SDEV Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Sous-comité des droits de la personne et du développement international du comité permanent des affaires étrangères et du commerce international
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mercredi 11 mai 2005
¹ | 1540 |
Le président (M. Navdeep Bains (Mississauga—Brampton-Sud, Lib.)) |
M. Ken Sunquist (sous-ministre adjoint, Affaires internationales et délégué commercial en chef, ministère du Commerce international) |
¹ | 1545 |
Mme Christine Côté (directeur par intérim, Direction de la politique commerciale sur l'investissement (EBI), ministère du Commerce international) |
¹ | 1550 |
¹ | 1555 |
Le président |
M. Gary Nash (sous-ministre adjoint, Secteur des minéraux et des métaux, ministère des Ressources naturelles) |
º | 1600 |
Le président |
L'hon. Ed Broadbent (Ottawa-Centre, NPD) |
º | 1605 |
Le président |
L'hon. Ed Broadbent |
Le président |
M. Wajid Khan (Mississauga—Streetsville, Lib.) |
Le président |
L'hon. Ed Broadbent |
Le président |
Le président |
M. Ken Sunquist |
» | 1715 |
Mme Christine Côté |
M. Vernon MacKay (analyste principal de la politique commerciale, Direction de la politique commerciale sur l'investissement (EBI), ministère du Commerce international) |
L'hon. Ed Broadbent |
M. Vernon MacKay |
L'hon. Ed Broadbent |
M. Vernon MacKay |
L'hon. Ed Broadbent |
Le président |
L'hon. Ed Broadbent |
M. Ken Sunquist |
L'hon. Ed Broadbent |
M. Ken Sunquist |
L'hon. Ed Broadbent |
» | 1720 |
Le président |
M. Wajid Khan |
M. Gary Nash |
» | 1725 |
M. Wajid Khan |
M. Vernon MacKay |
M. Gary Nash |
Le président |
L'hon. Ed Broadbent |
M. Vernon MacKay |
L'hon. Ed Broadbent |
» | 1730 |
M. Gary Nash |
Le président |
M. Gary Nash |
Le président |
M. Wajid Khan |
Le président |
CANADA
Sous-comité des droits de la personne et du développement international du comité permanent des affaires étrangères et du commerce international |
|
l |
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l |
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TÉMOIGNAGES
Le mercredi 11 mai 2005
[Enregistrement électronique]
* * *
¹ (1540)
[Traduction]
Le président (M. Navdeep Bains (Mississauga—Brampton-Sud, Lib.)): La séance est ouverte.
Je suis désolé de ce léger retard entraîné par ce qui se passe actuellement à la Chambre des communes. Ce n'est pas une excuse, c'est la réalité. Je fais confiance au jugement des membres du comité; il y avait sans doute de bonnes raisons pour ce retard, car ils sont généralement à l'heure. Néanmoins, je présente mes excuses à nos témoins. En même temps, je vous souhaite la bienvenue et je vous remercie d'être venus.
Comme vous le savez, nous allons parler aujourd'hui de l'exploitation minière dans les pays en développement, en insistant particulièrement sur la responsabilité sociale des entreprises.
Nous accueillons les représentants de deux ministères, celui du Commerce international et celui des Ressources naturelles. Je crois, d'après ce que me dit le greffier, que M. Ken Sunquist va prendre la parole le premier et qu'il sera suivi par M. Gary Nash.
Vous avez environ cinq minutes pour votre exposé. Ensuite, nous passerons aux questions. Les députés ont sept minutes chacun. Si quelqu'un d'autre veut prendre la parole, n'hésitez pas. La séance est prévue de 15 h 30 à 17 heures, donc nous avons environ une heure et quart.
Monsieur Sunquist, vous avez la parole.
M. Ken Sunquist (sous-ministre adjoint, Affaires internationales et délégué commercial en chef, ministère du Commerce international): Bonjour, et merci beaucoup de nous avoir invités.
Je voudrais vous préciser que notre exposé va être séparé en deux. Je vais en faire une partie et Christine Côté, qui est directrice par intérim de la Direction de la politique commerciale sur l'investissement, abordera de son côté quelques points.
Nous sommes accompagnés de plusieurs autres hauts fonctionnaires. Carl Pilon est responsable du groupe des fonctions du Service des délégués commerciaux pour les questions de RSE. Vivien Escott est notre sous-directrice au Commerce en Asie du Sud-Est et Vern MacKay est conseiller principal à notre Direction de la politique commerciale sur l'investissement. J'espère que nous allons pouvoir répondre à vos questions.
Je vais essayer d'être très bref pour que nous ayons plus de temps pour les questions. Je vous ai remis en anglais et en français un petit document qui ressemble à ceci. Il s'intitule « Responsabilité sociale des entreprises ». Je vais vous en parler brièvement pour vous expliquer de quoi il s'agit, car en fait ce que nous faisons, c'est exporter chaque jour les valeurs canadiennes dans le cadre de nos relations commerciales, et je crois que c'est un important point de départ pour nous.
Le Service des délégués commerciaux s'occupe d'exportation, d'investissements dans les deux sens et de sciences et de technologie. Nous avons environ 250 agents venant du Canada en poste à l'étranger, et 600 autres recrutés locaux dans 140 missions à travers le monde. En outre, nous avons une centaine d'agents disséminés dans nos bureaux régionaux à travers le Canada et plusieurs autres ici à l'administration centrale.
Le petit document que nous allons vous présenter n'a pas été conçu à votre intention. Nous voulions simplement vous montrer exactement ce que font nos agents au quotidien—ce que nous donnons à chaque délégué commercial qui va représenter notre pays à l'étranger. Je pense que c'est une distinction importante, car c'est effectivement ce qu'ils font.
