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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 3e SESSION

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 13 mai 2004




À 1015
V         Le président (L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.))
V         M. Charles Hubbard (Miramichi, Lib.)
V         Le président
V         M. Charles Hubbard
V         Le président
V         M. Charles Hubbard
V         Le président
V         M. Charles Hubbard
V         Le président

À 1020
V         M. Elliot Morley (ministre de l'Environnement et de l'Agroenvironnement, Chambre des communes du Royaume-Uni)

À 1025
V         Le président
V         M. Julian Reed (Halton, Lib.)

À 1030
V         M. Elliot Morley

À 1035
V         Le président
V         M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ)
V         M. Elliot Morley

À 1040
V         Le président
V         Le sénateur Lorna Milne (comté de Peel, Lib.)
V         M. Elliot Morley
V         Le sénateur Lorna Milne
V         M. Elliot Morley

À 1045
V         Le président
V         Le sénateur Tommy Banks (Alberta, Lib.)
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         M. Elliot Morley
V         Le président

À 1050
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         M. Elliot Morley

À 1055
V         Le président
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         M. Julian Reed
V         M. Elliot Morley

Á 1100
V         M. Julian Reed
V         M. Elliot Morley
V         M. Julian Reed
V         M. Elliot Morley
V         M. Julian Reed
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         L'hon. Serge Marcil (Beauharnois—Salaberry, Lib.)

Á 1105
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         M. Elliot Morley
V         L'hon. Serge Marcil
V         M. Elliot Morley
V         L'hon. Serge Marcil
V         M. Elliot Morley

Á 1110
V         L'hon. Serge Marcil
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         Le sénateur Tommy Banks
V         M. Elliot Morley
V         Le sénateur Tommy Banks
V         M. Elliot Morley
V         Le sénateur Tommy Banks

Á 1115
V         M. Elliot Morley
V         Le sénateur Tommy Banks
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ)
V         M. Elliot Morley

Á 1120
V         Mme Francine Lalonde
V         Le président
V         Le sénateur Isobel Finnerty (Ontario, Lib.)
V         M. Elliot Morley
V         Le sénateur Isobel Finnerty
V         Le président
V         Le sénateur Lorna Milne

Á 1125
V         M. Elliot Morley
V         Le sénateur Lorna Milne
V         M. Elliot Morley
V         Le sénateur Lorna Milne
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         L'hon. Stéphane Dion (Saint-Laurent—Cartierville, Lib.)
V         M. Elliot Morley

Á 1130
V         Le sénateur Tommy Banks
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         Mme Francine Lalonde
V         M. Elliot Morley

Á 1135
V         Mme Francine Lalonde
V         M. Elliot Morley
V         Mme Francine Lalonde
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         M. Julian Reed
V         M. Elliot Morley
V         M. Julian Reed
V         M. Elliot Morley
V         M. Julian Reed
V         M. Elliot Morley
V         M. Julian Reed
V         M. Elliot Morley
V         M. Julian Reed

Á 1140
V         Le président
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         M. Elliot Morley
V         Le président

Á 1145
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         M. Elliot Morley
V         Le président
V         M. Elliot Morley
V         Le président










CANADA

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 019 
l
3e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 13 mai 2004

[Enregistrement électronique]

À  +(1015)  

[Traduction]

+

    Le président (L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.)): La séance est ouverte. Bonjour à tous et, en particulier, bienvenue à nos invités d'outre-Atlantique, et une bienvenue toute spéciale à nos collègues du Sénat. Nous sommes enchantés de voir des sénateurs à nos réunions.

    L'occasion est la visite de M. Morley, que nous tenons à accueillir chaleureusement. Nous avons eu l'occasion de lire votre biographie des plus riches et des plus variées et c'est avec grand intérêt que nous attendons que vous preniez la parole.

    Évidemment, de ce côté-ci de l'Atlantique, par le truchement des médias, nous entendons les déclarations faites au Royaume-Uni sur le changement climatique et, plus récemment, cette déclaration très alarmante de Sir David King, conseiller scientifique principal du premier ministre, qui nous prévenait que le changement climatique constituait une menace beaucoup plus grave pour le monde que le terrorisme lui-même, et peut-être nous en direz-vous davantage sur cette question.

    De toute façon, il y a quelque six mois, nous avons eu l'occasion de...

    Monsieur Hubbard.

+-

    M. Charles Hubbard (Miramichi, Lib.): Monsieur le président, j'aimerais dire un mot avant que nous commencions aujourd'hui.

    Comme vous le savez, monsieur le président, je suis un nouveau venu au Comité de l'environnement, n'y siégeant que depuis janvier. Comme aujourd'hui pourrait être une de nos dernières réunions, puisque nous envisageons inévitablement une élection dans un proche avenir, monsieur l'ambassadeur, nous aimerions dire—et je suis sûr de parler au nom de tout le monde autour de cette table ce matin—que le président est un député de longue date de notre Parlement...

+-

    Le président: Monsieur Hubbard, cela n'est pas à l'ordre du jour. Nous ne sommes pas...

+-

    M. Charles Hubbard: J'aimerais que cela figure au compte rendu, si je le pouvais, monsieur le président...

+-

    Le président: Et j'étais au beau milieu d'une phrase, monsieur Hubbard.

+-

    M. Charles Hubbard: Je pense que de nombreux Canadiens ont suivi votre longue carrière, monsieur le président, et votre engagement au sein du gouvernement du Canada et à titre de membre de la Chambre des communes. Nous tenons certainement à vous saluer pour le travail que vous avez effectué en tant que membre et président de ce comité. Si l'on regarde les grandes questions de développement durable que vous avez pilotées, je suis sûr que tous ici nous voulons vous féliciter.

    Nous voulons également dire à nos visiteurs aujourd'hui que notre président est également président de l'Association parlementaire Canada-Europe, qui informe notre Chambre et nos députés ainsi que nos sénateurs sur les grandes questions qui se déroulent en Europe. Il surveille ces événements très attentivement. Il est certain que les membres de la Chambre des communes et tous les Canadiens ont une dette de reconnaissance à son endroit en raison de son travail à titre de président de ce comité et de président de l'Association parlementaire Canada-Europe.

    Je sais que ces paroles figureront au compte-rendu. Je pense que c'est quelque chose qui doit être dit aujourd'hui en mon nom et pour vous. Nous voulons vous rendre hommage, monsieur le président, et nous espérons que vous continuerez d'être le grand Canadien que vous avez toujours été, et pour...

+-

    Le président: Monsieur Hubbard, vous pourriez devoir me saluer après la prochaine élection, parce que j'ai la possibilité de me présenter comme candidat indépendant, ce à quoi je songe sérieusement, alors, vous ne vous débarrasserez pas de moi aussi facilement. Les nouvelles de mes funérailles politiques sont prématurées.

+-

    M. Charles Hubbard: J'espère, monsieur le président, maintenant que vous nous avez mis au courant de vos projets, que vous serez de retour parmi nous, quoi qu'il advienne.

+-

    Le président: Merci, je vous suis reconnaissant de ces pensées. Je vous suis très reconnaissant.

    Des voix: Bravo!

    Le président: Monsieur Morley, pour conclure ma brève introduction, je veux juste vous laisser savoir qu'il y a environ huit mois, sous les auspices de votre Haut-commissariat, nous avons eu le plaisir—du moins, certains d'entre nous—de rencontrer un autre de vos conseillers scientifiques, qui nous a informés de votre politique visant à réduire d'ici à l'an 2050 les émissions de gaz à effet de serre de quelque 40 p. 100, voire même de 50 p. 100, chiffre absolument remarquable. Encore une fois, nous aimerions que vous nous en disiez davantage sur la question.

    Bref, nous vous adressons la plus chaleureuse des bienvenues. Nous sommes heureux du fait que le Canada soit inclus dans votre visite en Amérique du Nord. Très souvent, en Europe, nous constatons que l'Amérique du Nord signifie uniquement Washington, alors que nous avons un point de vue différent, évidemment. La parole vous appartient et soyez les bienvenus, ainsi que vos collègues autour de la table et vos collègues présents dans la salle.

À  +-(1020)  

+-

    M. Elliot Morley (ministre de l'Environnement et de l'Agroenvironnement, Chambre des communes du Royaume-Uni): Merci beaucoup, monsieur le président, pour l'accueil. Je suis très heureux d'être ici aujourd'hui pour adresser la parole à nos collègues parlementaires des deux Chambres du gouvernement canadien.

    Comme vous le savez, le Canada est pour nous au Royaume-Uni un partenaire très important—membre du G-8 qui exerce une grande influence au sein de l'ALENA et pays avec lequel nous avons travaillé en étroite collaboration au sein de toutes sortes d'organismes internationaux. Alors, nous sommes très heureux de ce partenariat.

    Nous avons eu également un excellent dialogue sur les questions environnementales et les questions climatiques. J'ai personnellement eu beaucoup de contacts avec M. David Anderson, qui a été un excellent représentant du gouvernement canadien sur les questions environnementales.

    Je suis accompagné à la table, monsieur le président, par M. Bradley Bates, mon secrétaire privé; par M. David Reddaway, haut-commissaire britannique, par M. Chris Leigh, de la Division de l'atmosphère mondiale, au sein du ministère de l'Environnement, de l'Alimentation et des Affaires rurales, mon ministère au Royaume-Uni.

    En fait, je suis au Canada pour prendre la parole à la Conference of the Reducers. Cette conférence fait partie du Climate Group qui a été lancé à Londres assez récemment. Il s'agit de sa première conférence internationale. Il est très significatif, je pense, qu'elle ait lieu à Toronto, ici en Amérique du Nord. J'ai été très encouragé par le fait que la participation comprend des gens en provenance d'Australie, de l'Union européenne et de trois États américains, ce qui est très important à mon avis.

    Le Climate Group est formé d'un groupe de gens qui veulent promouvoir toute la question de la réduction des émissions de gaz à effet de serre et promouvoir cette question par rapport à la lutte contre le changement climatique dans le cadre ou à l'extérieur du cadre du protocole de Kyoto. Le protocole de Kyoto est très important. Nous croyons, nous avons confiance, que la Russie finira par ratifier ce protocole et qu'il entrera en vigueur. Nous sommes très heureux que le Canada soit un signataire du protocole.

    Mais nous devons en fait regarder au-delà de Kyoto et nous devons envisager la deuxième phase. Kyoto est important, mais c'est une première étape. Vous avez raison, monsieur le président, lorsque vous dites que nous avons pris l'engagement national de réduire nos émissions de gaz à effet de serre de 60 p. 100 d'ici à 2050 et nous avons un objectif intérimaire de réduction de 20 p. 100 d'ici à 2010.

    Nous venons juste de publier notre plan de répartition nationale dans le cadre du système d'échange des droits d'émission de l'Union européenne. Cela nous mène à un objectif de réduction des gaz à effet de serre de 15,2 p. 100, mais ce n'est qu'un objectif initial. Cela nous met sur le voie de notre objectif de réduction de 20 p. 100 d'ici à l'an 2010. Nous avons déjà dépassé nos objectifs de Kyoto qui étaient une réduction de 12,5 p. 100. Nous en sommes rendus à une réduction de 14 p. 100, presque de 15 p. 100, par rapport aux émissions de 1990.

