ENVI Réunion de comité
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent de l'environnement et du développement durable
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 6 octobre 2005
¹ | 1535 |
M. Joshua Laughren (directeur, Conservation marine, Fonds mondial pour la nature au Canada) |
¹ | 1540 |
¹ | 1545 |
¹ | 1550 |
¹ | 1555 |
º | 1600 |
Le vice-président (M. Lee Richardson (Calgary-Centre, PCC)) |
M. Bob Mills (Red Deer, PCC) |
Le vice-président (M. Lee Richardson) |
M. Bob Mills |
M. Joshua Laughren |
M. Lorne Johnson (directeur, Bureau d'Ottawa, Fonds mondial pour la nature au Canada) |
º | 1605 |
M. Bob Mills |
M. Joshua Laughren |
M. Bob Mills |
M. Joshua Laughren |
M. Bob Mills |
M. Joshua Laughren |
M. Bob Mills |
M. Joshua Laughren |
M. Bob Mills |
Le vice-président (M. Lee Richardson) |
M. Bernard Bigras (Rosemont—La Petite-Patrie, BQ) |
º | 1610 |
M. Joshua Laughren |
M. Bernard Bigras |
M. Joshua Laughren |
M. Bernard Bigras |
º | 1615 |
Lorne Johnson |
º | 1620 |
M. Joshua Laughren |
Le vice-président (M. Lee Richardson) |
Mme Yasmin Ratansi (Don Valley-Est, Lib.) |
M. Joshua Laughren |
Mme Yasmin Ratansi |
M. Joshua Laughren |
Mme Yasmin Ratansi |
M. Joshua Laughren |
º | 1625 |
Mme Yasmin Ratansi |
M. Joshua Laughren |
Mme Yasmin Ratansi |
Le vice-président (M. Lee Richardson) |
Mme Yasmin Ratansi |
L'hon. Bryon Wilfert (Richmond Hill, Lib.) |
Le vice-président (M. Lee Richardson) |
L'hon. Bryon Wilfert |
Le vice-président (M. Lee Richardson) |
L'hon. Bryon Wilfert |
Le vice-président (M. Lee Richardson) |
L'hon. Bryon Wilfert |
Le vice-président (M. Lee Richardson) |
M. Francis Scarpaleggia (Lac-Saint-Louis, Lib.) |
º | 1630 |
M. Joshua Laughren |
Le vice-président (M. Lee Richardson) |
M. Nathan Cullen (Skeena—Bulkley Valley, NPD) |
M. Joshua Laughren |
M. Nathan Cullen |
M. Joshua Laughren |
º | 1635 |
M. Nathan Cullen |
M. Joshua Laughren |
M. Nathan Cullen |
Le vice-président (M. Lee Richardson) |
M. Nathan Cullen |
º | 1640 |
M. Joshua Laughren |
M. Nathan Cullen |
Le vice-président (M. Lee Richardson) |
M. Brian Jean (Fort McMurray—Athabasca, PCC) |
M. Joshua Laughren |
º | 1645 |
M. Brian Jean |
M. Joshua Laughren |
M. Brian Jean |
M. Joshua Laughren |
M. Brian Jean |
Le vice-président (M. Lee Richardson) |
º | 1650 |
M. David McGuinty (Ottawa-Sud, Lib.) |
M. Joshua Laughren |
M. David McGuinty |
M. Lorne Johnson |
M. Joshua Laughren |
º | 1655 |
M. Lorne Johnson |
M. Joshua Laughren |
M. David McGuinty |
Le vice-président (M. Lee Richardson) |
» | 1700 |
M. Joshua Laughren |
M. David McGuinty |
M. Joshua Laughren |
Le vice-président (M. Lee Richardson) |
CANADA
Comité permanent de l'environnement et du développement durable |
|
l |
|
l |
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 6 octobre 2005
[Enregistrement électronique]
* * *
¹ (1535)
[Traduction]
M. Joshua Laughren (directeur, Conservation marine, Fonds mondial pour la nature au Canada): Je vous remercie. Je m'excuse d'être quelques minutes en retard. Je ne suis pas encore très habitué aux formalités et je dois apprendre à prévoir un délai suffisant pour m'inscrire. Veuillez m'en excuser.
Je vous remercie pour cette occasion de présenter un exposé. Je m'appelle Josh Laughren et je suis directeur du service Conservation marine du Fonds mondial pour la nature au Canada. Je suis également responsable des aires marines protégées pour le réseau mondial du Fonds mondial pour la nature. Je suis accompagné de mon collègue Lorne Johnson, directeur de notre nouveau bureau d'Ottawa.
Naturellement, nous sommes ici pour discuter des conclusions et des recommandations du chapitre 1 du rapport de la commissaire, qui concerne les progrès réalisés jusqu'à présent au chapitre des engagements que nous avons pris en matière de protection des océans.
Conformément aux recommandations de la commissaire, nos commentaires seront principalement axés sur la performance du Canada en matière d'aires marines protégées et de gestion intégrée. Nous ferons des observations sur les trois principaux thèmes récurrents du rapport de la commissaire, à savoir le leadership, la reddition de comptes et le financement. Enfin, nous proposerons des mesures immédiates en ce qui concerne les aires marines protégées qui pourraient aider, d'après nous, à respecter ces engagements, à répondre aux besoins urgents en matière de conservation et à amorcer le rétablissement de la position de chef de file du Canada en ce qui concerne les océans.
Si nos commentaires seront principalement axés sur les aires marines protégées, nous insistons sur le fait que ces aires ne constituent qu'un des nombreux volets du programme visant les océans. Je pense notamment au projet de loi C-15, visant à réduire les vidanges d'eaux de cale dans l'élaboration duquel votre comité a joué un rôle très important et auquel nous avons également apporté notre contribution, qui est un bel exemple des autres menaces qui pèsent sur les océans. Nous pensons toutefois qu'en l'occurrence, les aires marines protégées peuvent aider à résoudre des problèmes de conservation urgents et qu'elles constituent une stratégie efficace pour sensibiliser tous les Canadiens au programme visant les océans du présent gouvernement.
En outre, plusieurs aires marines protégées, identifiées depuis longtemps comme prioritaires par divers ministères, offrent une occasion de réussites rapides contribuant à donner une impulsion à ce programme. L'histoire et l'expérience nous ont toutefois appris que la constitution d'aires de protection que nous pensons imminente peut prendre non seulement plusieurs mois, mais aussi plusieurs années—et, dans certains cas, il ne serait pas exagéré de dire que cela peut durer des dizaines d'années, si l'on ne fait pas quelque chose pour accélérer le processus. Ces délais peuvent entraîner une dégradation accrue de ces aires ou sites, des occasions manquées et une perte de crédibilité accrue du Canada à ce chapitre.
Je pense que plusieurs d'entre vous connaissent le Fonds mondial pour la nature. Voici quelques informations à son sujet.
Le Fonds a été créé en 1961 et est la plus grande organisation indépendante de conservation au monde. La section canadienne a été créée en 1967 par le sénateur Alan Macnaughton. Notre conseil d'administration est composé de représentants du milieu des affaires, du milieu universitaire et de divers chefs de file locaux. Nous avons des administrateurs originaires de toutes les régions du Canada, comme M. Arthur May, qui a été sous-ministre des Pêches et des Océans et président de la Memorial University, Donald Sobey, un homme d'affaires actif sur le marché international établi au Canada Atlantique, M. Daniel Pauley, un expert renommé dans le domaine des pêches et, naturellement, l'honorable John Turner, ex-premier ministre.
Nous sommes actifs au plan régional. Nous avons des bureaux à Toronto, bien entendu, mais nous en avons également dans les Territoires du Nord-Ouest, à Vancouver, à Prince Rupert, à Montréal, à Halifax et, maintenant, à Ottawa. Notre effectif est de plus de 60 000 membres à l'échelle nationale.
Les aires marines protégées ne sont pas un sujet nouveau pour nous. C'est une question à laquelle le Fonds mondial pour la nature au Canada s'intéresse depuis plus de 20 ans et je m'occupe de ce dossier depuis plus de huit ans.
Nous sommes pragmatiques, nous fondons nos actions sur des données scientifiques et nous sommes résolument apolitiques. Nous nous sommes fixé des objectifs ambitieux mais réalistes, nous l'espérons du moins, et nous nous efforçons de bien faire certaines choses. Nous adoptons une approche fondée sur la collaboration et nous avons appris qu'il était important de former des alliances, en apparence contre nature, avec l'industrie et avec d'autres partenaires. Par exemple, M. Johnson, mon collègue, a été détaché pendant un an à Tembec, dans l'industrie forestière, pour aider ce secteur à respecter certains de ses critères en matière de durabilité.
Nous collaborons principalement avec les employés des bureaux ministériels régionaux et avec les fonctionnaires d'Ottawa, à tous les échelons, pour promouvoir la conservation. Nous nous présentons devant votre comité aujourd'hui en raison d'un profond et sincère sentiment d'urgence et de frustration au sujet de l'incapacité du gouvernement de réaliser des progrès assez rapidement dans la mise en oeuvre du programme visant les océans et de la conservation marine, surtout en ce qui concerne les aires marines protégées. Nous sommes conscients du rôle essentiel que votre comité peut jouer en sensibilisant les Canadiens et le gouvernement au caractère urgent du programme visant les océans et en demandant des comptes à ce dernier au sujet des engagements qu'il a pris.
¹ (1540)
Les raisons de notre présence ici pour discuter des océans méritent d'être signalées. Le Fonds est une organisation de conservation mondiale. Le rapport de la commissaire est constitué de huit chapitres, consacrés chacun à des problèmes criants et à des lacunes importantes qui nécessitent une intervention. Pourquoi mettons-nous donc l'accent sur les océans? Il y a à cela quatre raisons principales.
La première est que les océans sont probablement le sujet le plus négligé sur le plan environnemental et sur celui de la conservation au Canada, et probablement à l'échelle mondiale. On les a perdus de vue et on les oublie. À l'exception des habitants des régions côtières et des personnes qui en tirent leurs moyens de subsistance, le seul contact que la plupart d'entre nous ont avec les océans est lorsque nous sommes sur une plage. Un très petit nombre d'entre nous sont déjà allés voir ce qui se passe sous la surface de l'océan, par exemple.
Un océan sain et un océan qui ne l'est pas, un qui est vidé de ses poissons ou qui est extrêmement pollué, ont exactement le même aspect quand on en regarde la surface. On ne peut pas évaluer l'état de santé de l'océan de l'extérieur, contrairement à une forêt, dans laquelle une simple promenade suffit. En raison de cette incapacité de juger de l'extérieur, nous ne sommes pas conscients des changements qui s'opèrent.
La deuxième raison est que les océans sont probablement la ressource naturelle la plus mal gérée au Canada et à l'échelle mondiale. Toutes les études scientifiques l'indiquent. La FAO—c'est-à-dire l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture—estime que 70 p. 100 des pêches commerciales sont surexploitées ou exploitées au maximum, ce qui veut dire généralement qu'elles sont au bord de la faillite, comme nous avons pu nous en rendre compte à plusieurs occasions, ici même au Canada. Nous avons perdu par exemple plus de 90 p. 100 des poissons de grosse taille, des prédateurs, de l'Atlantique. En ce qui concerne le thon, l'espadon, la morue et même le flétan de l'Atlantique, les stocks ne représentent plus que le dixième de ce qu'ils étaient il y a une cinquantaine ou une soixantaine d'années.
La troisième raison est que l'on entend dire souvent que les océans couvrent 70 p. 100 de la surface de la planète. C'est ce que la plupart d'entre nous ont appris à l'école. Cependant, si l'on tient compte du fait que la profondeur moyenne des océans est d'environ quatre kilomètres et qu'ils sont peuplés d'espèces fauniques et végétales à tous les niveaux de profondeur, en volume, les océans représentent 99,9 p. 100 de l'espace habitable total sur la planète. Si l'on fait abstraction de ce dixième de pour cent, on peut donc dire que la presque totalité de notre planète est marine. Puisque je suis spécialisé dans l'environnement marin et que je travaille pour une organisation de conservation, nous nous intéressons forcément aux océans.
