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INAN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires autochtones et du Nord


NUMÉRO 039 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 5 décembre 2016

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Bonjour à tous. Je déclare la séance ouverte.
    C’est le Comité permanent des affaires autochtones et du Nord de la Chambre des communes. Conformément à l’article 108(2) du Règlement, nous sommes ici aujourd’hui pour étudier l’objet du projet de loi S-3, Loi modifiant la Loi sur les Indiens, et plus précisément l’élimination des iniquités fondées sur le sexe en matière d’inscription. Nous nous réunissons aujourd’hui, comme nous le faisons toujours, sur le territoire non cédé des Algonquins, que nous remercions.
    Comme nous entendrons cinq témoins pendant la première heure, nous avons demandé à chacun d'entre eux de s'en tenir à un exposé de sept minutes chacun, ce qui laissera 25 minutes pour les questions du Comité. Je montrerai un carton jaune lorsqu’il restera une minute, puis un carton rouge pour indiquer qu’il faut conclure.
    Je vous prierais de ne pas dépasser le délai imparti afin que nous puissions poser quelques questions et que tout le monde puisse être entendu équitablement. Je vous présenterai maintenant les témoins.
    Tout d’abord, de l’Association du Barreau canadien, Gaylene Schellenberg, avocate, Législation et réforme du droit, et David Taylor, membre de l’exécutif, Section du droit des autochtones. Ensuite, du Fonds d’action et d’éducation juridiques pour les femmes, Kim Stanton, directrice juridique, et Krista Nerland, associée chez Olthuis Kleer Townshend - LLP. À titre personnel, Pamela Palmater, chaire de gouvernance autochtone, Ryerson University, département de politique et d’administration publique, ainsi que Mary Eberts et Ellen Gabriel.
    Bienvenue à vous tous. Nous sommes ravis que vous puissiez être là aujourd’hui.
    Nous allons commencer par l’Association du Barreau canadien et ses deux représentants.
    Je vous inviterais à partager ces sept minutes entre vous comme bon vous semble. Vous avez la parole. Merci beaucoup.
    Merci de nous avoir invités à comparaître devant vous aujourd’hui pour étudier le projet de loi S-3.
    L’Association du Barreau canadien est une association nationale qui regroupe 36 000 avocats, étudiants en droit, notaires et professeurs de droit. Les principaux objectifs de l’Association comprennent l’amélioration du droit et de l’administration de la justice.
    Notre section du droit des autochtones compte des membres de toutes les régions du Canada spécialistes du droit des autochtones. David Taylor, membre de l’exécutif de cette section m’accompagne aujourd’hui. Il résumera notre mémoire et répondra à vos questions.
    Merci.
    Merci. Bon après-midi monsieur le président et honorables députés.

[Français]

    C'est un plaisir de comparaître devant le Comité permanent des affaires autochtones et du Nord.
    Je vais faire ma présentation en anglais, mais je pourrai répondre avec plaisir à des questions en français.

[Traduction]

    La section du droit des autochtones de l’ABC est heureuse de contribuer à l’étude préalable de l’objet du projet de loi S-3 par le Comité permanent des affaires autochtones et du Nord.
    Je rappellerai d’abord les motifs du jugement de la juge Ross de la Cour suprême de la Colombie-Britannique dans l’arrêt McIvor v. the Registrar, Indian and Northern Affairs Canada:
... nous nous attendons fondamentalement à acquérir notre identité culturelle de nos parents et à la transmettre à nos enfants.
    Il n’est donc pas surprenant que l’une des critiques les plus fréquentes concernant le registre est qu’il refuse aux femmes autochtones le pouvoir de transmettre le statut d’Indien à leurs enfants.
    L’une de nos principales préoccupations est la manière dont le projet de loi a été présenté et la manière dont il est étudié au Parlement.
    Lorsque le projet de loi S-3 a été lu pour la première fois au Sénat, les consultations relatives à la première étape de la réponse du gouvernement à l’arrêt Descheneaux étaient loin d’être terminées. Même si nous comprenons que les consultations menées par Affaires autochtones sur le projet de loi S-3 devaient se terminer vendredi dernier, le 2 décembre, il n’en demeure pas moins qu’avancer dans le processus législatif alors que les consultations étaient encore en cours constitue un manquement au devoir du gouvernement fédéral de consulter les nations autochtones lorsque des modifications législatives les concernent, comme l’exige l’honneur de la Couronne et la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Même si les étapes de l’étude en comité au Sénat et à la Chambre visent à modifier les projets de loi en fonction de la rétroaction publique, l’honneur de la Couronne et la Déclaration des Nations Unies exigent davantage que de laisser les nations autochtones regarder le train législatif quitter la gare.
    Nous nous préoccupons aussi de l’article 8 du projet de loi S-3, qui empêche les personnes visées par le projet de loi S-3 de demander une indemnisation après avoir été exclues du statut d’Indien. Le Parlement et la Couronne savent depuis au moins l’arrêt McIvor de la Cour d’appel de la Colombie-Britannique en 2009 que les modifications apportées à la Loi sur les Indiens en 1985 ne réglaient pas entièrement les aspects discriminatoires du système d’inscription des Indiens.
    Sur ce point, la juge Masse a tranché dans Descheneaux:
Nous sommes en 2015. La Loi de 1985 dont découle la discrimination est en vigueur depuis un peu plus de 30 ans.
    La constatation générale de discrimination dans la décision prise en 2009 par la Cour d’appel de la Colombie-Britannique dans l’arrêt McIvor aurait pu permettre au Parlement de prendre des mesures correctives plus radicales que celles de la loi de 2010. La discrimination qu’ont subie les plaignants découle des mêmes sources.
    Le Canada savait qu’il restait du travail à faire après l’arrêt McIvor et le projet de loi C-3. Laisser l’article 8 dans le projet de loi S-3 permet au Canada de se mettre à l’abri des conséquences de son comportement et incite peu à l’éradication rapide de la discrimination dans le contexte de l’inscription au registre des Indiens.
    En continuant à refuser l’admissibilité au statut d’Indiens à certaines femmes et à leurs descendants, le gouvernement réalise des économies: il réduit les coûts en limitant le nombre de membres. La discrimination ne devrait pas se traduire par un avantage économique pour le gouvernement.
    Supprimer l’article 8 du projet de loi S-3 modifierait l’incitatif financier à l’avenir et enverrait un message clair du Parlement que le gouvernement n’autorisera pas la discrimination en absolvant les conséquences antérieures de ses actes, lorsque des décisions judiciaires antérieures ont clairement informé le gouvernement que son cadre législatif n’était pas constitutionnel.
    De manière pratique, il faudrait donner des ressources suffisantes aux bandes qui devront accueillir de nouveaux membres à cause du projet de loi S-3, et donner des ressources suffisantes aux services opérationnels pertinents d’Affaires autochtones afin que l’inscription des personnes qui ont été exclues de manière inconstitutionnelle depuis plus de trois décennies s’effectue le plus rapidement possible.
    L’objet du projet de loi S-3 devrait aussi être envoyé à un comité parlementaire dans un délai de 18 mois après l’entrée en vigueur de la loi. Nous croyons comprendre que le gouvernement a l’intention de proposer d’autres révisions au système d’inscription des Indiens dans le cadre de sa réponse en deux étapes à l’arrêt Descheneaux. C’est louable et conforme à la recommandation de la juge Masse de procéder à un vaste examen de cette question.
    D’ailleurs, dans l’avant-dernier paragraphe des motifs de son jugement, la juge Masse déclare:
Une lecture aussi stricte du présent jugement que celle qui a été faite de la décision de la CACB dans McIvor, n’est pas la voie que devrait emprunter le législateur. S’il souhaite jouer pleinement son rôle, plutôt que de laisser le champ libre aux litiges, il fera autrement cette fois-ci, tout en apportant rapidement des correctifs suffisamment larges pour remédier à la discrimination constatée en l’espèce. L’un n’exclut pas l’autre.
    Étant donné la discrimination de longue date dans le système d’inscription des Indiens, le processus en deux étapes profitera d’un examen parlementaire opportun bien avant les prochaines élections, afin que la compétence des parlementaires et les points de vue des membres de la communauté ne se perdent pas dans la frénésie législative caractéristique de la fin d’une session parlementaire.
(1535)
    En terminant, il importe de souligner que les arrêts McIvor et Descheneaux portent sur des aspects du système d’inscription des Indiens qui sont discriminatoires et contraires à l’article 15 de la Charte. À ce titre, ils établissent un seuil constitutionnel, le niveau d’équité au-dessous duquel le système d’inscription des Indiens ne doit pas tomber. Chose certaine, le processus législatif, actuel et dans l’étape à venir, devrait viser à corriger les iniquités qui ont été constatées depuis longtemps dans le système d’inscription des Indiens.
    Voilà nos commentaires.

