AGRI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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CANADA
Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 29 avril 2010
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
La séance est ouverte.
Un témoin et des membres se joindront à nous sous peu.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à nos témoins. Je vous remercie d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer malgré votre horaire très chargé. Je sais à quoi ressemblent vos journées; en agriculture, il n'est jamais facile de quitter sa terre, surtout quand le temps est clément. Toutefois, cette étude que nous menons sur l'avenir de l'agriculture est très importante, et je suis heureux de constater que vous partagez mon point de vue à cet égard.
Nous allons donc commencer par les présentations, après quoi nous poserons des questions.
Je donne d'abord la parole à Mme Storey, pendant cinq à sept minutes, si possible. Merci.
Je m'appelle Kate Storey. Je suis cogestionnaire de l'exploitation céréalière et de production bovine de ma famille ici au Manitoba.
Je parle au nom de mon fils, qui a le profil du jeune agriculteur type. Il a 23 ans, et il a réussi à rassembler des capitaux. Il va bientôt se marier et il souhaite se lancer dans l'agriculture. Je crois qu'il a tout ce qu'il faut pour réussir, parce qu'il est consciencieux. Il est capable de régler des problèmes et il a le dévouement requis pour travailler de longues heures sur sa terre.
Malheureusement, mon fils, comme beaucoup d'autres jeunes qui aspirent à devenir agriculteurs, ne peut se permettre de consacrer son temps à une entreprise qui ne lui permettra pas de gagner un juste salaire.
Je ne crois pas avoir besoin d'entrer dans les détails pour ce qui est du resserrement des marges pour les agriculteurs. Je suis certaine que vous comprenez que lorsque le prix des produits de base est inférieur aux coûts de production, l'agriculteur n'est pas rémunéré pour son travail. Nous, les anciens, nous pouvons survivre avec des revenus insuffisants pendant un certain moment, mais les jeunes agriculteurs ont besoin de ce revenu pour démarrer leur entreprise et pour élever leur famille.
Vous êtes les décideurs. Vous avez l'occasion de faire évoluer l'agriculture — soit en faveur des jeunes agriculteurs, soit contre eux. Vos décisions peuvent fournir aux jeunes agriculteurs les outils dont ils ont besoin, ou encore elles peuvent créer des obstacles qui les décourageront.
Vous devez donc vous poser les questions suivantes: Voulez-vous qu'il y ait de jeunes agriculteurs? Voulez-vous que les denrées alimentaires soient produites par des familles ou par des employés? Estimez-vous que les exploitations agricoles familiales ont de la valeur ajoutée?
L'exploitation agricole familiale n'est pas qu'un symbole réconfortant issu du passé. Il s'agit d'une structure qui produit des avantages considérables sur le plan économique. En fait, les exploitations agricoles familiales peuvent s'adapter, et cette faculté d'adaptation est importante au pays. Nous parlons ici de production de denrées alimentaires. Car si les banques peuvent s'effondrer et les constructeurs automobiles, faire faillite, la production d'aliments doit demeurer stable.
Le Canada a implanté le modèle des entreprises agroalimentaires depuis assez longtemps pour en connaître les avantages et les inconvénients. Les entreprises agroalimentaires ont l'avantage de l'efficacité administrative et des profits par rapport aux exploitations agricoles familiales. Elles peuvent aller chercher des investissements provenant des actionnaires et s'approvisionner en matières à faible coût. Ces entreprises agroalimentaires peuvent être plus concurrentielles que les exploitations des jeunes agriculteurs; or, l'innovation leur fait défaut. La vraie valeur d'une exploitation agricole familiale réside dans les idées et dans la capacité d'innovation, les facteurs mêmes qui contribuent à son succès. Les exploitations familiales sont plus productives et plus stables. De plus, elles fournissent des produits de meilleure qualité que ceux de n'importe quelle entreprise agroalimentaire gérée par des employés.
Nous savons que la population mondiale est en croissance, que les échanges commerciaux évoluent et que les maladies qui frappent les cultures sont à la hausse. Je crois que la population canadienne veut conserver ses entreprises familiales parce que c'est un choix logique sur le plan de l'économie, de la santé et de la stabilité du pays. Les exploitations agricoles familiales sont efficaces et productives et elles existent grâce à un investissement personnel. Elles sont gérées par les propriétaires, ce qui signifie que les propriétaires sont toujours sur place pour régler les petits problèmes avant qu'ils ne prennent des proportions démesurées. Actuellement, 40 p. 100 de la production alimentaire mondiale est gaspillée. Les propriétaires d'exploitations agricoles, eux, ont personnellement intérêt à aller vérifier leur cellule à grains pour éviter la surchauffe ou à sortir à 2 h du matin pour aller surveiller la vache qui est en train de mettre bas.
Les entreprises agroalimentaires gérées par des actionnaires absents fonctionnent tout autrement. Le gaspillage qui s'y fait est notoire, de sorte que la population mondiale croissante est mieux servie par les entreprises familiales, dont on connaît l'engagement et l'efficacité. Les exploitations agricoles familiales ont une intégrité qui découle de cet engagement personnel. La tendance vers les aliments à bas prix est en train de se renverser, dans un contexte où la population exige la qualité et la responsabilité. Les exploitations agricoles familiales sont tout indiquées pour fournir de la qualité. Bien sûr, les gouvernements peuvent tenter de légiférer sur la qualité, et ils peuvent pour ce faire embaucher toujours plus d'inspecteurs, mais il n'en demeure pas moins que les entreprises agroalimentaires ne sont pas conçues pour fournir des produits de qualité. La qualité découle de l'intégrité, et l'intégrité est fondée sur l'engagement personnel. En fait, l'intégrité va de pair avec la structure des exploitations agricoles familiales.
La distinction entre les entreprises gérées par les propriétaires et celles qui sont gérées par les employés n'a rien à voir avec la taille. Qu'il s'agisse de grandes exploitations ou de petites fermes, l'important, c'est que la personne qui les gère participe activement à la réussite. Les entreprises familiales offrent une stabilité qui découle de leur diversité. Le rôle du gouvernement devrait être de promouvoir la stabilité économique du secteur alimentaire. Cette stabilité passe nécessairement par la diversité. Vous avez la responsabilité de favoriser la diversité du secteur alimentaire, puisque c'est ce qui permettra de traverser les crises occasionnées par les fluctuations du marché, les périodes de sécheresse, les maladies qui frappent les récoltes, les augmentations des taux d'intérêt et les fluctuations du prix de l'énergie.
Cela signifie que les propriétaires d'exploitations agricoles doivent être sur le terrain, prêts à trouver des solutions innovatrices pour s'adapter aux changements. Cela signifie également qu'il doit y avoir de la diversité, et ce, dans la taille des exploitations agricoles, dans les types de récoltes, dans les méthodes de production et dans les marchés, afin que les perturbations que nous vivons n'entraînent pas l'effondrement de toute l'industrie alimentaire.
Appuyer les jeunes agriculteurs, c'est contribuer à la diversité de l'agriculture. Si vous décidez d'aider les jeunes agriculteurs, vous devez d'abord reconnaître qu'ils se trouvent en concurrence avec les exploitations déjà établies, disposant de vastes capitaux, pour l'accès aux fermes et aux marchés. Pour aider les jeunes agriculteurs et leur permettre d'exister, il faut égaliser les chances.
Le Parlement peut aider les jeunes agriculteurs en diminuant le plafonnement des charges d'emprunt dans le cadre des programmes de gestion des risques d'exploitation ou en fixant une limite aux quotas de gestion des approvisionnements, ce qui laisserait place aux nouvelles exploitations plutôt que de favoriser uniquement l'expansion des fermes déjà établies. Les contribuables canadiens préféreraient que les subventions soient accordées aux nouvelles exploitations agricoles familiales plutôt qu'aux grandes sociétés.
Vous pouvez renforcer les lois sur la concurrence au Canada et les faire appliquer pour contribuer à la diversité dans l'industrie des engrais, des carburants, du transport, de l'achat du grain et du conditionnement de la viande. Le marché libre ne fonctionne que dans la mesure où il est diversifié.
Vous pouvez favoriser le commerce international pour les exploitations agricoles familiales du Canada en mettant l'accent sur la qualité des produits canadiens et en renforçant l'image de marque du Canada.
Vous pouvez également faire en sorte que des prêts à faible taux d'intérêt, à long terme, soient consentis aux jeunes agriculteurs afin qu'ils puissent être concurrentiels par rapport aux entreprises financées par les investisseurs.
Enfin, vous pouvez mettre en oeuvre des programmes de planification de la relève agricole afin que les capitaux rassemblés par les exploitations familiales restent dans la famille.
Nos jeunes agriculteurs sont l'espoir de la survie des exploitations agricoles familiales. L'agriculture au Canada est maintenant à la croisée des chemins. La population canadienne souhaite que ses denrées alimentaires proviennent des exploitations agricoles familiales du pays.
Grâce à vos décisions politiques, vous êtes ceux qui détermineront qui produira nos denrées alimentaires dans l'avenir. Déciderez-vous d'encourager les jeunes agriculteurs?
Merci.
Bonjour à tous. Tout d'abord, j'aimerais vous remercier de m'avoir donné l'occasion d'être ici aujourd'hui.
Je me suis lancé dans l'agriculture il y a cinq ans. Je possède ma propre terre. Ayant moi-même 23 ans, je peux facilement m'identifier au fils de Kate.
Je crois que les jeunes agriculteurs qui décident de quitter le secteur de l'agriculture le font souvent en raison de la crise que traversent actuellement leurs parents. Ils sont nombreux à voir la qualité de vie de leurs parents et les revenus qu'ils obtiennent en travaillant jour et nuit. Pour beaucoup de jeunes hommes et de jeunes femmes, cette situation est loin de sembler idéale. Par exemple, plusieurs jeunes hommes de ma région ont quitté l'agriculture pour apprendre un métier, puisque cela leur permet d'habiter en ville et d'y mener une vie plus trépidante. C'est ce que souhaitent beaucoup de jeunes. Ils gagnent ainsi beaucoup plus d'argent, en déployant beaucoup moins d'efforts.
Un autre sujet de préoccupation est la question des prêts afin d'acheter des terres, comme l'a dit Kate. Il est difficile pour les jeunes agriculteurs comme moi de réunir suffisamment de capitaux pour acheter une terre. Lorsque j'ai acheté mon premier lopin de terre, je devais fournir un versement comptant de 30 p. 100. Les banques ne sont pas nombreuses à vouloir prendre des risques pour prêter 25 000 $ à un jeune de 18 ans n'ayant aucun dossier de crédit et aucune source de revenu stable. Il est difficile pour nous de rassembler des capitaux pour acheter des terres. Actuellement, dans le secteur de l'agriculture, si on ne prend pas de l'expansion, on est voué à disparaître. Il n'est donc pas facile de démarrer, lorsqu'on nous demande autant d'argent comptant pour acheter une terre.
Une autre source de préoccupation, à mon avis, est le fardeau fiscal qu'on impose aux jeunes agriculteurs qui prennent la relève d'une exploitation familiale. Il me semble injuste qu'une exploitation familiale agricole ait à payer ce type d'impôt successoral tous les 20 ou 30 ans, particulièrement si la famille a déjà contracté un emprunt important pour payer la terre et les frais liés à l'exploitation. Elle doit alors contracter un autre emprunt, dans certains cas, uniquement pour payer l'impôt. Cette situation ne me semble pas très logique.
Cela dit, je comprends qu'il faille percevoir des impôts sur les successions, mais j'estime tout de même qu'il est plutôt injuste de demander à une exploitation familiale de payer ces droits chaque fois qu'une nouvelle génération prend la relève.
Les coûts que doivent assumer tous les agriculteurs constituent à mon avis un autre problème. Le coût des moyens de production augmente, à l'instar du coût des cultures et du bétail. Notre marge se rétrécit, et il ne semble pas y avoir de solution. Souvent, nous perdons de l'argent année après année. Il va falloir que nous envisagions de quitter l'agriculture. S'il n'y a pas de jeunes agriculteurs qui prennent la relève bientôt, nous allons nous retrouver dans une situation très difficile, parce que de nombreux agriculteurs quittent le secteur. Et il ne s'agit pas simplement du nombre d'agriculteurs, mais aussi de la taille des exploitations agricoles. Nous perdons les petites exploitations. Dans la région, il y a de nombreux agriculteurs qui n'ont pas d'enfant ou dont les enfants ne veulent tout simplement pas travailler en agriculture, parce qu'ils voient l'évolution de la situation. Souvent, leurs parents les ont mis en garde parce qu'ils ne souhaitent pas ce mode de vie pour leurs enfants. Mon père a fait la même chose. Il m'a souvent donné des avertissements, mais j'imagine que je suis un peu plus entêté qu'il ne le croyait.
J'aimerais également en profiter pour soulever un autre point. Je trouve qu'il est frustrant que le gouvernement actuel dépense l'argent des contribuables pour mener bataille contre des groupes d'agriculteurs à la Commission canadienne du blé. Il est frustrant de les voir dépenser notre argent en campagnes médiatiques et en frais de tribunaux. Nous disposons déjà de mécanismes; si la majorité des agriculteurs le souhaitaient, nous pourrions nous passer de la Commission canadienne du blé. Après tout, nous élisons le conseil d'administration afin qu'il nous représente. Sur nos 10 représentants, nous en avons élu 8 qui étaient en faveur de la Commission canadienne du blé. Nous disposons déjà d'un mécanisme pour régler ce type de problèmes; il vaudrait donc peut-être mieux investir cet argent ailleurs. Évidemment, ce n'est pas à moi de dire comment le dépenser, mais je crois qu'il serait possible de mieux l'utiliser, étant donné que nous disposons déjà de ce mécanisme.
Voilà ce que j'avais à vous dire. Je vous remercie de m'avoir invité.
Bonne journée.
Merci de l'occasion que vous m'avez offerte de vous parler aujourd'hui.
Je m'appelle Kyle Foster. J'ai 34 ans. Je suis un jeune agriculteur d'Arborg. Je siège aussi sur le conseil d'administration de KAP — Keystone Agricultural Producers. Je fais de l'agriculture avec mon père de 65 ans et mon frère de 39 ans. Nous exploitons une ferme familiale fondée il y a 107 ans. Nous cultivons environ 5 000 acres de canola, de blé, d'avoine et de fourrage. Nous avons aussi un petit troupeau de wapitis et nous sommes d'anciens éleveurs de porcs.
En 1999, nous avons modifié la propriété de la ferme lorsque nous avons racheté la part de mon oncle. Ses enfants n'étaient pas intéressés par l'agriculture. Leur désintérêt s'expliquait principalement par le fait que mon oncle ne cessait de leur dire « Ne travaillez pas dans le domaine de l'agriculture. Il n'y a aucun avenir dans ce domaine. »
Pour me préparer à la séance d'aujourd'hui, j'ai demandé, hier soir, à mon père combien de fermes notre entreprise avait absorbées depuis ses débuts dans le domaine. Il est arrivé au chiffre de 15 fermes, et ces fermes avaient auparavant absorbé d'autres fermes. La région où nous vivons n'est pas vaste et nous n'avons pas une grande ferme. C'est inquiétant et alarmant de voir le nombre de fermes qu'une seule entreprise peut absorber.
Nous perdons définitivement du terrain sur nos voisins. Rien ne nous ferait plus plaisir que d'avoir une communauté saine et prospère, mais dans les faits, il n'est plus possible de faire de l'argent avec une terre de 600 acres. Tout un chacun pense soudainement qu'il a besoin d'une terre d'au moins 2 500 acres pour gagner sa vie.
Voici deux ou trois raisons qui expliquent, selon moi, pourquoi nous ne réussissons pas à attirer un grand nombre de jeunes agriculteurs.
La première raison est la stabilité. Nous venons de connaître les deux années les plus pluvieuses jamais enregistrées. L'an dernier, en 2009, probablement un peu moins de la moitié du territoire de notre région a été ensemencé. En 2008, la moitié des récoltes ont été brûlées. Il est possible de survivre sans revenu pendant deux années de suite, mais c'est plutôt difficile lorsque l'on est endetté jusqu'au cou en tant que jeune agriculteur.
Dans la région, il existe divers programmes, comme Agri-stabilité et Agri-relance. Nous sommes en mai 2010, et je n'ai pas encore reçu de chèque du programme Agri-stabilité pour la récolte que nous avons perdue pendant la campagne agricole de 2008. Étant donné que mon exercice prend fin le 28 février, je ne suis pas en mesure de présenter une demande pour le programme Agri-stabilité avant la sortie des formulaires de demande en 2009, soit un an plus tard. Une personne au service de comptabilité de la société m'a dit que nous aurions dû séparer notre fin d'année civile de notre fin d'exercice; c'est donc la raison pour laquelle nous sommes punis.
Deux années se sont écoulées depuis 2008, et nous n'avons toujours pas reçu de chèque. Évidemment, je dois attendre à l'année prochaine pour présenter une demande pour 2009. Notre manque à gagner est donc considérable. Comme nous approchons de la période d'ensemencement, une aide de n'importe quelle source serait la bienvenue.
Le programme Agri-relance semble fonctionner sous certaines conditions. Actuellement, nos députés provinciaux sont établis pour la plupart dans les villes. Le gouvernement est formé par le NPD, et il n'a pas d'argent. Le gouvernement provincial doit s'entendre avec le gouvernement fédéral conservateur et, jusqu'à maintenant, nous n'avons pas eu beaucoup de chance.
Ces programmes doivent être fiables et prévisibles. Par exemple, mon voisin fait partie des personnes dont nous avons dû louer la terre il y a environ trois ans. Il a investi dans l'industrie porcine. Il a dû louer sa terre et vendre de nombreuses parcelles de terrain. Il a reçu son chèque du programme Agri-stabilité environ 11 mois plus tard. S'il avait reçu son chèque à temps, il pratiquerait probablement toujours l'agriculture.
Il y a une autre question que j'aimerais soulever, mais je suppose que je ne m'adresse pas aux bonnes personnes. J'aimerais dire qu'il y a constamment des règlements qui nous sont imposés. Quand nous avons acheté notre ferme — une petite entreprise porcine —, c'était une ferme familiale. Nous avons des fosses de béton et nous devions épandre le lisier pendant l'hiver; il n'y avait pas d'autre façon de le faire.
À l'heure actuelle, on interdit l'épandage pendant l'hiver. Si nous pouvons nous permettre de dépenser un demi-million de dollars dans des réservoirs pour y conserver le fumier pendant l'hiver, il nous faudra alors tripler probablement la superficie de notre entreprise porcine. Mais il y a aussi un moratoire dans notre région qui nous interdit d'accroître la taille de notre porcherie ou de construire d'autres porcheries. Cela revient donc à dire qu'officiellement, on a mis la clé dans la porte de notre entreprise.
Nous avons aussi d'autres problèmes. Des mesures ont été prises pour réglementer l'entreposage des réservoirs de carburant. Des processus sont également en cours en vue de réglementer la gestion des eaux usées sur place. On doit aménager des zones tampons autour des drains secondaires. Le salaire minimum est en hausse. Nous avons toujours offert à nos employés des assurances privées, et maintenant, nous sommes obligés de verser des indemnisations aux accidentés du travail, ce qui représente pour nous plus d'argent, mais moins de couverture. Voilà un autre problème.
Toutes ces dépenses nous ont été imposées au cours des dernières années. En tant que jeunes agriculteurs, nous ne pouvons tout simplement pas assumer ces coûts supplémentaires.
Selon moi, la principale raison pour laquelle les jeunes agriculteurs ne veulent pas participer à l'industrie est qu'il n'y a pas d'argent à faire. C'est ce que mon oncle a dit à ses enfants, et c'est ce que j'entends constamment. Ils ne font tout simplement pas assez d'argent, et il ne vaut pas la peine d'investir du temps et des efforts pour faire de l'agriculture.
Nous recevons une fraction très minime de l'argent que les consommateurs dépensent pour se nourrir. Par l'entremise de Keystone Agricultural Producers, nous avons réalisé un projet appelé Farmers' Share en vue de déterminer quel pourcentage de l'argent consacré par les consommateurs chaque semaine à leur alimentation revient aux petits exploitants agricoles. De 2008 à 2009, le coût des aliments dans les épiceries a augmenté de 3,2 p. 100. Les agriculteurs ont touché 1,7 p. 100 de moins par rapport à l'année précédente. Le consommateur a payé 6,01 $ de plus par semaine. Les agriculteurs ont reçu 86 ¢ de moins par semaine. Quant à l'intermédiaire, il a reçu 6,87 $ de plus. Pour nos produits céréaliers, nous avons reçu environ 5 p. 100 sur le pain, et nous avons touché une part de 2 p. 100 pour la farine d'avoine.
Nous prenons les risques les plus importants. Nous devons miser sur la température. Nous investissons beaucoup. À moins d'un changement qui nous permettra de recevoir plus d'argent, je pense que le déclin de l'agriculture sera de plus en plus marqué.
J'ai souvent pensé que la seule façon pour nous d'accomplir ce travail est de mettre en place une taxe sur les aliments. C'est la seule façon pour nous d'avoir une certaine prise sur ce qui revient aux agriculteurs. Quand je pense à Kellogg et au raisonnement sur lequel s'appuient les membres du conseil d'administration de l'entreprise lorsqu'ils fixent le prix d'une boîte de Frosted Flakes, ils ne se contentent pas de penser à la somme qu'ils verseront aux agriculteurs et qu'ils doivent retenir pour la boîte s'ils veulent disposer d'une marge commerciale de 15 p. 100 avant de procéder à sa mise en vente. Ils réfléchissent plutôt au montant le plus élevé que le consommateur est prêt à payer pour le produit — combien ils peuvent obtenir pour cette boîte.
