LANG Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des langues officielles
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 7 février 2012
[Enregistrement électronique]
[Français]
Messieurs, mesdames, puisqu'il est 8 h 45 et que nous avons quorum, nous allons commencer la séance et reprendre nos travaux.
Mme Michaud a maintenant le droit de parole.
Merci beaucoup.
Bonjour à tous.
J'aimerais rappeler rapidement le sujet de la motion dont on va débattre aujourd'hui. Comme vous l'avez appris lors de la séance publique du Comité permanent des langues officielles de la semaine dernière, nous allons débattre de la motion du député conservateur de Richmond Hill, qui vise à ce que tous les travaux de comité du comité se tiennent à huis clos.
Nous, les députés du NPD, croyons qu'une telle motion porte gravement atteinte aux droits démocratiques des parlementaires et des Canadiens. Nous demandons donc au gouvernement conservateur de retirer cette motion immédiatement. Bien sûr, l'auteur de la motion n'est pas là aujourd'hui. Toutefois, je pense que cela n'empêche pas qu'une telle réflexion soit menée par nos collègues d'en face.
Ce matin, on va débattre plus précisément de l'amendement présenté par mon collègue Dan Harris pour que le huis clos ne puisse jamais être décrété sans l'assentiment d'au moins un député de l'opposition. Pour nous, cet amendement est très important. Nous pensons qu'il devrait être appuyé par tous les membres de ce comité. Cet amendement vise à assurer la transparence des travaux de ce comité. Car même si la majorité des 39 p. 100 de Canadiens qui ont choisi d'aller voter le 2 mai a élu un gouvernement conservateur majoritaire, comme on se le fait rappeler à maintes reprises, cela ne veut pas dire que les Canadiens ont donné carte blanche au gouvernement. On vit dans une démocratie, et les Canadiens s'attendent à ce que nous rendions des comptes et à ce qu'il y ait des débats publics sur les enjeux qui leur tiennent à coeur.
Le système dans lequel on vit, le parlementarisme britannique, a certaines règles particulières. Il peut être très facile pour un gouvernement majoritaire d'utiliser à outrance les règles traditionnelles ou simplement écrites pour tenter de bâillonner l'opposition et, parfois, de cacher des informations qui sont cruciales pour les Canadiens. Selon nous, il faut nous doter de mécanismes qui vont nous garantir le maintien d'un fonctionnement démocratique et ouvert au sein de notre comité, et c'est ce que cherche à réaliser l'amendement de mon collègue M. Harris.
Selon nous, un huis clos qui pourrait cacher aux Canadiens tous nos travaux serait désastreux pour les communautés linguistiques du pays, qui s'attendent à ce que le comité produise des résultats concrets, visibles et qui auront un effet positif sur leur développement et leur épanouissement. C'est l'argent des contribuables qui est en jeu, celui des communautés qu'on doit représenter. Il est important que le travail qu'on fait pour ces gens soit visible et très concret.
Depuis septembre, le gouvernement contrôle totalement l'ordre du jour du comité et refuse absolument de discuter des questions soulevées par les membres de l'opposition. Nous proposons différents enjeux qui proviennent très souvent des différentes communautés de langue officielle en situation minoritaire qui nous joignent à nos bureaux pour soulever des questions qui les touchent, des inquiétudes qu'ils ont par rapport à certaines actions et certaines décisions. Ils nous demandent d'aborder ces questions ici, au comité. Cependant, il y a très clairement un abus du huis clos et nous ne sommes pas en mesure d'avoir ces discussions entre nous, alors que c'est notre rôle. En tant que parlementaires, nous devons prendre le temps de discuter entre nous et tenter d'arriver à des consensus qui vont favoriser le bien commun des communautés linguistiques que nous tentons de représenter.
Présentement, les rencontres sont publiques seulement quand nous recevons des témoins, à vrai dire. C'est le seul moment qu'il nous reste ici pour soulever les enjeux dont nous aimerions traiter de façon urgente entre nous.
Depuis que nous sommes ici, nous avons énormément de difficulté à faire passer nos messages. Comme mon collègue M. Harris, je considère très important que les séances ne puissent pas se tenir à huis clos sans l'assentiment d'au moins un député de l'opposition. Ce ne sont pas des réunions à huis clos qui vont permettre aux Canadiens de constater que le gouvernement ne fait pas son travail en matière de langues officielles.
D'ailleurs, le gouvernement n'a toujours pas répondu aux recommandations du rapport annuel du commissaire aux langues officielles, qui ne sont pourtant pas très compliquées et qui vont améliorer la situation des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Présentement, nous en sommes encore à étudier la Feuille de route, et ça s'éternise. Le rapport de mi-parcours va être déposé dans quelques semaines, mais il nous reste des témoins à entendre et nous n'avons toujours pas pu nous pencher sur les enjeux présentés par ceux qui ont déjà témoigné.
La Feuille de route est importante, mais permettez-moi d'abord d'ouvrir une courte parenthèse. De nouveaux collègues se sont joints à nous tout récemment. Or il serait important, je crois, qu'ils soient mis au courant des enjeux qui seront traités ici, de façon à ce qu'ils aient l'information requise pour suivre nos discussions.
Je vais me permettre de rappeler en quelques mots ce qu'est exactement la Feuille de route pour la dualité linguistique canadienne 2008-2013. La Feuille de route, c'est ce qui a succédé au Plan d'action 2003-2008 pour les langues officielles, qui avait été mis en oeuvre par le gouvernement. Cette initiative a été mise en vigueur pour rappeler l'appui du gouvernement à l'égard de la dualité linguistique du Canada. Cette grande stratégie, qui nous semble assez importante, trace les grandes orientations du gouvernement en matière de langues officielles. La Feuille de route pour la dualité linguistique canadienne s'ajoute à d'autres mesures déjà en vigueur, en vertu notamment de la Loi sur les langues officielles.
La Feuille de route regroupe divers programmes et initiatives qui s'inscrivent dans cinq domaines d'action principaux, soit: valoriser la dualité linguistique auprès de tous les Canadiens; bâtir l'avenir en misant sur la jeunesse; améliorer l'accès aux services pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire; miser sur les avantages économiques; et, finalement, assurer une gouvernance efficace pour mieux servir les Canadiens. On voit qu'en général, l'objectif est de favoriser le développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Depuis septembre, c'est tout ce que nous faisons. Nous avons reçu des témoins qui nous ont tout de même fait part des avantages qu'ils avaient retirés de la Feuille de route. Il faut reconnaître que ce programme a favorisé le développement des communautés et que plusieurs projets ont été menés à bien. Il reste que dans le cadre des présentations de ces témoins, ceux-ci ont soulevé des préoccupations et des besoins qui méritent d'être débattus au sein de ce comité. Or nous ne nous sommes pas encore véritablement penchés sur ces questions. Selon moi, il est urgent que nous le fassions, étant donné que le rapport de mi-parcours approche et que des questions de ce genre risquent d'être soulevées. En outre, la Feuille de route va se terminer en 2013.
La plupart sinon la totalité des communautés de langue officielle en situation minoritaire ont réclamé que la Feuille de route soit reconduite, mais que certaines améliorations y soient apportées. Une question a été soulevée à plusieurs reprises et par bon nombre d'organismes communautaires. Ceux-ci se sont dits préoccupés par le fait que les priorités gouvernementales mises en avant dans le cadre de la Feuille de route ne cadraient pas toujours avec celles des communautés.
Plusieurs groupes ont témoigné devant le comité et nous ont présenté des plans d'action stratégiques qui ont été développés au sein de leur communauté. Toutefois, plusieurs de ces plans n'avaient pas été pris en compte dans les différentes étapes du développement de la Feuille de route. Pourtant, cela aurait été une chose importante à faire, dans la mesure où les programmes mis en place par la Feuille de route visent à aider directement ces communautés. Il nous semble donc très important que ces besoins soient inclus dans les considérations stratégiques inhérentes à l'élaboration d'une prochaine Feuille de route.
C'était la même chose pour les cibles que l'on cherchait à atteindre par l'entremise des actions de la Feuille de route et les indicateurs de suivi, qui permettent de voir la progression et les effets concrets de la Feuille de route sur les communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Un autre élément qui a été mentionné par bon nombre de groupes communautaires est la question du manque de transparence et des lacunes dans la reddition de comptes pour les programmes relatifs à la Feuille de route. On a posé beaucoup de questions aux témoins à ce sujet, parce qu'il s'agit d'un enjeu extrêmement préoccupant. Il y aurait 1,1 milliard de dollars qui serait investi par le gouvernement dans la francophonie. Par contre, lorsqu'on demande directement aux organismes communautaires de parler de la provenance des fonds qu'ils reçoivent, beaucoup d'entre eux sont absolument incapables de dire exactement d'où ils proviennent. Proviennent-ils de la Feuille de route, ou du programme d'appui aux langues officielles? C'est très difficile à dire.
Dans une optique de bonne fiscalité et de bonne gestion des fonds publics, il est important qu'on soit en mesure de retracer exactement où sont faits les investissements qui proviennent de cette stratégie gouvernementale et de voir l'effet concret de ces investissements sur les communautés. C'est ce qui devrait orienter les prochaines actions et stratégies lors de l'élaboration d'une Feuille de route qui débuterait en 2013.
Peut-être qu'un meilleur travail devrait être fait en vue d'expliquer la Feuille de route aux organismes, par exemple les différents modes de fonctionnement et les buts à atteindre. Cela pourrait les aider à avoir une certaine compréhension de ces questions et mener à une meilleure utilisation des fonds débloqués par le gouvernement pour favoriser la promotion du bilinguisme et le développement de nos communautés de langue officielle en situation minoritaire.
En outre, plusieurs organismes se sont dits préoccupés par le fait qu'une bonne partie des sommes qui proviennent de la Feuille de route est utilisée par les organismes pour payer des programmes qui seront récurrents. Selon différents témoins qui ont comparu devant nous, les sommes de la Feuille de route qui sont allouées au Bureau du dirigeant principal des ressources humaines servent à payer les salaires des employés. Le bureau, qui accomplit les responsabilités qu'avait la défunte Agence de la fonction publique, s'acquitte de fonctions nécessaires. Il faut aussi se pencher sur ce genre d'enjeux et s'assurer que le financement est prévisible et permanent pour les groupes des communautés linguistiques en situation minoritaire.
