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NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 046 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 12 juin 2012

[Enregistrement électronique]

(1205)

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte.
    Nous devons tout d'abord examiner rapidement une question relative aux travaux du comité, soit l'affectation d'un budget pour les témoins qui ont comparu dans le cadre de notre étude.
    Le montant total est de 17 950 $. Est-ce que quelqu'un pourrait proposer une motion pour que le comité adopte le budget proposé de 17 950 $ pour son étude du concept stratégique de l'OTAN?
    Est-ce que quelqu'un souhaite intervenir? Comme personne ne se manifeste, qui est en faveur de la motion?
    (La motion est adoptée.)
    Merci.
    Comme les votes nous ont retardés, nous économiserons du temps en faisant comparaître ensemble les deux témoins que nous entendrons alors que nous poursuivons notre étude du concept stratégique de l'OTAN et du rôle du Canada en matière de coopération de défense internationale, conformément à l'article 108(2) du Règlement. Nous accueillons donc Jack Granatstein et Ernie Regehr.
    Bienvenue à tous deux.
    M. Regehr est un chercheur universitaire de l'Institute of Peace and Conflict Studies at the University of Waterloo.
    Nous sommes impatients d'entendre votre exposé.
    Auriez-vous l'obligeance de faire vos exposés et de ne pas prendre plus de 10 minutes?
    Monsieur Granatstein, pourriez-vous prendre la parole en premier?
    Merci, monsieur.
    Mesdames et messieurs les députés, je vous remercie de me donner l'occasion de comparaître devant vous.
    Selon moi, votre comité peut jouer un rôle fort utile au pays en examinant la relation du Canada avec l'OTAN. Cette alliance est-elle toujours pertinente? Le Canada est-il toujours utile à l'alliance? Si les réponses à ses questions ne sautent pas aux yeux — et je ne crois pas que ce soit le cas —, alors nous devrions nous demander si l'engagement du Canada à l'égard de l'OTAN devrait être accru, maintenu, réduit ou même rompu.
    Nous ne nous sommes pas posé ces questions depuis l'arrivée au pouvoir de Pierre Trudeau en 1968. Il est plus que temps de se les poser de nouveau. Pourquoi? Parce que les interventions de l'alliance en Afghanistan ont été pour le moins difficiles. Des pays, dont le Canada, ont, jusqu'à la fin de 2005, imposé des limites à ce que leurs troupes pouvaient faire. De nombreux pays membres ont envoyé peu ou pas de troupes, et n'ont pu être convaincus de faire davantage. La structure de commandement de l'alliance s'est parfois révélée inefficace, et les États-Unis ont, pour un temps, refusé catégoriquement de collaborer avec la structure de la FIAS de l'OTAN. Ces lacunes ont eu de graves conséquences tactiques et ont, selon moi, entraîné des pertes inutiles chez les soldats canadiens.
     Je traite de certaines de ces questions avec David Bercuson dans un document que nous avons préparé pour l’Institut canadien de défense et des affaires étrangères.
    Certains avanceront que l'opération menée en Lybie l'an dernier a prouvé que l'OTAN pouvait travailler efficacement. Je ne crois pas que ce soit le cas. Tout d'abord, la France a pour ainsi dire forcé la main de l'OTAN en lançant ses propres frappes aériennes. En outre, même si bien des pays membres ont accompli du bon travail, notamment nos forces aériennes et navales, nombre d'entre eux ont refusé de participer ou ont fortement limité le rôle de leurs forces. Ils disposaient de trop peu d'aéronefs et de munitions, et manquaient de pilotes. La structure de commandement, dirigée de main de maître par un général canadien, n'en était pas moins affligée par un commandement, un contrôle et des lignes de communication incertains, des lacunes qu'on connaît bien. Même si elle a réussi à évincer Gadhafi, l'opération a surtout mis en lumière la faiblesse militaire des pays européens membres de l'alliance.
    Le problème s'aggrave et continuera de le faire, car la situation financière du monde et de la communauté européenne oblige les membres de l'alliance à sabrer dans leurs budgets de défense. La « défense intelligente » de l'OTAN est supposée favoriser une utilisation plus sensée et mieux coordonnée des ressources militaires des membres. L'idée a du bon, mais bien peu de choses laissent espérer que l'OTAN, après plus d'un demi-siècle, réussira à l'appliquer. En réalité, si l'Europe le voulait, elle pourrait parfaitement se défendre sans le concours de l'Amérique du Nord. L'URSS n'est plus, et la Russie, bien qu'elle soit potentiellement menaçante, ne deviendra probablement pas une menace sérieuse pour au moins 10 ans. Aucune autre menace ne pointe à l'horizon. L'Europe est un riche continent, même dans la situation actuelle, et elle peut et devrait faire ce qu'elle croit bon de faire pour protéger ses intérêts.
    À l'instar du Canada, les États-Unis tournent leur attention vers le Pacifique. C'est de là que viendront les défis, notamment l'émergence de la Chine en tant que puissance militaire, économique et politique. Il n'est pas question de guerre, mais il convient de mieux se préparer afin d'être fin prêt. Compte tenu des difficultés financières des États-Unis et du Canada, il y a lieu de se demander si nous pouvons porter attention simultanément à l'Europe et à l'Asie. Je crois que non.
    Je ne propose pas que le Canada quitte l'OTAN. L'alliance nous unit à nos amis et sert nos intérêts supérieurs. Mais peut-être devrions-nous réduire notre intérêt et notre engagement envers l'OTAN, comme nous l'avons d'ailleurs fait en nous retirant de certains programmes militaires de l'alliance. Il nous faudrait peut-être chercher de nouveaux partenaires avec qui travailler en Amérique du Nord. Le Royaume-Uni et la France semblent disposés à défendre les intérêts occidentaux, bien que l'arrivée au pouvoir de Hollande à Paris puisse refroidir les ardeurs. Les Australiens et les Néo-Zélandais ont envoyé d'excellentes troupes en Afghanistan et sont des partenaires historiques du Commonwealth. Dans l'avenir, la République de Corée, le Japon, l'Inde, Singapour et d'autres pays voudront peut-être se joindre à ce que nous pourrions qualifier d'anglosphère élargie.
(1210)
    Je n'entrevois pas de nouvelle alliance officielle dans l'avenir immédiat. Il se peut toutefois que de nouvelles coalitions voient le jour entre des pays intéressés, des démocraties capables de travailler ensemble, fortes d'un intérêt commun à protéger et à promouvoir leurs valeurs communes.
    J'étudie l'histoire et non l'avenir. Les historiens ont assez de difficultés à tenter de comprendre ce qui s'est déjà passé sans chercher à prévoir ce qui pourrait arriver demain. Il revient au gouvernement et aux députés de planifier pour l'avenir. Votre comité, mesdames et messieurs, peut contribuer à cet effort en réfléchissant dans une perspective d'avenir.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Granatstein.
    Monsieur Regehr, vous avez la parole.
    Je vous remercie de m'avoir invité et de me donner l'occasion de comparaître.
    J'ai préparé un document d'information. Je crois comprendre qu'il vous a été distribué. Dans les prochaines minutes, j'aimerais en résumer les principaux points. Je m'attarderai exclusivement au volet nucléaire du concept et de la position stratégiques de l'OTAN, comme je l'ai fait dans le document que j'ai déposé.
    Même si certains ne sont pas d'accord, le moment est encore propice pour favoriser le désarmement nucléaire. Le concept stratégique de l'OTAN de 2010 témoigne en partie de l'attention et du soutien accrus que porte la communauté internationale à l'établissement d'un monde exempt d'armes nucléaires.
    Le paragraphe 26, qui porte essentiellement sur la maîtrise des armements, forme un contraste frappant avec le concept stratégique de 1999. Ce dernier indiquait à grand renfort de mots que les armes nucléaires en territoire européen étaient essentielles à la sécurité de l'Europe, insistant pour dire que ce déploiement demeurait crucial pour préserver la paix et que les armes nucléaires en Europe constituaient un lien politique et militaire primordial entre les membres européens et nord-américains de l'alliance.
    Rien de tout cela ne figure dans le concept stratégique de 2010, qui ne fait qu'indiquer que l'OTAN continuera de disposer de « tout l’éventail des capacités nécessaires pour assurer la dissuasion et la défense », sans insister explicitement sur les capacités nucléaires basées en Europe.
    Il semble toutefois qu'on hésite encore à joindre le geste à la parole. La pression croissante qui s'exerce pour mettre fin au déploiement nucléaire en Europe s'avère une question politique épineuse pour l'OTAN. La question devrait être claire à un égard: les articles I et II du Traité de non-prolifération des armes nucléaires interdisent expressément le déploiement d'armes nucléaires dans des États ne possédant par de tels armements. Les États-Unis et l'OTAN sont actuellement les seuls à ne pas respecter ces deux articles.
    On estime que 200 bombes à chute libre B61 sont présentement déployées dans cinq pays membres de l'OTAN, état de fait qu'on justifie en disant que cet arrangement a été conclu avant la date d'entrée en vigueur du traité en 1970, comme c'est le cas d'un arrangement semblable de l'Union soviétique en vertu du Pacte de Varsovie. La situation a été tolérée dans le contexte de la guerre froide, mais cette tolérance tire à sa fin.
    Dans le cadre du processus d'examen du Traité de non-prolifération des armes nucléaires, on ne cesse de réclamer que tous les États possédant l'arme nucléaire prennent des mesures pour réintégrer et conserver ces armes sur leur territoire, éliminer la capacité de les déployer rapidement dans d'autres pays, et mettre fin à la formation dans le domaine nucléaire dans les pays n'ayant pas d'armes nucléaires.
    L'Allemagne a demandé la fin des déploiements nucléaires sur son territoire, notamment aux fins de conformité au traité de non-prolifération. On défend maintenant les déploiements nucléaires en Europe comme étant largement des symboles de solidarité politique. On s'entend en effet pour dire que les bombes B61 n'ont pas d'utilité militaire.
    Autrement dit, les États-Unis et les États hôtes actuels — l'Allemagne, les Pays-Bas, la Belgique, l'Italie et la Turquie — pourraient se conformer au traité sans que leur sécurité en pâtisse.