Pourquoi ne tenterions-nous pas d'intervenir un peu dans leurs profits? Ils vont continuer d'en demander le plus possible aux consommateurs, mais nous pourrions peut-être obtenir en retour un pourcentage plus élevé. De nombreuses personnes croient que le consommateur devra payer davantage pour les produits, mais, dans les faits, le montant qu'ils demandent aux consommateurs est probablement le plus élevé qu'ils peuvent demander. C'est donc peut-être le temps d'obtenir la part qui nous revient.
J'aimerais aussi soulever deux ou trois autres questions. Il faut absolument voir à la planification de la relève, à la planification financière, à la formation, aux prêts sans intérêt, et aux prêts à faible taux d'intérêt. Mais, en fin de compte, on doit se poser la question suivante: êtes-vous prêts à courir tous ces risques et à emprunter tout cet argent lorsque vous ne serez pas payés convenablement en retour? C'est difficile.
Il y a aussi quelques autres points que j'aimerais aborder. Nous avons un troupeau de wapitis. Nous nous sommes lancés dans ce domaine avant de séparer nos parts avec mon oncle, parce que nous pensions que ce serait une bonne occasion pour un jeune agriculteur de commencer à une petite échelle. Nous pouvons exploiter un ranch de wapitis sur le quart de la superficie d'une terre, ce qui ne représente pas un investissement important. Malheureusement, en raison de la maladie débilitante chronique des cervidés et du manque de producteurs, la plupart des fermes de wapitis ont fermé leurs portes. Celles qui poursuivent leurs activités dans la région n'ont pas d'argent, et n'ont jamais fait d'argent. C'est un problème que nous devons vraiment tenter de régler avec le gouvernement, pour rouvrir la frontière afin de rétablir le commerce dans l'industrie du wapiti. Selon moi, cette industrie pourrait très bien réussir à ramener de jeunes agriculteurs sur la ferme compte tenu des dépenses minimes qu'ils doivent y engager.
Nous devons certainement aussi restructurer la Commission canadienne du blé, mais force est de constater que tout le monde dans l'industrie de l'agriculture tente d'instaurer un monopole. Qu'il s'agisse de Viterra, des transformateurs du canola, des usines d'engrais — tous souhaitent mettre en place un monopole. Nous avons déjà un monopole sur notre blé et nous tentons de nous en débarrasser? Cela n'a aucun sens. C'est une entreprise dont nous avons besoin. Nous ne pouvons nous passer de cet organisme de mise en commun.
Aux environs de 1995, nous avions un système de vente à guichet unique pour les porcs dans la province. Les choses allaient toujours rondement. Nous avions cinq ou six usines d'empaquetage. Depuis que nous avons perdu notre système de vente à guichet unique, il y a, essentiellement, une personne qui dicte le prix qu'ils vont nous payer. C'est pourquoi nous devons préserver la Commission canadienne du blé. Elle veille à nos intérêts. C'est une commission dont les membres sont élus par les agriculteurs. Je détesterais la voir disparaître.
Récemment, depuis les fusions dans le secteur agricole, comme celle qui a mené à la création de Viterra, si nous voulons nous procurer de l'anhydre pour nos fermes, le seul endroit où nous pouvons l'acheter est chez Viterra. Le Bureau de la politique de concurrence ne fait rien pour l'arrêter. Viterra ne cesse d'acheter d'autres entreprises. Cette semaine, elle a mis la main sur deux ou trois indépendants de plus. Et si nous voulons nous procurer de l'anhydre auprès d'un concurrent, nous devons parcourir une distance d'une heure en voiture. C'est un problème important pour nous. J'espère que quelqu'un au Bureau de la concurrence ralentira un peu ce processus.
C'est ce que j'avais à dire. Merci.
Je vous remercie grandement de me permettre d'assister à ces séances de votre comité fédéral.
Mon nom est Ian Robson. Je suis agriculteur à Deleau, au Manitoba. J'ai commencé à pratiquer l'agriculture avec mon père, mon grand-père et mon frère. Nous avons fait un peu d'agriculture biologique. Nous élevons du bétail et cultivons des céréales; sur notre ferme, nous faisons à la fois de l'élevage et de l'agriculture. Nous avons ce que vous appelleriez aujourd'hui une petite exploitation agricole en comparaison avec les autres exploitations que l'on trouve dans les environs. Nous n'avons que 60 vaches et une terre et demie.
J'ai 55 ans, et j'ai entendu dire l'autre jour que l'âge moyen des agriculteurs est de 52 ans; ainsi, je suis l'un de ceux qui peuvent affirmer qu'il y a des jeunes, qui sont moins âgés que la moyenne, qui pratiquent l'agriculture. Nous avons vraiment besoin que des gens plus jeunes pratiquent l'agriculture et s'y intéressent. Nous vous prions, vous qui détenez le pouvoir suprême, de nous écouter aujourd'hui et de trouver des façons d'améliorer les politiques sur l'agriculture pour aider les Canadiens.
Pourquoi sommes-nous ici aujourd'hui pour vous parler de la nécessité d'attirer les jeunes dans le domaine de l'agriculture, particulièrement aujourd'hui alors que nous pourrions ensemencer nos terres? C'est simplement parce que le nombre de jeunes qui souhaitent devenir agriculteurs est minime. Aujourd'hui, les possibilités pour les jeunes de devenir agriculteurs comme nos parents et nos grands-parents sont grandement réduites. Il est très important pour la société canadienne que nos jeunes contribuent à l'avenir de notre approvisionnement alimentaire. Donc, vous avez du travail à faire, et pour y arriver, vous devrez faire vos devoirs.
Que prévoit la société canadienne pour ses agriculteurs? Que prévoit le Canada pour l'environnement? Les activités agricoles — et les ressources pour répondre aux besoins de l'agriculture — changent notre environnement, et même notre climat. Les changements climatiques découlent vraiment de la combustion de combustibles fossiles par les humains. L'instabilité du climat complexifie la pratique de l'agriculture. Dame Nature a peut-être le dernier mot, mais l'homme et les politiques gouvernementales et les politiques d'entreprises qu'il conçoit jouent également un rôle.
Je suis directeur du Syndicat national des cultivateurs du Manitoba. Pendant 40 ans, le syndicat a fait de nombreuses recommandations en matière d'agriculture au moyen de demandes dans lesquelles il priait le gouvernement de prendre ses responsabilités au sérieux. Le syndicat a toujours maintenu que les agriculteurs auraient besoin d'un marché plus fort pour être en mesure de négocier de meilleurs prix. Nous existons parce que les agriculteurs ont connu et connaissent toujours des périodes difficiles à cause des hausses de coûts et des baisses de prix. Nous pouvons affirmer que nous avions déjà dit que cela arriverait si la société suivait une certaine politique. Nous avons un bon bilan, mais l'application de nos recommandations a été diluée.
Je vous invite à vous procurer une copie de l'énoncé de politique du Syndicat national des cultivateurs, dans lequel vous trouverez nos objectifs pour une société qui pourra continuer à s'améliorer et à améliorer son environnement. J'ai une copie de l'énoncé de politique ici.
Nous sommes heureux de dire que l'économie agricole a tiré profit de mesures appuyées par le syndicat, telles que la mise en place de restrictions touchant l'hormone de croissance recombinante bovine dans le lait. Mais l'économie agricole paie beaucoup trop cher pour les grains brevetés qui nous apportent bien peu. À ce jour, l'augmentation du rendement dans plusieurs cultures découle de la sélection naturelle et des intrants, et non des organismes brevetés ou génétiquement modifiés. Avec ces augmentations de rendement, le dossier montre que les prix à la production ont chuté, sous prétexte d'une offre excédentaire.
Ce pays a été créé par des personnes qui souhaitaient organiser les choses et travailler ensemble. Pendant des périodes beaucoup plus difficiles sur le plan économique, de grandes choses ont été accomplies. Les coops, la Commission canadienne des grains, la Commission canadienne du blé, l'inspection des aliments, le classement des aliments, la en marché ordonnée, et la Loi sur les semences du Canada sont toutes des choses pour lesquelles on a dû se battre, et qui continuent à apporter beaucoup aux agriculteurs.
Ironiquement, bon nombre de ces réalisations sont malmenées par l'empressement du gouvernement fédéral à courir après les marchés d'exportation, coûte que coûte, ainsi que par les investissements axés uniquement sur les profits au moyen de fusions et d'intégrations. Nous devons comprendre d'où nous venons pour arriver à accomplir ce que nous souhaitons accomplir. C'est important: les faibles bénéfices qui ont été mentionnés ne semblent pas être le fruit du hasard. Il y a eu de nombreux progrès technologiques dans le domaine de l'agriculture; la pratique de l'agriculture est devenue moins ardue au fil du temps. Les acheteurs ne souhaitent plus payer autant pour vos produits, maintenant qu'ils considèrent que votre travail est moins exigeant.
C'est là qu'entre en jeu la négociation. Comme je l'ai mentionné, la part des revenus agricoles qui va aux agriculteurs a diminué. Ce n'est pas accidentel. Nous sommes des producteurs de premier niveau, et les entreprises acheteuses, qui se trouvent de l'autre côté de la table, ont plus de pouvoir que nous au moment d'établir les prix. Le gouvernement doit agir: il a la responsabilité de se pencher sur la question et d'utiliser la Loi sur la concurrence, qui est entrée en vigueur il y a de nombreuses années. Les divers changements lui ont fait perdre bien des plumes. L'examen des investissements étrangers et la propriété étrangère ont contribué à ce relâchement du côté des règlements.
Comme le premier intervenant l'a dit, lorsque vous avez des intérêts locaux, vous avez un contrôle local. Vous avez une économie locale qui fonctionne. Lorsque vous obtenez un investissement d'un pays étranger, vous n'avez aucun intérêt local en jeu. Vous voulez seulement faire du profit. Vous vous inquiétez moins de l'environnement, ainsi que de la santé et de la culture des citoyens de votre localité.
Il est important que le gouvernement assume pleinement sa responsabilité de réglementer les coûts que demandent les entreprises. Cela s'applique également aux agrofournisseurs. Comme je l'ai dit lorsque j'ai parlé de la Commission canadienne du blé et de la négociation des prix pour nos produits, nous avons fait des gains dans ce domaine. Ce sont des acquis que nous devons conserver. Nous avons perdu le droit de vendre le porc à guichet unique, et les producteurs de porcs ont essuyé des pertes à la suite de cela. Nous avons des tonnes de porcs, mais l'élevage porcin n'est pas avantageux. Il était facile de prévoir que, si on produisait trop de porcs, les prix allaient éventuellement être réduits.
Le problème se pose aussi dans l'industrie bovine. Je crois qu'en tant qu'éleveur de bovins, vous êtes en position de comprendre comment nous nous sentons dans l'industrie bovine. Nous sommes acculés au pied mur: nous avons moins d'acheteurs pour la transformation et la distribution de nos produits. Nous faisons des affaires avec quelques personnes seulement, et elles sont bien capables d'établir les prix qui leur conviennent, mais qui ne nous conviennent pas à nous, producteurs de premier niveau.
Je vous invite à faire la lumière sur quelques politiques à cet égard. J'ai appris des choses sur la politique fiscale. En parlant avec quelques voisins et en me préparant pour ma présentation d'aujourd'hui, j'ai appris que l'agriculteur qui constitue sa ferme en personne morale obtient certains avantages fiscaux. Mon exploitation agricole n'est pas constituée en personne morale, donc mon avantage fiscal est moins important.
Le problème avec les gens de métier, c'est qu'ils vous donnent seulement une ristourne si vous avez une grande exploitation agricole. Pour ma part, j'ai une petite exploitation agricole, donc je ne suis pas avantagé lors de l'achat de mes ressources. C'est ici qu'entre en jeu la Loi sur la concurrence, dont j'ai parlé plus tôt. Un système de banques foncières serait bien. Les emprunts à long terme seraient intéressants. Les études et les emplois à l'extérieur de la ferme ont posé problème.
En tout cas, merci.
Bonjour, mesdames et messieurs.
Tout d'abord, j'aimerais vous remercier de m'avoir donné la possibilité de me présenter devant vous aujourd'hui pour vous parler de la situation actuelle des jeunes agriculteurs. Pour ceux que j'ai rencontrés au cours des dernières années: c'est bien plaisant de vous revoir.
Mon nom est Joe Bouchard, j'ai 30 ans et je suis agriculteur de troisième génération de la région de Fisher Branch. Mon épouse, qui est enseignante en ville, mon père et moi cultivons des céréales et élevons des bovins. Notre exploitation agricole mixte comprend 1 100 acres de terre à foin et 900 acres de terre cultivée qui sont consacrés à l'avoine, au blé et au canola. Nous avons choisi ces cultures parce que ce sont les seules qui peuvent pousser à cet endroit en raison du climat et du type de terre. Certains autres producteurs sèment des fougères. Nous avons également 2 000 acres de pâturage. Nous avons environ 300 veaux. Nous attendons que les veaux pèsent entre 750 et 900 livres avant de les vendre.
Ainsi, nous nous tenons occupés. Je crois depuis toujours que n'importe qui doit travailler au moins 40 heures par semaine pour arriver à nourrir sa famille convenablement, et je ne crois pas que cela devrait être différent pour les agriculteurs. Mais lorsque je me rends compte que nous n'arrivons pas, malgré le fait que nous travaillons entre 80 et 100 heures par semaine, que nous nous démenons corps et âme pour nourrir notre famille, que nous faisons tout comme il faut et que nous produisons des produits de toute première qualité, je me pose des questions.
Je vous parlerai aujourd'hui de la situation dans laquelle se trouvent actuellement les jeunes agriculteurs, des occasions qui s'offrent à eux, des difficultés qu'ils éprouvent et des solutions possibles.
J'habite dans la circonscription de James Bezan, tout comme Kyle, qui est venu ici avec moi. Comme quelques-uns d'entre vous le savez sûrement, ces deux dernières années ont été très difficiles pour nous. Ces dernières années, les habitants de la circonscription ont dû se battre pour survivre. Notre région connaît probablement des moments plus difficiles que la moyenne des régions du pays.
En ce moment, la vie est loin d'être facile pour les jeunes agriculteurs. C'est un domaine dans lequel il est difficile de survivre, pour ne pas dire, dans lequel il est difficile de réussir. Rares sont ceux qui y reviennent, parce qu'il y a des façons bien plus faciles de gagner sa vie en travaillant moins d'heures et en courant moins de risques.
Par exemple, l'un de mes beaux-frères travaille comme opérateur de machinerie lourde, ce que j'ai moi-même déjà fait. Son travail se rattache à la pipeline, et il travaille environ sept ou huit mois par année. Il fait de longues journées de travail, mais son salaire est dans les trois chiffres.
Je suis l'aîné de la famille. Mon frère le plus âgé a travaillé dans l'industrie des combustibles à Calgary; il s'occupait du soutien informatique. Il vient d'obtenir un nouvel emploi; il fait dans les trois chiffres. Il a des jours de vacances et peut prendre d'autres jours de congé. Au cas où vous ne le saviez pas, ces autres jours de congé s'ajoutent aux vacances et sont payés.
Lorsque vous vous démenez corps et âme pour gagner votre vie et que vous entendez ça, c'est un peu fâchant.
La population de notre région est vieillissante. Dans notre MR, la MR de Fisher, nous sommes quatre jeunes hommes à être revenus environ à la même période. L'un avait des parents plus âgés, et il n'est jamais parti. Nous sommes environ quatre; nous avons tous à peu près le même âge.
L'un d'entre nous ne travaille déjà plus en agriculture. Il a abandonné parce qu'il n'était tout simplement pas capable de faire le travail. Il a quitté le domaine, a vendu tout ce qui pouvait l'aider à rembourser ses dettes et a trouvé un emploi à Manitoba Hydro. Nous n'étions alors plus que trois, dans toute la MR. Tout récemment, un autre jeune agriculteur a obtenu son diplôme de l'université et il est revenu dans la région. Mais quatre jeunes agriculteurs dans toute une MR, ce n'est pas suffisant.
L'économie de notre collectivité est fondée sur l'agriculture. La MR dans laquelle Kyle et moi nous trouvons fait rouler la région. L'agriculture « est » l'économie; c'est la source de tout. Nos collectivités vivent du stress: les agriculteurs n'ont pas d'argent et les entreprises non plus. Si vous vous présentiez dans les bureaux de certaines des entreprises de la région, et tout spécialement dans les bureaux d'entreprises du domaine de l'agriculture, les gens qui vous accueilleraient seraient « fous, fous, fous ». Ils semblent n'avoir vu personne depuis des jours. Ils seraient simplement contents de voir quelqu'un cogner à leur porte.
Permettez-moi de passer aux programmes, dont Agri-stabilité pour les jeunes agriculteurs. Beaucoup d'entre nous l'appellent « Agri-incertitude », parce que personne ne semble en mesure de déterminer si c'est bancable, si ça va marcher. Il y a beaucoup de frustration.
Lorsque l'on va voir notre comptable — qui semble être le seul à faire de l'argent avec ce programme, en raison de ce qu'il facture pour remplir les papiers —, c'est très frustrant. Il peut calculer notre impôt sur le revenu et savoir presque au sou près ce que l'on doit payer ou ce qui va nous revenir. Dans le cas d'Agri-stabilité, si tout va bien, il a une bonne idée des chiffres et envoie tout ça au bureau, mais il arrive parfois qu'il n'en sache rien. Ça s'avère problématique lorsque l'on compte sur ce programme pendant une année difficile.
Il faut avoir une marge pour qu'Agri-stabilité fonctionne. Dans le cas des jeunes qui développent leur ferme, la formule continue à faire augmenter la marge de référence. Même s'ils ne connaissent pas de bonnes années, la marge de référence continue à augmenter parce qu'ils sont en pleine croissance. Je suppose que c'est bien d'avoir une marge, mais si elle continue à augmenter même lorsque l'on a besoin d'aide, c'est qu'il y a un problème avec le programme.
Comme je l'ai dit, ce n'est pas bancable. De nombreux agriculteurs — Kyle l'a mentionné — ont reçu un chèque alors qu'il était déjà trop tard.
Ce que je reproche le plus à Agri-stabilité, c'est que les fermes mixtes sont désavantagées. Les gens qui se donnent à fond dans un secteur — les céréales ou le bétail — ont un programme comme ça pour les aider à stabiliser les choses. Les propriétaires de fermes mixtes font ça par eux-mêmes. Ça n'encourage pas les gens à avoir des fermes mixtes afin d'atténuer les risques, et ce n'est pas juste.
Nous travaillons pendant toute l'année sur notre ferme mixte. Nous travaillons de longues heures sans relâche, et il est très difficile d'avoir ne serait-ce qu'une journée de congé.
Je comprends l'objectif du programme, pourquoi la couverture est telle que vous ne pouvez pas dépasser 85 p. 100. Mais en tant que jeunes agriculteurs, notre marge est si étroite que nous avons besoin de ce 15 p. 100. Je sais que c'est là qu'Agri-investissement entre en jeu, mais lorsque l'on se bat pour mettre du pain sur la table et qu'on n'a pas d'argent à mettre dans Agri-investissement, ce programme n'est pas non plus d'une grande utilité. Pour les jeunes agriculteurs, c'est une grande source de préoccupation.
Dans le cas d'Agri-protection... et je sais que je peux faire fausse route dans une certaine mesure, parce que je crois savoir que les responsabilités sont partagées entre le fédéral et le provincial, mais Agri-protection s'est avéré une vraie catastrophe dans notre secteur ces dernières années. C'est étonnant qu'il n'y ait pas eu davantage d'agriculteurs qui aient fait faillite, vu la manière dont l'assurance a été gérée.
Notre couverture est insuffisante vu les primes facturées, et il n'y a pas d'assurance dans plusieurs secteurs d'élevage. L'autre chose, c'est que ce programme semble calculer 80 p. 100 de la valeur de notre récolte, mais on ne peut obtenir qu'une couverture de 80 p. 100. Je ne suis pas un génie, mais je sais que 80 p. 100 de 80 p. 100, ça donne une couverture de 64 p. 100, non pas de 80 p. 100. Il faut donc que la récolte soit vraiment mauvaise pour obtenir un dédommagement, mais ça ne nous empêchera pas de perdre davantage que ce qu'on a investi dans la terre. Or, sans moyens de production appropriés, nos chances de faire de l'argent sont nulles.
Le programme Agri-investissement, comme je l'ai dit, ne fonctionne que si on a de l'argent à y investir. Si c'est le cas, c'est un bon programme, mais pour les jeunes agriculteurs... Comme je l'ai dit, lorsque il faut se battre pour survivre, on n'a pas d'argent pour ça.
En ce qui concerne Agri-relance, nous avons du bétail dans la région d'Interlake, et c'était un bon programme. Il a tiré du pétrin de nombreux agriculteurs. Pour être honnête, je ne crois pas qu'il resterait autant d'agriculteurs là-bas si ce n'était de ce programme. Le processus aurait pu être un peu plus rapide — c'est ma seule critique — et ça doit être bancable. Ça a pris un bon moment avant qu'il soit annoncé, et il y a eu pas mal de dommages. Si cet argent était arrivé plus tôt, ça aurait aidé pas mal plus de gens.
Je crois que le programme le plus important, celui dont nous avons besoin, c'est Agri-relance. En cas de vrai désastre, nous avons besoin d'un programme qui répond rapidement. Certaines personnes d'Agri-investissement nous ont dit l'an dernier: « Vous avez des acres non ensemencés. » Eh bien, les acres non ensemencés ou l'excès d'humidité, ça fonctionne lorsque l'on a 5 ou 10 p. 100 qu'on ne peut ensemencer. Lorsque ça grimpe à 90 ou 95 p. 100, ça ne marche pas. Ça couvre tout juste nos frais fixes, notre loyer foncier. Il ne reste rien à la fin. On n'a même pas l'argent nécessaire pour effectuer les paiements de notre machinerie.