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur Taylor.
    Nous entendrons maintenant le Fonds d’action et d’éducation juridiques pour les femmes.
    Vous avez sept minutes, mesdames Nerland et Stanton, à partager comme vous le voulez.
    Bon après-midi. Merci beaucoup d’avoir invité le FAEJ à s’adresser à vous aujourd’hui. Nous sommes reconnaissantes à la nation algonquine, qui nous permet de nous réunir sur son territoire.
    Je m’appelle Kim Stanton. Je suis la directrice juridique du FAEJ, le Fonds d’action et d’éducation juridiques pour les femmes. Je suis accompagnée de Krista Nerland, qui travaille chez Olthuis Kleer Townshend. Krista est l’avocate associée du Fonds dans la cause Gehl c. procureur général. Cette cause devrait être entendue à la Cour d’appel de l’Ontario d’ici quelques semaines. Elle porte sur la manière dont la Loi sur les Indiens traite de la paternité non reconnue ou non déclarée. Nous disons que la politique est une forme de discrimination à l’égard des femmes. Nous notons avec inquiétude que le ministère de la Justice continue de se battre contre Mme Gehl, une Autochtone handicapée, qui s’efforce d’obtenir le statut d’Indien. C’est un aspect qu’il faut vraiment corriger, et le projet de loi ne le fait pas.
    Le FAEJ est une organisation nationale sans but lucratif fondée en 1985 pour promouvoir l’égalité réelle des femmes et des filles par des poursuites judiciaires, la réforme du droit et l’éducation publique. Nous nous inquiétons depuis longtemps de la persistance de la discrimination fondée sur le sexe dans la Loi sur les Indiens et nous sommes très déçues de constater qu’il s’agit une fois de plus d’une autre tentative législative de lutter contre la discrimination qui ne fasse pas justice aux femmes autochtones.
    Krista vous présentera un résumé de nos préoccupations relatives au projet de loi.
(1540)
    Aujourd’hui, le FAEJ se concentre sur ce que le gouvernement appelle la première étape, soit essentiellement le projet de loi S-3 devant vous. Nous appuyons la vaste réflexion de nation à nation, afin de faire avancer le statut d’Indien vers la citoyenneté autochtone. En attendant, nous estimons qu’il n’est pas acceptable de laisser en place un régime d’inscription discriminatoire envers les femmes autochtones. Dans cet esprit, j’aimerais présenter cinq observations au sujet du projet de loi.
    Premièrement, si je ne m’abuse, l’Association des femmes autochtones du Canada a déjà expliqué au Comité que les femmes autochtones ont été exclues lors de l’élaboration de ce projet de loi, qui leur a été présenté comme un fait accompli. C’est une erreur. Il va sans dire que les groupes féminins autochtones devraient participer à l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes dans la Loi sur les Indiens.
    Deuxièmement, contrairement à son titre, cette loi n’élimine pas la discrimination fondée sur le sexe dans les dispositions de la Loi sur les Indiens relatives à l’inscription. Au mieux, c’est une réponse partielle. Ainsi, le projet de loi semble accorder un statut inférieur à certaines personnes nées avant 1951 dont le statut d’Indien découle de la ligne maternelle. De plus, les dispositions relatives au statut, ou plus particulièrement la manière dont AINC les applique, imposent un fardeau disproportionné aux femmes qui ne peuvent pas identifier le père de leurs enfants, pour cause de viol, d’inceste ou de violence conjugale, par exemple. Le projet de loi ne donne pas à ces femmes et à leurs enfants un accès égal aux dispositions de la Loi relatives au statut. Il s’agit de discrimination fondée sur le sexe, interdite par l’article 15 de la Charte et par le droit international.
    À notre avis, le projet de loi S-3 est une malheureuse copie de l’approche étroite et partielle que le Parlement avait adoptée il y a six ans, après la décision de la Cour d’appel de la Colombie-Britannique dans l’arrêt McIvor. Si le projet de loi est adopté tel quel, nous reviendrons tous ici dans un an, dans deux ans, ou dans cinq ans, lorsqu’une autre génération de femmes autochtones ou l’une de leurs descendantes aura passé des années devant les tribunaux pour tenter d’obtenir un statut égal en vertu de la loi. C’est inacceptable et incompatible avec la garantie fondamentale d’égalité prévue dans la Charte d’imposer à des femmes autochtones et à leurs descendants un fardeau financier et émotif pendant que des poursuites s’éternisent devant les tribunaux afin d’éliminer la discrimination déjà bien connue dans la Loi sur les Indiens.
    Nous exhortons le comité à s’assurer que la réponse législative du Parlement à l’arrêt Descheneaux élimine toute discrimination fondée sur le sexe dans les dispositions actuelles relatives au statut. Ce sera une assise solide pour la vaste discussion de nation à nation qui devra suivre afin d’aller au-delà de la Loi sur les Indiens.
    Troisièmement, la meilleure façon de procéder consiste à cesser d’ajouter différents niveaux de statut, qui maintiennent l’ancienne discrimination en vertu de la loi. Il y a de meilleures options. Il y a six ans, après l’arrêt McIvor, le gouvernement a proposé un projet de réforme tout aussi étroit et partiel, semblable à celui que vous avez actuellement devant vous. À l’époque, une modification proposée visait à donner effectivement à tous le statut d’Indien par une version modifiée de l’alinéa 6(1)a) au lieu de créer d’autres niveaux de statut inférieurs. Une disposition de ce genre contribuerait beaucoup plus à lutter contre la discrimination fondée sur le sexe dans la loi, même s’il convient de souligner qu’elle n’éliminerait pas la discrimination à l’égard des femmes qui ne peuvent pas ou ne veulent pas déclarer la paternité de leurs enfants. C’est un autre problème qu’il faut résoudre.
    Quatrièmement, le délai du 3 février 2017 imposé par la Cour supérieure du Québec ne devrait pas être invoqué pour justifier un projet de loi qui ne règle pas le problème. Si vous ne pouvez pas éliminer maintenant toute la discrimination fondée sur le sexe, alors vous devez demander un délai afin que le projet de loi porte sur l’ensemble de la discrimination que nous savons exister dans la Loi sur les Indiens.
    Enfin, nous exhortons le gouvernement à s’assurer que les communautés et organisations autochtones possèdent les terres et les ressources nécessaires pour s’occuper des nouveaux inscrits. Ce que cela suppose ne peut être déterminé unilatéralement à Ottawa, mais plutôt en partenariat avec les gouvernements et les organisations autochtones.
    En conclusion, je tiens à souligner ce qui est en jeu pour les personnes exclues à cause de ces dispositions discriminatoires. Ce ne sont pas seulement les avantages matériels, le financement postsecondaire, la santé, même s’ils peuvent être importants. Le refus du statut peut signifier également l’exclusion de la vie communautaire, un manque de dignité et d’estime de soi, la perte du statut de membre et l’incapacité de vivre dans une réserve. Le Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes a déclaré que ces dispositions de la Loi sur les Indiens comptent parmi les causes profondes de la violence contre les femmes autochtones au Canada. Les torts sont graves, et les femmes autochtones et leurs enfants les subissent depuis plus de 145 ans. Il est essentiel que le gouvernement fasse ce qui est nécessaire.
    Merci de nous permettre d’exprimer nos points de vue.
    Nous vous remercions.
    Avant de passer à Mme Palmater, qui témoigne à titre personnel, je fais remarquer que Mme Palmater nous a remis un document. Nous n’avons pas eu le temps de le faire traduire dans les deux langues officielles. Nous avons une version anglaise et une ébauche en français. Si les membres du Comité n’y voient pas d’objection, nous la distribuerons, mais je ne voulais pas le faire sans permission.
    Êtes-vous tous d’accord?
    Des voix: D’accord.
    Le président: Madame Palmater, vous avez la parole pendant sept minutes. Merci.
(1545)
    [La témoin s’exprime en micmac.] Pam Palmater. J’appartiens à la nation souveraine micmaque sur les territoires non cédés dans le Mi’kma’ki.
    Je vous remercie de me permettre de vous exprimer aujourd’hui quelques préoccupations concernant le projet de loi S-3. Premièrement, je trouve important de reconnaître que nous nous trouvons sur le territoire algonquin. Deuxièmement, nous sommes ici aujourd’hui grâce aux efforts de femmes autochtones qui mènent cette bataille depuis de nombreuses décennies, notamment Mary Two-Axe Early, Jeannette Corbiere Lavell, Yvonne Bédard, Sharon McIvor, Sandra Lovelace, et maintenant la deuxième génération qui se bat pour l’égalité des femmes autochtones, notamment Jeremy Matson, Lynn Gehl, Nathan McGillivary, et évidemment Stéphane Descheneaux.
    Mes principales préoccupations sont présentées dans le mémoire qui est distribué actuellement.
    La plus importante est que le projet de loi S-3 n’élimine pas toute forme de discrimination fondée sur le sexe, loin de là. D’autres témoins vous ont donné des exemples très précis. Mes exemples ne sont pas exhaustifs, mais ils comprennent les petits-enfants de femmes autochtones qui ont épousé un non-Indien avant 1951, les filles illégitimes d’Indiens nées avant 1951 et leurs descendants, et aussi la différenciation et la hiérarchie qui ont été créées entre l’alinéa 6(1)a), la catégorie des hommes, et l’alinéa 6(1)c), principalement la catégorie des femmes. Ils en sont venus à être appelés les « vrais Indiens » et les « aspirants Indiens » et les « c ». De fait, les personnes visées par la série d’alinéas (c) du paragraphe 6(1) ont les mêmes ancêtres; ce sont simplement des femmes autochtones et leurs descendants.
    Le projet de loi S-3 est aussi une source de discrimination fondée sur le sexe. On inclut désormais des distinctions encore plus complexes entre les catégories. Il y a les alinéas proposés 6(1)(c.01), (c.2), (c.3), et (c.4), qui ont un effet disproportionné sur la descendance de femmes autochtones qui ont épousé un non-Indien. Cela pose problème. Il n’y a aucune justification juridique ni dans la loi, ni dans la politique pour qu’Affaires autochtones identifie tout le monde de cette façon.
    Les programmes et services sont déterminés par des ententes de financement fondées sur l’appartenance ou l’inscription au registre des Indiens. Quand on obtient des services de santé, il n’est jamais nécessaire de préciser si l’on est visé par l’alinéa 6(1)a), b), c), d) e), f), ou par le paragraphe 6(2). Il n’y a aucune raison de le faire, alors quelle est la justification?
    On stigmatise des femmes et leurs descendants parce qu’elles ont commis le péché de se marier à un non-Indien, ou pire, parce qu’elles sont nées femmes. On ne stigmatise pas ainsi les hommes Indiens et leurs descendants lorsqu’ils ont marié une non-Indienne, comme ils l’ont fait pendant de nombreuses générations.
    L’autre problème est la hiérarchie du statut d’Indien entre les paragraphes 6(1) et 6(2), ceux qui peuvent transmettre le statut et ceux qui ne le peuvent pas. Ceux qui ne le peuvent pas sont pour ainsi dire défectueux et ils ne peuvent pas transmettre leur statut. Les effets sont disproportionnés sur les femmes autochtones, les enfants de femmes autochtones célibataires qui ne peuvent pas donner le nom du père ou qui ne veulent pas le faire pour les raisons indiquées par le FAEJ, et aussi lorsque les pères refusent de reconnaître la paternité ou refusent de signer les demandes d’inscription. AANC permet aux hommes Indiens d’avoir une telle influence sur les enfants de femmes autochtones. Enfin, on refuse d’indemniser des femmes qui ont subi la discrimination pendant si longtemps.
    Le projet de loi S-3 ne fournit pas une protection suffisante pour les membres. Vous vous rappellerez qu’avant 1985, statut d’Indien et appartenance étaient synonymes. Même après le projet de loi S-3, les deux termes ne seront synonymes que pour les hommes Indiens, pas pour les femmes Indiennes. Le projet de loi C-3 ne prévoyait pas ces protections, et le projet de loi S-3 ne le fait pas non plus.
    La protection constitutionnelle de l’égalité des sexes est pourtant claire. L’article 15 de la Charte porte sur l’égalité des hommes et des femmes. Pour tous ceux veulent faire reconnaître les droits issus de traités, le paragraphe 35(4) de la Constitution garantit l’égalité des hommes et des femmes. L’article 44 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, que le gouvernement dit vouloir mettre en œuvre, affirme également l’égalité des hommes et des femmes. Il n’y a pas d’option légale pour négocier, examiner, consulter, ou accepter autre chose que l’égalité des sexes.
(1550)
    Si vous prenez les lois traditionnelles des nations autochtones au Canada, je n'en ai pas encore trouvé une seule qui favorise l'inégalité entre les sexes.
    Le Canada ne peut pas passer à la deuxième étape sans régler la question de l'inégalité entre les sexes. Il s'agit d'une condition juridique préalable. Vous ne pouvez pas parler à nos Premières Nations sans nos femmes autochtones et leurs descendants. C'est inconstitutionnel. Cela viole toutes nos lois traditionnelles et constituerait un obstacle juridique pour même entamer la deuxième étape.
    Le projet de loi S-3 doit également être accompagné d'un financement pour les Premières Nations. Vous savez qu'AANC a mis de côté des millions de dollars pour pouvoir traiter les demandes reliées au projet de loi S-3, mais il n'a absolument rien mis de côté pour que les Premières Nations s'occupent de cette question au niveau communautaire.
    De toute évidence, le Canada a omis de son propre aveu d'entreprendre des consultations juridiques de quelque nature que ce soit.
    Comme nous en avons discuté, l'incidence de l'inscription des Indiens est très grave. Il ne s'agit pas uniquement de programmes et d'avantages; c'est une cause profonde de femmes autochtones assassinées et disparues. C'est un manque d'accès aux aînés, à la langue, aux cérémonies et même aux pow-wow. Il existe des pow-wow auxquels les enfants ne peuvent pas assister à moins de détenir un certificat de statut d'Indien, peu importe la façon dont ils ont été éduqués ou s'ils ont grandi au sein d'une communauté d'une Première Nation.
     Il ne réglera pas non plus une seule des affaires dont les tribunaux sont saisis. Le litige de Sharon McIvor est toujours en suspens. Les affaires Descheneaux sont toujours en cours. Il y a aussi les affaires concernant Lynn Gehl, Jeremy Matson et Nathan McGillivary, sans oublier que la Commission canadienne des droits de la personne a de nombreux dossiers ouverts. Bien entendu, il y a le recours collectif lié au projet de loi C-3 qui a été intenté pour motif de discrimination fondée sur le sexe.
    Très rapidement, mes recommandations concernent l'alinéa 6(1)(a) sur toute la ligne. Chaque homme et femme autochtone qui a eu des enfants avant 1985, marié ou pas, devrait avoir le même statut de sorte que les femmes autochtones et leurs descendants n'aient pas à porter la lettre écarlate de l'alinéa 6(1)(c). Il vous faut l'indemnisation méritée pour toutes les personnes à qui on a sciemment refusé l'égalité entre les sexes depuis 1982. Pour ce qui est d'avant 1982, le ministère de la Justice a dit qu'il s'agit d'un obstacle; il y a eu des consultations juridiques.
    Finalement, je vous dirais que si nous ne réglons pas la question de la discrimination fondée sur le sexe maintenant, il n'y en aura pas selon toute vraisemblance. Au cours de l'étape deux, ils veulent que nous traitions des droits ancestraux ou issus de traités, de nation à nation, que nous nous débarrassions de la Loi sur les Indiens, et la ministre a dit que sa norme à cet égard est le consensus absolu. De tous les temps, il n'y a jamais eu de consensus sur l'égalité entre les sexes, mais c'est la loi du pays.
    Merci.
    Merci, madame Palmater.
    Nous passons à l'intervenante suivante, Mary Eberts. Vous avez la parole.
    Je vous remercie beaucoup de m'avoir invitée. Je remercie également la Nation algonquine qui nous accueille sur son territoire.
    J'ai été avocate dans de nombreuses affaires où des femmes ou des femmes et leurs enfants ont demandé à contester le refus de statut en vertu de la Loi sur les Indiens. J'ai également fait des représentations devant la Chambre des communes et devant le Sénat au nom de l'Association des femmes autochtones du Canada et au nom de l'organisme Indian Rights for Indian Women sur des questions relatives à l'inscription et aux femmes.
    Aujourd'hui, je comparais à titre personnel. Je ne parle pas au nom d'un client.
    J'aimerais ajouter quelques hommages à ceux rendus par Mme Palmater. Dans l'affaire Descheneaux, il y avait aussi deux autres demanderesses: Susan Yantha et sa fille Tammy. Elles ont contesté l'incapacité d'une femme de transmettre son statut à un enfant né hors du mariage dans certaines situations. J'aimerais aussi rendre hommage ou compléter l'hommage rendu à Mary Two-Axe Earley en reconnaissant le travail de Jenny Margetts et de Nellie Carlson, qui ont aidé à fonder la filiale de l'Ouest de Indian Rights for Indian Women.