Une autre chose qui avait été mentionnée est la nécessité d'avoir plus de consultations au départ, soit lors de la conception, pour essayer de cibler les priorités exprimées par les différents groupes. Il faut aussi s'assurer de les consulter au cours des différentes étapes du processus de la mise en place de la Feuille de route, afin d'être bien certain que toutes les sommes sont bien dépensées au sein des communautés et que les actions entreprises et les stratégies mises en avant vont véritablement répondre aux besoins des communautés.
Plusieurs autres questions avaient été soulevées par différents groupes que nous avons reçus ici, mais je pense que certains de mes collègues vont pouvoir s'exprimer un peu plus longuement sur le sujet au cours des prochaines rencontres. Entre autres, je pense que la reddition de comptes sera un élément qui sera abordé plus longuement. Je pense que c'est une des sources de problèmes qu'on a pu déceler avec l'actuelle Feuille de route pour la dualité linguistique canadienne.
Au cours de leurs différentes comparutions, les témoins nous ont aussi fait part de certaines inquiétudes face à des enjeux qui ne sont pas directement liés à l'étude de la Feuille de route pour la dualité linguistique canadienne. Ils ont fait appel directement aux membres du comité pour se pencher sur certaines décisions ou actions du gouvernement qui semblaient avoir un effet négatif sur les communautés de langue officielle en situation minoritaire, bien souvent les communautés francophones. Les demandes qui nous ont été faites par ces groupes, selon nous, méritent des gestes immédiats de notre part.
Au cours des derniers mois, les membres de l'opposition ont tenté de mettre en avant certains enjeux et de les faire inscrire officiellement à l'ordre du jour de ce comité. Malheureusement, nos collègues conservateurs nous empêchent de discuter des enjeux qui nous tiennent à coeur parce que, bien souvent, ils vont se dépêcher de présenter des motions pour que tous les débats sur les enjeux que nous mettons en avant se tiennent à huis clos.
La séance d'aujourd'hui est publique. Pour que les gens qui nous écoutent puissent comprendre réellement pourquoi l'assentiment d'au moins un membre de l'opposition devrait être nécessaire pour que l'on puisse travailler à huis clos, je vais vous lire quelques motions que le Nouveau Parti démocratique a déposées devant le comité depuis le début de cette session parlementaire. Il y en a beaucoup. Je crois qu'il est très important que les citoyens soient bien au fait du type d'enjeux qui nous préoccupent et qui méritent d'être discutés publiquement.
La première motion veut que le comité entreprenne une étude sur l'Examen stratégique et fonctionnel du gouvernement conservateur inscrit dans « La prochaine phase du Plan d'action économique du Canada — Des impôts bas pour stimuler la croissance et l'emploi » d'ici le 15 décembre 2011.
Je vais devoir demander l'aide de mes collègues si jamais je parle un peu trop rapidement pour les interprètes, car j'ai tendance à avoir un débit rapide. J'essaie de me modérer, mais faites-moi signe si c'est le cas, et ça va me faire plaisir de ralentir.
Je poursuis avec une deuxième motion, qui veut que le comité demande au Sous-comité du Conseil du Trésor chargé de l'Examen stratégique et fonctionnel de lui fournir, d'ici le 1er mars 2012, un rapport sur l'état de l'intégration des langues officielles à l'Examen stratégique et fonctionnel ainsi qu'un bilan en matière de langues officielles dès la fin de l'examen.
Nous avons également proposé que le comité invite à comparaître incessamment, pour une durée de deux heures, tous les membres du Sous-comité du Conseil du Trésor chargé de l'Examen stratégique et fonctionnel inscrit dans « La prochaine phase du Plan d'action économique du Canada — Des impôts bas pour stimuler la croissance et l'emploi » d'ici le 22 novembre 2011, pour qu'ils fassent état des langues officielles dans leurs travaux.
On voit que certaines choses, malheureusement, n'ont pas pu être faites. Elles pourraient quand même être faites très rapidement au cours des prochaines séances, si nous nous entendons sur les règles du huis clos et, idéalement, si nous nous assurons d'une participation importante de l'opposition au processus décisionnel qui nous amène à décréter le huis clos.
Madame Michaud, je voudrais seulement m'assurer que vous ne dévoilez pas des motions qui auraient pu être présentées à huis clos.
On va suivre cela et, si c'est le cas, on vous avisera, mais assurez-vous de ne pas dévoiler des choses qui ont été faites à huis clos.
Certainement.
Alors, je vais poursuivre. C'est important d'avoir des lignes directrices à cet égard. Comme je viens de le mentionner, il y a parfois une certaine confusion. Le huis clos est utilisé à tellement de reprises qu'il devient difficile de suivre. On ne peut plus savoir exactement à quel moment nous sommes en droit d'informer les citoyens et quand nous devons nous taire. J'espère ne pas brimer le privilège parlementaire de personne. Je vais faire bien attention où je me mets les pieds.
J'en étais à cette prochaine motion, qui veut que le Sous-comité du Conseil du Trésor chargé de l'Examen stratégique et fonctionnel inscrit dans « La prochaine phase du Plan d'action économique du Canada — Des impôts bas pour stimuler la croissance et l'emploi » fournisse dans les plus brefs délais au comité le document de travail dans lequel est inscrit comment les langues officielles sont intégrées à l'Examen stratégique et fonctionnel, d'ici le 11 octobre 2011 à midi.
Encore une fois, c'est un élément qui aurait dû être traité de façon plus urgente par le comité et qui est maintenant tombé en désuétude, malheureusement.
La prochaine motion que je vais porter à votre attention traite d'un sujet qui a été soulevé à maintes reprises au cours des travaux de ce comité. L'étude sur le Nord est un sujet qui a soulevé beaucoup de passions au sein de ce comité et qui va continuer à le faire jusqu'à ce qu'on puisse s'entendre sur les actions à entreprendre pour bien résoudre cette situation. Ainsi, la motion veut que le comité reprenne l'étude entreprise à la troisième session de la 40e législature sur le développement de la dualité linguistique dans le Nord canadien, et que les témoignages et la documentation reçus par le comité dans le cadre de cette étude soient pris en considération par celui-ci au cours de la présente session.
J'ai une autre motion, toujours à propos de l'étude sur le Nord. Cette étude avait coûté assez cher aux contribuables canadiens, et je crois que ceux-ci méritent d'avoir certaines explications sur la façon dont les fonds ont été dépensés et sur les résultats qui auraient été obtenus ou non dans le cadre de cette étude. La motion demande que le comité justifie publiquement, d'ici le 30 janvier 2012, les raisons pour lesquelles il a dépensé 109 621,18 $ pour mener une étude, encore incomplète à ce jour, sur le développement de la dualité linguistique dans le Nord canadien.
En ce qui concerne les deux dernières motions que je viens de lire, il vaut la peine que je répète toute l'importance qu'elles ont pour les membres du comité, du moins du côté du NPD. Je crois de plus que M. Bélanger avait aussi mentionné à plusieurs reprises l'importance qu'il accordait à cette étude. Nous avons même reçu une lettre de l'Association franco-yukonnaise et des commissions scolaires francophones du Yukon pour demander que le comité se penche rapidement sur cette étude.
Une autre question devrait normalement faire partie d'une étude sur une initiative gouvernementale aussi importante que la Feuille de route pour la dualité linguistique canadienne, soit le fait de recevoir le ministre et les hauts fonctionnaires du ministère du Patrimoine canadien. C'est une étape qui n'a pas encore été franchie par ce comité alors que, comme nous l'avons mentionné, le rapport de mi-mandat approche. Nous avions, au NPD, demandé que le comité invite le ministre du Patrimoine canadien, le sous-ministre ainsi que les hauts fonctionnaires pertinents au sujet du rapport de mi-parcours de la Feuille de route pour la dualité linguistique canadienne 2008-2013, et ce, d'ici le 23 février 2012. On voit qu'il n'est pas encore trop tard. Si on est en mesure d'avoir des discussions plus ouvertes et de s'entendre sur les règles entourant le huis clos, on pourra recevoir ces témoins et leur poser les questions qui proviennent directement des membres des communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Plusieurs autres motions que nous avons présentées ne sont pas liées à l'étude de la Feuille de route pour la dualité linguistique canadienne, mais touchent quand même plusieurs enjeux qui sont au coeur des préoccupations que nous ont exprimées les témoins en provenance des communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Entre autres, nous avons mentionné à plusieurs reprises, au sein de ce comité, toute la place que CBC/Radio-Canada occupe au coeur de la vie culturelle des communautés et le rôle majeur que joue cette institution en ce qui a trait à la diffusion de l'information et de l'actualité au sein de ces communautés. Les compressions présentement envisagées à CBC/Radio-Canada inquiètent grandement les communautés de langue officielle en situation minoritaire. Pour essayer de jeter un peu de lumière sur cette situation, nous avons demandé que le comité invite le président-directeur général de CBC/Radio-Canada, M. Hubert T. Lacroix, pour une séance publique et télévisée de deux heures avant le 15 février 2012, compte tenu de l'importance de CBC/Radio-Canada pour la vitalité des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Encore une fois, il n'est pas trop tard pour agir. Je pense qu'il serait important d'entendre son point de vue avant la présentation du nouveau budget, pour bien répondre aux préoccupations qui ont été exprimées par les membres des communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Une autre motion que nous avons présentée touche plutôt la fermeture des centres de coordination des opérations de recherche et sauvetage de la garde côtière, à Québec entre autres. Plusieurs questions ont été posées à la Chambre à ce sujet. Plusieurs groupes de la société civile se sont exprimés fermement contre ces fermetures, et ce, pour différentes raisons. Certaines sont liées à des considérations sécuritaires, mais plusieurs autres vont directement au coeur de la question des langues officielles et du fait de donner des services équivalents aux communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Dans cette optique, et pour répondre à ces préoccupations, nous avons demandé que le comité entreprenne une étude sur la fermeture des centres de coordination des opérations de recherche et sauvetage de la Garde côtière à Québec et à St. John's d'ici le 15 décembre 2011. La date mentionnée est déjà passée, malheureusement, malgré le fait que cet enjeu soit extrêmement pressant, dans la mesure où les fermetures sont prévues pour le printemps 2012. Malgré tout, je pense qu'il est encore temps, pour les membres de ce comité, d'agir sur cet enjeu et de se pencher publiquement sur le sujet.
