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Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi . Plus tôt nous adopterons à cette étape l'accord de libre-échange à la Chambre, plus tôt il sera renvoyé au comité et reviendra à la Chambre pour la troisième lecture. Il s'agit d'une excellente mesure législative, qui profitera tant aux Canadiens qu'aux Jordaniens.
Ces accords sont les plus récents exemples de la stratégie de notre gouvernement pour ouvrir des portes aux entreprises et aux investisseurs canadiens en cette période économique difficile. Cet accord sera constitué de l'accord de libre-échange entre le Canada et la Jordanie et des accords parallèles sur l'environnement et sur la coopération dans le domaine du travail.
Comme on l'a souligné tant dans le discours du Trône que dans le budget de 2010, un programme dynamique de libre-échange favorisera la croissance économique, encouragera la compétitivité et offrira plus de choix aux Canadiens. Alors que l'économie mondiale poursuit sa reprise, une chose est claire: le libre-échange, et non le protectionnisme, est essentiel à la prospérité à long terme des travailleurs canadiens.
L'élargissement de notre accès aux marchés et la participation aux partenariats de libre-échange plutôt que le protectionnisme font partie de la stratégie du gouvernement visant à promouvoir la création d'emplois, la croissance et les débouchés pour les Canadiens de l'ensemble du pays. Cet accord de libre-échange multiplierait les retombées dont bénéficieraient un certain nombre de secteurs de l'économie canadienne.
Aujourd'hui, je vais énumérer quelques-uns de ces secteurs et j'expliquerai pourquoi les relations commerciales avec la Jordanie sont aussi importantes à l'heure actuelle.
Divers secteurs de l'économie canadienne ont besoin du type d'accès concurrentiel aux marchés que leur offrira cet accord de libre-échange. Nos entreprises doivent être en mesure de faire face à la concurrence et de prospérer sur le marché mondial. L'accord prévoit l'élimination immédiate des tarifs douaniers sur la vaste majorité des exportations canadiennes actuelles vers la Jordanie. Pour être plus précis, disons que l'accord aura pour effet d'éliminer tous les droits de douane sur les produits non agricoles ainsi que la vaste majorité des droits frappant les produits agricoles dans les échanges commerciaux entre les deux pays.
Les agriculteurs bénéficieront de l'accord parce qu'il éliminera les tarifs douaniers sur les légumineuses, y compris les lentilles, les pois chiches et les fèves, de même que sur les frites surgelées, les aliments pour animaux et divers aliments prêts-à-servir. Il élargira les possibilités qui s'offrent aux Canadiens dans d'autres secteurs également, notamment ceux des produits forestiers, de la machinerie industrielle et électrique, de l'équipement de construction et des pièces d'automobile.
Les députés sont sûrement au courant que nos manufacturiers, de même que les Canadiens employés dans les secteurs concernés, ont besoin de tous les avantages concurrentiels possibles pour pouvoir tirer leur épingle du jeu sur les marchés internationaux, surtout en ces temps difficiles. Grâce à l'élimination des tarifs douaniers, notre accord de libre-échange avec la Jordanie ouvrirait de nouvelles avenues pour ces secteurs en générant de nouveaux débouchés pour les Canadiens qui y travaillent. L'accord de libre-échange aiderait nos entreprises à prospérer sur les marchés mondiaux. En outre, il contribuerait à garantir l'égalité des chances pour les exportateurs canadiens par rapport à leurs concurrents qui bénéficient actuellement d'un accès préférentiel au marché de la Jordanie.
Je vais également prendre une minute pour parler de l'accord mixte de promotion et de protection des investissements étrangers qui est entré en vigueur le 14 décembre dernier. Signé en même temps que l'accord de libre-échange, il facilitera les investissements dans les deux sens en fournissant aux investisseurs des deux pays le degré de clarté et de certitude dont ils ont besoin lorsqu'ils investissent dans l'autre marché.
Les investisseurs canadiens sont en train de découvrir une abondance d'occasions sur le marché jordanien. Des secteurs comme l'extraction des ressources, l'énergie nucléaire, les télécommunications, les transports et les infrastructures sont tous très prometteurs pour les investisseurs canadiens. On n'a qu'à voir les excellents résultats obtenus en Jordanie par la Potash Corporation of Saskatchewan pour s'en convaincre. Cette entreprise est actuellement le plus grand investisseur étranger en Jordanie. Et il y a encore une longue liste d'entreprises canadiennes, comme Bombardier et SNC-Lavalin, qui ont fait des percées importantes sur le marché jordanien.
C'est pourquoi l'accord de libre-échange et l'entente de promotion et de protection des investissements étrangers sont des réalisations si importantes. Nous défendons les intérêts des entreprises canadiennes et nous appuyons sans réserve les travailleurs canadiens. Globalement, ce n'est qu'un début.
L'Accord de libre-échange entre le Canada et la Jordanie constitue le premier accord de libre-échange que le Canada ait jamais conclu avec un pays arabe. Le Moyen-Orient et la région du Nord de l'Afrique revêtent une importance de plus en plus grande pour les entreprises canadiennes.
Cette entente avec la Jordanie nous donnerait accès à un marché essentiel de la région. Nous avons ouvert un grand nombre de portes dans la région et préparé le terrain pour permettre aux entreprises canadiennes de nouer encore plus de liens commerciaux au Moyen-Orient et en Afrique du Nord dans les années à venir.
Toutefois, le Canada croit également qu'il n'est pas nécessaire que le renforcement des relations commerciales se fasse au détriment des normes du travail ou de l'environnement. Nous sommes d'avis que le commerce et les investissements peuvent constituer une force positive pour les collectivités du monde entier. Nous sommes très heureux d'intégrer des accords parallèles dans le domaine du travail et de l'environnement à l'ensemble des ententes que nous avons signées avec la Jordanie.
Parlons d'abord de l'Accord de coopération dans le domaine du travail, qui engage les deux pays à respecter les principales normes du travail établies par l'Organisation internationale du travail. Ce sont des normes qui aident à éliminer le travail des enfants, le travail forcé et la discrimination en milieu de travail, et qui tiennent compte de la liberté d'association et du droit à la négociation collective. Cet accord engage aussi les deux pays à établir des normes et prévoir des indemnisations en cas de blessures ou de maladies liées au travail. J'aimerais également ajouter que dans le cadre de cette entente, les travailleurs migrants bénéficieront dorénavant de la même protection légale que les citoyens de chaque pays en ce qui concerne les conditions de travail.
Dans le même ordre d'idées, l'Accord sur l'environnement engage les deux pays à prévoir des niveaux élevés de protection environnementale ainsi que l'élaboration et l'amélioration de politiques visant à protéger l'environnement naturel. Les lois canadiennes en matière d'environnement doivent être appliquées et respectées. Cet accord engage les deux pays dans ce sens.
Il engage également les deux pays à prévoir des processus d'évaluation environnementale poussés ainsi que des recours en cas d'infraction aux lois environnementales. Au moyen de l'accord sur l'environnement, les gouvernements encouragent aussi les entreprises à adopter des pratiques exemplaires en matière de responsabilité sociale et à promouvoir la sensibilisation et la participation du public. À l'instar de l'accord sur le travail, ces mesures feraient en sorte que des échanges commerciaux et des investissements accrus ne se fassent pas au détriment de l'environnement et que les entreprises jouent un rôle positif dans l'évolution des deux pays.
L'économie du Canada traverse une période difficile. La récession économique mondiale a frappé durement tous les pays. Par exemple, nos échanges commerciaux bilatéraux avec la Jordanie, qui représentaient 92 millions de dollars en 2008, sont passés à 82 millions de dollars en 2009, principalement à cause d'un déclin des exportations canadiennes vers la Jordanie.
Nous devons préparer la reprise. Nous devons continuer de prendre des mesures pour améliorer l'avantage concurrentiel du Canada. La mondialisation de l'économie est là pour rester. Au Canada, un emploi sur cinq dépend des échanges commerciaux du Canada sur la scène mondiale. Nous devons continuer d'ouvrir des portes et de trouver des débouchés pour que nos entreprises et nos investisseurs prospèrent maintenant et après la récession économique. Notre accord de libre-échange avec la Jordanie s'inscrit dans le cadre de ces efforts. Il en va de même de l'Accord sur la promotion et la protection des investissements étrangers et des deux accords dans le domaine de l'environnement et du travail. Le Canada a besoin de ces outils pour être concurrentiel en Jordanie.
