:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je m'appelle Douglas Barrett et je suis président du conseil d'administration du Fonds canadien de télévision. Je suis accompagné de Mme Valerie Creighton, qui est la présidente du Fonds.
[Français]
À sa droite se trouvent M. Stéphane Cardin, vice-président, Politique stratégique, du Fonds canadien de télévision et
[Traduction]
Mme Kathy Corcoran est notre directrice de la recherche.
[Français]
À ma gauche, il y a M. Michel Carter, qui est vice-président du comité des finances du conseil d'administration du Fonds canadien de télévision. Il est aussi l'ancien président du comité des finances, et surtout, il est un directeur indépendant de notre conseil d'administration.
[Traduction]
Je pense que nous disposons de dix minutes. Avez-vous bien reçu la version anglaise de notre exposé?
Vous avez peut-être remarqué, d'après son poids, que notre mémoire est long. Nous en avons supprimé de nombreux passages pour respecter vos délais limités. Même si nous omettons certains passages, nous aimerions que vous les lisiez plus tard.
Merci beaucoup pour cette occasion de témoigner. C'est un moment important dans la controverse des deux dernières semaines. Comme vous le savez, le Fonds a été décrit dans de nombreux articles de journaux au cours des dernières semaines comme une institution à la dérive totale, nécessitant une restructuration complète de son organisation et de ses activités. En ce qui nous concerne, nous ne pensons pas que le Fonds soit vraiment en cause, mais j'en reparlerai dans ma conclusion.
Nous signalons pour le compte rendu que si nous estimons que le Fonds canadien de télévision (FCT) peut et devrait s'améliorer, c'est une organisation saine et vigoureuse, et certainement pas à la dérive, comme certaines personnes l'ont laissé entendre. Le FCT a évolué et continuera d'évoluer, de se transformer et de s'améliorer continuellement.
Sur le plan pratique, c'est une institution dirigée et administrée efficacement. Ses programmes sont efficaces en matière de fourniture des services et elle est bien gérée sur le plan administratif. Le Fonds gère des budgets considérables composés de fonds publics et de fonds privés, selon les normes fiduciaires les plus rigoureuses. Il suit des lignes directrices générales contractuelles en tentant d'atteindre des objectifs de programme établis par le ministère du Patrimoine canadien. Les résultats qu'il obtient sont soumis à un examen rigoureux et sa performance a toujours été jugée satisfaisante au cours des examens périodiques.
Toutes ces affirmations sont démontrées par les faits. Nous sommes heureux d'examiner ces faits avec vous aujourd'hui.
Comme vous le savez, le CRTC a proposé initialement la création du Fonds de câblodistribution, le prédécesseur du FCT, en 1994. Ce Fonds était alors constitué en société privée à but non lucratif. Depuis que la surveillance du Fonds sur le plan des politiques a été transférée du CRTC au ministère du Patrimoine canadien, c'est-à-dire depuis 1996, le Fonds est administré en vertu d'une série d'ententes de contribution avec le ministère.
Les ententes de contribution établissent une dizaine d'orientations stratégiques primordiales qui régissent nos activités. Elles sont énumérées dans le document que nous vous avons remis. Ces orientations stratégiques semblent simples et faciles à administrer, mais ce n'est pas le cas. Elles sont très complexes et leur mise en oeuvre nécessite des compétences très poussées. C'est pourquoi la structure de régie du FCT a été établie dès le début, dans le premier avis public du CRTC, de façon à réunir les meilleurs experts de l'industrie.
Le FCT est dirigé par un conseil d'administration composé de 20 membres représentant de nombreux groupes d'intervenants. C'est le ministère qui détient le plus grand nombre de sièges, soit cinq. Jusqu'à tout récemment, le conseil d'administration incluait également des cadres de Shaw et de Vidéotron, qui ont participé à ses réunions pendant plusieurs années.
Les bonnes pratiques en matière de gouvernance exigent une gestion des conflits d'intérêts. Le conseil d'administration compte actuellement six membres qui sont indépendants et n'ont aucun lien commercial avec le milieu de la télévision. Ces membres indépendants forment un comité permanent indépendant qui supervise et surveille une politique élaborée en matière de conflits d'intérêts.
En outre, et c'est peut-être l'aspect le plus important, toutes les décisions stratégiques et financières importantes du conseil d'administration doivent être adoptées à une double majorité des membres indépendants et des autres membres représentant les intervenants.
Monsieur le président, j'ai été pendant plus de 30 ans avocat-conseil de sociétés et, pendant plus de 20 ans, j'ai fait partie, en tant qu'associé, d'un cabinet d'avocats très connu de Toronto; je pense donc être en mesure d'affirmer que j'ai quelques connaissances en matière de régie d'entreprise. Je vous assure que les pratiques du FCT en matière de régie sont comparables ou supérieures aux meilleures pratiques de gouvernance des plus grandes sociétés ouvertes canadiennes.
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Ainsi, après les crédits d'impôt, le Fonds canadien de télévision est la principale source de financement de la production télévisée au Canada. En 2005-2006, le FCT a investi plus de 249 millions de dollars dans la production canadienne, investissement qui a permis de créer 2 276 heures d'émissions nouvelles de qualité. Au cours des 10 dernières années, le FCT a appuyé plus de 4 000 projets et octroyé des fonds d'un montant total de 2,2 milliards de dollars pour la production de télévision canadienne qui ont permis d'établir des budgets de production se chiffrant au total à 7,4 milliards de dollars.
Cette activité a généré plus de 23 000 heures de contenu canadien diffusé pendant les heures de grande écoute, donc accessible à des centaines de millions de téléspectateurs. En 2004-2005, le FCT a distribué des fonds pour un montant total de 251 millions de dollars qui ont généré des budgets de production d'une valeur de 841 millions de dollars et ont créé un nombre estimatif de 22 400 emplois à plein temps.
En ce qui concerne le rendement de l'investissement, le FCT a obtenu des résultats exceptionnels et impressionnants. En 2005-2006, chaque dollar investi a généré une mise de fonds de 3,50 $ dans la production. Ces productions télévisées sont réalisées dans les diverses régions du pays en favorisant le développement d'un professionnalisme créatif et technique.
Nos fonds sont octroyés par le biais de programmes fondés sur des règles, incluant les enveloppes de rendement des télédiffuseurs, appelées ERT, et le programme des initiatives spéciales. Ce qui est important, c'est que dans le cadre de ces deux programmes, les fonds sont versés directement aux producteurs indépendants.
Le programme des ERT a été mis en place en 2004-2005; son objet était d'accroître la prévisibilité en ce qui concerne les fonds octroyés aux télédiffuseurs et à la production, car les demandes excédaient les fonds disponibles depuis plusieurs années. Le but était également d'établir le succès auprès de l'auditoire en encourageant les télédiffuseurs à choisir et à soutenir des productions intéressant de larges audiences. Le programme soutient des genres sous-représentés à la télévision canadienne, dans les deux langues officielles, et la diffusion, pendant les heures de grande écoute, d'émissions dramatiques, documentaires, de variétés et d'arts de la scène, ainsi que d'émissions pour les enfants et pour les jeunes.