Nous avons vécu un autre événement préoccupant à la Chambre au cours du mois de juin 2011. Il s'agit du dépôt à la Chambre des communes de documents relatifs au transfert de détenus afghans, des documents qui avaient été déposés en majorité sans traduction. Pour nous, c'est une entorse majeure aux obligations qui incombent aux institutions parlementaires. Dans cette optique, nous avons demandé que le comité étudie le dépôt de documents à la Chambre des communes du 22 juin 2011 concernant l'Afghanistan, invite des témoins et fasse rapport à ce sujet à la Chambre d'ici le 27 octobre 2011.
Je vous fais maintenant part d'une autre motion sur un autre sujet. Nous avons demandé que le comité reprenne l'étude entreprise à la troisième session de la 40e législature sur le Rapport annuel 2009-2010, volume II, du commissaire aux langues officielles, que les témoignages et la documentation reçus par le comité dans le cadre de cette étude soient pris en considération par celui-ci au cours de la présente session, et que les demandes d'information adressées aux institutions fédérales dans le cadre de cette étude qui sont demeurées sans réponse soient envoyées de nouveau au cours de la présente session.
Pour donner suite à cela, nous avons aussi soumis une motion demandant que le comité trouve les institutions qui n'ont pas donné suite aux demandes du comité lors de la troisième session de la 40e législature et rende public le nom de ces institutions d'ici le 11 octobre 2011.
Finalement, la dernière motion que nous avons déposée demandait que tous les travaux du comité soient tenus en séance publique, sauf lorsque le comité a l'assentiment d'au moins un membre de l'opposition pour tenir une séance à huis clos. Les règles spécifient clairement que nous ne pouvons pas vous dire ce qui s'est passé à huis clos. C'est le problème au coeur des discussions aujourd'hui. Nous pouvons quand même vous dire que nous avons déposé toutes ces motions, et vous pouvez constater, publiquement, que le Comité permanent des langues officielles est paralysé par l'étude sur la Feuille de route depuis des mois.
En 21 rencontres, les conservateurs ont demandé le huis clos six fois. C'est énorme. Devant l'impossibilité pour mes collègues et moi de pouvoir contribuer directement à l'ordre du jour du comité et devant le manque d'ouverture du parti gouvernemental face aux motions que nous avons proposées, nous avons dû prendre d'autres mesures pour nous faire entendre et pour pouvoir faire connaître aux Canadiens les enjeux qui touchent les langues officielles et qui nous préoccupent énormément. Une des principales façons que nous avons dû employer est de nous tourner vers le commissaire aux langues officielles afin qu'il se penche sur ce que nous considérons être de flagrants manquements de ce gouvernement à ses obligations constitutionnelles envers les communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Je vais maintenant profiter du fait que cette rencontre du Comité permanent des langues officielles est publique pour me permettre de lire certaines des lettres que nous avons adressées au commissaire. Ces lettres vont bien exposer toutes nos préoccupations et tous les éléments qui nous portent à considérer que ces enjeux devraient être discutés publiquement au sein de ce comité. Cela donne une toute nouvelle pertinence à l'amendement qui a été présenté par Dan Harris pour s'assurer qu'à tout moment où on décide d'aller à huis clos, on aura eu au préalable l'assentiment d'au moins un membre de l'opposition.
Dans une des premières lettres, vous allez pouvoir constater que bon nombre des sujets ont déjà été soulevés par certaines motions que nous avons présentées. La première a pour objet la fermeture du centre de coordination des opérations de recherche et sauvetage de la Garde côtière de Québec. Cette lettre a été envoyée au commissaire le 3 octobre 2011:
Monsieur,
Le 19 juillet 2011, un analyste du Commissariat refusait d'enquêter sur une plainte concernant la fermeture du Centre de coordination des opérations de recherche et sauvetage de la Garde côtière de Québec, au motif que l'une des conditions pour mener une enquête, soit que celle-ci doit faire suite à un incident précis, n'était pas remplie.
Nous ne l'interprétons pas de cette manière. En premier lieu, en matière de recherche et sauvetage, on ne doit pas attendre qu'un incident se produise avant de penser à ce qui aurait dû être fait, car les conséquences peuvent être fatales. La prévention doit aussi s'appliquer aux langues officielles. On doit en effet éviter, dans la mesure du possible, qu'un droit soit brimé.
Nous sommes bien conscients que, sur le plan opérationnel, il est bon de vérifier si le cas étudié répond aux critères établis avant de décider de lancer une enquête. Mais nous croyons aussi qu'il faut savoir remettre ces critères en question lorsque les circonstances le justifient.
D'une part, on peut bien s'assurer d'avoir du personnel bilingue, mais cela ne signifie aucunement qu'il y a absence de problèmes linguistiques, qui peuvent avoir, comme je l'ai déjà indiqué, des conséquences fatales.
Comment peut-on garantir que le service bilingue sera offert en tout temps, par exemple dans le cas où les employés bilingues sont malades ou partis dîner? A-t-on consulté les principaux intéressés sur les répercussions d'une telle décision et pris les mesures qui convenaient?
Il faut mettre les choses en perspective. Dans le cas de la fermeture du centre de Québec, par exemple, même si les francophones ne sont pas minoritaires au Québec, ils le sont à l'échelle du Canada. Fermer ce centre et attribuer ses responsabilités à une région anglophone a donc un effet sur la vitalité des communautés linguistiques.
À la lumière de ce qui précède, veuillez recevoir la présente comme une plainte officielle.
Si vous jugiez toujours cette plainte non recevable, nous vous prions d'avoir la gentillesse de nous faire part des raisons précises qui vous mènent à une telle conclusion.
Cette lettre a été signée par les quatre députés du NPD qui sont membres du Comité permanent des langues officielles ainsi que par Annick Papillon, députée de Québec, et Philip Toone, député de Gaspésie—Îles-de-la-Madeleine.
Comme je l'ai mentionné, en plus de la question de sécurité qui est liée à la connaissance du golfe et du fleuve Saint-Laurent, qui est l'un des endroits les plus difficiles à naviguer, il y a énormément d'inquiétude par rapport à la capacité des employés bilingues d'Halifax d'assurer un service aussi efficace en français.
Ici, la capacité d'obtenir un service en français n'est pas seulement un droit; c'est souvent une question de vie ou de mort. Pour plusieurs citoyens, cet enjeu nécessite d'avoir un débat public au sein du Comité permanent des langues officielles. Le sujet a été soulevé à maintes reprises par des membres de l'opposition, et c'est dans ce type de débat qu'il faut s'assurer d'avoir l'accord d'au moins un membre de l'opposition avant de tenir une séance à huis clos.
La deuxième lettre, qui a été envoyée à M. Graham Fraser le 4 octobre 2011, a pour objet le dépôt de documents à la Chambre des communes. Ici, on fait bien entendu référence au dépôt de documents relatifs au transfert de détenus afghans, des documents qui n'ont pas fait l'objet de traduction. Certains documents sont seulement disponibles en français. Bien entendu, il y a très peu de ceux-ci; la majorité sont disponibles seulement en anglais.
Je vais commencer par vous lire cette lettre. Je sens vraiment l'obligation de m'attarder sur l'importance de cette plainte, principalement en ce qui a trait à nos responsabilités en tant que membres d'une institution parlementaire qui se doit de respecter les principes du bilinguisme. Voici:
Monsieur le Commissaire,
Le 22 juin 2011, le ministre des Affaires étrangères, John Baird, a déposé à la Chambre des communes des documents traitant du transfert de détenus afghans par le Canada, ainsi qu'un rapport du Groupe d'experts-arbitres (document parlementaire no 8530-411-3). Nous estimons que le dépôt de ces documents est contraire à la Loi sur les langues officielles.
D'une part, la Loi prévoit que « les documents qui émanent d'une institution fédérale et qui sont déposés au Sénat ou à la Chambre des communes par le gouvernement fédéral le sont dans les deux langues officielles[ ».] Cette disposition de la Loi n'a pas été respectée.
D'autre part, selon la Loi, « les archives, comptes rendus et procès-verbaux du Parlement sont tenus, imprimés et publiés dans les deux langues officielles[ ».] À ce jour, on nous confirme que les archives de ce dépôt ne sont toujours pas disponibles dans les deux langues officielles et que le Parlement n'a pas tenté de les faire traduire.
Par respect pour les communautés de [langue officielle] et de la Loi, nous vous demandons d'enquêter sur ce dépôt de documents et de recevoir la présente comme une plainte officielle.
Cette lettre a été signée par les quatre membres néo-démocrates du Comité permanent des langues officielles.
Dans la Loi sur les langues officielles, il est tout à fait clair que le gouvernement et toutes les institutions gouvernementales sont tenues de produire des documents dans les deux langues officielles. Dans cette situation, ça n'a pas été le cas, et la capacité des parlementaires d'accomplir efficacement leur travail est brimée. Bien que certains parlementaires parmi nous aient la chance d'être bilingues, plusieurs n'ont pas encore cette chance. Présentement, ces parlementaires n'ont pas la possibilité d'analyser eux-mêmes tous les documents disponibles. Cet enjeu a soulevé énormément de débats à la Chambre des communes, et pour plusieurs députés, c'était crucial. Nous aurions aimé pouvoir consulter nous-mêmes tous les documents provenant du Groupe d'experts-arbitres et du gouvernement.
C'est la raison pour laquelle nous avons demandé au commissaire de faire enquête sur cette situation. Selon nous, celle-ci n'aurait jamais dû se produire, peu importe que ce soit pour des considérations de temps ou de budget. Aucune raison ne peut justifier qu'une entité du Parlement, quelle qu'elle soit, se soustraie à ses obligations légales et constitutionnelles. Encore une fois, étant donné nos responsabilités de parlementaires, nous estimons qu'un débat public au sein de ce comité aurait été nécessaire, à l'époque, et le serait encore aujourd'hui. C'est pour cette raison que nous avons déposé la plainte.
Nous espérons, une fois l'étude sur la Feuille de route terminée, pouvoir tenir ces débats de façon ouverte et publique au sein du comité. Pour ce faire, il faut accepter l'amendement qu'a proposé mon collègue afin que l'assentiment d'un membre de l'opposition soit obtenu chaque fois que le comité désire siéger à huis clos.