Bon nombre de Canadiens voient d'un bon oeil cet accord de libre-échange qui éliminerait les droits de douane sur les produits canadiens exportés vers ce marché en plein essor. Ainsi, cet accord créerait des débouchés pour les industries canadiennes qui se remettent des turbulences économiques qui les ont secouées récemment. En outre, il compléterait la stratégie du gouvernement qui consiste à stimuler la croissance économique pour les Canadiens sur tous les fronts, une stratégie efficace. Il bénéficierait aux consommateurs canadiens, car il éliminerait les droits de douane sur pratiquement toutes les importations de Jordanie. De ce fait, et c'est là l'essentiel, il protégerait l'environnement et les droits des travailleurs.
Je ne peux pas le souligner assez: cet accord est plus qu'un accord de libre-échange. Il comprend des ententes parallèles sur les droits des travailleurs et sur l'environnement. Ces deux ententes, négociées parallèlement à l'accord de libre-échange, comprennent des dispositions portant sur l'environnement et les droits des travailleurs. Ces ententes sur les droits des travailleurs et sur l'environnement renferment ce que les négociateurs appellent une disposition de non-dérogation, c'est-à-dire que ni le Canada ni la Jordanie ne peuvent déroger à leur obligation d'appliquer les lois sur l'environnement et sur le travail dans le but de stimuler le commerce ou l'investissement.
En effet, les ententes parallèles sur les droits des travailleurs et sur l'environnement contribueraient à faire avancer les droits des travailleurs et la protection de l'environnement.
Permettez-moi de parler d'abord de l'entente sur l'environnement assortie à l'accord de libre-échange.
Cette entente engage les deux pays à maintenir les normes de protection de l'environnement les plus élevées et à poursuivre leurs efforts afin d'élaborer et d'améliorer leurs lois et leurs politiques environnementales.
Le Canada et la Jordanie sont déterminés à respecter leurs lois nationales en matière d'environnement et à les mettre en pratique, à s'assurer qu'il existe des dispositions pour remédier aux violations des lois environnementales, à sensibiliser la population aux lois et aux politiques en matière d'environnement, à mettre en place des mécanismes d'évaluation des répercussions environnementales et à encourager les entreprises à utiliser des pratiques exemplaires volontaires en matière de responsabilité sociale.
L'accord sur l'environnement pave aussi la voie à des possibilités de coopération. Les secteurs d'activités touchés comprennent la coopération sur l'application et la conformité, la responsabilité sociale des entreprises et les technologies environnementales.
Les dispositions prévues dans l'accord pour le règlement des différends sont avant-gardistes et progressistes.
Des citoyens pourraient soumettre des questions à n'importe quelle partie, sur toute obligation ou activité de coopération visée par l'accord. Le Canada et la Jordanie peuvent mener des consultations pour régler tout désaccord et, au besoin, transmettre la question aux ministres en vue d'une décision.
En ultime recours, la Jordanie et le Canada pourraient tous deux demander à un comité d'examen indépendant de se pencher sur les cas où ils pensent que l'autre partie n'a pas mis en pratique ses lois environnementales. Dans cette situation, le Canada et la Jordanie travailleront à élaborer un plan d'action afin de mettre en place les recommandations du comité.
Les mécanismes de protection de l'environnement et des droits des travailleurs font partie intégrante de l'accord de libre-échange entre le Canada et la Jordanie. Nous savons tous que les normes en matière d'environnement et de travail peuvent aller de pair avec le libre-échange et peuvent même en bénéficier. Notre accord de libre-échange avec la Jordanie y veille, de même que les accords parallèles sur l'environnement et la coopération dans le domaine du travail.
Enfin, je veux toucher quelques autres points pour résumer cette entente.
Nous savons que le Canada et la Jordanie supprimeraient les droits visant tous les produits non agricoles et la plupart des produits agricoles, et que les deux pays se sont engagés à réduire les barrières non tarifaires. Ce serait une bonne chose pour les exportateurs canadiens d'avoir un plus grand accès au marché jordanien, et cet accord de libre-échange favoriserait aussi une concurrence à armes égales face à des entreprises concurrentes qui jouissent actuellement d'un accès préférentiel par rapport aux entreprises canadiennes.
Avec la suppression des droits, tous les droits imposés par la Jordanie sur les produits non agricoles, actuellement de 11 p. 100, en moyenne, seraient supprimés. Des droits de 10 à 30 p. 100 sont en effet imposés sur bon nombre de produits non agricoles présentant un intérêt pour les exportateurs canadiens, par exemple la machinerie industrielle et électrique, les pièces d'automobiles, le matériel de construction et des produits forestiers, comme le bois d'oeuvre et le papier. Les droits imposés par la Jordanie seraient aussi éliminés pour la grande majorité des produits agricoles, dont des produits clés pour les exportateurs canadiens, par exemple les légumineuses, les frites congelées, des aliments transformés et des aliments pour les animaux. Pour tous ces produits, les droits peuvent atteindre 30 p. 100.
Un accès à un marché jordanien libre de droits dès l'entrée en vigueur de cet accord de libre-échange serait bénéfique pour la grande majorité des exportations que le Canada fait déjà en Jordanie. Au moment de l'entrée en vigueur de l'accord, le Canada éliminerait immédiatement les droits sur les produits non agricoles ainsi que sur la plupart des produits agricoles importés de Jordanie. Comme pour tous les accords de libre-échange que nous avons déjà conclus, le Canada a exclu les produits soumis à la gestion de l'offre de toute réduction tarifaire s'ils sont vendus hors contingents, par exemple les produits laitiers, la volaille et les produits agricoles.
Cet accord prévoit aussi une réduction des barrières non tarifaires, un engagement à assurer un traitement non discriminatoire des produits importés, des dispositions réaffirmant les obligations découlant de l'Accord de l'OMC relatif aux obstacles techniques au commerce et une entente visant le respect des dispositions de l'Accord de l'OMC sur l'application des mesures sanitaires et phytosanitaires.
Un comité du commerce et des règles d'origine serait mis sur pied et servirait de tribune où le Canada et la Jordanie pourraient discuter de toute question commerciale relative à la vente de produits, y compris des obstacles techniques au commerce.
Il y aurait un mécanisme de surveillance du commerce bilatéral. Les exportations canadiennes en Jordanie ont totalisé 65,8 millions de dollars en 2009, alors qu'elles s'étaient élevées à 31 millions de dollars en 2003. Nos principales exportations en Jordanie, en 2009, ont été les véhicules, les produits forestiers, la machinerie, les légumineuses, comme les lentilles et les pois chiches, les navires et bateaux, et le plastique. L'année précédente, nous y avions surtout exporté du papier et du carton, du fil de cuivre, des légumineuses, de la machinerie et de la pâte de bois. Les importations de Jordanie au Canada ont représenté 16,6 millions de dollars en 2009, contre seulement 6 millions en 2003. On importe essentiellement des tricots ou des vêtements tissés, des pierres et des métaux précieux, surtout sous forme de bijoux, des légumes et des produits chimiques inorganiques.
Toutes nos consultations et tous les examens que nous avons faits de cet accord très important nous montrent que le commerce ne sera pas seulement élargi, mais qu'il sera considérablement élargi. Cet accord arrive à un moment où nous avons besoin d'emplois et de perspectives d'avenir pour les travailleurs canadiens. Quelques partis semblent rejeter complètement l'accord de libre-échange. Ils nous ramèneraient à l'époque de la Crise de 1929 et dresseraient toutes sortes de barrières commerciales techniques que les Canadiens ne peuvent simplement pas se permettre d'avoir.
Enfin, par souci de coopération, je dois dire qu'il y a des partisans du libre-échange à la Chambre, certainement au sein du Parti libéral. Ils ont déjà été en faveur d'accords de libre-échange. J'aimerais qu'ils examinent cet accord et qu'ils l'appuient. Nous ne pouvons pas nous permettre de fermer des portes aux négociants canadiens. Nous ne pouvons pas nous permettre de fermer des portes aux exportateurs canadiens.
