Que la Chambre demande au Gouvernement du Canada de rétablir immédiatement le formulaire détaillé obligatoire du recensement; et étant donné que personne n’a jamais été emprisonné pour ne pas avoir complété le recensement, la Chambre demande de plus que le gouvernement présente des amendements législatifs à la Loi sur la statistique afin d’éliminer la clause au sujet de l’emprisonnement de l'article 31 de la Loi en ce qui a trait au formulaire détaillé obligatoire, au recensement de la population et au recensement agricole.
-- Monsieur le Président, en débutant, j'aimerais dire que ce matin, je vais partager mon temps avec ma collègue de . De plus, j'apprécierais grandement que vous m'avertissiez une minute avant la fin des dix premières minutes de ma présentation.
C'est avec fierté que je me lève aujourd'hui pour la première journée d'opposition du Parti libéral pour parler d'un enjeu extrêmement important pour le Canada. Je vais prendre la peine de lire en français la motion de notre parti:
Que la Chambre demande au Gouvernement du Canada de rétablir immédiatement le formulaire détaillé obligatoire du recensement; et étant donné que personne n’a jamais été emprisonné pour ne pas avoir complété le recensement, la Chambre demande de plus que le gouvernement présente des amendements législatifs à la Loi sur la statistique afin d’éliminer la clause au sujet de l’emprisonnement de l'article 31 de la Loi en ce qui a trait au formulaire détaillé obligatoire, au recensement de la population et au recensement agricole.
Que s'est-il passé cet été? Je peux vous garantir que tous mes collègues qui sont à la Chambre ici, aujourd'hui, en quittant le Parlement au mois de juin, n'auraient jamais pensé que, rendu au mois de septembre, on serait ici en train de débattre chaudement de la question du recensement.
[Traduction]
Que s'est-il passé pendant l'été? Lorsque je suis entré en politique, je l'ai fait parce que j'avais, comme mon parti, une vision pour notre pays. Les autres partis ont des visions différentes, mais jamais au grand jamais je n'aurais pensé devoir aujourd'hui avancer des arguments pour que le gouvernement revienne sur la décision absurde qu'il a prise de modifier le questionnaire détaillé de recensement.
Pendant les jours tranquilles de l'été, alors que les gens étaient au chalet et ne le surveillaient pas, le gouvernement actuel en a profité, comme il le fait parfois dans d'autres dossiers, pour décider d'annoncer un changement touchant le formulaire détaillé de recensement, compromettant ainsi l'utilité future de cette très importante et précieuse base de données qui sert à brosser un portrait fidèle de la complexe mosaïque canadienne, et de rendre facultatif un exercice obligatoire, sans se rendre compte, au départ en tout cas, du moins à ce qu'il dit, que la valeur du recensement s'en trouverait compromise.
En soi, le recensement constitue une base de données qui permet au gouvernement de formuler ses politiques de la façon la plus judicieuse possible dans l'intérêt des Canadiens. Cet exercice doit être précis et exhaustif parce que la mosaïque canadienne est composée de riches et de pauvres, de minorités linguistiques et ethniques et de nos concitoyens des Premières nations. Comme le Canada est une mosaïque complexe, pour en avoir une représentation exacte, il faut connaître le niveau d'éducation des Canadiens et leurs habitudes de migration quotidienne, parce que nous voulons promouvoir le transport en commun en cette époque où l'environnement est un enjeu majeur. Enfin, pour nous permettre de mettre en place des politiques éclairées, nous devons avoir une foule de réponses importantes à certaines questions.
Pourquoi l'actuel gouvernement n'a-t-il pas compris que le remplacement d'un recensement obligatoire par une enquête à participation facultative mettrait en péril cette précieuse base de données?
De toute évidence, il s'agit d'une mauvaise décision à laquelle nous avons réagi de façon très décisive, à l'instar de l'ensemble des Canadiens. En fait, comme les députés le savent, plus de 350 groupes dont la réputation est bien établie ont dit « Cessez cette insanité. Ne faites pas ce changement. C'est une erreur. Le recensement est un outil essentiel pour l'élaboration de la politique publique. C'est également un outil essentiel pour les organisations non gouvernementales qui s'intéressent aux questions sociales et économiques. Pourquoi modifier une formule qui fonctionne extrêmement bien depuis 30 ans, essentiellement sous la même forme? »
Nombre de personnes m'ont demandé pourquoi le gouvernement avait pris cette décision. J'ai bien du mal à répondre à cette question.
À mon avis, la seule explication logique c'est que les conservateurs ont pensé se faire du capital politique en annonçant cette décision; ils ont cru pouvoir consolider leur base d'appui ou rallier de nouveaux membres au Parti conservateur. Évidemment, cette approche nie l'importance de la rigueur scientifique, de la logique et de la vérité pour remplacer ces principes par une idéologie dogmatique. Elle nous mène dans le noir. Cette décision du gouvernement n'est pas judicieuse.
Permettez-moi de citer quelques opinions à cet égard. L'Association canadienne des professeures et professeurs d'université a déclaré: « Nous sommes gravement préoccupés par les conséquences désastreuses que cette mesure aura sur la compréhension scientifique de la société canadienne et sur la capacité de prendre des décisions éclairées relatives aux politiques sociales et économiques. »
[Français]
On ne peut plus tirer certaines conclusions ni savoir si l'écart s'agrandit entre jeunes et vieux et entre certaines régions. Ce genre d'analyse ne sera plus possible.
[Traduction]
Le représentant du Conseil économique des provinces de l'Atlantique a dit: « Le degré de fiabilité ne sera pas le même avec une enquête à participation volontaire. »
[Français]
Cela nous rend beaucoup plus vulnérables: si un gouvernement ou un groupe d'intérêts prétend quelque chose, on ne disposera pas des données nécessaires pour les contredire.
[Traduction]
Les spécialistes de la planification au pays doivent pouvoir se baser sur des données précises, opportunes et cohérentes pour aider à construire les collectivités canadiennes. En rendant la collecte de ces données volontaires, nous affaiblissons les politiques gouvernementales.
Nous sommes au courant de la lettre qu'ont envoyée deux anciens greffiers du Conseil privé, MM. Himelfarb et Cappe, et de celle de David Dodge, un ancien gouverneur de la Banque du Canada dont l'opinion est hautement respectée. Il y a aussi Ivan Fellegi, qui est véritablement le fondateur de Statistique Canada, qui a écrit au premier ministre pour l'exhorter à reconsidérer sa décision.
Nous avons également entendu parler de groupes évangéliques et du Congrès juif canadien qui ont dit très clairement que cette décision était mauvaise.
Nous avons également entendu le gouverneur de la Banque du Canada, Mark Carney, affirmer récemment que cette décision pourrait compliquer la tâche du gouvernement du Canada en ce qui a trait à sa politique budgétaire.
Un grand nombre de plaintes ont été présentées haut et fort au cours des trois derniers mois. Permettez-moi d'en mentionner quelques-uns. Bon nombre de ces plaintes viennent de circonscriptions où des députés résident. Les administrations municipales des villes de Calgary, Edmonton, Fredericton, Hamilton, Kelowna, Kitimat, Langley, Mississauga, North Vancouver, Merritt, Montréal, New Westminster, Ottawa, Penticton, Pitt Meadows, Prince George, Spruce Grove, Surrey, Toronto, Vernon et Victoria ne sont que quelques-unes de celles qui ont souligné que c'était là une mauvaise décision que le gouvernement avait prise.
Nous avons également entendu un grand nombre de groupes de tous genres qui ont protesté parce qu'ils se rendaient compte que ces questionnaires volontaires ne seraient remplis que par un certain nombre de Canadiens qui, au mieux, pourrait peut-être atteindre 65 p. 100 de la population. Ceux qui ne seront pas représentés sont ceux qui ne rempliront pas le formulaire. Ce sont eux qui auront le plus besoin des politiques du gouvernement du Canada, les gens des minorités ethniques et linguistiques. À l'heure actuelle, la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada poursuit le gouvernement pour tenter de le faire revenir sur sa décision.
Je laisserai maintenant la parole à la députée de . Nous discuterons de cette motion tout au cours de la journée, mais j'espère sincèrement que les arguments que nous présentons aujourd'hui pousseront le gouvernement à revoir cette mesure malavisée dans l'intérêt de tous les Canadiens.
:
Madame la Présidente, mon collègue a présenté d'excellents arguments en faveur du formulaire obligatoire du recensement et du retrait des punitions pénales.
[Traduction]
En tant que porte-parole en matière de réforme démocratique et marraine d'un projet de loi d'initiative parlementaire visant à inscrire dans la Loi sur la statistique le formulaire détaillé du recensement à caractère obligatoire, j'aimerais utiliser mon temps de parole aujourd'hui pour démontrer que la décision du gouvernement conservateur d'éliminer ce formulaire est un outrage à la démocratie et au processus parlementaire. Nous dénonçons le gouvernement pour ce qu'il a fait et la manière dont il s'y est pris.
Ce matin, l'éditorial du Globe and Mail disait qu'il incombe au Parlement de décider de l'avenir du recensement.
[Français]
Cependant, selon l'édition du Devoir de ce matin, le a déjà annoncé qu'il ne tiendra pas compte du résultat du vote. Il a déclaré aux journalistes, hier, que son gouvernement adoptait typiquement la position selon laquelle une motion n'est rien de plus qu'une motion et n'engage en rien le gouvernement en place.
[Traduction]
Comme le député de l'a déclaré, la décision au sujet du recensement figure dans la liste des priorités du premier ministre. Il n'y a eu aucune consultation, personne n'appuie cette idée et la décision est fondée sur une idéologie libertaire. Cela n'a rien à voir avec les éléments de preuve et les avis des experts et des personnes qui utilisent les données du recensement.
[Français]
Les Canadiens doivent être mis au courant que cette décision a été prise dans le plus grand secret. Il n'y a eu aucune consultation des groupes qui utilisent ces statistiques. Pis encore, il n'y a même pas eu de consultation des comités nommés par ce gouvernement, comme le Conseil national de la statistique. Ce dernier est mandaté pour tenir le statisticien en chef au courant de toutes les activités de Statistique Canada. De plus, de façon implicite, il est responsable de toutes les priorités des programmes. Il n'a même pas été consulté. Maintenant, on découvre que tous ces gens s'opposent à la décision du gouvernement.
[Traduction]
Cette décision a été prise par un ministre, sans consultation, en secret, sans même demander l'avis du comité mis sur pied pour conseiller le ministre et le statisticien en chef, pendant que le Parlement ne siégeait pas. Pour couronner le tout, le ministre a fait savoir que, peu importe le résultat du vote, il ne se pliera pas à la volonté de la Chambre.
Il semble que le ministre a pris cette décision sur l'ordre du cabinet du premier ministre et qu'il met en oeuvre l'idéologie d'un qui préfère que le gouvernement n'ait aucun rôle à jouer et qui n'est pas très chaud à l'idée qu'une agence gouvernementale puisse recueillir des données et lever le voile sur les politiques du gouvernement qui reposent sur une idéologie faisant fi de tous les faits.
Il est préférable de s'en prendre au messager quand on s'aperçoit que, selon les statistiques, la criminalité est en baisse. Statistique Canada fournit les faits. Comme le gouvernement préférerait ne pas connaître les faits, il punit l'organisme qui est chargé de les recueillir.
En gestion, la règle d'or est la suivante: chose mesurée est chose remarquée, et chose remarquée finit par se réaliser. Or, le gouvernement refuse de gérer et de gouverner. Tout ce qu'il sait faire, c'est de mener des campagnes pour critiquer l'opposition et pour semer la peur. En fait, il refuse de se conformer au principe de la saine gestion gouvernementale, qui repose sur des données probantes.
Toutefois, il n'y a pas de gouvernement au pays de la paix, de l'ordre et du bon gouvernement. Le parti au pouvoir ne croit pas au rôle du gouvernement. Il préfère ne pas avoir de statistiques si celles-ci sont pour lui rappeler la nécessité de son intervention.
Comme nous l'a indiqué le professeur Brenda Elias à la table ronde qui a eu lieu dans le cadre de l'assemblée générale de l'Assemblée des Premières nations, les personnes qui ne sont pas comptées ne comptent pas. Le recensement est à la base de la responsabilité gouvernementale. Il est essentiel que chacun puisse être compté.
Le 21 juillet, le Comité de l'industrie a entendu le témoignage de la merveilleuse Elisapee Sheutiapik, qui est membre du conseil de l'Inuit Tapiriit Kanatami. Voici ce qu'elle a dit:
Il ne faut pas oublier que le long formulaire contient des questions comme: combien de chambres à coucher y a-t-il dans la maison? Dans les collectivités de l'Arctique, il fait trop froid pour être sans abri. Il y a donc du sans-abrisme caché. Nous n'obtiendrons jamais ces données si le long formulaire n'est pas rempli.
Elle a ajouté ceci:
[...] parce que, dans les communautés du Nord, les formulaires intimident encore assez la population, surtout les aînés, parce que certains ne savent toujours pas lire l'anglais. Ils sont donc intimidés. Cependant, si quelqu'un dûment formé par Statistique Canada fait du porte-à-porte, ces gens seraient très heureux d'accueillir cette personne qui les aide à remplir ces formulaires. [...] En tant qu'Inuits, vu que nous sommes peu nombreux au sein de notre grande nation, nous sommes parfois oubliés, mais ces données nous apportent des renseignements réels dont nous avons besoin à tous les niveaux dans les organisations gouvernementales et non gouvernementales.
[Français]
C'est pourquoi les francophones présentent aujourd'hui leur cas en cour. Si on n'est pas compté, c'est qu'on ne compte pas. Ce gouvernement conservateur abdique ses responsabilités constitutionnelles.
[Traduction]
Le Conseil canadien de développement social a identifié plus de 370 groupes en faveur du recensement, à l'instar, comme mon collègue l'a dit, de la Banque du Canada, de la Fédération canadienne des municipalités, de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, des évêques et des églises. S'y opposent l'Institut Fraser et la National Citizens Coalition. Nous croyons qu'ils auront bien du mal à expliquer à la population pourquoi ils recommandent au gouvernement de dépenser 30 millions de dollars de plus pour obtenir de l'information moins fiable. Cette brillante idée vient du .
Nous croyons que le Parlement a le droit d'ordonner au gouvernement d'épargner 30 millions de dollars.
Lors de la conférence Women Deliver, à Washington, une représentante de l'Institut Guttmacher a dit que le Canada avait cessé de faire ses preuves et déploré le fait qu'il n'avait pourtant pas cette réputation sous le règne de George Bush. Notre a choisi une idéologie axée sur la médiocrité politique.
Cela est gênant pour les experts et pour les organismes communautaires qui ont besoin de données pour planifier leur action. Cela est gênant pour les économistes. Au nom de l'idéologie, le gouvernement conservateur est prêt à dépenser 30 millions de dollars de plus afin d'obtenir des données moins fiables, mais ce qui est pis encore, des données qu'il est impossible de comparer à celles des recensements antérieurs. Il est impossible de déterminer si les choses s'améliorent ou se gâtent. C'est un peu comme si, en tant que médecin, je m'en remettais à un laboratoire qui n'utilise plus les mêmes tests, de sorte que je ne pourrais plus savoir si les taux de sucre ou de cholestérol de mes patients sont élevés ou bas.
Le est prêt à débourser davantage pour obtenir moins. Il a déjà supprimé l'excellente Enquête sur la participation et les limitations d'activités qui recense les besoins des Canadiens handicapés.
Nous devons rappeler que, si le gouvernement pensait que le formulaire de recensement élargi à participation volontaire était mieux, il aurait pu et aurait dû le dire. Au lieu de cela, le 28 juillet, il a discrètement publié dans la Gazette du Canada les questions pour le recensement de 2011. Heureusement, la consciencieuse journaliste de la Presse canadienne Jennifer Ditchburn a remarqué que les questions du formulaire détaillé obligatoire du recensement n'y figuraient pas et a trouvé, parmi une foule de choses sur le site web de Statistique Canada, une Enquête nationale auprès des ménages, à participation volontaire. Elle a sonné l'alarme. Les gens qui utilisent les données, qui en ont besoin, étaient scandalisés. On ne les avait pas consultés du tout. La décision avait été prise unilatéralement. Ils n'arrivaient pas à croire que le gouvernement ait pu prendre cette décision, sans égard à ceux qui ont besoin de ces données pour leur planification.
Comme nous l'avons entendu, de la Banque du Canada à la Fédération canadienne des municipalités, tous ont eu l'impression qu'on sapait leurs efforts et qu'on faisait fi de leurs besoins. Plus alarmant encore, le conseil nommé par le gouvernement pour le conseiller sur les questions liées au recensement avait été exclu de la décision. Il n'a pas été consulté. Le conseil consultatif n'a pas pu donner son avis. Les membres du conseil n'ont pas trouvé cela drôle et ont exprimé clairement leur désaccord.
