:
Je vous remercie de me donner l'occasion de comparaître, messieurs. Je ne vous ai jamais rencontrés, sauf pour M. Weston, alors je vous remercie de vous être déplacés.
Je suis le président de la Fundy North Fishermen's Association. L'association représente des pêcheurs de St. Martins à Deer Island et du long de la côte nord de la baie de Fundy. Nous avons environ de 40 à 60 membres, soit probablement un peu moins que la moitié des pêcheurs de cette zone. Les autres ne sont membres d'aucune association. Notre association est une association bénévole. Les frais d'adhésion s'élèvent à 200 $. La plupart du travail est fait par des bénévoles, quoi que nous avons pu embaucher un employé de bureau pour traiter de certaines questions — paperasserie et ainsi de suite — au besoin.
Je suis également membre du Conseil pour la conservation des ressources halieutiques, mais je ne comparais pas ici aujourd'hui en cette capacité. Vous avez déjà parlé à Jean-Guy et à Gérard, et avez été témoins du déni de la réalité. Je parle au nom de Fundy North et, je dois le dire, un peu en mon nom également.
Je suis aussi membre du Conseil du golfe du Maine sur l'environnement marin, la table ronde provinciale sur les pêches et la table ronde Scotia-Fundy, alors je passe beaucoup de temps en réunion, en bonne partie dans mes temps libres et à mes propres frais, mais la pêche est ma vie, et c'est un sujet qui m'intéresse beaucoup.
Lorsque vous représentez une association — et je suis certain que je ne vous apprends rien — vous constatez qu'il y a beaucoup de points de vue différents. J'ai un bon ami au sein de l'association, un pêcheur, qui est convaincu qu'il faut moins exploiter les stocks de homards. J'ai un autre bon ami au sein de l'association, également un pêcheur, qui dit que les homards sont là pour être pêchés autant que possible, et que si c'est trop, tant pis pour eux. J'entends toutes sortes de points de vue, alors il est difficile pour moi de représenter un groupe
À Fundy North, nous tentons de travailler avec les gens avec qui nous avons des différends afin d'aller de l'avant. Je dirais que Fundy North a bien travaillé avec l'industrie de l'aquaculture pour tenter de régler certains des conflits que nous avions avec eux. Nous avons travaillé avec le groupe Irving relativement au terminal de GNL pour tenter de résoudre le conflit que nous avions avec ce groupe. Nombre de nos pêcheurs ont dit qu'il fallait soit s'y opposer, soit ne rien faire, soit lutter contre eux, mais notre approche a été de tenter de régler certains de nos problèmes.
Voilà le ton de mon exposé aujourd'hui, parce que nous avons des problèmes que nous tentons de régler sans toutefois avoir les mécanismes pour y arriver. J'y reviendrai plus tard, vous allez peut-être juger que je suis dur avec vous, messieurs, mais je prends le risque.
Selon les études scientifiques, dans la baie de Fundy, un homard atteint la taille réglementaire pour la pêche au bout de sept ans.Cet état de fait a deux conséquences majeures. D'abord, tous les homards qui seront pêchés au cours des sept prochaines années se trouvent actuellement au fond de l'océan. Deuxièmement, il faudra attendre huit ans pour connaître le taux de succès du frai de cette année.
Le plan actuel pour la pêche du homard consiste à pêcher autant de homards que possible chaque saison tout en respectant les règles de conservation. Cette pratique ne semble pas constituer un plan d'affaires prudent pour sept années de stock. La grande crainte dans une pêcherie compétitive, c'est que quelqu'un pêche le homard avant vous, ce qui explique pourquoi on tente d'en pêcher autant que possible.
Il n'y a aucun mécanisme en place pour examiner le plan économique à long terme. La commercialisation mondiale et la croissance rapide à l'échelle mondiale de l'aquaculture a augmenté la concurrence dans le marché des fruits de mer. L'industrie du homard injecte trop de produits dans le marché pour que les prix élevés auxquels on s'attend soient maintenus. La demande, et donc les prix, ont commencé à baisser avant même que le ralentissement économique actuel aggrave la situation. Les tableaux — j'en ai certains ici — indiquent que 2005 a été une année record pour les ventes et les prix des homards. Les ventes et les prix sont en baisse depuis.
Traditionnellement, la moitié des homards pêchés sont transformés, et l'autre moitié est destinée au marché du homard vivant. Les prix de traitement sont inférieurs à ceux du marché du homard vivant qui semble avoir atteint le plafond, alors qu'on n'a jamais enregistré autant de débarquements depuis 100 ans.
Une partie de l'industrie estime que dans cette conjoncture, il serait plus avantageux pour la pêcherie de remettre à l'eau les homards de moindre qualité, de limiter les débarquements pour réduire la surabondance sur le marché et de trouver une façon de réduire les fluctuations de prix afin de pouvoir planifier à l'avance les promotions. D'aucuns estiment que toute mesure en ce sens minerait l'avantage concurrentiel et d'autres que l'industrie est surcapitalisée et inefficace. D'autres encore trouvent que ceux qui travaillent fort seront récompensés et que le reste devra plier bagage. Le ministère des Pêches estime qu'il s'agit de préoccupations économiques et que le statu quo l'emportera si les mesures à prendre ne font pas l'unanimité.
Au sein de l'industrie, les avis sont aussi partagés au sujet de la santé à long terme du stock de homards. Certains disent que les débarquements actuels élevés prouvent que notre régime de gestion suffit à garantir la santé de la biomasse. D'autres sont d'avis que de commencer à pêcher un stock deux ans avant qu'il atteigne l'âge de frai, sans savoir quel pourcentage de ce stock est pêché ne peut que mener au désastre.
Si vous cherchez « cadre de développement durable » dans Google, vous obtiendrez plus de trois millions d'occurrences allant du développement durable de la forêt du Wisconsin à celui du secteur riverain de Toronto. On constate ainsi à quel point le concept du développement durable est devenu important pour notre société. Il est également intéressant d'apprendre que toutes les définitions reconnaissent que les considérations sociales et économiques sont toutes aussi importantes que les besoins écologiques.
S'il y a une chose sur laquelle l'industrie est d'accord, c'est sur le fait qu'il faut mieux commercialiser le homard. Ce que l'industrie ne semble pas saisir, c'est qu'une meilleure commercialisation implique un changement de pratique. Le Japon veut une meilleure connaissance et une meilleure gestion des toxines paralysantes dans le tomalli. L'Europe veut la traçabilité et une certification par une tierce partie que la pêcherie est viable. Les groupes environnementaux veulent davantage de protection pour les espèces à risque dans les plans de pêche. De nombreux détaillants importants demandent la certification du Marine Stewardship Council.
Les ressources de homard sont la propriété du peuple canadien. Cette ressource génère environ 1 milliard de dollars par année en revenu, surtout dans les communautés rurales. Ces ressources constituent dans de nombreuses régions le principal moteur économique, alors que d'autres pêches continuent à avoir beaucoup de mal à arriver. Il est possible de relever les défis auxquels cette industrie importante doit faire face, mais il faut des changements et de l'argent. Et voilà ce que je voulais ultimement faire valoir: notre régime réglementaire actuel ne nous permet de faire ni l'un ni l'autre.
Permettez-moi de m'écarter du sujet. Il y a de nombreuses années, environ 30 ans, lorsque j'ai commencé à représenter les pêcheurs, nous tentions de sauvegarder la pêche au saumon au filet provenant de la rivière Saint-Jean. Nous avons eu une réunion avec notre député de l'époque à ce sujet. À cette époque, le gouvernement venait tout juste de créer des postes d'agents de services communautaires. Il y avait des gens dans les collectivités qui tentaient d'aider les pêcheurs à travailler avec le ministère des Pêches pour régler leurs problèmes. Je me souviens que le député avait dit qu'il n'aimait pas ces agents de services communautaires. Il disait se souvenir du bon vieux temps où lorsqu'un pêcheur avait un problème, il prenait l'avion pour Ottawa et nous réglions son problème. Ces temps sont révolus, mais malheureusement, il n'y a pas de modifications à la réglementation qui nous permettent de prendre des décisions différentes. Nous ne pouvons prendre nous-mêmes des décisions. Je ne sais plus quoi faire, et c'est pourquoi je m'en remets à vous.