Les enveloppes comme telles sont fondées sur quatre facteurs de rendement, à savoir le succès auprès de l'auditoire, l'accès historique au Fonds, les droits de diffusion supérieurs à la moyenne et les licences de production régionale.
En 2005-2006, 65 télédiffuseurs ont obtenu des enveloppes qui ont permis de financer 383 nouvelles productions.
Le programme des initiatives spéciales inclut une aide au développement, une aide aux productions en langue française hors Québec et une aide aux productions en langues autochtones. Les deux derniers types d'aide sont octroyés de façon sélective afin d'assurer un soutien, un accès et une programmation régionaux et linguistiques.
En ce qui concerne les auditoires, depuis le début des années 1990, le nombre de nouvelles licences de télédiffusion et d'entreprises de distribution de la radiodiffusion a explosé de façon exponentielle au Canada. Pourtant, d'après Nielsen, la quantité d'heures d'écoute de la télévision a comparativement peu changé.
Malgré un environnement plus concurrentiel, plusieurs émissions canadiennes ont obtenu une plus grande visibilité et reçu davantage d'attention que jamais, notamment de nombreuses émissions financées par le FCT. Par exemple, la première de Little Mosque on the Prairie a été diffusée dernièrement sur CBC et la cote d'écoute moyenne a été de plus de deux millions de téléspectateurs. Pour ce qui est des diffusions suivantes de l'émission, la cote d'écoute s'est stabilisée à plus d'un million de téléspectateurs. Trailer Park Boys est une série très suivie au pays et constamment une des principales émissions à Showcase.
Degrassi: The Next Generation est une série culte au Canada, surtout chez les adolescents. Une souscription américaine à cette série est imminente.
Da Vinci's Inquest fait actuellement l'objet d'une souscription aux États-Unis et attire de trois à quatre millions de téléspectateurs par semaine en remportant le plus souvent la palme pour le créneau dans lequel elle est diffusée; cette série est actuellement diffusée dans plus de 100 pays.
Dans la catégorie des émissions pour enfants et pour jeunes, neuf des 50 émissions qui ont le plus de succès au Canada auprès des enfants âgés de 2 à 11 ans sont financées par le FCT.
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En raison de la concurrence moindre des sources américaines et de la fragmentation moins accentuée des auditoires, le contenu produit nationalement a obtenu un grand succès auprès du marché québécois. Le FCT continue de jouer un rôle très important en soutenant la position dominante du contenu produit au Canada, à l'intérieur de ce marché. Si l'on considère les téléspectateurs âgés de deux ans ou plus, parmi les 25 émissions les plus populaires programmées régulièrement pour le marché francophone québécois, 10 émissions étaient financées par le FCT, dont
Le coeur a ses raisons,
Annie et ses hommes et
Casino.
Par ailleurs, plusieurs productions en langue française financées par le FCT ont été acclamées internationalement, telles Insectia ou L'Odyssée de l'espèce, ou ont été vendues à l'échelle nationale ou internationale en tant que formats. On peut citer l'émission Un gars, une fille exportée à plus de 30 marchés dans le monde entier et première émission québécoise à être adaptée aux États-Unis. Il y a également, Le coeur a ses raisons, qui a été vendue récemment en France, et Rumeurs, vendue au Canada anglais et à l'international.
Quant à la reconnaissance critique, en 2005, près de la moitié, c'est-à-dire 38 des 75 prix Gemini, ont été accordés à des productions financées par le FCT, dont, en langue anglaise Making the Cut, The Eleventh Hour et Beethoven's Hair. Les productions en langue française financées par le FCT ont été encore mieux saluées par la critique. En 2005, près des deux tiers des prix Gémeaux, 48 sur 74, ont été attribués à des productions du FCT, dont Annie et ses hommes, Rumeurs et Ramdam.
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Un financement opportun et constant est essentiel au bon fonctionnement du FCT et à sa capacité d'appuyer la communauté télévisuelle canadienne comme mandaté et requis. À ce titre, les entreprises de distribution de radiodiffusion font des contributions mensuelles au FCT, conformément à la circulaire 426 du CRTC. Tout le modèle financier du FCT s'appuie sur les entrées de fonds mensuelles des EDR et sur les versements du ministère du Patrimoine canadien s'ajoutant aux réserves et aux autres contributions. Les versements du FCT aux producteurs ont lieu tout au long de l'année, conformément aux principes directeurs, et sont essentiels pour élaborer, maintenir et achever des productions canadiennes.
L'annonce récente et la décision de Shaw Communications et de Vidéotron de retirer les contributions faites au FCT sont significatives et peuvent avoir un impact dévastateur sur la communauté des productions canadiennes, tout particulièrement parce que les mois d'avril à septembre représentent le cycle traditionnel de production et que les cycles de diffusion qui requièrent un nouveau contenu canadien commencent en septembre.
Très préoccupé au sujet de la capacité de l'industrie de gérer une réduction importante à ce moment critique, le conseil a approuvé un plan financier qui permettra au FCT de maintenir son appui financier à toutes les productions admissibles jusqu'à la fin de l'exercice financier en cours, qui se termine le 31 mars prochain. Tous les projets ayant déjà fait l'objet d'une demande continueront d'être analysés, et tous les types d'émissions seront traités de façon équitable.
L'impact réel sur le financement du FCT, en raison de la réduction du financement de Shaw et de Vidéotron, est le suivant : pour l'exercice financier 2006-2007, la réduction totale du financement est de 24 900 000 $, la réduction nette du financement, en tenant compte des revenus de récupération, des fonds inutilisés de l'ERT et des réserves, est de 10 millions de dollars. Pour l'exercice 2007-2008, la réduction du financement de Shaw et de Vidéotron s'élèvera à au moins 62 600 000 $, à laquelle s'ajoute la récupération du déficit de 2006-2007 de 10 millions de dollars, pour un manque à gagner total de 72 600 000 $.
Il est estimé que cette réduction de 72,6 millions de dollars, qui représente une diminution de 27 p. 100 par rapport au niveau budgétaire du FCT en 2006-2007, résultera en une perte de 165 millions de dollars du volume de production du marché de langue anglaise, et de 81 millions de dollars du marché de langue française, ce qui constitue donc une perte totale de 246 millions de dollars. Ceci aboutira à la perte de plusieurs milliers d'emplois dans tous les secteurs de l'industrie de la production télévisuelle.
