FOPO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des pêches et des océans
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 5 février 2019
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Monsieur le président, avant de commencer, j'aimerais poser une question à la présidence.
Vendredi, le projet de loi S-203 a été adopté avec dissidence. Selon vous, quand sera-t-il renvoyé au Comité?
À ce stade-ci, on ne m'a pas dit quand il sera renvoyé au Comité. Je ne sais pas si ce sera cette semaine, ou la semaine prochaine ou celle d'ensuite. J'espère en savoir un peu plus bientôt. Si je ne me trompe pas, le projet de loi pourrait être assujetti à différents processus. Je suis persuadé que nous devrons l'examiner s'il est renvoyé au Comité puisque, comme vous le savez, l'étude en comité est prioritaire.
Bien sûr. Seulement, nous sommes mardi et nous avons un ordre du jour bien rempli. J'aimerais que vous vous renseigniez, si cela ne vous dérange pas. J'espère qu'il sera renvoyé au Comité cette semaine.
Monsieur le président, le point que j'aimerais soulever s'apparente à la question qui a été posée par mon collègue M. Donnelly. Le projet de loi nous sera renvoyé bientôt, et j'imagine qu'un autre suivra aussi peu de temps après, ou au cours des prochaines semaines. Nous devons savoir dès que possible quand nous en serons saisis afin de pouvoir organiser la venue de témoins.
Dès que nous saurons quand le projet de loi sera renvoyé au Comité, nous en informerons les membres.
Merci d'avoir posé cette question.
Conformément au paragraphe 108(2), nous étudions la réglementation des pêches de la côte Ouest.
Aujourd'hui, quelques témoins se joignent à nous par vidéoconférence, et d'autres sont ici sur place.
David MacKay et Des Nobels, des pêcheurs, et Joy Thorkelson, du Syndicat des pêcheurs et travailleurs assimilés-Unifor, sont avec nous par vidéoconférence.
Nous accueillons aussi en personne M. Dan Edwards et M. Peter de Greef, qui sont tous deux des pêcheurs.
Bonjour à tous. Je vous souhaite la bienvenue au Comité. Vous disposez de sept minutes chacun pour votre exposé.
Nous commencerons avec ceux qui se sont joints à nous par vidéoconférence. Nous procédons ainsi au cas où l'on rencontrerait un problème technique que l'on aurait besoin de régler pour que tout le monde puisse voir et entendre ce qui se dit.
Monsieur MacKay, vous avez la parole.
Vous disposez de sept minutes ou moins.
D'accord. Nous n'avons pas de...
Passons alors à Des.
Des, commencez s'il vous plaît.
Je m'appelle Modestus Nobels. Je suis un pêcheur commercial à la retraite depuis 2007.
J'habite la petite collectivité de Dodge Cove, en banlieue de Prince Rupert, une ancienne communauté de pêcheurs. La flotte du Nord a été construite à cet endroit; plus de 1 000 navires de pêche ont été lancés à partir de cette localité.
J'ai été pêcheur pendant près de 30 ans, et j'ai travaillé avec et pour des pêcheurs commerciaux dans le cadre de plusieurs processus consultatifs et de certaines structures de planification pour la côte du Pacifique.
Je suis également un représentant élu du district régional de North Coast. Je siège à la Groundfish Development Authority, et je préside le Coastal Community Network.
J'aimerais remercier le Comité de nous donner cette occasion de témoigner et de faire part de nos préoccupations au sujet de certains problèmes liés à la réglementation et à la délivrance de permis sur la côte Ouest. Je suis vraiment reconnaissant au Comité de se pencher sur cette question. Nous demandons depuis plusieurs années qu'un tel examen soit mené. Ces enjeux ont eu des conséquences majeures sur nos collectivités et sur les pêcheurs de l'industrie.
La structure réglementaire qui régit actuellement nos opérations, c'est-à-dire le contingent individuel transférable, ou CIT, est, selon moi, extrêmement nuisible aux pêcheurs actuels de la région ainsi qu'aux collectivités qui participent depuis des années au secteur de la pêche. On peut constater un fléchissement marqué des infrastructures dans notre région et une diminution du nombre de pêcheurs actifs. Nous avons une ressource incroyable à notre disposition, mais nous ne pouvons pas en profiter.
Les contingents en tant que tels ne sont pas le problème. Ils ne sont qu'un outil parmi d'autres pour gérer les pêches. C'est plutôt la transférabilité de ces contingents qui crée la situation à laquelle nous sommes confrontés. Cette transférabilité a fait des permis mêmes une marchandise à vendre. Dans de nombreux cas, les permis ont été retirés des mains des vaillants pêcheurs pour être mis entre celles d'investisseurs et de grandes sociétés. Cela n'est pas avantageux pour nos collectivités, et de plus, dans de nombreux cas, ces sociétés se fusionnent pour gérer toutes leurs affaires à partir d'un seul endroit.
Les petites collectivités, qui puisent depuis toujours une partie de leurs revenus du secteur de la pêche ont beaucoup de mal à entretenir leurs infrastructures et à maintenir leur population. Des pêcheurs quittent ces régions pour ne plus jamais y revenir et des jeunes aimeraient oeuvrer au sein du secteur de la pêche, mais ne sont pas en mesure de le faire en raison de la structure réglementaire actuelle. Les coûts sont si exorbitants que le simple fait de se lancer dans ce secteur à l'heure actuelle se traduirait par des dettes à perpétuité. Il s'agit d'un problème majeur qui me préoccupe vivement et qui préoccupe aussi de nombreux habitants des collectivités avec lesquelles je travaille.
Des solutions existent.
[Difficultés techniques]
Oui. Voulez-vous prononcer votre discours? Lorsque la connexion sera rétablie, nous reviendrons à M. Nobels.
Allez-y quand vous êtes prêt.
D'accord.
Je m'appelle David MacKay, je suis un pêcheur commercial de cinquième génération de la collectivité côtière de Pender Harbour, où je suis né et où j'ai grandi. Je participe à la pêche du hareng roqué au filet maillant ainsi qu'à la pêche du saumon à la traîne et au filet maillant dans le Nord.
J'ai recommencé à travailler dans le secteur des pêches il y a environ six ans, et les affaires ont été difficiles. Aujourd'hui, je veux mettre l'accent sur un élément lié au contingent individuel transférable, et je pourrai également parler de ce dernier, mais je parlerai surtout des permis associés.
Peut-être que vous êtes déjà au courant, mais je vais commencer par donner un peu de contexte. Lorsque les permis sont devenus liés à une zone, la délivrance des permis de pêche au saumon a été divisée ainsi: trois zones de pêche à la traîne, trois zones de pêche au filet maillant et deux zones de pêche à la senne. Les propriétaires et les exploitants de bateaux qui voulaient pêcher dans chacune de ces zones devaient acheter tous les permis. Au lieu d'avoir à en acheter un seul, ils devaient se procurer les permis propres à chaque zone. Il est impossible de séparer ces permis, et c'est pourquoi nous les appelons « permis associés ». J'aimerais que ce genre de permis disparaisse. C'est d'ailleurs le sentiment exprimé par la très grande majorité des pêcheurs avec lesquels je me suis entretenu, et c'est l'élément central de mon intervention.
Séparer ces permis en permis individuels permettrait aux jeunes pêcheurs d'en acheter. Prenons l'exemple de mon père et d'autres pêcheurs âgés qui s'apprêtent à prendre leur retraite et qui ont deux ou trois permis, voire plus; ils ne peuvent pas les vendre en bloc à quiconque. Alors, ils doivent se tourner vers l'Initiative des pêches commerciales intégrées du Pacifique, l'IPCIP, ou simplement les conserver, mais ce sont des personnes vieillissantes. Le fait de pouvoir dissocier leurs permis les aiderait à quitter l'industrie, et aiderait les jeunes pêcheurs à y accéder. C'est une solution bien simple qui relève actuellement de l'IPCIP. Lorsque les permis sont renvoyés à l'IPCIP, ils sont automatiquement dissociés, alors je ne comprends pas ce qui pose problème. Pourquoi la dissociation n'est-elle donc pas possible? C'est ce qui me préoccupe le plus.
J'aimerais aussi parler du programme de retrait de permis de pêche à la traîne au saumon. Je pense qu'il me reste encore quelques minutes, donc je vais rapidement traiter de cette question. Le Traité sur le saumon du Pacifique propose un programme de retrait volontaire de permis de pêche à la traîne — tout un nom. Si, par exemple, j'avais un permis de pêche à la traîne associé à mon bateau et que je voulais me retirer du secteur des pêches et me défaire uniquement de ce permis-là, je ne le pourrais pas. Ce programme me permettrait cependant de procéder au retrait volontaire de mon permis au moyen de sessions de retrait. Si je ne me trompe pas, plus de 100 permis de pêche ont été retirés dans les trois zones de pêche à la traîne au large de nos côtes. Je pense que le nombre exact est 106. Depuis le 31 octobre 2016, 400 demandes ont été soumises. Les 106 permis retirés ne permettent plus de pêcher le long de nos côtes, et ce, de façon permanente. Cela représente 106 bateaux, ou 106 emplois multipliés par le nombre de membres de l'équipage. Voilà le problème. La solution me paraît simple, donc je tenais à aborder la question. Je suis persuadé qu'il y aura des questions à ce sujet plus tard.
Cela conclut mon introduction. Je remercie encore une fois le Comité de nous accueillir. Je cède maintenant la parole à quelqu'un d'autre.
Merci.
Des, voyons voir si nous pouvons vous entendre. Vous pourrez ainsi terminer votre témoignage.
Parfait. Je reprends là où je me suis arrêté. J'avais commencé à parler de la structure du contingent individuel transférable et de ses répercussions sur les collectivités et les nouveaux pêcheurs qui tentent d'accéder à l'industrie des pêches.
La transférabilité des contingents individuels transforme les permis de pêche en marchandises, ce qui crée ainsi un droit de propriété. Cela attire les personnes qui ne participent pas au secteur des pêches, mais qui cherchent à réaliser des investissements. Ils achètent donc des permis, qui deviennent des biens d'investissement, ce qui fait augmenter les prix à un point tel que les pêcheurs de l'industrie ont du mal à se les procurer. Dans de nombreux cas, une fois le permis acheté, il est conservé.
Au cours des dernières années, nous avons remarqué, au sein de la Groundfish Development Authority, que des contingents sont transférés à des intérêts étrangers. Ce ne sont plus les Canadiens qui achètent ces permis, mais plutôt des intervenants étrangers. Cela commence réellement à préoccuper les pêcheurs de l'industrie, parce qu'il est très peu probable que ces contingents soient récupérés s'ils sont cédés. C'est une réalité difficile. Cela a également une incidence sur le prix: les permis deviennent si coûteux que les jeunes pêcheurs qui souhaitent se lancer dans le secteur de la pêche ont du mal à le faire. Les coûts sont trop élevés. Cela ne devrait jamais arriver. Le coût du permis ne devrait pas être supérieur à la valeur du poisson qui est pêché avec ce permis.
Par conséquent, je crois que la transférabilité devrait être supprimée du régime de délivrance des permis afin que les permis soient réellement accordés à des pêcheurs et qu'ils profitent à la collectivité d'une quelconque façon. Comme je le disais, selon moi, il y a un certain nombre de solutions à ce problème. L'une d'entre elles consisterait à appliquer la politique du propriétaire-exploitant et à séparer les flottilles. Ensemble, ces deux mesures permettraient aux pêcheurs de maintenir leur position au sein de l'industrie et limiteraient l'accès de ceux qui n'y participent pas réellement. J'aimerais vraiment que le contrôle de l'industrie de la pêche se retrouve de nouveau entre les mains des pêcheurs actifs, qui sont sur le terrain et qui participent à des initiatives communautaires... [Difficultés techniques]
J'aimerais porter à l'attention du Comité plusieurs rapports qui, selon moi, lui seraient grandement utiles dans son étude. Le premier est un rapport d'Ecotrust Canada intitulé « Understanding Values in Canada's North Pacific ». Ce rapport présente de façon exhaustive les avantages tangibles et intangibles que présente le secteur des pêches pour les collectivités et la région.
Le régime actuel prive les collectivités de ces nombreux avantages et pousse même les gens à déménager. C'est là une très grande perte. De nombreuses collectivités dépendent de la pêche. L'esprit de collaboration qui règne dans cette industrie favorise la création de collectivités résilientes et viables, mais c'est en train de disparaître. Le tissu de nos collectivités se dissout, se désagrège. Nos collectivités sont beaucoup moins liées qu'elles ne l'étaient auparavant. Cela m'inquiète grandement et inquiète aussi beaucoup d'autres personnes. Encore une fois, l'application de la politique du propriétaire-exploitant ferait en sorte que les permis se retrouveraient entre les mains des pêcheurs actifs, et la séparation des flottilles empêcherait les grandes entreprises de se procurer des permis et de s'en servir de différentes façons pour servir leurs propres intérêts, ce qui a tendance à être néfaste pour les collectivités et les pêcheurs.
J'aimerais vous parler d'un autre rapport publié récemment intitulé « Just Transactions, Just Transitions », qui examine soigneusement les répercussions des CIT au cours des dernières années sur les activités dans la région du Pacifique et sur les collectivités qui s'y trouvent.
Je souhaite également attirer votre attention sur un document produit il y a quelques années par Mme Evelyn Pinkerton, qui s'intitule « Fisheries that Work. » Il s'agit d'un document fort intéressant qui présente diverses solutions de rechange au régime de CIT et qui se penche sur certains des problèmes que le ministère voulait régler au moyen des CIT, mais qui, selon moi, n'ont pas été réglés au final.
Il y a d'ailleurs un certain nombre d'instances en plein essor au Canada, notamment l'industrie de la pêche de la côte Est. Celle-ci est très axée sur la collectivité et fonctionne selon une politique de propriétaire-exploitant et de séparation rigoureuse des flottilles afin que les pêcheurs bénéficient de ce qu'ils pêchent, et que les collectivités bénéficient en retour des pêcheurs qui y habitent. Je crois qu'il serait extrêmement important que nous nous penchions sur cette réalité et que nous la comprenions.
Il y a également une pêcherie plus au nord, en Alaska, et nous nous en inspirons depuis un certain nombre d'années pour trouver des possibilités de développement dans notre région. Elle applique également une politique rigoureuse de propriétaire-exploitant et de séparation des flottilles, et sa structure de gestion des pêcheries est réellement axée sur les collectivités et fait participer les membres de la collectivité et les pêcheurs locaux. C'est grâce à cela, ainsi qu'aux pêcheurs de la région que cette pêcherie fait preuve d'une aussi bonne intendance. Les pêcheurs sont réellement attachés aux poissons et à l'environnement, et ils les connaissent très bien. On ne peut pas en dire autant pour la plupart des propriétaires absents qui oeuvrent dans les systèmes de CIT; un grand nombre de ces propriétaires ne pêchent pas et se servent des contingents comme d'une source de revenus, coûtant à de nombreux pêcheurs jusqu'à 70 % de la valeur totale de leurs prises.
Les recettes qui reviennent aux pêcheurs en Alaska et sur la côte Est du Canada dépassent largement celles que touchent les pêcheurs de la Colombie-Britannique, où il y a une diminution des revenus.
Nous avons largement dépassé le temps imparti, donc je dois vous interrompre. J'espère que les questions qui vous seront posées vous permettront d'aborder ce que vous n'aurez pas eu le temps de dire dans votre témoignage.
Nous passons à Mme Thorkelson, de l'United Fishermen and Allied Workers' Union. Vous disposez de sept minutes ou moins.
Je suis présidente de l'United Fishermen and Allied Workers' Union, communément appelé UFAW-Unifor. Notre syndicat représente certains — mais pas tous — des pêcheurs de poissons sauvages de la Colombie-Britannique.
Tous les membres de notre syndicat sont des pêcheurs actifs. Les gens qui viennent de Terre-Neuve-et-Labrador ont probablement déjà entendu parler du Fish, Food and Allied Workers Union, ou FFAW, le syndicat des travailleurs de l'industrie de la pêche de cette région. Nous faisons tous deux partie d'Unifor, donc nous sommes affiliés. Nous représentons tous les deux les pêcheurs et les travailleurs d'usine aux deux extrémités du pays, mais c'est à peu près tout ce que nous avons en commun.
Les revenus des pêcheurs de notre région sont à la baisse, alors que ceux des pêcheurs du FFAW sont à la hausse. Cette différence s'explique par les coûts supplémentaires assumés par nos pêcheurs. Près de 80 % de la valeur au débarquement des prises dans les pêches assujetties au CIT est soutirée des pêcheurs de la Colombie-Britannique, alors que ce n'est pas le cas pour leurs homologues sur la côte Est. On peut également apercevoir une énorme différence au niveau de la collectivité: la capacité de transformation dans les collectivités rurales de la Colombie-Britannique diminue sans cesse, alors que c'est tout le contraire dans les régions rurales du Canada atlantique.
Je travaille pour le syndicat depuis 40 ans, et j'ai été témoin de nombreux changements au cours de ma carrière. Je suis vieille, tout comme la majorité des travailleurs de l'industrie de la pêche en Colombie-Britannique. Cette industrie a été très lucrative pour les travailleurs qui y ont participé, ce qui leur a permis de très bien gagner leur vie. C'est pourquoi nous sommes tous là depuis longtemps. Maintenant, la situation économique des personnes qui veulent partir est inadéquate.
Nous avons un grave problème. Les pêcheurs aînés veulent partir, mais n'ont pas les moyens de quitter leur emploi, et les jeunes pêcheurs veulent accéder à l'industrie, mais n'ont pas les moyens de le faire. Quand j'étais jeune, la majorité des capitaines possédaient leurs propres permis et bateaux. En 1985, 20 000 pêcheurs ont obtenu un permis de pêche personnel. En 2015, 15 000 pêcheurs avaient déjà quitté l'industrie, et seulement 5 700 d'entre eux étaient en Colombie-Britannique. Ce sont les dernières données publiées par le ministère des Pêches et des Océans.
En 1969, 13,2 % de la flotte appartenait à des sociétés. Quinze ans plus tard, le pourcentage des permis de pêche à la senne détenus par des transformateurs et des investisseurs, par exemple, est passé à 40 % et, 20 ans plus tard, à 55 %. En 1993, les transformateurs et les investisseurs possédaient 39 % des permis de récolte d’oeufs de hareng. En 2012, ce pourcentage est passé à 51 %.
En 1993, un seul transformateur possédait 27 % des permis de récolte d'oeufs de hareng à la senne. Maintenant, 20 ans plus tard, en raison de la consolidation des sociétés, ce même transformateur possède 95 % des débarquements appartenant à des transformateurs. On ne peut pas évaluer les répercussions des transformateurs sur les pêcheurs actifs uniquement avec les chiffres présentés ci-dessus. On doit également tenir compte du contrôle exercé par les transformateurs.
Le plus important transformateur de saumon détient 37 permis liés à 20 bateaux qui ne sont pas des bateaux de pêche. Dans de nombreux cas, ces bateaux n'existent pas réellement. On les appelle les « bateaux bidons », parce qu'ils pourraient aussi bien être des bidons qui flottent sur l'eau. Il peut arriver, et il arrive qu'une société loue ses permis à des pêcheurs de saumon qui en ont besoin pour pêcher dans une zone différente.
Dans une pêcherie de saumon assujettie au système de CIT, une société non pêcheuse peut transférer le contingent lié à ses permis à un autre pêcheur, donnant ainsi lieu à une combinaison des contingents pour ce bateau. Le pêcheur peut donc attraper le nombre de poissons prévus par son propre contingent, ainsi que par le contingent du bateau bidon. Les pêcheurs sont ainsi liés à la société. S'ils souhaitent éventuellement augmenter leur contingent dans le but d'accroître leur revenu, ils devront continuer à pêcher pour cette société de transformation. Cette situation n'est pas unique aux pêcheries de saumon: elle est pire pour les pêcheurs du hareng rogué, puisque le ministère des Pêches et Océans exige la combinaison d'un nombre minimal de permis de pêche au filet maillant pour pêcher. Je me souviens de quelques années où les pêcheurs actifs, tenus pas le ministère de louer des permis, ont perdu de l'argent parce que le prix de location de ces permis dépassait la valeur des prises de hareng rogué.