    Vous pourriez être intéressés par certains rapports que nous avons ramenés de la conférence et qui donnent de très bons exemples de ce que différents pays font. Mais ce qui est bien dans le cas du Climate Group, c'est qu'il ne s'agit pas uniquement de gouvernements ou de pays; il regroupe des villes, des États, des provinces et des entreprises qui font beaucoup par elles-mêmes pour ce qui est de la réduction des gaz à effet de serre. On y trouve des exemples, dont notre propre plan national du Royaume-Uni; alors, vous pourriez vouloir jeter un coup d'oeil là-dessus.

    Nous avons également un aperçu de notre programme d'efficacité énergétique, qui fait partie de ce que nous prévoyons faire pour obtenir ces réductions par le biais d'un accroissement de l'efficacité énergétique, ainsi que de notre stratégie pour un avenir à faible émission de carbone.

    Nous avons eu un débat très poussé au Royaume-Uni. C'est une question d'une grande importance pour Tony Blair. J'ai été très heureux du mot de bienvenue, communiqué par vidéo, du premier ministre Martin, accompagné de Tony Blair, à la conférence de Toronto. Je pense que c'était très important. Il a reçu un très bon accueil.

    Nous sommes déterminés à prendre nous-mêmes des mesures d'action en ce qui concerne le CO2, mais nous reconnaissons évidemment qu'il s'agit d'une question mondiale. Cela signifie que nous devons obtenir la participation de la communauté internationale. Nous sommes heureux du fait que l'Union européenne a adopté cette mesure très ferme, mais nous tenons beaucoup, évidemment, à obtenir la participation des Américains, qui n'ont pas ratifié le protocole de Kyoto, mais qui, néanmoins, se sont joints à nous dans des partenariats tels que Renewable Energy and Energy Efficiency Partnership, auquel les Américains ont adhéré. Il s'agissait d'une initiative du Royaume-Uni qui a donné naissance à un organisme international installé en Autriche. Nous espérons beaucoup que cela constituera un véhicule très important pour la conférence de Bonn sur les énergies renouvelables qui doit avoir lieu en juin.

À  +-(1025)  

    Vous avez également raison de dire que notre conseiller scientifique principal, le professeur Sir David King, a dénoncé le changement climatique comme l'une des plus grandes menaces du XXIe siècle. Nous acceptons cette position et acceptons que nous devons agir collectivement sur le changement climatique.

    Dans ce domaine, il n'y a pas d'option gratuite, parce que si nous ne faisons rien, nous nous exposons, évidemment, à voir des changements assez spectaculaires dans le climat. Nous ne comprenons pas entièrement la relation qu'il y a ici, mais le Centre Hadley au Royaume-Uni a fait des travaux de modélisation très intéressants sur les possibilités concernant le changement climatique.

    Le professeur King et moi avons présidé un groupe de travail appelé Foresight Program, qui avait pour mission d'examiner les répercussions du changement climatique sur les inondations et la défense côtière. La conclusion, c'est que si nous n'agissons pas, il en coûtera des milliards et des milliards de livres pour faire face à une élévation du niveau de la mer et au changement des conditions climatiques.

    Alors, il n'y a pas d'option gratuite. Ignorer la question du changement climatique signifie que nous allons créer de sérieux problèmes pour l'avenir et plus nous tarderons à prendre des mesures efficaces, plus il sera difficile et plus il sera coûteux d'y faire face dans l'avenir. Et, évidemment, c'est l'héritage que nous laissons à tous ceux qui viendront derrière nous qui est en train de se bâtir.

    Alors, c'est une question importante. Comme je l'ai dit, nous sommes heureux du partenariat que nous avons avec le Canada sur cette question. Il s'agit d'un acteur clé. Nous devons tous faire notre part dans cette question.

    Mais cette situation recèle également des possibilités. Vous verrez à partir des observations sur le programme du Royaume-Uni que nous croyons en fait, d'après notre modélisation, qu'obtenir cette réduction de 60 p. 100 dans les émissions de CO2 d'ici 2050 ne fera que retarder la croissance de notre économie de six mois. C'est le genre de calcul que nous avons fait sur cette question.

    Évidemment, bien qu'il y ait un prix pour agir, il y a également des gains. Une toute nouvelle industrie est en train de se bâtir sur les technologies environnementales—de nouvelles technologies. Il y a des sources de rentabilité pour l'industrie en termes de gains de productivité et d'efficience, et bien sûr, pour les utilisateurs résidentiels—et beaucoup de gaz à effet de serre sont émis par le secteur résidentiel—, on parle d'une meilleure isolation, d'appareils qui économisent l'énergie, de réduction des coûts pour les consommateurs. De plus, encore une fois, il y a une industrie qui est en train de se développer dans la foulée de ces changements.

    Ainsi, le fait d'agir sur le changement climatique peut produire des gains très réels; ce n'est pas uniquement une question de coûts ou de répercussions sur l'industrie. Je pense que c'est un point très important à faire valoir. Mais je n'en dirai pas plus, parce que je suis intéressé à entendre les vues des membres du comité. Je pense que nous pouvons apprendre beaucoup l'un de l'autre.

    Je suis très intéressé par certains des programmes que le Canada est en train de mettre en place, particulièrement dans le domaine de la sensibilisation du public. Je suis vraiment impressionné par cela, parce que la sensibilisation du public est évidemment un des éléments clés pour amener les gens à prendre cette question au sérieux.

    Merci.

+-

    Le président: Merci beaucoup. Il ne pouvait y avoir de meilleure déclaration liminaire pour encourager les interventions.

    Jusqu'ici, nous avons sur la liste, M. Reed, suivi de M. Bigras et j'invite d'autres membres du comité à faire connaître leur intention.

    Monsieur Reed, veuillez commencer.

+-

    M. Julian Reed (Halton, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président. Je vous souhaite à tous la bienvenue ici. J'ai eu le privilège d'avoir un aperçu de votre plan pour 2050 pour atteindre l'objectif de réduction de 60 p. 100. C'est quelque chose que notre pays, je crois, devrait envisager sérieusement.

    Vous avez parlé d'accroître la sensibilisation du public. Le plus récent élément de conscientisation qui a lieu au Canada a été le prix du pétrole brut, qui a atteint hier les 40,77 $ US. Je pense aux années 70 lorsque le prix du pétrole a atteint un sommet. Il y a eu une incroyable prise de conscience à ce moment-là, mais ensuite les prix ont baissé et l'Amérique du Nord s'est endormie. Cela m'amène à vous poser une question.

    Est-ce que vous insistez sur des choses comme les mandats pour atteindre ces objectifs et quelle est votre méthode pour amener l'industrie et les gouvernements à participer, pour atteindre certains points tournants? Nous envisageons l'utilisation de mandats ici pour des choses comme les combustibles de remplacement et ce genre de choses et nous nous heurtons initialement à une vive résistance de la part de l'industrie. Je serais curieux de savoir comment vous faites face à ce problème.

À  +-(1030)  

+-

    M. Elliot Morley: Pour ce qui est de la question du prix du pétrole, une bonne part de l'augmentation est liée au marché, et particulièrement à la croissance de l'économie chinoise. Évidemment, la leçon qu'il y a à tirer, c'est que le pétrole est une ressource finie; il ne durera pas éternellement. C'est une raison en soi pour envisager de nouvelles technologie et en particulier des technologies de transport propre.

    Au Royaume-Uni, nous avions un programme d'augmentation du prix du carburant, qui était appliqué depuis un certain nombre d'années, visant effectivement à augmenter le prix du pétrole et cela a des répercussions en ce sens qu'il force les fabricants d'automobiles à améliorer l'efficacité énergétique des véhicules, parce qu'évidemment, il est avantageux pour eux de le faire du point de vue de la commercialisation. Nous avons également modifié le régime fiscal applicable aux voitures des entreprises pour encourager l'utilisation de véhicules à faible émission et efficace au plan énergétique, et cela a également eu des répercussions sur les fabricants.

    Pour ce qui est des mandats, nous avons abordé cette question de différentes façons au Royaume-Uni. Nous avons en fait été les premiers à faire l'essai d'une ou deux mesures, comme les échanges de crédits de carbone. Nous avions notre propre système pour le Royaume-Uni et nous allons maintenant adopter le système européen.

    Nous avons également implanté une taxe sur le changement climatique qui s'applique à l'énergie utilisée par l'industrie du Royaume-Uni. Cependant, cette taxe a été conçue pour qu'elle ait un effet fiscal neutre dans le secteur, parce que l'argent provenant de cette taxe est remis sous forme de réduction des contributions de l'employeur à l'assurance nationale pour sa main-d'oeuvre, et de plus, de l'argent est canalisé vers ce que nous appelons un fonds du carbone. Le fonds du carbone sert à distribuer des subventions à l'industrie pour qu'elle améliore son efficacité. Nous accordons également un allègement fiscal à l'industrie qui met en oeuvre de l'équipement efficace au plan énergétique. Ainsi, l'argent est rendu dans le secteur où il est prélevé, de sorte qu'il a un effet neutre sur les revenus.

    En vertu de la taxe sur le changement climatique, les grandes entreprises, celles qui émettent beaucoup de gaz à effet de serre, peuvent obtenir une réduction de 80 p. 100 de la taxe si elles signent une entente liée au changement climatique. Ce type d'entente fixe des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre que l'entreprise est tenue de réaliser. Dans presque tous les cas—et l'industrie a formulé beaucoup de plaintes à cet égard, comme vous pouvez l'imaginer; personne n'aime le changement, personne n'aime payer—, tous les secteurs ont en fait réussi à réaliser leurs objectifs des années avant la date prévue, et, évidemment, il s'en est suivie une réduction des coûts et les entreprises sont en fait assez heureuses de cette situation. Elles aiment l'idée des échanges de crédits de carbone parce que cela permet de récompenser les entreprises qui améliorent leur efficacité énergétique. C'est bon pour l'entreprise et cela lui donne un nouvel actif, qui est le crédit de carbone qu'elle peut échanger au sein de son secteur dans l'Union européenne.

    En bout de ligne, nous aimerions étendre ce système à la planète. Nous aimerions que le Canada se joigne à nous. Nous aimerions que l'Australie aussi le fasse. Nous aimerions voir d'autres pays industrialisés participer à ce programme, parce qu'il s'agit d'une question qui touche la planète toute entière. Cela n'a pas d'importance que vous fassiez des échanges entre les continents, parce que si vous diminuez les émissions de gaz à effet de serre, il importe peu de savoir où vous le faites, parce qu'il s'agit d'une question mondiale. Alors nous tenons beaucoup à étendre la participation et nous croyons que nous y parviendrons.

    L'industrie aime beaucoup l'approche de l'échange des crédits de carbone. C'est une notion qu'elle connaît. C'est un mécanisme du marché. Il s'agit probablement d'une des approches les plus rentables. L'industrie n'aime pas beaucoup l'idée des plafonds, bien qu'il doive y avoir un plafond. Pour que le système fonctionne, nous devons imposer une réduction des émissions, et l'industrie n'aime pas beaucoup cela. Il y a eu beaucoup de discussions pour déterminer qui obtient quoi et pour savoir si notre modèle est exact et si nous avons pris en considération la production et des choses du genre. Mais nous avons passé à travers tout cela et je crois que nous avons un système qui fonctionne. Il s'agit d'une approche ferme mais équitable pour l'industrie. Cette dernière doit comprendre que si nous voulons que l'échange fonctionne, il faut abaisser les plafonds des émissions. C'est quelque chose qui est en voie de se faire à l'heure actuelle dans l'Union européenne et je pense que ce sera assez important. Une fois que le système aura débuté et qu'il tournera, je pense que l'étape suivante consistera alors à étendre son utilisation à l'échelle de la planète.

