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INDU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie


NUMÉRO 059 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 7 mai 2007

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    La séance est ouverte. Il s’agit de la 59e réunion du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie. Conformément à l'article 108(2) du Règlement, le comité reprend son étude sur la contrefaçon et le piratage de la propriété intellectuelle.
     Nous accueillons six invités aujourd’hui. Chacun d’eux va faire une déclaration préliminaire d’au plus cinq minutes, puis nous passerons immédiatement aux questions du comité. Je vous présente les invités dans l’ordre où ils vont intervenir.
     Premièrement, M. Lee Webster, président du comité de la propriété intellectuelle de la Chambre de commerce du Canada. Deuxièmement, quelqu’un que nous connaissons bien ici, M. Jayson Myers, premier vice-président et économiste en chef de Manufacturiers et Exportateurs du Canada. Troisièmement, M. Michael Hilliard, avocat de société chez Microsoft Canada Co. Quatrièmement, M. Douglas Frith, président de l’Association canadienne des distributeurs de films. Cinquièmement, M. Lorne Lipkus, président du comité de l’éducation et de la formation du Réseau anti-contrefaçon canadien. Enfin, M. Graham Henderson, président de l’Association de l’industrie canadienne de l’enregistrement.
     Messieurs, je vous souhaite la bienvenue.
     Comme je viens de le dire, M. Webster va prendre la parole en premier, suivi des autres intervenants, dans l’ordre que j’ai donné. Nous apprécierions beaucoup que votre introduction ne dépasse pas cinq minutes pour que nous puissions consacrer le plus de temps possible aux questions du comité.
    Monsieur Webster, vous avez la parole.
    Monsieur le président, honorables membres du comité, bonjour.
     Je m’appelle Lee Webster. Je suis président du comité de la propriété intellectuelle de la Chambre de commerce du Canada. Je suis également un associé du cabinet d’avocats Osler, Hoskin & Harcourt de Toronto. J’exerce le droit de la propriété à l’échelle internationale depuis plus de 25 ans.
     Je suis ici pour vous dire que le Canada est en train de perdre la guerre contre la contrefaçon des produits. Auparavant, la contrefaçon portait essentiellement sur les t-shirts bas de gamme, les montres et autres produits de luxe. Mais, le peu de risques qu’encourent les contrefacteurs et les bonnes marges de profit qu’ils réalisent ont encouragé ces criminels, notamment le crime organisé, à intensifier leurs activités et à contrefaire toutes sortes de produits : médicaments, plaquettes de frein et autres pièces pour automobiles, produits électriques et produits de soins personnels. Aucun secteur n’est épargné par cette activité illégale.
     Il faut savoir que la contrefaçon constitue un risque grave pour la santé et pour la sécurité en raison de la qualité médiocre et inégale des produits de contrefaçon et de leur nature potentiellement dangereuse. Les contrefacteurs ne se soucient guère de savoir si les produits de contrefaçon présentent ou non un danger pour les consommateurs; leur seul souci, c’est le profit, l’appât du gain. On s’est rendu compte que certaines piles de contrefaçon importées au Canada contenaient du mercure et présentaient un risque d’explosion. On a trouvé au Canada des shampooings de contrefaçon importés des États-Unis qui étaient contaminés par des bactéries. Je suis sûr que vous avez entendu parler de cette pauvre femme en Colombie-Britannique qui a succombé à un empoisonnement après avoir avalé des médicaments achetés par Internet. Il s’est avéré après analyse que ces médicaments étaient additionnés d’agents de remplissage contenant, croyez-le ou non, du plomb et de l’uranium.
     Empêcher la distribution des produits de contrefaçon ne se limite pas à la protection des droits légitimes des concepteurs de montres et de sacs à main haut de gamme. Hormis les questions de sécurité, on ne peut pas nier le fait que c’est également une question de perte d’emplois et de recettes fiscales. La contrefaçon et le piratage ne font pas l’objet de vérifications sérieuses au Canada et continuent donc de croître à un rythme exponentiel. On estime à des milliards de dollars par an la valeur des produits de contrefaçon au Canada, et les estimations sont en hausse. Les conséquences économiques de ce problème sur les sociétés canadiennes et la perte de recettes fiscales pour le gouvernement sont considérables. Ce problème a une incidence négative sur les affaires au Canada et sur les membres de la Chambre de commerce.
     La Chambre de commerce du Canada est d’avis que, dans le contexte d’une économie mondiale qui évolue rapidement, la protection de la propriété intellectuelle est fondamentale pour la compétitivité du Canada.
     Dans une économie fondée sur les connaissances, la propriété intellectuelle est un facteur essentiel pour promouvoir l’investissement dans la recherche et l’innovation, le commerce international et l’investissement, la protection des consommateurs, et la croissance économique dans son ensemble. On peut prétendre que tout cela est orchestré par l’industrie du spectacle qui cherche à protéger sa propriété intellectuelle du téléchargement illégal. Même si cette préoccupation est authentique, le problème est bien plus vaste. Les problèmes de l’industrie du spectacle ne sont qu’un seul aspect du problème plus général qu’est le vol de la propriété intellectuelle. Voler la propriété intellectuelle de quelqu’un revient non seulement à dépouiller un détenteur de droits des avantages économiques que lui confèrent ces droits, reconnus depuis bien longtemps par des lois de notre droit civil traditionnel comme les lois sur les brevets, les marques de fabrique et les droits d’auteur; mais en plus, cela ternit la réputation de notre pays à l’étranger en trompant le consommateur, sans parler du fait que cela peut mettre en danger la santé et la sécurité des consommateurs.
     Ce problème n’est pas passé inaperçu auprès de nos principaux partenaires commerciaux. La semaine dernière justement, pour la 13e année consécutive, le Bureau du Représentant des États-Unis pour le commerce a de nouveau inscrit le Canada sur la liste de surveillance spéciale 301, liste annuelle qui répertorie les pays dont les mesures de protection de la propriété intellectuelle sont jugées insuffisantes.
     Le gouvernement du Canada doit commencer à prendre des mesures significatives et vigoureuses immédiatement pour contrer ce problème. La Chambre de commerce du Canada demande depuis longtemps que des mesures soient prises, et nous prenons comme un signe encourageant le fait que le comité ici présent et que le Comité permanent de la sécurité publique et nationale étudient attentivement le problème de la contrefaçon au Canada. Il était temps que le gouvernement prenne ce problème au sérieux et agisse en conséquence.
     Le Réseau anti-contrefaçon canadien a publié un rapport complet sur la contrefaçon et le piratage au Canada intitulé Une carte pour le changement. La Chambre de commerce du Canada est en accord total avec ce rapport et les recommandations qui y figurent. Le présent comité a déjà commencé à s’attaquer au problème en intégrant à son récent rapport une section sur la contrefaçon dans le secteur manufacturier. Le comité de la sécurité publique va bientôt publier un rapport sur les conséquences des produits de contrefaçon sur la santé et la sécurité.
     Mes collègues présents aujourd’hui vont approfondir les recommandations précises qui permettront d’inverser la tendance en matière de vol de la propriété intellectuelle. Mais je souhaiterais avant souligner quelques faits.
     En premier lieu, il faut que les organismes d’application de la loi et les substituts du procureur général disposent de meilleurs outils pour pouvoir lutter efficacement contre l’importation, la fabrication, la distribution et la vente de produits contrefaits dans ce pays.
     En deuxième lieu, les douaniers doivent notamment être investis de nouveaux pouvoirs et bénéficier de ressources plus importantes pour pouvoir fouiller les marchandises aux frontières et saisir les produits soupçonnés d’être des produits contrefaits.
     Il faut prendre bien d’autres mesures encore. Les lois canadiennes en vigueur sur la propriété intellectuelle ne prévoient pas de mesures de redressement efficaces et efficientes — et je souligne bien « efficientes » — en cas de contrefaçon de produits.
     Pour terminer, il est urgent de réviser en profondeur toutes nos lois liées à la propriété intellectuelle, la Loi sur le droit d’auteur, la Loi sur les marques de commerce et la Loi sur les brevets, ainsi que les dispositions d’autres ensembles de lois qui portent sur la propriété intellectuelle, par exemple le Code criminel, et ce afin que les détenteurs de droits et les autorités possèdent les outils nécessaires pour mettre fin de façon efficace et efficiente à la circulation des produits de contrefaçon dans ce pays. Il faut mettre un terme aux activités des contrefacteurs. Le cadre canadien relatif à la propriété intellectuelle doit être élevé aux normes de celui de nos partenaires commerciaux internationaux.
(1535)
     Nous vous remercions de nous avoir donné l’occasion d’exprimer les points de vue de la Chambre de commerce. Je répondrai à toutes vos questions avec plaisir à l’issue de nos exposés.
    Merci, monsieur Webster.
     Monsieur Myers, c’est à vous je vous prie.
     Bonjour mesdames et messieurs.

[Français]

    Bonjour, mesdames et messieurs. Je vais maintenant lire ma présentation. Je suis assuré que la version traduite sera bientôt prête à être distribuée aux membres du comité.

[Traduction]