    Les États européens ayant des bombes B61 doivent tous décider s'ils remplacent l'aéronef de transport et de largage; cette série de décisions nationales en matière d'approvisionnement pourrait mettre fin au déploiement par défaut. L'Eurofighter, l'appareil de remplacement que pourrait retenir l'Allemagne, n'a pour l'instant pas de capacité nucléaire. Les Belges, les Italiens et les Turcs envisagent d'acquérir le F-35.
    Dans chaque cas, il en coûterait 5 à 10 millions de dollars de plus par appareil pour y ajouter la capacité nucléaire. Les Belges ne pensent pas acheter de nouvel avion de combat, ce qui met fin à leur rôle dans le domaine nucléaire.
    Si les coûts financiers supplémentaires de l'ajout de la capacité nucléaire causeront des soucis dans tous ces pays, le prix politique afférent à une décision de s'engager à assumer un rôle nucléaire au cours des 30 à 40 années de service des nouveaux appareils en causera encore davantage.
    Pendant ce temps, les États-Unis comptent moderniser l'ogive B61 pour notamment modifier l'empennage afin d'améliorer la justesse de tir sur les cibles renforcées. Si on associe la plus grande précision de l'ogive B61 au nouvel avion de combat furtif F-35 basé en Europe, la Russie pourrait y voir une augmentation substantielle de la menace nucléaire.
(1215)
    Même ainsi, la Russie ne justifie pas la possession d'armes nucléaires non stratégiques principalement pas la présence de bombes nucléaires américaines en Europe. Elle s'inquiète davantage de l'écrasante supériorité des forces conventionnelles de l'OTAN. La Russie effectue moins de 6 p. 100 des dépenses militaires mondiales, alors que les pays de l'OTAN en font environ 60 p. 100. Tant que la Russie considérera cette immense force conventionnelle comme une menace sérieuse à ses intérêts régionaux, elle résistera à l'élimination finale de ses armes nucléaires tactiques. Vingt ans se sont maintenant écoulés depuis la fin de la guerre froide, et il est plus que temps de remettre en question les soupçons que l'OTAN et la Russie ont l'un envers l'autre et de s'y attaquer sérieusement.
    Sachez que dans le cadre des démarches pour constituer une véritable communauté oeuvrant à la sécurité mutuelle dans la région de l'OSCE, le SMA, Politiques, du ministère de la Défense nationale a déclaré, lorsqu'il a témoigné devant le comité il y a quelques semaines, que l'OTAN n'a eu de cesse de dire à la Russie que l'alliance n'était pas contre elle. Voilà qui a marqué un point important dans l'intérêt de la sécurité mutuelle. Le ministre de la Défense de Lithuanie a toutefois affirmé le contraire au comité, à peine une ou deux semaines plus tard. La Lithuanie, les pays d'Europe de l'Est et les États baltes veulent que la mission de l'OTAN vise principalement à assurer la défense commune contre la Russie. Le ministre a indiqué que leur principale crainte était l'intention de la Russie de dominer la région et les États baltes.
    L'OTAN n'a donc pas envoyé un message cohérent à la Russie et n'a pas toujours agit conformément aux objectifs de sécurité mutuelle. La modernisation de la B61 le montre bien, tout comme la défense contre les missiles balistiques. Il est vrai que la Russie tend à tenir des propos exagérés sur les répercussions que pourrait avoir le système européen de défense contre les missiles balistiques sur sa sécurité et sur la fiabilité de ses effets dissuasifs, mais il est aussi évident que ce système nuit considérablement aux efforts déployés pour repartir les relations globales entre la Russie et l'OTAN sous de nouveaux auspices. Certains, comme le ministre lithuanien, considèrent que cette initiative s'inscrit dans la défense intelligente, mais nombreux sont les experts qui se demandent ce qu'il y a d'intelligent dans un déploiement militaire fondé sur une technologie non éprouvée et très controversée, mise en oeuvre contre une menace incertaine, le tout allant à l'encontre d'un objectif principal de l'OTAN en matière de contrôle des armements, soit celui de l'élimination des forces substratégiques.
    Tout cela pourrait inspirer des orientations stratégiques constructives au Canada. Je ne vous énumérerai pas toutes celles que j'ai proposées dans le document, mais nous pourrions peut-être en parler au cours de la période de discussion.
    Merci.
(1220)
    Merci, messieurs. Je vous suis reconnaissant d'avoir tous les deux réussi à parler moins de 10 minutes.
    Le temps nous étant compté, nous ferons des interventions de cinq minutes pour permettre au plus grand nombre possible de membres de poser des questions.
    Monsieur Harris, voudriez-vous lancer le bal, je vous prie?
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les deux témoins de comparaître aujourd'hui pour nous faire part de leurs opinions.
    Tout d'abord, monsieur Granatstein, j'ignore si vous avec délibérément cherché à être provoquant, mais votre réputation vous précède. Il me semble qu'il ne convient pas que le Canada s'unisse à d'autres pays pour créer une alliance militaire constituant une sorte d'« anglosphère » mondiale, puisqu'il est un État bilingue aux multiples peuples fondateurs.
    Nous avons évidemment un grand nombre d'intérêts et de valeurs en commun avec les pays que vous avez évoqués. Cependant, la paix et la coopération internationales doivent dépendre des efforts que déploie le Canada pour coopérer, entretenir de bonnes relations et établir des alliances stratégiques avec les Lithuaniens, les pays de l'OTAN et d'autres pays membres des Nations Unies qui utilisent peut-être nos connaissances pour tenter de les aider à tirer parti de nos compétences et nos valeurs.
    Essayez-vous d'être provocant ou pensez-vous vraiment ce que vous dites?
    J'ai fait attention de ne pas dire que nous devions quitter l'OTAN. Ce que je disais, c'est que, si le Pacifique nous intéresse, c'est un peu en dehors des opérations courantes de l'OTAN. Nous devons peut-être chercher à collaborer avec des pays qui partagent nos valeurs dans cette partie du monde. L'Australie et la Nouvelle-Zélande sont des exemples évidents. La Grande-Bretagne et la France ont toujours des intérêts dans la région. La Corée, le Japon, l'Inde, le Singapour et d'autres pays vont peut-être se rendre compte qu'ils partagent les intérêts de l'Occident, compte tenu de l'agressivité de la Chine et du contrôle qu'elle cherche à exercer dans la mer de Chine méridionale et dans d'autres régions du Pacifique. Je ne dis pas que nous devons former une alliance militaire, mais nous devons tenir des discussions avec d'autres pays.
    Il y a aussi l'OTASE.
    Cette organisation n'existe plus.
    Nous allons en rester là. Vous avez raison.
    Je n'ai pas beaucoup de temps. C'est pourquoi je vais rapidement passer à une autre question, monsieur Granastein.
    Monsieur Regehr, merci de votre analyse et de signaler les importantes différences entre les politiques nucléaires des concepts stratégiques de 1999 et de 2010.
    Votre mémoire suggère certaines mesures que le Canada doit prendre. Concernant l'OTAN, pouvez-vous donner deux ou trois mesures que le Canada doit encourager pour que le nouveau concept évolue, étant donné que nous semblons avoir adopté une nouvelle approche? Quelles sont les deux ou trois mesures que nous devons promouvoir?
(1225)
    Je pense que le déploiement d'armes nucléaires en Europe devient un problème important, parce que les acquisitions vont bon train. En fin de compte, c'est avant tout une décision qui revient aux Européens, mais je pense que le Canada doit indiquer clairement quelle est sa position et dire que ces armes ne sont plus utiles, même si elles ont pu l'être. La communauté internationale, qui tente d'éviter la prolifération ailleurs, comme en Iran et en Corée du Nord, doit se concentrer sur la politique qui poursuit le déploiement d'armes nucléaires dans les pays qui ne possèdent pas l'arme nucléaire et qui ont signé le TNP. Je pense que cette politique est très problématique et que nous devons insister sur l'adhésion ferme à l'esprit et à la lettre du TNP.
    À mon avis, les relations avec la Russie, en ce qui a trait à la modernisation des têtes explosives que planifient les États-Unis et le déploiement de la défense antimissiles balistiques, sont aussi très préoccupantes. L'Allemagne, la Norvège et certains États ont demandé que le Conseil OTAN-Russie donne un second souffle aux discussions sur la coopération avec la Russie. Je pense que nous devons mettre l'accent sur une interruption ou, à tout le moins, un ralentissement du déploiement de la défense antimissiles balistiques jusqu'à ce que nous sachions si cette forme de défense est la bonne et si elle peut s'associer à la collaboration avec la Russie, au lieu de sembler s'opposer aux intérêts de la Russie.
    Merci. Votre temps est écoulé.
    Monsieur Alexander.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Merci aux témoins de leur présence et de s'être adaptés à l'horaire imprévisible d'aujourd'hui. Merci à vous deux de vos exposés.
    Je vais commencer par M. Granastein. Vous êtes historien et vous voyez ces questions avec du recul. Vous avez parlé de 1968 et d'autres dates marquantes concernant notre point de vue sur l'OTAN et notre participation renforcée ou affaiblie.
    Je pense que bien des membres du comité sont surpris par le pourcentage du PIB que le Canada consacre à la défense, qui ne rivalise pas avec celui du Royaume-Uni ou de la France, sans parler des États-Unis depuis le début des années 1960. Il y a eu un long déclin dans les années 1970, une certaine reprise dans les années 1980, une autre baisse, puis une faible augmentation.
    Pouvez-vous donner des précisions sur les relations que nous avons avec l'OTAN, selon vous? Notre stratégie est-elle déphasée à l'heure actuelle, par rapport aux autres pays de l'OTAN? Devons-nous réellement réexaminer en profondeur les principes fondamentaux? Quelles sont nos intentions générales en matière de dépenses?
    Selon moi, nous ne dépensons pas assez pour maintenir les activités que nous devons tenir. Nous avons réussi à combler certains besoins militaires, mais nous n'avons toujours pas assez de personnel. Il nous manque encore beaucoup de matériel dans certaines régions.
    En fait, nous ne faisons pas partie de l'OTAN, sauf quand nous choisissons de participer aux opérations. Même si des officiers d'état-major canadiens travaillent dans l'organisation, nous nous sommes retirés de programmes modestes mais essentiels à l'OTAN, auxquels nous participions jusqu'à récemment.
    Nous avons bien sûr collaboré avec l'OTAN en Afghanistan et en Libye, mais on pourrait dire que c'était des guerres choisies. Nous avons participé aux opérations de l'OTAN, parce que c'était dans notre intérêt.
