:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Comme le président l'a annoncé, je m'appelle Don Stephenson et j'occupe les fonctions de négociateur commercial en chef pour l'accord de partenariat économique global Canada-Inde.
[Traduction]
Je suis ravi d'être parmi vous aujourd'hui pour aborder la question d'un accord de partenariat économique global, ou APEG, entre le Canada et l'Inde.
Je suis accompagné de Luc Santerre du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international.
[Français]
Luc est le directeur des relations commerciales avec l'Asie du Sud-Est et l'Océanie.
[Traduction]
Je suis également accompagné d’Eric Robinson, sous-négotiateur en chef, accord de partenariat économique global Canada-Inde, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, et de Michelle Cooper, directrice, Politique commerciale sur les services.
Comme le comité le sait, le ministre a effectué une visite en Inde du 3 au 9 novembre 2011, dans le cadre de laquelle il s'est rendu dans les villes de Delhi, d'Ahmadabad, de Mumbai et de Pune afin de faire valoir les intérêts du Canada dans des secteurs clés. J'ai eu le privilège d'accompagner le ministre dans le cadre de cette mission qui avait pour objet de renforcer les liens entre le Canada et l’Inde au chapitre du commerce et des investissements; de rencontrer des ministres du gouvernement indien pour faire valoir les intérêts fondamentaux de notre pays et des dirigeants du monde des affaires indien pour mettre en lumière le savoir-faire et les capacités du Canada; d'attirer des investissements indiens au Canada; et de faire progresser les intérêts commerciaux des entreprises canadiennes cherchant de nouveaux débouchés dans ce marché prioritaire.
Parmi les secteurs ciblés par la mission du ministre Fast en vue de créer de plus grandes perspectives d’avenir pour les entreprises canadiennes, on retrouve l'agriculture et l'agroalimentaire, secteur dans lequel la population croissante de l'Inde et l'amélioration du niveau de vie présentent des possibilités accrues pour les producteurs canadiens; les infrastructures, secteur dans lequel le gouvernement de l'Inde a établi qu'il lui fallait investir 800 milliards de dollars, notamment dans les routes, les ponts, les chemins de fer, les ports et les aéroports, et dans lequel les entreprises canadiennes peuvent participer et toucher des bénéfices; l'éducation, secteur dans lequel le savoir-faire canadien peut aider à combler l’énorme écart entre le nombre d'établissements d'enseignement existants et les besoins réels à cet égard, et à remédier aux pénuries d'éducateurs qualifiés. Plusieurs autres secteurs importants étaient ciblés, comme l'énergie, les industries manufacturières et les technologies de l'information et des communications.
[Français]
De façon générale, l'Inde a de plus en plus besoin de produits, de services et de compétences en raison de son économie en croissance. Entre 2006 et 2010, son économie nationale a crû à un taux annuel moyen de 8,2 p. 100, ce qui montre qu'elle est bien partie pour devenir l'une des plus grandes économies du monde.
Permettez-moi maintenant de mettre en contexte les négociations de l'accord de partenariat économique global Canada-Inde, de faire le point sur la situation actuelle des pourparlers et de vous faire part de nos attentes au cours des prochains mois.
[Traduction]
Le Canada met en oeuvre un programme de plus en plus ambitieux de négociations commerciales avec ses partenaires des quatre coins de la planète. Ce programme est décrit dans la Stratégie commerciale mondiale du gouvernement. Le moteur de ce programme est, sans aucun doute, l'état d'avancement des négociations multilatérales à Genève ou, malheureusement, leur impasse, et la multiplication des initiatives lancées par presque tous nos concurrents pour conclure un ALE bilatéral ou régional.
En bref, nous avons réalisé énormément de progrès dans le domaine bilatéral pour essayer d'obtenir autant que possible une longueur d'avance sur nos concurrents et pour garantir à nos entreprises des conditions de concurrence égales à l'échelle internationale. Depuis 2006, le Canada a conclu des accords de libre-échange avec neuf pays: les quatre États membres de l'Association européenne de libre-échange, soit l'Islande, la Norvège, la Suisse et le Liechtenstein, ainsi que le Pérou, la Colombie, la Jordanie, le Panama et, plus récemment, le Honduras. De nombreux autres sont en cours, y compris les négociations en vue d'un accord de libre-échange avec l’UE, la plus importante initiative commerciale du Canada depuis la signature de l'ALENA, il y a près vingt ans.