À  +-(1035)  

+-

    Le président: Monsieur Reed, vous pourrez reprendre la parole au second tour.

    Monsieur Bigras, suivi du sénateur Milne.

[Français]

+-

    M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ): Merci, monsieur le président.

    Tout d'abord, pour éviter toute méprise, je voudrais préciser que même si je suis de ce côté-ci de la table, je ne suis pas membre de la partie gouvernementale, mais bien député de l'opposition pour le Bloc québécois.

    J'aimerais que vous nous parliez des conditions et de la politique fiscale environnementale que vous avez adoptée ou que vous avez l'intention d'adopter afin d'en venir à une réduction à la source des émissions de gaz à effet de serre.

    Ce que je comprends de vos propos, c'est que vous appuyez la position canadienne, qui sera négociée dans une prochaine conférence, des parties visant à permettre les crédits d'émissions pour les énergies propres. À mon avis, la voie à suivre, c'est une réduction à la source des émissions de gaz à effet de serre.

    J'aimerais savoir si chez vous, comme au Canada, il y a plusieurs avantages fiscaux consentis à l'industrie pétrolière et aux hydrocarbures. On parle, si je ne me trompe pas, de 66 milliards de dollars depuis les années 1970, comparativement à tout près de 350 millions de dollars pour les énergies renouvelables.

    Donc, est-ce que vous avez une politique, par exemple, d'incitatifs fiscaux pour la production d'énergie éolienne qui viendrait financer le kilowattheure? Est-ce que les consommateurs bénéficient d'avantages fiscaux pour l'achat de voitures plus écologiques? Quel type de politique fiscale avez-vous chez vous pour en arriver à une réduction à la source des émissions de gaz à effet de serre?

[Traduction]

+-

    M. Elliot Morley: Oui, c'est une question très intéressante. Nous avons une variété d'instruments financiers, et il y a un débat assez intense au Royaume-Uni au sujet de l'ensemble de l'utilisation des instruments financiers—la taxe verte. Je pense en fait qu'il y a encore beaucoup de place pour toutes sortes de débats.

    Pour ceux que cela intéresse, nous avons également implanté un échange pour les sites d'enfouissement sanitaire. Nous imposons des plafonds sur l'enfouissement sanitaire parce que nous voulons réduire la taille de ces sites. Nous imposons des limites aux autorités et elles peuvent échanger les limites, de sorte qu'encore une fois, celles qui auront réduit l'enfouissement sanitaire ont des crédits.

    Nous avons des subventions pour les consommateurs qui achètent des voitures qui sont converties au gaz de pétrole liquéfié, GPL. Ils peuvent obtenir un rabais de l'État. Nous accordons également des subventions pour les nouvelles voitures hybrides qui arrivent sur le marché. En fait, vous pouvez avoir accès à une subvention de 1 000 livres du gouvernement du Royaume-Uni pour l'achat, à l'état neuf, du dernier modèle, la voiture de Toyota, qui est sur le marché à l'heure actuelle. C'est pour encourager l'achat de cette nouvelle technologie.

    Pour ce qui est des énergies renouvelables, nous nous sommes fixé comme objectif que 10 p. 100 de notre énergie doit provenir des énergies renouvelables. En fait, nous avons récemment porté cet objectif à 15 p. 100. Pour ce qui est des incitatifs à cet égard, nous avons quelque chose que nous appelons des certificats d'obligation en matière d'énergie renouvelable. Ce que cela signifie, c'est que les entreprises productrices d'énergie du Royaume-Uni doivent se procurer un pourcentage donné de leur énergie de sources d'énergie renouvelable et elles doivent posséder ces certificats pour démontrer qu'elles achètent leur énergie de ces sources d'énergie renouvelable. Les certificats eux-mêmes sont échangeables également. Cela fait partie des instruments financiers. Il s'agit d'un engagement très ferme qu'elles doivent prendre.

    Pour donner l'exemple, le gouvernement s'est engagé à acheter 15 p.100, je pense que c'est le pourcentage, de l'énergie qu'il consomme à partir de sources renouvelables. Mon propre ministère est parvenu à dépasser cet objectif. Nous donnons également des incitatifs particuliers pour les centrales de cogénération. Elles ont droit à un traitement particulier, non seulement pour ce qui est des incitatifs financiers, mais également en ce qui a trait au système d'échange des droits d'émissions. Cela fait également partie des mesures utilisées pour inciter les gens à investir dans ce genre de technologie et d'installations.

    Nous accordons également des subventions aux agriculteurs pour qu'ils cultivent la biomasse. Nous avons également des règles particulières pour eux de sorte qu'ils puissent cultiver la biomasse sur des terres mises de côté en vertu de la politique agricole commune. Nous accordons un rabais de 20 pences le litre pour les biocarburants vendus à la pompe. Nous avons, en fait, un secteur du biodiésel en très grande expansion au Royaume-Uni à l'heure actuelle. Bien que l'éthanol ne soit pas encore très répandu chez nous, le secteur du biodiésel, lui, est en pleine expansion.

    J'ai parlé des incitatifs fiscaux pour l'équipement efficace au plan énergétique. Il y a des subventions destinées aux propriétaires fonciers pour les inciter à améliorer l'efficacité énergétique des maisons qu'ils louent, par exemple. C'est une mesure qui est en voie d'implantation. Nous accordons également des avantages fiscaux pour l'équipement efficace du point de vue de la consommation d'eau. L'eau est en train de devenir une préoccupation importante; évidemment, c'est une question qui est également liée au changement climatique. Alors, il y a ces mesures.

    J'ai entendu ce que vous avez dit au sujet des crédits. Bien sûr, vous devez examiner comment ils seront appliqués. Je pense que les propositions canadiennes précèdent les propositions de Kyoto. Il y a des aménagements à l'intérieur de Kyoto, comme l'initiative conjointe et le mécanisme pour un développement propre, qui pourraient intéresser le Canada, mais je pense qu'ils doivent figurer dans le cadre du protocole de Kyoto et non pas le précéder.

À  +-(1040)  

[Français]

+-

    Le président: Merci, monsieur Bigras.

    Madame la sénatrice Milne, s'il vous plaît.

[Traduction]

+-

    Le sénateur Lorna Milne (comté de Peel, Lib.): J'allais vous poser une question au sujet de votre taxe sur le changement climatique, parce qu'en période préélectorale, les députés louvoient beaucoup sur cette question...

+-

    M. Elliot Morley: Étant moi-même député, je peux comprendre.

+-

    Le sénateur Lorna Milne: ... mais vous avez déjà bien répondu à la question. J'ai vu les oreilles de Julian se dresser lorsque vous avez parlé de biomasse et de biodiésel.

    Alors, je vais plutôt vous demander comment vous vous y êtes pris pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre dans la production d'énergie. Comment produisez-vous principalement votre électricité au Royaume-Uni?

+-

    M. Elliot Morley: Le gaz naturel est probablement la principale source à l'heure actuelle, mais nous avons un secteur nucléaire assez développé. Le nucléaire représente environ 20 p. 100 de la production. Ensuite, nous avons le gaz naturel, le charbon et un peu de pétrole. Mais en réalité, le pétrole sert uniquement à des fins d'appoint. Il n'est pas vraiment utilisé comme méthode principale de production d'énergie.

    Nous avons également une interconnexion avec la France et nous importons de l'électricité de ce pays et nous en exportons également, parce que nous avons des périodes de pointe différentes. Par conséquent, au moment de nos périodes de pointe respectives, la France éponge une partie de nos besoins et nous épongeons une partie des siens, ce qui est une utilisation assez efficace de la gestion en ce qui concerne le réseau national en place au Royaume-Uni.

    Pour ce qui est des progrès que nous avons réalisés, le principal facteur est l'amélioration de l'efficacité énergétique. J'ai présenté une donnée statistique très intéressante dans le discours que j'ai donné à Toronto; en effet, si chaque foyer aux États-Unis remplaçait les cinq lumières les plus utilisées dans la maison par des ampoules efficaces au point de vue énergétique, cela permettrait de se passer de 22 centrales électriques. C'est une mesure très simple et peu coûteuse à prendre.

    Nous avons fait la promotion des ampoules à faible énergie. Nous avons de nouveaux règlements de l'UE. Dans les magasins, il faut afficher la cote énergétique de tous les appareils électriques, qui varie de A à E, de sorte que les gens puissent voir quelle est la consommation d'énergie. Cela est également très utile.

    L'autre facteur qui a eu des répercussions importantes, c'est que nous avons beaucoup réduit l'utilisation du charbon et beaucoup augmenté l'utilisation du gaz naturel. C'est vrai. Mais évidemment, le gaz naturel est une ressource finie et nous devons envisager autre chose pour l'avenir.

    Nous avons mené des expériences avec les cultures énergétiques, comme la culture du saule, mais en fait, la technologie s'est révélée très difficile à appliquer. Ce qui est en fait plus efficace, à l'heure actuelle, c'est que les cultures énergétiques sont vendues à nos centrales électriques alimentées au charbon de très grande taille et elles sont brûlées en même temps que le charbon. On brûle la biomasse énergétique avec le charbon et, par conséquent, on réduit le pourcentage de charbon et on réduit les émissions de CO2. C'est une des façons que les centrales au charbon parviendront à respecter leurs plafonds en vertu des échanges de droits d'émission.

À  +-(1045)  

+-

    Le président: Merci.

    Sénateur Banks, suivi du président.

+-

    Le sénateur Tommy Banks (Alberta, Lib.): Merci, monsieur le président, monsieur le ministre.

    J'ai une question très courte qui ne nécessitera qu'une réponse très courte. Je pense déjà la connaître, mais j'aimerais juste confirmer.

    Nous n'avons pas un État unitaire et il y a un partage des responsabilités en matière de ressources naturelles entre le gouvernement du Canada, d'une part, et les provinces, d'autre part. Y a-t-il de tels obstacles au Royaume-Uni au fonctionnement du gouvernement, lorsque vous mettez en oeuvre toutes ces étapes, dont vous avez parlé, et qui s'appliquent à toutes les parties du Royaume-Uni?

+-

    M. Elliot Morley: Non, il n'y en a pas. Il s'agit d'une structure différente. Nous sommes un pays beaucoup plus petit, comme vous le savez. Nous avons le Parlement écossais et l'Assemblée nationale du Pays de Galles, mais la politique énergétique globale est une question qui regarde Westminster et, par conséquent, c'est beaucoup plus facile pour ce qui est d'adopter une approche unifiée.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Morley, au sujet de l'arrangement fiscal, M. Bigras a soulevé une question clé et, comme c'est un gentilhomme, il n'a pas signalé que nous avons dans notre pays un régime fiscal qui est plein de contradictions et qui est donc conçu en fonction d'une réalité antérieure à Kyoto, de sorte que nous avons beaucoup de chemin à faire pour le reconfigurer pour qu'il cadre avec Kyoto.

    Nos incitatifs pour l'énergie renouvelable et la biomasse, etc., sont très limités, très minimes, tandis que les incitatifs applicables aux combustibles fossiles sont encore énormes. On dirait que notre nation, notre pays tente de chevaucher simultanément deux chevaux qui galopent dans des directions opposées. C'est une transition très difficile, aucun doute là-dessus.