     Pour commencer, je voudrais vous témoigner ma reconnaissance et vous adresser mes remerciements pour le travail que vous accomplissez, pour l’efficacité avec laquelle vous représentez les fabricants du Canada et pour les efforts que vous déployez en leur nom. Le budget prévoit un certain nombre de mesures qui s’inspirent des recommandations formulées par ce comité; je m’attends à une réponse très positive du gouvernement à votre rapport sur la compétitivité dans le secteur de la fabrication.
     L’une des questions que vous avez reconnues comme étant prioritaires lorsque vous vous êtes adressés aux fabricants de tout le pays est le problème du commerce déloyal et, plus précisément, le problème que posent, pour l’économie canadienne, les produits contrefaits et le vol de propriété intellectuelle. Je vais me faire l’écho des propos de M. Webster. Il s’agit d’un problème urgent qui touche une grande variété de produits et de services au Canada.
     Je voudrais dire aussi que l’industrie ne dispose pas d’estimations économiques précises de l’ampleur du problème. Je pense que parmi nos estimations, certaines sont raisonnables, mais elles sous-évaluent une partie des conséquences économiques et sociales qu’engendrent les activités de contrefaçon.
     J’aimerais vous parler un peu de l’expérience de Manufacturiers et Exportateurs du Canada (MEC) en la matière et de ce que nous faisons pour lutter contre le commerce des produits de contrefaçon. En plus, en tant que membre du Réseau anti-contrefaçon canadien, MEC approuve totalement les recommandations qui seront exprimées tout à l’heure.
     Dans l’exemplaire de mon exposé que vous possédez, j’ai énuméré le nombre de produits qui ont été portés à notre attention par nos membres et que nous avons donc répertoriés.
     Aliments, boissons et produits du tabac : cigarettes, bière, alcool, vin de glace, sirop d’érable et fruits en conserve.
     Habillement : bien sûr, vêtements, chaussures, sacs à main, bijoux. J’ai jeté un œil attentif et très intéressé sur la garde-robe de ma femme, et je peux vous dire que ce n’est pas beau à voir.
     Produits électroniques : puces, semi-conducteurs, modules électroniques, commutateurs, CD et DVD, consoles de jeux, lecteurs audionumériques MP3, téléphones cellulaires, ordinateurs, lampes, piles, appareils électroménagers.
     Produits en métal et en plastique : produits moulés. Les États-Unis importent et répertorient dans leurs importations en provenance du Canada plus de produits moulés destinés au secteur automobile qu’on n’en fabrique au Canada; ces produits portent de fausses marques et passent ainsi du Canada aux États-Unis.
     Pièces pour automobiles : freins, systèmes électroniques de pièces pour automobiles, textiles pour voitures, colorants pour automobiles.
     Équipement: bétonnières. Notre premier vice-président travaille en collaboration avec Monarch Industries à Winnipeg; il a vu une bétonnière dans une foire commerciale aux États-Unis — ils en fabriquent — il s’est approché en se disant que ce produit lui était familier. En consultant le catalogue fourni par une société chinoise, il est tombé sur une photo de lui aux côtés d’une bétonnière avec la légende : « Un autre client satisfait ».
     Une large gamme de produits sont touchés, notamment dans le domaine médical — produits pharmaceutiques, instruments médicaux — et bien sûr les logiciels.
     Le marché de la contrefaçon au Canada, que nous avons essayé d’estimer, est évalué à 20 à 30 milliards de dollars par an. Je sais que certains contestent ces chiffres, mais il s’agit pourtant d’estimations plutôt raisonnables. Ces montant équivalent à 2 à 3 p. 100 de nos importations et de nos exportations combinées, ils correspondent aux estimations de l’OCDE et à celles de la Chambre de commerce internationale. Cependant, il faut que je vous précise un point : ces chiffres ne tiennent pas compte de la production nationale de produits de contrefaçon, ni bien sûr des conséquences sociales et économiques pour le Canada. Il est impossible de réaliser des analyses économiques précises puisqu’il s’agit d’activités criminelles et de marché noir. Si l’on pouvait chiffrer la valeur de ce marché, le problème ne se poserait pas; mais il se trouve qu’on ne peut pas surveiller efficacement ce marché clandestin.
     Un témoin vous a dit qu’il faut réunir des données sûres et fiables avant d’agir. Il y a une chose que je souhaite vous dire aujourd’hui. Il est vrai que nous devons réaliser des analyses économiques, mais cela ne doit pas nous empêcher d’agir.
     Vous verrez le reste de mon exposé lorsqu’il circulera parmi vous.
     L’ampleur des conséquences sociales et économiques de la contrefaçon dépasse de beaucoup l’ampleur de cette activité. Il ne s’agit pas seulement de ventes perdues, de salaires en moins, de pertes de recettes fiscales ou de parts de marché. C’est également une perte d’investissement et d’innovation. Sans compter les incidences sur la sécurité et la sécurité exposées par M. Webster et les conséquences juridiques et financières. Le vrai danger est que si les États-Unis ferment leur frontière parce que nous sommes incapables de sécuriser les nôtres, cette décision mettrait un frein aux activités transfrontières de nos deux pays, à savoir 1,5 milliard de dollars d’échanges à la frontière entre nos deux pays. C’est le danger que court le Canada en figurant sur cette liste de surveillance du Bureau du représentant américain au commerce.
     MEC lutte activement contre la contrefaçon. Nous travaillons en collaboration avec la CSA, la GRC et le Réseau anti-contrefaçon canadien. Toutefois, nous avons tiré les conclusions et les enseignements suivants de notre expérience : ce sont les entreprises canadiennes qui doivent déceler les activités de contrefaçon; mais comme il est quasiment impossible de savoir à quel moment précis se déroulent ces activités, il est tout aussi impossible d’obtenir une ordonnance du tribunal pour faire appliquer la loi. L’application des lois ne doit pas revenir au secteur civil; c’est difficile d’un point de vue pratique, c’est coûteux, c’est inefficace, sans compter les problèmes qui se posent en matière d’exécution de la loi et de répartition des ressources consacrées à l’application de la loi. Et franchement, ce n’est pas une priorité du gouvernement.
     Les recommandations que nous avons formulées sont tout à fait en accord avec celles du Réseau anti-contrefaçon canadien. Je laisse la parole à un représentant de ce réseau qui va vous formuler des recommandations bien précises.
(1540)
    Merci, monsieur Myers.
     Monsieur Hilliard, nous vous écoutons.
     Je m’appelle Michael Hilliard et je suis avocat de société chez Microsoft Canada. Je suis heureux d’avoir l’occasion de m’exprimer devant ce comité et de vous faire part de quelques réflexions sur l’importance de protéger les droits de propriété intellectuelle et d’appliquer les lois qui les régissent, en particulier concernant les logiciels.
     Le problème du piratage informatique au Canada est un problème de taille. Selon la dernière enquête BSA-IDC sur le sujet, le taux de piratage informatique s’élève à 33 p. 100 au Canada. Trente-trois pour cent des logiciels au Canada sont piratés. Ce taux baisse depuis quelques années, mais il reste considérablement plus élevé qu’aux États-Unis, 21 p. 100, qu’en Nouvelle-Zélande, 23 p. 100, qu’en Finlande, 26 p. 100, et que dans beaucoup d’autres pays développés.
     Les pertes dues au piratage au Canada sont chiffrées à plus de 800 millions de dollars. Ce problème entraîne de nombreuses conséquences économiques néfastes. Il sape les efforts des développeurs de logiciels canadiens. Il en résulte moins d’emplois sur le marché officiel du logiciel et une perte de recettes fiscales. Selon l’IDC, si l’on pouvait réduire à 26 p. 100 le taux de piratage au Canada, on retrouverait 14 000 nouveaux emplois dans le secteur du logiciel et les recettes fiscales augmenteraient de 2 milliards de dollars.
     Autrement dit, ce problème ne concerne pas uniquement les fabricants de logiciels comme Microsoft. Pour chaque dollar de logiciel vendu, il se vend au moins 1,25 $ en services destinés à concevoir, installer, personnaliser et soutenir le logiciel. La plupart de ces services ou revenus supplémentaires sont fournis par des entreprises locales.
     Au-delà des aspects économiques du piratage, les Canadiens qui utilisent des logiciels piratés courent des risques considérables. Une enquête récente de l’IDC a porté sur l’étude de sites Web qui proposent des clés de produits de contrefaçon, de logiciels piratés, etc.; 25 p. 100 de ces sites Web tentaient d’installer des logiciels malveillants ou potentiellement parasites. L’échelle des conséquences de ce type de logiciels parasites est variée : conséquences sans trop de gravité (logiciels de publicité, fenêtres flash ou piratage de page d’accueil), conséquences ennuyeuses (fonctions destructrices des chevaux de Troie qui épuisent les ressources de l’ordinateur) et conséquences désastreuses lorsque des logiciels de référence ou des espions de clavier prennent contrôle de l’ordinateur pour envoyer du pourriel, entreposer des fichiers illégalement ou donner accès à des données de nature délicate.
     Pour les entreprises, une étude récente de spécialistes de la sécurité des TI a montré que les frais à engager pour résoudre les problèmes déclenchés par un virus, un accès non autorisé à de l’information ou le vol de renseignements peut dépasser 20 000 $ par incident.
     À Microsoft, nous prenons très au sérieux le problème du piratage informatique. Nous avons regroupé les divers investissements que nous y consacrons en une seule initiative que nous appelons l’initiative Microsoft pour les logiciels authentiques. Cette initiative a trois principaux volets stratégiques : le premier est l’information, en sensibilisant aux risques que présentent les logiciels de contrefaçon et à l’importance de détenir des licences de logiciels par des campagnes de communications auprès des consommateurs. Le deuxième est le génie-logiciel. Nous dotons nos logiciels de dispositifs anti-contrefaçon qui alertent le consommateur de la présence d’un logiciel de contrefaçon, et qui le protège de certains des dangers dont je viens de parler. Et le troisième est l’application de la loi. Microsoft soutient activement les représentants du gouvernement et les instances chargées d’appliquer la loi qui prennent des mesures contre le piratage informatique et contre les personnes dont pourraient être victimes les entreprises et les consommateurs canadiens sans méfiance.
     Par ailleurs, Microsoft ne se contente pas de se reposer sur le gouvernement pour contrer ce problème. Microsoft entend prendre toutes les mesures judiciaires nécessaires pour protéger ses partenaires et les consommateurs honnêtes.
     Pour contrer le problème du piratage informatique, en plus d’être tout à fait favorable aux recommandations du Réseau anti-contrefaçon canadien, Microsoft croit que le gouvernement du Canada devrait prendre les mesures suivantes : la première, mettre en vigueur immédiatement les dispositions du Traité de l’OMPI sur le droit d’auteur et du Traité de l’OMPI sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes; la deuxième, investir l’Agence des services frontaliers du Canada de pouvoirs autonomes l’autorisant à saisir ou à détruire les produits de contrefaçon; la troisième, faire de la fabrication, de la vente et de la distribution de marques non authentiques une infraction au Code criminel; et la quatrième, octroyer à la GRC et au ministère de la Justice les ressources nécessaires à la lutte efficace contre la contrefaçon.
     Les droits de propriété intellectuelle jouent un rôle croissant dans l’économie mondiale. Pour que les Canadiens puissent bénéficier des avantages de cette économie et y être compétitifs, il est impératif que le cadre juridique du Canada et son régime d’application de la loi soient renforcés, afin d’encourager le développement et la protection de la propriété intellectuelle.
     Au nom de Microsoft, je vous remercie de l’intérêt que le comité porte à cette question, et je vous remercie de m’avoir donné l’occasion de m’exprimer devant vous tous.
(1545)
    Merci beaucoup, monsieur Hilliard.
     Passons à M. Frith je vous prie.
    Je vous remercie monsieur le président, mesdames et messieurs les députés.
     Je suis président de l’Association canadienne des distributeurs de films, qui agit à titre de porte-parole pour défendre les intérêts des grands studios de production de films, de technoloisir et de télévision. Nos membres sont Sony Pictures, Universal Pictures, Warner Bros., Paramount Pictures, 20th Century Fox et Disney; autrement dit, les producteurs qui font une grande partie des films que vos enfants, mes enfants et mes petits-enfants verront cet été.
     Le Canada a un grave problème de crime contre la propriété intellectuelle; voilà longtemps qu’il aurait fallu prendre des mesures claires pour renforcer le système d’application de la Loi sur la propriété intellectuelle au Canada. Comme le dit la GRC, du point de vue de l’application de la loi criminelle, il est essentiel de commencer par établir qui est perdant et qui est gagnant. Les détenteurs de droits, les détaillants légitimes, le grand public, les entreprises canadiennes et l’économie canadienne sont tous perdants. Ce sont les criminels qui y gagnent. Par conséquent, l’Association canadienne des distributeurs de films est favorable à l’ensemble des recommandations qui figurent dans le rapport du Réseau anti-contrefaçon canadien.
     Je voudrais axer mes commentaires aujourd’hui sur notre principal sujet d’inquiétude: l’impact sur le marché du piratage mondial de films des enregistrements illégaux sur caméscope réalisés dans les cinémas canadiens.
     Voici les faits. Tout piratage de film, qu’il s’agisse de copie illégale d’un DVD ou de téléchargement sur Internet, commence par un vol de film. Aujourd’hui, plus de 90 p. 100 de tous les films récents qui sont piratés proviennent de films illégalement enregistrés dans des cinémas. Les auteurs réalisent des bénéfices en vendant des copies à des personnes qui les distribuent sur Internet et à des réseaux criminels organisés qui reproduisent et vendent des millions de DVD illégaux dans le monde entier.
     Comment savons-nous cela? Parce qu’en 2003, les grands studios de production de films ont commencé à se pencher sur le problème de l’enregistrement illégal sur caméscope en intégrant à leurs épreuves de films des empreintes en filigrane sophistiquées pour qu’il soit possible de déterminer par analyse technique le cinéma exact où l’enregistrement sur caméscope a été effectué. Les exemplaires pirates qui circulent dans le monde entier et les copies illégales que l’on trouve sur Internet sont continuellement analysés afin qu’on détermine leur provenance et le cinéma où l’image a été enregistrée pour la première fois. C’est ainsi que nous savons que le Canada est désormais une source vaste et croissante de copies pirates de films.
     Rien qu’en 2006, les enregistrements illégaux réalisés au Canada sur caméscope ont généré environ 20 p. 100 à 25 p. 100 des versions illégales de tous les films des grands studios de production que l’on pouvait trouver sur Internet ou sur des DVD illégaux dans le monde.
     Les DVD pirates et les copies de films des grands studios que l’on a trouvés sur Internet provenaient de cinémas situés en Colombie-Britannique, en Nouvelle-Écosse, en Ontario, en Alberta et au Québec. On a trouvé des copies DVD de ces films volés dans plus de 45 pays, et ils étaient proposés sur Internet par plus de 130 pseudo-groupes de lancement, qui sont largement responsables de la distribution en ligne des copies illégales de films. Avec les progrès des technologies numériques, croyez-moi, il s’agit de vols très organisés. Les auteurs emploient des méthodes diverses pour produire des copies d’excellente qualité et utilisent des installations d’écoute assistée afin de produire des bandes sonores impeccables dans les deux langues officielles.
     Malgré la gravité du problème, le Canada n’a pas promulgué de loi visant à dissuader efficacement les auteurs d’enregistrements illégaux. En vertu du droit en vigueur au Canada sur le droit d’auteur, des éléments de preuve doivent permettre de démontrer que la copie du film a été enregistrée sur caméscope à des fins commerciales. Les professionnels de l’enregistrement illégal le savent très bien et prétendent tout simplement avoir fait une copie pour leur usage personnel. Les agents d’application de la loi appelés par des employés de cinéma qui surprennent des personnes procédant à un enregistrement sur caméscope ne peuvent qu’invoquer le fait qu’aucune disposition précise interdisant l’enregistrement par caméscope ne figure dans le Code criminel.
     Non inquiétés par les agents d’application de la loi, les auteurs d’enregistrement poursuivent leurs activités. Ils constituent une menace pour les employés de cinéma, et l’augmentation constante de leurs actes est préoccupante. Les Associations des propriétaires de cinémas du Canada s’inquiètent pour les plus de 17 000 employés de cinémas au Canada qui doivent généralement confronter ces malfaiteurs sans l’intervention d’agents d’application de la loi, ce qui pose évidemment un gros problème. C’est la raison pour laquelle les Associations des propriétaires de cinémas du Canada, tous les membres des principaux syndicats et confréries et les distributeurs canadiens se joignent à nous pour demander au gouvernement de prendre des dispositions afin de modifier le Code criminel et d’y inclure des dispositions relatives à l’enregistrement de films sur caméscope.
     Concernant les mesures que nous prenons dans notre industrie, nous consacrons des ressources importantes à des initiatives d’information, de technologie, de sécurité et de formation pour lutter contre ce problème. Mais nous n’y arriverons pas sans l’existence de lois dissuasives qui garantissent que les autorités puissent prendre des mesures efficaces pour mettre fin au vol de films et qui envoient le signal clair que les activités criminelles ne sont pas tolérées au Canada.
    Merci, monsieur le président.
(1550)
    Merci, monsieur Frith.
     Écoutons maintenant M. Lipkus, si vous voulez bien.
    Je vous remercie monsieur le président, mesdames, messieurs les députés.

[Français]

    Je vous remercie de me donner l'occasion de témoigner devant votre comité. J'apprécie grandement d'avoir été invité à vous donner mon point de vue sur le problème de la contrefaçon et du piratage.

[Traduction]

