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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


NUMÉRO 085 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 8 février 2018

[Enregistrement électronique]

(1525)

[Traduction]

    Bonjour à tous. Bienvenue à notre réunion du Comité permanent de la justice et des droits de la personne, alors que nous poursuivons notre étude sur le counseling et d'autres services de santé mentale offerts aux jurés.
    Je tiens à remercier les membres de notre distingué groupe de témoins d'aujourd'hui, dont deux se joignent à nous par vidéoconférence. Mesdames, quand je vous présenterai, faites-moi savoir si vous m'entendez bien.
    Nous accueillons Cheryl Thomas, professeure, directrice du projet de jury à la Faculté de droit de l'University College London, qui est ici à titre personnel.
    Madame Thomas, vous m'entendez?
    Formidable.
    Nous accueillons aussi Paula Hannaford-Agor, directrice du Center for Jury Studies à Williamsburg, en Virginie.
    Madame Hannaford-Agor, vous m'entendez?
    Merci beaucoup.
    Nous accueillons aujourd'hui dans la salle M. Doug Morton, directeur des Relations gouvernementales à l'Association canadienne de normalisation.
    Bienvenue monsieur Morton.
    Nous accueillons également Mme Candace Sellar, gestionnaire du programme de Sécurité des travailleurs et du public à l'Association canadienne de normalisation.
    Bienvenue madame Sellar.
    Mesdames, comme nous l'avons mentionné aux personnes présentes dans la salle, nous allons vous demander de témoigner en premier puisque vous êtes en vidéoconférence et que nous ne devons pas attendre les pépins techniques. Vous aurez toutes les deux environ huit minutes. Je ne vous interromprai pas avant 10 minutes. Ensuite, une fois que vous aurez toutes les trois pris la parole, nous passerons aux questions du groupe.
    Nous allons commencer par madame Thomas.
    Je vous remercie.
    J'aimerais remercier le Comité de m'avoir invitée à témoigner aujourd'hui au sujet de mes recherches sur les répercussions pour le public de la fonction de juré. Dans mes remarques liminaires, je fournirai au Comité des renseignements généraux sur la perception de la question en Angleterre et au pays de Galles, sur mes recherches auprès des jurés sur cette question précise, un bref résumé des conclusions de ces recherches et des renseignements sur la nouvelle règle de procédure pénale instaurée en Angleterre et au pays de Galles par suite de ces recherches.
    En ma qualité de directrice du Projet de jury de l'University College London ou UCL, je mène des recherches auprès de jurés en Angleterre et au pays de Galles depuis 2002. Mes recherches ne sont menées qu'auprès de jurés à la cour. Je n'utilise pas d’étudiants ou d'autres membres du public pour représenter les jurés. Mon témoignage d'aujourd'hui est tiré d’enquêtes que je mène immédiatement après le verdict auprès d'un grand nombre de jurés avant qu'ils ne quittent le tribunal.
    En Angleterre comme au pays de Galles, l'impact de la fonction de juré sur le public est décrit comme posant un problème, et ce, pour plusieurs raisons. Il y a eu dans les dernières années un certain nombre d'affaires dans lesquelles des jurés ont exprimé publiquement leurs préoccupations au sujet de l'impact de la fonction de juré après un procès. Ces jurés ont dit qu'ils avaient de la difficulté à composer avec la pression, parce qu'ils n'étaient pas en mesure de parler de l'affaire à qui que ce soit une fois le procès terminé. Cela indiquait clairement que les jurés étaient confus au sujet des règles sur la divulgation de leur expérience de la fonction de juré. Un autre facteur est l'augmentation récente du nombre d'affaires d'infractions sexuelles jugées par des jurys. Il y a 10 ans, les infractions sexuelles représentaient moins du quart des infractions jugées par un jury en Angleterre et au pays de Galles. Aujourd'hui, ce chiffre est passé à plus du tiers.