     Aujourd'hui, je veux faire valoir deux points. Le projet de loi S-3 est limitatif et le processus utilisé pour modifier les dispositions relatives à l'inscription au moyen du projet de loi S-3 ne respectent pas les recommandations de madame la juge Masse.
     Je commence par quelques observations sur les origines de la discrimination à l'endroit des femmes, que je vous demande de ne pas oublier de prendre en compte si vous entérinez une approche à courte vue de la réparation prévue par la présente loi, ce que contient le projet de loi S-3, ou une approche plus vaste, comme celle recommandée par Mme Palmater, Sharon McIvor et d'autres.
    Il est crucial de se rappeler que l'un des principaux objectifs de la Loi sur les Indiens consistait à hâter la « civilisation » — autrement dit l'assimilation — des peuples autochtones. L'un des principaux mécanismes pour parvenir à l'assimilation était la définition du mot « Indien » prévue dans la loi. Quiconque n'était pas visé par cette définition était, en raison de cette exclusion, assimilé, c'est-à-dire qu'il ne relevait plus du gouvernement du Canada.
    Pourquoi? Nous ne devrions jamais oublier. Même à l'époque où il y avait un traité au sujet des terres, la Première Nation se faisait attribuer ses terres et ces dernières étaient administrées en vertu des dispositions de la Loi sur les Indiens. Le lien entre les terres des Indiens et la Loi sur les Indiens a une conséquence clé. Si le nombre d'Indiens inscrits pouvait être ramené à zéro, alors les liens entre les peuples autochtones et leurs terres seraient rompus. Il a toujours existé un lien entre l'inadmissibilité des femmes à transmettre de plein droit leur statut et le droit de convoiter les terres indiennes.
    Historiquement, les femmes ont été les principales cibles de l'exclusion de la loi. Une raison qui explique cette situation était le privilège des hommes qui régnait en maître à l'époque victorienne, lorsque la loi a été pour la première fois conçue. Une autre était celle de la volonté de l'emporter sur les lois autochtones relatives à l'affiliation. Ces deux raisons ont agi ensemble. La Loi sur les Indiens mettait en application la famille victorienne avec son père de famille, supplantant les règles de nombreuses cultures autochtones qui préconisaient la femme comme source d'affiliation à la nation. Par exemple, la « loi » des Tsimshians prévoyait qu'une femme et ses enfants étaient toujours membres de la nation, qu'ils étaient toujours les bienvenus même après avoir quitté la nation en raison d'un mariage ou pour d'autres motifs.
    La seule exception à cette hégémonie masculine sur le statut était le droit de la femme indienne de transmettre son statut à un enfant à qui elle avait donné naissance hors des liens du mariage. Il ne s'agissait pas d'un droit absolu. Il était possible, en vertu de nombreuses versions de cette législation, de contester l'admissibilité de l'enfant au statut. Lorsque, dans l'affaire Martin c. Chapman, il a été statué qu'un Indien de sexe masculin pouvait aussi transmettre le statut à son enfant — à savoir son fils né hors des liens du mariage —, ce droit n'était pas assorti de la possibilité que quiconque pouvait protester parce que le père n'était pas un Indien.
(1555)
    Cela aussi est une indication du pouvoir disproportionné de l'homme en vertu du régime de la Loi sur les Indiens. Le simple fait de reconnaître que l'enfant était le sien, que ce soit vrai ou non, pouvait conférer le statut à l'enfant. Dans les règles « tacites » ou « non reconnues » sur la paternité en vertu de la présente loi, nous voyons une réaffirmation puissante de ce privilège masculin, où le fait de retenir cette reconnaissance, ou l'impossibilité de l'obtenir, porte préjudice à l'acquisition du statut intégral par l'enfant.
    Chaque fois qu'une réforme de la Loi sur les Indiens ne donne pas aux femmes tous leurs droits, soit au moment présent, soit par rapport à des règles passées, nous perpétuons le système qui a eu recours à l'exhérédation des femmes et de leurs enfants comme outil d'assimilation. Si nous poursuivons cette approche assimilationniste dans la construction et l'administration de la Loi sur les Indiens, nous continuons l'approche du colonisateur, si bien résumée dans la déclaration de Duncan Campbell Scott, alors surintendant adjoint des Affaires indiennes. En 1920, il a dit:
Notre objectif est de continuer jusqu'à ce qu'il n'y ait plus un seul Indien au Canada qui n'ait pas été absorbé par la société, jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de question indienne ni de département des Affaires indiennes. Voilà l'objet de ce bill.
     Permettez-moi de mentionner quelques aspects de sous-inclusion. Je vais commencer par dire que je suis d'accord avec Mme Palmater et Sharon McIvor au sujet de l'aspect pratique et de la sagesse de modifier l'alinéa 6(1)(a) à toutes fins utiles. Je suis également d'accord avec l'ABC dans sa recommandation au sujet de l'article 8. Je vous renverrais au mémoire du Grand Conseil de la Nation Waban-Aki pour d'autres cas où le projet de loi S-3 ne remplit pas son mandat.
    Si vous le permettez, j'ai un dernier point au sujet de la consultation. Je suis d'accord avec les témoins qui ont dit que la consultation ne convient pas dans un cas où vous réparez des violations des droits à l'égalité. Le projet de loi C-31 a été le produit d'une consultation et nous constatons maintenant, 30 ans plus tard, que les gens plaident encore l'inconstitutionnalité des résultats de cette consultation.
    Merci.
(1600)
    Merci beaucoup.
    Madame Gabriel, vous avez sept minutes.
    Merci.
    [La témoin s'exprime en mohawk.]
    Je vous salue dans ma langue et je reconnais toutes les forces naturelles de vie qui nous permettent d'être ici aujourd'hui, y compris notre mère la Terre.
    J'écoute les gens parler des subtilités juridiques, et je suis ici pour vous parler un peu de ce que c'est que de vivre dans une communauté où l'on se bat pour savoir qui est plus indien que l'autre. Nous, les Autochtones, réglementons la dysfonction du Canada, le refus du Canada de répudier les doctrines de supériorité qui lui ont permis de nous dire et de définir pour nous qui est un Indien en vertu de la Loi sur les Indiens. Vous venez vers nous et vous vous attendez à ce que nous vous donnions la réponse. Eh bien, la réponse c'est l'autodétermination; pas l'autonomie gouvernementale, mais l'autodétermination.
    Je suis d'accord avec tout ce qui a été dit aujourd'hui. Les femmes autochtones ont vécu une double discrimination, d'abord pour être des Autochtones, et ensuite pour être des femmes.
    Je constate que beaucoup des propos utilisés dans la propagande pour amener les gens à penser qu'ils obtiennent une quelconque admissibilité au statut démentent la dépossession dont nous faisons l'objet en tant qu'Autochtones. Nous y avons droit; c'est quelque chose que nos ancêtres nous ont donné. Nous y avons droit de la part du colonisateur.
    Nous allons rebâtir nos nations, et au même titre que les excuses liées aux pensionnats indiens ont reconnu ceux et celles qui ont survécu au génocide, le Canada doit reconnaître davantage et plus profondément les dommages et menaces à nos langues et notre culture et la criminalisation de nos formes traditionnelles de gouvernance. Nos formes traditionnelles de gouvernance doivent refaire surface, et nous devons faire partie de véritables partenariats en tant que nation, et non comme « consultants », parce que nous sommes toujours considérés des minorités. Nous ne sommes pas des minorités. Nous sommes des peuples qui ont le droit à l'autodétermination, et à ce titre, nous déterminerons qui seront nos citoyens.
    En ce qui concerne l'assimilation forcée, et Mary l'a dit, en vertu de l'article 8 de la Déclaration sur les droits des peuples autochtones, les personnes ont le droit de ne pas subir d'assimilation forcée ou de destruction de leur culture. Pourtant, c'est précisément ce qui se passe avec le Canada et ses lois. Comme l'a dit Mary, 1985 a été précisément l'année où nous avons commencé à bouger à cet égard, mais le Canada hésite en raison du coût. Dans nos communautés, nous sommes dépossédés encore davantage, parce que c'est toujours l'intérêt public et non l'intérêt des droits de la personne des Autochtones qui vient en premier.
    Nous sommes les premiers à vivre les changements climatiques. Nous sommes les premiers à avoir ce que le Canadien ordinaire considère... Comme l'a dit il y a de nombreuses années l'ancienne vérificatrice générale Sheila Fraser, il faudrait 28 années aux écoles communautaires pour rattraper le reste des écoles et le reste du Canada. Imaginez: les enfants et les écoles vont être mis de côté. C'est le genre de portrait que je veux que vous voyiez afin que vous puissiez voir ce sur quoi vous allez prendre des décisions.
    Nous avons besoin de l'émergence et de la capacité de nous relever du génocide dont nos ancêtres se sont relevés. Le Canada doit réparer le tort qu'il a fait aux nations autochtones. Pourquoi devons-nous toujours avoir une résidence dans les réserves, ces minuscules communautés dans lesquelles le gouvernement du Canada nous a permis de vivre grâce à sa grande générosité, et pourtant il peut s'approprier les terres chaque fois que le cœur lui en dit?
    Je trouve très difficile d'être ici aujourd'hui et de parler de l'égalité entre les sexes, parce que je crois en cette égalité. J'y crois de tout cœur, mais il doit y avoir une réconciliation et une restitution. Il faut une approche fondée sur les droits de la personne. La Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones est une bonne façon d'aborder la question. Universels, interdépendants, indivisibles — voilà ce que signifient les droits de la personne. Ils ne sont pas reliés à l'économie. Le Canada doit cesser de faire de nous son industrie pour produire des employés et créer des emplois, car une grande partie de notre budget est consacré à la bureaucratie qui se trouve au ministère des Affaires autochtones et du Nord.
    Les consultations sont totalement inadéquates. Il vous faut de véritables consultations si nous voulons examiner en profondeur cette question de l'égalité entre les sexes, et nous devons mettre de côté la question de ce qu'il en coûtera au Canada, parce que maintenant c'est à nous qu'il en coûte. Il nous en coûte des menaces à notre langue, des menaces à notre culture, des menaces à nos terres, l'environnement...
(1605)
     Je trouve très difficile d'entendre le premier ministre du Canada dire que les peuples autochtones sont la relation la plus importante qu'il a lorsque je vois ce qui se passe avec l'environnement, les pipelines, et lorsque je vois que ma communauté, qui a souffert l'occupation militaire et des forces paramilitaires il y a 26 ans, continue de se battre pour les mêmes questions territoriales d'alors. Notre enjeu est le plus ancien. Cela fait 300 ans qu'il dure.
    Nous devons cesser de regarder le coût et commencer à regarder les coutumes traditionnelles. Nous avons besoin d'avoir accès à notre fonds de fiducie qui a été créé pour nous. C'est de là que vient notre argent pour les services.
     Vous savez, lorsque le Canada décide d'accepter quelqu'un comme citoyen, ce citoyen doit se renseigner sur le pays, parler la langue, et comprendre la culture. Ce n'est pas ce qui se passe lorsqu'il est question du statut d'Indien. Le statut d'Indien est donné comme des cartes de bingo. Ce que nous voulons, si ces gens reviennent, c'est qu'ils apprennent aussi leur langue et qu'ils apprennent leur culture. Cela n'a rien à voir avec la SAQ et l'achat de bouteilles de vin sans payer de taxes. C'est beaucoup plus profond que cela. C'est être onkwehonwe, les véritables êtres humains dont mes ancêtres ont parlé. C'est au sujet d'aimer la terre, d'aimer l'environnement, et de penser sept générations à l'avance. C'est de cela dont il devrait être question.
    Je vous remercie de votre temps.
    Je ne veux manquer de respect envers qui que ce soit. J'espère que mes propos n'ont blessé personne.
    Niawen ko:wa.
    Merci beaucoup, madame Gabriel.
    Nous passons à la première série de questions des membres du Comité. Chaque question est de sept minutes et j'utiliserai les cartes de la même façon.
    Le premier intervenant est Gary Anandasangaree.
    Merci à tous nos invités de leurs évaluations très franches du projet de loi S-3.
    Madame Gabriel, nous ne sommes nullement blessés. Vous nous rappelez les raisons pour lesquelles nous sommes tous ici, en particulier nous les députés, afin de travailler à cette question importante.
    Je dois reconnaître que j'hésite. Comme nous avons très peu de temps, je vais poser une question très précise. Je veux également pouvoir laisser un peu de temps à mon collègue de Thunder Bay. Par contre, compte tenu du temps dont nous disposons, je tiens à poser cette question précise à chacun et chacune d'entre vous représentant les trois organismes, ainsi qu'aux deux personnes qui comparaissent à titre personnel.
    Dans sa forme actuelle, est-ce que nous adoptons le projet de loi S-3, avec l'engagement de la ministre et du ministère de passer à la consultation de la deuxième étape?
    Est-ce que nous le modifions? Si nous le modifions, quelles sont les particularités qui... Je sais que vous l'avez tous mentionné, mais peut-être que vous pourriez nous donner des points très précis.
    Est-ce que nous ne le modifions pas et passons tout simplement à la deuxième étape, sachant fort bien que cela contreviendra à la décision?
    Je sais que c'est probablement une position difficile dans laquelle je vous place, mais je pense que ce sera utile pour nous dans le cadre de nos délibérations.
    Pour commencer, dans la mesure où d'autres catégories distinctes ont été cernées et sont connues — le titre du projet de loi est de mettre fin à la discrimination connue sur les sexes —, l'approche serait de modifier le projet de loi maintenant et tout ce qu'il y a d'autre sur la table. Il y a eu diverses propositions quant à la meilleure façon de s'y prendre, et l'ABC ne prendra pas de position à cet égard.
    Il y a des ajouts aux divers critères ou, comme l'a proposé Mme Palmater, une modification visant à prévoir à l'alinéa 6(1)(a) le statut avant 1985. Dans la mesure où le Parlement sait maintenant qu'il y a un enjeu, il faut agir dès maintenant, comme l'a indiqué madame la juge Masse à la fin de ses motifs, de ne pas se limiter seulement aux faits de demandeurs additionnels.
(1610)
    Nous convenons qu'il devrait être modifié maintenant. Il ne devrait pas être adopté. On ne devrait pas le laisser passer à la deuxième étape. Il doit être corrigé maintenant. Dans la mesure où une modification peut englober ce que Mme Palmater a suggéré quant au libellé de l'alinéa 6(1)(a) pour tout le monde, nous sommes bien évidemment d'accord.
    Nous voulons que les hiérarchies soient éliminées de la Loi sur les Indiens. Ce projet de loi perpétue les hiérarchies. Elles doivent être supprimées.
    Nous pensons que le projet de loi ne devrait absolument pas être adopté tel quel. Il doit être modifié.
     Je suis d'accord, il doit être modifié. Par contre, je ferais la mise en garde suivante. Il devrait être modifié pour s'assurer que les hommes et les femmes, mariés ou non, et leurs descendants sont égaux avant 1985 en vertu de l'alinéa 6(1)(a) de sorte qu'il n'y ait aucune hiérarchie. Toutefois, cette tentative a été faite auparavant, par Mme McIvor relativement au projet de loi C-3, et cette modification a été jugée irrecevable pour des motifs de procédure.
    Si jamais pour une question technique ou de procédure il ne vous est pas permis de le faire, et si vous ne pouvez pas le modifier correctement, il faudrait alors demander une prolongation au tribunal, avec le consentement des demandeurs dans l'affaire Descheneaux, consentement qu'ils ont déjà accordé, afin que l'on dispose de plus de temps pour le faire comme il se doit et ne pas s'en remettre à la deuxième étape, parce que cette deuxième étape comporte la norme du consensus, et comme vous le savez, aucune société humaine ne s'entend sur l'égalité entre les sexes, et ce n'est pas une option pour nous.
    Je suis d'accord avec Mme Palmater sur pratiquement tout, et j'ajouterais ceci:
    Si la modification qui revient à dire que tous sont visés par l'alinéa 6(1)(a) est contestée, à mon avis, il est très défendable qu'un tel amendement soit valide en raison du titre de la loi, et par conséquent l'objet de la loi, est l'élimination des iniquités fondées sur le sexe à l'inscription. Il s'agit d'un objectif vaste. Je vous exhorterais à faire preuve d'audace compte tenu de ce vaste objectif.
    Merci.
    Je suis d'accord avec les intervenants précédents.
    Je pense que si vous devez apporter des modifications, il faut que ce soit avec le consentement éclairé préalable des peuples autochtones. La Commission canadienne des droits de la personne, et je crois la Cour suprême, a dit que les tribunaux canadiens sont libres de recourir aux instruments des droits de la personne internationaux lorsqu'ils interprètent des lois nationales, et vous devriez faire intervenir ces instruments de droits de la personne internationaux dans la discussion.