Sachez que ce cours a été lancé expérimentalement avec nos délégués commerciaux en Asie du Sud-Est. Nous l'utilisons maintenant en Amérique du Sud et en Afrique. Nous sommes en train de l'intégrer à ce que nous appelons notre initiative mondiale d'apprentissage pour tous les délégués commerciaux à l'étranger. Ce cours sera présenté à tous les délégués en provenance du Canada ou recrutés locaux.
Nous nous servons aussi des grandes rencontres du secteur minier, par exemple les réunions de l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs, la PDAC, ou de l'Association minière du Canada, l'AMC. Nous amenons des délégués à ces réunions où ils ont un contact direct avec les représentants de ce secteur, et de cette façon nous nous assurons que tout le monde est au courant de ce que nous faisons pour aider les entreprises et des limites de ce champ d'action.
Je ne vais pas vous lire textuellement ce document, mais je vous dirai simplement que la responsabilité sociale des entreprises porte sur un ensemble complexe de questions—droits des travailleurs, protection de l'environnement, corruption et droits de la personne—dont nos délégués commerciaux sont amenés à s'occuper.
Mais pourquoi notre ministère est-il impliqué dans ces domaines? Eh bien, c'est pour respecter les engagements internationaux du Canada. Cela nous permet de promouvoir les valeurs et les préoccupations des Canadiens. Je pense que c'est un aspect important.
C'est aussi parce que nous exigeons de l'industrie minière canadienne qu'elle respecte des normes plus élevées que celles qui sont imposées à bien d'autres industries qui font affaire à l'étranger. Mon collègue M. Nash, du ministère des Ressources naturelles, vous en parlera peut-être un peu plus tout à l'heure, Nous estimons que le comportement des entreprises canadiennes à l'étranger façonne l'image que les étrangers ont de notre pays. Nous considérons que c'est très important.
Comment mettons-nous tout cela en oeuvre? Eh bien, nous intégrons cette notion à l'ensemble. Elle n'est pas, et je le souligne bien, prise isolément. Ce n'est pas un ajout. Nous contribuons aux programmes de la RSE; nous développons les compétences dans les pays en développement en collaborant avec l'ACDI et d'autres organismes gouvernementaux; nous nous occupons de questions de commerce et de conflits armés.
Nous tenons à ce que nos délégués commerciaux soient au courant des questions de RSE parce que nous voulons qu'ils soient les premiers à informer les Canadiens de l'engagement du gouvernement du Canada à l'égard de la RSE et les premiers à informer les gouvernements hôtes de ce souci des Canadiens. Nous voulons recueillir des renseignements utiles pour nos clients et pour le ministère.
Nous voulons qu'on discute de la RSE dans les missions à l'étranger. Elle ne doit pas se limiter à nos délégués commerciaux; elle doit être présente partout, au niveau de notre politique, de notre commerce, de notre aide et de nos agents du développement.
Dans une de ces diapositives, on parle de nos six services de base. Il s'agit de ce que font les délégués commerciaux avec les entreprises. On parle ici d'aperçu du marché, de recherche de contacts clés, d'information sur les compagnies locales, de renseignements sur les visites. J'aimerais vous expliquer comment nous intégrons la RSE à chacun de ces éléments.
Par exemple, si vous prenez la diapositive sur l'aperçu du marché, vous avez le cas d'une entreprise canadienne qui nous demande comment se présente ce secteur, donc c'est l'étape de la prospection. Nous couvrons tous les dossiers chauds, les relations de travail, l'environnement, la corruption. Il faut leur expliquer ce qui se passe. Nous parlons aussi de la législation locale et canadienne, c'est évident.
¹ (1545)
La diapositive suivante porte sur les contacts clés. Nous y parlons des autorités gouvernementales locales, des ONG, des représentants de la société civile, de ce que ces gens-là ont à apporter et des contacts à prendre avec eux, parce que nous souhaitons que les entreprises canadiennes les contactent avant de commencer à investir.
Ensuite, nous voyons avec qui elles peuvent coopérer, nous examinons les informations sur les entreprises locales et nous signalons les problèmes dont nous avons connaissance. Puis, quand les entreprises sont sur place, nous avons des entretiens face à face; nous poursuivons constamment la discussion avec elles en leur soulignant les problèmes, en leur désignant les intervenants et en leur rappelant des impératifs juridiques.
Nous avons aussi un rôle de dépannage quand les choses vont mal, et c'est un point qui intéresse le comité, je crois. Nous essayons d'aider les clients à trouver des solutions, nous ne nous contentons pas de limiter les dégâts. Nous nous souvenons de nos messages clés. Nous disons aux gens de ne pas prendre partie, mais de chercher à savoir ce qui s'est passé. De même que les Canadiens à l'étranger ont droit à des services consulaires, les entreprises canadiennes ont droit à l'aide du gouvernement.
Ce qu'il faut faire, c'est examiner la situation et trouver ce qui s'est passé, et si une entreprise est rançonnée pour des raisons de corruption ou autres, nous intervenons à ses côtés pour essayer de l'aider. Nous nous appuyons sur l'ensemble de la mission, nous comptons sur nos collègues sur le plan politique et sur celui du développement pour nous signaler des problèmes dont nous n'avons pas nécessairement connaissance mais qui sont envisagés, notamment par le chef de mission ou l'ambassadeur, dans une perspective à l'échelle du gouvernement tout entier.