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Au début de notre exposé, j'ai dit que la question dont le comité était saisi ne concernait pas l'état ou le rendement du FCT. Nous pensons que Shaw et Vidéotron ont des préoccupations au sujet du Fonds. Certaines de ces préoccupations sont fondées sur des principes, mais d'autres sont liées à des intérêts commerciaux. Ces deux sociétés ne sont pas les seules à avoir de la difficulté à admettre nos décisions. Compte tenu de la diversité des intérêts en jeu — les télédiffuseurs, les producteurs, les entreprises de distribution de radiodiffusion, etc. —, le contraire serait étonnant. Ce qui classe Shaw et Vidéotron dans une catégorie à part, cependant, c'est qu'elles ont des entreprises de distribution de radiodiffusion qui versent des contributions au FCT, ce qui représente pour elles un levier financier puissant pour défendre leurs intérêts personnels.
Les principes directeurs sur lesquels repose la structure du FCT, depuis sa création en 1994, nous obligent à prendre nos décisions en toute indépendance des intérêts financiers supérieurs d'un intervenant, d'un groupe ou d'une entreprise déterminés. Notre rôle est de régler les problèmes dans le meilleur intérêt du réseau de télédiffusion et de production, et des Canadiens.
Les considérations de politique gouvernementale qui sont à la base de la création du FCT viennent de la Loi sur la radiodiffusion et du Conseil, des travaux de parlementaires comme vous et des divers ministres du Patrimoine canadien et leurs fonctionnaires qui se sont succédé.
La question à examiner en fait aujourd'hui est la suivante : qui doit être le principal responsable du choix et de la conception des structures appropriées pour soutenir la production télévisée au Canada avec les ressources publiques? Le débat doit-il être mené par le Parlement, par les ministres et par les fonctionnaires, avec l'aide de l'organisme de réglementation concerné, ou alors par les groupes d'intervenants du secteur privé, avec les leviers financiers dont ils disposent?
Nous savons tous que le paysage de la télévision évolue et que nous sommes confrontés à de nouveau défis de taille. Le FCT se réjouit de collaborer avec le ministère du Patrimoine et avec la ministre, et aussi avec tous les groupes d'intervenants, comme nous l'avons toujours fait, pour régler ces difficultés. Certains changements seront à coup sûr nécessaires. Cependant, le FCT a démontré qu'il est une organisation extrêmement flexible, dotée d'une grande capacité d'adaptation, et que, de ce seul fait, il a été, pour le gouvernement du Canada et pour les Canadiens, un instrument innovateur et performant en matière de politique gouvernementale.
Monsieur le président, vous nous avez demandé de faire une série de recommandations qui sont incluses dans cet exposé, mais si je vous les lisais, nous dépasserions le temps dont nous disposons. Par conséquent, nous vous les laissons pour que vous puissiez les examiner.
Merci beaucoup pour cette occasion de témoigner —
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Bien sûr. Merci beaucoup.
Nous pensons que le contexte réglementaire établi par le CRTC laisse planer une certaine ambiguïté qui fait que ses dispositions concernant les paiements annuels concernant les entreprises de distribution de radiodiffusion sont applicables alors que les exigences en matière de versements mensuels énoncées dans la circulaire du CRTC sont vraisemblablement moins exécutoires. Pour régler ce problème, nous recommandons que les dispositions applicables du Règlement sur la distribution de radiodiffusion soit modifiées afin d'y inclure tous les paiements obligatoires visés par la circulaire.
Par ailleurs, nous constatons que les entreprises de distribution de radiodiffusion jouent un rôle important dans le débat parce qu'elles sont contributrices au système. Puisque nous sommes un organisme opérationnel relevant du ministère du Patrimoine canadien, nous estimons que ce débat devrait être une priorité importante au niveau ministériel. Nous recommandons par conséquent à la ministre d'établir une sorte de conseil des fournisseurs de fonds qui se réunirait chaque fois que le ministère signe une entente de contribution avec le Fonds, qui serait chargé de faire des commentaires à la ministre et au gouvernement sur les orientations stratégiques qui nous seraient imposées dans l'entente en question. Nous estimons que ce serait une tribune plus appropriée pour ce type de dialogue que le niveau opérationnel qui est le nôtre.
Nous estimons qu'il est temps d'ajouter un siège supplémentaire au conseil d'administration pour les fournisseurs de services de distribution par satellite de radiodiffusion directe. Comme vous le savez peut-être, il n'existe actuellement à notre conseil d'administration qu'un seul siège pour les fournisseurs de services par satellite et trois pour les câblodistributeurs. Depuis un certain temps, il est visible que, puisque la contribution des fournisseurs de services de distribution par satellite de radiodiffusion directe augmente, un seul siège n'est plus suffisant. Nous estimons par conséquent qu'il est temps d'en ajouter un.
Enfin, nous recommandons la création d'un organisme de mise en nomination chargé de défendre à l'intérieur du conseil d'administration les intérêts de toutes les entreprises de distribution de radiodiffusion. À l'exception de la CBC-SCR, il n'existe pas de siège réservé à une société au sein de notre conseil d'administration et nous estimons que ce n'est pas approprié. Tous les sièges de notre conseil sont occupés par des organisations corporatives comme l'Association canadienne des radiodiffuseurs, l'Association canadienne de production de films et de télévision, etc.
L'Association canadienne de télévision par câble disparaîtra officiellement au mois d'août et une organisation remplaçante est essentielle pour nommer les représentants des EDR au conseil d'administration. Sinon, elles perdront leur droit d'avoir un siège au conseil. Et, malgré les événements des dernières semaines, nous apprécions leur participation. La qualité de la contribution des administrateurs des entreprises de distribution de radiodiffusion — elles sont au nombre de quatre — depuis la création du Fonds a été de très haut niveau et nous aimerions qu'elles aient à nouveau un siège dans notre conseil.
Merci beaucoup, monsieur le président.
:
J'ai tenté de comprendre la cause précise de ce spectacle public en demandant des informations à Shaw et à Vidéotron. Les premiers commentaires, ceux de Shaw, ont été que la société n'aimait pas
Trailer Park Boys. Je trouvais que c'était pas mal fort qu'une entreprise de câblodistribution gigantesque fasse des commentaires prétentieux au sujet d'un divertissement sans prétention, mais c'est peut-être une opinion strictement personnelle.
Il y a ensuite la question de la responsabilisation et de l'absence de représentation de ce secteur, qui dispose pourtant d'un siège au conseil d'administration. En outre, le conseil a été remanié, si nous avons bien compris.
C'est devenu ensuite une attaque contre la CBC, une attaque en pleine face contre un radiodiffuseur public. Ces sociétés ont dit qu'elles ne voulaient être associées en aucune façon à la CBC. Pourtant, lorsque je vérifie la façon dont les fonds sont distribués, je constate que la CBC ne reçoit pas directement de fonds. Ils sont destinés à la production indépendante.
Ensuite, il y a 100 millions de dollars du gouvernement fédéral. On pourrait très bien se demander pourquoi des entreprises de télédiffusion privées reçoivent des subventions fédérales. Les 100 millions de dollars offerts par le gouvernement fédéral compensent-ils les fonds qui sont finalement investis dans la production indépendante finalement diffusée sur SRC ou CBC?
