion un peu plus informelle que d'habitude.

    Pendant que nous nous organisons ici, pour l'information des membres du comité qui n'auraient pas eu l'occasion de lire la biographie de M. Lindsey, il a obtenu un baccalauréat en mathématiques et en physique à l'Université de Toronto, une maîtrise à l'Université Queen's et un doctorat à l'Université Cambridge, en physique nucléaire dans les deux cas; il a travaillé au sein du groupe de recherches en campagne du Conseil de recherches pour la défense au ministère de la Défense nationale du Canada. Il a dirigé les sections de recherches en campagne du Commandement de la défense aérienne ainsi que le Centre de guerre anti-sous-marine SACLANT de l'OTAN en Italie, puis a été chef du Centre d'analyse de recherche opérationnelle au quartier général de la défense de 1967 à 1987. Depuis sa retraite, comme je l'ai signalé plus tôt, il oeuvre au sein de l'Institut canadien des études stratégiques et il participe également aux activités de l'Institut canadien pour la paix et la sécurité internationales.

    Peut-être pouvons-nous commencer les présentations, monsieur Lindsey.

+-

    M. George Lindsey: Ils sont en train de brancher leurs écouteurs en ce moment.

    Nous avons ici...je pense à lui en tant que commodore de l'air Greenaway, mais il est également brigadier-général Greenaway; il est probablement le plus grand spécialiste canadien pour ce qui est de l'examen du Nord canadien depuis les airs et de la navigation sur des territoires qui n'ont jamais été cartographiés. Il possède donc d'excellentes connaissances sur les questions liées aux forces de l'air.

    Monsieur Dwight Fulford, ancien agent du service extérieur qui s'est rendu dans de nombreuses parties du monde à titre de membre de délégations à l'étranger.

    Nous avons également... Je pense que vous avez dû comparaître devant ce comité de nombreuses fois. Je ne sais comment expliquer toutes ces choses que vous avez faites.

    Lorsque nous avons lu des choses sur lui dans les journaux pour la première fois, il était au Vietnam où il s'occupait de transmissions chez l'ennemi, parce que les Américains ne pouvaient y aller et depuis, il a eu toutes sortes de missions extraordinaires dans différentes parties du monde, particulièrement en ce qui a trait aux renseignements et aux relations canadiennes, américaines et d'autres types de relations internationales. Nous avons M. David Kirkwood et je ne sais si je dois dire de lui qu'il est de la Défense nationale ou des Affaires étrangères, parce qu'il a passé des parties de sa vie à travailler pour ces deux ministères et il a également été sous-ministre dans une sorte de boîte à intrigues financières.

    Le général Beattie a été un de nos principaux chefs dans les opérations de maintien de la paix à Chypre et il a également été chargé de la défense dans le Nord pendant un certain nombre d'années. Il a participé à une étude antérieure de l'ICAI sur les affaires nordiques qui a produit beaucoup de choses intéressantes; il en sait beaucoup sur le Nord.

    Nous avons Bob Edmonds, autre agent du service extérieur, qui a dirigé la section de la capitale nationale jusqu'à il y a quelques années. Il a eu affaire à ce genre de questions pendant la plus grande partie de sa vie. Je pense qu'il n'aime pas l'idée qu'on place des armes dans l'espace. Nous avons toutes sortes d'idées différentes dans notre groupe.

    De toute façon, voilà ceux qui se sont présentés à la séance.

¿  +-(0930)  

+-

    Le président: Très bien.

    Peut-être pourrions-nous commencer avec les questions maintenant. Madame Gallant, vous avez sept minutes. 

+-

    Mme Cheryl Gallant (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.

    Avec les États voyous et la Chine maintenant qui ont accès à des missiles balistiques intercontinentaux, est-ce que votre organisme croit qu'il est maintenant nécessaire d'installer des intercepteurs antimissiles balistiques dans l'Arctique?

+-

    M. George Lindsey: Je pense que la plupart des personnes dont nous avons suivi et respecté les travaux ne voient pas vraiment une grande menace dans le cas des États voyous et des missiles balistiques intercontinentaux; certainement pas dans un avenir rapproché et il est permis d'en douter fortement pour ce qui est de l'avenir éloigné. Les deux choses que vous avez mentionnées—l'acquisition d'armes de destruction massive et l'acquisition de missiles balistiques de portée intercontinentale—sont des choses extrêmement difficiles à réaliser et seul un grand pays qui travaille pendant des années peut y parvenir. Il y a une possibilité que ces pays puissent acheter ou voler ou acquérir autrement certains éléments, et je pense qu'il est très vraisemblable que ces gens puissent mettre la main sur des armes biologiques ou chimiques dont ils seraient capables de se servir. Mais les armes nucléaires, c'est beaucoup plus difficile, et les missiles balistiques intercontinentaux, c'est presque impossible.

    Nous ne voyons pas pourquoi cette question suscite tant d'inquiétudes et pourquoi elle a une telle priorité dans leur budget de défense. Maintenant, si tous ce qu'ils faisaient, c'était de travailler pendant des années pour parfaire leurs défenses contre les missiles balistiques de quelqu'un, cela serait sensé. Mais de mettre cette question au sommet des priorités alors qu'il y a tant d'autres menaces dans le monde—parmi lesquelles les missiles balistiques à courte portée figurent en très bonne place—cela semblerait une chose encore beaucoup plus sensée. Notre attitude serait de dire que nous ne sommes pas d'accord avec les priorités américaines, mais que nous voyons ce qu'ils essaient de faire.

+-

    Mme Cheryl Gallant: Merci beaucoup.

    Vous avez parlé des missiles à courte portée. Qu'est ce que votre groupe proposerait pour protéger les eaux côtières d'Amérique du Nord contre des navires marchands qui pourraient avoir été affrétés par des États voyous ou des groupes terroristes et qui seraient capables de lancer des missiles sur des villes nord-américaines?

+-

    M. George Lindsey: Je pense qu'il s'agit de l'une des menaces les plus difficiles à contrer et parmi les plus vraisemblables. Si une surveillance aérienne vous dira qu'un navire s'approche, il y aura en tout temps des milliers de cargos provenant de partout dans le monde sillonnant tous les océans du monde. Il n'est pas vraiment possible de dire à partir d'une surveillance aérienne comme celle-là si quelque chose de tel se prépare. Je dirais que le seul moyen de défense efficace contre cette situation, c'est d'être en mesure de monter à bord des navires et de procéder à une inspection des lieux avant de les autoriser à accoster dans un port.

    Maintenant, si nous avons un très bon système de renseignement qui pourrait nous dire, d'une façon quelconque, que parmi ces milliers de navires, tel ou tel navire est un peu suspect ou tel ou tel navire provient d'un endroit où nous savons qu'il y a des terroristes ou des fabricants d'armes, alors, on pourrait le désigner pour faire l'objet d'une inspection, qui devrait être faite par des petits navires de la Garde côtière ou de la marine. Des gens monteraient à bord du navire pour l'inspecter de fond en comble. Je pense que c'est la seule façon que nous avons de contrer une telle menace.

+-

    Mme Cheryl Gallant: À votre avis, est-ce que les États voyous ont la technologie leur permettant de lancer sur le continent un missile à courte portée à partir des eaux côtières; ou pensez-vous que cette idée n'est pas réaliste en ce moment?

+-

    M. George Lindsey: Je pense que c'est réaliste. Il y a des milliers de missiles balistiques à courte portée éparpillés un peu partout dans le monde, sous le contrôle de nombreux pays, dont bon nombre faisaient partie de l'ex-Union soviétique. Je suis certain que beaucoup de missiles du genre SCUD sont à vendre ou peuvent être volés.

    S'arranger pour en lancer un depuis un navire n'est pas terriblement difficile. Ce qu'il faut pour les lancer n'est pas très complexe. Il faudra un certain travail d'ingénierie pour adapter le cargo, mais je pense qu'on peut le faire. Je crois que c'est une possibilité. Si le missile n'est armé que d'une tête hautement explosive, les dommages ne seraient pas tellement importants; par contre, s'il était armé d'une tête nucléaire, les nouvelles seraient beaucoup moins bonnes. Mais, encore une fois, cela suppose que l'on demande aux terroristes d'être beaucoup plus avancés que nous pensons que cela leur est possible en ce moment. Je pense que c'est quelque chose qui devra être étudié très attentivement.

¿  +-(0935)  

+-

    Mme Cheryl Gallant: Vous avez dit que la surveillance aérienne pourrait peut-être détecter quelque chose comme cela. Est-ce que les capteurs IR montés sur les satellites seraient en mesure de détecter un tel missile à temps?

+-

    M. George Lindsey: Après son lancement, oui, ils le détecteraient. Mais s'il s'agit de missiles à courte portée, la durée du vol d'un tel missile n'est que d'environ huit minutes. Et si le navire se rapproche très près de la côte et qu'il vise des cibles plus rapprochées, on parle de beaucoup moins que huit minutes. Faire en sorte que l'ensemble de l'Amérique du Nord soit protégée par une sorte de système qui réagit en huit minutes n'est pas une tâche facile.

    De plus, vous perdriez plusieurs des huit minutes à vous demander quel est cet objet chaud à l'endroit ou tel ou tel navire se situait—et il se déplace, il se déplace. Vous pouvez prendre conscience, dans l'espace de quelques minutes, qu'il s'agit d'un missile à courte portée, mais il faudra un système qui réagit vraiment rapidement et avec une précision remarquablement et il n'y aurait pas de temps pour appeler le président ou consulter un manuel. Et ensuite, même si on sait qu'il s'agit d'un missile, assurer une défense contre des missiles à courte portée tout le long des côtes de l'Amérique du Nord serait une entreprise vraiment gigantesque qui, à mon avis, ne serait pas pratique.

+-

    Mme Cheryl Gallant: Si la technologie des lasers dans l'espace était en place, est-ce que ces derniers seraient même en mesure d'intervenir?

+-

    M. George Lindsey: Oh, mais la technologie existe. C'est ce que font les systèmes pour nous défendre contre les missiles de courte portée et c'est ce qu'ils ont pu faire en Irak il y a quelques semaines. Mais il faudrait en avoir beaucoup, partout le long de la côte, et il faudrait des soldats qui se relayent aux trois heures, et s'il y en a un qui se trouve à regarder par la fenêtre et à prendre une partie de vos huit minutes, ce serait trop tard. Cela ne paraît tout simplement pas très pratique.

+-

    Le président: Merci, monsieur Gallant.

    Monsieur LeBlanc.