Nous avons fait parvenir une autre lettre au commissaire, le 25 octobre 2011. Cette fois-ci, l'objet était une plainte relative aux cartes de visite du ministre des Affaires étrangères. Cette question avait été soulevée à la Chambre des communes et a quelque peu froissé — pardonnez-moi cet euphémisme — les sensibilités des communautés de langue officielle en situation minoritaire, en l'occurrence les francophones. C'est pour cette raison que nous avons cru bon de parler directement au commissaire de cette situation qui nous a semblé extrêmement problématique, par l'entremise de la lettre suivante:
Monsieur,
Vous êtes bien au courant du fait que le ministre des Affaires étrangères s'est procuré par les fonds publics des cartes de visite unilingues anglaises. Il semble bien que cela soit contraire aux exigences du Programme de coordination de l'image de marque (PCIM) du Secrétariat du Conseil du Trésor (SCT) et à l'esprit de la Loi sur les langues officielles. Il appert, à la lecture des journaux, que le président du Conseil du Trésor aurait approuvé cette exemption aux directives du SCT.
Notons que le Manuel du PCIM stipule que les deux langues officielles doivent figurer côte à côte sur les cartes de visite ou figurer en français sur l'une des faces et en anglais au verso.
Selon le NPD, il est inadmissible que le ministre des Affaires étrangères, appuyé par le président du Conseil du Trésor, exclu[e] une des langues officielles d'un outil promotionnel du gouvernement du Canada et, par conséquent, invalide les principes d'une politique de longue date.
Le ministre s'est défendu à la Chambre des communes d'avoir des cartes bilingues. Il est clair que si elles restent dans ses poches, cela ne sert pas à grand-chose.
Par respect pour les communautés de langue officielle, je vous demande donc de mener une enquête formelle sur la présente.
Cette lettre-ci a été signée par Yvon Godin, député d'Acadie—Bathurst. Bien sûr, le contenu de cette lettre est endossé par tous mes collègues. Nous approuvons totalement le texte que je viens de vous lire.
C'est la responsabilité de tous les parlementaires de faire preuve de leadership lorsqu'il est question des langues officielles et de leur promotion auprès des citoyens, dans le cadre de nos actions et de nos contacts avec les gens. Cette responsabilité incombe d'autant plus aux ministres.
Cette situation que nous avons vécue, peu importe comment elle a pu être expliquée par le ministre, nous apparaît inconcevable. C'est pour cette raison que nous avons décidé de faire appel à M. Graham Fraser et aux capacités d'étude et d'analyse de son bureau.
Toujours le 25 octobre, nous avons été confrontés à une autre décision de ce gouvernement qui nous a semblé incompréhensible et inexplicable. Selon nous, et probablement selon d'autres députés de l'opposition, elle aurait dû faire l'objet d'un débat public urgent au sein de ce comité. Je fais référence à la nomination du vérificateur général du Canada. C'est très facile de balayer sous le tapis une telle décision qui, honnêtement, s'avère assez embarrassante pour le gouvernement.
L'amendement proposé par mon collègue serait, dans un cas semblable, absolument essentiel pour assurer de pouvoir ouvertement discuter de cette décision qui a soulevé beaucoup de controverses et de débats, autant parmi les parlementaires que parmi les citoyens, et pas seulement chez les membres des communautés de langue officielle vivant en situation minoritaire.
Bien entendu, je vais revenir un peu plus longuement sur cette controverse. Je crois qu'il sera important de rappeler certains faits et certains propos qui ont été prononcés au moment où ce débat est devenu un peu plus prééminent sur la scène publique.
Tout d'abord, je vais commencer par faire la lecture de la lettre qui suit:
Monsieur le commissaire,
Nous avons appris que M. Mike Ferguson du Nouveau-Brunswick sera nommé vérificateur général du Canada. Or, M. Ferguson est unilingue. Pourtant, dans l'avis de poste vacant publié dans la Gazette du Canada [...], il est écrit que « la maîtrise des deux langues officielles est essentielle ».
Je tiens à souligner que le gouvernement contrevient ainsi à ses propres règles. La série de nominations unilingues à des postes clés par le gouvernement conservateur ne présage rien de bon pour la dualité linguistique du pays.
Par conséquent, je vous demande d'enquêter et de vous prononcer sur cette nomination, à titre de protecteur des droits linguistiques.
Cette plainte a été signée par M. Yvon Godin, député d'Acadie—Bathurst, mais bien entendu, le contenu est encore une fois endossé par tout le caucus néo-démocrate et par les membres de l'opposition du comité. Je me permets, dans le cas présent, de présumer des opinions de M. Bélanger. À moins d'une grande surprise, je ne crois pas me tromper. Je le lui demanderai quand il reviendra.
Comme je l'ai mentionné, cette décision a soulevé énormément de débats et de controverses, parce que les responsabilités qui incombent au vérificateur général sont énormes et nécessitent, selon nous, une bonne compréhension des deux langues officielles ici, au Canada, pour lui permettre d'accomplir efficacement son travail.
Au Québec, bien entendu, et ailleurs au pays, plusieurs citoyens ont été très mécontents de cette décision et auraient aimé que le comité se penche publiquement sur la question et cherche à avoir de plus amples explications de la part du gouvernement sur tout ce qui aurait pu motiver ce choix. Selon nous, il s'agit d'une décision inacceptable.
De plus, je me rappelle le cri du coeur lancé par le député d'Ottawa—Orléans, qui n'est malheureusement plus membre du comité, mais qui, je crois, aurait trouvé cette partie de mon discours à tout le moins assez intéressante. Son cri du coeur nous est parvenu de façon très spontanée lorsque cette question a été soulevée, il y a quelques mois, au cours des différentes discussions que nous avons eues en comité. Il nous a clairement fait savoir qu'il était, pour reprendre ses paroles, « un des députés les plus déçus de la nomination d'un vérificateur général qui n'est pas bilingue ». Il a continué son allocution en nous disant que lorsque cette nomination a été faite, il est monté aux barricades pour s'informer de l'erreur qui avait été commise.
Je pense qu'ici, le message de fond est très clair. Même pour certains membres du gouvernement, le fait de nommer un vérificateur général unilingue anglophone était incompréhensible et aurait mérité un débat public ici, en comité. Si nous avions déjà accepté une mesure telle que celle proposée dans l'amendement de M. Harris, nous aurions pu, selon moi, avoir ces discussions et peut-être en arriver à une meilleure compréhension de tous les éléments qui ont motivé un choix qui semble, pour bon nombre de citoyens et de parlementaires, clairement inapproprié.
Je pense que si cette nomination a soulevé les passions jusqu'au sein du caucus conservateur, c'est un signe très clair qu'il y a lieu de se questionner sur la véritable importance qu'a le bilinguisme pour ce gouvernement. Il est important d'avoir ces discussions de façon ouverte, car les citoyens du Canada se posent exactement les mêmes questions.
Je vais revenir sur les lettres destinées au commissaire. Il en reste quelques-unes. Un des sujets que nous avons encore voulu aborder, parce que cela nous a semblé être un manquement flagrant aux obligations en matière de langues officielles, c'est la configuration de la messagerie vocale de Citoyenneté et Immigration Canada et de la Chambre des communes. La lettre se lit comme suit:
Monsieur,
Nous aimerions signaler, dans un premier temps, que nous avons appris dans les journaux que l'anglais est la langue de configuration par défaut de la nouvelle solution de messagerie vocale de Bell Canada retenue par Citoyenneté et Immigration Canada (CIC).
La décision de CIC de retenir cette solution est contraire à la Loi sur les langues officielles parce qu'elle prive les employés de l'ensemble du ministère de leur droit de travailler dans la langue de leur choix.
Il est d'autant plus préoccupant que la direction du Ministère a sciemment informé ses employés que le premier contact avec le nouveau système ne se ferait pas en français, ce qui indique une négation des droits linguistiques par la direction.
Dans un deuxième temps, nous constatons que la langue de configuration par défaut de la messagerie vocale à la Chambre des communes est également l'anglais seulement [...]
Ces situations doivent être corrigées dans les plus brefs délais. Elles devraient aussi être évitées dans toutes les institutions fédérales. Il en va du respect des droits linguistiques des fonctionnaires et des employés touchés.
Veuillez donc recevoir la présente comme une plainte formelle envers CIC et la Chambre des communes.
Cette plainte particulière a été signée par Robert Aubin, député de Trois-Rivières, et par Yvon Godin, député d'Acadie—Bathurst. Encore ici, elle a bien entendu reçu notre accord.
Des décisions de ce genre peuvent sembler anodines pour certains. Pourtant, elles ont des conséquences réelles sur le travail accompli par les fonctionnaires, les députés et leurs équipes. Il faut s'assurer que chacun des membres de l'appareil gouvernemental peut avoir directement accès à toute forme de service dans sa langue maternelle, que ce soit le français ou l'anglais, et ce, dès la première interaction.
C'est le comité qui a la responsabilité de se pencher sur ce type de question. Cela touche directement la question du respect des obligations du gouvernement, de la Chambre et des différents ministères à l'égard des langues officielles. C'est la raison pour laquelle nous avons soumis cette plainte. C'est aussi pour cette raison que nous estimons que nous aurions dû avoir un débat ouvert au sein de ce comité.
Le 29 novembre 2011, nous nous sommes aussi penchés sur le rapport de la vérificatrice générale intitulé « Programmes et services de santé au Yukon ». Les gens du Grand Nord occupent une place importante dans les débats parce qu'ils ont un rôle important à jouer dans la francophonie canadienne. Pour nous, il est important que ce type de débat ait lieu au sein du comité, au cours d'une séance publique, bien entendu. C'est cet enjeu même qui donne sa pertinence à l'amendement que nous avons proposé. Une fois de plus, je réitère mon désir de voir les députés conservateurs retirer la motion originale qui a précédé l'amendement proposé par mon collègue. À tout le moins, j'invite chacun de vous à appuyer cet amendement.
Je vais maintenant lire la lettre:
Monsieur,
Dans la foulée de la plainte du député Yvon Godin, datée du 1er novembre 2011, concernant l'ancienne vérificatrice générale, Mme Sheila Fraser, nous déposons, par la présente, une seconde plainte formelle.
