:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Tout d'abord, je tiens à remercier le Comité de m'avoir invitée à comparaître aujourd'hui dans le cadre de son étude des diverses questions relatives à la diffusion sur Internet, ou diffusion Web, des délibérations de la Chambre et de ses comités. Mon personnel, toujours remarquablement diligent, s'est appliqué à préparer une longue déclaration préliminaire qui fait l'historique de la question. Plutôt que de vous en imposer la lecture, je vais simplement la remettre au greffier. Je vais vous en faire un résumé, et le document sera à votre disposition. Vous voudrez peut-être le joindre aux délibérations d'aujourd'hui, car il contient beaucoup de données historiques. Si vous êtes d'accord, je ne crois pas qu'il soit nécessaire que j'examine ces données avec vous aujourd'hui, mais elles pourraient être utiles, au bout du compte, à l'attaché de recherche et au personnel du Comité lorsqu'ils rédigeront le rapport.
Je suis accompagnée aujourd'hui par Rob Walsh, légiste et conseiller parlementaire. Je compte aborder le sujet de façon générale, notamment en ce qui concerne les questions de procédure en jeu et celles ayant trait aux usages dans d'autres pays. Je dois avouer que ce que je vais dire se retrouve en grande partie dans le document que j'ai déposé. Je demanderai au légiste de parler des questions de privilège et de la Loi sur Ie droit d'auteur.
[Français]
Comme vous le savez, cette question a été soulevée au printemps 2007. Un organisme, Friends of Canadian Broadcasting, diffusait sur son site Web les enregistrements sonores et vidéo des délibérations des comités. Le 23 mars 2007, le Bureau du légiste et conseiller parlementaire a envoyé une lettre lui demandant de cesser de webdiffuser, de baladodiffuser ou de diffuser autrement les délibérations de la Chambre des communes. Le conseiller parlementaire a informé l'organisme que, et je cite:
[l] e fait de diffuser les délibérations des comités sans I'autorisation de la Chambre des communes ou Ie permis approprié pourrait être considéré par la Chambre des communes comme une violation de ses privilèges [...] la diffusion sans autorisation d'extraits des délibérations des comités permanents de la Chambre des communes pourrait également être considérée comme un outrage au Parlement étant donné que la publication d'une partie des délibérations de la Chambre des communes pourrait être perçue comme de I'obstruction.
[Traduction]
Le 16 avril 2007, un porte-parole de Friends of Canadian Broadcasting a répondu à la lettre en disant que l'organisme ne souhaitait pas retirer ce matériel de son site Web, mais qu'il serait heureux de respecter toute procédure raisonnable que la Chambre pourrait proposer afin d'obtenir les autorisations nécessaires et qu'il serait disposé à recevoir des consignes de la Chambre à cet égard.
Plus tard au cours du même mois, le président du Comité permanent des finances et celui du Comité permanent du patrimoine canadien ont écrit au président de votre comité pour l'informer qu'un organisme, Friends of Canadian Broadcasting, offrait à ses abonnés la possibilité de télécharger ou de visionner en webdiffusion les délibérations de leurs comités respectifs sans autorisation. Ils ont demandé au Comité d'examiner les politiques et les recours possibles pour empêcher cette atteinte à l'autorité de la Chambre sur les enregistrements de ses délibérations. Lors de sa réunion du 10 février dernier, le Comité a accepté de consacrer la réunion d'aujourd'hui à l'examen des questions entourant la diffusion Web, par exemple établir des règles ou ajouter des dispositions au Règlement, déterminer l'autorité responsable de cette question ici à la Chambre et voir comment d'autres assemblées législatives traitent cette question.
Pour ce qui est de l'autorité responsable de traiter cette question, comme vous le savez, conformément au sous-alinéa 108(3)a)(v) et au paragraphe 119.1(2) du Règlement, le Comité a pour mandat d'examiner la radiodiffusion et la télédiffusion des délibérations de la Chambre et de ses comités, d'en faire rapport et d'établir des lignes directrices régissant la diffusion des séances de comités. Malgré l'absence d'un ordre de renvoi de la Chambre des communes sur une question de privilège relative au cas susmentionné, le Règlement vous confère néanmoins l'autorité de traiter de cette question de façon plus générale.