+-

    M. Dominic LeBlanc (Beauséjour—Petitcodiac, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Merci beaucoup, monsieur Lindsey, de vos commentaires et aussi de vous être fait accompagner ce matin d'un groupe de vos distingués collègues. Le large éventail d'expertise qu'il y a autour de cette table est intéressant. Je pense que nous pouvons apprendre beaucoup, et je crois que les Canadiens peuvent apprendre beaucoup, de votre expérience et des travaux que vous avez faits à l'Institut. Alors, je vous remercie.

+-

    M. George Lindsey: Et bien, je pense que je reviendrais au modèle de NORAD, où nous marchions main dans la main, absolument en symbiose avec les Américains. Je ne crois pas que nous ayons perdu la souveraineté; je crois que nous l'avons tout simplement rétablie, en quelque sorte, si tant est qu'il fut un jour où elle n'était plus établie. Je pense que le fait d'entreprendre des discussions avec quiconque sur quoi que ce soit ne change rien à la souveraineté.

    Des questions pourraient être soulevées sur le titulaire du pouvoir de prendre une décision. Le temps pourrait manquer pour consulter Ottawa et Washington. Peut-être devons-nous dire qu'un général de Colorado Springs est le détenteur de ce pouvoir, et peut-être est-il américain, mais en son absence, ce serait son substitut canadien. À mes yeux, ce n'est pas perdre la souveraineté, c'est simplement conclure une entente sensée avec un collègue. Maintenant, il se trouve que le collègue est dix fois plus gros et cent fois plus puissant que nous, alors ce n'est pas une coalition entre égaux, mais nous n'y pouvons rien. Je ne crois pas que notre souveraineté soit en péril, absolument pas.

    Je pourrais voir un risque si nous prenions l'autre approche et disions que nous n'avons rien à y voir parce que nous sommes purs et propres, faites donc ce que vous voulez. Supposons qu'ils décident qu'il leur faut une station radar dans le Nord, ou qu'ils veulent disposer des armes quelconques quelque part dans le nord-est, parce que c'est l'endroit approprié, et nous nous y opposons. Je ne sais pas ce qui arrivera, mais je pense que, à la façon qu'ont les Américains d'agir ces temps-ci, ils ne se gêneront pas.

    Je crois que c'est vraiment plus susceptible d'être le problème avec l'autre enjeu, le terrorisme. Si nous créons un bon système de surveillance aérienne des régions inhabitées de l'Amérique du Nord, pour savoir ce qui se passe dans notre pays, cela renforcerait notre souveraineté. Si nous avons des différends au sujet du Passage du Nord-Ouest ou d'autre chose, si nous savons ce qui se passe là-bas, plutôt que devoir le lire dans le New York Times, c'est confirmer notre souveraineté.

    Si nous ne le faisons pas et les Américains veulent savoir ce qui se passe là-bas, ils s'imposeront et le feront à notre place. Alors, je pense que la question de la souveraineté est très centrale dans cet argument, mais c'est à tourner le dos aux États-Unis que nous risquerions de la perdre.

    Je ne sais pas si certains de nos collègues plus érudits auraient quelque chose à dire là-dessus.

¿  +-(0940)  

+-

    M. Dominic LeBlanc: Je serais curieux de voir cela. Je ne sais pas, monsieur le président, mais si les collègues de M. Lindsey ont quelque chose à ajouter, ce serait sur mon temps. Je pense que ce pourrait être une discussion intéressante.

    J'en apprends sur ces choses, mais d'après ce que j'ai compris, l'une des possibilités, si le Canada accepte de discuter d'une éventuelle participation, serait celle d'intégrer le système national de défense antimissile à la NORAD plutôt que d'en faire un commandement strictement américain, un commandement du Nord, par exemple.

    À mon avis, le Canada aurait ainsi un rôle légitime et concret pour comprendre et coopérer à quelque chose comme le système national de défense antimissile, plutôt que de n'en être que l'observateur. Pensez-vous qu'on puisse dire, aussi, que NORAD est un meilleur véhicule où intégrer un système de défense antimissile de ce genre, plutôt qu'on ait quelque chose qui soit strictement sous commandement américain?

+-

    M. George Lindsey: Absolument.

+-

    M. Dominic LeBlanc: Monsieur le président, mon oreille s'est dressée lorsque M. Lindsey a parlé d'opportunités pour l'industrie canadienne. Dans mon esprit, c'est l'une des raisons pour lesquelles le gouvernement devrait mieux comprendre ce que proposent les Américains et discuter avec eux de moyens par lesquels nous pourrions peut-être participer, parce que cela pourrait ouvrir des portes à l'industrie canadienne, comme vous l'avez dit vous-même.

    Peut-être pourriez-vous en dire un peu plus au sujet de ces éventuelles opportunités. Vous avez parlé d'une espèce de système d'armement mobile comme un moyen par lequel nous pourrions faire participer l'industrie canadienne. Je me demande si vous ou vos collègues avez une idée du rôle que pourrait avoir l'industrie canadienne, à la lumière de ce que nous savons actuellement du plan américain.

+-

    M. George Lindsey: Eh bien, je demanderai au commodore de l'air d'ajouter quelques mots à ce que j'ai à dire.

    Le Canada a à son actif une bonne série de succès en matière d'espace. RADARSAT a été une invention révolutionnaire, et ses auteurs sont encore en train de conclure des affaires.

    L'enjeu dépend en partie de capteurs, d'infrarouge, de lasers ultraviolets. Le Canada est en tête de file de ceux qui développent cette technologie.

    Beaucoup dépend du transfert de données sur de grandes distances en peu de temps. Nous avons dû le faire parce que notre pays est tellement grand et vaste, alors nous y sommes devenus assez bons. Ensuite, il y a le traitement de l'information actuel, qui fait qu'on reçoit de l'information de toutes sortes de sources, qui va en un seul endroit, et d'une manière ou d'une autre, il faut constituer un tableau unique pour résumer le tout. C'est une forme de technologie électronique où le Canada ne se défend pas trop mal.

    Lorsqu'il s'agit d'éléments à bord d'aéronefs et de navires, ce ne concerne pas tant l'industrie que l'armée, mais la marine a passé de nombreuses années à surveiller la situation dans l'Atlantique nord, et elle se débrouille pas mal dans le domaine; elle s'est d'ailleurs montrée très compétente pour inventer ou améliorer l'équipement pour le faire. L'armée de l'air a fait pas mal de choses dans le Nord.

    Je vais demander au commodore de l'air Greenaway d'ajouter quelques mots là-dessus, s'il veut bien.

¿  +-(0945)  

+-

    M. Keith Greenaway (Institut canadien des études stratégiques): Oui.

    Je vais faire une rétrospective, et parler d'il y a 40 ou 50 ans. L'armée de l'air avait été chargée de faire des photographies du Canada pour créer notre première série de cartes du pays. Lorsque le programme trimetrogon a été terminé—c'est une prise de vue verticale et deux obliques—il a été remis aux mains de l'industrie, qui devait faire un suivi avec les verticales. Grâce à cette technique, et parce qu'elle est sortie de sphère militaire, nous avons créé une excellente capacité—de fait, la meilleure du monde—avec cette méthode de photographie. Par l'entremise de l'ACDI, elle a été employée outre-mer et en Afrique, et elle nous a acquis une bonne réputation.

    De là, bien entendu, nous sommes passés de la photographie à l'ultra-violet et aux diverses autres parties du spectre. Dans ce domaine, nous faisons efficacement concurrence aux Américains.

    Le fait est que nous n'avons pas eu à nous mesurer aux vastes exigences opérationnelles ou à l'industrie. Bon nombre des idées que nous avons eues au Canada ont fini par être exploitées au sud de la frontière. C'est justement ce qui est arrivé des aides à la navigation que nous avons conçues. Pour n'importe lequel des aéronefs sophistiqués qu'il y a aujourd'hui, on peut aller à la source et voir que le concept est venu du Canada à cause des problèmes que nous avons eus avec le pôle magnétique dans notre pays et les convergences extrêmes, et aussi les méridiens. Mais nos besoins intérieurs et notre base industrielle n'étaient pas assez grands pour pouvoir en faire autant à l'étranger. Ce sont les Américains, surtout, qui en ont tiré parti.

    Permettez-vous une petite digression? Je pense qu'on a bien le droit d'être très critiques à l'égard du fait que les Américains se considèrent menacés. Nous disons, eh bien, ils ne sont pas menacés. C'est notre interprétation. Mais si les Américains se sentent menacés—ce sont nos voisins, et s'ils se sentent menacés, c'est leur argent qu'ils dépensent—nous pouvons leur dire notre pensée.

    Cependant, nous sommes leurs bons voisins. Nous avons des échanges commerciaux avec eux, et tout le reste. D'accord, alors, comment pouvons-nous les aider? Nous ne sommes pas d'accord avec eux sur le principe de base, mais ce n'est pas bon pour nous de toujours les contredire. Demandons-leur, comment pouvons-nous vous aider à faire face à ce que vous considérez comme un péril pour vous?

    Nous divisons le tout et traçons une ligne en plein milieu. Nous pouvons dire nous ne sommes pas d'accord avec vous, mais nous vous aiderons, sachant pleinement que derrière tout cela, il y a de belles occasions pour notre industrie. Je prendrai bien l'autre voie, mais elle est bloquée.

    C'est pourquoi je défends aussi fortement, comme George, le travail sur ce que nous appelons la phase terminale, à court terme. C'est très utile. Nous avons eu du travail. L'usine Oerlikon, près du Richelieu, a un excellent système ADATS. De fait, il vaut mieux que le PAC-3 des Américains, mais il y a un problème politique qui fait qu'on ne peut pas le vendre là-bas, comme vous le savez certainement. C'était tout de même un bon système. Comme vous le savez, c'est lui qui a servi à assurer la protection lorsque le G8 se réunissait à divers endroits. C'était un système canadien, que nous avons conçu, en fait, d'après des critères canadiens. Nous n'entendons pas parler de lui. Notre politique nous interdit de faire la publicité de nos armes, mais c'est un système de défense.

+-

    Le président: Merci.

    Peut-être Commodore, pouvons-nous revenir sur le sujet plus tard. Il ne reste plus de temps à M. LeBlanc.

    Nous allons laisser la parole à Mme Wayne.

+-

    Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Merci beaucoup, monsieur le président.

    Je suis très honorée, monsieur Lindsey, d'être en compagnie de tant de titulaires de l'Ordre du Canada. Je vois les épinglettes, et je pense que c'est merveilleux, vraiment.

    Je me suis grandement inquiétée pour le Canada. Je dis cela, parce qu'à un moment donné, après le 11 septembre, nous avons appris que les terroristes avaient une liste de toutes les centrales nucléaires au Canada, dont l'une est à Saint-John, au Nouveau-Brunswick, dans ma circonscription, la centrale de Point Lepreau. Nous sommes plus près de la frontière américaine là-bas, aussi. C'est donc que certains terroristes s'intéressaient aux centrales nucléaires du Canada. Je m'en inquiète beaucoup depuis ce temps-là.