Ma circonscription nous en donne un très bon exemple. C'est une région très rurale qui borde la côte Sud-Ouest de la Nouvelle-Écosse. Dans cette très petite circonscription rurale, 97 p. 100 des emplois créés sont liés au commerce ou sont créés ans le secteur manufacturier. Qu'il s'agisse de la transformation de poisson ou de fabrication, ce sont des activités à valeur ajoutée. Nous avons également une industrie aéronautique et une industrie aérospatiale. Le secteur forestier est centré sur le bois de construction de dimensions courantes. Ce sont là encore des produits manufacturés. Les produits de l'agriculture sont aussi des produits à valeur ajoutée.
Si ces gens n'arrivent pas à vendre leurs produits, s'ils ne peuvent pas jouir de l'accès au marché mondial comme c'était le cas des provinces de l'Atlantique, surtout la Nouvelle-Écosse, à l'époque des goélettes et avant, alors non seulement nous faisons un pas en arrière, mais nous rétrogradons à une époque où les gens vivaient dans des villes fortifiées et se faisaient la guerre plutôt que de faire du commerce. Ce serait une terrible erreur.
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Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui au sujet d'un projet de loi qui m'intéresse beaucoup et qui concerne l'accord de libre-échange entre le Canada et le Royaume hachémite de Jordanie. Je l'appuie en principe et suis en faveur de son renvoi au comité afin que nous puissions convoquer des témoins et nous pencher de près sur la mesure législative, comme il convient de faire pour chaque projet de loi.
Cet accord de libre-échange améliorerait l'accès des entreprises et entrepreneurs canadiens au marché jordanien en éliminant les droits de douane sur la plupart des exportations canadiennes à destination de la Jordanie. Entre autres, les produits manufacturés et forestiers canadiens, ainsi que certains produits agricoles et agroalimentaires, seraient exempts de droits. Une fois de plus, nos secteurs soumis à la gestion de l'offre sont protégés aux termes de l'accord.
L'année dernière, les échanges commerciaux entre le Canada et la Jordanie se sont élevés à plus de 82 millions de dollars. Les exportations canadiennes en Jordanie représentaient 80 p. 100 des échanges, soit un peu moins de 66 millions de dollars. C'est plutôt faible. Il va sans dire que le précédent établi par l'accord de libre-échange conclu entre les États-Unis et la Jordanie est encourageant. Les échanges entre ces deux pays ont décuplé en peu de temps depuis la conclusion de l'accord. Nous pouvons donc espérer un résultat semblable.
J'ai dit que j'étais en faveur du renvoi de la mesure au comité, mais j'ai des doutes quant aux priorités du gouvernement en matière de commerce. La Chine et l'Inde croissent de 6 à 9 p. 100 par année, représentent d'énormes marchés et investissent des sommes considérables dans l'infrastructure, l'eau, le traitement des eaux usées, les transports en commun et l'environnement, secteurs qui nécessitent des produits que le Canada sait fabriquer. C'est pourquoi j'estime que le gouvernement devrait se concentrer davantage sur ces marchés plus prometteurs.
La question de l'Afrique est importante et le a parlé de l'Afrique du Nord et du Moyen-Orient, mais le gouvernement conservateur semble n'accorder aucune attention à l'Afrique. Un large consensus est en train de se dégager sur le fait que le Canada devrait envisager de tisser des liens commerciaux avec l'Afrique plutôt que de se contenter de lui fournir de l'aide humanitaire, et le potentiel d'une relation commerciale est considérable.
J'ai parlé avec des gens, dont David Rubenstein, directeur du Carlyle Group, qui pensent que l'Afrique est le continent dans lequel il sera le plus avantageux d'investir au cours des 10 prochaines années. Ce continent offre d'énormes débouchés pour nous et le Canada entretient une relation historique avec lui. À mon avis, nous devrions nous concentrer davantage sur cette relation, qui présente un avantage considérable pour nous.
J'aimerais revenir sur la question de cet accord de libre-échange. En effet, malgré mes doutes sur la politique commerciale générale du gouvernement, je crois que ces accords sont utiles. J'aimerais qu'on mette davantage l'accent sur les possibilités à long terme pour le Canada.
On prévoit que l'économie jordanienne croîtra de 3 p. 100 cette année et de 3,7 p. 100, en 2011. La Jordanie est un marché stable, bien que relativement petit pour les exportateurs canadiens. Comme pour la plupart des accords de libre-échange conclus par le Canada, cet accord comprend des accords parallèles sur l'environnement et la coopération dans le domaine du travail qui aideront à promouvoir la durabilité, ainsi qu'à protéger et à garantir les droits des travailleurs. Plus précisément, l'accord de coopération dans le domaine du travail entre le Canada et la Jordanie reconnaît les obligations des deux pays envers l'Organisation internationale du Travail et aux termes de la Déclaration relative aux principes et droits fondamentaux au travail, y compris la protection des droits suivants: le droit à la liberté d'association et à la négociation collective, l'abolition du travail des enfants, l'élimination du travail forcé ou obligatoire et l'élimination de la discrimination.
Les accords sur l'environnement et la coopération dans le domaine du travail comprennent des processus de règlement des plaintes et des conflits qui permettent au public de demander une enquête sur l'incapacité apparente du Canada ou de la Jordanie à se conformer à ces accords.
Le Canada a déjà conclu un accord de libre-échange dans cette région. Il s'agit de l'accord de libre-échange avec Israël, qui est en place depuis 1997. Cependant, l'accord avec la Jordanie est le premier que le Canada a signé avec un pays arabe. Il est approprié que c'est avec la Jordanie que nous établissions ce précédent. En effet, le Canada et la Jordanie ont une relation amicale et constructive, comme le démontre le récent accord entre les deux pays concernant les utilisations pacifiques de l'énergie nucléaire.
La Jordanie a fait preuve d'un leadership remarquable pour faire avancer le processus de paix au Moyen-Orient et elle a conclu un traité de paix avec Israël en octobre 1994. La Jordanie contribue également au renforcement des relations et de la compréhension entre l'Occident et le monde arabe. Sur le plan commercial, la Jordanie est déjà partie à des accords de libre-échange avec certains des plus importants partenaires commerciaux du Canada. L'ALE avec les États-Unis est entré en vigueur en décembre 2001. La Jordanie a également conclu des accords de libre-échange avec l'Union européenne et avec l'Association européenne de libre-échange, qui sont respectivement entrés en vigueur en mai 2002 et en septembre 2002.
Le 28 juin 2009, le Canada et la Jordanie ont également signé l'Accord sur la promotion et la protection des investissements étrangers, ou l'APIE, en même temps qu'un accord de libre-échange. Toutefois, contrairement à l'ALE, l'APIE est déjà en place. En fait, il est entré en vigueur le 14 décembre 2009. Je me demande pourquoi l'APIE est un accord distinct alors qu'il a été conclu en même temps que l'ALE.
L'APIE est axé sur le principe du traitement national, selon lequel un investisseur canadien en Jordanie sera traité exactement comme un investisseur jordanien en Jordanie et vice versa. Autrement dit, nous devons traiter les investisseurs jordaniens au Canada de la même façon que nous traiterions nos propres investisseurs. Le principe du traitement national qui régit l'APIE se retrouve également au centre des accords de libre-échange.
Lorsqu'on examine la position du Bloc québécois à l'égard de certaines dispositions prévues dans les accords de libre-échange, on constate avec étonnement que l'APIE prévoit notamment des dispositions garantissant le traitement national, qui sont souvent appelées dispositions sur le règlement des différends entre investisseurs et État. Nous sommes ravis que nos collègues bloquistes appuient cet accord de libre-échange, mais nous leur rappelons néanmoins que, s'ils sont opposés aux dispositions sur le règlement des différends entre investisseurs et État et au principe du traitement national, l'APIE n'a pas été présenté à la Chambre.
