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Merci beaucoup, monsieur le président.
Au nom de Chrysler et de Chrysler LLC, c'est un privilège et un plaisir de comparaître devant le comité ce soir. Nous allons présenter un exposé de 10 à 15 minutes, si ça vous va. M. LaSorda et moi allons nous relayer. Je vais commencer.
Il est indéniable que l'économie mondiale, tout comme l'industrie de l'automobile et Chrysler Canada, traverse des temps très difficiles. J'aimerais commencer à vous présenter un aperçu des activités de Chrysler Canada, puis vous parler des facteurs fondamentaux qui ont une incidence sur notre compétitivité au Canada, de nos plans d'avenir au Canada en ce qui concerne la fabrication, de notre restructuration et de notre viabilité à long terme, et, enfin, j'aimerais vous parler brièvement de l'alliance que nous sommes sur le point de conclure avec Fiat.
Après nos remarques, nous serons heureux de répondre aux questions des membres du comité.
Tout d'abord, Chrysler Canada a son siège social à Windsor, en Ontario, nous assurons une présence importante au Canada, et nos activités ont une forte incidence sur l'économie canadienne.
Chrysler exploite des installations de fabrication d'automobiles à Windsor et à Brampton, en Ontario, et une usine de coulage à Etobicoke. Nous avons aussi un centre de recherche et développement primé à Windsor, en partenariat avec l'Université de Windsor. Depuis plus de 20 ans, ce centre appuie et dirige de nombreux programmes de développement de technologies avancées, comme les véhicules au propane et au gaz naturel, et, plus récemment, les véhicules électriques.
Chrysler Canada a aussi des bureaux et des centres de distribution à Toronto, Montréal, Calgary et Red Deer. En comptant les opérations financières de Chrysler, l'entreprise offre actuellement de l'emploi direct à environ 9 400 personnes.
Il y a aussi 451 concessionnaires au Canada qui fournissent de l'emploi à près de 26 000 personnes, qui vivent exclusivement de la vente et de la réparation des produits Chrysler.
Du point de vue de l'approvisionnement, 407 fournisseurs approvisionnent en pièces les installations de fabrication de Chrysler. Ces fournisseurs emploient près de 50 000 personnes. L'an dernier, Chrysler a acheté des biens de ces entreprises pour un montant total de 5,5 milliards de dollars.
Enfin, avec 13 000 employés à la retraite, ce sont environ 100 000 Canadiens qui dépendent directement ou indirectement de Chrysler Canada pour leur bien-être.
Chrysler Canada assemble plus de un demi-million de véhicules par année et vend approximativement 230 000 véhicules sur le marché canadien. En 2007, Chrysler Canada est passé au deuxième rang des vendeurs de véhicules au Canada, et, la même année, a accru sa part de marché et ses ventes plus que tout autre vendeur de véhicules au pays. Avec un chiffre d'affaires de cinq milliards de dollars et des recettes de fabrication d'environ 13 milliards de dollars, Chrysler Canada est l'une des plus importantes sociétés du pays.
Le manque d'accès au crédit sur le marché canadien a des répercussions importantes non seulement sur Chrysler Canada, mais aussi sur l'économie du pays en général. En juillet 2008, avant que la crise mondiale du crédit ne se fasse sentir pleinement, Chrysler Canada avait connu une croissance de ses ventes d'une année sur l'autre pendant 23 mois consécutifs, un fait sans précédent dans l'histoire de notre entreprise et qui reste inégalée chez l'un ou l'autre des grands marchands de véhicules auxquels nous livrons concurrence au Canada.
Aujourd'hui, les marchands Chrysler de partout au Canada ont indiqué que jusqu'à 20 p. 100 des acheteurs potentiels de voitures neuves étaient incapables d'obtenir du financement pour l'achat d'un véhicule. De plus, le financement par crédit-bail fait actuellement défaut pour bon nombre de fabricants d'automobiles sur le marché canadien. Pendant les six premiers mois de 2008, près de 50 p. 100 des ventes de véhicules de Chrysler Canada ont fait l'objet d'un bail, alors que, aujourd'hui, on n'en trouve plus aucun.
Notre organisation de marchands fait également face à une pression extrêmement forte au chapitre du crédit. Le taux d'intérêt courant de la Banque du Canada n'a jamais été aussi bas, mais les marchands subissent des hausses sans précédent des coûts associés au financement d'inventaire ou de leurs nouveaux stocks de véhicules. De plus, il est presque impossible pour un futur marchand Chrysler d'obtenir le financement de véhicules dans sa concession, ce qui, en retour, ralentit l'activité économique du pays et empêche un nouveau marchand de se lancer en affaires. Il est également très difficile pour un marchand Chrysler d'obtenir un prêt hypothécaire pour construire un nouvel établissement ou pour financer une fusion avec un autre marchand.
La disponibilité du crédit est essentielle au bon rendement de l'industrie automobile et à la bonne santé de l'économie canadienne. En outre, une plus grande stabilité du côté de l'économie américaine aura aussi une incidence directe sur le succès de Chrysler Canada. Les activités de Chrysler Canada sont inextricablement liées à celles de Chrysler LLC et à nos activités aux États-Unis. Par exemple, 85 p. 100 des produits fabriqués par Chrysler Canada sont exportés aux États-Unis, 60 p. 100 des produits vendus au Canada sont fabriqués aux États-Unis, et entre 20 et 27 p. 100 de la production mondiale de Chrysler se fait au Canada. Par conséquent, nous pensons qu'il est irréaliste, et, en toute franchise, inapproprié d'examiner les activités de Chrysler Canada sans tenir compte du contexte global dans lequel notre société fonctionne.
Cela dit, je vais céder la parole au président de Chrysler LLC et à notre vice-président, M. Tom LaSorda, qui va parler de certains des facteurs fondamentaux de notre compétitivité au Canada.
Je suis canadien aussi. Je vis aux États-Unis et j'ai acquis la citoyenneté américaine il y a trois ans, mais je suis en même temps fier d'être canadien.
Je représente la société Chrysler et Chrysler LLC, à titre de président et vice-président du conseil de la société.
Le succès actuel et la viabilité à long terme des activités de fabrication de Chrysler au Canada dépendent en grande partie de trois facteurs fondamentaux: l'établissement de prix de transfert internes clairs par le gouvernement du Canada, les coûts de main-d'oeuvre au pays et l'aide gouvernementale. Chrysler LLC ne peut se permettre de fabriquer des produits dans un pays qui ne serait pas concurrentiel par rapport aux autres pays où l'on fabrique des voitures.
Permettez-moi d'aborder l'autre grande question, c'est-à-dire celle de l'établissement des prix de transfert internes. À l'automne 2007, l'Agence du revenu du Canada ou ARC a émis des avis indiquant que, pour la période allant de 1996 à 1999, Chrysler Canada aurait dû toucher des profits plus élevés que ceux qu'elle a déclarés au Canada, et que, par conséquent, elle aurait dû déclarer des profits réduits aux États-Unis.
J'aimerais dire quelque chose qui ne figure pas dans le texte de notre exposé: Chrysler a payé les impôts en question. Le problème, c'est que l'ARC suppose que la société aurait dû payer davantage d'impôts qu'elle n'en a payés au Canada, et moins aux États-Unis, d'où le conflit.
Lorsque Daimler a vendu sa participation majoritaire dans Chrysler, la société avait accepté d'indemniser Chrysler pour ce qui est notamment de telles impositions à l'égard des prix de transfert internes. Selon la loi canadienne, même si Chrysler Canada conteste dûment les avis de cotisation, la société a été obligée de fournir des liquidités et des actifs pour garantir 50 p. 100 des montants imposés.
Daimler a déclaré qu'elle ne paierait pas l'indemnité tant que la contestation de la validité des cotisations n'aura pas été réglée, laissant à Chrysler Canada l'obligation de fournir les garanties nécessaires à l'ARC. Cette obligation de payer ou de garantir les montants ainsi imposés a eu de profondes répercussions sur les activités de la société pendant cette période difficile.