Malgré ce que j'ai dit, les possibilités sont immenses pour les jeunes agriculteurs, parce qu'il n'y a pas beaucoup de personnes qui reviennent. La population ne cesse de croître et il en va de même pour la demande de denrées alimentaires. Je continue de croire que le monde rural est un endroit merveilleux pour vivre et élever une famille.
En ce qui concerne les problèmes, je suis un peu tanné d'entendre parler de ces marchés spécialisés où les gens sont prêts à payer davantage. Je veux savoir où ils se trouvent. Les gens veulent la meilleure qualité au prix le plus bas. Nous avons ce qui me semble être une politique d'aliments bon marché, une politique d'aliments gratuits. Six entreprises contrôlent 85 p. 100 du marché nord-américain de la vente au détail d'aliments. La marge bénéficiaire des détaillants est démesurée. Une étude réalisée sur le boeuf a démontré que les détaillants touchaient 54 p. 100 du prix. C'est énorme. Walmart n'existerait pas si la mentalité n'était pas d'obtenir la meilleure qualité au prix le plus bas. Je n'ai jamais entendu personne annoncer à quel point ses aliments étaient chers.
Le principal problème des jeunes agriculteurs, c'est les liquidités. Nous en avons besoin pour fonctionner, et nous prenons parfois de piètres décisions de commercialisation parce que nous n'avons pas les liquidités nécessaires. S'il y a une chose que vous pouvez faire pour les jeunes agriculteurs, c'est de leur permettre de continuer à obtenir des avances de fonds. C'est primordial.
Les loyers sont astronomiques. La température et la commercialisation sont toujours des facteurs considérables. Si les taux d'intérêt augmentent, ce sera un autre problème de taille qui s'ajoutera pour les jeunes agriculteurs.
Si les fermes n'étaient pas pratiquement données aux jeunes par leurs parents, il leur serait impossible de réussir. Ils ne peuvent se permettre d'exercer leurs activités et de payer en même temps pour la ferme. Les générations précédentes subventionnent la production alimentaire dans ce pays, et les règlements et les coûts supplémentaires doivent être surveillés, parce que ce sont les autres qui établissent les marges alors que nous sommes vendeurs au prix du marché. Ils retirent cela de ce qu'ils paient.
La pénurie de marchés, tant à l'échelle nationale qu'internationale, est un problème, et les entreprises à intégration verticale complète commencent à devenir plutôt effrayantes.
En ce qui concerne le manque d'infrastructure, c'est la même chose. Ça relève probablement davantage du provincial, mais nos routes et nos systèmes de drainage sont un véritable gâchis, et ça nous occasionne des frais supplémentaires. Nos communautés sont en train de s'éteindre, en partie parce que les services se font rares.
Pour résoudre ces problèmes, il nous faut un meilleur environnement — ce qui signifie des allègements fiscaux pour nous permettre d'accroître notre production — et il faut aussi créer d'autres marchés. Dans le cas des jeunes agriculteurs, peut-être pourrions-nous obtenir une plus grande partie de nos avances de fonds sans intérêt.
En ce qui concerne les taux d'intérêt et les allègements liés aux prêts et aux hypothèques, il faudrait que ceux-ci soient étalés sur plus de cinq ans et que les plafonds soient plus élevés afin que nos parents puissent être payés pour leur ferme. Ce serait formidable. La Société des services agricoles du Manitoba le fait, mais le faible taux d'intérêt ne dure que deux ou trois ans. Si nous pouvions étaler cela sur 10 ans pour les jeunes dont les paiements sont constitués presque entièrement d'intérêts, ce serait fabuleux.
En ce qui concerne le commerce et les marchés, il est important d'accroître les échanges et de développer des marchés. Si les gens d'ici ne paient pas pour nos produits, nous devons pouvoir les envoyer à des gens que cela intéresse.
On a parlé du coût de production, de même que de la gestion de l'offre. Je ne suis pas ici pour m'y attaquer, mais le cheptel laitier du Manitoba est passé de 800 à moins de 400 producteurs en 10 ans. Ils se regroupent aussi rapidement que les autres, alors ce système n'est pas parfait non plus.
J'aime l'idée de Kyle. Nous avons peut-être besoin d'une taxe sur les aliments, et cet argent pourrait servir à aider les jeunes agriculteurs.
Merci.
Merci beaucoup, Joe.
J'étais dans votre région il y a de cela bientôt deux ans, et j'ai vu l'eau. Je n'avais jamais rien vu de tel dans ma vie. Je n'arrive pas à imaginer comment vous avez pu travailler là-dedans.
Passons maintenant à la série de questions.
Allez-y, monsieur Valeriote, pour cinq minutes.
J'aimerais tout d'abord remercier chacun d'entre vous d'avoir pris le temps d'être ici aujourd'hui. Je sais que vous avez probablement des tâches plus importantes à accomplir. Vos exposés sont vraiment d'une très grande qualité. Chacun d'entre vous a enrichi la réflexion, et il est extrêmement important pour nous d'entendre ce que vous avez à dire.
Hier, quelqu'un en Saskatchewan a dit que nous ne serions pas ici si nous n'avions pas une crise sur les bras, et j'ai effectivement l'impression, après avoir écouté les témoins des quatre derniers jours, que nous sommes en état de crise. Nous avons entendu une longue liste de solutions, de changements et de légères modifications qui pourraient s'appliquer aux prêts sur les fermes et à Agri-stabilité, mais j'ai l'impression que nous sommes rendus au point où il faut aller au-delà du peaufinage de certains de ces programmes, car ça risque d'être insuffisant. Il se pourrait cependant que je me trompe et que les solutions que vous proposez soient suffisantes.
Si nous pouvions donner libre cours à notre imagination pendant un instant, que proposeriez-vous — n'importe lequel d'entre vous — comme programme pour aider à attirer et à retenir les jeunes agriculteurs?
La solution pourrait passer par la constitution de réserves foncières. Il faut énormément de capital pour entrer dans le système et pour obtenir une terre, et les jeunes agriculteurs doivent assumer cette dépense.
Les programmes de prêt sont utilisés, mais ils nécessitent un remboursement. Les agriculteurs de la génération précédente — nous l'avons mentionné — financent de nombreux transferts. Ils espéraient obtenir un certain montant parce qu'ils voyaient leur terre comme un système de pension, mais la valeur des terres ne cesse de croître. Il vient tout juste d'être indiqué que même si le revenu agricole décroît, la valeur des terres continue d'augmenter. Ça n'est pas très sensé.
Il faut des programmes novateurs pour faciliter le transfert des terres d'une génération à l'autre. Les réserves foncières sont une possibilité; aux États-Unis, certaines communautés ont examiné les fiducies foncières pour établir un système de transfert des terres, alors c'est une idée.
Je pense qu'il faut quelque chose qui donne aux jeunes agriculteurs un avantage sur les autres, qu'il s'agisse d'une aide pour leur hypothèque s'ils ont moins de 40 ans ou d'avances de fonds plus importantes que celles accordées aux agriculteurs établis. Je crois que c'est la seule façon de permettre aux jeunes agriculteurs d'obtenir ce léger avantage dont ils ont besoin et de remédier au fait qu'ils n'ont pas de capitaux propres.
Drew, vous avez mentionné que la Commission canadienne du blé et les agriculteurs étaient capables de prendre leurs propres décisions. Nous vous avons entendu de ce côté de la table et nous appuyons fortement la commission, comme vous le savez, mais j'ai entendu dire que certains problèmes devaient être réglés, et je pense que vous l'avez souligné.
Vous avez peut-être entendu dire cette semaine qu'il s'agit peut-être d'une question de transparence ou de quelque chose du genre. Pouvez-vous nous parler de certains problèmes que vous constatez et qui pourraient être réglés au sein de la Commission canadienne du blé?
Certaines des options de paiement aux producteurs que le Commission canadienne du blé offre maintenant règlent de nombreux problèmes que les agriculteurs rencontraient fréquemment. Ceci dit, existe-t-il un système dont tout le monde soit satisfait? Non. Personnellement, je suis assez subjectif, alors je ne veux pas dire que tout fonctionne bien, mais je dirais qu'ils font de leur mieux. Ils essaient d'être souples et de répondre aux besoins des agriculteurs.
Je crois que nous avons mentionné la question des liquidités. Il est difficile pour les jeunes agriculteurs qui ont besoin d'argent pour payer leurs factures d'attendre le chèque de la Commission canadienne du blé, mais de manière générale, je pense qu'ils font réellement de leur mieux pour répondre aux besoins des agriculteurs. Selon moi, ils font un très bon travail.
Joe, vous avez parlé d'intégration verticale et du problème qu'elle pose. La Loi sur la concurrence est conçue de façon à interdire aux gens de collaborer et de fixer les prix; ce n'est pas comme aux États-Unis, où on divise des entreprises si on croit qu'elles exerceront un monopole.
L'un d'entre vous pourrait-il recommander des changements à la Loi sur la concurrence afin que nous puissions éviter que les pouvoirs soient si concentrés au sommet?
Je crois qu'il nous faut le bon environnement afin que plus d'entreprises veuillent se mettre sur pied et qu'il y ait davantage de concurrence. C'était ma réflexion à ce sujet.
C'est ce qu'il faut. Nous examinons ce modèle américain qui leur permettait de diviser le contrôle selon la concentration des abattoirs. C'était il y a des années. Depuis, ils ont adouci leurs lois sur la concurrence également, mais il est absolument nécessaire que le gouvernement exerce ses pouvoirs dans l'économie. Ce n'est pas déraisonnable de le faire.
Si on examine pourquoi les sociétés existent au départ — c'est une leçon d'histoire —, il s'agit d'un groupe de personnes qui se sont réunies pour atteindre un but; on parle surtout de profit, mais ce peut être plus que ça, et c'est le gouvernement qui accorde une charte des sociétés. Il faut en faire la demande au gouvernement. Le gouvernement peut établir des règles raisonnables à ce sujet, et il devrait le faire.
Merci.
C'est au tour de M. Bellavance. Tout le monde devrait mettre ses écouteurs pour entendre l'interprétation.
[Français]
Je vous remercie beaucoup.
Avant que j'oublie, M. Foster, vous avez mentionné certaines statistiques en matière de coûts d'épicerie et de revenus des agriculteurs. Serait-il possible de transmettre ces informations à la greffière du comité, s'il vous plaît? Il n'est pas nécessaire que ce soit aujourd'hui, mais l'important est qu'on puisse tenir compte de ces statistiques lorsqu'on fera notre rapport.
Vous avez parlé du pourcentage des profits que les détaillants réussissaient à faire, par les temps qui courent, et des revenus des agriculteurs qui étaient constamment à la baisse. Comprenez-vous ce que je veux dire? Pourriez-vous transmettre ces informations à la greffière?
[Traduction]
Absolument. Je crois que c'est Keystone Agricultural Producers, l'APAS et Wild Rose qui ont rédigé cette étude. Elle est sur leur site Internet, mais je crois que j'en ai un exemplaire avec moi que je pourrai vous laisser.
[Français]
Messieurs Bouchard et Foster, j'étais heureux de vous entendre ce matin, bien que les nouvelles sur les problèmes que vous vivez et que vous nous avez transmises ne soient pas joyeuses. Depuis le retour de l'élection, qui a eu lieu en 2008, j'essaie de sensibiliser mes collègues du comité à l'importance de faire une révision des programmes. J'ai même réussi à faire adopter une motion en ce sens. Je ne suis pas le seul membre du comité et je respecte le fait que les autres membres aient d'autres priorités. La tournée que l'on fait aujourd'hui est très importante. Pour moi, cela confirme qu'il faut régulièrement faire une révision de tous les programmes spécifiques aux producteurs agricoles.
Monsieur Bouchard, vous en avez fait une. Vous nous avez parlé du programme Agri-stabilité, que vous appelez le programme « Agri-incertitude », ce qui n'est pas sans me rappeler beaucoup d'autres témoignages que l'on a entendus depuis le début de cette tournée et depuis que le programme existe. Vous avez aussi parlé du programme Agri-relance. Il y a beaucoup de programmes. Ils ne sont pas tous mauvais et ils n'ont pas été créés de mauvaise de foi. Je suis convaincu que ni le gouvernement ni les fonctionnaires ne mettent en place des programmes en sachant qu'ils ne fonctionneront pas. Je suis convaincu que l'idée de départ est d'essayer d'apporter de l'aide, quel que soit le gouvernement. Je suis un membre de l'opposition, mais je suis capable de reconnaître cela.
Par contre, le gouvernement doit reconnaître qu'une fois qu'un programme est créé, il est possible qu'il ne se passe pas ce qu'on aurait voulu. Il est possible que le programme ne réponde pas aux besoins réels des producteurs et des productrices. C'est ce que vous avez démontré en quelques minutes ce matin. J'aimerais que vous reveniez sur le dossier.
Chez vous, il y a eu des inondations. Les programmes liés aux catastrophes vous ont-ils été utiles? Avez-vous l'impression que vous avez la possibilité de vous en sortir grâce à ces programmes? Si oui, y aurait-il des améliorations à apporter à ces programmes? Sinon, qu'est-ce qui devrait être fait pour vous aider dans de telles circonstances?
[Traduction]
Eh bien, comme je l'ai dit, l'aide aurait pu venir plus rapidement. Nous savions en septembre que c'était la catastrophe assurée. Nous savions en août que nous étions dans le trouble. Nous avions l'assurance que quelque chose s'en venait, et pour tous les secteurs. Bon nombre de producteurs de céréales ont été indemnisés pour l'excès d'eau mais ça ne faisait pas vraiment le poids compte tenu des dégâts qu'ils ont causés à leurs champs en essayant de faire les récoltes — les ornières, et ensuite l'argent nécessaire pour les niveler. Ils ont été mis de côté. Je n'ai pas trouvé cela très juste.
Mais pour le secteur de l'élevage bovin, l'aide a été considérable. Elle a vraiment sauvé le secteur de l'élevage bovin. Ma seule crainte — comme je l'ai dit, nous savions très tôt que nous étions dans le trouble, et nous avons frappé aux portes pendant tout l'été —, c'est que l'aide aurait pu venir un peu plus rapidement. Également, Agri-relance est un programme provincial-fédéral, alors il nous a fallu obtenir l'aide de la province. Ce n'est pas juste de pointer du doigt un côté seulement.
C'était ma seule plainte. Le programme d'aide en cas de catastrophe a sa raison d'être, et lorsque des catastrophes surviennent, le programme doit être rapide, parce que les autres programmes, qui arrivent plus tard, fonctionnent en temps normal, mais pas en cas de catastrophe.
[Français]
J'espère que vos commentaires seront utiles à tous les membres du comité, tous partis confondus. Il faut faire une véritable révision de ces programmes. Vous avez parlé d'un programme qui a relativement bien fonctionné, mais vous avez aussi témoigné de programmes qui ont connu moins de succès, en raison de leurs particularités. On ne peut pas répondre complètement aux besoins de tout le monde, mais il y a certainement moyen d'améliorer ces programmes, notamment le programme Agri-stabilité. C'est le message que je retiens depuis le début de cette tournée.
Je vous remercie.
[Traduction]
Merci à vous tous d'être ici. Il est agréable d'entendre ce que vous dites, mais c'est également très déprimant, alors il est évident que nous devons faire quelque chose. Il me semble que tout le monde a de bonnes intentions. Tout le monde autour de cette table et tous les gouvernements veulent aider, mais en même temps, nous constatons que quelque chose ne fonctionne pas.
Ian, je crois que vous avez parlé d'exportation à tout prix. Nous sommes un pays commerçant. Nous essayons d'ouvrir des marchés, grâce au ministre. D'un autre côté, dans le secteur de l'élevage bovin, les exportations ont triplé au cours des 20 dernières années, et pourtant les éleveurs de bovins de boucherie gagnent moins de la moitié des revenus qu'ils touchaient il y a 20 ans.
Nous avons signé des accords commerciaux dans le cadre de l'ALENA. Nous étions tout juste en Colombie-Britannique, où nous avons parlé à des représentants de l'industrie fruitière. Avant l'ALENA, il y avait des tarifs douaniers en saison qui protégeaient les producteurs de légumes et de fruits de notre pays, et ils pouvaient vivre de la terre, mais la plupart d'entre eux sont maintenant dans la misère en raison du dumping des produits américains.
Nous constatons que l'entente commerciale Canada-Union européenne qui fait l'objet de discussions actuellement va frapper nos collectivités et ouvrir des contrats de sorte que dans des administrations municipales comme Portage, les travailleurs locaux seront en concurrence avec les travailleurs européens. Nous savons que la gestion de l'offre et la Commission canadienne du blé sont sur la table. Il semble que le Canada rural est constamment frappé par ces accords commerciaux, mais d'un autre côté, nous sommes un pays commerçant.
Voici la question que je vous pose: comment peut-on arriver à un compromis pour aider à renforcer le Canada rural afin que chacun d'entre vous puisse gagner un peu d'argent, ne pas avoir à travailler 90 heures par semaine et pouvoir prendre le temps de faire ce que la plupart des gens tiennent pour acquis? Comment pouvons-nous à la fois maintenir notre commerce et nous assurer que vous obtenez un prix juste pour ce que vous faites? C'est une question philosophique, mais c'est le coeur du problème.
Nous parlons de solutions temporaires. Agri-stabilité et Agri-flexibilité nous permettront d'apporter de l'aide. Certains programmes fonctionnent et d'autres non, mais le coeur du problème, c'est que nous continuons de glisser. Nous perdons le Canada rural et nous perdons des fermes, qui sont, comme l'un de vous l'a mentionné, le fondement de tout cela.
Quelle est la réponse? Commençons peut-être par Kate et descendons la liste.
Je crois que nous parlons tous des coûts liés à l'agriculture, parce que c'est ce que nous voyons le plus et, évidemment, ce n'est pas l'objet de votre question; votre question porte sur le commerce.
Je crois que la valeur du Canada réside dans la qualité. Nous ne sommes pas un fournisseur à bas prix sur le marché, quel qu'il soit, et maintenant notre dollar a pris de la valeur. En route pour la séance, nous avons entendu dire que l'Union européenne commençait à avoir des problèmes, et elle est l'un de nos grands marchés. Nous ne pouvons faire concurrence sur les coûts. Nous pouvons faire concurrence sur la qualité, et je crois que les programmes, peu importe le programme canadien, devraient viser à maintenir la qualité des produits agricoles canadiens.
Cela signifie s'attaquer à la question des aliments génétiquement modifiés. Regardez ce qui est arrivé à nos marchés lorsque le lin génétiquement modifié a décimé les marchés. De plus, il faut utiliser la Commission canadienne du blé pour commercialiser la qualité du blé. Faites ce qu'il faut, mais nous ne sommes pas des producteurs à bas prix, et il faut bien le comprendre.
M. Alex Atamanenko: Merci.
Drew.
Il est évident que nous devons garder les jeunes agriculteurs. S'il n'y a pas de jeunes agriculteurs, alors il n'y a pas d'agriculture dans l'avenir.
Permettre aux jeunes agriculteurs d'emprunter de l'argent à des taux plus bas que ceux fixés pour les autres agriculteurs est un début. Par l'entremise du CARM, le rabais accordé aux jeunes agriculteurs, je crois, est de 0,5 p. 100 actuellement, alors la différence n'est pas énorme. Le fait de nous permettre d'emprunter au taux préférentiel par l'entremise de FAC nous aiderait grandement, car ainsi, nous ne subventionnerions pas l'utilisation de ces programmes pour d'autres agriculteurs. Je ne comprends pas pourquoi nous sommes punis lorsque nous essayons de nous joindre à cette industrie. Les gens disent qu'ils veulent que nous en fassions partie, mais nous payons les mêmes taux que les autres. Pourquoi voudrions-nous en faire partie? Les autres sont punis, et nous le sommes parce que nous sommes jeunes. Je considère que c'est un grand obstacle.
L'autre chose, c'est de permettre aux agriculteurs de choisir ce qu'ils vont faire avec leur produit, que ce soit par l'entremise de la Commission canadienne du blé ou parce qu'ils veulent un marché ouvert. Nous avons besoin de ce choix. Nous n'avons pas besoin que quelqu'un d'autre prenne la décision à notre place. La stabilité est un problème; il n'y a pas beaucoup de gens qui veulent s'adonner à l'agriculture parce qu'ils ne savent pas d'où proviendra le prochain chèque de paye ou quand il arrivera.
Je crois que c'est probablement la principale façon de garder l'industrie à flot.
Merci, monsieur le président.
Merci à tous d'être ici.
J'ai entendu ce que vous avez dit, et je crois que le fait d'être dissuadé par sa famille de se joindre à l'entreprise est chose courante en ce moment dans tous les domaines professionnels. Si on prend les soins de santé, je dirais que depuis les 15 dernières années, la profession des soins infirmiers n'est pas recommandée par les infirmières, simplement en raison des contraintes, de la pression et des nouveaux défis. Je dirais qu'il en va de même pour l'éducation. Je crois que cela fait partie du défi auquel nous faisons face: essayer de trouver de l'optimisme quand il n'y en a pas beaucoup à l'horizon actuellement.
Vous avez pratiquement parlé de la ferme familiale en tant que personne. J'ai deux ou trois autres questions, mais très brièvement, pourriez-vous me donner votre définition d'une exploitation agricole familiale de nos jours?
Ma définition c'est qu'elle est exploitée par le propriétaire. Le propriétaire est dans l'étable ou sur le tracteur à un moment donné. Il embauche peut-être de l'aide et c'est peut-être une très grande exploitation, mais le propriétaire est là, sur le terrain.
Je suis d'accord. Vous constaterez que maintenant, au Manitoba, les élevages de porcs ne sont plus des entreprises familiales. Ils appartiennent tous à des provenderies et à des abattoirs, et cela ne constitue pas une exploitation agricole familiale selon moi.
Je suis d'accord. Le propriétaire est celui qui accomplit le travail. Je ne crois pas que ce devrait être en fonction de la taille. Les gars agrandissent leur exploitation pour pouvoir vivre de l'agriculture sans avoir à travailler à l'extérieur de la ferme. C'est pour ça que nous le faisons.