L'industrie a besoin d'un processus décisionnel qui ne définit pas le consensus comme une entente qui fait l'unanimité. J'ai deux exemples: si pour payer des impôts sur le revenu il fallait que tous les citoyens soient d'accord à le faire, rien ne se passerait; si on demandait le consensus au Parlement avant de mettre en oeuvre quoi que ce soit, rien ne se ferait. Mais c'est précisément ce qu'on demande aux pêcheurs.
L'industrie a besoin d'un mécanisme de collecte de fonds pour financer, par exemple, des débouchés commerciaux, le développement de produits et des nouveaux progrès scientifiques et technologiques. L'objectif serait d'améliorer les contributions du gouvernement au lieu de les remplacer. Mais l'industrie doit prendre certaines responsabilités. Rien n'engendre plus le sentiment de propriété que la participation aux coûts. On dit que celui qui paie les violons choisit la musique. Si le pêcheur veut avoir son mot à dire, il lui faut un mécanisme qui lui permette de régler certains des problèmes auxquels il est confronté.
Le gouvernement revient sur ses engagements de financement aux pêches et nous demande de faire davantage, mais il ne permet pas des initiatives qui exigeraient que tout le monde paye. J'ai été confronté à ce genre d'obstacles à de nombreuses reprises au cours des 30 années durant lesquelles j'ai représenté les pêcheurs, et je vais vous donner un exemple.
Nos quais ont été confiés aux autorités portuaires locales. De façon générale, ce système a assez bien fonctionné, mais les autorités portuaires n'ont pas l'autorité de prélever des frais. Elles dépendent finalement de dons. Si un pêcheur refuse de payer ses cotisations, on ne peut rien y faire. Nous avons demandé à de nombreuses reprises à des représentants du gouvernement de corriger la situation en ajoutant ces cotisations aux frais de licence ou en demandant aux utilisateurs des quais de payer, mais nous devons essuyer des refus. En ce sens, le gouvernement encourage la non-conformité et la non-coopération lorsqu'il récompense ceux qui ne se plient pas aux règles.
C'est la même chose pour l'obtention d'un consensus. Le gouvernement donne le droit de veto à n'importe qui en définissant le consensus comme une entente unanime. À titre d'exemple, on a tenté par trois fois d'adopter une nouvelle loi sur les pêches. Le projet de loi avait été déposé par les libéraux quand M. Regan était ministre, puis une autre fois sous les conservateurs alors que Hearn était ministre...
:
Bonjour. Je suis membre du Fundy Regional Forum, composé de représentants de l'industrie de la pêche du Sud du Nouveau-Brunswick. Nous couvrons la région qui s'étend de la frontière canado-américaine à Alma. Nous couvrons également les communautés insulaires de Grand Mana, Deer Island et Campobello.
Notre forum a récemment été entretenu sur le sujet de l'empoisonnement marin paralysant attribuable au homard par Mike Beattie, un docteur en médecine vétérinaire au ministère de l'Agriculture et de l'Aquaculture. J'ai ici de l'information de Santé Canada, il s'agit d'une nouvelle version mise à jour. On peut y lire:
Santé Canada recommande que:
—les enfants ne mangent pas de tomalli.
—quel les adultes limitent leur consommation quotidienne de tomalli à la quantité contenue dans un homard cuit.
Au forum, nous estimons que l'IPP dans les homards limite les ventes de nos produits sur le marché, et qu'il faut faire davantage de recherche et de développement, ainsi que davantage de tests sur le produit lui-même.
J'ai ici une lettre que nous avons rédigée et envoyée à la ministre, de même qu'au président de l'Agence canadienne d'inspection des aliments. J'aimerais vous la lire:
Madame la ministre Shea et madame Swan,
La présente fait suite au programme d'analyse et d'échantillonnage du tomalli du Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Écosse mené en automne 2008. Elle découle des discussions subséquentes relativement à des révisions possibles de l'avis de consommation de tomalli de Santé Canada.
L'information mise à jour de Santé-Canada est en fait une mise à jour du dernier avis qui a été acheminé, et qui recommandait une consommation réduite de tomalli. Le niveau de préoccupation a légèrement augmenté. La mise à jour a été faite tout récemment, soit le 19 mars.
Le Fundy Regional Forum est un comité d'intervenants de l'industrie des fruits de mer créé à la suite de recommandations découlant d'un processus de renouvellement des pêches au Nouveau-Brunswick. Le forum a été créé avec l'appui du ministre des Pêches, l'honorable Rick Doucet et de la Table ronde du ministre sur les pêches. Le forum fait la promotion d'intérêt commun et du développement, et traite des possibilités ou des défis auxquels doit faire face l'industrie des fruits de mer. Les membres ont à cœur le bien-être social et économique de la communauté et sont originaires de la région qui s'étend de la frontière canado-américaine au port d'Alma au fond de la baie de Fundy et comprend les communautés insulaire de Grand Manan, de Campobello et de Deer Island.
Les membres du forum sont maintenant au courant de plusieurs manques d'information scientifique sur le lien entre le homard, le tomalli, l'empoisonnement marin paralysant et la santé humaine. Votre appui pour l'obtention de réponses sur cette question de salubrité alimentaire délicate est nécessaire afin d'assurer la stabilité et la confiance dans les marchés et pour réduire toute possibilité de répercussion négative dans un marché mondial déjà volatile. Aujourd'hui, les exportations de homard canadien sont estimées à environ 1 milliard de dollars.
Malgré le fait que des enquêtes aient été entreprises initialement, la recherche doit absolument se poursuivre et demeurer une priorité pour le homard de l'Atlantique. Il est essentiel de recevoir une aide financière pour évaluer et/ou établir ce qui suit:
i. La consommation de tomalli, la toxicité et la santé humaine
ii. Distribution et prévisibilité spatiales et temporelles de l'empoisonnement marin paralysant et variation chez les homards et d'autres crustacés
iii. Accumulation et diminution des toxines dans les produits vivants et cuits
iv. Diagnostics, traçabilité et conformité sur le marché
L'approche de recherche collaborative établie en automne 2008 à laquelle participaient l'Agence canadienne d'inspection des aliments, Pêches et Océans Canada, le Centre de la science du homard du Collège vétérinaire de l'Atlantique, la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick, les pêcheurs de homard et l'association devrait être adoptée de nouveau et financée.
Nous comprenons qu'il peut être difficile de trouver de l'argent pour la recherche, surtout pour le secteur des pêches et des fruits de mer. À l'approche d'un nouvel exercice financier, nous nous attendons à ce que soit examinée très sérieusement la possibilité d'accorder de l'aide financière pour résoudre certaines des questions importantes qui ont été soulevées.
Nous croyons que votre soutien financier correspond aux objectifs, mesures et priorités établis en vertu du Cadre de renouveau pour les pêches au Nouveau-Brunswick. La saison de pêche du homard du printemps arrive à grands pas. La coordination, l'établissement et la création de rôles clés pour tout projet sont essentiels compte tenu du fait que la pêche commence le 1er avril.
Nous vous remercions de votre attention et comptons sur votre réponse positive relativement à cette question importante.
Bref, nos homards sont refusés dans certains marchés, particulièrement au Japon, ce qui crée plus de pression dans nos autres marchés. Nous croyons qu'avec un peu plus de recherches approfondies sur l'IPP dans le homard, nous pourrons obtenir les approbations nécessaires pour vendre nos produits à l'échelle mondiale, pour la consommation de tous.
Merci beaucoup.
:
Merci, monsieur le président.
Bienvenue à tous dans ce comité et au Nouveau-Brunswick. Je suis ravi d'être ici, même si nous sommes encore un peu loin de ma circonscription, on est probablement plus proche de celle de Rodney. Je remercie tous les gens de la collectivité qui sont venus.