Le problème avec l'ARC a été soumis à une méthode de règlement de différend, à laquelle participent l'IRS et l'ARC, qui a pour but de déterminer la répartition de la valeur entre les activités de Chrysler aux États-Unis et au Canada. Toutefois, pour la poursuite des activités de Chrysler au Canada malgré le processus de règlement de ce différend, Chrysler a besoin de recevoir de l'ARC l'assurance qu'elle se contentera, pendant ce processus, de la caution que Chrysler Canada lui a fournie — un privilège sur notre usine de fabrication de Brampton, évalué à 500 millions de dollars, et un nantissement de plus de 335 millions de dollars en espèces, en TPS payée et due à Chrysler, mais retenue — et qu'elle ne cherchera pas à obtenir une caution supplémentaire tant que le différend ne sera pas résolu, ce qui a été convenu avec l'IRS.
Dès que cette question concernant les prix de transfert internes sera tranchée, Daimler paiera le montant qui sera effectivement dû à l'ARC aux termes de son obligation d'indemnisation.
Permettez-moi de passer à la deuxième question, c'est-à-dire le coût de la main-d'oeuvre. À l'heure actuelle, les taux de rémunération tout compris offerts par Chrysler/TCA ne sont pas concurrentiels. Le syndicat des TCA s'est vu offrir d'autres approches ainsi qu'une proposition détaillée pour combler l'écart du coût de la main-d'oeuvre des TCA d'environ 20 $ l'heure. L'écart du coût de la main-d'oeuvre est une mesure qui compare les installations de Chrysler/TCA aux usines de montage canadiennes délocalisées comme celles de Honda et de Toyota. Il comprend aussi les activités de fabrication de Chrysler/TUA et les usines délocalisées aux États-Unis. La réduction de l'écart entre les coûts de main-d'oeuvre comprend aussi une diminution de 50 p. 100 des autres avantages accordés à la cessation d'emploi.
Outre les considérations énumérées ici, il est impératif de combler l'écart dans les coûts de main-d'oeuvre des TCA afin de préserver la présence des usines de fabrication canadiennes de Chrysler.
La troisième chose, c'est l'aide gouvernementale. À la suite du fléchissement sans précédent de la demande d'automobiles provoqué par la crise financière mondiale, Chrysler Canada a demandé, le 5 décembre 2008, l'aide du gouvernement canadien et du gouvernement de l'Ontario.
Chrysler Canada demande au Canada une aide proportionnelle à celle que notre société mère, Chrysler LLC, cherche à obtenir aux États-Unis, en s'appuyant sur le fait que nos deux organisations sont fortement intégrées.
Aux États-Unis, nous avons demandé un prêt sous forme de fonds de roulement de sept milliards de dollars pour financer notre restructuration à court terme et notre viabilité à long terme à l'occasion d'une présentation que nous avons faite au Congrès américain le 2 décembre 2008. Cette demande reposait sur des données annuelles désaisonnalisées — nous appelons ça des DAD — qui faisaient état de ventes de 11,1 millions d'unités pour 2009 aux États-Unis.
Le 2 janvier 2009, le Trésor des États-Unis a avancé quatre milliards de dollars de la somme demandée et obligé Chrysler à présenter un plan de restructuration pour soutenir sa viabilité à long terme.
Le 17 février 2009, Chrysler a présenté au Trésor américain un plan de viabilité dans lequel notre projection des DAD pour 2009 a été ramenée à 10,1 millions d'unités tout en prévoyant une croissance plus progressive dans les dernières années de la période de planification.
Comme le marché américain n'a cessé de se détériorer, nous avons demandé un financement d'appoint supplémentaire de deux milliards de dollars en plus du montant initial de sept milliards de dollars.
Le 20 décembre 2008, les gouvernements du Canada et de l'Ontario ont promis à Chrysler Canada un prêt productif d'intérêt remboursable de un milliard de dollars canadiens. Reconnaissant le fait que nous sommes une société et une industrie intégrées, les gouvernements ont aussi indiqué qu'ils désiraient fournir un appui parallèle, dans sa forme et ses modalités, et proportionnel, dans son montant, à l'aide américaine. À cette fin, Chrysler Canada a continué d'imiter, le cas échéant, les efforts de restructuration et de transformation demandés par le Trésor américain.
Si nous ne parvenons pas à régler les problèmes liés à ces trois facteurs, le coût de la main-d'oeuvre, l'aide gouvernementale et, bien entendu, l'impôt touchant les transferts —, nos usines de fabrication au Canada seront grandement défavorisées par rapport à nos usines de fabrication en Amérique du Nord et pourraient très bien nous empêcher de poursuivre nos activités de production au Canada. Étant une société présente dans plus d'un territoire, nous ne pouvons pas nous permettre de fabriquer des produits dans des régions qui ne sont pas concurrentielles sur le plan des coûts.
Je vais céder la parole à Reid, qui vous parlera des plans pour le Canada et vous décrira notre plan de viabilité et ce que nous allons faire avec Fiat. En passant, je suis sûr que vous savez tous que le président-directeur général de Fiat est lui aussi canadien.
Comme nous l'avons indiqué précédemment, le Canada a toujours été un important marché de fabrication et de ventes pour Chrysler. Mentionnons plus particulièrement que le Canada est le plus vaste marché de ventes de véhicules pour Chrysler à l'extérieur des États-Unis et qu'aucun autre fabricant de véhicules que Chrysler n'a plus une grande partie de toutes ses activités manufacturières au Canada.
À l'heure actuelle, Chrysler Canada fabrique la Dodge Grand Caravan, la Chrysler Town and Country, ainsi que la Volkswagen Routan à notre usine d'assemblage de Windsor. De plus, nous produisons la Chrysler 300, la Dodge Charger et la Dodge Challenger à notre usine d'assemblage de Brampton.
Si nous arrivons à réunir les trois facteurs essentiels que Tom a énumérés, Chrysler envisage un avenir prometteur pour nos activités canadiennes. Plus précisément, Chrysler Canada entend poursuivre ses investissements actuels dans ses usines d'assemblage de Windsor et de Brampton.
Je vous fais un résumé de ces investissements à Windsor. En 2008, pour le programme de la mini-fourgonnette en 2008, nous avons investi près de un milliard de dollars. Également en 2008, nous avons investi près de 240 millions dans l'usine de peinture. Pour la mini-fourgonnette de 2009, nous sommes en train d'investir 41 millions de dollars pour fabriquer des véhicules pour le marché international. Et pour le modèle de 2011, nous avons l'intention de procéder à une mise à niveau du portefeuille des mini-fourgonnettes en investissant encore 153 millions de dollars dans notre usine d'assemblage de Windsor.
À Brampton, les investissements sont encore plus importants. Nous poursuivons les investissements pour la prochaine génération de véhicules Chrysler 300 et Dodge Charger à notre usine d'assemblage de Brampton à compter de l'année civile 2010. Ces plates-formes seront généralement adaptées aux marchés internationaux, y compris en ce qui concerne la production de véhicules à conduite à droite. Pour résumer, en 2008, nous avons également investi 332 millions de dollars dans notre usine d'assemblage de Brampton pour la Dodge Challenger, et, pour la prochaine génération des modèles 300 et Charger, nous prévoyons un investissement d'un peu plus de un milliard de dollars.
Rapidement, du point de vue de la restructuration et de la viabilité, depuis que Cerberus a acheté notre organisation de Daimler en août 2007, nous avons immédiatement entrepris de revoir notre modèle d'affaires, d'améliorer notre portefeuille de produits et de créer une structure de coût plus concurrentielle.
Pour ce qui est de l'amélioration des activités, nous avons réduit les coûts fixes de 3,1 milliards de dollars; nous avons diminué notre effectif de 32 000 employés, notre capacité de fabrication a été réduite de 1,2 million d'unités, par la suppression de 12 quarts de travail dans la fabrication et par la fermeture de deux usines de fabrication, celles de St. Louis et de Newark; nous avons cessé de produire quatre modèles; nous avons vendu des actifs improductifs d'une valeur de 700 millions de dollars et, plus près de chez nous, nous avons fermé les centres de distribution de pièces de Vancouver, de Winnipeg et de Moncton. Tout ça visait à permettre une réduction de notre structure de coût.