Au-delà de ces six services, nous avons des engagements dans le cadre de nos activités de rayonnement, nous partageons des pratiques exemplaires et nous nous assurons que nos chefs de mission et nos ambassadeurs sont bien au courant de ce qui se passe.
Avec la dernière diapositive, je dirais que pour nous et nos délégués commerciaux à l'étranger, la responsabilité sociale des entreprises est présente dans tout ce que nous faisons. Ce n'est pas une intervention à part, c'est une partie intégrante de leur travail et c'est notre formation.
Je vais maintenant passer la parole à Christine qui va vous parler un peu plus des retombées stratégiques. Ensuite, nous pourrons passer à vos questions.
Mme Christine Côté (directeur par intérim, Direction de la politique commerciale sur l'investissement (EBI), ministère du Commerce international): Merci, Ken.
J'ai simplement quelques remarques liminaires. Je voudrais m'en tenir essentiellement aux principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales.
Disons d'emblée que le gouvernement s'attend à ce que les entreprises canadiennes à l'étranger respectent les lois des pays hôtes où elles sont présentes et les normes et principes internationaux de comportement responsable dans le domaine des affaires. Comme nous le savons, le Canada est une source d'investissement pour les industries extractives du monde et il est indispensable que les entreprises canadiennes gèrent correctement leurs activités sur le plan environnemental et social.
Le non-respect des normes de RSE, c'est-à-dire de responsabilité sociale des entreprises, peut retarder des projets d'investissement et même souvent entraîner leur annulation, soit de la part des investisseurs eux-mêmes ou de la part du gouvernement hôte. En outre, les entreprises canadiennes qui ne respectent pas ces normes RSE se font une mauvaise publicité qui nuit non seulement à leur propre réputation mais aussi éventuellement à la réputation de tout le Canada dans les pays où se produisent ces problèmes. C'est pour toutes ces raisons que le gouvernement tient fermement à promouvoir la RSE.
En ce qui concerne les principes directeurs de l'OCDE, une bonne partie des activités de promotion de la RSE par le ministère découlent de l'adhésion du gouvernement aux principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales. Pour vous donner le contexte, je précise que ces principes directeurs s'inscrivent dans le cadre d'un ensemble d'instruments multilatéraux intitulé Déclaration de l'OCDE sur l'investissement international. Ils ont pour objet d'inciter les membres de l'OCDE à créer un climat positif pour l'investissement étranger direct. Ces principes directeurs ont reçu l'adhésion de 39 pays et constituent un cadre de normes et principes volontaires de comportement responsable des affaires dans des domaines tels que l'environnement, la main-d'oeuvre, les droits de la personne et la lutte contre la corruption. Ils s'adressent à des entreprises multinationales fonctionnant à l'intérieur ou à partir de pays de l'OCDE, et s'appliquent donc à l'échelle mondiale. Le gouvernement canadien s'attend vraiment à ce que les entreprises canadiennes respectent ces principes directeurs dans leurs activités à l'étranger et il les encourage à le faire.
Je suis directrice par intérim de la Direction de la politique commerciale sur l'investissement, qui préside et coordonne ce que l'on appelle le point de contact national, le PCN, dans le cadre des principes directeurs. Le point de contact national est en fait l'organisme gouvernemental qui met en oeuvre l'engagement du Canada à promouvoir les principes directeurs, mais il contribue aussi à régler des problèmes éventuels de comportement d'affaires. Le PCN est interministériel et composé de représentants non seulement du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, mais aussi des ministères de l'Environnement, de l'Industrie et des Ressources naturelles, de l'ACDI, du ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences, du ministère des Finances, ainsi que d'EDC à titre d'observateur.
Je vais vous expliquer un peu comment nous réglons les problèmes qui se présentent, car c'est un des rôles du PCN. Nous devons examiner les plaintes soulevées par les intéressés à propos du fonctionnement d'entreprises canadiennes dans la perspective des principes directeurs. Il est important de préciser que nous ne sommes pas un organisme quasi judiciaire et que nous n'avons donc pas à déterminer s'il y a eu infraction aux principes directeurs, mais que nous sommes simplement là pour proposer nos bons offices et faciliter le dialogue entre les parties qui sont généralement des ONG et des entreprises, afin de les aider à surmonter leurs différends.
Pour saisir le PCN, il faut rédiger une plainte écrite précisant les aspects pertinents des principes directeurs. Le PCN examine alors la plainte et détermine si elle est justifiée. Si c'est le cas, nous nous efforçons de faciliter le dialogue entre les deux parties qui sont souvent des ONG et des entreprises, comme je viens de le dire.
Au cours des cinq dernières années, le PCN canadien a été saisi de cinq plaintes officielles dont trois visaient des entreprises minières canadiennes. Dans un cas, nous avons pu résoudre le problème de façon satisfaisante. Deux des trois autres affaires sont toujours à l'étude et la dernière affaire, qui ne concerne pas une entreprise minière, est aussi toujours à l'examen.
Voilà donc en gros la fonction du PCN dans le cadre des principes directeurs. Nous avons aussi d'autres initiatives de promotion des principes directeurs de l'OCDE, des ateliers et des colloques avec les divers intéressés, des brochures et notre site Web.
J'aimerais vous dire quelques mots des activités de TVI aux Philippines. Le 4 novembre 2004, les représentants du PCN canadien ont rencontré les délégués de Mines alerte Canada et une délégation de la communauté de Subanon, dans l'île de Mindanao, aux Philippines.
¹ (1550)
Les représentants de cette délégation ont affirmé que les activités de TVI avaient des retombées néfastes sur leur communauté. Notre PCN a informé les représentants de Mines alerte et les membres de la délégation des principes directeurs et de la démarche à suivre pour soumettre une plainte. Nous n'avons plus entendu parler de ces deux groupes pour l'instant, donc il n'y a toujours pas eu de plainte officielle.