    D'après moi, c'est l'état de nos relations avec l'OTAN en ce moment. Nous choisissons les guerres qui nous conviennent. Nous gardons nos distances, mais nous prenons part aux opérations militaires ou aux alliances qui servent nos intérêts. C'est une question de choix.
     Je crois que, si un conflit survient selon l'article 5 et qu'on met en doute la solidarité qui règne au sein de l'OTAN, nous allons participer aux opérations. Nous devons comprendre que ça pourrait se produire dans un avenir assez rapproché.
    On a laissé entendre que la Turquie pourrait demander l'aide de l'OTAN pour se défendre, compte tenu de ce qui se passe en Syrie. Je présume que nous répondrions à l'appel. Mais la façon dont aiderions ce pays, c'est une autre question. J'imagine que le Canada déploierait un navire, mais selon moi, c'est improbable pour l'instant qu'il envoie beaucoup de militaires sur le terrain.
(1230)
    Le concept stratégique de l'OTAN prévoit trois grands rôles. Il y a la défense collective, le rôle historique de l'OTAN, et la gestion des crises, les guerres ou les missions choisies. Comme on l'a vu, la participation n'est pas la même selon les pays membres. Mais il y a aussi la sécurité coopérative.
    J'aimerais connaître vos commentaires sur la question, monsieur Granastein. Le concept stratégique de l'OTAN fait état de l'occasion de travailler avec des partenaires partout dans le monde pour façonner les opérations à l'avenir, mais cette organisation de sécurité ne permet l'entrée que de pays européens.
    Dans quelle mesure l'OTAN peut-elle relever les défis de sécurité en Asie et partout dans le monde? Jusqu'à quel point devons-nous poursuivre nos efforts dans le cadre d'une autre entente régionale sur la sécurité?
    Comme je l'ai souligné dans mon exposé, l'OTAN n'est pas forcément la meilleure organisation pour régler les problèmes dans le Pacifique. Ce n'est pas tous les pays de l'OTAN qui ont des intérêts dans le Pacifique et qui s'intéressent à cette question.
    Nous avons bien sûr une très longue côte et bon nombre d'intérêts qui influencent le Pacifique. Cette région est bien plus importante pour nous que pour la plupart des pays de l'OTAN. Voulons-nous qu'une action collective dans le Pacifique dépende de la Lituanie?
    M. Chris Alexander: Sans doute que non.
    M. Jack Granastein: Probablement pas, cette approche ne nous convient pas.
    Il me reste deux secondes...
    Non, votre temps est écoulé. Je dois être diligent et juste.
    Monsieur Trudeau, la parole est à vous.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je devais avoir sept minutes avec chacun d'entre vous, mais j'ai finalement cinq minutes avec vous deux. Je vais donc poser mes questions assez rapidement, puis vous pourrez répondre tous les deux.
    L'OTAN a bien sûr été établie en grande partie en réaction aux pressions du bloc soviétique, ou elle est devenue ce qu'elle est en raison de la guerre froide. Sauf certaines exceptions comme la Turquie et la Syrie, ce modèle a été supplanté en grande partie par des préoccupations...
    Même les mesures contre la Libye ne visaient pas le pays lui-même, mais un régime et une personne en particulier. On dirait que la guerre entre les États est une idée révolue... c'est à tout le moins le cas présentement. Ce contexte influence les activités de l'OTAN, mais aussi le désarmement nucléaire, comme vous l'avez indiqué, monsieur.
    J'aimerais tout d'abord que vous parliez de la façon dont nous devrions gérer la transition de la guerre entre les États, l'ancien modèle de maintien de la paix, aux mesures antiterroristes, à la promotion de la sécurité et aux guérillas entre diverses factions dans les États.
    Ensuite, vous avez beaucoup parlé de la dissuasion nucléaire... mais aussi des organisations non étatiques qui commencent à avoir accès à des armes nucléaires et des effets sur les relations. Vous avez fait une certaine association avec les armes classiques, les armes chimiques et biologiques et les bombes à dispersion, qui entraînent des conséquences plus importantes pour la sécurité mondiale.
    Cette question s'adresse aux deux témoins.
(1235)
    Merci.
    La menace que présente l'acquisition d'armes nucléaires ou même de la matière nucléaire par des acteurs non étatiques a grandement nui au désarmement et à l'adhésion plus stricte au TNP. Lorsque Kissinger, Sam Nunn et George Schultz ont fait leurs déclarations sur le désarmement nucléaire, c'est un des aspects qui les préoccupaient beaucoup.
    Nous avons compris qu'il était impossible d'avoir une communauté internationale stable, dont certains pays ont des armes nucléaires depuis longtemps alors que d'autres n'en ont pas, dans un monde où le matériel et le savoir nucléaires sont largement répandus. Les pays industriels émergents comme l'Iran, qui ont des universités et des chercheurs et qui ont accès au matériel nucléaire, peuvent fabriquer des armes nucléaires. Ils ont des relations privilégiées avec les groupes non étatiques. C'est le principal facteur dissuasif.
    En passant, le fait d'installer de petites bombes dans les aérodromes partout en Europe n'est sans doute pas la meilleure décision sur le plan de la sécurité.
    Concernant l'autre partie de votre question, si vous permettez, l'OTAN se voit toujours comme un modèle de la guerre froide axé sur les conflits entre deux États. C'est pourquoi elle a été mise sur pied, et je pense que cette mentalité prévaut encore dans une large mesure.
    Les commentaires du ministre des Affaires étrangères de la Lituanie que mon collègue a mentionnés laissent entendre que certains membres de l'OTAN pensent de cette façon. D'ailleurs, un certain nombre d'entre eux ont sans doute raison. Si je vivais en Lituanie, j'adopterais ce point de vue de manière très ferme.
    Certaines choses ne changent pas, mais les technologies de guerre pourraient changer du tout au tout. Nous parlons maintenant de cyberguerre. C'est un aspect auquel l'OTAN et tous ses membres doivent accorder beaucoup plus d'attention, dans leur propre intérêt. C'est clair que la guerre de l'information peut entraîner des conséquences extraordinaires pour la société civile, sans parler des régimes militaires.
    Avant le début de la séance, je parlais avec M. Regehr des F-35 et du fait que la Chine aurait déjà volé une bonne partie de la technologie que ces avions comportent.
     [Note de la rédaction: inaudible]
    Nous pouvons peut-être les payer moins cher.
    Il y a désormais bien des manières de faire la guerre. Je pense que l'OTAN doit se préparer en conséquence.
    Merci. Votre temps est écoulé.
    Monsieur Chisu.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci beaucoup aux témoins de leur présence aujourd'hui.
    Je vais situer le contexte. Lorsque l'OTAN a été fondée en 1949, le Canada jouait un rôle majeur. Il avait participé aux deux guerres mondiales et, à l'aide de l'OTAN, il a établi la paix en Europe. Par la suite, deux générations n'ont pas participé à une guerre en Europe, sauf celle des Balkans, mais l'OTAN a maîtrisé la situation. De nos jours, l'OTAN est composée de 28 pays, dont la plupart des pays d'Europe de l'Est faisaient partie du Pacte de Varsovie.
    Je viens d'Europe de l'Est et je sais très bien que l'OTAN constitue toujours une garantie contre la Russie, qui veut maintenir son hégémonie et son influence politiques en Europe de l'Est.
    Que peut faire le Canada pour continuer de jouer le rôle qu'il avait lors de la création de l'OTAN? Pensez-vous que nous avons toujours notre mot à dire dans les activités de l'OTAN?
(1240)
    L'OTAN a été créée il y a plus de 60 ans. J'ai plutôt tendance à penser que la Russie représente une sorte de menace pour l'Europe de l'Est, mais différente de ce qu'elle était pendant la plus grande partie des 60 dernières années.
    Est-ce que demain la Russie est susceptible d'envahir l'Europe de l'Est? C'est très peu probable. Pourrait-elle le faire dans 10 ans? Peut-être. Mais, au fond, c'est sûrement un problème européen.
    Cela intéresse le Canada, mais moins, je dirais, qu'il y a 60 ans, quand une guerre froide mondiale se préparait. D'après moi, les Russes ne sont pas susceptibles d'employer ce type de méthode, à l'échelle mondiale, dans un proche avenir.
    Je vous ai interrogé au sujet de la Russie, parce qu'elle est notre voisine du côté de l'Arctique. Nous ne pouvons donc pas dire qu'elle ne nous concerne pas.
    Si on se retrempe dans la mentalité russe de l'entre-deux-guerres, la Russie s'est dotée d'une grosse machine industrielle, et personne n'y croyait. Mais, maintenant, ce grand pays commence à se sentir coincé entre l'OTAN, à l'ouest, et la Chine, à l'est. Elle fera quelque chose. Nous devrons réagir. Du côté de l'Arctique, elle est notre voisine, et l'Arctique est en train de s'ouvrir. Nous ne pouvons pas simplement l'ignorer.
    Qu'en pensez-vous?
    Jamais je ne conseillerais de négliger les Russes. Je conseillerais d'évaluer convenablement les menaces qu'ils peuvent représenter et y réagir de la bonne façon. Nous avons peut-être une idée différente de la nature de ces menaces. C'est tout.
    Je pense que, pour le moment, nous sommes beaucoup plus susceptibles de coopérer avec les Russes que de les combattre dans l'Arctique.
    Vous parlez de la question nucléaire. Quand le pacte de Varsovie, dans les années 1990... les pays du pacte et la Russie employaient un armement classique, et la situation nucléaire était équilibrée. Maintenant, l'équilibre est rompu. La supériorité des armes classiques appartient à l'OTAN, et il y a un déséquilibre dans l'armement nucléaire.
    Comment, d'après vous, le désarmement nucléaire peut-il se faire, dans cette situation, quand il est perçu comme une menace des deux côtés? C'est une menace inversée.
    La ministre lithuanienne — je la cite peut-être trop — a aussi dit, de façon tout à fait explicite, après avoir parlé des sujets d'inquiétude que représente la Russie, qu'il n'existe aucune menace militaire russe.
    Qu'en est-il de Kaliningrad?
    Ce qui risque de s'y trouver est préoccupant.
    Mais c'est ce qu'elle a dit.
    J'ai cité Karl Deutsch. Sa définition de communauté fondée sur la sécurité commune est un groupe d'États pour qui l'idée de se faire la guerre entre eux pour résoudre leurs problèmes est vraiment inconcevable.
    Cette idée est inconcevable pour la plupart des communautés euro-atlantiques. Elle n'est probablement pas absolument inconcevable, mais je pense que le mouvement vers le désarmement vise à trouver des façons de réduire la posture de menace des deux façons et de trouver des façons de s'occuper, en commun, des questions d'intérêt mutuel, comme nous dans l'Arctique.
    Merci. Votre temps est écoulé.