Encore une fois, le gouvernement a tenté d'imposer une décision dans le secret et de façon sournoise au moment de la visite des représentants du G8 et du G20, pendant que le Parlement ne siégeait pas, en espérant que les Canadiens, les utilisateurs des données du recensement et, bien sûr, le comité consultatif ne se rendraient compte de rien. Encore une fois, le gouvernement a adopté une attitude paternaliste et a traité les Canadiens comme s'ils étaient stupides. Les gens n'avaient pas à se mettre martel en tête. Les conservateurs espéraient que lorsqu'on découvrirait le pot aux roses et qu'on constaterait leur décision, il serait déjà trop tard pour apporter des changements au recensement de 2011. Ce n'est pas le cas.
Les conservateurs ont ensuite fait de affirmations mensongères à l'égard du statisticien en chef, comme si c'était lui qui avait recommandé cette mesure. Je cite la déclaration de Munir Sheikh à ce sujet:
J'aimerais profiter de l'occasion pour faire un commentaire sur un aspect technique d'ordre statistique qui est devenu sujet de discussion dans les médias. Cela est relatif à la question de savoir si une enquête volontaire peut remplacer un recensement obligatoire.
M. Fellegi a indiqué que le gouvernement a mal interprété la mise en application du formulaire détaillé du recensement car, jusqu'en 1971, il n'existait que ce formulaire. En effet, c'est en 1971 que le formulaire abrégé a été instauré.
[Français]
De façon continuelle, le gouvernement fait outrage au Parlement et aux institutions démocratiques du Canada. On traite ce Parlement comme une boîte à suggestions décorée une fois par année avec des lumières de Noël.
[Traduction]
Hier, le a dit qu'il ne se soumettra pas à la volonté du Parlement. C'est l'attitude qui est de mise depuis les deux dernières législatures.
Le gouvernement utilise le formulaire détaillé de recensement comme test. Maintenant que les Canadiens voient ce qui se passe, les conservateurs écouteront-ils enfin? Écouteront-ils les experts et les collectivités? Pour une fois, laisseront-ils le Parlement prendre la décision, car, comme on pouvait le lire ce matin dans le Globe and Mail: « Le sort du recensement incombe au Parlement »?
:
Madame la Présidente, je suis heureux de participer au débat aujourd’hui afin de parler des changements que le gouvernement a annoncés cet été dans le cadre de la révision du processus de recensement de 2011, y compris le remplacement du questionnaire détaillé obligatoire par la nouvelle enquête nationale à participation volontaire auprès des ménages.
Avant de commencer, je crois qu’il est important de noter les divergences entre la position du gouvernement et celle de l’opposition. Les différences ne pourraient pas être plus claires.
Le gouvernement croit qu’il est de son devoir de trouver un juste équilibre entre le besoin d’information et le fait de recueillir des renseignements en menaçant les gens d’emprisonnement ou d’amendes. L’opposition rejette ces préoccupations et exige que les Canadiens soient tenus, qu’ils le veuillent ou non, de donner des renseignements détaillés en réponse à plus de 40 pages de questions.
Nous sommes d’avis que le point de vue de l’opposition ne permet pas de réaliser l’équilibre. C’est aussi simple que cela.
Nous avons toujours appuyé et continuons à appuyer pleinement les objectifs du recensement. Nous devons cependant trouver un équilibre entre le droit des Canadiens de refuser de répondre à ces questions et le désir du gouvernement d’obtenir des réponses.
C’est dans ce contexte que le gouvernement a annoncé sa décision de remplacer le questionnaire détaillé obligatoire du recensement par une enquête volontaire. Le gouvernement croit en effet que personne ne devrait être tenu, sous peine d’emprisonnement ou d’amende, de répondre aux 40 pages de questions du questionnaire détaillé.
Permettez-moi de poser une petite question hypothétique à n’importe quel député faisant partie de la coalition entre libéraux, bloquistes ou néo-démocrates. Si un électeur de leur circonscription ne veut pas remplir les 40 pages du questionnaire demandant des renseignements personnels et privés sur son ascendance, ses croyances, ses activités quotidiennes ou l’état de sa maison, convient-il que le gouvernement le harcèle jusqu’à ce qu’il revienne sur sa décision?
Les députés d’en face ont clairement dit que c’est cela qu’ils veulent, que c’est cela qu’ils défendent. Je ne peux pas souscrire à cette position, et le gouvernement non plus. Certains considèrent à juste titre que le fait de demander à quelqu’un combien de journées de congé de maladie il a pris l’année dernière, en le menaçant de le jeter en prison ou de lui imposer une grosse amende, est une intrusion intolérable de la part de l’État.
C’est pour cette raison que notre gouvernement a cherché un compromis en établissant la nouvelle enquête nationale à participation volontaire auprès des ménages.
Je crois, comme le gouvernement et beaucoup de Canadiens que nous représentons, que cette nouvelle approche réalise l’équilibre entre le besoin d’information sur les ménages, aux fins de la politique publique, et la nécessité de supprimer les sanctions indues contre les Canadiens qui préfèrent ne pas répondre au questionnaire détaillé.
J’ai été profondément déçu de constater, en écoutant le débat qui s’est déroulé ces deux derniers mois, que certains semblent accepter sans trop s’en formaliser les moyens coercitifs utilisés pour recueillir de plus en plus de renseignements personnels sur les Canadiens. C’est une forme de collecte abusive de données.
Nous savons que les entreprises et d’autres organisations sont avides d’information, mais en maintenant ce questionnaire de 40 pages, le gouvernement se transformerait en un organe d’exécution chargé d’obtenir cette information par la menace.
L’opposition, je le sais, dit que personne n’a été emprisonné, mais, en toute franchise, lorsque des agents du gouvernement frappent à la porte de citoyens en leur disant « Vous irez en prison », c’est bel et bien une menace d’emprisonnement et de grosses amendes. Oui, ces menaces étaient faites par des agents du gouvernement.
Pensez-y. Pour beaucoup de membres de notre société, beaucoup de Canadiens faisant partie de nos amis, de nos voisins et peut-être même de nos parents, c’est la seule occasion d’avoir affaire au gouvernement. Et cette occasion n’est pas très agréable.
J’ai parlé avec certains des recenseurs embauchés. Parmi eux, une dame en larmes m’a expliqué que des néo-Canadiens terrifiés pensaient qu’ils allaient être expulsés s’ils ne répondaient pas aux questions du formulaire détaillé.
Des députés d’en face sont en train de rire de moi. Il n’y a pas dans cette question matière à rire. Ils rient et m’interrompent, ce qui témoigne de leur désinvolture.
Un autre recenseur a dit que, malgré les plus grands efforts de Statistique Canada, qui a une politique à cet égard, certains recenseurs proviennent du même quartier que les personnes recensées, de sorte que le quartier peut prendre connaissance d’une partie des renseignements les plus personnels et intimes des répondants.
Pour l’opposition et d’autres segments de notre société, ce ne sont là que des détails négligeables. Ce n’est pas un grand sujet de préoccupation. Pour eux, l’information est essentielle et rien ne doit faire contrepoids à la volonté de la recueillir. Nous croyons cependant que c’est là une terrible dégradation du contrat social entre les gouvernants et les administrés. Nous devons rétablir l’équilibre.
Aux fins du débat sur la motion, j’admets que des porte-parole ont réclamé du gouvernement des modifications législatives pour retirer complètement de l’article 31 de la Loi sur la statistique les dispositions sur l’emprisonnement relativement au formulaire détaillé, au recensement de la population et au recensement de l’agriculture.
Mes collègues seront heureux d’apprendre que j’ai déjà annoncé que nous supprimerions cette lourde sanction si la Chambre et l’autre endroit y consentent. La nouvelle loi fera disparaître la menace d’emprisonnement pour celui qui exerce le droit de refuser de participer à l’une ou l’autre des enquêtes obligatoires de Statistique Canada.
Par le passé, tous les gouvernements du Canada, quelle que soit leur allégeance politique, ont toujours eu pour position qu’il leur appartenait de déterminer quelles questions sont obligatoires ou facultatives. Ce n’est pas la première fois que des modifications sont apportées au recensement, qui a évolué avec le temps. Des questions sont modifiées, ajoutées ou supprimées à chaque nouveau cycle de façon à tenir compte d’un certain nombre de facteurs comme les réactions aux consultations, l’appui de la législation, les besoins en matière de politique, la comparabilité dans le temps et l’existence d’autres sources de données.
[Français]
Même si le recensement remonte à 1871, le formulaire long existe depuis 1971 seulement. La quantité de renseignements personnels détaillés que le gouvernement demande aux Canadiens a beaucoup augmenté.
[Traduction]
Il ne faut pas oublier que les questions de base du formulaire détaillé du recensement sont restées constantes pendant des décennies, mais que les 40 ou 50 questions de plus qui sont soudain apparues en 1971 ont été continuellement modifiées et que d’autres se sont ajoutées. Il n’y a pas que les questions qui aient changé. Les modalités de collecte ont aussi évolué. Des modifications ont été certainement pour le mieux. Par exemple, en 1971, les Canadiens ont commencé à remplir eux-mêmes le questionnaire au lieu de répondre verbalement à un interviewer, bien que la pratique subsiste dans certains cas d’exception. À compter de 2006, les Canadiens ont pu donner leurs réponses par Internet. Nous espérons que, en 2011, un nombre de Canadiens encore plus grand choisiront de répondre en ligne au questionnaire du recensement et à l’Enquête nationale auprès des ménages.
Par contre, on n’a pas aussi bien accueilli les questions d’approfondissement, dans un régime obligatoire, et elles sont d’autant moins bien accueillies dans un contexte technologique où les Canadiens sont de plus en plus soucieux de protéger leurs renseignements personnels.
Le questionnaire abrégé reste obligatoire, mais les questions qu’il contient sont beaucoup moins exigeantes. Comme il est abrégé, ce questionnaire est jugé moins difficile à remplir. Il contient des questions sur des renseignements démographiques de base comme la date de naissance, le sexe, la situation de famille, la langue maternelle, comme c’était le cas précédemment. Même s’il est obligatoire de remplir le questionnaire abrégé, en raison de la nature des questions et du fait qu’il n’y en a que 10, la plupart des citoyens y verront beaucoup moins une invasion de leur vie privée.
Je tiens à répéter ici que tous les ménages canadiens recevront le questionnaire abrégé du recensement en 2011. Comme l’ont laissé entendre mes réponses au cours de la période des questions, la semaine dernière, notre gouvernement, qui est un gouvernement juste et raisonnable, a également ajouté deux questions supplémentaires concernant les langues officielles dans le formulaire abrégé. Je peux assurer à la Chambre que toutes les questions relatives aux langues officielles posées lors du recensement de 2006 seront maintenues pour le recensement de 2011, y compris celles qui concernent la connaissance des langues officielles, la langue maternelle et les langues parlées à la maison.
[Français]
L'ajout de questions au recensement de 2011 à propos de la capacité d'une personne à parler l'une des deux langues officielles du Canada et au sujet de la langue parlée à la maison permettra au gouvernement de respecter la Charte canadienne des droits et libertés et la Loi sur les langues officielles.
[Traduction]
Je crois vraiment qu’une enquête à participation volontaire associée au recensement, pour lequel nous supprimons la menace d’emprisonnement dans les cas de non-réponse, constitue un équilibre raisonnable entre le respect de la vie privée des citoyens et le besoin d’obtenir ces données. Cela ne veut pas dire que l’Enquête nationale auprès des ménages sera moins complète que le questionnaire obligatoire actuel. Les questions seront pratiquement les mêmes et porteront notamment sur le revenu et le logement, par exemple, pour mesurer la densité d’occupation et évaluer le besoin de logements, ce qui permettra l’élaboration de programmes de logements communautaires.
Une des principales questions abordées au cours du débat public au sujet de ces changements apportés au recensement portait sur la qualité des données. Je peux dire que Statistique Canada est convaincu, à juste titre, que l’Enquête nationale auprès des ménages fournira des données utilisables et utiles qui pourront répondre aux besoins de nombreux usagers.
Sur la recommandation de Statistique Canada, qui reconnaît que la taille de l’échantillon diminuera si le questionnaire détaillé devient facultatif, le gouvernement a accepté d’envoyer l’Enquête nationale auprès des ménages à presque deux fois plus de ménages canadiens comparativement au questionnaire détaillé de 2006. Ce sera l’enquête la plus vaste jamais menée auprès de la population canadienne étant donné que le questionnaire détaillé sera distribué à un plus grand nombre de ménages.
Statistique Canada administrera l’Enquête nationale auprès des ménages en assurant une coordination étroite avec le recensement. Il utilisera diverses méthodes pour inciter les gens à remplir le nouveau questionnaire. Ce sont des méthodes similaires à celles utilisées pour d’autres enquêtes facultatives auprès des ménages, qui se sont déjà révélées très utiles. Cela comprend des envois directs par la poste pour souligner l’importance de cette enquête et des rappels aux ménages qui n’ont pas répondu. Statistique Canada cherchera également la meilleure façon d’inciter les Canadiens à remplir à la fois le questionnaire de recensement et l’Enquête nationale auprès des ménages.
Cette approche repose sur une solution raisonnable qui nous permet d’obtenir ce que le statisticien en chef a appelé des « données utiles et utilisables » pour répondre aux besoins de nombreux usagers. Pour faire en sorte que la taille de l’échantillon soit suffisante pour que ces données soient utiles et utilisables, nous devons travailler activement avec les particuliers et les groupes. Le gouvernement a prévu de le faire, tout en comptant sur la capacité de Statistique Canada de mener des enquêtes facultatives, son expérience, son professionnalisme et ses méthodes rigoureuses.
Grâce aux méthodologies que je viens de décrire, je pense que certains des problèmes de distorsion seront résolus. Toutefois, notre gouvernement cherche à trouver un juste équilibre entre les besoins des organismes gouvernementaux qui utilisent ces données, comme je l’ai mentionné, et les besoins des citoyens canadiens qui n’aiment pas qu’on vienne chez eux les menacer.
J’ai souvent entendu des députés de l’opposition tenter de balayer du revers de la main les préoccupations du gouvernement au sujet des menaces d’emprisonnement en parlant du nombre de Canadiens ayant vraiment écopé d’une telle peine. Je parle du sondage dans mes observations. Comme je l’ai dit, cela n’a rien à voir. Par le passé, les Canadiens qui ont refusé de remplir le formulaire détaillé du recensement ont été menacés de se voir imposer une amende, une peine d’emprisonnement ou les deux. Je l’ai entendu dire non seulement par des gens qui m’ont parlé personnellement, mais aussi aux audiences du comité qui se sont tenues au Parlement cet été.
J’aurais tort de ne pas reconnaître publiquement qu’il existe des inconnues à cet égard. Nous devons toujours chercher à éviter les biais de sélection, bien que personne ne sache vraiment ce qu’il en est tant que nous n’aurons pas réalisé le sondage. Nous savons que certains groupes sont généralement sous-représentés, soit les très riches, les très pauvres, les nouveaux immigrants et d’autres, mais nous pouvons alors travailler auprès de ces groupes et individus pour augmenter leur représentation.
Toutefois, ce que le gouvernement ne fera pas, c'est d’obliger les Canadiens, sous la menace d’un casier judiciaire, à répondre à l'Enquête nationale auprès des ménages. Je veux que ce soit bien clair. Nous avons pris une décision en fonction d’un principe de base, et je crois que c'est la bonne décision. L’idée de menacer les Canadiens de se voir imposer une amende ou une peine d’emprisonnement pour n’avoir pas rempli le formulaire détaillé du recensement de 40 pages sera chose du passé, et nous ne reviendrons pas sur cette décision.
En résumé, le gouvernement veut protéger les citoyens contre les atteintes à la vie privée et surtout ne pas être la source de ces atteintes. Qu’il s’agisse de nos voisins, de nos amis ou des membres de notre famille, il existe des gens qui ne veulent tout simplement pas remplir ce formulaire parce qu'ils ne veulent pas dévoiler leurs renseignements personnels. Je ne peux tout simplement pas admettre la position de ceux qui considèrent que la coercition est acceptable ou même que ce serait une politique gouvernementale souhaitable pour obliger les gens à remplir le formulaire détaillé du recensement.
Nous croyons que la nouvelle méthode qui consiste à combiner un formulaire abrégé obligatoire et un sondage détaillé facultatif établit l’équilibre souhaité entre la nécessité d’obtenir les données qui permettront d’étayer la politique gouvernementale et celle de respecter le droit à la protection des renseignements personnels, que les Canadiens ont obtenu de haute lutte.
À l’intention de mes collègues, je répète que le recensement de 2011 nous procurera de l’information démographique et économique de grande qualité, comme toujours. Je suis par ailleurs passablement certain que le changement dans notre méthode de collecte de données, au moyen de la nouvelle Enquête nationale auprès des ménages, nous permettra d’acquérir des données utiles et fiables pour le gouvernement et, bien sûr, pour tous les clients de Statistique Canada. C'est un point important, et notre gouvernement en est absolument convaincu: non seulement nous avons pris le temps de chercher un juste équilibre, mais nous avons trouvé le juste équilibre.
:
Madame la Présidente, lorsque l'on a appris, en juin dernier, que le gouvernement conservateur allait modifier la manière dont allait être mené le recensement, tout de suite, des centaines de groupes ont dénoncé sur la place publique les intentions du gouvernement. Par conséquent, je suis content de voir que nous tenons aujourd'hui un tel débat, d'autant plus que j'ai été à même de participer aux rencontres du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie, qui a été convoqué d'urgence, cet été, pour étudier la question.