Une exploitation agricole familiale est dirigée par un propriétaire exploitant qui accomplit le travail et prend les décisions, mais si vous voulez en parler, nous avons la technologie qui permettrait à 25 gars de s'adonner à l'agriculture dans tout l'Ouest canadien. Ça se fait dans d'autres régions du monde. Les gens le feraient selon un modèle de main-d'oeuvre salarié, et continueraient peut-être de se considérer comme une exploitation agricole familiale.
Nous devons commencer à limiter la taille et l'étendue des exploitations agricoles si nous voulons avoir une économie rurale dynamique. Autrement, comme il a été mentionné, le retard des paiements d'Agri-stabilité fait en sorte que les agriculteurs abandonnent la terre. Le système est presque conçu de façon à augmenter la taille d'une exploitation agricole, alors on ne peut pas ignorer une discussion sur la limite de la taille d'une exploitation agricole qu'un agriculteur peut diriger. Certains gars exploiteront un grand territoire, mais d'autres seront contents d'essayer de le faire à plus petite échelle.
Mon objectif est d'essayer de le faire à plus petite échelle, et ça devient de plus en plus difficile.
Merci.
Il est évident que c'est le défi auquel fait face chaque industrie actuellement. J'ai exploité une petite entreprise et même à cette époque, le défi était de me maintenir. Il fallait croître ou se retirer du marché. Je sais que c'est difficile, il n'y a aucun doute.
Dans votre commentaire, Drew, vous avec parlé du choix d'un agriculteur, et je partage votre avis à ce sujet. Je respecte votre position à ce sujet et à propos de la Commission canadienne du blé, et je crois que vous avez raison, mais si vous êtes un jeune agriculteur qui veut s'adonner à l'agriculture et qui veut commercialiser ses propres produits, comme vous en avez parlé, et qui veut choisir comment commercialiser ses propres produits, que faut-il faire pour équilibrer tout cela? Vous êtes nouveau dans l'industrie, vous avez de nouvelles idées, vous avez peut-être trouvé de nouvelles possibilités d'affaires, mais vous êtes limité simplement parce qu'une certaine commission de commercialisation, dans ce cas-ci la Commission canadienne du blé, limite vos choix.
Je pense que j'ai été mal compris quand j'ai parlé de choix. Je faisais allusion au choix de voter en faveur de la commission ou de voter contre, je ne parlais pas de choisir entre la commission et le marché ouvert. Je ne crois pas aux vertus d'un marché double.
Je dirais que le Canada est une démocratie. Depuis toujours, c'est la majorité qui l'emporte, et je ne pense pas que la situation devrait être différente à cet égard dans l'industrie agricole. Je ne pense pas que nous méritons d'avoir des règles spéciales.
Comme je n'ai jamais eu de problèmes réels à ma ferme en ce qui concerne la Commission canadienne du blé, je ne sais pas ce que je dirais.
Non, je comprends tout à fait. À mon avis, il importe simplement de... Vous savez, nous nous penchons sur l'avenir de l'agriculture et sur ce que nous pouvons changer, en tant que décideurs, pour favoriser l'investissement dans l'industrie et y attirer plus de jeunes. Vous n'avez qu'à regarder la situation à l'est du Manitoba où il n'y a pas de Commission canadienne du blé, et où les gens semblent rencontrer les mêmes difficultés; il n'y a donc pas de solution nette d'une façon ou d'une autre.
J'ai souvent l'impression que, quand on cherche à entreprendre quelque chose, les règles qui nous sont imposées au début peuvent aller jusqu'à nous décourager d'essayer. À mon avis, nous devons nous intéresser à ce genre d'obstacles, et je pense que c'est la raison pour laquelle nous sommes venus vous écouter aujourd'hui.
Joe, vous avez parlé des programmes d'assurance ou des programmes mis en œuvre lorsqu'il y a une catastrophe, par exemple; je pense que ces programmes constituent un défi pour tous les gouvernements. Nous avons essayé de transformer un programme d'aide à l'agriculture pour en faire un programme d'aide en cas de catastrophe, tout simplement parce que c'est très facile à voir.
En 1997, nous avons eu un printemps extrêmement humide; en fait, l'ensemencement n'a eu lieu en grande partie que très tard à la fin de juin. Beaucoup de pressions ont été exercées sur le gouvernement provincial pour qu'il propose un programme. Dans ce genre de situation, la difficulté est que, si le programme est lancé trop tôt, les gens ne se donnent pas la peine d'essayer de faire ce qu'ils sont censés faire; si le programme arrive trop tard, la récolte risque d'être une perte totale. C'est un équilibre fragile.
Nous pouvions voir la catastrophe. Nous avons vu la catastrophe dans votre région, et il est difficile de mettre en place les mécanismes requis avant que les choses ne se gâtent. Avez-vous une idée de ce que nous pouvons faire pour prévenir ce genre de situation d'une certaine façon? Y a-t-il des formules ou des processus que nous devrions mieux utiliser pour être prêts à intervenir plus rapidement?
Je comprends tout à fait votre position en tant que gouvernement. Vous voulez créer des programmes pour aider les gens, mais vous ne voulez pas qu'on en abuse, et je comprends très bien.
L'aide a été annoncée en mars. À mon avis, en novembre ou en décembre, une fois que le sol a été gelé et que tout était presque fini, si nous avions eu la confirmation qu'une aide allait nous être versée, cela aurait été formidable. Mais je pense que nous n'avons rien su avant le 3 mars.
Non, je comprends les concepts et le fait qu'il y ait des échéanciers.
Merci, monsieur le président.
J'aimerais revenir sur le point soulevé par Merv concernant la Commission canadienne du blé; il ne fait aucun doute que le gouvernement a tout fait jusqu'à la limite de l'illégalité pour essayer de s'en débarrasser. Mais j'aimerais bien savoir où cela nous a menés de nous débarrasser de tous les offices provinciaux de commercialisation du porc. Je pense que nous devrions réfléchir avant d'agir hâtivement, parce que nous avons perdu notre industrie porcine dans le Canada atlantique. C'est fini. Il n'y en a plus. Nous avons perdu des centaines de producteurs, alors nous devons bien y penser.
À mon avis, les jeunes agriculteurs font face à deux problèmes. Le premier, c'est l'absence de rentabilité dans l'industrie actuellement. C'est le principal problème, et je pense que vous en avez tous parlé. Les transferts intergénérationnels et la façon dont nous aidons les jeunes à se tailler une place dans l'industrie et à faire concurrence aux agriculteurs établis constituent le deuxième problème.
D'abord et avant tout, nous devons faire en sorte que l'industrie soit rentable.
Que faisons-nous à l'égard des programmes actuels? Vous avez parlé du programme Agri-stabilité et du programme Agri-investissement. Une personne nous a dit l'autre jour que ces programmes ne fonctionnaient tout simplement pas, que si vous aviez deux ou trois mauvaises années d'affilée, c'était fini.
À Ottawa et dans les capitales provinciales — et cela n'a rien de politique — cela me rend fou. Les ministres de l'agriculture se sont réunis en juin dernier et en février. Il y avait des ministres du NPD, des ministres libéraux et des ministres conservateurs; à la sortie de cette réunion, on aurait dit que tout était merveilleux. Quand ces ministres sont sortis de leur réunion en février et en juin, on aurait dit qu'il n'y avait aucun problème dans le domaine de l'agriculture au Canada.
Mais qu'est-ce qui cloche? Ce n'est pas nous, au niveau politique. Ce que je veux dire, c'est que je peux discuter avec ces gens là-bas, qui représentent le gouvernement, mais un énorme problème en matière de politiques touche l'agriculture, et cela n'a rien à voir avec le parti au pouvoir.
Ma première question est la suivante: Comment, à votre avis, nous est-il possible de corriger le programme Agri-stabilité? On va nous répéter que, oh, c'est la province, ou, oh, c'est le gouvernement fédéral, mais les programmes ne fonctionnent pas. Le Programme canadien de stabilisation du revenu agricole n'a pas donné les résultats escomptés lorsque nous étions au pouvoir — j'étais secrétaire parlementaire à l'époque — et le programme Agri-stabilité ne donne pas les résultats escomptés sous le régime du gouvernement actuel. Tout ce que nous avons fait, c'est de changer le nom.
Que faut-il faire pour que ce système de filet de sécurité fonctionne?
À mon avis, pour corriger le programme Agri-stabilité, s'il ne fonctionne pas, il faut en modifier la structure. Sa raison d'être est de fournir un soutien quelconque, mais il est évident qu'il ne fournit aucun soutien. Et c'est peut-être la vraie raison pour laquelle il existe: il a été conçu pour ne donner aucun soutien aux agriculteurs.
Cela s'explique peut-être par le fait qu'ils veulent encourager l'expansion des exploitations agricoles et utiliser tout revenu agricole généré grâce au commerce. Comme je l'ai mentionné, c'est le commerce à tout prix, mais ce commerce doit être rentable pour l'agriculture. Je le répète, les coûts sont élevés au Canada par rapport à bien d'autres pays dans le monde, et les consommateurs semblent vouloir des produits bon marché; il y a donc un conflit entre les producteurs, dont l'intérêt est d'avoir un salaire décent, et les consommateurs, qui veulent payer le moins cher possible. Dans ce cas, pourquoi avez-vous besoin de nous? Vous pouvez aussi bien acheter votre nourriture ailleurs.
Tout revient à la question de savoir ce que nous voulons comme économie nationale, et cela doit être clair dans l'esprit de nos législateurs. Ils ne peuvent écouter les entreprises de transformation, qui préfèrent acheter leur lait ailleurs plutôt que de soutenir les producteurs locaux, ce dont nous avons besoin.
Ian, en ce qui concerne le programme Agri-relance, devrait-il y avoir un programme d'aide en cas de catastrophe?
Mon temps est-il déjà écoulé, monsieur le président?
Joe, vous avez parlé du programme Agri-relance, qui vous a permis d'économiser de l'argent; mais permettez-moi d'avancer que ce n'est pas grâce au programme Agri-relance en soi que vous avez économisé, mais plutôt grâce aux changements qui ont été apportés à votre situation. Agri-relance devrait être un programme d'aide en cas de catastrophe. Il n'a pas donné de bons résultats pour l'industrie de la pomme de terre au Canada atlantique; il a été efficace dans votre région pour l'industrie du boeuf, mais je pense que c'est grâce aux modifications que le ministre y a apportées pour que ça fonctionne.
Avons-nous besoin d'un programme d'aide en cas de catastrophe qui s'enclenche et soutient l'industrie dès qu'il y a une catastrophe? Agri-relance ne couvre même pas les coûts.
Eh bien, comme je l'ai dit, c'est une arme à deux tranchants. Une surveillance s'impose; sinon, il risque d'y avoir de l'abus.
Il faut reconnaître que nous avons dû travailler très fort avec notre gouvernement provincial pour faire progresser le projet au niveau fédéral. Il s'agit d'un nouveau programme, comme certains autres. Aucun programme n'est parfait, et il faut du temps pour réussir à corriger tout ce qui ne va pas. Comme c'est un nouveau programme, je vais y aller doucement.
Vous avez parlé des provinces. Il y a moins d'un an, une tornade a frappé notre région, et toute la province s'en est ressentie. Il y a eu beaucoup de frustration à l'égard de la lenteur de la bureaucratie. C'est très lent, non seulement à l'échelon fédéral mais aussi à l'échelon provincial. Il y a toujours des pépins.
Allez-y, monsieur Richards, vous avez cinq minutes.
Merci à tous d'être ici aujourd'hui. Nous sommes très heureux d'avoir pu venir vous rencontrer ici, au Manitoba, pour savoir ce que vous pensez de l'avenir de l'agriculture et recueillir vos idées et vos suggestions, puisque l'avenir de l'agriculture, c'est vous; c'est très important.
Comme vous le savez bien sûr, nous traversons le pays pour entendre les témoignages de gens de diverses régions qui travaillent sur le terrain, qui sont le visage et l'avenir de l'agriculture, pour entendre ce que vous avez à dire sur la meilleure façon d'y arriver.
Il va sans dire que c'est le coeur du problème — essayer de trouver un moyen pour que des gens comme vous continuent de faire de l'agriculture. Comme vous le savez tous, l'âge moyen des agriculteurs augmente. De plus en plus de jeunes choisissent de quitter la ferme. J'en suis un exemple. Je dois admettre que j'ai moi-même choisi de quitter l'agriculture. Je suis de l'Alberta, et j'ai un frère qui a essayé de vivre de l'agriculture, et il s'est trouvé un emploi dans un champ de pétrole pour essayer de compenser pour ses habitudes agricoles, j'imagine. Comme il gagnait beaucoup d'argent au champ de pétrole, il s'est rendu compte que cela n'avait aucun sens de continuer à cultiver la terre.
Cela se voit de plus en plus, et c'est regrettable. Nous devons trouver un moyen de rendre le métier d'agriculteur attrayant et de rendre l'agriculture rentable, pour inciter les jeunes à rester et à choisir cette industrie.
Cela dit, j'aimerais poser quelques questions d'ordre très général qui, à mon avis, nous feront réfléchir. J'ai posé une question semblable partout au pays, et les réponses que j'ai reçues se ressemblent pas mal. Mais c'est une question qui m'aide beaucoup à bien comprendre à quoi doit ressembler l'avenir.
De votre point de vue de jeunes agriculteurs, quelle est la plus grande différence entre l'industrie d'aujourd'hui et celle de l'époque où vos parents ont commencé à faire de l'agriculture? À votre avis, qu'est-ce qui a le plus changé? Je sais que certains d'entre vous sont plutôt jeunes. Je ne pense pas que vous soyez nombreux à avoir des enfants en âge de songer à reprendre la ferme familiale. Où voyez-vous l'agriculture dans l'avenir? Suggéreriez-vous à vos enfants de demeurer à la ferme et d'essayer de la rentabiliser?
Je sais qu'il faut penser à la fois au passé et à l'avenir, mais j'aimerais que chacun de vous me dise ce qu'il en pense.
J’ai beaucoup étudié le passé à ce sujet. Mon grand-père avait 30 vaches. J’en ai 300, aujourd'hui. Tout est relatif. Aujourd’hui, nous avons l’équipement pour faire le travail. Mon grand-père a probablement travaillé plus fort que je ne le fais aujourd’hui, mais on consacre autant d’heures de travail, on souffre autant de stress, on manque autant de liquidités qu’il y a 40 ans.
Tout est plus gros, mais les choses n’ont pas beaucoup changé. L’échelle est simplement différente.
C’est mon point de vue.
Si on se tourne vers l’avenir, je souhaite que mes enfants deviennent agriculteurs, mais pour ce faire, il faudra trouver un moyen de rendre profitables les petites fermes d’antan. Il faudrait qu'on puisse gagner sa vie honorablement sur une ferme de 600 acres — les gens sont déjà là. Une ferme de 600 acres ne pourra pas être profitable si on ne prend pas de mesures relativement aux structures et au montant qu’on nous paie.
Je pense que les problèmes sont les mêmes aujourd’hui qu’ils ne l’étaient pour nos ancêtres. C’est une question de concurrence et d’accès aux marchés. La pression de la concurrence est beaucoup plus forte aujourd’hui et il y a moins d’agriculteurs. Bien entendu, les coûts de production sont énormes, mais s’il est impossible de vendre nos produits et si nous n’avons aucun pouvoir sur le marché, les coûts de production ne changeront rien.
Je pense que le plus grand changement, c’est le regroupement. Partout dans l’industrie, les fermes se regroupent, les fournisseurs et les acheteurs se regroupent. Nous avons perdu toutes les coopératives. Nous en sommes au point où pour survivre, il faut être un gros joueur, et nous n’avons pas les moyens de l’être. Par conséquent, de nombreux agriculteurs quittent le milieu. J’aimerais pouvoir dire que la situation va s’améliorer, mais je ne vois pas la lumière au bout du tunnel. Le prix des terres augmente. Nous allons probablement perdre de nombreux autres agriculteurs.
Je ne pense pas que je vais demander à mes enfants de devenir agriculteurs, et je suis agriculteur que depuis cinq ans!
Lorsque nous avons perdu le tarif du Nid-de-corbeau, les pertes directes pour nos exploitations s’élevaient jusqu’à 30 $ la tonne. C’est une des principales raisons pour lesquelles il est difficile d’être agriculteur de nos jours. Les décisions que vous prenez ont des effets directs sur les revenus des agriculteurs. À cause de vous, j’ai perdu, en revenus, 30 $ par tonne de céréales, et je ne peux récupérer cette somme nulle part.
Par exemple, lorsque vous étudiez les demandes d’augmentation des plafonds sur les avances de fonds ou sur les paiements par l’entremise de programmes gouvernementaux, si vous acceptez ces demandes, c’est comme si vous disiez que vous ne voulez pas voir de nouveaux agriculteurs joindre l’industrie, que vous êtes heureux avec les agriculteurs qui sont déjà là et que vous voulez qu’ils continuent à augmenter la taille de leurs exploitations. Vous devez donc réfléchir attentivement aux sortes de plafonds que vous voulez mettre sur pied et faire appel à votre jugement.
Nous avons également dû lutter âprement pour le programme d’avances de fonds. Nous avons presque perdu ce programme il y a 15 ans. Heureusement, nous avons été en mesure de le conserver. Le plafond de ce programme pourrait être ajusté selon l’inflation.
En tout cas, il y a matière à réflexion.
Merci.
Avant de conclure, il semble qu’on a beaucoup parlé de la taille des fermes familiales, probablement encore plus ici qu’ailleurs. À mon avis, vos positions sur le sujet se ressemblent beaucoup, sauf peut-être celle de Ian.
Mon grand-père a élevé 10 enfants sur une ferme de 100 acres et il tirait un revenu supplémentaire du bois de chauffage qui provenait d’une terre à bois de superficie équivalente. Il a travaillé un peu à l’extérieur de la ferme, mais il a surtout nourri sa famille avec celle-ci. Mon père a élevé ses sept enfants sur une ferme de 1 500 à 2 000 acres. J’ai élevé mes trois enfants sur une ferme de près de 3 000 acres. Je ne pense pas qu’il y ait un lien entre la taille des fermes et la diminution du nombre d’enfants, mais on peut voir une tendance.
Cependant, je ne sais pas comment on pourrait réglementer la taille des fermes. Au cours des cinq dernières années, mes enfants ont grandi et ils ont commencé à travailler à la ferme. Ma femme et moi avons participé au vêlage de nos 300 vaches et nous avons gardé nos 500 têtes de bovins d’engrais. Nous avons eu un peu d’aide à temps partiel avec les semences et la fenaison, mais le reste, nous l’avons fait nous-mêmes. C’est comme ça. Je peux revenir aux débuts de mon père dans le domaine, ou quand j’étais jeune, et qu’il n’avait que 200 ou 300 acres. Même si je suis sentimental et que je peux dire que c’était le bon vieux temps, je demeure réaliste. Nous devons demeurer réalistes.
J’ai présenté un projet de loi privé qui interdirait l’accès aux sociétés cotées en bourse aux mêmes programmes gouvernementaux que vous, les producteurs. J’aimerais connaître votre opinion à ce sujet, que vos commentaires soient favorables ou non. Le projet de loi n’exclurait pas une entreprise familiale quelle que soit sa taille, seules les sociétés cotées en bourse seraient exclues. J’aimerais donc savoir ce que vous en pensez.
Kate, vous avez parlé des plafonds relatifs aux quotas dans le domaine de la gestion de l’offre. Je ne sais pas si vous pouvez nous en dire plus à ce sujet. Je comprends que c’est une source d’inquiétude pour l’industrie laitière. De plus en plus de producteurs laitiers de ma circonscription me disent comment les jeunes pourraient se lancer dans le domaine.
J’aimerais entendre vos commentaires à ce sujet.
Je voulais seulement parler de la situation des regroupements, où un jeune agriculteur ne peut être concurrentiel. Les quotas ont un prix. Si un gros agriculteur peut acheter ces quotas, les jeunes ne peuvent faire leur entrée dans le marché.
Je suis persuadée que oui, mais on doit sensibiliser les gens à cet égard.
La même chose s’applique pour Agri-stabilité, qui est un plafond sur les paiements. J’aime bien votre suggestion de ne pas offrir d’argent public sous forme de subventions à des entreprises cotées en bourse. Je pense que c’est une idée splendide.
Je suis d’accord. Je crois que les sociétés agricoles ont siphonné trop d’argent du système. C’est un investissement pour eux. Ce ne sont pas des fermes familiales, les actionnaires ne travaillent pas eux-mêmes sur les terres. N’importe qui peut avoir des actions de ces immenses sociétés, comme le médecin ou le pharmacien du village.
J’aimerais également voir des mesures concernant les terres agricoles parce que quelques investisseurs achètent les terres dans le but de les louer. Ces investisseurs réalisent qu’en louant ces terres, ils reçoivent un demi-point de pourcentage de plus que s’ils avaient pris des dépôts à terme à la caisse populaire. Ils achètent donc des terres. Les agriculteurs, surtout les jeunes, augmentent leurs capitaux propres grâce à l’augmentation de la valeur de leurs terres, et maintenant, ils perdent cet élément.
Je ne crois pas qu’on doive limiter la taille des fermes; je pense qu’il serait préférable de les rendre profitables.
Je vous suis reconnaissant de tenter... Lorsqu’on prend le temps de s’asseoir, comme vous le faites actuellement, qu’on observe ce qui se passe et qu’on y pense, on est porté à tirer les conclusions nécessaires. Nous avons besoin de parler de la taille des fermes.
Personne n’a l’intention de cultiver seul toute la province. Mais si rien n'est fait, c’est probablement ce qui nous attend. Les sociétés d’investissement le font déjà en Ukraine et au Brésil. Elles sont présentes en Australie depuis des années et elles possèdent des fermes immenses au Montana.