La dernière raison est que le Canada a perdu sa position de chef de file à l'échelle mondiale en ce qui concerne les océans. Le rapport de la commissaire établit une comparaison entre les progrès réalisés au Canada et ceux réalisés en Australie en matière de gérance des océans et nous voudrions à ce propos citer un exemple. Avec le concours du centre des pêches de la University of British Columbia et du World Conservation Monitoring Centre, qui est un organe du Programme des Nations Unies pour l'environnement, nous avons fait le premier levé cartographique de toutes les aires marines protégées au monde. L'Australie a protégé environ 8 p. 100 de la superficie des océans faisant partie de sa zone économique exclusive en créant des aires marines de protection alors qu'au Canada, 0,05 p. 100 seulement de nos océans est protégé. Malgré l'adoption de la Loi sur les océans en 1996, le pourcentage des zones protégées n'est passé que de 0,43 p. 100 à 0,51 p. 100. Au cours de la même période, le pourcentage des zones protégées en Australie est passé de 4,5 p. 100 à 7,5 p. 100. Quelle que soit l'efficacité de notre loi et de notre politique, il est indéniable que nous avons perdu notre position de chef de file mondial en ce qui concerne la protection de nos océans et que nous sommes maintenant devancés par de nombreux autres pays.
Par conséquent, pourquoi les aires marines protégées sont-elles une partie de la solution? Aldo Leopold a dit, dans les années 60, que le bricoleur intelligent conserve toutes les pièces. J'aime cette citation. En ce qui concerne la gestion des ressources naturelles, y compris des pêches et des forêts, le Canada a reconnu formellement sur papier que nous en étions encore au stade du bricolage et des expériences. Nous ne savons pas où nous allons. La mise en place d'un réseau d'aires marines et terrestres protégées qui soit représentatif et couvre toutes les parties de notre patrimoine national est la première étape de tout effort visant à conserver toutes les pièces, au cas où quelque chose ne fonctionnerait pas, en cas de surpêche de nos stocks de poissons dans diverses régions du pays, par exemple. Par conséquent, la protection d'un réseau représentatif d'aires naturelles et d'habitats terrestres ou aquatiques est un pilier de la durabilité et de la conservation.
En ce qui concerne les progrès réalisés jusqu'à présent, le rapport de la commissaire signale que le Canada a élaboré une législation et des outils d'intervention de classe mondiale, notamment la Loi sur les océans, la Stratégie sur les océans et le Plan d'action pour les océans. Nous trouvons que la Loi sur les océans est une bonne mesure législative. Nous reconnaissons que le Plan d'action pour les océans est ambitieux et renferme les bons ingrédients. Cependant, malgré toutes ces promesses, les progrès ont été très lents en ce qui concerne les aires marines protégées, l'aménagement du territoire et le plan de gestion intégrée qui devrait permettre la mise en place de ces réseaux. Le rapport de la commissaire rappelle en effet que nous n'avons créé que deux aires marines protégées depuis huit ans.
¹ (1545)
Je signale qu'entre 1990 et 2000, le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux ont mis en place plus d'un millier d'aires terrestres et forestières protégées. Au cours de la période équivalente, si l'on remonte à 1990, je pense que trois aires marines protégées seulement, en incluant celle du Saguenay, ont été mises en place. La cadence du changement est donc d'une lenteur exaspérante aujourd'hui par rapport à cette période.
Nous n'avons pas terminé la mise en place d'un plan de gestion intégrée—essentiellement un plan d'aménagement du territoire—en ce qui concerne les ressources aquatiques. Nous participons de façon directe et très active depuis plus de sept ans au processus d'élaboration du plan de gestion intégrée le plus avancé pour la Nouvelle-Écosse. Il est actuellement à l'état d'ébauche. Certains volets de ce plan sont au point. Les discussions se poursuivront sur d'autres volets. Il est toutefois intéressant de signaler que l'on n'a pas encore identifié au cours de ce processus de nouvelles aires protégées potentielles et on ne sait pas encore très bien quand ou comment ni même si ce projet se réalisera.
Les belles promesses que nous avons entendues ou la législation et les outils d'intervention vigoureux qui ont été mis en place n'ont pas encore démontré leur efficacité par le biais de mesures concrètes.
Les exemples pertinents sont légion, mais nous voudrions en signaler trois en particulier qui nous permettraient de réaliser des progrès considérables à brève échéance, surtout en ce qui concerne le programme visant les aires marines protégées. Nous pourrions en citer d'autres, mais ce sont trois exemples particulièrement importants. Il s'agit de domaines dans lesquels l'engagement du Fonds mondial pour la nature au Canada remonte à de nombreuses années—dans un cas, à plus de 20 ans—, à l'échelle communautaire. Ces projets bénéficient d'un appui vigoureux du public. Ce sont d'excellents exemples écologiques de la diversité et de la splendeur de nos océans. Ils sont déjà identifiés comme des priorités ministérielles, que ce soit à Parcs Canada, au Service canadien de la faune ou à Pêches et Océans.
Le premier concerne une aire située sur la côte ouest du Canada, au-dessus du mont sous-marin Bowie. Si vous ne savez pas ce qu'est un mont sous-marin, je signale qu'il s'agit essentiellement d'une montagne sous-marine; le mont sous-marin Bowie, situé à environ 160 kilomètres au large de la côte des îles de la Reine-Charlotte, de Haida Gwaii, s'étend sur une longueur d'environ trois kilomètres et son sommet n'est qu'à 25 mètres de la surface. C'est un des quelques monts sous-marins au monde—en fait, le seul à ma connaissance—où l'on puisse faire de la plongée. Je n'en ai pas fait, mais une expédition a été faite à cet endroit il y a environ trois ou quatre ans et les plongeurs qui y ont participé l'appelaient «le monde oublié». Ils y ont vu des quantités de poissons d'une variété et d'une taille comme on n'en voit plus dans nos eaux côtières.
Comme l'indique le rapport de la commissaire, Bowie a été identifié aire marine protégée pilote en 1998 et, sept ans plus tard, même si un certain travail a été fait au ministère, vu de l'extérieur, aucun progrès n'a été réalisé depuis cette décision. Nous abordons souvent le sujet au cours des entretiens que nous avons avec des fonctionnaires du MPO, que ce soit à Ottawa ou dans les bureaux régionaux, et ce qu'on nous dit, c'est que c'est une priorité pour le gouvernement, que le projet progresse bien et que la création de cette aire protégée est imminente. Pendant ce temps, comme l'indique également le rapport de la commissaire, une pêche expérimentale à la morue non réglementée se poursuit toujours dans cette zone.
L'ouest du lac Supérieur est l'autre exemple que je voudrais mentionner. C'est un projet qui relève de Parcs Canada. Il s'agit d'un projet d'aire marine nationale de conservation. Cette aire est située dans la zone nord-ouest du lac Supérieur. Elle débute directement à l'est de Thunder Bay. C'est une aire sauvage d'une beauté spectaculaire. Je suis certain que vous avez pour la plupart déjà traversé la partie nord du lac Supérieur. C'est une aire candidate depuis une dizaine d'années et si elle était désignée, elle deviendrait la plus vaste réserve d'eau douce au monde. En outre, elle est contiguë à l'Isle Royale Park situé du côté américain. Ce serait un bel exemple de protection transfrontalière sur les Grands Lacs, type de protection dont un besoin urgent se fait actuellement sentir.
En 2001, après trois années de consultations publiques intenses, le comité consultatif de Parcs Canada a recommandé que Parcs Canada procède à la mise en place de cette aire marine de conservation. Il est important de signaler que le gouvernement provincial appuie vigoureusement ce projet. Les inquiétudes exprimées par les collectivités locales des Premières nations au sujet de la cogestion de l'aire de conservation ont empêché le gouvernement de passer à la mise en place de ce qu'il appelle l'entente de principe, qui est l'étape suivante—et qui doit être signée avec le gouvernement de l'Ontario—et, par conséquent, le projet reste en suspens, à notre avis. Nous avons de fréquents entretiens avec les fonctionnaires de Parcs Canada au sujet de cette aire de conservation et ce qu'ils nous disent, c'est que ce projet est une priorité, qu'il progresse bien et que sa réalisation est imminente.
Le dernier exemple concerne Igaliqtuuq, qui est une réserve nationale de faune relevant du Service canadien de la faune. Il s'agit d'un lieu dénommé baie Isabella, situé sur la côte est de l'île Baffin. C'est un endroit extraordinaire. Chaque année, durant les mois d'été, de 80 à 90 baleines boréales s'y rassemblent et ce, depuis de nombreuses générations. Ce nombre représente environ un tiers de la population totale de cette espèce menacée. C'est une aire d'une importance capitale pour cette espèce.
¹ (1550)
Depuis les années 80, les Inuits de Clyde River et le Fonds mondial pour la nature exercent des pressions et lancent des appels pour la protection de cette aire. Nous avons financé diverses recherches sur les baleines boréales, et nous avons notamment accru les capacités des collectivités locales pour leur permettre de faire cette recherche et d'apporter leur contribution à la connaissance scientifique.
Au cours des années, plusieurs facteurs ont ralenti la désignation de ce site, notamment l'élaboration de l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut, la création du Nunavut en 1999 et les négociations relatives à ce que l'on appelle l'entente sur les répercussions et les bénéfices économiques pour les Inuits, qui n'est pas encore en place. Nous avons appris que l'on était en train de préparer une présentation au Conseil du Trésor qui aidera à régler la question de cette entente mais, en attendant, quand nous posons la question à des fonctionnaires, ils nous disent que c'est une priorité ministérielle, que le projet progresse bien et que la désignation de cette aire est imminente.
Je voudrais faire une brève digression. J'ai commencé à travailler pour le Fonds mondial pour la nature il y a huit ans. Une de mes premières tâches a été de me rendre sur place, à Igaliqtuuq, et de constater les progrès. Je suis rentré à Ottawa et j'ai fait un rapport à Monte Hummel, notre président et mon patron à l'époque. Je lui ai dit que j'avais de bonnes nouvelles, que j'avais rencontré les responsables et que tout se déroulait bien, qu'aucun problème ne se posait, qu'aucune intervention de notre part n'était nécessaire et que ce projet devrait être chose faite dans six mois.
Lorne a commencé à travailler pour le Fonds mondial pour la nature il y a quelques mois. Sa première tâche a été de s'informer au sujet d'Igaliqtuuq, de voir où en était ce projet. Je n'invente rien. Il était au téléphone haut-parleur avec moi, Monte et deux autres personnes qui avaient travaillé sur ce projet. Lorne nous a dit qu'il avait de bonnes nouvelles et qu'il était heureux de signaler que la réalisation de ce projet était imminente, que tout se déroulait bien, qu'aucune intervention de notre part n'était nécessaire et que ce projet devrait être chose faite dans les six mois. Il a été déconcerté par les rires qui ont éclaté dans la pièce. Je m'occupais de ce dossier depuis huit ans et Monte depuis 23 ans, si je ne me trompe.
Ce ne sont là que trois exemples; je pourrais en citer beaucoup d'autres. Il s'agit d'aires d'une beauté vraiment exceptionnelle qui sont situées sur trois de nos quatre côtés—si l'on considère les Grands Lacs comme notre quatrième zone côtière. Si ces projets étaient réalisés, ce serait une contribution exceptionnelle à l'échelle mondiale, qui nous aiderait à retrouver notre position de chef de file. En outre, nous ne pensons pas que la situation restera indéfiniment propice à la réalisation de ces trois projets. Certains événements pourraient fermer la porte à ces options et nous craignons fort que le gouvernement laisse passer l'occasion.
Quels sont les obstacles au progrès en ce qui concerne la protection de ces aires? Pourquoi ne pouvons-nous pas réaliser ces projets qui, à notre avis... En ce qui concerne Igaliqtuuq, il s'agit d'une aire essentielle pour une espèce menacée; c'est en outre un projet qui bénéficie d'un vigoureux appui de la part de la population locale et dont le bien-fondé est largement démontré par des données scientifiques. L'absence de conflit avec les utilisateurs des ressources est le Saint-Graal de la conservation. Si l'on n'arrive pas à protéger une aire comme celle-là, on se demandera alors quels rouages du mécanisme de désignation des aires protégées sont défectueux.