Je ne veux pas faire l'historique de la télédiffusion à la Chambre des communes et du rôle joué par Ie Comité et ses prédécesseurs pour agir dans ce domaine. Le document que j'ai déposé, comme je l'ai dit, fait un bref survol depuis 1970, lorsque la question générale de la diffusion, à la radio et à la télévision, des travaux de la Chambre des communes a été renvoyée au Comité permanent de la procédure et de I'organisation — comme on l'appelait à l'époque —, à la suite des débats tenus à la Chambre en 1967 et en 1969. L'historique se poursuit jusqu'en 2003, quand ParlVU a été lancé en avril 2003 sur le site Web parlementaire pour les députés et leur personnel. Depuis le 2 février 2004, la population canadienne peut visionner ParlVU sur le site Web parlementaire.
Comme en témoigne cet historique, tout comme la Chambre, le contexte a évolué au fil du temps. Le défi consistait à utiliser les médias électroniques de façon à tirer parti des possibilités qu'ils offraient, sans compromettre l'intégrité du Parlement. C'est le même défi auquel vous êtes confrontés aujourd'hui devant le problème de la diffusion de l'information.
Aux fins de consultation, je répète que j'ai remis le document au greffier et j'ai demandé que l'on distribue ces deux feuilles de 8 ½ sur 14 pouces, qui sont essentiellement un tableau des enregistrements audio et vidéo des délibérations parlementaires. Le document ne fait qu'expliquer comment les délibérations sont diffusées de nos jours.
[Français]
Naturellement, c'est dans les deux langues. Vraiment, il s'agit d'information en format capsule qui explique quelles sont les options dont on peut se prévaloir pour avoir accès aux enregistrements audio et vidéo des délibérations de la Chambre et des comités.
Je suis prête à répondre à vos questions. Naturellement, cela a été préparé par le Service de radiotélédiffusion des Services d'information de la Chambre. D'ailleurs, je les en remercie.
La Chambre contrôle donc la diffusion de ses délibérations, et il est clair que son intention a toujours été que le contrôle de tout ce système, notamment le respect du concept de hansard électronique, devait continuer à relever de la Chambre et en particulier du Président, le mandataire de tous les députés.
La licence de diffusion ci-après figure au début et à la fin de toutes les radiodiffusions, télédiffusions et diffusions Web faites par la Chambre des communes ainsi que sur les étiquettes apposées sur les DVD et les bandes magnétiques fournies sur demande.
Ça se lit comme suit, et je cite:
Le Président de la Chambre des communes autorise l'utilisation du contenu de la présente vidéo dans les écoles aux fins d'études particulières, de recherche, de critique ou d'examen.
Les entreprises de télé et de radiodiffusion détenant une licence du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes peuvent utiliser des extraits enregistrés de ces délibérations télévisées dans leurs émissions d'actualités ou d'affaires publiques. Toute autre rediffusion ou tout autre usage commercial de ces délibérations nécessite l'approbation expresse et préalable, par écrit, du Président de la Chambre des communes.
Dans son 40e rapport de la 1re session de la 39e législature, le 30 mars 2007, vous vous rappelez peut-être que ce comité avait formulé des lignes directrices permanentes pour la diffusion des séances de comité. Permettez-moi d'en citer l'extrait suivant:
Le Comité continuera de suivre de près la radiodiffusion et la télédiffusion des travaux des comités par les médias électroniques. Il est par ailleurs toujours autorisé, conformément au sous-alinéa 108(3)a)(v) et au paragraphe 119.1(2) du Règlement, à recommander des modifications à ces lignes directrices.
[Traduction]
Je pense que le Comité se trouve en quelque sorte devant un dilemme en ce moment. D'une part, il devrait être assez honnête pour élaborer des lignes directrices ou des règlements pour limiter l'utilisation à l'externe de toute forme de diffusion des délibérations de la Chambre et de ses comités. D'autre part, l'application de telles lignes directrices posera un défi de taille.
Il importe de se rappeler qu'à l'origine, l'objectif était de diffuser les travaux de la Chambre et de ses députés au plus grand nombre de gens possible. Mais ces décisions ont été prises à une époque où les choses étaient beaucoup plus simples. Une partie du rapport sur la radiodiffusion de 1972 est carrément dépassé si on le relit. Par exemple, le paragraphe 70 se lit comme suit: « Si l'on décide de téléviser les délibérations de la Chambre, il faudra choisir entre la couleur ou le noir et blanc... ».
Nous vivons à une époque bien différente. De nombreux députés ont leurs propres sites Web où ils affichent régulièrement des séquences de leur participation à la Chambre ou aux comités. Comme la technologie devient chaque jour plus facile à utiliser, il est tout à fait normal que des préoccupations soient soulevées concernant le contrôle de l'utilisation des délibérations de la Chambre.