Nous avons également demandé à tous les intervenants importants qui ont un intérêt direct dans la viabilité à long terme de Chrysler et de Chrysler LLC de faire des concessions. Des concessions ont été demandées aux cadres et à la direction de Chrysler LLC et à nos concessionnaires, et elles ont été obtenues, non seulement au Canada, mais également aux États-Unis. Au Canada seulement, nos marchands canadiens ont accepté des concessions de plus de 30 millions de dollars pour contribuer à la viabilité à long terme de nos organisations.
En ce qui concerne nos syndicats, comme Tom l'a mentionné, des pourparlers sont en cours avec les TCA. Aux États-Unis, nous avons réussi à réduire le coût de la main-d'oeuvre pour être concurrentiels par rapport aux usines délocalisées au sud de la frontière.
Des négociations avec les fournisseurs dans le but de leur demander de faire des concessions sont également en cours.
Nous avons demandé à nos créanciers de deuxième rang de transformer toutes leurs créances en actions, et nous avons également demandé aux actionnaires de convertir leurs créances et leurs obligations en actions de l'entreprise.
Nous cherchons également à nous acquitter de nos obligations de restructuration en concluant un partenariat stratégique avec Fiat. Nous avons actuellement plus d'une vingtaine de coentreprises et de partenariats, mais le projet d'alliance avec Fiat nous permettrait d'améliorer notre plan de restructuration, de profiter d'importantes possibilités d'économies de coûts et nous doterait d'une capacité de distribution sur les principaux marchés de croissance.
L'alliance avec Fiat aiderait aussi Chrysler à atteindre les économies d'essence qu'elle vise à mesure que Chrysler aurait accès aux technologies de propulsion et aux plates-formes plus petites et éconergiques de Fiat. Comme le marché canadien accapare 42 p. 100 des petits véhicules et des véhicules compacts, cet arrangement fournirait à Chrysler Canada et à ses marchands un avantage supérieur.
Pour conclure, monsieur le président, merci beaucoup de nous avoir offert l'occasion de témoigner devant le sous-comité, et merci de votre patience à l'égard du fait que nous avons dépassé le temps prévu.
Nous sommes pleinement conscients du fait que nous demandons un prêt très important au gouvernement canadien et aux contribuables canadiens. Toutefois, les investissements que nous ferons au Canada seront également de taille. Nous croyons fermement que ce prêt pleinement garanti par les gouvernements aura aussi un rendement positif pour les contribuables.
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Merci, monsieur le président.
Et merci à nos invités d'être venus ici aujourd'hui.
Je vais commencer, comme j'ai commencé plusieurs séances jusqu'à maintenant, par établir quelques éléments d'un contexte mondial et par vous demander quelles sont vos pensées à cet égard.
Plusieurs publications du monde ont commenté la situation au Canada.
On a pu lire dans The Economist, par exemple, que « dans un monde en plein naufrage, le Canada est un peu comme un bouchon de liège. La grande crainte, c'est que la récession américaine fasse couler le Canada en même temps que les États-Unis ».
Je cite le Daily Telegraph: « Si le reste du monde s'était comporté avec la même modestie et la même prudence, nous ne serions peut-être pas dans ce pétrin. » L'auteur comparait le Canada aux autres pays du G8.
Je cite maintenant Newsweek: Si le président Obama cherche un exemple de gouvernement intelligent, comme nous tous, il aurait beaucoup de choses à apprendre de [...] nos voisins du Nord. »
Même le président des États-Unis, M. Obama, a dit: « L'une des choses étonnantes à propos du Canada, c'est qu'au milieu de cette grave crise économique, je pense que le gouvernement du Canada a fait la preuve qu'il est un bon gestionnaire du système financier au sein de l'économie, d'une façon qui n'a pas toujours été la nôtre, ici, aux États-Unis. »
Ce sont quatre observations de sources externes et indépendantes selon lesquelles ce problème s'inscrit dans un contexte mondial.
Le ralentissement aux États-Unis a vraiment eu des répercussions sur la situation au Canada. Selon la façon dont j'envisage le problème, il y a des répercussions à deux égards. Il y a les répercussions directes de la situation aux États-Unis, et ce sont les répercussions sur le secteur de la fabrication. En d'autres termes, lorsque les Américains ont cessé d'acheter des voitures, ça a immédiatement affecté notre secteur de la fabrication. Ensuite, il y a les répercussions indirectes de cette situation, c'est-à-dire le fait que les Américains ont, de façon générale, cessé d'acheter quoi que ce soit. Nous fabriquons beaucoup des produits qu'ils achètent habituellement. Par conséquent, les emplois au Canada sont devenus moins sûrs, et nous avons cessé d'acheter des voitures au Canada. Ce sont les répercussions sur les ventes.
Selon vous, est-ce une analyse juste de la situation et des problèmes auxquels nous faisons face?
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Merci, monsieur le président.
J'aimerais savoir si, dans votre plan de restructuration, vous avez pensé à l'après-crise.
Vous savez que présentement, aux États-Unis comme au Canada, il y a plusieurs pertes d'emploi, plusieurs baisses de salaire. En effet, les travailleurs acceptent ces baisses de salaire pour aider les entreprises, et ce, dans tous les domaines.
Vous savez aussi que le pouvoir d'achat de tous ces consommateurs diminue de façon exponentielle. Ce soir, au bulletin de nouvelles télévisées, j'ai vu qu'aux États-Unis, 300 personnes demeurent présentement dans des tentes. Et il semble qu'une foule d'autres personnes vont faire de même parce qu'elles n'ont plus de maison ni de voiture; elles n'ont plus rien.
Compte tenu de tout cela, allez-vous continuer à fabriquer le même type de véhicules ou allez-vous fabriquer un nouveau modèle, en fonction de la crise économique?
Le pouvoir d'achat a diminué et les banques ou les caisses ne prêtent plus d'argent aussi facilement pour l'achat d'une voiture. Le salaire des travailleurs a baissé, et les dettes qu'ils ont déjà contractées ont atteint un point de saturation. Ces institutions bancaires ne veulent donc plus prêter aucun argent pour l'achat d'une voiture ou d'autres choses.
Dans votre plan, avez-vous prévu de fabriquer un nouveau modèle de voiture, plus petit, sous-compact, moins cher, pour essayer de séduire les consommateurs de sorte qu'ils estiment pouvoir acheter ce type de voiture? Les ventes pourraient alors être assez exceptionnelles.
Il peut encore y avoir un marché pour les voitures de types Chrysler 300, Charger ou Challenger, par exemple. Néanmoins, j'imagine que le pouvoir d'achat pour une voiture va descendre en deçà des 25 000 $ ou 30 000 $. Avez-vous déjà pensé à cela, pour ce qui est de l'après-crise?
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On vient de me demander cet après-midi de venir témoigner; je n'ai donc pas eu beaucoup de temps pour me préparer. Je vais donner un aperçu général des deux lois qui gouvernent principalement les restructurations au Canada. Je ne sais pas très bien quel degré technique appliquer à mes explications, car je ne sais pas quelles sont vos connaissances générales dans le domaine, mais je vais essayer de présenter cela de façon simple; vous pourrez me bombarder de questions plus tard.
Ce sont principalement deux lois qui gouvernent la restructuration des entreprises en cas d'insolvabilité au Canada. D'abord, il y a la Loi sur la faillite et l'insolvabilité et, ensuite, il y a la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (LACC). Ces deux lois sont semblables à certains égards, mais très différentes à d'autres. Elles visent toutes les deux à faire en sorte qu'une entreprise insolvable puisse continuer à exercer ses activités et éviter la faillite. Cela ne veut pas dire pour autant qu'elle ne permet pas de liquider des biens. Et il importe de savoir que, sous le régime de l'une ou de l'autre, il peut y avoir une proposition qui aboutit à une simple liquidation. L'idée que l'entreprise poursuive ses activités a donc cours, mais elle n'est pas nécessairement le corollaire du recours à l'une ou à l'autre des deux lois.