     En plus d’être un membre-fondateur du Réseau anti-contrefaçon canadien, je suis avocat en exercice privé depuis 26 ans. L’intégralité de mon activité consiste à traiter plusieurs centaines de dossiers de contrefaçon par an dans tout le Canada pour plus de 75 marques et fabricants différents. Dans tous ces dossiers, il est rare que je ne puisse pas trouver de produits de contrefaçon dans un domaine précis.
     Si je suis ici aujourd’hui, c’est pour vous expliquer que j’ai toujours et immanquablement trouvé, et c’est toujours le cas aujourd’hui, des produits de contrefaçon dans presque tous les grands mails et centres commerciaux du Canada. On en trouve tous les ans dans de nombreux magasins de détail partout au Canada, et quand je dis nombreux, je veux dire des centaines.
     J’ai participé à des descentes dans des usines de fabrication au Canada prises en flagrant délit de fabrication de vêtements, de batteries de cellulaires et d’accessoires.
     J’ai participé à une descente dans une unité de distribution au Canada qui importait pour des centaines de milliers de dollars de cartouches à jet d’encre et d’emballages de contrefaçon séparés, et qui les assemblait pour les vendre sur le marché canadien.
     Récemment, nous avons saisi de grandes quantités de casques d’écoute pour téléphones cellulaires chez un importateur de casques de contrefaçon Bluetooth qui importait les emballages à part. Ces produits étaient destinés à être distribués par Internet au Canada, dans des entreprises canadiennes. Depuis la fin du mois de novembre de l’année dernière, j’ai personnellement ouvert plus de 50 nouveaux dossiers de contrefaçon de casques d’écoute pour téléphones cellulaires. Ces produits ne sont pas approuvés et ne sont pas fabriqués avec les matériaux requis.
     Un grand nombre de contrefacteurs et de pirates ne négocient qu’en argent liquide. Nous avons souvent affaire à eux, et j’ai toutes les raisons de croire qu’ils ne déclarent pas leurs revenus à l’Agence du revenu du Canada.
     Voici rapidement quelques exemples.
     Au cours des deux dernières années, je me suis rendu à plusieurs reprises au Richmond Night Market à Richmond, en C.-B., accompagné de nos équipes de lutte contre la contrefaçon, et de membres de la GRC et de Santé Canada. Chaque fois, parmi les centaines d’établissements présents, nous en avons repéré plus de 60 qui vendaient des produits de contrefaçon, dont la liste vous a déjà été énumérée : piles, appareils, cartouches à jet d’encre, produits électriques, bijoux, lunettes de soleil. Même à une quinzaine de personnes, nous n’avons jamais pu épingler plus de 10 p. 100 à 15 p. 100 des marchands, parce qu’ils prennent la fuite dès qu’ils nous repèrent.
     Le marché de Richmond exige de tout marchand qu’il possède également un magasin de détail à Richmond pour avoir un autre point de vente. À Richmond et à Burnaby, en C.-B., on a repéré des douzaines d’endroits à l’arrière des magasins qui ont pignon sur rue où sont écoulées de grandes quantités d’articles de luxe. Il faut connaître quelqu’un pour y accéder.
     Je suis appelé plusieurs fois par an par des membres de la GRC et de l’ASFC. Ils m’avertissent qu’ils ne se sont pas opposés à l’entrée d’une expédition au Canada alors qu’ils savaient parfaitement qu’il s’agissait de produits de contrefaçon. Plusieurs fois par an, la police ou les autorités me disent que, même s’ils ont détecté l’importation de produits de contrefaçon au Canada, ils décident de ne pas engager de poursuites, soit parce que les produits sont protégés par une marque de fabrique mais pas par le droit d’auteur, soit, et c’est le cas le plus fréquent, parce qu’ils ne disposent pas des ressources suffisantes pour intervenir.
     J’ai vu de nombreux cas où les propriétaires de marque n’ont pas été officiellement avisés du nom des importateurs ou des exportateurs. Ils ne peuvent donc pas, tant que les autorités ne saisissent pas la marchandise, suivre la piste des produits dans le réseau de distribution. J’ai vu très souvent des expéditions admises au Canada, fractionnées puis renvoyées aux États-Unis.
     Tant qu’aucune enquête n’est lancée, comment le propriétaire d’une marque pourrait-il savoir qu’il est victime du crime organisé? Nous n’avons pas accès à la base de données qui répertorie les criminels. La police y a accès, mais si elle ne partage pas ce type d’information, nous n’avons aucun moyen de le savoir. Cependant, je peux vous dire que dans de nombreux cas — des dizaines — la police m’a personnellement prévenu que le dossier sur lequel j’étais en train de travailler concernait des membres du crime organisé.
     Je dirige des séances de formation et je donne des conférences sur la lutte contre la contrefaçon depuis bientôt 12 ans. Des représentants de l’Agence du revenu du Canada y assistent régulièrement et se réjouissent du fait qu’on leur transmette ces cas. Mais de nombreux procureurs de la Couronne et agents des douanes canadiennes brillent par leur absence.
     Dans un endroit appelé le Pacific Mall, j’ai récemment repéré plus de 50 établissements vendant des produits de contrefaçon divers. Chaque fois que nous y faisons une descente et que nous pénétrons dans le premier établissement, ils ferment tous boutique. J’ai essayé de faire des achats avec ma carte Interac ou ma carte de crédit, mais ils refusent et n’acceptent que de l’argent comptant. Un informateur m’a dit qu’un marchand de l’un des marchés aux puces de la région de Toronto — à Saint-Jacobs il me semble — engrange de 5 000 $ à 7 000 $ d’argent liquide par semaine.
(1555)
     Quand on me demande où on peut trouver des produits de contrefaçon au Canada, ma réponse tient en un seul mot : partout. Quand on me demande quelle est l’ampleur du problème, je réponds qu’il est bien plus grand qu’on ne l’imagine. Quand on me demande ce qu’on fait pour lutter contre le problème, je réponds qu’on n’en fait pas assez.
     Je vous remercie de m’avoir donné cette occasion de m’exprimer devant vous.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur Lipkus.
     Écoutons, pour terminer, M. Henderson.
    Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les députés.
     Je m’appelle Graham Henderson. Je suis le président de l’Association de l’industrie canadienne de l’enregistrement et je fais partie du comité directeur du Réseau anti-contrefaçon canadien. C’est en son nom que j’ai le plaisir de présenter mes commentaires sur les recommandations du Réseau anti-contrefaçon canadien.
     Je dois dire tout de suite que les solutions ne sont pas compliquées et qu’elles n’ont pas besoin d’être onéreuses. D’autres pays s’en sont déjà rendu compte. Il existe des feuilles de route.
     À de nombreux égards, nous sommes loin derrière nos partenaires commerciaux. Il suffit de consulter les politiques d’application de la loi relative à la propriété intellectuelle de l’Europe, des États-Unis et du Japon, et de regarder la législation type promulguée par l’Organisation mondiale des douanes, dont le Canada est membre.
     Si vous me le permettez, je voudrais attirer l’attention du comité sur les documents que le Réseau anti-contrefaçon canadien a préparé à votre attention. Le premier est un communiqué de presse qui stipule qu’une enquête CACN/Pollara a conclu que 39 p. 100 des Canadiens ont déjà acheté, sciemment ou non, des produits de contrefaçon. Aux États-Unis, ce pourcentage est de 13 p. 100, trois fois moins qu’au Canada. Le deuxième document énumère les questions qui ont été posées dans le cadre de cette enquête.
     Le troisième document est une étude de cas, une sorte de conte qui se conclue par une morale et qui explique combien la situation est déplorable au Canada. Le texte porte sur un auteur de DVD de contrefaçon de Vancouver qui a fait fi de la loi pendant des années. Maintes fois des poursuites ont été engagées contre lui, maintes fois il a été condamné, et lors de sa dernière inculpation, il a été condamné à une amende de 5 000 $. Ça vaut le coup d’être lu.
     Nous avons également joint une présentation en PowerPoint, j’ai vu certains d’entre vous la parcourir. Nous l’avons jointe pour montrer l’incroyable variété de produits que l’on trouve au Canada sous forme de contrefaçons.
     J’ai également joint un discours que j’ai prononcé devant le Economic Club of Toronto et qui servira de résumé au plan d’action dont je vais vous parler un instant.
     Enfin, et peut-être le document le plus important de tous, vous trouverez le document En route pour le changement du Réseau anti-contrefaçon canadien. Il s’agit du sommaire accompagné dans les dernières pages — et c’est le plus important — de nos recommandations.
     Nous vous avons également remis un extrait de ce plan d’action qui établit clairement un lien entre ces activités et le crime organisé. Je pourrais ajouter que ce document de deux pages contredit carrément les propos d’un précédent témoin. Le crime organisé est à l’origine de ces actes, et vous verrez ici que le SCRS, Interpol et la GRC s’accordent à dire que c’est le cas.
     Que devons-nous faire exactement? Et bien, comme je vous disais, le Réseau anti-contrefaçon canadien a dressé une liste détaillée de recommandations, dont vous possédez un exemplaire. Il m’est impossible de toutes les passer en revue de façon approfondie, et je vais donc me limiter à quelques-unes.
     Pour pallier le manque de ressources consacrées à la lutte contre la contrefaçon au niveau de la police et des poursuites, et combler l’insuffisance des sanctions pénales, nous devons, premièrement, faire en sorte que la GRC et le ministère de la Justice disposent des ressources financières et humaines nécessaires pour pouvoir lutter contre la contrefaçon; et deuxièmement, consacrer les fonds nécessaires à la mise sur pied d’une équipe spéciale de lutte contre le crime contre la propriété intellectuelle composée de policiers, de douaniers et de procureurs fédéraux, qui orientera et coordonnera l’application de la loi relative aux crimes contre la propriété intellectuelle. Ce type d’équipe existe dans beaucoup d’autres pays.
     Pour actualiser la législation relative aux crimes contre la propriété intellectuelle, nous devons, premièrement, promulguer une loi qui définisse clairement la contrefaçon de marques comme une infraction criminelle précise en vertu de la Loi sur les marques de commerce; et deuxièmement, promulguer une loi pour que l’enregistrement sur caméscope dans les cinémas soit une infraction criminelle. Pour investir les douaniers de pouvoirs efficaces, nous devons mettre en vigueur une législation qui interdise clairement l’importation de marchandises de contrefaçon. Et nous devons investir l’ASFC des pouvoirs exprès qui lui manquent pour retenir, cibler, saisir et détruire les produits de contrefaçon de sa propre initiative.
     Enfin, et c’est peut-être la recommandation la plus importante — quoiqu’elles le soient toutes — il faut renforcer le statut de la propriété intellectuelle dans ce pays. Pour que le Canada soit une nation plus prospère et plus compétitive, nous devons suivre la voie d’autres nations et établir des conseils fédéraux et provinciaux de coordination de la propriété intellectuelle avec participation ministérielle. Ce type de structure existe au Brésil, aux États-Unis, en Angleterre et au Japon.
     Nous pouvons mettre ces mesures en vigueur. Vous n’avez entendu que des fonctionnaires vous dire combien c’était difficile à mettre en place vu la quantité d’obstacles à franchir. Je crois qu’on a battu le record du monde de l’emploi du mot « complexe ». Nous sommes venus, avec toutes les autres parties prenantes, témoigner devant vous aujourd’hui pour vous dire tout simplement que ce n’est pas si difficile que cela.
(1600)
    Il y a cinq mois, le réseau canadien de lutte contre la contrefaçon entamait une première étude importante sur les répercussions économiques de la contrefaçon, sur les lacunes des lois et des règlements qui sont à l’origine du problème, ainsi que sur le lien étroit entre les économies innovatrices et la protection rigoureuse de la propriété intellectuelle. Par ailleurs, l’étude vise les pratiques exemplaires employées à l’échelle planétaire. Le rapport officiel, qui a été diffusé aujourd’hui, est en train d’être traduit. Dès que la version française sera prête, elle sera fournie au comité.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur Henderson.
    Passons immédiatement aux questions des membres. Nous avons beaucoup de témoins — vous êtes six — et les membres auront cinq ou six minutes pour poser toutes leurs questions. Essayez donc de répondre le plus brièvement possible. Si un membre vous pose directement une question, libre à vous d’y répondre. Si vous voulez répondre à une question posée à un autre témoin, faites-moi signe et j’essaierai de vous donner la parole s’il reste assez de temps.
    Commençons d’abord par M. McTeague. Vous avez six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
     Je veux d’abord remercier tous les témoins de leur présence. Vous complétez très bien le travail dont a entendu parler le comité, comme l’a dit M. Myers, relativement à notre rapport sur l’industrie. C’était unanime. Je crois que nous comprenons la question. Nous l’avons saisie.
    Il y a des gens qui estiment que la meilleure approche, qui complète peut-être les problèmes plutôt complexes auxquels le groupe de travail semble se heurter, c’est de—Un témoin nous a dit la semaine dernière que nous devrions étudier la question plus à fond, que nous devrions charger un comité de préparer un rapport, que le gouvernement ne devrait exécuter aucune mesure et que, en fait, nous devrions recommencer à zéro.
    Monsieur Frith, en tant qu’ex-membre de ce comité et d’autres comités, vous pourrez sans doute confirmer mon opinion. Au cours de mes 14 ans comme député, je n’ai jamais vu une situation où deux comités étudiant la même question simultanément ont tiré sensiblement les mêmes conclusions.
    Monsieur Henderson, laissez-moi vous interroger d’abord. Pouvez-vous nous donner une idée de ce que cela signifierait si nous recommencions à zéro, c’est-à-dire entamer un rapport, entamer une étude? Qu’est-ce que cela fait à la réputation internationale du Canada, sans compter au problème de la contrefaçon au Canada?
(1605)
    Je pense que cela montre simplement que nous ne sommes pas disposés à nous attaquer à un problème qui saute aux yeux. L’idée que nous n’avons pas assez étudié la question est fausse. Non seulement a-t-elle été l’objet d’une étude approfondie au Canada — et nous avons produit un rapport qui, soit dit en passant, a été réalisé en six mois et non en six ans —, mais elle a été étudiée à fond tant au Canada qu’à l’échelle mondiale.
     Par exemple, sur le plan du lien avec le crime organisé, le Service canadien de renseignements criminels a fait observer, dans ses rapports annuels de 2005 et 2006, que la contrefaçon était liée au crime organisé. La GRC a dit la même chose dans son rapport sur les crimes liés aux DPI. Par ailleurs, dans son témoignage devant le comité de la sécurité, Mike Cabana a dit :
Nos rapports de renseignements stratégiques nous révèlent que les marges de profit sont très considérables et que les risques de se faire prendre […] sont très faibles. Si faibles, en fait, qu’au Canada, pratiquement tous les grands groupes du crime organisé et même des groupes de terroristes, comme l’a révélé un dossier particulier, se livrent très activement à la fabrication, à l’importation et à la distribution de marchandises contrefaites.
    Je ne comprends pas qu’il reste encore des études à faire.
    Pour ce qui est des pertes financières, vous l’avez entendu maintes fois de la bouche des témoins, aujourd’hui et la semaine dernière. J’ai devant moi un rapport d’étude qui a été préparé par le comté de Los Angeles intitulé A False Bargain—The Los Angeles County Economic Consequences of Counterfeit Product; on le trouve sur le Web à l’adresse www.laedc.org/consulting/projects/2007_piracy-study.pdf. Pensons-nous vraiment que nous pourrons obtenir des résultats différents, que, d’une façon ou d’une autre, le Canada ne subira aucune répercussion économique grave? Je ne pense pas. Nos lois sont pires.
     Je suis donc d’accord avec ce que M. Myers a dit plus tôt aujourd’hui. Nous avons étudié la question. Ne rien faire ne fera qu’aggraver le problème.
    Monsieur Henderson, monsieur Lipkus et monsieur Hilliard, vous avez tous proposé des remèdes précis relativement au Code criminel.
    Monsieur Lipkus, vous faites de l’excellent travail dans ce domaine depuis plusieurs années. J’ai assisté à votre dernière séance à Markham, tout près du Pacific Mall, et je connais très bien la situation là-bas.
    Permettez-moi, monsieur, compte tenu de certaines des options qui sont disponibles, de vous interroger sur la réputation actuelle du Canada à l’étranger — M. Frith et M. Henderson sont peut-être plus disposés à répondre — relativement à notre incapacité à combattre le problème lié aux caméscopes. Qu’est-ce que cela signifie pour l’avenir des films au Canada? Qu’est-ce que cela signifie pour la capacité du Canada à continuer d’être un fier membre de la communauté commerçante internationale?
    Je peux vous dire maintenant, monsieur McTeague, qu’un studio en particulier a déjà pris des mesures en retirant à certains cinémas dans certaines villes canadiennes le droit de projeter les premières exclusivités d’un film. Cela ne signifie pas qu’un produit n’est pas disponible dans la grande région de Montréal, mais que des salles précises ont des problèmes précis. On leur a retiré le produit. Espérons que le problème ne se répandra pas ailleurs.
    De toute évidence, les studios de Hollywood sont très préoccupés par le fait que leurs films sont distribués dans les rues de quelque 45 pays moins de 18 heures après avoir pris l’affiche au Canada. Cela a d’importantes répercussions sur leur bilan et, laissez-moi vous dire, ils ne prennent pas ça à la légère.
    Je dois vous dire, monsieur McTeague, que j’ai moi aussi assisté à de nombreuses conférences internationales sur la lutte contre la contrefaçon, notamment la récente conférence mondiale et les conférences de la International AntiCounterfeiting Coalition, et des gens d’autres pays me demandent régulièrement: « Qu’est-ce qui ne va pas au Canada? », « Que se passe-t-il? » Cela n’a aucun sens. Ils ne comprennent pas pourquoi un pays aussi bien vu peut avoir une mauvaise réputation dans ce dossier.
    Monsieur Lipkus, permettez-moi de vous demander ceci. C’était intéressant. Nous avons rencontré des représentants du département de la Sécurité intérieure à la conférence de Markham. Quelqu’un m’a dit que les Américains sont si avancés, qu’en fait — et d’autres pays ont fait la même chose — , ils ont envoyé des représentants dans les pays où la contrefaçon risque de commencer.
    Pouvez-vous expliquer brièvement au comité ce que le Canada pourrait faire pour rattraper le reste de la planète au chapitre de la capacité à empêcher les produits contrefaits de quitter les autres pays?
(1610)
    Nous pouvons notamment tenir un registre de nos marques de commerce et de nos droits d’auteur. Cela ne se fait pas actuellement au Canada. Les agents des douanes ne connaissent même pas nos droits d’auteur ni nos marques de commerce. Dans certains pays, les douanes ont un registre, ce qui leur permet de saisir elles-mêmes les produits contrefaits. Elles n’ont pas besoin d’appeler la police. Elles n’ont pas besoin d’appeler des agents d’application de la loi. Elles peuvent les saisir de leur propre initiative, et le problème est éliminé sur-le-champ.
    Merci, monsieur McTeague.
    C’est maintenant au tour de M. Vincent.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue.
     Au sujet de la propriété intellectuelle et de la contrefaçon, d'autres témoins nous ont dit qu'il y avait des brevets, mais qu'il en coûtait très cher de défendre ceux-ci devant les tribunaux, compte tenu des frais d'avocat et de la longueur des délais nécessaires avant d'arriver à quelque chose de concret.
    Avez-vous une idée de la façon dont on pourrait atténuer les délais et établir une procédure nettement moins dispendieuse? Avez-vous des suggestions à nous faire à ce sujet?
    Par ailleurs, monsieur Myers, en tant que premier vice-président de l'organisme Manufacturiers et exportateurs du Canada, voulez-vous nous dire à combien se chiffrent d'après vous, en termes de dollars perdus par année, les vols reliés à la contrefaçon au Canada?