Ce que le Comité doit faire — j'exprime de nouveau une opinion personnelle, après mûre réflexion évidemment —, c'est d'examiner très attentivement si toutes ces préoccupations sont entièrement justifiées. Dans la grande majorité des cas, il n'y a pas d'intentions malveillantes dans la diffusion des délibérations, pour ainsi dire. Dans les cas précis où de réelles préoccupations existent — par exemple, si des gens ont l'impression qu'on a porté atteinte à leurs privilèges d'une façon ou d'une autre —, la Chambre peut alors réaffirmer son pouvoir et son autorité, notamment en punissant l'utilisation inappropriée en tant qu'outrage à la Chambre.
Comme je l'ai dit plus tôt, je suis accompagnée par mon collègue Rob Walsh, légiste et conseiller parlementaire. Pour compléter cette discussion, il traitera des questions juridiques entourant la reproduction et la distribution des enregistrements des délibérations de la Chambre et des comités par des tiers, ainsi que des moyens dont dispose maintenant la Chambre pour limiter ou contrôler l'utilisation par des tiers des enregistrements des délibérations de la Chambre et des comités.
Merci, monsieur le président. Je vais céder la parole à Rob.
:
Merci, monsieur le président.
Je vais faire un bref historique pour le Comité, puis que je vais laisser le reste du temps aux députés pour poser des questions.
Depuis 1993, on a inclus une série de déclarations dans plusieurs publications de la Chambre des communes pour décrire la reproduction permise pour un enregistrement donné. On l'appelle parfois « permission du Président ». Dans chaque cas, l'autorisation dépend du type d'enregistrement.
Il y a actuellement trois types d'autorisation en usage à la Chambre. J'ai apporté aux membres, s'ils sont intéressés, des copies des trois autorisations générales... ou des autorisations moins générales actuellement en usage à la Chambre.
[Français]
Le Bureau du légiste traite, au nom du Président, les demandes d'autorisation de reproduction, à des fins commerciales ou à d'autres fins, des enregistrements des délibérations de la Chambre et d'autres documents dont la Chambre détient les droits d'auteur. Ces demandes proviennent de particuliers et d'organismes, et nous sont aussi transférées par la section Droit d'auteur de la Couronne et octroi de licences, par la Bibliothèque du Parlement, par des comités et par d'autres secteurs de l'Administration de la Chambre. Les demandes d'autorisation pour utilisation de documentaires, de manuels et ainsi de suite sont habituellement acceptées.
[Traduction]
La plupart des demandes sont acceptées sans frais, mais des demandes qui viseraient à commercialiser ou à ridiculiser les délibérations, ou à s'en servir comme preuve en cour, seraient rejetées.
Au moment d'examiner de telles demandes, les reproductions des enregistrements des délibérations qui sont uniquement destinées à être diffusées sur Internet ne sont généralement pas autorisées par mon bureau: d'une part, elles ne risquent pas de faciliter le contrôle du Président sur le matériel et, d'autre part, elles ne respectent pas les restrictions en matière de diffusion établies dans la permission du Président, qui limite les diffuseurs détenant des licences du CRTC aux émissions de nouvelles et d'actualité.
Puisque la diffusion Web encodée par la Chambre était attendue et est maintenant disponible, on prévoyait qu'elle garantirait que la Chambre garde le contrôle sur l'intégrité des délibérations et permettrait aux utilisateurs d'avoir accès à la version officielle des délibérations disponibles dans les deux langues officielles.
[Français]
Les types d'utilisation pour lesquelles l'autorisation de reproduction peut être refusée, c'est-à-dire à des fins politiques ou électorales, de satire ou de dérision, et à des fins commerciales, respectent les lignes directrices envisagées pour le contrôle de la télédiffusion lorsqu'on a étudié la possibilité de téléviser les délibérations en 1972. Ces types d'utilisation respectent également ce qui se fait dans d'autres assemblées législatives du Commonwealth.
[Traduction]
Je suis également disposé à discuter des options qui s'offrent à la Chambre en matière de diffusion Web, par opposition à la technologie plutôt dépassée de la télévision. Mais je vais m'arrêter ici et répondre aux questions des membres.
D'après le rapport comparatif que nos attachés de recherche ont préparé, je constate que d'autres pays ou provinces autorisent l'utilisation des délibérations au moyen de la diffusion sur le Web, et qu'on évalue le droit d'auteur ou la propriété intellectuelle, mais il n'y a aucun frais. On peut les utiliser sans problème pourvu que ce ne soit pas à des fins commerciales.