Je n'oserais prétendre être capable de faire des commentaires sur toutes ces questions. La commissaire l'a mieux fait que je ne pourrais le faire. Les trois thèmes qui se dégagent constamment de ce rapport sont le leadership, le financement et la reddition de comptes.
En ce qui concerne le leadership, il est intéressant de signaler qu'il s'agit d'un dossier qui relève non seulement du MPO, mais aussi d'Environnement Canada—par l'intermédiaire du Service canadien de la faune—et de Parcs Canada. Cependant, le MPO a une position dominante dans ce dossier. Il est essentiel que cette position se manifeste sur deux fronts: au niveau interministériel, sous la direction du MPO, et au niveau de Pêches et Océans Canada.
Bien que les groupes de travail interministériels et la collaboration entre de nombreux ministères soient fondamentalement nécessaires pour assurer l'efficacité de notre gestion des océans, cette collaboration comme telle n'apporte pas le leadership nécessaire pour régler un problème aussi complexe que celui-ci. L'absence de leadership peut être une cause de paralysie.
Le mandat et le leadership du MPO en ce qui concerne les océans sont indéniables, en vertu de la Loi sur les océans, mais si cette question ne devient pas une priorité à l'échelle pangouvernementale, nous avons de la difficulté à voir comment nos efforts pourraient être couronnés de succès. Malgré les engagements que nous avons pris et les commentaires encourageants du discours du Trône, nous n'avons pas beaucoup de preuves que ce soit réellement le cas et que les océans soient devenus une priorité du gouvernement; je pense que le seul indice encourageant sont les récentes pressions exercées pour régler les problèmes liés à la surpêche dans les Grands Bancs, notamment à la surpêche étrangère.
Il semble qu'au ministère, la résistance, et je dirais même l'opposition, au progrès en ce qui concerne les aires marines protégées et la gestion intégrée demeure vigoureuse. Vu de l'extérieur, nous pensons que cette situation est principalement due à deux raisons.
La première est la perception, qui rejoint souvent la réalité, d'un compromis au détriment des pêches. Étant donné que Pêches et Océans Canada ne dispose pas de fonds suffisants, toute initiative ou tout engagement concernant le programme visant les océans se fait aux dépens des programmes existants du ministère. Si l'on réduit le budget de ces programmes pour en financer de nouveaux, cela pourrait susciter de la méfiance et de la rancoeur de la part des responsables des programmes qui seront touchés.
¹ (1555)
La deuxième raison est que l'industrie de la pêche, qui est toujours considérée comme un client—en fait, comme le principal client—du MPO, continue d'afficher une vive méfiance en ce qui concerne les aires marines protégées, en raison de la perte potentielle d'occasions économiques, et à l'égard du processus de gestion intégrée, en raison des risques de perte d'accès et d'influence, influence qui a toujours été très vigoureuse.
Le financement: on ne peut pas s'en passer. Le MPO n'a pas reçu de fonds supplémentaires pour la mise en oeuvre de la Loi sur les océans. Par conséquent, il a dû réaffecter plus de 100 millions de dollars—c'est le chiffre cité dans le rapport de la commissaire—pour le financement de ces nouvelles activités, sur un budget ministériel déjà insuffisant. En février 2005, le MPO a reçu une première tranche de financement pour le plan d'action pour les océans, de l'ordre de 14,2 millions de dollars par an, pour une période de deux ans. Par contre, dans le même budget, des fonds d'un montant de 59 millions de dollars ont été affectés au Programme national sur la santé des animaux aquatiques, dont le but est de protéger nos exportations de fruits de mer. Mon intention n'est pas de critiquer la protection de nos exportations de fruits de mer, mais ce chiffre vous donne une idée du niveau d'investissement. Par conséquent, à titre de simple observateurs, nous avons beaucoup de difficulté à croire que la protection des océans est une priorité gouvernementale.
En ce qui concerne la reddition de comptes, sauf par exemple au niveau des engagements internationaux, nous estimons que le programme visant les océans ne contient pas les objectifs et les échéanciers rigoureusement précis nécessaires pour réaliser des progrès concrets. Par exemple, en ce qui concerne le Plan de gestion intégrée de l'Est du Plateau néo-écossais, des échéances précises ou des objectifs précis n'ont pas encore été fixés sept ans après son élaboration. Quelques objectifs ont été énoncés, mais pas encore des résultats précis. On n'a pas encore établi de normes, ni interdit certaines activités ou encore fixé des objectifs de conservation, comme un alignement sur les catégories de l'UICN, en ce qui concerne les aires marines protégées. On n'a pas encore établi de définitions ou d'objectifs en ce qui concerne un système ou un réseau d'aires marines protégées—par exemple, en ce qui concerne la représentation, comme je l'ai mentionné tout à l'heure. C'est pourquoi au cours de toutes les discussions franches et honnêtes que nous avons eues à ce sujet, et nous en avons déjà eu quelques-unes, les mêmes questions controversées sont revenues sans cesse sur le tapis: Qu'est-ce qu'une aire marine protégée? Pourquoi en établit-on? Sont-elles nécessaires? Sont-elles efficaces? Ces questions sans réponse sont un obstacle au progrès et ralentissent le processus.
Nous ne prétendons pas connaître toutes les réponses. C'est un problème très complexe. Nous ne prétendons pas avoir les compétences voulues pour dire de façon précise de quelle façon il conviendrait de déployer les ressources gouvernementales pour que ces projets se concrétisent. Cependant, étant donné que nous sommes des observateurs informés et à l'occasion des partenaires, voire des quasi initiés dans ce domaine, nous voudrions vous soumettre pour discussion trois recommandations générales, dans la foulée des constatations faites par la commissaire dans son rapport.
La première est de faire de la mise en place de certaines de ces aires, qui sont des candidates depuis des années, une priorité constituant les premières mesures concrètes prises dans le contexte du plan d'action pour les océans, car cela permettrait aux Canadiens d'avoir des initiatives concrètes à appuyer et cela convaincrait les sceptiques, au Canada et à l'étranger, tout en nous faisant récupérer une partie du leadership que nous avions dans ce domaine.
En ce qui concerne la deuxième recommandation, on ne peut pas y couper. Il s'agit de mettre en place un financement pluriannuel pour la deuxième étape et pour la troisième. Quand le financement est octroyé sur une base annuelle seulement, il est difficile de mobiliser et de déployer les ressources nécessaires dans le contexte d'un dossier comme celui-ci. Un minimum de sécurité serait très important.
Notre dernière recommandation concerne le leadership et la reddition de comptes qui ne sont, à notre avis, possibles qu'en établissant des objectifs, en fixant des échéances et en mettant en place des normes pour les aires protégées et les processus de gestion intégrée. L'action d'un seul ministère dans ce domaine n'est pas suffisante. Il est essentiel qu'elle soit appuyée et adoptée par les 17 ou 18 ministères concernés par le programme pour les océans. Ce pourrait être alors un outil essentiel d'évaluation des progrès réalisés dans ce dossier.
Tant que le programme du MPO sera du seul ressort du comité sur les pêches ou qu'il restera uniquement associé aux pêches, nous ne voyons aucune possibilité de respect, à l'échelle pangouvernementale, des engagements pris dans le cadre du programme pour les océans, dans le cadre du programme de durabilité qui fait maintenant partie intégrante des activités du MPO et du programme gouvernemental en général.
º (1600)
Nous tentons de trouver une solution, mais nous demandons votre appui pour que cela devienne une priorité gouvernementale et pour communiquer ce message au gouvernement et aux Canadiens, par l'intermédiaire de la Chambre des communes, afin que les belles promesses et l'investissement que nous avons fait dans la législation et les politiques se transforment en mesures concrètes de protection des océans. En faisant ces recommandations, nous sommes prêts à écouter tout conseil qui nous permettrait d'apporter une contribution plus efficace et plus constructive à la réalisation de cette oeuvre.
Je vous remercie pour votre attention. Je répondrai bien volontiers à vos questions ou à vos commentaires.
Le vice-président (M. Lee Richardson (Calgary-Centre, PCC)): Monsieur Laughren, je vous remercie pour votre excellent exposé et pour votre évaluation et vos commentaires très pertinents sur le rapport de la commissaire, ainsi que pour les recommandations adressées par le Fonds mondial de la nature au comité pour pouvoir aller de l'avant.
Nous allons entamer la période de questions avec M. Mills. Vous disposez de 10 minutes, monsieur Mills.
M. Bob Mills (Red Deer, PCC): Je vous remercie, monsieur le président. Je suis certain que vous veillerez à ce que je respecte la discipline.
Le vice-président (M. Lee Richardson): Je serai très sévère, vous pouvez en être sûr.
M. Bob Mills: Oh oui!
Quoi qu'il en soit, je souhaite la bienvenue à notre invité. J'ai d'abord un commentaire à faire, puis j'aurai deux questions à lui poser.
Lorsque je suis arrivé ici, en 1993, j'ai vécu une situation analogue à celle que vous exposez. On a en effet annoncé la dépollution des étangs bitumineux de Sydney pour l'année suivante. C'est une annonce qui a été répétée chaque année depuis que je suis ici et cette année, le gouvernement nous a annoncé qu'on ferait une étude d'une durée de deux ans, puis que l'on procéderait au nettoyage de ces étangs. En fait, le gouvernement ne cesse de repousser l'échéance pour ce qui est de passer à l'action.
Je comprends donc votre sentiment de frustration et je pense être en mesure de comprendre celui de la commissaire à l'environnement quand elle signale—et résume dans ses cinq derniers rapports—que l'on parle beaucoup mais que l'on agit très peu. Elle exprime cette opinion de manière un peu plus précise en disant, «aussitôt que le coup d'envoi est donné», pour citer ses commentaires.
Ainsi, vous dites que nous avons une Loi sur les océans qui est bien conçue mais sans aucun suivi. Je comprends votre sentiment de frustration et je vous signale que nous sommes tout aussi frustrés que vous lorsque nous examinons certains de ces dossiers.
J'ai deux questions à poser.
En ce qui concerne les réserves écologiques, et je ne suis pas très bien informé à ce sujet, je pense que le gros problème, que vous avez évoqué d'ailleurs, est l'atmosphère de méfiance qui règne—méfiance des pêcheurs, méfiance de l'industrie pétrolière et gazière sur la côte ouest et crainte que l'objectif de ces projets soit en fait d'exclure tout développement et toute pêche. Je me demande ce que nous pouvons faire à ce chapitre. Je ne vois pas ces projets sous cet angle. Je pense que nous sommes en mesure de faire en sorte qu'ils ne causent pas de dommages sur le plan commercial.
Cependant, cette méfiance est bien réelle et nous en entendons parler. Vous en entendez parler, de toute évidence. Comment pourrait-on régler ce problème?
M. Joshua Laughren: En ma qualité de représentant d'une organisation qui ne s'oppose pas au développement, je suis entièrement d'accord avec vous. Je pense qu'il est possible de s'arranger; d'autres pays ont d'ailleurs prouvé que c'était possible. C'est difficile. Je pense qu'il est juste de dire que le Fonds mondial pour la nature est conscient de la tâche que représente l'établissement de liens avec l'industrie de la pêche, comme nous l'avons fait avec d'autres secteurs, notamment le secteur forestier. Nous avons amorcé le processus, mais c'est une tâche difficile.
Je demanderai à M. Johnson de répondre. Lorne a travaillé, et continue de travailler, sur le dossier forestier avec les représentants de l'industrie et, comme je l'ai mentionné, il a été détaché dans ce secteur pour l'aider. Il pourra peut-être faire des commentaires plus lucides que moi sur les possibilités d'obtenir ce niveau d'engagement.
M. Lorne Johnson (directeur, Bureau d'Ottawa, Fonds mondial pour la nature au Canada): C'était une bonne question, monsieur Mills.
Je pense que ce que vous demandez, c'est comment il serait possible de vaincre la méfiance qui règne, non seulement dans l'industrie, mais aussi à l'échelle locale. Je voudrais citer quelques cas concernant des aires terrestres dans lesquels nous sommes sortis de ce type d'impasse. Dans presque tous les cas dans lesquels la mise en place d'aires protégées sur le territoire terrestre au Canada a été laborieuse, deux ingrédients essentiels sont entrés en jeu.