Je signale à titre d'information pour le Bloc québécois que le gouvernement a curieusement décidé, d'une part, de faire de l'APIE un accord distinct et, d'autre part, de ne présenter à la Chambre que l'accord de libre-échange. Or, à certains égards, cette décision contrevient à la politique que le gouvernement a lui-même établie en ce qui concerne le dépôt des traités devant le Parlement. En effet, si on consulte cette politique qui a pris effet le 25 janvier 2008, on peut y lire ceci:
La présente politique vise à garantir le dépôt devant la Chambre des communes de tous les instruments considérés comme régis par le droit international public et signés entre le Canada et d'autres États ou organisations internationales, après leur signature ou leur adoption au moyen d'une autre procédure, mais avant que le Canada n'ait notifié officiellement qu'il est lié par l'instrument en question.
L'APIE avec la Jordanie a été signé en juin 2009 et est entré en vigueur en décembre 2009. Toutefois, il n'a jamais été présenté à la Chambre. Permettez-moi de citer le député de qui, à l'époque, était ministre des Affaires étrangères. Voici ce qu'il a dit:
Dès aujourd'hui, tous les traités régis par le droit international public conclus entre le Canada et d'autres États ou entités seront déposés à la Chambre des communes.
Puis, il a poursuivi en décrivant l'engagement du gouvernement:
Ceci reflète l'engagement de notre gouvernement en faveur de la démocratie et de l'obligation de rendre compte. En soumettant nos traités internationaux à l'examen du public, nous respectons notre promesse de rendre le gouvernement plus ouvert et plus transparent.
Je pense qu'il est important de rappeler à la Chambre que le gouvernement s'est fermement engagé à présenter tous les traités internationaux à la Chambre. Le gouvernement a présenté l'accord de libre-échange avec la Jordanie, mais pas l'APIE, qui est l'accord sur les investissements. Je pense qu'il aurait dû le faire avant la ratification finale de cet accord. Ce n'est pas la première fois que le gouvernement conservateur contredit sa propre politique ou son propre engagement en matière de démocratie et de reddition de comptes.
Nous savons que le gouvernement a prorogé le Parlement et qu'il s'en est pris aux valeurs démocratiques. Le gouvernement conservateur n'a pas présenté à la Chambre l'accord sur la politique d'achat aux États-Unis. Pourquoi? Parce qu'il avait prorogé le Parlement. Il a plutôt tenu une conférence de presse pour annoncer cet accord, et ce n'est qu'une semaine plus tard qu'il a produit le document en tant que tel, ce qui a laissé pantois l'opposition et les Canadiens.
Au final, nous nous sommes rendu compte que l'accord avait été conclu trop tard — en fait, presque trop tard pour que les Canadiens aient accès aux mesures de relance américaines. De plus, il était beaucoup trop faible pour protéger les travailleurs canadiens.
Le gouvernement conservateur a lamentablement échoué dans ses efforts en vue de défendre nos intérêts face à notre partenaire commercial le plus important, les États-Unis. Il n'a pas réussi non plus à diversifier nos relations commerciales en cherchant activement à conclure des accords avec les plus grands marchés émergents du monde.
L'économie de notre pays dépend des échanges commerciaux. En effet, 80 p. 100 de notre économie et des millions d'emplois canadiens dépendent de notre capacité d'avoir accès aux marchés étrangers. L'histoire retiendra que, des peaux de castor au BlackBerry, la prospérité du Canada repose sur les marchés mondiaux. Nous prospérons parce que nous pouvons et devons soutenir la concurrence.
Le Canada est un chef de file dans le monde en ce qui concerne l'extraction efficace des ressources naturelles, par exemple. Nos produits manufacturés sont connus dans le monde entier pour leur qualité et leur caractère novateur, et ce, parce qu'au Canada, on est suffisamment intelligent et compétent pour prendre avantage du libre-échange. Le Canada a tiré profit de la signature du Pacte de l'automobile avec les États-Unis. L'ALENA a permis au pays de prospérer.
Cependant, sous ce gouvernement, en 2009, le Canada a connu son premier déficit commercial en 30 ans. Si nous ne prenons pas de mesures concrètes pour diversifier nos relations commerciales, nous risquons de prendre du retard par rapport aux autres pays qui diversifient les leurs.
Je voudrais prendre un instant pour parler de toute la question des changements climatiques, non pas du point de vue des changements visant l'environnement et le climat, ni de la responsabilité en matière environnementale, mais du point de vue des perspectives économiques. Le fait est que, dans le monde entier, des pays fixent un prix pour le carbone. Différents pays de l'Union européenne l'ont fait et dans ce domaine, l'Union européenne va de l'avant. Aux États-Unis aujourd'hui, trois mesures législatives font l'objet d'un débat, le projet de loi Waxman-Markey, le projet de loi Cantwell-Collins et plus récemment, l'initiative élaborée par les sénateurs Lindsey Graham, Joe Lieberman et John Kerry.
Nous ne savons pas ce qui va se passer au Congrès des États-Unis. Comme chacun le sait, le Congrès est parfois dysfonctionnel. Néanmoins, je pense qu'à un moment donné et peut-être bien dans les prochains mois, les États-Unis vont fixer une sorte de prix pour le carbone.
Que les Américains en décident ainsi dans les prochains mois ou dans les années à venir, nous savons que le monde est en train d'attribuer un prix au carbone. Nous savons aussi, d'après les dires de Fan Gang, un des économistes chinois les plus éminents et en fait, un des auteurs du plan quinquennal, que même en Chine, on envisage d'incorporer un mécanisme visant à fixer un prix pour le carbone dans le prochain plan quinquennal.
Si le monde et, en particulier, les Américains protectionnistes, fixent un prix pour le carbone, nous pouvons nous attendre à ce que des mécanismes incluent ce prix pour le carbone dans les droits de douane. Cela signifie qu'à long terme, au Canada, parce que nous avons une économie où le carbone domine, nous serons moins compétitifs que nous ne le sommes aujourd'hui.
Le gouvernement conservateur a décidé qu'il se contenterait d'attendre de voir ce que les États-Unis feraient au sujet du prix du carbone. C'est risqué parce que, lorsque les États-Unis seront parvenus à une conclusion législative ou administrative au sujet du prix du carbone et décideront d'imposer une taxe carbone sur les importations canadiennes, notre économie pourrait en subir des effets très néfastes.
Le Canada est le plus grand fournisseur d'énergie des États-Unis, ce qui signifie que nous avons un intérêt direct dans les décisions que prennent maintenant le Congrès et le gouvernement des États-Unis. Nous ne devrions pas rester les bras croisés en attendant ces décisions, mais nous devrions intervenir parce que nous sommes leur plus grand fournisseur d'énergie.
Nous devrions collaborer plus étroitement avec les États-Unis afin de développer des sources d'énergie plus propres, de rendre les sources traditionnelles d'énergie plus propres et de développer de nouvelles sources d'énergie. Nous devrions travailler avec eux à la modernisation du réseau d'approvisionnement en énergie, renforcer les systèmes de transport d'énergie, nous diriger vers des réseaux intelligents et adopter des compteurs intelligents.
Nous devrions collaborer plus étroitement avec les États-Unis afin d'élaborer une stratégie binationale sur l'énergie qui pourrait nous protéger du risque potentiel d'un mécanisme de fixation du prix du carbone adopté par les États-Unis sans consultation du Canada et, ce qui est plus fondamental, afin de rendre nos deux économies plus concurrentielles dans l'économie verte qui émerge dans un monde qui cherche à réduire ses émissions de carbone.
Au Forum économique mondial de cette année, à Davos, le conservateur du Canada a été le seul des chefs d'État présents à déclarer avec insistance que les mesures de lutte contre les changements climatiques auront de véritables répercussions sur les emplois et la croissance économique. Il a également ajouté qu'il y avait de grands compromis à faire à court terme compte tenu des impératifs économiques. Ses vues tranchaient sur celles des dirigeants mondiaux y compris, ces derniers mois, avec celles du président Obama.
Dans le monde, le discours sur les changements climatiques est passé d'un discours sur la responsabilité environnementale à un discours sur les possibilités économiques. Le Canada étant un grand producteur d'énergie, il peut miser sur son expertise dans le secteur de l'énergie traditionnelle pour devenir une superpuissance de l'énergie verte. Nous pouvons placer le Canada parmi les premiers dans le monde. Nous pouvons faire du Canada un partenaire de la Chine et de l'Inde dans la production d'une énergie propre, mais seulement si nous avons une stratégie fédérale, une stratégie nationale élaborée avec les provinces.