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Est-ce qu'en ce qui concerne les 100 millions de dollars, la question que vous posez est celle de savoir si c'est suffisant? Le problème en ce qui concerne la production de télévision canadienne est qu'il est très difficile pour le télédiffuseur de faire cette production et de réaliser un profit sur l'investissement, car nous avons plus de difficulté à nous constituer un auditoire que ce n'est le cas pour les émissions américaines.
Les télédiffuseurs sont confrontés à une difficulté liée aux coûts de production, de promotion et de diffusion; ils ont de la difficulté à réaliser un profit sur l'investissement. C'est à ce niveau qu'intervient le Fonds pour jouer ce rôle-là.
Est-ce suffisant? Nous savons qu'avant que le système des enveloppes de rendement des télédiffuseurs ne soit établi, les demandes de fonds dépassaient d'environ 50 p. 100 le volume d'activité qui pouvait être financé, mais les enveloppes de rendement des télédiffuseurs ont apporté une certaine prévisibilité au système. Les télédiffuseurs ne reçoivent pas de fonds; ce sont les producteurs qui nous présentent des demandes. C'est à leur nom que sont émis les chèques. Ils produisent l'émission. Ils doivent avoir une licence de télédiffusion pour pouvoir s'adresser à nous.
En ce qui concerne la CBC, et pour tenter de répondre à la question, Shaw et Vidéotron ont signalé de façon très claire qu'elles n'appréciaient pas que 37 p. 100 de l'argent que contenait le Fonds soient affectés à l'enveloppe de la CBC. Historiquement, la CBC ne pouvait pas avoir accès directement au Fonds, mais les producteurs dont elle est le radiodiffuseur ont pu avoir accès aux subventions distribuées par le Fonds pour faire diffuser ces émissions sur son réseau.
La question des 37 p. 100 est un héritage. Ce n'est pas une décision sur laquelle le conseil d'administration de notre organisation avait une certaine influence en termes d'orientation politique. C'était une exigence qui faisait partie intégrante de notre entente de contribution et nous ne pouvions par conséquent rien y changer. Une révision est-elle possible? Certainement. J'estime toutefois qu'il est important de signaler que les producteurs qui nous présentent des demandes — La CBC est notre principal télédiffuseur public. Elle diffuse de nombreuses émissions canadiennes et particulièrement des dramatiques, surtout aux heures de grande écoute; par conséquent, les producteurs ont tendance à s'adresser à elle pour essayer d'obtenir une licence afin de faire diffuser leurs émissions. Historiquement, la CBC a théoriquement souvent eu accès à plus de 37 p. 100 du Fonds et je pense par conséquent que ce chiffre est un modèle qui a pour objet de nous donner une idée de l'accès que la CBC a en permanence.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins. Nous vous remercions pour vos témoignages.
Je suis très optimiste de nature et je pense bien que le Fonds sera maintenu et qu'on arrivera à régler les problèmes par la négociation. Je soutiens vigoureusement la télédiffusion canadienne et je sais que vous avez joué un rôle important à ce chapitre. Par conséquent, je vous remercie. Nous vous remercions pour votre contribution.
Je voudrais obtenir quelques éclaircissements. Nous avons entendu de nombreux commentaires concernant les mesures qu'il faudrait prendre pour le moment pour tenter de faire bouger les choses. Je sais que les discussions se poursuivent et qu'il y a des cordes sensibles chez les deux parties, c'est-à-dire du côté des entreprises et du Fonds. De toute évidence, vous vous trouvez en quelque sorte dans une impasse, mais j'ai bon espoir que les choses s'arrangent.
J'aimerais avoir quelques éclaircissements. On a notamment réclamé que la ministre suspende les licences de Shaw Cable et de Vidéotron. Je sais qu'elle n'a pas le pouvoir — Il faudrait que je vérifie. Pensez-vous également que la ministre n'a pas le pouvoir de suspendre les licences de radiodiffusion de ces deux entreprises?
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Merci, monsieur le président. Mme Samson et moi en avons discuté tout à l'heure. Nous ferons d'abord notre exposé, puis ce sera leur tour. Nous avons des observations distinctes à faire, mais pensons qu'il existe un lien entre elles. Nous démarrons.
Bonjour, mesdames et messieurs. Je m'appelle Guy Mayson. Je suis président et directeur général de l'Association canadienne de production de films et de télévision ou ACPFT. Je suis accompagné aujourd'hui de Mario Mota, notre directeur principal des Relations avec les diffuseurs et de la recherche.
Nous tenons avant tout à féliciter le comité permanent d'avoir instauré cette étude d'urgence sur le Fonds canadien de télévision. Merci de nous avoir invités à partager nos opinions sur le rôle essentiel qu'il joue dans le maintien de l'industrie canadienne de la production télévisée indépendante.
Pour éviter tout malentendu, je signale d'emblée que le FCT est un volet essentiel du système canadien de radiodiffusion.
L'ACPFT, ou Association canadienne de production de films et de télévision, représente, comme vous le savez probablement, les intérêts de près de 400 entreprises actives dans la production et la diffusion d'émissions de télévision en langue anglaise, de longs métrages, de produits et de services des médias, de toutes les régions du pays. Les entreprises membres de notre association emploient de nombreux Canadiens et Canadiennes doués d'un talent créateur; elles assument les risques associés à l'élaboration d'un contenu original pour des auditoires canadiens et internationaux, sur le plan financier et sur le plan créatif.
Que font les producteurs au juste? Il semblerait que la question se pose toujours. Nous élaborons le projet. Nous structurons le financement. Nous engageons les talents créateurs et les équipes afin de transformer des histoires en émissions, contrôlons l'exploitation des droits et livrons le produit fini. Nous créons des émissions de qualité comportant des risques financiers élevés, dans les catégories des dramatiques, des comédies, des documentaires, des émissions pour enfants et des arts de la scène — ce que le CRTC appelle la programmation prioritaire.
Nous créons en outre du contenu pour les nouvelles plates-formes numériques. Tous les jours, nous offrons aux téléspectateurs canadiens le choix d'un point de vue canadien sur notre pays, sur le monde qui nous entoure et sur notre place dans ce monde. À ce titre, le secteur de la production indépendante joue un rôle capital dans le système de radiodiffusion canadien, tel que le reconnaît la Loi sur la radiodiffusion.
Outre le rôle primordial qu'ils jouent dans la promotion des objectifs stratégiques canadiens en matière de télédiffusion, les producteurs ont un impact considérable sur l'économie canadienne et ils sont responsables d'un pourcentage considérable d'une activité de production au Canada d'une valeur de 4,5 milliards de dollars, qui soutient annuellement plus de 120 000 emplois à plein temps directs et indirects.