[Français]

    Madame Moore, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Regehr, vous êtes un spécialiste du désarmement. L'OTAN, dans son concept stratégique, s'engage à oeuvrer pour le contrôle des armes, le désarmement et la non-prolifération. J'aimerais connaître votre opinion sur les efforts de l'OTAN pour le contrôle des armes et savoir quels sont, pour l'OTAN, les principaux obstacles au contrôle des armes.
    J'ai une autre question sur le contrôle des armes. Quelques-uns des plus gros exportateurs d'armes dans le monde viennent de pays membres de l'OTAN, lesquels pays exportent des armes, notamment, vers des pays d'Afrique du Nord, du Maghreb et du Moyen-Orient, comme la Libye, l'Algérie, la Syrie, le Yémen et l'Égypte.
    Jusqu'à récemment, le Canada vendait des armes à la Libye, à l'Algérie ou encore à l'Égypte. On ne pouvait pas prévoir le Printemps arabe ni que des milliers de civils seraient tués avec des armes fabriquées au Canada, aux États-Unis ou en France. Cependant, on sait que les dirigeants de ces pays, par exemple le colonel Kadhafi, ne se sont pas transformés en dictateurs en un jour. On savait probablement depuis un certain temps que les armes vendues pouvaient servir à tuer ou à emprisonner injustement des civils depuis de nombreuses années.
    Quelle position le Canada devrait-il adopter par rapport à ce problème? Quelle position notre pays devrait-il défendre ou essayer de mettre en avant à l'OTAN sur le contrôle des armes?
(1245)