[Traduction]

    J’aimerais pouvoir vous expliquer toute l’ampleur de cette activité, mais cela est extrêmement difficile, outre essayer de calculer approximativement les répercussions économiques. Si nous connaissions toute l’ampleur de l’activité, nous aurions une longueur d’avance, en ce sens que nous pourrions prendre note d’au moins une partie des activités de contrefaçon beaucoup mieux que nous ne le faisons actuellement. Mais puisque nous n’appliquons pas les règlements, nous n’avons pas vraiment une bonne idée de l’ampleur du problème au Canada. Et on ne parle là que du marché.
    Si on envisage les incidences sociales et économiques des pertes d’investissements et d’activités d’innovation, ainsi que les préoccupations en matière d’application rigoureuse de la loi soulevées à la frontière en raison de l’inquiétude relative à nos frontières qui ne sont pas sûres et de l’éventuel afflux de produits contrefaits, surtout en provenance de l’Asie et passant par le Canada à destination des États-Unis, aucune importante analyse économique n’a été faite de toutes ces incidences, sauf celle du RCLS. Je crois que c’est l’analyse la plus fiable qui ait été faite jusqu’à présent au Canada.
    Au chapitre des recommandations — et j’appuie encore une fois les paroles de M. Henderson — je pense que la première chose à faire est d’accorder la priorité à la question. Si je ne m’abuse, entre 1999 et 2004, les agents de douane américains ont procédé à approximativement 36 000 saisies. Au cours de la même période, les agents de douane canadiens ont fait six saisies. Même sur une échelle de un à dix, nous n’arrivons pas à la cheville des Américains.
    Si les législateurs et nos agences de services frontaliers n’y accordent pas la priorité et que nous n’y affectons pas les fonds nécessaires, nous n’y attachons pas suffisamment d’importance. Je crois que c’est probablement là la première étape. Certes, les recommandations formulées par le RCLS sont beaucoup plus précises et détaillées.
    M. Lipkus voulait faire une observation.
    J’aimerais ajouter que d’après mon expérience, la contrefaçon est une activité qui connaît une croissance exponentielle. Pour ce qui est des commerces dans lesquels j’ai fait des descentes il y a trois ou quatre ans et qui vendaient peut-être uniquement des sacoches de luxe, aujourd’hui ils vendent peut-être encore des sacoches, mais ils vendent aussi des briquets, des articles de fantaisie et des jouets. Les contrefacteurs ne se spécialisent pas dans un produit seulement, ils se spécialisent dans la cupidité.
(1615)

[Français]

    Mais selon votre expérience, quelle mesure contribuerait le plus à enrayer la contrefaçon? Que pouvez-vous suggérer au comité pour que celui-ci puisse émettre une recommandation dans le cadre d'un rapport?

[Traduction]