Je suis sûr que le comité partage nos graves inquiétudes au sujet des menaces lancées par Shaw Communications et par Vidéotron en ce qui concerne la suppression des paiements qu'ils doivent faire au FCT. Nous ne pouvons pas rester impassibles et nous estimons que le comité, le gouvernement et le CRTC ne peuvent le rester non plus devant les tentatives faites par certaines sociétés de télédistribution pour détruire toute l'industrie en imposant unilatéralement leurs propres conditions pour qu'elles acceptent de respecter les obligations qui leur sont imposées par voie de règlement.
Alors que l'ACPFT a été très heureuse d'apprendre, la semaine dernière, que le FCT continuera à soutenir toutes les productions admissibles pour l'année 2006-2007, nous sommes très préoccupés au sujet de la réduction prévue de son budget 2007-2008 et des sommes affectées aux programmes, à la suite des agissements de Shaw et de Vidéotron. L'incertitude considérable entourant le financement des projets de télévision au-delà de 2006-2007 a déjà un impact négatif majeur sur les projets et le développement, et sur le financement international. L'argument que nous entendons le plus souvent est que les télédiffuseurs, ne sachant pas les montants qu'ils ont à dépenser, ne peuvent pas donner le feu vert aux projets. Il est par conséquent urgent de régler cette question.
Pour l'ACPFT, l'attitude de Shaw et de Vidéotron est inacceptable et irresponsable; si on tolère qu'elle persiste, cela créera un précédent dangereux qui aura des répercussions à long terme, non seulement sur la viabilité future du FCT, mais aussi en ce qui concerne l'intégrité du pouvoir d'octroi des licences et de réglementation du CRTC.
Si on ne riposte pas, les menaces de Shaw et de Vidéotron concernant la suspension des contributions qu'elles sont obligées de faire au FCT auront des effets destructeurs sur le Fonds, sur la production télévisée canadienne, sur la production indépendante et sur les secteurs créatifs qui entraîneront la perte de milliers d'emplois.
En vertu des articles 29 et 44 du Règlement sur la distribution de radiodiffusion du CRTC, les entreprises de câblodistribution de taille moyenne et de grande taille et les entreprises de distribution par satellite de radiodiffusion directe, désignées ci-après sous l'appellation EDR, sont obligées de faire une contribution équivalant à un pourcentage fixe de leurs recettes brutes annuelles provenant de leurs activités de radiodiffusion, au FCT. En outre, la circulaire no 426 du CRTC établit une directive stipulant que ces EDR doivent s'acquitter de leur contribution par des versements mensuels. Je pense que c'est très clair.
Compte tenu de la gravité de la situation, l'ACPFT a demandé au CRTC d'aviser immédiatement Shaw et Vidéotron que leur menace de cesser d'appuyer financièrement le FCT mettrait leur entreprise de câblodistribution et l'entreprise de diffusion directe à domicile par satellite de Shaw en contravention du Règlement sur la distribution de radiodiffusion.
Si Shaw et Vidéotron ne font pas leur contribution par des versements mensuels, nous estimons que leur refus va à tout le moins à l'encontre de l'esprit de la circulation no 426 du CRTC.
Nous avons exhorté le CRTC à prendre les mesures nécessaires pour que Shaw et Vidéotron se conforment au Règlement et à la circulaire.
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Il ne faut pas oublier les origines des contributions des EDR à la production télévisée canadienne. En 1993, le CRTC a tenu une audience portant sur la structure de l'industrie afin de faire une étude du milieu des communications qui était en pleine évolution. Un des constats faits à la suite de cette audience est qu'il était essentiel de s'employer à « encourager énergiquement la production et la distribution d'émissions canadiennes plus nombreuses et de meilleure qualité ».
Le Conseil a demandé que l'on fasse des commentaires sur la forme que prendrait ce nouveau mécanisme de financement. L'Association canadienne de télévision par câble avait alors proposé la création d'un nouveau fonds financé grâce aux contributions de l'industrie de la câblodistribution qui fournirait les montants nécessaires pour compléter les fonds récoltés grâce aux licences payées par les radiodiffuseurs à des producteurs indépendants pour certains types d'émissions sous-représentées.
La réaction des parties concernées a été, d'une façon générale, favorable et, par conséquent, le CRTC a accepté cette proposition en y apportant quelques modifications. Les sociétés de câblodistribution en ont tiré de gros avantages car elles ont pu maintenir 50 p. 100 des hausses des taux d'abonnement liées aux dépenses en immobilisations. Il était prévu que cette entente viendrait à échéance cette année-là. Certaines sociétés de câblodistribution ont tenté à plusieurs reprises de revenir sur cette initiative et les menaces de Shaw et de Vidéotron constituent une tentative supplémentaire d'atteindre cet objectif.
Au fil des années, les sociétés de câblodistribution ont réclamé et obtenu le droit d'affecter jusqu'à 40 p. 100 de leurs contributions au financement de leurs canaux communautaires. Les radiodiffuseurs fournissant des services de diffusion directe au foyer par satellite furent ensuite autorisés à affecter 0,4 p. 100 de leurs contributions au financement de petites stations de télévision conventionnelles des petits marchés plutôt que de supprimer des émissions. L'ACPFT a été alarmée par les propositions faites par le CRTC à l'occasion de l'examen récent de son cadre réglementaire en ce qui concerne la télévision en direct, à savoir que toutes les contributions financières supplémentaires que les EDR seraient éventuellement obligées de faire devraient être prélevées sur leurs contributions obligatoires actuelles à la production d'émissions canadiennes.
Nous estimons qu'il est temps que le CRTC rétablisse la pleine contribution de 5 p. 100 faite par les EDR à des fonds administrés de façon indépendante destinés à la production indépendante. En procédant de la sorte, il atténuerait l'incapacité du FCT de répondre à toutes les pressions financières dont le Fonds fait l'objet et équilibrerait l'apport financier supplémentaire que nous avons demandé aux télédiffuseurs conventionnels de faire à la production d'émissions typiquement canadiennes. Le Conseil a en outre estimé qu'il était important que ces fonds ne soient pas détournés davantage du Fonds canadien de télévision.
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Nous ne réfuterons pas tous les arguments faits publiquement par Shaw et Vidéotron au sujet de ce qu'ils considèrent comme les « failles » du FCT. Ils font preuve à notre avis d'une incompréhension surprenante et d'un manque de respect à l'égard d'un organisme de financement qu'ils ont aidé à créer et à gérer, adoptant une attitude qui frise le mépris à l'endroit des émissions et des auditoires canadiens.
Shaw et Vidéotron ont manifesté leur insatisfaction quant à la performance, au fonctionnement et à la régie du FCT. À ce propos, nous signalons que la bonne gouvernance du FCT a été signalée par la vérificatrice générale du Canada, en octobre 2005, et plus récemment confirmée par un examen indépendant fait par Renaud Foster, d'Ottawa, en juin 2006. Nous estimons que la composition très représentative du conseil d'administration du FCT, dans lequel se trouvent des représentants du secteur de la distribution de radiodiffusion depuis la création du Fonds, lui a permis d'être sensible aux intérêts de tous les intervenants. Le fait que plusieurs anciens présidents du conseil d'administration du FCT étaient des représentants du secteur de la câblodistribution — et très compétents, par ailleurs — mérite d'être signalé.
