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Merci beaucoup, monsieur le président. Bonjour, mesdames et messieurs les membres du comité.
Je suis très heureux de constater la présence des députés des trois territoires pour m'appuyer, ainsi que de voir des anciens collègues. Je suis très heureux de vous voir.
Je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant le Comité aujourd'hui. Je me réjouis de votre intérêt à entendre le point de vue du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest sur des enjeux qui touchent le quotidien de notre population. Notre gouvernement privilégie le partenariat et le consensus. Si nous voulons servir ceux qui nous ont élus, nous devons être en mesure de participer pleinement aux décisions qui auront des retombées sur eux, sur notre territoire et sur notre avenir.
Tout d'abord, j'aimerais vous parler un peu des Territoires du Nord-Ouest, qui s'étendent sur 1,1 million de kilomètres carrés.
Nos résidants vivent dans 33 collectivités de moins de 100 à 22 000 habitants. La population des Territoires du Nord-Ouest comprend environ 44 000 personnes, et environ la moitié d'entre elles sont autochtones — Premières Nations, Inuits et Métis. J'aimerais également souligner que notre Assemblée législative a 11 langues officielles.
Les indicateurs économiques et sociaux indiquent des écarts considérables entre les centres importants et les petites collectivités, ainsi qu'entre les Autochtones et les non-Autochtones. Par exemple, le revenu annuel moyen à Paulatuk, une collectivité de 327 habitants située sur la côte de la mer de Beaufort, est de 31 000 $, alors qu'à Yellowknife, il s'élève à 71 000 $.
On observe également de grandes inégalités dans le niveau de scolarisation. En effet, plus de 2 000 Autochtones âgés de plus de 15 ans n'ont pas atteint ou terminé leur 9e année. Chez les non-Autochtones, ce nombre n'est que 195 — un contraste frappant. Comme vous êtes nombreux à le savoir, le niveau d'alphabétisme et de numératie correspondant à la 9e année est considéré comme un minimum pour bien fonctionner au quotidien.
Le produit intérieur brut actuel des Territoires du Nord-Ouest s'élève à 4,8 milliards de dollars, dont 40 % proviennent du développement du secteur des ressources naturelles. Notre économie dépend énormément d'industries telles la construction, le transport et le commerce de gros, et le secteur des ressources naturelles a de grandes répercussions sur les services professionnels, scientifiques et techniques.
Lorsque nous parlons de notre économie, nous parlons de la capacité de notre gouvernement de soutenir la population. Ce soutien prend de nombreuses formes, que ce soit les programmes et services, l'offre de possibilités d'emplois satisfaisants et, ce qui est peut-être le plus important, la capacité de susciter l'espoir chez les gens et dans les collectivités.
À l'heure actuelle, le tourisme, la technologie, la culture et les activités traditionnelles ne représentent qu'une très petite portion de notre économie, et nous cherchons des moyens de dynamiser ces secteurs pour la diversifier. À titre de comparaison avec le secteur des ressources naturelles, le tourisme représente 3,5 %, et la pêche, 0,01 %. La diversification de notre économie est essentielle pour créer des occasions à saisir pour notre population. Par ailleurs, le fait que notre secteur agricole naissant ne puisse pas accéder à la gestion de l'offre est problématique. Il faudra des investissements importants pour éliminer les écarts entre ces divers secteurs.
La croissance soutenue de l'économie des Territoires du Nord-Ouest se heurte à un obstacle persistant, et dont la plupart des Canadiens ignorent l'existence, à savoir le manque important d'infrastructure publique. Les habitants du Nord doivent se débrouiller sans certaines choses que de nombreux Canadiens tiennent pour acquises. En effet, seulement 12 de nos 33 collectivités peuvent accéder en tout temps au réseau routier toutes saisons, et sur le territoire continental, les zones situées à moins de 100 kilomètres d'une route praticable en toutes saisons représentent seulement 33 % de la superficie terrestre. Cette lacune, en plus de faire augmenter le coût de la vie pour les habitants, vient entraver la croissance économique.
J'aimerais vous donner quelques renseignements sur les finances gouvernementales aux Territoires du Nord-Ouest. Pour l'exercice 2017-2018, les prévisions de dépenses de notre gouvernement territorial s'élèvent à 1,66 milliard de dollars pour les activités d'exploitation et à 266 millions de dollars pour l'infrastructure. Notre revenu total pour ce même exercice est estimé à 1,86 milliard de dollars. Une bonne partie des revenus de notre gouvernement, soit 66 %, provient des transferts du gouvernement fédéral. Le reste vient entre autres de l'impôt, d'autres types de transferts du gouvernement canadien et des ressources naturelles.
Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, contrairement aux provinces, est assujetti à une règle fédérale qui lui interdit de contracter une dette supérieure à 1,3 milliard de dollars. Pour 2017-2018, nos prévisions d'emprunts sont de 990 millions de dollars.
Même si le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest s'est doté d'une stratégie fiscale pour gérer ses investissements en infrastructures à l'intérieur des limites d'emprunt imposées par le gouvernement fédéral, le Comité doit savoir que les paiements du service de la dette sont peu élevés et correspondent à environ seulement 1 % du revenu annuel total. Pour faire croître l'économie des Territoires du Nord-Ouest, nous devons moins compter sur les revenus de source fédérale pour offrir nos programmes et services. Les investissements du gouvernement canadien dans des infrastructures nécessaires, combinés à une limite flexible pour nos emprunts, permettront à notre gouvernement d'investir dès aujourd’hui afin de pérenniser l'économie de demain, celle dans laquelle vivront nos enfants et nos petits-enfants.
L'économie des Territoires du Nord-Ouest ne s'est toujours pas complètement remise de la récession mondiale de 2008. Les deux plus grandes mines de diamants, qui génèrent des milliers d'emplois directs et indirects, pourraient devoir fermer d'ici 10 ans. La mine du lac Snap a fermé en 2016, mais une autre mine de diamant, Gahcho Kué, a ouvert au début de 2017, et on en estime la durée de vie à environ 10 ans. Actuellement, les exportations de diamants des Territoires du Nord-Ouest s'élèvent à plus de 2 milliards de dollars par année.
Le champ pétrolifère de Norman Wells est temporairement fermé, car l'oléoduc qui transporte le pétrole brut jusqu'en Alberta a besoin de réparations. La production déclinant considérablement, il est peu probable que cette installation soit encore exploitée plus de 5 à 10 ans. Étant donné les prix actuels et projetés du pétrole et du gaz naturel, on n'entrevoit aucun projet important d'exploration ou de production dans les Territoires du Nord-Ouest au cours de la prochaine décennie, même si ce territoire contient 16,2 billions de pieds cubes de gaz naturel classique commercialisable et 193 milliards barils de pétrole.
Il existe des possibilités d'exploration et d’exploitation liées à des minéraux comme le lithium, le bismuth et d'autres terres rares, des composants clés pour les secteurs émergents des technologies vertes et du numérique. En fait, nous avons deux mines qui ont reçu leur certification environnementale réglementaire pour l'extraction de ces minéraux, mais elles n'arrivent pas à obtenir le financement nécessaire pour commencer l'exploitation. De plus, on trouve des projets d'extraction de métaux communs et d'or qui pourraient progresser si le marché des produits de base continue de s'améliorer.
Je suis d'avis, tout comme les leaders du gouvernement autochtone de Beaufort-Delta, que l'imposition unilatérale, par le gouvernement du Canada, d'un moratoire de cinq ans sur l'exploration pétrolière et gazière dans la mer de Beaufort contrevient aux droits à l'autodétermination du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et de ce gouvernement autochtone. Cette décision, prise sans consultation, a étouffé tout espoir de voir apparaître des projets d'exploration pétrolière et gazière dans la région, et a lancé un message d'incertitude à l'ensemble du secteur des ressources naturelles des Territoires du Nord-Ouest, y compris les mines. Le moratoire a pour ainsi dire fermé la porte au projet — déjà approuvé — des gazoducs dans la vallée du Mackenzie, et il se termine en 2023.
De plus, nous devons composer avec la mise en place d'un système de tarification du carbone qui rendra plus difficile l'analyse de la rentabilité des projets d'exploration et de développement.
Que dit-on ainsi à nos enfants sur leur avenir? Nous les encourageons à rester à l'école, à faire les bons choix et à enrichir leur collectivité. Comment exiger d'eux qu'ils s'engagent dans cette voie si, lorsqu'ils termineront leur formation, notre économie n'a rien à leur offrir?
L'autodétermination est cruciale pour les Territoires du Nord-Ouest, que ce soit pour le gouvernement territorial ou pour les gouvernements autochtones. La plupart des peuples autochtones ont signé des accords — d'autres ententes sur les terres et les ressources restent à conclure — et travaillent à l'aménagement de leur autonomie gouvernementale. Dans une optique semblable, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest poursuit le transfert législatif relatif à la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie, qui régit la plus grande partie des Territoires du Nord-Ouest. C'est notre droit en vertu de l'Entente sur le transfert des responsabilités conclue par les Territoires du Nord-Ouest et le gouvernement du Canada, et le fait que celle-ci ne soit pas pleinement mise en oeuvre est extrêmement frustrant.