    Il pourrait être utile à ce stade d'expliquer quelques aspects de la fonction de juré en Angleterre et au pays de Galles. Un quart de million de personnes font partie chaque année d’un jury en Angleterre et au pays de Galles. Plus personne ne peut désormais être dispensé de plein droit. Nous utilisons un processus de sélection aléatoire, de la convocation initiale jusqu’à la composition finale du jury. Nous n'appliquons ni le voir-dire ni la récusation péremptoire. Mes recherches ont montré que cela produit à chaque cour de la Couronne un groupe de jurés qui sont remarquablement représentatifs de la population locale. Cela est important en ce qui concerne l'impact de la fonction de juré sur le public, car nos jurés englobent un éventail extrêmement vaste de personnes.
    Jusqu’à l'an dernier, le soutien des jurés et les services de suivi étaient surtout passifs. Des dépliants étaient remis aux jurés à la cour pour leur expliquer comment communiquer avec les Samaritains pour discuter de ce qu’ils ressentent. Les Samaritains sont une organisation non gouvernementale de bénévoles qui offre une aide confidentielle jour et nuit dans tout le Royaume-Uni par l'entremise d'une ligne téléphonique gratuite. Dans certains cas exceptionnellement difficiles, des juges ont décidé de leur propre initiative de prendre des dispositions pour qu'une équipe de Samaritains rencontre les jurés au début ou à la fin d'une affaire afin de leur expliquer quelle aide leur était offerte.
    En 2016, le Lord Chief Justice of England and Wales m’a demandé d'étudier les questions suivantes: la compréhension par les jurés de leurs responsabilités juridiques, y compris leur compréhension des règles relatives à la divulgation des affaires pendant et après le procès; l'impact de la fonction de juré sur les jurés; et la demande de soutien et d'assistance pour les jurés après le procès. Je suis heureuse de faire part aujourd’hui au Comité de quelques-unes des principales conclusions de cette étude. Je dois dire que ces résultats ne sont pas publiés, mais ils le seront plus tard cette année.
    La première constatation principale est qu'une grande partie des jurés sont clairement perplexes quant à ce dont ils pouvaient parler, avec qui et quand, pendant et après le procès. Cela cause un stress inutile aux jurés.
     La deuxième conclusion principale est que la grande majorité des jurés qui ont fait partie d'un jury ont trouvé que la fonction de juré était une expérience positive, et non négative. Lorsqu'on leur a demandé de décrire leur expérience de la fonction de juré, les réponses les plus fréquentes ont été positives, avec des qualificatifs comme éducative, intéressante et informative. Les réponses les moins fréquentes ont été obtenues pour des descriptions aussi négatives que déprimante, déroutante, ennuyeuse et inquiétante. Seule une minorité a répondu que l'expérience était stressante.
     La troisième conclusion principale est que seule une très faible proportion des jurés ont dit qu'ils communiqueraient avec les Samaritains pour discuter de ce qu’ils ressentent à l'égard de la fonction de juré. Bon nombre de jurés pensaient que les Samaritains étaient réservés aux personnes suicidaires. Il était toutefois clair que s’il était possible de communiquer avec les Samaritains par une ligne d'assistance téléphonique pour les jurés, près de la moitié des jurés disaient qu'ils le feraient ou pourraient le faire pour discuter de choses comme l'incidence de la fonction de juré sur leur vie, la façon de composer avec les problèmes avec d'autres jurés et demander des renseignements sur les règles de droit qu'ils devaient observer.
    Sur la base de cette étude, un nouvel avis de convocation à un jury a été conçu et testé auprès d'un grand nombre de jurys en Angleterre et au pays de Galles sur une période de huit mois. Il s'agit d’un document intitulé « Your legal responsibilities as a Juror », dont le Comité a obtenu une copie si j’ai bien compris. Vous constaterez que ce document énonce clairement les deux principales règles à suivre par les jurés lorsqu'ils discutent d'une affaire, et qu'il renferme également des renseignements sur ce que les jurés peuvent faire s'ils estiment avoir besoin de soutien en raison de leur fonction.
    Mes recherches m’ont permis de constater que cet avis a grandement amélioré la compréhension des jurés quant à ce qu'ils peuvent et ne peuvent pas faire, à qui ils peuvent parler, de quoi et quand, pendant et après le procès. Cet avis a également été très bien accueilli par les jurés eux-mêmes. En conséquence, une nouvelle règle de procédure pénale a été promulguée en Angleterre et au pays de Galles en juillet 2017, exigeant que cet avis soit donné par le juge à chaque juré assermenté au début de chaque procès devant jury.