Outre son programme d'accords de libre-échange, qui est le plus ambitieux qu’il ait entrepris récemment, le Canada développe aussi son réseau d'accords sur la promotion et la protection des investissements étrangers, d'accords de coopération scientifique et technologique et d'accords de transport aérien. L'objectif général de toutes ces initiatives consiste à renforcer et à élargir l'accès du Canada aux marchés mondiaux, car elles engendreront des emplois et la croissance économique pour les travailleurs canadiens et leur famille.
[Français]
La décision de poursuivre les négociations en vue d'un accord de partenariat économique avec l'Inde s'inscrit aussi dans la stratégie élargie d'engagement du Canada envers ce pays de plus en plus important.
L'Inde est, bien entendu, un marché mondial clé, et les liens entre le Canada et l'Inde continuent de s'approfondir et de se resserrer. Ces relations s'intensifient dans les domaines de la science, de la technologie, de la recherche et des échanges étudiants. En plus de l'accord bilatéral en science et technologie déjà en vigueur, le gouvernement s'est engagé, dans le budget de 2011, à consacrer 12 millions de dollars répartis sur cinq ans à un centre d’excellence en recherche Canada-Inde.
Nous faisons le nécessaire pour conclure très bientôt avec l'Inde un accord sur la promotion et la protection des investissements étrangers, et nous en sommes à régler les derniers détails de l'accord de sécurité sociale Canada-Inde. Comme le premier ministre Harper l'a indiqué, nous souhaitons signer ces deux accords dans les plus brefs délais.
De plus, le Canada et l'Inde ont également signé un accord de coopération nucléaire qui permettra aux entreprises canadiennes de saisir des débouchés commerciaux dans le secteur de l'énergie nucléaire civile. Nous nous réjouissons à l'idée de la conclusion de l'arrangement administratif qui permettra la mise en oeuvre complète de cet accord.
L'Inde constitue clairement un marché prioritaire pour les engagements commerciaux du Canada. Alimentée par une libéralisation progressive depuis les années 1990, son économie continue de croître rapidement, tout en conservant des taux de croissance élevés supérieurs à 6 p. 100, même pendant la crise économique mondiale. Ce pays s'est déjà imposé comme un acteur essentiel dans l'échelle des valeurs mondiales, et sa classe moyenne compte entre 150 et 250 millions de personnes, ce qui représente un marché de consommation de quelque 400 milliards de dollars. On prévoit que l'Inde aura la quatrième économie en importance au monde d'ici à 2025, et la troisième d'ici à 2050, après quoi l'Inde deviendrait aussi la nation la plus peuplée au monde.
[Traduction]
Le Canada et l’Inde ont des économies d'un billion de dollars. Les niveaux de commerce et d'investissement entre les deux pays progressent rapidement, et leurs échanges ont doublé au cours de la dernière décennie. Et, comme l'Inde devient une partie intégrante des chaînes de valeur mondiales, des entreprises canadiennes comme Bombardier, SunLife et SNC Lavalin ont établi et cultivé leurs partenariats dans ce pays, alors que des entreprises indiennes comme Essar, Tata et Birla ont également été actives sur le marché canadien.
Toutefois, les relations commerciales entre le Canada et l’Inde demeurent sous-développées compte tenu de la taille de nos économies, avec des investissements bilatéraux d'environ 7 milliards de dollars et des échanges bilatéraux se situant juste au-dessus des 4 milliards de dollars l'année dernière. L'Inde est actuellement notre 13e destination en importance pour les exportations de marchandises et notre 19e source d'importations. Toutefois, le potentiel est énorme. Nos deux premiers ministres se sont engagés à tripler la valeur des échanges entre leurs deux pays pour la faire passer à 15 milliards de dollars d'ici 2015.