    Merci beaucoup.
    Monsieur le président, j'aimerais céder le reste de mon temps à mon collègue de Thunder Bay.
    Très bien.
    Don, il reste deux minutes.
    Madame Gabriel, ce que vous avez dit dans votre exposé de sept minutes m'a vraiment interpelé, parce que je pense que c'est ce que nous devons faire au sein de notre comité, ce que nous devons faire en tant que gouvernement. La Loi sur les Indiens est une loi qui a été conçue pour détruire nos peuples. La rafistoler ou faire certaines choses ne permet aucunement à nos peuples d'avancer. Nous ne faisons que perpétuer tous les problèmes qui ont existé dans nos communautés pendant beaucoup trop longtemps.
     Cela étant dit, j'ai travaillé dans de nombreuses communautés isolées des Premières Nations avec des gens qui ont été absolument détruits par la Loi sur les Indiens, qui sont absolument dépendants. J'ai posé la question suivante aux représentants du ministère — et je suis certain que le Comité obtiendra la réponse: qui sont les 40 000 personnes dont la ministre a dit aujourd'hui qu'elles seront touchées par le projet de loi S-3, et qui sont les personnes qui pourraient éventuellement être touchées par certaines modifications?
    Ensuite, je me pose la question en me disant que le ministère des Affaires autochtones et du Nord dispose de ressources limitées; donc, est-ce que ces personnes qui sont actuellement visées par la Loi sur les Indiens et qui en dépendent absolument seront touchées par un problème de ressources si plus de personnes sont admissibles au statut en vertu de la Loi sur les Indiens?
    Malheureusement, il ne reste que 20 secondes. Don, je ne sais pas à qui vous vouliez poser la question.
    J'aimerais répondre.
    Désolée, vous vouliez aussi le faire.
    Incontestablement, le financement sera un enjeu. Je pense que le ministère des Affaires autochtones et du Nord ne devrait pas prendre autant d'argent pour l'administration, parce que nous avons besoin du financement. Nous devons rebâtir nos nations. S'il doit y avoir une véritable réconciliation, il faut une restitution. Une restitution coûte de l'argent, malheureusement. Rebâtir après un génocide coûte de l'argent.
(1615)
    Je suis désolé, nous n'avons plus de temps. Je suis convaincu qu'il y aura une occasion d'obtenir d'autres éléments de réponse avec les prochaines questions.
    Cathy McLeod, vous avez la parole.
    Le 21 novembre, nous avons accueilli les représentants du ministère. Je leur ai demandé s'ils étaient convaincus que nous avions réglé cette question du titre et des iniquités fondées sur le sexe. Ils ont dit qu'ils étaient absolument convaincus que ces « modifications nous permettent de régler toutes les iniquités connues fondées sur le sexe dans l'inscription des Indiens ». Il est devenu très clair très rapidement que ce n'est pas le cas. Je pense qu'il y a quelques points.
    Je suis d'accord. Lorsque des questions liées aux droits de la personne sont en jeu, vous devez tenir une consultation. Nous parlons de consultation, mais je pense qu'en ce qui concerne les experts, ce que nous avons appris de chaque témoin qui a recensé des problèmes différents... Je vois à certains égards un processus différent que le gouvernement doit entreprendre pour s'assurer que des experts comme vous examinent ce qui est présenté, les modifications qui sont apportées.
    Cela étant dit, ce que j'ai recommandé et proposé — même si mes collègues du Parti libéral ne veulent pas l'appuyer —, c'est que la deuxième étape devrait être réservée aux questions liées à la vue d'ensemble, que nous devons présenter un texte législatif approprié. Je n'en suis pas convaincu. Nous pourrions présenter quelques amendements et peut-être l'adopter à toute vitesse, mais je pense que nous allons devoir revenir traiter des mêmes enjeux. Je ne dis pas que nous devrions prendre beaucoup de temps, mais je pense qu'ils devraient demander une prolongation, dialoguer avec les personnes qui peuvent véritablement s'assurer qu'ils ont cerné tous les autres enjeux, puis aller de l'avant. Sinon, nous en avons encore pour cinq ou six ans.
    J'aimerais savoir ce qu'en pense chacun de nos témoins. Croyez-vous que c'est probablement la meilleure approche pour s'assurer que le texte législatif convient?
    Je suis d'accord avec votre suggestion.
    Je suis une avocate plaidante depuis 40 ans et je continue, et je me présente souvent en cour contre le gouvernement du Canada dans des affaires où la construction des garanties d'égalité dans la Charte est un enjeu. Je peux vous dire qu'historiquement, le gouvernement du Canada, depuis que les garanties ont été enchâssées dans la Charte en 1982, a adopté une approche très, très prudente de ce qu'elles signifient et de ce qu'elles garantissent.
    Il est très utile d'avoir un processus qui laisse entrer la lumière et qui ouvre les choses, et qui n'attend pas que l'on se retrouve devant les tribunaux. Le gouvernement doit adopter une approche plus généralisée des garanties de la Charte. Je suis d'accord qu'il faudrait prendre le temps de le faire. Ce n'est pas un aspect qui devrait être réglé dans le cadre d'une consultation sur la vue d'ensemble. C'est une question de fond. Elle est technique, et il faut la régler avec des modifications techniques éclairées par les garanties fondamentales de la Charte.
    Je suis d'accord. C'est la troisième fois qu'on essaie de régler la question de l'égalité entre les sexes.
    Justice Canada et la ministre ont dit dans leurs témoignages devant le Sénat, dans l'autre endroit, qu'en réalité ils savent qu'il ne règle pas toute la question de discrimination fondée sur le sexe. Ils ont dit autre chose dans leurs témoignages, mais depuis ils ont dit qu'ils savent qu'ils ont affaire à une discrimination simple plutôt que complexe fondée sur le sexe, complexe voulant dire que nous sommes face à des couches multiples de discrimination à notre endroit, nous les femmes autochtones, et qu'on ne devrait pas s'occuper de cette question.
    Ils devraient de toute évidence obtenir une prolongation du tribunal, ce qu'ils ont obtenu dans l'affaire McIvor deux fois, sans problème. Le tribunal semblait tout à fait disposé à ce que le Canada élargisse son approche et règle la question de la discrimination fondée sur le sexe. D'ailleurs, s'il y avait eu des consultations le 15 août, lorsque cette décision a été rendue au sujet des Premières Nations et des femmes autochtones, nous aurions pu leur parler de ces problèmes. Cependant, ils ne nous ont rien dit et ils n'ont pas consulté. Voilà pourquoi nous sommes ici et que nous utilisons l'élection comme excuse.
    Leurs processus ne nous détournent pas de nos droits à l'égalité. Aucun des bureaucrates... et les fonctionnaires qui témoignaient ici sont les mêmes que ceux qui travaillent à cette question depuis des décennies. Ils n'étaient pas concernés par une élection. Seulement la ministre.
    Ils n'ont aucune excuse de ne pas le faire comme il se doit. Nous savons maintenant qu'il y a un problème. Ils ont admis qu'il y a un problème. Réglons-le. Pour ce qui est de la deuxième étape, oui, nous devrions discuter pour savoir s'ils devraient s'occuper du statut, puis ne plus s'occuper de nos affaires et nous laisser assumer notre autodétermination, conformément à leur promesse dans le cadre de la DNUDPA.
    Pour chaque jour que la Loi sur les Indiens est toujours en vigueur, il ne peut pas y avoir juridiquement et constitutionnellement de discrimination fondée sur le sexe. Ils devraient demander une prolongation et faire les choses comme il faut.
(1620)
    Oui, nous sommes d'accord, il est logique d'avoir une prolongation.
    Comme on l'a déjà dit, deux prolongations ont été accordées dans l'affaire McIvor. Dans l'affaire Descheneaux, la juge a précisément ordonné qu'il y ait une solution plus générale de la part du gouvernement, que ce dernier ne devrait pas se contenter d'une autre solution fragmentée comme il l'a fait en 2010 après l'affaire McIvor, et qu'il doit le faire comme il faut.
    Nous croyons comprendre que les demandeurs dans l'affaire Descheneaux sont d'accord. Il y a quelques personnes au Québec qui seraient touchées par le retard — pas au Canada, seulement au Québec — et le gouvernement lui-même a témoigné lors de sa comparution devant le Comité des Nations unies pour l'élimination de la discrimination à l'endroit des femmes à cet effet. Il s'agit d'un petit groupe de personnes qui devraient attendre un peu plus longtemps, mais ce serait pour le plus grand avantage de femmes d'un bout à l'autre du pays qui sont continuellement l'objet de discrimination. Il est absolument ridicule que nous ayons consacré 50 années là-dessus.
    Nous sommes entièrement d'accord qu'un petit retard pour régler effectivement le problème est justifié.
    La Section du droit des Autochtones de l'ABC n'a pas adopté une position officielle en ce qui concerne la question d'une prolongation. Par contre, je peux dire qu'il y a des avantages et des inconvénients à une prolongation.
    Récemment, dans l'affaire Carter, la Cour suprême a abordé la nature exceptionnelle de prolonger une déclaration d'invalidité suspendue. Nous savons que cela a été fait deux fois dans l'affaire McIvor. D'ailleurs, la Cour d'appel a critiqué cette décision dans cette affaire.
    Dans la mesure où les délais du tribunal retiennent l'attention du gouvernement, la préoccupation devient alors que s'il s'agit d'une prolongation additionnelle de six mois et que les discussions de fond ne commencent que le cinquième mois, quelle a été la progression réelle des discussions, par opposition à adopter un projet de loi et à s'engager à en adopter un autre avant une certaine date? Voilà la motivation à l'origine de la recommandation selon laquelle la question doit revenir devant le Parlement, soit un comité de la Chambre, soit un comité du Sénat, dans un délai de 18 mois.
    Nous avons atteint la marque des sept minutes. Merci beaucoup. Les réponses ont été très bien synchronisées.
    Romeo Saganash est l'intervenant suivant.
    J'ai ressenti un certain malaise par rapport à cette question. Étant un Autochtone, je le ressens très bien et j'ai fait part de cette préoccupation aux membres de notre comité, parce que ce processus ne repose sur aucun principe et n'est pas fondé sur les droits de la personne ou la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Essentiellement, on nous demande d'essayer d'améliorer une mesure législative discriminatoire et fondamentalement raciste. Cette mesure législative ne ferait que perpétuer le racisme et la discrimination si je comprends bien ce que vous nous dites.
    Mon autre difficulté en tant que député est que dans mon mandat, j'ai aussi une obligation de maintenir la primauté du droit, et cette obligation signifie respecter la Constitution, qui comprend la Charte, soit dit en passant. Par conséquent, pour cette raison, je trouverais très difficile de me lever et d'appuyer ce projet de loi. Il demeure discriminatoire et toujours — j'utiliserai l'un des mots utilisés ici — « limitatif ». Il est discriminatoire. Le problème est énorme, et je comprends les enjeux constitutionnels et juridiques qui ont été soulevés dans le cadre des exposés.
     Un des autres aspects dont j'aimerais vous entendre parler est relié au fait que le projet de loi vient du Sénat, un organisme non élu qui n'a aucune relation historique avec les peuples autochtones du Canada. Cette relation relève de la Proclamation royale et des traités avec la Couronne, représentés par le premier ministre, qui a promis, soit dit en passant, une nouvelle relation, et qui a promis, toujours soit dit en passant, la mise en œuvre de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. À mon avis, toute nouvelle initiative législative devrait reposer sur ces principes, et ce n'est pas le cas. À tout le moins, le projet de loi aurait dû être présenté par la ministre des Affaires autochtones et du Nord, et ce n'est pas ce qui a été fait.
    J'aimerais savoir... Je suis essentiellement d'accord avec la plupart des propos tenus ici, et je suis en faveur d'une prolongation afin que nous puissions faire les choses comme il se doit, parce que c'est la base du respect, à mon avis. De plus, au sujet de la promesse ou de l'engagement pris par la ministre relativement à la deuxième étape, il se trouve qu'après une année du gouvernement actuel, je n'ai pas vraiment confiance à ces engagements. Je n'ai pas confiance dans les promesses qui sont faites par le gouvernement. J'aimerais vous entendre parler de ce processus étrange que nous suivons concernant ce projet de loi émanant du Sénat.
    Je pose la question à tous.
(1625)
    Merci beaucoup, monsieur Saganash.
    L'une des choses que je trouve vraiment difficile, c'est de faire intervenir l'aspect humain dans tout cela, parce que je connais des femmes qui n'ont jamais été en mesure de revenir dans leurs communautés. Cela a perturbé l'unité familiale. La Loi sur les Indiens n'est pas simplement une loi au Canada, c'est une loi raciste. C'est une loi coloniale. Elle a trait à l'histoire impériale du Canada avec la Grande-Bretagne. Il n'y a aucune réconciliation dans cette loi. Je suis d'accord qu'il faut faire les choses comme il se doit. Il doit y avoir une transférabilité de nos droits. Ce n'est pas seulement au sujet de ceux qui vivent dans la communauté, c'est au sujet de la transférabilité de nos droits.
    Les gens ont parlé d'inclusivité. Avoir le droit de voter lors d'une élection d'un conseil de bande ne veut pas dire que vous faites partie du processus décisionnel. C'est beaucoup plus profond que cela. La question de statut est vraiment de savoir comment vous êtes censés maintenir l'honneur de la Couronne. Vous êtes censés respecter la primauté du droit. Le Canada a signé de nombreux engagements internationaux selon lesquels les droits de la personne sont universels.
    Agissez comme il se doit et apportez les modifications qui mettront un terme à cette question de façon à ce que nous puissions passer aux autres enjeux de dépossession des terres ou de menaces à notre langue et notre culture et à tout ce qui compose notre identité autochtone, afin que nous puissions protéger les terres pour les générations futures.
    Merci.
    Je suis d'accord avec vous au sujet de la Loi sur les Indiens. Étant une constituante, une identité que je reconnais, j'ai honte de voir que nous en sommes encore là, que cette question accapare le temps du Parlement, et qu'elle accapare le temps du Parlement pour laisser tomber un petit quelque chose ici et un petit quelque chose là, au lieu de reconstruire avec les Premières Nations notre relation fondée sur des principes. Il est plus que temps que cela se fasse.
    Au cœur de cette honte et de ce grand désarroi de l'utilisation que nous faisons de nos institutions, je me souviens de ce que l'organisme Indian Rights for Indian Women a dit, à savoir que l'on veut que ce problème soit réglé pour que les femmes et les enfants reviennent dans les communautés des bandes indiennes, dans la Loi sur les Indiens, parce que ce n'est qu'à ce moment-là qu'ils peuvent être à la table pour les consultations qui détermineront leur avenir. S'ils ne sont pas à la table parce qu'ils ne sont pas des Indiens inscrits, ils ne peuvent pas discuter des revendications territoriales ou de quoi que ce soit d'autre.
    En ce qui concerne le Sénat, je pense que vous avez mis le doigt sur quelque chose de très dangereux, et c'est que quelqu'un contestera le projet de loi pour ce motif après tout ce que vous aurez fait pour l'adopter, et ensuite il sera écarté parce que son point d'origine est le Sénat.
    Je suis d'accord avec Ellen et Mary. Je vous relance tout simplement et je dis que la ministre de la Justice du Canada a donné l'assurance que ce texte législatif est conforme à la Charte, et vous avez entendu dire à maintes reprises, tout comme le Sénat, que ce n'est évidemment pas le cas. Cela devrait tous nous préoccuper, nous qui sommes ici à faire cela.
    L'autre point que je mentionnerai très rapidement, c'est que le Canada admet au Canada, par naissance ou par immigration, 650 000 nouveaux Canadiens chaque année, et on ne pose pas une seule question à savoir si les Canadiens devraient avoir d'autres bébés ou si nous devrions fixer le seuil seulement pour les bébés des femmes canadiennes.
    Merci.
    C'est tout le temps que nous avons pour cette question. La dernière question revient à Joël Lightbound.
    Je m'excuse, monsieur le président, je constate qu'il est 16 h 30 et que la ministre est arrivée. Sur le plan de la procédure, est-ce que cela nous permet de poursuivre?
    Avec l'assentiment du comité, j'allais permettre la dernière question de cette série et emprunter un peu de temps de la ministre pour la deuxième heure. Sommes-nous d'accord?
    Non.
    J'ai besoin du consentement unanime pour cela.
    Nous avons entendu notre dernière question. Je tiens à remercier chacun et chacune d'entre vous de vos témoignages aujourd'hui. Merci beaucoup de vos témoignages réfléchis et puissants. Ils nous sont effectivement très utiles. Nous interrompons nos travaux pour permettre aux nouveaux témoins de prendre place.
    Merci.