    Enfin, je voudrais dire quelques mots sur la nécessité de trouver un juste équilibre dans ce dossier.
    La fonction de juré constitue un service public important. Les gouvernements doivent comprendre l'impact de la fonction de juré sur les membres du public afin de s'assurer que les mesures qui s’imposent sont prises pour aider les jurés qui ont besoin d'aide, mais cela devrait être fait et compris dans le contexte des effets extrêmement positifs de la fonction de juré sur la grande majorité des membres du public qui siègent à un jury.
    De nombreux membres du public sont d'abord mécontents ou réticents à l'idée d'être convoqués pour faire partie d'un jury, mais en Angleterre et au pays de Galles, nous avons constaté que 81 % des personnes qui ont fait partie d'un jury ont déclaré, à la fin du procès, qu'elles seraient heureuses de le faire à nouveau si elles étaient convoquées.
    Il semble également que la fonction de juré pourrait avoir des effets positifs considérables sur la vie civique en général. Des recherches menées aux États-Unis montrent que les jurés qui n'avaient jamais voté auparavant étaient plus susceptibles de voter à la prochaine élection après avoir fait partie d'un jury.
    Les témoignages de l'Angleterre et du pays de Galles indiquent que nous ne devrions pas exclure un plus grand nombre de personnes de la fonction de juré par crainte de l'impact de cette fonction. Nous devons plutôt trouver de meilleurs moyens de veiller à ce que les jurés comprennent clairement les règles de la fonction de juré et puissent facilement avoir accès au soutien qui leur est offert. Cela permettra à un plus grand nombre de personnes d'être habilitées par l’expérience de la fonction de juré et de ne pas en subir de conséquences négatives.
    Je vous remercie et je serai heureuse de répondre aux questions du Comité.
(1530)
    Merci beaucoup. C'était fascinant et très apprécié.
    Nous allons maintenant passer à madame Hannaford-Agor. J'attends de voir si elle va apparaître à l'écran. L’avons-nous perdue? Il y a un problème audio.
    Nous allons vous rappeler. En attendant, nous allons maintenant passer à l'Association canadienne de normalisation, et nous reviendrons ensuite à vous. Je suis désolé de ce contretemps.
    Monsieur Morton et madame Sellar, vous avez la parole.
    Merci monsieur le président.
    Je m’appelle Doug Morton. Je suis directeur des relations gouvernementales pour le Groupe CSA et je suis accompagné par Candace Sellar, gestionnaire de programme de notre groupe d'élaboration des normes de Sécurité des travailleurs et du public. C'est un plaisir et un honneur pour Candace et moi d'être ici aujourd'hui, et nous sommes heureux de pouvoir prendre la parole devant le Comité sur ce sujet très important.
    Le Groupe CSA est le plus grand organisme d'élaboration de normes au Canada et, en 2019, nous célébrerons 100 ans de service à la population du Canada et de partout dans le monde. Nos quelque 3 000 normes couvrent un large éventail de secteurs, dont la sécurité du public et celle des travailleurs, les soins de santé, l'infrastructure, le pétrole et le gaz naturel, ainsi que les changements climatiques. Nous sommes accrédités au Canada par le Conseil canadien des normes le CCN et aux États-Unis par l'American National Standards Institute.
    Comme le Comité l’a signalé dans son communiqué du 9 novembre 2017, et comme divers témoins vous l’ont dit, le fait de faire partie d'un jury peut être stressant, mais la connaissance de ce stress au Canada est assez limitée. Le Groupe CSA ne prétend pas être un expert en stress des jurés. Nous avons toutefois élaboré des normes et continuons d'élaborer, en matière de santé et de sécurité et psychologiques dans divers domaines, de nouvelles normes qui pourraient selon nous fournir au Comité des exemples de pratiques exemplaires susceptibles de vous intéresser.
    Je vais maintenant céder la parole à Candace, qui vous fournira plus de détails, et nous serons heureux de répondre à vos questions après notre exposé.