Le texte de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité expose lui-même la plupart des règles applicables; c'est donc facile à suivre. Si vous êtes en mesure de lire la loi, en plus, vous savez ce qu'un créancier est autorisé à faire, ce qu'un débiteur est autorisé à faire aussi et quelles sont les lignes directrices applicables. C'est une loi qui sert moins souvent que la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies dans le cas de restructurations compliquées.
La LACC repose davantage sur l'action des tribunaux. C'est d'ailleurs une demande envoyée à un tribunal qui déclenche la démarche. Pour agir, vous obtenez l'ordonnance d'un tribunal, démarche qui a maintenant été rationalisée, de sorte que c'est plus ou moins un document type maintenant, au départ. La première ordonnance vaut pour 30 jours, puis il faut s'adresser de nouveau au tribunal pour qu'il rende les ordonnances subséquentes. Et comme c'est le tribunal qui est l'élément moteur de la démarche, le genre d'accords ou d'arrangements auxquels on peut arriver est nettement plus variable. Par contre, cela veut dire qu'il faut y investir beaucoup plus de temps, aller comparaître beaucoup plus souvent pour convaincre le tribunal de ce qu'on fait valoir. De même, les règles ne sont pas aussi strictes. C'est tout de même la loi qui s'applique habituellement à une restructuration compliquée ou d'envergure, ce qui serait probablement le cas de la restructuration dans l'industrie de l'automobile.
La Loi sur la faillite et l'insolvabilité impose des délais. Vous pouvez tenir vos créanciers à distance, mais pour une certaine période seulement. Habituellement, c'est six mois, pas plus; sous le régime de la LACC, le sursis peut s'appliquer pendant une période beaucoup, beaucoup plus longue.
Les deux lois exigent des créanciers qu'ils votent sur l'arrangement proposé, quel qu'il soit, et prévoient qu'un tribunal, une fois l'arrangement approuvé par les créanciers, puisse l'examiner de nouveau et l'approuver. C'est donc une démarche en deux étapes, plus ou moins.
Les créanciers garantis ont droit à un traitement qui est un peu différent de celui qui est réservé aux créanciers ordinaires, il importe de le savoir aussi. Si les créanciers garantis ne votent pas en faveur du plan proposé, il n'y a pas forcément faillite; cela veut simplement dire qu'il n'y a pas de sursis, mais l'entreprise ne peut plus les tenir à distance; à ce moment-là, les créanciers garantis peuvent essentiellement s'emparer des biens qui étaient donnés en garantie.
Ce sont essentiellement les groupes des catégories ordinaires de créanciers qui approuvent le plan. Ce sont eux qui comptent du point de vue du vote. Par contre, il faut satisfaire aux exigences des créanciers garantis, sinon ils peuvent simplement reprendre leurs biens.
Pour résumer, ce sont probablement là les principales distinctions entre les deux lois. Je ne sais pas jusqu'à quel point vous voulez que j'approfondisse encore la question ou si vous avez des questions particulières au sujet des opérations.
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J'ai suivi avec pas mal d'attention les travaux de votre comité; vous avez entendu beaucoup de témoignages sur les questions immédiates et les questions cycliques. Comme j'aborde certaines d'entre elles dans mon dossier, je vais éviter d'en parler aujourd'hui. Je serais heureux de répondre à vos questions à leur sujet. J'ai un avis sur certaines questions, mais ce serait trop long d'en parler, selon moi. J'aimerais mieux m'en tenir aux questions structurelles touchant le secteur, la direction que prend l'industrie pour les 12 prochaines années, plus ou moins, la situation du Canada au sein de l'industrie, l'avenir et le cadre dans lequel il faut inscrire la politique gouvernementale en rapport avec notre industrie.
Permettez-moi de vous le dire de manière catégorique: l'industrie va survivre à la crise qui sévit en ce moment, j'en suis sûr à 100 p. 100, cela ne fait aucun doute. Les véhicules font partie intégrante de notre style de vie. Or, les véhicules s'usent. Saviez-vous que, ce matin, 240 millions de Nord-Américains se sont levés et se sont mis au volant de leur voiture pour se rendre au travail et revenir ensuite à la maison, et que, un jour, il faudra remplacer tous ces véhicules-là? Il y aura toujours une demande. L'industrie va passer au travers de cette crise.
En même temps, le niveau de la demande — ce dont vous avez discuté avec Chrysler — et la croissance de la demande au cours des prochaines décennies vont certainement être moindres. Les Américains ont acheté des véhicules dans une proportion qui est ridicule; ça ne peut durer d'aucune façon. Ce n'est pas un problème au Canada; au Canada, nous avons été très responsables. C'est un problème américain.
Quelques données viennent confirmer cette analyse. Nous dénombrons les véhicules par personne en âge de conduire: aux États-Unis, ce taux s'élève à 101 p. 100; au Canada, il est plus près de 70 p. 100. Nous nous en tirons très bien avec 70 p. 100 des gens qui possèdent un véhicule. Comment se fait-il qu'il faut que ce soit 101 p. 100 chez les Américains?
Je pourrais donner un très, très grand nombre d'exemples. Le meilleur que je puisse donner comme ça, c'est que tous les ans, depuis 10 ans, entre deux et trois millions d'Américains, contractent une deuxième hypothèque de 35 ans dont ils se servent pour acheter un véhicule, un véhicule qui aura largement perdu sa valeur 10 ans plus tard. Comment cela peut-il tenir?
Les membres de votre comité ont beaucoup débattu du niveau de la demande. Même en songeant au meilleur scénario possible, vous pouvez envisager une demande se situant entre deux et trois millions d'unités pour les 12 prochaines années, tous les ans, rien ne changera cela. La prévision que Chrysler a présentée dans son mémoire est la plus prudente et la plus réaliste. J'appuie cette prévision.
Je pourrais citer d'autres exemples, mais je ne le ferai pas.
Si la proportion de propriétaires américains de véhicules devait baisser pour atteindre les niveaux canadiens, on aurait le scénario cauchemardesque du genre de celui que met de l'avant la CIBC, par exemple, soit une demande se situant à huit ou neuf millions d'unités, des trucs du genre. Cela n'arrivera pas. Techniquement, comme les achats de véhicules dépassent la norme de 15 à 20 millions d'unités, nous pourrions ne rien acheter l'an prochain et très bien survivre... [Note de la rédaction: inaudible] Ça n'arrivera pas. Il y aura une demande de base d'un niveau que Chrysler est probablement parvenu à situer correctement, en termes approximatifs.
Je suis tout à fait convaincu d'une chose: malgré la crise qui sévit, il y a au Canada une occasion sans précédent de croissance, une occasion sans précédent de soutenir l'industrie. Nous sommes peut-être sur le point d'entamer la meilleure décennie de l'histoire de notre industrie, si nous prenons pour horizon l'année 2020. À ce sujet, je veux faire valoir six points.
Peter pourrait vous en dire plus long que moi. Le produit que nous allons conduire au cours des 10 à 12 prochaines années doit être entièrement réinventé, d'un bout à l'autre. En 2020, nous ne le reconnaîtrons pas. Il y a le gouvernement américain qui affirme que les voitures devront faire 35 milles au gallon. Or, nous ne pouvons satisfaire à cette norme-là si nous ne réinventons pas notre produit. En ce moment même, nous investissons plus de 30 milliards de dollars par année en Amérique du Nord pour innover — c'est la recherche, la conception, le développement, les essais. Cela va monter en flèche. Le segment qui croît le plus vite au sein de l'industrie automobile canadienne de nos jours, c'est celui des emplois intellectuels, qui donnent lieu à un grand nombre de trouvailles. Encore une fois, Peter pourrait citer une ou deux douzaines de cas qui montrent que le Canada occupe un rang élevé dans la chaîne de valeur, qu'il s'en tire très bien sur ce point. Je crois vraiment que chaque emploi de col bleu que nous perdrons au sein de notre industrie, sous l'effet de la crise actuelle, peut être remplacé d'ici quatre ou cinq ans — ce sera peut-être 10 ans —par un emploi intellectuel mieux rémunéré. Le potentiel est là. Je vois donc l'avenir avec beaucoup d'optimisme.