Nous avons appris au Comité permanent des langues officielles, le 22 novembre 2011, par l'entremise de l'Association franco-yukonnaise (AFY), que la vérificatrice générale a dévoilé le 25 février 2011 un rapport intitulé « Programmes et services de santé au Yukon — Ministère de la Santé et des Affaires sociales du Yukon » sans faire aucune référence aux services en français ni aux langues officielles.
Cette absence de référence et d'évaluation des services en français et des langues officielles dans ce territoire n'est pas acceptable au regard de l'objet de l'étude:
Le ministère de la Santé et des Affaires sociales du Yukon est chargé de fournir des programmes et des services sociaux et de santé aux Yukonnais. En 2009-2010, le Ministère a dépensé 148 millions de dollars en services de santé et 109 millions de dollars en services sociaux, en soins prolongés et en services administratifs.
Nous avons examiné les processus de planification du Ministère et sa façon de gérer les programmes et services de santé. À des fins d'illustration, nous nous sommes surtout penchés sur les programmes de services de prévention et de contrôle du diabète et de lutte contre l'abus de l'alcool et des drogues.
Comment est-il possible que Mme Sheila Fraser ait examiné les processus de planification du Ministère et sa façon de gérer les programmes et services de santé sans tenir compte des langues officielles, qui sont pourtant indissociables des programmes et services de santé du Yukon? Qu'a-t-elle fait de ses responsabilités en matière de langues officielles?
La réponse est simple. Comme vous le savez, Mme Fraser a déclaré: « Il demeure néanmoins que le Parlement a délégué au commissaire aux langues officielles la responsabilité de l'ensemble des questions touchant les langues officielles. »
Cette déclaration de Mme Fraser, contraire à la Loi sur les langues officielles, a défini l'orientation de toutes les activités du Bureau du vérificateur général du Canada au cours des 10 dernières années, au grand dam de nos communautés de [langue officielle] en situation minoritaire.
Au lieu d'être une alliée des communautés en conjuguant langues officielles et exercices de vérification, Mme Fraser a fermé les yeux sur la mauvaise gestion des fonds devant être consacrés aux langues officielles. L'épanouissement des communautés de [langue officielle] exige une réelle prise en compte de leurs besoins dans tous les secteurs [d'activité]. Évaluer l'efficience des programmes en faisant abstraction des questions linguistiques revient à nier les besoins et défis spécifiques des communautés.
Le rapport de la vérificatrice générale sur les programmes et services de santé au Yukon est un exemple concret d'incident qui vous permettra d'enquêter formellement, nous le souhaitons, sur la conduite de Mme Fraser au cours de son mandat.
Cette lettre a été signée par les quatre membres néo-démocrates du Comité permanent des langues officielles.
Un peu plus tôt, j'ai abordé la question des problèmes de reddition de comptes. C'est un autre exemple flagrant d'une situation franchement inacceptable qui pourrait faire l'objet d'une discussion au Comité permanent des langues officielles. Cela devrait être fait de façon ouverte et publique.
Comme je l'ai mentionné dans le cadre de l'étude sur la Feuille de route, plusieurs témoins nous ont parlé de leur difficulté à déterminer la provenance exacte des fonds qu'ils recevaient. Je crois que la plainte que nous avons faite touche à ces préoccupations extrêmement importantes qui devraient être prises au sérieux par un gouvernement qui, par ailleurs, se vante de ses capacités dans le domaine des finances et de la gestion des fonds publics. Nous ne savons pas comment les fonds sont dépensés, où l'argent est investi, si les communautés de langue officielle en situation minoritaire sont réellement desservies par les programmes, par les initiatives mises en place par le gouvernement, et par les différents fonds qui leur sont destinés.
Selon moi, cette situation doit être réglée très rapidement. Il faut tenir un débat publiquement. Pour nous, il serait absolument insensé de tenir une discussion de ce type à huis clos. C'est principalement parce que les communautés de langue officielle en situation minoritaire ont demandé directement à nous de résoudre ce problème et ont soulevé beaucoup d'inquiétudes par rapport à cela. Je crois que cela aussi démontre la pertinence de l'amendement présenté par mon collègue M. Harris.
Comme je vous l'ai mentionné, selon nous, membres du NPD, une grande partie de ces enjeux, sinon la totalité, auraient dû faire l'objet d'une discussion en comité lors d'une séance publique. Il faut tenir ces discussions et s'assurer que leur contenu est accessible aux citoyens. Ces enjeux préoccupent aussi les Canadiens.
Nous avons entendu leurs préoccupations de plusieurs façons, par exemple par l'entremise de lettres et de courriels adressés directement à nos bureaux. Elles ont été exprimées dans des lettres ouvertes aux journaux, ou encore dans les témoignages qu'on a reçus ici, dans le cadre de l'étude sur la Feuille de route. Les Canadiens ne veulent pas que ces débats se fassent en secret, derrière des portes closes, selon la volonté du gouvernement, surtout lorsque les discussions que nous avons ici pourraient embarrasser ses membres.
Nous sommes tous, en tant que parlementaires, redevables envers les citoyens qui nous ont confié le mandat de les représenter et de défendre leurs intérêts. Nous avons tous aussi l'obligation morale, à défaut d'en avoir l'obligation légale, de rendre compte publiquement de nos décisions.
C'est pour cette raison que nous trouvons essentiel de nous doter de mesures comme celle proposée dans l'amendement de mon collègue. Cet amendement vise à assurer que les discussions de ce comité ne se feront jamais de façon secrète, que l'information ne sera jamais cachée aux citoyens du Canada sans qu'un consensus ait été obtenu parmi les membres de ce comité selon lequel certaines discussions doivent temporairement être tenues à huis clos. Il faut s'assurer que l'opposition peut toujours dire son mot lorsque vient le temps pour le comité d'adopter une telle mesure.
Selon nous, il est essentiel que les travaux de ce comité soient accessibles aux citoyens, puisque les débats que nous engageons reflètent souvent leurs préoccupations. La Loi sur les langues officielles nous impose une responsabilité envers eux. Les citoyens ont le droit d'être informés des discussions que nous avons, car elles concernent directement des sujets qui leur sont chers.
Ce n'est pas en siégeant à huis clos que nous permettrons aux Canadiens de savoir que le Secrétariat du Conseil du Trésor a supprimé l'aspect des langues officielles d'une de ses politiques, sans considération pour cet enjeu. Ce n'est pas en siégeant à huis clos que nous permettrons aux Canadiens de savoir que le Conseil du Trésor a décidé d'exiger moins de comptes rendus des institutions fédérales, même si cela contrevient à la Loi sur les langues officielles.
Ce n'est pas en siégeant à huis clos que nous permettrons aux Canadiens de savoir que le gouvernement a déposé un projet de loi touchant Air Canada pour lui faire croire qu'on se soucie du respect des langues officielles, alors que ce projet de loi en question met davantage en péril les droits linguistiques des Canadiens.
Ce n'est pas en siégeant à huis clos que nous permettrons aux Canadiens de se rendre compte des conséquences de la suppression de postes de professeur de langue à l'École de la fonction publique.
Et ce n'est certainement pas en siégeant à huis clos que nous permettrons aux Canadiens de constater que les conservateurs veulent persister à nommer des unilingues à des postes pour lesquels le bilinguisme devrait être une compétence essentielle. Nous avons mentionné à plusieurs reprises le cas du vérificateur général. Toutefois, il ne faut pas oublier les juges de la Cour suprême.
Notre responsabilité est de nous questionner sur certaines décisions ou actions du gouvernement qui peuvent sembler aller à l'encontre de la Loi sur les langues officielles, ou même seulement à l'encontre de l'esprit de cette loi. Cela doit se faire publiquement. Les citoyens s'attendent à ce que nous remplissions efficacement cette partie de notre mandat. Les débats qui font partie intégrante des travaux de ce comité doivent être tenus publiquement, à moins qu'un consensus ne soit obtenu pour que le comité siège à huis clos.
Nous avons l'obligation de discuter de cette question. D'ailleurs, il n'est pas juste ni responsable de confier l'entièreté de la décision de siéger à huis clos aux membres du gouvernement qui peuvent vraisemblablement — ils l'ont déjà fait — prendre une décision à leur avantage dans le but de cacher certains débats et certaines controverses aux citoyens. Pourtant, il est clair que les questions cachées sont susceptibles de heurter la sensibilité des gens, eux qui méritent d'avoir des réponses rapides aux interrogations qui sont soulevées.
En plus des obligations constitutionnelles et légales que nous avons, je pense qu'il est extrêmement important que tous les parlementaires, en particulier les membres de ce comité, valorisent le bilinguisme dans toutes leurs actions et dans toutes leurs discussions. Par exemple, il faut s'assurer que les débats qui portent sur des questions urgentes et sur les préoccupations des citoyens sont faits publiquement, afin de démontrer l'engagement du gouvernement dans la promotion du bilinguisme.
J'ai déjà eu le malheur d'entendre à plusieurs reprises que le bilinguisme était quelque chose qui coûtait excessivement cher à notre société, et que c'était vu comme une obligation pour ceux qui veulent passer à de plus hauts postes et à de meilleurs emplois dans notre fonction publique, et moins comme une valeur à part entière dans notre société. Cette responsabilité est en partie la nôtre, puisque nous sommes des parlementaires. Nous devons assurer cette promotion, cette valorisation du bilinguisme. Je pense que d'engager des débats publics sur des enjeux qui sont cruciaux pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire est une des façons d'y arriver.
Pour mieux appuyer mes dires à ce sujet, je me permets de vous citer un article du Globe and Mail, un billet daté du 23 janvier 2012 qui nous explique à quel point il est important et avantageux pour les Canadiens de maîtriser les deux langues officielles. Je pense que ce billet nous aidera à démontrer encore une fois toute l'importance de l'amendement présenté par mon collègue, amendement qui nous permettrait de poursuivre publiquement tous les débats importants sur des enjeux parfois controversés. Ainsi, les citoyens pourraient être au fait de nos préoccupations de parlementaires, qui bien souvent rejoignent les leurs.
Comme je vous le disais, c'est un billet du Globe and Mail du 23 janvier 2012 qui s'intitule « Linguistic versatility is undervalued »:
[Traduction]
Officiellement bilingue, le Canada est un chef de file de la promotion de la connaissance d'une deuxième langue. Le fédéral et les provinces consacrent annuellement plus de 2 milliards de dollars pour offrir des services gouvernementaux en français et en anglais. Toutefois, la capacité de la population à s'exprimer dans les deux langues demeure réduite. Au Québec, 35 p. 100 des francophones parlent l'anglais, tandis que seulement 7,4 p. 100 des anglophones des autres provinces parlent le français.