En 2016, le syndicat a réalisé une étude auprès de la flotte de pêche au saumon. Parmi les 234 répondants, 84 % ont dit ne pas voir d'avantages au système de CIT; 89 % pensaient que leurs coûts grimperaient avec l'arrivée du CIT; et 86 % ne voulaient pas que leur région soit assujettie au système de CIT.
En 2018, soit deux ans plus tard, nous avons mené une autre étude. Nous avons élargi la portée de cette dernière afin d'inclure tous les pêcheurs et toutes les pêcheries, et nous avons posé le même genre de question: « Pensez-vous que la politique de délivrance de permis de la côte Ouest devrait profiter aux pêcheurs actifs? » Bien sûr, 94 % ont répondu oui; 91 % étaient favorables à la politique sur les propriétaires exploitants, créée pour répondre aux besoins des pêcheurs de la Colombie-Britannique; 88 % appuyaient une politique de séparation des flottilles en Colombie-Britannique; et 66 % estimaient qu'en l'absence de changements à la politique de délivrance des permis, les collectivités côtières rurales continueraient à se dévitaliser.
Le directeur général de la région a énuméré les priorités des pêcheries du Pacifique: la conservation, la conformité, la durabilité et la viabilité économiques, la distribution équitable des avantages et la collecte de données. Plus tard, Ken Hardie a présenté une liste des objectifs du ministère des Pêches et des Océans, mais je pense qu'il s'est trompé, parce qu'il a parlé de moyens de subsistance durables, de retombées économiques régionales et de collectivités durables. Ce sont peut-être les objectifs de la région de l'Atlantique, mais je vous assure que ceux de la région du Pacifique sont bien différents.
Le ministère des Pêches et des Océans dans la région du Pacifique fait la distinction entre les titulaires de permis de pêche et les pêcheurs. Il veut que les pêcheurs s'adaptent aux temps qui changent et qu'ils paient pour la gestion de leur pêcherie. Il n'établit pas d'objectifs sociaux visant à assurer des moyens de subsistance durables pour les pêcheurs, des retombées économiques régionales ou des collectivités durables. Ces termes ne figurent pas dans le lexique de la région du Pacifique.
La vérité, c'est que le ministère des Pêches et des Océans de la région du Pacifique mène des consultations auprès de moins en moins de pêcheurs actifs. Il consulte les détenteurs de contingents et de permis qui sont, de plus en plus souvent, des personnes qui ne participent pas aux activités de pêche. Au printemps dernier, notre personnel et moi avons fait une tournée de six semaines dans l'ensemble de la côte. Nous avons visité 21 collectivités. Nous sommes montés à bord de plus de 800 bateaux pour demander aux pêcheurs s'ils souhaitaient que des changements soient apportés à leur pêcherie. Seuls quelques-uns étaient satisfaits de la situation actuelle; tous les autres voulaient que des changements profitant aux pêcheurs actifs soient apportés.
Bien qu'ils ne s'entendaient pas tous sur la solution, la plupart d'entre eux ont relevé le même problème: l'argent est siphonné à même les poches des pêcheurs actifs et est redirigé dans les poches de ceux qui ne pêchent même pas. Les transformateurs ont une emprise sur presque tous les pêcheurs en raison de leur contrôle des contingents.
Les pêcheurs sur la côte Pacifique croient que l'heure du changement est venue. Nous recommandons au ministre de procéder à un examen externe de la délivrance des permis dans la région du Pacifique dans le but de créer des flottilles commerciales et des collectivités côtières viables, y compris les collectivités des Premières Nations, qui reposent sur le principe fondamental selon lequel la pêche est une ressource publique et appartient à tous les Canadiens. Les permis donnent un accès privilégié à une ressource commune. Il devrait y avoir une séparation des flottilles et la mise en oeuvre d'une politique sur les propriétaires exploitants. Les avantages de la pêche devraient profiter aux pêcheurs et à leurs collectivités, et non à ceux dont la participation consiste à détenir ou à contrôler des permis ou des contingents. Les politiques de délivrance de permis devraient encourager la relève intergénérationnelle, et les principes de contiguïté devraient régir les transformateurs de sorte que les recettes découlant de nos pêches, y compris des transformateurs, demeurent dans les collectivités locales.
Nous appuyons les objectifs sociaux et économiques du projet de loi C-26 dans l'intérêt des pêcheurs actifs et de leurs collectivités.
C'est ce qui conclut mon intervention.
Merci, Mme Thorkelson.
Nous passons maintenant à M. Dan Edwards. Vous disposez d'au plus sept minutes.
Merci de me permettre de témoigner devant le comité parlementaire des pêches sur ce sujet extrêmement important. Je comparais devant vous à titre de propriétaire exploitant indépendant de petit bateau de la Colombie-Britannique.
Au cours des prochains jours, vous entendrez plusieurs jeunes pêcheurs; je n'en fais pas partie. J'ai 68 ans. Je travaille sur les ponts de petits bateaux de pêche en Colombie-Britannique depuis que j'ai environ sept ans, quoique mon père, s'il était toujours en vie, remettrait probablement en question le montant de travail que j'effectuais réellement à l'époque.
Cela fait 20 ans que je pêche chaque année le poisson de fond avec mon fils. En 2018, j'ai effectué 2 excursions de pêche au flétan avec mon frère et 10 autres excursions à bord du palangrier familial que mon fils commande depuis 20 ans, pêchant ces 10 dernières années sous le régime intégré de pêche du poisson de fond que nous avons aidé à créer en Colombie-Britannique, en mettant principalement l'accent sur le flétan et la morue charbonnière.
Notre bateau est doté de caméras qui surveillent toutes nos prises. Lorsque nous débarquons le poisson, celui-ci fait l'objet d'une validation indépendante, laquelle comprend une vérification de nos registres et des enregistrements vidéos. Si toutes ces vérifications sont satisfaisantes, nous sommes autorisés à effectuer notre prochaine excursion de pêche. Ces systèmes ont été conçus en collaboration avec l'organisme de gestion et l'industrie afin de donner confiance à la population canadienne, à qui appartient cette ressource que nous pêchons. Il est important que nous puissions prouver que nous pêchons de manière responsable et viable, en particulier parce que notre méthode de pêche, la pêche à la palangre avec hameçons, peut permettre de récolter jusqu'à 10 000 poissons par jour, ce qui comprend des espèces considérées comme étant préoccupantes dont le total autorisé des captures est très faible. Dans l'industrie, nous les appelons les espèces au point de rupture. Nous devons gérer nos plans de pêche en fonction de ces espèces afin de poursuivre nos activités.
À chacune des quatre dernières années, nous avons débarqué de notre bateau entre 240 000 et 350 000 livres d'espèces mélangées. Lorsque nous pêchions le chien de mer, il n'était pas rare pour nous de débarquer de notre bateau de bois de 91 ans jusqu'à 1,6 million de livres de produit par année. Dans toutes ces années, pas une seule fois les flottilles pêchant plus de 20 différentes espèces de poisson n'ont dépassé le total autorisé des captures de l'une de ces espèces. Au contraire, dans bien des cas, nous laissons des poissons dans l'eau, tellement nous devons être sélectifs dans la façon dont nous pêchons.
Après une telle explication, on pourrait croire que je suis ici pour vous dire que tout va parfaitement bien dans la région du Pacifique et que nous avons la pêche la mieux gérée au monde, mais ce n'est pas le message que je veux vous adresser.
Depuis quelques années, je m'intéresse aux droits de la personne dans le contexte de l'industrie de la pêche ainsi qu'au droit des particuliers à un gagne-pain équitable, un principe auquel souscrit le Canada. Je travaille avec la flotte de pêche à la traîne du saumon, dont le gagne-pain a été donné, par décret ministériel, à un autre secteur, le secteur de la pêche sportive, menant à la faillite les pêcheurs commerciaux à la traîne contraints de demeurer sur la rive. Le gouvernement ne reconnaît même pas que c'est sa propre politique de délivrance des permis qui a détruit leur gagne-pain. Des analystes des politiques respectés ont prévenu le gouvernement qu'il devait, moralement et éthiquement, fournir un mécanisme de transfert équitable s'il enlevait leur gagne-pain à ceux qui ont investi toutes leurs épargnes et leurs capitaux dans des bateaux, du matériel et des permis pour l'octroyer à d'autres usagers.
Vous avez entendu la directrice régionale de la région du Pacifique l'autre jour dire que le gouvernement ne verse pas d'indemnisation. Vous êtes des politiciens. Vous devez faire savoir au ministère qu'il a tort, qu'il a l'obligation, en vertu du principe des droits de la personne auquel souscrit notre pays, de rectifier la situation.
Je collabore également avec la flotte de pêche au crabe dormeur, qui est aussi très bien gérée du point de vue de la conservation. Elle a été l'une des premières flottes au monde à employer des caméras pour surveiller ses prises, mais cela n'est pas sans son lot de problèmes. On tente constamment d'enlever de l'espace attribué à cette pêche pour le réattribuer à d'autres usagers et à d'autres utilisations, que ce soit le secteur de la pêche sportive, d'autres industries telles que les parcs éoliens ou encore pour favoriser la réconciliation avec les Premières Nations ou céder aux pressions des organismes environnementaux qui réclament davantage d'aires marines protégées. On ne reconnaît aucunement à quel point la perte de lieux de pêche est dommageable pour la viabilité économique.
Il est urgent d'intégrer les principes sociaux et économiques dans la structure de gestion pour empêcher que les pêcheurs perdent arbitrairement leur gagne-pain lorsque d'autres intérêts souhaitent se les approprier. Qu'il s'agisse de pêches qui se portent bien et qui sont productives ou de pêches en difficulté, le dénominateur commun à pratiquement toutes les pêches en Colombie-Britannique est que les pêcheurs actifs ne prospèrent pas. Si nous poursuivons sur la voie actuelle, si nous ne changeons rien, nous n'aurons pas d'autre génération de pêcheurs compétents pour assurer la relève. Qui voudrait devenir pêcheur lorsque cela signifie travailler aussi dur, dans des conditions souvent très difficiles, pour un salaire de crève-faim, sans espoir que les choses s'améliorent? Ce n'est pas parce que la pêche n'est pas lucrative; c'est parce qu'une si grande partie de la richesse est capturée par quelqu'un sur la terre ferme qui détient un bout de papier. Cet échec en matière de gestion découle de décennies de négligence du facteur socioéconomique dans l'équation des politiques.
Ce n'est pas un problème unique au Canada; c'est un problème mondial. Je suis allé à Turin, en Italie, il y a quelques années pour une conférence sur l'écogastronomie, et j'ai entendu la même histoire, depuis le Brésil jusqu'en Afrique du Sud en passant par la Méditerranée. Il y a quelques années, la Northwest Atlantic Marine Alliance m'a invité à visiter plusieurs villages de pêcheurs dans les États du Maine, du Massachusetts et du Rhode Island, et j'y ai entendu exactement la même histoire encore et encore.
Il y a de la richesse à côté de nos collectivités et elle est récoltée, mais elle quitte nos collectivités. Elle quitte nos pêcheurs actifs des collectivités adjacentes à la ressource conformément à une idéologie qui échoue, qui dit que les gouvernements n'ont pas besoin d'intervenir ou de s'ingérer dans le marché, que le marché, laissé à lui-même, distribuera équitablement la richesse. Nous constatons à quel point cela fonctionne bien: 26 personnes dans ce monde possèdent maintenant plus de richesse que 3,8 milliards de personnes.
Je reviens à notre entreprise de pêche et à la raison pour laquelle, malgré le fait que nous travaillons extrêmement dur sur l'eau, rapportant des débarquements annuels d'une valeur de plus de 2 millions de dollars et aidant à concevoir certaines des pêches les mieux gérées au monde, mon fils et moi ne faisons pas assez d'argent pour reconstituer le capital de notre entreprise ou en retirer un salaire décent pour nous-mêmes ou notre équipage, ainsi qu'à la raison pour laquelle, depuis quatre ans, nous sombrons dans l'endettement à un point tel que, si nous passons une année de plus sous ce régime, nous serons contraints d'abandonner l'industrie. J'ai réalisé une analyse de la valeur de nos débarquements. Nous payons 80 % de la valeur de débarquement à ceux qui se sont vu octroyer le contingent ou qui achètent ces permis et ce contingent depuis 25 ans et qui me les louent — autrement dit, c'est tout le contraire de propriétaire exploitant.
Après tout ce travail sur l'eau, après toutes ces réunions auxquelles j'ai assisté depuis 20 ans pour concevoir des pêches qui fonctionnent réellement du point de vue de la conservation et de la viabilité, nous sommes forcés de faire faillite parce que, en dépit des avertissements répétés, le gouvernement ne porte pas attention à la répartition équitable des retombées, alors que cela constitue l'une de ses principales responsabilités.
Il était très exaspérant pour moi de constater que pas une fois dans leur présentation au Comité la semaine dernière les directeurs régionaux de ma propre région, le Pacifique, et de la côte Est n'ont parlé de ce problème, même s'il leur a été dit que ce processus entier d'examen porte sur la politique relative au propriétaire exploitant. C'est la raison même pour laquelle cet examen a été demandé. Pas plus loin que la semaine précédant leur présentation, la Fédération des pêcheurs indépendants du Canada a rencontré la directrice régionale et le ministre, et j'ai déclaré que, dans le contexte de la pêche au flétan, la plus grande partie de la valeur des débarquements, soit 66 millions de dollars en 2017, a servi à payer la location à ceux qui détiennent le document, qui ne participent pas à la pêche et qui ne font que détenir un investissement.
Depuis huit mois, dans la foulée de la reconnaissance de l'importance du propriétaire exploitant pour la santé de l'industrie de la pêche sur la côte Est et pour le tissu des collectivités du Canada atlantique, bon nombre des flottes de la Colombie-Britannique reconnaissent qu'on ne peut laisser cette répartition inéquitable des retombées se poursuivre. Les pêcheurs actifs de la pêche au flétan, au chalut, au thon, au crabe, au saumon, à la morue charbonnière, à la crevette, à la panope et à l'oursin ont tous communiqué avec le ministère pour lui faire savoir que ceci représente un grave problème auquel il faut remédier. Nous avons proposé une rencontre des flottes et de ceux qui contrôlent les contingents afin de négocier une entente de partage équitable qui serait intégrée à la structure de gestion par l'entremise de nos processus consultatifs et de notre cadre de travail relatif au Plan de gestion intégrée des pêches et appuyée, à sa discrétion, par le ministre.
Nous avons entendu la directrice régionale vous dire clairement que le mandat du ministre et la Loi sur les pêches prévoient la répartition équitable des retombées. En effet, il s'agit de l'une des responsabilités fondamentales du gouvernement en ce qui a trait à l'utilisation des ressources qu'il gère. Or, lorsque le Comité lui a demandé directement si le ministère surveille les coûts de location, le deuxième responsable en importance a répondu que non, il ne le fait pas.
On pourrait faire appel à un certain nombre de mécanismes pour rendre les retombées de la pêche à ceux qui pêchent la ressource et à la population canadienne, de la modification des incitatifs fiscaux aux cadres de négociation collective en passant par les politiques précises relatives au propriétaire exploitant, sans oublier le mécanisme de partage équitable que nous proposons. Il ressort clairement de la présentation du ministère au Comité que le ministère a l'intention de ne pas tenir compte de ce problème. Par conséquent, nous avons besoin que vous lui en donniez la directive politique, afin de vous acquitter de votre rôle à titre de représentants élus, de sorte que le gouvernement fasse ce qui s'impose pour corriger ce scandaleux échec du marché et appuyer la création d'un secteur de la pêche viable et productif en Colombie-Britannique.
Merci de m'avoir donné l'occasion de m'adresser directement à vous en cette période critique pour notre industrie de la pêche.
Bon après-midi, chers membres du Comité permanent. Je vous remercie de cette occasion de prendre la parole au sujet de la pêche sur la côte Ouest. Quiconque connaît ma famille sera étonné si je parviens à tout dire en sept minutes.
Je m'appelle Peter de Greef. Je suis un pêcheur commercial actif. Mon oncle et moi sommes partenaires à bord d'un bateau de pêche indépendant, l'Optimist No. 1, qui récolte chaque année du flétan, de la morue charbonnière et du germon, et qui est également autorisé à pêcher le saumon et le sébaste. Trois générations de la famille participent à notre exploitation. Au cours des 35 dernières années, j'ai pêché le saumon et le thon à la traîne, j'ai pêché le flétan et la morue charbonnière à la palangre, j'ai pêché le hareng rogué au filet maillant et j'ai empaqueté l'oursin et l'holothurie.
Depuis 12 ans, c'est-à-dire depuis que je suis devenu propriétaire de bateau et détenteur de permis, je donne bénévolement de mon temps au sein de divers conseils, comités et associations. À l'heure actuelle, je suis vice-président de l’Association des pêcheurs de thon de la Colombie-Britannique et membre du conseil d'administration de la Pacific Halibut Management Association. Je siège au conseil consultatif du thon ainsi qu'au comité consultatif du Site d'intérêt extracôtier du Pacifique. Récemment, j'ai été nommé commissaire canadien à la Commission internationale du flétan du Pacifique.
Je mentionne cela simplement pour montrer mon expérience. Je ne suis pas ici pour représenter quelque entité que ce soit autre que moi-même, à titre de pêcheur indépendant actif.
Ce dont l'entreprise de pêche indépendante de ma famille a besoin pour prospérer, c'est d'un accès stable au poisson, d'un accès aux lieux de pêche, d'un accès à des capitaux, d'un accès à des marchés concurrentiels et d'un accès à une juste part des profits. Mon équipage et moi avons également besoin d'un milieu de travail sûr.
Pour moi, un accès stable au poisson signifie un stock stable et viable et la capacité de pêcher ce stock de manière prévisible. Cela dit, les contingents individuels transférables fonctionnent bien, surtout combinés à notre système sophistiqué et de renommée mondiale de gestion intégrée du poisson de fond, lequel permet bien peu de gaspillage des prises accessoires. Les pêcheurs sont excellents pour cibler les espèces qu'ils recherchent, mais moins bons pour éviter les prises accessoires. Ce système les tient responsables et change les comportements. La transférabilité est essentielle pour que cela fonctionne adéquatement.
L'accès aux lieux de pêche, c'est simple: la capacité de pêcher le poisson là où il se trouve ou là où il pourrait se trouver. Si elles ne sont pas mises en oeuvre adéquatement, les aires de protection marines menacent cet accès.
L'accès à des capitaux est aussi un problème. Les permis et les contingents sont extrêmement dispendieux. En ce moment, la plupart des pêcheurs prennent des dispositions avec les transformateurs, les détenteurs de contingents importants, leur famille ou des établissements de crédit. Les prêts des transformateurs viennent généralement au détriment de l'indépendance. Les établissements de crédit vont accorder des prêts pour les bateaux, mais bien peu vont en accorder pour les permis et les contingents. Ceux qui le font exigent une mise de fonds minimale de 50 %. Un lien familial m'a été d'une aide inestimable pour obtenir un contingent et des capitaux, mais ce n'est pas tout le monde qui a cette chance.
L'accès à des marchés concurrentiels qui achètent et paient bien est également crucial. D'après ce que je peux voir, les acheteurs font de l'excellent travail pour ce qui est de développer de nouveaux marchés pour certaines pêches, mais ont de la difficulté à faire de même pour d'autres. Cependant, je dois souligner que, compte tenu du nombre élevé de pêcheurs rattachés à des entreprises, il peut être difficile pour les pêcheurs indépendants d'obtenir un prix concurrentiel.