Le premier est que nous avons un gouvernement qui a annoncé ses projets sans se demander s'il serait bon de prendre telle initiative ou plutôt telle autre initiative. Il a annoncé ses intentions, un point c'est tout.
Le second est que le gouvernement a annoncé qu'il ne prendrait pas d'initiatives sans la participation des parties concernées et que c'est alors un long processus d'établissement de relations qui s'est amorcé. Cependant, du fait qu'il n'a pas établi d'emblée des objectifs précis—qu'il ne s'est pas interrogé sur l'opportunité de le faire ou n'a pas hésité mais a décidé de mettre ces projets en place parce qu'ils sont nécessaires et qu'il a pris des engagements sur la scène internationale—, ces projets n'ont pas progressé. Nous avons été témoins de l'échec de nombreux processus gouvernementaux de protection d'aires terrestres, surtout des processus provinciaux, parce qu'on avait établi un processus de consultation des intervenants sans leur donner d'instructions précises à suivre avant de poursuivre les discussions. Lorsqu'ils ont un mandat, ces groupes reviennent généralement en annonçant qu'ils n'arrivent pas à dégager un consensus, mais dans ce cas-ci, on ne leur a pas donné de mandat précis.
Je pense que ce serait utile.
º (1605)
M. Bob Mills: En ce qui concerne l'aire située à proximité des îles de la Reine-Charlotte, les monts sous-marins, où cette aire est-elle située par rapport à l'emplacement supposé des réserves de pétrole et de gaz? Il ne s'agit pas de réserves prouvées, mais de réserves potentielles. Où est-elle située? Est-ce à proximité de cet emplacement?
M. Joshua Laughren: Des discussions très intéressantes seront bientôt entamées en Colombie-Britannique au sujet de l'attribution des ressources et de l'éventuel accès aux gisements pétroliers et gaziers. Ces discussions sont en fait en cours. La région du mont sous-marin Bowie est heureusement située loin du bassin Reine-Charlotte. Elle est située loin des zones où l'on a relevé des gisements pétroliers et gaziers potentiels que j'ai vues sur les cartes.
En ce qui concerne ce projet du moins, je pense que c'est une des raisons pour lesquelles il pourra progresser; il échappe à cette controverse.
M. Bob Mills: Et qu'en pense la population autochtone locale? Est-ce qu'elle est au courant du projet et est-ce qu'elle l'appuie? Est-ce que certains facteurs locaux pourraient en retarder la réalisation?
M. Joshua Laughren: Les Haida sont la Première nation la plus proche de cette aire et ils revendiquent certains droits ancestraux. Ils signalent qu'ils y ont envoyé des bateaux. Ils ont un nom dans leur langue pour désigner ce lieu, mais je serais absolument incapable de le prononcer.
Les Haida sont un peuple très intelligent et très sophistiqué. Ils ont dit qu'ils étaient tous en faveur de la protection du mont sous-marin Bowie et qu'ils ne s'opposaient pas du tout à l'établissement d'une aire marine protégée à cet endroit, mais à leurs conditions, cependant. Je sais que le MPO a tenu des négociations avec les Haida. Je ne sais pas quelle est la nature du conflit, mais le MPO compte procéder sans consulter les Haida, à ses propres risques et périls.
M. Bob Mills: En ce qui concerne les trois réserves écologiques qui ont été mentionnées et dont la création se justifierait de toute évidence, quel coût représenterait l'engagement du gouvernement sur une période de cinq ans, par exemple?
M. Joshua Laughren: Je ne sais pas très bien, car il faut faire une distinction entre le coût du processus d'établissement et les autres coûts. Les coûts de gestion seraient minimes. La surveillance serait probablement assurée par les bateaux et les avions qui patrouillent cette zone, ce qui entraînerait une certaine hausse des coûts.
En ce qui concerne Igaliqtuuq, par exemple... C'est difficile à dire en ce qui concerne Bowie, car il serait probablement nécessaire d'assurer une certaine surveillance. Celle-ci serait toutefois assurée en majeure partie avec les ressources actuelles.
En ce qui concerne le projet du lac Supérieur, je pense que Parcs Canada a déjà affecté les fonds nécessaires. Ils attendent que le processus soit terminé. Le montant est de l'ordre de 20 millions de dollars et il est alloué dans le budget.
En ce qui concerne Igaliqtuuq, la question des fonds n'est pas encore réglée. Elle est liée aux négociations concernant le règlement de l'entente sur les répercussions et les bénéfices économiques pour les Inuits. Nous pensons que le montant a diminué à environ 1 million de dollars, dont le versement serait réparti sur une période de sept ou huit ans. Ce chiffre n'est peut-être pas exact, mais le montant est de cet ordre.
D'après nos évaluations les plus précises et les informations communiquées par le ministère, ce n'est pas la question des fonds qui retarde le processus, sauf en ce qui concerne les négociations portant sur l'entente sur les répercussions et les bénéfices économiques pour les Inuits.
M. Bob Mills: Observe-t-on une certaine résistance administrative dans les ministères concernés? Avez-vous détecté une résistance? De toute évidence, la volonté politique n'est pas là, mais a-t-on décelé la présence d'obstacles administratifs?
M. Joshua Laughren: C'est très difficile à dire quand on n'est qu'un observateur externe. Il est indéniable que ces projets sont identifiés comme des priorités dans les ministères concernés. Force m'est de conclure qu'une certaine résistance se manifeste dans divers secteurs des ministères concernés, surtout en ce qui concerne Bowie—des conflits internes sur la façon de procéder, sur la date et sur les objectifs visés. C'est, en ce qui me concerne, une conclusion inévitable.
M. Bob Mills: Merci beaucoup.
Le vice-président (M. Lee Richardson): Je vous remercie, monsieur Mills.
Monsieur Bigras.
[Français]
M. Bernard Bigras (Rosemont—La Petite-Patrie, BQ): Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Je serai bref. J'aimerais poser deux questions. En premier lieu, ce qui frappe, à la lecture du chapitre 1 du rapport de la commissaire à l'environnement et au développement durable, est l'absence de transparence en ce qui a trait aux données et aux informations auxquelles le public devrait avoir accès, tout autant que les parlementaires.
En second lieu, on constate combien il est difficile — ce qui transparaît partout — d'adopter une approche intégrée relativement aux différentes zones de protection marines. On peut lire ceci à la page 33 du rapport:
Le Ministère n'a pas respecté sa promesse de produire un rapport sur l'état des océans et n'a pas mis à jour l'information affichée sur son site Web. |
Je voudrais d'abord savoir où nous en sommes en ce qui a trait aux indicateurs qui ont été développés par le passé et qui nous permettent de connaître l'état de nos océans. Ensuite, afin d'obtenir un bon état de la situation de nos océans, que serait-il important de produire et de transmettre au public? Par la suite, je poserai une autre question.
º (1610)
M. Joshua Laughren: Je m'excuse, monsieur Bigras. Je pense que vous savez que mon français n'est pas...
M. Bernard Bigras: Je sais.
M. Joshua Laughren: ... très bon.
[Traduction]
Je pense que vous avez demandé où nous en sommes en ce qui a trait à la publication d'indicateurs qui nous aideraient à connaître l'état de nos océans et ce qu'il serait important de produire et de transmettre au public.
C'est une bonne question. Je voudrais faire d'abord une petite remarque. Je ne voudrais pas retarder certaines initiatives que nous pourrions prendre à court terme en attendant d'avoir toute l'information parce que, comme nous le savons, nous n'avons jamais toute l'information, surtout en ce qui concerne les océans. Que serait-il toutefois le plus important de produire et de transmettre au public?
Je pense que le type d'information qu'il est essentiel de rendre accessible a changé. Le mécanisme du MPO est centré sur la collecte de l'information nécessaire pour établir des évaluations des stocks et prendre des décisions concernant l'attribution des quotas et ce, pour d'excellentes raisons. Chaque année, il est nécessaire de prendre ce type de décisions pour permettre aux bateaux d'aller pêcher mais, dans le processus, l'arbre nous cache souvent la forêt.
Les meilleurs travaux sur les indicateurs en ce qui concerne les océans ne sont pas produits dans la fonction publique, notamment en raison de fonds insuffisants. C'est par exemple une étude faite par deux professeurs de Dalhousie, Boris Worm et Ransom Myers, qui a indiqué que nous avions perdu 90 p. 100 des poissons de grosse taille. En fait, on constate qu'environ 80 p. 100 de la biomasse a disparu une quinzaine d'années après l'ouverture d'une pêche. Ce n'est pas une étude gouvernementale qui l'a démontré. C'est une étude effectuée par M. Daniel Pauley, de la University of British Columbia—équipée d'un centre d'étude sur les pêches de tout premier plan—qui a fait des levées cartographiques indiquant l'état de la baisse de niveau trophique ou signalant que l'on pêche à un niveau de plus en plus bas du réseau alimentaire.
Lorsqu'on a pêché tous les prédateurs de niveau trophique supérieur, qui jouent un rôle très important, on va à un niveau de plus en plus bas de la chaîne alimentaire, pour pêcher en fin de compte des espèces comme le crabe des neiges et la crevette plutôt que la morue et le flétan. Un des facteurs les plus préoccupants est que si l'on épuise les stocks de crabe des neiges et de crevette, il n'y aura plus aucune autre option. M. Pauley a signalé qu'il disait souvent en plaisantant que l'on finirait par pêcher la méduse, jusqu'à ce qu'il apprenne l'existence de pêches à la méduse prospères dans diverses régions du monde et d'un marché émergent pour cette espèce au Japon.
Ces types d'indicateurs, qui permettent de se faire une idée de l'état exact des stocks—et cela ne concerne que les pêches—, n'émergent toutefois jamais de l'information sur les stocks diffusée par le MPO car celui-ci axe tous ses efforts sur la publication de l'information nécessaire pour pouvoir faire une évaluation des stocks dans les délais... Ce type d'analyse serait extrêmement utile à mon avis dans le contexte de la promotion de la conservation et permettrait d'indiquer à la population quels enjeux ont vraiment de l'importance. En ce qui me concerne, ces quelques petits indicateurs sont beaucoup plus importants qu'une étude très volumineuse sur l'état de nos océans, consistant à tout mesurer en ayant recours à toutes les méthodes disponibles, qui est déjà dépassée le jour même de sa publication.
[Français]
M. Bernard Bigras: Ma deuxième question porte sur l'approche intégrée. Je connais bien ce concept, car on souhaite, au Québec, qu'il y ait une gestion plus intégrée du Saint-Laurent. Dieu sait qu'il est difficile d'adopter une approche intégrée pour le Saint-Laurent, de réunir des gens autour de la table, qu'ils soient du milieu économique, du secteur des pêches ou du tourisme, de les faire travailler avec des gens préoccupés par la préservation des écosystèmes, d'essayer de faire comprendre que lorsqu'on protège les écosystèmes, on favorise la croissance économique. Quand on favorise la croissance économique, on crée des emplois. C'est cela, une approche intégrée.
La commissaire à l'environnement et au développement durable nous dit que le travail fait par un comité interministériel a ses limites et que bien souvent, cela n'a pas donné de résultats. Je suis frappé de voir qu'une stratégie nationale sur les océans a bel et bien été élaborée. Toutefois, elle écrit à la page 9: « Des travaux sont en cours pour cinq grandes zones de gestion maritime. Cependant, aucun plan n'est encore prêt. »
Mon expérience me démontre que si nous ne sommes pas capables de réunir autour de la même table les intervenants économiques, sociaux et environnementaux d'un bassin ou d'une zone, nous ne pourrons pas réussir. Nous ne pouvons simplement pas demander aux ministères de se parler entre eux si les intervenants eux-mêmes ne font pas partie de la démarche.
Je lis que le secteur du transport maritime a des inquiétudes en ce qui a trait aux zones de protection marine. Je me demande donc quel forum vous semble être le plus opportun pour faire en sorte que nous soyons capables de passer d'une stratégie à des plans d'action, dont la commissaire nous dit qu'ils sont encore en élaboration et qu'ils ne sont pas encore prêts. Quel forum, ou table de discussion, devrait être créé pour que nous passions de la parole aux actes relativement aux zones de protection marines?