    De plus, comme je l'ai dit, 23 réservations avaient été faites de Saint-John à New York, mais elles ont été annulées. Ensuite, après le 11 septembre, il y en a un qui a été faite et maintenue, mais lorsque le type est arrivé à Toronto, ils ont appelé de Toronto pour nous dire qu'il avait fait un faux passeport, de fausses pièces d'identité, tout était faux. Sa photo était dans le journal.

    C'est pourquoi je pense que nous avons un rôle important à jouer dans cette situation. Nous nous sommes toujours sentis protégés et en sécurité, etc., mais je pense qu'il est temps que nous aussi nous nous mettions sur un pied d'alerte, que nous observions la situation et que nous soyons très prudents dans le futur, parce que tout cela m'inquiète vraiment. Nous devrions collaborer avec les Américains en matière de défense antimissile. Je pense que nous devrions travailler avec les Américains pour la défense, point. J'en suis convaincue. Nous sommes voisins. Oui, nous avons notre souveraineté, comme le disait Dominic, nous voulons la préserver et nous la préserverons. Ils ne nous demandent pas d'y renoncer.

    Je dois avouer que je suis très inquiète. Lorsque j'entends votre présentation, et que j'entends Dominic dire ce que nous pourrions faire ici, au Canada... Vous avez dit ici que nous devrions offrir de coopérer avec les Américains et je suis d'accord avec vous.

    Vous avez aussi dit que le fait d'entreprendre des recherches et le développement de systèmes mobiles conçus pour la défense aérienne et antimissile, le développement de technologies qui sont prometteuses pour accroître les capacités d'intercepter les missiles balistiques de courte portée et, en fin de compte, la première et la dernière parties des trajectoires des missiles balistiques intercontinentaux, offrirait des perspectives de participation par les industries de pointe du Canada qui possèdent l'expérience pertinente du développement des technologies nécessaires pour les véhicules spatiaux, les aéronefs, les capteurs à large spectre, les communications sur les longues distances, l'informatique et le traitement de l'information.

    Je pense que c'est très important. Ça l'est vraiment, à notre époque. J'ai des petits enfants, et je m'inquiète pour eux maintenant, parce que je ne pense pas que tout soit aussi sécuritaire que nous le voudrions. Je crois qu'il y a des gens, là-bas, qui s'intéresseront au Canada autant qu'aux États-Unis, parce que nous sommes si proches de la frontière américaine. Alors, je suis tout à fait convaincue que nous devrions jouer un rôle.

    Monsieur le président, j'aimerais que notre comité aille voir les gens de la NORAD. J'aimerais que nous allions là-bas, et le plus tôt sera le mieux. Je crois que c'est très important que nous y allions pour parler à ces gens-là, qu'ils voient que nous sommes disposés à participer, que nous sommes prêts à collaborer avec eux; il faut qu'ils le sachent.

    Si nous ne participons pas au système de défense antimissiles balistiques, croyez-vous, monsieur Lindsey, que nous ferons encore partie de la NORAD, ou est-ce qu'ils diront c'en est fini pour le Canada?

¿  +-(0950)  

+-

    M. George Lindsey: Madame, vous avez parlé de beaucoup de choses. Je pense que je pourrais demander à Blair Seaborn de m'aider à répondre à quelques-unes.

    Tout d'abord, vous avez parlé d'installations nucléaires, et ensuite vous avez dit que nous avons beaucoup d'autres choses précieuses qui pourraient être des cibles pour les terroristes. C'est tout à fait vrai, et je pense qu'avec la crise de l'énergie, les Américains seront de plus en plus empressés d'avoir l'électricité canadienne, de voir le combustible et le gaz canadiens passer par les pipelines. Beaucoup de pipelines sont dans des territoires inhabités, pratiquement sans défense. La centrale nucléaire serait une cible tentante. Il faudrait une arme relativement sophistiquée, je pense, pour en détruire une, parce que, pour des raisons qui leur sont propres, elles sont complètement entourées d'un épais bouclier. Si quelqu'un arrivait à y créer une fissure, ce serait, bien évidemment, très mauvais.

    En général, je pense que appuyez mes propos, lorsque je dis que les Canadiens doivent prendre une certaine initiative, essayer de songer à ce qu'on pourrait faire d'utile, et le faire. Je pense que c'est tout à fait fondamental. Nous sommes souvent critiqués pour toujours ne faire que réagir : nous attendons, puis les Américains pensent à quelque chose et nous disons oui ou non. Pourquoi ne pas, nous mêmes, penser à quelque chose? Nous le devrions et nous devrions agir.

    Ici, nous avons une belle perspective de pouvoir faire quelque chose qui fasse plaisir aux Américains et qui soient bonne pour nous aussi, et c'est là que, selon moi, ce serait rentable.

    Je pense que Blair Seaborn doit avoir des choses à dire à ce sujet. C'était un véritable expert des questions nucléaires, et il l'est encore. Peut-être ne peut-il pas, cependant, en parler.

¿  +-(0955)  

+-

    M. Blair Seaborn (Institut canadien des études stratégiques): Il n'y a rien qui justifie que je ne sois puisse pas en parler. Mon expertise, si expertise il y a, concerne l'élimination des déchets nucléaires.

    Au sujet de l'autre question, cependant, je n'en sais pas énormément, à part pour confirmer ce qu'il me semble vous avoir entendu dire, que la construction même de la plupart des centrales nucléaires est telle qu'il serait difficile d'y faire une faille.

    J'ai participé aux travaux d'un comité, récemment, en Afrique du Sud, et à des études là-bas, et nous avons conclu que même un avion qui s'écraserait sur une centrale nucléaire serait peu susceptible d'y faire beaucoup de dommages, à cause de la structure des installations.

    Cependant, j'ai un ami, à ma droite, qui est physicien nucléaire. S'il veut en parler, je lui cède la parole.

+-

    M. David Kirkwood (Institut canadien des études stratégiques): Je pense que je m'en abstiendrai. Mon expertise en physique nucléaire s'éteint en 1950, quand j'ai quitté Chalk River.

+-

    Mme Elsie Wayne: Comme c'est dans ma ville, où se trouve la plus grande raffinerie de pétrole privée du Canada, et aussi la centrale nucléaire... Et nous envoyons de l'électricité nucléaire aux États-Unis. Nous avons un contrat avec eux. Donc, nous avons un partenariat avec les É.-U. Peut-être est-ce parce que j'ai deux frères qui sont hommes d'affaires aux États-Unis, mais je suis tout à fait convaincue qu'il nous faut collaborer très étroitement avec les Américains, qui sont nos partenaires.

    Pensez-vous que si nous renonçons à participer au programme de défense antimissile balistique, nous ferons encore partie de la NORAD, ou est-ce que ce sera fini pour nous, avec les États-Unis?

+-

    M. George Lindsey: Eh bien, je pense qu'il y a beaucoup de gens dont la profession exige qu'ils suivent la question de très près qui ne sauraient même pas la réponse. Je pense que les États-Unis sont déterminés, lorsque leur propre sécurité est en péril. Comme le dit Keith Greenaway, peu importe que nous pensions ou non qu'ils sont en danger; s'ils pensent qu'ils le sont, ils agiront, et ne laisseront aucun autre pays qui n'est pas d'accord avec eux leur faire obstacle.

    Alors, je soupçonne que si nous ne jouons pas le jeu avec eux, en ce qui concerne la défense antimissile balistique—et si on se rappelle que la menace du bombardement est à peu près éliminée—il est probable que la NORAD se réduirait à quelque chose de bien moindre importance. Il y aurait certainement encore un élément de contrôle du trafic aérien et ce genre de choses, mais je pense que nous perdrions l'un de nos liens les plus précieux avec eux alors que, dans un sens, nous sommes actuellement égaux et nous participons à beaucoup des discussions auxquelles nous ne serions pas, autrement, invités.

    Beaucoup d'officiers canadiens qui ont servi au quartier général de la NORAD à Colorado Springs disent qu'après quelques mois, les Américains oublient qu'ils ne sont pas Américains, et ils forment vraiment une famille, et c'est une bonne chose.

+-

    Mme Elsie Wayne: Oui, c'est un fait.

    Merci beaucoup, monsieur le président.

+-

    Le président: Merci, madame Wayne.

    M. Lindsey, Commodore, j'ai quelques questions à poser, au sujet des observations du commodore de l'air.

    Vous avez vraiment piqué ma curiosité avec vos commentaires sur le système ADATS d'Oerlikon, et la capacité de défense aérienne à basse altitude que nous avons eue, dans le passé, au Canada. Il me semble, pour ce qui est de la discussion sur ce système de défense antimissile à diverses altitudes, que nous avons déjà en place certaines des composantes, si on regarde, par exemple, le radar au sol et l'accès aux capteurs spatiaux que nous avons par l'entremise de la NORAD et de certains de nos équipements, comme le système Oerlikon.

    Mais il me semble aussi, lorsqu'on regarde ce dont il a été question aux États-Unis, en fait de missile d'interception en phase de propulsion avec un système en mer, que les Américains utilisent le Standard Missile-3, le SM-3, à partir de leur destroyer équipé du système AEGIS. Nous utilisons le SM-2, à ce que j'ai compris, de nos frégates de classe iroquois. Pourriez-vous nous dire un peu ce qu'il faudrait pour améliorer certains de ces systèmes? Par exemple, expliquez-nous un peu ce que le système Oerlikon était censé empêcher. De toute évidence, il me semble que c'était un système de défense antimissile du champ de bataille.

    Pouvez-vous aussi expliquer les capacités par rapport au système PAC-3, le Patriot Advanced Capability-3, parce que le système PAC-3 semble avoir eu une bonne performance en Iraq, en fait d'interception de certains missiles. Peut-être pourriez-vous nous donner un peu plus d'information sur le sujet, parce que je peux vous dire que nous tous, assis ici autour de la table, sommes plus ou moins des néophytes en la matière.

À  +-(1000)  

+-

    M. Keith Greenaway: Le PAC-3—et en fait, le PAC-2 si on remonte plus loin—n'ont jamais vraiment été mis à l'essai hors d'un environnement très contrôlé. Le PAC-3 a abattu un aéronef britannique, ce qu'il n'aurait pas dû faire si le système avait bien fonctionné. Il reste encore beaucoup à faire pour améliorer le PAC-3. Il a été mis en service très rapidement, et il a été entouré de beaucoup de publicité et de battage médiatique.