Afin de conserver un équipage expérimenté et dévoué et de veiller à l'entretien sécuritaire d'un bateau, il est important d'avoir une juste part des profits. Notre exploitation familiale actuelle a une entente de partage équitable. Nous en sommes venus là parce que mon oncle souhaitait que je continue de diriger son bateau et de pêcher ses contingents et que j'avais besoin d'une certaine sécurité pour continuer de pêcher. Par le passé, j'ai été membre de l'équipage d'une exploitation louée de pêche aux oeufs de hareng. Les choses n'allaient jamais très bien, alors j'hésitais à me lancer dans l'aspect location de la pêche.
L'entente avec mon oncle s'est bien passée, et nous avons décidé de former un partenariat, d'acheter le bateau de mon père et d'obtenir accès à ses contingents. Cela a bien fonctionné au fil des ans pour l'équipage, le bateau et les détenteurs de contingent, car tout le monde travaille dans le même sens. Il y a des défis, mais ceux-ci sont surtout attribuables à des pressions provenant de l'extérieur.
Le peu de contingent que je détiens, je l'ai acheté il y a quelques années, avant que la valeur du poisson de fond ne monte en flèche. Il me serait pratiquement impossible aujourd'hui d'acheter un contingent de poisson de fond et de maintenir la structure de partage équitable. Premièrement, les prix sont si élevés pour les contingents que le rendement serait insuffisant pour couvrir les taux d'intérêt.
La vérité, c'est qu'il existe toujours beaucoup d'ententes de partage équitable, mais pour combien de temps?
Un autre aspect dont il faut tenir compte est la sécurité. J'ai été consterné de lire que la pêche commerciale est l'industrie la plus mortelle, selon une récente analyse du Globe and Mail. L'idée qu'il soit 14 fois plus dangereux d'être pêcheur que d'être policier m'a renversé. J'attribuerais une bonne partie de cela à des facteurs socioéconomiques. Lorsqu'il n'y a pas d'argent pour attirer des équipages de qualité à long terme ou pour investir dans l'entretien des bateaux et dans de nouveaux bateaux, tout problème qui survient est exacerbé. Les équipages inexpérimentés et les incidents liés à une défaillance du bateau mènent à un nombre accru de décès, selon moi.
Le système de contingent individuel transférable fait de l'excellent travail pour atteindre ses objectifs de conservation, mais malheureusement, aucun objectif socioéconomique n'a été déclaré, donc sur ce plan, c'est un échec. Cela ne veut pas dire qu'il est trop tard. Si, un peu comme pour l'intégration du poisson de fond, on déclare des objectifs, les pêcheurs de la Colombie-Britannique vont les atteindre. Une solution conçue en Colombie-Britannique, élaborée par les parties intéressées de l'industrie par l'entremise de nos processus consultatifs et comportant des objectifs socioéconomiques précis est la meilleure façon de procéder.
Chaque pêche comporte ses propres défis, alors il est préférable de continuer de consulter chacune individuellement. Une initiative communautaire est la proposition de partage des risques et des retombées. Elle jouit de l'appui d'un grand nombre de capitaines, de membres d'équipage, de propriétaires de bateau et de détenteurs de permis et de contingent. On pourrait la comparer à d'autres propositions pour déterminer laquelle fonctionne le mieux pour chaque pêche.
Bref, la côte Ouest est unique, et bien que l'industrie de la pêche n'ait pas d'objectifs socioéconomiques précis à l'appui à l'heure actuelle, de bonnes choses se produisent. Pour favoriser adéquatement le changement, il faut créer, au niveau du conseil consultatif du ministère des Pêches et des Océans, un processus assorti des objectifs déclarés de conservation et socioéconomiques à des fins de consultation, et ce, pour bon nombre de pêches sur la côte Ouest.
Merci. C'était parfait. Vous avez à peine dépassé les sept minutes, donc vous avez été le meilleur de tous.
Nous allons maintenant passer aux questions. Je rappelle aux députés que je devrai être strict en ce qui concerne le temps de parole. Si je vous dis que votre temps est écoulé, alors votre temps est écoulé.
Pour les sept premières minutes, nous allons donner la parole à un ministériel.
Monsieur Hardie, vous avez la parole.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci à tous de votre présence, en personne ou par vidéoconférence.
Monsieur de Greef, vous avez dit que vous avez une entente de partage équitable en raison d'un pacte de famille, si vous le voulez. Quelle est la part du détenteur de contingent par rapport à celles du transformateur et du pêcheur?
Nous avons commencé à 50 % pour le contingent, 50 % pour le bateau et l'équipage. Les conditions du marché ont influencé cela il y a quelques années parce que les prix de location étaient très élevés, alors nous sommes maintenant à 60 % pour le contingent et 40 % pour l'équipage. Le bateau a pris une part plus petite pour que l'équipage demeure entier.
Nous avons entendu que le processus d'acquisition de contingent passe par le paiement du contingent au préalable. Autrement dit, avant même d'aller pêcher, il faut trouver et payer le contingent.
Monsieur MacKay, est-ce que cela correspond à votre expérience?
Oui, c'est un petit contingent de flétan, et habituellement, dès que la poignée de main est échangée, le chèque est dans les mains du détenteur du permis associé au contingent. Parfois, ce chèque vient d'une entreprise, parfois des pêcheurs indépendants eux-mêmes, mais oui, le risque est pris au préalable.
Il n'y a pas de mécanisme transparent de transfert de contingent disponible. Il y a eu quelques tentatives du secteur privé pour en mettre un au point, mais cela n'a pas fonctionné.
Bien souvent, la personne connaît quelqu'un qui connaît quelqu'un qui a un contingent. C'est ainsi que cela fonctionne. Sinon, les entreprises de transformation du poisson en recherchent activement et se battent pour faire l'offre la plus intéressante afin d'obtenir suffisamment de contingents pour l'année.
Pour notre bateau, une grande partie de cela se fait par l'entremise de l'entreprise de transformation, car nous n'avons pas ce genre de relations et d'accès. Nous n'avons pas non plus le portefeuille bien garni qu'il faut pour louer le contingent immédiatement. Il faut réellement avoir un registre transparent des contingents dans ce processus.
J'allais vous poser la question, monsieur Nobels.
Comment savez-vous qui a un contingent à vendre, et comment l'obtenez-vous? Quel est le processus?
D'après mon expérience, c'est habituellement l'entreprise pour laquelle vous pêchez qui s'en occupe, à moins que vous ayez pris des dispositions au préalable avec un particulier. Il est très difficile de savoir qui a un contingent disponible à moins que vous passiez par une entreprise de transformation.
Pensons à l'entreprise de transformation et à sa position dans ce dossier. Elle vous aide à obtenir le contingent, mais, bien entendu, vous êtes alors tenu de pêcher pour elle et vous êtes payé ce qu'elle est prête à payer lorsque vous débarquez le poisson. Cela rappelle presque la vieille chanson Sixteen Tons, de Tennessee Ernie Ford; vous êtes vendu au magasin de l'entreprise, en quelque sorte.
Le paiement immédiat du montant au détenteur de contingent, quelle que soit la valeur finale des débarquements qui s'ensuivront, semble vraiment déséquilibrer l'équation risque-récompense ici.
Madame Thorkelson, peut-être que vous pourriez parler de cela.
Le contrôle est la clé. C'est pour cela que les transformateurs aiment ce système.
Lorsque je me suis entretenue avec un petit transformateur, le gestionnaire a dit que, personnellement, il déteste cela, mais que c'est bon pour l'entreprise. C'est ainsi qu'elle s'assure d'obtenir du poisson. Elle s'approprie un contingent et le revend, ce qui lui garantit qu'elle obtiendra de l'argent pour satisfaire ses besoins.
Le transformateur a intérêt à obtenir un contingent, car cela lui garantit qu'il obtiendra le produit voulu pour son usine de transformation.
Est-ce que, essentiellement, le pêcheur se fait dire par le transformateur: « D'accord, nous avons un contingent pour toi et voici ce que cela va te coûter »? Ou y a-t-il une forme de transparence, de sorte que le pêcheur sache, à tout le moins, combien le propriétaire du contingent demandait pour ce contingent?
Je ne crois pas. Les pêcheurs à qui j'ai parlé font affaire avec l'entreprise de transformation. Ils ne savent pas vraiment à qui appartient le contingent qu'ils obtiennent; ils l'obtiennent simplement par l'entremise de l'entreprise de transformation.
Nous faisons affaire avec une entreprise concernant les contingents de saumon en ce moment, et elle traite ses contingents comme s'ils étaient une allocation aux entreprises. Elle prend tous ses contingents, les place dans un grand panier et les pige à mesure que la pêche s'effectue.
Les pêcheurs sont liés par contrat à l'entreprise. Ils paient également un montant promis immédiatement qui est déduit de leur règlement. Ils sont liés par contrat à l'entreprise, alors ils ne vont pas simplement s'enfuir. Cependant, une entreprise va prendre son contingent et simplement le répartir.
Monsieur Edwards, en ce qui concerne l'entente de partage équitable, envisagez-vous essentiellement un pourcentage réglementé déterminant qui obtient quoi, ou tiendriez-vous également compte du coût final du poisson tel qu'exigé par le pêcheur au débarquement ou par le transformateur lorsqu'il le vend?
Expliquez-nous à quoi ressemblerait un partage équitable.
J'ai passé de nombreuses années en Colombie-Britannique à m'occuper de cadres de négociation fondée sur les intérêts avec diverses flottes.
Je dirais qu'il faut utiliser un processus semblable, fondé sur les intérêts, et qu'il doit être transparent. Il faut connaître le coût du navire. Il faut savoir de quelle somme dispose l'investisseur, combien il faudra emprunter, ou utiliser l'argent pour obtenir un quota. On met tout cela sur la table afin de déterminer quel type de navire il faut.
On négocie ce dont on a besoin en fonction de ce qu'on croit... c'est un pourcentage.
On ne le sait pas. C'est une question de pourcentage.
En ce moment, les gens paient à l'avance, disons 5 $ ou 6 $ la livre, et le transformateur va se retrouver dans une situation délicate, tout autant que le pêcheur, car le marché peut fluctuer. Ils ne savent pas comment les choses vont évoluer.
On essaie de traiter cela comme une entente de partage négociée, comme un pourcentage de la valeur des débarquements avant le début de la saison, afin d'éviter ce genre d'arrangement. On règle la question à la vente du poisson.
C'est ce qu'ils font à Terre-Neuve. J'ai parlé à Dave Decker, de la FFAW. Cette année, grâce à ce processus et davantage une sorte de processus de négociation collective, les pêcheurs de flétan ont obtenu de l'entreprise 12,75 $ la livre au quai. J'en obtiens environ 1,50 $.
Merci.
Nous passons maintenant aux conservateurs. Monsieur Doherty, vous disposez de sept minutes tout au plus.
Merci, monsieur le président.
Je remercie nos invités d'aujourd'hui de leur présence. M. Edwards et tous les autres, merci de votre témoignage sincère. Il s'agit d'un sujet dont nous avons beaucoup discuté. Je remercie ceux qui sont venus de loin pour être ici aujourd'hui.
Ma première question vous touche tous de manière personnelle, alors sentez-vous bien libres d'y répondre. Selon vous — et je veux dire vous tous —, qui bénéficie le plus du système de QIT?
Je vous écoute, monsieur de Greef.
C'est donc pour cela que les témoins de la semaine dernière ont déclaré que c'est pour eux un moyen de gérer la flotte, le nombre de navires en mer. C'est bien cela?
D'accord.
Monsieur Edwards, monsieur MccKay et madame Thorkelson, êtes-vous tous d'accord avec cette affirmation?
En fait, non. C'est la transférabilité qui pose problème. On peut certainement avoir un stock de poissons. C'est un outil de gestion de la pêche intégrée du poisson de fond, mais il existe d'autres moyens. Une fois qu'on a décidé de répartir les poissons en quotas et de les transférer, il faut examiner d'autres mécanismes de transfert — peut-être un partage équitable, peut-être seulement entre les pêcheurs —. Les pêcheurs doivent trouver diverses solutions de rechange au système actuel de QIT fondé sur l'argent.
Qui, en dehors des pêches manifestement, détient la balance du pouvoir? Le transformateur? Le propriétaire du navire? Le pêcheur?
Oui. C'est le détenteur de quota qui détient le pouvoir au bout du compte. C'est lui qui peut retenir le poisson.
La semaine dernière, des témoins nous ont dit que pour détenir un quota, il faut aussi avoir un permis de pêche. Êtes-vous au courant d'exemples concrets de groupes, d'organisations, d'entreprises ou de particuliers qui détiennent des quotas, mais qui ne pêchent pas, qui ne possèdent pas de permis de pêche?
M. Edwards?
Oui, on vient de réaliser une analyse à ce sujet. Il existe par exemple 435 permis de pêche au flétan, mais seulement environ 140 navires ont pêché l'an dernier. Il existe de nombreux permis inutilisés. Ils ne représentent qu'environ 0,1 % des quotas. En ce moment, ils servent de permis de transfert de quotas, bien souvent au profit de sociétés ou de transformateurs. Ce sont eux qui détiennent les permis et s'en servent pour transférer des quotas.
Je ne suis pas totalement convaincu que c'est le mécanisme de transfert qui pose problème. S'il s'agissait de propriétaires-exploitants et que seuls des pêcheurs détenaient des quotas, la situation serait bien différente. On pourrait continuer d'effectuer des transferts pour s'assurer que notre entreprise demeure viable. C'est nécessaire pour la pêche au poisson de fond, mais il faut se débarrasser du système des propriétaires absents.
D'accord. Je vais reformuler ma question. Savez-vous si quelqu'un détient un quota sans avoir de permis de pêche?
M. Nobels.
Oui, beaucoup de particuliers et de sociétés qui détiennent des quotas ne les utilisent pas. Ces deux dernières années, l'organisme de développement du poisson de fond dont je fais partie a eu vent de rumeurs selon lesquelles d'importants fonds étrangers souhaitaient acheter des quotas, qui sont maintenant détenus par des intérêts étrangers. Ces détenteurs ne pêchent pas. Ils louent ces quotas à des sociétés qui pêchent ici et qui détiennent des permis.
Non. On peut détenir un quota sans être un citoyen canadien, mais pour pratiquer la pêche, il faut être citoyen canadien.
D'accord, mais la semaine dernière, M. Thomson nous a dit que pour détenir un quota, il faut détenir un permis de pêche. Je pose la question pour en être bien certain.
Des conventions de fiducie peuvent toutefois se cacher derrière certains permis. C'est pourquoi je crois qu'un registre serait fort utile, par souci de transparence. On pourrait ainsi comprendre ce qui se passe, et cela pourrait aider les banques et d'autres établissements de prêt.
En effet, cela permettrait de dire qu'on possède un bien de valeur. On pourrait obtenir du financement pour des activités, ou...
D'accord.
Revenons aux commentaires des représentants qui étaient ici la semaine dernière. M. Edwards, je suis entièrement d'accord.
Diriez-vous que le témoignage de la semaine dernière était inexact et qu'il faut posséder un permis pour détenir un quota? Nous savons que des entités détiennent un quota sans avoir de permis.
Il faut avoir un permis, mais il s'agit de savoir qui détient le permis. D'où vient l'argent? Ce pourrait être une société fictive, et on ne peut pas vraiment faire de suivi dans ce cas. Il faut pouvoir rattacher le permis à un quota, mais cela ne nous apprend pas vraiment quoi que ce soit. Cela ne permet pas de savoir qui est le véritable propriétaire.
Donc, selon le témoignage de M. Thomson, si vous n'avez pas de permis pour pêcher ce poisson, vous possédez un permis, mais vous n'avez pas le permis lié à ce quota. Est-ce bien cela?
D'accord. Je suis vraiment content d'apprendre tout cela, car comme nous ne sommes pas des pêcheurs, nous essayons de comprendre tout cela un peu mieux.
Sur ce, je cède la parole à mes collègues. Merci beaucoup.
Merci, monsieur Doherty.
Nous passons maintenant au NPD. Monsieur Donnelly, vous disposez d'un maximum de sept minutes.
Merci, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins d'aujourd'hui, qu'ils soient présents ici ou par vidéoconférence.
Si ce n'est déjà fait, j'invite tous ceux qui ont fait des recommandations à les transmettre par écrit à la greffière du Comité. Bon nombre de témoins ont fait des recommandations, et ce serait vraiment très utile au Comité d'avoir ces recommandations par écrit. Cela vaut pour tous ceux qui font une présentation, même s'il ne s'agit que d'un courriel dans lequel vous écrivez « Voici ma recommandation ».
Madame Thorkelson, vous avez fourni une très longue recommandation exhaustive. Si nous pouvions l'avoir par écrit — ce qui doit être le cas si vous avez soumis votre présentation —, cela nous serait très utile.
Monsieur Nobels, vous avez parlé de différents rapports, dont le rapport « Just Transactions, Just Transitions » d'Ecotrust Canada, et le rapport « Fisheries that work » d'Evelyn Pinkerton. Si vous pouviez remettre un exemplaire de ces rapports au Comité, cela nous serait utile de pouvoir les consulter. Ainsi, les membres du Comité, la greffière, les analystes, bref, tout le monde pourrait examiner les documents dont vous avez parlé.
J'aimerais commencer avec vous, monsieur Edwards.
Vous avez parlé d'un mécanisme permettant d'obtenir une juste part, que vous avez expliqué à M. Hardie lorsqu'il vous a posé une question à ce sujet. Je me demande si vous pouviez nous en dire un peu plus. Vous avez mentionné un registre transparent sur les quotas. Y a-t-il d'autres éléments de ce mécanisme permettant d'obtenir une juste part que vous aimeriez que le Comité examine, et même que le gouvernement mette en oeuvre?
Un constat est en train de s'établir depuis huit ou neuf mois, et je crois que cela est dû en grande partie aux travaux de ce comité. Vous avez recueilli les témoignages de nombreux jeunes pêcheurs de la Colombie-Britannique qui ont dit ne pas pouvoir accéder aux poissons. Beaucoup de pêcheurs, même des détenteurs de quotas, admettent qu'au train où vont les choses, il n'y aura plus d'équipage, plus de capitaine et personne pour prendre la mer. Il faut donc trouver une solution.
Ce mécanisme de partage n'est qu'une des solutions qui ont été proposées. Nous en étudions d'autres. Nous disons simplement qu'il faut s'asseoir avec les détenteurs de quotas pour parvenir à une entente de partage équitable dans ce dossier.
Peu importe le type de pêche auquel j'ai participé — poisson de fond ou autre —, tous les pêcheurs actifs sont d'avis qu'il s'agit d'une excellente idée, mais que le pouvoir discrétionnaire du ministre est nécessaire pour concrétiser le tout. Autrement dit, si certains ne respectent pas l'entente négociée conclue avant le début de la saison, le ministre a le pouvoir, comme cela fut le cas au sujet des ententes civiles illégales sur la côte Est, de retirer des permis et de mettre fin aux activités commerciales.
Le ministre a le pouvoir de déclarer: « D'accord. Vous avez négocié une entente, qui fera maintenant partie du PGIP, et nous allons la mettre en oeuvre. Il faut la respecter, sinon il y aura un processus d'appel et de très fortes chances que la personne perde son permis ces prochaines années. »
C'est l'idée générale. Il y a encore beaucoup à faire pour créer un processus qui permettrait aux gens d'être représentés. J'ai parlé du processus utilisé dans le cas du poisson de fond. Nous avons travaillé pendant cinq ans pour parvenir à un processus d'intégration. Sur la côte Ouest, les membres de l'industrie sont habitués à travailler fort en matière de processus, et je sais que nous pouvons réussir.
Merci.