D'autres pays ont utilisé leurs plans de relance de l'économie pour devenir plus concurrentiels dans l'économie mondiale plus verte qui s'annonce. Dans leur plan de relance, les États-Unis ont investi six fois plus par habitant que le Canada dans les énergies propres. Le Canada se retrouve parmi les pays de l'OCDE qui ont le moins consacré aux énergies vertes dans leur plan de relance.
En décembre, la Chine et le gouvernement Obama ont signé une entente sur les technologies de capture et de stockage du carbone. Le Canada n'était même pas à la table. C'est un domaine où le Canada détient un avantage comparatif. Quarante pour cent du stockage de carbone dans le monde se fait à Weyburn, en Saskatchewan. C'est grâce à l'investissement du gouvernement fédéral libéral de Paul Martin et du secteur privé que cela est possible. Les installations de Weyburn et les technologies utilisées sont de classe mondiale.
Pourtant, nous n'étions même pas à la table quand la Chine a signé une entente avec notre principal partenaire commercial, les États-Unis, sur la séquestration du CO2. Cette année, selon le secrétaire américain à l'Énergie, M. Chu, les États-Unis vont investir 3 milliards de dollars dans les technologies de séquestration du CO2, un montant qui s'ajoute aux 7 milliards de dollars investis par le secteur privé.
Nous devons agir sans tarder si nous voulons conserver notre avance dans le domaine de la séquestration du CO2, car la Chine et les États-Unis progressent plus rapidement que nous sur les plans de l'investissement et de l'innovation.
La lutte pour savoir qui prendra les devants dans la nouvelle économie verte est féroce. En 2008, la Chine est devenue le principal pays producteur de panneaux solaires du monde et, en 2009, le principal pays producteur d'éoliennes.
Nous ne pouvons pas attendre pendant que d'autres pays agissent. Si l'avantage allait à celui qui parle le premier, le Canada l'emporterait probablement, mais malheureusement, l'avantage va à celui qui bouge le premier, et d'autres pays sont en train de bouger. Le Canada reste assis à attendre.
À Davos, cette année, le sénateur américain républicain Lindsey Graham a fait la déclaration suivante:
Il y a six mois, ma plus grande inquiétude était qu'une entente sur les émissions rendraient les entreprises américaines moins concurrentielles par rapport aux entreprises chinoises. Maintenant, ce qui m'inquiète, c'est que chaque jour où nous remettons au lendemain l'établissement du prix du carbone est un jour dont la Chine profite pour dominer l'économie verte. La Chine a pris une décision stratégique à long terme et fonce droit devant.
Nous devons resserrer notre relation énergétique avec les États-Unis. Nous devons nous concentrer sur des mécanismes coordonnés d'établissement du prix du carbone, des corridors intelligents pour le transport de l'énergie ainsi que la recherche, le développement et les partenariats dans le domaine des technologies vertes. Nous devons profiter de la relation Canada-États-Unis, tout en devenant le partenaire de choix de la Chine et de l'Inde en ce qui concerne les énergies propres.
Nous avons besoin d'une approche stratégique à long terme pour veiller à défendre nos intérêts contre le protectionnisme américain et pour diversifier nos relations commerciales tout au long du XXIe siècle dans les domaines où notre avantage comparatif est le plus fort, c'est-à-dire l'énergie propre et les solutions énergétiques propres.
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Monsieur le Président, avant de prendre part au débat sur le projet de loi , permettez-moi de souligner l'initiative extraordinaire des organisateurs de la manifestation « Une heure pour la Terre » qui ont permis, samedi dernier, à plus de 10 millions de Canadiens et à près d'un milliard de personnes dans le monde d'éteindre symboliquement les lumières pendant une heure, entre autres entre 20 h 30 et 21 h 30. À Montréal, Hydro-Québec a éteint le logo de son siège social. Même le parlement canadien y a participé. En tout, plus de 3 400 villes de 125 pays ont pris part à l'activité.
Lorsque l'on connaît l'importance qu'accordent les conservateurs à la lutte contre les changements climatiques, on n'a pas besoin de dire l'importance de se mobiliser et d'envoyer un message clair à nos représentants. Il faut se pencher davantage sur cet enjeu crucial. J'en profite pour souligner le travail exceptionnel fait par mon collègue de dans la lutte contre les changements climatiques.
Cela dit, revenons au sujet débattu aujourd'hui, soit l'accord de libre-échange entre le Canada et la Jordanie. Le Bloc québécois est favorable à ce projet de loi dans son ensemble, mais il croit tout de même que quelques notions devraient être repensées ou rediscutées. S'il en est venu à ce constat, c'est que, fidèle à son habitude, le Bloc québécois a étudié méthodiquement cet accord pour en arriver à la conclusion qu'il respectait en grande partie les valeurs de notre parti, donc celles des Québécoises et des Québécois.
La semaine dernière, je me suis levé à la Chambre pour dénoncer le traité de libre-échange entre le Canada et la Colombie, parce que celui-ci ne respectait en aucun cas les principes que défend le Bloc québécois, des principes fondamentaux comme les droits de la personne et des travailleurs ainsi que le respect de l'environnement. On peut être assuré que nous nous lèverons et parlerons haut et fort tant et aussi longtemps qu'un accord, qu'un traité ou qu'une décision du gouvernement ne respectera pas cette moralité.
Dans le cas présent, rien ne laisse présager un manque sur le plan de ces principes, et nous saluons même les efforts qui peuvent y être consentis. Par contre, il est à se demander pourquoi signer un tel accord avec la Jordanie, considérant que les échanges entre le Canada et cet État ne représentent que 92 millions de dollars de marchandises. Plus important encore, ses échanges avec le Québec ne représentent qu'un maigre montant de 32 millions de dollars.
Nous pensons tout de même que cet accord est nécessaire pour équilibrer nos appuis dans cette région du monde. Sachant très bien que le Canada a déjà homologué un traité de libre-échange avec Israël, il est important, considérant la situation politique tendue au Moyen-Orient, d'envoyer un message clair dans cette région, à savoir que nous sommes ouverts à des échanges et à des ententes équitables avec l'ensemble des nations qui s'y retrouvent. Cela pourrait même favoriser de meilleures relations entre l'Orient et l'Occident, ouvrant la porte à certains pays orientaux désireux de développer de meilleures relations économiques avec l'Occident.
Il ne faut pas non plus passer sous silence le travail considérable que fait la Jordanie pour moderniser son État et son économie. Dans une région où l'écart entre les riches et les pauvres est plus que gigantesque, le fait de moderniser l'État et l'économie s'avère un solution bénéfique pour régler une partie du problème. Il faut donc saluer ces efforts. Appliquer cet accord enverrait, une fois de plus, un message clair aux autres pays du Moyen-Orient, démontrant l'importance de moderniser son État et de diversifier son économie.
Un peu plus tôt, j'ai dit que la Jordanie ne représentait qu'un acteur mineur dans les échanges commerciaux du Canada et du Québec. Malgré ce fait, le Bloc québécois pense tout de même que, pour le Québec, cette entente serait bénéfique. En tant que porte-parole du Bloc québécois en matière de boisés privés, je tiens à dire que la situation de la crise forestière, qui affecte de nombreux travailleurs canadiens, et surtout québécois, me préoccupe au plus haut point, sachant que près de 10 milliards de dollars ont été investis dans l'industrie automobile ontarienne et que des miettes ont été investies au Québec.
Le Bloc québécois demande depuis longtemps, pour l'industrie forestière du Québec, la mise en place de prêts et de garanties de prêts au taux du marché ainsi que la mise en place d'une politique globale de soutien et de modernisation de l'industrie forestière comprenant une politique d'utilisation du bois dans les constructions fédérales. Le projet de loi de mon collègue de va en ce sens.
En outre, les propriétaires de boisés privés au Québec sont de grands oubliés de la crise forestière. Il faudrait s'en occuper aussi, peut-être en revoyant quelques aspects sur le plan de la fiscalité. Par conséquent, la création d'un régime enregistré d'épargne sylvicole serait un outil très important pour ces propriétaires de boisés privés. Cela leur donnerait peut-être aussi l'occasion un jour, je l'espère, de pouvoir exporter des pâtes et papiers partout dans le monde, et particulièrement en Jordanie, le sujet de notre débat aujourd'hui.