º (1615)
[Traduction]
Lorne Johnson: Monsieur Bigras, je ferais deux suggestions concernant deux questions distinctes. L'une concerne ce que le gouvernement peut faire à l'interne, dans le contexte de sa structure de comités, puis
[Français]
ce qu'on peut faire avec les intervenants. Pour moi, il s'agit de deux questions distinctes.
[Traduction]
Comme l'a souligné la commissaire, des initiatives horizontales ou interministérielles posent de très grands défis. Nous ne sommes pas des experts en ce qui concerne l'appareil gouvernemental ou la façon de l'utiliser. Nous ne pouvons pas faire de tours de magie. Nous n'avons pas de suggestions percutantes à faire en ce qui concerne d'autres façons de procéder. Tout ce que nous pouvons dire, c'est que la mise en oeuvre d'initiatives horizontales ou interministérielles non assorties d'échéanciers, d'objectifs et de résultats précis posera de grosses difficultés. Par conséquent, notre recommandation en ce qui concerne le plan d'action pour les océans est d'établir des objectifs, des échéanciers et des résultats à atteindre précis.
Cela nous ramène peut-être également à votre question précédente, monsieur Bigras, à savoir ce qu'il serait important de transmettre au public. M. Laughren a signalé qu'il était essentiel de communiquer immédiatement de l'information sur l'état de santé des océans et je pense qu'il est également essentiel de communiquer au public l'information que nous pouvons lui communiquer sur les progrès que le Canada réalise en ce qui concerne des objectifs ou des résultats précis.
Actuellement, le plan d'action pour les océans n'a aucune signification concrète pour l'homme de la rue. Il contient toutefois des propositions qui pourraient être très intéressantes; je pense donc qu'il est essentiel de fixer des objectifs et des échéanciers précis qui permettront au gouvernement de rendre chaque année des comptes sur les progrès réalisés.
En ce qui concerne l'autre volet de votre question qui concerne la tribune pour les intervenants, il faudrait laisser à Pêches et Océans une certaine marge de manoeuvre car le concept de gestion intégrée est un concept nouveau dans le contexte des océans. Le gouvernement vient de se fixer, par le biais du plan d'action pour les océans qu'il vient de rendre public, un objectif de cinq plans de gestion intégrée. Dans celui qu'il a déjà amorcé, celui qui concerne l'Est du Plateau néo-écossais—dans le contexte duquel il a assez bien réussi à réunir les divers intervenants autour de la même table—, je pense qu'il a appris quelques leçons qu'il pourra probablement mettre en application dans d'autres contextes. C'est du moins ce que j'espère. Ce que je recommanderais en outre de faire, c'est de fixer des objectifs et des échéanciers précis au comité regroupant les divers intervenants.
º (1620)
M. Joshua Laughren: Le commentaire supplémentaire que je voudrais faire, c'est que nous avons tous tendance à penser que c'est plus facile dans d'autres pays. C'est le type de raisonnement selon lequel l'herbe est toujours plus verte de l'autre côté de la clôture. On entend dire que le gouvernement australien a réussi et que cela a dû se faire sans difficultés dans ce pays, alors que ce pays a les récifs de coraux et que le tourisme y est plus intensif. Pourtant, on est persuadé que c'est plus difficile ici. Sur la côte est, on pense que c'est certainement plus difficile que sur la côte ouest et réciproquement.
J'ai passé quelque temps en Australie à la Great Barrier Reef Marine Park Authority, lorsque cette administration avait entamé le processus d'un renforcement considérable du niveau de protection de la Grande Barrière de corail, processus fondé essentiellement sur un programme de gestion intégrée. Cela ne s'est pas fait sans difficulté. Il a fallu des années pour réaliser ce projet. Il a suscité des rancoeurs et des controverses. Les peuples aborigènes avaient des préoccupations. Des conflits ont éclaté entre le secteur touristique, celui de la pêche sportive et celui de la pêche commerciale. Ce fut aussi difficile que dans tous les autres pays. Ce ne fut pas une partie de plaisir.
Je suis un fervent partisan de l'approche axée sur la gestion intégrée et c'est pourquoi nous avons fait des investissements aussi considérables dans la gestion intégrée en ce qui concerne le MPO. Une des clés de la gestion intégrée—et Lorne l'a évoquée—consiste à aider les responsables à établir des définitions et à donner des instructions en ce qui concerne ce qui peut être accompli et à charger les intervenants de trouver la façon la plus efficace de procéder. Cependant, en l'absence de directives précises sur les objectifs à atteindre, les discussions tournent à la bisbille. Tant et aussi longtemps que quelques intervenants ont tout intérêt à ce que le statu quo soit maintenu, le ralentissement du processus et l'obstruction à tout consensus deviennent une fin en soi. C'est alors qu'un processus piétine et que l'on n'en tire aucun résultat.
Le vice-président (M. Lee Richardson): Je vous remercie.
Madame Ratansi.
Mme Yasmin Ratansi (Don Valley-Est, Lib.): Je vous remercie.
Je remercie les témoins d'avoir accepté notre invitation. C'est agréable de voir des êtres humains se préoccuper autant de l'environnement et de l'océan. Je vous en félicite.
Ma question se greffe à ce que vous avez dit à propos de l'Australie, à savoir qu'elle a réussi là où nous avions échoué.
J'ai une formation de comptable et, par conséquent, je me demande s'il y a des pratiques exemplaires dans ce domaine et si elles seraient applicables ici. Dans ce cas, quels sont les facteurs qui ont permis à l'Australie de réussir là où nous avions échoué? J'ai une approche pluraliste en la matière. Si c'est possible, j'aimerais que vous donniez un réponse qui ne soit pas fondée sur la question de la reddition des comptes, du leadership et du financement, mais que vous disiez plutôt comment les autorités australiennes ont procédé pour régler les problèmes qui se posaient.
M. Joshua Laughren: Cela me ramène malheureusement à certains des facteurs que nous avons mentionnés.
L'un est un leadership très vigoureux, facteur que Lorne a évoqué, dont les autorités australiennes ont fait preuve: elles ont fait comprendre que c'était important pour le gouvernement, pour les Australiens, pour le patrimoine naturel du pays, pour sa culture, pour sa souveraineté, pour sa sécurité et pour son économie. Le gouvernement n'avait pas encore déterminé comment obtenir les résultats voulus, mais c'était un premier pas.
Deuxièmement, les autorités australiennes ont octroyé les ressources nécessaires. Dans ce cas-là, par exemple, la Great Barrier Reef Marine Park Authority—qui a également pris des initiatives pour protéger des zones situées à l'extérieur de celle-là—disposait des ressources nécessaires pour faire participer les intervenants et pour rassembler les études scientifiques nécessaires. L'administration ne disposait pas de ressources illimitées, mais celles-ci étaient suffisantes pour lui permettre d'accomplir cette tâche.
Mme Yasmin Ratansi: Pendant que vous y êtes, savez-vous combien d'argent ils y ont investi?
M. Joshua Laughren: Non, mais je pourrai fournir cela ultérieurement au comité. Je pourrai vous le trouver, mais je ne me souviens pour le moment pas du chiffre.
Mme Yasmin Ratansi: Si je vous pose la question c'est que vous avez parlé de financement et du fait que vous êtes pragmatique, et dans le cadre de ce pragmatisme, il vous faut voir l'approche holistique que suit vraisemblablement le ministère des Pêches et des Océans. Celui-ci assure donc un financement, mais il effectue ensuite une analyse coûts-avantages.
Je ne jette donc le blâme sur personne. J'essaie simplement de comprendre dans ma tête ce qui a fait qu'eux ont réussi et pas nous, en dépit du fait que nous ayons mis... Est-ce que notre rapport coûts-avantages se situe du côté de nos exportations de produits de la mer? Est-ce là que se trouve notre économie? Il vous faut suivre une approche durable. Vous ne pouvez pas simplement dire que c'est l'environnement par opposition à ceci; il vous faut adopter une approche durable.
Je vous invite donc à pousser un petit peu plus loin cet ordre d'idées, s'il vous plaît.
M. Joshua Laughren: Premièrement, je suis tout à fait d'accord avec vous. Nous résistons en permanence à la caractérisation du débat sur l'environnement comme étant l'environnement par opposition à des emplois. Bon sang, pour ce qui est des océans, si nous n'avons pas appris que l'absence de conservation de la ressource est la pire chose pour les emplois, alors où d'autre aurions-nous pu apprendre cela? Il n'y a pas d'autres secteurs fondés sur les ressources où il a été prouvé de façon plus catastrophique que si vous ne vous occupez pas de la ressource, les emplois disparaîtront. Terre-Neuve a fourni de cela une preuve beaucoup plus éloquente que tout ce que je pourrais jamais vous dire en la matière. Vous avez donc tout à fait raison, il y a en la matière une analyse coûts-avantages.
S'agissant d'être réaliste, je dirais qu'une partie de notre pragmatisme en l'espèce matière serait d'examiner le mandat de Pêches et Océans et la précision qui est requise dans notre mode actuel d'allocation des pêches. Lorsque nous regardons ce qu'ils sont obligés de faire, ce qu'ils doivent réellement faire côté allocation des stocks, puis ce qu'ils ont promis de faire et ce qu'ils sont tenus de faire dans le cadre du programme de conservation, il est difficile pour un réaliste de regarder les chiffres et de convenir que les deux choses peuvent être réalisées.
En tant que réaliste, je dis que cela ne va pas arriver. Il est injuste de demander cela au Ministère, en un sens, de livrer—je veux être prudent ici pour ne pas me faire coincer des deux côtés de l'argument—sous tous les volets du programme pour les océans. Il n'y a aucun doute que cela va exiger plus de sous, aucun doute du tout. Est-ce là l'excuse du manque de progrès sur certains des sites évidents, certaines des aires évidentes dont il faudrait s'occuper?
Pouvons-nous, avec les ressources actuelles, livrer la marchandise dans le cadre du Projet de gestion intégrée de l'est du plateau néo-écossais? Je pense que oui. Pouvons-nous livrer en ce qui concerne les sites dont j'ai parlé, et plus encore? Oui, je le crois réellement. Pouvons-nous livrer pour ce qui est du programme pour les océans et de tout le débat sur la durabilité avec les ressources actuelles? Je ne le pense pas. Je ne pense pas que nous puissions soutenir les pêcheries que nous avons à l'heure actuelle, les emplois qui y sont liés, avec les ressources qui sont présentement à la disposition du MPO.
º (1625)
Mme Yasmin Ratansi: Bien.
M. Joshua Laughren: Cela nous coûte de rogner là-dessus. Je pense que le rapport de la commissaire dit que les océans contribuent quelque 23 milliards de dollars à l'économie. Je parierais—je n'ai pas fait cette analyse—que si l'on regardait nos intrants dans la gestion comparativement au rendement que cela procure, un intrant dans la conservation par rapport au rendement, ce serait plutôt maigre.
Mme Yasmin Ratansi: Je vais partager le temps dont je dispose avec Bryon.
Bryon.
Le vice-président (M. Lee Richardson): Allez-y, je vous prie.
Mme Yasmin Ratansi: Sans quoi je poserai encore une question.
L'hon. Bryon Wilfert (Richmond Hill, Lib.): Monsieur le président, je serai très bref.
Tout d'abord, j'aimerais savoir s'il vous serait possible de mettre votre mémoire à la disposition de mon bureau et du comité. Je connais le dossier du parc du Lac Supérieur; je pense que vous l'avez assez bien exposé. Je m'engage à vous revenir à vous et au comité pour vous dire ce qu'il en est, dans l'espoir que cela puisse faire avancer les choses.
Je ne pense pas que les autres relèvent directement d'Environnement Canada, en tout cas pas dans les volets dont je suis responsable. Mais je peux certainement prendre un engagement auprès de vous en ce qui concerne le Lac Supérieur. D'après ce que je comprends, nous en approchons, mais, là encore, il y a des questions à résoudre avec les Premières nations.
Clairement, monsieur le président, dans le budget de 2005, nous avons investi 28 millions de dollars sur deux ans pour la mise en oeuvre de la phase un du Plan d'action pour les océans. Il est clair que nous voulons donner suite à notre engagement à l'égard de la Loi sur les océans de 1997. Une grosse partie de tout cela relève du MPO. Oui, je conviens avec vous que le MPO doit montrer la voie et, bien sûr, travailler en collaboration avec d'autres ministères.