    Les Américains ont une certaine philosophie... J'ai passé environ huit ans, au total, à faire de la recherche et du développement avec les Américains, dont deux ans au SAC. Ils ont tendance à prendre un système qui a un certain potentiel, le présenter et le laisser grandir. Aux phases initiales, le système échoue lamentablement, et ils continuent d'y travailler. C'est très difficile pour nous et pour d'autres. On lit les rapports qui sont diffusés, et on ne sait jamais si ce sont des faits ou si ce n'est que du baratin publicitaire.

    Le PAC-3 n'a pas vraiment été mis à l'essai. Même dans la guerre qui est en cours, il a eu de grave lacunes quand il fallait distinguer l'ennemi de l'allié.

+-

    Le président: J'ai cru comprendre, cependant, qu'ils ont réussi à abattre un ou deux missiles avec le système PAC-3. Peut-être est-ce que je me trompe? Vous en sauriez certainement plus sur le sujet.

+-

    M. Keith Greenaway: J'en doute encore. Je n'en dirai pas plus.

+-

    Le président: Pourriez-vous parler un peu du système Oerlikon, en rapport avec nos propres capacités sur ce plan et ce qu'il peut faire?

+-

    M. Keith Greenaway: L'Oerlikon a été conçu pour répondre à un besoin de l'armée canadienne, surtout pour la défense antichar et anti-aéronef, ce genre de portée. Ils ont augmenté sa portée au stade final pour intercepter l'ICBM, mais seulement en phase terminale.

    Ils avaient espéré pouvoir pénétrer le marché américain, mais c'est un peu comme nous, quand nous essayons d'accéder au marché américain avec un aéronef—c'est très difficile—et ils ont échoué.

    Mais le système Oerlikon a été mis à l'essai sur le terrain de façon continue, et ses possibilités ont été augmentées, non seulement pour atteindre des aéronefs à basse altitude, mais aussi la portée verticale, pour l'interception de missiles entrants. C'est fait, et le tir est contrôlé automatiquement. L'interception, la détection et le tir sont interconnectés.

    C'est un système assez simple, de ce point de vue. C'est un bon système, et je soupçonne que si nous avions une entente avec les Américains en matière de défense antimissile balistique, il seraient très heureux de nous avoir avec notre système de type Oerlikon pour la défense en phase terminale.

+-

    Le président: Monsieur Lindsay.

+-

    M. George Lindsey: En ce qui concerne la manière dont le système américain a fonctionné lors de la guerre la plus récente, les Américains disent que le PAC-3, le système Patriot muni du système plus sophistiqué, a abattu neuf missiles de courte portée. Ils étaient de très courte portée; ils avaient été en quelque sorte projetés de la région inférieure de l'Irak vers le Koweit. Ils ont affirmé en avoir abattu neuf. Nous verrons si c'est vrai ou non, mais même si ce n'était que cinq sur neuf, ce serait déjà bon.

À  +-(1005)  

+-

    M. Keith Greenaway: Je voudrais ajouter que certains de ces missiles de conception russe avaient plus de puissance que leur structure ne pouvait en prendre, et certains se sont désintégrés.

    L'analyse qui a été faite après la guerre du Golfe a révélé que c'est ce qui était arrivé. Ils ont constaté que lorsque le PAC-2 essayait d'abattre ces missiles, il ne le faisait pas. Il tirait dans le sens de ces missiles, mais beaucoup d'entre eux se désintégraient d'eux-mêmes à cause de leur faible construction structurelle.

+-

    Le président: Monsieur Lindsey.

+-

    M. George Lindsey: Si nous devions en dire plus au sujet de la capacité anti-aérienne, le général Beattie est l'un de nos grands spécialistes de la défense anti-aérienne. Je vais lui offrir de dire quelques mots.

    M. Kirkwood a quelque chose à dire au sujet de l'autre partie de la question.

    Clay, voulez-vous dire quelque chose au sujet de l'aspect anti-aérien?

+-

    M. Clayton Beattie (Institut canadien des études stratégiques): Nous avons des soldats qui reçoivent une formation et qui sont qualifiés pour le système ADATS. Je pense que vous le savez. Nous essayons de rester là et de nous accrocher. Aucun n'est déployé sur le terrain pour l'instant, mais ils sont disponibles et participent à des exercices d'entraînement.

+-

    M. David Kirkwood: Monsieur le président, au sujet d'un aspect différent des questions dont traite le comité, j'aimerais dire un mot sur les questions qui touchent à la souveraineté, qu'a soulevé M. LeBlanc. Pour ce faire, j'aimerais comparer deux situations qui ont revêtu de l'importance, ces derniers mois, dans les relations entre le Canada et les États-Unis.

    L'une de ces situations concernait la position américaine au sujet de l'Iraq, alors que nous subissions de très fortes pressions pour participer aux mesures que prenaient les États-Unis avec la Grande-Bretagne. Nous avons refusé de le faire sans l'aval des Nations Unies. C'était clairement une affirmation de souveraineté, et nous avons affirmé notre souveraineté à cette occasion, parce que le gouvernement avait conclu que ce que proposaient les États-Unis était mal, que ce n'était pas le bon moyen de régler ce problème particulier.

    La question de notre relation avec les États-Unis, en ce qui concerne la défense en Amérique du Nord, la défense antimissile, etc., touche aussi—ou, du moins, aux yeux de beaucoup de monde, du moins—la question de la souveraineté, mais je pense qu'il y a une importante distinction à faire. Ce qu'envisagent apparemment les États-Unis, dans ce domaine, sont des mesures pour se protéger d'une menace qu'ils perçoivent. Comme le disait M. Lindsay, nous ne sommes pas tout à fait d'accord avec eux sur l'imminence de la menace des missiles balistiques sur l'Amérique du Nord, mais je ne pense pas que nous puissions soulever la moindre objection au désir des États-Unis de se protéger contre de périls qu'ils jugent réels.

    Je ne vois pas en quoi notre souveraineté souffrirait d'une coopération avec eux relativement à de telles mesures, des mesures qui ne sont pas injustifiées dans un sens absolu, en ce qui nous concerne—la priorité peut être erronée, mais c'est une autre question—particulièrement si la coopération présente divers avantages accessoires pour nous, directement. Coopérer là-dessus est une affirmation positive de souveraineté.

    Je pense qu'il y a eu une certaine tendance, dans la discussion publique, à voir les deux enjeux comme étant quelque peu similaires. Beaucoup de gens, au Canada, n'étaient pas satisfaits de la position américaine sur l'Iraq. Il y a des gens, au Canada, qui considèrent que les États-Unis sont par trop militaristes, par trop agressifs, et que la défense antimissile balistique n'est qu'une autre manifestation du militarisme américain. Je pense que l'analogie est erronée, et elle a eu tendance à brouiller la discussion.

    Merci, monsieur le président.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Madame Gallant.

+-

    Mme Cheryl Gallant: Monsieur Lindsey, les huit minutes des missiles de courte portée me préoccupent encore. Avec la technologie d'aujourd'hui, ou peut-être ce qui est envisagé pour le futur, est-ce que le système laser spatial pourrait éliminer plusieurs de ces menaces? Comme vous l'avez dit, il n'était pas pratique de mettre les missiles en place ou d'aborder tous les navires qui sont dans nos eaux côtières, même provenant de pays suspects. 

    Que savez-vous de cela?

À  +-(1010)  

+-

    M. George Lindsey: Le laser implanté dans l'espace est l'un des projets qui est, je pense, le plus loin d'être achevé. C'est un problème technique d'une difficulté extrême, parce que les lasers sont un peu comme la lumière : Il ne faut pas beaucoup d'énergie pour avoir une toute petite ampoule et pourtant on peut la voir à des milles de distance; par contre, si on doit utiliser le laser pour détruire quelque chose, il faut projeter une quantité phénoménale de chaleur en très peu de temps, et il faut pour cela des millions de fois l'énergie qui suffirait à seulement éclairer quelque chose.

    Les rayons lasers ont été très efficaces comme une espèce d'équivalent du radar pour détecter la portée et la structure de quelque chose, ou pour envoyer des signaux. Mais pour en faire une arme, il faut une immense source d'énergie soudaine et cela, avec la technologie actuelle, nécessite un équipement très pesant et qui consomme beaucoup de combustible.

    Nous sommes presque parvenus à créer un laser terrestre. Les Américains ont une arme qui a réussi à détruire des fusées en vol. Je ne pense pas qu'ils aient déjà fait l'essai des missiles balistiques, mais ça viendra. Cependant, c'est une construction énorme qui pèse, je ne sais pas, des milliers de livres et elle n'est pas mobile.

    Ce serait plus facile si c'était sur un bateau, mais plus difficile de l'installer sur un aéronef, et pire encore de l'installer dans l'espace. Mais le laser aéroporté est l'un des grands projets, et c'est vraiment pour essayer de mettre dans le ciel une arme qui serait en mesure de détruite un missile au tout début de son vol. L'avantage du laser est qu'il concentre la chaleur, qu'il crée un point de chaleur énorme.

    Dans le cas du missile balistique, s'il a du carburant liquide, le réservoir est assez mince. Il est tout juste assez fort pour contenir le liquide. Et si on fait un trou dans le réservoir, le carburant s'échappe et, soit qu'il prend en feu ou qu'il explose, ou au pire, que le missile ne se rend pas à destination parce qu'il aura perdu une partie de son combustible.

    Je ne pense qu'il y ait beaucoup de doutes sur le fait qu'une arme au laser est sur le point d'être créée, mais quant à vouloir la mettre dans l'espace, c'est vraiment chercher la difficulté. Si l'aéronef qui doit le porter est tellement gros et lourd qu'il peut à peine, même, porter assez de combustible pour une longue sortie, il sera difficile de mettre dans l'espace un véhicule qui est censé y rester longtemps. Chaque kilogramme supplémentaire coûte très cher à mettre en orbite.

    Je pense que le laser aéroporté existera un jour. Un laser implanté dans l'espace existe pour la détection et la collecte de données. Ce n'est pas là pour être une arme, et ce ne le sera pas pendant encore longtemps. Mais c'est une technologie très prometteuse pour essayer d'attraper quelque chose au début de la trajectoire de vol, et je ne doute pas qu'on y travaillera très fort.

    Comme le radar, les lasers fonctionnent dans le noir, mais au contraire de la lumière, ils ne traversent pas les nuages. Donc, si on a affaire à un missile la plus courte portée, il ne prend pas bien longtemps à arriver au bout de sa période de combustion, moins d'une minute. Et s'il doit être sous le couvert des nuages pendant une bonne part de cette minute, vos chances sont assez minces, mais peut-être cela vaudrait-il la peine de tenter ces chances.