Je m'en voudrais de ne pas souligner la présence de deux personnes spéciales. Il s'agit de deux députés provinciaux des environs, Wayne Steeves d'Albert et Mike Olscamp de Tantramar. Merci, messieurs, d'être venus aujourd'hui.
J'aimerais vous poser quelques questions. Greg, nous avons parlé tout à l'heure du processus décisionnel. À titre de membre du Conseil pour la conservation des ressources halieutiques, vous connaissez probablement le rapport. Certains témoins nous ont dit qu'il y avait eu un effort considérable de rationalisation et nous ont parlé de ce que le rapport appelle l'initiative du Québec. Vous avez dit que dans certaines ZPH, l'idée du rachat de permis est accueillie avec assez d'indifférence, mais il y a d'autres zones où il faudrait probablement rationaliser un peu et je comprends ce que vous dites au sujet de ceux qui voudraient moins exploiter la ressource et ceux qui voudraient pêcher davantage. C'est pas mal la même chose dans toutes les zones.
Si certaines ZPH ont réussi à rationaliser leurs propres activités, quels genres de mesures avez-vous envisagées pour réduire le taux d'exploitation, particulièrement dans la ZPH 36?
:
Je m'appelle Norman Ferris et je suis un pêcheur de pétoncles et de homards dans le district 36.
Notre industrie n'est pas différente de la culture de la pomme de terre ou de la récolte du bois. Nous exploitons tous une ressource et c'est la demande du consommateur qui détermine le prix. Comme eux, le coût élevé du combustible, des appâts, des engins et de l'équipement nous causent des difficultés. Nous utilisons la meilleure technologie afin de ne pas nous laisser dépasser — casiers métalliques les plus modernes, électronique, plus gros bateaux. Nous prenons plus de homards que jamais auparavant et nous voyons davantage de jeunes homards. Les stocks de homards sont abondants.
En tant qu'entrepreneurs, notre objectif est d'avoir une pêche rentable et durable. Voici les mesures que nous prenons pour protéger nos stocks: marquage par encoche en V des femelles oeuvées, dimension et nombre de casiers limités, évent d'échappement, saisons et vérification de la taille.
Lors d'un ralentissement de l'économie, la première chose dont les gens se privent sont les produits de luxe comme le homard. La baisse de la demande entraîne une baisse des prix.
J'ai fait des exposés dans trois colloques touristiques pendant l'été 2008. Il y a en général 30 participants, tous des Américains. Ils s'intéressent à notre pêche et à notre façon de prendre le homard. La question qu'on me posait le plus souvent était celle de savoir comment reconnaître si un homard est frais. Ils m'ont raconté avoir commandé du homard au restaurant et qu'on leur a servi un homard avec très peu de chair. Ils ont dit qu'ils n'avaient jamais plus commandé de homard, ni au restaurant ni chez le poissonnier.
Les homards d'une livre qu'on conserve pendant quatre ou cinq mois dans un vivier avant de les vendre ne sont plus frais et leur qualité n'est plus ce qu'elle était au moment où les pêcheurs les ont vendus. S'il y avait moyen d'imprimer sur le homard la date à laquelle il a été acheté du pêcheur — ou même seulement le mois — cela accélérait peut-être sa vente et renforcerait la confiance du consommateur. Le homard est conservé en attendant que le prix augmente, parfois jusqu'à quatre fois celui versé au pêcheur, alors que la qualité marchande du produit se détériore.
Nos relations avec les acheteurs n'ont pas changé depuis les années 1970. Nous ne savons pas le prix que nous en obtiendrons tant que le homard n'est pas empilé sur le quai. On ne nous le dit jamais avant. En 2006-2007, certains acheteurs prenaient possession du homard trois jours avant de déterminer le prix.
Il faut que le secteur du tourisme fasse la promotion de notre homard, à la fois auprès des touristes et de nos concitoyens du Nouveau-Brunswick. Discutons de la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui. Notre principal marché est les États-Unis mais leur économie est en pleine dépression, avec des millions de personnes sans emploi ou menacées par des mises à pied. Les perspectives de prix du homard ce printemps ne sont pas bonnes.
Qu'est-ce que notre gouvernement peut faire pour nous aider? Voici trois suggestions.
Premièrement, si les ventes sont tellement faibles que les critères de l'AI ne sont pas respectés, il faudrait permettre d'inclure le revenu hors-saison dans le revenu assurable.
Deuxièmement, subventionner le prix et, à la fin de la saison, que les pêcheurs présentent leur demande, en fournissant leurs factures et sans que les acheteurs aient rien à dire, ni possibilité de revendication ou de contrôle.
Troisièmement, créer un conseil ou un comité pour surveiller la majoration du prix du homard frais dans les magasins. Par exemple, on verse 3,75 $ aux pêcheurs et on en réclame 11,75 $ aux consommateurs. On abuse de la libre entreprise.
L'essentiel, c'est la demande. Si nous pouvons accroître la demande ici au Canada, cela contribuerait à stabiliser le marché.
Merci.
:
En tant que pêcheur, j'ai assez peu d'expérience. Cela fait quatre ans seulement que j'ai mon propre bateau et mon propre permis. Depuis que j'ai environ 15 ans je ne rate aucune chance de monter à bord d'un bateau et j'ai travaillé comme homme de pont pendant huit ou neuf ans.
Au cours des dernières années, l'an dernier surtout, le prix a chuté de manière spectaculaire, mais, si vous allez à l'épicerie, là le prix n'a pas changé. Il y a quelqu'un qui s'en met plein les poches entre mon bateau et l'épicerie. Nous devons nous rapprocher du consommateur. Il y a trop d'intermédiaires entre le pêcheur et le consommateur.
Je pêche également le pétoncle. Un jour, j'étais chez Sobeys et j'ai vu qu'ils vendaient les pétoncles frais pour 13 ou 14 $ la livre. Sur le quai, les acheteurs nous donnaient environ 6,50 $. J'ai demandé à l'employé d'où provenaient les pétoncles. Il est allé derrière, est revenu avec une boîte de conserve dont l'étiquette disait pétoncles frais de Bedford, Massachussetts. Moi je pêche les pétoncles à 20 minutes de là et lui il paie probablement 10 $ la livre pour acheter des pétoncles frais du Massachussetts. L'acheteur envoie le gros de mes pétoncles à Boston ou ailleurs au Massachussetts d'où ils sont réexpédiés en sens inverse. Je lui ai dit que je pouvais lui vendre des pétoncles pour 7 $ la livre. Je gagnerais plus d'argent et lui aussi. Mais il m'a dit qu'il ne pouvait pas faire cela; il n'avait pas le droit d'acheter mes pétoncles à moins d'avoir un permis d'acheteur.
Les intermédiaires font beaucoup d'argent. Je suis sûr que c'est vrai aussi pour le homard.
Nos prix ne cessent de baisser, mais l'acheteur va continuer à réduire le prix pour montrer combien il gagne. Mais il gagne toujours autant. Je ne crois pas qu'il subisse de perte. Il nous transmet la baisse mais lui conserve la même marge. S'il gagne 50 ¢ la livre et que le prix baisse d'un dollar, il nous donne un dollar de moins et lui gagne quand même 50 ¢.
Norman vous parlait de la qualité du homard qu'on vend. En général, dans le monde entier, les gens achètent du homard et les conservent dans des viviers pendant cinq ou six mois; pendant ce temps, la qualité du homard se détériore. Je crois que réfrigérés ils conserveraient un peu mieux leur chair, mais ce n'est pas toujours ainsi qu'on les garde. Si vous allez dans un restaurant à Toronto ou ailleurs et que vous payez 35 $ pour un homard, que vous l'ouvrez et qu'il n'en sort rien que de l'eau, allez-vous de nouveau commander du homard? Probablement pas. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous devons nous rapprocher du consommateur.