Mme Thorkelson, votre recommandation était elle aussi exhaustive. Vouliez-vous y ajouter quelque chose? Le comité se penchera sur votre recommandation et sur la façon de la scinder en différentes parties. Souhaitez-vous ajouter autre chose pendant la minute ou deux qu'il me reste?
Je pense que Peter de Greef a dit ce que j'ai dit, mais de manière beaucoup plus succinte et mieux.
Chaque pêcherie aura son propre plan pour sortir de l'impasse dans laquelle nous nous trouvons. Selon moi, il faut que ce soient les pêcheurs en activité qui s'assoient à la table des négociations et décident de leur avenir. Le gouvernement du Canada doit donner la priorité aux pêcheurs en activité et aux collectivités, et non aux investisseurs et aux avantages dont ils bénéficient.
La région du Pacifique, en ce moment, cherche avant tout à offrir des avantages aux investisseurs, alors que cela devrait être l'inverse: elle devrait protéger les pêcheurs en activité et les collectivités côtières.
Je pense que les pêcheurs ont le droit de décider eux-mêmes ce qui leur conviendrait le mieux. Ensuite, les investisseurs doivent être invités à participer aux discussions pour parler du processus de transition de la situation actuelle à une situation où les pêcheurs en activité auraient le sentiment qu'ils peuvent vivre décemment.
J'ai une minute.
Monsieur de Greef, vous avez indiqué que le système des QIT marchait bien pour le poisson, mais de toute évidence, pas trop bien pour les pêcheurs. On nous a dit que de nombreuses populations de poissons déclinent depuis des décennies. Par conséquent, si le système de gestion n'est pas responsable de ce déclin, comment peut-on l'expliquer?
Il y a de très nombreuses espèces. Je pourrais parler plus particulièrement du flétan. C'est la même chose qui se passe pour différentes espèces de saumon. La taille en fonction de l'âge est un gros problème. Les poissons ne sont plus aussi gros qu'ils l'étaient. Il y a toujours le même nombre de poissons. C'est un problème environnemental, selon moi, et pas nécessairement un problème lié à la pêche.
Oui, je pense que la CIFP travaille là-dessus, en ce qui concerne le flétan précisément. Pour ce qui est du ministère des Pêches et des Océans, je ne sais pas.
Merci, Monsieur Donnelly.
Revenons du côté du gouvernement: monsieur Rogers, vous avez sept minutes, maximum.
Merci, monsieur le président.
Merci à tous les témoins qui comparaissent aujourd'hui. Je vais commencer par M. Edwards.
Vous avez utilisé l'expression « dénominateur commun » quand vous parliez des pêcheries. Vous disiez que les pêcheurs en activité avaient du mal à joindre les deux bouts alors que les titulaires de permis à quota récupéraient les profits.
Comment peut-on réparer un système que vous qualifiez d'inopérant pour les pêcheurs?
C'est dans ce but que nous avons fait quelques propositions, pour essayer de trouver une manière de partager les revenus équitablement. Nous avons fait des propositions allant dans ce sens. Il y a, potentiellement, d'autres manières de faire cela, au fil du temps. On peut développer, avec le temps, un cadre de travail pour les propriétaires-opérateurs ici, en Colombie-Britannique. On peut avoir recours à des incitatifs fiscaux. Il y a différentes manières de renverser la tendance pour que l'argent revienne aux pêcheurs en activité — 20 % dans la situation actuelle — plutôt que vers les détenteurs de quotas comme moi — 80 %.
Je ne suis pas dans la même situation que Peter parce que je n'ai pas reçu de quotas par l'intermédiaire de ma famille. On va constater, de plus en plus, que ceux qui se sont vu attribuer des quotas initialement ne pêchent plus. Leur nombre est déjà très élevé. Il faut faire des changements qui s'avèrent fructueux pour la prochaine génération. C'est vraiment là où nous en sommes. Vous avez entendu la prochaine génération poser la question de son devenir si une telle situation persiste. Nous devons trouver une solution.
Monsieur Nobels, vous avez déclaré que les QIT étaient nocifs. Vous avez parlé de transfert par opposition à achat de quotas et d'autres problèmes relativement aux QIT. Selon vous, doit-on réparer ou changer le modèle des QIT actuel?
Comme Dan l'a dit, le transfert n'est pas, en soi, un problème, s'il y a un système de contrepoids dans le reste de la structure, ce qu'il n'y a pas en ce moment. Cela permet aux investisseurs étrangers et à ceux qui n'appartiennent pas à l'industrie de commencer à capitaliser sur le système des quotas. Au bout du compte, le fait que les investisseurs puissent accaparer les quotas, au détriment des pêcheurs actifs, est vraiment le problème primordial. Je suis d'accord avec tous les autres intervenants. Il faut rendre le poisson et les profits qui en découlent à ceux qui pêchent vraiment et aux collectivités dans lesquelles ils vivent.
Dan a expliqué plusieurs manières de faire cela. Dans le monde, différentes méthodes ont été utilisées pour [Inaudible] réorganiser les régimes de quotas et les rendre plus sensés et équilibrés. Nous devons nous pencher là-dessus et décider lesquels prendre pour exemple pour gérer nos pêcheries de manière plus durable.
David, vous avez fait référence à des permis associés et vous avez dit qu'ils devraient disparaître. Pensez-vous que ce soit une solution simple? Pourriez-vous nous en dire plus là-dessus?
On peut faire simplement les choses dès maintenant. Si un pêcheur demande la scission de ses permis associés au ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne, il devrait être autorisé à le faire et à les liquider. C'est trop demandé à un nouveau venu dans l'industrie d'acheter une série de permis. C'est déjà bien difficile d'en acheter un, alors trois! Comment dissocions-nous ces permis? Je dis que c'est une solution simple parce que je le pense. Il se pourrait bien que le ministère dise autre chose, mais pourquoi le ferait-il si un pêcheur veut dissocier ses permis et vendre son permis de pêche à la traîne à un jeune de la collectivité qui veut faire ses débuts dans l'industrie?
Nombre de ces permis se retrouvent dans les mains de l'IPCIP. C'est un excellent programme, et Ken Hardie s'est fait un point d'honneur, l'autre jour, de dire que l'IPCIP devait donner plus d'accès aux pêcheurs des Premières Nations. Certains de ces permis retournent à l'IPCIP.
Peter, vous disiez que les IQT respectaient leurs objectifs sur le plan de la conservation, mais pas sur le plan socio-économique pour les pêcheurs ou leur collectivité. Faudrait-il changer cela et, le cas échéant, comment?
Comme Dan l'a dit, une proposition a été faite, similaire à celle que nous faisons, qui garantirait une répartition plus juste des profits. La donne était meilleure avant, mais elle a changé, sous l'influence de [Inaudible]. Vous ne pouvez pas vous attendre à ce qu'un pêcheur accepte de gagner moins d'argent que sur le marché ouvert. Pour que le prix de ces locations soit accepté, il faudrait qu'il soit fonction d'un pourcentage, de sorte que les risques et les revenus soient équitablement partagés. Cela serait bénéfique et cela pourrait marcher, selon moi. Cela marche pour nous depuis des années.
Merci.
Joy, vous avez dit représenter les pêcheurs et les ouvriers des usines. Vous avez fait notamment remarquer que beaucoup veulent quitter l'industrie, mais ne peuvent se le permettre et que les jeunes veulent y travailler, mais n'ont pas les moyens financiers de le faire. Vous avez déclaré que les ressources étaient concentrées entre les mains de quelques entreprises et investisseurs.
Qu'est-ce que l'UFAWU aimerait que l'on fasse du système des QIT?
Il serait facile de proposer simplement de s'en débarrasser, mais c'est une vue simpliste. Il faut, en fait, que les gens qui s'occupent de la gestion intégrée de la pêche du poisson de fond discutent des conditions qui seraient satisfaisantes pour les pêcheurs en activité.
J'ai beaucoup de questions à poser à propos de l'entente de partage équitable, et si nous parvenons à la mettre sur pied, les pêcheurs en activité devraient participer aux décisions.
La situation pourrait être complètement différente dans l'industrie du saumon en ce qui concerne la pêche à la senne, au filet maillant et à la traîne.
Il y a un dénominateur commun, je pense, à savoir que ces gens travaillent pour gagner leur vie et n'ont pas vraiment envie de devoir payer de grosses sommes pour avoir accès à ces ressources. Leurs parents y avaient accès gratuitement. Pourquoi devraient-ils payer quelqu'un pour y accéder? Peter paie son oncle, mais beaucoup de gens paient des docteurs ou des avocats qui ont investi dans ce quota.
Merci, Monsieur Rogers.
Nous revenons maintenant aux conservateurs.
Monsieur Arnold, vous avez au maximum cinq minutes.
Merci, monsieur le président, et merci à tous les pêcheurs qui comparaissent aujourd'hui.
Vos témoignages sont très intéressants. Cela devient de plus en plus intéressant au fur et à mesure de nos découvertes. Ce que nous apprenons, par ces témoignages, va nous aider beaucoup à formuler nos recommandations.
Je ne suis pas sûr d'avoir bien compris: la pêche au flétan serait la première à avoir été intégrée au système des quotas. Vous pourrez me le confirmer ou non après. Je crois comprendre que la sécurité des pêcheurs est l'une des raisons pour lesquelles cette décision a été prise. Dans l'ancien système, le premier à sortir et à revenir est celui qui optimisait la valeur de sa pêche. Les pêcheurs sortaient donc en mer dans de dangereuses conditions et ainsi de suite. Le système des QIT a permis aux pêcheurs de sortir n'importe quand lorsque les conditions météorologiques étaient meilleures. Initialement, ces quotas étaient définis pour chaque pêcheur, en fonction de sa précédente pêche. Puis les quotas sont devenus transférables.
Est-ce que cela s'est passé à peu près comme ça, ou est-ce que j'ai mal compris?
Monsieur de Greef, voulez-vous commencer?
Au cours d'une décennie, à un moment donné, la saison du flétan en particulier a raccourci et est passée de 60 à 6 jours. La rationalisation s'est poursuivie et la saison de la pêche au flétan a continué à se réduire comme peau de chagrin et, pendant ce temps, le nombre de pêcheurs augmentait... À cette époque, en 1987, si je ne m'abuse — je ne pêchais pas, ce jour-là — il y a eu une grosse tempête. Neuf navires ont coulé et trois personnes sont mortes.
Je suis convaincu que c'est cet événement qui a précipité l'adoption des quotas. Je crois, néanmoins, qu'on considérait plus cela comme un outil de conservation et de gestion. Il était très difficile de gérer la ressource quand la saison était si courte.
Soit dit en passant — je suis commissaire à la CIFP — il y a une pêcherie au flétan, dans le Sud, qui est accessible à tous. On y a accès pendant 10 heures et c'est extrêmement dangereux. Les pêcheurs veulent changer les choses et réfléchissent à d'autres solutions.
On a d'abord réparti les prises de flétan en quotas, mais pas des quotas transférables. Il y avait des quotas aussi pour la rascasse. Vous pêchiez votre quota puis trois mois plus tard, tous les quotas non atteints étaient remis en jeu. Si vous souhaitiez ressortir pêcher, vous vous inscriviez et vous vous voyiez attribuer un autre quota.
Les quotas non remplis étaient repris par le gouvernement qui les distribuait alors aux vrais pêcheurs qui sortaient en mer pêcher. Il fallait sortir pêcher en mer pour se voir allouer un quota.
C'était comme ça que cela se passait dans le cas de la rascasse. C'est une autre manière de réglementer la conservation et l'accès, toujours aux mains du gouvernement, cependant. Il n'y avait pas de reliquats. Bien sûr, le gouvernement a changé cela et a transformé ces quotas en quotas transférables, dans le cadre de la gestion intégrée du poisson de fond.
D'abord, la pêche au flétan a été répartie en quotas. Cela a suscité beaucoup de questions parce que c'était la première fois qu'on attribuait d'importants quotas, même s'il y a eu l'ormeau avant le flétan. Dans le cas de l'ormeau, cela a été catastrophique parce qu'il a disparu. On avait donc des quotas de rien. Le flétan a été intégré au système des quotas vraiment vite.
Nous avons à peu près compris comment nous en sommes arrivés là où nous en sommes aujourd'hui: ce sont tous ces QIT, échangeables et monétisables, qui valent très cher, qui en sont responsables. Selon vous, comment pourrions-nous faire pour revenir à un système qui fonctionne? Ce que j'essaie de dire, c'est que nous avons expliqué comment nous en sommes arrivés là. Comment fait-on maintenant pour aller là où nous voulons aller?
Un grand nombre de pêcheurs ont proposé un grand nombre d'idées. Une partie de la réponse dépend de la valeur du contingent. Un contingent ne vaut pas grand-chose dans une pêche dégradée. Les pêcheurs disent: « Achetons le contingent. Plaçons-le dans un groupe et voyons la suite. » Pour d'autres pêcheurs, par exemple, dans le cas de pêches comme celle du flétan, où les contingents ont une grande valeur et où ils sont acquis par de nombreux investisseurs, il pourrait falloir un programme de 10 ou 15 ans, dans le cadre duquel une partie des contingents seraient achetés par le gouvernement, regroupés puis redistribués aux pêcheurs actifs.
Il y a énormément d'idées qui circulent. C'est la raison pour laquelle notre organisme n'a jamais proposé d'idées bien définies. Bien des idées pourraient fonctionner de différentes façons dans différentes pêches.
Oui, cinq minutes, c'est court quand le sujet est intéressant.
Nous passons maintenant du côté du gouvernement.
Monsieur Fraser, vous avez cinq minutes ou moins. Cela va probablement clore cette partie avant que nous passions au prochain groupe.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci à tous d'être venus. C'est très intéressant.
Dan, je pourrais peut-être commencer par vous et continuer sur une question à laquelle vous avez répondu au sujet de la propriété, lorsque vous parliez, je suppose, de l'octroi des permis et des contingents. Diriez-vous que ce qui détermine vraiment la propriété est le degré de contrôle sur la transférabilité d'un permis ou d'un contingent?
Non, pas vraiment. Cela dépend plutôt de la personne qui en a fait l'acquisition sur le marché. Cette personne en est ni plus ni moins propriétaire.
Je veux dire que, dans le contexte canadien, il n'y a pas vraiment de propriétaires. Cela demeure quand même une ressource canadienne, mais c'est une propriété de fait dès qu'il y a possibilité de vente sur le marché. Quant à ceux qui payent — je pense que Peter en sait peut-être plus à ce sujet — le prix pour le flétan sur le marché ouvert a déjà grimpé jusqu'à 125 $ la livre. Il descend à 90 $ et fluctue. C'est bien au-delà, comme Peter l'a dit, de ce qu'il est possible d'amortir dans la situation actuelle.
Donc, la réponse est que, si l'on instaurait un accord de partage, et que les pêcheurs obtenaient plus d'argent, à la longue, on commencerait à voir une limitation de sa valeur comme simple investissement. La valeur serait bien plus grande pour le pêcheur, qui aurait plus d'argent dans ses poches. Le prix commencerait à baisser. Les pêcheurs actifs auraient de l'argent qu'ils pourraient investir.
Dans l'état actuel des choses, je ne peux même pas investir dans l'entretien de notre bateau.
D'accord.
Peter, puis-je savoir ce que vous pensez du degré de contrôle qu'une personne aurait sur la transférabilité, qui fait partie de la question, ici?
À votre connaissance, y a-t-il des accords, par exemple, des accords financiers, qui limitent la capacité d'une personne à transférer un permis, peut-être en échange d'une garantie d'approvisionnement — un transformateur, par exemple, qui aurait une garantie d'approvisionnement?
Est-ce un problème, en ce qui vous concerne, en ce qui a trait à la capacité réelle d'un pêcheur de conclure des accords pour le financement?
Oui, en général, les transformateurs ont recours à leur moyen de financement. Les banques ne leur prêtent pas d'argent. Si on n'a pas d'amis ou de famille... Il faut trouver l'argent quelque part.
Quant à savoir combien cela coûte, je ne pourrais vous le dire, mais je dirais que le coût, c'est d'avoir l'indépendance de vendre son poisson sur un marché libre.
Dans vos observations, vous avez soulevé le fait que l'accès à des capitaux est l'un des problèmes, surtout pour les jeunes qui veulent se lancer dans la pêche. Je suppose que cela est lié au fait que, pour obtenir du financement, il faut conclure des accords qu'on ne conclurait pas autrement, parce que c'est la seule façon d'obtenir des capitaux.
En Colombie-Britannique, d'après ce que je comprends, la province n'a créé aucune commission provinciale de prêts aux pêcheurs, contrairement à d'autres provinces. Approuveriez-vous que la Colombie-Britannique aille dans cette direction ou qu'il y ait une autre façon de permettre la création d'une commission provinciale de prêts aux pêcheurs pour donner accès à des capitaux?
Je serais très favorable à cette idée. Je pense que cela aiderait, conjointement, peut-être, avec des banques; cela supprimerait une partie du risque pour les banques et autres institutions semblables. Je soutiendrais une idée comme celle-là, oui.
Je n'ai qu'une question pour ce groupe pour l'instant et je vais probablement poser la même pour le prochain groupe.
Euh, non, j'ai deux questions. Désolé.
Ma première est: que vaut un contingent? Nous en parlons beaucoup et notre collègue, M. Hardie, l'a demandé à la séance précédente. On dirait que personne ne peut nous le dire. Je conclus que cela dépend du poisson et du fait qu'il est inatteignable ou hors de portée, mais que vaut un contingent?
Ma question s'adresse à tout le monde.
Allez-y, monsieur de Greef.
Le contingent est déterminé par le marché et le gouvernement du Canada est un gros joueur pour le programme IPCIP, que j'appuie parce qu'il porte sur une approche volontaire acheteur-vendeur. Toutefois, il y a...
Il y a des conséquences à cela. Auparavant, je dirais que cela a marché dans les cas les plus faciles, ceux qui voulaient simplement se retirer. Maintenant, il est plus difficile d'obtenir les contingents en vente, ce qui fait grimper les prix.
Sur un marché, pour une personne qui vendait un contingent, oui, c'était le cas. Cela l'a fait grimper, de même que d'autres facteurs, mais c'est un marché. Il fluctue. À l'heure actuelle, il est à environ 90 $ la livre, pour le flétan. Il a donc diminué un peu. Il était à 130 $, il y a quelque temps.
Vous obtiendriez une livre de flétan
Désolé, je devrais expliquer. Vous obtenez un pourcentage du total autorisé des captures.
C'est exact. Vous achetez un pourcentage du total autorisé des captures, quel qu'il soit à ce moment-là.
À l'heure actuelle, nous en sommes à un point où les totaux autorisés de captures sont un peu bas. Cela aurait pu aussi contribuer à faire monter les prix en prévision d'une autre hausse des totaux autorisés de captures.
Je vois.
Les questions suivantes s'adressent à tous nos invités. Nous entendons ceci dans nos entretiens individuels et nos réunions avec les personnes qui ont communiqué avec nous.
Trouvez-vous que le ministère des Pêches et des Océans écoute vos préoccupations? Avez-vous le sentiment d'avoir été consultés? Dans l'affirmative, trouvez-vous qu'on vous a écoutés? Quelles ont été vos interactions personnelles avec le ministère?
Allez-y, monsieur Edwards.
J'ai répondu à cette question dans ma déclaration. La réponse est non et j'évoque directement le témoignage de la DGR que vous avez entendu. Les témoins ont refusé de reconnaître la plupart des problèmes que nous décrivons ici, dans leur témoignage qu'ils vous ont livré, tout comme la personne de la côte Est. Il n'a pas parlé des propriétaires-exploitants, qui constituent un élément essentiel et dont nous sommes supposés parler ici. Aucun des trois n'en a parlé et j'ai trouvé cela extrêmement insultant.
Je demandais simplement si vous estimez avoir été pleinement consultés, si vos interactions avec le ministère des Pêches et des Océans sont...