Il est certain que la conclusion d'un accord de libre-échange stimulerait beaucoup le commerce bilatéral en éliminant les droits de douane ainsi que les obstacles au commerce, réglementaires ou autres, qui limitent actuellement les débouchés. L'Inde continue d'appliquer des droits relativement élevés à la plupart des importations. En 2009, le taux moyen des droits de l’Inde se chiffrait à 13 p. 100, alors que celui du Canada n'était que de 3,7 p. 100. En ce qui concerne les produits revêtant un intérêt particulier pour le Canada, les droits appliqués par l’Inde atteignent, par exemple, 10 p. 100 pour l'engrais, les produits chimiques, les produits du bois, les pâtes et le papier, ainsi que les hélicoptères; 30 p. 100 pour le poisson et les fruits de mer; et de 30 à 50 p. 100 pour les légumineuses, qui bénéficient actuellement d'un accès en franchise en Inde grâce à une mesure temporaire, mais qui pourraient être assujetties aux droits élevés de ce pays ultérieurement.
L'élimination des droits pourrait donc créer des débouchés importants pour les producteurs et les exportateurs canadiens dans divers secteurs de l’économie. De plus, nous estimons que de nombreux débouchés pour les entreprises et les travailleurs canadiens se trouvent dans le secteur des services, où sont créés 80 p. 100 des nouveaux emplois au Canada aujourd'hui. Plus précisément, les entreprises canadiennes et leurs employés pourraient bénéficier d'une plus grande libéralisation des échanges avec l’Inde dans un grand nombre de secteurs, notamment l’énergie et les services miniers, les services financiers, les services environnementaux ainsi que les services de transport et d'infrastructure, dont l’architecture et l’ingénierie.
[Français]
En novembre 2009, les premiers ministres Harper et Singh ont annoncé la création d'un groupe d'étude conjoint qui avait pour mandat d'étudier la viabilité et les avantages d'un accord de partenariat économique.
En septembre 2010, l'étude conjointe a été publiée. Elle indique que la conclusion d'un accord de libre-échange pourrait stimuler l'économie canadienne d'au moins 6 milliards de dollars, augmenter le commerce bilatéral avec l'Inde de 50 p. 100, engendrer des retombées directes pour divers secteurs canadiens, notamment les produits agricoles primaires, les produits liés aux ressources, les produits chimiques, le matériel de transport, les machines et l'équipement, ainsi que les services.
[Traduction]
Comme je l'ai indiqué plus tôt, un autre élément moteur du programme du Canada en faveur du commerce est le besoin de veiller à ce que les entreprises et les travailleurs canadiens puissent mener leurs activités sur le même pied d’égalité que leurs concurrents étrangers. L’Inde a déjà négocié des accords de libre-échange avec plusieurs autres parties, par exemple le Chili, l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est, la Corée et, plus récemment, le Japon. Actuellement, l’Inde négocie aussi avec la Nouvelle-Zélande, l'Australie et l'Union européenne, et la liste d'attente ne fera que s'allonger dans les années à venir.
Où en sont donc les négociations? Après la publication de l'étude conjointe l'automne dernier, les premiers ministres du Canada et de l’Inde ont officiellement lancé les négociations en vue de conclure un APEG en novembre 2010. Des séries de pourparlers ont eu lieu par la suite en novembre et en juillet. Une troisième série de négociations est prévue à la mi-décembre.
Pour ce qui est de la structure, sept tables de négociations ont été établies afin d'aborder les principaux domaines visés par l'accord, soit les marchandises, les services, les obstacles techniques au commerce, les mesures sanitaires et phytosanitaires, les procédures liées à l’origine, les douanes et la facilitation des échanges ainsi que les questions institutionnelles.
Nous avons également convenu que d'autres domaines indiqués dans l’étude conjointe pourraient faire l'objet de discussions pendant des séries de négociations futures. Les deux parties se sont communiqué des données sur le commerce, des renseignements sur les droits et un modèle d'accord. De plus, les négociateurs poursuivent les travaux entre les séries de négociations.
[Français]
En général, l'Inde forme une très petite équipe pour mener ses négociations commerciales. Ainsi, les séries de pourparlers avec l'Inde seront plus courtes, plus précises et plus fréquentes que le modèle que le Canada utilise habituellement. On prévoit des sessions de trois ou quatre jours tous les deux mois, d'ici à l'été 2012.
Bien sûr, les pourparlers n'en sont qu'à leur début et nécessiteront beaucoup de temps. Ils présenteront également des difficultés, car les deux parties utilisent des approches différentes dans certains domaines.