Vous avez donc une chance: quand la situation est critique, le gouvernement peut faire la différence.
Merci, Ian.
Nous devons conclure cette partie de la séance. Nous avons un autre groupe de témoins.
Pour conclure, on a posé beaucoup de questions au sujet du Bureau de la concurrence — je crois que Frank en a posé quelques-unes. On a demandé à quelques reprises au Bureau de la concurrence d’examiner certaines situations dans le domaine de l’agriculture — gaz, prix et tout le reste. Ont-ils tous les outils nécessaires sans s’en servir? Ont-ils plutôt besoin de meilleurs outils, plus fiables, pour examiner la concurrence? Nous n’avons pas le temps aujourd’hui, mais j’aimerais que vous y réfléchissiez et que vous transmettiez vos commentaires au comité.
Je vous remercie beaucoup d’avoir trouvé un peu de temps dans vos journées fort chargées pour venir ici. C’est très important et je crois que nous avons eu une très bonne discussion.
Nous nous arrêtons quelques minutes, le temps de changer de témoins.
La deuxième partie de la séance d’aujourd’hui est ouverte. Nous étudions l’avenir de l’agriculture, plus particulièrement les façons d’inciter les jeunes à devenir agriculteurs et à le demeurer.
Merci à tous et à toutes pour votre présence aujourd’hui.
Comme j’ai grandi sur une ferme, je sais combien il est difficile, lorsqu’il fait beau, surtout au printemps, de s’arrêter quelques heures. Merci beaucoup.
Nous allons passer aux déclarations. Puisque nous avons beaucoup de témoins, veuillez limiter votre déclaration à cinq à sept minutes. Je peux faire preuve de souplesse, mais si vous pouviez respecter cette demande, nous aurions plus de temps pour les questions.
Sans plus tarder, nous commençons avec Luke Lelond.
Merci, Luke.
Bonjour, et merci de m'offrir la chance de m'exprimer devant vous au sujet des obstacles qui empêchent les jeunes agriculteurs de démarrer leur entreprise.
Je m'appelle Luke Lelond, je suis un exploitant de ferme mixte de l'ouest du Manitoba. Nous élevons des bovins et cultivons des céréales. Je viens d'un endroit assez inhabituel pour notre époque. Dans notre municipalité, il y a 20 fermiers qui ont moins de 35 ans. Ce que nous avons tous en commun est que nous ne serions pas des agriculteurs si ce n'était de nos parents.
À moins que vos parents soient prêts à hypothéquer leur retraite, il est très difficile de trouver quelqu'un qui soit prêt à vous prêter, sans garantie, assez d'argent pour acheter des terres et l'équipement nécessaire à l'exploitation d'une ferme. L'obstacle le plus évident, pour tous ceux qui veulent une ferme, est le manque de capital. Très peu de personnes ont assez de liquidité pour acheter une ferme, et la plupart ne peuvent emprunter suffisamment.
Bon, imaginons que vous avez trouvé l'argent. Vous achetez des terres et vous exploitez une ferme. Qu'arrive-t-il s'il y a une catastrophe, comme il m'est arrivé? Vous faites faillite si personne n'est là pour vous renflouer.
J'ai commencé à exploiter ma ferme en 2003. Puis l'ESB a frappé. Ensuite, alors que j'ai voulu investir dans une entreprise familiale à long terme de production d'urine de jument gravide, celle-ci a réduit ses effectifs et j'ai alors perdu la chance d'investir dans une entreprise agricole profitable.
Puis, en 2004, au moment où la récolte de blé s'annonçait très bonne, j'ai, de même que tout l'ouest du Manitoba, été frappé par une gelée précoce au mois d'août. Toute ma récolte a été réduite en pâture pour les bêtes. J'ai vendu le blé et reçu une assurance-récolte. Cela n'a pas réussi à couvrir la facture d'engrais et d'épandage. Nos filets de sécurité axés sur la marge ont été inopérants.
Alors que les agriculteurs les mieux nantis reçoivent plus d'aide, ceux qui ont le moins d'argent et de garanties, ne reçoivent rien. Pourquoi cela? Plus l'agriculteur est riche, plus sa marge bénéficiaire est grande. Les nouveaux agriculteurs n'ont pas de marge.
Avec les désastres de 2003 et de 2004 — dans notre région — l'industrie agricole a perdu un grand nombre de jeunes et bons agriculteurs. Si ce comité cherche des solutions concrètes à ce problème et qu'il ne se contente pas de voeux pieux, c'est un domaine qui nécessite des changements. Si vous voulez réellement que de jeunes agriculteurs participent à cette industrie et profitent de filets de sécurité, les programmes devront être avantageux pour eux.
Aussi, l'administration des programmes doit se faire en temps opportun. J'ai un voisin bien établi qui, après avoir perdu sa ferme à cause de l'ESB et après être déménagé en ville pour trouver un emploi, a reçu un paiement de Agri-stabilité, cinq années trop tard. Ce n'est pas tous les banquiers qui acceptent d'attendre cinq ans. Ce n'est rien pour encourager les agriculteurs à rester dans l'industrie.
L'accès aux marchés est très important pour nos résultats nets, tel que nous l'avons compris durant les problèmes de l'ESB et du Triffid. Je lisais hier soir que les essais en champs d'un autre lin transgénique pourraient commencer cette année à l'University of Alberta. Pourquoi devons-nous enfoncer des produits dans la gorge des consommateurs au lieu de leur demander ce qu'ils veulent? Ce sont les agriculteurs qui en paient le prix.
Ah oui, et comme si cela ne suffisait pas, aucun des deux responsables joints à la faculté de l'agriculture de l'université n'avait jamais entendu parler du CDC Triffid ou des problèmes qu'il avait causés. Ce sont là les personnes à qui nous confions la sécurité du marché.
Au cours des dernières années de tourmente des marchés, j'ai eu la chance d'avoir des céréales bloquées à un prix profitable avec la Commission canadienne du blé. Mon argent était garanti, c'est une chose dont les agriculteurs qui ont traité directement avec des acheteurs indépendants n'ont pu profiter. Si cela a l'air futile, demandez aux agriculteurs américains qui avaient bloqué leur maïs 7 $ avec les usines d'éthanol qui ont fait faillite.
Nous parlons beaucoup du dernier référendum sur la Commission du blé. Je n'ai pas reçu de bulletin de vote pour ce dernier même si j'étais admissible. Je ne faisais pas partie de la liste référendaire. J'ai tenté de m'inscrire sur cette liste, mais mon bulletin de vote est arrivé trop tard.
Par contre, je connais un couple âgé qui n'a jamais cultivé de sa vie et qui a reçu son bulletin de vote à temps. Ça nous fait mettre en doute les résultats.
J'ai énoncé les problèmes tels que je les vois. Je vais ensuite formuler des solutions telles que je les conçoit, du point de vue d'un jeune agriculteur. Je vais les énumérer brièvement et ensuite je répondrai aux questions.
Premièrement, un programme de filet de sécurité adéquat doit être établi par une loi du Parlement. Sans loi du Parlement, les règles changent quotidiennement. C'est quelque chose dont nous en sommes témoins depuis des années.
Deuxièmement, laissez la Commission du blé entre les mains des agriculteurs.
Troisièmement, lorsqu'une entreprise sort un produit qui nuit aux agriculteurs, cette entreprise doit être tenue responsable et les agriculteurs doivent être dédommagés.
Quatrièmement, les pâturages communautaires de l'ARAP sont très importants pour les jeunes agriculteurs qui tentent de percer le marché bovin. S'il vous plaît, continuez à les soutenir.
Et si vous vous sentez vraiment généreux, vous pourriez réinstaurer le tarif du Nid-de-Corbeau.
Merci.
Merci beaucoup, Luc.
Nous allons maintenant laisser la parole à M. Fred Tait. Vous avez de cinq à sept minutes s'il vous plaît.
Merci, monsieur le président.
Je crois que le problème auquel nous devons faire face aujourd'hui n'est pas un problème de production. Ce n'est pas non plus un problème de climat, bien que de temps en temps il y a certaines variations. Le problème est un problème de déni. Nous avons investi pendant au moins 40 ans dans un système où le marché seul détermine les structures du système de production agricole et les communautés rurales du Canada, et ce modèle a échoué. Comme il est difficile de l'accepter, nous le dénions.
En réalité, les jeunes agriculteurs auraient de petites fermes. Mon collègue a d'ailleurs souligné le problème du financement. Si un agriculteur souhaite posséder 2 000 acres de terrain pour avoir une ferme viable, il doit faire face à un niveau d'endettement de 4 à 5 millions de dollars.
Nous savons également que la technologie a permis des unités de production plus grandes. Le marché a ensuite ajusté sa structure pour profiter de cette soi-disant efficacité, assurée par l'application des technologies. Les faibles marges bénéficiaires par unité de production font que les fermes les plus petites ne sont plus viables au sein de cette structure.
Je crois que nous devons également poser un oeil critique sur la politique publique. Si nous nous penchons sur les comptes publics du passé au Canada et examinons la distribution de l'aide publique à l'agriculture, nous pouvons constater que le fédéral a généreusement émis 1 400 $ par jour d'aide sur une base de 365 jours pour chaque unité de production. On serait en droit de se demander pourquoi cette aide n'a pas servi à consolider des unités de production et à les transformer en exploitation plus grande et plus « viable ».
Nous pouvons également nous pencher sur Financement agricole Canada qui a encouragé ce type de concentration, particulièrement dans le rôle qu'elle a joué dans la structure de l'industrie du porc au Canada, ce qui a contribué à exclure la plupart des agriculteurs de cette industrie.
Nous avons créé une situation aujourd'hui que j'appelle de « dépendance technologique ». Je suis ébahi par le raffinement et l'éducation des gros producteurs, mais je suis également très mal à l'aise devant leur dépendance à cette technologie.
Que nous ayons atteint le pic pétrolier, ou que nous l'atteignions dans l'avenir, lorsque nous aurons atteint ce point, les technologies basées sur des combustibles fossiles ne seront pas disponibles sur-le-champ. Nous dépendrons alors d'un autre système agricole que nous avons systématiquement écarté et détruit. Le modèle actuel ne sera pas un modèle renouvelable pour encore bien longtemps.
Je crois également que les membres du comité doivent étudier la part de plus en plus petite du dollar du consommateur qui revient aux producteurs agricoles. En 1970, les producteurs de boeuf recevaient environ 65 p. 100 de l'argent dépensé par les consommateurs. En 2008, d'après des informations publiées par Charles Gracey, nous ne recevions, au plus, que 40 p. 100. M. Gracey a également souligné que les détaillants d'aujourd'hui retiennent 50 p. 100 de la valeur du boeuf.
Nous devons nous interroger à ce sujet. Est-ce que c'est parce que l'industrie du détail sous sa forme concentrée est devenue plus grande, plus bureaucratique, plus inefficace et qu'elle demande une plus grande part ou est-ce parce que les revendeurs exercent une sorte de monopole?
Nous devons nous demander ce qui peut être fait. Nous devons évidemment étudier la question de la souveraineté alimentaire du pays — les politiques publiques agricoles versus les politiques des forces du marché. Nous devons établir, autant que possible, des systèmes alimentaires locaux et veiller à ce que les producteurs demeurent propriétaires au sein du marché.
Nous devons considérer l'idée de changer le modèle de fonctionnement des facultés agricoles de nos universités. Nous devons créer une éducation parallèle à ce que j'appellerais l'agriculture à peu de frais. Nous devons enseigner aux gens qu'il est possible de faire de l'agriculture autrement qu'en assumant des frais élevés et des marges bénéficiaires réduites. De plus, il faut créer les outils dont notre société aura besoin lorsque ma théorie du pic pétrolier et notre système de production non renouvelable se concrétiseront.
Nous devons traiter à fond de la question de la faiblesse de nos lois en matière de concurrence et de non-concurrence. Elles se sont avérées totalement inadéquates parce qu'elles ont permis la concentration qui prévaut actuellement. Si l'on croit à un système de marché, ce marché ne peut fonctionner que s'il y a un certain nombre de concurrents. Étant donné que le nombre de concurrents sur le marché de l'agriculture, tant du côté des fournisseurs que du côté des acheteurs, a diminué, la part de l'argent dépensé par les consommateurs qui revient aux producteurs a également régressé.
Nous devons je crois étudier toute la question du transfert des terres et du transfert entre générations. L'endettement agricole atteint aujourd'hui 61 milliards de dollars. L'endettement agricole actuel, basé sur les rendements du marché, ne peut poursuivre ainsi. Nous avons créé une situation en terme de prix et de propriété des terres, très semblable au marché de l'habitation des États-Unis.
Les terres sont achetées avec l'idée que l'inflation va perdurer et que l'acheteur recevra un rendement de 50 p. 100 en 10 ans. Cette théorie a ses limites, parce que si l'on regarde le rendement réel du marché, on constate que les revenus sont de moins de 2 $ par acre par année, depuis les 20 dernières années. Ce type de rendement n 'est pas suffisant pour couvrir un investissement de 2 000 $ l'acre.
Nous devons nous pencher sur le transfert de terre entre générations, à qui il profite et à qui il nuit. Il n'est pas dans mon intérêt d'endetter les gens qui occuperont les terres après moi. Ce que j'aimerais voir est un système semblable au prêt hypothécaire inversé. À la retraite, j'aurai besoin d'un revenu et non pas d'un problème fiscal. Il n'est pas utile pour un nouvel agriculteur de payer des intérêts à la banque. Le vendeur souhaite un paiement mensuel qui lui fournisse un revenu. À sa mort, sa succession pourrait continuer à recevoir ses paiements et ainsi éviter de rajouter à la dette de 61 milliards de dollars.
Je crois aussi que ce comité devrait se pencher sur — et c'est mon dernier point monsieur le président — cette théorie qui veut que notre succès en agriculture dépend de notre capacité d'augmenter l'exportation. Si l'on veut être un exportateur prospère, il faut être alors le fournisseur le moins cher.
De notre point de vue géographique, et à cause de notre climat, il nous est impossible de soutenir cette position. Ce sont les lois de la nature.
Merci de m'avoir accordé votre temps.
Merci, Fred.
J'aimerais clarifier quelque chose que vous avez dit avant de continuer. Vous avez parlé de 2 $ par acre pour les 20 dernières années.
Monsieur le président, si l'on écarte tout le soutien public à l'agriculture et conservons uniquement le rendement du marché, vous allez arriver à un chiffre qui est à peu près, en fait, 1,45 $ l'acre. J'ai été généreux.
D'accord. Je voulais seulement clarifier ce point.
Ensuite nous passons à Beverly Stow. Vous avez de cinq à sept minutes, s'il vous plaît.
Je m'appelle Beverly Stow. Mon mari, Reg, et moi sommes des agriculteurs de Graysville, dans la partie ouest de la vallée de la rivière Rouge, au Manitoba. Nous exploitons également la ferme de ma famille, à Snowflake. Cela fait 131 ans que cette ferme appartient à ma famille.
Je tiens à remercier le comité de nous accueillir aujourd'hui afin que nous puissions exprimer nos idées sur les défis et les problèmes actuels. Je vais vous parler de ce que je considère surtout comme des défis à relever.
Curieusement, il semble que les politiques mises en place antérieurement par le groupe qui cherche maintenant des solutions sont, à bien des égards, à l'origine du problème que nous tentons de régler. La mise en oeuvre rapide des recommandations formulées dans le rapport de la commission royale de la fin des années 1960 — qui indiquait que le Canada comptait un trop grand nombre d'agriculteurs — de même que les pressions insistantes exercées par des entreprises, principalement des entreprises étrangères, expliquent en grande partie la situation actuelle.
S'il est vrai que le nombre d'agriculteurs a décliné quel que soit le groupe d'âge considéré, c'est le groupe dont nous parlons aujourd'hui qui a subi le déclin le plus marqué et le plus grave. Au Manitoba seulement, leur nombre est passé de 7190 en 1991 à 2815 en 2006. Le Syndicat national des cultivateurs a réalisé une étude à partir d'autres statistiques concernant la même période. Cette étude a révélé qu'au cours des 20 dernières années, si l'on tient compte de l'inflation, les agriculteurs ont généré des revenus de 389 $ par année par âcre, mais que de ce montant, il leur est resté seulement 1,45 $ au cours de cette période. Par ailleurs, pendant à peu près la même période, les agriculteurs ont triplé leurs exportations, mais leurs revenus ont diminué de moitié, et la dette agricole a monté en flèche pour s'établir dans les 60 milliards de dollars. Il est troublant de constater que ces variations coïncident grosso modo avec la période pendant laquelle l'accord de libre-échange et l'ALENA ont été en vigueur.
La plus grande partie de l'infrastructure physique, économique et réglementaire qui a soutenu les agriculteurs canadiens des années 1920 au début des années 1990 s'érode rapidement ou est déjà disparue. À la place de cette infrastructure de soutien, les agriculteurs se sont retrouvés avec une accumulation incessante de nouveaux coûts de production, mais ces nouveaux coûts n'ont été compensés par aucune augmentation du prix des produits agricoles, ou alors par des augmentations minimes.
Au cours des 12 dernières années, plus de 3 000 milles de rails ont été retirés dans l'Ouest. Le Canada est peut-être le seul pays du monde à avoir adopté cette voie. Le tarif du Nid-de-Corbeau a été aboli, et aucuns droits de circulation conjoints n'ont été mis en place pour assurer notre compétitivité. Qui plus est, la Commission canadienne du blé a été la cible d'attaques répétées, et il y a maintenant lieu de se préoccuper sérieusement de la gestion de l'offre.
La mise en oeuvre de mesures de protection des obtentions végétales menace de plus en plus le droit millénaire des agriculteurs de recueillir des semences et d'exercer un certain contrôle sur les coûts, et cette tendance s'est exacerbée en raison des compressions dans les programmes publics d'obtentions et de l'avidité dont les sociétés étrangères font preuve lorsqu'il s'agit d'obtenir des brevets et de faire respecter les droits qui en découlent.
Par ailleurs, les plafonds des programmes de gestion des risques de l'entreprise sont énormes, ce qui incite les plus gros exploitants à s'agrandir encore davantage. Il devient donc beaucoup plus difficile pour les jeunes agriculteurs d'acquérir une ferme. Quand on considère ces énormes plafonds, on ne peut que se demander pourquoi ces grandes exploitations, qui vont déjà si bien, ont besoin que de telles sommes leur soient versées à partir des deniers publics.
Sur le marché, les grandes exploitations agricoles bénéficient d'escomptes sur les intrants et de primes sur les livraisons, mais les petits exploitants ne peuvent pas profiter de ces avantages. Cela crée une situation ridicule, dans laquelle les petits exploitants paient pour les avantages dont bénéficient les grandes fermes.
Reg et moi pratiquons l'agriculture ensemble depuis 47 ans, et Reg est agriculteur depuis plus d'une cinquantaine d'années. Pendant tout ce temps, nous n'avons jamais observé de concentration du marché comparable à celle avec laquelle les agriculteurs d'aujourd'hui doivent composer. Des entreprises individuelles sont maintenant propriétaires de chaînes d'approvisionnement complètes; elles prennent tout en charge, des portes de la ferme à l'épicerie. Et pendant qu'elles y sont, elles s'occupent également de la vente des intrants agricoles. On pourrait dire que les agriculteurs du XXIe siècle n'ont guère d'autre choix que de vendre leur âme au magasin de la compagnie.
Des rationalisations successives ont accru de manière exponentielle les distances que les agriculteurs doivent parcourir pour vendre leurs produits. Les deux gros industriels du boeuf qui sont toujours à l'oeuvre dans l'Ouest du Canada exercent aujourd'hui un contrôle assez exclusif sur les prix grâce à un approvisionnement captif et à des contrats sans prix. Ce sont également eux qui choisissent les lieux des mises aux enchères, selon la répartition de leurs acheteurs. Dans notre cas, nous devons faire un voyage d'une heure et demie pour aller vendre nos bovins.
Dans une région où le chemin de fer est indiscutablement la manière la plus efficace, la plus économique et la plus écoresponsable de transporter sur de longues distances d'importants volumes de produits lourds, les agriculteurs n'ont maintenant plus d'autre choix que de charroyer leur grain sur des routes conçues pour des véhicules légers, pour se rendre à l'endroit choisi par l'entreprise qui offre un sou ou deux de plus la livre à ce moment-là. J'ajouterais que cela se produit de plus en plus rarement, étant donné que, dans la foulée de leurs rationalisations périodiques, les quelques entreprises qu'il reste se sont réparti le territoire afin qu'il n'y ait pratiquement plus de concurrence.
La concentration du marché est le fruit des pressions soutenues que les entreprises ont exercées auprès des politiciens. La fonction publique et les organismes de réglementation, dont le principal est le Bureau de la concurrence, semblent ne plus faire autre chose qu'apposer leur sceau d'approbation sur les listes de souhaits des entreprises. Malheureusement, les agriculteurs forment un groupe de pression faible et divisé. Ils n'ont donc aucune chance devant des agents politiques grassement payés par des entreprises, qui sont déterminés à obtenir ce qu'ils veulent, et devant des fonctionnaires qui sont, quant à eux, déterminés à le leur donner.
Il semble par ailleurs y avoir quelque chose d'autre de retors dans la manière dont se font les changements de politique. En effet, les questions qui ont une incidence sur la subsistance des agriculteurs sont toujours débattues quand ceux-ci sont aux champs, pour l'ensemencement des terres, les récoltes ou quoi que ce soit d'autre.
Les jeunes, même ceux qui ont rêvé toute leur vie de devenir agriculteurs, ont de plus en plus de raisons de trouver qu'il serait déraisonnable de se lancer dans une industrie qui offre des perspectives aussi peu engageantes.