En conclusion, les investissements canadiens à l'étranger contribuent de façon importante à la croissance et au développement économique du monde en développement. Les entreprises canadiennes sont de plus en plus présentes dans le secteur minier des pays en développement. Nous nous efforçons d'encourager ces entreprises canadiennes à respecter les normes internationales de RSE. Les principes directeurs de l'OCDE sont à notre avis un aspect important de la démarche du gouvernement pour promouvoir cette responsabilité sociale des entreprises.
Merci.
¹ (1555)
Le président: Merci beaucoup.
Je voudrais signaler aux témoins qu'il y aura un vote dans une vingtaine de minutes. Par conséquent, je voudrais respectueusement vous inviter à limiter vos exposés à cinq à 10 minutes. Nous pourrons alors consigner vos remarques au compte rendu. Si vous souhaitez revenir après le vote, nous allons voir ce qu'en disent les autres membres du comité et nous déciderons en conséquence, si vous le voulez bien.
Monsieur Nash, allez-y.
M. Gary Nash (sous-ministre adjoint, Secteur des minéraux et des métaux, ministère des Ressources naturelles): Étant donné que vous avez eu le texte de mes remarques, j'espère, je ne vais pas le lire mais je vais me concentrer simplement sur quelques points.
Comme on vous l'a déjà dit, l'industrie minière canadienne est une industrie mondiale; elle a des activités de prospection dans plus de 100 pays et quelque 2 800 perspectives d'investissement dans la création de mines. Au Canada, elle représente 50 milliards de dollars en production. Je dirais que c'est, sinon le plus grand, du moins un des plus grands secteurs en terme de volume de production et de valeur de production.
En outre, dans le secteur des biens de production—je ne parle pas des services—c'est le plus gros investisseur à l'étranger, et il représente plus de 30 p. 100 des investissements à l'étranger. Ce qui est important, c'est que c'est une industrie à contrôle essentiellement canadien. Qu'est-ce que cela signifie? Cela signifie qu'un grand nombre de fournisseurs d'équipement ou de services au Canada—que ce soit Lavalin, Hatch Associates ou autre—et des gens qui fournissent d'autres approvisionnements ont l'occasion d'exporter leurs services à destination de ces entreprises dans ces pays en développement. L'investissement de l'industrie minière canadienne au Chili, par exemple, qui a été considérable et le demeure, a ouvert la voie à un accord de libre-échange qui nous a ensuite ouvert d'autres portes. La même évolution s'est produite dans d'autres pays d'Amérique du Sud et nous voyons maintenant des investissements canadiens en Afrique.
Nous avons estimé que plus de 2 200 entreprises installées au Canada vendaient des produits scientifiques ou techniques spécialisés à des entreprises minières au Canada et à l'étranger. C'est donc toute une industrie qui gravite autour du secteur minier. Sans vouloir trop nous jeter des fleurs, je dirai que l'on peut considérer nos industries de ressources naturelles comme l'un des rares secteurs dans lesquels nous savons que nous avons un avantage sur la concurrence. Compte tenu de la conjoncture mondiale, il est important de connaître nos forces et notre situation par rapport à la concurrence.
En matière de responsabilité sociale des entreprises, de nombreuses entreprises, associations et autres ont toutes sortes de lignes directrices. Le Canada ne dispose pas de moyens juridiques contraignants pour leur imposer un comportement, et il s'agit donc d'une responsabilité volontaire. Il y a une différence entre les grandes et les petites entreprises. Sans vouloir dire que les grandes sont parfaites, loin de là, je dirais que beaucoup des petites entreprises n'ont pas nécessairement les ressources ou ce que j'appellerais le degré de sensibilité culturelle requis pour savoir comment se comporter avec les communautés et les populations locales. Je crois que les diverses associations sectorielles devraient se pencher sur ce problème car c'est très important quand on s'installe au sein d'une communauté. À quel stade consulte-t-on? À partir de quand comprend-on le système de valeurs des gens auxquels on a affaire? Connaît-on leurs ambitions? Ce sont des aspects très importants du processus de consultation.
Je ne vais pas m'étendre sur les détails, mais je sais que vous vous intéressez à l'initiative sur la transparence des industries extractives dont il a été question au G-8 et qui a été mise de l'avant par le Royaume-Uni. Cette initiative a pour but d'accroître la transparence pour lutter contre les problèmes de corruption. En général, le Royaume-Uni procède en recueillant des informations sur les fonds versés par une compagnie au gouvernement et en essayant de voir ce que fait le gouvernement ou ce qu'il reçoit de la compagnie. Il font effectuer des vérifications par des tiers.
Le Royaume-Uni a contacté plusieurs fois le Canada pour qu'il se joigne à cette initiative. Nous ne sommes pas d'accord avec cette démarche. Nous estimons que nous avons une approche complémentaire. Nous considérons que la reddition de comptes et la transparence dans les systèmes de gouvernance constituent la bonne marche à suivre, par opposition à la simple collecte de données. En effet, la corruption ne fonctionne pas uniquement à l'intérieur du pays; les transactions peuvent très bien se faire dans un autre pays. Vous comprenez, c'est parfaitement clair.
Nous estimons que l'aide à la gouvernance est la bonne formule et je vais vous en donner un ou deux exemples. J'ai rencontré des gens de divers pays en développement quand j'étais à Toronto pour la réunion des prospecteurs. Il y a eu de 10 000 à 13 000 participants. C'est la plus grande conférence de prospecteurs et d'exploitants miniers au monde. Toronto est le centre international; c'est le centre international des entreprises de financement de la prospection et des exploitations minières. C'est un atout pour le Canada.