Dans certains de ces pays ou provinces, on exclut également l'utilisation des délibérations, dans n'importe quel média, dans le cadre de publicités politiques ou de campagnes électorales, à moins d'avoir la permission de tous les membres qui figurent sur les séquences visées — à des fins de satire, de dérision, de dénigrement, ou encore de parrainage ou de publicité commerciales.
J'aimerais avoir votre avis, vos meilleurs conseils. Pensez-vous que nous devrions, au XXIe siècle, permettre le téléchargement de n'importe quelle information disponible sur les sites Web de la Chambre et les moteurs de recherche, pour autant que ces exclusions existent?
:
Madame Jennings, je dois dire que je constate un certain malaise à l'idée de laisser le champs libre de la sorte, mais j'estime qu'il est grand temps de le faire. À mon avis, nous sommes rendus au point où la technologie le permet, et nous devons nous rappeler que toute cette diffusion visait fondamentalement à rendre les délibérations accessibles.
Je sais que le Hansard, la couverture intégrale, est un concept auquel les députés tiennent beaucoup. Néanmoins, je pense que maintenant, compte tenu de l'évolution de la technologie, il est tout à fait justifié que la Chambre fournisse la couverture intégrale, mais aussi très normal que les gens disent, par exemple: « Bon, nous comparaissons devant un comité à titre d'ONG et voici notre témoignage ». Ce n'est pas la couverture intégrale. C'est beaucoup plus restreint peut-être, mais ça leur permet de faire valoir leur argument aux partis intéressés, aux intervenants.
Aux fins de discussion, je pense donc que c'est un bon point de départ. J'inviterais mon collègue à commenter là-dessus, car à partir des avis d'autres pays ou provinces, il a proposé un avis — nous pouvons vous le fournir plus tard, si vous voulez — où de telles exceptions seraient prévues. Je pense que c'est une protection très raisonnable. On garde le contrôle en principe, mais on ne s'impose pas, en un sens, l'absurdité d'exercer une surveillance; bref, il s'agit d'être proactif. De toute évidence, on doit pouvoir régler les questions précises s'il y a des abus flagrants, mais autrement, je pense que c'est l'une des rares occasions où je suis portée à m'en remettre à la bonne volonté des personnes en cause.
:
La décision d'inclure ou non des restrictions relève, bien entendu, du Comité. Ce ne devrait pas être à moi de choisir. Toutefois, les choix que l'on fait soulèvent certaines questions. L'avis général qui vous a été distribué est une tentative de ma part de rédiger un avis qui s'applique à toute reproduction qui pourrait être diffusée. Pour l'instant, nous en avons trois — je crois qu'on vous en a aussi distribué des exemplaires. Il y en a un qu'on utilise pour la radiodiffusion; un pour les procès-verbaux et les témoignages des comités; et un autre pour les journaux, dont vous recevez les copies.
Nous essayons de trouver un libellé qui s'appliquerait aux trois. Et si je peux me permettre, ce qu'il faut absolument se demander ici, c'est où vous vous situez par rapport à la question. Les Américains ont tout placé dans le domaine public, ce qui signifie qu'on peut en faire tout ce qu'on veut. On peut transformer un membre du Parlement en kangourou parlant, ou peu importe. On est libre d'en faire ce qu'on veut.
L'autre extrême, bien sûr, c'est d'imposer toutes sortes de limites pour empêcher évidemment ces types d'absurdités, mais aussi pour prévenir d'autres utilisations inappropriées, notamment à des fins commerciales. La question suivante se pose alors: comment faire respecter ces limites? Bon, dans l'avis général que je vous ai distribué, vous verrez au deuxième paragraphe une phrase en italique. Elle se trouve là simplement pour proposer une série ou une liste de diverses exclusions, que vous pourrez appliquer en totalité ou en partie ou encore, ne pas les appliquer du tout.
Et je sais, madame Jennings, que vous avez souligné que d'autres assemblées législatives prévoient une restriction à l'égard de l'utilisation du matériel à des fins politiques. J'attire votre attention tout simplement sur un point. On devrait, me semble-t-il, réexaminer cette restriction fondamentale qui existe ailleurs, comme si c'était la première fois. Autrement dit, dans une institution comme la Chambre des communes, où les députés débattent de questions politiques, ou en comités, il me semble difficile de justifier la raison pour laquelle ces délibérations ne devraient pas être utilisées à des fins politiques. C'est comme dire que l'exposé d'un universitaire peut être enregistré, sans qu'on puisse toutefois l'utiliser à des fins pédagogiques.