    Monsieur Henderson.
    D’après moi, la réponse à cela est d’accepter notre rapport. Il a été mis aux oubliettes. Les recommandations ne sont pas trop complexes, elles vont même droit au but. Certaines pourraient être mises en œuvre en adoptant un règlement. Il ne s’agit pas de revoir une loi au complet, c’est très simple.
    Je tiens également à ajouter qu’en plus d’accepter les recommandations, il faut faire un pas de plus, c’est-à-dire sensibiliser.
    Les Français savent depuis longtemps qu’il y a un problème, et ils y travaillent très activement. En mars, une initiative a été annoncée par — et c’est intéressant de voir les responsables — le ministère de l’Économie, des Finances et de l’Industrie, en collaboration avec le Comité national anti-contrefaçon. Ils ont ça, mais pas nous. L’Institut national de la propriété intellectuelle a lancé une campagne que l’on peut voir sur le Web à l’adresse http://www.non-merci.com. C’est plutôt hallucinant de voir ce qui arrive quand un gouvernement accorde la priorité à cette question et agit en conséquence.
    Monsieur le président, permettez-moi de vous donner un exemple. Avant l’entrée en vigueur de la loi sur les produits de la criminalité, les industries des droits d’auteur étaient exemptées. Voilà un point. Il n’est pas nécessaire de modifier une loi, mais plutôt d’adopter un décret en conseil. Nous ne visons pas à protéger… Nous voulons qu’au Pacific Mall ou ailleurs, la police puisse saisir l’auto du propriétaire, sa maison, son argent. On n’a pas besoin de modifier une loi pour cela, mais d’adopter un décret.
    D’accord, monsieur Lipkus, mais brièvement.
    À mon avis, si nous avons les bonnes lois et — pour renchérir sur ce que vient de dire M. Frith — si le gouvernement autorise des saisies en vertu de la loi sur les produits de la criminalité, il pourra récupérer peut-être plus que le coût des ressources requises pour effectuer une bonne partie de ce travail.
    Merci.
    Je tiens à rappeler aux témoins et aux membres qui ont un BlackBerry de le tenir le plus loin possible du microphone, car cela dérange parfois et cela dérange certainement les services d’interprétation.
     Passons maintenant la parole à M. Carrie, pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Frith, j’ai une petite question pour vous. Nous venons juste de voir Spider-Man 3, et j’ai entendu dire que deux jours avant la sortie du film il y avait une copie ou un faux qui circulait à Pékin. Vous venez de mentionner comment on a procédé avec tous ces filigranes, tous ces trucs, tout au long de la projection en salle; alors, comment une telle chose a pu se produire?
    Le Globe and Mail a fait un reportage là-dessus il y a une semaine. On m’a dit que c’était inexact.
     Et ça l’était?
    Oui, parce que la seule possibilité pour qu’une telle chose se produise c’est qu’il y ait une brèche dans le dispositif de sécurité avant qu’on commence la projection du film en salle de cinéma. Il y a eu une enquête là-dessus et on a trouvé que le reportage qui a été publié dans le Globe and Mail était erroné.
     Un faux reportage dans le Globe and Mail?
     Lorsqu’on a vérifié ce qui s’est passé, on a trouvé qu’ils avaient en main la maquette de Spider-Man 3, mais c’est plutôt sur le Spider-Man 2 qu’ils ont travaillé. Voilà ce qui s’est passé. Ainsi, les loups se mangent entre eux.
    Bien, merci! Il n’y a pas de doute, vous avez rendu tout cela clair pour les dossiers.
     J’avais aussi une question particulière pour Microsoft. Il m’a semblé comprendre que vous venez tout juste d’avoir gain de cause dans une affaire — je crois de 500 000 $ — et j’aimerais en savoir plus. Pouvez-vous nous en dire un peu plus? S’agissait-il de Windows 95 ou de Windows 98? Combien de temps vous a-t-il fallu devant les tribunaux pour avoir gain de cause? Les affaires de ce genre sont-elles courantes pour vous?
    Pour répondre à votre dernière question, oui, nous intentons probablement entre 10 et 20 procès contre le piratage par an. Nous avons baptisé Interplus celui auquel vous faites allusion en particulier. Cela a été une assez grande réalisation pour nous, en ce sens qu'il nous a fallu, je crois, six ans pour porter cette affaire en cour. Le procès a duré 10 jours. Le juge nous a accordé le plus grand montant de dommages intérêts prévu par la Loi sur le droit d’auteur. Par ailleurs, en plus des sociétés mises en cause, deux des acteurs principaux ont été personnellement reconnus redevables envers nous.
     Ce que vous devriez savoir c’est que les dommages intérêts importants accordés ne sont rien comparés à ce que tout cela nous a coûté. Or, les parties défenderesses ont interjeté appel, ce qui signifie que nous allons supporter des frais d’appel et je ne serais pas surpris si à la fin de tout cela, nous nous retrouvons simplement avec une clique d'individus et de sociétés en faillite.
(1620)
    Pourriez-vous avoir des chiffres précis des montants réels que vous dépensez annuellement pour combattre ce fléau?
    Au Canada, cela nous coûte plus d’un million de dollars par an.
    Pouvez-vous nous expliquer en quoi consistent les recommandations de votre politique en matière d’étiquettes et de marques de fabrique et comment cela peut profiter à Microsoft?
    Les recommandations de notre politique en matière d’étiquettes?
    D’étiquettes et de marques de fabrique.
    Tous ceux d’entre vous qui possèdent un ordinateur portable ont probablement constaté en dessous l’étiquette du certificat d’authenticité. Ce à quoi on assiste aujourd’hui c’est qu’on tend à s’éloigner de la contrefaçon haut de gamme des produits tels que Windows ou Office pour se concentrer sur les gens qui distribuent l’étiquette. Ils procèdent en prenant des articles bas de gamme et bon marché, qu’ils placent dans un ordinateur et ils plaquent au bas du produit l’étiquette pour l’authentifier.
     Le problème c’est que le l’étiquette indique au consommateur qu’il a à faire à un produit légitime, qu’il s’agit d’un bon modèle et qu’il en tirera tous les avantages d’un logiciel authentique. Or, en réalité, il se trompe.
    Notre préoccupation vient du fait qu’il est très difficile de s’attaquer aux personnes qui distribuent juste ces petites étiquettes. Et ce problème n’est pas seulement celui de Microsoft. Il touche la plupart des sociétés qui fabriquent les équipements sportifs aux États-Unis, et voilà pourquoi elles se sont organisées pour faire pression sur le Congrès qui a voté des dispositions législatives semblables à celles que nous réclamons ici pour combattre le même fléau.
    J’ai une question pour M. Myers. Étant donné que l’essentiel des échanges commerciaux du Canada se fait avec les États-Unis à l’heure actuelle, peut-être puis je poser cette question à quelques-uns d’entre vous.
     A en juger par certains témoignages que nous avons entendus, il ressort que nous n’avons pas affaire réellement à un très gros problème, que les milieux du crime organisé n’y sont pas impliqués. Il semble cependant que tous les autres avis indiquent qu’il s’agit d’un problème important. Si nous ne faisons rien, si nous ne réglons pas ce problème qui concerne nos importations et nos exportations avec les États-Unis, comment seront nos relations avec les États-Unis au cours des prochaines années?
     Il s’agit à mon avis d’un problème très important. C’est avec les États-Unis que nous entretenons l’essentiel de nos relations commerciales et, en fait, de nos liens économiques. C’est donc un problème que le Canada figure depuis si longtemps sur la liste de veille du Représentant au commerce des États-Unis (USTR) en tant qu'un des principaux exportateurs des produits piratés qui sont fabriqués ou transbordés ici.
    À mon avis, le véritable danger c’est que si nous ne pouvons pas rendre nos frontières sûres, d’autres vont se charger de le faire à notre place. Et si la frontière n’est pas fermée à certains produits en particulier, les entreprises vont faire face à des retards de plus en plus importants pour exporter leurs lignes de produits vers les États-Unis. Nous assistons d’ores et déjà à un durcissement des formalités à la frontière: la réglementation et les inspections à la frontière se traduisent pour nous par des retards de plus en plus nombreux et des dépenses de plus en plus élevées. Ce fardeau est déjà très onéreux pour les exportateurs canadiens.
    Le problème réel c’est que si les États-Unis décident d’appliquer à la frontière leurs mesures de restrictions contre les produits de contrefaçon provenant du Canada, ces coûts vont augmenter considérablement et entraîner naturellement des conséquences graves pour les investissements au Canada.
    M. Henderson voulait dire quelque chose.
    Je voulais juste ajouter que nous savons que les droits de propriété intellectuelle sont devenus un des plus grands problèmes dans les relations commerciales entre la Canada et les États-Unis. Ceux d’entre nous qui font des affaires trouvent cela très embarrassant. Nous sommes une nation très avancée sur le plan démocratique. Ça n’a pas de sens. Quand on examine ces recommandations, on se rend compte qu’il s’agit des idées très simples. Je pense qu’il y va de notre réputation vis-à-vis non seulement des autres gouvernements mais aussi des autres peuples. Ça dépasse leur entendement.
    J’allais demander à M. Webster de nous faire connaître son point de vue.
     Vous avez été quelque peu silencieux alors que du point de vue des affaires —
    Du point de vue des affaires, j'ai l'habitude de vivre cela tout le temps. Je n’y puis pas grand-chose, mais je pense que nous aurons de sérieux problèmes avec les États-Unis. Il y a de cela un mois environ, un de nos clients m’a demandé d’enregistrer ses marques de fabrique auprès de nos autorités frontalières afin de permettre la saisie des marchandises quand elles entrent. Je lui ai écrit pour expliquer que nous ne pouvions absolument rien pour lui, étant donné que nous n’avions aucun mécanisme d’application.
    J’ai rencontré un camarade la semaine dernière à la réunion de l’Association internationale des marques et il a été totalement abasourdi d’entendre que nous n’avions aucun mécanisme d’application à nos frontières.
    Je voudrais ajouter autre chose afin de vous permettre de voir les choses sous un autre angle. J’ai des relations d’affaires avec une société étrangère spécialisée dans les machines à sous. Ce groupe est spécialisé dans la technologie des jeux et ses machines sont utilisées dans les casinos ici au Canada. Ces dirigeants m’ont dit que les machines à sous bas de gamme ne constituaient pas un problème pour eux au Canada parce que notre industrie était hautement réglementée. Par contre, ces machines leur causent d’énormes problèmes dans des pays d’Amérique du Sud comme la Colombie, le Pérou, l’Argentine et même dans des anciennes républiques soviétiques d’Europe de l’Est.
    Ils n’ont cependant pas perdu le Canada de vue; en effet, ils ont découvert en Colombie des machines bas de gamme vendues sur le marché par les cartels de la drogue. Quand ils ont examiné ces machines, ils ont trouvé l’endroit où étaient fabriquées leurs cartes de circuits imprimés. Vous avez deviné qu’elles sont fabriquées dans ce pays, et vous vous demandez comment ces cartes de circuits imprimés bas de gamme se retrouvent en Colombie. Il doit certainement y avoir un lien avec le crime organisé.
    Cela m’amène à spéculer. Peut-être est-ce là un moyen de transférer au Canada l’argent de la drogue. J’en parle sans preuve, mais je ne peux m’empêcher de me demander pourquoi nous trouvons en Colombie des mémoires EPROM fabriqués au Canada.
(1625)
    Je vous remercie, monsieur Webster.
     Je regrette, mais le délai imparti est dépassé. Nous allons, s’il vous plaît, passer la parole à M. Masse.
    Merci, monsieur le président.
     Merci pour la délégation.
    En ce qui concerne la question de la provenance de la marchandise, par quels ports est-ce qu’elle entre? Bien sûr, je représente la circonscription de Windsor-Ouest, la frontière la plus active en Amérique du Nord, mais cela implique aussi des marchandises provenant des États-Unis. Quel pourcentage de marchandises provient des États-Unis? Quelle quantité vient de la côte est? Qu’est-ce qui entre par la côte ouest? Qu’est-ce qui vient par avion? Nous devrions être capables de chiffrer tout cela, à moins que cela vienne des États-Unis.
    Monsieur Lipkus.
     En octobre 2000, je crois, il y a eu une modification de la législation et les douaniers ont commencé à contrôler les expéditions. S’ils trouvaient de la marchandise de contrefaçon, ils devaient contacter la GRC. Un agent de renseignement régional devait appeler la GRC par téléphone. Si la GRC acceptait de se charger de l’affaire, alors la douane procédait à la saisie de la marchandise.
    Je fais ce travail depuis 1985 dans le service de la lutte contre la contrefaçon. Jusqu’alors, nous n’avions jamais saisi un conteneur hors de Vancouver. Nous avons saisi environ 10 conteneurs en moins de six mois. Il nous a manqué de la place pour entreposer la marchandise; pendant des années il n’y a plus eu de saisies du niveau de conteneur. Cependant quand nous avons arrêté, après six mois, nous avons commencé à voir la contrefaçon entrer en passant par Lethbridge en Alberta. Ainsi, si vous sévissez à un endroit, cela entre par un autre. Pendant une certaine période, lorsque nous sommes devenus plus actifs dans la région de Toronto, nous avons commencé à constater qu’au lieu d'expédier les marchandises par conteneurs, les faussaires procédaient par des envois de 45 kg de marchandises par fret aérien par Toronto ou Montréal. Pourquoi? Parce que les radars ne les détectent pas et les gens ne les attrapent pas.
    Halifax, Montréal, Toronto et Vancouver sont les principales plaques tournantes.
     La marchandise ne provient donc pas des États-Unis, sauf en ce qui concerne l’Alberta, je suppose. Les États-Unis n’auraient pas eu un argument de poids contre nous si la marchandise empruntait un circuit tournant et entrait tantôt par là-bas, tantôt par ici. Nous avons des problèmes à nos frontières, croyez-moi.
    Qu’allons-nous faire? Nous sommes en train de préparer l’accord prochain sur la Porte d’entrée du Pacifique, ce qui signifie plus d'échanges commerciaux particulièrement avec la Corée du Sud et la Chine, et nous ne prenons aucune mesure; que va-t-il se passer si notre politique gouvernementale ne change pas en la matière et que nous élargissons ces avenues qui sont celles qui essentiellement nous causent des problèmes aujourd’hui?
     Ces questions nous interpellent tous.
    De plus en plus de produits contrefaits vont entrer chez nous et nous deviendrons la plaque tournante de la contrefaçon à destination des autres pays. J’ai été témoin de cas où les produits piratés entrent au Canada en provenance de l’Asie, puis repartent vers toutes les destinations dans le monde, parce qu’aujourd’hui avec l’Internet, beaucoup de sites Web se trouvent au Canada et ils vendent dans le monde entier. J’enquête sur un cas où la marchandise n’a en réalité jamais transité par le Canada et se trouve plutôt en attente dans les entrepôts de douanes d’où elle sera expédiée vers une destination quelconque.
    Ce qui se passe ici fait l’affaire de beaucoup de monde à l’extérieur. Si vous étiez un faussaire et que vous êtes au courant qu'au port de Vancouver il n'y avait pas de fouille, de saisie, de détention, de destruction ou toute autre mesure de lutte contre la contrefaçon, parce qu’on ne peut le faire, où enverriez-vous vos marchandises? À Portland? À Seattle? Au port de Los Angeles? Vous pourriez, parce qu'on ne fouille pas systématiquement toutes les marchandises, mais certainement Vancouver serait le premier port auquel vous penseriez et c'est cela qui va nous créer de plus en plus de problèmes avec la communauté internationale.
    Quelqu’un a-t-il une idée du pourcentage du commerce légitime et du commerce illégitime au port de Vancouver?
    Personne ne saurait vous le dire pour la simple et bonne raison qu’il est impossible d’ouvrir toutes les caisses. C’est tout simplement impossible.
    Quelle quantité de drogues est vendue dans l’école secondaire que fréquente votre enfant? Vous ne pouvez pas le savoir. Vous savez qu’il y a un problème, mais de là à quantifier exactement les données…
    Il n’y a que 2 à 3 p. 100 des expéditions qui sont vérifiées, un point c’est tout.
    Les faussaires sont couverts, subtils; ils savent ce que nous vérifions, ils savent où nous regardons et comment y échapper.
    Et ils connaissent les lois mieux que nous.
(1630)
    Un des exemples les plus intéressants, c’est le million de piles avec leur mercure. C’est une illustration parfaite du problème qui se pose. Il ne s’agit pas seulement du problème immédiat créé par l’objet et de la problématique liée à son état de fonctionnement; il y a aussi l'héritage qui en découlera.
    Quelles mesures publiques devrions-nous adopter? Quand je constate tout cela, je commence à réfléchir et à me demander pourquoi nous devons permettre que des piles continuent d’arriver de Chine alors qu’au cours de la même année près d’un million de ces produits ont été introduits dans le pays avec les dangers qu’ils font peser sur nos citoyens et l’empoisonnement qui en résulte pour nos sites de décharges? La moindre trace de mercure est absolument désastreuse. Quelles mesures publiques devrions-nous proposer en matière d’accords commerciaux, étant donné que nous allons bientôt être de plus en plus envahis par ces produits-là?
    Monsieur Henderson.
    Nous pouvons prendre toutes les mesures que nous voulons, mais nous devons savoir que ce ne seront pas les entreprises ayant pignon sur rue en Chine qui nous expédieront ces produits, mais des entités pirates. Il est donc plutôt question de déterminer ce que nous devons demander aux Chinois ou à n’importe quel pays source de faire. Que devons-nous exiger? Avons-nous besoin d’adopter des textes de lois interdisant à certains pays d’exporter chez nous? Devrait-il y avoir ce genre de prohibition? On a déjà évoqué ce genre de traité.
    On pourrait instaurer une sorte d’approbation préalable, si on peut s’exprimer ainsi. On peut définir les produits acceptables et, par voie de conséquence, ceux qui ne le sont pas.
    Juste pour découvrir que les certificats eux-mêmes sont truqués ou contrefaits. C’est un problème terrible.
    Cela me préoccupe. Dès que nous nous mettons à parler de cette manière, cela décourage les gens d’agir, un point c’est tout. Je pense que des mesures publiques doivent constituer une partie des solutions à envisager, de même que les mécanismes d’application de la loi, qui sont d’une grande importance.
     Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Masse.
     Nous allons passer la parole à M. Scott, s’il vous plaît.
    Merci beaucoup.
    Je suis sûr que vous ne pouvez pas répondre avec précision à ces questions que je m’en vais poser, mais je suis convaincu que vous m’apprendrez beaucoup de choses. Quel est le profil des marchandises en question? Celles qui sont importées des États-Unis, celles qui viennent d’ailleurs et celles qui sont exportées; à quoi ressemblent-elles? J’aimerais juste avoir un aperçu visuel de ce qui est fabriqué au Canada, ce qui est importé au Canada, ce qui transborde au Canada et comment ça se passe.
    L’Organisation mondiale des douanes a désigné la Chine, je crois, comme la source de 80 à 90 p. 100 environ des marchandises de contrefaçon. Cela ne veut pas dire que toutes ces marchandises sont fabriquées en Chine, mais plutôt qu’elles en proviennent. Une marchandise peut être originaire d’ailleurs, être embarquée à Hong Kong et se retrouver ici. Vous n’allez pas trouver beaucoup de produits contrefaits qui entrent au Canada avec pour origine ou pour provenance les États-Unis. Croyez-moi, ça se passe plutôt dans l’autre sens.
     De plus en plus, on constate qu’elles sont fabriquées ici. Une des raisons de leur fabrication ici, notamment en ce qui concerne les produits logiciels ou de divertissement, c’est qu'il y a désormais sur place la technologie nécessaire pour faire les fausses copies, en utilisant les graveurs DVD à une grande échelle dans le sous-sol d'un centre commercial. Des centaines de milliers de produits peuvent être fabriqués de cette manière. Les faussaires ne sont donc plus obligés de passer par des processus de fabrication très complexes en Malaisie ou ailleurs avant d’expédier les marchandises ici, bien que cela arrive aussi.
    Vous avez peut-être lu les histoires de Lucky et Flo, les deux chiens noirs labrador capables de renifler la présence de polycarbonate à travers des portes en acier. Avez-vous lu les échos de ces prodiges? Ces deux chiens sont à l’heure actuelle en tournée dans le Sud-Est asiatique où leurs têtes ont été mises à prix. Les faussaires ont mis leurs têtes à prix parce qu’ils se sentent menacés par ces chiens qui sont les seuls au monde capables de renifler la présence de polycarbonate derrière des portes en acier.
     Mais ils opèrent ici en très grand nombre et de manière très subtile.
    Les deux chiens en question ont été dressés par la Motion Pictures Association of America. Je voulais seulement que ce soit mentionné dans le dossier.
    Je crois qu'il faut prendre bonne note de ce que vient de dire Graham. Il y a trois ou quatre ans, les produits DVD piratés étaient importés. Aujourd’hui les choses ont complètement changé. Ils sont gravés, comme l’a dit M. Henderson, dans les recoins des centres commerciaux à Toronto, Montréal, etc. Cela complique beaucoup plus les choses.
    J'ignore quel pourcentage des produits viennent d'Asie, mais nous savons que c'est le principal problème. Aucun pays, en fait, n'est à l'abri de ces produits manufacturés qui entrent au Canada. Par exemple, nous avons envoyé quelqu'un au marché aux puces de St-Eustache, il y a quelques semaines, et on m'a rapporté que plus de 8 000 vêtements contrefaits y avaient été dénombrés — 8 000. Tous semblaient avoir été fabriqués au Canada. Eh bien, si on les trouve au marché aux puces de Saint-Eustache, je dirais qu'il y a lieu de croire que ces vêtements ont pu être fabriqués à Montréal et dans ses environs; c'est là que se fait la fabrication. Parfois, nous trouvons des produits similaires ou identiques, munis d'étiquettes de produits et d'étiquettes volantes, qui viennent d'Asie. Il s'agit donc d'une combinaison.
    Si la technologie existante permet de fabriquer un produit au Canada, il y a probablement quelqu'un qui le fait. Nous avons parlé des piles; il y a plusieurs années, j'ai fait une descente à Winnipeg dans un magasin de jouets, à l'arrière duquel on fabriquait des piles de téléphones cellulaires. On y apposait une fausse étiquette de la compagnie, et on les fabriquait avec un fer à souder. Je ne voudrais pas approcher cela de mon oreille.
(1635)
    Rapidement, monsieur Myers.
    En ce qui a trait aux produits contrefaits, nous parlons de commerce bilatéral et trilatéral, mais surtout, évidemment, de marché mondial. Notre véritable source de préoccupations est la sécurité des chaînes d'approvisionnement mondiales.
    La Federal Aviation Administration estime qu'environ 580 000 pièces utilisées pour fabriquer des avions, aux États-Unis, sont contrefaites. Des pièces d'auto, des garnitures de frein faites d'herbe compressée, et même des filtres à huile dotés de chiffons en guise de matériel de filtrage entrent ici.
    L'ennui, c'est que si nous ne pouvons sécuriser les marchandises de la chaîne d'approvisionnement, qui sait ce que contiennent certaines pièces qui entrent ici pour être utilisées dans le cadre d'un processus légitime d'assemblage et de fabrication? Beaucoup d'entre elles sont interceptées lors d'un contrôle de qualité.
    Monsieur Scott.
    La semaine dernière, notre comité a tenu une séance qui portait sur la priorisation — et je ne veux pas compliquer le débat — de l'aspect santé et sécurité par rapport au reste, et autres sujets du genre. Y a-t-il des recours? J'ai relevé cinq domaines différents: les règlements, les lois, les ressources, les frontières et peut-être le marketing social. Est-il juste de dire que ces recours ne se limitent pas à un secteur? Font-ils généralement l'objet d'une entente, selon qu'il s'agit de divertissement, de TI ou autres? D'habitude, ces solutions...
    Un témoin: Oui.
    L'hon. Andy Scott: Vous êtes de cet avis?
    Tout cela m'amène à une grande question. Je ne suis pas membre de ce comité; en fait, je siège à celui du patrimoine canadien. Mais j'aurais dû faire partie de celui-ci, je crois.
    Comment expliquez-vous le fait que le Canada se retrouve dans la position que vous avez décrite? Il ne s'agit pas d'un problème de champ de compétence, n'est-ce pas, dans le contexte de...? Non? Alors quelle explication pourriez-vous nous donner?
    Je crois pouvoir répondre. Je fais respecter les droits de PI pour mes clients depuis longtemps.
    Ce que je constate, c'est que même si les outils de base sont en place, il est très difficile d'exercer ces droits. Je dirais qu'à la frontière, les outils d'application de la loi brillent par leur absence; mais si l'on est au Canada et qu'on s'occupe d'une vente de produits ici, on peut recourir à la Loi sur le droit d'auteur ou à la Loi sur les marques de commerce. Les causes d'action sont là, mais il n'est vraiment pas facile de faire respecter ces droits.
    Vous avez entendu Michael Hilliard témoigner au sujet du cas de Microsoft Interplus. Il faut beaucoup de temps et de travail pour mener des poursuites dans un dossier comme celui-là. Et si l'on fait face à une défense vigoureuse, cela coûtera une fortune.
    Nous devons peaufiner notre législation pour la rendre plus efficace et efficiente. Il y a d'autres cas particuliers, comme l'enregistrement par caméscope — nous avons parlé de la police à la frontière — mais les droits existants doivent être légèrement ajustés pour nous permettre d'agir dans ce dossier de façon efficace et efficiente.
    Nous avons dépassé le temps prévu, mais allez-y brièvement, monsieur Frith.
    J'aimerais ajouter, monsieur le président, qu'il y a un vide en matière de législation et d'application de la loi, de même qu'au chapitre du système judiciaire. Il faut qu'il y ait de la sensibilisation, de sorte que si une personne fait face à des accusations pour la troisième fois, elle ne négociera pas de plaidoyer pour s'en tirer avec 3 000 $ d'amende.
    Merci, monsieur Scott.
    Je cède maintenant la parole à M. Shipley.
    J'apprécie la venue de nos témoins aujourd'hui.
    Monsieur Hilliard, vous avez parlé de notre capacité d'aller de l'avant en ce qui concerne l'autorisation, la saisie et la destruction de matériel, d'intégrer ces dispositions au Code criminel et de disposer des ressources pour réaliser ce genre de saisie. Croyez-vous que cela découragera le piratage et la contrefaçon, et y a-t-il des preuves que cela fonctionnera?
    Je crois qu'il est juste de dire que cela découragerait le piratage. La réalité, c'est que Microsoft aura beau s'acharner à poursuivre des gens au civil, des sanctions pénales, surtout si elles sont significatives, seront un élément dissuasif bien plus important. Comme je l'ai dit à votre collègue, M. Carrie, en réalité, si vous poursuivez quelqu'un, le pire qui pourrait lui arriver serait une faillite.
    De toute évidence, Microsoft a les ressources et l'argent pour mener ces poursuites, mais je soupçonne que ce n'est pas le cas pour toutes les entreprises. Est-ce un problème?
(1640)
    Absolument. L'une des choses que je dis à propos des problèmes de piratage et de contrefaçon, c'est qu'ils découragent les créateurs de logiciels locaux. C'est malheureux que les entreprises soient très peu nombreuses à disposer des ressources nécessaires pour s'attaquer à ce problème.
    Monsieur Henderson.
    Vous demandez si cela changera quelque chose. Je pense qu'il est instructif de voir les taux de piratage aux États-Unis, où l'on applique des lois efficaces et vigoureuses à l'encontre des crimes relatifs aux droits de PI, et où l'on accorde beaucoup d'attention à ces droits. Comme je l'ai dit, 39 p. 100 des Canadiens achètent des produits contrefaits, qu'ils en aient conscience ou non. Ce pourcentage est de 13 p. 100 aux États-Unis. Je pense que M. Hilliard a évoqué le fait que le taux de piratage de logiciels de gestion est de 33 p. 100 ici, contre 21 p. 100 là-bas. Pour le piratage des cartes routières de jeux vidéo, ces proportions sont de 34 p. 100 et 17 p. 100.
    Il est donc clair que cela change quelque chose.
    Pour ce qui est de l'industrie des drogues illicites, nous en connaissons les effets pour nos familles, notre économie et nos enfants. En tant que membre du comité, je dois vous dire qu'au cours des deux dernières semaines, le niveau de conscience est passé de presque rien à très élevé. Je pense que ce ne sont pas seulement les politiciens qui ne saisissent pas l'impact de ce problème, mais aussi les familles et les parents.
    Donc, lorsque nous parlons de la nécessité de mener des études, nous ne connaissons probablement pas toutes les répercussions de l'industrie pharmaceutique, ni la proportion de produits qui entrent ici, ni la totalité de leur processus de fabrication et leur impact sur notre économie. Notre Code criminel contient néanmoins des lois et des mesures d'action qui traitent de la question.
    Pourriez-vous relier cela au fait que c'est une chose que nous devons savoir — qu'il n'y ait pas vraiment de reconnaissance des problèmes de piratage et de contrefaçon en matière de propriété intellectuelle?
    Nous allons entendre M. Webster, puis M. Henderson.
    Je pense que les gens deviennent plus conscients. Vous n'avez qu'à penser à cette histoire alarmante d'aliments pour chiens ayant causé l'empoisonnement d'animaux; c'est une forme de contrefaçon. Les gens pensent acheter un certain ingrédient, mais il s'agit d'un autre ingrédient mortel. Il y a l'exemple que nous avons évoqué de cette femme, en Colombie-Britannique, qui avait ingéré du plomb et de l'uranium faisant office d'agents de remplissage. Aujourd'hui même, en couverture du New York Times, figurait un article sur des médicaments empoisonnés, en Chine, qui tuent des gens.
    Avec des articles comme ceux-là, les gens commencent à être conscientisés. Mais il en va autrement pour pour ce qui est du fait que les atteintes à la propriété intellectuelle entraînent des pertes d'emplois et de revenus. Ce n'est pas seulement une question de sécurité. Celle-ci n'est qu'une conséquence du manque de contrôle de la qualité auprès de ces produits. Là où le bât blesse surtout, c'est du côté des pertes économiques.
    Les gens perdent leur emploi, et les entreprises n'investissent pas dans ce pays. L'innovation qui résulte habituellement de l'application vigoureuse des droits de PI ne se manifeste pas, dans ce contexte. Cela cause des torts sérieux. C'est un problème économique qui nuit aux Canadiens aussi bien qu'au gouvernement fédéral, car il représente une perte de recettes fiscales.
    Donc, nous ne pouvons perdre cela de vue.
    Merci.
    Nous allons maintenant entendre M. Henderson.
    En fait, nous en savons étonnamment beaucoup sur le sujet. Lorsque nous aurons fait traduire l'étude et que vous aurez eu l'occasion de la lire, je pense que vous conviendrez que l'étendue de nos connaissances est surprenante. À ce que je sache, une seule personne et peut-être un fonctionnaire ont laissé entendre que nous n'en savions pas assez.
    Comme l'a dit quelqu'un d'autre aujourd'hui, nous en savons long, mais ce n'est pas parce que nous ne savons pas tout que nous ne devrions pas agir maintenant.
    Merci, monsieur Shipley.
    La parole est maintenant à M. André.