Selon les consultations menées jusqu'à maintenant, les parties concernées au Canada, notamment les provinces et les territoires, appuient fortement les négociations en vue de conclure un accord de partenariat économique avec l'Inde. Nous continuerons à les consulter et à solliciter des conseils d'eux tout au long des pourparlers.
Nous avons pour objectif d'être très ambitieux, afin de conclure un accord axé sur l'avenir qui reflète nos échanges actuels et facilite le renforcement des relations entre le Canada et l'Inde dans les années à venir. Les négociations avec l'Inde constituent une grande priorité, et nous tâcherons de les conclure en 2013, comme cela a été indiqué dans le discours du Trône de 2011.
En conclusion, les négociations de libre-échange sont de plus en plus importantes afin de promouvoir les intérêts du Canada partout dans le monde et ainsi susciter des emplois et la croissance économique au Canada.
Les relations entre l'Inde et le Canada sont essentielles à la prospérité des entreprises de ce dernier, de ses travailleurs et de leur famille.
[Traduction]
Comme en a fait foi la visite du ministre en Inde, le gouvernement est résolu à renforcer les liens qui existent entre le Canada et l’Inde en matière de commerce et d'investissement. Le programme de négociations commerciales du Canada est ambitieux, et I'APEG en constitue un élément clé.
Je remercie le Comité de m'avoir donné cette occasion de m'adresser à lui; mon équipe et moi attendons avec impatience vos commentaires qui influeront sur nos négociations, et nous nous tenons à votre disposition pour répondre à toutes vos questions.
[Français]
Merci.
Je pense que nous en sommes aux premiers stades des négociations avec l'Inde concernant les services. Nous n'avons pas encore échangé officiellement de demandes, mais l'étude conjointe réalisée par le Canada et l'Inde a permis de reconnaître certains secteurs de complémentarité entre nos deux économies. Comme l'a indiqué Don, il y a beaucoup d'éléments.
Je pense que le Canada a beaucoup d'expertise à vendre. Don a parlé des firmes d'ingénierie. Je pense qu'il s'agit là d'un solide avantage pour le Canada à l'étranger, non pas uniquement en Inde, mais dans la plupart des marchés émergents. Nous avons les firmes d'ingénierie qui peuvent fournir la conception et les compétences particulières. Souvent, elles se spécialisent dans des domaines différents.
Nous avons mentionné l'énergie et les services énergétiques comme un domaine. Le transport de l'électricité est un autre domaine où le Canada possède beaucoup de compétences. Il y a également l'exploration pétrolière et gazière et l'infrastructure — les immeubles et l'architecture — dont a parlé également Don. Beaucoup d'entreprises canadiennes sont très actives et, évidemment, voient le marché indien comme un magnifique endroit pour prendre de l'expansion.
Évidemment, un autre avantage pour nous, c'est que dans ces négociations, nous cherchons à obtenir plus de transparence. Souvent les entreprises vont soulever le fait qu'elles ne connaissent pas nécessairement le régime en place en Inde. Alors, la transparence serait un domaine, de même que le fait de simplement lier le régime actuel. Dans de nombreux cas, l'Inde a adopté la libéralisation autonome dans divers domaines — dont les services financiers —, mais n'a pas officialisé cela. Ainsi, les entreprises ne sont pas toujours certaines qu'elles jouiront des mêmes conditions d'investissement ou de services que celles qui existent à l'heure actuelle. Alors, un des avantages de l'APEG est de lier le régime actuel. C'est ce que le Canada chercherait à obtenir dans un accord.
De l'autre côté, évidemment, comme l'a dit Don, l'Inde est au 13e rang des exportateurs de services dans le monde, par ordre d'importance. En fait, ce pays est un exportateur de services encore plus grand que le Canada; nous arrivons au 18e rang. Elle a beaucoup d'avantages. On a parlé de technologie de l'information; c'est un domaine où l'Inde a pris beaucoup d'expansion. Nous avons également parlé des centres d'appels.
L'Inde a tendance à faire connaître ses intérêts; de toute évidence, elle examine différents modes. Nous avons parlé des modes de prestation de services, mais elle a un intérêt pour l'admission temporaire de ses travailleurs ainsi que pour l'ouverture des frontières, ce qui concernerait, par exemple, la technologie de l'information.