[Traduction]

    Merci beaucoup de votre question.
    Je pense que nous devons comprendre que l'OTAN, collectivement, n'a aucun rôle important dans les négociations directes sur le contrôle des armes. Son rôle peut être important pour le climat des négociations, mais ces négociations sont soit beaucoup plus étroites, bilatérales, entre la Russie et les États-Unis, soit beaucoup plus générales, multilatérales, dans le contexte de l'ONU. Donc, en tant qu'organisation, l'OTAN, d'après moi, ne joue pas de rôle direct, mais il agit sur l'environnement.
    Il faut mentionner deux obstacles très importants au contrôle des armes, que j'ai déjà mentionnés: la défense antimissiles balistiques et le déséquilibre conventionnel des forces entre l'OTAN et la Russie. Ils deviendront très importants à mesure que les niveaux diminueront. Dans le contrôle des armes stratégiques, les niveaux diminueront. La Russie se trouve déjà sous les niveaux d'armes déployées que prévoit le traité START. La diminution se poursuivra donc. Mais je pense que la défense antimissiles balistiques et le déséquilibre conventionnel gagneront d'autant en importance. On peut s'occuper de la défense antimissiles balistiques, soit en s'arrêtant, soit en coopérant très ouvertement avec la Russie, la seule solution à mon avis. Pour le déséquilibre conventionnel, il faut notamment réinventer les rapports entre l'OTAN et la Fédération russe. Je pense que c'est la solution qui s'impose.
    Je suis heureux de parler un peu des armes classiques et de leur exportation, en partie parce que les Nations Unies entament, en juillet, des négociations sur un traité relatif au commerce des armes. Le Royaume-Uni, notamment, s'en est fait un champion. Depuis quelques années, un comité préparatoire tient des réunions en vue d'un tel traité, et cela se fera connaître cet été, au moment des négociations. Je pense qu'elles seront très difficiles, en raison de la large gamme d'intérêts économiques et politiques en jeu dans l'exportation de marchandises militaires. Mais il est très important qu'on tente d'établir certaines normes internationales de retenue. Le Canada a été, en grande partie, le partisan d'un tel traité, et je pense qu'il doit persévérer. Certaines questions, comme les critères fondés sur les droits de la personne, par exemple, doivent jouer un rôle important, et le Canada doit les promouvoir.

[Français]

    Merci beaucoup. Votre temps est écoulé.

[Traduction]