Il s'agit donc d'une question qui mérite l'attention du Comité. Toutefois, cela ne veut pas dire nécessairement que n'importe quelle fin politique est acceptable. Si c'est à des fins électorales, la question s'impose. Lors des élections il y a quelques années — je ne me rappelle pas l'année, mais c'était peut-être en 2006 ou 2004 —, on avait pris une très courte séquence des délibérations d'un comité dans laquelle un ancien ministre avait dit: « J'ai droit aux droits qui me sont dus ». Vous vous en souvenez peut-être, et ces mots avaient inspiré une publicité. Le but partisan est évident, mais il faut se demander s'il s'agit d'une utilisation inappropriée des paroles d'un témoin. Celui-ci les a pourtant bel et bien prononcées.
Voilà le type de questions que le Comité doit se poser parce que comment peut-on contrôler pareilles situations? Dans l'exemple évoqué, on n'a rien pu faire. L'agent des élections surveille les élections. Oui, la Chambre des communes aurait pu recourir à diverses mesures qui auraient pu aboutir à un outrage ou peu importe, mais il s'agit là d'une démarche très compliquée. Intenter une poursuite en matière de droit d'auteur est tout aussi complexe.
Je crois donc que dans la pratique, il faut se demander dans quelle mesure on peut interdire l'utilisation de ce matériel à des fins politiques, tout en veillant à ce que cette restriction soit respectée. Le gain commercial et ces autres questions sont les plus faciles, si vous voulez les inclure. Mais dans l'avis général, la partie en italique peut être supprimée ou modifiée, en choisissant parmi les exclusions celles que vous voulez appliquer. Par contre, la question de l'exécution s'impose.
Je veux commencer par faire une observation générale. Notre greffière est venue ici ce matin et a affirmé que le personnel était diligent. Voilà de grands éloges, surtout de la bouche de la greffière. C'est un peu comme si Bouddha apparaissait pour vous dire que vous êtes zen.
Pendant que je passais en revue la documentation, j'essayais de me rappeler s'il y a déjà eu un cas où le règlement sur le droit d'auteur de la Chambre avait entraîné l'interdiction de diffuser sur Internet. L'exemple qui m'est venu à l'esprit est le site Wikipédia. Je crois que nous y avons tous lu des articles nous concernant, et il faut dire que le degré de fiabilité varie. Quoi qu'il en soit, on trouve des articles sur les députés dans Wikipédia, accompagnés de photos. Dans le mien, il y avait une photo de moi qui devait dater, si je ne me trompe pas, peut-être de la 38e législature, mais un jour elle a disparu. La raison, selon moi, c'est que les responsables du site essayaient d'être tout à fait conformes aux divers règlements en matière de droit d'auteur. Je présume qu'il en est de même pour de nombreux membres du Parlement, mais je n'en ai pas fait la vérification.
Cet exemple soulève plusieurs sujets de réflexion. Tout d'abord, on est en train d'interdire ce qui semble être une utilisation raisonnablement inoffensive d'informations protégées par un droit d'auteur. Deuxièmement, les photographies sont, à certains égards, différentes des enregistrements vidéos. Il y a lieu de faire une distinction entre les deux au moment d'élaborer un certain type d'avis général. On pourrait en avoir plusieurs.
C'était juste une observation.
Je passe maintenant aux questions. Pour ce qui est des mots en italique dans l'avis général proposé, on fait allusion à une distribution ou à une utilisation à des fins politiques électorales ou partisanes ainsi qu'à des fins de satire. Ne s'agit-il pas là d'une restriction non constitutionnelle à la liberté de parole aux termes de la Charte des droits et libertés? Je sais qu'il n'y a pas de protection pour le discours commercial. C'est une question qui est contestable aux États-Unis, mais ça ne l'est pas en vertu de notre Charte.
C'est une chose d'avoir des restrictions générales relatives au droit d'auteur, mais c'en est une autre de faire un virage à 180 degrés. Vous pouvez utiliser le contenu à toutes sortes de fins, sauf si c'est pour essayer d'influencer le comportement électoral des gens. Et cette restriction ne s'applique pas seulement en période électorale où l'on doit se soumettre aux règles normales d'approbation selon les critères qui s'appliquent aux agents officiels. D'après le libellé, je ne peux jamais utiliser ce contenu si mon intention est d'influencer le comportement des gens. Bien entendu, ce que nous disons et faisons ici compte de façon pertinente. Si je veux prendre des délibérations antérieures pour expliquer qu'Untel mérite votre vote ou non, ou que ses propos méritent votre attention ou non... En tout cas, si c'était devant les tribunaux, ce serait considéré, me semble-t-il, comme une restriction à la liberté d'expression. Et je dirais que l'article 1 de la Charte ne pourrait pas venir en aide.