Un grand nombre de ces questions ont été examinées dans le cadre du rapport Easter, commandé par le gouvernement Martin, en 2004-2005, et des solutions sensées ont alors été proposées. Depuis, la situation s'est considérablement détériorée. On ferait un grand pas en avant pour résoudre le problème si nous déterrions ce rapport, si nous le mettions à jour et si nous mettions en oeuvre les solutions qui y sont proposées.
En terminant, j'aimerais souligner que le problème ne se limite pas à la disparition des agriculteurs. C'est un problème qui concerne la sécurité alimentaire de notre pays, ainsi que les risques qu'il y a à remettre l'approvisionnement alimentaire du Canada entre les mains avides de multinationales étrangères. En 1846, le gouvernement britannique a aboli les Corn Laws, ce qui a accablé les agriculteurs, et fait les choux gras des manufacturiers et des négociateurs de marchandises. Je doute fort que ce gouvernement ait prévu qu'au début du siècle suivant, les voies d'approvisionnement de son île seraient bloquées, et les citoyens britanniques menacés de famine.
Les choses tournent toujours mal quand on néglige les agriculteurs et qu'on veut faire bon marché de l'approvisionnement alimentaire.
Merci, monsieur le président.
Je m'appelle Larry Black. Je viens de Deloraine, au Manitoba. Ce printemps, mon épouse et moi ensemencerons nos terres pour la 33e fois. C'est un sujet qui me passionne au plus haut point. J'ai vu un grand nombre de mes voisins quitter l'industrie, et j'ai constaté les effets négatifs de la situation sur nos collectivités rurales.
J'aimerais tout d'abord dire qu'on adopte une perspective beaucoup trop étroite en se demandant seulement de quelle manière on pourrait inciter davantage de jeunes gens à entreprendre une carrière dans le domaine de l'agriculture. Le véritable problème, c'est le déclin des revenus agricoles nets. La crise agricole dure depuis 25 ans, et le désintérêt des jeunes pour notre profession n'est qu'un symptôme d'un problème beaucoup plus vaste. J'ai bien peur qu'on ne trouve qu'une solution temporaire, dans le meilleur des cas, si l'on concentre nos efforts sur un symptôme. Si on règle le problème et qu'on fait en sorte que l'agriculture redevienne rentable, les symptômes s'estomperont d'eux-mêmes, que ce soit le manque d'intérêt des jeunes, l'augmentation de la dette agricole, le déclin des collectivités rurales ou le stress éprouvé par les familles d'agriculteurs.
Il y a encore beaucoup de jeunes qui aimeraient travailler dans le domaine de l'agriculture, mais il faudrait que la conjoncture économique soit viable pour qu'ils puissent le faire. Les investissements en capitaux nécessaires sont astronomiques; les rendements sont rarement à la hauteur des attentes; la combinaison du stress, des dettes et de la charge de travail réduisent à néant la qualité de vie. Dans ce contexte, je ne recommanderais à personne d'entreprendre une carrière d'agriculteur.
Examinons un peu ce qui se passe dans le domaine de l'agriculture aujourd'hui. Les éleveurs de porcs perdent de l'argent, et des programmes ont été mis en place pour les aider à quitter l'industrie. Les éleveurs de bovins de boucherie perdent également de l'argent depuis la crise de la vache folle, en 2003. Globalement, les programmes de gestion des risques de l'entreprise ne suffisent pas à soutenir ces industries. Les producteurs de céréales vendent leur grain à un prix correspondant au coût de production, quand ce n'est pas à un prix inférieur. Les programmes sont également inadéquats dans ce domaine. Lyle Vanclief a déclaré que les prochains programmes de gestion des risques de l'entreprise allaient sortir l'agriculture de la gestion de crise. À mon avis, les programmes sont encore pires qu'avant.
Les produits visés par la gestion de l'offre s'en tirent beaucoup mieux que tous les autres. Alors qu'est-ce qui cloche, et comment pouvons-nous régler le problème? Selon moi, le problème, c'est que les politiques agricoles n'ont pas permis de maintenir une conjoncture favorable pour les producteurs primaires. Les entreprises avec lesquelles les agriculteurs font affaire, que ce soit pour les achats ou pour la vente de leurs produits, sont souvent les mêmes entreprises, et elles ont fusionné au point qu'il n'y a pratiquement plus de concurrence sur le marché. Le Bureau de la concurrence ne fait pas son travail. On a mentionné le Bureau de la concurrence à de nombreuses reprises aujourd'hui, et c'est à mon tour de le faire.
Un diplômé en commerce peut entreprendre une carrière au bureau, exercer ses fonctions pendant 30 ans et prendre sa retraite sans jamais avoir refusé une seule fusion. Quelle importance faut-il accorder à l'emprise sur le marché pour régler le problème qui nous occupe? J'ai parlé, plus tôt, de la gestion de l'offre. Selon moi, c'est la structure de mise en marché par excellence. Nous contrôlons les importations au moyen de tarifs, mais dans le cas de l'industrie laitière, nous autorisons toujours 5 p. 100, et je sais que les allocations d'importation sont considérablement plus élevées dans le secteur de la volaille.
Nous contrôlons la production au moyen de quotas. Nous établissons des prix en appliquant une formule sur laquelle on s'est entendu, qui tient compte du coût de production. Ce système n'est pas tributaire des subventions du gouvernement. Les revenus proviennent du marché, et c'est ainsi que les choses doivent se passer. Chacun des maillons de la chaîne de valeur obtient un rendement honnête, et le consommateur obtient des produits de qualité, à prix abordable.
Grâce à la gestion de l'offre, mon exploitation agricole a pu passer à la génération suivante. Ce système contrebalance la domination que les entreprises exercent sur le marché. La Commission canadienne du blé est un autre exemple d'organisme de mise en marché. Grâce à la CCB, les agriculteurs bénéficient d'un comptoir de vente unique, ce qui réduit la concurrence au moment de la mise en marché. La mise en commun des prix fait en sorte que les agriculteurs sont assurés d'un prix stable, peu importe le moment de l'année où ils vendent leur grain. C'est très important car, à l'automne, quand il y a des tas de factures à payer, le prix du grain est habituellement à son niveau le plus bas.
La Commission canadienne du blé est un fervent défenseur des agriculteurs. Elle s'est attaquée à des problèmes comme les services de transport insatisfaisants offerts par les compagnies de chemin de fer, ou à l'introduction du blé Roundup Ready, un produit dont un grand nombre de nos clients ne veulent pas. Grâce à la CCB, nous pouvons offrir à nos clients une qualité uniforme, qui satisfait à leurs besoins individuels. La majorité des agriculteurs soutiennent cet organisme, comme en témoigne le grand nombre de directeurs qui l'appuient.
Une autre question dont je veux vous parler concerne l'Organisation mondiale du commerce et les négociations qu'on y mène. Ce n'est pas de commerce équitable dont on parle ici. Il s'agit plutôt d'avantager encore plus nos multinationales, et de leur aplanir encore davantage le terrain pour qu'elles puissent faire encore plus de profits au détriment des autres parties concernées, et des agriculteurs en particulier. Nous engageons des dépenses au Canada, et nous avons besoin de politiques élaborées au Canada pour nous aider à tirer un revenu raisonnable de la vente de nos produits.
Si, à Genève, vous vous dépouillez par une simple signature de votre capacité d'agir à ce niveau, comment pourrez-vous gérer les problèmes que nous connaissons ici? Les agriculteurs doivent payer les factures de 2010 avec un revenu de 1972.
J'ai apporté avec moi un exemplaire d'un rapport intitulé Un pouvoir de marché accru pour les producteurs agricoles canadiens. Je constate avec plaisir que son auteur est parmi nous aujourd'hui. Il y a six ans, Wayne Easter a interrogé 450 producteurs et dirigeants agricoles dans un processus qui n'est pas sans similitudes avec celui que nous poursuivons ici aujourd'hui. Je suis prêt à parier que ce document à Ottawa est couvert d'une couche de poussière encore plus épaisse que celle que j'ai fait disparaître du mien en soufflant dessus. Je me demande bien où aboutira le rapport des travaux d'aujourd'hui.
Pour moi, ce rapport saisit l'essence même des vrais problèmes qui affligent le secteur. Voici quelques-uns des points mis en évidence. Il est nécessaire d'équilibrer l'emprise sur le marché entre les agriculteurs et l'agro-entreprise; cette nécessité revient partout dans le document, au début, au milieu et à la fin. Le document aborde la question de l'endettement agricole et il présente des statistiques: en 1994, il était de 23,5 milliards de dollars, contre 48,9 milliards de dollars en 2004, ce qui signifie qu'il a plus que doublé en dix ans. En 2010, il dépasse déjà la barre des 60 milliards de dollars. C'est une bombe à retardement dont les proportions atteignent probablement celles du problème des jeunes agriculteurs.
Le rapport fait état de la part restreinte du prix de vente au détail qui revient à l'agriculteur et il souligne la nécessité de faire ressortir ce point chaque fois que la possibilité se présente. C'est une tâche que les producteurs de la Keystone Agricultural Producers ont pris sur eux d'accomplir et pour moi, cela devrait se faire à beaucoup plus grande échelle. Le rapport reconnaît et salue les bienfaits qu'apporte la Commission canadienne du blé aux agriculteurs. Pour une raison inconnue, l'actuel gouvernement se propose de démanteler cette institution alors même qu'un document gouvernemental — je parle bien de ce document-ci — évoque des travaux de recherche indépendants et souligne les bienfaits que procure la Commission. À un moment où les agriculteurs doivent unir leurs efforts pour avoir plus de poids, le ministre Ritz les divisent. Il existe une vaste gamme de moyens pour venir en aide aux agriculteurs, des moyens auxquels tous les agriculteurs pourraient se rallier, et quelle que soit votre position en tant qu'agriculteur dans le débat sur la Commission canadienne du blé, moi, ce qui m'inquiète le plus, c'est de voir comment le gouvernement peut piétiner nos droits démocratiques et nous priver de notre choix.
Pour parler encore une fois du Bureau de la concurrence, j'aimerais citer une recommandation tirée du rapport:
Restructurer le Bureau de la concurrence en lui confiant le mandat d'examiner les répercussions de fusions actuelles et proposées sur les producteurs primaires.
Alors où est le besoin de reconstruction? N'est-ce pas exactement ce qu'ils étaient censés faire dès le départ? J'aimerais demander au comité de nous faire part plus tard — je sais que cela a été fait à petite échelle ici même ce matin — ce qu'est exactement le mandat du Bureau de la concurrence actuellement. Et j'ajouterais: quel était-il auparavant? Y a-t-il eu un changement au niveau du processus? Je suis vraiment curieux de le savoir.
Il importe que vous compreniez que je ne suis pas en train de blâmer seulement les conservateurs pour certaines des choses qu'ils font. Les libéraux ont passé plus de temps à la barre du pays au cours des 25 dernières années que les conservateurs et je ne pense pas que leurs politiques agricoles nous étaient tellement plus favorables non plus.
Je vais maintenant changer de sujet et aborder la question des solutions.
Très bien, merci; désolé.
Je crois qu'il nous faut d'abord consulter les organisations agricoles pour ensuite définir une vision de l'agriculture en veillant à ce qu'elle soit publique et transparente. Il faudrait mesurer toutes les politiques futures à l'aune de cette vision. La nouvelle politique que nous voulons adopter nous rapproche-t-elle ou nous éloigne-t-elle de la vision? Ensuite j'adopterais la politique dans la mesure où elle placerait l'intérêt des agriculteurs devant les intérêts corporatistes.
Le rapport de Wayne Easter renferme beaucoup d'autres recommandations qui sont à mon avis fort viables. Il faudra du courage et de la détermination pour les mettre en oeuvre. Plus on attend avant de saisir le taureau par les cornes, plus le coût des solutions augmente. La dernière chose dont nous ayons besoin, c'est bien d'une solution molle qui ne s'attaquerait qu'aux symptômes ou des programmes sous-financés auxquels nous avons été habitués. Attaquons-nous au véritable problème, celui du rendement net pour les agriculteurs, et les symptômes tels que le fléchissement du nombre des jeunes agriculteurs disparaîtront d'eux-mêmes.
Merci.
Merci.
Je vous ai entendu dire que vous étiez originaire de Deloraine. Vous saluerez mon bon ami Vern Gilson de ma part.
Ça fait des années que je ne l'ai pas vu.
Ian Wishart, de Keystone Agricultural Producers, vous avez de cinq à sept minutes, sans dépasser, s'il vous plaît.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Visiblement, je ne suis pas un jeune agriculteur. Nous avions la ferme intention d'envoyer un jeune agriculteur présenter cet exposé mais il a refusé d'abandonner son semoir pneumatique, ce qui était sans doute une sage décision.
Vous avez déjà entendu au moins un de nos jeunes agriculteurs plus tôt aujourd'hui. Kyle Foster est lui aussi membre de notre organisation. Notre organisation compte un groupe très solide et très actif de jeunes agriculteurs et nous nous efforçons d'obtenir leur concours dans toutes nos activités d'élaboration de politiques. Notre exécutif actuel de 12 membres compte quatre jeunes agriculteurs. C'est signe que nous voulons leur donner beaucoup de place.
Notre principale préoccupation, je crois, est le fléchissement de la population agricole en général, mais plus particulièrement la baisse marquée du nombre des jeunes agriculteurs. Il nous faut attirer des jeunes dans le secteur par tous les moyens possibles. Ce sera tantôt à travers les exploitations agricoles existantes et les fermes de style conventionnel, tantôt par des modèles d'exploitation entièrement nouveaux.
L'un des facteurs qui jouent contre l'entrée d'un nouveau venu dans le secteur — je ne parle pas seulement de jeunes agriculteurs issus de fermes existantes, mais de nouveaux agriculteurs venant de l'extérieur du secteur — est l'image très négative que l'on s'en fait et le message également très négatif qui en émane. Les organisations agricoles telles que la nôtre s'efforcent d'être attentives aux histoires à succès qui marquent le secteur et de les faire connaître au public.
Il est clair qu'il y a des problèmes de limitation et d'équité. Se lancer en agriculture coûte très cher. Les programmes dont nous disposons — et il en existe plusieurs au Manitoba qui sont offerts par l'intermédiaire des services agricoles de la province — présentent de sévères limitations au niveau de l'équité, ce qui rend difficile leur application.
Le secteur de la gestion du risque d'entreprise présente certainement des problèmes. Certains ont déjà été mentionnés, tel que celui de l'absence du dépôt de garantie dans le programme Agri-stabilité. Il en va de même dans le cas de la protection offerte par l'assurance-récolte aux jeunes agriculteurs et aux nouveaux venus dans le secteur. Et c'est vrai également dans le cas d'Agri-investissement. On n'a tout simplement pas les chiffres qu'il faut pour démarrer. La clientèle cible est constituée des nouveaux venus les plus vulnérables et c'est à eux qu'on accorde le moins de protection. Nos politiques sont visiblement mal ciblées.
Il faut que certains programmes soient mis en place et nous allons en proposer quelques-uns. De concert avec notre groupe de jeunes agriculteurs, nous avons tracé les grandes lignes d'un programme organisé essentiellement selon trois axes: le développement du leadership et des compétences, des occasions de mentorat sous une forme quelconque qui ferait appel à l'expérience accumulée dans l'industrie et, naturellement, permettre un certain accès au capital.
L'un des grands changements, toutefois, est celui de la rentabilité du secteur. Cette considération a été présente tout au long du processus. Nous avons assisté à une importante perturbation des chaînes de valeur qui s'est soldée par un sérieux manque de rentabilité. Vos propres données sur le revenu agricole, qui viennent de sortir cette semaine, confirmeront largement cette affirmation.
Il y a donc une baisse importante du revenu agricole ce qui causera au cours de la prochaine année une crise qui est déjà en cours de formation. Cette donnée est encore plus évidente dans les secteurs à valeur ajoutée, qui ont connu une baisse de revenu encore plus considérable. De toute évidence, la situation a changé du tout au tout.
M. Black a abordé la question de la part qui revient à l'agriculteur. Un document que nous suivons depuis un certain temps révèle l'existence d'une baisse continue de la part du dollar dépensé par les consommateurs qui revient à l'agriculteur. C'est vraiment là que le bât blesse: quel que soit le gain d'efficacité que nous ayons réalisé en tant qu'agriculteurs, c'est quelqu'un d'autre, dans le secteur, qui en profite. En fait, nous avons subventionné l'inefficacité dans le secteur de la chaîne de valeur. C'est là quelque chose que nous ne pourrons nous permettre de faire dans l'avenir.
Pour en revenir à notre document conceptuel, que nous n'avons pas encore parachevé... Nous en sommes à l'étape de l'élaboration; je me contenterai donc de vous communiquer quelques-uns des points abordés. Nous l'avons intitulé « AgriStart » pour nous conformer aux modèles d'appellation actuellement utilisés dans le lexique du jour.
Au chapitre du développement du leadership et des compétences, nous croyons qu'il faut commencer par un programme de subventions limitées à environ 10 000 $ par personne pendant les trois premières années. Les gens seront dûment formés aux compétences requises aujourd'hui pour administrer une ferme de grande taille. Le programme visera à faciliter l'accès aux outils et aux ressources de planification, que ce soit en matière de planification financière, de planification d'affaires, de mise en marché ou autre.
Il sera assorti d'un volet de formation au leadership parce que je pense que la communauté agricole de l'avenir aura besoin de leaders et c'est d'elle qu'ils devront provenir. Il comportera également un programme de mentorat appliqué. Nous en reparlerons un peu dans un instant. Et il y aura une participation accrue des organisations agricoles parce qu'il nous faudra parler d'une voix forte dans l'avenir.
Dans le volet programmes de stage ou de mentorat, nous offrirons de la formation sur place, dans les fermes, aux personnes intéressées, ainsi que de la formation pratique dans le domaine de la production et de la gestion. L'employeur bénéficiera d'un encouragement fiscal basé sur le nombre d'heures de mentorat qu'il fera et l'employé se verrait verser un pourcentage par le producteur, auquel s'ajouterait un supplément prévu au programme de développement du leadership.
Alors, ce serait comme dans d'autres secteurs. Nous diviserions les coûts rattachés à l'embauche d'une nouvelle personne dans le milieu de travail, cette personne obtiendrait une formation, et le propriétaire de l'exploitation en profiterait également.
Pour les participants non liés au milieu agricole — les personnes n'ayant pas d'expérience actuelle dans le domaine agricole ou les personnes non liées à l'agriculture —, un programme appliqué serait nécessaire pour tout autre prêt ou tout ce qui s'appliquerait à d'autres programmes. Il faudrait que les fermes qui offrent l'encadrement reçoivent une approbation pour chaque produit, ce qui serait fait par des organisations de produits provinciales. Les exploitants de fermes laitières en sont un exemple.
Nous présentons aussi un concept que nous appelons AgriFoundation. Le financement pour AgriStart serait offert à de faibles taux d'intérêt, même de 0 p. 100. Ce financement pourrait provenir de sociétés comme Financement agricole Canada, ou bien nous pourrions créer un bassin d'agriculteurs retraités voulant investir des sommes dans ce projet — mais peut-être que ce ne serait pas aussi direct. Des garanties seraient peut-être nécessaires à cet égard.
Il faudrait que les participants non liés au milieu agricole s'inscrivent à un programme de stage ou de mentorat appliqué; nous saurions ainsi qu'ils ont l'expérience. Nous offririons aussi des incitatifs financiers pour ceux qui utilisent les énergies de remplacement et les technologies vertes. Nous trouvons qu'il est franchement très difficile d'amener les nouveaux agriculteurs, les jeunes agriculteurs, ou même les agriculteurs qui ont un peu d'expérience à utiliser certaines de ces nouvelles technologies vertes, en particulier les énergies de remplacement. Peut-être que nous devrons faire venir ces gens d'ailleurs afin que les premiers à le faire aient les outils nécessaires.
C'est notre document de réflexion, et je serai heureux de répondre à vos questions.
Merci beaucoup, Ian.
Passons maintenant à M. Ted Eastley et à Mme Gwen Donohoe du Conseil d'adaptation rurale du Manitoba.
Si je comprends bien, madame Donohoe, vous allez prendre la parole. Vous avez de cinq à sept minutes.
Merci.
Mlle Gwen Donohoe (directrice de la jeunesse, Conseil d'adaptation rurale du Manitoba):
Merci. Bonjour à vous mesdames et messieurs membres du comité, et du personnel du comité, et au public.
Je m'appelle Gwen Donohoe et je suis la directrice de la jeunesse du Conseil d'adaptation rurale du Manitoba. À ma droite se trouve Ted Eastley, notre directeur exécutif.
En plus d'être la directrice de la jeunesse du Conseil d'adaptation rurale du Manitoba, aussi appelé le CARM, je suis une jeune productrice et je termine une maîtrise ès sciences à l'Université du Manitoba. Je possède et gère un troupeau de vaches de boucherie et je participe à la gestion et à l'exploitation quotidiennes de la ferme mixte familiale qui compte une exploitation de naissage commerciale de 300 têtes, ainsi que des cultures céréalières et oléagineuses. Nous sommes situés près de Le Pas, au Manitoba, à 600 kilomètres au nord-ouest de Winnipeg. Je suis également vice-présidente de mon district de conservation local.
C'est très encourageant pour de jeunes producteurs comme moi de savoir que vous êtes intéressés à entendre ce que nous avons à dire au sujet de l'avenir des jeunes agriculteurs et de l'industrie agricole au Canada. Je suis ici aujourd'hui pour vous dire comment vous pouvez m'aider à assurer l'avenir de l'industrie agroalimentaire canadienne, parce que je crois que la solution se trouve ici, avec les jeunes producteurs qui se trouvent dans cette salle. Nous représentons la solution que vous cherchez. Nous avons seulement besoin d'appui et de possibilités pour vous offrir concrètement cette solution.