Je voulais dire—et malheureusement j'ai un engagement avec le ministre—que je reviendrai au comité avec la réponse sur le Lac Supérieur. Monsieur Laughren, si vous pouviez me remettre votre carte de visite avant que je ne quitte, nous verrons ce qu'il est possible de faire là-dessus. Nous serions bien sûr reconnaissants de toute aide qui pourrait être fournie pour faire avancer ce projet qui créerait le plus important parc du genre en Amérique du Nord et dans le monde.
Merci, monsieur le président.
Le vice-président (M. Lee Richardson): Nous avons des copies du mémoire. Malheureusement, nous n'avons pas pu en faire faire la traduction à temps pour la réunion d'aujourd'hui. Je peux vous assurer que le greffier vous en fournira copie. Il n'est donc nul besoin pour vous, monsieur Laughren, de vous occuper de cela. Nous vous le ferons parvenir dès que possible. Vu le court préavis que nous avions donné aux témoins, il nous a été impossible de faire le nécessaire avant la réunion.
L'hon. Bryon Wilfert: Merci. Et félicitations pour votre présidence. Quoi qu'on vous paye, je suis certain qu'on en a pour notre argent.
Des voix: Oh! Oh!
Le vice-président (M. Lee Richardson): Oui. Y a-t-il autre chose que vous aimeriez dire?
L'hon. Bryon Wilfert: Non, c'est tout.
Le vice-président (M. Lee Richardson): Revenez nous voir bientôt.
L'hon. Bryon Wilfert: Absolument.
Le vice-président (M. Lee Richardson): Voulez-vous poursuivre? Il nous reste encore trois minutes environ, monsieur Scarpaleggia, si vous voulez poser une rapide question.
M. Francis Scarpaleggia (Lac-Saint-Louis, Lib.): Oui, merci beaucoup.
Vous avez dit quelque chose qui m'a vraiment interloqué. Vous avez dit qu'il y avait désaccord au sein de Pêches et Océans quant à la façon d'aller de l'avant avec certains dossiers. En temps normal, l'on relève des désaccords entre des ministères qui abordent un dossier à partir de perspectives différentes—par exemple, Industrie et Patrimoine Canada au sujet du droit d'auteur. Il est rare de constater cela au sein d'un seul et même ministère.
Je comprends que vous voudrez être diplomate dans votre réponse, mais y a-t-il quelque chose qui ne tourne pas rond à Pêches et Océans? Y a-t-il une lutte interne pour le pouvoir? Je ne vous demande pas de réponse aussi directement que cela à la question, mais je ne pense pas que vous n'êtes pas experts quant à l'appareil gouvernemental. Vous avez pu suivre ce dossier pendant longtemps et effectuer des analyses comparatives et autres à l'échelle du pays. Je ne sais si vous auriez un commentaire à faire là-dessus.
º (1630)
M. Joshua Laughren: Certainement, et je m'efforcerai de ne pas être trop diplomate. D'ailleurs, je suis très sensible à cette question.
Le MPO est une très vaste organisation et je suis sans cesse émerveillé par sa taille et la nature diversifiée de ses activités, qu'il s'agisse des services qui s'occupent des questions de l'Arctique versus le bureau de Prince Rupert, ou la côte Est versus Ottawa, ou l'exploitation de la garde côtière par opposition à la gestion des pêcheries, par opposition au volet scientifique. Il s'agit d'un ministère extrêmement complexe qui a une longue histoire de la gestion des pêches, dirais-je. C'est la raison d'être même du Ministère.
Étant donné que la période écoulée de 1997 à nos jours est plutôt courte—l'on parle de moins de dix ans pour changer la culture de l'organisation—je ne pense pas qu'il soit étrange que l'on trouve, au sein d'une organisation aussi vaste et diversifiée, d'importants éléments qui argueraient qu'avec des ressources rares nous devrions faire davantage de travail scientifique. Écoutez, le MPO, que je sache, ne finance aucun travail. Je pense qu'il vient d'ailleurs tout juste d'annuler le tout dernier financement pour la recherche sur la morue à Terre-Neuve. C'est ainsi que l'on peut trouver au sein de la direction scientifique des gens qui demandent pourquoi on se préoccupe de gestion intégrée alors que l'on ne fait pas cette recherche sur la morue. Il s'agit là d'un conflit tout naturel.
Encore une fois, ce n'est pas une excuse; je comprends très bien quelle peut être la situation au sein du MPO. Mais en même temps, le paradigme que nous avons utilisé pour gérer les pêcheries au cours des 100 dernières années n'a clairement pas fonctionné—il n'a pas fonctionné pour les pêcheurs, sans parler des océans. Alors ce changement de cap d'un très gros navire est absolument impératif, mais cela ne m'étonne pas que le processus ait été lent ou saccadé. Je pense qu'à la base il doit s'opérer un changement réel de la culture, et c'est ce qui est lentement en train de se faire.
Le vice-président (M. Lee Richardson): Merci.
Je pense que nous sommes maintenant prêts à passer à M. Cullen.
M. Nathan Cullen (Skeena—Bulkley Valley, NPD): Merci, monsieur le président.
Merci également à vous deux d'être ici.
Vous avez mentionné les deux rôles centraux devant être joués. Il y a, tout d'abord, la façon dont fonctionne le gouvernement, entre ministères et au sein de ministères, et le rôle qu'il doit jouer à l'égard de nos océans. Deuxièmement, il y a le rôle de la communauté, des parties prenantes qui sont véritablement engagées—et la convergence des deux, si convergence il y a.
Après lecture du rapport de la vérificatrice, et c'est peut-être parce qu'on a si souvent battu le tambour ici à Ottawa et dans la presse, cela m'étonne quelque peu que cette partie du rapport de la vérificatrice, s'agissant des océans, n'ait pas attiré davantage d'attention et de couverture médiatique, car c'est une condamnation plutôt ferme. On nous dit que, fois après fois, lorsque le gouvernement a élabore un plan, le suivi découlant du plan a été difficile ou n'est pas venu.
Je caractériserai en tout cas les luttes intestines au sein du MPO comme étant graves. Je viens d'une circonscription qui dépend très largement de la pêche commerciale et sportive, et il ne s'y trouve pas de visage fédéral plus détesté que celui du MPO. Je dis cela sans équivoque et sans hésitation aucune, et ce n'est pas difficile à percevoir. Cela a été un désastre colossal.
La question que j'aimerais vous poser est la suivante : en ce qui concerne la capacité des collectivités et parties prenantes locales de gérer leur propre pêcherie, décelez-vous au sein du gouvernement fédéral un désir sincère de faire en sorte que ces plans de gestion intégrée aient le poids nécessaire pour qu'il en découle les décisions en matière d'allocation, de conservation—tous ces aspects clés? Et ces plans de gestion des groupes de parties prenantes ont-ils réussi dans d'autres régions qu'il nous faudrait examiner?
M. Joshua Laughren: Il s'agit là d'une question intelligente et piquante, qui reflète sans nul doute votre expérience dans la région d'où vous venez, et il est très difficile d'y répondre. Si vous permettez, j'aimerais vraiment renvoyer celle-là au MPO.
M. Nathan Cullen: Pourriez-vous faire quelque commentaire?
M. Joshua Laughren: Oui, je pense qu'il serait juste de dire que le MPO est schizophrène s'agissant de partager le pouvoir. Il n'a pas une très belle histoire en matière de partenariat. Je pense que cela fait partie de la lutte de pouvoir et du dilemme du contrôle central en matière de gestion des pêcheries face à l'idée de céder de son pouvoir. Il s'agit là d'un domaine qui déborde de mes compétences s'agissant de l'établissement de pêcheries à gestion locale, et tout ce que je peux dire c'est qu'il existe des exemples de cas où cela a été fait.
Il y a toujours un rôle pour une agence de gestion, que l'on parle de science ou d'équité. Je songe aux îles de la Reine Charlotte, par exemple, Haida Gwaii, où la question est de savoir qui a le poisson, les pêcheurs qui viennent de l'île de Vancouver ou les gens du coin—dans quelle mesure la proximité doit-elle entrer en ligne de compte? Si vous soumettiez tout simplement la question à une table de parties prenantes, sans encadrement aucun, je pense que cela donnerait très vite lieu à un bain de sang.
Mais vous posez la question vraiment très difficile de savoir comment gérer au mieux l'allocation des pêches. Je cherche des moyens d'ajouter de la sagesse à ma réponse, et je n'arrive pas à grand-chose.
º (1635)
M. Nathan Cullen: Concentrons-nous un moment sur l'aspect premières nations. En Colombie-Britannique, et je sais qu'il en est de même le long de la côte Est, cette question a été extrêmement controversée avec toute l'incertitude constitutionnelle, les précédents historiques et tout le reste.
S'agissant de la gestion des océans, qu'envisageriez-vous comme placement idéal ou comme rôle clé pour les communautés des Premières nations? Je dirais, en guise de préface, qu'en vertu de la loi actuelle, avec les décisions prises ces dernières années dans les affaires Delgamuukw et Sparrow et d'autres encore, les Premières nations commencent à avoir de plus en plus de poids à la table décisionnelle lorsqu'elles traitent avec le gouvernement fédéral. Or, il y a également eu des groupes, comme la bande de Cheam en Colombie-Britannique, qui ont adopté un style très agressif qui a causé beaucoup de problèmes, tant pour eux et leurs voisins que pour d'autres Premières nations.
J'aimerais donc savoir si à votre avis il y a un rôle que les Premières nations pourraient jouer à la table en vue de renforcer les choses dont vous avez parlé dans votre mémoire.
M. Joshua Laughren: En réponse à cette question, j'aimerais beaucoup pouvoir m'en remettre à Michele Patterson, la directrice de notre bureau de Prince Rupert en Colombie-Britannique, qui a beaucoup plus d'expérience que moi en la matière.
Mais clairement, en ce qui concerne le dossier des pêcheries des Premières nations, on peut l'aborder à partir de deux angles différents. Le premier est l'angle légal et constitutionnel. Il y a des gens qui se plaignent en disant que les Premières nations se sont vues accorder une certaine priorité constitutionnelle à l'égard de la pêcherie, et c'est bel et bien le cas. C'est la loi du pays et il y a un certain degré d'acceptation de ce fait. Le deuxième angle est celui des collectivités locales et des intendants—c'est le cas de n'importe quel pêcheur—qui ont des renseignements et des connaissances traditionnelles écologiques à contribuer. Tout dépend de quel côté vous vous placez.
Par ailleurs, c'est clairement une erreur—vous êtes tous très au courant de cela, mais il y a des gens qui commettent cette erreur—de penser que les Premières nations sont un genre de bloc uniforme qui envisage les pêcheries ou la gestion de la même façon. Les Premières nations, comme vous le savez mieux que les autres, sont caractérisées par une énorme diversité, non seulement entre bandes, mais également entre régions, ce qui ne se prête pas très bien à une caractérisation unique.
Outre le respect du droit constitutionnel, il y a également le rôle chez les Premières nations, comme dans toute communauté de pêcheurs locale, de fournir des informations pour appuyer la science, interroger la science, contribuer à la science et réfuter dans certains cas la science. Il existe ici une occasion merveilleuse de puiser là-dedans et de placer les usagers de la ressource dans une position d'intendance. Au lieu d'avoir à courir pour attraper jusqu'au dernier poisson, ce qui semble parfois être le cas, il y a le dilemme du prisonnier économique, dans lequel vous aimeriez vraiment sauver le poisson, mais si vous ne le prenez pas, quelqu'un va le faire à votre place, alors autant y aller vous-même. Il y a des exemples où la communauté elle-même, que ce soit une communauté des Premières nations ou une autre communauté petite ou grande, assume la responsabilité de la gestion de cette ressource.
J'ai le sentiment de n'avoir fait que picorer autour de votre question, mais je ne vais sans doute pas pouvoir faire mieux dans ce cas-ci.
M. Nathan Cullen: Monsieur le président, où en sommes-nous côté temps?
Le vice-président (M. Lee Richardson): Il vous reste trois minutes.