Il faut comprendre qu'en annonçant une telle décision en plein été, le gouvernement espérait sans doute faire avaler la pilule plus facilement à des centaines d'organismes, d'experts, de chercheurs, d'associations professionnelles, d'universités et j'en passe. Malheureusement, comme je l'ai dit plus tôt, le Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie a dû se réunir d'urgence pour comprendre les intentions du gouvernement conservateur derrière sa décision de modifier un questionnaire qui comporte des données collectives importantes. Le comité a entendu le témoignage des différents groupes affectés par les modifications apportées au recensement.
Avant d'aller plus loin, je vais faire un résumé des changements que veut apporter le gouvernement. Tout d'abord, le questionnaire détaillé à réponses obligatoires, utilisé depuis 35 ans, qui comportait des questions détaillées sur différents aspects socioéconomiques des ménages est éliminé. En 2006, ce formulaire avait été envoyé à 20 p. 100 de la population, selon un mode aléatoire. Le gouvernement conservateur, pour des raisons encore nébuleuses, souhaite le remplacer par un questionnaire plus court, qui garderait son caractère obligatoire avec des questions générales et beaucoup moins utile. Ces questions portent sur le nombre d'habitants de chaque résidence, leur âge et leur sexe, et s'adresse à tous les citoyens.
D'autre part, le gouvernement compte maintenant envoyer à 30 p. 100 de la population le questionnaire détaillé, mais les réponses de celui-ci seront dorénavant volontaires. Voilà le noeud du problème, voilà la décision qui a été prise: passer d'un questionnaire obligatoire à un questionnaire volontaire.
Dans une entrevue accordée au Globe and Mail par le , ce dernier disait vouloir mettre fin à la présence de l'État dans la vie des gens. Pour le bien de la cause, je lirai ici sa déclaration: « Je crois qu'on obtiendra une réponse beaucoup plus honnête et enthousiaste que celle obtenue lorsqu'on brandit la menace d'une amende ou d'une peine de prison pour arracher une réponse. Je m'interroge sur la validité de cela. »
La déclaration du ministre me laisse perplexe quant à la véritable intention de ce gouvernement. On a une formule qui fonctionne relativement bien depuis plusieurs années, et pour des raisons qui, selon moi, sont purement idéologiques, le gouvernement décide de modifier radicalement, et surtout sans consultation, un outil qui fournit des renseignements précieux à des centaines d'organismes du Québec et du Canada. De plus, ce changement de questionnaire détaillé obligatoire à questionnaire volontaire coûtera au gouvernement 30 millions de dollars de plus. Pourquoi augmenter les dépenses du gouvernement fédéral alors que le budget est déficitaire? Je sais que certains députés du gouvernement vont faire de la démagogie en disant qu'il est inacceptable d'envoyer quelqu'un en prison s'il ne répond pas au recensement, mais jamais personne n'a été emprisonné. Ne vaudrait-il pas mieux modifier la loi de manière à enlever cet article plutôt que d'abolir complètement le système? Même l'ancien chef de Statistique Canada a affirmé, avant sa démission en juillet dernier, que le fait de remplacer le formulaire obligatoire par un formulaire volontaire ne sera pas aussi efficace.
La décision du gouvernement de procéder ainsi est surprenante. C'est comme si le gouvernement venait sabrer lui-même le seul outil qui lui permet, tous les cinq ans, d'établir un portrait de l'état de la société. Il est important de pouvoir non seulement faire des comparaisons dans le temps, mais de projeter dans l'avenir le genre de société que l'on veut.
D'ailleurs, la Fédération des communautés francophones et acadienne a porté devant la Cour fédérale les changements que le gouvernement veut faire avec le questionnaire long.
L'élimination de l'obligation de remplir ce questionnaire fera en sorte que le gouvernement n'aura plus des données fiables et représentatives pour respecter ses obligations à l'égard de la Loi sur les langues officielles et des services fédéraux en français.
Pour le Bloc québécois, il ne fait aucun doute que la décision est fondée sur des critères strictement idéologiques qui nuiront à la capacité du Québec et de ses municipalités à mettre de l'avant des politiques publiques ciblées et efficaces.
En réduisant la qualité de l'information disponible, le gouvernement tente de museler les critiques légitimes de ses politiques. Le gouvernement conservateur s'est d'ailleurs empressé de discréditer les renseignements recueillis par Statistique Canada afin de justifier ses décisions idéologiques.
Tout comme le propose la motion du Parti libéral, nous croyons qu'il faut retirer les peines d'emprisonnement, mais nous croyons que les amendes doivent être conservées. Cependant, nous sommes ouverts à toute autre mesure alternative telle que l'option selon laquelle certains services gouvernementaux, comme le renouvellement du passeport, pourraient être refusés aux citoyens qui auraient omis de remplir leur formulaire.
La modification au processus de recensement est une décision unilatérale qui est décriée par une pléiade d'acteurs de la société civile. Cette décision fait écho à la droite américaine qui conteste, malgré son caractère confidentiel, cet exercice.
Pour ceux et celles qui n'ont pas eu la chance de suivre le dossier assidûment cet été, j'aimerais rappeler que certaines associations ont dénoncé cette décision.
D'abord, la Fédération canadienne des municipalités a dit craindre qu'avec ces changements, les villes n'auront plus les informations locales fiables, notamment quand vient le temps de tracer de nouveaux trajets de transport en commun ou de décider où construire des logements sociaux.
De son côté, l'Association francophone pour le savoir, par l'entremise de son président Pierre Noreau, a dénoncé une situation problématique importante en disant que: « Les chercheurs en sciences sociales ne peuvent se passer de ces données complètes et fiables. » C'est par leur analyse que les chercheurs peuvent proposer des solutions aux grands défis qui nous attendent: le vieillissement de la population, la gestion du système de santé ou encore l'immigration.
Pour la Fédération québécoise des professeures et professeurs d'université, les changements imposés au recensement par le gouvernement auront de lourdes conséquences sur la recherche universitaire. La fédération estime qu'après l'abandon du formulaire détaillé obligatoire, il deviendra quasi impossible de décrire l'évolution d'une situation, qu'elle soit sociale, linguistique ou économique, sans entreprendre soi-même des enquêtes spécifiques, complexes et coûteuses.
L'Association canadienne des professeures et professeurs d'université va plus loin. Elle dit que: « C'est dévastateur. Lorsqu'un gouvernement doit décider parmi plusieurs options politiques, il peut consulter les données disponibles et faire en sorte que sa décision soit appuyée sur les faits et pas seulement sur des préférences politiques. »
Pour l'Institut canadien des urbanistes, les changements quant à la façon dont le Canada recueille des données de recensement auront des effets indésirables sur la croissance et le développement des collectivités canadiennes.
Les professeurs de l'Université du Québec à Montréal, Jean-Pierre Beaud et Jean-Guy Prévost, qui sont spécialisés dans les questions de recensement, ont été sans équivoque. Selon ces derniers: « Il y a eu une controverse il y a deux ou trois ans lorsque l'étude de l'évolution des revenus a démontré que l'écart s'était creusé entre riches et pauvres. À cette époque, la presse de droite avait hurlé à mort en accusant Statistique Canada de marxisme. Il y a une tension entre le gouvernement et Statistique Canada, qui montre une réalité qu'on ne veut pas voir. »
Finalement, j'aimerais citer M. Martin Simard, professeur chercheur au département des sciences humaines à l'Université du Québec à Chicoutimi, pour résumer la nécessité, selon ce dernier, de conserver le questionnaire détaillé obligatoire.
Les données risquent donc d'être considérées comme moins fiables, en particulier pour la recherche universitaire. Cela risque de limiter nos recherches, de les rendre moins précises comparativement à celles qui se font dans d'autres pays. Cela risque également d'avoir des conséquences sur les entreprises privées qui font des études de marché pour localiser des restaurants ou des commerces. Dans le domaine des politiques publiques également, cela posera de très grands problèmes, spécialement aux échelles locale et régionale où les données risquent d'être encore davantage imprécises.
J'aurais pu parler de plusieurs autres organismes, ou associations ou personnes qui ont émis des opinions relatives au formulaire de recensement, mais je crois que l'essentiel de ces propos est une preuve de la nécessité de conserver le questionnaire détaillé de recensement dans sa forme originale.
Pour le Bloc québécois, la décision d'Ottawa est incompréhensible, mais surtout inexplicable. Les arguments que l'on va entendre tout au cours de la journée vont nous en faire voir de toutes les couleurs. Tout à l'heure, on a entendu le ministre nous montrer une partie de cette couleur. On nous dira que même s'il est obligatoire, on n'a pas de preuve que les citoyens vont répondre honnêtement, qu'il faut protéger les renseignements personnels des individus, que le gouvernement ne devrait pas menacer des gens en s'introduisant dans leur vie privée. Mais tous ces arguments sont de la poudre aux yeux. La véritable raison pour l'abolition du formulaire détaillé de recensement est une raison idéologique, et pour le Bloc québécois, c'est inacceptable.
:
Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole sur cette question. Je vais partager le temps qui m'est imparti avec le député de .
En tant que parlementaires, nous ne devrions même pas être en train de débattre de cette question étant donné la multitude d'autres problèmes touchant l'économie, la santé, l'environnement et le réchauffement de la planète qui méritent notre attention. D'une part, nous sommes en présence d'un dossier qui repose sur la collecte de données scientifiques. D'autre part, nous avons le Parti conservateur du Canada et un ministre qui, pour des raisons idéologiques, souhaitent le voir disparaître. En toute honnêteté, je crois qu'il s'agit d'une étape dans un long processus visant à éliminer le droit de parole au pays et à imposer des coupes supplémentaires à des particuliers, à des organisations et à des groupes qui, parfois, sont en marge de la société et qui ont besoin d'appui. Cette décision s'inscrit à merveille dans le programme idéologique du gouvernement, sinon je ne vois pas pourquoi on en discuterait.
Tout d'abord, j'aimerais parler des arguments ridicules mis en avant par le ministre. Ce matin, c'était intéressant d'écouter le ministre à la Chambre des communes. C'était presque embarrassant de l'entendre dire que l'opposition souhaite jeter des personnes en prison et que des agents du gouvernement se présentent chez les gens et empiètent sur leur vie privée. Il tient un langage qui, selon moi, ne sied pas à un ministre et qui est indéfendable quand on regarde les faits réels.
Premièrement, la position du gouvernement consiste à maintenir une politique qui est en place depuis quatre ans, en vertu de laquelle des peines d'emprisonnement sont prévues si les gens ne participent pas au recensement ou ne remplissent pas le formulaire. C'est une réalité incontournable pour le gouvernement. Cette politique est en place depuis quatre ans. Le gouvernement était au courant et voilà maintenant qu'il blâme les députés de l'opposition. Lorsque nous nous sommes penchés sur cette politique, nous avons dit qu'elle n'avait pas de sens, qu'elle ne semblait pas juste, qu'elle ne nous intéressait pas et qu'en fait nous n'en voulions pas. Nous savons qu'elle n'était même pas appliquée. Personne n'a été sorti de force de sa maison pour être arrêté et emprisonné, mais c'est ce que prévoit la politique du ministre.
Le gouvernement actuel est au courant depuis quatre ans. Il a eu à planifier le recensement. Il a eu à prévoir ce qu'il allait faire avec le formulaire et comment il allait le présenter. Or, il a maintenu cette politique. Tout cela n'est qu'un petit jeu détestable pour essayer de semer la peur.
Plus tôt, le gouvernement a tenté de mettre fin au formulaire détaillé obligatoire du recensement en invoquant la protection de la vie privée. Tout à coup, le ministre est devenu très préoccupé par la protection de la vie privée. J'ai téléphoné au Commissariat à la protection de la vie privée afin de savoir si le recensement suscitait de telles préoccupations. J'ai appris que, sur une période d'une dizaine d'années, ou à peu près, très peu de Canadiens avaient formulé une plainte. Lorsque cela s'est produit, le commissariat s'en est occupé.
Lors de cette conversation, j'ai aussi appris que le formulaire de recensement avait déjà fait l'objet d'une vérification obligatoire par le Conseil du Trésor en ce qui a trait à la protection de la vie privée. Ainsi, le formulaire de recensement qui a été élaboré et rédigé, et pour lequel nous avons déjà dépensé de l'argent afin qu'il soit prêt, a fait l'objet d'une vérification interne, ici à la Chambre des communes, afin de protéger la vie privée des gens.
Le formulaire a aussi fait l'objet d'une vérification semblable par la Commissaire à la protection de la vie privée. La commissaire avait déjà approuvé les questions qui allaient être inscrites dans le formulaire. En fait, le Commissariat à la protection de la vie privée a dit que ses relations avec Statistique Canada étaient excellentes et continues. Les deux organismes ont collaboré afin de s'assurer d'avoir des données de qualité, tout en veillant à protéger la vie privée des Canadiens et en réglant les problèmes avant qu'ils ne se manifestent.
Le ministre a dû laisser tomber cet argument, mais il a commencé à dire qu'ils allaient jeter des gens en prison.
J'écoute la période des questions depuis le début de ce débat et je trouve gênant de voir le ministre continuer de soutenir que ce n'est pas bien de jeter des gens en prison, parce que nous savons que cela n'arrive pas. Nous savons qu'il s'agit là de sa politique, qu'il ne l'a jamais modifiée et que les Canadiens ne sont pas dupes de ces propos exagérés.
Les Canadiens veulent savoir pourquoi le gouvernement veut dépenser plus d'argent, faire plus de publicité et imprimer plus de documents pour mener un recensement qui serait à participation volontaire, qui donnerait des résultats limités, qui rendrait inutiles toutes les données comparables que nous avons recueillies par le passé, parce qu'aucune comparaison ne serait possible, et qui suscite l'opposition de tous, allant des gens d'affaires aux petits groupes communautaires, et même de la part des collectivités les plus éloignées et des collectivités autochtones. Tous conviennent que le recensement dans sa forme actuelle est bien mieux que ce que proposent le ministre et le Parti conservateur.
La Chambre des communes est censée être un lieu où nous pouvons collaborer. Or, nous avons appris du témoignage du ministre, cet été, lorsque le comité a repris ses travaux, que le 17 juin, un décret a été pris pour remplacer le recensement obligatoire par une Enquête nationale auprès des ménages, qui ressemble fort à une expérience ratée faite aux États-Unis, mais à l'envers.
Cet été, lorsque j'ai assisté à la rencontre de l'Association parlementaire Canada-États-Unis, les membres du Congrès américain, les sénateurs et les responsables du recensement de partout aux États-Unis surveillaient ce que le Canada faisait et s'interrogeaient sur les motifs. Ils ont dit avoir déjà emprunté cette voie et qu'ils avaient dû faire marche arrière parce qu'ils avaient eu toutes sortes de problèmes. Ce qui se passait au Canada les rendait très perplexes.
Lors de la réunion du comité du 17 juin, nous avons appris que, pendant que le ministre siégeait à la Chambre des communes, il planifiait déjà de modifier le recensement sans en parler à quiconque. Les membres du Comité de l'industrie ont toujours su bien s'entendre et essaient de laisser la partisanerie de côté. Normalement, nous étudions une question, nous faisons venir des experts, nous réexaminons la question, puis nous présentons des recommandations à la Chambre. Le ministre a gardé son idée pour lui.
Le 26 juin dernier, le changement a été publié dans la Gazette du Canada, mais ce n'est que le 1er ou le 5 juillet que le ministre a fait sa première déclaration publique à ce sujet. À la suite de cette déclaration, le statisticien en chef du Canada, Munir Sheikh, a donné sa démission le 21 juillet à cause de ce que le ministre a déclaré publiquement. Ce fut un départ assez spectaculaire.
Dans cette affaire, les conservateurs, qui se disent responsables sur le plan budgétaire, qui affirment bien gérer l'argent des contribuables, ont finalement dépensé davantage d'argent. Le Comité de l'industrie a dû être convoqué de nouveau, ce qui a entraîné des dépenses supplémentaires et des pertes de temps, sans parler du gaspillage. Nous aurions pu nous réunir pendant la dernière session du Parlement, dans un meilleur esprit de coopération. Comme les conservateurs ont refusé d'approuver le calendrier proposé, l'une des réunions a été une pure perte de temps et elle a coûté des milliers de dollars.
Nous sommes censés protéger le porte-monnaie des Canadiens, mais, à cause de l'approche idéologique et têtue des conservateurs, les Canadiens finissent par payer davantage. Je le répète. Le recensement tel que le conçoivent les conservateurs coûtera au moins 30 millions de dollars de plus aux Canadiens. En outre, les entreprises, les chercheurs, les églises et autres types d'organisations religieuses, les populations autochtones, les scientifiques et tout un ensemble de groupes et d'organismes qui constituent les consommateurs qui achètent les données du recensement à raison de millions de dollars, tous nous disent que cette mesure causera un tort irréparable au recensement.
Le taux de participation au recensement est d'environ 95 p. 100. Le recensement sert d'appui scientifique à d'autres types de sondages et de données.
J'ai en ma possession une lettre que l'Alliance évangélique du Canada a envoyée au ministre. Ce groupe a été consulté au sujet du recensement en général. Dans la lettre, on lit ceci: « Il n'a jamais été question de supprimer le formulaire détaillé. » Ce groupe s'oppose à cette mesure et a voulu donner un coup de main en présentant d'autres suggestions, qui ont été rejetées par le ministre.