Mon mentor était Yves Landry, qui nous a quitté il y a plus de 10 ans de cela. Je cite une de ses déclarations qui remonte à 15 ans; à ce moment-là, il a dit que l'avenir de l'industrie canadienne de l'automobile se trouve entre nos deux oreilles. Il avait raison. Ce serait encore plus vrai aujourd'hui. Ça vous montre à quel point c'était un grand homme: il pensait avec 15 années d'avance.
Ensuite, l'industrie est devenue mondiale, et elle sera de plus en plus en plus mondiale à l'avenir. Il n'y a absolument rien que le Canada ou les Américains puissent faire pour contrer cela. Le Canada devra donc rivaliser avec les autres et trouver une façon de se faire valoir sur un terrain mondial. Nous n'avons pas d'autres choix, ce sera comme ça de haut en bas, rien ne changera cela. On ne peut se prémunir contre ce phénomène. On ne peut le fuir. On ne peut se cacher. C'est une industrie mondiale. Voilà la donnée de base.
La troisième chose que je voulais dire, c'est que la politique canadienne en matière d'automobile s'est révélée très protectionniste par le passé. Il existe des douzaines de politiques protectionnistes qui ont aidé notre industrie depuis 20 ou 30 ans — je suis l'expert de la chose. De fait, j'ai rédigé certaines d'entre elles — à commencer par le Pacte de l'automobile. Nous n'avons plus accès à ces instruments-là. La plupart d'entre eux, de fait, sont illégaux. On ne peut revenir à cette époque.
Voilà notre véritable défi. Pour la première fois dans l'histoire de l'industrie canadienne de l'automobile, il nous faut trouver une façon d'obtenir des investissements à partir d'une position concurrentielle, purement, simplement — et non pas grâce au protectionnisme, grâce à toutes les politiques et à toutes les béquilles qui nous ont servi dans le passé.
Je crois que cela peut se faire, à condition que nous ayons le bon type de cadre stratégique. Cela évoque pour moi un certain manque de confiance, et c'est peut-être un truc propre au Canada — « Merde alors, ça nous prend absolument cela, ça nous prend... ». Eh bien, nous ne pourrons plus avoir cela. C'est une question de confiance à bien des égards, et pas seulement une question de politique gouvernementale. N'oubliez pas cela.
Quatrièmement — je vais y aller très rapidement —, dans sa politique, le gouvernement doit s'attacher à promouvoir l'efficacité de toutes les façons possibles. C'est promouvoir les investissements pour que nous nous obtenions les toutes dernières technologies, les meilleures technologies au Canada, sans oublier les investissements dans l'infrastructure, la fiscalité, les régimes de réglementation, les ressources humaines, etc. Tout doit s'articuler autour de la notion d'efficacité. Pour pouvoir rivaliser sur l'échiquier mondial, vous n'avez pas d'autre choix. Vous devez être efficace et saisir l'occasion qui se présente.
Cinquièmement, je dirais qu'il faut regarder avec beaucoup d'attention la réglementation et la fiscalité qui s'appliquent à notre industrie. Pour être tout à fait franc, nos gouvernements — ce n'est pas que le gouvernement canadien, c'est aussi le gouvernement de l'Ontario, le gouvernement des États-Unis — ont profité des possibilités fiscales du secteur de l'automobile, et ils en ont fait leur vache à lait. Ils ont adopté taxe sur taxe sur taxe — et je pourrais toutes les énumérer, dans le cas du Canada — des taxes sur la climatisation ou sur la consommation d'essence, taxe de luxe, taxe sur les pneus, TPS, TVP, etc. toujours avec le même prétexte: bon, l'industrie de l'automobile, c'est gros, ça a la capacité de payer ces taxes-là; il faut que le secteur fasse sa juste part.
Nous avons fini par le constater, nous ne pouvons nous permettre de faire cela. De nombreux politiciens — ce n'est pas l'affaire particulière de votre gouvernement ou des gouvernements fédéraux précédents, ça s'applique à l'ensemble — se sont servis du secteur de l'automobile pour montrer à l'électorat qu'ils maîtrisent d'autres dossiers, l'environnement étant le meilleur exemple, en affirmant: « Nous travaillons à protéger l'environnement: nous imposons la pratique X, Y et Z à l'industrie de l'automobile », en songeant très peu au coût que cela suppose. De même, la dure réalité des six derniers mois a fini par nous le faire découvrir, c'est impossible à tenir et hors de prix.
Si vous voulez tirer parti de l'occasion qui se présente, vous devez faire très attention à la fiscalité et à la réglementation.
Le sixième point — je vais clore mon exposé là-dessus — nous ramène à ce que Chrysler disait. Pour que vous soyez à l'aise avec la question, votre premier souci doit pouvoir se ramener à trois choses: le produit, encore le produit, et toujours le produit — le programme des produits sous tous ses aspects. Si Chrysler, Ford, General Motors ou une autre entreprise s'adresse à vous en parlant de ce qu'elle entend faire de ses produits et que vous êtes à l'aise... Immanquablement, toute l'histoire de l'industrie le confirme, c'est le produit qui met l'entreprise dans le pétrin et c'est le produit qui tire l'entreprise d'un mauvais pas. Voilà la première étape. Sans produit, il n'y a rien.
Il y a eu beaucoup de discussions sur l'idée que le Canada se donne une sorte de politique exhaustive sur le secteur de l'automobile. On a même conclu qu'il doit le faire. Cela est impossible. Vous n'y arriverez jamais Ça ne se trouve pas.
Chacun des ministères de votre gouvernement touche notre industrie de l'automobile d'une façon ou d'une autre, de façon positive ou négative. Votre politique réunit en quelque sorte tous les ministres et l'industrie en question pour déterminer ce que l'on peut faire pour éliminer les obstacles, pour aider — et je parle d'Environnement, d'Agriculture, d'Industrie — chaque ministère — tous les ministères — qu'il faut réunir et peut-être que ce sera une solution bricolée. Il faut se pencher sur tous ces éléments-là; le gouvernement joue un rôle vraiment capital. Tout de même,vous n'allez pas vous donner une politique de l'automobile au Canada.
Merci beaucoup.
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Je ne vais pas traiter de long en large des difficultés actuelles liées au marché dans l'industrie de l'automobile, sauf pour dire que, cela ne fait aucun doute, comme d'autres l'ont dit, les problèmes qui se présentent à notre secteur de l'automobile se présentent partout dans le monde dans tous les pays et dans toutes les régions où on fabrique des automobiles, de l'Asie à l'Europe, sans oublier, bien entendu, l'Amérique du Nord où nous nous trouvons. Cela n'a rien d'unique.
Je ne vais pas m'éterniser là-dessus, car je soupçonne que d'autres ont dit cela aussi, mais je crois qu'un des aspects clés de la crise, c'est le fait qu'elle survienne à un moment où l'industrie déploie de grands efforts pour créer les véhicules de l'avenir, qui seront plus écologiques, plus sécuritaires et plus efficaces. Or, la seule façon de financer ces efforts-là est de puiser dans les liquidités que procurent de solides ventes, ventes qui se sont confirmées entre les années 1990 et le début de l'an dernier ou le milieu de l'an dernier. Lorsque les ventes en question ont périclité, les fonds disponibles pour créer des produits nouveaux se sont raréfiés.
L'élément principal qu'il faut saisir — et il est probablement un peu étonnant que je dise cela —, c'est que la R et D ne réglera pas le problème aujourd'hui. C'est un problème à court terme qui touche le crédit et le consommateur. Tout de même, la R et D, la recherche et le développement, et l'innovation ont une importance capitale; c'est une façon pour les entreprises canadiennes du secteur de l'automobile de devenir viables pour l'avenir, d'être présentes au moment où l'économie se redressera et où les ventes reprendront. Cela pour que nous ayons de merveilleux produits que les gens voudront acheter et qui permettront à nos citoyens de continuer de travailler. Et c'est de cela que je vous parle aujourd'hui.
Si l'industrie canadienne de l'automobile veut bien se positionner pour l'avenir, selon moi, les investissements qui sont faits aujourd'hui — et on investit bel et bien — deviennent vraiment importants. Tous les jours, une cohorte de chercheurs dévoués aide les entreprises canadiennes du secteur de l'automobile à tirer parti des occasions qui accompagnent les difficultés actuelles ainsi que les occasions appelées à se présenter à l'avenir, que le secteur doit saisir.