[Français]

    Bienvenue, messieurs.
    J'ai été très étonné de constater le nombre et la variété de produits contrefaits. On peut facilement imaginer l'impact majeur que cela peut avoir sur un secteur manufacturier qui vit présentement des difficultés. J'ai vu vos recommandations. Je me demandais si on devrait prévoir une plus grande campagne de sensibilisation auprès du public. Vous avez inclus un sondage qui démontre qu'en général, les gens connaissent certains produits et les achètent, probablement parce qu'ils sont moins dispendieux. Ils sont prêts à prendre un risque. Dans d'autres cas, ils achètent des produits mais ne savent pas qu'ils ont été contrefaits.
     Considérant l'éventail de produits que vous présentez ici, il serait peut-être intéressant que les gens connaissent mieux ces produits contrefaits et les conséquences qu'a cette contrefaçon sur le plan socioéconomique et sur les emplois.
(1645)

[Traduction]

    Monsieur Lipkus.
    Merci pour cette question.
    Des membres du Réseau anti-contrefaçon canadien font de la sensibilisation active auprès du public. Il y a également une campagne d'affichage en français et en anglais orchestrée en collaboration avec la GRC. On retrouve ces affiches partout au Canada, et cette campagne, qui montre les dangers de la contrefaçon, prend de l'ampleur.
    L'an dernier, la France a mis en oeuvre une campagne télévisée extrêmement efficace. Si vous avez la chance de voir ces publicités, vous constaterez leur force et leur impact auprès du public.
    Il faut que le gouvernement prenne part au processus de sensibilisation; nous y sommes favorables. Soyez assurés que l'industrie privée y participe depuis un bon bout de temps. Je me rends régulièrement dans des écoles publiques pour enseigner à des enfants de 6 à 14 ans comment distinguer le vrai du faux, et ils savent faire la différence entre le bien et le mal. C'est peut-être leurs parents qui nous donnent du fil à retordre.
    Les prochains sur la liste sont MM. Henderson et Myers.
    J'aimerais revenir sur la campagne française « Non merci », que j'ai évoquée plus tôt, et dont vous parlez. Elle se déroule depuis deux ans. Examinons encore une fois ses partenaires: les ministères de l'économie, des finances et de l'industrie — cela vous indique à quel point les Français accordent de l'importance à la question, qu'ils voient comme un problème économique et financier. Ils ont un comité national anti-contrefaçon regroupant des intervenants du milieu des affaires, des représentants du gouvernement et des groupes de consommateurs. Pourquoi n'en ferions-nous pas autant? C'est possible.
    L'éducation est essentielle. Vous avez abordé un aspect hautement important. Beaucoup de Canadiens savent que les montres sont contrefaites, mais ils ignorent que les piles le sont aussi.
    Monsieur Myers.
    Je pense qu'une campagne pour alerter le public est très importante, mais nous devons également éduquer les consommateurs au sujet des impacts potentiels de l'achat de produits contrefaits et, du point de vue de l'industrie, de l'assurance de qualité que les entreprises peuvent donner.
    Je crois qu'une partie de la campagne visant le public et les entreprises ne devrait pas seulement transmettre le message que la contrefaçon est une mauvaise chose, mais aussi que le sigle de la CSA et autres marques de qualité sont une part importante du processus d'assurance de la qualité. Une telle campagne doit appuyer les efforts de la CSA et des réseaux de qualité existants pour faire passer le message au public, mais aussi aux entreprises.
    Avez-vous une autre question?

[Français]

     Je partage vraiment l'idée voulant que les pressions exercées par la population, quand celle-ci est sensibilisée à un problème social de ce type, agissent souvent mieux que toutes les lois criminelles pouvant exister. Les gens étant plus sensibilisés, ils font pression les uns sur les autres, et ça a beaucoup d'impact.
    Merci.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Henderson.
    Nous n'avons pas à remanier entièrement le Code criminel. Quand vous regardez les recommandations, vous voyez qu'elles sont très circonscrites. Il s'agit de modifications à la loi assorties d'une campagne de conscientisation continue, à long terme.
    Merci.
    La parole est maintenant à M. Van Kesteren.
    Merci, monsieur le président.
    Et merci à nos témoins de leur comparution.
    Dans l'un de vos mémoires, j'ai lu que cela constituait du vol :