Malgré tout ce que je viens de dire, le Bloc québécois voit d'un bon oeil l'accord étudié actuellement pour l'industrie forestière québécoise. Ne soyons pas utopiques. Cet accord est loin d'être une solution concrète à l'inactivité des conservateurs dans l'important dossier de l'industrie forestière, particulièrement chez nous au Québec. Toutefois, il n'en demeure pas moins que ce traité représente des gains appréciables pour cette industrie en crise, et ce, depuis déjà trop longtemps.
Les échanges commerciaux entre le Québec et la Jordanie ont représenté 32 millions de dollars en 2008. De ceux-ci, 25 millions de dollars ont été alloués à notre industrie des pâtes et papiers, ce qui n'est pas peu dire. Puisque la Jordanie possède un manque visible de ressources forestières compte tenu de son climat, et considérant que l'industrie québécoise des pâtes et papiers est laissée à l'abandon par le gouvernement conservateur depuis longtemps, l'accord débattu en ce moment représente une solution intéressante pour pallier tant la rareté de cette richesse en Jordanie que la passivité des conservateurs face à cette industrie.
Comme je l'ai aussi mentionné plus tôt dans mon allocution, le Bloc québécois et moi-même pensons qu'il y a quelques éléments qui doivent être repensés et débattus afin de rendre encore plus justifiable la nature de cet accord.
En tant que porte-parole adjoint du Bloc québécois en matière de ressources naturelles, j'estime, tout comme mes collègues du Bloc québécois, qu'il est plus que nécessaire de s'assurer que les importantes ressources en eau du Québec sont exclues de l'accord de façon claire afin que le contrôle de son exploitation reste entre les mains des Québécois. Bien qu'on n'en fasse pas mention dans le texte de l'accord lui-même, il n'en demeure pas moins que cette condition doit impérativement se retrouver à l'intérieur de cet accord.
Nous aurons la chance d'examiner cela en profondeur lors de l'étude en comité au cours des prochaines semaines.
Si, sur le plan de l'agriculture, l'accord de libre-échange entre le Canada et la Colombie est inacceptable, ce n'est pas le cas dans le présent accord avec la Jordanie. Contrairement au projet de loi concernant le Canada et la Colombie, la petite taille du marché jordanien et le type d'agriculture qu'on y pratique ne risquent pas de toucher nos producteurs agricoles québécois et ne risquent pas non plus de toucher les producteurs agricoles jordaniens. Il est très important pour nous de respecter autant nos producteurs agricoles que ceux d'autres pays avec lesquels nous signons ou voulons signer des ententes.
Pour l'agriculteur que je suis, il est important de respecter les particularités agricoles des pays et de les aider à se développer. Ainsi, au Québec, l'Union des producteurs agricoles a approuvé cet accord en précisant qu'il ne posait aucun problème. On pourrait discuter longtemps d'agriculture à la Chambre.
Il est alarmant de voir agir les conservateurs dans cet enjeu si primordial. Le gouvernement fait assurément preuve d'ignorance et d'incompétence. Des mesures concrètes, peu coûteuses et réalisables peuvent améliorer l'agriculture pratiquée ici et ce, parfois à faible coût. Ce ne sont pas les idées qui manquent: le Bloc québécois a déposé une liste concrète de solutions. Ce qui manque, c'est une volonté politique, et les conservateurs semblent en manquer fortement.
Quand on connaît les intentions du gouvernement et l'importance qu'il accorde à l'agriculture, il est difficile de ne pas être inquiet du sort de l'agriculture au Canada, surtout au Québec.
Mais revenons à l'accord de libre-échange entre le Canada et la Jordanie. Le Bloc québécois dénonce également la stratégie conservatrice de signer des ententes bilatérales avec les autres États, au détriment des ententes multilatérales que nous suggérons depuis longtemps.
Le Bloc québécois pense fortement qu'une approche multilatérale est plus efficace pour développer un commerce plus équitable et respecter les intérêts de toutes les nations du monde.
Pour que les échanges commerciaux soient mutuellement profitables, ils doivent d'abord être équitables. Concernant l'accord de libre-échange entre le Canada et la Colombie, ce n'est pas le cas, mais les conservateurs, comme les libéraux, ne semblent pas s'en soucier.
Un système commercial qui mène à l'exploitation des pays pauvres et au dumping dans les pays riches n'est pas viable. Le Bloc québécois ne peut pas accepter un libre-échange qui aurait pour conséquence un nivellement par le bas. Il ne peut pas accepter non plus des ententes de libre-échange où l'absence de normes en matière d'environnement ou de droit du travail dans les accords commerciaux exerce une pression énorme sur nos industries, particulièrement nos industries traditionnelles. Il leur est très difficile de faire concurrence à des produits fabriqués au mépris des règles les plus élémentaires de droits sociaux.
Dans l'optique de rendre plus équitables les ententes commerciales, le Bloc québécois presse le gouvernement fédéral de réviser ses positions dans les négociations commerciales, afin d'inclure dans les accords commerciaux des clauses prévoyant le respect des normes internationales de droit du travail, de respect des droits de la personne et de l'environnement.
Le Bloc québécois considère que le Canada, pour être crédible sur cette question, doit rapidement adhérer aux grandes conventions de l'Organisation internationale du travail contre les discriminations, le travail forcé et le travail des enfants, et celles pour le droit d'association syndicale et la libre négociation.
Voilà ce à quoi il faut donner la priorité dans nos ententes commerciales. Or, jusqu'à preuve du contraire, les conservateurs et, dernièrement, les libéraux avec leur complicité très évidente dans le projet de loi sur l'accord de libre-échange entre le Canada et la Colombie, refusent de le faire.
L'appui du Bloc québécois au projet de loi est ponctuel. Nous resterons vigilants quant aux accords signés entre le Canada et les autres nations. Si le Canada ne devait pas respecter les principes fondamentaux défendus par notre parti et les intérêts de la nation québécoise, nous, les députés du Bloc québécois, nous lèverons pour critiquer de telles ententes et nous ferons tout en notre pouvoir pour que celles-ci soient annulées ou corrigées.
Nous ne ferons jamais la sourde oreille à des questions aussi respectables et nous n'accepterons jamais de cautionner de telles injustices, comme le font les députés libéraux dans le dossier de l'accord de libre-échange avec la Colombie.
J'espère que le gouvernement fédéral considérera ces principes dans ses prochains accords. Cela devrait pourtant aller de soi, mais les députés d'en face semblent avoir oublié ces notions humanitaires.
Toutefois, chaque fois que les conservateurs, ou tout autre parti au pouvoir, seront négligents face à cette réalité, nous pourrons compter sur le Bloc québécois pour les remettre à l'ordre et pour défendre ces principes. Il en va du respect des droits humains et des travailleurs, du respect de l'environnement et du respect des intérêts du Québec.
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Monsieur le Président, c'est pour moi un plaisir de parler aujourd'hui du projet de loi , c'est-à-dire de la loi de mise en oeuvre de l'accord commercial entre le Canada et le Royaume hachémite de Jordanie.
J'aimerais d'abord faire remarquer à quel point le gouvernement s'est traîné la patte dans ce dossier. Nous avons entendu beaucoup de belles paroles à propos de cet accord comme pour tous les autres déjà proposés par le gouvernement. Il faut cependant savoir ce qu'il en est vraiment. Dès le départ, le gouvernement a obtenu le feu vert de tous les partis de la Chambre pour qu'il soit renvoyé au comité. De nombreuses questions se posent, auxquelles je reviendrai plus en détail tout à l'heure.
Je ne pense pas me tromper en disant que la controverse entourant le projet de loi et l'accord avec la Colombie est aussi claire que palpable ici à la Chambre. Pour ce qui est de l'accord avec la Jordanie, tous les partis étaient d'accord pour que la Chambre en soit saisie, qu'on en débatte et qu'il soit renvoyé au comité, où on aurait pu entendre les nombreux témoins ayant leur mot à dire sur la question et où on aurait pu apporter les amendements requis.