M. Nathan Cullen: Permettez que je passe un instant à autre chose.
Ayant parcouru à nouveau le rapport de la vérificatrice, et certains des autres rapports que nous avons vus, si les membres du comité souhaitaient un jour vivre une journée divertissante, siéger au Comité des pêches et des océans est absolument fascinant et terrifiant, s'agissant des préoccupations environnementales, lorsque vous entendez des témoins venir parler de nos pêches et de la façon dont celles-ci sont abordées, qu'il s'agisse du ministère des Pêches, et... [Note de l'éditeur—Inaudible]
L'un des outils à la disposition du Ministère et du gouvernement fédéral est le processus d'évaluation environnementale. Il comporte des priorités absolument essentielles et des choses qui ne doivent pas être cédées. L'une de ces priorités est le principe de prudence et une autre est la durabilité de la ressource, quelle qu'elle soit, qu'il s'agisse d'une route pour accéder à une mine ou d'une ressource océanique.
Pourriez-vous nous entretenir quelques instants de la façon dont ce processus a été utilisé en ce qui concerne les océans et de l'augmentation, notamment le long de la côte Ouest—penchons-nous un instant sur la côte Ouest—du nombre de piscicultures commerciales à cages en filet? Je discute avec des fonctionnaires du Ministère et leur dis qu'il existe beaucoup de données scientifiques selon lesquelles il nous faudrait au minimum être prudent en ce qui concerne la pisciculture en cages en filet. Le rapport de la vérificatrice parle d'inefficience et d'inexactitude au sein du Ministère—le refus des fonctionnaires d'écouter les conseillers locaux. Ils reviennent et disent qu'ils font des évaluations environnementales des piscicultures au préalable, et que cela suffit. Sur la plupart des plans ces évaluations sont, au mieux, faibles.
Je vous invite à partager vos lumières en la matière avec le comité. Il vaut la peine de souligner que l'on a constaté une augmentation de 650 p. 100 des piscicultures depuis 1988, alors c'est significatif.
º (1640)
M. Joshua Laughren: L'une des lacunes du processus d'évaluation environnementale a toujours été du côté de l'examen des effets cumulatifs. Le processus prévoit une évaluation au cas par cas, et bien trop souvent l'on ne se penche pas sur le rejet d'autres options et les effets cumulatifs enregistrés.
Je pense que le dossier de l'aquaculture est un cas classique dans le genre. Chaque cas est examiné isolément au lieu que l'on se penche sur le cumul des différents sites. Sur la côte Est, je pense que c'est dans la région de Grand Manan que l'on dénombre la plus forte concentration de sites aquicoles au monde. Je parie que l'archipel de Broughton n'est pas loin derrière, et il a peut-être même rattrapé son retard.
Il y a plusieurs choses qui m'irritent vraiment dans le domaine de l'aquaculture. Ici encore, il y avait des leçons à tirer du vécu de la Norvège et de l'Écosse en ce qui concerne la propagation de maladies infectieuses, de l'AIS, le pou de poisson et les échappés. Ces pays ont déjà parcouru ce chemin. Il y avait un sentiment voulant que cela n'arriverait pas ici et que l'on avait appris notre leçon, mais cela est bien sûr arrivé.
Je ne pense pas que l'installation de cages aquicoles à très haute concentration de poissons à l'embouchure d'un des cours d'eau à saumon les plus productifs au monde, avec très peu de travail préparatoire préalable, soit une façon prudente de procéder. Je pense que le MPO se fait prendre du fait d'être et initiateur et organisme de réglementation. L'on a déjà constaté cela, et dans le cas de l'aquaculture, c'est ce qui s'est passé.
Lorsque le stock de saumon rose s'est écroulé dans l'archipel de Broughton, l'on a accusé le pou du poisson. La réponse initiale du Ministère a à mon sens été indifférenciable de la réaction de l'industrie, c'est-à-dire que cela ne se pouvait pas du fait qu'il n'y avait pas de preuve, au lieu de tout de suite aller voir si cela ne se passait pas bel et bien et quels renseignements étaient disponibles. Je pense que c'est un exemple de situation dans laquelle et le MPO et le processus d'évaluation environnementale ont échoué sur le plan mise en place des éléments fondamentaux de l'approche fondée sur la précaution.
M. Nathan Cullen: Merci.
Le vice-président (M. Lee Richardson): Merci, monsieur Cullen.
Monsieur Jean.
M. Brian Jean (Fort McMurray—Athabasca, PCC): Merci, monsieur le président.
Merci à nos invités d'être venus aujourd'hui.
Ma première question concerne ce que nous faisons depuis dix ans dans ce pays comparativement à d'autres pays. Je sais, sur la base de ma participation passée, que de nombreux groupes comme le vôtre voient davantage une perspective internationale, et l'on s'attarde parfois plus sur une approche générale que sur une approche spécifique. Pourriez-vous nous éclairer aujourd'hui sur ce que le Canada a fait au cours des dix dernières années comparativement à d'autres pays développés comme l'Australie, que vous avez évoquée, et le Royaume-Uni, en vue de créer des réserves, de les protéger et d'utiliser l'argent disponible à cette fin?
M. Joshua Laughren: Je vais commencer avec les bonnes nouvelles. Je suis un éternel optimiste, mais c'est presque une condition préalable pour faire ce travail.
Je ne parle pas à la légère lorsque je dis que le Canada a la meilleure loi et certaines des meilleures politiques au monde. C'est un énorme atout. Je suis vraiment sincère lorsque je dis que je parle avec mes collègues dans d'autres pays du monde et même aux États-Unis et qu'ils me disent qu'ils aimeraient énormément avoir quelque chose comme la Loi sur les océans. Ils luttent pour faire mettre en place des aires protégées en vertu des lois en matière des pêches et de la Magnuson-Stevens Act, et ce avec des outils vraiment très mal adaptés.
Voilà pour ce qui est des bonnes nouvelles. La boîte à outils est là. Nous avons une loi formidable qui est en vérité très sophistiquée, très bien pensée, flexible et participative. Nous avons réellement des outils à la fine pointe qui, à mon sens, nous positionnent pour être en mesure de livrer en ce qui concerne le programme pour les océans. Ce n'est pas de la petite bière. Cela nous place dans une très bonne position, position dans laquelle ne se trouvent pas d'autres pays comme le Royaume-Uni, l'Australie, la Russie et les États-Unis.
Il est cependant clair qu'en Europe ils sont déjà en train d'aller de l'avant avec des zones protégées, même en haute mer, avec la Convention pour la protection du milieu marin de l'Atlantique du nord-est, qui est une commission océanique régionale.
En Australie, il n'y a pas que pour la Grande Barrière de corail qu'ils ont engagé un très bon processus. Ils viennent tout juste de créer l'aire protégée la plus vaste, la plus importante zone interdite de prise au monde, au large des îles Heard et McDonald, l'un des protectorats australiens bien au large des côtes, ce pour contrer un problème de pêche illégale semblable à ce à quoi nous sommes confrontés sur les Grands Bancs.
Bien sûr, les îles Galapagos auraient dû être dans la poche. Il s'agit d'un lieu incroyable sur le plan de sa valeur biologique. Or, il y a eu là-bas des manifestations; on a littéralement mis le feu aux immeubles abritant la gestion des pêcheries, et le personnel a été menacé et a quitté les îles, tout cela à cause de la mise en place d'une réserve pour contrer la surpêche.
Notre pays est très bien placé sur le plan lois et politiques, et c'est une chose forte et formidable, mais il est clair que ce qui fait défaut, c'est le progrès sur l'eau.
º (1645)
M. Brian Jean: Nous avons donc beaucoup d'outils, mais pas de charpentiers pour la construction.
J'ai passé un peu de temps en Australie, et il m'avait bien franchement semblé, à l'époque, il y a de cela dix ans, qu'ils étaient très en avance sur nous s'agissant de protéger ces aires, même si ce n'était pas en vertu de lois. J'ai vu très peu d'action ici. Bien sûr, ma circonscription est sans accès à la mer, mais si je m'appuie sur les voyages que j'ai faits le long des côtes Est et Ouest, il me semble que très peu a été fait au sujet des déversements de pétrole, des vidanges de fonds de cale en haute mer, et de la création d'aires protégées.
Ce que vous êtes donc en train de dire, en gros, c'est que rien n'a été fait au cours des dix dernières années, si je vous ai bien compris. Bien que nous ayons les outils, nous ne nous en servons pas.
M. Joshua Laughren: Oui.
Encore une fois, optimiste que je suis, j'ai horreur de dire que rien n'a été fait. Je pense que le projet de loi C-15 a été une merveilleuse réussite. Nous avons lutté long et fort pour assurer la protection du goulet au large de la côte néo-écossaise, ce qu'a fait le MPO, et le plan de gestion est plutôt bon, plutôt solide. Il s'agit là d'une réelle réussite, alors je ne dirais pas que rien n'a été fait; il y a eu quelque chose.
Mais cela ne s'est pas fait au rythme voulu, et je ne dis pas cela parce que c'est ce que pense la Fédération canadienne de la faune. J'ose espérer que l'on s'entend tout autant pour dire qu'il est tout aussi évident que l'on ne satisfait pas les exigences qui sont là, et que cela nous coûte, sur les plans tant de notre patrimoine naturel et de nos emplois que sur celui de l'économie.
M. Brian Jean: Pensez-vous que ce soit par suite d'un manque de volonté, de pression internationale, ou que ce soit davantage une question de coût? Je sais qu'ils mettent de côté de l'argent; le gouvernement met de l'argent de côté, mais il semble que ce n'est que très rarement que cet argent est engagé. Nous devons disposer de beaucoup d'argent, car il semble que rien ne soit dépensé.
M. Joshua Laughren: C'est en partie culturel. Le Canada regarde vers le Sud, et non pas beaucoup vers nos eaux. Cela joue contre nous. C'est en partie le leadership. Aucun gouvernement n'a fait des océans une réelle priorité pour le gouvernement lui-même. L'on s'en remet tout simplement au ministre des pêches pour livrer ou non, selon, et cela laisse les gens indifférents.
Il vaut la peine de souligner que lorsque Lorne et moi-même avons fait la tournée—Lorne plus que moi—à Ottawa au sujet de la question de savoir pourquoi l'on n'avait pas fait plus de progrès dans ce dossier, certaines personnes plutôt bien placées au gouvernement ont répondu en disant : cela importe-t-il à quelqu'un que cela se fasse ou non? Cela nous a vraiment assis, mais c'était tout à fait juste. Si nous ne faisons pas de progrès là-dessus, qui en bout de ligne va regarder ce qui se passe et dire, bon sang, il nous faut faire cela?
Voilà donc que sort le rapport de la commissaire et c'est bien que cela excite un peu les gens, mais cela passera. Et s'agit-il là de quelque chose que quelqu'un au gouvernement ou au Parlement, quel que soit son parti, va vraiment considérer comme l'une des choses essentielles à faire? Cela tend à passer après les autres priorités qui sont alignées. Mais c'est là une autre question.
Et si je descends plus bas dans l'échelle, si vous voulez, la troisième question est le fait que le Ministère soit, en partie à cause de tout cela, davantage axé sur l'allocation des pêches que sur la gestion des océans.
M. Brian Jean: Merci.
Le vice-président (M. Lee Richardson): Merci, monsieur Jean.
Je pense que par pure coïncidence M. Watson avait la même question, alors nous n'allons pas entendre l'honorable député d'Essex cet après-midi, mais passer plutôt à M. McGuinty.
º (1650)
M. David McGuinty (Ottawa-Sud, Lib.): Merci beaucoup.
Bonjour, messieurs. Je m'excuse de mon retard. Je regrette d'avoir manqué vos présentations.
J'aimerais revenir sur un ou deux thèmes. Première question : savez-vous ce que le fait le gouvernement du Canada dans son entier s'agissant de la recherche sur les océans au niveau, par exemple, de toutes les différentes organisations subventionnaires à l'extérieur du MPO? Que fait le CRSH, que fait le CRSNG, et que fait le fonds de recherche sur le changement climatique? Quelqu'un a-t-il réuni tout cela en un seul et même endroit? Avez-vous, par exemple, vu cela inscrit quelque part?