Shaw a insinué que les émissions financées par le FCT sont suivies par peu de personnes et qu'elles ont peu de valeur commerciale ou ne sont pas très exportables. Le FCT, dont les décisions en matière d'octroi de fonds sont de plus en plus fondées sur les cotes d'écoute, a rendu possibles de nombreuses émissions canadiennes très populaires comme Shanina: A Life in Eight Albums, un film de la semaine avec un auditoire de 1,2 million de téléspectateurs; One Dead Indian, un film de la semaine avec un auditoire d'un million de téléspectateurs; Degrassi: The Next Generation, une réussite spectaculaire avec une cote d'écoute moyenne de 737 000 téléspectateurs et Little Mosque on the Prairie, dont la cote d'écoute a atteint dernièrement une moyenne de 1,5 million de téléspectateurs. Ces émissions et de nombreuses autres émissions financées en partie par le FCT sont suivies et appréciées par des millions de Canadiens; elles sont en outre la preuve que les émissions canadiennes peuvent attirer de vastes auditoires.
Ne vous basez pas uniquement sur notre opinion. Le p.-d.g. de CTV, Ivan Fecan, a déclaré, au cours du récent examen de la télévision en direct fait par le CRTC, que les émissions canadiennes diffusées par CTV suscitaient une très bonne réaction de la part de l'auditoire. En ce qui concerne la valeur d'exportation, les dramatiques subventionnées par le FCT comme Degrassi: The Next Generation, Da Vinci's Inquest et Cold Squad, ainsi que des émissions pour enfants et pour jeunes comme Life with Derek, Franny's Feet et Renegadepress.com sont suivies et appréciées, dans certains cas, dans plus de 100 pays. La liste des émissions, dans ces catégories et dans d'autres catégories, qui ont trouvé des marchés d'exportation est très longue. Dernièrement, Da Vinci's Inquest, par exemple, a été suivie en moyenne par 3,4 millions de téléspectateurs aux États-Unis, battant ainsi la populaire émission CSI: Miami.
Nous pourrions énumérer des exemples de réussite parmi les émissions financées par le FCT pendant toute une journée. La vérité est que les insinuations de Shaw à l'effet que les émissions canadiennes sont de faible qualité et ne sont pas exportables sont totalement fausses.
Il est intéressant de mentionner que plus de 30 émissions canadiennes ont reçu au cours des deux dernières années un soutien financier du FCT et du Fonds Rocket de Shaw, le fonds de production indépendant qui a été créé en 1998. Si ces projets méritent l'appui du Fonds de Shaw, on peut présumer qu'ils méritent également l'appui du FCT.
Ce matin, le FCT a donné un aperçu de certaines de ses principales réalisations. Nous ne les rappellerons pas toutes, mais nous aimerions signaler que, depuis sa création, le FCT a accordé un soutien financier d'un montant total de 2,2 milliards de dollars à 4 470 productions canadiennes en langue anglaise et en langue française dans les catégories des dramatiques, des émissions pour enfants et pour jeunes, des documentaires et des émissions de variété et d'arts de la scène. La contribution financière de ce partenariat unique en son genre a permis la création de 23 000 heures d'émissions de télévision canadienne très intéressantes, représentant des budgets de production se chiffrant à 7,4 milliards de dollars. Chaque dollar investi au fil des années par le FCT a permis d'obtenir 3,3 $ supplémentaires en provenance d'autres sources. Il ne faut donc pas sous-estimer l'effet de levier de ce Fonds.
On estime que 21 000 des équivalents d'emplois à plein temps sur les 46 700 emplois dans le secteur de la production télévisée sont dus aux productions subventionnées par le FCT. C'est un chiffre très révélateur. Est-ce qu'un gouvernement laisserait une entreprise qui emploie plus de 21 000 personnes fermer ses portes sans faire de tentative de sauvetage?
En bref, sans le FCT, les producteurs indépendants n'auraient pas les moyens de produire leurs émissions. Le marché canadien est tout simplement trop petit pour financer les coûts élevés de ces émissions. Sans le Fonds, les télédiffuseurs canadiens n'auraient pas pu diffuser les quantités d'émissions télévisées typiquement canadiennes de haute qualité qu'ils ont présentées au cours des dix dernières années.
L'ACPFT a deux représentants au conseil d'administration du FCT. Nos représentants ont vigoureusement exprimé, au fil des années, les opinions du secteur de la production indépendance sur les activités du Fonds. L'ACPFT estime que le FCT est l'initiative la plus importante de soutien à la production télévisée typiquement canadienne. Par conséquent, nous continuons de soutenir le Fonds et ses objectifs généraux.
En conclusion, la contribution de 200 millions de dollars sur deux ans au FCT annoncée le 26 janvier par la ministre Oda et la confirmation de l'engagement du gouvernement à l'égard de l'industrie de la production télévisée canadienne et d'un système de radiodiffusion vigoureux nous ont réjouis au plus haut point. C'est maintenant la responsabilité de Shaw et de Vidéotron de respecter leurs engagements et celle du CRTC de s'assurer que ces deux titulaires de licence se remettent à verser leurs paiements dans les délais prévus.
Nous apprécions l'intérêt que porte le comité permanent à cette question et l'encourageons à exprimer dans ses recommandations son appui pour le Fonds canadien de télévision.
Je vous remercie pour votre attention. C'est avec plaisir que nous répondrons à vos questions.
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Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, M. Vincent Leduc, président du conseil d'administration de l'APFTQ et moi-même, Claire Samson, présidente et directrice générale de l'APFTQ, vous remercions de nous avoir conviés ce matin à vous présenter notre point de vue sur la crise actuelle relative au Fonds canadien de télévision.
L'APFTQ représente la vaste majorité des maisons de production indépendantes en télévision et en cinéma au Québec, soit plus de 130 entreprises.
[Traduction]
Comme nous l'avons signalé au cours de la conférence de presse que nous avons tenue mardi à Montréal conjointement avec cinq associations québécoises du milieu, l'APFTQ considère que la décision des câblodistributeurs Shaw et Vidéotron de cesser de verser leurs contributions obligatoires au Fonds canadien de télévision est inacceptable et prend en otage l'ensemble du système canadien de télédiffusion.