L'autre élément clé, pour qui souhaite comprendre l'effort de l'industrie canadienne de l'automobile en matière d'innovation, de même que celui des organismes publics qui collaborent avec elle, c'est que les jeunes Canadiens qui fréquentent l'école aujourd'hui — mes enfants à moi, vos enfants à vous —, auront besoin d'un travail à l'avenir. Or, ces emplois-là seront à forte saveur technologique, comme Dennis l'a dit de façon très juste. Nous devons nous assurer de préparer nos jeunes à occuper ces emplois très techniques; ainsi, non seulement nous aurons des entreprises bien positionnées parce qu'elles sont armées de technologies merveilleuses, mais aussi nous aurons des jeunes qui sont prêts à aller occuper les emplois en question et à aider notre pays à progresser à l'avenir. Encore une fois, c'est pourquoi il m'apparaît important, même durant une période difficile comme celle que nous vivons, de continuer à investir dans l'innovation, car une bonne partie de notre effort d'innovation sert à former les jeunes.
Chez AUTO21, nous appliquons un programme de recherche qui est soutenu par l'industrie et adapté à ses consignes à elle. De même, nous appliquons un programme de formation des étudiants qui a été primé, et qui a remporté notamment le prix de l'édition 2006 du concours de la Fondation Yves Landry. Grâce à cela, nous avons déjà formé plus de 1 200 jeunes ingénieurs destinés à intégrer le secteur de l'automobile ou à embrasser une carrière autre comme idéateur dans le secteur, et c'est là que se dirige vraiment le secteur, comme Dennis l'a fait remarquer. Nos programmes d'aujourd'hui et de demain aideront à former des milliers de gens encore. Ce sera un travail capital à un moment où les emplois se font rares et où nos plus beaux talents doivent contribuer à l'ensemble et bâtir une assise sur laquelle ils pourront se fonder pour s'épanouir.
Nous permettons donc à nos plus beaux talents tout au moins de nourrir le feu de l'industrie à l'époque très difficile que nous vivons. On ne saurait surestimer cela, à mes yeux.
Lorsque le marché reviendra à des niveaux plus normaux, les entreprises qui seront demeurées viables et qui auront gardé chez elles leurs principaux techniciens et conçu des produits, des méthodes et des procédés nouveaux seront bien placées pour réussir, grâce aux nouvelles technologies et aux connaissances acquises de concert avec les chercheurs canadiens.
AUTO21 est le programme national de recherche du Canada dans le domaine de l'automobile. Installé d'un océan à l'autre, il englobe 44 universités et instituts de recherche. Nous y soutenons les travaux de plus de 300 chercheurs partout au Canada. AUTO21 verse leur allocation de subsistance à plus de 500 boursiers de recherche. De même, plus de 240 partenaires du secteur public et du secteur privé appuient nos programmes de recherche — financièrement, entendons-le — et reçoivent les connaissances que nous créons. Je crois que c'est là un des aspects fondamentaux d'AUTO21 qu'il faut vraiment avoir à l'esprit. C'est un programme qui se finance lui-même en nous permettant de créer des connaissances que les entreprises commercialisent et utilisent pour améliorer leurs gammes de produits pour l'avenir. Et cela pousse toujours les gens vers l'avant.
Dans le petit mémoire que j'ai préparé — il y en a des exemplaires ici pour ceux qui en veulent —, je relate quatre ou cinq cas de réussite qui illustrent le genre d'avantages que l'on a pu tirer des recherches d'AUTO21 au fil des ans. Je ne vais pas lire tout cela. Je veux simplement mettre en valeur l'une des histoires en question, en vérité, pour citer un cas qui représente bien la somme des brevets et licences, plus de 90, due aux recherches d'AUTO21, grâce notamment à la participation de nos partisans de l'industrie.
Je voulais en citer une pour montrer simplement comment nous travaillons. Notre organisme de recherche a été le premier au Canada à soutenir une étude de grande envergure sur les biomatériaux pour l'industrie de l'automobile, et cela remonte à 2001, avant que les biomatériaux n'arrivent vraiment sur la scène. À ce moment-là, ils étaient une sorte de curiosité scientifique, mais l'industrie s'y intéressait; nous avons donc investi dans cette recherche-là.
Dirigé par un professeur d'aménagement forestier de l'Université de Toronto, le projet fait appel à une équipe multidisciplinaire composée de chercheurs provenant de nombreuses facultés au pays, qui travaillent de concert avec les centres d'excellence de l'Ontario. Le projet a donné lieu à la mise sur pied d'une entreprise dérivée appelée GreenCore Composites, classée parmi les dix premières entreprises du Canada l'an dernier pour ses « techniques propres », et à la mise au point de produits originaux qui arrivent tout juste sur le marché aujourd'hui, bien que cela se fasse à un rythme assez lent, étant donné l'ampleur des ventes, mais les produits sont là. Le groupe Woodbridge dispose d'un nouveau produit baptisé BioFoam, qui entrera dans la composition de la garniture du pavillon, c'est-à-dire la partie au-dessus de votre tête, dans le toit de la voiture. Decoma International, division de Magna, participe à ce programme de recherche, de même que l'entreprise canadienne General Tower et ainsi de suite.
Il ne s'agit donc pas de projets de recherche d'une poignée de professeurs qui cherchent seulement à assouvir leur curiosité. C'est un vrai travail qui génère de vrais revenus pour l'économie du Canada et qui crée, du même coup, des possibilités de formation. En ce moment, il y a plus de 1 200 jeunes Canadiens qui sont en train de devenir spécialistes de ces technologies-là. Et comme je le dis, il y a d'autres cas de réussite évoqués à la fin du mémoire.
C'est ce que nous appelons un modèle d'aspiration du savoir. Nous n'entamons pas un programme de recherche avant de savoir qu'une société réceptrice du savoir s'intéresse aux travaux en question, qu'elle s'engage à fournir un soutien financier en nature et, de même, qu'elle s'engage à recevoir le savoir établi grâce aux travaux et à commercialiser l'affaire au Canada en premier. Plus de 160 entreprises du secteur privé ont participé à nos projets de recherche, nombre qui s'est accru sensiblement au fil du temps.
D'autres pays reconnaissent la valeur de ce modèle et l'adoptent, et j'ai toutes sortes de contacts de par le monde, tout comme Dennis et d'autres représentants de l'industrie automobile, car il s'agit, comme M. LaSorda l'a dit, d'une industrie mondiale. Les modèles allemand et américain sont merveilleux, mais il est question là de très grands pays qui fonctionnent à une échelle que nous peinerions à reproduire au Canada. Un des meilleurs modèles que j'ai vus pour parler d'une échelle qui correspond à celle du Canada est ce qui s'appelle l'AutoCRC, ou Cooperative Research Centre, qui se trouve en Australie.
Bon, l'industrie australienne de l'automobile correspond à peu près au dixième de la nôtre pour ce qui est de son ampleur. L'AutoCRC a été fondée en 2005, quatre ans après la fondation d'AUTO21. De fait, les gens d'AutoCRC ont un budget plus important que nous, mais ils ont adopté un très bon modèle. En réalité, ils se sont fondés sur la configuration d'AUTO21, mais en faisant des rajustements vraiment intéressants qui se sont révélés très bons. Je viens tout juste de participer à l'examen de ce programme-là, qui en est à sa troisième année. C'est très bon, un travail très bien fait.
Pour conclure, car je sais que le temps presse, je dirai que l'État joue un rôle clé pour soutenir l'innovation par les investissements qu'il fait en vue de créer des installations et de former des spécialistes dont l'industrie n'a tout simplement pas besoin tout le temps et qu'elle n'a pas vraiment les moyens de maintenir, surtout dans le cas des entreprises canadiennes qui, de manière générale, fonctionnent à une échelle qui ne permet pas de soutenir un effort d'envergure en R et D interne.