    La question que je voudrais vous poser porte sur l'Inde, la Chine, le Brésil et d'autres pays. Comment vous y prendriez-vous pour intégrer ces grands pays à l'accord de Kyoto?

+-

    M. Elliot Morley: À l'heure actuelle, comme vous le savez, ces pays sont traités différemment dans l'Accord de Kyoto. Leur argument est que ce sont des pays en développement dont la croissance est très importante pour atténuer la pauvreté, ce qui est vrai. Dans des pays comme le mien, nous sommes passés par une époque salissante et nous avons contribué puissamment à polluer la planète. C'est un peu beaucoup leur demander de plafonner leur croissance quand nous avons vécu cette période et que nous en récoltons maintenant les avantages.

    On peut comprendre la logique de cette position à certains égards, mais ce que nous avons dit à ces pays-là, c'est qu'ils n'ont pas besoin de passer par cette phase salissante de l'industrialisation. Ils peuvent faire un saut et passer directement aux nouvelles technologies. Ils peuvent en tirer les avantages. La Chine, dont la croissance est renversante, a pourtant réduit ses émissions de gaz à effet de serre. Ils prennent cela très au sérieux quant à l'impact potentiel. Ils ont cessé l'exploitation forestière en Chine. C'est aussi lié à la désertification et à la gestion des ressources hydriques et à la lutte contre les inondations, bien que cela nécessite bien sûr d'importer de plus grandes quantités de bois, ce qui apporte son lot de problèmes.

    Mais j'en reviens au fait que les nouvelles technologies non polluantes offrent des gains d'efficience et des économies et ne sont pas nécessairement négatives. On n'a pas besoin de restreindre la croissance et de réduire la production. Nous avons réussi à réduire nos gaz à effet de serre en deçà des objectifs de Kyoto, et pourtant nous avons eu une croissance d'environ 30 p. 100 au cours de cette même période. Nous avons donc eu à la fois croissance économique et réduction des gaz à effet de serre. Si cela peut se faire dans un pays comme le Royaume-Uni, alors cela peut aussi se faire dans des pays comme la Chine, l'Inde et le Brésil.

    Pour faire cela, il faut notamment faire appel à la technologie, partager l'information, travailler en partenariat. C'est pourquoi nous tenons beaucoup à encourager des organisations comme RPET, c'est pourquoi Tony Blair veut que le dossier du changement climatique devienne l'un des thèmes clé de la présidence du G-8 assumée par le Royaume-Uni l'année prochaine; le Canada est bien sûr un membre très important du G-8, et nous pouvons travailler en partenariat dans ce dossier. C'est la manière de procéder et de démontrer aux pays en développement qu'ils peuvent avoir un taux de croissance intéressant tout en réduisant les gaz à effet de serre.

+-

    Le président: Que faites-vous des membres de la communauté scientifique qui nient que le changement climatique soit attribuable aux gaz à effet de serre?

À  +-(1050)  

+-

    M. Elliot Morley: Eh bien, monsieur le président, je peux vous dire avec plaisir que ceux qui nient cet état de fait sont de moins en moins nombreux. Ils deviennent quasiment comme les tenants de la terre plate.

    Je fais observer que même l'Académie des sciences des États-Unis a publié un rapport dans lequel on reconnaît la réalité du réchauffement planétaire et le fait qu'il résulte de l'intervention humaine. En fait, certains de leurs rapports concordent avec les nôtres. Il y a aussi la question de l'interprétation de l'impact de cette situation. Il y a possibilité de très graves troubles internationaux, d'un afflux massif de réfugiés venus de tous les coins du monde où il y aura à long terme des sécheresses, des récoltes perdues, des difficultés d'approvisionnement en eau, avec toute l'instabilité que cela créera. C'est un autre volet du problème du réchauffement planétaire. Et cela nous ramène aussi à l'avertissement de David King et cela explique pourquoi il considère tout cela comme une menace tellement grave.

    Maintenant, je sais qu'un rapport en ce sens a été présenté à la Maison Blanche. Je suis vraiment convaincu que la réalité du réchauffement planétaire et de ses liens avec l'activité humaine est vraiment incontestable. Le poids de la preuve scientifique est tout à fait irréfutable. Nous pouvons argumenter sur les conséquences à long terme. Il y a là des questions d'analyse, mais il est vraiment impossible de contester que le réchauffement planétaire est un fait.

+-

    Le président: Votre gouvernement a-t-il déjà quantifié les dommages que cela pourrait causer à l'industrie, comme dans l'assurance, les incendies de forêt, le transport maritime, l'agriculture? Avez-vous quantifié cela dans un secteur donné?

+-

    M. Elliot Morley: Nous avons des chiffres sur l'impact potentiel que cela pourrait avoir notamment sur les compagnies d'assurances. En passant, quand nous avons eu une discussion sur les mesures fiscales que nous avons prises au Royaume-Uni, bien que nous ayons eu des différends avec des organisations comme la Confédération de l'industrie britannique, la CBI, l'industrie n'a pas présenté une position unifiée. De nombreux secteurs sont très inquiets au sujet du changement climatique, notamment l'assurance et les banques.

    Ils reconnaissent que le coût potentiel pour les compagnies d'assurances serait absolument gigantesque. Je pense qu'il y a ici un scénario où l'on donne des chiffres quant aux conséquences à long terme et le coût total s'élèverait à des milliards et des milliards de dollars. Un seul petit exemple : en 2000, nous avons eu au Royaume-Uni les pires inondations depuis mille ans. Ces inondations ont coûté peut-être 2 milliards de livres, montant que les compagnies d'assurances ont dû payer, et dix mille maisons ont été touchées, avec les perturbations que cela a entraînées.

    Nous avons essayé de prévoir l'impact du changement climatique jusqu'à la fin du siècle. Nos programmes de prévision établissent le coût, en terme de dommages, encore une fois dans les milliards de livres et il faut aussi tenir compte de ce qu'il en coûtera pour améliorer nos défenses contre les inondations. Par exemple, il faudra remplacer les digues le long de la Tamise à cause de l'élévation du niveau de la mer, d'ici 30 ans, mais il en coûtera autour de 5 milliards de livres pour faire cela et pour renforcer les défenses dans l'estuaire de la Tamise, selon les prévisions actuelles.

    Les coûts sont donc gigantesques. J'en reviens à ce que je disais, que de ne rien faire n'est pas une option, et que l'absence de toute mesure ne se traduit pas par des économies; cela finira plutôt par nous coûter encore plus cher à l'avenir.

+-

    Le président: Merci.

    Nous souhaitons la bienvenue à Mme Lalonde, notre collègue à la Chambre des communes, qui vient de se joindre à nous.

    Mme Lalonde, à l'instar de M. Bigras, est députée du Bloc québécois et elle est très active au Conseil de l'Europe.

    Je voudrais vous poser une question sur le changement climatique. Est-ce que votre gouvernement a un programme de coopération avec l'Union européenne; dans l'affirmative, de quelle envergure?

+-

    M. Elliot Morley: Nous avons accepté le Protocole de Kyoto; la totalité de l'UE a signé. Dans le cadre du régime d'échange d'émissions de l'UE, l'exigence minimale est que le plan national que chaque pays doit présenter à la Commission européenne pour son approbation doit être conçu pour que le pays atteigne l'objectif de Kyoto. Un certain nombre de pays européens s'éloignent actuellement de l'objectif de Kyoto. La Suède et nous-mêmes avons atteint et dépassé les objectifs. L'Allemagne est très proche de l'objectif.

    Mais on est libre, à l'intérieur de ce plan, d'aller encore plus loin. Et nous avons fait le choix, à l'échelle nationale, d'aller encore plus loin dans l'atteinte de nos objectifs pour respecter les engagements que nous avons publiés dans notre Livre blanc énergétique, à savoir l'objectif de 60 p. 100 d'ici 2050.

À  +-(1055)  

+-

    Le président: Avez-vous entendu parler du défi canadien d'une tonne?

+-

    M. Elliot Morley: On m'en a parlé ce matin. J'aime bien le ton de cette campagne. C'est une bonne campagne de sensibilisation. Je trouve que c'était une très bonne idée de fixer ce chiffre d'une tonne. Cela me plaît.

+-

    Le président: Cela permet aussi de rejoindre les citoyens.

+-

    M. Elliot Morley: Oui.

+-

    Le président: C'est une indication donnée aux citoyens.

+-

    M. Elliot Morley: C'est assurément une technique que j'envisagerais moi-même. Je n'ai aucune hésitation à emprunter une bonne idée, monsieur le président.

+-

    Le président: Croyez-vous que cela fonctionnerait au Royaume-Uni?

+-

    M. Elliot Morley: Je pense que cela fonctionnerait au Royaume-Uni parce que les gens sont très sensibles aux questions climatiques, surtout parce que, paradoxalement, nous avons subi de graves inondations en 2000 et nous avons aussi eu de très graves inondations dans le bassin de la Tamise en 2003. Cela a sensibilisé les gens et a suscité un débat. Mais il n'y a rien comme d'établir un lien direct entre le foyer de chacun et l'environnement, pour frapper l'imagination des gens. J'aime donc cette campagne, ce défi d'une tonne. Je trouve que c'est très bon.

+-

    Le président: Merci.

    Deuxième tour, monsieur Reed.

+-

    M. Julian Reed: Merci, monsieur le président.

    Nous avons besoin d'un peu d'encadrement au sujet de l'acceptation politique. Certaines mesures imposées peuvent susciter des réactions négatives parmi le public, et je constate pourtant que c'est la méthode que vous avez choisie pour le carburant d'automobile, par exemple. Je lisais l'autre jour que les camionneurs en Grande-Bretagne doivent maintenant payer leur carburant 4 livres le gallon, et nous avons ici des citoyens qui se plaignent quand le prix de l'essence atteint 90 cents le litre. J'ai dû leur répondre, mais je peux maintenant leur répondre en toute confiance, parce que je ne me représente pas. Je leur dis qu'ils se plaignent le ventre plein. Le prix de l'essence chez nous est parmi les plus bas au monde. Mais la sensibilisation, c'est une chose, le souci du climat est une chose, mais c'est une autre paire de manches que de surmonter cet obstacle et d'atteindre une certaine acceptation politique et je pense que nous aimerions tous avoir de l'aide à cet égard.

+-

    M. Elliot Morley: Il n'y a pas de réponse facile à cette question, parce que tout dépend des circonstances dans chaque pays, de l'attitude de la population, laquelle peut d'ailleurs changer avec le temps. Le prix de l'essence a causé beaucoup de problèmes chez nous, des manifestations et des blocus de raffineries de pétrole. Plusieurs facteurs se sont conjugués, notamment le mécontentement parmi les syndicats des conducteurs de camions-citernes qui étaient en conflit avec les compagnies pétrolières. Il y avait une foule de facteurs, mais c'était effectivement un problème. À cause de cela, nous avons dû stopper le mécanisme de hausse automatique du prix du carburant. Nous continuons d'augmenter les droits sur l'essence, mais l'augmentation est essentiellement en ligne avec l'inflation à l'heure actuelle. Il a fallu réduire l'augmentation, qui était supérieure à celle de l'inflation. Bien sûr, il faut reconnaître que l'on ne peut pas aller plus loin que ce que la population est prête à accepter.