Les Canadiens ont un choix à faire: soit ils paient davantage pour promouvoir le programme conservateur, soit ils économisent davantage et s'évitent des soucis en laissant le recensement sous sa forme actuelle, protègent les données scientifiques nécessaires au fonctionnement d'une société civilisée et s'assurent que nous pourrons mettre à profit toutes les ressources et tous les efforts que les Canadiens ont consentis par le passé en remplissant les formulaires de recensement précédents. C'est cela qu'il faut faire.
:
Madame la Présidente, comme les Canadiens et les députés le savent, le recensement sert à diverses fins. À tout le moins, un recensement donne une mesure de la taille de la population de ce pays et établit une comparaison avec les années antérieures. On peut faire des extrapolations à partir de ces données. C'est le strict minimum qu'un recensement doit fournir.
Le formulaire détaillé va plus loin et, bien entendu, aide la Chambre et les gouvernements de l'ensemble du pays à prendre des décisions relativement à la délimitation des circonscriptions et à la redistribution des sièges, entre autres, dans les provinces et les territoires. Le recensement sert également à ce genre de choses.
Permettez-moi de parler du formulaire de 2006. Le formulaire détaillé obligatoire, ou qui était autrefois obligatoire, comportait des questions permettant d'obtenir des données démographiques élémentaires telles que l'âge, le sexe et l'état matrimonial. En fait, le formulaire de 2006 a été le premier à renfermer des questions sur le mariage homosexuel, par exemple, et ce type d'unions. Il comportait également des questions sur les antécédents professionnels et la formation scolaire des répondants, leur lieu de naissance et leur relation avec le chef de ménage, toutes des questions auxquelles la plupart d'entre eux n'avaient aucun inconvénient à répondre et qui sont extrêmement importantes.
Des renseignements de ce genre servent à mettre au point des politiques publiques éprouvées et à prendre des décisions basées sur des données scientifiques, comme mon collègue de l'a si éloquemment souligné dans une question qu'il a posée plus tôt au ministre à la Chambre. Ils répondent aux besoins de diverses collectivités canadiennes qui sont différentes les unes des autres. Ils portent sur divers éléments comme le logement, l'éducation et les services offerts aux groupes vulnérables ou marginalisés, ce qui comprend les femmes, les handicapés et les groupes de minorités visibles et linguistiques.
Les données recueillies grâce au formulaire obligatoire sont essentielles, non seulement pour les gouvernements de tous les niveaux, mais pour les groupes communautaires, les organisations de la société civile et les mouvements confessionnels de justice sociale.
Nous savons que les personnes qui sont les moins susceptibles de remplir un tel formulaire, et ce même s'il est obligatoire, font généralement partie de ces groupes qui comptent le plus sur les programmes sociaux fédéraux, provinciaux et municipaux, et je pense par exemple aux immigrants récemment arrivés, aux peuples autochtones et autres. La disparition de cette partie du recensement entraînera tout probablement une sous-évaluation de l'importance de ces groupes vulnérables. Elle risque également de réduire la quantité et la qualité des renseignements dont nous disposons sur ces groupes vulnérables qui sont difficiles à desservir.
Je ne pourrais le dire mieux que ne l'a fait Marlene Davidson, la présidente du Atikokan Métis Council, dans une lettre qu'elle m'a fait parvenir la semaine dernière J'aimerais donc vous en lire quelques extraits:
En tant que citoyenne de la Nation métis de l'Ontario, je demande votre aide dans le but de convaincre le gouvernement du Canada d'abandonner ses projets visant à faire disparaître le formulaire détaillé du recensement.
La perte de crédibilité de ces données, qui découlera de la disparition du formulaire détaillé, serait dévastatrice pour le peuple métis qu'il ramènerait à cette période où les gouvernements ne tenaient aucun compte des peuples métis du pays. Comme vous le savez, la population métis constitue une partie vitale et importante des collectivités de l'Ontario. La décision du gouvernement d'éliminer le questionnaire long à participation obligatoire entraînera la perte de données importantes sur les Métis de votre circonscription et de toutes les autres circonscriptions à partir l'Ontario jusque dans l'Ouest du pays.
Il y a plusieurs raisons qui expliquent pourquoi ces données sont si importantes pour les Métis. Tout d'abord, c'est le seul moyen par lequel le gouvernement recueille des renseignements sur les Métis en tant que groupe autochtone distinct au Canada. On qualifie souvent les Métis de « peuples autochtones oubliés » parce que pendant de nombreuses générations, tous les niveaux de gouvernement ont nié notre existence même et nos droits.
Dans les questionnaires de recensement antérieurs il n'y avait pas de case où on pouvait s'identifier en tant que Métis. Les fonctionnaires du gouvernement et les politiciens ont préféré fausser la réalité afin d'appuyer leur position erronée, à savoir que les collectivités métisses en Ontario, et dans le reste du Canada d'ailleurs, n'avaient aucun droit.
Depuis la mise en vigueur de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982, depuis que l'on reconnaît et affirme les droits des Métis, et depuis que la nation métisse collabore de façon continue avec Statistique Canada, on observe un renversement de la tendance consistant, depuis toujours, à gommer volontairement la réalité métisse au Canada. De plus en plus, nous pouvons recueillir un plus grand nombre de données précises sur les populations métisses, dont d'importants indicateurs démographiques tels que la mobilité, l'âge médian et les endroits où habitent ces populations. Selon nous, cela rend le Canada plus fort, car cela contribue à la reconnaissance des Métis, cela les tire de l'oubli dans lequel les gouvernements les ont jetés parce qu'ils ne voulaient pas leur reconnaître de base territoriale. Ces statistiques ont permis à la nation métisse de sensibiliser les fonctionnaires au fait que nous sommes une autre nation autochtone qui habite, utilise et occupe des terres où vivent également d'autres Canadiens et membres des Premières nations.
Deuxièmement, sans les renseignements essentiels que permet de recueillir le formulaire détaillé, les gouvernements fédéral, provinciaux et métis sont désavantagés, en cela qu'ils n'ont pas les outils dont ils ont besoin pour suivre l'évolution rapide de la population métisse. Grâce à ces statistiques, nous pouvons offrir à nos concitoyens des services appropriés et efficaces dans des domaines tels que la santé, les programmes d'emploi, l'éducation et la formation de même que des services sociaux axés sur les besoins de la population. De plus, ces statistiques nous permettent d'élaborer des plans stratégiques à long terme judicieux en vue d'améliorer le bien-être des collectivités métisses et de l'ensemble des collectivités au Canada. Ce type de statistiques ne peut être obtenu qu'à partir d'un échantillon crédible et fiable de la population du Canada (un échantillon comprenant un ménage sur cinq). Or, le questionnaire détaillé est basé sur ce type d'échantillon. Un système facultatif de collecte des données ne saurait remplacer le système obligatoire, car il ne permet pas d'établir le profil démographique précis des Métis et de leurs collectivités en Ontario et à l'ouest de la province. À cause de la décision du gouvernement, les Autochtones, tels que les Métis, qui sont les personnes les plus marginalisées au sein de la société, continueront d'être sous-représentés.
Si nous avons tiré des leçons de l'histoire du Canada, nous savons que la solution ne consiste pas à ignorer les difficultés des populations autochtones. La politique de l'autruche n'est pas une solution. Cela n'a pas fonctionné dans le passé lorsqu'on a commencé à aborder les questions des peuples autochtones et cela ne fonctionnera pas à l'avenir. Cela ne fera que rassurer ceux qui veulent ignorer les peuples autochtones et accentuer les disparités culturelles et socio-économiques, et il n'y aura pas de statistiques crédibles sur lesquelles baser des décisions politiques solides. Selon moi, un gouvernement responsable ne saurait voir là un résultat acceptable.
Elle ajoute ceci:
Je vous exhorte vivement à communiquer avec l'honorable Tony Clement, ministre de l'Industrie, et à l'inciter à revenir sur cette décision malencontreuse qui manque de vision. Je crois que nous devons tous tenter de trouver des solutions pour faire du Canada un meilleur pays. Toutefois, le gouvernement fédéral doit continuer à remplir son rôle en recueillant les données qui permettront de trouver des solutions fondées sur des données fiables et des politiques solides.
Comme je l'ai déjà dit, cette lettre vient de Marlene Davidson, qui est présidente du Atikokan Métis Council.
Je suggère d'annuler immédiatement les changements que le gouvernement veut apporter au formulaire détaillé du recensement. Ce formulaire est un outil crucial pour l'élaboration de bonnes politiques, et la décision de le modifier manquait de vision et a été prise sans consultation. Par conséquent, le gouvernement devrait annuler immédiatement la modification du formulaire. Je pourrais énumérer une longue liste de personnes qui partagent mon opinion à cet égard, mais je ne le ferai pas pour l'instant.
Un des intervenants a soulevé un point intéressant plus tôt à propos du coût. C'est l'élément qui semble être le plus souvent abordé. M. David Cameron, le premier ministre du Royaume-Uni, a aboli le formulaire de son pays en donnant comme justification le coût de ce dernier. Toutefois, le coût de notre formulaire n'est pas le même. En fait, les changements proposés par le gouvernement coûteront beaucoup plus cher que le processus actuel. Je crois que cela devrait inquiéter les Canadiens, surtout à une époque où le déficit continue de croître tous les jours.
Marlene Davidson, un grand nombre de personnes à qui j'ai parlé et moi aimerions demander au ministre de revenir sur sa décision immédiatement.
:
Madame la Présidente, Je suis heureux d'intervenir sur cette motion et je félicite mon collègue de l'avoir présentée.
Je vais partager mon temps avec le député de .
Il y a des expressions qu'on entend trop souvent à la Chambre, notamment l'expression « sans précédent ». Quand des députés parlent de quelque chose qui est sans précédent, on a l'impression qu'ils parlent de quelque chose qui ne s'est pas produit depuis 72 heures. C'est une espèce de refrain ici.
Toutefois, je crois que ce qui est vraiment sans précédent, c'est le nombre de voix qui se sont élevées pour dire que cette décision concernant le questionnaire détaillé du recensement était une absurdité.
Des groupes de l'est, de l'ouest, du nord, du sud, de gauche et de droite, religieux et laïcs, des groupes de gens d'affaires ou de travailleurs ont tous dénoncé cette décision. Les gens se sont unis pour parler de cette absurde décision sur le recensement. Tous s'entendent pour dire que cela n'a aucun sens.
J'ai récemment reçu le texte d'une lettre envoyée par le maire de la municipalité régionale de Halifax. Il n'en a pas envoyé une copie aux députés de l'Atlantique comme il le fait habituellement. Cette lettre s'adressait au . Voici ce qu'il dit: « En exigeant que les gens remplissent le questionnaire détaillé du recensement, on obtient des données valables et complètes qu'on ne peut obtenir avec un régime purement facultatif ».
C'est donc notre maire de la municipalité régionale de Halifax, Peter Kelly, qui fustige le gouvernement conservateur. Nous verrons s'il continue.
Les gens ont été interloqués. Personne ne comprend. Certains disent que c'est de la bêtise. Ils sont gentils. Je ne crois pas que le gouvernement ait agi par bêtise. Il est peut-être bête à d'autres égards, et je lui en donne acte, mais dans ce cas précis, je ne crois pas qu'il ait été bête.
Je crois qu'il a agi délibérément. Le gouvernement conservateur est conscient de la valeur de l'information. Il ne veut pas s'en servir pour prendre ou justifier des décisions. Il ne veut pas savoir ce que le gouvernement pourrait faire pour répondre aux besoins des gens, car il estime que ce n'est pas le rôle du gouvernement d'aider les gens dans le besoin.
La meilleure description de cette décision, c'est celle qu'a faite cet été ma collègue de Winnipeg-Centre-Sud à une table ronde à Winnipeg. Un professeur de l'Université du Manitoba, une personne apolitique et sans préjugé, a exprimé son effarement. Elle a dit que dans notre pays, le gouvernement avait remplacé une politique fondée sur la preuve par une preuve fondée sur la politique.
On le constate sans arrêt. Le gouvernement décide d'une conclusion et fabrique les preuves qui la justifient. Bien souvent, ce n'est que du vent. Pourtant, les gouvernements sont censés s'appuyer sur des preuves et sur des informations.
Je pense que ce gouvernement se sert de l'information quand ça l'arrange. Imaginez cette grande salle de crise à Ottawa, avec des apparatchiks installés devant des ordinateurs qui font des appels pour avoir de l'argent et qui colportent des ragots sur les députés de l'opposition. Je suis sûr que le gouvernement ne cherche pas à avoir moins d'information de ses bailleurs de fonds. Il est bien conscient de la valeur de cette information dans ce genre de situation.
Nous avons un gouvernement conservateur qui ne veut pas avoir d'information, mais un Parti conservateur qui en veut. Il sait se servir de l'argent. Il sait enfoncer des coins dans la société. Contrairement à la majorité des gouvernements du Canada, libéraux et progressistes-conservateurs, qui essaient de rétablir l'unité de la société quand ils voient qu'on y enfonce un coin, ce gouvernement-ci essaie au contraire de l'enfoncer encore plus.
Le Parti conservateur veut avoir toutes les informations possibles. Le gouvernement conservateur, lui, choisit la démarche du sergent Schultz: « Je ne sais rien, donc je ne peux rien faire pour améliorer la situation. »
C'est le genre de chose que nous a seriné le durant les audiences de cet été. Il a dit: « Nous estimons qu'il ne faut pas menacer les gens de la prison. Imaginez que quelqu'un pousse les choses à l'extrême et se retrouve avec une peine de prison de trois mois pour avoir refusé de répondre à ces questions personnelles.
On entend sans arrêt ce genre d'argument. C'est du plus haut ridicule. Il y a une solution. Je la propose gratuitement au gouvernement. Il n'y qu'à amnistier tous les Canadiens qui croupissent dans les prisons de notre pays parce qu'ils n'ont pas rempli le questionnaire. Nous pourrions le faire avant midi, et midi, c'est dans une minute seulement. Ce serait l'amnistie la plus facile et la moins coûteuse jamais accordée au Canada. En fait, on n'a jamais emprisonné quelqu'un pour avoir refusé de remplir le questionnaire détaillé. C'est une affirmation absurde.
C'est ce que propose la députée de dans son projet de loi. Nous sommes d'accord. Il n'y a qu'à changer cela. Ce n'est pas un problème, mais qu'on ne remette pas en question l'intégrité du questionnaire détaillé.
J'aimerais vous donner l'exemple d'un groupe pour qui les conséquences seraient particulièrement graves, car les gens qui le composent figurent parmi les plus marginalisés de notre société. Beaucoup de gens qui travaillent avec leurs concitoyens vivant dans la pauvreté ont affirmé être incapables de faire leur travail sans les données nécessaires. Ils savent aussi que, bien souvent, le gouvernement préférerait certainement ne pas avoir ces données, parce qu'il aime mieux ne rien faire. Il ne veut pas voir la réalité en face. Il ne veut pas savoir qui est pauvre. Il ne veut pas savoir qui est handicapé.
C'est impensable qu'un gouvernement songe sincèrement à instaurer une politique qui nuirait à ses citoyens les plus marginalisés; mais il faut croire que c'est une tendance qui est en train de s'ancrer. L'enquête EPAL, qui portait sur la participation des personnes handicapées et leurs activités, a été annulée.
Selon Laurie Beachell, du Conseil des Canadiens avec déficiences, l'heure est grave, parce qu'il s'agit d'un outil qui donnait résultats. Mais voilà qu'il a disparu.
Au printemps dernier, le gouvernement a enfin ratifié la Convention relative aux droits des personnes handicapées, des Nations Unies. Les personnes handicapées du Canada ont alors cru que le gouvernement allait enfin commencer à les écouter. Pour la première fois, ils ont cru que les choses étaient sur le point de changer pour le mieux.
Mais voilà que l'enquête EPAL a été annulée. Et comme si ce n'était pas assez, voilà que survient toute cette histoire du formulaire détaillé de recensement. On pourrait même ajouter le cas du Conseil canadien sur l'apprentissage, qui compilait des données sur l'apprentissage et s'intéressait particulièrement aux populations vulnérables, et qui est aujourd'hui dissolu. Ça n'a aucun bon sens.
Comme le disait M. Carney, de la Banque du Canada, une quantité non négligeable de données risquent d'être compromises.
C'est une façon polie de dire les choses, comparativement à ce qu'on a entendu ailleurs.
Il n'en demeure pas moins que les personnes handicapées continuent d'affirmer qu'il s'agit d'un problème de taille. D'un problème énorme.
Je cite ici un article publié par Canwest:
L’Association des malentendants canadiens, une organisation nationale représentant des millions de Canadiens qui vivent avec une déficience auditive, demande au gouvernement du Canada de renverser sa décision ayant pour effet de supprimer le questionnaire long du recensement canadien [...] Il est obligatoire et ordinairement transmis à 20 p. 100 des domiciles canadiens. Le questionnaire long est une source d’informations critiques en matière des déficiences, de la diversité, de l’emploi, du revenu, de l’éducation, et d’autres questions d’intérêt. Ces informations servent de base solide pour le développement optimal de lois, de politiques et de programmes.