Le comité des ressources humaines et de l'infrastructure du CARM, présidé par un jeune producteur nommé Colin Hudon, reconnaît qu'il faut trouver des solutions, trouver une façon d'attirer et de retenir les jeunes agriculteurs. Cela a donné lieu à la création du projet des collectivités rurales vibrantes, une initiative lancée par un jeune producteur qui a pour but de cibler les problèmes et de trouver des solutions pour la production agricole rurale et la planification de la relève dans les collectivités, et ce, comme l'envisagent les jeunes producteurs.
Le document de travail qui se trouve dans notre mémoire a aussi été élaboré par le comité comme moyen de favoriser la discussion dans le but de vous présenter des solutions. C'est de cela que je parlerai aujourd'hui.
Une réunion comme celle d'aujourd'hui est un premier pas pour nous aider à trouver des solutions pour l'agriculture, et la solution réside dans le fait de partager de l'information. Mais nous devons nous assurer que le processus ne s'arrête pas ici. En tant que jeunes producteurs, nous devons avoir plus d'occasions de vous communiquer nos idées et nos solutions parce que nous avons des idées différentes, pas seulement des vôtres, mais aussi de celles des agriculteurs d'expérience de l'industrie. Et nous avons notre propre vision de l'avenir de l'agriculture.
Comme industrie, nous devons aussi partager plus de renseignements avec nos consommateurs et avec la société canadienne — il est possible que nous ayons failli à notre tâche sur ce point. Nous devons fournir des renseignements aux consommateurs afin qu'ils puissent prendre la décision d'acheter des aliments sains, sûrs et durables sur le plan de l'environnement, avec ce qu'il nous plaît d'appeler la « confiance des consommateurs ».
Ces mesures sont nécessaires pour promouvoir le caractère positif, crucial et florissant de l'industrie agricole et du métier d'agriculteur de manière positive, importante et fructueuse. Je suis lasse de me faire dire que je suis trop intelligente ou trop instruite pour retourner sur la ferme familiale et que je suis stupide de le faire. Si on considère les biens et les services publics importants que je vous offre chaque jour, vous devriez m'encourager à y retourner.
Le fait de partager des renseignements peut aussi servir à éliminer les obstacles intergouvernementaux et interprovinciaux à l'égard du changement qui existent en ce moment. Il faut éliminer le cloisonnement en ce qui a trait aux questions liées à l'agriculture. L'agriculture ne se résume pas à l'exploitation agricole, elle englobe également les collectivités rurales, le transport, la salubrité des aliments, le mode de vie sain, le développement économique et l'environnement. Ce sont des questions prioritaires pour tous les Canadiens, et l'agriculture et les jeunes producteurs peuvent offrir des solutions à tous.
Les ministères fédéraux et les provinces doivent reconnaître cette interdépendance, et nous devons travailler ensemble afin de pouvoir créer une industrie stable sur le plan financier et maintenir des collectivités rurales vibrantes.
Les jeunes producteurs doivent avoir les compétences et l'appui nécessaires pour offrir ces solutions par le biais de programmes visant à perfectionner leurs compétences en leadership, à développer leur confiance en eux et en l'industrie, et à offrir de l'encadrement — tout cela est possible à la ferme. Nous possédons peut-être les solutions, mais nous avons besoin de l'appui du gouvernement afin de devenir des leaders et des fournisseurs de solutions.
Ces mesures ont été ciblées dans le document de discussions sur les collectivités rurales. Parmi les autres mesures que nous avons ciblées se trouvent des programmes visant à encourager la diversification et les activités à valeur ajoutée dans les collectivités rurales et à nous aider à trouver des secteurs présentant des possibilités rurales qui ne sont pas liées à l'agriculture, comme le tourisme ou les industries environnementales et des télécommunications ainsi que la transformation à valeur ajoutée.
Nous avons besoin d'un appui financier, mais nous avons besoin d'une forme d'appui différente. Il nous faut un système d'appui qui nous permettra d'avoir accès à des capitaux et à du crédit à court terme et qui reconnaîtra l'importance de l'agriculture dans le maintien d'un environnement sain. Il faut que ce système appuie les activités agricoles actuelles qui permettent à tous d'avoir de l'eau potable et de l'air pur, et qui maintiennent les fonctions des écosystèmes. Cet appui financier doit encourager les initiatives risquées au moyen de l'atténuation des risques, contrairement à l'approche actuelle fondée sur l'aversion pour le risque et le statu quo.
Ces solutions doivent être offertes de manière opportune, transparente et efficace et ne doivent pas être rattachées à des objectifs bureaucratiques et politiques afin d'assurer notre stabilité à long terme. Ces organismes d'exécution existent déjà sous la forme d'organismes sans but lucratif ou autonomes, comme le CARM, et le programme des districts de conservation du Manitoba. Nous devons en tirer profit. Les programmes offerts peuvent transformer un financement national en une réalité régionale.
Voici mon passage préféré du document de discussions:
Les entrepreneurs ruraux ne veulent pas passer régulièrement leur temps à tenter d'obtenir du soutien en vue de maintenir leur niveau d'existence. Ils souhaitent qu'on leur fournisse les outils et un soutien global et que l'on ait confiance qu'ils peuvent avoir une propriété en assumant leur propre destinée plutôt qu'en ayant constamment quelqu'un qui les surveille (« la génération hélicoptère ») pour les protéger des erreurs.
En d'autres mots, donnez-nous des responsabilités et dites-nous comment faire preuve de leadership, et nous agirons.
Nous croyons que ces outils font partie des mesures ciblées par le comité des ressources humaines et de l'infrastructure. Nous croyons qu'ils sont nécessaires afin que les jeunes producteurs puissent offrir les solutions visant à améliorer la rentabilité de l'agriculture et qu'ils puissent rester sur leur ferme.
J'espère que nous pourrons poursuivre ce processus de partage de renseignements et que nous pourrons établir des mesures raisonnables, rapides, mesurables et responsables pour assurer la survie et la croissance futures des collectivités rurales et agricoles essentielles.
Merci.
Gwen, vous avez dit que vous étiez lasse de vous faire dire de ne pas retourner sur la ferme. Vous vous faites dire cela par qui?
Par des membres de ma famille, de la collectivité et du milieu universitaire.
Ces personnes nous encouragent à opter pour un emploi rémunéré régulier.
Merci. Je voulais simplement clarifier ce point.
Nous allons maintenant passer aux questions.
Monsieur Valeriote, vous avez cinq minutes.
Avant tout, j'aimerais tous vous remercier d'avoir pris le temps de nous informer. Ce qui est important, c'est que ce que nous apprenons de vous mène à l'élaboration de politiques et de lois. Ce n'est pas simplement un exercice de relations publiques des politiciens pour vous donner l'impression qu'ils sont à l'écoute, alors qu'ils n'ont pas l'intention de faire quoi que ce soit à cet égard.
Gwen, nous avons entendu la même chose de la part d'autres personnes: les jeunes agriculteurs sont découragés par leurs parents de travailler sur une ferme. J'ai entendu des déclarations très convaincantes au cours de la dernière semaine.
Je viens d'un milieu où l'entreprise occupe une place importante, mais je suis maintenant convaincu que nous vivons dans le déni si nous ne pensons pas que ces programmes sont conçus pour créer, en bout de ligne, des monopoles de plus en plus importants. Nous allons dans cette direction et, comme il a été dit l'autre jour, le Canada rural sera éventuellement déserté. Nous devons changer les choses, comme Fred l'a dit, en s'attaquant à la source du problème, pas simplement en essayant de traiter les symptômes.
La Loi sur la concurrence vise à interdire aux entreprises de collaborer et de fixer les prix. Elle ne vise pas à assurer la survie du monopole dans le secteur. Ce n'est pas comme aux États-Unis.
Je me demande si vous pensez — je m'adresse à ceux qui souhaitent prendre la parole — que les grandes sociétés, les transformateurs et les épiciers contrôlent les recettes que reçoivent les producteurs? Croyez-vous que la situation est telle que la Loi sur la concurrence doit être modifiée pour éliminer ces monopoles et démanteler les deux ou trois grandes sociétés qui contrôlent tout le système?
Est-ce que quelqu'un aimerait faire un commentaire là-dessus?
Je vois Ian et Fred... vous tous.
D'accord, allez-y.
Merci beaucoup.
Nous avons effectivement eu affaire directement au Bureau de la concurrence. Il y a trois ans, nous avons fait appel à Pricewaterhouse pour mener une étude sur la concurrence des prix des fertilisants en comparant tour à tour les prix du Manitoba et ceux du Dakota du Nord. Nous avons constaté une différence de 60 p. 100, qui était à notre désavantage, évidemment.
C'était une étude très sérieuse. Nous l'avons confiée à une importante société d'experts-conseils afin de nous assurer qu'elle ne serait pas mise en doute. Nous avons tenté d'amener les gens du Bureau de la concurrence à s'y intéresser. Ils nous ont dit grosso modo que la seule façon de les amener à intervenir serait de trouver une personne impliquée dans le commerce qui serait disposée à témoigner pour dénoncer la collusion. Nous leur avons fourni beaucoup de renseignements de l'extérieur. Nous avons continué à surveiller les prix, et ils ont été nivelés encore davantage, simplement en raison de la publicité créée par ce genre de programme. Mais ils n'étaient pas prêts à prendre aucune mesure à moins que nous fassions pratiquement tout le travail à leur place, et que nous le leur remettions en disant: « Voilà, c'est fait ».
Moi aussi j'ai eu affaire au Bureau de la concurrence. Une fois, c'était dans le contexte de la fusion dans l'industrie de l'abattage de porcs. À cette époque, le Bureau de la concurrence, très perspicace, avait conclu qu'il y avait évidemment de la concurrence au Manitoba, parce que nous pouvions livrer nos porcs à Sioux Falls, au Dakota du Sud, qui est à environ 800 milles environ. C'était leur définition de concurrence dans ce cas. J'ai également assisté à des fusions dans l'industrie céréalière, et j'ai observé les décisions là aussi.
Pour bien évaluer le Bureau de la concurrence, il faut tenir compte du contexte. Quand on entend, à l'occasion, de beaux discours concernant son projet d'éliminer les restrictions sur l'investissement étranger, ça veut plutôt dire sur la concentration; il veut éliminer les obstacles à la concentration des capitaux.
Nous devons aussi porter une grande attention à la capacité des gens de la communauté agricole à critiquer ce qui se passe, parce qu'ils en viennent ainsi à critiquer parfois ceux-là mêmes qui leur accordent leur crédit commercial ou leur fournissent leurs importations, ou encore ceux à qui ils finiront par livrer leurs produits.
Cette situation ne devrait pas exister. Elle est très malsaine.
Tel que le bureau fonctionne aujourd'hui, il n'existe que pour les apparences.
Merci, monsieur le président.
L'exemple qui me vient à l'esprit quand je pense à la concurrence est le programme pour les bovins d'engraissement annoncé il y a quelque temps, après l'ESB, à environ 2 $ le poids de 100 livres; je crois que c'était probablement trois ou quatre ans après l'ESB. Un jour ou deux après l'annonce du programme, le prix au marché aux enchères avait diminué du même montant.
Si ça ce n'est pas un fait frappant, alors je me demande s'il en est. C'est un exemple parfait de concurrence.
J'ai beaucoup de difficulté à comprendre comment je peux conduire un boeuf à un abattoir local qui me demande 440 $ pour l'abattage. Je le prends et je le vends à 30 ou 40 p. 100 de rabais et je me retrouve avec plus d'argent dans mes poches. C'est seulement...
Ça devrait être la façon la moins efficace de procéder. On les tue pour 150 $ dans l'Ouest. Mais où va tout cet argent? Et puis ils sont vendus au prix de détail, et non à 40 p. 100 de rabais.
Si vous regardez la composition d'un ou des deux principaux abattoirs qui subsistent dans l'Ouest canadien, vous constaterez que la même famille est propriétaire d'à peu près tous les types d'entreprises imaginables, et même de marchés aux enchères. Je ne sais pas à quel point elle est active du côté des épiceries, mais il y a beaucoup de marchés aux enchères sur sa liste de propriétés.
L'autre chose que je voulais mentionner est que quelqu'un a affirmé que le mandat du Bureau de la concurrence était de veiller à ce qu'il n'y ait pas de collusion des prix. Eh bien, le bureau n'a-t-il pas fait enquête il y a un an ou deux sur la présence d'algues dans les tee-shirts de Lululemon? Quel est le rapport?
[Français]
Madame Donohoe, je trouve ce que vous avez dit profondément attristant et choquant. Que votre famille ou votre entourage vous dise qu'il est difficile de faire de l'agriculture de nos jours et que, compte tenu des études que vous avez faites, vous pourriez peut-être changer de domaine, c'est un peu normal. Dans une famille, on tient souvent ce genre de discussion. Par contre, quand vous dites que des gens du milieu de l'éducation ou de la communauté vous incitent à faire autre chose que de l'agriculture, je suis estomaqué. C'est un des métiers les plus nobles qui soit. Les agriculteurs nourrissent le monde. Ce n'est pas compliqué: se nourrir, se vêtir et se loger sont les éléments les plus importants de la survie humaine.
On peut décider, en tant que pays, société ou collectivité, que la nourriture va venir d'ailleurs. C'est un choix de société. Par contre, ceux qui prennent cette décision pourraient bien se retrouver face à une pénurie de certains aliments ou à une fluctuation de prix absolument épouvantable. Il n'y aura plus de gestion de l'offre. Ces gens ne pourront plus acheter et offrir à leurs enfants du lait de la Nouvelle-Zélande ou des États-Unis parce que le prix aura fluctué à cause de la Bourse de Chicago. À ce moment-là, ils iront vous voir pour vous faire part de leurs besoins et vous diront qu'en fin de compte, faire de l'agriculture aurait été un bon choix.
Pour ma part, je trouve qu'il faut du courage pour décider, après avoir fait des études, de faire de l'agriculture, malgré le contexte actuel et les écueils qui risquent de survenir. Je vous remercie d'avoir pris cette décision. Tous les jeunes que nous avons entendus nous ont dit que ce n'était pas facile. Certains ont décidé de quitter ce domaine. D'autres nous ont dit qu'ils le feraient si les choses n'allaient pas mieux d'ici à deux, trois, quatre ou cinq ans. C'est un message que nous, en tant que parlementaires, devons entendre. Nous devons aussi faire en sorte que le gouvernement s'ouvre les yeux, se réveille. C'est un peu ce qu'on fait dans le cadre de ces séances. La bureaucratie n'avance pas vite, c'est certain, mais on essaie de pousser la machine. Ce n'est jamais aussi rapide qu'on le voudrait, mais il faut dire qu'on a réussi à accomplir certains progrès. Des programmes ont été mis en oeuvre, et c'est grâce à vous qui venez témoigner. Il est très important que vous persévériez. Je tenais à vous le dire.
Dans une partie du document très intéressant que vous nous avez présenté, qui est intitulée « Appel à l'action », votre organisation, que je ne connaissais pas — comme vous l'avez sans doute constaté, je viens du Québec —, suggère ceci:
6. Fournir un soutien financier afin d'encourager, d'explorer et de nourrir les entreprises comportant des risques élevés en utilisant une approche d'atténuation du risque plutôt qu'une approche de réduction ou d'évitement du risque.
Pourriez-vous nous donner des détails sur ce que vous entendez par là et nous expliquer quelle est la nuance entre une approche d'atténuation du risque et une approche de réduction ou d'évitement du risque?
[Traduction]
D'accord, mets-moi dans l'embarras, Gwen.
Des voix: Oh, oh!
M. Ted Eastley: Notre organisation reçoit du financement du gouvernement fédéral. Nous appuyons la mise en oeuvre de nombreux projets nouveaux et innovateurs qui repoussent les limites et incitent au risque, mais de façon acceptable. Je crois que notre organisation, nos directeurs et nos collectivités rurales dynamiques font valoir la nécessité de mettre en place des mesures d'atténuation du risque sans qu'elles soient des barrières. Il faut laisser ces jeunes gens prendre des risques et nous suggérer des options et des discussions quant aux moyens d'éviter les catastrophes, mais en même temps, bon nombre des programmes qui sont mis en oeuvre découragent fortement la prise de risques. Nous devons encourager le fait que des idées nouvelles et innovatrices seront mises de l'avant par nos jeunes, et par certains de nos gens expérimentés également. Je ne veux pas minimiser les capacités des gens de ma génération en cette matière, mais je crois que nous devons susciter de nouvelles occasions de prendre des risques et mettre en place un filet de sécurité pour les cas où la réussite n'est pas totale. Nous n'espérons pas une réussite totale chaque fois; nous en offrons seulement la possibilité.
C'est de là que nous partons.
Je vais répéter les propos de mes collègues et vous dire merci beaucoup d'avoir pris le temps de venir ici.
J'ai une question très brève pour vous, Fred, avant de passer à autre chose. Vous avez parlé de réduction des intrants, que nous devrions nous tourner vers cette solution. Je sais par exemple que ma cousine et son mari, qui exploitent une vaste propriété agricole au nord de Saskatoon, se sont mis à l'agriculture biologique et ont économisé 120 000 $ en produits chimiques la première année. Mais ce n'est pas tout le monde qui est dans le biologique. Ce n'est pas tout le monde qui veut prendre cette direction. Je me demande ce que vous suggérez exactement et comment vous envisagez la réduction des intrants en agriculture traditionnelle.
Je vais poser ma deuxième question à Luke, et peut-être que d'autres voudront commenter. Vous avez mentionné la catastrophe dans l'industrie du lin causée par le lin génétiquement modifié Triffid. Vous êtes probablement au courant du projet de loi C-474, mon projet de loi d'initiative parlementaire, qui envisage une évaluation des risques économiques pour les agriculteurs avant l'introduction de la luzerne et du blé génétiquement modifié. Il y a eu des contestations et des critiques à l'effet que ce projet de loi freine l'innovation et qu'il n'a pas de fondement scientifique, donc j'aimerais entendre vos commentaires et vos préoccupations, et peut-être des suggestions de chacun de vous à ce sujet, parce que nous aimerions le mettre de l'avant.
Fred, peut-être que vous pourriez donner une réponse brève, puis nous pourrons passer à l'autre sujet.
Quand j'ai parlé de la réduction des intrants agricoles, j'avais en tête certains des travaux très intéressants effectués par Martin Entz à l'Université du Manitoba, qui cherche à atteindre cet objectif en capturant de l'azote dans l'atmosphère, etc. Les rendements obtenus se sont avérés aussi bons, sinon meilleurs que ceux de l'agriculture traditionnelle. Ce type d'agriculture libère également l'agriculteur de sa dépendance aux fournisseurs d'intrants.
Malheureusement, compte tenu du niveau de compétence nécessaire, le processus d'apprentissage est ardu. Il s'effectue généralement au moyen d'un programme de mentorat.
Je crois qu'en tant que société, nous devrions investir davantage afin d'intégrer cela dans le programme d'enseignement officiel, à plus forte raison pour protéger la société avant que le pic pétrolier prenne fin.
Tout d'abord, j'aimerais dire que les mathématiques sont une science, et que quand vous examinez toute cette science, vous devriez tenir compte des mathématiques aussi. La recherche ne nous aide pas si nous détruisons nos marchés; la recherche ne sert à rien si nous ne pouvons pas vendre nos produits. Nos tentatives pour forcer ces marchés à prendre nos produits n'ont pas été très fructueuses. Après tous les conflits que nous avons eus, je n'ai jamais constaté de très bons résultats.
J'aimerais aussi faire un commentaire à ce sujet.
J'ai omis de mentionner dans mon exposé tout à l'heure que je suis producteur biologique, et que l'arrivée de produits de canola génétiquement modifiés m'a enlevé la possibilité de faire pousser du canola biologique, en raison des transferts génétiques par la voie des airs ou par je ne sais quel autre moyen. L'organisme de certification ne peut plus me garantir que mes champs ne seront pas contaminés, donc je n'ai pas l'autorisation d'en faire pousser.
Un spécialiste étranger m'a dit que si la luzerne génétiquement modifiée était introduite, le vent transporterait le pollen sur 10 milles. Comment peut-on raisonnablement s'attendre à pouvoir limiter à 10 milles la distance de propagation de ces nouvelles technologies? Ça va détruire l'industrie biologique, parce que la luzerne se retrouve dans tous les aspects de l'industrie biologique, soit comme un produit de consommation ou comme amendement pour le sol. Je produis également du lait biologique, donc je ne pourrai pas nourrir mes vaches avec ça. Ça va tout simplement détruire l'industrie biologique en entier, et dans quel but? Ça va en faire un peu plus dans les poches de Monsanto.
Donc je crois qu'il est essentiel qu'on fasse passer les agriculteurs en premier, y compris dans le cadre d'autres politiques qui sont en progression. C'est ce qui nous permettra de renverser la vapeur, une réforme de nos priorités. Plutôt que de s'occuper d'abord de ce que veulent les grandes entreprises puis de laisser les restants aux agriculteurs, s'il y en a, je crois qu'il faut inverser la situation et s'occuper en premier lieu des priorités des agriculteurs.
Merci.
J'allais simplement féliciter M. Atamanenko pour son projet de loi. J'étais très heureuse quand il a été rédigé, très heureuse quand il a été présenté, et extrêmement soulagée quand il a été adopté en deuxième lecture. J'espère qu'il sera maintenu par le comité
Je crois que ce sera un grand pas en avant pour les producteurs si nous pouvons l'intégrer au système de réglementation sur les semences.
Merci.
Je tiens vraiment à commencer en mettant le doigt sur un élément important. À mon avis, il semble qu'on ait une idée fausse de la position du gouvernement sur la Commission canadienne du blé.
J'aimerais préciser que notre position consiste à offrir aux agriculteurs de l'Ouest canadien — les producteurs de blé et d'orge — le choix en matière de commercialisation: rien de plus, rien de moins. Par conséquent, si un agriculteur choisit de vendre ses produits à la Commission canadienne du blé, nous appuyons ce choix. Si un agriculteur choisit de vendre ses produits d'une autre manière, par lui-même, en commercialisant son propre produit, nous appuyons ce choix. C'est donner le choix aux agriculteurs qui importe.