(1535)
     En 2006, le Groupe CSA a publié une norme nationale du Canada intitulée Z1000, Gestion de la santé et de la sécurité au travail, qui est utilisée par de nombreuses administrations partout au Canada. Cette norme définit la santé et la sécurité au travail comme la promotion du bien-être physique, mental et social des travailleurs sur le lieu de travail, ainsi que comme la protection des travailleurs contre les conditions de travail et les facteurs nuisibles à leur santé et à leur sécurité, et la prévention de ces facteurs. La norme de gestion de la santé et de la sécurité au travail fournit un modèle pour établir, mettre en oeuvre et assurer le maintien d'un système de gestion de la santé et de la sécurité au travail. Un tel système accroît la sensibilisation à la santé et à la sécurité et favorise l’adoption d’une approche plus systématique pour atteindre les objectifs définis en matière de santé et de sécurité.
    La norme CSA Z1000 a servi de cadre modèle en 2011 lorsque le Groupe CSA et le Bureau de normalisation du Québec ont été mandatés par la Commission de la santé mentale du Canada d’élaborer une norme portant sur la santé et la sécurité psychologiques en milieu de travail. Le projet a été financé en partie par le gouvernement du Canada par l'entremise de Ressources humaines et Développement des compétences Canada, Santé Canada et l'Agence de la santé publique du Canada, ainsi que par une contribution financière du Centre pour la santé mentale en milieu de travail de la Great-West et de Bell Canada.
    Cette norme canadienne de renommée internationale publiée en 2013 s'intitulait Santé et sécurité psychologiques en milieu de travail - Prévention, promotion et lignes directrices pour une mise en oeuvre par étapes. La norme renferme une série de lignes directrices, d'outils et de ressources d’adoption volontaire destinés à guider les organisations dans la promotion de la santé mentale et la prévention des préjudices psychologiques en milieu de travail. Elle a été téléchargée plus de 42 000 fois depuis sa publication, et elle est actuellement considérée comme un document de base par l'Organisation internationale de normalisation aux fins de l'élaboration d'une norme internationale sur ce sujet très important.
    La norme sur la santé et la sécurité psychologiques en milieu de travail comprend des renseignements sur des sujets comme l'identification des dangers psychologiques, l'évaluation et le contrôle des risques associés aux dangers qui ne peuvent être éliminés, la mise en oeuvre de pratiques qui soutiennent et favorisent la santé et la sécurité psychologiques, la croissance d'une culture qui favorise la santé et la sécurité psychologiques, et la mise en oeuvre de systèmes de mesure et d'examen pour assurer la durabilité de l'approche globale.
    La norme sur la santé et la sécurité psychologiques fournit de l'information pour aider les organisations à mettre en oeuvre les éléments clés de la norme, y compris des scénarios adaptés aux organisations de toutes tailles, un outil de vérification et d'autres ressources et références. La norme en milieu de travail a été beaucoup téléchargée à ce jour, soit dans une proportion de 21 % par le secteur des soins de santé, de 20 % par les secteurs gouvernemental, judiciaire et policier et de 11 % par le secteur de l'éducation.
    En se fondant sur la norme de santé et de sécurité psychologiques en milieu de travail, la CSA publiera ce mois-ci une nouvelle norme nationale sectorielle pour le Canada en matière de santé et de sécurité psychologiques dans l'organisation des services paramédicaux, commandée par l'Association des paramédics du Canada et financée par le programme de prévention et d'innovation en santé et sécurité au travail du gouvernement de l'Ontario. Cette norme a été élaborée par et pour les travailleurs paramédicaux, et il s'agit d'un produit véritablement fondé sur la collaboration et le consensus.
    Il y a environ 40 000 travailleurs paramédicaux au Canada, ce qui en fait le troisième plus grand groupe de fournisseurs de soins de santé au pays. Les responsabilités et les défis uniques auxquels sont confrontés les travailleurs paramédicaux et leur risque accru d'exposition au stress psychologique sont bien connus. Les dangers psychologiques auxquels les travailleurs paramédicaux sont régulièrement exposés au travail peuvent être de nature aiguë ou chronique et peuvent comprendre, sans toutefois s’y limiter, des facteurs de stress opérationnels comme des traumatismes, des blessures et des maladies graves, des crises de santé infantile, le décès, la violence et les menaces à leur vie même.