Selon Mme Louise Normand, présidente nationale de l'association, « éliminer le formulaire long du recensement est complètement contraire aux engagements internationaux que le Canada a accepté il n’y a que quelques mois ».
D'un bout à l'autre du pays, il y a des gens, surtout au sein d'organismes sans but lucratif, de groupes caritatifs, de fondations pour la santé et d'organismes sociaux, qui ont besoin de ce genre d'aide.
Nous avons entendu ce que pensent les groupes de commercialisation et presque tous les organismes religieux du pays ainsi que des chambres de commerce, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, nombre de municipalités et les provinces.
J'aimerais tout particulièrement, dans le cadre de ce débat aujourd'hui, parler au nom des Canadiens handicapés, des personnes qui, tous les 308 députés en conviendront, méritent intérêt et appui. On s'entend pour dire qu'il convient de leur venir en aide. Aux yeux de plusieurs, le Canada est le modèle à suivre pour ce qui est de la façon de traiter les personnes qui ont le plus besoin d'aide. Nous ne sommes pas aussi bons que nous devrions l'être ou que nous croyons parfois l'être. Je suis néanmoins persuadé que tous les députés seraient d'accord pour dire qu'ils veulent être là pour les Canadiens handicapés. Ils veulent leur offrir de l'aide, des chances égales. Ils veulent prendre la parole et faire savoir que, si quelqu'un vit des difficultés, surtout si elles sont indépendantes de sa volonté, ils seront heureux de lui venir en aide.
Nous croyons que le gouvernement doit lui aussi aider les personnes handicapées. Pourtant, nous avons une politique sur le recensement qui contredit cela. Avec cette politique, des gens ne seront pas comptés et ne pourront pas présenter leurs données. Le gouvernement pourra alors prétendre qu'il ne dispose pas de l'information, qu'il ne peut pas aider ces gens et qu'il ne connaît même pas leurs besoins puisqu'il ne les aura pas comptés. Le pire, c'est que le gouvernement savait ce qu'il faisait.
Le Globe and Mail d'aujourd'hui cite Rosemary Bander, statisticienne en chef adjointe, qui a déclaré qu'une partie des données de l'enquête « ne pourra pas servir à divers usages pour lesquels les données du recensement sont nécessaires ».
Nous sommes donc devant un consensus incroyable, un consensus insensé, renversant et sans précédent au Canada. Notre gouvernement n'agit pas dans le meilleur intérêt de la population canadienne. Les personnes handicapées, les personnes marginales, les groupes autochtones, les groupes linguistiques minoritaires, tous comptent sur les données qu'ils n'auront pas. Ils ne pourront pas non plus établir de comparaisons avec les années antérieures puisque l'intégrité des données aura été violée.
Aussi étonnant que cela puisse paraître, nous avons un gouvernement du Canada qui affirme essentiellement qu'il ne veut même pas connaître les problèmes des Canadiens. Cela n'est ni sa faute ni sa préoccupation ni sa priorité. Il ne veut rien savoir. Il ne veut pas avoir l'information dont il a besoin pour prendre des décisions.
Je dirai aux députés et aux Canadiens que cette façon de faire est maintenant la norme au Canada. Ce n'est pas là le Canada auquel croient la plupart des Canadiens.
:
Monsieur le Président, je dois avouer que je n'aurais jamais imaginé prendre la parole à la Chambre des communes sur une motion visant à sauver le recensement. À l'époque de mon élection, je ne croyais pas que je viendrais ici pour participer au sauvetage d'une institution dont la valeur, le mérite et l'intérêt sont incontestables et qui est reconnue partout dans le monde, parce que le gouvernement a décidé que les gens s'étaient mis à avoir peur des données de recensement ou des recenseurs.
De toute ma vie, je n'ai jamais entendu parler de quiconque ayant peur du recensement. Le recensement peut parfois être un désagrément. Les gens peuvent être irrités d'avoir à consacrer une heure tous les cinq ans à remplir ce questionnaire, mais je n'ai jamais rencontré quiconque, soit à l'église en tant que ministre, soit un voisin dans ma vie quotidienne, soit au travail en tant que député, qui se soit dit inquiet d'avoir à remplir le formulaire de recensement. Je suis donc un peu surpris de nous voir ici aujourd'hui en train d'essayer de rétablir ce qui est d'après nous une institution de grande valeur du Canada.
Il y a toutefois un point qui me préoccupe davantage, soit le fait que le gouvernement semble s'être écarté d'une politique établie depuis des décennies. Le gouvernement fait en sorte que le slogan du recensement, « Soyez du nombre », ne s'adresse plus à certains Canadiens. Avec cette procédure, tout le monde ne figurera plus dans les résultats. Le député qui a pris la parole avant moi a fait valoir que certains groupes ont été particulièrement visés par le gouvernement, prenant l'exemple des personnes handicapées. Je voudrais pour ma part parler des communautés culturelles du Canada.
À l'époque où il siégeait dans l'opposition, le actuel a décrit les immigrants récemment arrivés d'Asie comme « des gens qui vivent dans des ghettos et qui ne sont pas intégrés à la société de l'Ouest du Canada ». Maintenant qu'il est au pouvoir, le a fait de gros efforts pour convaincre les communautés culturelles du Canada que de tels sentiments étaient chose du passé et que le Parti conservateur avait beaucoup changé quant à sa conception de la diversité et qu'il préconisait maintenant une intégration inclusive.
Je ne crois pas que ce soit le cas. La décision de supprimer le formulaire de recensement détaillé révèle que le gouvernement a décidé de ne pas tenir compte des gens qui pourraient ne pas être du nombre, ceux qui se retrouvent en marge de la société. Ces gens doivent être entendus et compris. Il faut reconnaître leur valeur et les représenter.
C'est pendant les jours de canicule, cet été, que les changements concernant le recensement ont été proposés. Le gouvernement pensait qu'il pourrait changer de politique d'une manière drastique sans que personne ne s'en aperçoive. C'est l'inverse qui s'est passé. Plus de 350 particuliers et groupes importants de ce pays sont intervenus et ont déclaré avoir besoin des renseignements que le formulaire détaillé du recensement fournit et ont affirmé y attacher beaucoup d'importance.
Le gouvernement a de toute évidence sous-estimé la réaction des Canadiens de tous les horizons. Il a essayé de semer la crainte quand il n'y en avait aucune. Il a essayé de ridiculiser les experts qui s'opposaient à sa décision. Depuis des décennies, les Canadiens moyens — mères et pères, enfants, personnes âgées — répondent à l'appel du recensement. Ils considèrent cela comme une démarche démocratique, un exercice qui prouve que chacun compte en tant qu'individu, en tant que membre d'une famille, en tant que membre d'une collectivité. Les conservateurs sont maintenant en train de lui dire qu' il ne compte plus.
Les renseignements démographiques cruciaux concernant notre pays, en particulier à propos des néo-Canadiens dans nos collectivités, nous aident à déterminer où les besoins les plus importants se situent et à cerner les problèmes les plus difficiles auxquels on se heurte quand on essaie d'aider les nouveaux venus à s'intégrer dans la société canadienne. La suppression de ces données et de l'analyse que nous pouvons en faire n'est rien d'autre qu'une attaque préventive contre un outil essentiel dont les trois paliers de gouvernement ont besoin pour servir les néo-Canadiens de manière équitable et juste.
Selon mon expérience, les néo-Canadiens veulent désespérément s'intégrer. Ils veulent désespérément s'intégrer au tissu que constitue la société canadienne. La formation linguistique et d'autres services offerts aux nouveaux venus constituent une part essentielle de ce processus. On doit offrir ces services aux nouveaux venus là où ils vivent. Pour ce faire, on doit savoir où ils vivent. On doit savoir combien ils sont. On doit savoir à quel genre de barrière ils se heurtent en matière de langues. On doit savoir quels emplois ils recherchent, quelles compétences ils ont. On doit savoir d'où ils viennent et, surtout, où ils veulent se rendre. C'est ce genre de renseignements que nous fournit le questionnaire détaillé du recensement.
Si le gouvernement conservateur parvient à ses fins, les néo-Canadiens et les communautés culturelles seront sous-représentés dans les données officielles. Ils recevront moins de services sur mesure pour les aider dans leur vie quotidienne.
Il y a cependant un bon côté à cette initiative du gouvernement. Le but du Parti conservateur est généralement de diviser les Canadiens. Cette fois, exceptionnellement, la question de l’abolition du questionnaire détaillé de recensement a servi à unir les Canadiens.
Hier soir, j’ai rencontré l'Alliance évangélique du Canada. Ce groupe appuie habituellement de tout son poids le parti d’en face. Pourtant, il s’inquiète vivement de la disparition des données fournies par le questionnaire détaillé de recensement. Sans cette information, l'Alliance ne saurait ni comment planifier ses activités d’élimination de la pauvreté au Canada ni comment s’acquitter de ses bonnes œuvres. Elle n’aurait aucun moyen de savoir comment elle pourrait continuer d’offrir ses programmes évangéliques aux fidèles qui tiennent à être entendus et pris en compte. Elle ignorerait où planifier le déploiement de nouvelles églises.
Il ne faut pas oublier non plus que les entreprises utilisent également ces données. Certaines entreprises, d’un bout à l’autre du pays, achètent même les données de recensement. Elles contribuent ainsi à garnir les goussets de l’État. Elles ont besoin de ces données pour savoir où construire des magasins et des restaurants et comment mieux servir les Canadiens. Elles achètent donc des données. Le recensement est par conséquent une autre source de recettes pour l’État.
Les députés se doutent bien que j’ai été vraiment choqué en réalisant que, non seulement nous recueillerons des données sans valeur qui, en fait, nuiront à la prise de décisions, mais encore qu’il nous coûtera de 30 à 35 millions de dollars de plus pour recueillir des données inutiles. Les Canadiens aussi sont choqués lorsqu’ils apprennent que le gouvernement veut gaspiller l’argent des contribuables à des fins idéologiques.
En fait, les églises, les synagogues, les mosquées et les sociétés qui expriment leurs préoccupations au Parlement national sont très inquiètes en ce moment. Elles ont donc manifesté leur inquiétude, comme l’ont aussi fait des conseils de planification sociale, des bibliothèques, des municipalités, des provinces, des organismes caritatifs, des organisations, des entreprises, des chefs d’entreprises, bref, des Canadiens qui sont éminemment qualifiés pour parler du rôle des statistiques, du rôle des témoignages d’experts, du rôle des données.
Le gouvernement conservateur doit réaliser que « données » n’est pas la forme plurielle d’« anecdote ». Nous ne pouvons nous contenter de raconter des histoires en pensant que si nous en racontons un nombre suffisant nous recueillerons des données objectives. Le fait est que les données sont le fruit de la collecte scientifique d'information selon des formats approuvés qui ont été vérifiés conformément à l’éthique, qui ont survécu à des dizaines d’années d’examen et d’interprétation et qui continueront de s’ajouter pendant des décennies à un continuum de connaissances. Nous prenons appui sur cette information.
Si nous ne collectons aucune donnée cette fois-ci, nous risquons de rendre inutiles les données recueillies ces dernières décennies. Ce sont les tendances qui nous intéressent, la façon dont les choses changent. Nous voulons savoir où ça bouge. Nos universitaires peuvent ensuite analyser les données, les entreprises peuvent s'en servir et les groupes communautaires peuvent nous aider à mieux les interpréter.
Social Planning Toronto est l'un de ces groupes communautaires. Il a écrit à tous les députés, je suppose, pour leur parler des obstacles auxquels il est confronté dans les efforts qu'il déploie pour améliorer nos villes, nos collectivités et nos quartiers. John Campey a écrit ce qui suit:
Le recensement produit les données socio-démographiques les plus fiables à l'échelle du quartier. On ne peut tout simplement pas le remplacer par un questionnaire facultatif. Nous oeuvrons dans la communauté depuis des décennies et n'avons jamais entendu un citoyen se plaindre du temps qu'il lui a fallu pour remplir le questionnaire ou encore d'une intrusion dans sa vie privée. Bien au contraire, les groupes communautaires sont ravis et reconnaissants d'avoir accès à des données de qualité qui donnent un aperçu intéressant des communautés qu'ils desservent, leur permettant ainsi, en tant que citoyens, de prendre des décisions responsables et éclairées dans les dossiers locaux.
Les données du recensement nous renseignent sur la composition des communautés ainsi que l'âge, le sexe, l'origine ethnique, la langue et le niveau de revenu de leurs habitants, et nous donnent un aperçu des tendances démographiques émergentes. Comment pourrons-nous comprendre les phénomènes comme le vieillissement de la population, la chute du taux de natalité, les tendances en immigration, les changements dans la population active, le chômage, le sous-emploi, les types de travail et les besoins en matière de transports et être en mesure de composer avec ces derniers? C'est ce genre de données qui nous aide à faire en sorte que les communautés soient animées par la compassion, que nos villes soient vivables et que notre pays serve de modèle dans le monde illustrant la valeur que nous accordons au savoir-faire et la façon dont nous nous en servons pour rendre notre société meilleure.
:
Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat sur cet important dossier. Le ministre a souligné un point qui semble avoir échappé aux députés de l'opposition, à savoir que notre gouvernement a déjà fait un compromis.
L'opposition a adopté une position qui n'est pas un compromis. Elle croit uniquement au statu quo, à savoir que les Canadiens respectueux des lois devraient être forcés de répondre à des questions détaillées sur leur vie personnelle.
Puisque nous parlons de compromis, je vais traiter expressément de la motion de l'opposition. Comme les députés le savent pertinemment, la motion demande au gouvernement de rétablir immédiatement le formulaire détaillé obligatoire du recensement et d'éliminer la menace d'emprisonnement. Toutefois, la motion ne tient pas compte de l'importance de l'Enquête auprès des ménages et de l'équilibre visé par celle-ci en tenant compte à la fois des besoins des groupes d'utilisateurs et des préoccupations des Canadiens.
Il importe de ne pas oublier pourquoi nous sommes ici aujourd'hui. Nous sommes ici pour discuter des limites qu'il convient de fixer au gouvernement face aux citoyens. Le formulaire abrégé a toujours fourni des données très utiles aux gouvernements, et il va continuer de le faire. L'accès à des renseignements pertinents et de bonne qualité est essentiel dans une société ouverte et démocratique, afin d'appuyer la prise de décisions par des personnes et par leurs représentants élus.
Personne n'a dit que la collecte de données au moyen de l'ancien formulaire détaillé n'était pas utile. Les députés de l'opposition ne se rendent pas compte qu'en adoptant la position qui est la leur, ils privent les Canadiens du droit de refuser de fournir ces renseignements, sinon ceux-ci s'exposent à des amendes ou à des peines d'emprisonnement. Aux yeux des députés de l'opposition, l'opinion des Canadiens n'est ni importante, ni digne d'intérêt.
Cet été, les députés de l'opposition ont trop souvent fait état du nombre de Canadiens qui ont écrit à la Commissaire à la protection de la vie privée pour se plaindre des questions indiscrètes renfermées dans le formulaire détaillé du recensement. Cet argument est tout à fait hors de propos. Les Canadiens qui se préoccupent du respect de leur vie privée sont moins susceptibles de fournir des renseignements personnels au gouvernement, que ceux-ci soient transmis à la Commissaire à la protection de la vie privée ou au statisticien en chef.
Nous voulons simplement atteindre un équilibre, c'est-à-dire, d'une part, respecter les Canadiens qui estiment qu'ils ne devraient pas être menacés de se voir imposer une amende ou une peine d'emprisonnement et, d'autre part, assurer la collecte de renseignements utiles aux groupes d'utilisateurs. Nous croyons que les changements proposés par le gouvernement répondent à ces critères. Comme l'a mentionné le ministre, ces changements sont davantage liés à la procédure qu'au fond, et ils ne minent absolument pas l'objectif du recensement.
Dans le contexte des changements à la procédure, je vais limiter mes remarques aux peines et aux questions liées à la vie privée, et je vais aussi formuler des observations sur la nouvelle Enquête auprès des ménages.
Il est important de noter que le recensement de 2011, qui est à participation obligatoire, comprend exactement les mêmes questions que celles figurant dans le formulaire abrégé du recensement de 2006, en plus de deux autres questions portant sur l'utilisation des langues officielles pour veiller à ce que nous respections les dispositions de la Loi sur les langues officielles. Les questions portent sur les caractéristiques démographiques de base comme l'âge, le sexe, l'état matrimonial et l'union libre, les liens dans le ménage et la langue maternelle. Comme en 2006, il y a également une question sur le consentement des Canadiens à transmettre leurs renseignements personnels du recensement à Bibliothèque et Archives Canada dans 92 ans.
Le gouvernement a fait un compromis en ajoutant deux questions sur la connaissance et l'utilisation des langues officielles du Canada pour s'assurer qu'il se conforme aux dispositions de la Loi sur les langues officielles.
Tout au long de l'été et avant le début des audiences du Comité de l'industrie, nous avons discuté des sanctions rattachées au recensement et au fait qu'il était obligatoire de répondre à une longue liste de questions très indiscrètes. Je crois que nous avons exposé très clairement notre position relativement à ces sanctions et au caractère obligatoire du recensement.