Je crois que le gouvernement doit faire un plus grand effort de commercialisation pour nous. À titre individuel, nous ne pouvons pas faire grand-chose pour promouvoir le homard à l'étranger. On voit de vastes campagnes de commercialisation du saumon, et je crois que la province a investi pas mal d'argent dans le secteur du saumon, dans l'aquaculture.
C'est en gros ce que j'avais à dire au sujet de la faiblesse des prix. Il y a bien d'autres questions que j'aimerais aborder, mais je pense qu'elles ne relèvent pas de votre mandat. Je crois que certains d'entre vous avez mon texte. Si vous avez des questions sur les autres éléments, je serais très heureux d'en parler.
Il y a une autre chose. Lorsque je me suis lancé dans la pêche il y a quatre ans, j'ai eu énormément de difficulté à trouver quelqu'un qui accepte de me prêter de l'argent. Je voulais emprunter un quart de million de dollars, ça fait des sous. Les banques n'accordaient aucune valeur à mon permis et refusaient de l'accepter comme nantissement. Je voulais acheter un vieux bateau d'une valeur de 20 000 $. C'est tout ce que j'avais comme nantissement. J'ai dû hypothéquer ma maison et trouver des co-signataires, etc. Les banques étaient hors de question. J'ai été obligé de m'adresser à la Charlotte County Business Development Bank qui a accepté de me prêter de l'argent, mais à un taux d'intérêt insensé, 10 p. 100 ou plus.
Dans un an, j'aurai remboursé le plus gros de mes prêts et je pourrai respirer un peu plus librement, mais je sais que pour le moment je ne peux pas compter seulement sur mon revenu de la pêche. Pendant l'hiver, je vais devoir pêcher le pétoncle et pendant l'été je devrai travailler dans la construction. Je ne pourrai pas faire autrement.
C'est tout. Je ne peux rien ajouter.
:
J'avais travaillé sur des bateaux pendant des années et j'avais beaucoup aimé mon expérience. J'ai travaillé en Colombie-Britannique pendant un an, dans l'industrie forestière, et lorsque je suis revenu à la maison j'ai décidé que je devrais faire ce que j'aimais, c'est-à-dire pêcher. Je suis retourné travailler avec un homme âgé en tant que matelot de pont. Il avait plus de 80 ans, alors je faisais la plus grande partie du travail, et j'ai beaucoup appris. Il pêche encore un peu avec son fils.
C'est ainsi que je suis revenu à la pêche, et je lui ai dit que lorsqu'il serait prêt à vendre, je serais intéressé à acheter. À un moment donné, j'ai cru qu'il l'avait vendu à une autre personne, parce qu'il ne croyait pas que je pouvais rassembler l'argent nécessaire. C'était trop d'argent pour moi, il ne croyait pas que je le trouverais. Mais l'entente a échoué. Il a continué pendant une autre année, et je lui ai dit de me donner une année et j'allais essayer de trouver le nécessaire. Nous avons pêché ensemble pendant une autre année. Et c'est alors que j'ai cherché à emprunter l'argent pour l'acheter.
Les banques étaient prêtes à me prêter l'argent, mais elles voulaient des garanties — la maison, la terre, la maison de mes parents, et le reste, pour garantir les 250 000 $. Alors je suis allé à la BDC, et elle fut très utile. Les gens là-bas m'ont dit qu'ils pouvaient me prêter la moitié, 100 000 $. Et ils pouvaient me prêter 50 000 $ de plus en passant par le comté de Charlotte. Ils ont été très bons. Je leur transmets mes états financiers chaque année, et ils continuent de me surveiller. Je n'ai jamais eu de problème avec mes paiements jusqu'à maintenant, mais je suis inquiet. Au printemps dernier, lorsque les prix ont baissé, j'ai pris plus de homards et j'ai pu compenser cette baisse. Si je n'avais pas pris plus de homards, j'aurais éprouvé des difficultés. La BDC, lorsque vous avez une mauvaise année, l'ajoute à la fin de votre contrat pour compenser. Mais elle a été la seule qui m'a aidé.
Je veux rétablir les faits. Je pense que le meilleur endroit pour manger du homard, c'est en Alberta, quel que soit l'endroit où il a été pêché.
Messieurs, je suis un Albertain qui s'intéresse beaucoup à la pêche. J'ai grandi sur une ferme et je vois beaucoup de similarités entre les agriculteurs et les pêcheurs. Vous êtes un preneur de prix. Vous ne contrôlez pas le coût de vos intrants, et vous ne contrôlez pas le prix que l'on vous offrira. En Alberta présentement, et surtout dans l'ouest du Canada, l'âge moyen des agriculteurs est d'un peu plus de 60 ans. Il y a une blague voulant que lorsqu'un père transmet sa ferme à son fils, on devrait l'accuser de maltraiter son enfant.
Tout comme vous, monsieur Withers, la plupart des agriculteurs doivent pallier à leur revenu. On parle d'une dépendance à l'agriculture. Vous aimez beaucoup la pêche, et vous payez pour votre dépendance à la pêche en travaillant dans un autre secteur, que ce soit la foresterie ou la construction. Bien sûr, en Alberta beaucoup d'entre nous vont travailler dans le secteur de l'énergie lorsque nécessaire.
Alors je vois beaucoup de similitude. Je vois beaucoup de frustration, et j'ai de l'empathie pour vous. J'ai hâte d'avoir l'occasion de faire certaines recommandations qui, je l'espère, aideront votre industrie.
On parle constamment de niveaux de prises records. Lorsque nous avons discuté avec Colin MacDonald, le président-directeur général de Clearwater Seafoods, il a dit qu'il y avait encore plus de homards que jamais auparavant, mais que la qualité n'était pas excellente. Il a parlé du problème de qualité, monsieur Ferris, et on a utilisé le mot « Wal-Mart », bien que je n'ai jamais vu de homard vendu chez Wal-Mart.
À l'automne dernier, pendant la campagne électorale, j'ai mangé à un restaurant Subway, et ils vendaient une sandwich au homard. Lorsque j'étudiais à l'université il y a 20 ans, le seul endroit où l'on trouvait du homard en Alberta était dans un restaurant haut de gamme, mais maintenant on le retrouve dans des sandwiches du Subway. L'on parle de prises records, mais je ne sais pas si c'est la meilleure chose pour l'industrie. Peut-être qu'on devrait en prendre moins, les vendre à un prix plus élevé, pour qu'ils demeurent dans un échelon élevé. Il est difficile de dire cela pendant une période de ralentissement économique, lorsqu'il y a moins de demandes pour un objet de luxe, mais je me demande quelle est votre opinion à ce sujet. Le homard devient comme un hamburger que l'on vend dans un restaurant, et je ne suis pas certain que cela soit utile à votre industrie.
Avez-vous des commentaires à faire à ce sujet?
:
Ma prochaine question concerne quelque chose qui a été soulevée lors de notre passage aux Îles-de-la-Madeleine où un témoin a établi un lien entre l'agriculture et les pêches et a demandé la fusion des ministères de l'Agriculture et des Pêches en un seul afin que les pêcheurs aient accès à certains programmes d'aide financière dont bénéficient les agriculteurs. Les programmes que nous appelons généralement programmes de stabilisation du revenu.
Je vous donne un exemple. Dans le cadre d'un de ces programmes, un agriculteur peut, pendant les bonnes années, déposer son excédent de revenu dans un compte à impôt différé plutôt que de payer des impôts ou de le réinvestir dans de l'équipement dont il n'a pas besoin. Puis, pendant une année de mauvaise récolte, sans que ce soit sa faute, ou de mauvaises conditions météorologiques, il peut retirer de l'argent de ce compte, en payant l'impôt, afin de payer ses factures.
L'ennui c'est qu'il faut gagner assez d'argent pendant les bonnes années pour pouvoir en mettre un peu de côté. Mais à la fin de sa carrière, l'agriculteur peut utiliser cet argent comme fonds de retraite et retirer l'argent après avoir vendu son exploitation.