    Madame Gallant, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Granatstein, vous avez fait rapidement allusion aux F-35. Je me rappelle un article publié en avril, sur le coût de ces appareils. On y lisait que, désormais, il fallait faire entrer en ligne de compte non seulement le coût de l'appareil lui-même, mais celui des pièces ainsi que de l'équipement ajouté et de l'entretien. Il faut donc comptabiliser les pièces et l'entretien. Est-ce que ce n'était pas la coutume, ces 10 ou 20 dernières années, d'inclure les coûts prévus du carburant et les salaires prévus des pilotes, par exemple?
(1250)
    Je pense que oui, effectivement.
    D'accord.
    Revenons à la possibilité de ne pas avoir d'alliance officielle, mais en ce qui concerne le Pacifique. Vous avez dit que vous n'en voyiez pas la nécessité. Faute d'une structure de commandement ou de statuts sur lesquels se fonderaient les décisions, comment cela fonctionnerait-il? Est-ce que ce serait au gré des circonstances?
    Des coalitions de partenaires pour une même cause, que nous avons vues dans le passé. Une telle coalition, si on est réaliste, comporterait probablement une structure de commandement américaine à laquelle viendraient se joindre d'autres pays. Ce serait évidemment la solution utile pour des exercices avec certains pays du Pacifique. Dans les faits, c'est ce qui se passe. Chaque année, nous participons à l'exercice naval RIMPAC, et, cette année, notre participation sera plus grande qu'à l'accoutumée. Nos liens avec l'Australie se sont resserrés. Nous avons des rapports plus suivis avec Singapour. Autrement dit, c'est dans cette direction que, en réalité, nous allons. Je pense que c'est bien. Nous avons, dans certaines parties du monde, des amis avec qui nous devrions parler plus souvent de coopération militaire.
    M. Regehr voulait intervenir à ce sujet.
    Je me sens obligé de mentionner, dans cette discussion, pour qu'on s'en occupe un peu, les Nations Unies et leurs opérations de paix. Elles se déroulent dans des circonstances très difficiles, et donnent de très bons résultats, au Soudan maintenant — le Soudan du Sud ainsi que dans les collines Nuba — et encore dans le Darfour. Toutes manquent de ressources, comme en République démocratique du Congo. Si ce n'est pour le financement, les communautés industrialisées du Nord en ont été en grande partie absentes. Si nous songeons à réétalonner la politique canadienne de défense, je pense que nous devrions en tenir compte ou préconiser une plus grande participation.
    Dans le Pacifique, est-ce que les coalitions de partenaires pour une même cause présentent des difficultés d'interopérabilité ou de communication de renseignements, vu que, entre les pays membres de l'OTAN, cela présente, de temps à autre, des difficultés?
    Bien sûr qu'il y aurait des difficultés. Nous échangeons beaucoup de renseignements avec les États-Unis, une puissance du Pacifique, avec l'Australie et la Nouvelle-Zélande, deux autres puissances du Pacifique. Les difficultés surviennent avec les pays que j'ai mentionnés au début, le Japon, la Corée, Singapour, et je soupçonne que nous traiterions ces pays de la même manière que certains pays membres de l'OTAN ne reçoivent pas de renseignements que les États-Unis communiquent à la Grande-Bretagne et au Canada: nous sommes privilégiés à cet égard.
    En Afghanistan, des officiers allemands et néerlandais se sont amèrement plaints de ce qu'ils considéraient comme une conspiration des Américains, qui leur communiquaient moins de renseignements qu'aux Canadiens. C'est difficile, dans une alliance, parce que, nécessairement, on fait plus confiance à certains pays qu'à d'autres.
    Vous avez mentionné que la mission en Libye a révélé certaines faiblesses de l'Europe. Plus précisément, quelles étaient-elles?
    Là-bas, beaucoup de pays membres de l'OTAN ont rapidement manqué de bombes. Certains n'avaient pas de pilotes. D'autres ont refusé de participer à certains aspects de la mission. Certaines communications entre les avions étaient impossibles. Après 60 années d'alliance, je ne parvenais vraiment pas à croire que ce type de problème survienne sur un théâtre étranger, très proche de l'Europe.
(1255)
    Merci. Votre temps est écoulé.
    Monsieur Kellway.
    Merci, monsieur le président. Merci également à nos invités, d'être venus.
    Monsieur Regehr, vous avez très rapidement parlé du F-35 et des armes nucléaires dans votre mémoire et dans votre déclaration. Je me demande donc si vous pouvez nous en dire un peu plus, à ce sujet, si, d'abord, le F-35, capable de transporter des armes nucléaires, faisait partie d'une stratégie nucléaire plus générale; ensuite, s'il est très consciemment perçu comme tel dans certains pays; enfin, si, dans l'OTAN, il y a controverse au sujet de cette capacité du F-35, compte tenu de vos observations sur le traité de non-prolifération.
    Les États-Unis ont toujours eu l'intention de construire des F-35 possédant la double capacité; c'est-à-dire celle de larguer ces bombes à chute libre, les B61. Les B61 sont également largables par le bombardier stratégique B-2. Mais le nouveau rôle de chasseur est réservé au F-35. Il y en a un nombre limité, mais ils sont là.
    D'où la question: est-ce que les États européens qui possèdent actuellement des bombes B61 intégreront dans les F-35 qu'ils achèteront, le cas échéant, une capacité de transport d'armes nucléaires? On s'y attend.
    Je pense que c'est une question politiquement biaisée, qui se posera avec plus d'acuité d'ici quelques années, mais on en entendra parler. Comme j'ai dit, en période d'austérité, le coût ajouté sera un facteur, mais je pense que le coût politique sera beaucoup plus important.
    En Allemagne, l'opinion appuie très fermement l'abandon du rôle nucléaire de ce pays. Actuellement, une sorte de tradition protège le gouvernement allemand. Il joue ce rôle depuis longtemps et il n'a encore pris aucune décision. Mais quand il décidera de l'intégration de cette capacité dans le nouvel avion et qu'il annoncera que pour encore 30 ou 40 ans le pays continuera de jouer un rôle nucléaire, cela déclenchera la controverse politique aux Pays-Bas, je pense, en Allemagne, notamment, et aussi, je pense, en Italie. En ce qui concerne la Turquie, je n'en suis pas certain.
    Je pense que ce sera une question politique très importante. N'étant pas historien, je ne peux pas prévoir l'avenir et je parierais que l'Allemagne, les Pays-Bas et l'Italie décideront de ne pas inclure la capacité nucléaire.
    C'est intéressant.
    Monsieur Granatstein, je comprends vos réserves au sujet de l'OTAN. Que pensez-vous du rôle de l'OTAN dans le contexte que M. Regehr a exposé au sujet de la perception changeante de la véritable nature de la menace nucléaire. Nous nous trouvons maintenant devant la menace de la prolifération des armes nucléaires. D'après vous, l'OTAN a-t-elle une utilité devant cette menace? Dans l'affirmative, comment et sinon pourquoi pas?
    Je ne suis pas sûr d'avoir tout à fait bien compris votre question, mais laissez-moi essayer.
    La Russie possède encore un nombre considérable d'armes nucléaires, mais moins qu'avant. Si j'étais un État européen membre de l'OTAN, l'absence de déséquilibre m'inquiéterait beaucoup. Je voudrais que mon côté possède au moins suffisamment d'armes nucléaires pour que la dissuasion soit crédible. Je pense que nous sommes dans cette situation. Je pense que l'objectif devrait être de maintenir cet équilibre.
(1300)
    Vraiment, je parle de la nouvelle...
    Votre temps est écoulé. Cinq minutes de plaisir, c'est vite envolé, je sais.
    Monsieur le président, pour moi aussi, malheureusement, le temps s'est envolé, et je dois partir à 13 heures.
    D'accord, il est 13 heures.
    Merci d'être venu. Vous êtes excusé. J'ai trouvé vos observations très utiles et très curieuses.
    Est-ce que le reste du comité veut poursuivre? Je sais que nous devons nous ajourner à 13 heures, mais comme nous avons commencé tard, voudriez-vous que deux ou trois intervenants de plus interrogent M. Regehr?
    Des voix: D'accord.
    Le président: Bien.
    Nous devons aller voter à 13 h 20.
    L'appel de la sonnerie se fera entendre de nouveau dans environ 20 minutes.
    Poursuivons.
    Monsieur Strahl, c'est à votre tour.
    Merci, monsieur le président. Le départ du témoin influencera un peu la structure de mes questions.
    Suivant la question de M. Kellway, j'aimerais savoir si les nouveaux avions de combat russes et chinois peuvent porter une charge nucléaire.
    J'ignore la réponse à propos des avions chinois, mais les avions russes peuvent assurément le faire. Tant que le pays aura des armes non stratégiques, ses avions de combat posséderont cette capacité.
    À votre avis, l'avion de combat russe a-t-il été conçu en réponse aux F-35, ou inversement?
    L'avion de combat s'inscrit dans le cadre d'une stratégie à long terme visant simplement à conserver une variété de munitions nucléaires stratégiques — au sein des forces aériennes, terrestres et marines — et non stratégiques. Les États-Unis se limitent pratiquement à une seule arme non stratégique, à savoir la B61, mais la Russie en conserve un éventail plus large.
    Vous pouvez peut-être répondre à la question que j'allais poser à M. Granatstein. J'imagine que vous ne vous intéressez pas à l'OTAN uniquement pour des raisons de désarmement nucléaire. Votre confrère a notamment souligné des problèmes liés à cette alliance qui dure depuis 60 ans. Lorsque l'OTAN a dû agir rapidement dans le cadre d'une opération, elle a éprouvé des difficultés de communication évidentes et certains problèmes en matière d'interopérabilité. En tant que membre de l'OTAN, convenez-vous que le Canada doit absolument continuer de participer à des activités internationales, et aussi vérifier, en collaboration avec ses alliés, l'interopérabilité du matériel dont il fait l'acquisition?
    Comme je l'ai dit tout à l'heure, je crois que le Canada doit absolument continuer de prendre part aux opérations à l'étranger, militaires ou non, et qu'il doit avoir la capacité d'intervenir. Cela dit, je pense qu'il faut modérer un peu nos attentes ayant trait à ce qui peut être accompli. Comme nous l'avons appris en Libye et en Afghanistan, un régime peut très facilement être renversé par ces opérations expéditionnaires, et surtout par certains éléments de l'opération militaire. Nous constatons que le défi majeur dans les deux cas a été de reconstruire le nouveau régime, car cela exige de toutes autres ressources, compétences et capacités. Le Canada doit continuer d'avoir la capacité nécessaire pour collaborer aux opérations militaires de soutien de la paix à l'échelle internationale avec ses alliés et d'autres organisations, y compris les Nations Unies. Je crois toutefois qu'il faut davantage intégrer la reconstruction diplomatique à la résolution de ce genre de conflits.
    Croyez-vous que l'OTAN est la mieux placée pour diriger de tels efforts de reconstruction? Sinon, devrait-elle laisser la place aux Nations Unies ou à une autre organisation? L'OTAN est-elle conçue pour adopter une approche pangouvernementale dans le cadre de la reconstruction d'un pays?
(1305)
    À mon avis, il apparaît que l'OTAN n'a pas été conçue spécifiquement à cette fin. La défense collective est son rôle prépondérant. Elle a endossé un rôle de gestion des crises avec un succès mitigé. La sécurité commune nécessite un cadre bien plus vaste que celui offert par l'OTAN.
    Merci.
    Merci. Il vous reste du temps, mais nous allons poursuivre.