Pendant les audiences du comité, j'ai trouvé frustrant qu'on nous demande constamment combien de personnes avaient été envoyées en prison parce qu'elles n'avaient pas rempli le formulaire détaillé obligatoire. Cette question rate totalement la cible. Il n'a jamais été question du nombre de personnes punies; c'était plutôt la menace de subir une sanction qui posait problème.
Permettez-moi d'exposer la situation suivante aux députés d'en face. Supposons qu'un agent du gouvernement se présente à votre porte ou chez un membre de votre famille et vous dit que vous devez lui préciser le nombre de pièces que compte votre maison ou lui donner des détails sur votre horaire quotidien personnel. Si vous refusez de répondre, vous risquez de devoir payer une amende de 500 $ ou de vous retrouver en prison. Est-ce que le genre de respect auquel les Canadiens sont en droit de s'attendre de la part de leur gouvernement?
Si vous refusez de répondre pour une raison ou une autre et que le même agent se présente à plusieurs reprises chez vous et qu'à chaque fois, il a recours aux mêmes tactiques coercitives, est-ce bien acceptable? S'il se met à interroger vos voisins pour savoir à quel moment vous êtes à la maison pour être bien sûr de ne pas vous manquer, est-ce bien acceptable? Est-ce une bonne façon d'agir?
De toute évidence, l’opposition croit que c’est bien. Il est clair que les partis d’opposition pensent qu’il est convenable pour le gouvernement de traiter les citoyens de cette façon. Ce n’est pas le cas de notre gouvernement.
Je ne peux m’empêcher de penser aux néo-Canadiens venant de pays moins démocratiques que le nôtre qui peuvent se demander pourquoi leur pays d’élection veut les forcer à répondre aux questions indiscrètes qui faisaient auparavant partie du questionnaire détaillé de recensement. Suffit-il, après avoir obligé ces gens à répondre, de leur dire: « Ne vous inquiétez pas, c’était pour votre propre bien » s’ils sont fâchés?
C’est peut-être la position des libéraux, des néo-démocrates et des bloquistes, mais ils devront l’expliquer à leurs électeurs si ce débat se poursuit. De ce côté-ci de la Chambre, notre réponse à nos électeurs est simple et claire. Nous avons trouvé l’équilibre entre le droit des Canadiens de ne pas être menacés d’emprisonnement et d’amendes quand on leur demande de révéler des renseignements personnels et le droit des groupes d’utilisateurs de recueillir cette information.
C’est une meilleure façon d’amener les gens à remplir un formulaire d’une quarantaine de pages qui demande beaucoup de questions personnelles, au lieu de les menacer simplement. Pensez-y : la seule fois que beaucoup de Canadiens participant au recensement ont affaire à un agent du gouvernement, cet agent les menace implicitement en leur disant de remplir le formulaire sous peine de sanctions. Nous devons traiter les Canadiens avec plus de respect. Tous ces problèmes entourant l’invasion de la vie privée disparaissent grâce à la suppression du caractère obligatoire du questionnaire détaillé et à l’élimination de la menace d’emprisonnement.
Nous sommes heureux que nos collègues d’en face conviennent avec nous que ces menaces sont déplacées. Je suis sûr qu’ils sont aussi heureux que nous de notre décision d’éliminer ces sanctions sévères qui s’appliquent à toutes les enquêtes obligatoires assujetties aux dispositions de la Loi sur la statistique.
Permettez-moi de passer maintenant au contenu de l’enquête nationale auprès des ménages. Les renseignements auparavant recueillis au moyen du questionnaire détaillé obligatoire du recensement seront maintenant obtenus dans le cadre de cette nouvelle enquête nationale à participation volontaire. Les questions seront pratiquement les mêmes que celles du questionnaire obligatoire de 2006. Le questionnaire de l’enquête nationale auprès des ménages, ou ENM, comprendra des questions sur la démographie, les limitations d’activités, la langue, la citoyenneté et l’immigration, l’origine ethnique et la religion, l’appartenance à un groupe autochtone, la mobilité, l’éducation, le marché du travail, le lieu de travail, le revenu et le logement.
L’ENM comprendra aussi la question normalisée relative au consentement à la divulgation après 92 ans qui figure aussi dans le questionnaire abrégé. D’après la Loi sur la statistique, les répondants doivent consentir à la divulgation de leurs renseignements personnels après 92 ans. Cela découle d’une modification apportée à la loi en 2005. On avait demandé aux Canadiens, à partir du recensement de 2006, de décider s’ils acceptaient que leurs renseignements personnels soient rendus publics 92 ans après leur collecte. Les renseignements ne sont divulgués qu’avec le consentement des intéressés. Le consentement éclairé à l’utilisation de ses propres renseignements personnels est une question fondamentale de protection de la vie privée. Les Canadiens doivent avoir le droit de décider eux-mêmes s’ils veulent que les renseignements qu’ils ont donnés au recensement soient rendus publics à l’avenir.
La modification législative de 2005 s’applique uniquement au recensement et non à d’autres enquêtes. Avec le remplacement du questionnaire détaillé du recensement par l’enquête nationale auprès des ménages, ces renseignements personnels n’auraient plus été à la disposition des généalogistes. Face à ce problème, le ministre s’est engagé à présenter des mesures législatives autorisant la divulgation de ces renseignements dans les mêmes conditions que celles du questionnaire détaillé du recensement. Par conséquent, Statistique Canada ajoutera la question relative au consentement à la divulgation après 92 ans au questionnaire de l’enquête nationale 2011 auprès des ménages.
Bien que ce soit la première fois que Statistique Canada mènera cette enquête à participation facultative, elle la réalisera et en publiera les résultats en utilisant les mêmes méthodes et les mêmes normes que pour toutes ses enquêtes.
L'Enquête nationale auprès des ménages sera effectuée dans les quatre semaines suivant le recensement de mai 2011. Le questionnaire de l'enquête sera distribué à un ménage sur trois, ce qui représente environ 4,5 millions de ménages en tout. Il s'agit d'une augmentation par rapport aux 2,9 millions de ménages qui ont reçu le formulaire détaillé du recensement de 2006, soit un ménage sur cinq. Statistique Canada s'attend à recevoir des réponses de plus de deux millions de ménages, ce qui est un nombre important. Le ministère effectuera des activités de suivi poussées pour encourager la participation au recensement et à l'Enquête nationale auprès des ménages.
Finalement, je récapitule les changements que le gouvernement prévoit présenter au cours des prochains jours. Ce sont les suivants:
Compte tenu de nos préoccupations au sujet de l'injustice inhérente aux peines d'emprisonnement, nous voulons éliminer ces peines imposées pour non respect du recensement et aussi de toutes les autres enquêtes obligatoires.
Compte tenu de la règle des 92 ans dont j'ai parlé plus tôt, le gouvernement prévoit présenter un projet de loi qui permettrait la divulgation des données de l'Enquête nationale auprès des ménages de la même manière que les données du recensement. Par conséquent, Statistique Canada ajoutera à l'enquête une question demandant aux répondants de consentir à la divulgation des données les concernant après 92 ans.
Les questions sont essentiellement les mêmes que dans le processus de 2006 et identiques aux questions qui auraient figuré sur le questionnaire détaillé de 2011. Nous avons essentiellement doublé la taille de l'échantillon pour contrebalancer toute perte de données. Cependant, le plus important, c'est que nous avons éliminé la menace de peines d'emprisonnement et d'amendes que même les députés libéraux et les témoins jugent excessives.
Je le répète, l'opposition a présenté une position intellectuellement malhonnête sur la question. Les députés de l'opposition prétendent que nous avons tout simplement éliminé le formulaire détaillé de recensement. Rien ne saurait être plus loin de la vérité.
Gardant cela à l'esprit, le gouvernement veut proposer une modification raisonnable à la motion qui démontrerait clairement que le gouvernement vise à atteindre un équilibre nécessaire sur la question en respectant les besoins des groupes d'utilisateurs tout en prenant au sérieux les préoccupations soulevées par des Canadiens.
Au nom du gouvernement, je propose donc l'amendement suivant en espérant obtenir l'appui de tous les partis. Je propose: « Que la motion soit modifiée en remplaçant les mots “clause au sujet de l’emprisonnement” par “clause au sujet de l'emprisonnement et des amendes” et en insérant les mots “et à l'emprisonnement” après les mots “formulaire détaillé obligatoire”.
:
Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole avec le député de Malpeque.
Je suis heureuse de prendre part au débat sur cette motion de l’opposition. Je félicite le député qui l'a présentée.
L’abolition du questionnaire détaillé obligatoire de recensement est tombée comme un cheveu sur la soupe. Les intervenants n’ont pas été consultés. Cette initiative ne semble pas faire partie du programme du Parti conservateur. Aucune motion n’a été présentée au comité à cet égard. La question n’a fait l’objet d’aucun débat public. Ce qui s’est produit, c’est que le cabinet du a choisi un beau jour paisible de juin, pendant le congé estival du Parlement, pour présenter un autre bel exemple de sa politique tendant à diviser pour régner, un autre geste typique de ce régime qui s’arroge le droit de fixer les règles dans ce pays.
Nous n’avions jamais vu une telle diversité et un tel nombre de citoyens et de groupes opposés à un tel changement au Canada. En effet, plus de 370 groupes s’opposent aux modifications décrétées par le gouvernement. Il y en a peut-être bien une dizaine seulement qui appuient le gouvernement dans ce dossier. Bien que je comptais donner une longue liste de ces groupes, je pense qu’un bon nombre ont déjà été mentionnés. Si j’ai le temps, à la fin de mon exposé, j’en ajouterai quelques-uns à la liste.
Si la principale motivation du gouvernement conservateur était de supprimer la menace d’une peine d’emprisonnement pour quiconque refuserait de remplir le questionnaire détaillé et obligatoire de recensement, on pourrait simplement se demander pourquoi le gouvernement n’a pas proposé une mesure législative portant suppression de cette menace, comme le fait la motion libérale d’aujourd’hui.
Ce matin, le a répété que l’opposition voulait criminaliser ceux qui ne remplissaient pas le questionnaire détaillé de recensement. Je rappellerai encore une fois que ce n’est pas le gouvernement conservateur, mais bien le caucus libéral qui a présenté une mesure législative visant à modifier la Loi sur la statistique.
Si nous ne comptons pas les citoyens, ils ne comptent pas, leurs problèmes ne comptent pas et il n’est pas nécessaire que le gouvernement prenne les mesures appropriées. Voilà probablement la principale raison pour laquelle le gouvernement veut supprimer le caractère obligatoire du questionnaire détaillé.
Nous savons tous que le recensement est la source fondamentale d’information pour notre pays, pour notre société. Depuis 1971, le formulaire détaillé obligatoire fournit des données objectives et sûres qui livrent parfois aux gouvernements des renseignements bien commodes. Il donne de l’information sur le travail non rémunéré, le salaire des femmes, la situation des personnes handicapées et celle du parc de logements. Cela dérange-t-il le gouvernement de savoir que 16 personnes vivent dans un logement de 1 000 pieds carrés dans une réserve des Premières nations? De savoir que l’état du parc de logements dans les collectivités des Premières nations est un sujet de honte nationale? De savoir qu’un nouvel arrivant a besoin de soutien et d’aide pour s’installer? De savoir que les gouvernements dispensent les services avec moins d’efficacité et d’efficience qu’ils ne pourraient le faire?
Le 5 août, j’ai rencontré des membres de ma collectivité à Winnipeg pour discuter de la suppression du caractère obligatoire du formulaire détaillé. Ont participé à la discussion des représentants de l’association des municipalités du Manitoba, d’organismes sans but lucratif, de chercheurs universitaires, de collectivités autochtones et de groupes de personnes handicapées. Certaines organisations ont dit qu’elles auraient voulu être là, mais qu’elles avaient peur de venir parce qu’elles reçoivent des fonds du gouvernement. Dans un pays comme le Canada, elles avaient peur de venir exprimer leurs préoccupations au sujet du caractère non obligatoire du formulaire détaillé.
Il est important de signaler que, à cette réunion, j’ai entendu des réflexions comme les suivantes: remplir le formulaire détaillé obligatoire de recensement est un devoir civique; ce n’est pas de l’intrusion, c’est le devoir des citoyens.
Quelqu’un a dit que la décision de sacrifier le formulaire détaillé obligatoire s’inscrivait dans la tendance du gouvernement à recueillir les faits en fonction d’une politique plutôt qu’à élaborer une politique fondée sur des faits, comme un de mes collègues l’a signalé plus tôt. Quelqu’un d’autre a dit que les données administratives sont bien plus indiscrètes que les données du recensement et que leur consultation coûte beaucoup plus cher.
Quant à la validité d’une enquête nationale sur les ménages à participation facultative, il est scandaleux que le ait déclaré plus tôt que le gouvernement se conformait aux conseils de Statistique Canada. Nous savons que le statisticien en chef a dû remettre sa démission pour faire comprendre clairement qu’une enquête à participation facultative ne peut se substituer à une enquête à participation obligatoire. Le gouvernement n’a pas vraiment consulté Statistique Canada. Il est parti de la prémisse selon laquelle le formulaire détaillé obligatoire serait remplacé.
D’autres députés ont parlé aujourd’hui du besoin de données fiables et dit que seul le formulaire détaillé obligatoire permet de les produire. Je signale que même le ministre a avoué qu’un recensement à participation facultative introduira une distorsion, car il y aura peu de réponses chez les salariés à bas revenu et à revenu élevé ainsi que chez les Canadiens autochtones. Il a aussi admis tacitement que nous allions payer plus cher afin d’obtenir des données moins bonnes.
J'ajouterais que, si les recensements ont lieu tous les cinq ans, c'est non seulement pour prendre régulièrement le pouls de la société, mais aussi pour faire des comparaisons d'une fois à l'autre. Et comme l'enquête volontaire sera incompatible avec l'ancien formulaire détaillé, il n'y aura aucune comparaison possible.
Même le connaît — ou connaissait — l'importance que revêt la cohérence méthodologique. Dans la thèse de maîtrise qu'il a rédigée en 1991, il s'est servi des données du recensement pour illustrer les cycles économiques et politiques. Il a même fait remarquer à quel point les changements de nature méthodologique pouvaient compromettre l'analyse à long terme des comportements politiques canadiens et empêcher de bien les comprendre.
Le gouvernement prétend qu'il doit trouver l'équilibre entre les besoins en matière de données et les menaces d'emprisonnement, qu'il faut selon lui éliminer. J'aimerais bien que le gouvernement reconnaisse le profond déséquilibre qu'il a créé en décidant de se débarrasser du formulaire détaillé obligatoire au lieu de supprimer les peines d'emprisonnement et de garder le recensement intact.
Comme je le disais plus tôt, jamais dans son histoire la Chambre n'aura vu pareil florilège d'intervenants — y compris d'autres ordres de gouvernement — se rassembler comme s'ils formaient une coalition et dénoncer la décision de se débarrasser du formulaire détaillé de recensement.
Je tiens à citer les propos qu'a tenus le Conseil national des femmes du Canada dans une lettre envoyée au premier ministre:
Le Conseil est convaincu qu'il faut reconnaître la contribution du travail non rémunéré au dynamisme de l'économie canadienne. La présente a donc pour but de faire connaître l'opposition du Conseil aux changements que le Canada entend apporter à son recensement. Les données recueillies grâce à un recensement volontaire perdent leur fiabilité comme leur utilité. Toutes les autres enquêtes sur les services sociaux se trouvent également compromises si elles ne s'appuient sur aucune échelle démographique comparative digne de ce nom.
Je vais terminer en vous citant le Globe and Mail d'aujourd'hui. On peut en effet lire ce qui suit à la fin de l'éditorial:
C'est dommage qu'une chose aussi fondamentale et aussi cruciale que le formulaire détaillé du recensement doive être inscrite dans la loi. Mais comme son abolition est le fruit d'un calcul politique, c'est de l'arène politique, où il existe un vaste consensus concernant l'abolition du formulaire détaillé, que doit venir la solution.
Je demande donc aux députés d'en face, et plus particulièrement aux membres du cabinet du premier ministre, de respecter cette institution, de respecter le vote qui scellera l'issue du débat d'aujourd'hui et de garder le formulaire détaillé obligatoire. Nous avons entendu l'opinion des Canadiens de partout au pays, des groupes confessionnels aux gens d'affaires en passant par les écoles, les groupes de défense des droits des femmes et les personnes handicapées. Les Canadiens des quatre coins du Canada connaissent le formulaire détaillé obligatoire, ils l'utilisent et ils en ont besoin. Je demande aux députés d'en face de respecter les décisions de la Chambre.
:
Monsieur le Président, je suis ravi d'intervenir au sujet de cette motion présentée aujourd'hui par mon collègue de et qui exhorte le gouvernement à rétablir immédiatement le formulaire détaillé obligatoire de recensement.
Comme les députés le savent déjà, la motion exige notamment ceci:
[...] que le gouvernement présente des amendements législatifs à la Loi sur la statistique afin d’éliminer la clause au sujet de l’emprisonnement de l'article 31 de la Loi en ce qui a trait au formulaire détaillé obligatoire, au recensement de la population et au recensement agricole.