:
Pour revenir à votre argument concernant Wikipédia, nous ne pouvons pas surveiller tous les sites Web où le matériel de la Chambre pourrait être utilisé. On nous apprend parfois que tel ou tel matériel se trouve sur
YouTube et, dans ces cas, nous avons appelé
YouTube pour demander de le retirer. Nous nous efforçons de le faire chaque fois que quelqu'un nous appelle pour signaler quelque chose qui le dérange ou qui ne devrait pas être là, etc. Nous utilisons la protection du droit d'auteur à cette fin. La réponse est habituellement favorable, et le matériel est retiré.
En ce qui a trait à votre autre argument, j'ai essentiellement dit la même chose à Mme Jennings. On peut utiliser un matériel à des fins de satire de façon à offenser la dignité de l'institution, mais on peut aussi le faire pour formuler des commentaires politiques. Les députés eux-même peuvent entacher la réputation de la Chambre aux yeux des Canadiens. Nous connaissons tous ce débat. Je vous laisserai le soin de démêler la situation. Où tirer la ligne entre une utilisation irrespectueuse à l'égard de l'institution et une utilisation irrespectueuse à l'égard de la personne qui prononce la déclaration?
J'attire votre attention sur l'avis général et la proposition générale au début du deuxième paragraphe: il est permis d'utiliser ce matériel sur n'importe quel support, pourvu que la reproduction soit exacte et qu'elle ne soit pas présentée comme version officielle. Cela dit, une fois que vous commencez à changer l'enregistrement d'une manière ou d'une autre, même pour faire valoir un argument, vous allez à l'encontre de cette autorisation. Vous ne pouvez pas le changer. Cela ne veut pas dire nécessairement que vous devez l'utiliser intégralement, mais vous ne pouvez pas le changer.
Certains d'entre vous ont peut-être vu — je l'ai vu sur YouTube pour la première fois — un extrait vidéo d'une réunion de comité où la voix d'un témoin avait été doublée de façon à ajouter des mots ou des sons dans sa déclaration, et c'est ce qui est arrivé également à l'un des députés. Selon nous, il s'agissait clairement d'une distorsion — même si c'était pour ridiculiser l'institution ou en faire un satire —, mais d'autres pourraient alléguer que c'est un commentaire politique. Je ne veux pas entrer dans ce débat. C'était une distorsion du produit, ce qui contrevient à l'autorisation, et nous prendrions des mesures à cet égard.
:
Merci, monsieur le président.
Je vous remercie de vous être déplacés ce matin pour discuter d'un sujet qui semble simple à première vue, mais qui est assez complexe. Je partage les propos de Mme Jennings, quand elle dit qu'il faut se mettre à jour, qu'il faut entrer dans le XXIe siècle, l'ère des technologies. On ne peut pas résister à cela. Même si on le voulait, on a des preuves que c'est hors de notre contrôle. Les choses partent de tous bords tous côtés via le Web ou d'autres technologies, et on n'a pas de contrôle là-dessus.
Je suis assez préoccupée. On peut bien adopter une série de règlements, mais on n'a pas les moyens ni les outils pour contrôler, comme l'a dit M. Walsh, ce qui se passe sur tous les moteurs de recherche. Même les policiers et la GRC ne réussissent pas à détecter, par exemple, les prédateurs sexuels. On est confronté à cette difficulté. Si on établit une réglementation plus serrée et des règles plus strictes, on devra se doter d'outils de contrôle pour pouvoir naviguer, réagir à chaque plainte et accuser des gens d'outrage et tout le reste. On alourdirait beaucoup la gestion pour ceux qui seront les gardiens de ces activités.
Le Parlement est un lieu public et si on rend de plus en plus accessibles nos délibérations et nos discussions, on peut aussi, par ricochet, toucher le citoyen et l'intéresser à la chose politique. J'ai été très touchée par l'exposé de M. Mayrand, qui est venu nous voir cette semaine, quand on discutait du peu d'intérêt de beaucoup de Québécois et de Canadiens à exercer leur droit de vote. Dans une série de recommandations, il songeait à utiliser le Web comme outil pour attirer les jeunes, qui sont plus branchés que vous et moi et qui utilisent le Web quotidiennement. Si un directeur général des élections pense à utiliser le Web pour inciter les jeunes à voter, on peut aussi penser à rendre nos délibérations accessibles.