D'ici la mi-février, le Fonds canadien de télévision doit déterminer les montants des enveloppes qui seront attribués aux émissions de chaque diffuseur. Si le gouvernement canadien et le CRTC ne prennent pas rapidement les dispositions appropriées pour obliger ces deux entreprises à verser leurs contributions, ils enverront à l'ensemble des entreprises de distribution comme de programmation le message qu'elles peuvent aussi se soustraire à toute obligation réglementaire qui ne leur convient pas. À terme, cela pourrait signifier l'effondrement de l'ensemble du cadre réglementaire de la radiodiffusion canadienne, ce qui serait extrêmement lourd de conséquences et totalement inacceptable.
Dans le contexte actuel, ne pouvant plus compter sur les contributions des distributeurs privés, le FCT perdra 60 p. 100 de son financement, soit 150 millions de dollars, dès l'exercice 2007-2008. Pour le public, cela signifiera 60 p. 100 moins d'émissions canadiennes en dramatique, documentaire, jeunesse et variétés. Cela entraînera une baisse de 60 p. 100 des emplois pour les scénaristes, réalisateurs, artistes-interprètes, techniciens et compositeurs. Par conséquent, plusieurs maisons de production indépendantes devront probablement fermer leurs portes.
Comment les différentes chaînes pourront-elles planifier leurs grilles pour l'automne et l'hiver prochain avec une pareille épée de Damoclès au-dessus de leurs têtes? Comment ces chaînes pourront-elles présenter leurs futures émissions aux commanditaires potentiels dès mai prochain? Sans commandite confirmée, la plupart des chaînes ne pourront pas tenir le coup et respecter les conditions de leur propre licence.
Vincent.
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Vidéotron et Shaw se comportent en mauvais citoyens corporatifs et tentent actuellement d'imposer leurs vues, non par l'échange, la discussion et la négociation avec leurs partenaires, mais par un coup de force irresponsable, qui est de nature à déstabiliser tout le système de financement des émissions canadiennes.
Il est impératif de ne pas encourager une telle attitude et de refuser de négocier, à la va-vite et avec un revolver sur la tempe, une quelconque réforme de ce Fonds, d'autant que les arguments évoqués par Quebecor Média pour justifier son attitude sont peu convaincants.
Les journaux ont publié que sa filiale de distribution Vidéotron verse environ 15 millions de dollars par année au FCT et que sa filiale de programmation, TVA, bénéficie d'un engagement annuel de 18 millions de dollars de ce même Fonds, pour le financement d'émissions destinées à son antenne. Où est l'injustice?
Au-delà des arguments invoqués par Quebecor ou Shaw, leurs contributions au FCT ne sont pas des versements volontaires auxquels ces entreprises peuvent arbitrairement décider de mettre fin, mais des obligations réglementaires qu'elles doivent respecter.
D'autre part, le privilège de détenir une licence de câblodistribution confère à ces entreprises des avantages économiques importants, dont le fait qu'encore aujourd'hui, les consommateurs qui optent pour le câble n'ont pas le choix de leur fournisseur puisqu'il n'y a qu'une entreprise de câble autorisée par territoire. Les câblodistributeurs n'ont pas davantage le droit de jouir de leur licence en mettant fin à leurs versements que leurs clients n'ont le droit de conserver l'accès au service du câble en cessant de payer leur abonnement.
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La Loi sur la radiodiffusion ainsi que les mesures de soutien à l'industrie ont notamment été mises en place pour favoriser l'épanouissement et la diffusion de notre culture face à l'omnipotence de notre voisin américain. Les objectifs de cette loi sont plus pertinents que jamais dans un contexte international où la promotion de la diversité culturelle représente encore une bataille à gagner et à livrer. Cette lutte n'a de sens que si la diversité culturelle en question est d'abord affirmée et promue sur une base nationale.
D'ailleurs, l'un des objectifs de la politique canadienne de radiodiffusion est de faire appel de façon notable aux producteurs canadiens indépendants, de façon à assurer une plus grande diversité des lieux de création. D'autres mesures ont été mises en place pour permettre un équilibre entre les chaînes publiques, privées et spécialisées. Des quotas de contenu canadien ont été instaurés pour assurer une place prépondérante de nos émissions sur nos écrans. Des mesures de soutien au financement de nos productions ont été établies pour répondre à la demande. Des règles de propriété et de contrôle canadiens des entreprises de radiodiffusion existent pour protéger l'ensemble du système.
Le système canadien de radiodiffusion constitue un modèle à travers le monde. Les succès de la télévision québécoise n'auraient pu voir le jour sans un ensemble de mesures de soutien. Depuis 25 ans, notre système a favorisé une protection de l'écoute francophone, une grande popularité de nos émissions et une qualité reconnue à l'échelle internationale.
La promotion de notre culture constitue un choix de société que les Canadiens ont affirmé au fil des ans. Il serait irresponsable de remettre ces politiques en question sans songer aux fondements mêmes de leur existence. Ce débat concerne tous les citoyens, et non seulement quelques entreprises insatisfaites de certaines règles du jeu.
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Un géant comme Quebecor Média, dont le chiffre d'affaires annuel s'établit à 2,7 milliards de dollars, est déjà très privilégié dans le marché québécois et y jouit d'un niveau de concentration média très élevé qui pourrait menacer la diversité des voix. Mentionnons Vidéotron, TVA, JPL Production, Illico, Canoë, le
Journal de Montréal, le
Journal de Québec, etc.
On peut sûrement s'interroger à savoir si une entreprise d'une telle taille, aussi dominante dans son marché et jouissant d'un tel niveau de propriété croisée multimédia, contribue suffisamment au soutien de la production culturelle québécoise et canadienne dont elle tire une grande part de sa richesse. Ajoutons que Quebecor Média bénéficie de dizaines de millions de dollars par année en fonds publics directs et indirects, notamment grâce aux émissions diffusées par TVA.
Une chose est sûre, la contribution annuelle que sa filiale Vidéotron doit verser au FCT, qui représente 0,006 p. 100 des revenus de Quebecor Média et qu'elle retrouve entièrement par une autre filiale, TVA, ne justifie aucunement qu'une telle entreprise défie la loi et mette en péril l'ensemble du milieu de la production télévisuelle indépendante québécoise.
La stabilité de toute une industrie est en jeu. S'il y avait un désistement généralisé de la part des câblos et satellites à leur contribution au Fonds canadien de télévision, cela signifierait une perte de 8 500 emplois au Canada, dont plus de 2 500 au Québec.
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Il est prioritaire de dénouer la crise et de rassurer tous les joueurs de cette industrie ainsi que la population.
Actuellement, on tergiverse sur le degré d'illégalité des décisions de Quebecor et de Shaw. Certains experts soutiennent qu'en suspendant leurs versements mensuels, Vidéotron et Shaw ne sont pas encore dans l'illégalité, car si le Règlement sur la distribution de radiodiffusion fait obligation aux câblodistributeurs et aux distributeurs par satellite de consacrer 5 p. 100 de leurs recettes annuelles brutes à l'expression locale et à la programmation canadienne, dont une portion doit être versée au FCT, il ne précise pas le calendrier ou les modalités de cette contribution annuelle obligatoire.