(1630)
    Nous reprenons la séance avec notre deuxième groupe de témoins qui est composé de l'honorable Carolyn Bennett, ministre des Affaires autochtones et du Nord ainsi que de hauts fonctionnaires d'AANC. Bienvenue à vous.
    Nous connaissons tous le fonctionnement, maintenant. Je vais vous céder la parole, madame la ministre, pour 10 minutes.
    Merci beaucoup. Il me fait plaisir d'être ici de nouveau cet après-midi pour discuter du projet de loi S-3, et je tiens à souligner que nous nous réunissons sur le territoire traditionnel du peuple algonquin. Je suis aussi heureuse d'avoir la chance de vous rencontrer pour présenter l'approche proposée par le gouvernement en lien avec la décision Descheneaux.
    Je suis accompagnée de représentants d'Affaires autochtones et du Nord: Joëlle Montminy qui, comme vous le savez, est sous-ministre adjointe, Résolution et affaires individuelles, et Nathalie Nepton, directrice exécutive, Registraire des Indiens et gestion intégrée des programmes. Nous essayons de la mettre au chômage, puisque nous voulons confier cette tâche aux Premières Nations. Je suis aussi accompagnée de Candice St-Aubin, directrice exécutive, Résolution et des affaires individuelles et de Me Martin Reihr, avocat général au ministère de la Justice.
    J'aimerais d'abord rendre hommage aux nombreuses femmes courageuses des Premières Nations, dont le travail acharné a fait la lumière sur ces enjeux, des femmes comme Mary Two-Axe Earley, Jeanette Corbiere Lavell, Yvonne Bédard, la sénatrice Lovelace Nicholas et Sharon Donna McIvor. J'aimerais aussi saluer le travail de Stéphane Descheneaux, de Susan Yantha et de Tammy Yantha, dont la lutte courageuse permettra d'éliminer le traitement discriminatoire de dizaines de milliers de personnes.
(1635)