Aux États-Unis, 9 p. 100 de la population parlent deux langues, et que dire de l'Union européenne, où 56 p. 100 de ses citoyens peuvent s'exprimer dans une deuxième langue et le tiers en maîtrise une troisième, selon une nouvelle étude publiée par l'Association des études canadiennes.
Il existe des raisons complexes expliquant l'ambivalence du Canada anglais envers le français, entre autres la concentration régionale des francophones et l'importance accrue de l'Asie dans l'économie mondiale, particulièrement dans l'Ouest du Canada. En Colombie-Britannique et en Alberta, le tiers de la population estime que l'espagnol et la mandarin pourraient se révéler un choix plus judicieux comme deuxième langue.
D'autre part, les problèmes inhérents à notre bilinguisme sont peut-être imputables également aux lois adoptées. La maîtrise de nos deux langues officielles peut être perçue à tort comme une anomalie historique ou une obligation coûteuse imposée par le gouvernement. (Pourtant, personne n'est tenu d'apprendre le français et l'anglais, sauf les fonctionnaires.)
Au contraire, on devrait considéré que l'apprentissage d'une deuxième langue procure à la société des avantages significatifs sur la scène mondiale et contribue à gommer les différences culturelles. « En Amérique latine et en Europe, la majorité — particulièrement les jeunes — adoptent le bilinguisme, qu'ils perçoivent comme un tremplin », selon Jack Jedwab, l'auteur de l'étude.
La plupart des Canadiens apprennent la deuxième langue à l'école, mais peu ont l'occasion de s'en servir dans la vie de tous les jours. En offrant l'occasion de parler français et en prenant des mesures incitatives en ce sens, on pourrait inverser cette tendance. Les employés bilingues sont susceptibles d'être mieux rémunérés, particulièrement au Québec et dans le secteur public.
La maîtrise du français et de l'anglais ainsi que de l'espagnol ou du mandarin devrait être perçue comme une source de fierté et un investissement qui rapportera tout au long de notre vie. Deux des plus merveilleuses langues sont parlées au Canada. Il faudrait s'en estimer chanceux et non pas considérer qu'il s'agit là d'une malédiction.
[Français]
À la lecture de ce texte, je pense que le type d'attitude que nous devrions adopter en tant que parlementaires se clarifie. Je pense plus spécifiquement que ce genre d'attitude devrait se refléter dans toutes les actions et décisions de ce gouvernement. Cela n'a pas toujours été le cas ces derniers temps.
Je ne réciterai pas la liste des motions que l'opposition a présentées, ni la liste des plaintes que nous avons dû adresser au commissaire aux langues officielles en raison de l'impossibilité d'aborder devant ce comité ces enjeux pourtant extrêmement importants.
Selon moi, il faut s'assurer que cette attitude ouverte et cette façon de présenter le bilinguisme comme atout, comme un aspect important pour la société canadienne et pour chaque citoyen, se reflètent aussi dans les procédures en vigueur à ce comité. Une des façons d'y parvenir est de tenir des débats accessibles au public, et non derrière des portes closes. Il faut maintenir la possibilité d'informer les citoyens des décisions parfois, voire souvent problématiques pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Encore une fois, j'insiste sur l'importance de l'amendement qui demande de s'assurer d'avoir le consentement d'au moins un député de l'opposition lorsque vient le temps de déclarer la tenue des travaux de ce comité à huis clos.
Il faut démontrer du leadership. Pour que les citoyens puissent percevoir ce leadership, il faut que les gens puissent être au fait des travaux que le comité entreprend ainsi que des discussions et des débats que nous tenons. Ça aidera aussi à leur donner confiance en notre capacité, en tant que membres du Comité permanent des langues officielles, à bien défendre les intérêts des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Les citoyens doivent être en mesure de bien comprendre que nous travaillons à l'épanouissement et au bon développement de ces communautés. En tant que membres du Comité permanent des langues officielles, nous nous préoccupons de bien valoriser leur langue maternelle dans les communautés où cette langue est moins parlée. Je pense avoir bien fait comprendre ma position à ce sujet.
À la lumière de tout ce que je viens de dire, depuis que les citoyens ont accès à beaucoup plus d'information sur ce qui pourrait faire l'objet de discussions dans ce comité et sur ce qui n'y a pas encore été discuté, ils comprennent un peu mieux les objections exprimées par les députés de l'opposition quant à la tenue éventuelle de tous les travaux de ce comité à huis clos.
On comprend sans doute un peu mieux l'idée des conservateurs de remplacer un membre du Comité permanent des langues officielles, qui avait une expertise approfondie du dossier des langues officielles. Malgré certaines divergences d'opinions avec nous, le député d'Ottawa—Orléans avait soulevé certaines questions, notamment à propos de l'unilinguisme anglais du vérificateur général et des chasseurs de tête engagés pour faire la recherche de candidatures. Malheureusement, M. Galipeau n'aura pas eu la chance de voter sur cette motion. Qui sait, peut-être nous reviendra-t-il? Si cette question est toujours pertinente, nous pourrions alors la présenter de nouveau.
Cela dit, on remet en question la volonté du gouvernement de travailler avec les communautés de langue officielle en situation minoritaire et de les aider à se développer. Cette remise en question est motivée par le retrait d'une partie de l'expertise du caucus conservateur de ce comité ainsi que par la volonté de cacher tous les travaux effectués par ce comité.
Malheureusement, les conservateurs n'ont plus besoin de nous démontrer qu'ils s'opposent à l'esprit et la lettre de la Loi sur les langues officielles. Nous en avons de nouvelles preuves chaque jour, chaque semaine. Il est important, selon nous, que les Canadiens soient au courant de ces circonstances qui, la plupart du temps, sont désavantageuses pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire. Les Canadiens doivent savoir ces choses. Ils ont le droit d'avoir toute l'information dont ils ont besoin pour juger de nos actions, de la façon dont nous aurons rempli notre mandat au cours des quatre prochaines années et de la façon dont nous aurons défendu les intérêts des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Il n'est pas honnête de siéger à huis clos et de faire semblant de promouvoir l'amélioration des conditions des communautés de langue officielle. Les citoyens doivent être au courant des discussions qui se déroulent ici.
Même parmi les Canadiens qui ne sont pas membres des communautés de langue officielle en situation minoritaire, plusieurs valorisent beaucoup le bilinguisme et s'intéressent à la situation du français ou encore à celle de l'anglais dans le reste du pays.
Par exemple, nous avons reçu des gens de la Colombie-Britannique, membres de l'association Canadian Parents for French, qui nous ont parlé de l'importance du français dans le parcours éducatif de leurs enfants et pour leur avenir. Ils ont dit valoriser beaucoup l'apprentissage du français, qui donne à leurs enfants de plus grandes chances de voir des portes s'ouvrir dans l'avenir. Je crois que ces citoyens, tout comme bon nombre de membres de communautés de langue officielle en situation minoritaire, veulent connaître l'état des discussions que nous menons, les sujets dont nous traitons et les décisions que nous prenons, qu'elles mènent à des actions ou à l'inaction par rapport à certains enjeux.
Sur ce point, le huis clos pose problème. Il ne nous permet pas d'informer les citoyens des décisions qui sont prises, que ce soit celle de simplement ignorer un enjeu, celle de ne pas entreprendre une étude, celle de ne pas produire de rapport ou celle de ne pas faire de recommandations au gouvernement. Ces aspects font aussi partie de l'information qui est essentielle aux Canadiens s'ils veulent se faire une idée et avoir un portrait réel de ce qui se passe en comité, s'ils veulent savoir de quelle façon la francophonie sera traitée par ce gouvernement, et s'ils veulent connaître les enjeux soulevés par des communautés de langue officielle en situation minoritaire qui seront simplement ignorés et relégués aux oubliettes. En fait, il n'y a pas moyen de savoir quand ces enjeux pourront être remis sur la table, puisque présentement l'établissement de l'ordre du jour est indépendant de notre volonté.
Je crois avoir bien démontré toute l'importance de l'amendement pour les membres du comité qui siègent dans l'opposition. Encore ici, je me permets de parler en votre nom, monsieur Bélanger. Je pense avoir bien saisi une bonne partie de vos intentions et de vos opinions lorsque vous nous avez expliqué un peu plus en détail la Loi sur les langues officielles et divers éléments de ce type.
Je vais maintenant laisser la parole à M. Robert Aubin, qui poursuivra la discussion.
Merci, madame Michaud.
Des voix: Bravo!
Le vice-président (M. Yvon Godin): C'est maintenant au tour de M. Robert Aubin.
J'en profite pour remercier M. Mauril Bélanger de m'avoir remplacé ce matin.
J'invoque le Règlement, monsieur le président.
M. Gourde doit se rendre compte que sa chemise n'est pas en règle. Tous les autres portent une chemise bleue sauf lui.
Des voix: Ah, ah!
Je crois, monsieur Bélanger, que ça ne doit pas faire l'objet d'un recours au Règlement.
Monsieur Aubin, c'est à vous.
Merci, monsieur le président.
Tout d'abord, j'aimerais souhaiter la plus cordiale bienvenue à tous les gens du public qui se sont joints à nous et à tous les représentants des médias qui sont ici ce matin. Je considère votre présence comme une bouffée de fraîcheur. Il me semble qu'il y a longtemps qu'on vous avait vus. C'est un plaisir de voir que vous êtes de retour. Espérons que nous saurons alimenter vos réflexions le mieux possible.
À cet égard, je veux à mon tour tirer mon chapeau à Mme Michaud, mais j'attendrai son retour afin qu'elle puisse profiter de mes remerciements. Je remercie aussi M. Bélanger, qui a malheureusement dû quitter la dernière séance prématurément, à cause d'un conflit d'horaire. Je dois avouer qu'il nous a laissés, moi et plusieurs autres, sur notre appétit.
M. Mauril Bélanger: Mon nom figure sur la liste de ceux qui veulent prendre la parole.
M. Robert Aubin: Oui, je le sais. Je crains quand même que d'autres événements ne se soient passés, lorsque votre tour reviendra.