Comme les députés ne sont pas sans le savoir, j'ai posé plus tôt une question à un ministériel sur le fait que, aujourd'hui, le défaut de remplir le questionnaire de recensement agricole entraîne toujours une amende de 500 $ et une menace d'emprisonnement. Voilà qui montre que le gouvernement applique deux poids deux mesures et que ses arguments sur cette question ne reposent pas sur des principes solides.
Cette motion est extrêmement importante parce qu'elle concerne directement la prise de décisions politiques à tous les niveaux. Les décisions doivent être basées sur les faits et les faits doivent reposer sur des données d'une exactitude irréprochable. Qu'elles concernent le trajet d'un autobus dans une ville, une école dans une collectivité, un centre communautaire ou un centre de soins de santé dans une région rurale, les décisions prises par les municipalités, les gouvernements provinciaux, le gouvernement fédéral et les comités consultatifs communautaires doivent reposer sur des données exactes. Par conséquent, l'exactitude des données est essentielle.
Dans un article publié dans le quotidien Globe and Mail, Steven Chase souligne l'absurdité de la position de l'actuel gouvernement à l'égard du recensement. M. Chase dit notamment ceci:
Une étude menée par Statistique Canada de nombreuses semaines avant qu'Ottawa n'annonce son intention de supprimer le questionnaire détaillé obligatoire de recensement révèle que des erreurs graves peuvent survenir dans les résultats des enquêtes à participation facultative.
M. Chase ajoute que la décision du gouvernement « nuira à la riche base de données sur laquelle comptent les organisations ».
J'ajoute pour ma part que compte tenu de la façon dont le gouvernement modifie le recensement de 2011, les tendances seront faussées et on ne pourra plus, à long terme, se fier sur la qualité des données, ce qui a fait la réputation du Canada dans le monde. Grâce à Statistique Canada, le Canada était respecté dans le monde entier. Nous étions le modèle à suivre. Le gouvernement mine ce respect et cette réputation dont nous jouissons à l'échelle internationale.
L'auteur de l'article paru dans le Globe and Mail poursuit en disant comment la « nouvelle formule de recensement risque de fausser les données dans divers domaines, notamment dans les secteurs du logement et de la démographie ».
Comme le laisse entendre M. Chase, n'importe où dans le monde, quiconque travaille dans le domaine de la statistique et de la collecte de données sait qu'un recensement à participation volontaire comporte de graves lacunes.
Cependant, pour aggraver encore la situation, non seulement le gouvernement rend le recensement facultatif, mais il essaie de le cacher en distribuant plus de questionnaires, ce qui va rendre les données encore moins fiables parce que cela va fausser les chiffres. Il dépense 30 millions de plus que pour le recensement ordinaire et cela pour obtenir des renseignements moins fiables. Est-ce logique? Je sais que le gouvernement a pour habitude d’emprunter et de dépenser et qu’il n’hésite à faire aucune dépense supplémentaire, même pour le recensement, pour obtenir des renseignements moins fiables. Est-ce logique? Certainement pas.
Toutefois, comme nous l’avons constaté à de nombreuses occasions, le gouvernement ne veut pas renoncer à son idéologie. Son idéologie passe avant les faits, il ne veut pas laisser la réalité entraver les décisions qu’il désire prendre et il s’arrange donc pour fausser cette réalité. Nous l’avons constaté récemment à la Chambre au cours de certains débats.
La position du gouvernement est claire. Son idéologie doit l’emporter sur les faits et c’est ce qui caractérise la plupart de ses décisions.
En tant que porte-parole de mon parti pour l’agriculture, je peux citer l’exemple de la Commission canadienne du blé. Le ministre ne veut pas entendre les faits à cet égard non plus. D’ailleurs, il est ministre depuis longtemps, mais il n’est même pas encore allé aux bureaux de la Commission, parce qu’il ne veut pas entendre parler du bon travail qu’elle accomplit. C’est l’idéologie...
M. Dean Del Mastro: Nous ne croyons pas dans la Commission. Nous croyons dans le libre marché, Wayne. C’est une notion qui vous est étrangère.
L'hon. Wayne Easter: ...ou la loi, comme le crie le député d’en face. C’est un député pour la loi et l’ordre. C’est le programme de la loi et l’ordre: il faut dépenser 9 millions de dollars de plus pour des prisons, pour des criminels et des crimes non signalés. C’est ridicule.
Néanmoins, voyons ce que d’autres décideurs disent de cette décision stupide qui se fonde sur l’idéologie du gouvernement. Un rapport présenté au conseil municipal d’Edmonton, le 15 juillet, reproche au gouvernement fédéral d’éliminer le questionnaire détaillé de recensement. Selon ce rapport, l’élimination de ce questionnaire aurait des répercussions directes pour tous les citoyens de la ville parce que la perte de ces données empêcherait la municipalité de planifier, que ce soit l’emplacement de centres récréatifs ou pour des questions de transport.
La Fédération canadienne des municipalités a déclaré, dans une lettre adressée au , en juillet, que de toute évidence, non seulement les gouvernements fédéral et provinciaux ont besoin des données du questionnaire détaillé obligatoire, mais que les municipalités comme celles d’Edmonton, de Calgary, de Charlottetown, etc., ont également besoin de ces données.
Le PDG de la Canada West Foundation, Roger Gibbens, a dénoncé l'ignorance que manifestent les conservateurs, et a déclaré que la fondation sait qu'un recensement volontaire ne produira pas de données fiables. Il a dit: « Ce n'est pas une opinion; c'est un fait. »
L'Association médicale canadienne semble partager les craintes de la ville d'Edmonton. D'après l'article paru dans le Journal de l'Association médicale canadienne le 15 juillet, la décision du gouvernement est absurde et dangereuse. Voici ce qu'écrivait l'auteur de l'article: « En décidant de ne pas procéder à une consultation, le gouvernement [du premier ministre] a miné la prise de décisions fondée sur des preuves au Canada. » Il poursuit comme suit: « Le recensement est un outil essentiel pour la planification et la prestation de services dans le secteur des soins de santé. » Il conclut en disant: « Si cette décision n'est pas renversée, le Canada sera le seul pays développé à ne pas posséder de renseignements détaillés sur sa population. »
C'est toute une déclaration. Cela montre dans quelle voie nous mène le gouvernement. Ce n'est pas étonnant que nous perdions le respect de la communauté internationale. Le gouvernement fonde toutes ses décisions sur une idéologie et essaie de faire abstraction des faits à tout prix.
Permettez-moi de parler d'un autre point à l'égard duquel le gouvernement use d'hypocrisie. Les conservateurs prétendent qu'ils abolissent le formulaire détaillé obligatoire pour éviter que des Canadiens n'aillent en prison ou n'aient à payer des amendes. Apparemment, cela ne vise pas et ne s'appliquera pas aux agriculteurs.
Qui sera responsable d'envoyer les agriculteurs en prison? Le , selon le . Lorsque le ministre de l'Industrie a comparu devant le comité, il a déclaré que cette décision revient au ministre de l'Agriculture.
Comme je l'ai dit plus tôt, il est clair qu'il y a deux poids deux mesures, puisque le gouvernement fait valoir que le but est d'éviter que des gens aillent en prison, mais, comme le le sait, le Recensement de l'agriculture est important. Le formulaire détaillé est le seul moyen d'obtenir ces données fiables. Le recensement est obligatoire et les agriculteurs s'exposent à des amendes et à des peines de prison s'ils refusent d'y répondre. La collectivité agricole accepte les règles, car elle connaît la valeur des renseignements recueillis et l'importance de données exactes pour la prise de décisions opérationnelles.
Nous sommes confrontés à une décision prise quelque part dans les officines du cabinet du premier ministre, laquelle a été imposée aux députés ministériels. Maintenant, ils chantent tous à l'unisson et essaient de présenter leurs arguments. C'est vraiment l'idéologie qui prime sur la substance. Voilà ce que c'est.
:
Monsieur le Président, permettez-moi de mentionner que je vais partager mon temps avec le député de . Je veux vous préciser que c'est une chance que nous ne soyons pas dans un concours d'amateurs parce que ma voix peut augmenter ou diminuer de plusieurs octaves en peu de temps aujourd'hui. La grippe a commencé ses ravages un peu partout.
Concernant le questionnaire long de Statistique Canada que le gouvernement veut amputer afin d'éliminer ce qui est obligatoire pour le rendre volontaire, ma conception de la situation est très claire. L'intention du gouvernement est un peu comme faire la promotion du désengagement de la société par rapport à ceux qui répondaient auparavant dans un fort pourcentage au questionnaire long obligatoire. En même temps, le gouvernement veut aussi nous annoncer, en quelque sorte, son désengagement au niveau des politiques plus humaines et sociales.
On se rappellera qu'il y a quelque temps — et même déjà quelques années probablement —, le gouvernement s'est mis à sabrer dans les subventions et dans les bourses au niveau des centres de recherche relatifs aux sciences humaines et sociales. On se souviendra très bien qu'il y a eu un tollé d'insatisfaction qui s'est vraiment fait sentir. Aujourd'hui, on sent encore que le gouvernement ne veut pas prendre ses responsabilités, car il ne veut pas avoir une image quinquennale exacte de la société québécoise et canadienne. Une image qui peut faire en sorte d'amorcer une initiative pour élaborer des politiques, notamment au niveau social, mais aussi dans d'autres secteurs.
On connaît tous probablement un urbaniste quelque part. J'ai été conseiller municipal et l'urbaniste qui s'occupait des statistiques à qui j'ai parlé dernièrement l'a mentionné. Le gouvernement a l'impression de payer pour ces gens, d'aller chercher de l'information et de les payer et que ce sont d'autres personnes qui les utilisent. Il n'y a aucun problème à ce niveau parce qu'on sait qu'ils doivent faire un travail. Ils ont de l'information globale, mais pour rendre plus pointues les informations et les faire parler, ces gens doivent aussi investir beaucoup de temps, ramener les informations à un niveau d'arrondissement de la municipalité et même dans la région. Il y a beaucoup de travail qui doit se faire.
Le 27 août dernier, j'ai eu l'occasion d'assister à une réunion de comité où il y avait trois groupes de témoins qui, je dois l'avouer, étaient venus pour appuyer le maintien du questionnaire long obligatoire. Quelques-uns, mais très peu, étaient présents pour appuyer l'action du gouvernement pour rendre le questionnaire volontaire.
Je dois aussi avouer qu'à la réunion précédente pour fixer la date d'une réunion du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie afin de parler encore du recensement, le gouvernement n'en voulait pas dans un premier temps parce qu'il était incapable d'avoir des témoins crédibles pour appuyer sa position et que ces gens étaient venus défendre. À toutes fins pratiques, c'était marquant de voir la différence et surtout ce qui animait chaque groupe.
Les tenants du maintien du questionnaire long obligatoire sont tous ou à peu près du même avis. Je prends l'exemple de M. Mel Cappe, président de l'Institut de recherche en politiques publiques. M. Cappe connaît bien l'appareil gouvernemental et la fonction publique fédérale. Il a été nommé à l'époque par décret à un poste de sous-ministre sous Brian Mulroney. Il est un ancien greffier au Conseil privé et secrétaire du cabinet de M. Chrétien. Il termine sa carrière en bon serviteur loyal du actuel. Cet homme témoignait en toute impartialité. Ce qu'il nous disait n'était absolument pas partisan. Il nous avouait qu'il avait envoyé quatre lettres au et au . Il n'a eu aucune réponse du premier ministre et un accusé de réception du cabinet du ministre de l'Industrie.
C'était très clair pour M. Cappe: le formulaire long sert l'intérêt général de la population. Il sert aussi à répondre à ses besoins. En effet, il permet de cerner les tendances à venir, les besoins et les préoccupations de la population qui se dessinent.
Évidemment, il est obligatoire, ce qui dérange largement les conservateurs. De fait, ils savent très bien qu'une large part de la population ne répondra pas à ce questionnaire s'il est à participation volontaire.
Si c'était simplement une question statistique et que la proportion des gens qui n'y répondent pas était équivalente à celle des gens qui y répondent, cela pourrait ne pas changer grand-chose, mais on sait très bien ce qui arrive dans ces situations. Des gens se croient non pas nécessairement obligés, mais responsables de voir à la création de politiques justes et équitables dans cette société. Or, avec les questionnaires à participation volontaire, ce sont des groupes de personnes qui ne répondraient pas, des personnes qui vivent des situations plus particulières. Donc on n'aurait plus du tout d'informations sur ces groupes de personnes, ce qui rendrait inutilisable, en pratique, ce questionnaire à participation volontaire.
Plusieurs personnes, même à l'échelle internationale, ont tour à tour affirmé que les statistiques canadiennes ne seraient plus bonnes à rien, ou à peu près, qu'on ne pourrait pas s'y fier, donc qu'elles n'auraient aucune crédibilité.
Comme on le sait, l'Institut canadien des urbanistes le dit aussi. Il utilise ces données fréquemment, pour ne pas dire tout le temps, dans la planification tant à court terme qu'à moyen et long terme. En effet, on sait très bien qu'il y a des mouvements dans la population qu'on doit pouvoir prévoir et comparer d'un recensement à un autre. Or, ce ne sera plus possible dès l'année prochaine, si le gouvernement ne change pas sa politique.
Comme le mentionnait M. Cappe, il faut produire des données fiables et solides. Bien sûr, il parlait de mesures moins coercitives, empiétant le moins possible sur la vie privée des gens et respectant au maximum la confidentialité des données. Pour ce qui est de la confidentialité et de la vie privée, j'ai relu le questionnaire de 2006, mais je ne saurais dire quelles questions étaient vraiment indiscrètes ou de nature intime dans ce questionnaire. On aurait pu publier mes réponses à ce questionnaire dans le journal quotidien de ma région sans me le demander et je ne m'en serais pas senti lésé. Il n'y avait rien de spécial.
Des groupes adoptant la position du gouvernement, qui se disaient représentatifs de nombreuses organisations regroupant des centaines de milliers de personnes, disaient comme cela, sans rire, de façon très sérieuse, que plus de gens répondraient au questionnaire s'il était à participation volontaire. Au contraire, on a bien compris, d'après les présentations, que les gens ne le feraient plus. Dès lors, comme je le disais tout à l'heure, un groupe de personnes bien identifiable ne répondrait plus de façon volontaire à ce recensement. Il nous manquerait donc de l'information et, en définitive, le gouvernement verrait réduites ses possibilités de faire des politiques qui se tiennent.
Cela touche de nombreuses sphères d'activité. C'est par souci de créer et de mettre sur pied des politiques visant à répondre aux besoins de la population, quelquefois des gens plus marginalisés, que nous devons revenir au questionnaire obligatoire. Le gouvernement va toujours à contre-courant, car les gens ressentent de plus en plus qu'ils ont l'obligation de participer à cette évolution de la société en ayant le plus d'informations à une date donnée.
D'ailleurs, on sait que ce ne sont pas les sciences humaines comme telles qui préoccupent le gouvernement, c'est évident. On a juste à s'en remettre à la Canadian Association for Business Economics, qui s'oppose aussi à cette décision prise, soutient-elle, « sans consultation des utilisateurs des données du recensement ».
De plus: « Les entreprises et le gouvernement prennent régulièrement des décisions quant à l'emplacement de nouvelles initiatives sur la base des données recueillies par le formulaire long du recensement », écrit l'association.
Même les économistes disaient qu'il fallait le garder.
:
Monsieur le Président, le Bloc québécois appuie la motion du Parti libéral voulant que l'on rétablisse immédiatement le formulaire détaillé obligatoire du recensement — le formulaire long. Dans la même veine, le Bloc demande aussi que l'on enlève tout aspect relatif à un possible emprisonnement advenant le cas où une personne ne participerait pas à l'exercice.
Une chose est très importante, et je veux en instruire nos amis conservateurs: d'où viennent les recensements? Reportons nous à une époque où l'on parlait d'obscurantisme — je ne parle pas nécessairement du Parti réformiste du Canada, qui est la racine du Parti conservateur, mais qui fait peur jusqu'à ce point, quand même, car on connaît et voit certains de ses représentants — et où les despotes régnaient en monarques absolus. Ces derniers avaient droit de vie ou de mort sur leurs sujets. Ces monarques visaient à s'enrichir le plus possible, que ce soit au détriment d'autres rois ou de leur propre peuple. Autrement dit, le roi n'avait que lui-même comme élément de réflexion, il possédait la vérité infuse. En outre, plusieurs de ces rois étaient même considérés comme étant de droit divin.
Par la suite, il y a eu des révolutions. Ont suivi des moments de réflexion où l'intelligence a pris le dessus. J'aimerais que les conservateurs reviennent sur Terre au lieu de nous faire reculer dans le temps. J'aimerais qu'ils restent avec nous. Au cours des révolutions libérales qu'on a vécues, on a mis dehors ces despotes. Un nouveau système a été mis en place. Depuis près de 400 ans — peut-être un peu moins —, c'est ainsi que ça fonctionne: un système démocratique est mis en place. Ces démocrates qui se font élire ont à coeur le sort de leur peuple et se demandent comment l'améliorer, comment améliorer la situation du peuple. Ils se disent aussi qu'ils ont besoin d'informations.