    La présence d'une arme aéroportée en poste pour protéger une cible 24 heures sur 24 nécessite au moins trois aéronefs qui prennent chacun des quarts, et deux autres dans l'aérogare. Il faut probablement cinq aéronefs pour garder un laser en poste, et il ne pourra pas couvrir un très vaste territoire. Donc il serait, à mon avis, extrêmement coûteux d'avoir tout un tas de ces équipements le long de la côte. Je pense que si nous attendons, nous verrons que les lasers vont faire de plus en plus de choses et, petit à petit, devenir des armes, de même que de l'équipement de collecte de renseignements. Mais ce n'est pas facile, et ce n'est pas pour demain.

À  +-(1015)  

+-

    Mme Cheryl Gallant: Merci.

    J'aimerais parler de désarmement. L'un de nos témoins, ici, est un expert qui a étudié la question des déchets nucléaires, ou qui a travaillé dans le domaine. J'aimerais savoir, selon vous, la transformation de la matière nucléaire des bombes en combustible pour les réacteurs nucléaires... Est-ce que vous connaissez le projet de combustible MOX? En quoi y verriez-vous est une solution générale pour nous débarrasser des armes de destruction de masse, et surtout nucléaires?

+-

    M. Blair Seaborn: Je pense que c'est le système qui a été établi entre les États-Unis et la Russie tout d'abord, selon lequel les Américains prendront une grande partie de ce plutonium et conviennent de le consumer dans des réacteurs américains. Il y a eu des suggestions de réacteurs canadiens, mais je ne sais pas où la question en est maintenant. C'est une façon utile de réduire la quantité de plutonium qui pourrait être utilisé à des fins militaires.

    Je n'ai pas suivi la question récemment, mais je crois que l'utilisation de ce combustible MOX pour les réacteurs a remporté un certain succès et que des progrès sont réalisés sur ce plan, ce qui contribuerait à réduire la disponibilité de la matière. Mais cela ne peut fonctionner que s'il y a un pays prêt à collaborer à l'autre bout, en l'occurence Russie, qui dit oui, nous aimerions nous débarrasser d'une part de notre plutonium, nous n'en voulons pas, et nous aimerions bien que vous nous aidiez à payer son achat et à l'utiliser dans nos réacteurs. C'est une bonne collaboration. Cela ne sert pas vraiment beaucoup quand le pays est peu disposé à collaborer, ou qu'il veut du plutonium à des fins infâmes.

+-

    Mme Cheryl Gallant: Donc, si nous rendons le plutonium plus précieux en le transformant en combustible, peut-être alors les représentants du gouvernement de la Russie seraient plus disposés à faire le suivi du plutonium plutôt que de le laisser entrer sur le marché noir, où les États hors-la-loi se le procurent.

+-

    M. Blair Seaborn: Une partie de l'entente, bien sûr, ferait qu'ils soient payés pour ce plutonium, mais il y aura toujours la tentation pour quelqu'un de la centrale de la Russie d'en vendre un peu sur le marché noir. Je pense que cela contribue à réduire la quantité qui est susceptible de se rendre jusque-là, mais cela ne l'empêche pas tout à fait.

+-

    Mme Cheryl Gallant: Je vous remercie.

    Dans quelle mesure est-il important, à votre avis, que le Canada ait extérieur?

+-

    M. Blair Seaborn: Je crains d'avoir pris une douzaine d'années de retard dans mes activités de renseignement, mais je reste un peu sceptique à l'idée de la création d'un système de renseignement extérieur. Tout d'abord, c'est extrêmement coûteux. Cela comporte de considérables risques politiques, et je ne suis pas tout à fait convaincu que la plupart des gouvernements canadiens auraient les nerfs assez solides pour le défendre si les choses tournaient mal. Il y a des choses qui vont de travers quand on se mêle de renseignement extérieur. Je soupçonne que c'est l'une des principales raisons qui fait que nous ne nous en sommes pas mêlés, les coûts financiers et politiques, lorsqu'on est quelque peu exposé par ce qui s'est passé.

    Nous avons un excellent système de mise en commun des renseignements avec plusieurs proches alliés, maintenant. Le Canada fait une contribution raisonnable à cet effort global, particulièrement par le biais du renseignement électromagnétique, qu'on ne peut même pas maintenant mentionner en public. Je ne sais pas si ce serait tout à fait rentable de faire une contribution supplémentaire par l'entremise de notre système de renseignement extérieur.

    Les avis diffèrent sur le sujet, et je pourrais probablement présenter des arguments dans un sens ou dans l'autre. Entre les deux, je serais tenté de dire que je ne suis pas sûre qu'il vaille la peine de s'en mêler.

+-

    Le président: Merci, madame Gallant.

    Monsieur Lindsay, j'aimerais vous poser quelques questions qui me semblent être tout à fait de votre ressort, en matière de physique et d'aspects scientifiques généraux se rapportant à la défense antimissile et à la manière dont le système fonctionne, ou dont il est censé fonctionner.

    Il y a eu des reportages des médias, récemment, selon lesquels le Canada pourrait devenir le principal champ de réception des débris de tout missile intercepté, qu'il soit nucléaire, biologique, ou chimique. Je n'en sais pas beaucoup sur l'aspect scientifique de la question, mais il me semble que si le système devait fonctionner comme il est censé fonctionner, c'est-à-dire que l'intercepteur abat le missile en phase de propulsion—et je suis sûr que vous me corrigerez si je me trompe—je pense que ces missiles se déplacent à quelque chose comme 17 000 milles à l'heure, avec une énergie cinétique provoquée par l'impact de deux missiles allant en sens contraire.

    Quel genre de danger y a-t-il, si, disons, il y avait interception d'un missile en milieu de trajectoire, en phase terminale ou en phase de propulsion aussi, pour les populations environnantes? Pouvez-vous nous faire une analyse de cette situation?

À  +-(1020)  

+-

    M. George Lindsey: Je pense que la menace dépendrait beaucoup de ce qui se trouve dans la tête explosive du missile. Si c'est un explosif détonnant, il est probable qu'il y aurait une explosion très haut dans l'espace, à 200 ou 300 milles au-dessus de la surface de la terre, et cela ne toucherait personne.

    Si c'est une charge biologique, alors, elle serait répartie loin là-haut, et je pense qu'elle se disperserait et subirait les rayons du soleil et la pression zéro, etc., ce qui ferait que toutes les bactéries seraient anéanties et que personne n'en serait touché.

    Si c'est une arme chimique, je ne pense pas que quelques centaines de livres de n'importe quel produit chimique horrible dispersé dans la haute atmosphère pourraient retomber sur la terre et poser un grand danger.

    Si c'est une tête explosive nucléaire et qu'elle n'explose pas, alors, on peut présumer qu'elle tomberait avec un choc quelque part, et si elle n'explose pas alors, on pourrait espérer que quelqu'un, en Amérique du Nord, la découvrirait et qu'elle serait désactivée. Mais si elle explosait et qu'il y avait une forte explosion à quelques centaines de milles au-dessus de la terre, 10, 100 ou 1 000 kilotonnes, elle provoquerait probablement une panne de beaucoup d'équipement électronique. Il y a une chose qu'on appelle l'impulsion électromagnétique, qui est très mauvaise pour les petits ordinateurs et leurs minuscules composantes, alors peut-être que nous n'aurions plus d'ordinateurs personnels dans toute la province du Manitoba ou quelque chose du genre. Je ne dis pas que ce soit une tragédie, mais c'est une possibilité.

    Je pense que lorsqu'on s'inquiète des débris, il y a aussi la question du fait que les fragments n'atteignent pas la vitesse de révolution orbitale. Les 17 000 milles à l'heure les garderait en orbite, mais peut-être que l'un d'eux irait à 14 000 milles, et l'autre à, peut-être 12 000 milles, et leurs débris finiraient un jour par retomber sur terre.

    Je pense que si on compare les dommages que pourraient provoquer pour les humains la détonation d'un missile balistique nucléaire qui parvient à sa cible dans une ville, on parlerait de centaines de milliers de morts. Je pense que si l'autre solution est de répandre quelques fragments de débris dans le nord du Canada, on ne peut pas trop s'en fâcher. Si j'étais Américain, j'enverrais la chose dans le ciel, où que doivent en retomber les débris, si cela devait sauver Chicago. Je pense que j'en ferais autant si c'était Montréal, Toronto ou Ottawa. Je dois faire attention à ce que je dis en cette compagnie.

+-

    Le président: Vous avez parlé de l'impulsion électromagnétique. J'ai lu un article, il n'y a pas longtemps, qui parlait de l'effet Cristofilos, que provoque l'explosion d'une arme nucléaire à faible orbite terrestre, ce qui, à ce que j'ai compris, est quelque chose entre 60 et 100 milles, ou à peu près...

À  +-(1025)  

+-

    M. George Lindsey: Ou un peu plus, oui.

+-

    Le président: ...et l'effet que cela aurait. Vous avez parlé des dommages qui seraient causés aux petits ordinateurs, etc.

    Il me semble que les pays comme la Corée du Nord, par exemple, auraient cette capacité, parce qu'ils ont une arme nucléaire, ou semblent du moins, en avoir une maintenant. Ils ont la technologie pour que leurs missiles puissent voler à faible orbite terrestre—probablement, avec leur missile Taepo Dong 2.

    Ceci touche à toute la question de l'armement de l'espace. Comment protéger l'équipement qui est dans l'espace? Il me semble qu'il y a probablement 100 milliards de dollars d'équipement dans l'espace en ce moment, et nous pourrions être mis à la rançon par des États hors la loi qui pourraient, en fait, s'approprier une vaste partie de notre système de communications sur terre, tout ce sur quoi dépendent nos communications satellite, que ce soit la chaîne sportive ou la transmission des données bancaires, ou même les millions et les millions, et probablement les milliards de transactions qui se font tous les jours actuellement, que nous prenons pour acquis, et dont une énorme partie pourrait être anéanti, si ce n'est l'ensemble, si une arme nucléaire explosait dans l'espace.

    Comment allons-nous protéger notre équipement dans l'espace s'il y a des pays comme, par exemple, la Corée du Nord, qui répudient complètement le cadre convenu dans l'accord de 1994 qu'elle a signée avec les États-Unis? Comment allons-nous protéger ces équipements s'il y a des pays dont la signature sur un traité international ne signifie absolument rien? Comment ferons-nous?

+-

    M. George Lindsey: Je vais dire quelque chose, puis je demanderai à Bob Edmonds d'ajouter ses commentaires parce que c'est une question qu'il suit depuis déjà longtemps.

    Je pense que le scénario dont vous parlez pourrait arriver, et ce serait une catastrophe. Mais l'un des moyens, je suppose, de contrer ce genre de choses, c'est de pouvoir détruire un satellite qui est en orbite. Il y a plusieurs moyens de le faire, mais le plus facile, de loin, pour les États-Unis, est d'utiliser l'un de leurs intercepteurs antimissiles et d'intercepter un véhicule à l'espace. Ce serait très facile.