Je ne saurais dire si ma relation avec le ministère des Pêches et des Océans est bonne, mais je ne pense pas qu'il ait vu cela comme un objectif prioritaire. Nous devons faire savoir que c'est un objectif prioritaire.
Je vais en parler. Je connais des gens qui siègent à des comités consultatifs et qui ont l'impression que certains au ministère des Pêches et des Océans ont des intentions cachées de sorte que, lorsqu'ils se présentent à la réunion, ils ont déjà pris leur décision. Ils ne tiennent pas compte de l'avis des pêcheurs. Il y a cela.
En règle générale, il nous faudrait simplement avoir une meilleure relation avec eux. Nous avons besoin de plus de certitude. Il nous faut un ministre qui défende nos pêches et notre industrie. Il nous faut aussi sentir que quelqu'un va intervenir pour nous, nous défendre et nous faire savoir que, avec tout le battage médiatique sur ces différents enjeux, les pêches vont rester et les collectivités côtières vont prospérer et que nous travaillons à améliorer les choses.
Nous devons assurément entendre plus de déclarations publiques.
Merci, monsieur Doherty. Voilà qui conclut notre séance avec le premier groupe de participants.
Merci à tous d'avoir comparu en personne et par vidéoconférence. Comme il a été mentionné par certains membres, si vous jugez que de l'information, que ce soit une recommandation ou autre chose, n'a pas été couverte, n'hésitez pas à l'envoyer par courriel ou autrement pour que nous puissions l'inclure dans notre rapport.
Merci encore.
Nous allons suspendre la séance quelques minutes, le temps de nous préparer à entendre les prochains témoins.
Bienvenue encore à tous.
Nous allons maintenant entendre le deuxième groupe de témoins. Nous avons des invités en personne. Nous accueillons Duncan Cameron, qui est pêcheur, Fraser MacDonald, aussi pêcheur, et Mme Jennifer Silver, professeure agrégée, à l'Université de Guelph.
Vous avez chacun sept minutes pour faire une déclaration préliminaire.
Nous allons d'abord écouter Duncan Cameron pendant sept minutes ou moins.
Merci, monsieur le président. C'est un plaisir d'être ici.
Je souhaite tout d'abord remercier le Comité d'entreprendre cette étude très importante et de me donner l'occasion de prendre la parole. Je suis accompagné de nombreux autres jeunes pêcheurs qui représentent l'avenir de notre industrie. Nous sommes prêts à suivre le processus approprié. Nous sommes les intendants de cette ressource et nous savons ce que nous voulons.
Pour moi, l'avenir souhaité est clair comme de l'eau de roche: les permis de pêche doivent être entre les mains des pêcheurs; les entreprises de pêche doivent profiter aux collectivités et créer des emplois pour les constructeurs de bateaux, les soudeurs, les charpentiers, les épiciers, les poissonniers et les charpentiers; les membres des équipages doivent pouvoir faire des études universitaires; et les restaurants et plusieurs autres entreprises doivent également bénéficier des retombées. En plus des avantages économiques qui découleraient de tout cela, je veux de nouveau faire partie d'une collectivité où des pêcheurs font du bénévolat dans le cadre de programmes scolaires et de voyages, où ils sont des entraîneurs sportifs et où ils participent à des concours de cuisine pour des organismes de bienfaisance. Lorsque nous prenons soin de nos collectivités, celles-ci prennent soin de nous. La réduction de la mise en valeur du saumon et de la surveillance des ruisseaux concerne tout le monde, et il est approprié d'adopter une approche mesurée. Après tout, il s'agit d'une ressource publique.
Au cours des deux dernières réunions du Comité, vous avez entendu des gens qui étaient à la barre lorsque la valeur des pêches de la Colombie-Britannique a chuté alors que celle de nos voisins du Nord, du Sud et de l'Est augmentait. Nous avons entendu certains résultats d'études économiques qualifiés de mythes. Même notre propre ministère a à peine admis qu'il y avait un problème dans la région du Pacifique. La Canadian Fishing Company a déclaré qu'elle avait moins de poissons et que la baisse de l'offre avait pour conséquence une baisse des prix. L'entreprise contrôle une grande part de cette pêche, mais affirme qu'elle n'a aucun pouvoir sur les coûts. On lui a demandé s'il existait une formule ou une mise sur le poisson vendu; elle a répondu qu'il n'existait pas de formule magique pour ce qui est du calcul de la marge. Le prix du saumon rouge est le même depuis les années 1980. Nul besoin de se casser la tête avec des principes économiques complexes; la situation est très préoccupante.
Vous avez déjà entendu parler de nombreux types de permis, de systèmes de contingents et d'outils de gestion comme les CIT, mais personne n'a encore parlé de la propriété. Des outils de gestion ont été mis en place pour gérer les pêches et non pour dicter des résultats économiques, ou du moins pas les bons. Il est possible d'avoir divers permis et les pêcheurs peuvent en être propriétaires.
Juste pour être sûr d'être bien compris, on a beaucoup parlé des CIT. Des locations de permis se produisent et créent des inégalités dans essentiellement toutes les pêches où le poisson a de la valeur.
Je suis un capitaine exploitant certifié depuis 13 ans. Au cours de cette période, j'ai possédé, loué, acheté et vendu des permis et des bateaux. J'ai pu me rendre où je suis aujourd'hui grâce aux avantages que venir d'une famille de pêcheurs m'a procurés. Mon père possède plusieurs permis, y compris un qui donne droit à un contingent de flétan. Nous avons récemment formé un partenariat et acquis un bateau de pêche aux crevettes. Sans ces avantages, je n'aurais jamais pu me rendre aussi loin.
Lorsque je pêche, je suis sous surveillance 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 grâce à des systèmes de vidéosurveillance qui utilisent le suivi GPS et différents codes pour déceler si je viole les conditions de permis. Alors que je suis en mer, ces données sont envoyées à un tiers et je fais l'objet d'une vérification pour toute violation possible.
J'exerce l'un des métiers les plus dangereux du pays, la pêche du crabe dormeur au casier. Il y a quatre ans, j'ai failli faire augmenter cette triste statistique lorsque mon bateau de pêche au crabe de 19 pieds a coulé au beau milieu de la nuit et que la Garde côtière a dû venir me secourir sur la grève.
En Colombie-Britannique toutefois, ceux qui souhaitent détenir un permis n'ont pas à risquer leur vie ni à être surveillés par vidéo. En effet, pour les détenteurs étrangers, créer une société fictive peut suffire, et le fait d'avoir ce bout de papier qu'est un permis leur rapporte 80 % de la valeur des débarquements sans courir de risque. Les permis constituent un privilège accordé par les Canadiens. Je saisis l'importance des transformateurs et des emplois qu'ils créent. C'est l'avenir des transformateurs et des pêcheurs que nous devons assurer. Nous n'avons pas à nous préoccuper de l'avenir de ceux qui ne font rien mis à part de louer leur permis. Ces individus ne font que nuire aux emplois, aux économies, à la sécurité alimentaire et aux recettes fiscales du pays.
Au coeur de ce problème se trouve une cause très simple: une politique de délivrance de permis qui ne tient pas compte des préoccupations culturelles ou socioéconomiques. Cela a mené au regroupement des permis et à la concentration de la propriété, les entreprises de produits de la mer s'intégrant ainsi verticalement pour contrôler les coûts et sécuriser l'approvisionnement. En ce qui concerne l'industrie de la pêche en particulier, cela leur a donné le contrôle des conseils consultatifs — il n'est pas surprenant que les pêcheurs soient devenus un coût et que nos revenus aient diminué. Le cercle des pêcheurs a éclaté, ce qui a laissé place à un ensemble désorganisé. Nous sommes devenus des coûts marginaux plutôt que des coûts fixes ou variables. Comme tout coût marginal dans une économie intégrée verticalement, notre part sera près de zéro pour cent.
Cependant, l'industrie de la pêche au Canada n'est pas comme les autres industries. Tout d'abord, c'est une ressource publique qui appartient aux citoyens du Canada. Un permis est un privilège, ce qu'on nous rappelle souvent chaque fois que nous avons des problèmes à en obtenir. La gestion des pêches, des ports qui nous accueillent et de la Garde côtière qui nous protège est payée par les Canadiens. Pourquoi dépensons-nous tout cet argent sans en recevoir les bénéfices, les profits allant plutôt à un petit nombre composé de plus en plus d'intérêts étrangers? Pourquoi ne pas faire en sorte que le Canada profite des retombées économiques? Cela signifierait plus de fruits de mer au Canada et une meilleure valeur des débarquements, ce qui générerait plus d'impôts pour rembourser les investissements des Canadiens.
Je pense qu'il est également important de souligner que, même si la situation est grave à l'heure actuelle, celle-ci peut encore s'aggraver considérablement. Une grande partie de nos produits de la mer sont exportés, et si cela se poursuit et que nous n'apportons aucun changement réglementaire, les permis et les contingents seront également exportés.
Lors des deux premiers témoignages, nous avons entendu que le coût élevé des permis et la nécessité d'obtenir une hypothèque pour en acheter un constituent un obstacle à l'entrée. C'est en partie vrai, mais le plus grand problème est le faible rendement du capital investi. Peu importe le niveau d'endettement qu'assument les pêcheurs, ces derniers doivent être en mesure de rembourser la dette qu'ils contractent.
Dans la plupart des cas, nous ne sommes pas en mesure de le faire puisque nous sommes en concurrence avec des transformateurs, des détenteurs d'un grand nombre de contingents et des pays étrangers ayant un seuil de rendement du capital investi beaucoup plus faible que celui des pêcheurs dont la seule source de revenus est la pêche. La surcapitalisation de nos pêches est un problème grave. Toutefois, si seuls les pêcheurs pouvaient acheter des permis, nous n'aurions pas ce problème.
Si le rendement du capital investi ne s'améliore pas, une commission des prêts pour l'achat de permis ne ferait qu'aggraver le problème. Cependant, s'il s'améliore, ce serait un excellent outil pour nous.
Vous avez également entendu dire que la surcapacité, la conservation et la sécurité figuraient parmi les principaux objectifs de l'évolution du régime de délivrance de permis sur la côte Ouest. Je ne crois pas que la politique actuelle de délivrance de permis permette d'atteindre ces objectifs.
Au cours d'une année, je peux pêcher le hareng, le saumon, le flétan et le crabe et passer plus de 200 jours en mer. C'est ainsi parce que je loue la plupart des permis que j'exploite et que je ne touche qu'un faible pourcentage des recettes totales. Si je pouvais posséder ne serait-ce qu'un tiers de ces pêches, je pourrais réduire mes activités de plus de 60 %. Cela libérerait des permis pour que d'autres pêcheurs puissent les utiliser et en faire autant. Nous observerions un effet en cascade: il y aurait plus de permis disponibles puisque les pêcheurs pêcheraient moins et que ces derniers recevraient plus pour leurs prises. En même temps, cela permettrait d'atténuer certains des prétendus problèmes de surcapacité.
En ce qui concerne la conservation, lorsque les pêcheurs ont des marges de profit très étroites et qu'ils sont très inquiets pour leur survie d'une année à l'autre, la priorité qu'ils accordent à la conservation est bien faible comparativement à celle qu'y accordent les gens capables de planifier pour le reste de leur vie.
Le but de l'étude devrait être d'examiner ce qui s'est réellement passé sur le plan de la conservation, et non la théorie ou l'hypothèse dont la décision découle.
En ce qui concerne la sécurité, je pense que le régime actuel continue de nuire gravement aux pêcheurs et d'accroître les conséquences environnementales. Les budgets des pêcheurs sont très limités et seule une petite partie de cette somme peut être consacrée à l'achat d'équipement de sécurité ou de nouvelles technologies plus propres.
La cause de ces problèmes est simple, mais les problèmes créés sont extrêmement complexes. C'est accablant pour quelqu'un comme moi et c'est ma réalité depuis toujours. Cependant, la cause est simple et les solutions peuvent l'être aussi.
Nous devons remettre les permis de pêche entre les mains des pêcheurs. Nous devons faire en sorte que les collectivités dans lesquelles nous vivons puissent profiter des retombées économiques des pêches. Nous devons donner aux Canadiens la possibilité d'acheter le poisson pour lequel ils assument les coûts de gestion. Nous devons faire la transition de manière à permettre aux pêcheurs qui louent actuellement leurs permis d'en devenir propriétaires et à ne pas faire de tort à ceux qui ont investi de l'argent de bonne foi.
Voici quelques objectifs à court terme qui, à mon avis, sont simples et concrets:
Premièrement, d'ici 2022, il doit être établi que les permis ou les contingents achetés doivent être exploités par la personne qui les achète. C'est plus délicat dans le cas du poisson de fond. En effet, les pêcheurs pourront déterminer la valeur du flétan ou des espèces ciblées, mais ils devront peut-être avoir recours à la location pour les prises accessoires connexes afin d'atteindre les objectifs de conservation.
Deuxièmement, il faut créer un espace pour que les pêcheurs qui ne sont pas titulaires de permis puissent collaborer avec le ministère des Pêches et des Océans, car l'industrie, c'est nous, et non des sociétés à numéro. Actuellement, le processus des conseils consultatifs ne permet pas de le faire.
Troisièmement, il faut permettre que des permis soient non associés afin qu'il y ait plus de permis disponibles sur le marché.
À long terme, je crois que la transition devrait être dictée par des principes et des objectifs sur lesquels les pêcheurs actifs s'entendent. Nous devons fixer un délai de sept ans, comme la politique Préserver l'indépendance de la flottille de pêche côtière dans l'Atlantique canadien, pour que cette transition puisse avoir lieu. Il convient également de noter que l'ensemble actuel des conseils consultatifs ne peut pas s'en servir pour s'occuper de... C'est ce que nous avons appris lors des réunions précédentes du ministère: cela ne fonctionnera pas.
Je vous remercie.
Je vous remercie, monsieur Cameron.
Passons maintenant à M. MacDonald. Veuillez limiter votre témoignage à sept minutes ou moins.
Bonjour monsieur le président, bonjour à tous. Je tiens à vous remercier de l'occasion que vous me donnez de comparaître devant vous aujourd'hui. Nous sommes bien loin des fonds de pêche de la Colombie-Britannique, et je vous suis très reconnaissant d'avoir la possibilité de venir ici m'adresser à nos représentants élus. Je vous en remercie.
Je m'appelle Fraser MacDonald. Je suis pêcheur de première génération de l'île de Vancouver. J'ai 32 ans et je fais de la pêche commerciale depuis 14 ans. Je possède deux petits bateaux de pêche commerciale et je pratique trois ou quatre types de pêche par année. Je loue la totalité de mon contingent de pêche.
Aujourd'hui je vais vous raconter mon expérience personnelle dans le secteur de la pêche commerciale en Colombie-Britannique dans la perspective d'un exploitant qui dépend du marché locatif. Je décrirai en quoi les politiques de pêche d'hier et d'aujourd'hui présentent des obstacles aux jeunes pêcheurs comme moi qui cherchent à se faire une place dans le secteur.
Il ne fait aucun doute que les politiques de délivrance de permis établies en Colombie-Britannique au cours des 25 dernières années ont contribué à la stabilisation et à l'amélioration de la gestion et de la viabilité des pêches, ainsi qu'à la sécurité, dans une certaine mesure. Elles ont eu l'avantage d'accroître la valeur marchande de notre ressource commune et elles ont fait de la province un chef de file mondial en gestion des pêches. Cela dit, elles ont également eu pour effet d'attribuer une valeur à l'accès. On n'aurait jamais dû permettre à l'accès d'être marchandé, acheté et revendu.
On n'aurait jamais dû permettre aux contingents et aux permis de se retrouver sur le marché libre, mais c'est ce qui s'est passé. Aujourd'hui, les marchés de permis et de contingents ressemblent davantage à une bourse d'actions spéculatives qu'à un outil de gestion des pêches. L'établissement du système a créé des gagnants et des perdants, et il en est encore ainsi aujourd'hui. Certains ont tout perdu et ont quitté l'industrie, et d'autres encore en ont été exclus lorsqu'on a introduit les CIT. Certains se sont vus attribuer des CIT ou des permis de pêche à accès limité dont la valeur a depuis augmenté à un point tel qu'ils valent des millions de dollars.
L'accès de la Colombie-Britannique au secteur de la pêche a été privatisé et exploité à des fins pécuniaires. Cette privatisation de l'accès a créé des coûts d'admission insurmontables ainsi que ce que j'appellerais une génération perdue de pêcheurs. J'ai vu tout cela se passer au sein de mon propre groupe d'amis. Il y a 10 ans, en 2008, j'avais dans mon coin du pays un réseau de 15 à 20 personnes qui travaillaient activement dans la pêche commerciale. Aujourd'hui, en 2018, nous ne sommes plus que trois. Mes amis ont quitté le secteur de la pêche commerciale, souvent bien malgré eux, pour faire carrière dans d'autres domaines parce qu'ils ne pensaient pas pouvoir gagner leur vie dans la pêche. Étant donné les coûts exorbitants et le manque d'accès au capital, beaucoup de jeunes n'ont pas les moyens de s'acheter un bateau et un permis. L'exode a causé une grave pénurie de main-d'oeuvre pour combler les équipages et laisse présager une crise de succession lorsque la génération actuelle de pêcheurs atteindra l'âge de la retraite.
En 2011, après avoir passé quelques années en tant que capitaine engagé, j'ai compris que je devais augmenter mes revenus si je voulais bien gagner ma vie tout en restant dans la pêche. Je pourrais garder une plus grande part des recettes par prise si j'avais mon propre bateau, alors je me suis mis à chercher. Le prix d'un permis de crevettes pour le bateau que j'ai acheté en 2012 était de 750 000 $, donc ensemble, le bateau et le permis montaient à un peu moins de 1 million de dollars. Puisque je n'avais pas les moyens d'obtenir un permis, il allait falloir louer mon contingent. Grâce à un programme de prêts financé par le gouvernement fédéral, j'ai pu obtenir un prêt de 200 000 $ en mettant ma maison en garantie pour m'acheter un bateau.
Il s'avère que j'ai acheté mon bateau en 2012, l'année de l'entière mise en oeuvre de l'IPCIP. Bien que je soutienne les objectifs de l'IPCIP, je dois dire que, selon mon expérience personnelle, ceux-ci n'ont pas été atteints; c'est d'ailleurs ce qu'a affirmé Chris Cook au Comité, hier. En mettant l'IPCIP en oeuvre comme il l'a fait, le MPO a en fait créé toutes sortes d'effets pervers dans bon nombre de pêches, non seulement par le marché locatif, mais aussi en faisant grimper les coûts. Je n'entrerai pas trop dans les détails aujourd'hui, mais je compte soumettre un mémoire au Comité sur mon expérience avec l'IPCIP.
Maintenant que j'avais mon bateau, mon plus grand obstacle serait l'accès à des permis louables. Je devais convaincre les acheteurs de donner une chance à un jeune exploitant et leur garantir mon produit si seulement ils étaient prêts à m'avancer les coûts de la location. La quasi-totalité des locateurs exigent que les frais de location soient payés à l'avance, et j'ai vite compris que les banques ne sont pas nécessairement portées à accorder une marge de crédit d'exploitation de 50 000 $ à un jeune propriétaire d'entreprise saisonnière de 26 ans, même avec un cosignataire et quelle que soit sa valeur nette. Ça n'a pas toujours été facile, mais j'ai fini par comprendre que, pour ceux qui ne viennent pas d'une grande famille de pêcheurs, il est quasiment impossible de percer dans le secteur sans un permis. L'accès incertain, année après année, est une grande source de stress et rend l'exploitation d'une entreprise très difficile. C'est seulement par la force de mon optimisme entêté que j'ai su maintenir la rentabilité de mon entreprise de pêche. Beaucoup d'amis ont été témoins des grandes difficultés que j'ai éprouvées au fil des ans, et leur manque de confiance dans le système de délivrance de permis s'est approfondi en conséquence.