Avez-vous déjà songé à demander à être inclus dans ce genre de programme de stabilisation du revenu? Pendant les bonnes années, votre comptable vous encourage à acheter un nouveau bateau ou une nouvelle camionnette ou autre chose afin d'éviter de payer des impôts mais lorsqu'arrivent les mauvaises années, vous êtes tenus de faire les paiements sur cette camionnette que votre comptable vous a poussé à acheter et vous n'avez accès à aucune source de fonds pour vous aider pendant les périodes de vaches maigres.
Avez-vous des suggestions à nous faire au sujet de programmes que le gouvernement pourrait créer qui en fait ne coûtent rien au gouvernement mais qui vous permettraient d'utiliser vos propres ressources et vos propres bénéfices pour préserver vos entreprises?
Je suis un pêcheur de homard de Chance Harbour, Nouveau-Brunswick, je pêche dans le district 36. J'ai obtenu mon premier permis de pêche au homard en 1964, mes souvenirs remontent donc à quelques années. Je peux seulement vous parler des mes observations personnelles et de ce que me disent d'autres pêcheurs plus âgés. Jamais, depuis la création du district 36, les prises de homards n'ont-elles été aussi élevées qu'au cours des 12 à 15 dernières années. Les prises dans le district 36 sont sans précédent.
Voici une observation personnelle. En regardant par la fenêtre de ma maison ancestrale de 160 ans, il était courant de voir plusieurs bateaux senneurs avec leurs seines en bourses naviguaient durant les belles journées d'hiver des années 1960. Puis avec la venue des quotas et les vérifications à quai, il n'y a plus de sardines, plus de bateaux senneurs. Et à la fin des années 1970 et dans les années 1980, plusieurs bateaux de Chance Harbour avaient de bonnes prises de morues. Puis on a eu les quotas puis les vérifications à quai — plus de morue. Vous voyez où je veux en venir. Les quotas et les vérifications à quai annoncent la fin du homard. Comme on dit avec raison: « On ne répare pas ce qui marche bien ». Le MPO veut ruiner quelque chose qui marche bien en appliquant plutôt la maxime de Red Green: « Si ça marche bien, c'est que vous n'essayez pas assez fort ».
De nombreux facteurs peuvent expliquer l'augmentation des prises dans le district 36, notamment que dans ce district nous avons, en passant de 375 à 300 casiers, perdu 75 casiers. Nous avons renoncé à deux mois et demi de pêche. L'application des règlements a été largement renforcée ces dernières années, grâce au dévouement des agents responsables. La baisse du nombre de prédateurs — morue, merluche, goberge et poisson chat — a sans doute contribué à l'augmentation des prises de homard. Tous ces facteurs, en plus du fait que nous avons une saison plutôt qu'un quota, de même que l'augmentation de la taille de la carapace et l'absence de quotas pour la vérification à quai aident à garantir la viabilité de la pêche.
En conclusion, je crois qu'il ne devrait y avoir ni quota ni vérification à quai pour le homard.
Une autre chose. Un changement qu'on pourrait apporter dans le secteur du homard c'est le rétablissement du rôle du propriétaire exploitant. Et je veux dire un véritable propriétaire exploitant, pas une entente quelconque qui donne au MPO l'impression que l'exploitant est le propriétaire.
Merci.
:
Je m'appelle Dale Mitchell. Moi aussi j'habite et je pêche dans le district 36, sur Deer Island, au Nouveau-Brunswick. Je détiens plusieurs permis. L'hiver, je pêche le pétoncle, au printemps, le homard, en été la sardine et le hareng et en automne, le homard. À une époque, mon revenu provenait environ à parts égales des trois pêches. Maintenant, le homard me procure 80 p. 100 de mon revenu en raison de mes prises beaucoup plus importantes, beaucoup plus élevées que je ne l'aurais jamais imaginé.
J'ai apporté la liste de mes débarquements et de mes prix. Je ne vais pas les rendre publics. Cependant, il y a 20 ans, en 1988, le prix du homard a commencé à 4,55 $ et a augmenté jusqu'à 4,85 $. C'était il y a 21 ans. L'an dernier, le prix du homard a augmenté de 7,60 $ avant de baisser à nouveau.
En septembre et octobre derniers, nous avons vu les prix dans le Maine tomber à 2 $ US. Nous avons eu le même sentiment qu'après le 11 septembre. À ce moment-là, le marché a baissé autant mais s'est rétabli de nouveau pendant le mois de novembre. On entendait les mêmes rumeurs cette année — l'industrie de la transformation du Nord du Nouveau-Brunswick avait des stocks trop abondants, les ventes dans les restaurants étaient faibles, des gens achetaient d'autres produits, la devise canadienne était forte. Cette fois-ci, ce sont les marchés boursiers qui ont baissé, les banques américaines sont maintenues à flot par le gouvernement, les fonds de couverture perdent de l'argent, les emplois disparaissent, le prix du carburant est élevé et il règne un pessimisme général.
Quel choix avions-nous? Nous avions espéré de bons prix et des homards à carapace dure de bonne qualité. Puis nous avons appris que le prix serait de 3,50 $ pour la plupart des acheteurs. Mon acheteur habituel a fixé son prix à 3,90 $ pour les homards de moins de cinq pouces et à 2,30 $ pour les géants de plus de cinq pouces destinés essentiellement à la transformation. C'était le prix de mon acheteur habituel, mais je vendrai à n'importe qui si je peux obtenir 5 ¢ de plus. Mon acheteur a un système à deux prix. Nous récompensons les pêcheurs qui prennent moins de géants et encourageons les pêcheurs à débarquer du homard de qualité supérieure.
Les acheteurs qui ont un seul prix fixent celui-ci en calculant la moyenne de tous les prix de ces pêcheurs. Ceux qui prennent moins de géants y perdent, ceux qui prennent beaucoup de géants y gagnent. Lorsqu'il y a un prix unique, il faut prendre autant de homards possibles, sans égard pour la qualité ni la taille. L'automne dernier des rumeurs venant de la Nouvelle-Écosse assuraient que les acheteurs cesseraient d'acheter le 15 décembre puisque les stocks étaient déjà trop élevés. Lorsque le district 34 de la Nouvelle-Écosse a ouvert à la fin de novembre, notre prix a baissé de 25 cents partout, mais à Deer Island, où je pêche, le prix est resté à 3,60 $ ou 3,70 $.
J'aurais pu obtenir 5 ¢ de plus d'un autre acheteur, mais j'avais peur de changer. J'avais peur que cet acheteur accepte puis me laisse tomber parce qu'il pourrait arrêter d'acheter. J'ai pensé qu'il était préférable de continuer avec l'acheteur que je connaissais déjà. Pour la première fois depuis 32 ans, mon acheteur m'a dit qu'il ne pouvait pas dépasser sa limite de crédit qu'il pouvait auparavant faire augmenter par un simple appel téléphonique. S'il ne vendait pas assez de homards et voulait en conserver une certaine quantité, il lui suffisait d'appeler la Banque de commerce pour faire augmenter sa limite de crédit. Il dit que maintenant la banque l'oblige à se rendre à la succursale et à remplir toute la paperasse sans que cela garantisse que sa limite de crédit sera augmentée. Il s'inquiétait de la vente de son homard.
Jim Flaherty a raison de dire que la crise du crédit nuit à tout le monde, y compris aux pêcheurs de homard. En novembre-décembre, j'ai vérifié le marché et le dollar américain avait augmenté de 15,6 p. 100 depuis l'ouverture de notre saison. C'est difficile pour les acheteurs. C'est difficile pour le monde. Même l'Europe transige souvent en dollars américains. C'était difficile. On voyait bien des choses qui nous laissaient perplexes.
Mon acheteur disait également que les grossistes étaient lents à le payer. Vers le 15 décembre, je suis allé à son entrepôt où il a des viviers d'une capacité de 500 000 livres. Il était presque vide. Il avait prévu tout vendre avant le nouvel an mais a préféré le faire avant Noël, ce qu'il a réussi à faire. Il était heureux que le homard soit parti et de savoir qu'il n'aurait pas des factures d'électricité élevées pendant l'hiver. Il n'avait plus rien à vendre et s'en réjouissait. Il disait être gagnant et heureux.