    Mais vous avez raison, même nos prix de l'essence au Royaume-Uni, qui sont parmi les plus élevés au monde, sont encore plus bas en chiffres réels qu'ils ne l'étaient il y a dix ans. Les gens l'oublient, évidemment, et ils ne réagissent pas toujours à cet argument. Et puis nous avons eu des différends avec l'industrie. Par ailleurs, en dépit de nos plans ambitieux, nous sommes quand même critiqués par les groupes environnementalistes et par l'opposition, parfois simultanément parce que nous allons trop loin et parce que nous n'allons pas assez loin. C'est bien sûr le privilège de l'opposition, mais les groupes environnementalistes disent également que nous ne sommes pas allés assez loin. On ne pourra jamais satisfaire tout le monde et son père.

    Pourtant, je pense qu'il se dégage un consensus approuvant ce que nous faisons au Royaume-Uni. Le fait que certains pays qui nous font concurrence n'adoptent pas la même attitude suscite une certaine nervosité et je comprends que c'est un grave problème pour le Canada, qui côtoie les États-Unis. C'est un problème particulier, mais c'était encourageant de voir que des représentants des États américains assistaient à cette conférence à Toronto, et je sais que les États du Nord-Est introduisent leur propre système de plans et d'échange pour le carbone et que la Californie prend de l'avance. Bien sûr, la Californie a un PIB qui dépasse celui de beaucoup de grands pays du monde. On reconnaît donc aux États-Unis, même si le gouvernement fédéral ne le reconnaît pas, au niveau des États et de la base, on reconnaît qu'il faut s'attaquer à ces problèmes.

Á  +-(1100)  

+-

    M. Julian Reed: Les gens s'intéressent de plus en plus aux nouvelles technologies et aux technologies émergentes et nous avons mis en place des mécanismes pour favoriser cette émergence. Quand je pense au Royaume-Uni, une chose me frappe : c'est le travail que vous avez fait sur l'énergie tirée des vagues. A-t-il fallu pour cela accorder des encouragements à l'industrie?

+-

    M. Elliot Morley: Oui.

+-

    M. Julian Reed: Quel genre d'encouragements?

+-

    M. Elliot Morley: La R et D sur l'énergie des vagues a été en grande partie financée par le gouvernement, mais pas en totalité. Il y a des institutions, des compagnies et des universités qui font leurs propres travaux là-dessus, mais nous avons un programme de recherches très étendu, basé en Écosse, et nous avons investi beaucoup d'argent des deniers publics dans l'énergie marémotrice, dans l'énergie des vagues et aussi dans un nouveau projet sur les courants sous-marins, qui me passionne parce que s'il est couronné de succès, on pourrait installer des turbines sous l'eau; personne ne les verrait, elles ne nuiraient pas au paysage et l'on aurait une ressource renouvelable. Pour un pays comme le nôtre, qui est une île entourée par de forts courants et des marées très prononcées, cela offre beaucoup de potentiel, comme aussi aux autres collectivités côtières.

+-

    M. Julian Reed: Dans le dossier de l'énergie marémotrice, y a-t-il eu un ressac environnemental?

+-

    M. Elliot Morley: Pas pour les vagues et les courants, mais dans le cas des marées, oui, parce que pour exploiter cette énergie, il faudrait construire un barrage dans un estuaire; or nos estuaires ont une importance internationale comme aires de repos des oiseaux migrateurs et aussi pour la biodiversité. Nous avons signé des accords internationaux, par exemple celui de Ramsar, ainsi que la directive de l'UE sur les habitats. Ce serait donc certainement très controversé de construire de grands barrages dans les estuaires du Royaume-Uni. Ce projet a toutefois des défenseurs, parce que l'on pourrait aussi en tirer des avantages économiques. On peut installer une route sur le barrage, ce qui ouvre des possibilités de développement économique dans des régions nouvelles; on peut aussi tirer de l'énergie bon marché des génératrices actionnées par les marées. Les Hollandais ont installé des turbines marémotrices dans certains de leurs barrages. Je ne crois pas vraiment que ce soit faisable au Royaume-Uni, parce que ce serait tellement controversé, et puis nous avons des obligations internationales en matière de protection de l'habitat, et c'est pourquoi les vagues et les courants sont probablement plus envisageables.

    Mais il y a un projet intéressant dans une île d'Écosse, une petite centrale tirant de l'énergie des vagues. Elle est déjà construite et installée sur la côte. C'est une chambre close et quand les vagues frappent le fond, cela comprime l'air au fond de la chambre et l'air comprimé actionne la turbine. C'est tout petit, cela ne nuit pas au paysage, et c'est une technologie émergente qui n'est pas tout à fait au point mais qui offre un bon potentiel.

+-

    Le président: Merci, monsieur  Reed.

    Monsieur Marcil.

[Français]

+-

    L'hon. Serge Marcil (Beauharnois—Salaberry, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Vous avez dit dans votre présentation que la mise en oeuvre de votre plan de lutte contre les gaz à effet de serre en vertu duquel vous visez 20 p. 100 de réduction d'ici 2010 et 60 p. 100 d'ici 2050 va amener un ralentissement économique que vous avez évalué sur une période de six mois environ. J'aimerais en savoir davantage. Comment arrivez-vous à évaluer cela, et comment l'industrie réagit-elle? Quelle incidence ce ralentissement aura-t-il?

Á  +-(1105)  

[Traduction]

+-

    M. Elliot Morley: L'évaluation a été faite à partir de la modélisation économique du ministère du Commerce et de l'Industrie. En fait, l'effort a été déployé dans l'ensemble du gouvernement; je suis le ministre de l'Environnement, du ministère de l'Environnement et nous assumons la responsabilité du dossier du changement climatique et nous avons notre mot à dire dans l'établissement de l'objectif. Le travail de modélisation et l'interface avec l'industrie se font en grande partie dans notre ministère du Commerce et de l'Industrie, mais nous travaillons très étroitement et très bien avec eux. Pour établir le modèle à long terme quant à la conséquence sur l'économie, il faut aussi tenir compte des avantages. Il y a du négatif et du positif.

    Vous verrez dans ce document que l'on donne des exemples de compagnies qui ont réalisé un gain financier net. Nous ne disons pas que ce sera toujours le cas, et il faut donc réaliser un modèle, mais les travaux du ministère du Commerce et de l'Industrie aboutissent à la conclusion que cela va simplement ralentir notre croissance économique en 2050; il faudra seulement six mois de plus pour atteindre en 2050 une situation que nous aurions atteint six mois avant en l'absence de ces mesures. Exprimé en termes du PIB, même si je sais qu'il y a différentes manières d'illustrer tout cela, tout indique que cela aura un impact très limité sur notre croissance économique et sur le PIB de notre pays.

+-

    Le président: Excusez-moi, monsieur Marcil.

    Cela tient-il compte du tort causé au secteur de l'assurance, des forêts et de l'agriculture?

+-

    M. Elliot Morley: Non, cela n'en tient pas compte.

[Français]

+-

    L'hon. Serge Marcil: Dans votre plan d'action, en ce qui concerne l'atteinte de votre objectif--que je trouve très ambitieux, soit dit en passant--, avez-vous fixé des objectifs de diminution de gaz à effet de serre par secteur industriel, par exemple dans le secteur de l'automobile, dans celui des ressources naturelles, dans celui de la foresterie, et ainsi de suite? Est-ce que vous avez fixé des objectifs sur une période de 10 ou 15 ans?

[Traduction]

+-

    M. Elliot Morley: Oui, nous l'avons fait. Dans le plan national, on précise l'effort de chaque secteur industriel. Chaque secteur aura un objectif et, au sein de ce secteur, chaque pollueur aura un objectif. Pour vous donner une idée, il y a 1 080 pollueurs dans le plan national. Certains relèvent de la même compagnie qui a plusieurs usines. Notre industrie sidérurgique, par exemple, compte un certain nombre de combinats de grande ampleur au Royaume-Uni et un objectif sera assigné à chacun d'eux.

[Français]

+-

    L'hon. Serge Marcil: Je comprends que le Royaume-Uni est probablement le pays où le litre d'essence est le plus cher. Dans le domaine de l'automobile, est-ce que vous avez une taxe qui fluctue en fonction des cylindrées? La taxe de vente sur les automobiles est-elle la même pour toutes les catégories de voitures, ou s'il y a une différence selon qu'il s'agisse d'une voiture à quatre, six ou huit cylindres?

[Traduction]

+-

    M. Elliot Morley: Il y a une taxe sur l'automobile, laquelle n'est pas liée pour le moment à la cylindrée du moteur. Mais il y a une taxe routière que chacun doit payer pour circuler en voiture sur la route, comme dans la plupart des pays, et cette taxe est différenciée. Pour un moteur d'une cylindrée inférieure à 1 200 cc, on paie une taxe routière inférieure à celle qui s'applique à tout moteur de plus de 1 200 cc.

    La différence la plus marquée se situe peut-être dans le domaine des voitures de fonction. La majorité des voitures neuves au Royaume-Uni sont achetées par des compagnies, et des allègements fiscaux s'appliquent aux voitures de fonction. L'ancien régime était fondé sur le nombre de milles parcourus : plus on roulait, plus l'allègement fiscal était prononcé. Cela poussait les gens à trouver des raisons de se réunir, vers la fin de l'année financière, dans des endroits très éloignés à l'autre bout du pays. C'était un système absurde. Aujourd'hui, le régime fiscal pour les voitures de fonction est fondé sur la taille du moteur et les émissions. C'est pourquoi la compagnie Jaguar a sorti son premier modèle à moteur diesel, par exemple. Je dois dire que dans le passé, les émissions et l'efficience énergétique n'étaient pas tellement prioritaires chez Jaguar, mais étant donné que la compagnie a une part de marché tellement grande dans le secteur des voitures de fonction, elle a opéré des changements draconiens dans l'efficience énergétique de ses voitures. Les autres fabricants d'automobiles en ont fait autant, y compris les fabricants d'Europe continentale et d'autres pays qui vendent leurs voitures au Royaume-Uni; ils ont modifié la taille de leurs moteurs, diminué la consommation d'essence et réduit les émissions.

    Il est donc possible de provoquer des changements en profondeur grâce à des mesures fiscales.

Á  +-(1110)  

[Français]

+-

    L'hon. Serge Marcil: Quelle est la place de l'éolienne dans la production énergétique au Royaume-Uni? Quelle est sa place en termes de pourcentage? Le gouvernement accorde-t-il beaucoup d'importance au développement de ce type d'énergie?

[Traduction]

+-

    M. Elliot Morley: Oui. L'énergie éolienne connaît actuellement au Royaume-Uni une expansion gigantesque. À l'heure actuelle, elle représente moins de 5 p. 100, mais nous visons environ 10 p. 100. Le gouvernement étudie actuellement des demandes prévoyant l'installation de parcs d'éoliennes de très grande envergure, dont certains extracôtiers. Je dois avouer que les projets extracôtiers sont moins controversés que ceux qui seraient construits sur la rive. Notre pays est petit et très densément peuplé, et il s'agit là de parcs d'éoliennes comptant 60 turbines. On se heurte à l'opposition du public pour les projets terrestres, mais c'est moins prononcé en mer. Je prévois que l'on construira beaucoup d'éoliennes extracôtières.

+-

    Le président: Merci.

    Sénateur Banks.

+-

    Le sénateur Tommy Banks: Merci.