En 2017, j'ai acheté mon deuxième bateau, un chalutier-congélateur en fibre de verre de 40 pieds servant à différentes pêches. La polyvalence de ce bateau m'a donné l'option de compter sur le revenu provenant d'autres pêches si ma principale s'avérait peu rentable. Cela dit, je n'allais pas répéter les erreurs du passé en achetant un bateau sans d'abord m'assurer d'avoir accès aux permis nécessaires. C'est là qu'une entreprise de transformation m'a fait une offre de partenariat, et au terme d'une négociation, nous sommes venus à une entente et j'ai acheté le bateau.
Selon les modalités de l'entente, j'avais obtenu le financement, l'accès au groupe de permis et de contingents de l'acheteur, et l'accès au crédit d'exploitation au besoin. En retour, l'entreprise posséderait une part minoritaire du bateau pour une période indéterminée et aurait un accès privilégié à mon produit tant et aussi longtemps qu'elle est disposée à payer la valeur marchande. Je dirais qu'il s'agissait d'une offre plutôt progressive qui s'est avérée dans l'intérêt de tous.
Je suis satisfait de la situation en l'occurrence, mais ce n'est pas pour autant une solution au problème du système de délivrance de permis sur la côte. Très peu de gens ont la possibilité de bénéficier d'un tel arrangement. Les autres personnes à qui j'ai parlé qui sont entrées en partenariat avec une entreprise ne sont pas aussi satisfaites.
Comme on vous l'a déjà expliqué, les propriétaires de CIT de flétan se font payer dès l'ouverture de la saison la valeur de leur contingent, généralement par des transformateurs qui doivent s'assurer d'obtenir un contingent pour garantir leur part du marché sur la prise. Comme ils ont de faibles marges de manoeuvre, les transformateurs travaillent à grande échelle. Plus ils peuvent obtenir de contingents dans leur groupe, plus ils peuvent mettre en marché, ce qui fait grimper leurs profits potentiels. Voilà qui a transformé la plupart des acheteurs de poisson sur la côte en courtiers de permis et de contingents, ce qui ajoute un énorme fardeau financier et administratif aux entreprises dont l'objectif premier est d'acheter du poisson, le transformer et le mettre en marché. La structure actuelle isole complètement les propriétaires de contingents de toute fluctuation des prix durant la saison, obligeant les pêcheurs et les acheteurs à assumer la totalité du risque.
J'ai passé l'année 2017 à pêcher un contingent de flétan loué, et mon expérience illustre parfaitement à quel point le système est bancal. En avril 2017, j'ai loué 32 000 livres d'un contingent de flétan d'un acheteur à 7,50 $ la livre. C'était la valeur marchande d'un bail à l'époque, et à ce moment-là, la valeur du flétan au débarquement était de 9 $ à 10 $ depuis deux saisons, on s'attendait donc à tirer un revenu brut de 2 $ après le coût du bail. Quelques mois plus tard, en août, la valeur au débarquement avait chuté à 7,50 $, et on a dû attendre la fin de la saison, espérant que le prix se rétablirait assez pour qu'on puisse se faire assez d'argent pour payer les frais. Même si le prix a fini par remonter assez pour nous donner une marge de manoeuvre, on s'est retrouvé avec quelques jours de pêche seulement compte tenu des intempéries, et je n'ai pas été en mesure de pêcher la totalité du contingent que j'avais loué. Fort heureusement, j'ai pu reporter les 16 000 livres de contingent restant à la saison 2018.
Quelques mois plus tard, en mars, à l'ouverture de la saison, je suis retourné aux lieux de pêche pour attraper les 16 000 livres qu'il me restait sur mon bail, mais le prix du marché avait chuté à 7,50 $. On n'avait pas le choix que d'aller pêcher puisque l'acheteur avait loué ce poisson 12 mois auparavant et avait déjà versé 124 000 $ au détenteur du contingent. J'ai dû aller à la pêche pour qu'ils puissent récupérer leur argent. Je suis sorti ramener ce poisson à terre pour rien; sans parler des 30 000 $ que j'ai emprunté de l'acheteur qui m'a loué le poisson afin de pouvoir payer mon équipage, qui méritait d'être payé pour son travail.
Les deux détenteurs de contingent à qui j'ai loué du poisson en 2017 ont reçu un chèque de 120 000 $ pour leur contingent. Mon équipage et moi avons passé un mois en mer et pêché pour plus d'un quart de million de dollars, et je me suis retrouvé 30 000 $ de plus dans le trou, sans parler de l'investissement de 50 000 $ que j'ai dû faire pour arrimer un long câble à mon bateau cet automne-là.
Perdre de l'argent pour aller en mer n'est pas inhabituel dans le secteur, et c'est un risque que j'accepte chaque fois que je largue les amarres, mais il est beaucoup plus facile d'assumer une perte lorsque la valeur du poisson au débarquement ne suffit même pas à couvrir les dépenses. En l'occurrence, le poisson débarqué s'est vendu très cher, c'est juste que la part revenant à mon équipage et à moi était nulle.
S'il y a une chose sur laquelle tous les intervenants peuvent s'entendre, c'est bien que le système actuel ne nous permettra pas de maintenir suffisamment de pêcheurs actifs pour répondre à la demande en production de l'industrie. La pêche est une activité commerciale, mais c'est aussi un art, un art qui se maîtrise au fil de longues années passées en mer. En conséquence, il faut absolument réformer le régime de délivrance de permis dès aujourd'hui pour éviter une pénurie grave de main-d'oeuvre dans un futur proche. Il est absolument essentiel que les recommandations découlant de la présente étude viennent résoudre les problèmes auxquels nous sommes confrontés aujourd'hui plutôt que d'offrir une solution temporaire. Il faut agir de toute urgence selon un calendrier préétabli de manière à ce que le ministère et l'industrie rétablissent un équilibre au sein du marché de location dans l'intérêt d'une répartition plus équitable des revenus générés par notre pêche. Comme l'ont affirmé d'autres témoins, une formule unique ne fonctionnera pas. Il faut étudier chaque pêche au cas par cas, mais il faut que cela se fasse rapidement. Toute manoeuvre dilatoire ou obstruction de la part du secteur privé s'avérerait selon moi plutôt malavisée, et j'espère que nous pourrons tous travailler ensemble à la recherche d'une solution qui soit dans l'intérêt de toutes les parties.
Sur le long terme, il nous faut trouver un terrain d'entente et dresser une vision pour les 10 prochaines années pour ensuite élaborer et mettre en oeuvre des politiques réfléchies nous permettant de la réaliser. J'entrevois pour l'avenir de la Colombie-Britannique un secteur viable de la pêche composé de pêcheurs et de transformateurs de poisson. Il y aurait lieu de dresser les futurs échéanciers de manière à laisser le temps aux investisseurs et aux pêcheurs en voie de partir à la retraite de vendre leurs actifs et s'assurer une retraite digne. La pêche est un milieu très soudé et bon nombre de pêcheurs investisseurs à la retraite sont des mentors et de proches amis des pêcheurs actifs.
En conclusion, je pense qu'on s'entend sur le fait que le système ne fonctionne pas comme prévu et je pense qu'il est essentiel que nous saisissions l'occasion qui s'offre à nous d'assurer un avenir meilleur pour notre industrie.
Merci beaucoup d'avoir entendu mes perspectives aujourd'hui, et veuillez m'excuser si j'ai pris plus de temps que prévu.
À peine, monsieur MacDonald; merci pour votre présentation.
Passons maintenant à M. Antilla, qui aura sept minutes ou moins.
Bonjour, je m'appelle Ross Antilla. Je viens de Pender Harbour et je suis un pêcheur de quatrième génération.
J'aimerais attirer votre attention sur les conséquences négatives du regroupement des permis pour les pêcheurs.
Le regroupement des permis complique l'achat et la vente de permis, étant donné qu'ils doivent être traités en bloc. Il est difficile d'acheter un seul permis. La plupart du temps, pour acheter le permis qu'on veut, il faut acheter un autre permis non voulu en même temps. Cela fait augmenter le coût du permis souhaité au point de le rendre inabordable pour la plupart des jeunes pêcheurs, ce qui les force à louer le permis de quelqu'un d'autre. Même si l'on possède un permis et l'on veut en acheter un autre pour développer notre entreprise, il est fort probable que ce second permis se trouvera associé de manière irréversible à celui qu'on possède déjà.
J'espère sincèrement que le Comité examinera la politique de regroupement des permis et permettra leur dissociation pour que les pêcheurs puissent se permettre d'acheter le permis qu'ils veulent, sans que d'autres y soient rattachés, et pour nous aider à éviter de devoir louer un permis de quelqu'un d'autre.
Le deuxième sujet que j'aimerais porter à l'attention du Comité est la location de permis, et j'aimerais parler de comment on est arrivé à la situation actuelle.
La location de permis était à l'origine une façon pour les pêcheurs de protéger leurs prises s'ils dépassaient leur contingent en empruntant le permis de quelqu'un qui n'avait pas pêché autant qu'il était autorisé à le faire. Cela se faisait à bon prix. Aujourd'hui, la location de permis exploite la première source de revenus d'un pêcheur au profit du portfolio du détenteur du permis.
À titre d'exemple, dans le cas de la pêche au flétan, les détenteurs de permis prennent 80 % des profits, tandis que les pêcheurs n'en reçoivent que 20 %, qu'ils doivent utiliser pour assumer la totalité des coûts, y compris les droits de permis, les frais de caméras, les honoraires de l'équipage et — s'il reste quelque chose après tout cela — pour assurer leur propre subsistance.
Dans la plupart des cas, les entreprises détiennent le contingent, ce qui implique que nous sommes forcés à leur vendre nos prises au prix qu'elles imposent, à livrer au port qu'elles nous dictent et à pêcher dans les zones qu'elles nous indiquent, ce qui nous prive de notre liberté en tant que pêcheurs. Si nous ne pêchons pas leurs contingents, nous ne pourrons peut-être pas pêcher du tout l'année d'après.
La plupart des membres des comités consultatifs des pêches du ministère des Pêches et des Océans sont des détenteurs de permis. Par conséquent, les comités prennent des décisions qui sont dans l'intérêt supérieur des détenteurs de permis. Cela a créé des conditions qui s'apparentent à l'esclavage pour les jeunes pêcheurs de l'industrie.
J'invite le Comité à revoir la politique de délivrance de permis pour les pêches de la côte Ouest et à changer la pratique de location pour que celle-ci tienne mieux compte des besoins des collectivités côtières de pêche menacées.
Merci.
Merci, monsieur Antilla.
Nous passons maintenant à Mme Silver, pour sept minutes ou moins, s'il vous plaît.
Je vous remercie de m'avoir invitée à comparaître et de me donner l'occasion de vous parler des pêches de la côte Ouest. Je remercie également les autres témoins présents aujourd'hui et ceux qui ont témoigné plus tôt. Je me réjouis de pouvoir prendre la parole aux côtés de tant de pêcheurs.
J'étudie les pêches, l'aquaculture et les collectivités côtières de la Colombie-Britannique depuis 14 ans, et au cours des deux dernières années, je me suis surtout concentrée sur l'octroi des permis de pêche commerciale. C'est sur ce travail que s'appuieront mes observations d'aujourd'hui. Dans mon exposé, j'aborderai trois points principaux puis parlerai de trois choses à retenir dans le cadre de votre étude de la question.
Le premier point dont je souhaite parler est que, comme on l'a déjà mentionné, le nombre de permis et de contingents pour toutes les principales pêches du Pacifique est limité. Pour toutes les principales pêches, les permis et les contingents peuvent être échangés dans le cadre de transactions commerciales.
Concrètement, cela signifie que les entreprises de pêche peuvent détenir plusieurs permis. Elles peuvent ainsi participer à diverses pêches ou générer des revenus en louant une partie ou la totalité de leurs permis et de leurs contingents. Inversement, d'autres entreprises détiennent un seul permis ou très peu de permis, ou n'en détiennent aucun. Celles-ci sont donc limitées du point de vue de leur accès à la pêche. Les choix qui s'offrent à elles sont de pêcher à temps partiel ou de louer des permis ou des contingents.
Les permis et les contingents coûtent très cher. Selon les estimations du ministère des Pêches et des Océans, en 2016, les permis se vendaient pour des dizaines de milliers de dollars — par exemple, le permis AG pour le saumon coûte plus de 64 000 $ — et certains pouvaient atteindre les centaines de milliers de dollars, comme le permis W pour la crevette, qui coûte plus de 770 000 $. On estime qu'un type de permis en particulier — le permis G pour la panope — se vend pour 6,1 millions de dollars sur le marché.
Mes recherches ont permis de compter le nombre exact de permis et de détenteurs de permis pour l'année civile 2017. Au total, 6 563 permis de pêche commerciale dans la région du Pacifique ont été décernés à 2 377 entités. Le nombre de permis octroyés dépasse le nombre de détenteurs et, comme vous le devinez sans doute, la distribution est inégale. Selon nos recherches, 38 entités ont enregistré 20 permis commerciaux ou plus. De ces 38, six ont enregistré plus de 50 permis. À l'inverse, il y a eu 1 357 entités qui ont enregistré un seul permis et 499 qui en ont enregistré deux.
À ma connaissance, mes recherches sont les premières qui examinent la distribution des permis dans l'ensemble des pêches. Elles s'appuient sur d'autres études qui ont examiné la distribution des permis de pêche pour le saumon et le hareng uniquement. Un corpus grandissant de recherche montre l'existence de plusieurs pêcheurs dont l'accès à la pêche est limité sur la côte Ouest. Aujourd'hui et lors des séances précédentes, vous avez entendu des témoignages sur les conditions auxquelles ces pêcheurs sont confrontés et sur les contraintes économiques liées à la location de permis et de contingents appartenant à des détenteurs de grands portfolios.
Le deuxième point que je tiens à aborder est que, dans le contexte mondial, les entreprises transnationales et les investisseurs transnationaux manifestent un intérêt pour l'obtention de permis et de contingents, et pour investir dans les entreprises de pêche ou les racheter. Une étude récente menée par des chercheurs suédois a révélé que 13 sociétés contrôlent de 11 à 16 % des captures marines mondiales et de 19 à 40 % des stocks de poisson les plus importants et les plus précieux.
Dans le contexte canadien, certains rapports anecdotiques — nous avons en avons d'ailleurs entendus quelques-uns aujourd'hui — et de récentes enquêtes journalistiques laissent croire qu'il y a eu des cas où des investisseurs étrangers ont financé l'achat ou la location de permis, de contingents ou de bateaux en Colombie-Britannique. Dans mes recherches, je cherche des preuves d'investissements étrangers dans les pêches de la côte Ouest. J'ai cherché surtout dans l'information accessible au public, dans les reportages des médias et dans le registre d'immatriculation des bâtiments de Transports Canada. Le fait de n'avoir accès qu'à l'information accessible au public fait qu'il est très difficile de dégager la mesure dans laquelle cela se produit dans les pêches canadiennes du Pacifique, et aussi de prévoir ce qui pourrait se passer à l'avenir. Puisque les stocks de poisson du Canada sont une ressource publique, je ferais valoir que la surveillance des investissements étrangers et spéculatifs est essentielle pour la transparence et que cela relève de la gestion des pêches.
Le troisième point dont je souhaite parler est le fait que la détention des permis, les arrangements de location et les autres types d'arrangements économiques liés aux permis et aux contingents ne sont pas surveillés, qu'on ne fait pas systématiquement rapport de ces éléments et qu'on ne tient pas compte de ceux-ci dans l'évaluation des pêches à l'heure actuelle.
C'est un point qui mérite d'être noté dans le contexte de votre étude sur les pêches de la côte Ouest. Les politiques de la région de l'Atlantique interdisent la location ou le prêt de permis, ainsi que toute autre relation économique entre les détenteurs de permis de pêche côtière et les transformateurs ou d'autres investisseurs. On entend parfois parler de ces arrangements, appelés accords de contrôle; selon les circonstances, ils ne sont pas permis ou, si oui, ils sont réglementés très rigoureusement.
Vous voudrez peut-être aussi noter que les données d'identification des détenteurs de permis que j'ai utilisées dans mes recherches comptent également des renseignements sur les permis et les détenteurs de permis de la côte Ouest provenant d'un tableau accessible au public géré par le personnel de la région du Pacifique du ministère des Pêches et des Océans. Ce tableau peut être téléchargé gratuitement, mais contient des centaines de milliers d'entrées. Afin de pouvoir compter le nombre de détenteurs de permis de différents types, nous avons dû concevoir un script informatique qui nous a permis d'extraire automatiquement certains renseignements. Les renseignements de base sont donc disponibles, mais ils ne sont pas facilement consultables, en général, à moins que la personne soit prête à faire deux ans de recherches et à apprendre à programmer.
Cela m'incite à suggérer que, même si le personnel de la région du Pacifique du ministère des Pêches et des Océans fait des progrès pour rendre les sciences de la pêche plus transparentes et mieux orientées vers les écosystèmes, celui-ci doit déployer des efforts comparables pour s'assurer que le processus d'attribution des permis et d'évaluation des pêches est tout aussi transparent et qu'il s'oriente sur des dimensions humaines.
J'aimerais maintenant proposer trois choses à retenir lors de votre étude. Je les ai choisies en prêtant une attention particulière à l'intérêt que vous accordez à évaluer la répartition des retombées économiques générées par l'industrie et les aspirations des pêcheurs et des communautés.
La première chose à retenir est que les préoccupations que les pêcheurs indépendants, les nouveaux pêcheurs et la prochaine génération de pêcheurs expriment relativement à leur avenir dans les pêches du Pacifique sont incontestablement liées au manque de disponibilité et au coût élevé des principaux permis et contingents. Encore une fois, pour mettre cela en contexte, songez au fait qu'en 2016, la valeur cumulative du marché de tous les permis détenus dans toutes les pêches était évaluée à un peu plus de 956 millions de dollars, et la valeur cumulative du marché des contingents à légèrement au-delà de 1,1 milliard de dollars. La nature impressionnante de ces chiffres et les questions de taille à savoir s'il est judicieux que les droits d'accès à une ressource publique soient marchandisés à un tel degré ainsi qu'échangés dans le cadre de transactions commerciales à l'heure actuelle très peu réglementées touchent, à mon avis, le coeur même de votre étude.
La deuxième chose à retenir est que, étant donné la nature très lucrative des permis et des contingents, le gouvernement fédéral ne doit pas ignorer la possibilité d'investissements étrangers et spéculatifs dans les pêches au large des trois côtes canadiennes. Il est essentiel de se demander de quelle façon et sous quelles conditions ces investissements seront permis — s'ils le seront —, et surtout, comment ceux-ci seront déclarés et surveillés. Le ministère des Pêches et des Océans devrait faire le suivi des locations, des ventes et des autres transactions, car, comme je l'ai mentionné plus tôt, les pêches sont une ressource publique très précieuse.
La troisième chose à retenir est que, comme on en a discuté, il existe des programmes et des options stratégiques qui pourraient être adaptés pour la côte Ouest. Il existe des programmes qu'on a mis en place ailleurs, comme les banques de permis et de contingents, ainsi que les permis pour les jeunes, qu'on pourrait mettre en place pour soutenir et élargir l'accès aux pêcheurs indépendants, aux nouveaux pêcheurs et aux jeunes pêcheurs. De plus, il existe des options stratégiques qui ont été mises en oeuvre ailleurs, comme la politique sur la séparation des flottilles et le signalement obligatoire des locations et des accords de contrôle, qui permettraient d'améliorer la transparence, la surveillance et l'évaluation et de favoriser l'atteinte des objectifs économiques locaux et sociaux dans les pêches du Pacifique.
Pour conclure, j'aimerais vous remercier encore une fois de m'avoir invitée à comparaître. Je tiens sincèrement à vous féliciter de cette étude. C'est un moment important pour les pêches de la côte Ouest et porter une attention soignée à la délivrance des permis et à l'attribution des contingents aidera à mieux équilibrer les objectifs relatifs à cette ressource publique des plus importantes.