Cela met en jeu un intérêt sociétal qui, à mon avis, est très important. Selon moi, ce genre de vol représente une très grave offense, plus grave encore que le vol d'un autre article ou bien matériel et ce, parce qu'il frappe au coeur même de ce qui différencie une société progressiste et créative d'une autre qui ne l'est pas.
    Je partage ce point de vue. À la dernière séance également, je me suis dit dépassé par le fait que les gouvernements n'aient pas encore agi à cet égard.
    Très brièvement, j'aimerais savoir une chose. Peut-être pourriez-vous me dire pourquoi les gouvernements ne sont pas encore intervenus pour instaurer une loi qui mettrait fin au problème? Quelle est la justification? Que se passe-t-il?
(1650)
    Je me lance.
    Je pense qu'il y a une inertie bureaucratique consternante pour ce qui est d'agir d'une quelconque façon dans ce dossier. Honnêtement, je n'arrive pas à comprendre. Les droits de propriété intellectuelle existent depuis 400 ans, depuis la loi anglaise de 1623 sur les monopoles. Pourquoi ce gouvernement ne voit-il pas qu'ils sont importants et nous fournissent les meilleurs outils qui soient pour réfréner les atteintes à la propriété intellectuelle? Nous voyons maintenant de graves problèmes de sécurité, en plus des problèmes économiques, et je ne comprends pas pourquoi on n'intervient pas.
    J'ai quelques questions de plus. Monsieur Frith, peut-être pourrions-nous revenir là-dessus dans un moment. J'aimerais poser une question à M. Myers.
    Vous avez parlé des pièces d'automobiles et d'avions. Qui les importe et les vend? S'agit-il surtout d'un marché noir? Y a-t-il des distributeurs et des détaillants honnêtes qui vendent ce type de produits, et comment le secteur automobile réagit-il à cette situation?
    J'avais quelques questions à poser. Pourriez-vous répondre?
    Je pense que, dans une large proportion, ils sont vendus sur le marché noir. Des distributeurs ou des importateurs font venir ces produits, puis les distribuent sur le marché nord-américain, et c'est l'une des raisons pour lesquelles il est si difficile d'arrêter cette activité à la frontière. Je vais vous donner un exemple.
    Depuis 12 ans, je travaille auprès d'une fonderie qui fabrique des pièces automobiles moulées. Pendant cette période, des produits frauduleux ont fait leur entrée sur le marché canadien. Notre cas a été renvoyé tantôt au ministère des Finances, tantôt à l'ASFC. Le ministère des Finances, le responsable du règlement, prétend n'être pas prêt à réécrire la loi en entier, et l'ASFC, pour sa part, nous dit qu'elle ne pourra l'appliquer tant qu'elle ne sera pas réécrite.
    C'est une petite entreprise. On lui a laissé la responsabilité de déterminer qui, exactement, importe ces pièces. Il s'agit probablement d'un distributeur qui exploite un marché plus ou moins noir, et qui vend ses produits aux États-Unis, mais à moins qu'on lui fournisse des preuves que ce produit entre ici, le service de sécurité frontalier dit ne pas pouvoir y mettre un terme. Alors, en somme, on a seulement... on n'a pas seulement abandonné, mais on a mis fin à toute l'opération.
    J'ai une question de plus pour M. Frith. Peut-être pourriez-vous intervenir juste après, car je ne vous ai pas donné l'occasion de répondre à l'autre question.
    Plus tôt, nous avons entendu des déclarations contradictoires au sujet des enregistrements par caméscope et du fait que ce n'était vraiment pas un problème au Canada. Les statistiques semblent incompatibles. Pourriez-vous, s'il vous plaît, tirer cela au clair?
    Le témoin auquel vous faites allusion a comparu il y a une semaine. Il a pris ses informations dans les journaux. Quand on fait de la politique comme vous en faites et comme j'en ai fait moi-même, on sait que ce qui est publié dans les journaux n'est pas toujours exact.
    Ensuite, à notre avis, il a bien mal interprété les données de l'industrie et, surtout, les chiffres qu'il a cités faisaient référence à un site Web piraté il y a plus de trois ans, ce qui n'a absolument plus rien à voir.
    C'est au cours des trois dernières années que nous avons créé les filigranes. Nous avons désormais les moyens de savoir d'où vient la copie piratée. Les studios ajoutent maintenant un filigrane même à leurs copies sur cassette vidéo ou DVD. Ils ont accru la sécurité pendant et après la production. Alors, citer une étude vieille d'il y a plus de trois ans ne présente aucun intérêt étant donné que la quasi-totalité de nos produits portent maintenant un filigrane et que nous pouvons prouver de façon empirique les chiffres.
    Par ailleurs, je voulais dire... J'étais député en 1980. Toute cette bataille sur la propriété intellectuelle a en fait opposé les fonctionnaires des ministères de l'Industrie et du Patrimoine pendant une vingtaine d'années si je ne m'abuse, et c'est vraiment une question qui transcende les allégeances politiques parce que les choses n'ont pas changé même si un gouvernement libéral a cédé sa place à un gouvernement conservateur.
    Il faut vraiment que les deux ministres, celui du Patrimoine canadien et celui de l'Industrie, aient beaucoup de détermination parce que la mentalité des fonctionnaires du ministère de l'Industrie est telle que nous tomberions des nues si jamais ils proposaient de déposer un projet de loi qui rendait nos règles conformes à celles de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle.
(1655)
    Monsieur Lipkus, très brièvement.
    Je veux répondre par des remarques générales à la question sur ce que font les compagnies automobiles.
    Ces entreprises participent régulièrement à des conférences, partout dans le monde, sur la lutte contre la contrefaçon, et elles mettent en oeuvre des programmes ingénieux pour lutter contre ce fléau, un peu comme beaucoup de gens ici présents. Ces programmes existent dans beaucoup d'entreprises mais, sans des lois appropriées et sans l'aide des douanes, on ne peut simplement pas faire grand-chose.
    Merci.
    C'est maintenant au tour de M. Masse.
    Merci, monsieur le président.
    Je veux revenir sur les recommandations que vous avez proposées, qui sont très valables.
    Je me demande si l'on a réfléchi à notre collaboration avec les États-Unis. Pourrions-nous avoir des précisions sur la façon d'intercepter les produits contrefaits non seulement à leur arrivée ici, mais aussi quand ils sont expédiés aux États-Unis, si c'est un problème réel? Pouvons-nous avoir des chiffres sur la quantité et le genre de produits dont on parle? S'agit-il de DVD ou d'autre chose?
    Qu'avez-vous à proposer à ce sujet? Je ne veux surtout pas immobiliser les camions à la frontière; loin de moi cette idée. Mais que pouvons-nous faire? Nous devons pouvoir faire davantage, de notre côté.
    Je crois qu'il faut avant tout passer à l'action. Une fois que la loi est en vigueur et que les responsables sont en mesure d'intervenir, nous aurons les renseignements nécessaires pour cibler les chargements. Nous n'en ciblons aucun actuellement.
    Je suis convaincu que, si nous avons des employés motivés qui peuvent intervenir, nous allons repérer les cargaisons de produits contrefaits sans perturber le commerce, parce que cela se fait ailleurs. Quand on commence à cibler des chargements avec les renseignements voulus et les employés formés à cet effet, on trouve.
    Je crois qu'il faut aussi se rappeler que le respect des droits de propriété intellectuelle ne fait ni gagnant ni perdant. Aider un autre pays à établir un régime de droits de propriété intellectuelle efficace ne nuit à personne; au contraire, cela renforce le marché international dans son ensemble.
    Je crois que c'est une occasion en or pour le Canada et les États-Unis de travailler en étroite collaboration pour régler ce problème commun. Les Américains ont des droits de propriété intellectuelle formidables, et nous aussi. Ce que nous faisons est excellent. Ils protègent ces droits, et pas nous. Je pense qu'une première étape, surtout en raison du renforcement de la sécurité à la frontière dont il a été question tout à l'heure et dont vous avez aussi parlé... En nous concertant, nous pouvons résoudre ce problème. La communication de l'information serait essentielle.
    L'industrie du camionnage, par exemple, a-t-elle aussi un rôle à jouer, si les produits contrefaits entrent principalement aux États-Unis par le Canada? L'industrie du transport en général pourrait jouer un rôle jusqu'à un certain point, mais j'imagine que ce serait plutôt l'industrie du camionnage. Y a-t-il lieu d'engager le dialogue avec elle?
    Je pense qu'il y a une responsabilité. Nous avons parlé à la dernière séance de toutes les entreprises touchées par le phénomène. Y a-t-il eu un examen attentif de la situation ou un engagement de la part de M. Bradley et de l'association du camionnage, sans vouloir les accuser de quoi que ce soit?
    Il s'agit peut-être de transporteurs indépendants. Quels sont les modes de transport utilisés?
    Nous avons discuté avec M. Bradley et un certain nombre de sociétés de transport. Les relations avec les entreprises font partie du système d'accréditation des États-Unis et des méthodes à mettre en place dans le cadre de leur programme de partenariat pour la lutte contre le terrorisme à la frontière, ou C-TPAT.
    Il y a deux ou trois enjeux ici. Celui de l'application de la loi en est seulement un. C'est bien beau de dire que c'est important, mais les camionneurs ont l'impression que leur industrie, qui a déjà un trop lourd fardeau à porter, a toujours de plus en plus de coûts à payer pour la sécurité à la frontière.
    Je crois que les expéditeurs, les camionneurs ainsi que les compagnies maritimes et aériennes veulent tous faire leur part, mais ils ont besoin d'aide pour que l'application de la loi à la frontière soit efficace.
    J'aimerais ajouter, monsieur Masse, au sujet de la politique commerciale générale dont vous avez parlé, que c'est un problème particulièrement important dans nos relations avec notre principal partenaire commercial qui est les États-Unis. Nos ententes commerciales devraient adopter un point de vue commun. Les Américains, les Européens et les Australiens ont intenté des recours contre d'autres pays, dont la Chine, sur des questions de propriété intellectuelle. Je crois que nous devrions exposer nos vues avec vigueur auprès de l'OMC. Nous devrions renforcer les mesures de protection de la propriété intellectuelle dans tous nos traités commerciaux internationaux, y compris celui que nous sommes en train de négocier avec la Corée.
    Je peux vous dire que, si nous ne faisons pas appliquer la loi, nous ne pourrons vraiment pas nous attendre à ce que les autres le fassent. En fait, certains soutiennent que la Chine fait appliquer de façon plus rigoureuse que le Canada les règles sur la propriété intellectuelle.
(1700)
    Merci, monsieur Masse. Il vous reste cinq secondes.
    C'est au tour de M. Thibault.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup à tous de votre présence, et je vous suis reconnaissant des recommandations très pertinentes que vous avez formulées.
    Je dois signaler que je ne suis pas membre en bonne et due forme du comité, mais je crois que c'est le troisième groupe de témoins que j'entends sur le sujet et seuls les chercheurs ont revendiqué des recherches. Les gens visés en comprennent l'importance et les répercussions.
    Monsieur Hilliard, j'aimerais que vous me précisiez quelque chose. J'ai appris dans un reportage la semaine dernière ou la semaine précédente que Microsoft, à cause du problème de piratage en Asie — et plus précisément en Chine, je crois — vendait sur ce marché à 10 ou 15 $ le même logiciel qui se détaille à 125 ou 135 $ sur le marché nord-américain.
    Est-ce exact?
    Il y a quelques semaines, Bill Gates est allé en Chine annoncer une mesure que Microsoft va prendre.
    Vous avez peut-être entendu parler de ce qu'on appelle la « fracture numérique ». En effet, si beaucoup de gens comme nous, surtout au Canada, ont accès à la technologie, il y a des milliards de gens dans le monde pour qui ce n'est pas le cas. Consciente de ses responsabilités sociales, Microsoft a proposé aux gouvernements, dont celui de la Chine où elle se trouvait, que, s'ils acceptaient d'investir pour l'achat d'ordinateurs destinés à l'usage des étudiants, à l'école et à la maison, dans les régions les plus pauvres de leur pays, elle mettrait à leur disposition une série spéciale de logiciels pour étudiants, comprenant des outils Windows et Office, au prix de gros de 3 $.
    Merci de cette précision. J'ai eu l'impression, dans l'article que j'ai lu, que c'était le même programme que celui que nous avions ici.
    Au sujet des caméscopes, monsieur Frith, il me semble étrange que les films enregistrés à partir de cet appareil dans une salle de cinéma soient de qualité suffisante pour pouvoir être reproduits et distribués. Tout le monde recherche la technologie 5.1 Dolby sur le marché nord-américain, ce que n'offre pas un caméscope à un seul haut-parleur. Mais j'imagine que le marché existe.
    Quand on va au concert, on nous interdit d'entrer dans la salle avec une caméra ou un autre appareil du genre. Il faut dire que c'est le promoteur qui l'exige, et non la loi. Ce serait fort simple d'avoir une loi qui rende cela illégal, pour protéger la propriété intellectuelle. Ce n'est pas très coûteux; il s'agit seulement de rédiger une mesure législative.
    Pourquoi ne l'a-t-on pas fait? Y a-t-il des conflits de compétences, des possibilités de contestation en vertu de la Charte? Quels sont les arguments, les problèmes?
    Actuellement, des accusations peuvent être portées seulement s'il peut être prouvé que l'enregistrement par caméscope va servir à des fins commerciales, de distribution. Le fardeau est alors laissé — Pour commencer, nous assurons nous-mêmes la surveillance interne avec l'aide d'anciens policiers. Ce n'est pas aussi facile que vous pensez de réussir —
    C'est en vertu de la loi en vigueur. Qu'est-ce qui nous empêche de rendre les lois sur la protection des renseignements personnels ou la propriété intellectuelle plus sévères?
    Pour nous, modifier le Code criminel pour ajouter que l'enregistrement délibéré par caméscope dans les salles de cinéma est une infraction nous aiderait énormément à régler nos problèmes. Sans être la solution miracle, cela nous permettrait —
    Oui, mais j'essaie de comprendre quelles sont les réticences. Que dit le ministère de la Justice? Pourquoi n'agit-il pas?
    Nous croyons comprendre — et c'est ce que nous espérons — qu'il prend la chose très au sérieux. J'ai personnellement rencontré beaucoup de membres des partis d'opposition pour plaider en faveur d'une modification au Code criminel, et j'espère toujours que le gouvernement va examiner la question de près et songer à la régler en modifiant le Code criminel.
    Monsieur Lipkus, il me reste une minute et je vais essayer d'être bref.
    On nous a beaucoup parlé des priorités à établir, de la sécurité publique par rapport à l'activité économique. Il faut aussi protéger le consommateur relativement aux « avantages prévus » d'un produit acheté, et toutes ces menaces. Si le comité faisait tout ce qu'on lui propose, il lui faudrait probablement établir quand même des priorités.
    Convenez-vous qu'il faut établir des priorités, ou pensez-vous qu'on devrait agir en fonction des informations obtenues?
(1705)
    Je pense que cela se décide sur le terrain, parce que tous les services de police vont établir des priorités dans leur travail. Toutes les entreprises font aussi la même chose. Il reste qu'il faut avoir suffisamment de ressources pour maîtriser la situation. Sinon, la loi viserait seulement les infractions les plus graves, ce qui ne réglerait pas le problème. On irait dans tous les sens.
    S'il y avait un conseil des droits de propriété intellectuelle qui examinait ces questions et en établissait l'ordre de priorité... c'est un peu ce qui manque. Les mesures législatives sont une partie de la solution. Ensuite, il faut qu'il y ait une certaine concertation entre divers ministères pour pouvoir établir des priorités avec les Canadiens, les intervenants et d'autres.
    Merci.
    C'est maintenant à M. Arthur.
    Merci, monsieur le président.
    Je ne sais pas ce que nous allons faire d'ici quelques mois à ce sujet, mais il faut agir. Tout dépendra de l'orientation donnée par le gouvernement et des échanges qu'il pourrait y avoir entre le ministère du Patrimoine et celui de l'Industrie, mais le Parlement devra intervenir. Il y a certaines pistes de solution que nous pouvons explorer.
    Les gens nous parlent de l'administration des douanes. Je traverse la frontière assez souvent chaque année, et je crois toujours qu'il est inquiétant de devoir se fier au bon jugement d'un douanier pour régler un problème. Chaque fois que je me présente à la frontière, j'ai l'impression que je pourrais porter une large tunique et cacher un AK-47 et que le douanier me demanderait quand même si je rapporte des cigarettes. C'est ainsi au Canada. Le jour où nous aurons une politique frontalière continentale, nous serons peut-être plus sérieux, même aux douanes.
    Le Code criminel que tout le monde veut faire modifier est complexe au Canada. Les provinces et les territoires ont la responsabilité de faire appliquer une loi qui est adoptée par le gouvernement fédéral; de plus, la question de l'intention criminelle et celle de l'obtention d'éléments de preuve constituent assurément des obstacles de taille.
    On a parlé d'éducation, comme M. André vient de le faire. On peut bien dire aux gens de ne pas acheter des produits contrefaits parce qu'ils ne sont pas de qualité, mais quand, au Québec, les consommateurs versent 60 p. 100 de leur revenu en impôts, on peut comprendre que le prix ait nécessairement plus d'importance que la qualité pour eux.
    C'est ce qui m'amène à penser qu'il y a une solution bien simple qui consiste à s'attaquer aux détaillants. On a été en mesure de rendre passibles d'une infraction tous les restaurateurs des provinces et territoires du Canada ayant de la viande avariée dans leurs réfrigérateurs, sans avoir à prouver qu'ils avaient l'intention de la vendre. Ils ne peuvent se défendre contre le fait qu'ils en possèdent, que cette viande se trouve sur les lieux. La chaîne de possession est facile à établir. On ne peut pas imputer la responsabilité à celui qui la leur a vendue. La viande est là et il y a infraction.
    Parmi toutes les solutions qui s'offrent à nous, il faudra finir par choisir la plus simple. Que pensez-vous de s'en prendre aux détaillants?
    On vous a raconté ce qui est arrivé à un détaillant et la façon dont ces commerçants sont traités. C'est extraordinaire. Il a été accusé à répétition et il continue d'exercer ses activités. Qu'est-ce qui est caractéristique ici? Il n'est pas incarcéré.
    On envoie ainsi un message très grave au milieu criminel. La GRC vous en a parlé, les forces policières nous le répètent, et le milieu des affaires va vous le dire également. Nous sommes unanimes.
    La deuxième fois que le détaillant en question a été accusé, il avait en sa possession 75 000 DVD vierges et brûleurs, de quoi fabriquer bien des produits de contrefaçon. Donc, oui —
    Mais ce n'est pas le détaillant.
    Oui. Il a un magasin dans un centre commercial.
    Le message sera plus percutant si vous saisissez les produits contrefaits d'un vendeur au marché aux puces et que vous lui imposez une amende sévère.
    Non, il faut porter des accusations, pas infliger une simple amende.
    On constate — et M. Lipkus peut le confirmer, puisqu'il en est témoin tous les jours, sur le terrain — que le phénomène se déplace vers le secteur du détail. Les marchés aux puces ne sont pas les seuls concernés; les centres commerciaux le sont aussi. Prenons l'exemple du Pacific Mall, qui compte une cinquantaine de magasins. Quand Lorne se présente avec son équipe, les portes se ferment, les gens s'enfuient, parce qu'ils ne veulent pas être accusés. C'est incroyable. Vous devriez aller faire un tour.
(1710)
    Cela fonctionne dans le cas des restaurants.
    Monsieur Lipkus.
    Je suis d'accord avec vous. Le phénomène se déplace vers le secteur du détail.
    Nous sommes allés récemment au Pacific Mall. Nous sommes entrés dans un premier magasin à 13 h 30. Nous en avons visité trois. Nous étions environ une quinzaine. Le centre ferme ses portes à 20 heures. Cinq minutes après notre arrivée — et je n'exagère pas, moins de quatre minutes après notre arrivée — environ 45 magasins ont fermé leurs portes. Elles sont demeurées fermées tout le temps que nous étions là. Parmi ces magasins, 28 ou 29 vendaient des DVD et des disques, et trois, des accessoires pour téléphones cellulaire. Ces derniers avaient déjà fait l'objet d'une descente. Les portes sont restées fermés pendant tout le temps. Il y avait aussi des magasins qui vendaient des sacs à main, y compris des articles contrefaits. Ils étaient également fermés. Nous n'étions pas là pour les sacs à main, mais les magasins sont restés fermés tout le temps que nous étions là.
    Donc, oui, il faut surveiller le secteur du détail, et les changements que nous proposons vont nous permettre de le faire. L'approche utilisée sera peut-être différente de celle qui s'applique aux restaurateurs, mais il faut surveiller les détaillants.
    Merci.
    Merci, monsieur Arthur.
    Monsieur McTeague.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Frith, vous pourriez peut-être nous en dire plus au sujet de la question qui vous préoccupe. Vous avez parlé des produits de la criminalité, du fait que, pour une raison ou pour une autre, la Loi sur le droit d'auteur ne semble pas tomber sous le coup des dispositions visant les produits de la criminalité. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi?
    L'industrie cinématographique n'est pas la seule visée, monsieur McTeague. La loi sur les produits de la criminalité a été adoptée — il y a une dizaine d'années de cela, si je ne m'abuse — sans que le secteur du droit d'auteur ne soit consulté. Nous en avons été exemptés. Nous trouvons cela déroutant, car nous ne voulons pas en être exclus.
    Nous en avons discuté avec les représentants du ministère. Or, il n'est pas nécessaire, pour inclure un secteur, de passer par le processus législatif. Il suffit d'émettre un décret en conseil.
    Monsieur le président, voici comment nous procédons. Quand il s'agit d'une affaire au civil, ou quand nous menons une opération avec des policiers, mais en dehors du cadre de la loi sur les produits de la criminalité, nous devons... Disons que nous devons obtenir une ordonnance d'un tribunal. Nous voulons saisir les actifs, mais nous n'avons pas suffisamment d'informations à leur sujet. Au civil, nous n'avons pas accès aux données que possèdent les policiers, de sorte que nous ne pouvons pas saisir les biens. Même si avons le droit de le faire en vertu de la loi, quand nous n'avons aucun renseignement sur les actifs, il est difficile de les saisir. Nous trouvons le faussaire qui s'adonne à cette activité depuis longtemps, nous saisissons les marchandises, mais nous ne pouvons jamais mettre la main sur les actifs.
    Les modifications apportées à la loi vont nous permettre d'entrer dans un lieu en même temps que les policiers. Ces derniers saisissent les biens dès qu'ils entrent, car ils ont déjà l'information en main. Ils s'emparent des marchandises. Il y a maintenant une personne qui va être accusée et traînée devant les tribunaux, sauf que c'est le gouvernement qui finit par se retrouver avec les actifs qui, comme je l'ai déjà dit, valent peut-être plus que ce que l'affaire va coûter au gouvernement.
    La GRC a réalisé une étude intéressante qui montre à quel point cette activité est lucrative, et aussi à quel point la loi sur les produits de la criminalité est importante. Nous en parlons dans notre exposé. Elle a établi une comparaison entre le trafic de drogues et les crimes contre la propriété intellectuelle, une analyse des risques: le trafic de trois kilos de cocaïne ayant une valeur à la revente de 90 000 $ entraîne une peine de cinq à sept ans d'emprisonnement; la vente de 1 000 copies piratées du logiciel Windows XP qui rapporte 450 000 $ — pas 90 000 $, mais 450 000 $ — ou cinq fois plus à l'organisation criminelle entraîne une condamnation assortie d'une faible amende. Pas étonnant que les criminels s'intéressent à cette activité.
    Qu'en est-il des autres sanctions? Vous en parlez à la recommandation 5.1: « Renforcer les recours civils pour la contrefaçon. En particulier, la législation civile doit prévoir », ainsi de suite.
    Nous avons parlé des recours criminels, mais il me semble — M. Lipkus et M. Webster peuvent le confirmer — que, mis à part la question des produits de la criminalité, il serait plus facile d'obtenir des dommages-intérêts si l'on optait pour cette solution. Proposez-vous que l'on instaure des recours civils plus rigoureux?
    Ma question s'adresse à tous les témoins.
    Je le recommanderais fortement. Il m'est arrivé de plaider devant la Cour fédérale. Les causes évoluent à leur propre rythme, et je suppose que cela fait plus ou moins l'affaire des entreprises canadiennes qui se livrent bataille, mais il est ridicule de voir que six ans peuvent s'écouler avant qu'un faussaire ne soit traîné devant les tribunaux. Il faut trouver des recours plus efficaces, plus rapides. Je ne sais pas si la solution passe par un plus grand nombre de juges ou un système de gestion des cas plus stricte.
    J'ai plaidé des affaires aux États-Unis, où des poursuites en contrefaçon de brevet très compliquées étaient intentées devant les tribunaux en huit mois. Pourquoi ne pouvons-nous pas faire la même chose ici, quand ce sont constamment les mêmes produits qui font l'objet de contrefaçons — Spider-'Man 3 sur DVD?
    Je vis dans le secteur Beaches à Toronto. Chaque fois que je stationne dans la rue, le soir, j'ai une contravention. Je ne peux rien faire. Je dois la payer. Je ne sais pas pourquoi on ne peut pas demander à quelqu'un de visiter les centres commerciaux et de donner des contraventions aux vendeurs de marchandises contrefaites. C'est insensé. Pourquoi un de mes clients doit-il dépenser 125 000 $, ou peu importe ce qu'il en coûte pour faire une descente...
(1715)
    Monsieur Webster, permettez-moi de vous interrompre. Si vous donnez une contravention à quelqu'un, où doit aller l'argent? Dans les recettes générales, dans les coffres du gouvernement du Canada? Est-ce qu'il faut dédommager l'entreprise qui a été victime de contrefaçon?
    Franchement, que l'argent soit versé dans les recettes générales ou remis à l'entreprise importe peu, pourvu que l'activité cesse. Si on met fin à la contrefaçon, le titulaire du droit d'auteur pourra réaliser des profits en vendant son produit. Si des accusations au criminel sont portées, que le produit de la criminalité — le yacht — est vendu et que l'argent est versé dans les recettes générales, tant mieux. Cela permettra de financer les mécanismes d'exécution de la loi.
    M. Lipkus voulait faire un commentaire.
    Il est important de renforcer les recours civils. Comme il est question ici d'une activité illégale, il pourrait être utile de simplifier les règles de la Cour fédérale. Il faudrait aussi regarder ce qui se fait du côté des États-Unis. Des groupes de travail importants ont été mis sur pied à New York, et maintenant à Los Angeles, et ces initiatives ont rapporté gros à ces gouvernements.
    Ils ont ciblé les propriétaires, les détaillants, comme vous l'avez indiqué. Ils ont dit au propriétaire que, parce qu'il avait conclu un contrat avec une personne et que cette dernière n'en respectait pas les modalités, et que s'il avait l'intention de permettre à des gens de vendre des produits illégaux, c'est lui qui subirait les conséquences. Ils seraient obligés de déposer des cautions s'ils se faisaient attraper.
    Cette démarche a connu beaucoup de succès. Ils en ont parlé à certaines conférences internationales auxquelles j'ai assisté. Des projets semblables sont en train de voir le jour dans d'autres villes aux États-Unis.
    Merci, monsieur McTeague.
    J'ai une question à poser. Elle sera peut-être suivie d'une question supplémentaire.
    Vous dites, et je cite, qu'il faut « donner à l'ASFC l'autorité expresse de cibler, détenir, saisir et détruire les marchandises contrefaites de sa propre initiative. » Vous ajoutez qu'il faut « mettre en place des règlements qui favorisent la détection de telles marchandises, comme l'obligation de déclaration des renseignements concernant la marque, au cours des expéditions. »
    Monsieur Lipkus, vous pouvez peut-être répondre à la question, puisque je crois que c'est vous qui avez préparé ce document, où vous donnez des exemples de produits contrefaits. Franchement, je ne serais pas en mesure de dire, en tant que consommateur, que ces produits sont contrefaits. Comment peut-on le savoir? Vous montrez un cravate Burberry. L'étiquette à l'intérieur dit qu'il s'agit d'une cravate Burberry. Comment les douaniers, les détaillants, ou n'importe quel autre intervenant de la chaîne d'approvisionnement, peuvent-ils savoir si ce produit est contrefait?
    C'est plus facile qu'on ne le croit généralement. Comme pour bien d'autres choses, quand on ne le sait pas, on trouve cela impressionnant. Il suffit de rechercher les petits indices qui vont nous dire si un article est contrefait ou non. Prenons l'exemple du sac à main de luxe Burberry. Les douaniers et les agents de la GRC ont fait appel à mes services pendant de nombreuses années, et je n'ai encore jamais trouvé de produits de luxe qui étaient authentiques.
    Le fait est que les entreprises légitimes envoient leurs produits du point A au point B, et que les faussaires, eux, expédient les marchandises aux points C, D, E et F. Les douaniers n'ont qu'à inscrire les adresses exactes et l'ordinateur leur fournit les réponses. Ils inscrivent sacs Burberry, et voient qu'ils sont envoyés de telle ville à destination de telle autre ville. Est-ce possible? Oui, sauf que dans 99,999 p. 100 des cas, ce sont des sacs contrefaits. C'est le marché qu'il faut cibler.
    Pour ce qui est de l'identification des produits contrefaits, nous organisons régulièrement des séances de formation à ce sujet. Les entreprises aussi. Je dois en donner une, mercredi, à Calgary, à plus de 100 personnes chargées de l'application de la loi. Plus de 40 entreprises sont représentées. À la fin de la séance de trois jours, les participants seront en mesure de dire si les produits sont contrefaits ou authentiques.
(1720)
    Devrions-nous prendre des mesures comme nous l'avons fait, par exemple, dans les domaines de la santé humaine ou de la santé des animaux? Est-il possible d'intervenir sans ralentir les échanges?
    M. Masse a parlé de la frontière Détroit-Windsor. S'il est possible, sans ralentir les échanges, de retracer un animal jusqu'à son lieu de naissance, ses déplacements, la nourriture qu'il a consommé, est-il possible de retracer un produit jusqu'au détaillant? Si nous ne pouvons pas le faire, si nous n'avons pas toutes les données en main, nous devrions peut-être présumer que le produit est contrefait, et intervenir à ce moment-là.
    Le gouvernement peut-il, concrètement, faire une chose pareille?
    Ce qu'il peut faire, c'est mettre sur pied une équipe de spécialistes, et on peut en avoir plusieurs à l'échelle du pays. Ces gens ont les compétences voulues pour s'occuper de ces questions. Tout ce qu'ils doivent faire, c'est communiquer avec les personnes concernées au sein des entreprises et ils vont avoir leur réponse.
    Nous sommes en train d'examiner quelques cas, et ce n'est pas l'identification qui pose problème. Nous pouvons identifier le produit contrefait assez rapidement. Nous offrons une formation en identification sur le Web. Supposons que quelqu'un de Vancouver communique avec mon bureau, à Toronto, et demande ce qu'il doit faire avec les produits qui ont été saisis auprès de six entreprises. Nous leur fournissons un numéro, ils vont sur le Web, visionnent un fichier PowerPoint qui montre les indices et c'est tout. C'est très rapide. Une fois cette étape franchie, ils savent qu'ils ont des marchandises qui sont contrefaites.
    Merci.
    Monsieur Henderson.
    Ces régimes existent dans d'autres pays. Croyez-moi, cela devrait intéresser tout le monde. Nous avons l'avantage d'être les derniers. Cela n'a tout simplement pas posé de problème.
    Brièvement — il me reste moins de deux minutes — je voudrais poser une question à M. Frith. J'ai abordé le sujet des caméscopes avec des représentants des ministères du Patrimoine et de l'Industrie. D'après le ministère du Patrimoine, il existe des recours civils pour prévenir ce genre de chose. Je voudrais avoir votre opinion là-dessus.
    Il existe des recours civils qui peuvent être utilisés en vertu de la Loi sur le droit d'auteur, et franchement, ils ne sont pas efficaces. Nous avons eu des cas, dans certaines grandes métropoles du Canada, où nous savions que les personnes étaient liées à des organisations criminelles. Or, les organismes d'exécution de la loi ne voulaient pas intervenir. Voilà pourquoi rien ne sera fait tant que cette activité continuera de tomber sous le coup de la Loi sur le droit d'auteur. Des modifications ont déjà été apportées dans le passé au Code criminel. On peut le faire dans le cas des caméscopes. On l'a fait dans le cas des satellites en apportant une modification à la Loi sur les télécommunications.
    La GRC n'est pas présente dans tous les territoires et provinces. Si quelque chose se passe à Peterborough, que peut-on faire? Il faut modifier le Code criminel pour donner des pouvoirs aux forces de police locales.
    Merci.
    Monsieur Henderson, un bref commentaire.
    Les recours civils ne s'appliquent pas aux criminels. Point à la ligne.
    Merci.
    Monsieur Vincent.