[Français]

    Je tiens à remercier le Comité de l'immense travail réalisé, dans des circonstances difficiles, au profit de ce projet de loi.

[Traduction]

    Je tiens à remercier le comité sénatorial pour l'immense travail réalisé lors des études pour ce projet de loi. Les audiences du comité sénatorial sur les peuples autochtones ont permis de recenser un groupe de personnes qui devrait être inclus dans ce projet de loi, et je pense qu'il le sera grâce à un amendement présenté au Sénat.
    L'échéance du 3 février imposée par le tribunal nous a forcés à faire des choix difficiles au sujet de la portée du projet de loi et à trouver un équilibre entre le temps nécessaire pour mobiliser les Autochtones et celui nécessaire aux parlementaires pour s'acquitter de leurs responsabilités.
     Le premier ministre et ce gouvernement se sont engagés à renouveler la relation entre la Couronne et les Autochtones. Lorsque possible, ils travailleront donc en partenariat pour résoudre les problèmes hors cour. C'est pourquoi le gouvernement a décidé de retirer l'appel de la décision Descheneaux dont nous avons hérité à notre arrivée au pouvoir. Le gouvernement a aussi décidé d'agir immédiatement pour remédier aux inégalités soulevées dans ladite décision et aux diverses discriminations fondées sur le sexe et relatives à l'inscription en vertu de la Loi sur les Indiens.
    Il est évident que la complexité des enjeux qui doivent être résolus, combinée à l'échéance du tribunal relativement à la législation, a grandement limité la capacité du gouvernement à mobiliser les Premières Nations. Des erreurs ont été commises, y compris l'échec de mon ministère à joindre directement les demandeurs. J'ai pris les mesures qui s'imposaient pour que cela ne se reproduise plus. J'ai depuis parlé à chacun des demandeurs et leur ai promis que leur participation à la conception du processus de la phase deux serait significative.
    Malgré cela, j'estime toujours que l'adoption des changements contenus dans le projet de loi S-3 et que l'adoption d'un processus collaboratif plus large pour traiter d'autres enjeux d'une grande complexité constitue le moyen de procéder le plus juste et le plus responsable.

[Français]

    Nous devons mettre fin, avant l'échéance imposée par le tribunal, à ces inégalités fondées sur le sexe.

[Traduction]

    Ce n'est pas important que pour les demandeurs, mais aussi pour les 35 000 autres personnes à qui l'on refuse actuellement des droits. Des témoins ont affirmé que ce projet de loi devrait être modifié simplement pour traiter d'autres formes éventuelles de discrimination. Le traitement d'autres questions liées à de possibles inégalités touchant l'inscription aurait de grandes répercussions sur les communautés autochtones. Nous savons tous que la prise répétée de décisions unilatérales concernant les peuples autochtones de la part du gouvernement fédéral a souvent des conséquences imprévues désastreuses.
    Le règlement des questions soulevées ici nécessitera des consultations poussées auprès des communautés pour traiter de conséquences beaucoup plus complexes que l'accès aux ressources, ainsi que de questions fondamentales comme l'intégrité culturelle des communautés.

[Français]

    Le premier ministre et le gouvernement ont clairement affirmé que, pour atteindre leur objectif commun, le Canada et les peuples autochtones devaient travailler en partenariat pour aboutir à un consensus et développer des solutions conjointes.
    

[Traduction]

    C'est la raison première pour laquelle nous avons suggéré une approche à deux phases en réponse à Descheneaux. Des témoins ont également proposé une solution au temps limité pour les consultations: demander une prolongation du délai accordé. Je comprends que l'on veuille régler tous ces problèmes à la fois, mais ce n'est pas possible étant donné le délai fourni par le tribunal, même avec une prorogation.
    La durée d'une telle prorogation serait extrêmement limitée. Elle serait vraisemblablement de trois à six mois. En considérant les processus législatifs requis dans le cadre de ladite prorogation, elle ne procurerait que très peu de temps supplémentaire pour les consultations. En effet, probablement qu'à la fin de ce processus, nous présenterons au Parlement un projet de loi semblable à celui-ci.
    Je comprends le cynisme des peuples autochtones et des parlementaires envers l'engagement du gouvernement à enclencher la phase deux, et, même si nous le faisions, dans quelle mesure elle entraînerait une réforme significative.
(1640)

[Français]

    Les gouvernements de toutes les allégeances ont brisé de telles promesses pendant des décennies.