Bref, j'apprécie grandement votre présentation, dans un contexte historique de la Loi sur les langues officielles. Si jamais on craignait que vous ne puissiez pas terminer cette histoire qui m'apparaît vraiment essentielle et cruciale, il faudrait peut-être penser à une solution de rechange qui vous permettrait de le faire. J'accepterais volontiers d'être votre lecteur et, le cas échéant, vous pourriez ajouter des commentaires pertinents à ma lecture.
Lorsque Mme Michaud reviendra, je lui transmettrai mes remerciements.
Ce matin, je vais commencer par une petite anecdote. Vous n'êtes pas sans savoir qu'avant d'être élu député, j'ai enseigné pendant 25 ans. Il ne se passe à peu près pas une fin de semaine sans que je retourne dans ma circonscription et qu'on me demande si je m'ennuie de l'enseignement. Chaque fois, je donne à peu près la même réponse: je ne m'en ennuie pas, du moins pas encore, mais j'ai souvent une pensée pour l'enseignement.
Au cours des quatre dernières années pendant lesquelles j'ai enseigné au Québec, j'enseignais un cours intitulé Monde contemporain. C'est un cours beaucoup axé sur la politique.
Lorsque j'étais enseignant en musique, soit les 21 années précédentes, à un moment donné, un poste d'enseignant en musique est devenu disponible. J'ai donc appelé un copain musicien et je lui ai demandé s'il avait envie d'enseigner avec moi. Je lui offrais le poste qui était vacant. Il m'a demandé de lui laisser quelques heures pour réfléchir et m'a rappelé le lendemain en me disant qu'il passerait son tour, car pour lui, il y a deux types de musiciens, soit ceux qui en parlent et ceux qui en font. J'ai compris qu'il se rangeait du côté de ceux qui en font puisqu'il avait été pianiste toute sa vie. Sa réponse m'avait quand même un peu heurté, car c'était comme s'il me disait que je n'étais pas un vrai musicien, mais plutôt juste quelqu'un qui parle de musique. Or, j'ai relativisé le tout en me disant que j'enseignais et que je faisais aussi une carrière de musicien en parallèle.
Quelques années plus tard, alors que j'étais en train de donner le cours Monde contemporain, je me suis dit: « Diantre, je suis devant exactement le même dilemme. » La politique, il y a ceux qui en parlent et ceux qui en font. Encore une fois, j'étais du côté de ceux qui en parlaient. Le désir de me lancer en politique m'habitait depuis l'adolescence. Je me suis dit que le temps était peut-être venu d'au moins tenter ma chance. Les planètes se sont alignées et ont fait en sorte que, le 2 mai dernier, je me sois retrouvé parmi vous.
Ce matin, j'ai curieusement l'impression que, dans ce débat, on me ramène à la case départ et qu'on me demande de retrouver mes attributs d'enseignant. Pendant les prochaines minutes, voire les prochaines heures ou les prochains jours, je devrai donner le cours Politique 101, qui traite d'un droit fondamental des politiciens de cette Chambre, des comités et de ce Parlement, soit le droit à la parole.
Évidemment, il y a quelques contextes qui sont un peu particuliers. Lorsque je donnais des cours, le défi était toujours de soutenir l'intérêt des élèves. Tous ceux qui ont enseigné savent que ce n'est pas facile. Dans le milieu scolaire, on avait quelques outils ou quelques moyens qui favorisaient l'attention. Par exemple, les téléphones cellulaires étaient interdits en classe, ce qui permettait aux personnes de carrément choisir de dormir — j'avoue que c'est arrivé dans quelques-uns de mes cours — ou de suivre ce qui se disait. Pour tout un chacun, c'est difficile de faire trois choses en même temps, bien que je commence à mettre un petit bémol à cet égard. En effet, depuis mon arrivée en politique, je m'aperçois que c'est non seulement possible, mais qu'il est nécessaire de pouvoir faire plus d'une chose en même temps sur la Colline.
Je vais quand même tenter d'être le plus pertinent possible pour soutenir l'intérêt de tout un chacun autour de ce débat. Vous avouerez que ce ne sera pas toujours facile et que la longueur des présentations fait parfois en sorte que l'on s'épuise, mais j'essaierai d'avoir le petit mordant qui réveille les troupes et qui permet de ne pas perdre de vue notre objectif, soit d'essayer de comprendre cette motion.
Je sais qu'on doit d'abord débattre de l'amendement de la motion, j'en conviens, mais on ne peut pas vraiment débattre de l'amendement de la motion si on ne se rappelle pas l'essentiel de ce qui nous a menés là.
Je répète que cette motion, qui a été déposée par un député du côté ministériel, proposait: « Que tous les travaux de Comité du Comité se tiennent à huis clos. » Le mot essentiel, si on fait une analyse grammaticale de la phrase, est « tous ». Le mot « tous » dit bien ce que cela veut dire. Cela veut dire qu'il ne permet aucune exception. Cela veut dire qu'on pourrait être mal pris, voire qu'on ne pourrait pas faire d'exception. On est doublement mal pris parce que le huis clos, bien qu'il soit souhaitable et accordé unanimement par moments, ne doit pas être la règle. Le huis clos doit être l'exception nécessaire dans certaines circonstances.
Or, cette motion nous propose tout à fait le contraire. Elle propose un revirement de situation à 180o où l'exception serait de ne pas être à huis clos. Même là, la motion telle que libellée ne le permettrait plus: « Que tous les travaux de Comité du Comité se tiennent à huis clos. » Comment peut-on revenir en arrière après avoir adopté une telle motion? Cela m'apparaît pour le moins problématique.
Il apparaît assez évident qu'il faut accomplir l'essentiel des travaux du comité publiquement et que, dans certaines circonstances le justifiant, on puisse demander le huis clos, ce qui correspond tout à fait à l'esprit de l'amendement de mon collègue M. Harris. Il demande: « Que la motion soit modifiée par adjonction, après les mots “huis clos”, de ce qui suit: “avec le consentement d'au moins un député de l'opposition [...]”. » Cela commence à être clair. On l'a déjà dit maintes fois et je le répète: l'opposition n'a pas la volonté de s'opposer systématiquement à toutes les demandes de huis clos. Il faudra quand même essayer de faire la démonstration de la pertinence d'une telle demande.
Je sais que lorsque les motions sont déposées, elles ne peuvent pas être débattues. Je ne veux pas refaire le livre de la procédure, ce serait un peu long et fastidieux, et je n'en ai probablement pas la compétence. Je me suis quand même posé la question pendant de nombreuses minutes relativement au motif d'une telle motion. Pourquoi déposer devant le comité, un bon matin, une motion aussi catégorique alors que rien ne m'apparaissait particulièrement troublant? J'ai développé deux hypothèses. Elles demeurent des hypothèses puisque, de toute évidence, je ne suis pas dans la tête de celui qui a proposé la motion.
La première hypothèse voudrait qu'une telle motion ait été déposée suivant une certaine idéologie. On souhaite que les travaux du Parlement soient dorénavant secrets. J'avoue que si tel était le cas, j'aurais un sérieux problème, suffisamment grand pour justifier l'obstruction qu'on est en train de faire, parce que c'est une entorse, et même plus qu'une entorse à tout notre système démocratique.
J'ai l'impression que je vais devenir bilingue en parlant et en écoutant l'interprétation simultanée. Excusez-moi cet aparté.
La deuxième hypothèse qui justifie une telle motion laisse entendre qu'il y a probablement, dans l'esprit de celui qui a déposé la motion, quelque chose qui devait l'irriter dans la façon de travailler de ce comité. La solution qu'il a choisie pour mettre un terme à cette irritation a été de déposer une motion aussi catégorique. Cela constitue aussi un sérieux problème, selon moi.
Je sais bien que nous n'avons pas à expliquer les motions qui sont déposées. Cependant, il me semble encore une fois que si tel était le cas — je rappelle que c'est une hypothèse —, il me serait apparu plus important que l'on discute de ces sources d'irritation autour de la table afin de trouver des solutions. Si on ne souhaite pas discuter autour de la table en public, peut-être pourrait-on le faire au sein du comité directeur, peut-être dans des discussions à l'extérieur. On pourrait peut-être demander une suspension. Si la façon de travailler de notre comité pose vraiment problème, il m'apparaîtrait plus important d'en discuter sur le fond, plutôt que de braquer nos positions et faire en sorte que le comité devienne dysfonctionnel, que le parlementarisme en prenne pour son rhume et que la population, qui nous élit et qui nous paie, ne soit plus desservie. C'est assez problématique.
J'aimerais revenir sur mon ancienne carrière d'enseignant, parce qu'il m'apparaît y avoir un parallèle intéressant à faire. On avait 20 journées pédagogiques par année. En effet, au Québec, l'année scolaire comprend 200 jours: 20 journées pédagogiques et 180 jours de classe pour les élèves. C'est le plus petit calendrier scolaire au monde, je pense, mais ça, c'est un autre débat qui relève d'un autre Parlement. On ne va donc pas s'étendre sur cette question ce matin.
Cela dit, certaines de ces journées pédagogiques étaient absolument passionnantes et je les suivais attentivement. Je dois avouer que certaines autres étaient plus longues, plus pénibles et représentaient moins d'intérêt. Toutes les fois, j'avais le réflexe de me demander combien nous étions. Je faisais le compte et je multipliais par le salaire moyen. Je me disais que cette journée pédagogique coûtait un certain nombre de milliers de dollars de l'heure, pour accoucher d'à peu près rien. J'avoue honnêtement avoir dû faire, dans les dernières semaines, exactement le même calcul, c'est-à-dire compter le nombre d'élus autour de la table et multiplier ce chiffre par le salaire moyen. On sait très bien que mon calcul serait déjà très en deçà de la réalité. On pourrait ajouter tout le personnel qui gravite autour, comme les greffiers, les interprètes, etc.
Avez-vous une idée du montant d'argent que coûte ce comité par heure? Je n'ose pas le révéler parce que mes calculs m'ont vraiment jeté par terre. De plus, je pourrais en oublier, parce qu'il y a plein de fonctions que je ne connais pas, étant donné que je suis en politique depuis peu. Cependant, on sait que cela coûte des centaines de milliers de dollars par heure, et même plus. Cela pourrait probablement atteindre le million de dollars, mais on ne mettra pas de chiffres ce matin. Je voudrais quand même qu'on prenne conscience de cela.