    Au sujet des parcs d'éoliennes, accorde-t-on des avantages fiscaux importants pendant une certaine période aux promoteurs de ces parcs d'éoliennes à vocation commerciale?

+-

    M. Elliot Morley: Le principal avantage pour les investisseurs est qu'ils obtiennent un accès garanti au marché, ce qui gonfle également le prix de leur électricité, leur donnant ainsi un bon rendement. Ils savent qu'ils peuvent se fier là-dessus, à cause des certificats d'obligation renouvelables. Les compagnies d'électricité et de distribution sont obligées d'acheter cette électricité, ce qui tend à gonfler le prix réel. Les promoteurs savent donc qu'ils peuvent construire ces parcs d'éoliennes et obtenir un bon rendement en vendant l'énergie produite.

+-

    Le sénateur Tommy Banks: Est-ce que ce régime remplace plus ou moins un allègement fiscal?

+-

    M. Elliot Morley: Cela remplace vraiment l'allègement fiscal, parce que c'est conçu pour leur donner une stabilité des prix à long terme, ce qui aide à trouver l'investissement nécessaire au départ. Il est clair que c'est attrayant, parce que le nombre de demandes a augmenté en flèche.

+-

    Le sénateur Tommy Banks: Le président a évoqué notre défi d'une tonne, qui jusqu'à maintenant est entièrement fondé sur l'observation volontaire. Nous essayons de fonctionner de cette manière dans notre pays, dans bien des dossiers, et parfois cela ne fonctionne pas. Je sais que c'est difficile à quantifier, mais vous avez aussi réalisé des programmes de sensibilisation au Royaume-Uni; cela ne s'appelle pas le défi d'une tonne, mais on a quand même fait des efforts de persuasion morale. Pour ce qui est de l'importance relative, dans l'ensemble du tableau énergétique, de la consommation intérieure d'un type d'énergie par rapport à un autre, et je parle des choix individuels et non pas des entreprises, si vous deviez faire une estimation approximative, croyez-vous, dans un premier temps, que la persuasion coercitive aurait donné des résultats en l'absence des obligations dont M. Reed a parlé? Je soupçonne que la réponse est non. Je pense que notre comité a établi que la réponse est non, qu'il faut une intervention musclée à un moment donné. Mais en général, pourriez-vous nous parler de votre expérience pour ce qui est de l'efficacité de l'ingénierie sociale sous forme d'efforts de persuasion, par opposition à l'obligation?

Á  +-(1115)  

+-

    M. Elliot Morley: Il y a un argument voulant qu'un volontaire vaut toujours plus que dix personnes auxquelles on a forcé la main, et je pense qu'il y a un grain de vérité dans cet adage. Les méthodes d'adhésion volontaire font partie de l'évolution et il n'y a rien de mal à commencer par là. Certaines mesures que nous avons prises relativement à nos industries étaient initialement d'application volontaire; les entreprises n'étaient pas obligées d'y adhérer. À un moment donné, il faut aller plus loin et commencer à instaurer un élément d'obligation. Je pense que nous devons le faire dans le cadre de notre stratégie, particulièrement quand les objectifs sont ambitieux. Notre programme est ambitieux, nous ne nous faisons pas d'illusions là-dessus. C'est ce que nous faisons, mais il y a encore des éléments de l'approche volontaire dans ce que les compagnies font. Nous avons eu une campagne de sensibilisation de très grande envergure intitulée « Faites votre part », avec des messages télévisés mettant en vedette des personnes célèbres. Je pense que cela n'a pas été la meilleure campagne que nous ayons jamais payée—elle a coûté très cher, mais nous devons remettre tout cela dans le contexte des mesures que nous prenons pour encourager les gens à aller dans cette voie.

    Au bout du compte, bien sûr, l'incitatif le plus puissant, c'est la possibilité d'économiser de l'argent. Je pense que nous pouvons faire la preuve que beaucoup de mesures visant à économiser l'énergie permettent aussi d'économiser de l'argent. Nous pouvons catalyser tout cela avec certaines mesures qui ont déjà été prises, des mesures fiscales, des allégements fiscaux, des subventions directes. Par exemple, on offre un avantage financier pour l'installation de chaudières de chauffage central dans les maisons; il y a un budget pour cela. On verra peut-être dans un avenir pas très éloigné des appareils miniaturisés servant à la fois à chauffer et à produire de l'électricité, qui auront la taille d'une chaudière de chauffage central, mais fonctionnant au gaz. Il existe un appareil semblable à un moteur d'automobile qui produit de la chaleur pour le chauffage central et de l'électricité pour alimenter la maison. Nous ne sommes pas très loin d'une percée commerciale dans ce domaine. Nous voudrons peut-être appuyer cette technologie. Par ailleurs, nous donnons des subventions pour les cellules photoélectriques. Les gens qui veulent en installer sur leur toit sont admissibles à une subvention du gouvernement.

+-

    Le sénateur Tommy Banks: Je pense vous avoir entendu dire que vous avez bénéficié directement, dans le secteur de la fabrication d'automobiles, du prix de l'essence.

+-

    M. Elliot Morley: Oui, la diminution de la consommation d'essence.

+-

    Le président: Madame Lalonde.

[Français]

+-

    Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Bonjour.

    Je regrette d'avoir manqué votre présentation, mais je la lirai avec intérêt lorsque j'aurai accès aux « bleus ».

    Je vous pose une question qui n'a pas déjà été posée, je m'en suis assurée. À plusieurs reprises, j'ai été prise dans des bouchons de circulation lorsque je rentrais à Londres. J'ai donc suivi avec beaucoup d'intérêt l'initiative du maire de Londres, qui a imposé une taxe pour circuler dans Londres. J'aimerais savoir si vous en avez mesuré les effets environnementaux, si vous croyez que des mesures semblables ont des retombées, et quel est le rapport entre une meilleure utilisation du transport en commun et la réduction des problèmes environnementaux liés au transport automobile.

[Traduction]

+-

    M. Elliot Morley: C'est certainement une expérience intéressante, cette taxe sur la circulation dans le centre de Londres. L'idée a été très controversée quand Ken Livingstone, le maire de Londres, l'a proposée. Beaucoup de gens ont prédit un désastre total. Il a choisi, avec beaucoup d'adresse, un lundi férié alors qu'il n'y avait pas de circulation, pour l'entrée en vigueur de cette taxe. Le désastre potentiel suscitait une telle crainte que personne n'a osé circuler dans le centre de Londres pendant environ une semaine, alors le succès a été encore plus grand que ce qu'il avait espéré.

    Une analyse est en cours. Elle n'est pas tout à fait aussi sophistiquée que ce que vous avez suggéré, en ce qui concerne les répercussions de facteurs comme la qualité de l'air et les émissions, et toute incidence sur la santé. Je pense que cela viendra. Ce que nous savons, c'est que cette taxe a réduit les embouteillages et la circulation de 20 à 30 p. 100 dans le centre de Londres. Le nombre de passagers dans les autobus a aussi augmenté, bien que les tarifs aient été réduits. Les recettes de cette taxe sur la circulation sont directement affectées au transport en commun, en particulier aux autobus, pour subventionner le prix des billets.

    Donc, le nombre de passagers est à la hausse dans les autobus, et celui des voitures qui circulent dans le centre de Londres à la baisse. Fait ironique, le nombre de voitures a tellement baissé que cette taxe n'a pas généré autant de recettes que prévu, puisque moins de véhicules circulent.

    C'est là un étrange phénomène, parce que Londres, avant la taxe sur la circulation, comme dans bien d'autres villes, appliquait des tarifs de stationnement très élevés pour décourager la circulation. Ce que je trouve curieux, c'est que les gens, apparemment, étaient prêts à payer ces tarifs de stationnement. C'était une livre pour 15 minutes dans le centre de Londres, et pourtant, la taxe sur la circulation, de cinq livres par jour, semble être beaucoup plus efficace. Il y a là un élément psychologique. Mais cela fonctionne. Plus de gens empruntent les transports en commun et il y a moins de voitures dans le centre de Londres. Donc, le plan a fonctionné.

    Maintenant, nous avons des problèmes dans certains secteurs de Londres, avec l'oxyde nitreux et l'ozone, avec les émissions des voitures quand il fait chaud, et cela a entraîné une hausse des maladies liées à l'asthme. De toute évidence, si on réduit le nombre de voitures et les émissions, il devrait y avoir aussi des avantages pour la santé.

Á  +-(1120)  

[Français]

+-

    Mme Francine Lalonde: Merci.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci, madame Lalonde.

    Sénateur Finnerty, sénateur Milne, puis la présidence.

+-

    Le sénateur Isobel Finnerty (Ontario, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Je suis seulement curieuse de savoir si vous avez des programmes de sensibilisation, dans les écoles. Je pense que si on pouvait éduquer nos jeunes assez tôt sur l'importance du problème, on aurait plus de chances de succès. Avez-vous essayé cela dans vos écoles?

+-

    M. Elliot Morley: Oui, bien qu'il faille faire plus. Je ne voudrais pas prétendre que tout est parfait, ou même que quoi que ce soit est parfait. Nous avons beaucoup à faire. Il nous reste encore des leçons à tirer et il y a encore des exemples d'autres pays qui, selon moi, peuvent être utiles et que nous pouvons appliquer.

    Nous avons, au Royaume-Uni, ce qu'on appelle le Green Ministers Committee, l'ENV(G), dont je suis le président, en tant que ministre de l'Environnement. Il y a, à ce comité, un ministre de chaque ministère, notamment celui de l'Éducation. J'ai parlé, récemment, à Sir Charles Clarke, Secretary of State for Education and Skills, des programmes environnementaux dans les écoles. Tout cela l'enthousiasme beaucoup, et aussi notre ministère de la Culture, des Médias et des Sports, et il veut faire plus.

    Cela se fait dans une certaine mesure, mais nous pensons qu'on pourrait faire plus. Nous aimerions, en fait, que chaque école subisse une évaluation relativement à l'environnement durable. On pourrait faire participer les élèves à cette évaluation. Ce serait vraiment un moyen pratique d'apprendre des choses sur l'utilisation de l'eau et de l'énergie. Nous savons, par exemple, qu'il y aurait des économies à réaliser en installant des dispositifs d'économie de l'eau dans les écoles. On pourrait épargner beaucoup d'argent aux budgets des écoles.

    Nous avons aussi des projets parallèles. Bien que j'aime à penser que nous sommes à l'avant garde de la plupart des pays sur des aspects comme le climat, nous accusons un retard en matière de gestion des déchets. L'une de mes priorités est de recycler et réutiliser plus, de minimiser les déchets et de moins recourir à l'enfouissement sanitaire. Nous avons une taxe sur l'enfouissement, et aussi un plafond d'enfouissement, qui doivent entrer en vigueur bientôt. Nous avons créé un fonds pour la minimisation des déchets, et nous avons aussi un programme d'action sur les déchets et les ressources, qui est partiellement financé par la taxe sur l'enfouissement. Il y a des projets comme Envirowise, avec des campagnes d'éducation et des brochures payés encore une fois avec l'argent des taxes perçues sur les activités préjudiciables dans la société pour affecter les recettes à des activités positives.

    Donc nous faisons cela aussi. Il faut encore faire mieux, mais il est certain que nous progressons.

+-

    Le sénateur Isobel Finnerty: Oui, je pense que c'est là notre point faible. Je pense qu'au Canada, nous devrions commencer au niveau des écoles, parce que les jeunes seront plus informés, et en rentrant chez eux, ils sensibiliseront leurs parents.