M. Joshua Laughren: Non, jamais. Le meilleur endroit où trouver cela serait peut-être le Réseau de recherche sur la gestion des océans, qui a été créé sous l'égide du CRSH, d'ailleurs, il me semble. Celui-ci assure un financement à la communauté des océanographes, qui a en fait tout juste il y a quelques semaines tenu sa réunion à Ottawa.
Je n'ai jamais vu tous ces éléments réunis ensemble. C'est une excellente question.
M. David McGuinty: Je viens tout juste de parcourir le rapport de la commissaire, et je ne vois pas cela non plus. En fait, d'après ce que je vois, cela ne fait même pas l'objet d'une recommandation. Je me demande simplement s'il y a quelqu'un qui a vraiment pris le temps de se renseigner sur ce que l'on fait en ce qui concerne la recherche sur le changement climatique dans les océans et ce que l'on fait sur différents fronts dans le domaine scientifique.
Je voulais simplement poser cette question pratique.
La deuxième question que j'ai pour vous est la suivante. Si j'ai bien compris, nous avons à l'heure actuelle dans ce pays ce que j'appellerais cinq projets de démonstration de gestion intégrée. Cette vérification s'est penchée sur trois des cinq et a relevé un certain nombre de sérieux défis. Pourriez-vous m'indiquer un pays dans lequel il existe des preuves évidentes d'un meilleur système de planification de gestion intégrée et me donner une idée—et, je ne sais pas, qu'il s'agisse de la Russie, de l'Australie ou d'un autre pays qui donne sur l'océan—des raisons pour lesquelles son processus de planification de gestion intégrée semble être supérieur au nôtre?
M. Lorne Johnson: Je viens du volet terrestre, comme vous le savez, et je pense qu'il existe, du côté terrestre, des exemples canadiens et étrangers de situations où l'on a fait des progrès énormes dans la gestion intégrée avec des secteurs axés sur des ressources—exploitation forestière, exploitation minière, chasse, trappage, loisirs—et des intérêts environnementaux.
Il y a eu une question plus tôt, à laquelle nous avons répondue en expliquant les ingrédients qui sont nécessaires pour aller de l'avant avec une approche inclusive de gestion intégrée. À brûle-pourpoint, la première réponse qui nous est venue était qu'il y ait une claire orientation ainsi qu'une directive gouvernementale en ce sens, avec un certain nombre de cibles déterminées au préalable. L'une des cibles serait peut-être du genre : ne vendez pas la ferme pour des raisons économiques, élaborez un réseau d'aires protégées représentatif et laissez les gens se débrouiller entre eux. C'est un petit peu plus compliqué que cela, mais si vous livrez réellement des résultats souhaités à un groupe de parties prenantes et de Premières nations réunies autour d'une table, alors elles peuvent faire des choses formidables, surtout avec de bons conseils gouvernementaux et une certaine facilitation.
La deuxième condition est de réunir les bonnes personnes autour de la table. Comme vous le savez sans doute mieux que nombre d'entre nous, ce n'est pas toujours facile lorsque les gens sont nombreux autour de la table; cela peut donner des résultats intéressants. Mais, encore une fois, si vous avez des objectifs clairs pour le processus et si vous fixez, avant que les gens ne viennent, les résultats espérés, alors je pense que vous maximisez vos chances de réussite.
Josh, y a-t-il des exemples de gestion intégrée en milieu marin qu'il vaudrait la peine de signaler?
M. Joshua Laughren: Oui, et je reviendrai à l'exemple de l'Australie. Cela m'ennuie d'y revenir toujours—il en existe d'autres—mais c'est un exemple facile. Les Australiens ont fixé ce qu'ils ont appelé des principes d'exploitation, établissant les règles du jeu, comme ce que Lorne a esquissé, un genre de liste de « ce pour quoi nous sommes ici ». Ils avaient des critères socio-économiques : nous opterons pour ce qui coûte le moins cher; nous chercherons à réduire au minimum les coûts. Certains de leurs critères ne cadrent pas parfaitement, mais ils disaient qu'ils couvriraient toute la gamme d'habitats, tant dans le nord que dans le sud, en tenant également compte de la profondeur de l'eau. Partout où la chose serait possible, ils protégeraient tout le récif; ils ne couperaient pas du reste une partie du récif. Ils avaient toute une série d'objectifs qu'ils avaient fixés pour permettre aux parties prenantes de jongler avec tous les éléments du cheminement.
L'exemple anecdotique que j'adore est le suivant : ils sont allés dans une localité de pêcheurs dans le nord de l'État de Queensland et ont demandé aux gens de leur dire quelles zones étaient importantes pour eux pour la pêche afin de pouvoir les indiquer sur la carte. Bien sûr, les pêcheurs ont dit, bon sang, si on leur dit où l'on pêche, on va leur livrer les renseignements les plus secrets qu'on possède. Alors les pêcheurs ont dit qu'ils pêchaient par-ci et par-là. Ils leur ont indiqué toutes sortes de zones qui n'étaient vraiment pas les bonnes. Puis, lorsque la première carte a été publiée par les responsables du parc marin, les pêcheurs ont paniqué, voyant que les meilleures zones de pêche avaient été fermées. Les autorités leur ont dit, écoutez, vous nous aviez dit que vous ne pêchiez pas là. Et les pêcheurs de répondre, oui, mais nous ne savions pas que vous alliez boucler toutes ces zones.
C'est à ce stade-là que les groupes de pêcheurs se sont réellement assis et ont commencé à travailler avec eux autour de la table. Ils se sont alors rendu compte qu'il leur fallait ou faire partie du processus ou subir des résultats épouvantables, parce qu'ils étaient les seuls à pouvoir contribuer. Alors voilà donc un exemple.
Les autres régions du monde qui ont fait de même avec ce que j'appellerais des principes de fonctionnement semblables—des règles du jeu permettant aux parties prenantes de s'engager autour de l'idée—étaient les îles Galapagos et les Channel Islands aux États-Unis, qui sont un sanctuaire marin mais qui sont une vaste zone qui n'a en fait pas vraiment eu de penchant pour la conservation avant l'instauration d'un processus de gestion intégrée. Les Keys de la Floride seraient un autre exemple.
º (1655)
M. Lorne Johnson: J'aimerais juste ajouter une chose en tant qu'exemple précis, si vous le permettez, très rapidement.
Je ne suis pas certain que ce soit le meilleur exemple que nous ayons dans ce pays, mais j'estime que le processus Des terres pour la vie en Ontario, pour lequel nombre d'entre nous avons été attaqués, et nous en portons toujours les traces, a été un exemple clair d'un gouvernement montrant la voie en disant, voici ce que nous allons faire. Le gouvernement a en fait dit la même chose à tout le monde, à l'industrie et aux groupes environnementaux. Malheureusement, cela n'a pas été formidable sur le plan participation des Premières nations, mais le gouvernement avait au moins dit à l'industrie et aux Premières nations, nous allons aller de l'avant et réaliser la chose avec ou sans vous. Nous nous sommes ensuite très vite précipités autour de la table et nous sommes organisés.
Je pense que la prochaine fois, nous procéderons de façon plus inclusive si la chose est possible, mais c'était un exemple d'un gouvernement disant « Voici ce qui va être fait ».
M. Joshua Laughren: J'aimerais, pour finir, évoquer la Colombie-Britannique, qui a une vaste expérience de la planification de l'occupation des sols—un sujet controversé, très chargé, avec beaucoup d'argent en jeu pour certaines industries qui subissaient de durs coups. Même si les initiatives étaient terrestres, je pense que c'est un exemple dont il vaudrait la peine de tirer beaucoup de leçons.
M. David McGuinty: Si je soulève cela—et je ne suis pas ici pour excuser qui que ce soit—je tiens à être très sérieux, et à ce que le comité soit très sérieux, s'agissant des difficultés incroyables que suppose la gestion côtière intégrée.
Ce rapport, aussi progressif qu'il soit en relevant les manquements du Ministère s'agissant d'amener une véritable gestion intégrée, recommande à la page 9 que le Plan d'action du Canada pour les océans soit reconnu et géré en tant qu'initiative gouvernementale horizontale. Il s'agit là de paroles dont vous pourriez paver toute la route de Vancouver à Ottawa : on nous parle d'initiatives horizontales mais sans nous expliquer de quelle façon procéder. Puis, à la page 22, on trouve une autre recommandation, celle-ci disant que Pêches et Océans Canada devrait finaliser et mettre en oeuvre ses lignes directrices opérationnelles pour la planification de gestion intégrée, mais qui ne donne aucune indication quant à la façon de faire. Il serait très utile au comité d'avoir une indication des pays du monde de la théorie de la gestion des zones côtières qui ont véritablement en place des systèmes de gouvernance et les bonnes attributions de compétences à ces zones et à ces joueurs pour véritablement faire un meilleur travail.
Monsieur le président, j'aimerais beaucoup que l'attaché de recherche du comité obtienne pour nous de tels renseignements comparatifs, s'il en existe. J'entends sans cesse parler de l'Australie, mais il n'y a rien dans ce rapport au sujet de ce prétendu bond en avant de l'Australie sur ce plan. Je pense qu'en tant que pays c'est ce mystère là qu'il nous faut élucider. Il semble que ce soit le fil conducteur de tout ce rapport. Cela m'ennuie que l'on ne m'ait pas fourni ici d'autres exemples comparatifs sérieux en dehors de l'Australie.
Je crois que c'est vers cela que le rapport nous dirige. Si nous voulons mieux nous occuper des océans, il nous faudra trouver de meilleurs processus pour inclure ceux qui interviennent dans les océans.
C'est cette pensée que j'aimerais livrer à tout le monde pour conclure.
Le vice-président (M. Lee Richardson): Ce que vous dites est tout à fait juste, et M. Laughren en a touché un mot plus tôt dans la réunion en disant que c'est dans cette direction qu'il nous faut aller. Mais ce n'est pas ce qui va se passer lorsque vous êtes en présence de ministères très différents, chacun avec son propre programme et son propre travail à faire. Il faudra vraiment qu'un comité comme celui-ci, ou qu'un organisme externe comme la Fédération canadienne de la faune, montre, je pense, la voie et assure cette intégration, ou un plan en vue de ce genre d'intégration, s'il y a...
Monsieur Laughren, êtes-vous au courant de plans existant dans d'autres pays, dans le genre de ce que souhaiterait voir M. McGuinty?
» (1700)
M. Joshua Laughren: Cette question est tout à fait pertinente, et je suis tout à fait en accord avec le commentaire. C'est tout simplement que cette gestion intégrée est chose difficile. Franchement, à l'échelle mondiale, la gestion des pêches et la gestion des océans sont en conflit. Le Canada n'est pas seul à avoir du mal à trouver sa voie en la matière.
Certaines études comparatives ont été réalisées. Je les dénicherai et je les ferai parvenir à votre bureau. Je ne sais plus dans quelle mesure elles seraient utiles, mais je les parcourrai et je verrai si je ne peux pas trouver de bons documents fiables détaillant la chose et je les transmettrai alors au comité, si cela peut vous être utile.
M. David McGuinty: En conclusion, monsieur le président, il est tout à fait possible que le Canada soit en tête de peloton, en fait, s'agissant de ses tentatives de concrétiser la notion de gestion intégrée de zone côtière. Cela n'est-il pas possible?
M. Joshua Laughren: Si je vous ai bien compris, je pense qu'il est juste de dire que le Canada est le chef de file dans ses tentatives. Je pense que nous avons essayé d'être juste sur le plan des lois, des politiques et des structures, mais pour ce qui est des résultats pour certains des indicateurs mesurables, lorsque vous prenez des indicateurs comme les aires marines protégées ou l'état de santé des stocks de poisson, alors il devient de plus en plus difficile de prétendre que le Canada est le chef de file.
Le vice-président (M. Lee Richardson): Merci, monsieur McGuinty.
Merci encore à vous, monsieur Laughren et monsieur Johnson, d'être venus comparaître aujourd'hui et de votre mémoire. Il sera sous peu distribué aux membres du comité dans les deux langues officielles. Nous vous sommes reconnaissants du temps que vous nous avez accordé aujourd'hui et, encore une fois, d'être venus en dépit du court préavis. Votre exposé a été très réfléchi, vous y avez consacré beaucoup de temps, et nous vous en sommes très reconnaissants. Merci d'être venus.
La séance est levée.