Entre Noël et le jour de l'An j'ai appelé un de mes amis à l'île du cap de Sable, district 34, qui est ministre. Il m'a dit que le prix du homard augmentait de jour en jour. À ce moment-là, j'en avais 1 200 livres en réserve. Je les ai vendus pour 4,20 $ et j'en étais très heureux. Je l'ai rappelé quatre ou cinq jours plus tard et le prix était rendu à 5 $. Quelques jours plus tard, il avait atteint 6,50 $. C'était après le jour de l'An, période où, même les meilleures années, le prix du homard diminue en général en raison de la baisse de la demande. Que s'était-il passé?
Je pense que la faiblesse des prix du homard frais nous a aidé. On en a beaucoup parlé à la radio et à la télévision américaines et canadiennes, ce qui nous a fait de la publicité. Les pêcheurs qui vendaient leurs prises dans la région de l'Atlantique directement de leurs camionnettes ont aidé Superstore, Sobeys et d'autres détaillants à baisser leur prix, ce qu'ils n'avaient pas encore fait. Nous touchions 3,50 $ alors qu'à Saint John le prix était encore de 11,95 $ pour un homard d'une livre et demie. C'est un énorme défaut du système. Lorsque le prix que nous obtenons baisse, il ne semble jamais y avoir de diminution du prix au détail. Ça semble se produire juste à notre bout de la chaîne, tout comme pour les agriculteurs, comme nous le disions tout à l'heure. Je n'y comprends rien.
Le 30 décembre, une animatrice de Canada AM a dit qu'elle était allée chez trois détaillants de Toronto et qu'elle n'avait pas trouvé de homards frais. Il n'y avait aucun homard de disponible dans cette région, ce qui m'a semblé être une bonne chose; cela voulait dire qu'on écoulait le produit. Cela montre que la faiblesse des prix a permis d'écouler nos stocks.
Un acheteur local prétend qu'il y a eu collusion entre les grandes entreprises dans le temps de Noël pour additionner tous les stocks disponibles pour les quatre mois suivants — parce qu'elles savaient que les prises de homard avaient déjà atteint un sommet et qu'elles commençaient à diminuer en raison de la froideur de l'eau — et ont dit: « Oui, nous pouvons augmenter le prix », et c'est ce qui est arrivé. À mon avis, lorsque le pêcheur obtient plus de 7 $ le prix du homard est trop élevé et les gens cessent d'en acheter et se procurent autre chose à la place. Ensuite, il faut que le homard revienne très bon marché pour que les gens décident d'en acheter de nouveau.
Qu'allons-nous faire? Nous sommes rendus à la fin de mars. Nous entendons dire qu'il y a d'énormes stocks de homards transformés dans le Nord du Nouveau-Brunswick. Nous voyons l'économie mondiale ralentir avec 300 à 400 000 emplois perdus au Canada cette année et quatre à cinq millions d'emplois perdus aux États-Unis. Bon nombre de ces emplois sont dans le secteur des banques et sont syndiqués, c'est-à-dire que ce sont des emplois bien rémunérés qui donnent aux gens les moyens de consommer.
L'une de mes idées pour aider le prix c'est de débarquer davantage de homards de première qualité. Par exemple, il ne faudrait plus débarquer de homards avec une seule pince, qui aboutissent en trop grand nombre dans les usines de transformation. La même chose est vraie pour les géants, qui sont en général destinés à la transformation. Nous devons cesser de débarquer n'importe quoi qui risque d'inonder le marché et de faire baisser le prix, ce qui se produit à cause de notre système de prix unique. Si le géant est rejeté à la mer il pourra se reproduire et le homard à une pince aura remplacé sa pince manquante après quelques années et pourrait être vendu comme un homard de première qualité. Cependant, pouvons-nous avoir confiance que le reste de la chaîne, les grossistes et les autres, récompenseront les pêcheurs qui débarqueront du homard de meilleure qualité ou se contenteront-ils de réduire le prix de la marchandise de qualité inférieure? Il n'y a pas moyen de le savoir.
Puis il y a la question des bassins. Auparavant, Deer Island, où j'habite, et Grand Manan avaient quelques-uns des rares viviers à marée où l'on pouvait conserver une grande quantité de homards. À cette époque, on les nourrissait régulièrement et souvent les homards prenaient du poids dans ces viviers. Maintenant ces bassins se trouvent un peu partout. Vous en a-t-on déjà parlé? Ils peuvent être construits n'importe où. Clearwater en a un au Kentucky, d'après le magazine The Economist , parce que c'est le point d'expédition le plus proche pour FedEx. Les homards y sont conservés dans des tubes réfrigérés à 37 degrés pendant des mois. Cela me fait penser à l'ours qui est gras en novembre, hiberne pendant plusieurs mois et ressort amaigri au printemps. Nous savons que le taux de survie du homard dans les viviers est élevé mais ils ont moins de protéine et de chair que les homards conservés dans les viviers à marée traditionnels.
En automne, le homard n'est pas entièrement rempli puisque la mue se produit en automne. Or on le conserve dans un vivier pendant quatre mois pour ensuite le vendre à prix élevé malgré qu'il soit gorgé d'eau. Par exemple, en mars et avril de l'an dernier des pêcheurs de la Nouvelle-Écosse qui avaient réservé de l'espace dans des viviers n'ont pas pu vendre leurs homards à cause de la faiblesse du prix du homard conservé à cet endroit. Ils ont repris leurs homards sur leurs bateaux et sont retournés à la pêche puis les ont mélangés avec leurs nouvelles prises et les ont débarqués à nouveau pour essayer de les vendre à un prix plus élevé puisque le homard de vivier se vend toujours à un prix inférieur au homard frais en raison de leur qualité inférieure.
Ces homards canadiens gorgés d'eau, de qualité inférieure, sont arrivés sur le marché de la Nouvelle-Angleterre où ils ont fait chuter le prix de tous les homards canadiens. Cela montre ce qui peut arriver. La vision à court terme de quelques pêcheurs est l'un des facteurs qui peut ruiner le prix.
Dans bien des cas, le négociant local est déconnecté du processus. Il travaille à commission comme intermédiaire entre les pêcheurs et les entreprises. Son seul intérêt est d'acheter autant d'homards que possible, sans égard pour la qualité. Lors d'une réunion, il y a deux semaines, j'ai entendu un acheteur dire qu'il n'avait aucune idée de ce qui arrivait à son homard lorsque celui-ci quittait le quai. Il faut l'instruire et l'inclure dans le processus d'achat.
Pour ce qui est de la conservation, le MPO parle depuis 15 ans de protéger une plus grande biomasse féconde. Tout d'abord, on nous a parlé du homard géant, ayant une carapace de 5 à 6 pouces ou plus. Cela aurait favorisé la reproduction et aurait évité que des homards de qualité inférieure se retrouvent sur le marché. Dernièrement, j'ai entendu parlé d'une fenêtre de grosseur limite, ce qui veut dire qu'on ne pourra pas garder les homards ayant une carapace de 4 1/2 pouces à 5 1/4 pouces environ.
:
Il me faudrait encore une minute et demie. J'accélère lorsque je parle de grosses prises et de prix élevés.
Des pêcheurs qui regardaient par le petit bout de la lorgnette ont acheté trop de bateaux et de permis coûteux. Lorsque le MPO a équipé des groupes autochtones, un permis dans mon district, le district 36, est passé de 25 000 $ à 400 000 $. Depuis, le prix est retombé à 100 000 $, ce qui est encore trop élevé, mais il suit maintenant une tendance qui les rend plus abordables.
Mes félicitations au MPO pour avoir essayé de ramener les propriétaires exploitants.