º (1600)
Quoi qu'il en soit, j'ai parlé à diverses personnes, des gens de l'Ouzbékistan, du Maroc ou de l'Argentine et je leur ai demandé s'ils avaient une réglementation environnementale prévoyant un instrument de garantie financière pour remédier éventuellement à des dégâts environnementaux à la fin de l'exploitation d'une mine ou même durant son exploitation. Non, une chose aussi simple ne leur était jamais venue à l'esprit. Je leur ai aussi demandé s'ils exigeaient un plan de fermeture de mine avant d'octroyer un permis. La réponse là encore a été négative. Je pense donc que le Canada a là une excellente occasion de montrer le chemin de la bonne gouvernance dans beaucoup de ces pays.
Voilà donc quelle a été notre réaction à l'initiative sur la transparence des industries extractives.
Une autre initiative, au moins du côté du Canada, a consisté à promouvoir la création d'une tribune internationale sur les minéraux et les métaux. L'objectif est d'échanger des informations et non de renforcer les compétences, car nous ne pouvons pas le faire dans une telle tribune, mais nous pouvons en revanche échanger des informations sur les questions de gouvernance. En collaboration avec le gouvernement d'Afrique du Sud, nous avons mis de l'avant cette idée à Johannesburg, lors de la Conférence des Nations Unies sur le développement durable. Tous les participants ont été d'accord. Nous avons demandé que 25 pays se joignent à ce forum, ce qui a été le cas, et maintenant il est en train de prendre forme et tiendra sa première rencontre à l'automne.
J'ajoute qu'au sein de notre groupe nous avons aussi contribué à créer le Partenariat minier de l'Afrique. C'est un regroupement de gouvernements. Nous avons essayé de les encourager à maintenir cette organisation en vie, bien qu'elle dispose d'un budget extrêmement rudimentaire, et je pense que le Canada pourrait jouer un rôle utile à cet égard.
En conclusion, compte tenu de l'étendue de l'investissement international du Canada, l'exploitation minière forme le visage du Canada dans bon nombre de pays en développement. Qu'on aime ce visage ou non, c'est la réalité, et il faut donc l'accepter. Une telle visibilité implique que l'image du Canada sera touchée par la performance environnementale et sociale de l'industrie minière. Bien que la grande majorité des sociétés canadiennes mènent convenablement leurs activités à l'étranger, la gouvernance inadéquate des pays en développement peut permettre à certaines de fonctionner d'une manière qui ternira la réputation de l'exploitation minière, et par ricochet, celle du Canada.
L'exploitation minière offre une occasion unique de promouvoir le programme international du Canada dans les pays en développement. À la lumière des nombreux problèmes environnementaux et sociaux et face au désir des pays en développement d'instaurer un développement durable, nous nous devons de promouvoir le Canada et les sociétés d'exploitation minière canadiennes en tant que bons citoyens conscients de leur responsabilité sociale et nous devons faire preuve de leadership international dans les politiques sur la gouvernance.
Merci.
Le président: Merci, monsieur Nash.
Monsieur Broadbent.
L'hon. Ed Broadbent (Ottawa-Centre, NPD): Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Nous accueillons aujourd'hui des témoins très sérieux et incontestablement très compétents, et je voudrais m'assurer d'avoir bien compris que vous aviez suggéré que nous revenions ici pour poursuivre après le vote.
º (1605)
Le président: C'est exact. C'est ce que je propose.
L'hon. Ed Broadbent: Ce serait parfait si nous pouvons le faire.
Le président: Tout à fait. C'est ce que je souhaite faire.
Monsieur Khan, cela vous va?
M. Wajid Khan (Mississauga—Streetsville, Lib.): Cela me va, s'ils ont le temps.
Le président: Vous êtes d'accord?
L'hon. Ed Broadbent: Nous devrions peut-être y aller.
Le président: Nous allons y aller tout de suite, et s'il y a un retard, nous en informerons le greffier.
Merci beaucoup.
La séance est suspendue.
º (1606)
» (1713)
Le président: Je suis désolé de ce retard.
Vos témoignages et vos remarques vont être consignés au compte rendu. Nous avons le quorum, donc vous pouvez maintenant poursuivre votre intervention.
Merci.
M. Ken Sunquist: Pour ce qui est du climat actuel, je crois que depuis une dizaine d'années, et peut-être même un peu moins, les entreprises canadiennes sont devenues beaucoup plus sensibles et cherchent à respecter les normes canadiennes aussi bien que locales. En général, les normes canadiennes sont plus rigoureuses que les normes locales, et elles s'y conforment.
Pour ce qui est des questions de droits de la personne et de main-d'oeuvre, je pense qu'elles essaient de respecter la norme la plus rigoureuse des deux. Mais il y a toujours des exceptions. Comme d'autres l'ont dit ici, les grandes entreprises ont des gens qui surveillent tous ces aspects quotidiennement. Elles ont un vice-président pour la RSE, un vice-président pour les RH et un vice-président… Et elles consacrent énormément de temps, d'argent et d'efforts à ce travail.
Mais le Canada est aussi, comme on l'a dit, le pôle de l'activité minière. Nous avons des centaines de petites entreprises minières qui font de la prospection. Il y en a un petit nombre qui font de l'extraction. Et c'est probablement à ce niveau-là que les problèmes apparaissent.
Christine, vous avez…?