Les installations et les spécialistes en question se trouvent souvent dans les universités, de sorte que les organismes comme AUTO21, qui sert d'intermédiaire et cherche à réduire le risque de l'innovation au Canada, peuvent vraiment faire en sorte que l'idée de procéder à ces travaux-là ici au pays devient vraiment attrayante. Voilà qui aidera nos entreprises à être viables et compétitives à l'avenir.
Je suis disposé à répondre à vos questions.
Merci.
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Merci à vous tous, messieurs, d'être venus comparaître ce soir moyennant un court préavis. Nous apprécions beaucoup cela.
Vous êtes au fait de la crise que nous vivons, essentiellement, et de ce que nous cherchons à faire. Nous cherchons à trouver le juste équilibre entre l'idée d'investir l'argent du contribuable, si jamais le gouvernement décide de prêter les sommes en question, en s'attendant, comme banque de dernier recours, à se les faire rembourser, et la nécessité de préserver les emplois aujourd'hui même.
Monsieur DesRosiers, cela me rassure de vous entendre dire que l'industrie va survivre. Je suis d'accord avec vous. La voiture ne va pas disparaître. Elle va se transformer, mais elle ne va pas disparaître. Et, essentiellement, je suis d'accord pour dire que c'est par la réflexion que nous allons assurer notre prospérité à l'avenir.
Ayant dit que l'industrie va survivre, tout de même, nous devons réfléchir à son avenir à court terme.
C'est vous l'expert. Étant donné les 5 000 communications que vous avez faites et le fait que vous soyez tenu pour un spécialiste de l'industrie, je dois vous poser une question de façon tout à fait directe, sinon je ne ferais pas mon travail. Vous avez sans doute jeté un coup d'oeil à la proposition de Chrysler. Vous avez jeté un coup d'oeil à la proposition de General Motors. Nous faut-il appuyer cela ou ne pas appuyer cela?
Prenez le temps qu'il faut pour exposer toutes les raisons en faveur ou en défaveur... les points faibles aussi bien que les points forts.
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Je vais essayer de bien résumer ma réponse.
Le Canada représente un élément incroyablement important de l'équation, mais l'avenir de GM, de Ford et de Chrysler réside entre les mains d'une seule personne. C'est tout. Cette personne-là, c'est M. Obama, point à la ligne. S'il n'entre pas dans le jeu, GM, Ford et Chrysler ne vont pas survivre. Je ne peux imaginer, personne ne peut imaginer que GM et Chrysler puissent survivre, et Ford se trouvera probablement dans le même cas à un moment donné — c'est à plus long terme, enfin, car sa situation est nettement meilleure —, sans l'aide du gouvernement fédéral américain ou du Trésor américain.
La somme d'argent demandée peut probablement être considérée comme légère. Si vous regardez tout ce qui entre en ligne de compte — l'argent de GM et de Chrysler, les demandes des fournisseurs et Ford qui demande une somme d'argent pour le passage à des véhicules écoénergétiques —, vous constatez que ça s'approche de 150 milliards de dollars et que le montant augmente. C'est un engagement très important. Pour que le gouvernement puisse contracter cet engagement-là, il doit arriver à saisir des questions assez capitales.
Premièrement, il doit décider s'il souhaite que l'industrie nord-américaine appartienne à des intérêts américains, étant donné que ce sont les entreprises appartenant aux intérêts américains qui sont en difficulté, et non pas les entreprises étrangères. C'est là une grande décision; il doit aussi déterminer s'il souhaite qu'une entreprise ou deux ou trois survivent. Voilà pour un niveau.
Puis, il y a encore d'autres aspects très importants qu'il faut déterminer. Qu'est-ce qui arrivera au marché? J'ai abordé certaines des questions qui se posent à ce sujet. Très certainement, la demande va subir une baisse probable de deux ou trois millions d'unités par année au cour des 12 prochaines années, au minimum. En envisageant les pires scénarios, jusqu'au scénario catastrophe lui-même, à l'échelle de l'Amérique du Nord, à l'échelle des États-Unis, vous arrivez à 15 millions, 14 millions, 13 millions, 12 millions — vous pouvez m'arrêter là. Voilà le deuxième point. Il faut arriver à accepter cela, et il est vraiment difficile de le faire étant donné que cela revient à une prédiction sur la culture de l'automobile en Amérique.
Pour la plupart, nous sommes optimistes: nous ne croyons pas que cette culture va disparaître. Elle ne sera peut-être que réduite à des niveaux durables, ce qui fait que nous prévoyons deux ou trois millions d'unités. C'est là qu'en est Chrysler. J'ai examiné et étudié à fond la proposition de General Motors — Ford n'en a pas présenté — et cela m'a paru beaucoup trop optimiste, irréaliste. Chrysler est plus réaliste et même si Chrysler pèche un peu par optimisme, c'est encore supportable.
Voilà pour le deuxième point. Voulez-vous que l'entreprise appartienne à des intérêts américains? La demande sera-t-elle au rendez-vous? Pour ce qui est de la demande, peut-on appuyer l'industrie à un moment où la demande sera ce qu'elle sera?
Troisième point: quel qu'en soit le montant, l'aide versée aux entreprises ne leur permettra pas de réussir à moins qu'elles ne renversent la vapeur en ce qui concerne une part de marché qui va en diminuant. Il n'y a pas si longtemps, elles possédaient une part de marché de l'ordre de 90 p. 100 en Amérique du Nord. Aujourd'hui, elles en sont à plus ou moins 45 p. 100. Elles ont perdu presque 50 p. 100 du marché et, depuis septembre, mois par mois, par rapport à l'année précédente, elles perdent sept ou huit points encore. Elles ont donc perdu deux ou trois points par année; maintenant, elles en sont rendues à perdre sept ou huit points par année et si elles n'arrivent pas à renverser la vapeur et à cesser de perdre des parts de marché, elles ne pourront survivre, point à la ligne. C'est là un très gros « si... ».
La solution à ce problème-là repose sur trois mots magiques: le produit, encore le produit, et toujours le produit. Les gens comme moi — et je pourrais vous mettre en relation avec quatre ou cinq experts américains qui étudient à mort leurs produits —, pour la plus grande part, voient avec optimisme les programmes de conception des produits qui sont en cours. Le problème vécu par les entreprises, c'est que même si tout est là sur la planche à dessin, elles ont dû, pour survivre, maintenant, éliminer des milliards de dollars de leur budget de conception des produits.
Lee Iacocca, qui a sauvé Chrysler au début des années 1980, a énoncé un principe célèbre que l'on viole aujourd'hui. À l'époque où Chrysler était en grave difficulté, à quelques centimètres de la faillite, au début des années 1980, il a dit qu'il vendrait les meubles avant de couper le programme de conception des produits, et il a fait cela, c'est-à-dire qu'il n'a jamais coupé les programmes de conception des produits, de sorte que Chrysler a survécu. Aujourd'hui, étant donné la situation financière qu'ils connaissent, GM, Ford et Chrysler coupent dans les programmes ce conception des produits. C'est attesté et c'est très bien intentionné, mais ce qui devait sortir en 2010 est maintenant prévu pour 2011 ou 2012 ou 2013.
Cela m'inquiète donc. Il y a beaucoup de « si... ». Au bout du compte, c'est le Trésor américain qui décidera. Je présume qu'il dispose à cet égard de très bons analystes — je connais certains de ceux qui travaillent à ce dossier, et ce sont des gens absolument brillants — et qu'il dira, peut-être pour des raisons qui tiennent davantage de la politique que de l'économie: nous allons appuyer cette industrie en versant les sommes d'argent nécessaires pour fonctionner pendant un an, sinon deux ou trois années encore, puis vous pourrez entrer en scène.
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Merci de votre question.
[Traduction]
Je vais continuer en anglais. Il se fait tard, et moi, je suis lent.
Chez AUTO21, nous travaillons à plusieurs grands buts. Tous nos projets sont évalués en fonction d'au moins un de ces buts-là. Notamment, il y a l'amélioration du rendement de la voiture sur le plan environnemental et le procédé de fabrication de la voiture. Ensuite, il y a l'amélioration de la voiture du point de vue de la santé et de la sécurité et les procédés de fabrication qui s'appliquent. Troisièmement, il y a l'amélioration du rendement économique des entreprises avec lesquelles nous travaillons. Tous nos projets sont donc centrés sur une ou plusieurs activités en ce sens. Nous essayons sans cesse d'aider les entreprises à mettre au point des matériaux et des procédés nouveaux qui déboucheront sur la production de voitures de meilleure qualité produites à moindres frais.