    Un véhicule de l'espace, au contraire d'un missile balistique intercontinental, a une trajectoire prévisible. On sait exactement quand il va passer et où. Il passe plusieurs fois par jour, peut-être à portée de tir. Il ne peut prendre de mesure d'évitement, et il est très délicat. Donc, il serait très facile de le détruire avec une arme basée au sol, si on en a une. D'une certaine façon, je suppose qu'on pourrait dire que si nous avions un bon système d'interception des ICBM, nous pourrions aussi détruire les satellites. Toutefois, s'ils mettent un satellite dans l'espace et qu'à sa première orbite, il lâche une arme nucléaire, il est trop tard pour l'intercepter et nous y serions vulnérables.

    Je doute que la Corée du Nord puisse mettre quelque chose de ce genre en orbite. Il est vrai qu'ils ont fait l'essai de leur missile Taepo Dong et qu'il est parvenu à atteindre l'océan Pacifique, et ils pensent que, peut-être, sa prochaine génération pourrait atteindre la pointe de l'Alaska ou quelque chose du genre, mais ce serait probablement sans aucune charge utile. Une arme nucléaire, inévitablement, a une assez grosse charge utile, et la réduire est l'une des choses les plus difficiles que les Américains essaient de faire depuis 50 ans. Bien entendu, ils peuvent en mettre maintenant dans un obus d'artillerie, mais il fait encore quelque centaines de livres. C'est très lourd.

    Alors je ne pense pas que ce soit un danger qui se rapproche dangereusement, dangereusement vite. Et je pense que si l'un des moyens de défense est de détruire les satellites en orbite, ce serait beaucoup plus facile de le faire avec un système ABM si on en a.

    Bob, vous suivez la question depuis déjà longtemps.

+-

    M. Robert Edmonds (ancien président, Section de la Capitale nationale, Institut canadien des affaires internationales): Mon expertise date de l'époque où j'étais conseiller politique à la mission des Nations Unies à New York. J'étais le représentant canadien au comité sur les utilisations pacifiques de l'espace extra-atmosphérique. À l'époque, nous avions eu l'incident du Cosmos 954, le réacteur nucléaire soviétique qui avait atterri dans les Territoires du Nord-Ouest et avait clairsemé sur une grande partie des Territoires des fragments radioactifs qui avaient une période radioactive de 10 000 ans,.

    Ceci a causé une vive consternation aux Nations Unies, parce que l'idée de l'utilisation pacifique de l'espace extra-atmosphérique est un concept largement accepté aux Nations Unies. Le nettoyage des Territoires du Nord-Ouest nous a coûté près de six millions de dollars, mais nous avons récupéré trois millions de dollars de l'Union soviétique, parce qu'eux aussi attachaient de l'importance au concept de l'utilisation pacifique de l'espace extra-atmosphérique.

    Vous demandez comment nous pouvons empêcher un élément nucléaire d'aller dans l'espace extra-atmosphérique? Je pense que nous devons compter sur la diplomatie. La Corée du Nord, en dépit des preuves du contraire actuelles, je pense, devrait écouter l'avis de l'Union soviétique, ou de la Russie maintenant. Je pense que le consensus est assez général, dans l'ensemble du monde multilatéral, sur l'utilisation pacifique de l'espace extra-atmosphérique, que tout pays qui tenterait cela risquerait d'être considérablement dénigré.

    Et je pense, comme vous l'avez dit, qu'il y a tellement d'information satellite, etc., que l'enjeu économique est très grand aussi.

À  +-(1030)  

+-

    Le président: Pour faire un suivi de cette question, nous avons vu, en ce qui concerne certains régimes ou groupes islamiques radicaux, qui s'intéresseraient à créer des gouvernements islamiques radicaux à certains égards, qu'ils n'y seraient peut-être pas intéressés. Ils pourraient être heureux de pouvoir asséner des coups à l'Occident. Ils pourraient être intéressés à faire tout, sauf coopérer sur une base multilatérale, pour protéger ce qu'ils considèrent comme leur intérêt.

    Je pense que le temps où nous pouvions compter exclusivement sur la diplomatie, lorsqu'il y avait un groupe de pays—je pense, ici, aux années 60 et 70—qui étaient très prévisibles dans leurs réactions aux enjeux internationaux, n'est plus. Ce pourrait être l'avènement d'une conjoncture stratégique où le chantage international ou les actes de terrorisme à très grande échelle, les actes criminels à très grande échelle, sont plus la norme que les pays qui signent un morceau de papier et sont tenus responsables devant un tribunal d'opinion publique international de l'observation de toutes les clauses d'un traité particulier.

    Ne pensez-vous pas que la conjoncture internationale a changé un peu ainsi et, peut-être, que nous ne devrions peut-être pas nécessairement faire confiance à tous ces joueurs internationaux qui peuvent être bien beaux parleurs quand il s'agit d'adhérer aux accords internationaux, mais qui, comme la Corée du Nord, font des choses qui sont absolument contraires à ce qui pourrait être considéré nécessaire à la paix et à la sécurité internationales?

+-

    M. Robert Edmonds: Je pense qu'on peut dire qu'il y a eu un changement de climat depuis le 11 septembre. Mais comme le disait M. Lindsey, je ne crois pas que ces soit disant pays hors-la-loi ont la technologie nécessaire pour lancer une attaque dans l'espace.

+-

    Le président: Pas pour l'instant.

+-

    M. Robert Edmonds: Non, pas pour l'instant. Je pense que la menace réelle est sur l'eau, les choses qui peuvent venir de la mer dans des conteneurs, etc. Je ne crois pas que l'espace extra-atmosphérique soit un problème en ce sens.

+-

    Le président: Madame Wayne.

+-

    Mme Elsie Wayne: Tout à l'heure, monsieur Lindsey, vous parliez de navires étrangers qui pourraient venir, porteurs de missiles et vous disiez que la Garde côtière devrait pouvoir aborder ces navires et les fouiller, et quoi encore.

    Je crois que ce qui m'inquiète le plus, et je l'ai constaté chez-moi, c'est que nous avons tellement réduit le budget de la Garde côtière au Canada, aux deux extrêmes du pays. C'est ce qui m'inquiète plus que tout, parce que depuis qu'on a supprimé la police portuaire et que la Garde côtière a été réduite, j'ai vu la quantité de drogues qui sont entrées à bord de navires. On l'a constaté à notre port de Saint John.

    Alors je me demande, si nous devions nous joindre aux États-Unis pour la défense antimissile balistique, et collaborer avec eux, s'il nous faudrait augmenter nos budgets. Cela ne fait aucun doute. Je me demande si nous nous abstenons parce que nous n'avons pas les moyens, dans le budget, actuellement. Comme vous le savez, nous venons d'envoyer nos militaires en Afghanistan, et nous ne leur avons donné aucun moyen de se protéger. Nous comptons sur les Allemands pour protéger nos hommes et nos femmes en uniforme. Et pourtant, comme je le disais tout à l'heure, nous venons de finir, la semaine dernière, de célébrer le soixantième anniversaire de la bataille de l'Atlantique, qui a eu lieu pendant la Seconde guerre mondiale, et les Allemands étaient alors nos ennemis.

    Pensez-vous que le budget, le manque d'argent pour que nous puissions aller de l'avant, nous empêche de dire oui, nous allons participer à la défense antimissile, avec les États-Unis?

+-

    M. George Lindsey: Oui, je pense que c'est un sujet de préoccupation. Le problème, c'est que nous ne savons pas combien cela coûterait. Nous ne le saurons pas avant qu'ils nous disent bien des choses, et ils ne nous diront rien à moins que cela vaille la peine de nous parler. Alors, je pense qu'en un sens, c'est un dilemme.

    Ce que vous dites, au sujet de la Garde côtière, est très important. La marine américaine n'a pas tout à fait les mêmes relations avec la garde côtière que la marine canadienne entretient avec la sienne. Elle fait presque partie intégrante de la marine américaine, et elle reçoit une énorme augmentation—non pas pour la défense antimissile balistique, mais pour la lutte au terrorisme—justement pour le genre de choses dont vous avez parlé.

    Je crois qu'il fait peu de doute, si nous devons tenir notre parole en matière de lutte au terrorisme—et c'est un sujet où nous sommes d'accord avec les Américains, nous pensons que c'est une priorité—nous devons faire plus en matière de surveillance de la surface de l'océan aux abords du Canada. Que ce soit avec la marine ou la Garde côtière, je n'en sais rien; ce serait quelque chose à déterminer plus tard. Mais cela ressemble à une fonction de la Garde côtière. Il doit ensuite y avoir un lien avec les inspections qui sont faites à terre. Ce sera utile si des gens ont vérifié un bateau et ont dit « nous pensons que celui-là ne pose pas de problème, quand il arrivera, ne perdez pas votre temps avec lui », ou « nous n'aimons pas tellement l'aspect du premier conteneur, alors peut-être devriez-vous envoyer quelqu'un avec un instrument pour voir s'il est radioactif ».

    En matière d'inspection des conteneurs, je pense que nous n'avons le temps, l'équipement et le personnel pour inspecter que 2 p. 100 des conteneurs qui arrivent. Eh bien, ce n'est pas vraiment une grande protection. Maintenant, je suppose que c'est pour les douanes et l'immigration.

    Il y a toutes sortes de ministères qui ont de choses à faire. Ce n'est pas le sujet auquel notre groupe s'est intéressé. Nous avons étudié ce que l'armée peut faire. Mais je pense que ce que l'armée peut faire a beaucoup à voir avec l'observation de la surface de l'océan et avec les navires, peut-être, avant qu'ils arrivent trop près des côtes canadiennes ou américaines.

À  +-(1035)  

+-

    Mme Elsie Wayne: Eh bien, chez moi, vous le savez peut-être, ils ont automatisé nos phares et en ont éliminé le personnel, mais ils n'ont pas automatisés les phares de Vancouver, ni de nulle part ailleurs au Canada ou à Terre-Neuve.

    Je suppose que j'aurais peut-être dû protester plus fort à l'époque, Dominic, mais je pensais que cela allait se faire partout dans le pays. Je me trompais.

    Ici, nous avons les plus hautes marées du monde. Il y a des bateaux qui viennent et nous avons les plus grandes raffineries de pétrole privées du monde, comme je l'ai déjà dit, et les plus gros navires pétroliers viennent à notre raffinerie de pétrole d'Irving, alors qu'il n'y a personne à notre phare. S'il y avait un problème avec l'un de ces gros pétroliers, il se répercuterait jusqu'aux États-Unis, parce que nos eaux descendent vers les États-Unis. Et ce serait la fin de la pêche, à ce moment-là.