+-

    Le président: Sénateur Milne.

+-

    Le sénateur Lorna Milne: Merci, monsieur le président.

    Je ne voudrais pas dominer la discussion et poser toutes les questions du Sénat aujourd'hui, mais puisque Julian n'a pas posé cette question, je vais le faire.

    Je m'intéresse à l'utilisation que vous faites de la biomasse, particulièrement à son emploi dans les usines au charbon...

Á  +-(1125)  

+-

    M. Elliot Morley: La cocuisson.

+-

    Le sénateur Lorna Milne: Oh, je vois, en anglais c'est « co », pas « coal ».

    Vous disiez que vous procédiez au recépage des saules sur certaines terres. Maintenant, je suppose que ce sont des terres dont vous payez les propriétaires pour qu'ils les soustraient à la production agricole.

+-

    M. Elliot Morley: C'est bien cela.

+-

    Le sénateur Lorna Milne: Donc, c'est une forme d'impôt qui va aider les agriculteurs, mais ils ne peuvent employer ces terres que pour le recépage des saules. Eh bien, le recépage n'est pas du tout une méthode employée au Canada pour cultiver les arbres ou augmenter la biomasse, mais dans certaines régions du pays, nous plantons des peupliers, l'arbre à la croissance la plus rapide que nous ayons. Généralement, nous les mettons en copeaux pour produire du papier plutôt que pour la cogénération de quoi que ce soit.

    Donc, je m'intéresse à la cogénération de la biomasse, et à la manière dont cela fonctionne.

+-

    M. Elliot Morley: Ce n'est pas entièrement fait sur des terres réservées, mais c'est une mesure d'incitation. En vertu des règles actuelles du CAP, un certain pourcentage de terres peut être soustrait à la production et les agriculteurs sont payés pour cela, par hectare. Ils ne sont pas autorisés à y faire des récoltes, mais ils peuvent y cultiver des saules. Par conséquent, ils peuvent avoir une récolte, et c'est un avantage.

    Certains agriculteurs n'utilisent pas des terres réservées; ils ont entrepris cela commercialement, à grande échelle. Ils font une rotation sur trois ans. Après trois ans, il y a une récolte, et il y a des machines spéciales qui font les copeaux au fur et à mesure de la récolte. Donc, au fur et à mesure que les arbres sont coupés, ils sont mis en copeaux, les copeaux sont vendus, parfois par l'entremise d'une coopérative, et d'autres fois par celle d'un grossiste.

    Maintenant, on avait pensé qu'il y aurait des centrales spécialisées pour cela, mais elles sont lentes à être créées. Il s'est révélé plus rapide de concevoir des centrales force-chaleur plus modestes. Je parle là de quelque chose de la taille d'une école ou d'un hôpital, avec des fournaises centrales qui brûlent les copeaux. Elles progressent très bien, donc il y a un marché pour cela.

    On peut aussi faire des copeaux—par exemple avec les déchets de l'industrie forestière. Lorsque le bois d'oeuvre est récolté, les branches sont coupées, et dans notre pays, elles sont souvent laissées sur place et servent de tapis sur lesquels circulent les débusqueuses. Ou encore, on peut tout ramasser, le mettre en copeaux et le vendre. Les déchets de la récolte du bois d'oeuvre peuvent aussi être mis en copeaux et vendus. Donc, il y a une possibilité d'un bon marché, ici.

    Je pense que c'est un nouvel élément tout à fait intéressant parce que la cocuisson dans nos centrales au charbon, qui sont énormes, est centrée autour de la plaine East Selby, dans le nord de l'Angleterre. Non seulement cela réduit-il le CO2, mais ce pourrait être un marché de volume. Si nous parvenons à stimuler ces marchés, un plus grand nombre d'agriculteurs s'y intéresseront.

    Il y a aussi eu des changements dans notre système agricole, par l'entremise du CAP. Nous cessons les subventions à la production à partir de l'année prochaine. Ces subventions n'existeront plus. Il y aura des paiements directs aux agriculteurs, mais il n'y aura plus de versements pour les terres arables, les graines oléagineuses, et toutes ces récoltes qui sont subventionnées. Cela veut dire que les agriculteurs peuvent examiner le marché et décider des opportunités qu'il offre. Nous constatons que cela a entraîné une forte croissance des récoltes industrielles.

+-

    Le président: Merci, sénateur.

    Monsieur Dion.

+-

    L'hon. Stéphane Dion (Saint-Laurent—Cartierville, Lib.): Merci.

    J'aimerais savoir quel genre de coopération vous avez eu d'autres pays de l'Union européenne et quel genre de réseaux de pratiques exemplaires vous avez avec elle. Aussi, quel genre de pressions êtes-vous enclins à exercer sur la Russie?

+-

    M. Elliot Morley: Pour ce qui est des pays de l'Union européenne, cela varie, comme vous pouvez l'imaginer. Notre attitude est la même que celle de pays comme l'Allemagne, et les pays scandinaves. Tous les pays s'entendent sur la nécessité de ces mesures. Ils sont tous d'accord. Mais les pays qui sont assez loin des cibles du protocole de Kyoto... Les changements, c'est sûr, sont assez difficiles pour eux, et il ne servirait à rien de prétendre le contraire. Certains pays, de plus, sont un peu nerveux à l'idée du genre de réductions qu'ils devront faire pour atteindre les cibles du protocole de Kyoto d'après le scénario de l'Union européenne. C'est inévitable.

    En ce qui concerne la Russie, j'ai eu un entretien très constructif avec le sous-ministre de la CDD des Nations Unies au sujet de l'attitude de la Russie. De plus, tout récemment, il y a eu une rencontre très constructive entre le président Poutine et la commissaire Margot Wallström, de DG de l'environnement, qui a été très encourageante pour nous.

    Nous sommes convaincus que la Russie finira par signer. Elle cherche peut-être à établir certains liens, peut-être à l'OMC, mais je pense qu'il est important de les encourager. Je sais que le Canada entretient de bons rapports avec la Russie, particulièrement au Conseil de l'Arctique. De fait, il y a d'importantes répercussions sur l'Arctique, qui touchent tant la Russie que le Canada, et je pense qu'il est important que nous exercions autant de pressions que possible.

    Nous avons abordé le sujet avec la Russie en leur démontrant certains des arguments que je vais présenter au comité soit qu'il y a des avantages pour la Russie à signer le protocole de Kyoto, à se joindre aux échanges de droits d'émission de carbone et aux initiatives conjointes, liées aux MDP.

Á  +-(1130)  

+-

    Le sénateur Tommy Banks: Peut-être puis-je ajouter brièvement un élément d'information à la question de Stéphane.

    Stéphane vous a posé une question sur d'autres pays de l'Union européenne, et vous avez dit que vous alliez très bientôt mettre fin à certains types de subventions agricoles dans un avenir rapproché. Est-ce qu'il y a d'autres pays de l'Union européenne qui font de même?

+-

    M. Elliot Morley: Oh, oui, c'est convenu, parce que cela relève de la compétence de l'Union européenne. C'est un découplage. À partir de l'année prochaine, les subventions à l'agriculture seront découplées de la production. Il y aura encore des subventions à l'agriculture; l'Union européenne n'est pas allée si loin. Ce n'est pas autant qu'on voudrait que ce le soit au Royaume-Uni—nous avons toujours été libéralistes en ce qui concerne les marchés agricoles—mais c'est un gros changement. D'ailleurs, je pense que beaucoup de gens sous-estiment l'ampleur du changement qui se fera, qu'apportera le découplage de la production.

+-

    Le président: Merci.

    Madame Lalonde.

[Français]

+-

    Mme Francine Lalonde: J'ai une question. Je viens d'une circonscription dont certaines parties sont fortement industrialisées. Des gens vivent à côté de ces industries. Nous avons constaté que le taux d'hospitalisation d'enfants ayant des problèmes respiratoires, notamment l'asthme, était excessivement élevé dans ce secteur. Dans cette même partie de mon comté, il y a beaucoup de circulation automobile, beaucoup de camions qui rejettent des particules lourdes, et les gens fument davantage qu'ailleurs. Nous faisons des études pour savoir s'il y a un effet de synergie entourant tout cela ou s'il y a des polluants en particulier qui seraient responsables de cette situation. Je voudrais savoir si vous avez fait des études de ce type. J'imagine qu'on doit trouver en Grande-Bretagne des concentrations du même genre.

[Traduction]

+-

    M. Elliot Morley: Il y a des concentrations similaires de polluants. De fait, il y a certaines règles de l'Union européenne qui s'appliquent aux niveaux maximum. Par exemple, l'aéroport Heathrow a demandé une troisième piste et, d'ailleurs, l'a obtenue, cette piste ne pourra pas être construite tant qu'il y aura ces niveaux de NOx. Heathrow est en deçà des normes de l'Union européenne. Il y a là une très grosse jonction d'autoroute, qui y contribue aussi. Cela pourrait très bien inciter l'autorité aéroportuaire britannique, qui est propriétaire de Heathrow, à investir son propre argent dans la création de services de transport en commun, parce qu'ils tiennent vraiment à construire cette piste, mais qu'ils ne pourront pas le faire tant que les niveaux ne seront pas réduits, alors cela vaudrait peut-être la peine pour eux d'investir leur argent dans l'amélioration du transport en commun. Il sera très intéressant de suivre la question pour voir ce qui se passera.

    Nous avons des études sur des secteurs qui ont de très hauts niveaux de polluants. La qualité de l'air, au Royaume-Uni, s'est améliorée dans l'ensemble, et c'est attribuable à des mesures de contrôle plus rigoureuses des émissions industrielles, qui se sont nettement améliorées. Les mesures dont nous parlons et l'efficacité accrue des carburants ont permis de réduire l'émission de polluants des véhicules automobiles aussi, bien que le nombre de voitures ait augmenté; l'un neutralise l'autre, en quelque sorte, mais les voitures sont plus propres, pour ce qui est de leurs répercussions sur l'environnement.

    Notre problème vient de points réellement chauds, principalement dans nos grandes villes et sont surtout attribuables au transport. C'est pourquoi nous faisons, à Londres, l'expérience des autobus à l'hydrogène et aux piles à combustible. Il n'y en a que trois, alors je ne voudrais pas exagérer l'ampleur du changement, mais nous faisons cette expérience. Peut-être devrons-nous envisager de restreindre le nombre de véhicules dans certains secteurs, en imposant des limites aux routes, par exemple, bien que nous n'en soyons pas encore là. Donc, dans l'ensemble, la qualité de notre air s'est améliorée, mais nous avons encore ces points chauds qui posent problème.

Á  +-(1135)  

[Français]

+-

    Mme Francine Lalonde: C'est la même chose ici. Globalement, l'air s'est amélioré, mais il y a des secteurs où des problèmes persistent. On ne peut pas dire qu'il n'y a qu'un seul responsable, car il y a sans doute un effet cumulatif et synergique. Par conséquent, il faut adopter des mesures pour tous ces polluants en même temps.

[Traduction]

+-

    M. Elliot Morley: C'est bien cela.

[Français]

+-

    Mme Francine Lalonde: Je serais très heureuse que vous me signaliez des études en particulier. Je vous remercie.

[Traduction]

+-

    M. Elliot Morley: Je suis sûr que nous avons fait des études sur la question. Nous pouvons certainement vous transmettre cette information.