Changements à la saison de printemps. Aux alentours du 1er mai, la pêche du homard ouvre à Terre-Neuve, aux Îles-de-la-Madeleine, sur la côte est du Cap Breton, dans quelques zones du Nord du Nouveau-Brunswick, dans une partie de l'Île-du-Prince-Édouard, et la péninsule gaspésienne. Le Sud-Ouest de la Nouvelle-Écosse débarque 80 p. 100 du homard de printemps en mai. Grand Manan, la région continentale du Nouveau-Brunswick et la Baie de Fundy sont également ouvertes, et aussi la région près d'ici. En cette période de l'année, d'énormes quantités de homards sont débarquées, sans compter les prises de la Nouvelle-Angleterre. Nous devrions songer à étaler la pêche en mai, juin et juillet. L'an dernier, 90 p. 100 des pêcheurs de notre district ont voté en faveur de la fermeture en avril et du prolongement de la saison de 2008 jusqu'en juillet. Les districts des environs, ont bloqué nos efforts par des moyens politiques. Combien cela nous aurait aidé l'an dernier si nous avions pu étaler la pêche sur une période plus longue.
Je vais en sauter.
Publicité. Il y a un mois, je me suis placé dans le rayon du poisson dans un Costco de Montréal et j'ai regardé les clients pendant une vingtaine de minutes. Ils ont acheté beaucoup de saumon congelé, mais du homard cuit congelé d'une livre et demie chacun, ils n'en ont pas acheté un seul. La différence de prix n'était pas tellement grande non plus. J'ai raconté ça à un acheteur lorsque je suis rentré à la maison. Il m'a dit: « On ne voit pas souvent du homard dans les émissions de cuisine ». Nous devons mieux informer les consommateurs sur toutes les façons de déguster le homard, peut-être sur ces chaînes de cuisine. Le MPO ou le gouvernement devrait faire de la publicité pour encourager la consommation de homard, afin que les gens sachent tout ce qu'on peut faire avec le homard.
Mon épouse travaille dans un petit bureau à Saint John où il y a, je pense, 12 ou 14 employés. Ces personnes n'achèteraient jamais un homard dans un magasin, mais ils nous en achètent 700 livres à l'automne ou au printemps. Je ne pourrais pas vous dire pourquoi; c'est ainsi, c'est tout.
Limites de casiers — je vais abréger cette partie. L'État du Maine a réduit le nombre de casiers de 2 500 à 600 ou 800 au cours des cinq dernières années, sans que les prises diminuent. Les prises sont tout aussi élevées. Bien sûr, leur nombre de prises par casier a augmenté et leurs coûts ont dû certainement baissé, puisqu'ils utilisent tellement moins de casiers. Voici ma question: pourquoi avons-nous encore 375 casiers dans certains districts de cette zone? Notre objectif devrait être la rentabilité, pas de voir à quelle vitesse nous pouvons débarquer du homard. Tout ce qu'on fait dans ce cas là — à mon avis, d'après ce que j'ai vu — c'est d'étaler les prises sur une période de temps plus longue, plutôt que d'atteindre un sommet au début de la saison. Cela aiderait.
Les prix. Comme je le disais tout à l'heure, j'ai mon propre vivier et je conserve du homard, mais il devient de plus en plus difficile de faire cela étant donné toutes les rumeurs qui circulent en Nouvelle-Écosse et qui ne sont pas négligeables dans toute cette situation. Y a-t-il une raison qui empêche les pêcheurs et les négociants de la Baie de Fundy, qui dépendent tous de la même ressource, qui dépendent tous de la même courte saison, du même marché, de se faire suffisamment confiance pour établir un prix le 1er octobre que nous pourrions tous accepter et qui permettrait aux négociants d'exporter et de garantir un prix stable tout au long de la saison? Il faut qu'il y ait plus de confiance.
Je m'arrête là.
:
Je répondrai d'abord à votre deuxième question. Ce dont vous parlez s'est produit dans le Maine. Pas dans notre secteur. Dans le Maine, le nombre de casiers est passé de 2 500 à 600 ou 800, selon les endroits, et les prises n'ont pas diminué. La Nouvelle-Zélande et l'Australie ont fait la même chose pour la langouste et leurs prises n'ont pas chuté. Par contre, je pense qu'ils ont échelonné la saison de pêche sur une plus longue période, ce qui est mieux.
J'ai déjà vu un casier contenant 25 homards, mais c'est rare. Certains casiers contiennent huit ou dix ou même quinze homards, et c'est beaucoup. Certains n'en contiennent aucun, je peux vous l'assurer. On compte beaucoup de casiers vides dans une saison. Je pense qu'on pourrait imposer une limite sur le nombre de casiers et augmenter la taille de nos prises. Ainsi, on perdrait moins de casiers et on diminuerait la pêche fantôme. Toutes ces choses favoriseraient la conservation.
En ce qui a trait aux gros homards, ils sont plus nombreux aujourd'hui. Mon père m'a dit que lorsqu'il a commencé à pêcher dans les années 1940, il y avait beaucoup de gros homards. Ils semblaient disparus, mais maintenant, on constate que leur nombre augmente de nouveau. J'ai des dossiers ici...
Je ne donne jamais mes dossiers, car ce sont des documents personnels, mais je les ai amenés avec moi. Les pêcheurs n'aiment pas du tout révéler leurs chiffres, je vous assure. J'ai pêché 15 à 20 p. 100 de gros homards en plus dans notre secteur. Je le sais parce que mon acheteur sépare les homards pris selon leur taille, et je vends les gros homards à un prix différent. Il est le seul acheteur dans le Sud du Nouveau-Brunswick à procéder ainsi. Jusqu'à environ 20 ou 25 p. 100 de gros homards en plus environ, ce système de double prix est avantageux. Au-dessus de ce pourcentage, il est plus avantageux de vendre tout au même prix. Cet acheteur traite plus que les autres avec des pêcheurs dont la prise est de qualité. Pour ma part, j'ai pêché des homards de meilleure qualité et de taille plus variée. Par ses actions, mon acheteur alimente cette tendance.
:
Les viviers à marée existent depuis les années 1920 ou 1930. Cette technologie a presque 100 ans aujourd'hui. Pour leur part, les bassins ont été inventés au cours des 15 dernières années. Vous pouvez en construire n'importe où dans le monde. Il en existe une au Kentucky située près d'un bureau de Fedex. J'ignore si des études ont été effectuées, mais toute l'industrie s'entend pour dire que les homards des bassins sont de moindre qualité.
À une certaine époque, et ça ne se fait plus aujourd'hui, on amenait des homards à carapace molle du Maine au mois de septembre et on les gardait. On les laissait durcir et on les nourrissait. Après quelques années, on obtenait plus de livres de homard du vivier que l'on aurait pu obtenir au départ. À cette époque, les homards étaient rares et le marché était plus propice en automne. On les nourrissait généralement d'os de morue et de hareng séché, et d'aliments de ce genre.
Mais les viviers à marée ne sont efficaces que dans certaines zones. Dans notre région, l'amplitude de la marée atteint 28 pieds. Il s'agit d'un barrage six pieds sous la surface de l'eau. Il est formé de lattes qui laissent passer l'eau, ce qui ajoute de l'air dans l'eau. À marée haute, toute l'eau du vivier est remplacée. À marée basse, il reste six pieds d'eau dans le vivier pour les quatre ou cinq prochaines heures afin de maintenir les homards en vie jusqu'à la prochaine marée haute. À intervalles réguliers de quelques jours, un plongeur vérifie que les homards se portent bien. Pour les maintenir en bonne santé, de l'air supplémentaire est ajouté dans l'eau par aération.
Les acheteurs sont d'avis qu'il s'agit d'une bonne méthode pour maintenir la qualité des homards, mais les résultats ne semblent pas aussi bons. On constate moins de pertes, comme on les appelle, dans les viviers que dans les bassins.
Dans le Sud-Ouest de la Nouvelle-Écosse, l'amplitude de la marée n'est pas suffisante et il y a trop d'eau douce pour pouvoir utiliser efficacement les viviers. Si un homard entre en contact avec de l'eau douce, il meurt très rapidement. Les viviers à marée fonctionnent donc dans les endroits où il n'y a pas du tout d'eau douce. S'il y a de l'eau douce, elle pénètre dans le vivier et tue les homards.