Présentement, il y a du gaspillage. Toutefois, j'hésite à utiliser le mot « gaspiller », parce que pendant que je participe à cette obstruction, je n'ai pas vraiment l'impression de gaspiller le salaire que les électeurs me donnent quand je suis en train de défendre la démocratie dans ses bases les plus strictes et les plus fondamentales. Cependant, je suis triste parce que j'avais l'impression qu'au Canada on avait réglé ce débat depuis longtemps et que la démocratie avait droit de cité partout. Force m'est de reconnaître qu'avec de telles motions, il y a à tout le moins une dérive. On a non seulement le devoir, mais aussi l'obligation commune, de part et d'autre, de stopper cela le plus rapidement possible.
Si vous trouvez que je dis des choses intelligentes pendant cette obstruction, tant mieux. Vous pourrez même me le dire par la suite. La chose la plus importante à dire autour de cette table, malheureusement, ne peut pas sortir de ma bouche. J'invite donc chacun des représentants du parti ministériel à m'interrompre quand bon lui semblera. Il vous suffira de dire que vous souhaitez retirer votre motion, passer à autre chose, régler le problème de fonctionnement s'il y en a un, ou peut-être trouver une solution au sein du comité directeur. Je ne connais pas la solution, mais je sais qu'il en existe une et que ce ne peut pas être de se braquer. C'est plutôt une voie dans laquelle nous sommes malheureusement obligés de nous engager.
Les droits démocratiques sont fondamentaux. Au moment où on voit des gens un peu partout sur la planète défendre la démocratie en payant de leur vie, je trouve c'est bien peu cher payé de ma part que de défendre la démocratie seulement par la parole. Il est certain que je parlerai tant et aussi longtemps que ce sera nécessaire.
Cette obstruction systématique — malheureusement, il s'en fait depuis quelques semaines et même quelques mois — n'est pas un phénomène particulier au Comité permanent des langues officielles. C'est vraiment inquiétant. Par exemple, on a vu les motions d'attribution de temps se multiplier à la Chambre comme probablement jamais on ne l'a vu dans l'histoire du parlementarisme britannique. Je ne suis pas assez vieux pour avoir vu cela, mais au cours des nombreuses années où je me suis intéressé à la politique, jamais je n'ai vu un tel rapport. On est en train de réaliser une première qui est loin d'être reluisante pour la démocratie canadienne.
On a vu les demandes de huis clos se multiplier dans les différents comités. Puis-je dire que le Comité permanent des langues officielles est le pire? Je ne le sais pas. Je ne siège pas à d'autres comités. Toutefois, pour avoir discuté avec des collègues, je sais qu'on n'est très certainement pas le meilleur comité.
Pire encore, je vois maintenant arriver des projets de loi qui visent à restreindre le droit de parole du citoyen sur des études environnementales qui traitent de grands projets de développement urbain. Je dois tristement reconnaître que des deux hypothèses que j'ai émises tout à l'heure, la première est peut-être la plus plausible, finalement. On est peut-être en train de bâillonner les Canadiens sur tous les plans en suivant une approche idéologique, que je ne partage évidemment pas. Je le répète, je souhaite vivement que la première hypothèse ne soit pas la bonne et que la deuxième soit plus probable. Je souhaite qu'on puisse régler rapidement les différends à propos du mode de fonctionnement du comité.
Qui bâillonne-t-on aussi? On bâillonne les médias, qui représentent le quatrième pouvoir après les pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire. Le jour où on enlèvera aux médias le droit de parole, comment les Canadiens et les Canadiennes de partout au pays obtiendront-ils l'information? Ici, j'admets que mon inquiétude est très grande. Les médias rapportent les travaux du Parlement. On sait que tous ne s'y intéressent pas dans la société, et cela, pour des raisons qui les regardent. Or, si l'information n'est même plus disponible, la démocratie est sérieusement en péril.
Je profite du retour de Mme Michaud pour la féliciter de cette participation magistrale au débat qui nous préoccupe. Soyez assurée que j'ai suivi avec attention peut-être pas chacune de vos paroles, mais bien chacun des sujets que vous avez abordés au cours de vos interventions. Je n'ai pas calculé, mais je sais que vous êtes intervenue pendant certainement plus de deux heures. Il m'arrivera peut-être de reprendre certains de vos propos, mais j'essaierai de les faire miens et de les mettre à la sauce « Robert Aubin de Trois-Rivières ». Tout ce que vous avez dit était on ne peut plus pertinent, et j'espère que l'accumulation de nos témoignages fera en sorte que quelqu'un hisse le drapeau blanc et demande de passer à autre chose. C'est la fin de la parenthèse.
J'allais donc dire que ce matin, je joins ma voix à ce concert d'indignation. C'est ce que nous faisons depuis le début de cette obstruction. En fait, j'aurais presque envie de proposer un marathon de l'indignation, parce que le mot « concert » fait trop joli. On pourrait même penser à un téléthon de l'indignation. Ce serait absolument extraordinaire. J'ai l'impression que si on organisait un véritable téléthon de l'indignation pendant la durée de cette obstruction, on réunirait probablement assez de fonds pour régler le déficit des conservateurs et des Canadiens. On pourrait ensuite passer à des mesures nettement positives. Je vous le dis, c'est une idée qui va faire son chemin.
Le téléthon de l'indignation permettrait aussi de recevoir des appels en direct de citoyens et citoyennes de partout au Canada. Ils nous diraient, dans les deux langues officielles, en quoi ils trouvent répréhensible le fait que tous les travaux de comité du comité se tiennent à huis clos, sans que le consentement d'au moins un député de l'opposition soit obtenu. Ce n'est pas la mer à boire, il me semble. Voilà. Je joins donc ma voix à celle des autres.
Comme parlementaires, il faut également être très conscients de ce qu'on fait présentement. Pour régler un problème de fonctionnement, faire avancer une idéologie ou défendre la démocratie, on est, de façon perverse mais c'est ainsi, en train d'alimenter ce que nous tenons le plus à combattre en politique, à savoir le cynisme des électeurs. J'ai vraiment l'impression qu'il ne s'agit pas ici de joueurs du Canadien qui n'ont pas marqué de but depuis un an: nous en marquons, mais dans nos propres buts, et ça s'applique à tous les partis politiques. Ce n'est pas avec la question qui nous préoccupe que nous faisons avancer l'implication citoyenne en politique. Cette situation doit cesser le plus rapidement possible.
Le bureau que j'occupe dans ma circonscription, à Trois-Rivières, est voisin de celui qu'a occupé Maurice Duplessis jusqu'à son décès. Or, je me suis questionné. L'idée de son fantôme m'a effleuré l'esprit. Quand je vois une motion semblable, je me dis, moi qui ne croyais pas aux fantômes, que je devrais peut-être commencer à avoir peur. Il y a, me semble-t-il, un genre de retour assez évident du phénomène de la Grande Noirceur, auquel je ne voudrais pas qu'on revienne et dont on s'était sorti d'une assez belle façon, au Québec. Je pensais qu'on allait pouvoir parler de cela comme d'un fait historique ayant marqué le cheminement d'un peuple et d'une nation, et non comme d'un phénomène cyclique qu'on risque de voir revenir.
Or il appert que la tenue systématique de séances à huis clos pour tous les travaux de comité du comité est un retour à la Grande Noirceur. Combien d'écrivains, de sociologues et de philosophes ont écrit que le meilleur moyen de diriger un pays était de faire en sorte que la population reste ignorante. Cette époque est révolue — c'est du moins ce qu'il me semblait —, et nous avons par conséquent l'obligation de tenir nos discussions en public, sauf dans le cas d'exceptions raisonnables, sur lesquelles tous les membres du comité s'entendent. Il s'agit en effet de situations où non seulement nous souhaitons que les discussions se fassent à huis clos, mais où il est important que ça se fasse de cette façon.
J'ai quitté l'enseignement le 2 mai dernier pour me joindre à ceux qui font de la politique. Or je dirais que les deux mois précédant mon départ ont probablement été la période la plus pertinente et la plus intéressante de ma carrière d'enseignant. En effet, le professeur qui était devant la classe était devenu autre chose qu'un enseignant, en l'occurrence un politicien réel. À l'époque, on ne savait pas s'il serait élu, mais il était déjà un politicien, dans la mesure où il faisait campagne. J'ai toujours dit que cette carrière en politique, qui m'est offerte au moins pour quatre ans, arrivait à un moment extraordinaire de ma vie. Je ne cherche pas à faire carrière à tout prix dans ce domaine, mais je veux rendre service aux citoyens. Dieu sait ce qui arrivera dans quatre ans, si je serai toujours député, si je serai réélu ou si je vais retourner à l'enseignement, mais peu m'importe puisque toutes ces occasions sont en soi intéressantes. Faire le travail que je fais comme politicien est absolument passionnant et j'ai envie de poursuivre ce travail tant et aussi longtemps qu'il me sera possible de le faire. Toutefois, retourner à l'enseignement ne constituerait pas une démotion. Je retournerais à l'enseignement avec une expérience hors du commun que bien peu d'enseignants peuvent se targuer d'avoir.
Quand je vois ce que nous sommes en train de faire depuis quelques semaines — cela a commencé avant Noël —, je vous avoue que j'ai une sérieuse inquiétude. Pendant des mois, des semaines et des années, j'ai tenté d'inculquer à des adolescents l'importance de s'impliquer dans la société civile, l'importance de s'impliquer en politique peu importe leur allégeance, l'importance de sortir et d'aller voter, l'importance d'être partie prenante de cette société et de cette démocratie. Qu'allez-vous me permettre de leur dire, si je reviens à l'enseignement? J'enseignais au secondaire à des adolescents de 15 à 17 ans qui se font une idée de la société dans laquelle ils vivent et du monde dans lequel ils vivent. Beaucoup de ce qu'ils reçoivent provient de la bouche des adultes qui les entourent. Parfois c'est très pertinent, parfois pas du tout.
Je me suis battu pendant des années pour leur dire qu'ils avaient un réel pouvoir sur le devenir de leur société. Si, comme élu, je ne retrouve plus de pouvoir sur la Colline du Parlement, comment voudrez-vous un jour que je retourne à l'enseignement et que je continue à parler de notre monde politique avec crédibilité et en appuyant les jeunes carrières? Vous êtes en train de me couper l'herbe sous le pied carrément, et je vois difficilement...
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