    Il y a aussi qu'il fait plus chaud, et cela nous ramène aux répercussions du changement climatique. L'été dernier a été le plus chaud jamais enregistré au Royaume-Uni; nous avons atteint la plus haute température jamais vue, soit 37,9 degrés centigrades, ce qui est très chaud pour le Royaume-Uni, particulièrement alors qu'une grande partie de notre infrastructure n'est pas vraiment conçue pour fonctionner au-delà de 30 degrés centigrades. Donc, si on passe de longues périodes au-dessus de 30 degrés, les lignes de transport d'énergie commencent à se dénuder, nos rails à se gondoler, on ne peut plus travailler dans les usines. Notre réseau de métro, à Londres, a vraiment atteint la limite en août dernier, pour ce qui est de la sécurité des utilisateurs. De fait, j'ai l'impression qu'avec les températures qui ont été atteintes dans le métro de Londres, nous intenterions des poursuites contre les agriculteurs qui transportent des animaux par ces températures, mais il y avait des gens dans le métro.

    En France, des milliers de personnes sont mortes, probablement à cause des hauts niveaux d'ozone, et aussi de stress, particulièrement chez les personnes âgées. L'ozone est un problème difficile, parce que ce n'est pas entièrement attribuable à l'industrie; il y a un facteur de l'action du soleil, et l'ozone peut avoir un effet négatif.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Reed.

+-

    M. Julian Reed: Monsieur le président, lorsque j'ai entendu parler de la fin des subventions, soudainement, j'ai...

+-

    M. Elliot Morley: Je n'irai pas jusqu'à dire qu'il s'agit de toutes les subventions, mais les subventions à la production prennent fin, c'est vrai.

+-

    M. Julian Reed: Est-ce que cette mesure de cessation des subventions s'appliquera aussi en France?

+-

    M. Elliot Morley: Oui. Il n'y aura plus de paiement pour les terres arables, les anciennes subventions. Il n'y aura plus de versement par tête de bétail et de mouton. Tout cela prend fin et, au lieu de cela, les paiements seront rassemblés en ce qu'on appelle un paiement unique. Nous l'appliquerons tout simplement à la superficie des terres, et ainsi l'agriculteur recevra un certain paiement par hectare. Il n'y aura pas de rapport avec la production ou le type de culture; tout cela, c'est fini. Par conséquent, les agriculteurs observeront maintenant ce que veut le marché, plutôt que de cultiver certains produits rien que parce qu'ils sont subventionnés pour ceux-là.

+-

    M. Julian Reed: C'est une révolution.

+-

    M. Elliot Morley: Je suis étonné par le peu d'intérêt que cela a suscité dans l'examen mi-mandat, mais c'est réellement un gros changement. La France s'y opposait.

+-

    M. Julian Reed: Nous avons entendu des bulletins de nouvelles, de temps à autre, au sujet d'épandages de fumier sur les Champs Élysées.

+-

    M. Elliot Morley: Les agriculteurs recevront encore des versements, mais ils ne seront pas fonction de la production.

+-

    M. Julian Reed: Merci. Je me suis remis du choc.

Á  +-(1140)  

+-

    Le président: J'ai plusieurs brèves questions. La première concerne le Green Ministers Committee. Est-ce que tous les ministres sont membres de ce comité?

+-

    M. Elliot Morley: Chaque ministère doit y désigner un ministre, et celui-ci est appelé le « green minister », le ministre écologiste. Cela fait partie des responsabilités d'un portefeuille ministériel. Un ministre de chaque ministère doit assumer cette responsabilité du portefeuille.

+-

    Le président: Y a-t-il plus d'un ministre par ministère?

+-

    M. Elliot Morley: Oh, oui. La plupart de nos ministères ont plusieurs ministres.

+-

    Le président: Ils se réunissent tous les mois?

+-

    M. Elliot Morley: Nous nous réunissons tous les trois ou six mois actuellement. Cependant, je rencontre en particulier chacun de ces ministres sur une base bilatérale pour parler de ce qu'ils font dans chacun de leur ministère.

+-

    Le président: Mais alors, vous faites un compte rendu au Cabinet plénier?

+-

    M. Elliot Morley: Effectivement, le comité fait un compte rendu au Cabinet plénier. Il produit aussi un rapport annuel et fait l'objet d'un examen par notre Comité de la vérification environnementale.

+-

    Le président: Certains d'entre nous avons comparu devant votre comité de la vérification environnementale il y a un an.

+-

    M. Elliot Morley: Oui, je l'ai appris.

+-

    Le président: Ma prochaine question concerne la taxe sur la circulation. Pouvez-vous nous donner une idée, en pourcentage, de l'augmentation de l'utilisation des transports?

+-

    M. Elliot Morley: Les autobus?

+-

    Le président: Les transports en commun.

+-

    M. Elliot Morley: Le transport par autobus a augmenté plus que tout autre chose. Tous les transports en commun sont en hausse, dont le métro, le réseau ferroviaire, le réseau ferré de banlieue, mais l'augmentation la plus marquée, récemment, est survenue dans l'emploi des autobus. Nicky Gavron, qui était maire adjoint de Londres—Londres commence tout juste, elle aussi, un cycle électoral; les élections doivent avoir lieu en juin—le maire, donc, a cité un chiffre à Toronto, qui est de 20 p. 100.

+-

    Le président: Ma question suivante concerne l'industrie automobile, dont ont parlé mes collègues. En Amérique du Nord, nous avons cet étrange phénomène qui fait que la première voiture de tourisme hybride produite par l'un des trois grands verra le jour cet été. C'est une Ford.

+-

    M. Elliot Morley: Je vois.

+-

    Le président: Je suppose qu'en Europe, il n'y a pas encore de véhicule hybride.

+-

    M. Elliot Morley: Il y a une Toyota en Europe.

+-

    Le président: Mais pas de voiture européenne.

+-

    M. Elliot Morley: Elle n'est pas fabriquée en Europe.

+-

    Le président: Comment pouvez-vous expliquer ce retard des fabricants européens et américains?

+-

    M. Elliot Morley: Je pense que c'est parce que jusqu'à maintenant, il n'ont pas réussi à concevoir un modèle qui pourrait être compétitif sur le marché. Les fabricants européens et, je pense, nord-américains, ont fait beaucoup de recherche et de développement, mais, selon les calculs, le coût du véhicule serait tellement élevé qu'il ne se vendrait pas vraiment. Manifestement, c'est une question qui s'adresse plus aux compagnies, mais je pense que tandis qu'elles raffineront leurs techniques, qu'elles raffineront leurs technologies et leurs techniques de fabrication, les prix baisseront. Toyota, c'est évident, l'a fait. Ce n'est pas la voiture la plus économique qu'on puisse acheter au Royaume-Uni, mais c'est une voiture que certaines personnes s'intéresseront à acheter au prix qui est demandé. Je le rappelle, on obtient aussi une subvention de 1 000 livres du gouvernement pour l'achat d'une telle voiture neuve.

+-

    Le président: Au Canada, sur le marché du détail, la Toyota se vend aux environs de 29 000 $, ce qui correspond au milieu de gamme.

+-

    M. Elliot Morley: Oui, c'est l'équivalent.

+-

    Le président: Deux provinces, la Colombie-Britannique et l'Ontario, et seulement ces deux-là, offrent une prime de 1 000 $. Vous nous avez dit 1 000 livres, donc vous êtes plus généreux que nous le sommes. Mais il n'y a que ces deux provinces. Le gouvernement fédéral n'offre aucun incitatif.

+-

    M. Elliot Morley: Cette voiture hybride est aussi exemptée de la taxe sur la circulation, il n'y en a pas beaucoup. Lorsque le président Bush est venu à Londres, il n'y a pas très longtemps, toute sa suite a dû payer cette taxe.

+-

    Le président: D'après l'Agence internationale de l'énergie, les gens de Paris prévoient que le point de déplétion à moyen terme du pétrole sera atteint aux environs de 2025. Est-ce que vos études parviennent aux mêmes conclusions?

Á  -(1145)  

+-

    M. Elliot Morley: Je ne suis pas sûr de ce que sont les dernières projections, bien que cela ne semble pas déraisonnable. Le pétrole de la mer du Nord baisse rapidement, donc il ne durera plus très longtemps.

+-

    Le président: Lorsqu'on se rendra compte, sur le marché, que le point de déplétion à moyen terme a été atteint, le prix du produit va dépasser toutes les bornes.

+-

    M. Elliot Morley: Je pense que c'est absolument inévitable. Il y a encore des réserves non exploitées, et il peut y en avoir qui ne sont pas connues, particulièrement dans le Caucase et en Russie, mais même celles-là sont en voie de développement actuellement. Je n'ai pas de données à jour, mais je ne pense pas que l'hypothèse soit déraisonnable. Cependant, entre maintenant et 2025, il pourrait très bien y avoir de nouvelles technologies de carburant propre, plus intéressantes que le pétrole. L'un de nos chercheurs a dit que l'âge de pierre n'a pas pris fin à cause du manque de pierres, et l'âge du pétrole pourrait bien ne pas s'éteindre à cause du manque de pétrole.

+-

    Le président: Au Canada, nous avons beaucoup d'espoirs dans l'hydrogène et la technologie Ballard. L'hydrogène est le carburant de l'avenir. Est-ce que c'est quelque chose que vous envisagez dans la première phase?

+-

    M. Elliot Morley: Nous faisons beaucoup de recherches sur le sujet, et nous collaborons aussi avec le Japon et les États-Unis au plan de la recherche. Le problème de l'hydrogène, bien entendu, c'est que sa production exige beaucoup d'énergie. C'est pourquoi l'Islande y voit un avantage potentiel, parce qu'elle a beaucoup d'énergie bon marché grâce à ses centrales hydroélectriques et thermiques. L'Islande envisage de devenir un grand producteur d'hydrogène et, de fait, d'autres pays qui ont une technologie de production électrique économique, l'hydroélectricité, notamment, pourraient s'y intéresser. Mais c'est l'inconvénient de l'hydrogène.

+-

    Le président: Ma dernière question nous ramène à vos observations préliminaires. Qu'est-ce qui vient après Kyoto? Quel devrait être le prochain grand protocole de la communauté internationale? Nous le savons tous, le protocole de Kyoto ne fait qu'adoucir le virage. Que voudriez-vous qu'il y ait après Kyoto?

+-

    M. Elliot Morley: Nous devons commencer dès maintenant à penser à la prochaine phase qui suivra Kyoto, en dépit des États-Unis et de la Russie. Nous devons aller de l'avant, et je pense que nous devons commencer à penser à un niveau de réduction de l'ordre de ce à quoi nous nous sommes engagés au Royaume-Uni, soit 50 à 60 p. 100 d'ici à 2050. Ce sont des cibles à long terme que nous devrions envisager. Il est certain que la prochaine phase de Kyoto devra prévoir de plus importantes réductions que la première.

+-

    Le président: Nous vous sommes très reconnaissants de vous être rendu disponible. L'échange a été absolument fascinant et, au nom de mes collègues, je vous souhaite bonne chance.

+-

    M. Elliot Morley: Merci, monsieur le président. Je témoigne souvent devant les comités du Parlement britannique, ils ne sont pas généralement aussi cordiaux que le vôtre, alors je vous en remercie infiniment.

-

    Le président: La séance est levée.