À l'époque, ces informations étaient appelées des « mathématiques politiques ». C'est à partir de là que tout a commencé. Les mathématiques politiques, c'était le fait d'avoir des informations — que mes amis conservateurs écoutent bien le mot qui suit — « scientifiques », obtenues selon une méthode scientifique. Le mot « scientifique » est très important. Je sais que, parmi les députés, certains croient que le monde a été créé il y a 5 000 ans et que les êtres humains vivaient alors avec les dinosaures. Ce n'est pas vrai. Qu'ils arrêtent de croire de telles choses. Ils n'aident ni la science ni le peuple, que ce soit le peuple québécois ou le peuple canadien.
Il n'en demeure pas moins que ces mathématiques scientifiques ont pris la connotation du mot allemand statistik. Ces statistiques, comme celles divulguées par Statistique Canada et par l'Institut de la statistique du Québec, aident le décideur, l'élu, le démocrate. Le démocrate élu veut aider le peuple, les citoyens, et avoir un jugement éclairé et scientifique sur la situation dans laquelle se trouve son peuple, et ce, dans toutes les différentes sphères de la vie et de la société, et dans les coins de toutes les nations qu'il représente. C'est donc très important que les conservateurs restent dans le monde contemporain et qu'ils ne nous ramènent pas au Moyen Âge. C'est bien important de prendre cela en note.
Pour toutes ces raisons et d'autres raisons qui relèvent du gros bon sens scientifique, le Bloc québécois rejette les modifications proposées par le gouvernement réformiste-conservateur au formulaire de recensement. Ces modifications sont fondées sur des critères strictement idéologiques, qui font peur, qui font beaucoup peur. En effet, c'est troublant: on s'attaque à la science.
Ces modifications nuiront à la capacité du Québec et de ses municipalités de mettre en avant des politiques publiques ciblées et efficaces qui répondent aux besoins du peuple. Je sais qu'ils entendent là quelque chose de nouveau, mais j'aimerais qu'ils entrent dans cette danse; on va les aider à le faire.
Pour garantir les objectifs de collecte de données viables à un échantillonnage scientifique adéquat, le maintien du caractère obligatoire du formulaire long doit être assuré. Les réformistes conservateurs veulent, en pratique, saboter l'aspect scientifique du recensement, ce qui est troublant, très troublant. J'entends à ce sujet des propos insensés de la part des réformistes conservateurs. J'en ai fait part plus tôt, et je me répète: le député de avance que, lorsqu'il était ministre responsable du recensement — donc ministre de l'Industrie —, il recevait jusqu'à 1 000 plaintes par jour au sujet du recensement. Les propos du capitaine Bonhomme sont bien faibles comparés à ceux du député de Beauce, quand il dit des choses aussi épouvantables. Un vrai bonhomme Sept-Heures, ce député de Beauce!
Pourtant, la commissaire à la protection de la vie privée, Mme Jennifer Stoddart, spécifiait le 27 juillet dernier — et j'étais présent au Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie — que lors des 20 dernières années, il n'y a eu que 52 plaintes concernant tous les aspects du recensement. Monsieur le député de , on parle de 52 en 20 ans. Lui, il en voyait 1 000 par jour, imaginez! Il n'y en a eu que six dans les dernières années. C'est épouvantable de dire de telles choses. D'après moi, il faudrait l'envoyer dans le coin pour qu'il réfléchisse comme il faut et qu'il pense à son affaire parce que, soyez-en assurés, ce n'est vraiment pas représentatif des Québécois de penser ainsi.
Les réformistes conservateurs nous écorchent les oreilles quand il nous disent qu'on menace les citoyens de les jeter en prison s'ils ne remplissent pas le questionnaire du recensement. D'abord, sachons que l'aspect obligatoire du recensement existe depuis 1918. C'est bien important de le souligner. En 1918, c'est un an après que la Ligue nationale de hockey ait été mise sur pied. Mon collègue d'Edmonton, le député et secrétaire d'État, va beaucoup aimer cela, lui qui a déjà travaillé pour les Oilers d'Edmonton, une équipe qui a d'ailleurs connu ses heures de gloire.
Encore faut-il savoir que tous les partis politiques d'opposition — il y en a trois en Chambre — sont d'accord pour qu'on enlève cet aspect relatif à l'emprisonnement. On ne veut pas que les gens aillent en taule parce qu'ils ne remplissent pas le questionnaire du recensement. On va le répéter pour qu'ils comprennent. On ne veut pas que les gens aillent en taule parce qu'ils ne remplissent pas le questionnaire du recensement. J'ai vu mon collègue d' qui hochait de la tête et avec qui on est d'ailleurs d'accord sur cet aspect. Il faut enlever cette mesure, cela n'a pas d'allure,
Plus de 300 organismes et municipalités, dont la ville de Gatineau, sont contre l'approche non scientifique des réformistes conservateurs qui les priverait de données essentielles pour le mieux-être de leurs citoyennes et citoyens. L'hostilité de ce gouvernement envers la science est, encore une fois, confirmée par cette décision. L'ensemble des organismes scientifiques et des professeurs d'universités réclament le retour au formulaire long obligatoire, puisqu'il s'agit de la meilleure méthode pour obtenir un échantillonnage représentatif de l'ensemble d'une société. Jamais un échantillonnage volontaire ne pourra recevoir l'aval des chercheurs compte tenu du caractère non représentatif des réponses obtenues.
C'est clair, l'abolition du formulaire long obligatoire s'inscrit dans le plan du gouvernement réformiste-conservateur qui souhaite affaiblir les bases de la science — c'est épouvantable, cela donne froid dans le dos — pour ensuite être mieux en mesure de la discréditer. C'est affreux. Cette tactique pourrait notamment être utilisée pour affaiblir les programmes sociaux des divers paliers de gouvernement. À défaut de régler et d'éliminer le problème de la pauvreté, une façon pour un gouvernement de droite d'éviter d'agir est souvent de la cacher. Un formulaire volontaire pourrait avoir cet effet en sous-représentant plusieurs groupes sociaux, voire des régions ou des villes entières, où les populations défavorisées sont présentes. Il faut le savoir.
Comment justifier les mesures pour venir en aide aux plus démunis et aux minorités linguistiques quand les données sont incomplètes et non fiables? La question se pose, la réponse est compréhensible. C'est insensé d'agir de cette façon. Il ne faut pas faire cela. Il sera alors facile de justifier l'implantation d'un agenda réformiste-conservateur et — on s'entend — de droite épouvantable contre l'avancement de la science lorsque le portrait de la réalité sera écarté par l'affaiblissement des statistiques de base.
Avec un recensement volontaire, il sera alors beaucoup plus facile pour ce gouvernement réformiste-conservateur d'écarter la réalité lorsqu'elle ne fera pas son affaire pour mieux justifier ses mesures idéologiques et démagogiques.
Même M. Munir Sheikh, qui a démissionné le 22 juillet dernier de son poste de statisticien en chef de Statistique Canada, l'a dit lui-même. Il a envoyé des dizaines et des dizaines de courriels pour dire « ne faites pas cela ». Cet homme de principes s'est levé debout contre ce gouvernement et a démissionné parce qu'il ne voulait pas voir son nom entaché par le manque de scientificité de ce gouvernement qui est en train de bafouer les Canadiens et les Québécois dans ce dossier.
:
Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec mon distingué collègue, le député d'.
Je n'aurais jamais cru présenter un discours comme celui-ci ou participer à une telle discussion à la Chambre des communes. De toute évidence, au cours des jours calmes de l'été, juste après la fin des travaux du Parlement, le a décidé, dans son infinie sagesse, de simplement changer ce qui a été utile pour notre pays et qui était un joyau de la Couronne dans le domaine de la collecte et de la compilation d'information. Une simple déclaration a suffi pour que le formulaire détaillé du recensement, qui était tellement nécessaire pour comprendre essentiellement qui nous sommes, soit éliminé — ou du moins pour proposer son élimination.
Nous avons ensuite appris, dans le cadre d'excuses plutôt pathétiques du gouvernement conservateur, que le questionnaire détaillé serait remplacé par un formulaire de déclaration volontaire.
Ce que nous savions à ce moment-là, c'était que le gouvernement avait en fait de l'information exacte, fiable, précise et honnête selon laquelle ce qu'il nous proposerait comme solution de rechange était en fait un parent pauvre de la formule établie.
Je vais passer très vite là-dessus, par ce que je veux profiter de mes dix minutes pour traiter du coeur du sujet, l'abrutissement du Canada par le gouvernement conservateur. Ce que le gouvernement ne veut pas, c'est fournir de l'information aux Canadiens et leur permettre de mieux se comprendre en tant que peuple.
J'aimerais que certains députés ministériels comprennent qu'il y avait une certaine sagesse dans les propos de Yogi Berra quand il a dit que, si l'on ne sait pas où l'on s'en va, il y a des risques qu'on se retrouve ailleurs.
Le gouvernement conservateur a commis ce que je considère être un acte de vandalisme statistique. Il enlise le Canada dans l'incertitude afin que les Canadiens aient une moins bonne compréhension de ce qu'ils sont. Je ne parle pas des gens qui appuient différents programmes ou qui ont un programme politique à défendre. Je parle des gens de toutes les couches de la société. Vous les connaissez, monsieur le Président. Ce sont par exemple les associations de policiers de ma circonscription.
Une voix: Les pompiers.
L'hon. Dan McTeague: Le député signale avec raison le cas des pompiers.
Ce sont des infirmières et infirmiers, des démographes, des petits entrepreneurs — l'épine dorsale de notre économie — et des agents municipaux. Alors que beaucoup d'entre eux dans ma province sont plongés dans des campagnes municipales, la question se pose de plus en plus. Ils craignent qu'on ne puisse plus déterminer efficacement les besoins, surtout dans les grands centres urbains, mais aussi dans les plus petites villes. Par exemple, je pense à mes amis du côté de chez mes parents, à Peterborough, en Ontario. Ils s'inquiètent beaucoup de savoir ce que cela va signifier pour l'avenir.
Bien des gens au Canada se demandent aussi comment on pourra prendre des décisions en fonction de l'évolution démographique de notre pays.
Ce n'est peut-être pas du goût des conservateurs, qui voudraient bien s'appuyer sur des informations imaginées ou peut-être fournies par un sondeur quelconque. La réalité, c'est qu'on supprime un excellent système sous prétexte que certaines personnes avaient peur de répondre au questionnaire et qu'on abandonne quelque chose d'essentiel et d'extrêmement important pour comprendre qui nous sommes et planifier notre avenir.
Je sais bien que planifier, réfléchir à l'avance et agir en fonction de l'avenir, c'est difficile pour les conservateurs parce que bien franchement, rien de cela ne les intéresse. Tous ce qu'ils veulent, c'est se contempler le nombril et diviser pour régner.
Je vais poser une questions à mes collègues et j'espère qu'ils pourront y répondre: pourquoi est-il acceptable d'imposer un questionnaire détaillé au Canada rural, mais pas au Canada urbain? Qu'est-ce qu'ils ont contre les Canadiens ruraux pour leur infliger une chose pareille?
Je sais que cela passe mal au parti conservateur, et je constate qu'ils finissent par s'animer. Il leur aurait suffi tout simplement de faire preuve de bonne volonté en supprimant la sanction pénale au lieu de jeter le bébé avec l'eau du bain.
Je sais que les conservateurs ont du mal à comprendre cela parce que, pour la première fois en 17 ans, je constate qu'à ma connaissance, aucun gouvernement fédéral conservateur ou libéral ni aucun gouvernement provincial libéral, néo-démocrate ou conservateur n'a jamais même envisagé de prendre une mesure telle que celle que le gouvernement actuel a prise.
Faisant fi de l'opinion massive et catégorique des médias et des organisations de notre pays, le gouvernement persiste donc dans son attitude de luddites des temps modernes en voulant détruire un document extrêmement important qui sert à mieux comprendre notre pays.
Je sais que les députés d'en face ont du mal à comprendre que cette information puisse servir même pour la composition de la Chambre des communes ou pour comprendre comment sont ventilés les programmes et comment les petites entreprises prennent leurs décisions dans les diverses régions du recensement, les RMR. S'ils sont vraiment prêts à supprimer ce document, c'est bien triste, car ils nous priveront du moyen d'obtenir des informations vitales pour notre pays.
Je comprends que les députés s’énervent, mais, à dire franchement, la plupart d’entre eux n’ont jamais été consultés au sujet de la décision du . Il doit être agréable de faire du chahut de ce côté-là, mais la réalité, aux yeux des députés de ce côté-ci, c’est qu’une mauvaise politique a découlé d’une très mauvaise décision.
Pourquoi le gouvernement n’admet-il pas simplement qu’il a tort? Pourquoi les intérêts les plus importants du Canada ne lui tiennent-ils pas à cœur? Pourquoi le Parti conservateur n’est-il pas disposé à défendre les Canadiens et à comprendre que nous nous engageons dans une certaine voie et que les conséquences seront importantes pour l’élaboration des politiques à la Chambre des communes? J’exhorte le gouvernement à essayer de comprendre l’importance de l’information produite par les recensements. J’ai l’impression qu’il ne se préoccupe plus de la nécessité de réunir correctement des faits et des renseignements.
Des députés ont parlé d’indiscrétion, et je comprends que certaines personnes soient mal à l’aise de répondre à des questions du formulaire détaillé. C’est déjà arrivé par le passé. Toutefois, les faits ne confirment pas le bien-fondé des préoccupations du gouvernement. La commissaire à la protection de la vie privée a comparu devant le comité parlementaire mis sur pied à l’instigation du Parti libéral pour étudier cette décision erronée du . J’ignore si les députés pourront le croire, mais il y a eu trois plaintes officielles au cours des 10 dernières années, et le Parti conservateur est prêt à tout chambouler au nom de sa position partisane. Je ne vois pas trop à quoi il veut en venir.
J’invite les députés à simplement faire disparaître la sanction pénale au lieu de détruire un régime irréprochable qui non seulement sert les Canadiens, mais fait aussi l’envie du monde.
Pour bien des gens, le formulaire détaillé est un enjeu important, mais je rappelle à mes collègues députés qu’il y a là, également, une obligation constitutionnelle. Le recensement est prévu dans notre Constitution. Tous les pays font des recensements depuis l’époque romaine.
C’est important et même vital. Croyez-moi lorsque je dis qu’il est important de comprendre que si, à l’avenir, nous n’avons pas une image fidèle du Canada, il est très probable que nous finirons par adopter de mauvaises politiques nationales. Il sera impossible d’obtenir une information fiable pour prendre des décisions avisées, efficaces et responsables concernant notre pays.
J’invite instamment les députés conservateurs qui se rallient aveuglément à leur à reconsidérer leur position et à faire ce qui leur semble nécessaire. S’ils craignent qu’on ne traite des gens comme des criminels, je signale que cela ne s’est jamais fait. Il est très important d’admettre qu’il n’est jamais arrivé au Canada que quiconque soit emprisonné pour avoir refusé de remplir un formulaire de recensement détaillé.
Avons-nous affaire à une politique qui cherche un problème auquel se greffer? Est-ce qu’on apporte une solution à un problème qui n’existe pas? Le gouvernement réagit-il à un certain point de vue marginal non précisé au sujet de ce formulaire détaillé?
Notre situation démographique est en pleine évolution. Notre population est vieillissante. Nous avons vu arriver beaucoup de nouveaux immigrants. On assiste à des mouvements de population entre les milieux rural et urbain, et ce, dans les deux sens. Certaines régions du pays s'en tirent très bien, tandis que pour d'autres, c'est une toute autre histoire. La meilleure façon de comprendre qui nous sommes en tant que Canadiens, c'est de maintenir le questionnaire détaillé du recensement dans sa forme actuelle, sous réserve de la modification proposée par le député de , qui vise simplement à éliminer ce que certains trouvent offusquant, c'est-à-dire l'aspect criminel.
Nous avons parlé de vie privée et d'atteinte à celle-ci. Il y a également l'obligation de transmettre des renseignements et le fait que quiconque les divulgue de manière à porter atteinte à la vie privée est passible de sanctions. Nous savons que c'est le cas pour les renseignements conservés par Revenu Canada, par exemple. J'espère que le gouvernement est bien conscient que cette règle s'applique aussi aux dossiers de santé et aux renseignements personnels des citoyens. Ce sont des garanties prévues dans la loi. L'accès à ces renseignements constitue un privilège, comme il se doit.
Lorsque les Canadiens se rendront compte de ce que propose le gouvernement conservateur — ce à quoi s'oppose le Parti libéral —, il ne fait aucun doute que le bon sens prévaudra.
Les gens comprennent ce qui se passe. Je pense que le gouvernement a passé un été abominable. Il a pris des décisions très controversées. Le ballon d'essai lancé par le gouvernement s'est écrasé après avoir été transpercé de toutes parts.
J'exhorte tous les députés de la Chambre des communes à se rendre compte de l'importance des organisations qui demandent que l'on conserve le formulaire détaillé du recensement. Ces groupes n'ont pas l'habitude de faire connaître leurs points de vue sur la place publique. Ils sont toutefois les défenseurs de notre pays. Le Canada au grand complet implore le gouvernement conservateur. Je demande au gouvernement d'écouter ces groupes. Il devrait faire ce qui s'impose, être raisonnable et défendre les intérêts des Canadiens.