» (1715)
Mme Christine Côté: En fait, je n'ai pas grand-chose à ajouter. Là encore, Vernon a peut-être des idées par ce qu'il est constamment plongé dans ce domaine. Manifestement, jusqu'ici nous avons choisi l'approche volontaire, mais c'est ce qui se fait le plus souvent à l'échelle internationale actuellement. Je crois que dans nos dialogues avec les entreprises et les ONG, la question est discutée régulièrement. On oppose toujours le système obligatoire au système volontaire. Jusqu'ici, notre approche nous a paru relativement efficace, mais il est toujours possible de faire plus.
Je ne sais pas si Vernon veut ajouter quelque chose sur cette question.
M. Vernon MacKay (analyste principal de la politique commerciale, Direction de la politique commerciale sur l'investissement (EBI), ministère du Commerce international): Je n'ai que deux observations. Pour en revenir à la remarque de Ken au sujet de la Convention de l'OCDE contre la corruption d'agents publics étrangers, on a là l'exemple d'un pays suffisamment convaincu pour faire avancer la question devant un forum multilatéral. Les autres pays ont embarqué, et nous avons réussi, nous avons eu une convention. Ensuite…
L'hon. Ed Broadbent: Qui a défendu cela, à l'origine?
M. Vernon MacKay: Les États-Unis.
L'hon. Ed Broadbent: Les États-Unis?
M. Vernon MacKay: Oui.
Au sein de forums multilatéraux comme l'OCDE, si l'on a suffisamment d'appui pour ce genre d'initiatives, elles peuvent progresser. Mais pour moi, qui voyage constamment pour aller aux réunions de l'OCDE… Je ne suis au courant d'aucun mouvement en ce sens, qui viserait, comme vous le disiez, à transformer les normes volontaires actuelles de responsabilité sociale des entreprises en normes obligatoires.
Je ne suis pas expert en matière de loi sur les droits de la personne, mais je voudrais faire remarquer que le Canada a une Loi sur les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre qui couvre tous les actes criminels commis au Canada et à l'étranger par des personnes physiques et des personnes morales.
L'hon. Ed Broadbent: Permettez-moi, monsieur le président, de poser une dernière question avant de partager mon temps avec mes collègues.
Le président: Bien sûr, pas de problème.
L'hon. Ed Broadbent: Votre témoignage tout à l'heure—et j'oublie lequel d'entre vous a dit cela—rejoint à la fois le travail que j'ai fait à la Commission des responsabilités des entreprises et les discussions informelles que j'ai pu avoir avec certains de mes amis qui font de la prospection minière. Le problème, pour dire les choses carrément, se pose surtout dans les petites sociétés canadiennes, pas les grandes sociétés canadiennes à l'étranger. Je vois plusieurs personnes hocher la tête.
Si tel est le cas—et c'est peut-être tout à fait théorique—est-ce que nous ne devrions pas, dans le contexte de la mondialisation et de l'adoption de normes plus sévères pour les pays en développement, avoir une loi qui s'appliquerait en particulier aux petites compagnies minières afin qu'elles soient informées? Parce que c'est là que c'est nécessaire. Avec une loi comme celle-là, les entreprises ne peuvent obtenir de l'aide d'organismes gouvernementaux que si elles respectent certaines normes minimales.
J'ai du mal à comprendre pourquoi ceci pourrait les désavantager sur le plan de la concurrence, même si, disons les choses comme elles sont, l'idée de compromettre la santé, la sécurité et les droits de la personne pour des raisons de concurrence ne m'attire guère de toute façon. Mais si ces critères étaient en place, comment pourrait-il y avoir des répercussions graves sur notre pays simplement parce que nous disons aux petites entreprises canadiennes : « Lorsque vous allez à l'étranger, vous devez traiter les travailleurs là-bas de la même façon qu'au Canada pour tout ce qui touche la santé et les conditions de sécurité »? C'est une question. J'aimerais entendre vos commentaires.
M. Ken Sunquist: J'ai jeté un coup d'oeil autour de moi pour voir si quelqu'un s'apprêtait à répondre, mais personne ne l'a fait.
Je crois que c'est une question grave. Tout ce que je peux vous répondre, c'est que nous passons, de très loin, la majeure partie de notre temps à l'étranger à traiter avec de petites sociétés pour leur donner des conseils sur ces problèmes. Les grandes compagnies connaissent les règles, et en général, elles les appliquent.
L'hon. Ed Broadbent: Ne serait-ce pas mieux si vous aviez une loi à votre disposition?
M. Ken Sunquist: C'est cela. J'ai parlé tout à l'heure d'« orientations »—loi, orientations, codes de conduite, etc. Pour beaucoup de ces entreprises, quand on parle de l'ACPE, les prospecteurs et entrepreneurs, 13 000 participants à Toronto, au cours des dernières années l'Association a organisé des activités sur l'éthique et les questions qui s'y rattachent. Donc en fait, même le secteur minier sait de quoi il s'agit lorsqu'on parle d'aide.
Ce n'est pas de l'autoréglementation. Ce n'est pas ainsi que je l'entends. Mais on essaie de beaucoup insister sur ces questions, et je pense d'ailleurs que le Canada le fait beaucoup plus que beaucoup d'autres pays. Cela n'a rien à voir avec l'avantage concurrentiel, parce que je crois vraiment, et je pense que Gary l'a mentionné, que chaque fois qu'une entreprise canadienne frappe à notre porte…
J'ai été ambassadeur en Indonésie de 1998 à 2001, et dans un sens, toutes les entreprises canadiennes qui venaient là-bas arboraient un drapeau canadien chaque fois qu'elles sortaient de l'ambassade. Je devais donc faire le maximum pour être sûr qu'elles respectent nos choix sur ces questions. Donc je suis d'accord avec vous, il faut passer du temps là-bas.