Encore aujourd'hui et même avant ce débat, depuis qu'Internet existe, il y a de plus en plus de manipulation. On prend la photo d'un député ou d'un personnage public, on le modifie, on change son nez, on le place sous différents angles. Ça fait partie de la vie et il faut s'en accommoder. Si on dénature les propos d'un député ou si on lui fait dire des choses vraiment inacceptables, il faut qu'il y ait des recours pour que le député puisse au moins faire retirer les propos qu'on lui prête ou se plaindre.
Comme Mme Jennings, j'aurais tendance à faire confiance et à penser que les délibérations sont utilisées de bonne foi. M. Guimond partage mon opinion sur cette question.
À la dernière élection générale, on a été surpris de voir certaines choses qui étaient inacceptables diffusées sur des sites de partis politiques. Elles ont ensuite été enlevées. « Là où il y a de l'homme, il y a de l'hommerie. » Ce n'est pas un propos sexiste, c'est une expression; ça inclut les femmes. On est tous conscients qu'il peut y avoir des abus. Il y a eu des abus avant le débat d'aujourd'hui et il y en aura toujours. Je suis plutôt favorable à l'idée de donner aux citoyens un accès plus large à nos délibérations. Il faut établir quelques règles afin qu'on puisse avoir des recours et faire retirer des propos qui auront été diffusés et dont on aura eu connaissance.
Concernant le cas présent du site qui a utilisé des propos qui ont été tenus en 2006, il est clair que cet organisme a utilisé l'information sans autorisation.
Monsieur Walsh, même si aujourd'hui on s'engage dans un processus pour adapter la réglementation, que va-t-on faire concernant cet organisme? Cette affaire n'a pas soulevé de question de privilège. Selon notre ancienne réglementation, qu'adviendra-t-il de cet organisme?
:
Merci, monsieur le président.
En fait, c'est un véritable privilège que nous avons d'être ici. Je pense qu'il s'agit d'un sujet fascinant, et cela démontre l'importance de nous adapter au contexte parlementaire du XXIe siècle.
Je tiens à dire d'emblée que mes trois filles ne regardent jamais la télévision. Les seules personnes qui m'ont dit m'avoir vu à la télévision alors que je siégeais à la Chambre, c'étaient des aînés ou des personnes plus âgées. Cela ne m'insulte pas du tout. Nous savons tous que YouTube est le site Web sur lequel la plupart des jeunes visionnent les délibérations parlementaires. Ils peuvent suivre les séances lorsqu'ils s'intéressent à un dossier en particulier. Il y a un vaste réseau de gens qui mettent en ligne des vidéos sur YouTube. Je considère que c'est très excitant, puisque c'est un média interactif et c'est en quelque sorte devenu leur télévision.
Dans le cas qui nous occupe — et nous devons y réfléchir sérieusement, parce que nous voulons favoriser la diffusion des délibérations parlementaires —, il nous faut trouver un juste équilibre entre les obligations dont nous devons nous acquitter en tant que parlementaires et le privilège et l'honneur que nous voulons protéger, ainsi que la capacité de manipuler une image très rapidement.
Je pense que la question de la diffusion intégrale est importante, étant donné qu'un enfant de dix ans peut trafiquer un extrait vidéo sur YouTube et attribuer à une personne des propos qu'elle n'a pas tenus. Si l'enregistrement est publié sur un site Web, il peut quand même causer du tort, mais s'il se retrouve sur YouTube, il peut carrément détruire une carrière politique. C'est très facile à faire. Je ne crois pas que ça prend plus qu'une quatrième année pour savoir comment s'y prendre — je précise la quatrième année d'aujourd'hui, et non pas de notre temps. Un élève de quatrième année pourrait facilement y arriver, mais ce serait encore plus problématique pour nous, puisqu'il faudrait le recruter.
Par conséquent, en ce qui concerne les restrictions s'appliquant à la manipulation des images qui déforme ou dénigre le travail d'un député, je pense que la question du privilège parlementaire doit entrer en ligne de compte.
Vous avez indiqué que vous communiqueriez avec les représentants de YouTube dans ces situations. J'ai rencontré des représentants de Google au sujet des systèmes d'avis et de retrait aux États-Unis et ici. Qu'arrive-t-il si une tierce partie décide de déformer une déclaration faite à la Chambre des communes et de la diffuser sur le Web? Nous communiquons avec elle, et ensuite, quels sont nos recours?