    De plus, des facteurs de stress organisationnels communs à de nombreux autres milieux de travail, comme une mauvaise communication, des problèmes liés à la paie et à la rémunération, des exigences émotionnelles élevées, un manque de soutien social de la part des collègues et de la direction, des contraintes physiques et une faible autonomie au travail peuvent entraîner des résultats négatifs. Il a également été démontré qu'il existe un lien entre ces facteurs de stress et le développement potentiel de divers types de problèmes de santé mentale.
    Ces facteurs de stress aigus et chroniques auxquels font face les travailleurs paramédicaux les exposent à un large éventail de problèmes de santé mentale, y compris, sans s’y limiter, le trouble de stress aigu, le trouble de stress post-traumatique, la dépression, l'anxiété, la colère et l'épuisement professionnel. Ces problèmes peuvent entraîner d'autres conséquences négatives comme le suicide, la consommation abusive d'alcool ou d'autres drogues, les comportements de dépendance, les difficultés relationnelles et l'absentéisme ou coïncider avec ces conséquences. En fait, 56 premiers intervenants se sont suicidés au Canada en 2017.
(1540)
    Cette importante nouvelle norme fournit aux organismes de services paramédicaux et à d'autres intervenants clés des conseils sur les pratiques exemplaires d'identification et d'évaluation des dangers et la gestion des risques pour la santé et la sécurité psychologiques auxquels font face les professionnels paramédicaux, ainsi que sur la promotion de leur santé et de leur sécurité psychologiques améliorées.
    Vous avez peut-être entendu parler le 29 janvier dernier du programme « Bell cause pour la cause ». De plus, la Fondation de la famille Rossy a également annoncé un don conjoint pour la création d'une norme nationale sur la santé mentale des étudiants de niveau postsecondaire, en vue d'appuyer la réussite des étudiants sur les campus partout au Canada. Ces organismes ont de nouveau engagé la Commission de la santé mentale du Canada à diriger le projet, et le Groupe CSA est actuellement en pourparlers avec eux pour appliquer son processus accrédité d'élaboration de normes à cette importante nouvelle norme. Comme la norme en milieu de travail, cet important document fournira des conseils aux universités, collèges et instituts canadiens pour promouvoir la réussite des étudiants grâce à une approche concertée de la santé mentale au sein du personnel, du corps professoral et des étudiants. Il comprendra des conseils sur les stratégies, les processus, les politiques et les responsabilités partagées des divers intervenants pendant toute la durée du cheminement d'un étudiant dans un établissement d'enseignement postsecondaire. Il tiendra compte du point de vue de l'élève à diverses étapes de sa progression dans l'établissement, reflétera les diverses voix représentées au sein du système scolaire et recueillera leurs commentaires, et portera sur tous les éléments clés d'un système de gestion de la santé et de la sécurité psychologiques.
    Comme vous l’avez constaté tout au long de cet exposé, le Groupe CSA collabore depuis longtemps avec des parties gouvernementales et des intervenants de l'industrie pour s'assurer d’élaborer en temps opportun des normes pertinentes et efficaces dans tous les secteurs qui composent le paysage canadien, y compris les soins de santé, la sécurité du public et celle des travailleurs.
    Compte tenu des connaissances qui émergent au sujet de l'impact négatif potentiel de la fonction de juré sur certains Canadiens, nous croyons qu'il est possible d'améliorer la vie de ceux qui sont appelés à exercer leur devoir civique en adoptant peut-être une approche systématique semblable à celle adoptée par d'autres secteurs en matière de santé et de sécurité psychologiques. Même s’il n’est pas possible d'éliminer tous les dangers associés à l'importante fonction des jurés, une approche fondée sur un système de gestion de la santé et de la sécurité psychologiques pourrait être axée sur la réduction des risques, la sensibilisation précoce et l'adoption de pratiques d'intervention fondées sur des données probantes et sur le soutien qui s’impose tout au long du processus.