Quelle est la meilleure méthode? Quant à savoir s'il vaudrait mieux avoir des dispositions législatives, et quels pouvoirs elles auront, ou s'il y a des problèmes d'extraterritorialité qu'il faut prendre en considération, je pense que des chercheurs pourraient examiner toutes ces questions et essayer de voir quelles pourraient être les répercussions.
Je vous ai donné un ou deux exemples sur le sujet des crimes contre l'humanité. Il y a des exemples de cas où nous avons fait au Canada des choses qui ont dépassé nos frontières. Je ne peux pas aller beaucoup plus loin.
L'hon. Ed Broadbent: Je comprends.
» (1720)
Le président: Merci.
Monsieur Khan.
M. Wajid Khan: C'est le problème lorsqu'on a un leader expérimenté ou expert sur le sujet, et qui pose toutes les questions que l'on veut poser. J'ai les réponses à certaines, mais toutes ne me satisfont pas.
À propos des droits de la personne, vous pouvez demander à nos entreprises de traiter leur main-d'oeuvre là-bas comme elles le font ici, mais il y a eu un tel débat, et c'est un sujet tellement immense et vaste d'un pays à un autre, d'une économie à une autre, et je ne sais pas si l'on peut établir des lois qui s'appliquent à toutes ces personnes partout dans le monde.
Par exemple, ici, on s'oppose au travail des enfants. Bien sûr, ça ne plaît à personne, mais en même temps je peux vous donner des exemples de pays d'Asie du Sud-Est où vous avez été ambassadeur, où si l'on supprime le revenu des quatre enfants qui travaillent, cela veut dire que la famille n'a plus de moyen de subsistance, à moins que l'on ne puisse les aider pour leur permettre d'aller à l'école. C'est une situation longue et complexe.
Cependant, pour revenir à l'exploitation minière et la réglementation, y a-t-il des pays qui ont des normes obligatoires?
M. Gary Nash: Je n'en connais pas. Il y a des groupes de petites sociétés minières, qui ne sont pas vraiment des groupes miniers mais plutôt des groupes d'exploration. C'est une fausse appellation, mais ils disent souvent « petits mineurs ». L'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs a élaboré un ensemble de principes au cours des dernières années pour orienter leur comportement en matière d'environnement et de relations communautaires. Mais encore une fois, ce n'est pas obligatoire; c'est seulement volontaire.
C'est presque un problème culturel dans le secteur minier. La culture de certaines grandes entreprises a peut-être changé. Elles ont les ressources voulues pour être en mesure de savoir comment s'y prendre. Je connais une société en Grande-Bretagne qui a décidé d'engager un anthropologue parce qu'elle voulait aller dans certaines communautés et comprendre le système de valeurs, la culture, les réactions, et savoir à quel moment consulter la communauté.
Il y a la question des droits de la personne, dans le contexte des peuples autochtones dans de nombreux pays. Il y a le problème des titres immobiliers. Très souvent, une entreprise minière—ou même une entreprise de prospection—va dans un pays et aimerait traiter avec la communauté autochtone locale, mais le gouvernement n'a pas réglé le problème des revendications territoriales, ou quelque chose du genre. C'est un domaine très complexe.
Je dirais qu'il y a beaucoup à faire, en ce qui concerne le système de valeurs de l'industrie. Nous devons jouer sur la culture de l'industrie. Qu'est-ce que cela signifie pour le Canada, particulièrement pour les sociétés contrôlées par des intérêts canadiens? C'est une option, mais ça ne pourra jamais régler le problème. Ce n'est peut-être pas obligatoire, mais si l'entreprise a une culture appropriée, cela devrait améliorer la situation.
La plupart des gens pensent—c'est pour cela que c'est difficile, et il y a beaucoup de choses pour le prouver—que les entreprises vont souvent sacrifier la santé et l'environnement pour augmenter leurs profits. Nous le savons, et le secteur du tabac en est un bon exemple. Néanmoins, en modifiant la culture, nous pouvons peut-être influencer les choses.
» (1725)
M. Wajid Khan: Y a-t-il eu des recherches, ou existe-t-il des mesures pour déterminer si les méthodes ou les mécanismes volontaires ont…? Dans quelle mesure vous ont-ils aidé à réussir? Est-ce que le système fonctionne? A-t-on fait des comparaisons entre le moment où ces lignes directrices volontaires ont été mises en place et la situation avant leur adoption? Dans quelle direction va-t-on, et est-il question de mettre sur pied un système obligatoire, comme le demandaient mes collègues?
M. Vernon MacKay: Je voudrais dire un mot des principes directeurs de l'OCDE. Tous les membres de l'OCDE sont obligés d'établir un point de contact national pour s'acquitter de leurs responsabilités. Ces points de contact nationaux sont tenus de présenter des rapports annuels à l'OCDE, rapports dans lesquels ils exposent les activités entreprises pour promouvoir les principes directeurs, répondre aux plaintes, etc. Il y a donc des données sur les résultats obtenus par les points de contact nationaux.
Jusqu'ici, il n'y a pas eu d'étude pour étudier la situation, au cours des cinq dernières années depuis que l'OCDE a révisé ses principes directeurs, pour voir s'il y a une amélioration dans le comportement des entreprises multinationales. Cette étude n'a pas été faite, mais si on la faisait, l'OCDE pourrait se diriger dans cette direction. Là encore, il faut des pays pour pousser l'idée et la faire avancer.