[Français]

    Monsieur Brahmi, vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Je vais poser les questions dans ma langue.

[Français]

    Monsieur Regehr, vous avez surtout parlé du désarmement nucléaire dans le cadre traditionnel de l'OTAN, c'est-à-dire dans un contexte de guerre froide mettant en cause ce qu'on peut appeler des puissances nucléaires traditionnelles.
    Avez-vous quelques idées sur le rôle que devrait jouer l'OTAN en ce qui concerne les puissances traditionnelles émergentes? Sans parler de conflits, pouvez-vous parler des tensions qui peuvent exister entre l'Inde et le Pakistan, et entre l'Iran et Israël? Comment la recherche du désarmement nucléaire sur le plan mondial peut-elle s'articuler pour ces deux paires de pays qui sont des puissances émergentes en termes de force nucléaire?

[Traduction]

    Je crois que l'OTAN n'a pas à intervenir ni en Asie du Sud ni au Moyen-Orient. À mon avis, on reconnaît généralement que les solutions aux conflits résident à l'échelle régionale, et surtout dans le cas de l'Iran et d'Israël.
    Lors de la Conférence des parties chargée d'examiner le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires en 2010, il a été convenu, à la suite d'une décision de 1995, que le Moyen-Orient continuerait d'être une zone exempte d'armes nucléaires — c'est-à-dire de toute arme de destruction massive. Ce processus à très long terme est extrêmement laborieux, mais on est conscient de sa nécessité pour empêcher de façon durable la prolifération d'armes nucléaires dans la région. Il faudra que l'ensemble du Moyen-Orient crée une tout autre dynamique en matière de sécurité pour qu'on ne le considère plus comme une menace.
    Il en va de même avec l'Inde et le Pakistan. Ce qui est tragique, c'est que les deux pays se livrent actuellement une course aux armements effrénée. Tous les deux produisent de la matière fissile à un rythme accéléré dans le but de créer des armes. Soit dit en passant, le programme civil de l'Inde permet au pays d'utiliser une plus grande quantité d'uranium local à des fins d'armement. Certains éléments régionaux entrent en ligne de compte ici aussi, car le déséquilibre traditionnel entre les deux pays est une cause majeure du conflit.
    De plus, les communautés internationales n'ont pas réussi à finaliser la négociation d'un traité visant à interdire la production de matière fissile, qui figure à l'ordre du jour de la Conférence sur le désarmement depuis 1995, et même avant. Je pense que l'incapacité de conclure ce traité est lourde de conséquences en Asie du Sud, et qu'il faudrait prioriser une telle entente afin de garder sous contrôle — je crois que c'est le seul mot qui convient — la course aux armements qui se déroule en Asie.

[Français]

    Si je comprends bien, le rôle du Canada au sein de l'OTAN devrait être plus un rôle de contrôle des matériaux... Enfin, l'OTAN devrait plutôt jouer un rôle dans le contrôle des matériaux nucléaires plutôt qu'un rôle de diplomatie en ce qui concerne les deux points de tension diplomatique entre ces pays.

[Traduction]