[Traduction]

    Je vous promets que la phase deux sera lancée en février 2017. Ce processus sera non seulement conçu conjointement avec les Premières Nations, mais il tiendra également compte des opinions des experts et de ceux dont les droits ont été brimés par le système colonial et archaïque. Je vous assure que nous inclurons de personnes véritablement inspirantes, comme Sharon McIvor, Jeanette Corbiere Lavell et la sénatrice Lovelace Nicholas.
    La phase deux doit faire intervenir un groupe diversifié de personnes afin de garantir que nos futures actions soient à l'unisson avec l'opinion de tous les gens touchés. Il n'y aura pas toujours consensus et le gouvernement aura peut-être à prendre des décisions politiques difficiles afin de protéger des droits, mais ces décisions ne seront pas prises unilatéralement, sans l'opinion de toutes les parties concernées.
    Cela dit, je vous exhorte à appuyer le projet de loi actuel et d'offrir une justice immédiate aux 35 000 personnes touchées. Je souhaiterais également attirer votre attention sur des témoins tels que le Congrès des peuples autochtones, l'Association des femmes autochtones et Jeanette Corbiere Lavell, qui ont affirmé que le projet de loi S-3 devrait être adopté.
    Je m'engage à aller de l'avant, immédiatement après cette étape essentielle, et de façon collaborative et adéquate dans le but d'obtenir une réforme plus approfondie, par la réforme des politiques qui s'impose. En vos propres mots, notre objectif ultime est de couper le poste de registraire.
    Merci beaucoup. Meegwetch.
    Merci, madame la ministre.
    Nous passons maintenant aux questions. La première série sera de sept minutes chacun.
    La première question sera posée par Mike Bossio, s'il vous plaît.
    Madame la ministre, comme toujours, nous vous remercions de vous mettre à la disposition de ce comité. Nous l'apprécions énormément.
    Nous avons entendu plusieurs témoins. Une de leurs principales recommandations est de rendre tous les peuples autochtones « complètement conformes à l'alinéa 6(1)(a) », pour reprendre leurs propres mots. Nous devons éliminer toute discrimination relative au sexe et au statut entre, d'une part, les femmes indiennes et leur descendance et, d'autre part, les hommes indiens et leurs descendants nés avant le 17 avril 1985.
    Pouvez-vous nous dire pourquoi il nous est impossible de procéder immédiatement à cette étape?
    Avec ce projet de loi, nous avons essayé de... Nous avons des obligations légales. La cour a affirmé que la situation est contraire à la Charte. Nous avons décidé de régler cela. Nous avons aussi décidé que nous inclurions dans ce projet de loi les dossiers très simples qui sont clairement liés au sexe de la personne, et de cette façon nous allons régler le cas des 35 000 personnes touchées. Les autres dossiers sont compliqués à cause de la date de naissance quand ce n'est pas par l'absence de registres des naissances avant 1951; dans d'autres cas, aucune décision n'a été rendue par la cour pour... Nous voulons consulter les gens et comprendre comment s'y prendre. Comment les gens régleraient-ils ces cas où aucun registre n'était tenu?
    Faire valoir ses droits ne veut pas dire qu'on les obtient forcément, parce que ceux-ci doivent être déterminés par les gens. Nous ferons ce que nous jugeons de bien, mais nous devons en parler avec les gens qui seront touchés par ces changements ce qui, selon moi, ne peut être fait par un comité parlementaire. Nous croyons que le Canada a la responsabilité d'écouter ses citoyens quant à la façon dont ils croient que leurs droits devraient être exercés. C'est pourquoi, depuis le tout début, nous avons adopté une approche en deux temps. Nous ferions des pas simples, que la Cour nous a ordonné de faire, et par la suite nous traiterions des cas complexes en temps opportun.
    Je serais ravie de revenir devant le Comité, si vous le voulez, pour vous faire une mise à jour su le travail effectué en préparation de la phase deux, tandis que nous nous apprêtons à mettre fin à toute discrimination dans la Loi sur les Indiens.
(1645)
    La première phase traite immédiatement du cas des 35 000 Autochtones, ou du moins elle en traitera dès que nous aurons pu les inscrire dans le registre. Comment veillerez-vous à ce que la phase deux soit exécutée en temps opportun?
    Nous nous y engageons. Je crois que, lors de nos premières discussions avec les intervenants, nous devrons demander quel serait le délai raisonnable pour régler ces problèmes. Nous savons qu'une consultation n'est pas un consensus. Nous n'amènerons pas tout le monde à être d'accord, mais nous devons consulter pour parvenir à prendre la bonne décision. Nous aurons entendu toutes les opinions et nous serons capables d'adopter la meilleure loi possible pour enrayer toute forme de discrimination qui brime les droits des Premières Nations partout au pays.
    Il y a des cas simples, comme l'émancipation — soit, quant à l'obtention d'un diplôme d'études postsecondaires, la personne perd son statut —, mais il y en a d'autres qui sont complexes et qui demanderont une étude approfondie.
    Je sais que vous êtes venue ici maintes fois, mais seriez-vous disposée à revenir dans six mois, dans 12 mois et dans 18 mois pour que nous puissions vous tenir, vous et le ministère, responsables des progrès réalisés en vue de régler ces problèmes dans des délais raisonnables?
    Certainement.
    Devant le Sénat, la semaine dernière, je me suis engagée à revenir au début de l'année prochaine. Nous commencerons par un plan de travail fondé sur ce que nous aurons appris et ce que nous croyons être un délai raisonnable, afin que vous puissiez participer à l'élaboration de la phase deux et au choix de l'échéancier.
    Penchons-nous sur la phase deux. Comment la voyez-vous évoluer? Vous nous l'avez expliquée dans ses grandes lignes, mais vu la complexité du dossier et compte tenu de l'échéancier, quel est concrètement votre plan?
    Les plaignants ont démontré un fort intérêt à être consultés. Ils savent que, grâce à leur combat, 35 000 personnes ont été reconnues. Ils veulent s'assurer que personne ne soit laissé de côté et ils veulent que l'affaire soit réglée dans un délai raisonnable. Ils ne veulent pas que le dossier traîne pendant des années. Je crois que nous réussirons à élaborer un plan de travail en vertu duquel les gens affectés auront droit de parole lors de l'élaboration de la deuxième phase.
    J'ai vu, par exemple, la liste des procédures de consultations préalables que vous avez tenues auprès de l'Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador, du Conseil des Autochtones de la Nouvelle-Écosse, de l'Association des femmes autochtones du Canada, de la nation anishinabek, du Congrès des peuples autochtones, de la Confédération des Premières Nations du Traité numéro 6, du Traité numéro 7 et du Traité numéro 8. Certains sont représentés ici.
    Nous voulons nous assurer que vous ne vous attarderez pas seulement aux grands organismes, où vous atteindrez beaucoup de gens à la fois, mais que vous vous intéresserez aussi aux plus petits. Nous avons rencontré beaucoup de petits organismes et d'individus qui ont besoin de représentation et de faire partie de ces procédures de consultation.
    Nous avons déjà entendu tellement de choses, soit que les organismes nationaux comptent des membres importants et qu'ils ont des politiques. On nous a clairement dit qu'on s'attend à ce que nous parlions directement avec les personnes touchées, avec les communautés et les organismes communautaires les plus directement concernés. Même dans la communauté de M. Descheneaux, beaucoup seront oubliés quand le projet de loi S-3 entrera en vigueur.
    Il faudra bien écouter les gens pour qu'ils n'aient pas à aller devant les tribunaux pour revendiquer leurs droits. Nous voulons prendre de bonnes décisions sur le plan des politiques pour enrayer les discriminations et les inégalités qui figurent toujours dans la Loi sur les Indiens.
(1650)
    Nous devrons arrêter ici, Mike.
    Merci beaucoup.
    La prochaine question nous vient de Cathy McLeod, s'il vous plaît.
    Madame la ministre, je vais commencer par signaler que la semaine dernière, vous avez affirmé ceci au Comité sénatorial permanent des peuples autochtones. Vous avez dit trouver non seulement inacceptable, mais aussi embarrassant en tant que ministre que votre ministère ne se soit pas engagé directement auprès des demandeurs. Bien sûr, comme nous le savons tous, et avec tout le respect que je vous dois, le ministre est responsable de son ministère et de ce qui s'y produit.
    Honnêtement, je crois que vous auriez été outrée en tant que porte-parole si nous avions adopté une mesure législative comportant clairement de nombreuses failles. Parlons des consultations. Ce projet de loi a été déposé le 25 octobre. La plupart de ces consultations ont eu lieu après le dépôt du projet de loi au Parlement. Quelques séances ont eu lieu juste avant, donc il est vrai que certaines conclusions tirées de ces discussions n'ont pas été prises en compte pour rédiger le projet de loi.
    Vous aurez beaucoup de travail lors de la deuxième phase, qui devrait en grande partie se concentrer sur l'étrange processus d'inscription dont nous sommes dotés. Nous en avons la chance, maintenant. Nous avons cerné... et je crois que les témoins se sont très bien exprimés, et ils ont identifié des problèmes fondamentaux en regard de la Charte. Je nous crois capables de les régler une fois pour toutes. Votre phase deux, plutôt que de se concentrer sur les inégalités liées au sexe, devrait davantage porter sur les sujets qui importent le plus aux yeux des Premières Nations, soit de tourner la page sur le système actuel.
    Premièrement, comment justifiez-vous le dépôt d'un projet de loi au Parlement alors que les consultations l'entourant ont eu lieu après, ce qui n'est absolument pas conforme au dialogue de nation à nation?
    Je crois que c'est la raison pour laquelle il y a deux phases.
    La première porte sur ce que la cour nous a ordonné de faire. Nous avons pu inclure certains dossiers simples dans ce projet de loi. Nous savions qu'il resterait du travail à faire après cela.
    Permettez-moi de vous dire que mon ministère n'a eu que très peu de chances de parler directement aux personnes concernées dans la dernière décennie. Nous sommes ici aujourd'hui parce que toutes les consultations nécessaires au projet de loi C-3 n'ont pas eu lieu. C'est ce que nous voulons donc régler. Nous devons nous tourner vers les personnes qui en savent le plus sur le sujet, vers celles et ceux qui ont l'expertise requise et qui ont vécu des cas de discrimination.
    Merci.
     C'est la raison pour laquelle nous sommes ici aujourd'hui. Parce que le projet de loi C-3 comporte des lacunes.
    Des témoins nous ont fourni des diagrammes qui montrent clairement les failles du projet de loi.
    Vous avez parlé de gens qui, si vous lisez leur témoignage au complet, appuyaient presque totalement l'adoption de ce projet de loi contenant des lacunes. Bien sûr, nous n'avons pas mentionné l'Association du Barreau canadien, les associations autochtones et Stéphane Descheneaux.
    Nous avons entendu d'excellents témoins. Ils ont presque tous affirmé que nous pouvons améliorer ce projet de loi dans un délai raisonnable dans le but de modifier ce qui allait à l'encontre de la Charte, de combler les lacunes et d'aller de passer à la phase deux pour se débarrasser des discriminations et des inégalités.
    Que dites-vous à ces témoins experts? Qu'un comité entier a affirmé, presque sans exception, qu'il lui faudra plus de temps pour faire les choses comme il faut? L'affaire McIvor a fait l'objet de deux prorogations.
    Malheureusement, la Cour ne nous a pas accordé un délai plus long. Nous avons eu droit à un peu plus de temps en raison des élections, mais nous n'avons que 18 mois, au lieu de l'année complète qu'elle accorde généralement.
    De plus, le 3 février est la date où plus aucune inscription ne devrait être acceptée dans le registre, car ces dispositions ont été abrogées. Depuis que la loi a été adoptée, nous avons reçu de 100 à 150 nouvelles demandes d'inscription au bureau du registraire, demandes émanant de personnes qui veulent exercer leurs droits. C'est parce que 35 000 personnes ont été mises au courant et qu'elles veulent en bénéficier des dispositions.
    C'est pour cela que nous devons entamer la phase deux en février. Nous devons nous pencher sur ces cas.
(1655)
    Premièrement, la cause McIvor a fait l'objet de deux prorogations. Honnêtement, je crois que si nous avons une phase deux limitée qui traite de sujets déjà discutés lors de comités, nous ne pourrons jamais...
    Je suis désolée, Cathy. Nous ne pouvons pas enclencher la phase deux avant de terminer la phase un. Je ne comprends pas exactement ce que vous voulez. Dites-moi ce qui, selon vous, serait la bonne marche à suivre.
    Je dis que nous avons des diagrammes clairs et que les failles ont été mises en lumière. Je pense qu'avec l'aide des experts vous pourriez voir quelles sont les autres dispositions qui ne sont pas conformes à la Charte et que vous pourriez consacrer la phase deux à la discussion plus importante qui s'impose au lieu de passer deux à cinq ans à examiner les diagrammes de l'avocat de Stéphane Descheneaux qui font état de failles évidentes.
    J'aimerais que ce soit aussi facile et qu'on sache clairement ce qu'il en est des autres iniquités. Malheureusement, il n'y avait même pas de registre avant 1951. Les cas de paternité non déclarée posent des problèmes difficiles à régler.
    Ce ne sont pas des choses faciles à mettre en oeuvre et il faut vraiment établir comment procéder avant de rédiger un projet de loi.
    Il reste encore un certain nombre de problèmes qui ont été signalés et que nous connaissons, mais que le projet de loi ne règle pas. Je dirais que les tribunaux ont tendance à être assez accommodants lorsqu'ils voient que l'on est vraiment désireux d'agir. Dans l'affaire McIvor, ils ont prolongé le délai à deux reprises.
    On m'a dit que la prorogation serait seulement de trois à six mois et qu'en général, la Cour accorde des prorogations pour régler les problèmes des plaignants.
     Pour ce qui est des remarques incidentes que contenait le jugement, nous estimons avoir réglé, dans le projet de loi, les problèmes faciles à résoudre. Nous croyons que le juge nous a conseillé de prendre le temps nécessaire pour la phase deux. Nous voyons cela comme un tout. Il y a les iniquités que la Cour a constatées et que nous pouvons régler facilement maintenant et nous passerons ensuite à la phase deux en temps voulu.
    D'autres plaignants ont suggéré que ce soit pour plus tard.
    Merci.
    Votre temps est écoulé.
    C'est au tour de Romeo Saganash, s'il vous plaît.
    Je remercie la ministre de comparaître de nouveau devant nous.
    J'ai plusieurs questions à vous poser après vous avoir écoutée, mais je vais commencer par la plus facile. Dans votre déclaration, vous avez dit: « Je vous promets que la phase deux sera lancée en février 2017. »
    C'est bientôt. Je suppose que vous avez déjà commencé à rencontrer les gens à ce sujet pour voir comment ce sera organisé.
    Oui. Je veux dire que nous préparons un plan de travail et nous sommes en train de décider à qui nous parlerons en premier.
    Qui consultez-vous actuellement?
    Pardon?
    Qui consultez-vous actuellement?
    Qui…
    Consultez-vous.
    Nous nous sommes efforcés de préparer les gens et de les informer que la phase deux est pour bientôt, lors de nos séances d'information. Nous avons communiqué avec l'Assemblée des Premières Nations à la suite de son témoignage ici et nous essayons d'établir une date pour entamer nos rencontres préalables.
    Nous avons toujours eu l'intention, pour la phase deux, d'avoir ces rencontres préalables à plus grande échelle. Néanmoins, après avoir entendu les témoins qui ont participé aux séances antérieures du Comité, nous cherchons également à voir qui devrait faire partie de ces entretiens.
    Merci.
    J'ai posé la question, madame la ministre, car nous sommes presque en 2017 et je remarque que votre gouvernement met en oeuvre la décision du Tribunal des droits de la personne à pas de tortue. Après la décision du tribunal et les deux ordonnances subséquentes, nous n'avons pas encore fait grand-chose. Voilà pourquoi je vous demande si vous allez agir rapidement cette fois-ci.
    Mon objection à l'égard de ce projet de loi, et je poserai la question à M. Reiher ensuite, mais d'abord, vous nous demandez… Tout le monde, tous les témoins s'entendent à dire que ce projet de loi du Sénat reste discriminatoire. Il n'est pas entièrement conforme à la Charte et vous demandez aux membres du Comité de l'appuyer. Vous me demandez de manquer à mon devoir de député qui est de défendre la primauté du droit à la Chambre.
    Votre collègue, M. Carr, a certainement une interprétation différente de la primauté du droit. Pour lui, c'est du ressort de la police. Je vois cela autrement.
    Selon la Cour suprême du Canada, la primauté du droit exige que l'on respecte la Constitution de notre pays et dans la Constitution, il y a la Charte des droits et libertés et l'article 35 sur les droits ancestraux et issus de traités.
     Vous me demandez de manquer à mon devoir de député en me demandant d'appuyer le projet de loi S-3.
(1700)
    Je ne suis pas de cet avis. Quand l'Association du Barreau Autochtone a mentionné qu'un groupe supplémentaire devait figurer dans le projet de loi, nous avons apporté un amendement grâce auquel on nous a dit que le projet de loi était conforme à la Charte.
    Bien entendu, nous révisons tous les éléments de la politique pour éliminer les autres iniquités que contient la Loi sur les Indiens. C'est la raison pour laquelle nous devons procéder en deux phases. Nous avons fait ce que la Cour nous a dit de faire et nous avons apporté quelques changements supplémentaires qui ne posaient pas de problèmes. Nous nous attaquons maintenant aux questions plus complexes portant sur la date de naissance et de nombreuses autres iniquités qui ont été signalées à votre comité.
    Je n'ai pas compris non plus ce que vous vouliez dire quand vous avez déclaré, en réponse, je crois, à une des questions précédentes, qu'il n'était pas possible de mettre tout le monde d'accord.
    Désolé, mais les droits de la personne ne sont pas négociables.
    Non. Je suis d'accord. Mais comme chacun sait, y a un grand nombre de droits différents qui se chevauchent… il y a l'interprétation des droits et l'affirmation de droits qui ne sont pas forcément reconnus. Je veux dire par là que si c'est la paternité qui est mise en doute ou autre chose, nous devons voir comment faire en sorte que les gens qui ont des droits puissent les exercer. Cela veut dire qu'il faut assurer l'intégrité du système.
    Je voudrais revenir sur une question que j'ai posée au groupe précédent et l'adresser à M. Reiher. J'ai soulevé le fait que le projet de loi vient du Sénat. Étant donné que le Sénat n'a pas de relations historiques avec les peuples autochtones, je vois déjà là un léger problème. Les profondes relations que nous avons avec les peuples autochtones sont du ressort de la Couronne. Ce projet de loi aurait dû être présenté, sinon par le premier ministre du Canada, du moins par la ministre des Affaires autochtones. Voyez-vous un problème à cet égard?
    Je ne sais pas si vous avez entendu la réponse qui a déjà été donnée à cette question, à savoir que tout pourrait s'effondrer parce que quelqu'un pourrait soulever cette question constitutionnelle très importante. Telle est la réponse qui a été donnée. Je crois que la ministre l'a entendue lorsqu'elle est arrivée, mais je tiens à vous poser la même question.
    Merci. Si j'ai bien compris, votre question porte sur la présentation du projet de loi au Sénat. Je considère que c'est une question de procédure parlementaire et je n'ai pas connaissance du problème constitutionnel qui a été soulevé.
    Je demanderais seulement à la ministre si elle a pris connaissance des conclusions et recommandations du Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, car le comité a également adressé des recommandations au gouvernement du Canada dans son rapport qui a été publié le 18 novembre, incidemment le même jour que le rapport concernant Val-d'Or. A-t-elle pris connaissance de ce rapport?