Merci.
Nous passons maintenant aux questions.
Tout d'abord, bien sûr, je tiens à souhaiter la bienvenue à Kent Hehr. Il remplace aujourd'hui M. Rogers, qui n'a pas pu être présent en raison d'autres obligations.
Bienvenue, monsieur. J'espère que nous pourrons vous apprendre certaines choses sur les pêches pendant que vous êtes ici.
Du côté du gouvernement, nous avons M. Finnigan, qui aura maintenant la parole pour un maximum de sept minutes.
Merci, monsieur le président.
Merci à vous tous d'être ici. J'aimerais également remercier M. Hardie d'avoir porté cela à notre attention. Cela nous a vraiment ouvert les yeux. Je viens de la côte Est et je pensais que notre secteur des pêches était compliqué, toutefois quand j'entends tout ce qui se passe sur la côte Ouest, cela me donne le goût de retourner dans l'Est pour entendre les témoignages des pêcheurs de là-bas. Je suis cependant vraiment heureux d'entendre ce que vous avez à dire.
J'entends de la part de différents pêcheurs indépendants qu'il existe des problèmes quant au financement, à la location ou à l'obtention d'un bateau pour pêcher sans savoir si l'on a un contrat ou non. Le comité consultatif et les sous-comités — y compris le Conseil consultatif du flétan, le Conseil consultatif sur le poisson de fond pêché au chalut, le Comité consultatif de la pêche à la morue charbonnière, le sous-comité sur les poissons pêchés à la ligne et à l'hameçon, le caucus industriel des pêcheurs de poissons des mers et le Conseil consultatif intégré sur le poisson de fond — ont été créés pour offrir des conseils au ministère des Pêches et des Océans sur la gestion de la pêche du poisson de fond.
Les pêcheurs indépendants actifs ont-ils l'impression d'avoir une voix dans ces conseils, et d'y être écoutés et pris au sérieux?
J'aimerais que quelqu'un parmi les pêcheurs indépendants présents me fasse part de son opinion sur cela.
Je peux commencer rapidement.
Je pense que, en général, on ne peut participer à ces conseils en tant que membre votant que si l'on détient un permis. La grande majorité des pêcheurs actifs sur nos côtes sont des skippers embauchés par les propriétaires des bateaux, ou bien des gens comme moi, qui ont un bateau, mais qui louent leur permis. Pour avoir une voix au sein des conseils consultatifs, il faut détenir un permis. C'est le seul moyen de devenir membre.
J'ai commencé à m'impliquer dans le conseil qui traite du thon très récemment, car, techniquement, un permis est maintenant enregistré pour mon bateau, alors je me rends aux réunions et je me permets d'y participer.
D'autres souhaitent-ils également faire part de leurs observations, ou est-ce que c'est plus ou moins la même chose pour tout le monde?
Je siège au conseil d'administration de la B.C. Crab Fisherman Association. Je participe aussi au comité consultatif de gestion du crabe à titre de mandataire désigné depuis cinq ans. Le principe selon lequel les détenteurs de permis étaient ceux qui avaient un intérêt direct dans le secteur fonctionnait très bien au départ. Cependant, ce critère n'a pas bien résisté à l'épreuve du temps, car de moins en moins de pêcheurs détiennent leur propre permis. Nous en sommes arrivés à une situation où les gens qui siègent aux comités consultatifs sont des gens qui ne pêchent pas. Au début, détenir un permis était un bon critère pour permettre aux gens qui avaient un intérêt direct dans le domaine de participer, mais cette façon de choisir les participants n'a pas évolué pour rester en phase avec la réalité.
Je crois que cela m'amène à ma deuxième question. Le 30 janvier dernier, un fonctionnaire du ministère des Pêches et des Océans a dit au Comité que le ministère appuierait la mise en oeuvre de changements à la gestion actuelle des pêches, dans le cas où ces changements sont appuyés par la majorité absolue des participants.
C'est ce que j'aimerais vous demander de préciser. Qui sont les participants? Est-ce les personnes qui détiennent un permis? Les participants qui pourraient influer sur les politiques ou amener des changements à celles-ci ne sont pas précisés ici. Pourriez-vous de nouveau dire qui devraient être les participants, monsieur MacDonald?
En ce qui a trait aux participants, dans un sens large, ce serait les détenteurs de contingents, les propriétaires des bateaux et les pêcheurs actifs. Nous participons tous aux activités de l'industrie, d'une manière ou d'une autre.
Le ministère des Pêches et des Océans est-il réceptif à vos observations et suggestions lorsqu'il mène des consultations?
Le ministère a de multiples niveaux de hiérarchie, alors le comité consultatif est généralement... D'après mon expérience avec le conseil consultatif sur le thon, nous communiquons nos préoccupations au gestionnaire des pêches, mais je ne sais pas très bien si le gestionnaire des pêches a de véritables pouvoirs au sein du ministère dans la région du Pacifique. Je ne pourrais pas en dire plus.
Madame Silver, vous avez parlé du prix des permis qui a augmenté au fil des ans, mais dans un marché normal, le prix ne serait-il pas déterminé par la valeur réelle du permis? En d'autres termes, si l'on paie 100 000 $ pour un permis, tant qu'il n'y a pas d'autres forces en jeu, le marché ne devrait-il pas déterminer le prix que l'on devrait payer, en permettant aux gens de gagner leur vie tout en le finançant?
Oui, et cela illustre le problème de la séparation de la propriété des permis et, dans bon nombre de cas, de la distinction entre ceux qui détiennent les permis et ceux qui pratiquent la pêche. Les coûts liés à la pêche ne sont pas nécessairement assumés par ceux qui détiennent les permis.
Y a-t-il des fonds engrangés dans les permis par des gens qui ne pêchent pas, mais qui sont des intervenants étrangers ou locaux qui investissent de manière spéculative? Cela a-t-il pu faire augmenter le prix des permis?
C'est un des défis que j'ai rencontrés au cours de mes recherches visant à comprendre qui sont les investisseurs. Par exemple, lorsque des sociétés à numéro apparaissent dans les registres des permis, il est très difficile pour une chercheuse comme moi, qui doit se contenter des renseignements accessibles au public, de découvrir exactement qui sont derrière ces sociétés et de comprendre leurs objectifs, leurs motivations, d'où vient leur argent, et ainsi de suite.
Nous avons entendu des histoires et, comme je l'ai déjà mentionné, il y a eu des enquêtes journalistiques publiées dans le Globe and Mail qui suggèrent qu'il y aurait peut-être un des investissements étrangers et spéculatifs. L'ambiguïté relève de la nature des renseignements publics versus les renseignements privés. C'est tout ce que je peux en dire avec certitude, mais c'est un aspect que le Comité devrait étudier et qu'il devrait recommander de surveiller davantage. Cela relève de la gestion des pêches.
Selon vous, faudrait-il rendre publics les renseignements sur les investisseurs, ou établir des règlements régissant qui peut détenir un permis?
Selon moi, il faudrait tout d'abord un registre public des permis et des contingents.
Comme je l'ai dit, il existe un énorme tableau électronique publié par le personnel de la région du Pacifique du ministère des Pêches et des Océans. Cela nous a pris quelques années avant de le comprendre et de pouvoir nous en servir. Je ne suis pas programmeuse. J'ai dû trouver un collègue spécialiste pour m'aider à extraire les renseignements pertinents sur les différents permis.
Donc, un bon point de départ serait d'avoir un outil plus convivial. Si le ministre, les fonctionnaires du ministère et les gestionnaires des pêches décident que les transactions marchandes doivent faire l'objet d'une surveillance, ce registre serait un bon point de départ et pourrait servir à cette fin.
Merci, monsieur le président.
Merci aux quatre témoins d'avoir assisté à la première session et d'être revenus aujourd'hui pour comparaître à la deuxième.
M. Antilla ou M. MacDonald, j'aurais dû retenir lequel de vous deux a parlé du fait que les entreprises de transformation déterminent essentiellement quand et à quel endroit pêcher, quelles prises cibler et où les livrer. Pourriez-vous nous en dire plus? Je vous accorderai du temps, car je sais que la limite de sept minutes vous a peut-être empêché d'en parler davantage.
Si on loue un contingent de quelqu'un, il s'attend à ce qu'on livre la prise qui s'y rattache, et c'est lui qui en établit le prix, qui n'est peut-être pas le meilleur prix de tout le marché. Normalement, comme pêcheur, on veut avoir le prix le plus élevé qu'on puisse obtenir.
Comme pêcheur, on doit diversifier ses activités dans plusieurs pêches. Avec la société de laquelle on loue habituellement... on obtient aussi d'autres contingents d'ailleurs. On est pris à pêcher pour cette société année après année, sinon on court le risque de ne pas pouvoir pêcher du tout.
J'ai une question pour vous. Est-ce à cause du besoin constant d'approvisionnement des transformateurs, c'est-à-dire parce que les usines et les employés doivent rester actifs de façon continue? Est-ce un facteur qui entre en jeu? Quels autres facteurs font partie des stipulations attachées à vos droits de pêche?
Oui.
Oui, je crois que vous avez mis le doigt dessus. Les transformateurs ont des coûts indirects très élevés. Vous avez entendu leurs témoignages à cet effet hier. Je sais que l'entreprise à qui je vends la majeure partie de mes prises vient de construire une usine qui semble avoir coûté beaucoup d'argent. Cette entreprise génère des revenus en achetant et en vendant du poisson. Elle a besoin d'un approvisionnement garanti, sinon elle ne peut pas dépenser avec assurance pour construire les usines dont elle aura besoin et créer la valeur dont on a besoin dans le secteur des pêches. Donc, oui, les acheteurs et les transformateurs de poisson sont contraints par la structure même du système de fonctionner comme courtiers de contingents, car ils doivent assurer leur propre approvisionnement.
Oui, c'est une complication qui s'est développée au fur et à mesure que le système a changé, que les usines de transformations se sont consolidées, que les petites usines locales ont graduellement disparu et ainsi de suite. Selon moi, il sera difficile de redresser la situation, à moins de pouvoir établir une relation de confiance entre les pêcheurs indépendants et les transformateurs.
Quelle solution envisagez-vous à ce problème? C'est évidemment très important pour les transformateurs.
Il y a d'autres façons de garantir la disponibilité du produit que d'être propriétaire de la ressource. Tous les détaillants du monde le savent. On peut y arriver en offrant de meilleurs prix et un meilleur service. Il existe beaucoup d'autres stratégies que d'en être propriétaire. On le voit dans d'autres secteurs, comme dans celui de la pêche au crabe, où il y a plus de 40 acheteurs. Cela fonctionne pour eux, car ils offrent du bon service et utilisent d'autres stratégies, mais ils ne sont pas propriétaires de ces contingents.
D'accord. Cela fait partie de ce que nous devons entendre en tant que comité pour que nous puissions formuler des recommandations.
Vous avez souligné, comme d'autres personnes l'on fait, que nous devons concevoir des solutions pour les pêcheurs de la relève — nous espérons que vous serez cette relève — ainsi que pour ceux qui suivront. C'est pourquoi nous devons entendre des propositions de solutions. Nous ne sommes pas sur le terrain; voilà pourquoi je pose ce genre de questions.
Il y a également eu une observation plus tôt quant au fait que la transférabilité serait en fait nécessaire. Je ne sais pas si vous l'avez entendue. Je crois que c'était au sujet des stocks de poisson de fond et ainsi de suite, pour lesquels les pêcheurs ont droit à une prise très limitée et peuvent transférer des contingents d'un bateau à un autre pour gérer les prises accessoires. Pourriez-vous nous expliquer brièvement pourquoi cela — cette transférabilité — est nécessaire?
Je ne sais pas qui aurait une réponse à cette question. C'est peut-être plus une réalité sur la côte Nord, je crois, d'après mes connaissances du dossier. Voulez-vous essayer d'y répondre, monsieur Cameron?
Oui, je peux essayer.
Je pense que les deux témoins qui ont parlé plus tôt ont beaucoup plus d'expérience dans la pêche du poisson de fond que nous. Il existe beaucoup d'espèces dont la population est moins nombreuse et qui sont étouffées. Par exemple, au large de la côte, il n'y a peut-être que 130 livres de sébaste aux yeux jaunes pour 15 000 livres de flétan, et même cette petite population est répartie dans différentes zones. On pourrait n'en prendre que 10 ou 20 livres dans une zone, alors il faut accumuler des contingents. Tout d'abord, il faut un contingent pour le sébaste aux yeux jaunes, et un contingent pour la zone où l'on pêche d'habitude. Mais cela n'implique pas qu'on ne peut pas accumuler des contingents pour l'espèce ciblée en fonction de ce qui est disponible.
D'accord. J'imagine que les détails sont trop compliqués pour que nous puissions faire le tour de la question ici aujourd'hui. Il est toutefois intéressant de constater qu'une certaine transférabilité est nécessaire. J'imagine donc qu'il faut implanter un système de transférabilité différent de celui des CIT.
Par l'entremise du président, nous pourrions peut-être obtenir de plus amples renseignements ou demander au témoin qui est intervenu plus tôt de nous fournir plus de détails sur ce qu'il entend par transférabilité. Merci.
Plus tôt, nous avons parlé du coût des quotas, des transferts et ainsi de suite.
Monsieur MacDonald, vous avez parlé des coûts que vous avez eu à assumer et du fait que vous aviez dû mettre votre maison en garantie. D'après ce que nous avons entendu plus tôt, les prix ont augmenté, parce que l'IPCIP a bénéficié d'avantages faciles, qui auraient dû être accordés aux nouveaux pêcheurs. Êtes-vous du même avis?
Je pense que, par l'entremise de l'IPCIP, l'injection de fonds publics a certainement fait grimper les prix. Je pense aussi que le prix des locations a augmenté au même rythme que la valeur des débarquements de poissons. Les investisseurs ont donc saisi la possibilité de profiter tous les ans d'un retour considérable et garanti sur leur investissement. Il faut aussi tenir compte du fait que des fonds ont été investis dans les titres de propriété des quotas à des fins spéculatives.
Merci, monsieur Arnold.
Nous allons maintenant accorder la parole au NPD, c'est-à-dire à M. Donnelly, pendant au plus sept minutes.
Merci, monsieur le président.
De nouveau, je vous remercie d'être ici aujourd'hui pour nous livrer votre témoignage dans le cadre de l'étude menée par notre comité. Si vous ne l'avez pas déjà fait, je vous encourage à présenter vos recommandations par écrit à la greffière du Comité. Nous allons écouter vos témoignages et fort probablement discuter des recommandations.
Je vais commencer avec vous, monsieur MacDonald.
Depuis des mois, le Comité entend clairement les revendications de certains jeunes pêcheurs. Je pense d'ailleurs que trois d'entre vous les représentent. Vous avez souligné que, si le système ne change pas, il ne restera pas assez de pêcheurs actifs. Pourriez-vous nous expliquer ce qui se produira si le système ne change pas et qu'il ne reste pas assez de pêcheurs actifs?
Nous devons tous être conscients du fait que nous disposons d'une ressource extraordinaire sur la côte Ouest, ainsi que d'un grand nombre d'espèces ayant une bonne valeur. Si on ne fait rien, il ne restera pas assez de personnes pour pêcher le poisson. Il ne suffit pas d'aller à l'école pendant trois mois, puis d'obtenir une autorisation pour aller pêcher. Il faut des années pour apprendre les techniques de la génération précédente. Si on n'encourage pas les jeunes à pêcher et qu'on ne tente pas de ramener les pêcheurs expérimentés qui sont partis, on ne pourra pas pêcher le poisson en utilisant de la main-d'oeuvre canadienne.
On se demande ce qu'il faudra faire alors. Eh bien, il se peut qu'on doive avoir recours à des travailleurs étrangers pour pêcher le poisson à cause de la pénurie de main-d'oeuvre qualifiée au pays. On peut imaginer la suite des choses. Si on change la politique dès maintenant, on pourra recruter plus de jeunes, qui, au cours des 10 prochaines années, apprendront les rudiments du métier. On pourra ainsi compter sur la prochaine génération de pêcheurs. Tout cela est en jeu en ce moment. On ne peut même plus trouver d'équipages de pêcheurs parce que les avantages nets sont insuffisants.
Excellent.
Vous avez décrit un système qui est efficace pour vous, mais qui ne l'est pas forcément pour d'autres personnes. Vous avez aussi dit que les objectifs de l'IPCIP n'ont pas été totalement atteints. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur l'un ou l'autre de ces sujets?
Oui. Je vais d'abord parler de l'IPCIP. Dans le cadre de cette initiative, il m'est arrivé très souvent de louer des permis à des bandes autochtones. Pendant quelques années, j'ai exploité un bateau pour former des membres de Premières Nations de ma région afin qu'ils puissent fonder leurs propres entreprises de pêche.
D'après ce que bon nombre de mes amis qui sont membres de bandes côtières et moi avons pu constater, les permis octroyés dans le cadre de l'IPCIP n'ont pas eu pour effet d'accroître l'accès des membres des Premières Nations à la pêche commerciale. Ces permis sont devenus des sources de revenus pour les bureaux de bande. Ils ne sont pas utilisés par des membres des bandes. Ils sont loués aux plus offrants sur le marché libre. Certains de mes amis qui sont membres de bandes côtières n'ont pas obtenu ces permis parce que des soumissionnaires avaient offert 5 000 $ de plus qu'eux. L'Initiative n'a donc pas atteint ses objectifs.
Madame Silver, pourriez-vous résumer vos principales recommandations? Je vous suis reconnaissant de l'abondante matière à réflexion que vous nous avez fournie. Je pense que ce sera un excellent exercice.
À mon avis, il faut mettre en place des mécanismes de surveillance, comme la création d'un registre des permis et des quotas. Pour certaines des raisons que j'ai données tout à l'heure, je pense qu'il serait alors plus facile de comprendre les marchés et de les réglementer d'une certaine façon, si nécessaire. Je pense aussi que cela serait utile sur le plan de la transparence. Le MPO et le milieu de la recherche disposent des ressources publiques et de la capacité nécessaires pour poser des questions sur les objectifs socioéconomiques au sein des localités côtières, ce qui nous aiderait à comprendre les enjeux.
Avez-vous réalisé des recherches sur d'autres pays qui constituent d'excellents exemples de ce que vous recommandez?
La semaine dernière, on vous a parlé de la situation en Alaska. Je pense que vous avez discuté d'initiatives intéressantes qui sont en cours dans cet État. La plupart de mes recherches portent sur la situation en Colombie-Britannique. Je serais heureuse de transmettre certains de mes rapports de recherche au Comité.
C'est toujours utile. Ce serait extrêmement utile si le gouvernement cherche des solutions et d'autres systèmes qui se sont avérés efficaces.
On nous a dit qu'il y avait trop de bateaux, qui tentent de pêcher trop de poissons.
Trop peu de poissons. Un trop grand nombre de poissons constituerait un autre problème, n'est-ce pas?
Pourriez-vous nous dire ce que vous en pensez?
Je pense que le premier système d'attribution de permis remonte à la fin des années 1960. On parlait alors de total autorisé des captures et de quotas. Dans certaines pêcheries, le quota est très élevé, mais la période de pêche est beaucoup plus longue qu'ici. Avant l'imposition d'un nombre limité de permis, il y avait beaucoup de pêcheurs à bord des bateaux. Les bateaux ne vont pas tout simplement disparaître. Les gens qui souhaitent pêcher ne vont pas tout simplement disparaître. J'ai beaucoup d'empathie pour les gens qui utilisent cette expression, car, du jour au lendemain, on a limité le nombre de permis. Il faudra nécessairement restructurer le système. À mon avis, on pense que les principes régissant le marché vont dicter l'attribution des permis. On a aussi entendu des gens dire que des enjeux politiques entrent peut-être aussi en ligne de compte.