C'est un des facteurs très importants à prendre en considération pour assurer l'avenir de l'agriculture et pour réussir à attirer de jeunes agriculteurs dans l'industrie. Je crois que l'agriculture d'aujourd'hui est très différente pour des personnes comme Gwen et Luke, qui commencent dans le domaine. Aujourd'hui, l'agriculture moderne diffère beaucoup de l'agriculture pratiquée par la génération de leurs parents ou de leurs grands-parents.
Nous entendons cela souvent quand nous nous déplaçons dans le pays. Il semble que l'agriculture — avec raison — devient plus qu'un simple travail physique qui se résume à planter des semences et à faire des profits. Actuellement, pour qu'une ferme soit rentable, il faut la gérer comme une entreprise.
Je pense que la plupart des jeunes agriculteurs en sont conscients et que c'est la manière dont ils veulent aborder l'agriculture. Ils désirent gérer la ferme comme une entreprise. Ce sont des gens instruits. Ce sont des gens intelligents. Ce sont parmi nos jeunes gens les plus brillants et ils veulent gérer leurs fermes comme une entreprise.
Ils veulent pouvoir avoir le choix de commercialiser leurs produits. Ils ont ces options avec Internet, grâce à toutes les relations qui peuvent être établies de nos jours — pas seulement partout au Canada et en Amérique du Nord, mais dans le monde entier. Les agriculteurs veulent que ces marchés leur soient ouverts. Que ce soit grâce au rôle qu'a joué notre gouvernement dans l'accès aux marchés partout dans le monde pour divers produits agricoles, grâce aux accords de libre-échange auxquels nous travaillons, grâce à la possibilité d'avoir le choix de commercialiser ses produits par des moyens comme le choix de modes de commercialisation pour les producteurs de blé et d'orge.
C'est ce que les jeunes agriculteurs me disent. Ils veulent pouvoir considérer leurs fermes comme une entreprise. Ils veulent pouvoir faire leurs propres choix. Je crois qu'il est important de faire valoir ce point. C'est étroitement lié à...
J'aimerais demander à Gwen et à Luke, nos deux plus jeunes agriculteurs dans la salle aujourd'hui, de formuler des commentaires sur le sujet. Ça reprend un peu ce que vous disiez, Gwen, à propos de la façon dont les gens méprisent la décision que vous avez prise de continuer en agriculture et de travailler à la ferme. Un commentaire du genre « Pourquoi donc voudrais-tu faire cela? ». À mon avis, c'est attribuable à une réelle méconnaissance de l'agriculture au sein de la population. On entend cela tout le temps. Il faut trouver un moyen de remédier à cela. Il faut montrer aux gens qu'une ferme est une entreprise qui peut être rentable, et dans laquelle une personne instruite qui a un bon sens des affaires peut vouloir jouer un rôle. Comment pouvons-nous alors changer cette perception?
Il n'y a pas que cela, mais il y a une autre idée fausse qui est très courante au sein de la population. Par exemple, je représente une circonscription en Alberta qui est en grande partie rurale. Toutes les villes de ma circonscription reposent grandement sur l'agriculture. Elles sont nées de l'agriculture. Ma circonscription touche à la ville de Calgary au nord et à l'ouest. Il n'est donc pas nécessaire d'aller très loin. En fait, vous pouvez conduire entre 15 et 20 minutes à partir de la ferme qui borde ma circonscription jusqu'au centre-ville de Calgary. Même si vous n'êtes qu'à 15 ou 20 minutes des fermes qui entourent la ville, la plupart des gens, lorsque vous leur demandez d'où proviennent leurs aliments, répondent qu'ils viennent de l'épicerie. Il est évident qu'il faut agir pour changer cette perception.
Tout d'abord, il y a l'idée que l'agriculture n'est pas une carrière qu'un jeune — quelqu'un d'instruit, d'intelligent et qui a le sens des affaires — devrait vouloir faire. Ensuite, il y a le manque de compréhension quant à la provenance réelle de la nourriture et le fait que beaucoup d'agriculteurs qui travaillent très fort pour faire en sorte que la population puisse avoir un produit disponible à l'épicerie. Pourtant, il ne semble pas que ces agriculteurs qui travaillent fort pour produire ces aliments obtiennent la part qui leur revient sur le prix de leurs produits.
J'aimerais simplement demander aux deux jeunes agriculteurs dans la salle ici ce qu'ils pensent que nous devons faire pour changer ces perceptions au sein de la population.
Merci.
Je pense que l'une des principales mesures que nous pourrions prendre pour commencer à changer les attitudes de la société et leur perception de l'agriculture serait que, comme producteurs, nous commençions à nous réunir plus et à être plus proactifs. Il faut commencer à renseigner les gens sur ce que nous faisons, à faire connaître nos pratiques de production, les produits et services publics que nous offrons, à expliquer en quoi nous protégeons l'environnement, et à dire comment ce serait si nous n'existions pas. Il y aurait très peu de gens pour gérer une très grande partie du territoire canadien.
C'est ce qu'il faut faire. Cela devrait faire partie de notre travail. Il faut améliorer cet aspect. Nous avons peut-être besoin de soutien pour nous aider à commencer cette sensibilisation.
Je crois qu'on devrait probablement commencer à enseigner dans les écoles que le boeuf vient des vaches. Ce n'était pas nécessaire il y a 50 ans, mais maintenant ce l'est.
Elle a dit qu'il fallait nous réunir davantage, et je pense que nous le faisons. Nous avons des institutions qui se réunissent, et nous devrions les utiliser au lieu de les mettre de côté.
Merci, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins pour leurs exposés. Je pense que nous pouvons tirer quelque chose de chacun d'eux.
Bev, j'aimerais faire valoir un point. Vous avez mentionné que vous transportez maintenant le bétail pendant une heure et demie. Lorsqu'on considère le pays comme un tout, dans mon coin de pays, à part les 350 bovins qui sont abattus dans une petite usine locale, inspectée par le gouvernement fédéral, il fallait expédier notre bétail soit aux États-Unis, soit en Ontario — 18 heures. Il n'y a plus d'usine de transformation de porc dans le Canada atlantique. Elle n'existe plus. Il faut tout envoyer au Québec.
C'est ce qui se produit. Sérieusement, nous perdons cette économie mixte vigoureuse. Cela va se produire ici également, si rien ne bouge.
Larry, vous avez parlé du rapport Un pouvoir de marché accru pour les producteurs agricoles canadiens. Il a été rédigé par un député. C'était un défi énorme pour notre gouvernement, comme ce l'est pour ces gens. Mais ce que ce rapport contient, ce sont essentiellement les recommandations des agriculteurs. Et je suis d'accord avec vous; il doit être dépoussiéré. Il faut le mettre à jour et mettre en application certaines de ces recommandations.
Ce qui me mène au point que la plupart des personnes ont fait valoir, je crois, et c'est le Bureau de la concurrence. Nous avons mené une étude sur la concurrence. Nous ne pouvons pas encore en parler, mais je pense qu'il y a d'honnêtes recommandations dans ce rapport et que nous devons certainement nous occuper du Bureau de la concurrence. Le problème, c'est que ça ne se termine pas là. Nous ne sommes pas le seul pays dans le monde à perdre des agriculteurs. Tous les pays en perdent. L'Union européenne commence maintenant à vraiment perdre beaucoup d'agriculteurs.
Comment est la solution par rapport à la nôtre? Je peux vous dire que nous avons annoncé, comme parti, une politique alimentaire nationale lundi dernier. Il reste beaucoup de travail à faire, mais vous vous insurgez toujours contre les personnes qui disent « Non, on ne peut pas faire ceci. Non, on ne peut pas faire cela. » Je suis en faveur du commerce équitable, mais nous dans le secteur agricole semblons toujours nous insurger contre quelque chose parce qu'une règle commerciale a été enfreinte ou parce que nous ne pouvons pas faire ça au Canada ou ainsi de suite.
Voici ce que je demande à chacun de vous: quelle serait votre priorité pour pouvoir renforcer l'industrie agricole du point de vue de la rentabilité afin de permettre aux jeunes agriculteurs un intérêt dans l'industrie et de leur donner un coup de pouce pour entrer dans l'industrie, se faire une place et la garder?
Par ailleurs, Gwen a soulevé un bon point concernant les silos. Je ne sais pas si elle a dit « silos », mais je sais pour être du côté du gouvernement — et ces personnes seraient d'accord avec moi si elles l'admettaient — qu'Agriculture Canada...
Les Finances dirigent Ottawa. Nous sommes mis en place par environ 11 ministères différents à Agriculture. Agriculture n'a rien à dire. Le sous-ministre — il ne fait que passer jusqu'à ce que le prochain soit nommé. Nous n'avons eu aucun sous-ministre convenable qui a travaillé pour les agriculteurs depuis Sid Williams dans les années 1970.
Pour en revenir à ma question. Désolé.
Je parlerai de ce point en premier.
Dans votre document, vous avez dit que certaines des réponses étaient internationales et je suis tout à fait d'accord avec vous. Déjà, notre gouvernement a renoncé à bien des droits du point de vue du contrôle des politiques dans ce pays. La question, c'est combien d'autres est-il prêt à sacrifier?
Je pense que nous aurons peut-être à former de nouvelles alliances avec d'autres pays qui pensent comme nous et qui vivent ces mêmes problèmes. Si l'UE perd autant d'agriculteurs, elle en viendra peut-être à voir la pertinence de revoir et de rajuster certains des accords qui ont été signés. Il faut prendre des mesures draconiennes, sinon cet énorme bateau n'arrivera pas à changer de cap. Il faut déterminer l'importance de la sécurité alimentaire au Canada.
Je pense que vous seriez étonnés de constater combien d'autres pays seraient prêts à vous appuyer dans ce genre de démarche et à dire: « c'est ici que ça s'arrête ». Nous devons faire environ quatre pas en arrière et repenser certains des droits auxquels nous avons déjà renoncé. Trouvons un moyen de faire de nos agriculteurs une plus grande priorité. Trouvons une façon pour notre gouvernement d'élaborer des politiques dans notre pays. Si le gouvernement le veut vraiment, je crois que nous sommes autorisés à faire ces choses.
Voilà ce que j'en pense.
Je vais y aller d'une courte observation philosophique. Les agriculteurs ont besoin d'un outil pour faire en sorte d'en obtenir davantage de la chaîne de valeur, et cette proportion varie d'une chaîne de valeur à l'autre.
C'est un énoncé assez général, mais le marché dispose de suffisamment d'argent. Nous ne recevons tout simplement pas autant d'argent qu'avant et l'écart se creuse de plus en plus. C'est une longue pente descendante. Nous avons besoin de différents outils pour y arriver. Certains existent déjà, mais il faut les développer davantage.
Ce que nous devons faire, c'est reprendre la souveraineté que nous avons perdue au cours des dernières décennies en raison de la négociation d'accords commerciaux et autres; en regagnant cette indépendance, les personnes que nous élisons à la Chambre des communes à Ottawa pourront alors se concentrer sur l'élaboration d'une politique agricole qui répond aux besoins des gens qui les ont portés au pouvoir. En vertu du modèle actuel, vous servez les intérêts d'un accord commercial. Vous servez la mauvaise cause.
Merci, monsieur le président.
Je remercie une fois de plus nos invités.
Luke, pour en revenir rapidement à votre commentaire sur l'éducation, il existe un programme d'agriculture, mais les établissements d'enseignement ont la liberté de l'offrir ou non. Je ne suis pas convaincu que renforcer davantage ce programme pour faciliter sa mise en oeuvre ferait quoi que ce soit pour nous aider à accroître la compréhension des gens.
Je me souviens lorsque j'ai commencé à travailler dans l'entreprise familiale avec mon père. À cette époque, de nombreux jeunes hommes de mon âge faisaient de même. Cela n'aurait probablement pas été possible sans l'aide de nos familles et si nos entreprises n'avaient pas été aussi solides; c'est si important. Je me souviens que l'entreprise devait faire face à des taux d'intérêt de 14, 15, 18 p. 100. C'était vraiment très difficile. Il aurait été très facile — très facile — pour mes frères et moi de tout abandonner. En fait, nous avons probablement décidé de le faire à quelques reprises, avant de nous résigner à persévérer après une bonne nuit de sommeil.
Je suis donc très conscient des défis que doivent surmonter les jeunes gens qui se lancent en affaires, que ce soit dans le domaine de l'agriculture ou ailleurs. Notre entreprise vendait de la machinerie agricole et nous dépendions grandement des exploitants agricoles.
Ce que j'entends... Je ne suis pas indifférent aux propos des autres invités, mais Luke et Gwen, vous représentez l'avenir, je le crois vraiment. Vous devez surmonter les obstacles qui se dressent devant vous et foncer. Je ne suis pas d'accord avec d'autres qui disent que...
Vous savez, nous pouvons passer notre vie à regarder en arrière. Si nous refusons de regarder droit devant et si nous ne commençons pas dès aujourd'hui à planifier et à régler ces difficultés au fur et à mesure qu'elles surviennent, nous allons passer notre vie à regarder en arrière. Je pense que c'est ce qui s'est passé dans bon nombre d'industries au cours des dernières années.
Vous êtes jeunes, vos entreprises sont lancées, vous connaissez certains des enjeux, pour ne pas dire beaucoup... Si le gouvernement venait à vous aujourd'hui et qu'il vous proposait d'apporter une modification aux politiques, une seule modification qui vous avantagerait personnellement et probablement tous les autres de votre génération, quelle serait-elle?
Gwen.
Selon moi, un des plus gros changements de politique que nous pourrions apporter est d'instaurer un système où les agriculteurs seraient payés non seulement pour les produits tangibles qu'ils fournissent, mais aussi pour les biens et services qu'ils offrent. Ce serait avantageux non seulement pour nous, mais pour tous les Canadiens.
Nous sommes un pays où les coûts de production sont élevés, et ce n'est pas prêt de changer. Il nous faut trouver une façon de retenir les gens sur la terre et de donner une plus grande valeur à leurs pratiques de production, ne serait-ce que pour offrir de beaux paysages aux passants ou pour fournir de l'eau propre ou des habitats naturels. Il nous faut un programme écologique de biens et de services, qui serait conçu pour nous aider à accroître notre rentabilité et pas seulement à aider ou à améliorer l'environnement.
Je pense que c'est ce que je proposerais.
Je ne sais pas si ça permettrait de tout résoudre immédiatement — il y a tellement de choses —, mais je sais que...
Avez-vous tous entendu parler de l'organisme One Earth? Il a l'intention d'offrir au public un million d'acres. Certaines personnes auraient les moyens d'acheter toutes les terres de l'Ouest canadien, si bien que nous devons nous protéger de ces personnes, ou sinon les laisser les avoir, parce qu'eux ont réellement les moyens d'exploiter des fermes au Canada. Comment pouvons-nous compétitionner avec eux?
C'est un bon point. Le défi pour chaque gouvernement est d'essayer de trouver un équilibre pour le bien-être de la collectivité. Je viens d'une région rurale. Je me suis battu pour des questions rurales probablement autant que vous tous autour de la table, mais il est difficile de faire passer le message.
Vous savez, nous avons beaucoup bénéficié de la santé de l'économie agricole. Si l'économie agricole allait bien, nous en bénéficiions. Nous avons créé des emplois. Nous avons peuplé les petites collectivités. C'est pourquoi je continue d'encourager les gens à ne pas abandonner et à persévérer, mais aussi à faire part de leurs idées aux décideurs.
Je vais faire un peu de publicité pour le groupe de Ian. Je pense, même si nous ne sommes pas toujours d'accord, que le groupe offre une tribune et défend vos intérêts — pas toujours sur une question précise — et qu'il a du poids à Ottawa. Il a aussi du poids au Manitoba. Je pense que les gens ont du respect pour ce qu'il fait.
Je voudrais seulement dire que si vous cherchez une organisation, celle-ci travaille d'arrache-pied depuis de nombreuses années pour se bâtir une réputation. C'est le genre de force dont les producteurs ont besoin selon moi pour pouvoir faire avancer leur cause autant que possible. Si une autre association est bonne pour vous, tant mieux, mais je crois que de rendre les choses accessibles est avantageux pour tous en bout de ligne.
Merci.
La séance tire à sa fin et j'aurais un mot à dire avant de conclure.
Nous avons entendu hier un témoin de la Saskatchewan. En gros, il disait ne pas vouloir être obligé de quêter pour vivre. Il voulait se tailler une place sur le marché, comme c'est le cas pour tous les agriculteurs.
Il a également dit que les programmes agricoles ne font pas d'eux des agriculteurs subventionnés. Selon lui, on ne devrait pas les voir comme des agriculteurs subventionnés, mais comme des clients subventionnés.
J'y ai pensé beaucoup hier. De ce que je comprends, l'enjeu le plus important est d'avoir une politique qui ferait baisser le prix des aliments. Le gouvernement actuel ne dispose pas de politique à cet égard, pas plus que le gouvernement précédent, auquel Wayne appartenait.
Le public semble avoir en tête cette idée d'aliments à bas prix. Beaucoup de gens me disent qu'ils veulent appuyer l'agriculture, et ils me demandent ce qu'ils peuvent faire. Je leur dis toujours d'aller au supermarché, de demander si le produit est canadien, et si non, d'exiger qu'il le soit. Ensuite, je leur dis de joindre le geste à la parole et de n'acheter que des produits canadiens.
Beaucoup de gens en parlent, mais ils ne prêchent pas par exemple quand vient le temps d'agir. Ils continuent de chercher les meilleurs prix.
La raison pour laquelle j'en parle, c'est que tant que le public aura en tête d'acheter des aliments à bas prix, pouvons-nous vraiment régler les problèmes du marché?
Avez-vous des commentaires à formuler? Je ne fais que penser tout haut.
Fred.
Je ne dirais pas que les aliments ne sont pas coûteux. Si on examine la répartition des produits provenant de la vente d'aliments, on constate que dans plusieurs secteurs, le consommateur paie plus alors que le producteur gagne moins. Je ne suis donc pas d'accord avec ce que vous avancez.
Une autre chose avec laquelle je ne suis pas d'accord est la possibilité d'élaborer un programme qui protégerait le producteur des soubresauts du marché. Ça peut arriver. C'est la structure du marché qui est à blâmer. Il ne sert à rien de tout remanier ou de se tourner vers des programmes comme Agri-investissement. Ça ne servira à rien. Tout ce que ça va réussir à faire, c'est d'augmenter encore plus la taille du système. Il faut voir ce qui a déjà été fait, en particulier dans le rapport Easter, mais aussi dans d'autres rapports.
Je ne laissais pas entendre qu'il fallait laisser quoi que ce soit de côté, Fred. Je ne sais pas où vous êtes allé chercher ça.
Je ne nierai pas qu'il peut y avoir certains problèmes de répartition des profits dans le secteur, mais je ne suis absolument pas d'accord avec vous en ce qui concerne le prix des aliments.
Dans ce pays, nous dépensons moins de 10 p. 100 de notre revenu disponible pour la nourriture, alors que le ratio était de 16 p. 100 il y a 20 ans. Les habitants du Kenya ou de l'Éthiopie doivent pour leur part consacrer 75 à 95 p. 100 de leurs revenus à l'alimentation, quand ils ont les moyens de se nourrir.
Je ne suis donc pas d'accord avec vous. Je crois que les consommateurs canadiens bénéficient de prix incroyablement bas sur les aliments, malgré tous les autres problèmes.
Larry.
Merci, Larry.
Je présume que je ne peux pas blâmer les consommateurs de vouloir payer le prix le plus bas possible au supermarché, car ils ont leurs propres problèmes à gérer. Quand on essaie de gagner sa vie avec un salaire de 15 $ l'heure, de payer ses impôts, le loyer, le carburant et les autres dépenses, et qu'il faut aussi prévoir un certain montant pour se nourrir, eh bien, il faut faire son possible. Nous ne pouvons pas obliger le consommateur à faire vivre l'agriculteur. C'est au gouvernement de cerner le problème — et je crois que nous sommes tous d'accord pour dire qu'il existe un problème — et de le résoudre.
Je crois que Fred a raison. Si on décidait de donner 10 000 $ par ferme, ce ne serait pas long que les entreprises agricoles en bénéficieraient. Elles savent quels sont nos coûts. Elles peuvent venir chercher l'argent dans nos poches comme bon leur semble. C'est le manque de compétition et la puissance du marché qui leur permettent d'agir ainsi. La question n'est pas de donner des subventions. Ça ne nous avancera à rien. Nous avons besoin de politiques qui serviront nos intérêts et qui nous donneront un certain pouvoir sur le marché. Nous pouvons compétitionner avec elles à un contre un. C'est ce qui va permettre de sauver les fermes familiales.
J'ai parlé de l'approche axée sur le symptôme, et j'ai bien peur que c'est vers là que nous nous en allons. Nous voulons savoir comment aider les jeunes agriculteurs. Les jeunes ne restent pas jeunes bien longtemps; ils atteignent bien vite l'âge mûr. Après cela, ils ne sont plus admissibles aux programmes et se retrouvent de nouveau seuls face à un marché inéquitable.
Ne nous contentons pas simplement de donner un peu de répit aux jeunes. Ça leur permettrait peut-être de souffler un peu pendant cinq ans, mais après, ils devraient gérer le marché comme n'importe qui d'autre. Concentrons-nous sur le véritable problème et pas seulement sur la question de la relève agricole.
Merci beaucoup.
Sur ce, nous devons nous arrêter.
Je tiens à tous vous remercier de nous avoir accordé de votre temps aujourd'hui. Ça a été très instructif et je vous souhaite la meilleure des chances.
Je crois qu'il tombe dehors une pluie plus qu'attendue. J'aimerais que ce soit la même chose en Ontario en ce moment.
Il m'a fait plaisir de venir à Portage La Prairie.
La séance est levée.
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