[Français]

    Vous avez parlé de sensibilisation. Des gens de la GRC nous ont apporté des disjoncteurs comme ceux-là. Ils ont été installés dans des hôpitaux parce que même des électriciens n'étaient pas capables de faire la différence.
    On devrait mener une campagne de sensibilisation parce que les gens ont beaucoup de difficulté à déterminer s'il s'agit vraiment d'une contrefaçon. Le prix peut être un facteur, mais on peut se laisser berner parce qu'on a vu des rallonges identiques à des rallonges normales, si ce n'est qu'elles ont trois brins. Cet argent ne pourrait-il pas servir plutôt à mettre plus de personnel aux douanes et aux postes frontaliers?
    Si les produits qui entrent au pays dans des conteneurs sont assortis d'un brevet, on pourrait essayer de contacter le propriétaire pour savoir s'il a fait fabriquer ces produits à l'extérieur. Ce serait peut-être une piste de solution.
    Monsieur Webster, vous avez dit que les délais judiciaires étaient très longs. Il peut être très clair, par exemple, que deux sacs à main ont été contrefaits, mais il s'écoule plusieurs mois avant que la cour rende une décision. Vous avez proposé d'ajouter plusieurs juges.
(1725)
    Monsieur Vincent, posez-vous votre question à M. Webster ou à M. Myers?
    Je demande d'abord à M. Myers de parler de sensibilisation. Les autres pourront aussi le faire par la suite.
    Ce sera donc MM. Myers et Henderson.
    Monsieur Myers.

[Traduction]

    Je pense pouvoir répondre à la question.
    Ce qu'il nous faut, c'est une procédure sommaire. Je ne me suis pas occupé directement du dossier Interplus, mais le cabinet d'avocats pour lequel je travaille, oui. Je sais que Microsoft a déployé beaucoup d'efforts pour démontrer que ce produit en particulier était contrefait. Beaucoup de preuves ont dû être rassemblées. Or, est-ce que Microsoft va être obligé d'entreprendre la même démarche à chaque fois? Une seule fois devrait suffire. Il faut mettre en place une procédure sommaire pour que les nombreuses questions relatives à la preuve qui doivent être abordées chaque fois devant les tribunaux puissent être réglées d'un seul coup. On peut classer une affaire rapidement, par voie de procédure sommaire.
    Je ne peux pas vous recommander des changements précis ou encore vous dire quelles modifications apporter à la Loi sur la Cour fédérale ou aux règles. Toutefois, il doit exister une façon de régler ces questions beaucoup plus rapidement, en fournissant les éléments de preuve pertinents sans délai et aussi en éliminant bon nombre des conférences préalables que nous avons tendance à avoir à la Cour fédérale.
    Monsieur Henderson.
    Il faut mettre en oeuvre les recommandations proposées. C'est très important. Ensuite, il faut collaborer avec l'industrie et les intervenants, s'assurer que la loi est appliquée de manière efficace. Je ne crois pas — et c'est ce que dit M. Lipkus — qu'il soit impossible de dire la différence. Nous devons aussi continuer de travailler de concert avec le gouvernement et les services de police. On le fait déjà ailleurs dans le monde, avec beaucoup de succès.
    Monsieur Vincent.

[Français]

    Les gens ne seraient pas tellement préoccupés pas les mesures répressives que vous recommandez, car ils gagnent des millions de dollars grâce à la contrefaçon. Les amendes et les poursuites devraient être plus pointues.

[Traduction]

    Eh bien, il faut les emprisonner.
    Monsieur Lipkus.
    Je dois dire qu'il y a aujourd'hui de plus en plus de criminels qui s'adonnent à la contrefaçon. Les entreprises prennent également davantage de mesures, mettent au point des technologies pour protéger les produits de marque. Microsoft, à l'instar d'autres fabricants, est un leader en la matière. Ils consacrent beaucoup d'efforts à la protection de leur produits, de sorte qu'il est facile de repérer les indices si vous savez quoi rechercher.
    Je suis tout à fait d'accord avec M. Webster. Une fois que les preuves d'authenticité concernant les technologies ont été fournies au tribunal, il ne devrait pas être nécessaire de les soumettre à nouveau. Il ne devrait pas être nécessaire de les fournir à chaque fois, de faire venir des témoins de par le monde pour démontrer leur authenticité. Soit les technologies sont authentiques, soit elles ne le sont pas. Si elles ne le sont pas, c'est de la contrefaçon.

[Français]

    Monsieur Vincent, merci.
    Nous passons à M. Colin Carrie.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Monsieur Frith, vous avez dit que certains changements aux règlements peuvent être apportés par voie de décret en conseil. Avez-vous la liste des règlements qui, selon vous, devraient être modifiés?
    Il y a celui sur les produits de la criminalité. Il n'est pas nécessaire de procéder par voie législative. On peut le faire au moyen d'un décret en conseil. Croyez-moi, personne au sein du secteur du droit d'auteur s'opposerait à cette mesure.
    Y en a-t-il d'autres?
    De nombreux règlements peuvent faire l'objet d'une modification d'une ligne. En passant, le CACN propose l'adoption d'un projet de loi omnibus de lutte contre la contrefaçon. Il nous faut un projet de loi d'ensemble, non pas des modifications ponctuelles. C'est ce qu'ont fait de nombreux pays: ils ont présenté un projet de loi qui fait de la contrefaçon et de l'importation de produits contrefaits une activité illégale. Tout découle ensuite de cela.
    J'ai une autre question.
    Savez-vous si des initiatives sont entreprises à l'échelle internationale? Il y a des codes à barre sur les produits, que n'importe qui peut apposer, mais j'ai entendu dire qu'il y a de nouvelles puces et autres choses du genre qui sont utilisées. Avez-vous entendu parler de techniques qui pourraient nous aider à retracer ces produits dans la chaîne d'approvisionnement?
    Il y a de nombreuses technologies qui permettent de le faire. Au Canada, une entreprise appelée IDGLOBAL, à Kelowna, a mis au point une technique qui fait appel à l'ADN synthétique. Il y a le RFID, l'identification par radiofréquence, des produits chimiques, des hologrammes très perfectionnés.
    Est-ce que ces techniques sont utilisées?
    Oui. Microsoft, par exemple, utilise des technologies multicouches. Je ne connais pas toutes les technologies qu'utilise l'entreprise, mais certaines d'entre elles ont fait l'objet de démonstrations devant les tribunaux. Je suis certain que Microsoft, tout comme d'autres fabricants, utilise des technologies à couches multiples pour lutter contre la contrefaçon. Elle peuvent être très perfectionnées, et elles sont efficaces. Certaines sont invisibles, d'autres, pas.
(1730)
    Seriez-vous en mesure de fournir une liste de certaines des technologies qui existent?
    C'est votre dernière question, monsieur Carrie.
    Monsieur Lipkus.
    Oui. Nous pouvons le faire. Nous avons une présentation PowerPoint qui illustre certaines des technologies les plus importantes que nous utilisons dans le cadre de nos séances de formation.
    Monsieur Carrie, merci beaucoup.
    Monsieur Lipkus, chers témoins, merci d'être venus nous rencontrer aujourd'hui. La discussion a été fort utile et instructive. Je pense que nous sommes sur la bonne voie. N'hésitez pas à communiquer avec nous si vous avez d'autres points à aborder, ou d'autres renseignements à nous fournir qui pourraient nous aider dans nos travaux.
    Encore une fois, merci.
    Notre prochaine réunion aura lieu mercredi. La séance est levée.