:
J'aimerais remercier nos deux témoins et l'auditoire pour être venus ici aujourd'hui nous accorder leur temps précieux.
Je viens de l'Ouest canadien et j'ai écouté avec attention ce que l'on a dit sur le meilleur homard, s'il vient de la Nouvelle-Écosse, du Nouveau-Brunswick ou même du Québec. À mon avis, le meilleur homard est celui qui se mange à l'après-ski à Whistler, et ce, quelle que soit la région d'où il provient. J'invite tout le monde à essayer un de ces homards.
Une des choses les plus terrifiantes pour un client est d'entendre un avocat qualifier son affaire d'intéressante. J'ai écouté vos témoignages intrigants et réfléchi à ce que nous avons entendu auparavant. Je n'aime pas vous le dire, mais en tant que politicien, nous faisons face à une affaire intéressante. Je parle de la question de l'offre et de la demande et de la commercialisation. Votre marché est segmenté: il existe un marché pour les gens qui habitent ici, un marché pour les touristes, un marché américain, un marché asiatique et un marché européen. Tous ces segments ont leurs propres exigences.
Différents intermédiaires influent sur vos prix et sur la destination finale de vos homards. Certaines personnes affirment que l'offre est totalement débridée et qu'à l'heure actuelle, elle dépasse vos attentes, ce qui a une incidence sur votre prix et votre rentabilité. Il existe des règlements, mais ce marché semble s'autoréglementer. La plupart des témoins que nous avons entendus apprécient cette approche et la préfère à une intervention du MPO. Aujourd'hui, il a beaucoup été question du contrôle de la qualité et de son effet sur la consommation de homards à l'avenir.
Et si un conseil de commercialisation fondé sur une participation volontaire était créé? Vous devriez payer votre cotisation pour pouvoir en profiter. Et si ce conseil de commercialisation comprenait des analystes qui vous aideraient à déterminer où trouver les meilleurs prix ou vous recommanderaient de restreindre votre offre pour des raisons de conservation ou de rentabilité? Pensez-vous que cela fonctionnerait? Tout le monde semble travailler chacun de son côté à l'heure actuelle. Il n'y a pas de méthodes de commercialisation cohérente et aucun pêcheur ne peut à lui seul investir dans une campagne publicitaire. Que pensez-vous de cette idée?
Monsieur Thompson.
Je connais un agriculteur. Il avait 5 000 acres à Brownsville — ou Browns quelque chose… au nord d’Edmonton. Il vendait une partie de son blé à la Commission canadienne du blé et il en conservait une partie, dans l’espoir que le marché s’améliorerait au cours de l’année.
Je ne sais pas si nous arriverons à faire de même. C’est difficile de convaincre les pêcheurs d’adhérer à des associations. Le gouvernement du Nouveau-Brunswick a rédigé la loi de manière à ce qu’il faille que tous les pêcheurs d’une zone votent une faveur d’une association. Les pêcheurs sont très indépendants. Seulement 20 p. 100 des pêcheurs de notre région sont membres d’une association. Dans le Nord du Nouveau-Brunswick ils sont plus actifs, mais même là il y a toujours quelqu’un qui déclenche une guerre dans l’achat du homard et ça s’arrête là…
Pour ma part, j’ai toujours conservé mon homard dans des viviers et je vends deux fois par saison. J’attends que le prix augmente. Maintenant, il ne semble plus augmenter. Au fil des années, sauf pour deux ans, le prix augmentait toujours entre novembre et l’approche de Noël. Cela ne semble plus se produire; il y a trop de homards sur le marché.
Je me demande s’il serait possible de rencontrer les acheteurs, comme cela se fait à Terre-Neuve, pour la crevette et le crabe, pour établir un prix — un prix minimum et même un prix maximum — en octobre qui serait acceptable pour tous. Ainsi Clearwater ou Paturel ou une autre société pourrait offrir ce homard à l’Europe en donnant l’assurance de pouvoir livrer en Espagne à telle date à tel prix. Je pense que cela vaudrait la peine d’essayer. Lorsque les acheteurs paient 3,50 $ la livre et ensuite 7 ou 8 $ deux semaines plus tard, je me demande si le prix était vraiment si faible ou s’ils ne nous ont pas simplement mené un bateau l’automne dernier. J’en arrive à soupçonner que les grosses sociétés ont profité de toutes les rumeurs pessimistes au sujet de l’économie pour nous mener un bateau. Cela m’a coûté entre 60 000 et 70 000 $ l’automne dernier — peut-être même 80 000 $.
Il y a deux gars qui travaillaient avec moi l’an dernier et je leur ai donné 25 p. 100 à chacun. Mon fils vient de terminer l’école secondaire et je lui ai donc donné une pleine part et j’en ai donné une autre à un autre gars. Cette année je vais donner la troisième part à mon fils et nous allons pêcher le homard juste nous deux. C’était ça l’entente et le gars qui a pêché avec moi le savait. À part ça, je paie toutes les dépenses. Mes dépenses représentent environ 25 p. 100 de mon stock — un stock normal — de l’année. L’an dernier, les stocks étaient bien sûr plus élevés puisque le prix était bas.
:
Je vais finir de répondre à cette question avant de faire une observation.
Mais je pense qu’il y a quelque chose que nous devrions examiner. Nous devons faire une enquête pour déterminer ce qui est arrivé afin que nous, les pêcheurs, puissions comprendre, afin que nous sachions mieux ce que nous devrions débarquer, à quel moment, afin que l’ensemble du système fonctionne mieux, y compris les acheteurs — le dernier maillon de la chaîne, les grossistes. Parce que nous ne faisons vraiment pas confiance aux grandes entreprises; nous nous méfions de l’ensemble du système. Tout le monde s’enrichit sauf nous.
Pour ma part, je ne crois pas qu’ils s’enrichissent. Voyez l’action de Clearwater: elle se transige à moins de 1 $ à l’heure actuelle. Donc, elle ne s’enrichit pas non plus. Elle ne se débrouille pas si bien. Les affaires ne vont pas si bien pour ces entreprises.
À la fin de sa thèse, la principale conclusion de mon épouse — une fois qu’on l'a lue et si elle était ici elle m’en voudrait probablement de ce que je vais dire — c’est que les pêcheurs sont très habiles à utiliser les politiques du gouvernement ou les règles des entreprises à leur propre avantage à long terme. Nous sommes prêts à changer. Elle vient de Fredericton. Lorsqu’elle est venue à Deer Island elle croyait que la pêche avait été toujours pareille et resterait toujours pareille. Mais après 25 ans, elle est étonnée de voir à quel point ma pêche personnelle et celle de Deer Island ont changé. La différence est incroyable. Mais nous avons également trouvé le moyen de manipuler le système, de l’exploiter, de l’utiliser à notre avantage afin de pouvoir gagner notre vie.
Qu’arrivera-t-il si nous établissons des règles trop précises? Je ne voudrais pas qu’on mette en place quelque chose qu’on ne pourrait pas modifier rapidement. Prenons l’exemple du calmar. Il y a quelques années, personne dans les alentours n’avaient de permis pour le calmar. Il n’y en avait jamais eu dans les alentours. Puis tout à coup, il y a environ 20 ans, des tas de calmar sont arrivés dans la zone et tout à coup tout le monde avait un permis et pêchait le calmar pendant un mois. Beaucoup d’argent a été gagné dans ce qui aurait été par ailleurs un mauvais été. Aujourd’hui, avec toutes les règles imposées par le gouvernement, des choses ne peuvent pas se faire aussi rapidement. Le calmar serait depuis longtemps retourné à Terre-Neuve avant que nous ayons la chance d’en pêcher dans les parages.
Donc je déteste qu’il y ait trop de règles trop rigides qui ne nous permettent pas de nous adapter à l’évolution du marché, parce que les marchés changent toutes les semaines ou toutes les deux semaines, tous les mois et tous les ans.