:
D'après le document de recherche ou de breffage que nos recherchistes nous ont préparé, la Colombie-Britannique et la Nouvelle-Écosse interdisent l'utilisation des images de la Chambre pour la publicité d'un parti politique, une campagne électorale ou toute autre activité politique partisane. L'Australie l'interdit aussi, sauf si la personne reçoit l'autorisation expresse du député ou de la députée dont l'image est captée.
Les commentaires de M. Angus sont importants. Nous avons déjà entendu parler d'une publicité carrément diffamatoire d'un candidat contre un autre candidat député. Ce n'était pas sur un site Web. Cette publicité est sortie la fin de semaine, avant le jour de l'élection. Heureusement, le candidat député en a eu vent, a pu intervenir et obtenir une injonction interlocutoire d'un tribunal, etc. Avec les nouveaux moyens de communication, si cette publicité avait été diffusée sur YouTube,
[Traduction]
Il va sans dire qu'elle aurait rapidement fait le tour. Dieu sait combien de médias et de gens l'auraient prise pour la publier sur leur site Web, leur page Facebook, etc.
Par conséquent, j'aimerais que vous nous disiez si on a déjà contesté l'interdiction en vigueur en Colombie-Britannique et en Nouvelle-Écosse d'utiliser des images pour la publicité d'un parti politique, d'une campagne électorale ou de toute autre activité politique partisane. Si ce n'est pas le cas, monsieur Walsh, en tant que juriste, que diriez-vous de conserver votre notion générique, mais d'ajouter « à moins que le député ait donné son autorisation expresse ». Certains députés pourraient vouloir utiliser leur image ou autoriser leur parti à s'en servir, mais cela nécessiterait une approbation expresse.
:
Merci, monsieur le président.
Je pense que plus nous discutons de cette question, plus elle nous paraît complexe. Je pense que nous convenons tous de ne pas permettre ou, du moins, de ne pas encourager la déformation des messages. Toutefois, lorsqu'il s'agit de déterminer si cela a été fait à des fins de satire ou de dérision, c'est tout de même subjectif. Je me demande simplement comment nous pourrions nous entendre sur les limites à ne pas dépasser.
Cependant, si ces restrictions en matière d'utilisation s'appliquent aux fins politiques ou partisanes, je me demande comment nous arriverons à faire notre travail, c'est-à-dire à comparer les positions politiques d'un parti avec celles de l'opposition sur une question particulière. D'autant plus que dans cet autre document, il n'est pas seulement question du Web, mais bien des journaux, des procès-verbaux et de la diffusion. De cette façon, je pense qu'on se trouverait à éliminer pratiquement notre capacité à comparer notre position avec celle de l'opposition, ou vice versa.
Par conséquent, comment pourrions-nous composer avec une déclaration de droit d'auteur qui est aussi exhaustive que celle que nous avons ici? Je suis conscient que ce n'est que le point de départ d'une série de discussions, mais je considère que nous ne serions plus en mesure de faire ressortir notre position par rapport à celle de l'opposition.
:
Bien sûr. J'en aurai même trop.
J'aimerais revenir sur les propos de Charlie. Celui-ci a parlé de la façon dont la Loi sur les droits d'auteur pourrait être utilisée tout en veillant au respect des créations artistiques.
Je pense que ce modèle artistique comporte de nombreuses qualités. J'hésiterais toutefois à l'appliquer aux activités politiques, parce que ça ne donnerait rien, tout comme on ne veut pas utiliser une oeuvre artistique pour dénigrer l'artiste, diminuer sa production artistique ou aller à l'encontre de son but visé. C'est une chose.
Mais essayer de nous dénigrer et de nous faire perdre notre emploi, n'est-ce pas là le but des élections? Il s'agit d'un groupe de gens qui essaie de prendre la place d'un autre groupe, et cela me semble être une option préférable aux révolutions, aux coups d'État ou à d'autres façons de renverser le gouvernement.
Comme vous pouvez probablement en déduire d'après ce que j'ai dit plus tôt, je pense que vous devriez être en faveur d'une utilisation ouverte et accessible à tous ou à personne, y compris les députés eux-mêmes. En fait, il devrait être plutôt facile de réglementer les députés, comme la publication de leurs vidéos sur leur propre site Web. C'est plus un éditorial que d'autre chose.