Mais non! Huit mois durant, le gouvernement a refusé de bouger. Huit mois durant, le gouvernement a fait stagner ce dossier invoquant comme prétexte celui de l'accord avec la Colombie. Loin d'être nous aussi d'avis qu'il s'agit d'un pas important pour la politique commerciale du gouvernement, nous aimerions savoir pourquoi le gouvernement a fait du sur-place durant huit mois alors qu'il aurait pu renvoyer le projet de loi au comité après quelques jours, puisqu'il avait le feu vert de tous les partis. Tous les partis ont demandé que le gouvernement le présente, mais celui-ci a refusé obstinément.
Je crois que cette attitude est symptomatique d'un problème plus grand encore: l'incohérence crasse de la politique commerciale — et de la politique industrielle en général — du gouvernement. Depuis quatre ans, nous voyons bien le type de loi que ce gouvernement-là nous propose. Je ne crois pas exagérer en disant que le NPD a été au coeur de tous les débats, mais tout ce temps perdu concernant ce projet de loi illustre à merveille l'amateurisme du gouvernement en matière de politique commerciale.
Ce n'est pas rien. Surtout quand on sait qu'au cours des 20 dernières années, soit depuis l'entrée en vigueur de l'Accord de libre-échange Canada—États-Unis, le revenu réel de la plupart des familles canadienne n'a pas augmenté; il a diminué. Partout au pays, le revenu réel des deux tiers des familles canadiennes, c'est-à-dire des classes moyenne et défavorisée du Canada, a carrément diminué.
Les seuls qui ont bénéficié de la mise en oeuvre de ce type d'accord et qui ont vu leur revenu réel augmenter au cours des 20 dernières années sont les Canadiens les plus riches. En effet, les plus riches, soit 10 p. 100 de la population, ont vu leurs revenus monter en flèche. Les 20 p. 100 dans la tranche de revenus la plus élevée, soit un cinquième des Canadiens, accaparent le plus gros des revenus réels au Canada.
Il est donc faux de dire que les accords de libre-échange que les libéraux et les conservateurs ont mis en oeuvre ont donné lieu à une prospérité instantanée. Statistique Canada contredit les affirmations selon lesquelles ces accords s'inscrivent dans le droit fil d'une stratégie industrielle et économique cohérente et brillante. Il n'y a pas de stratégie économique, il n'y a pas de véritable stratégie commerciale ciblée, si bien que la plupart des Canadiens sont pauvres.
Qu'en est-il du bilan du gouvernement depuis qu'il est arrivé au pouvoir? Il y a eu l'entente sur le bois d'oeuvre, qui a signifié la capitulation du Canada dans ce dossier, qui a fait disparaître des emplois aux quatre coins du Canada, y compris 2 000 dans les deux collectivités de ma circonscription, . Il y a eu l'accord sur la construction navale, une autre capitulation du Canada. Le NPD s'est opposé à cet accord, parce que des centaines de travailleurs des chantiers maritimes d'un bout à l'autre du Canada, y compris au Québec, dans le Canada atlantique et en Colombie-Britannique, lui ont dit qu'il aurait des effets désastreux pour le secteur.
Le gouvernement n'a pas fait d'étude d'impact. Il a improvisé. Il s'est fait damer le pion par le Liechtenstein. J'hésite à le dire, mais le Liechtenstein, un pays européen minuscule, a damé le pion au gouvernement conservateur.
Il suffit de penser à la capitulation du gouvernement dans le dossier du bois d'oeuvre et dans celui de la construction navale et aussi à l'accord commercial avec la Colombie, mais on en reparlera, car je sais qu'il faut nous en tenir à la Jordanie. Il reste que le bilan du gouvernement est vraiment pitoyable.
Que font nos concurrents? Ils investissent dans le soutien de la promotion des exportations. Les États-Unis, l'Australie et l'Union européenne consacrent chaque année des centaines de millions de dollars au soutien de leurs industries d'exportation et de la promotion des exportations. Que faisons-nous? Si le gouvernement veut vraiment s'affranchir de son dilettantisme relativement aux questions commerciales, que fait-il au juste?
J'étais en Argentine, la semaine dernière, en compagnie d'autres députés, dont mon collègue d'. Nous avons appris que, aussi incroyable que cela puisse paraître, le gouvernement conservateur consacre au soutien de la promotion de produits d'exportation sur le marché émergent d'Argentine, pays qui compte 40 millions d'habitants et représente le marché le plus riche d'Amérique du Sud, une somme totale de 400 $ par semaine. C'est moins que ne dépense le dépanneur moyen au Québec ou dans Burnaby—New Westminster dans un rayon d'activité de quelques pâtés de maisons.
Le même scénario se répète un peu partout. Contrairement à d'autres pays, dont l'Australie, le Canada n'investit aux États-Unis que quelques misérables cents sur chaque dollar. En Australie, le budget total de promotion des exportations s'élève à un demi-milliard de dollars, comparativement à quelques millions de dollars au Canada. Voilà ce qui cloche dans la façon de faire du gouvernement. Celui-ci n'accorde tout simplement pas autant de soutien que d'autres grands pays industrialisés avec lesquels nous sommes en concurrence.
Le NPD ne cesse de le dire depuis l'arrivée au pouvoir des conservateurs, le gouvernement doit changer sa façon de faire. Il ne peut pas se contenter d'assister aux cérémonies de signature d'accords commerciaux en pensant que sa part est faite. La plupart des Canadiens s'en trouvent appauvris, et les recettes du Canada en souffrent. Nous avons connu, il y a quelques mois, notre premier déficit commercial depuis 20 ans. De toute évidence, il y a quelque chose qui cloche dans la façon de faire du gouvernement.
Même si ces accords commerciaux étaient des accords de commerce équitable au lieu de s'en tenir au bon vieux modèle de l'ALENA, cela ferait-t-il une différence? Manifestement non, puisque diverses ententes bilatérales se sont en fait traduites par un recul de nos exportations sur les marchés concernés alors qu'à chaque fois, les importations en provenance des pays avec lesquels nous avions signé ces accords augmentaient. Autrement dit, ces pays ont profité des ententes signées avec le Canada, alors que nos exportations vers ces pays ont baissé. Comment peut-on signer un accord sans un suivi ou une stratégie pour renforcer nos exportations? C'est pourtant ce qui s'est passé.
Le problème de la démarche d'ensemble du gouvernement, c'est que non seulement il n'a pas de stratégie industrielle mais il n'est pas axé non plus sur les exportations et il renâcle à investir les fonds de l'État comme le font les autres pays pour consolider leurs industries.
À propos des discours ronflants de ce matin selon lesquels le Canada ne devrait pas protéger et soutenir certaines industries clés, je dirais que c'est au contraire une stratégie que tous les autres pays industrialisés ont adoptée et encouragée pour leurs industries. Alors que le gouvernement conservateur semble décidé à brader nos industries, la France, les États-Unis et tous les autres pays ont au contraire à coeur d'investir dans leurs industrie clés.
Les libéraux et les conservateurs accusent le NPD de proposer des stratégies d'achat au Canada, mais c'est ce que fait le reste du monde. Il s'agit de se doter d'assises solides.
Loin de travailler ensemble, comme le prétendent la ritournelle et le baratin des conservateurs, les Canadiens fabriquent de moins en moins et exportent de plus en plus de produits bruts, que ce soit des grumes ou du bitume, dans tous les domaines en fait, et ce sont en même temps des emplois qui partent ailleurs. Voilà le problème fondamental de la démarche du gouvernement en matière d'économie et plus précisément de politique commerciale.
Venons-en maintenant aux aspects plus précis de cet accord avec la Jordanie. Encore une fois, il va falloir l'examiner de très près à l'étape du comité et y apporter des modifications pour les raisons que je vais exposer dans un instant. Nous essayons de le faire renvoyer au comité pour pouvoir entendre des gens du milieu syndical, des défenseurs des droits de la personne et des gens qui se préoccupent de l'égalité des femmes car ce sont des questions qui reviennent dans les nombreux rapports sur les problèmes de la Jordanie.
Certes, on peut dire que la Jordanie a progressé dans divers domaines. On est loin de la Colombie avec son effroyable cortège de décès, de disparitions et de meurtres de syndicalistes, qui sont le quotidien tragique de ce pays où les paramilitaires travaillent main dans la main avec le gouvernement et l'armée. La Jordanie a réellement essayé de progresser et je reviendrai sur ces progrès.