La spécialiste des sciences sociales en moi pense à la longue histoire des pêcheries et sait que les gens, les pêcheurs et les bateaux ne vont pas tout simplement disparaître.
Merci.
Monsieur Cameron, vous avez parlé d'un processus approprié et d'une période de transition de sept ans.
Pourriez-vous préciser brièvement votre pensée à ce sujet? C'est une suggestion très précise et utile.
Comment pourrions-nous passer de la situation actuelle à celle que vous envisagez au bout d'une période de transition de sept ans?
Si j'ai parlé d'une période de sept ans, c'est probablement parce que c'est le temps qu'il a fallu à Terre-Neuve pour changer les choses. En toute honnêteté, je dois avouer que cette idée découle du cynisme que j'ai développé en travaillant toute ma vie avec cette région. Si on ne leur fournit pas des directives assez rigides, les parties intéressées vont se contenter d'en discuter. C'est ainsi que m'est venue cette idée, et il me semble aussi qu'un précédent juridique a été créé. Il me semble que cela pourrait marcher. Je vise des objectifs concrets, qui, selon moi, pourraient être atteints. Je pense qu'il existe des façons plus nobles de faire les choses.
J'aimerais proposer...
Sans vouloir offenser qui que ce soit, je pense avoir proposé une idée apolitique, qui devrait faire l'unanimité. Espérons qu'elle soit plus susceptible de faire son chemin.
Merci, monsieur Donnelly.
Revenons maintenant au parti ministériel. Monsieur Hardie, vous avez la parole pendant tout au plus sept minutes.
Merci, monsieur le président.
Merci à vous tous d'être ici aujourd'hui.
Monsieur MacDonald, avez-vous acheté un quota ou en louez-vous un?
C'est très étrange.
C'est vous qui avez l'argent, mais vous devez accepter le prix qu'ils fixent eux-mêmes.
Qu'est-ce qui cloche ici? Qu'est-ce qu'il faut changer?
Tout le système de propriété des quotas est très opaque. On ne sait pas trop qui les possède et qui les loue, et la vaste majorité des transactions passent par des acheteurs. La plupart du temps, j'ignore l'identité du propriétaire du permis ou du quota, car celui-ci est issu d'un bassin contrôlé par différents acheteurs.
Non. On essaie de collaborer avec l'acheteur, comme celui avec lequel j'ai conclu un accord de bonne foi, mais on ne sait jamais.
Évidemment, on craint que des entités étrangères se portent acquéreurs de quotas. J'ai parlé d'argent stupide, probablement de façon injuste, mais il s'agit d'argent que certains individus tentent simplement de cacher quelque part. Par exemple, en Colombie-Britannique, de l'argent provenant de transactions immobilières est utilisé pour acheter des quotas.
Existe-t-il des soupçons — voire plus que de simples soupçons — voulant que, si des intérêts étrangers se portent acquéreurs de quotas, les produits risquent d'être écoulés ailleurs que sur notre marché? Sommes-nous en train de perdre notre souveraineté sur les produits que nous extrayons de la mer?
Je vais dire rapidement ce que j'en pense, puis laisser les autres s'exprimer là-dessus.
En 2014, j'ai dîné avec des représentants d'une société chinoise qui exploite une chaîne de supermarchés. En gros, ils ont proposé de m'acheter un permis et un bateau de pêche à la crevette, car ils souhaitaient améliorer leur accès à ce produit en très forte demande. Ils ont constaté que le Canada disposait d'un stock de crevettes très important et de grande valeur. Ils m'ont aussi dit que, au cours des 12 mois précédents, ils avaient fait l'acquisition de 10 permis de pêche de la crevette au chalut au Canada.
Je ne peux pas parler des autres détails. Toutefois, je peux dire que j'ai dîné avec ces gens et que c'est ce qu'ils m'ont dit.
Ma première carrière, c'était à la radio. Les stations où j'ai travaillé avaient obtenu une licence qui les autorisait à utiliser une fréquence donnée. La fréquence appartenait aux Canadiens, et c'est la même chose pour les poissons: ils appartiennent aux Canadiens. Cependant, il y a une différence: une règle définit la proportion maximale des licences qui peut être détenue par des intérêts étrangers.
Devrait-on envisager quelque chose du même genre? Autrement dit, il s'agirait, comme pour une licence de radiodiffusion, ou encore comme dans le domaine de l'aviation commerciale, de plafonner la participation étrangère. Faudrait-il appliquer une règle semblable relativement aux permis de pêche et aux contingents?
Ma question ne s'adresse à personne en particulier.
Seuls les citoyens canadiens devraient être admissibles aux contingents et aux permis de pêche. Ce n'est pas compliqué.
Effectivement, c'est un enjeu crucial.
Ma réponse s'inscrit dans une conjoncture où, pour ainsi dire, les prises stagnent dans le monde. On est presque au maximum. Par conséquent, des entreprises et des pays chercheront à garantir leur approvisionnement.
Comme il a été dit, la côte Ouest regorge de ressources. Les ressources halieutiques abondent sur toutes les côtes canadiennes. Il s'agit donc d'une question fort pertinente, et il faut être conscient des moyens que prennent les entreprises et les investisseurs pour se garantir un approvisionnement.
A-t-on déjà recueilli l'information nécessaire pour déterminer le rendement du capital investi par un détenteur de contingent selon le modèle actuel? Est-ce que quelqu'un le sait?
Cela varie d'une année à l'autre. Le rendement pourrait avoisiner les 8 %, sauf que, il y a un an ou deux encore, la valeur d'un contingent grimpait rapidement.
Évidemment, c'est dans ce but que l'on s'achète un contingent. Il y a l'investissement initial. S'il prend de la valeur, j'imagine que l'on peut dire que, sur papier, le rendement augmente, sauf qu'il ne se concrétise qu'au moment de la vente.
Je m'interroge strictement sur le flux annuel de trésorerie.
Si l'on considère qu'il s'agit d'un actif et que cet actif est évalué sur une base annuelle, j'estimerais le rendement de l'actif à 8 %.
Selon ce que je comprends de la situation actuelle, les transformateurs jouent un rôle charnière. C'est dans leur intérêt de prendre les moyens nécessaires pour avoir assez de poisson afin de pérenniser leurs activités. Ils prennent ensuite le risque de le vendre sur le marché, évidemment.
Le plus avantageux sera-t-il bientôt que les pêcheurs deviennent en quelque sorte des employés des transformateurs?
Hier, l'un des témoins qui ont comparu a dit qu'il suffisait de trouver un meilleur patron. Ce sont les mots qu'il a employés. Or, à ce que je sache, les transformateurs ne paient pas nos cotisations au Régime de pensions du Canada. C'est nous qui le faisons. Par conséquent, j'ai trouvé cela très curieux.
Nous ne sommes pas leurs employés. Techniquement, nous sommes censés être des pêcheurs indépendants qui sont partie à une transaction: nous, nous pêchons le poisson, et eux, ils nous l'achètent.
La question peut s'imposer: vu l'évolution des choses, vous sentez-vous comme un chameau qui doit passer par le chas d'une aiguille?
D'accord, merci.
Nous avons aussi constaté qu'une commission des prêts, qui permettrait aux pêcheurs d'obtenir eux-mêmes du financement ou des garanties de prêt de manière à négocier directement avec les détenteurs des permis et des contingents — ce qui essentiellement retirerait les transformateurs de l'équation — vous laisserait éventuellement plus libre de vendre à qui vous voulez.
Actuellement, le transformateur négocie avec le détenteur de contingent, alors que le pêcheur est captif du transformateur. Si vous pouviez vous tourner vers une autre source de financement pour louer des permis et des contingents, briserait-on ainsi ce carcan?
À vous, Ross.
Le pêcheur qui détient un permis est largement plus libre de vendre à qui il le veut, au prix fort du marché.
A-t-on déjà procédé à une analyse de l'écart entre ce que touchent les pêcheurs lorsqu'ils déchargent le poisson et ce que touchent les transformateurs lorsqu'ils vendent le produit final?
Tout dépend de la part de marché du transformateur. Ainsi, dans le cas du saumon et du poisson canadien en général, l'écart sera considérablement plus important lorsque le transformateur contrôle une large part du marché, lorsqu'il contrôle les coûts.
Merci, monsieur Hardie. Vous avez excédé votre temps de parole.
Passons maintenant aux conservateurs. M. Doherty a la parole, pour un maximum de cinq minutes.
Je vous remercie.
Je remercie une fois de plus nos invités. C'est la première fois que j'ai l'occasion aujourd'hui de parler avec ceux qui sont parmi nous. Je vous sais gré de votre présence. Je vous remercie également de nos discussions la dernière fois que vous êtes venus à Ottawa.
Comme je l'ai déjà dit, je ne suis pas un pêcheur et je n'ai jamais travaillé dans l'industrie de la pêche, mais je commence à saisir comment les politiques définies à Ottawa ou à Victoria se répercutent sur vous. Il y a eu des cris du coeur la dernière fois, et je vous sais sincèrement gré de votre parler-vrai et de vos courriels subséquents. Je comprends.
Revenons aux pêcheurs étrangers, à la propriété étrangère.
Fraser, vous avez dit avoir déjeuné avec un groupe étranger qui allait acheter un bateau et qui allait aussi vous acheter un permis. Nous savons par ailleurs qu'il y a beaucoup d'intrusions illégales et non déclarées, de pêche clandestine, par des étrangers au large de la côte britanno-colombienne. Les groupes qui n'ont pas acheté de bateau pourraient-ils être les mêmes que ceux qui pêchent illégalement, mais aussi légalement, à la limite de nos eaux territoriales ou dans nos eaux territoriales?
C'est indéniablement possible. Je pense que tout dépend de leurs activités. Dans les flottilles hauturières étrangères, il y a des groupes de bateaux qui ont expressément pour fonction d'essayer de...
Oui. S'agit-il des mêmes personnes que celles qui investissent ici? Je l'ignore, mais c'est possible.
Oui, d'une façon ou d'une autre, ils arrivent à leur objectif, que ce soit en concluant un partenariat avec vous ou en allant là-bas malgré tout.
Y a-t-il quelqu'un d'autre qui a une observation à formuler à ce sujet?
J'ignore la réponse, mais c'est ce qui se passe dans d'autres pays. L'étude suisse dont j'ai parlé dans mon discours a déterminé qu'un petit nombre d'entreprises contrôlent une vaste proportion des prises. Comme l'a dit Fraser, les chercheurs s'interrogent sur les bateaux qui ont pour tâche de rester dans les eaux internationales, mais à la limite des eaux territoriales.
J'hésite à répondre résolument par l'affirmative, mais je trouve que c'est une question légitime.
Vous avez soulevé des éléments intéressants et vous avez fait état de données que nous n'avions pas réussi à obtenir. Les fonctionnaires du ministère des Pêches et des Océans — quelle surprise — n'ont pas pu nous fournir l'information. Quiconque s'intéresse aux délibérations de ce comité-ci sait que je n'en reviens jamais que ces gens-là soient censés être des experts. Ils sont censés gérer le dossier, mais ils n'ont pas l'information.
L'étude que vous évoquez nomme-t-elle les entreprises en question?
À vrai dire, je n'ai pas encore décidé de ce que je ferais à ce sujet dans les publications. Je pense que les gros joueurs ont été nommés ici.
Oui, tout à fait regrettable. J'ai entendu dire que les témoignages sont disponibles en rattrapage sur Internet.
Des voix: Oh, oh!
Que voulez-vous, je fais partie du milieu universitaire. C'est rare qu'on dise une telle chose à notre sujet.
J'ai quelques réflexions là-dessus. Jusqu'en 2015 environ, le ministère avait une page fort bien conçue où obtenir l'information. C'était un répertoire des permis, classé par pêcherie. Il y avait un menu déroulant. C'est ainsi que je louais des permis. Je vérifiais quelles bandes détenaient des permis qui conviendraient à mon bateau, puis je téléphonais et j'allais...
Elle n'existe plus. Depuis 2016 à peu près, il n'y a plus qu'un fichier Excel extrêmement compliqué et difficile à dénicher en plus. Il compte environ 4 000 pages. J'ai beaucoup de mal à m'y retrouver.
Je vous remercie, monsieur Doherty. C'est tout, votre temps de parole était écoulé.
Passons maintenant à M. Morrissey, pour un maximum de cinq minutes, je vous prie.
Merci, monsieur le président.
Il a beaucoup été question des permis associés, que le ministère des Pêches et des Océans est réticent à dissocier pour la vente. Quel serait selon vous le désavantage de permettre de revendre les permis associés indépendamment les uns des autres? Y a-t-il un désavantage?
Je pense que les représentants du ministère ont justifié cette décision dans leur témoignage du 30 janvier dernier en disant qu'il y aurait plus de bateaux au large. Comprenez-y ce que vous voulez. Je trouve que ce n'est pas du tout un désavantage.
Je prône la dissociation des permis, oui. Tout ce que je dis, c'est que, dans leur témoignage du 30 janvier dernier, les représentants du ministère en ont parlé.
Je pense que la politique actuelle visait à limiter l'ampleur de la flottille et j'estime que la taille de la flottille a bel et bien été limitée. Or, tout comme je pense que les restrictions relatives à la longueur que comportent de nombreux permis sont quelque peu archaïques, j'estime que d'autoriser la dissociation des permis aurait sans doute peu de désavantages tout en les rendant plus abordables.
Je vois.
En tant que député d'une circonscription de la côte Est, selon ce que je comprends des témoignages, l'impossibilité de transférer les contingents ou de les attribuer à quelqu'un qui ne détient pas de permis est un gros problème sur la côte Ouest. Quelqu'un a dit qu'il faut mieux équilibrer le marché locatif.
Expliqueriez-vous en quelques mots au Comité en quoi consisterait pour vous cet équilibre? Il a été question de transparence, mais s'il y a une chose que le Comité puisse faire, c'est bien de formuler des recommandations au sujet de la location. Tout le monde semble se concentrer sur ce point.
Je pense que vos deux invités précédents ont formulé d'excellents arguments. Une entente de location prévoyant un partage équitable et des mesures contraignantes, sous l'égide de l'État, résoudrait une bonne partie du problème. Dans mon cas, même avec une entente équitable de ce genre, l'argent supplémentaire que je gagnerais me permettrait de...
Je ne suis pas assez au fait des pratiques pour formuler des suggestions en toute connaissance de cause, mais je pense que quelque chose... Grosso modo, s'il était possible d'inscrire les pourcentages pour la location, des chiffres concrets, pêche par pêche, dans les plans de gestion intégrée de la pêche, ce serait déjà une idée. Cependant, je ne suis pas un expert. Il faut trouver le moyen d'imposer le respect des règles, car si l'on s'en tient au libre marché, la situation ne changera jamais.
Vous avez par ailleurs dit, monsieur MacDonald, que vous êtes un pêcheur de première génération, mais que vous ne détenez aucun permis. Vous pêchez, mais vous n'avez pas de permis.
Je n'ai pas vraiment eu d'autre option. Duncan a soulevé un très bon argument à ce sujet, un peu plus tôt: plus les prix de location des permis et des contingents augmentent, plus le pêcheur doit s'échiner afin d'avoir les moyens de rester à flot.
Je veux dire travailler plus fort. Il faut pêcher davantage, dans diverses pêcheries, afin d'arriver à gagner assez d'argent pour maintenir son entreprise à flot. Si une plus grande proportion de la valeur des débarquements allait aux pêcheurs plutôt qu'à quelqu'un d'autre, nous pourrions pêcher moins et faire moins de prises, car nous gagnerions assez d'argent pour pérenniser notre entreprise.
L'autre point qui m'a interpellé se rapporte aux commissions qui encadrent tout cela. Elles prennent les décisions qui scellent, pour ainsi dire, le sort des pêches, mais j'ai l'impression qu'il arrive qu'elles ne comptent aucun pêcheur actif parmi leurs membres. C'est compliqué de s'y faire nommer. Est-ce exact?
Qui constitue les commissions? Est-ce une politique du ministère fédéral des Pêches et des Océans qui définit les critères de nomination de leurs membres?
Oui. C'est ainsi que l'on communique de l'information dans la région sur différents plans de gestion.
Donc, le ministère définit les critères de nomination des membres des commissions ou des comités qui lui formulent des conseils.
Il définit le processus par lequel un comité consultatif transmet de l'information au ministère.
Je ne vais pas tourner autour du pot. Dans le cas du crabe, nous réclamons un autre processus multisectoriel depuis maintenant cinq ans. Je peux garantir sur quoi portera la prochaine réunion de l'industrie du crabe: il s'agira de réclamer un nouveau processus.
C'est à n'y rien comprendre. Il faut procéder autrement.
Dans le cas du thon, c'est très démocratique. Les administrateurs sont élus. Ensuite, nous sélectionnons les administrateurs de l'association des pêcheurs de saumon de la Colombie-Britannique qui siégeront au conseil consultatif, et eux traitent avec les gestionnaires des pêches. C'est très bien.
Le thon est un cas particulier, par contre, car, au Canada, il suffit d'un permis au titre de l'annexe II. C'est l'une des rares pêches auxquelles on peut accéder à peu de frais.
Merci, monsieur Morrissey.
Il ne nous reste que très peu de temps. Puisque nous avons commencé avec quelques minutes de retard, je vais permettre à MM. Doherty et Donnelly de poser une question chacun.
Je rappelle aux membres qu'avant de clore la réunion, nous devrons prendre quelques instants pour approuver le budget afin que nos invités soient défrayés de leurs dépenses.
Monsieur Doherty, vous avez la parole.
J'ai une question, et elle est très simple.
Les membres des comités consultatifs sont-ils des pêcheurs ou plutôt des fonctionnaires retraités?
Les conseils se composent essentiellement de détenteurs de permis. Il y a de moins en moins de pêcheurs. Auparavant, ils se composaient presque exclusivement de pêcheurs actifs. Or, maintenant que les pêcheurs sont de moins en moins nombreux à détenir des permis, les comités se composent de plus en plus de non-pêcheurs.
Pour en revenir à la question de la propriété, monsieur Cameron, vous avez parlé de faire la transition vers les pêcheurs actifs. Comment envisagez-vous cela? Comment peut-on faire participer les spéculateurs et les titulaires de permis à un processus visant à leur retirer la propriété de...
Il y a quelques semaines, j'ai assisté à une réunion avec le ministre et des représentants de la région du Pacifique. Nous avions demandé à les rencontrer afin de discuter de la question. Ils nous ont répondu que nous pourrions en discuter lorsque le Comité aurait formulé ses recommandations. Nous avions peut-être placé la charrue avant les boeufs. Je ne sais pas. Il faut s'asseoir et en discuter. Il nous faut une tribune où nous jouerons un rôle dans le processus.
Merci, monsieur Donnelly.
Une fois de plus, je remercie les témoins d'avoir participé à cette réunion. Ce fut fort instructif. Venant de la côte Est, j'avais l'impression que les pêches étaient un sujet sensible là-bas, mais la côte Ouest remporte la palme. Quoi qu'il en soit, j'ai eu beaucoup de plaisir à écouter vos observations et à prendre connaissance de tous les problèmes que vous tentez de résoudre, une pêche à la fois. Certains se seraient assurément questionnés sur l'utilité de prendre le temps de venir ici. Par conséquent, je vous remercie de nouveau de votre collaboration. Nous entendrons sans doute d'autres témoins du milieu de la pêche demain, et je suis convaincu que ce sera tout aussi instructif. Je vous remercie tous d'avoir témoigné devant nous aujourd'hui.
Je signale aux membres du Comité qu'il me faut une motion pour que nous approuvions le budget.
M. Hardie propose, avec l'appui de M. Doherty, que le budget soit approuvé.
(La motion est adoptée.)
Le président: Je vais signer, et tout le monde pourra se faire rembourser. Parfait.
Merci à tous.
La séance est levée.
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