Plusieurs experts s'entendent sur le fait que Vidéotron et Shaw seront clairement en défaut de respecter la réglementation afférente si, au dernier jour de l'année de radiodiffusion en cours, soit le 31 août 2007, elles n'ont pas versé au FCT la totalité de la contribution exigée par règlement pour l'année en cours.
Dans ce contexte, nous avons deux propositions à formuler pour dénouer la crise.
Premièrement, nous demandons à la ministre du Patrimoine canadien de faire en sorte que le gouvernement du Canada consente un prêt sans intérêt au Fonds canadien de télévision, correspondant au montant des sommes non versées par Shaw et Vidéotron, jusqu'à ce que ceux-ci reprennent leurs versements mensuels et paient les arrérages dus. De cette façon, ni le public ni les diffuseurs, les producteurs, les artistes et artisans, ne seront pris en otage. Le FCT ne sera pas obligé d'hypothéquer son prochain exercice financier. Par ailleurs, cela permettrait que toute discussion sur d'éventuelles modifications aux règles de gouvernance ou aux lignes directrices du Fonds se fasse dans un climat serein et avec le temps de réflexion nécessaire. D'autre part, avant toute discussion avec Quebecor et Shaw, le gouvernement devrait poser comme condition sine qua non le respect des règles en vigueur.
Deuxièmement, nous demandons au CRTC de faire savoir immédiatement à Vidéotron et à Shaw que, si elles n'ont pas versé au FCT la totalité de la contribution annuelle requise en vertu des dispositions du Règlement sur la distribution de radiodiffusion au terme de l'année de radiodiffusion en cours, le Conseil prendra les dispositions appropriées pour assurer le respect de sa réglementation et, à défaut, imposera aux contrevenantes les sanctions prévues par la Loi.
Nul n'est au-dessus de la loi ou de ses règlements. Le CRTC ne peut tolérer que Vidéotron et Shaw décident, de leur propre initiative, de se soustraire à son application et de se conférer ainsi des avantages pécuniaires et concurrentiels sur les autres entreprises de distribution de radiodiffusion qui respectent la Loi et la réglementation afférente.
[Français]
En conclusion, le geste posé par Quebecor et Shaw ne peut et ne doit pas être toléré. Nous exhortons les autorités compétentes à assumer leurs responsabilités et à agir dans les plus brefs délais. Il en va de la place de notre culture sur nos écrans et de la capacité du système canadien de radiodiffusion à la défendre.
Je vous remercie de votre attention et, bien sûr, nous sommes prêts à répondre à vos questions.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Cette question paraîtra redondante, mais je la poserai tout de même. Étant donné qu'il s'agit d'un règlement pris aux termes de la Loi, donc, que ce n'est pas, comme vous l'avez indiqué, une contribution volontaire, est-ce que l'un d'entre vous a rencontré la ministre?
Je voudrais savoir pourquoi la ministre n'a pas fait son travail en obligeant Shaw et Vidéotron à respecter le Règlement. J'aimerais savoir pourquoi la ministre ne l'a pas fait. A-t-elle dit qu'elle le ferait? A-t-elle dit qu'elle ne l'a pas fait?
Je me souviens de l'époque où la ministre travaillait pour le CRTC. On envisageait déjà de créer le FCT et elle n'était pas particulièrement en faveur de ce type de fonds.
J'aimerais savoir si l'un de vous lui a demandé pourquoi elle n'a pas tout simplement fait respecter le Règlement. Avez-vous des réponses? Lui avez-vous posé la question? Nous n'avons pas pu obtenir de réponse nous-mêmes.
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Je tenterai de répondre à cette question-ci car je pense que cette affaire a engendré une terrible incertitude sur le marché au cours des dernières semaines.
Ce que vous dites est parfaitement exact, monsieur Angus. Sur un marché étranger — Voici ce que j'ai entendu, cette semaine, venant du principal marché des émissions pour enfants et des dessins animés de New York : « Étant donné que nos télédiffuseurs canadiens ont de la difficulté à s'engager, pourquoi un distributeur étranger prendrait-il des engagements en ce qui concerne votre projet ». Cette affaire a donc un effet d'entraînement considérable. Le degré d'incertitude est actuellement très élevé.
Je suis entièrement d'accord avec ce que vous dites. Cela nous semble très clair en définitive. La gestion du Fonds pose toujours certains problèmes. Nous avons tous des reproches à faire au Fonds, mais pour nous, c'est, somme toute, une réussite monumentale; je pense d'ailleurs que le Règlement indique de façon très précise d'où doivent venir les contributions et quand elles doivent être versées. Les discussions concernant l'avenir du Fonds ne devraient pas se dérouler avec cette épée de Damoclès au-dessus de nos têtes, comme l'a si bien dit Mme Samson.
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Merci, monsieur le président.
Je voudrais poser une question associée aux commentaires que vient de faire M. Angus.
Je suis heureux que M. Leduc et M. Mota aient également rappelé l'historique de ce Fonds. C'est ce qu'avait fait M. Barrett avant vous. En fait, le FCT a été créé, en partie du moins, parce que les EDR voulaient augmenter leurs taux d'abonnement, dans le but de réinvestir ces fonds, je présume. En contrepartie, les EDR ont été obligées de verser des contributions au Fonds de câblodistribution.
Quand ce fonds est devenu le FCT et que le gouvernement a versé une contribution annuelle de 100 millions de dollars, le système fonctionnait apparemment bien. Si Vidéotron et Shaw veulent maintenant revenir en arrière, les discussions sur l'opportunité de rétablir des règlements supplémentaires seront très intéressantes car, quand on examine la genèse du Fonds, c'était ainsi à l'origine.
Je voulais également rectifier certaines erreurs venant de Mme Fry. On a signalé que Vidéotron et Shaw enfreignaient en fait le Règlement ou la Loi. Je pense que les versements mensuels sont en fait obligatoires en raison d'une circulaire du CRTC et qu'il ne s'agit pas de paiements exécutoires. En fin de compte, nous savons que cette période de financement arrivera à échéance à la fin de l'été, et nous estimons que ces deux sociétés ont l'obligation de financer le programme.
L'autre insinuation est que la ministre n'avait pas fait son travail. Les porte-parole du FCT avaient déjà signalé qu'ils l'avaient rencontrée. Nous savons que les EDR, Shaw et Vidéotron, ont rencontré la ministre également. Vous l'avez rencontrée aussi. Nous savons en outre que la ministre s'est dernièrement engagée à maintenir au cours des deux prochaines années une contribution fédérale de l'ordre de 200 millions de dollars. Je pense que cela démontre que la ministre est engagée.
Est-ce qu'au cours des rencontres que vous avez eues avec la ministre, celle-ci ou quelqu'un d'autre du Parti conservateur vous a signalé que nous ne sommes pas en faveur du maintien de ce Fonds?
Monsieur Mayson.