    Cette approche de système de gestion pourrait servir de base à la rédaction d'une norme ou d'un guide des pratiques exemplaires sur la santé et la sécurité psychologiques des jurés. Si un tel document s'avérait un outil utile et si le Groupe CSA devait y participer, notre processus accrédité d'élaboration de normes garantirait qu'une représentation équilibrée des intervenants pertinents siégerait au comité chargé d'élaborer ledit document, y compris des experts en santé et sécurité, des spécialistes en santé mentale et des membres de la profession juridique.
    Je vous remercie de votre attention.
    Doug et moi serons maintenant heureux de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup.
    Mme Hannaford-Agor vient de se joindre à nous. Allez-y, je vous prie.
    D'accord. Je suis désolée d'avoir raté vos deux autres orateurs. Je pourrais toujours les voir en vidéo et j'adorerais les entendre.
    Je m'appelle Paula Hannaford-Agor et je suis directrice du Center for Jury Studies au National Center for State Courts. Notre siège social est situé à Williamsburg, en Virginie. Je suis ravie d'être invitée à prendre la parole devant le Comité cet après-midi.
    Pour ceux d'entre vous qui ne connaissent pas le National Center for State Courts, je préciserai que nous sommes un organisme sans but lucratif qui offre encadrement et assistance technique et qui mène des recherches pour les tribunaux des États et les tribunaux locaux dans l'ensemble des États-Unis sur pratiquement toutes les questions qui les touchent: droit criminel, droit civil, droit de la famille, technologie judiciaire ainsi que ce qui constitue mon champ d'expertise, la gestion du système de jury et le déroulement des procès par jury.
    J'aimerais prendre quelques minutes cet après-midi pour vous parler un peu de la recherche que notre organisme a effectuée sur la question du stress des jurés. Il s'agit en partie de recherches plus anciennes qui remontent au milieu des années 1990, que nous n'avons pas eu l'occasion de mettre à jour, mais dont les résultats n'ont pas changé de façon appréciable selon moi.
    Brièvement, voici ce que j'entends par stress des jurés. Lorsque nous parlons de stress dans le contexte de l'exercice des fonctions de juré, il peut s'agir d'un bon ou d'un mauvais stress. Nous savons notamment que le stress peut améliorer le fonctionnement psychologique et physiologique. Les jurés qui vivent un bon stress peuvent voir leur attention accrue et avoir une plus grande conscience de la preuve en jeu et de leur expérience en général. C'est en fait une bonne chose au plan normatif pour les jurés qui participent au système de justice.
    Le mauvais stress, quant à lui, est un stress qui persiste pendant des périodes excessives ou à des degrés élevés et qui peut, avec le temps, entraîner de l'anxiété ou de la dépression. Ce type de stress est en fait une sous-catégorie d'une forme de stress aigu. Nous parlons d'un événement soudain qui provoque une réaction émotionnelle ou physique qui est souvent perçue par la personne comme une perte de contrôle sur son environnement ou une perte de prévisibilité dans sa routine quotidienne. Pour la plupart des jurés, une fois l'exercice terminé, cette réaction émotionnelle ou physique accrue revient à la normale. Il n'y a habituellement pas d'effets graves ou permanents.
    En ce qui concerne les symptômes de stress éprouvés par les jurés, il s'agit pour la plupart de symptômes émotionnels mineurs: anxiété, irritation, agitation, parfois ennui. Tous les cas ne sont pas particulièrement intéressants. Un petit pourcentage de jurés éprouvera des symptômes émotionnels ou physiques majeurs qui peuvent se traduire par des cauchemars, des sentiments de détachement, des souvenirs troublants au sujet du procès ou des délibérations, ou encore de la dépression. Les symptômes physiques peuvent inclure des nausées, des palpitations cardiaques, des douleurs thoraciques, parfois l'essoufflement, une pression artérielle élevée, des maux de tête, une tension musculaire et une baisse de la libido.