Les habitants du Nord sont témoins quotidiennement des effets des changements climatiques. Qu'il s'agisse de la baisse des niveaux d'eau, qui a des répercussions sur nos voies navigables et notre réseau hydroélectrique, de l'érosion du littoral de la mer de Beaufort, qui emporte des bâtiments dans les collectivités éloignées, ou encore du déclin consternant des populations de caribous — par exemple, le nombre de bêtes dans le troupeau de caribous de Bathurst est passé de plus d'un million à environ 26 000 —, les habitants du Nord sont conscients de l'environnement changeant et de la nécessité de s'adapter à différents phénomènes.
Les investissements dans l'infrastructure économique, dans les gens et dans des collectivités viables sont essentiels pour l'avenir de notre territoire. Les habitants des Territoires du Nord-Ouest ont les mêmes aspirations que les autres Canadiens, et le développement d'une solide économie du Nord est un élément essentiel à leur réalisation.
Un solide partenariat avec le gouvernement du Canada est essentiel pour que les habitants du Nord atteignent leurs objectifs sociaux, environnementaux et économiques. En collaboration avec son homologue fédéral, notre gouvernement s'efforcera de faire des Territoires du Nord-Ouest un endroit où tous peuvent prospérer et jouir de la santé, où une économie forte offrira des emplois et des occasions à saisir dans toutes nos collectivités, et où une bonne gestion de l'environnement contribuera à notre bien-être économique et à notre qualité de vie.
Il existe actuellement des occasions qui nous aideront à relever les défis économiques et financiers à moyen terme.
L'expansion du réseau routier toutes saisons entraînera des retombées économiques immédiates et favorisera la croissance. Le développement des infrastructures de transport est essentiel pour soutenir un développement économique qui profite à tous les habitants du Nord et à tous les Canadiens, pour multiplier les possibilités sociales et économiques qui s'offrent à la population des Territoires du Nord-Ouest et pour accroître la stabilité dans le contexte des changements climatiques.
Parmi les projets routiers récents, mentionnons la route reliant Inuvik à Tuktoyaktuk, qui sera terminée cette année, et la route toutes saisons Tlicho, un projet financé par le Fonds PPP Canada et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest.
Le développement du corridor d'accès à la province géologique des Esclaves de même que celui de la route de la vallée du Mackenzie sont également des priorités. Le premier projet ouvre un accès important à une région au sous-sol riche qui chevauche les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut. La route de la vallée du Mackenzie est un projet majeur qui vise à relier plusieurs collectivités au réseau routier public, ainsi qu'à offrir un accès fiable aux ressources pétrolières et minérales situées au coeur des Territoires du Nord-Ouest. L'analyse de rentabilité et une part importante de la planification sont terminées et ont été soumises au gouvernement du Canada.
Des sources d'énergie fiables et abordables sont essentielles pour le développement économique et la prestation de services dans les collectivités.
L'expansion de la centrale hydroélectrique de Taltson fait partie des investissements prioritaires. Menée en collaboration avec des gouvernements autochtones des Territoires du Nord-Ouest, elle créera des débouchés économiques, permettra de relier les Territoires du Nord-Ouest au réseau électrique continental et réduira les émissions de gaz à effet de serre de 360 000 tonnes dans le sud du Canada. Le troisième investissement essentiel en infrastructure concerne trois projets de production d'énergie renouvelable à plus petite échelle qui réduiront la dépendance aux groupes électrogènes au diesel. Mis ensemble, ces projets diminueront les émissions de gaz à effet de serre, feront baisser le coût de la vie et mettront en valeur des options novatrices pour les collectivités hors réseau qui utilisent des génératrices au diesel.
Ces investissements peuvent aider les Territoires du Nord-Ouest à garder une économie forte et un environnement sain tout en offrant des emplois et des possibilités à ses habitants et aux collectivités, le but étant que les jeunes aient confiance dans le marché de l'emploi et les débouchés économiques pour de nombreuses années à venir. Il est important d'investir dans les infrastructures, et le partenariat avec le gouvernement fédéral est nécessaire.
Comme je l'ai dit au début de mon exposé, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest souhaite participer pleinement à toutes les décisions qui touchent les habitants. Lorsque de nouvelles politiques et de nouvelles stratégies sont envisagées, il doit jouer, bien avant leur mise en oeuvre, un rôle important. Nous voulons collaborer avec le Canada et nous apprécions votre intérêt pour les Territoires du Nord-Ouest.
Merci beaucoup, monsieur le président.