    Non. Je pense que la responsabilité de l'OTAN est d'aider à créer, au sein de la communauté euro-atlantique, un environnement permettant de limiter la quantité d'armes nucléaires stratégiques et non stratégiques. Voilà son rôle. Il s'agit en partie d'un problème de contrôle du matériel, mais surtout de diplomatie et de réconciliation. Voilà donc l'objectif de l'OTAN en matière de désarmement nucléaire.
     Toutefois, je ne crois pas que l'OTAN permette au Canada d'atteindre ses objectifs de non-prolifération hors de la communauté euro-atlantique. Le Canada participe à la Conférence du désarmement et est actif à ce sujet sur le plan diplomatique. Compte tenu de l'impasse dans laquelle se trouve la conférence, nous recherchons par exemple d'autres façons de poursuivre les négociations entourant un accord sur la matière fissile.
    Je pense donc que le Canada doit utiliser d'autres tribunes pour atteindre son but en matière de non-prolifération hors de la communauté euro-atlantique, car l'objectif de l'OTAN s'y limite sur le plan du désarmement nucléaire.
(1310)
    Merci. Votre temps est écoulé.
    Monsieur Norlock.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Vous avez abordé certaines préoccupations entourant les ressources nucléaires ou la prolifération nucléaire. Naturellement, nous ne croyons pas que la Corée du Nord ait quoi que ce soit à voir avec... ni qu'elle en ait la capacité. Mais revenons à l'Iran et au conflit opposant l'Inde et le Pakistan, bien sûr, qui tombe parfois dans l'oubli, selon moi. L'OTAN s'intéresse bel et bien au Pakistan en raison de la nature du conflit en Afghanistan. Nous avons également affaire au Moyen-Orient, bien entendu, et le moins qu'on puisse dire, c'est que ses ressources pourraient bien mettre le feu aux poudres.
    Compte tenu de la grande complexité et variation des intérêts nationaux, et plus particulièrement en Iran, un véritable pays sans scrupule, dont l'ambition va au-delà de sa propre survie... C'est un peu comme un jihad, ou une guerre sainte, si vous me permettez l'expression en parlant d'armes nucléaires.
    Comment peut-on commencer à concilier ces différences...? Comment peut-on s'y retrouver dans tout cet amalgame? La confiance est la principale notion qui émerge de vos discours sur le désarmement nucléaire, mais je ne la vois nulle part. Si vous pouviez vous en servir dans le désarmement nucléaire de ces régions, comment procéderiez-vous?
    Pour commencer, je pense que vous avez tout à fait raison de dire que l'OTAN s'intéresse beaucoup à la situation en Asie du Sud et au Moyen-Orient. Or, je ne crois pas que le cadre de l'OTAN permette de résoudre ces problèmes. Par exemple, ce sont les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU et l’Allemagne qui s'occupent de l'Iran. Il s'agit de la Chine, de la Russie, de pays européens et d'un membre de l'OTAN.
    Je pense que la solution au problème de l'Iran est généralement connue, même si elle n'a rien de simple. En effet, il faudrait limiter à 20 p. 100 le taux d'enrichissement de l'uranium et permettre au pays de continuer à enrichir l'uranium servant aux réacteurs nucléaires à des taux de 3 à 5 p. 100. De plus, la communauté internationale doit approvisionner le pays en barres de combustibles, qui alimentent les réacteurs de recherche pour l'uranium dont l'enrichissement atteint 20 p. 100.
    Voilà les grandes lignes de la solution. Rien n'indique que l'Iran acceptera. Or, je crois que la communauté internationale fait fausse route depuis le début en insistant pour que le pays suspende tout enrichissement d'uranium. L'Iran a répondu à juste titre avoir le droit de le faire en vertu du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires.
    Parlez-nous aussi de la confiance au sein des autres pays que j'ai mentionnés.
    Je ne pense pas que la confiance règne entre l'Inde et le Pakistan — je suis certain que d'autres pourront vous en dire plus à ce sujet. C'est attribuable en partie à l'instabilité du Pakistan, mais surtout à la divergence traditionnelle profonde entre les deux pays, qui ne peut être surmontée. La situation est permanente et ne changera pas. La solution est donc de rétablir la confiance, un défi que certains s'emploient à relever.
(1315)
    J'aimerais également que vous nous parliez de la confiance entre Israël et l'Iran. L'OTAN n'a-t-elle pas un rôle à jouer dans ce conflit compte tenu de la proximité entre Israël et la Turquie — qui est bien sûr membre de l'OTAN?
    Votre temps est écoulé.
    Les intérêts de l'OTAN entrent bel et bien en ligne de compte.
    Madame James, vous êtes la dernière intervenante.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais laisser mon temps de parole à mon collègue, M. Alexander.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai malheureusement mal calculé mon temps tout à l'heure, et je n'ai pas eu l'occasion d'interroger M. Regehr au sujet des missiles balistiques associés aux enjeux nucléaires.
    Vous avez parlé des obligations auxquelles nous sommes tous soumis en vertu du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires. Naturellement, les états dotés d'armes nucléaires doivent respecter des obligations supplémentaires ayant trait aux bases, entre autres. Tout comme l'OTAN, le Canada prône manifestement le désarmement nucléaire aux bonnes conditions de façon à renforcer la sécurité. Dans l'intervalle, la tendance probablement la plus troublante qui se dessine depuis 10 ans en matière de prolifération porte sur la technologie nécessaire pour assembler des missiles balistiques. En effet, un vaste éventail de pays possèdent une telle technologie ou tentent d'en faire l'acquisition, et des acteurs non étatiques pourraient même réussir à se la procurer. Cela pourrait représenter une menace à petite échelle pour nos navires, si nous les déployons dans la Méditerranée ou dans l'Océan Indien, et même à grande échelle pour les pays, y compris ceux qui sont membres de l'OTAN.
    Comtpte tenu de ce que vous avez dit au sujet de la Défense nationale, entre autres, quelle ligne de conduite globale l'OTAN devrait-elle adopter, dans le cadre du concept stratégique ou non, afin de défendre ses membres et ses autres partenaires, en fonction de leur volonté politique, contre la menace grandissante que représentent les missiles balistiques?
    Je crois qu'il convient d'acquérir une capacité de défense contre les missiles balistiques. Pour l'instant, la technologie est loin d'être au point. La défense ponctuelle est réaliste et fonctionne raisonnablement bien, mais le problème en matière de défense est plutôt... Les experts doutent fort que la défense puisse un jour prévenir toute attaque. Autrement dit, un pays dont la technologie est suffisamment évoluée pour créer un missile balistique intercontinental sera capable d'y intégrer un système de leurre faisant échouer toute défense antimissile.
    La tâche n'a donc rien de simple. Je pense que ce qui cloche en ce moment, c'est le déploiement précoce d'un système dont la capacité est discutable, mais qui déstabilise la région euro-atlantique sur le plan politique.
    Je crois que la marche à suivre, c'est de collaborer avec la Russie et de mettre nos ressources en commun, puisque nous avons des intérêts communs, afin d'essayer de développer une véritable capacité de défense qui permettrait aussi d'intercepter un missile à mi-parcours. Soit dit en passant, ce genre de capacité pourrait aussi nous protéger contre d'autres menaces si le nombre d'armes nucléaires finit par diminuer.
    La collaboration est donc essentielle à l'efficacité de la défense antimissile balistique.
    Bien.
    Vous avez dit que la responsabilité en matière de sécurité est principalement régionale en Asie du Sud et au Moyen-Orient. L'ONU joue un rôle à cet égard, mais elle est paralysée depuis 60 ou 70 ans pour différentes raisons. L'OTAN regroupe désormais 28 alliés, assure la gestion de crises, développe des partenariats en matière de sécurité, et compte des partenaires comme l'Afghanistan, certains États du golfe Persique et la Turquie dans ces régions ou dans les régions voisines. Par conséquent, l'OTAN ne devrait-elle pas contribuer à la prévention et à la résolution des conflits, de même qu'à la gestion des crises à plus longue échéance? Ne devrions-nous pas nous attendre à de tels scénarios dans ces deux régions?
(1320)
    Je pense qu'il faut exploiter les compétences et les capacités de la communauté de l'OTAN, y compris en matière de vérification des accords, entre autres. Vous avez donc raison.
    Si les relations diplomatiques de la communauté de l'OTAN peuvent être mises à profit, alors je pense aussi... Or, je ne suis pas tout à fait convaincu que ces 28 pays ont une capacité diplomatique collective, pas plus que les coalitions de pays volontaires dont M. Granatstein a parlé, sur le plan diplomatique et militaire, qui comptent des membres de l'OTAN, mais d'autres éléments aussi.
    Merci.
    Tous les membres du comité ont eu l'occasion d'intervenir. Or, chacun doit maintenant vaquer à ses occupations.
    Cela dit, je tiens à vous remercier, monsieur Regehr, de votre témoignage perspicace et de votre participation aux délibérations.
    Je suis prêt à recevoir une motion visant à lever la séance.
    Merci, monsieur Trudeau.
    Tout le monde peut maintenant partir.
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