Encore une fois, je dois dire que je suis d'accord avec Dennis. Je ne crois pas qu'on puisse envisager en Amérique du Nord une voiture de 6 000 ou 7 000 $ qui serait compatible avec les normes nord-américaines en matière de sécurité et aussi les normes environnementales. Je crois tout de même que bon nombre de nos projets sont centrés sur l'idée de limiter les coûts tout en améliorant le rendement du véhicule, en fonction de la sécurité et de l'environnement.
Je devrais dire aussi — et songez au fait que je ne travaille pas pour les fabricants de voitures, je travaille avec eux — que l'automobile moderne est une machine assez remarquable, si on en mesure son bilan sur le plan de l'environnement et de la sécurité, de même que sa tenue routière, par rapport à un véhicule des années 1970, sans oublier le coût. Ce qu'offre même la voiture la plus modeste qui se trouve sur le marché de nos jours est assez remarquable, en fait.
Je ne sais pas si j'ai bien répondu à l'ensemble de votre question. Nous travaillons de notre mieux à ces questions-là — le coût, la sécurité, le bilan environnemental —, mais je crois que personne ne veut vraiment mettre en jeu le rendement des voitures sur le plan de la sécurité et de l'environnement, et il y a un seuil en deçà duquel on ne veut vraiment pas aller, du point de vue des coûts, à mon avis.
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Et j'ajouterai quelque chose à cela.
À la fin de l'an dernier, j'ai publié un article intitulé The 30-Year Problem in Our Industry sur l'idée qu'il faut 30 ans pour combler vraiment la plupart — mais pas l'intégralité — des lacunes d'un modèle d'affaires. Au cours des 15 premières années, fait intéressant, les responsables nient qu'il y a un problème, puis il faut trois ou quatre cycles de produits, légitimement, à quelques exceptions près, pour vraiment régler le problème.
Les gens en question ont vraiment dépassé le stade du déni. Ils ont compris. Leur direction n'est pas incompétente. Elle a compris, elle a merveilleusement bien compris. Certains des éléments inférieurs du modèle d'affaires ont été éliminés, essentiellement, et cela a pris 15 ans. La qualité dont on parle aujourd'hui est le mantra de l'industrie depuis 15 ans. La question de la qualité aujourd'hui est réglée. La structure de la base d'approvisionnement de l'industrie favorise très bien la concurrence. Les solutions de facilité se font assez rares dans le secteur de l'approvisionnement. Les gens ont largement dépassé ce problème-là. Pour certains des éléments en question, le travail commence tout juste.
La restructuration chez les concessionnaires représente un des meilleurs exemples qui soient. On en est aux tout premiers stades. La structure de rémunération, dont il est question tous les jours dans les médias, ne va pas poser de difficulté pendant 15 ans, car les gens en question n'y arriveraient tout simplement pas, mais, cela est légitime comme prétention, il leur manque 20 ou 25 $ pour avoir une structure de rémunération concurrentielle dans le contexte de l'Amérique du Nord. C'est un problème très grave auquel ils doivent s'attaquer.
De même, pour se pencher sur leur structure de rémunération, ils bénéficient d'un nouveau paradigme. Auparavant, une entreprise comme GM ou Ford ou Chrysler pouvait s'asseoir en privé avec ses syndicats et essayer de conclure une entente; nous en avions les moyens, économiquement. Maintenant, ils se sont tournés vers vous, vers le gouvernement, vers le consommateur; ils se sont adressés aux médias et se sont ouverts en disant: « Nous avons besoin de votre aide. » On ne se contente plus de conclure une entente avec les TCA; on conclut une entente avec ses travailleurs, avec les politiciens, qui auront à voter sur l'entente, avec les consommateurs qui le feront avec un chèque, de jour en jour, et avec les centaines d'articles paraissant dans les médias. C'est ce qu'ils n'ont pas encore compris. Ils croient qu'ils peuvent s'asseoir avec leurs représentants syndicaux et négocier un nouveau contrat, et tout est joué. Ce n'est pas le cas. C'est la grande difficulté qu'a connue GM avec la situation actuelle.
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Je vais tenter de répondre à votre question de façon aussi générale que possible.
Ce qui arrive dans ce cas, c'est que certains contrats peuvent être annulés ou résiliés au moment d'une restructuration sous le régime de la LACC, et certains contrats ne peuvent pas être soumis à ces mesures. Cela tient principalement aux circonstances et aux types de contrats en jeu. Certains contrats sont moins vulnérables que d'autres, comme les conventions collectives. Des choses comme des baux commerciaux sont souvent plus faciles à résilier dans le cadre d'une restructuration. Cela dépend beaucoup du type de contrat.
D'un point de vue plus général, toutefois, ce qui se produit sous le régime de la LACC, ou ce qui est censé se produire, idéalement, au cours d'une restructuration, c'est que l'entreprise — une version rationalisée, mais la même entreprise qui dispose du même effectif — poursuit ses activités un coup qu'elle s'est soustraite à certaines dettes qu'elle ne pouvait pas acquitter. Bien sûr, l'exception est toujours la règle. Ce qui se produit en réalité dans le cadre d'une restructuration est une tentative de conserver les contrats qui fonctionneront et de se départir de ceux qui ne fonctionneront pas. Parfois, on remet en question des contrats que l'entreprise n'aimait peut-être pas dès le début, il y a cinq ans, mais qu'elle n'avait jamais eu la possibilité de résilier avant maintenant. Maintenant, elle peut le faire, car la restructuration ouvre la voie à la négociation sur tous les aspects.
Mais, réduite à sa plus simple expression, l'entreprise devrait conserver autant d'effectifs que possible. Mais la réalité, toutefois, c'est que c'est un choix d'affaires, et le personnel responsable du processus de diligence raisonnable, lorsqu'il accorde les prêts et lorsqu'il effectue la restructuration, sortira sa calculatrice et dira: « C'est ici qu'il faut couper ». Et on ne saura de quel côté auront lieu les compressions que si on examine la situation au cas par cas — parfois l'effectif, parfois les dettes.
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Merci, monsieur le président.
Je veux commencer par répondre à quelques points soulevés par M. Masse. Il a mentionné que nous ne faisions rien pour faire avancer la cause des concessionnaires. J'ai trouvé ça assez ahurissant, parce que nous avons mis sur pied une facilité de crédit garanti, qu'une succession de témoins ont qualifié comme la mesure la plus importante pour aller de l'avant, et il a voté contre cette mesure dans le budget. Nous devons faire adopter ce budget par le Sénat pour pouvoir commencer à mettre l'argent en circulation.
Par ailleurs, en ce qui concerne les emplois, je rappellerai au député que, bien sûr, la raison pour laquelle nous entreprenons tout ce processus, la raison pour laquelle nous tenons ces discussions, l'objet principal de cela est de protéger les emplois. C'est l'objet principal, car nous pouvons tous comprendre comment on se sent lorsqu'on a une famille et on doit faire des paiements et assumer d'autres responsabilités, et nous sommes ici pour protéger les emplois. Alors, je tiens juste à mettre ces choses au clair. Voilà l'objet de toute cette démarche.
Je vais donner un peu de contexte ici. Nous en avons parlé l'autre jour. Nous avons parlé de prêter jusqu'à huit milliards de dollars, et peut-être plus. Lorsque vous décomposez ces chiffres, on parle d'un peu moins de 250 $ par homme, femme et enfant canadiens. Pour une famille de quatre, on parle d'une somme de 1 000 $.
J'ai posé cette question à l'un des témoins hier, mais je vais la poser à M. DesRosiers.
Je sais que vous êtes en faveur de ces prêts. Que dites-vous à cette famille de quatre à qui l'on demande 1 000 $ de son argent pour le prêt? Que lui dites-vous pour lui expliquer qu'elle devrait consentir et quand elle reverra son argent?