Toutefois, l'accord lui-même n'est qu'une entente calquée sur l'ALENA, avec les dispositions concernant les relations investisseur-État que nous avons dénoncées par le passé, avec des accords de coopération dérisoires sur la main-d'oeuvre et l'environnement, et c'est à cause de tout cela qu'il va falloir modifier radicalement le projet de loi au comité.
Il est clair qu'on trahit les valeurs canadiennes quand on accepte des dispositions inopérantes sur les droits des travailleurs et l'intendance de l'environnement, alors que la plupart des Canadiens souhaiteraient au contraire des protections très solides dans ces domaines. On sape aussi les valeurs canadiennes quand on accepte que le processus de décision démocratique soit contourné par le biais de dispositions comme celles qui régissent les rapports investisseur-État dans l'ALENA. Nous avons déjà abordé la question ici. À notre avis, on fait complètement fausse route à cet égard.
Étant donné le cadre de l'accord — modèle inadéquat dont les autres pays s'éloignent en faveur d'approches commerciales plus équitables — quelle est la situation en Jordanie? Quels sont ses problèmes?
J'aimerais citer trois rapports. Le premier a été publié il y a quelques semaines, le 11 mars plus exactement, par le Bureau of Democracy, Human Rights and Labor. Il s'agit du rapport de 2009 sur le bilan de divers pays au chapitre des droits de la personne; au sujet de la Jordanie, il dit:
Des lois et règlements contraignants limitent la liberté d'expression et de presse, et l'ingérence du gouvernement dans les médias et les menaces d'amendes et de détention mènent à l'auto-censure, selon des journalistes et des organisations de défense des droits de la personne. Le gouvernement continue également de limiter la liberté de réunion et d'association. Des militants religieux et des membres du parti d'opposition ont noté une diminution du harcèlement gouvernemental; toutefois, les femmes, les minorités religieuses, les personnes ayant renoncé à la foi musulmane en faveur d'autres religions et celles d'origine palestinienne ne sont toujours pas égales aux yeux de la société et de la loi. Les organisations locales de défense des droits de la personne font état de violence généralisée contre les femmes et les enfants. Le gouvernement limite les droits des travailleurs, et les organisations locales et internationales de défense des droits de la personne signalent une incidence élevée de mauvais traitement des travailleurs domestiques étrangers.
Le rapport cite ensuite diverses causes précises de préoccupation concernant le respect des droits de la personne. Je pense qu'il est important de parler de ces rapports et de noter certaines comparaisons avec d'autres pays.
L'atteinte arbitraire ou illégale à la vie
Il a été signalé que le gouvernement ou des agents travaillant pour celui-ci auraient commis des exécutions illégales.
Le 8 novembre, Saddam Al Saoud est décédé des suites de blessures qu'il aurait subies pendant qu'il était en garde à vue au poste de police d'Al Hussein. Le 17 octobre, la police avait appréhendé Al Saoud pendant une bagarre entre vendeurs de rue à Amman. Par la suite, le 18 octobre, les autorités avaient transféré Al Saoud, inconscient, dans un hôpital privé. La famille de la victime a déclaré que la police avait causé les blessures d'Al Saoud en le frappant à la tête avec un fusil. Le ministère de la Sécurité publique a fait enquête avant de mettre six agents de police en état d'arrestation en les accusant de deux crimes: coups causant la mort et transgression des règlements du ministère de la Sécurité publique. À la fin de l'année, les accusations portées contre les policiers étaient toujours en instance.
Les auteurs citent une autre affaire, celle de Fakhri Kreishan, qui est décédé des suites de blessures qu'il aurait subies pendant une altercation avec la police dans la ville méridionale de Ma'an. Encore une fois, les procureurs de la police ont fait enquête, arrêté le policier impliqué et porté contre lui des accusations pour deux crimes. L'affaire est toujours en instance devant le tribunal de police.
En ce qui concerne la privation illégale de la vie, nous avons deux cas à rapporter. Il convient de préciser que, dans les deux cas, les agents de police font face à des accusations. Voilà qui est important et différent de ce qui se passe dans certains autres pays, notamment en Colombie, où les massacres se poursuivent. Il n'y a pas d'autre façon de le dire. Dans ce pays, les meurtres de défenseurs des droits de la personne et de syndicalistes sont perpétrés en toute impunité. En effet, 95 p. 100 des affaires ne donnent lieu à aucune poursuite judiciaire. En Jordanie, les deux affaires en question ont abouti à des accusations.
Les disparitions font partie de la catégorie B. La bonne nouvelle, c'est qu'aucune disparition pour des raisons politiques n'a été signalée. Cette situation tranche avec celle d'autres pays. En Colombie, pays que je vais donner comme exemple, les disparitions sont un phénomène répandu. Des centaines de personnes se sont tout simplement volatilisées. Elles ont été kidnappées pour des motifs politiques ou tuées par des groupes paramilitaires de connivence avec le gouvernement colombien et l'armée colombienne. Aucune disparition pour des raisons politiques n'a été rapportée en Jordanie en 2009.
La torture et autres traitements ou châtiments cruels, inhumains ou dégradants sont classés dans la catégorie C. On peut lire dans le rapport que:
La loi interdit de telles pratiques. Cependant les ONG internationales continuent de prétendre que la torture et les mauvais traitements infligés pendant la détention par les forces de police ou de sécurité étaient toujours monnaie courante. Néanmoins, certaines ONG nationales affirment que les récentes initiatives de réforme avaient permis de réduire le nombre de cas de torture et de mauvais traitement aux mains de la police et des services de sécurité dans les établissements de détention.
Le fait que la situation se soit améliorée, comme le rapportent les ONG, est une bonne chose. Bien entendu, nous devons comparer cette situation avec ce qui se passe dans d'autres pays, la Colombie par exemple, où la Commission colombienne des juristes fait état d'agressions sexuelles perpétrées par les soldats et les paramilitaires colombiens acoquinés avec le gouvernement colombien.
Selon le Bureau of Democracy, Human Rights, and Labor, il est évident qu'il y a lieu de s'inquiéter. Cependant, on peut noter certains signes d'amélioration.
J'aimerais maintenant citer l'organisme Human Rights Watch. Dans son rapport World Report 2010: Harsher Climate for Human Rights cet organisme rapporte des préoccupations au sujet des travailleurs domestiques migrants et des mauvais traitements infligés aux femmes en Jordanie. Voici ce que dit ce rapport:
En 2010, la Jordanie devrait:
Supprimer les dispositions de la loi autorisant la réduction des peines des meurtriers « d'honneur » compte tenu de circonstances atténuantes.
Assouplir les restrictions visant les organisations non gouvernementales prévues par la loi afin de la rendre conforme aux normes internationales sur la liberté d'association.
Revoir la réglementation régissant les travailleurs domestiques migrants afin de l'harmoniser avec les normes internationales concernant la main-d'oeuvre et les droits de la personne, et établir un mécanisme permettant d'enquêter sur les allégations de mauvais traitements à l'endroit des travailleurs.
—encore une fois, une préoccupation au sujet des travailleurs domestiques—
Renforcer la reddition de comptes concernant la torture en transférant du tribunal de police aux tribunaux civils la compétence en matière d'actes de torture perpétrés par des agents de police.
Cesser de retirer la nationalité jordanienne aux citoyens d'origine palestinienne.
Il s'agit là de préoccupations signalées par l'organisme Human Rights Watch.
Le dernier rapport que je voudrais citer a été rédigé par Lubna Dawany Nimry, une avocate jordanienne, qui s'est inquiétée du traitement réservé aux femmes. Elle indique qu'il se produit chaque année environ 25 soi-disant crimes d'honneur, qui ne sont rien d'autre que des cas de mauvais traitements à l'endroit des femmes.
Elle indique que des défenseurs des droits de la personne luttent activement contre ce phénomène et que certains membres de la famille royale ont pris part à des manifestations contre les articles 98 et 340 du code pénal. Elle ajoute que, dans certaines régions de Jordanie, une femme risque sa vie si elle parle à un homme qui n'est pas un parent. Elle indique très clairement qu'il faut modifier en profondeur le code pénal jordanien afin d'assurer l'égalité des femmes.
Pour toutes ces raisons, nous avons des réserves au sujet de cet accord.