    Alors, tout cela m'inquiète énormément. Je ne veux pas faire de jeux de politique lorsqu'il s'agit de mettre de l'argent dans le budget. Je pense que nous devons définir correctement nos priorités. Je crois que les gens, au Canada, seraient vraiment très favorables à mettre beaucoup plus d'argent dans le budget, particulièrement pour que nous puissions collaborer avec les États-Unis sur la défense antimissile, mais aussi pour travailler avec nos militaires, etc. Ils sont vraiment très peinés de voir nos hommes et nos femmes qui partent outre-mer sans être munis de moyens de se protéger. Nous le savons tous, nous avons perdu du monde en Afghanistan. C'est donc une grande préoccupation, monsieur Lindsey.

    Je tiens à vous remercier tous d'être venus aujourd'hui.

    Je suis appelée ailleurs. Je suis l'un des juges d'une cérémonie d'octroi de bourses d'études de TD, comme le sait le père de Dominic. C'est lui qui m'a mise là. Je dîne avec eux aujourd'hui, alors je dois partir bientôt.

+-

    Le président: D'accord, merci, madame Wayne.

    Monsieur LeBlanc.

+-

    M. Dominic LeBlanc: Merci, monsieur le président.

    Je ne sais pas si vous, monsieur le président, ou Cheryl, avez d'autres questions sur l'aspect de la défense antimissile.

    Monsieur Lindsey, vous avez dit que votre groupe s'était penché sur la question du terrorisme. Dans le temps qu'il nous reste, j'aimerais savoir si vous pourriez, à tout le moins, commenter un peu la question. Vous avez éveillé notre curiosité, en disant que vous avez étudié le sujet qui, je pense, comme vous et vos collègues l'avez dit, a été moins compliqué dans les relations entre le Canada et les États-Unis, puisque nous partageons la même préoccupation à l'égard du terrorisme. Je serais curieux d'entendre vos points de vue là-dessus.

+-

    M. George Lindsey: Je le ferais volontiers, mais je me suis rendu compte, quand j'ai préparé mon exposé, que celui-ci prendrait plus de 10 minutes. J'ai donc laissé de côté la partie sur le terrorisme.

    M. Dominic LeBlanc: Je viens de vous accorder six minutes de plus.

    M. George Lindsey: C'est exactement ce que je veux dire.

    La plupart des Canadiens s'inquiètent probablement davantage de la menace que constituent les groupes terroristes internationaux pour l'Amérique du Nord, que des ICBM que peut lancer la Corée du nord.

    Ces terroristes ne sont probablement pas en mesure de s'équiper de bombardiers à long rayon d'action, d'ICBM, ou de missile balistiques à lanceur sous-marins. Toutefois, ils peuvent fort bien acquérir des missiles balistiques à courte portée ou des missiles de croisière, de même que des navires cargo délabrés qui pourraient lancer une bombe nucléaire dans un port, transporter des explosifs de grande puissance ou encore être équipés de lance-missiles capables de disperser des produits chimiques ou biologiques.

    Or, au lieu de lancer une attaque depuis l'extérieur du continent, il serait, semble-t-il, plus facile pour les terroristes de faire entrer des personnes ou peut-être du matériel aux États-Unis ou au Canada, de réunir leurs équipes et d'assembler leurs armes, de faire des préparatifs et de livrer leur attaque depuis l'intérieur du continent.

    Il existe deux grands domaines d'action où les forces militaires canadiennes et américaines pourraient contribuer à la défense de l'Amérique du Nord contre les attaques terroristes. Le premier est la prévention de l'entrée de terroristes ou de leur matériel sur le continent. L'autre est la détection de terroristes qui se sont déjà établis sur le continent, leur capture ou leur neutralisation.

    Maintenant, pour ce qui est des avions qui arrivent de l'extérieur du Canada ou des États-Unis, l'entrée en Amérique du Nord peut se faire au moyen de petits avions provenant de l'Amérique centrale ou des Antilles qui atterrissent sur des lacs ou des petits aéroports où il n'y a aucun inspecteur.

    Il existe une autre forme d'entrée clandestine, soit les petits bateaux qui peuvent s'amarrer près des petites collectivités côtières dans l'espoir de faire entrer des personnes ou du matériel sans subir les contrôles des inspecteurs. L'entrée peut également se faire au moyen de bateaux plus gros qui transfèrent des passagers et du matériel dans de petites embarcations rapides capables de s'amarrer à des petits ports dirigés par des collaborateurs.

    Il faut absolument assurer la surveillance efficace des zones d'approche aérienne et des eaux côtières entourant le continent.

    La police peut, avec l'aide des services de renseignement et de citoyens vigilants, être en mesure de détecter la présence de terroristes sur le continent canadien ou américain. Toutefois, il est plus difficile pour elle de détecter et d'observer les terroristes établis dans les régions peu peuplées du continent. Nous devons être en mesure d'assurer la surveillance du continent, des voies maritimes et des zones d'approche aérienne.

    Les radars militaires assurent, dans une certaine mesure, la surveillance aérienne des zones périphériques du Canada. Cependant, le contrôle du trafic aérien, lui, s'appuie surtout sur la coopération de l'avion, coopération qui suppose le dépôt des plans de vol, la communication vocale et la présence d'une balise répondeuse automatique.

    Les navires et les avions volant à basse altitude peuvent être détectés au moyen de radars installés dans des ballons captifs ou par des radars côtiers à ondes de surface. Il existe deux radars de ce genre à Terre-Neuve. Il s'agit là d'un dispositif important que les États-Unis n'ont pas encore mis en place.

    Pour ce qui est de la surveillance aérienne de la surface de la terre et de la mer, il est possible, grâce à la technologie moderne, de monter divers types de capteurs à bord d'un satellite ou d'un avion, et ainsi d'assurer la surveillance de zones immenses. L'industrie canadienne a fait oeuvre de pionner à cet égard avec le RADARSAT, un satellite qui fournit maintenant des renseignements à de nombreuses fins civiles. Le Commandement maritime des Forces armées canadiennes assure depuis de nombreuses années la surveillance des voies maritimes en Amérique du Nord.

    Ainsi, le rôle que nous suggérons pour le Canada est le suivant. Le Canada pourrait contribuer de manière importante à assurer la défense de l'Amérique du Nord contre le terrorisme en se donnant pour mission d'assurer la surveillance aérienne des approches septentrionales du continent, de la surface de la masse continentale et des régions peu peuplées du Canada. En plus d'assurer la sécurité du Canada et des États-Unis, cette surveillance offrirait des services extrêmement utiles à divers secteurs d'activité : mentionnons l'agriculture, la forêt, la recherche et le sauvetage, le développement du Nord.

À  +-(1040)  

    Voilà, en gros, ce que nous pensons de la défense contre le terrorisme. Vous aurez remarqué que nous n'avons parlé ni du renseignement étranger, ni des mesures que devraient prendre les villes qui ont été la cible d'une attaque. Ce que nous proposons est une étape intermédiaire : il faut empêcher l'entrée de terroristes en Amérique du Nord. S'ils entrent, il faut les détecter avant qu'ils ne se livrent à des activités.

À  +-(1045)  

+-

    Le président: Y a-t-il autre chose, monsieur LeBlanc?

+-

    M. Dominic LeBlanc: Oui, monsieur le président.

    Je voudrais savoir une chose. Le Comité des pêches, dont je fais partie, discute souvent de questions qui ont trait au contrôle de la circulation maritime et côtière, une responsabilité qui relève de la Garde côtière. Il semble y avoir des lacunes importantes au niveau de la couverture radar des approches sur la côte ouest du Canada. J'espère qu'on va s'attaquer à ce problème. Comme l'a indiqué Mme Wayne, cette situation est attribuable à des problèmes de financement que connaît peut-être, entre autres, la Garde côtière.

    C'est la première fois que j'entends parler du radar à ondes de surface à Terre-Neuve. De quoi s'agit-il? Est-ce un dispositif de contrôle de la circulation maritime? Un dispositif de surveillance militaire ou navale? J'aimerais en savoir un peu plus là-dessus.

+-

    M. George Lindsey: Le radar a un champ d'action limité, car son rayonnement étant presque rectiligne, il ne peut capter les objets qui survolent au-delà de son horizon. Toutefois, au-dessus de l'eau salée, qui est un conducteur d'électricité, le faisceau radar a tendance, étrangement, à dessiner une courbe vers le bas. Si l'antenne est orientée vers le haut, l'horizon radar sera d'environ 35 milles. Toutefois, le système radar de surface, qui est un radar à très basse fréquence, permet de repérer les objets au-delà de l'horizon, sur une distance d'environ 200 milles. Donc, le radar peut repérer presque n'importe quel navire et avion volant à basse altitude sur la surface de l'eau.

    Évidemment, ce que j'ai dit s'applique aux avions. Ils ne volent pas en rase-mottes, mais à basse altitude.

    Le Canada a fait oeuvre de pionnier à ce chapitre. Il y a deux radars dans les extrémités de la presqu'île Avalon, à Terre-Neuve. Leur précision en azimut laisse à désirer, en raison de la basse fréquence des radars, mais pas leur précision en distance. Donc, les radars captent tous deux un signal et suivent l'objet, qu'il s'agisse d'un navire ou d'un avion. Bien entendu, ils sont en mesure d'identifier très vite l'appareil, d'après la vitesse de celui-ci. Le Canada a été un précurseur dans ce domaine, mais son travail n'a jamais été apprécié à sa juste valeur.

    Je ne sais pas si Keith a quelque chose à ajouter, parce qu'il n'aime pas, lui non plus, les avions qui volent à basse altitude.

+-

    M. Keith Greenaway: C'est le Canada qui a mis au point cette technologie. L'entreprise Raytheon, de Waterloo, collabore avec la marine depuis bientôt 10 ans, et le radar sur la côte Est est opérationnel. On a prévu environ 49 millions de dollars pour la remise en état du radar de la côte Est, qui est relativement automatisé. L'installation d'un système similaire sur la côte Ouest, dans le détroit Juan de Fuca et sur les îles...

    Le Canada a fait oeuvre de pionnier dans ce domaine. Comme George l'a mentionné, nous pouvons surveiller les avions volant à basse altitude et les navires de surface sur une distance d'environ 200 milles, ce qui correspond à la zone économique.

    Les Américains sont au courant de l'existence de ces systèmes. Ils n'ont rien fait de leur côté, mais ils surveillent de près les résultats obtenus sur la côte Est. Le radar a été mis à l'essai pendant trois ans, alors qu'il était en mode semi-opérationnel. Il est maintenant entièrement opérationnel.

+-

    Le président: Merci, monsieur LeBlanc.

    Madame Gallant.