(1705)
    Il vous reste une seconde. Je crois que vous devrez y revenir plus tard, Romeo.
    C'est maintenant au tour de Gary Anandasangaree, s'il vous plaît.
    Madame la ministre, je vous remercie, vous et vos collègues du ministère.
    À notre première réunion, le 21 novembre, on vous a demandé, madame Montminy, si le projet de loi allait éliminer la discrimination fondée sur le sexe. Vous avez répondu: « Nous sommes confiants. Les modifications nous permettent de régler toutes les iniquités connues fondées sur le sexe dans l'inscription des Indiens. » Et vous concluez par ces mots: « Pour ce qui est de votre question sur la discrimination fondée sur le sexe, oui, le projet de loi corrige tous les problèmes. »
    Le Sénat a, depuis, reçu des nouveaux témoignages à propos de ce que la ministre vient de dire. Aujourd'hui, environ deux semaines plus tard, pouvez-vous affirmer catégoriquement que ce projet de loi règle toutes les iniquités connues, fondées sur le sexe, dans la Loi sur les Indiens?
    Quand j'ai dit que le projet de loi allait éliminer la discrimination connue fondée sur le sexe, c'était à propos des dispositions que la Cour avait jugées discriminatoires, celles qui concernent les cousins et les frères et soeurs. Comme vous le savez, nous avons aussi ajouté les mineurs omis ou retranchés de la liste. Le témoignage de l'Association du Barreau autochtone nous a fait prendre conscience d'une autre situation résultant de la solution que nous apportons vis-à-vis des frères et soeurs. Cela crée un nouveau groupe comparateur et dans certaines circonstances, assez complexes, cela pourrait causer une nouvelle iniquité, que nous avons examinée et que nous sommes prêts à régler si des amendements sont déposés à cet effet.
    Je me demande si nous avons vraiment tout examiné en ce qui concerne la discrimination fondée sur le sexe. Je sais que la phase deux donnera lieu à une étude beaucoup plus approfondie, mais ce qui m'inquiète, je pense, c'est que le jugement rendu dans l'affaire Descheneaux portait précisément… tandis que cela fait suite à des remarques incidentes et qu'on a donc voulu éviter d'avoir à retourner devant les tribunaux pour les iniquités fondées sur le sexe.
    Nous avons entendu, juste avant vous, un groupe très respecté qui a avancé un certain nombre d'arguments convaincants. Je veux seulement m'assurer que la ministre en est informée et que le ministère comprend bien que nous cherchons à éliminer toutes les iniquités connues fondées sur le sexe.
    Oui.
    Vous avez certainement entendu les témoins précédents parler de différents cas de traitement différentiel, mais un traitement différentiel n'est pas toujours synonyme de discrimination. Comme l'a dit la ministre, il y a toutes sortes de facteurs à considérer pour établir si une situation est discriminatoire.
    Pour ce qui est de la discrimination fondée sur le sexe, nous sommes certains de pouvoir y remédier en apportant la modification que l'Association du Barreau Autochtone a suggérée. Il y a d'autres situations plus complexes dans lesquelles d'autres facteurs comme la date de naissance et la situation maritale s'ajoutent à la discrimination fondée sur le sexe. Par exemple, je ne sais pas si les témoins précédents ont soulevé la question de la date limite fixée à 1951. C'est surtout une question de date de naissance qui, selon les circonstances, pourrait également entraîner d'autres iniquités fondées sur le sexe. Ce n'est pas uniquement la discrimination fondée sur le sexe.
    Dans ce cas, par exemple dans la décision qu'elle a rendue dans l'affaire McIvor, la Cour d'appel de la Colombie-Britannique a estimé que le gouvernement n'avait pas à remédier aux situations datant avant 1951. C'est allé devant les tribunaux et ces derniers ont rejeté l'argument des plaignants dans cette affaire.
    Gary, ce que nous disons, je pense, c'est que même si les tribunaux ont rendu cette décision, nous voulons remédier à la situation. Il y a des choses que les tribunaux nous ont ordonné de faire. Nous avons besoin de tenir des consultations au sujet des autres questions que les gens veulent nous voir régler afin que nous puissions enfin mettre un terme à toutes les iniquités que contient la Loi sur les Indiens.
(1710)
    Merci de ces précisions, madame la ministre.
    Toute discrimination est inacceptable. Cela me paraît assez évident. Lorsque nous parlons de discrimination fondée sur le sexe, qu'elle soit intentionnelle ou le résultat d'une série de dispositions qui peuvent avoir un effet discriminatoire, c'est exactement la même chose.
    Je me demande si nous ne devrions pas aller encore plus loin. S'agit-il des problèmes que le ministère a mis en lumière et les autres parties prenantes sont-elles d'accord pour que cet amendement soit adopté, sachant que la phase deux élargira le débat sur l'ensemble des iniquités?
    C'est ce que nous croyons nécessaire de faire dans le court délai que nous a accordé la Cour. Nous devons mettre cette mesure en place maintenant et nous occuper du reste en temps voulu afin de régler toutes les autres questions.
    Madame la ministre, si vous le permettez, je vais également demander conseil à l'égard du délai. Je sais que les témoins ont soulevé cette question à plusieurs reprises. Un délai supplémentaire a déjà été demandé par le passé. Je crois que c'était à deux reprises, pour la cause McIvor. Qu'est-ce qui vous empêche de retourner devant la Cour pour demander plus de temps?
    Il reste seulement une minute, s'il vous plaît.
    Certainement.
    Le Canada a la possibilité de retourner devant la Cour pour demander un délai supplémentaire. D'après notre expérience, pour avoir des chances de succès, nous savons qu'il ne faut pas le faire trop tôt. Le gouvernement doit montrer qu'il a fait ce qu'il avait à faire et s'est efforcé de son mieux de respecter le délai. Un tribunal peut accorder une prorogation pour surseoir à la déclaration d'invalidité d'une loi. C'est une chose qu'il ne fait pas à la légère. Il n'accordera pas non plus une prorogation à la légère.
    En fait, dans l'affaire Carter, en janvier dernier, la Cour suprême du Canada a fixé des critères très stricts en disant qu'une prorogation ne sera accordée que dans des circonstances extraordinaires.
    Nous sommes à court de temps. Merci.
    Nous passons maintenant à des tours de questions de cinq minutes.
    Le premier tour sera pour David Yurdiga.
    Je voudrais remercier la ministre d'être venue aujourd'hui répondre à nos questions.
    Je trouve décourageant que le ministère nous ait dit au départ qu'il avait mené des consultations intensives alors que nous avons appris que ce n'était peut-être pas vrai. Juste après que le ministère a témoigné devant notre comité, nous nous sommes rendu compte que tous les témoins qui sont venus ensuite n'avaient pas été consultés.
    Quand en avez-vous eu connaissance?
    Pour moi, il était entendu que ce projet de loi visait à mettre en oeuvre la décision de la cour et qu'il y aurait des consultations, mais qu'en raison du délai à respecter — je crois que j'en étais persuadée — ces consultations auraient lieu, en majeure partie, au cours de la phase deux. La phase un consistait seulement à exécuter le jugement. Quand je me suis rendu compte que les plaignants n'avaient pas été consultés — c'était vraiment une erreur; il y a eu une lettre qui n'a jamais été envoyée — j'ai été vraiment embarrassée et j'ai immédiatement téléphoné aux plaignants avec qui j'ai eu un très bon échange au sujet de la longue bataille qu'ils avaient livrée.
    Je dois dire que cela m'était déjà arrivé une fois, il y a 10 ans, à propos de la Loi sur la mise en quarantaine, et je me suis rendu compte, une fois de plus, que l'idée que je me fais des consultations ne correspond pas toujours exactement à celle que les autres s'en font.
    Nous avons vraiment compris qu'il n'y a pas de véritables consultations sans la participation des citoyens, et surtout celle des membres des Premières Nations, des Inuits et des Métis, et que nous devons mieux faire sur ce plan-là.
(1715)
    Je voudrais replacer les choses dans leur contexte. Le ministère ne vous donne-t-il pas régulièrement des séances d'information et pourquoi n'avez-vous pas relevé alors l'insuffisance du processus de consultation?
    Habituellement, les séances d'information portent sur les grandes lignes des consultations et de ce que nous avons entendu.
    Dans ce cas particulier, comme il y avait un délai à respecter et qu'il s'agissait, en fait, d'exécuter le jugement d'un tribunal, je n'ai probablement pas posé autant de questions que j'aurais dû au sujet des consultations, mais maintenant, je comprends et je croyais vraiment que la majeure partie des consultations auraient lieu au cours de la phase deux.
    Madame la ministre, la plupart des témoins nous ont dit que le projet de loi S-3 présente des failles. Allez-vous écouter les Premières Nations et demander une prorogation ou allez-vous rester sourde à la demande de prorogation des Premières Nations?
    Rester sourde n'est pas vraiment ce que je fais. J'ai parfaitement entendu les préoccupations qui ont été exprimées.
    On n'a pas bien compris, je pense, ce qu'une prorogation permettrait d'accomplir. La prorogation serait seulement de trois à six mois et il est impossible que nous puissions régler tous les problèmes qui ont été soulevés dans les deux comités en l'espace de trois à six mois. Pour pouvoir rédiger le nouveau projet de loi maintenant, il faudrait faire une demande au Cabinet, revenir avec le projet de loi et le faire adopter par les deux Chambres. On n'a pas bien compris, je pense, ce qu'une prorogation permettrait de faire et les raisons pour lesquelles un tribunal nous accorderait un délai supplémentaire.
    Je peux comprendre que les gens pensent, avec un certain cynisme, que nous cherchons à inclure le maximum de choses dans cette révision de la Loi sur les Indiens avant que le train quitte la gare. Ils ont l'impression que nous ne reviendrons pas sur ces questions. Je suis ici pour dire que des consultations étendues débuteront en février et que nous reviendrons avec le plan qui convient pour leur déroulement.
    Merci à tous les deux.
    C'est maintenant au tour de Don Rusnak, s'il vous plaît.
    En fait, c'est Michael McLeod qui va prendre ce tour.
    Vous cédez votre temps à Michael McLeod.
    Merci, monsieur le président.
    Merci de témoigner aujourd'hui, madame la ministre.
    Je pense que ceux d'entre nous qui suivent ce dossier depuis des années ont été, pour la plupart, satisfaits de voir que le gouvernement allait de l'avant et s'éloignait de la position du gouvernement précédent qui songeait à faire appel du jugement rendu. Néanmoins, c'est une question très complexe. C'est très compliqué.
    Je viens des Territoires du Nord-Ouest où la moitié de notre population est autochtone. Nous avons huit gouvernements autochtones. Nous avons encore beaucoup de difficultés à établir qui appartient à telle ou telle organisation. Beaucoup de gens en sont encore exclus. Je crois qu'à un moment donné, toutes nos organisations s'autogouverneront et que la Loi sur les Indiens ne s'appliquera plus. Le gouvernement Tlicho et la communauté de Deline témoignent déjà de cette tendance.
    Je crains que cela ne puisse peut-être pas se réaliser si nous n'agissons pas maintenant. Nous avons entendu aujourd'hui les témoignages d'un certain nombre de personnes qui ont présenté d'excellents arguments, très bien étayés, en faveur d'un report de cette mesure. Elles ont dit qu'il fallait améliorer le projet de loi. Nous avons aussi entendu certains de nos collègues dire qu'ils ne faisaient pas confiance au gouvernement.
    Je ne sais pas vraiment ce qui arrivera à l'avenir. Je sais que 35 000 personnes espèrent que cette mesure ira de l'avant et que leur nombre pourrait grossir. Si nous n'agissons pas maintenant, dans combien de temps pensez-vous que le projet de loi sera assez satisfaisant pour régler tous les problèmes? Je ne peux pas dire que je les connais tous. Je ne suis pas expert dans ce domaine. Dans quelle mesure pensons-nous que ce chiffre estimatif de 35 000 personnes va augmenter? Nous avons entendu dire qu'il y avait déjà au moins 150 personnes de plus.
(1720)
    Comme vous le savez, je préférerais régler maintenant le cas des 35 000 personnes touchées. C'est important, que ce soit sur le plan des prestations de santé ou sur celui de l'enseignement postsecondaire. C'est ce que les gens nous disent. Ils ne veulent pas attendre plus longtemps. Ce que nous espérons… Qu'il faille un an ou deux pour remédier au reste des iniquités dans un projet de loi, nous sommes déterminés à le faire et à le faire bien. Nous ne pensons pas avoir le temps de résoudre les iniquités qui ne sont pas fondées sur le sexe d'ici l'expiration du délai ou que la cour nous accordera suffisamment de temps pour faire les choses comme il faut.
    Vous savez sans doute, comme la plupart des gens… Je ne pense pas que les comités parlementaires soient le lieu où le gouvernement doit tenir ses consultations. Nous devons commencer par faire notre travail et revenir le soumettre au comité en espérant que nous aurons résolu toutes les autres iniquités.
    Cette question a suscité beaucoup de discussions un peu partout au Canada. Les gens de ma circonscription m'en ont parlé. Des gens voudraient voir là une possibilité de réconciliation. Cela pourrait être l'occasion de remonter à l'époque où les traités ont été signés et où leur texte a été imposé aux gens. Je ne sais pas vraiment si la phase deux permettra que cela se fasse.
    Est-ce une chose que les gens peuvent espérer? Peuvent-ils espérer que l'on remonte, dans mon cas, jusqu'au Traité no 11, conclu en 1921? Même dans ma famille, certaines personnes ont été autorisées à s'inscrire, mais d'autres pas. J'ai des cousins qui sont inscrits et d'autres qui ne le sont pas. Cela dépendait d'un grand nombre de facteurs. Je vous pose la question.
    C'est une excellente question, car nous voulons que ce soit les nations qui décident elles-mêmes de toute la question de l'appartenance et de l'inscription. Ce n'est pas une chose dont le Canada devrait décider, comme il a rédigé la Loi sur les Indiens. Ce n'est pas à nous de décider qui est inscrit et qui ne l'est pas. Nous voulons confier cette responsabilité à d'autres. Voilà pourquoi il est si intéressant de faire les choses comme il faut en demandant aux gens ce qu'ils souhaitent voir dans la loi.
    Madame la ministre, le temps imparti est malheureusement écoulé.
    C'est au tour de Cathy McLeod, s'il vous plaît.
    Pour revenir à ce que vous avez dit quant à la nécessité de mener d'abord des consultations et de laisser ensuite les comités faire leur travail, je suis entièrement d'accord avec vous. Nous avons malheureusement constaté qu'avec le projet de loi S-3 les consultations ont eu lieu après la rédaction du projet de loi. Dans ce cas, heureusement, nous en avons été saisis en même temps que le Sénat et ses failles apparaissent très clairement. Je revois l'avocat de M. Descheneaux et ses quatre images des réponses très inadéquates données dans la loi.
    Nous avons eu un comité. Nous avons eu des témoins experts. La majorité d'entre eux ont dit, qu'à leur avis, la loi présentait encore des défauts. Nous ne savons pas si le Sénat renverra le projet de loi avec une correction mineure ou non, mais la majorité des témoins du pays ont dit au comité qu'il fallait un peu plus de temps pour faire une bonne loi et qu'il fallait demander un délai supplémentaire.
    Vous avez déclaré aujourd'hui que vous ne le feriez pas. Vous ne croyez donc pas que ce que tous ces témoins nous ont dit est la chose à faire. Que ce soit le chef national Bellegarde ou… et je pourrais vous citer toute la liste. Vous avez vu les témoignages.
    Vous nous dites en fait, aujourd'hui, que c'est très bien qu'ils soient venus, mais que vous allez faire ce que vous avez décidé de faire, tout comme vous avez rédigé le projet de loi sans leur participation. Est-ce bien ce que vous nous dites aujourd'hui?
(1725)
    Non, je pense que nous disons que si nous demandions une prorogation, ce serait pour pouvoir faire adopter ce projet de loi par les deux Chambres en temps voulu. Je ne pense pas qu'on nous accorderait un délai suffisant pour régler toutes les autres iniquités. C'est l'opinion qui nous a été donnée, à savoir que ce serait pour répondre grosso modo aux revendications des plaignants. La prolongation servirait à rendre justice à ces plaignants.
    Nous sommes très reconnaissants au Barreau autochtone d'avoir mis en lumière le problème relatif à la question des frères et soeurs dans le projet de loi S-3, car un amendement pourra être apporté pour cet autre groupe. Nous croyons que cela nous donnera un projet de loi répondant à ce que la cour nous a demandé de faire.
    Le 21 novembre, j'ai demandé au ministère si les amendements proposés au sujet de l'inscription des Indiens se conformaient au jugement Descheneaux et éliminaient toutes les iniquités connues fondées sur le sexe. J'ai demandé au ministère s'il pensait avoir réglé cette question et il a répondu par l'affirmative. Néanmoins, nous apprenons qu'il aurait dû répondre non, car l'Association du Barreau autochtone et d'autres témoins ont déclaré que cela ne réglait pas toutes les iniquités connues fondées sur le sexe. De nombreux témoins nous ont dit que cela ne les réglait pas.
    C'est le Barreau autochtone qui nous a mentionné, je crois, que le projet de loi créait des iniquités pour un nouveau groupe. En réglant les autres problèmes, nous avons créé une nouvelle série de problèmes que nous pouvons maintenant résoudre grâce à un amendement.
    Si vous le permettez, cela montre, je pense, que lorsque vous précipitez les choses sans parler aux personnes qui connaissent le mieux… Quand Mme McIvor est venue, elle nous a apporté énormément de connaissances. Il y a des failles dans la loi et je pense qu'il y a là des failles supplémentaires. D'autres témoins ont exprimé des préoccupations.
    Si les amendements sont adoptés au Sénat, je ne pense pas… Nous n'allons pas refaire tout cet exercice suite à une contestation judiciaire et gaspiller le temps et les efforts de tout le monde parce que nous avons raté notre coup.
    Il ne vous reste plus de temps, Cathy. Les cinq minutes sont dépassées.
    Monsieur le président, si vous le permettez, un comité parlementaire a pour rôle de signaler les erreurs. Je crois vraiment que c'est important et quelqu'un doit trouver la solution pour y remédier. C'est bien le rôle important des comités parlementaires, mais nous devons tenir des consultations pour remédier aux iniquités restantes.
    Je tiens à remercier tous les témoins et vous, madame la ministre, ainsi que les membres de votre équipe.
    Chers collègues, j'ai pris soin de réserver une minute et demie que nous allons consacrer brièvement aux travaux du comité. Je vous demande donc de rester à votre place.
    Comme Charlie Angus se retire de notre comité, nous n'avons plus de deuxième vice-président. Nous devons élire Romeo Saganash.
    Grant va nous proposer une petite procédure, alors pouvons-nous l'écouter un instant, s'il vous plaît?
    Conformément au paragraphe 106(2) du Règlement, le deuxième vice-président doit être un député de l'opposition provenant d'un parti autre que le parti de l'opposition officielle.
    Je suis tout disposé à recevoir les motions pour le deuxième vice-président.
(1730)
    Il semblerait que Don Rusnak propose que ce soit Romeo Saganash.
    Je propose la motion pour Romeo.
    Elle est appuyée par Cathy McLeod.
    Y a-t-il d'autres formalités?
    Je vous remercie de votre patience. Il est proposé par Don Rusnak que Romeo Saganash soit élu deuxième vice-président du comité.
    Plaît-il au comité d'adopter la motion?
    Des voix: D'accord.
    (La motion est adoptée.)
    Le greffier: Je déclare la motion adoptée et Romeo Saganash dûment élu deuxième vice-président du comité.
    Merci.
    Félicitations, Romeo.
    La séance est levée.
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