M. Gary Nash: Il y a aussi un autre élément. Lorsque les grandes compagnies minières investissent dans un pays, elles s'adressent souvent à la société financière internationale à la Banque mondiale. Il y a là ce qu'on appelle des directives de sauvegarde. Elles sont complètes et détaillées. De nombreuses banques privées ont adopté certains des principes et exigences que l'on y trouve pour leurs propres décisions en matière de prêts. Il y a donc un aspect financier.
De plus, la Société financière internationale ou la Banque mondiale vont surveiller la société pour voir si elle respecte les directives, surtout s'il y a une plainte de la communauté locale. Il y a donc d'autres pressions qui s'exercent sur les entreprises, tout au moins les grandes, pour les inciter à bien se comporter.
Le président: Malheureusement, encore une fois, vous entendez sûrement les cloches, nous devons repartir à la Chambre.
Monsieur Broadbent, avez-vous une dernière remarque à faire ou une question à poser? Nous avons encore une ou deux minutes avant de mettre fin à la réunion.
L'hon. Ed Broadbent: Eh bien, pour continuer sur ce thème, j'ai été personnellement surpris de voir que ceux que j'appelle en général les « bons »—c'est-à-dire les Scandinaves dans l'ensemble—n'ont pas été directs, n'ont pas adopté de mesures nationales pour appuyer ces principes pour eux-mêmes, les Norvégiens ou les Suédois. Ils ne l'ont pas fait. C'est ce que j'ai cru comprendre d'après ce que vous avez dit. C'est exact?
M. Vernon MacKay: À l'OCDE, je pense que nous dirions des Scandinaves qu'ils font partie des pays progressistes pour promouvoir les normes de responsabilité sociale des entreprises, mais certainement pas au point d'insister pour que ces normes deviennent obligatoires, pas du tout.
L'hon. Ed Broadbent: Je ne sais pas si vous êtes encore prêt à faire des hypothèses.
J'ai entendu certains des arguments—et il y a des gens qui y croient vraiment, je pense—sur le désavantage concurrentiel que ceci pourrait représenter. Je continue à trouver curieux que les démocraties industrialisées avancées, dans lesquelles j'inclus évidemment le Canada—nous avons dans l'ensemble un bon dossier en matière de droits de la personne—n'aient pas insisté davantage pour que les principes directeurs de l'OCDE, disons, soient obligatoires. Je ne vois vraiment pas comment il pourrait y avoir un désavantage concurrentiel, si tous les pays le faisaient. Au fait, je suis au courant des problèmes d'extraterritorialité qui pourraient se poser, mais ils ont été réglés pour ce qui est de la corruption. Ils ont été aussi réglés pour les crimes les plus graves—les crimes contre l'humanité.
Donc si vous prenez, dans le domaine du travail, les normes fondamentales du travail qui ont été élaborées à l'OIT, qui font partie je crois des principes directeurs de l'OCDE—je vois plusieurs personnes hocher la tête—il y a eu un tel consensus entre les démocraties avancées pour cela que je ne comprends vraiment pas… Je ne sais pas si vous êtes en mesure de donner un avis quelconque lorsque vous participez à ces réunions.
Je ne comprends vraiment pas, alors qu'il y a un tel conflit entre les différentes cultures du monde et entre les pays riches qui le deviennent de plus en plus et les pays pauvres—même si certains pays pauvres, comme la Chine et l'Inde notamment, ont commencé à sortir de ce cycle de la pauvreté, beaucoup d'autres ne l'ont pas fait—pourquoi ne faudrait-il pas encourager dans les pays de l'OCDE les principes obligatoires que nous mettons en avant lorsque nous traitons avec les pays en développement.
Je sais que c'est affaire de jugement. Voulez-vous nous donner votre avis sur les raisons pour lesquelles nous l'avons fait, par exemple, pour la corruption? Vous avez dit que les États-Unis avaient pris le leadership sur la corruption. Attendons-nous qu'un ou deux pays prennent les devants, pour qu'ensuite il y ait peut-être un consensus établi?
» (1730)
M. Gary Nash: Je vais vous donner un petit élément de réponse. Si vous regardez le nombre de pays membres de l'OCDE, dont les pays d'Europe de l'Est et le Mexique, vous comprendrez que les normes que nous essayons de promouvoir dans la réglementation sont des normes qu'ils ne peuvent pas satisfaire eux-mêmes, alors qu'ils sont membres de l'OCDE. Ça peut être un problème délicat pour certains des membres, ce qui rendrait la chose encore plus difficile.
Le président: Je voudrais encore une fois remercier les membres du comité d'avoir participé à notre séance d'aujourd'hui. Nous leur en sommes très reconnaissants.
Je voudrais aussi remercier les deux ministères et tous les témoins qui sont venus aujourd'hui. Je vous en suis reconnaissant et je voudrais aussi vous remercier de la patience dont vous avez fait preuve lorsque nous avons été interrompus pendant notre séance. Encore une fois j'espère que nous aurons la possibilité de continuer et de vous poser d'autres questions ultérieurement, mais merci beaucoup d'être venus.
M. Gary Nash: Monsieur le président, j'ai un dernier commentaire.
Nous sommes convaincus que c'est une question extrêmement importante et un bref échange de questions et de réponses ne suffit pas pour traiter la question adéquatement, j'espère donc que nous pourrons nous rencontrer à nouveau.
Le président: Je pense que nous partageons tous le même sentiment.
M. Wajid Khan: Je voudrais aussi faire remarquer que le NPD et le Parti libéral sont représentés et que les absents sont, évidemment, les conservateurs et les bloquistes.
Le président: Merci de nous le faire remarquer. Merci beaucoup.
La séance est levée.