+-

    Mme Cheryl Gallant: Ce matin, à Radio-Canada, on parlait de la récente crise provoquée par le SRAS. On disait que si elle s'était produite ailleurs qu'en Ontario, les autorités n'auraient peut-être pas eu les ressources nécessaires pour y réagir de manière efficace. On demande que le gouvernement fédéral adopte une stratégie nationale coordonnée à cet égard.

    Nous sommes en train de parler de terrorisme. Dans le cas du SRAS, le pathogène a été introduit involontairement au Canada. S'il avait été introduit délibérément en Amérique du Nord, s'il avait frappé plusieurs grandes villes en même temps, nous nous serions retrouvés dans de beaux draps.

    Ma question est la suivante : devrait-on mettre en place un plan interministériel de défense intérieure totalement intégré? Que pensez-vous de l'idée de mettre sur pied un centre d'intervention?

À  +-(1050)  

+-

    M. George Lindsey: Le groupe n'a pas vraiment abordé le sujet, mais je pense que le problème est lié de près à l'utilisation d'armes biologiques.

    L'important, pour le milieu médical, c'est que le cas soit identifié très, très rapidement, de préférence en quelques heures, voire en quelques jours, car une fois la période d'incubation terminée, si le virus commence à se propager, on risque de se retrouver avec un gros problème sur les bras.

    Les agglomérations urbaines seraient probablement mieux à même de donner des diagnostics hautement précis et de qualité aux habitants des petites localités éloignées du Canada. Si les ressources étaient centralisées, il serait alors très difficile d'intervenir dans les régions éloignées du Canada, puisqu'il faudrait probablement plusieurs jours pour transporter l'équipement sur place.

    Je pense qu'il faut plutôt se demander si des mesures ont été mises en place pour réagir de manière efficace à une attaque à l'intérieur du continent. Bien entendu, une des solutions serait d'avoir une équipe d'élite prête à intervenir.

    Pour revenir à ce qu'a dit Bob Edmonds au sujet du matériel radioactif que l'on trouve dans le Nord, les Américains avaient une équipe d'élite, et je pense qu'elle était sur place quand on a découvert l'existence d'un problème. Toutefois, il n'y avait qu'une seule équipe de ce genre. Elle a fait du travail remarquable.

    On pourrait avoir plusieurs équipes, mais pas dans chaque ville. Je suppose qu'on pourrait créer toutes les équipes qu'on veut, en fonction du nombre d'incidents qui se produisent, mais ce serait difficile.

    C'est tout ce que je peux dire sur le sujet. Je ne sais pas si mes collègues savent ce qu'il faudrait faire dans ce cas-là, mais j'en doute.

+-

    Mme Cheryl Gallant: Merci, monsieur Lindsey.

+-

    M. Clayton Beattie: [Note de la rédaction : Inaudible]...était très important. Le régiment aéroporté était l'un des premiers sur place. Il s'est mis à l'oeuvre tout de suite, mais c'était assez sinistre.

+-

    M. George Lindsey: Monsieur Fulford.

+-

    M. Dwight Fulford (Institut canadien des études stratégiques): Je ne suis pas un expert en la matière. C'est ma fille qui est médecin et spécialiste des maladies infectieuses.

    Évidemment, si ce n'est pas une attaque qui vient de l'étranger, il peut s'agir, comme dans le cas du SRAS, d'un nouveau virus. Nous sommes beaucoup plus susceptibles d'être victimes d'un virus comme le SRAS que d'une attaque venant de l'étranger. Toutefois, les deux sont possibles.

    Il faudrait améliorer les capacités du système médical, par exemple, accroître le nombre de lits dans les hôpitaux et acheter de l'équipement. Si vous vous contentez uniquement de répondre aux besoins de la population d'une ville et que quelque chose se produit, vous allez avoir des problèmes. Je pense que les équipes médicales ont fait de l'excellent travail dans le cas du SRAS, mais il serait utile de renforcer les capacités du système.

    Comme j'ai la parole, je voudrais en profiter pour faire un autre commentaire. Vous avez parlé du renseignement étranger. Nous avons, bien sûr, un service du renseignement étranger. Je fais allusion aux ambassades. Malheureusement, en raison des mesures d'austérité qui ont été décrétées, le rôle politique de nos ambassades a été réduit au cours des dernières années.

    Vous avez des Canadiens sur place qui peuvent effectuer des évaluations de risque, analyser les intentions d'un gouvernement, nous dire ce qui se passe au Pakistan, par exemple, qui abrite un groupe extrémiste très important et qui possède aussi des armes nucléaires. Il est utile d'avoir accès à des renseignements de nature politique. Je ne pense pas qu'on devrait s'attaquer à cette source d'information que constituent les ambassades.

    Merci.

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    Le président: Avez-vous d'autre chose à ajouter, madame Gallant?

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    Mme Cheryl Gallant: Non.

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    Le président: D'accord.

    Pour ce qui est des retombées industrielles potentielles que procurent les technologies, aussi bien dans le domaine de la défense contre les missiles balistiques que dans celui de la surveillance du territoire en cas de menaces terroristes éventuelles, pouvez-vous nous décrire, monsieur Lindsey, les technologies précises qui existent à ce chapitre? Ces renseignements pourraient nous être utiles dans nos recherches futures. Vous en avez mentionnées quelques-unes au début de votre exposé, mais j'aimerais que vous nous les résumiez, peut-être avec l'aide de vos collègues—ce qui m'intéresse surtout, ce sont les radars à ondes de surface ou les entreprises qui sont en mesure de tirer partie des travaux entrepris dans l'un ou l'autre de ces domaines.

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    M. George Lindsey: Pour ce qui est du radar à ondes de surface, il s'agit, comme Keith l'a mentionné, d'un projet de Raytheon. Évidemment, Raytheon est une entreprise américaine qui est toutefois très active au Canada.

    À mon avis, c'est dans le domaine de la surveillance aérienne que l'expertise canadienne serait la plus utile. Je fais allusion ici aux capteurs. Nous avons accompli beaucoup dans le domaine des lasers, surtout dans les universités. Bon nombre de contrats ont ensuite été attribués à l'industrie.

    McDonald Detweiler est probablement l'entreprise la plus importante qui se spécialise dans la surveillance aérienne, du moins depuis l'espace. Elle a joué un rôle chef de file dans ce domaine. Elle a probablement participé à l'élaboration du bras spatial, qui n'a rien à voir avec la défense, sauf que cela relève de la technologie spatiale.

    Le RADARSAT, quant à lui, était un système unique en son genre. Au début, on s'attendait à ce qu'il serve à repérer les icebergs et à assurer l'ouverture de certains passages pour les navires. Il a donné de bons résultats de ce côté-là. On s'est ensuite rendu compte qu'il pouvait remplir toutes sortes de fonctions. Il a permis, par exemple, de détecter un déversement de pétrole dans la mer du Nord. Il y avait un navire en difficulté. Le radar a capté une image où l'on voyait le pétrole s'échapper du navire. Cela a permis aux équipes de nettoyage de se rendre sur place à toute vitesse.

    Depuis, on s'en sert à toutes les sauces, par exemple, pour voir s'il y a des matières polluantes qui sont déversées dans le Nord—ce que font certaines usines qui ne font pas tellement attention à ce genre de chose. On s'en sert dans le domaine agricole pour voir s'il y a des régions qui souffrent de sécheresse. On s'en sert aussi comme station de météorologie, bien qu'il existe des satellites qui remplissent ce rôle.

À  -(1055)  

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    Le président: Mais vous avez mentionné d'autres entreprises—Oerlikon, par exemple—qui travaillent dans le domaine de la défense antimissile, et aussi CAE, étant donné qu'elles ont déjà reçu un contrat.

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    M. George Lindsey: C'est vrai. Oerlikon, avec l'ADATS, aimerait bien pouvoir améliorer les capacités du système. Je ne sais pas si l'ADATS servirait à contrer la menace que posent les missiles balistiques, mais il serait très efficace contre les missiles de croisière et les avions, peut-être les court-courriers. C'est une question à laquelle on s'intéresse sans cesse. La technologie existe déjà.

    C'est un projet qu'on pourrait confier à l'armée. On en a fait usage, l'an dernier, dans l'Ouest, à l'occasion de la réunion du G-8.

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    Le président: Y a-t-il d'autres entreprises ou technologies qui vous viennent à l'esprit?

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    M. George Lindsey: Non. Si quelqu'un lève la main, je vais lui donner la parole.

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    M. Robert Edmonds: Le Centre canadien de télédétection est l'un des organismes les plus importants au Canada qui travaille dans ce domaine. Il est reconnu de par le monde.

    Si je puis me permettre, j'aimerais faire un commentaire au sujet de la surveillance du Nord. Notre groupe d'étude a eu des discussions à ce sujet avec le ministère de la Défense nationale et le ministère des Affaires étrangères. Nous avons constaté—et cela concerne également le Centre de télédétection—que le concept de surveillance à double usage aiderait non seulement les Américains, mais contribuerait également au développement du Nord. Il nous permettrait également de doter le Nunavut de ressources. Ils pourraient avoir accès à des ressources de leur propre gouvernement.

    Mais le fait est que les militaires s'occupent de surveillance militaire, et le Centre de télédétection, lui, s'occupe de détection civile. De cette façon, il n'y a pas de chevauchement.

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    Le président: Vous soulevez là un point intéressant.

    Y a-t-il d'autres commentaires ou suggestions pour ce qui est des retombées industrielles?

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    M. George Lindsey: Non. Nous n'avons pas accordé à cette question toute l'attention qu'elle mérite. Nous pensions que si l'idée était lancée, les entreprises feraient beaucoup de bruit, mais cela ne s'est pas encore produit.

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    Le président: Nous pourrions peut-être, messieurs, mettre fin à la discussion. Il nous reste moins d'une minute.

    Je veux profiter de l'occasion pour vous remercier d'être venus nous rencontrer. Nous avons eu une réunion fort intéressante, en ce sens qu'elle nous a donné d'excellentes pistes que nous pourrons explorer plus à fond. Vous nous avez fourni, grâce à votre vaste expertise, énormément de renseignements.

    Donc, encore une fois, au nom du comité, je vous remercie, monsieur Lindsay, vous et vos collègues, d'avoir comparu devant nous aujourd'hui.

    Je tiens à préciser que nous allons tenir d'autres réunions sur le sujet. Nous prévoyons nous rendre aux États-Unis à un moment donné, peut-être à l'automne, et ensuite préparer un rapport. Donc, si vous avez d'autres commentaires à formuler, n'hésitez pas à nous en faire part. Si vous avez d'autres renseignements à transmettre au comité, nous les accepterons volontiers. De plus, si vous avez des observations à faire au sujet du rapport final, je vous invite à nous les communiquer.

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    M. George Lindsey: Merci.

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    Le président: La séance est levée.