    L'étude réalisée par le National Center au milieu des années 1990 a révélé qu'environ 70 % de tous les jurés qui se présentent devant les tribunaux d'État des États-Unis — nous parlons de 1,5 million de jurés par année — font état d'un certain stress lié à l'exercice de la fonction de juré. Trente pour cent n'ont déclaré aucun stress. Mais moins de 10 % des jurés ont déclaré des niveaux de stress très, très élevés. Généralement, les types de causes pour lesquelles on rapporte des cas de stress étaient les procès pour crime grave impliquant soit la peine de mort, soit l'emprisonnement à perpétuité, les causes impliquant des crimes contre des personnes, en particulier des enfants et les procès civils dans une moindre mesure, généralement s'il y avait beaucoup de blessures corporelles. Même parmi les jurés qui n'ont pas participé au procès — les gens qui se sont simplement présentés à un jury, mais qui n'ont pas été sélectionnés — environ 25 % ont déclaré éprouver un certain niveau de stress.
(1545)
    Quelles sont les causes de ce stress? Il est important de se rappeler notre définition: c'est un événement soudain qui provoque des sentiments de perte de contrôle et de prévisibilité. Le stress est simplement causé par la perturbation des activités quotidiennes des jurés. Le voir-dire au début de la sélection du jury, au cours duquel le juge et les avocats posent des questions parfois très personnelles, peut être très stressant. Il est certain que la preuve et le témoignage au procès sont parfois très émotifs et génèrent une réaction émotionnelle assez intense.
    Ensuite, il y a les restrictions imposées au comportement des jurés qui sont souvent séquestrés et à qui on interdit de quitter le palais de justice, quand ils ne sont pas isolés pendant la nuit dans un hôtel. Ils n'ont pas le droit de parler du procès à leur famille ou à leurs amis ni d'utiliser des outils comme Internet pour communiquer. Tout cela est source de stress et l'expérience des délibérations et du verdict peut certainement causer du stress.
    Il est important de se rendre compte que ce stress est cumulatif. Il commence tout simplement lorsque les jurés franchissent la porte de ce lieu souvent peu familier qu'est le palais de justice et il se poursuit tout au long du procès.
    Les procès particulièrement stressants sont ceux qui durent très longtemps, plus que quelques jours. J'ai mentionné les procès pour crime grave. Ceux qui suscitent beaucoup d'attention dans les médias ont tendance à être très stressants. En fait, les jurés sont parfaitement conscients de leur propre rôle dans le système de justice. Les procès qui impliquent des preuves ou des témoignages très désagréables, horribles ou dérangeants sont stressants, tout comme les questions ou les preuves qui ont un impact personnel ou un sens pour les jurés individuels. Toutefois, ces jurés se retrouveront rarement membres de tels jurys. En général, les jurés qui ont des réactions personnelles seront détectés lors du processus de sélection et ne seront tout simplement pas choisis comme jurés de première instance dans cette affaire. Fait intéressant, les procès ennuyeux sont en fait extrêmement stressants pour de nombreux jurés.
    En général, nous essayons de sensibiliser les juges aux problèmes de stress vécu par les jurés et à ce qu'ils peuvent faire dans le cadre d'un procès individuel pour tenter de réduire au minimum l'incidence du stress sur les jurés. Dans le cadre de votre comité, cependant, je pense que vous vous intéressez davantage aux options de traitement après coup.
    Aux États-Unis, ces traitements n'ont été entrepris que sur une base ponctuelle et individuelle. J'ai pu entendre tout à l'heure certains des témoignages de la professeure Thomas et, comme elle l'a dit, il arrive parfois qu'un juge particulièrement attentif se rende compte que les jurés ont des problèmes et qu'il suggère une intervention directe. Toutefois, la plupart des tribunaux ne sont pas suffisamment bien soutenus pour être en mesure de fournir ces types de services.
    Nous avons examiné des options de traitement en fonction du degré de stress encouru: pour des causes modérément stressantes, nous recommandons simplement de fournir de l'information aux jurés. De nombreux tribunaux distribuent maintenant des dépliants sur les moyens de s'en sortir après avoir été juré. On y retrouve de l'information sur l'intérêt de normaliser l'expérience de juré et on y affirme par exemple: « Vous venez de vivre un événement assez stressant à cause de quoi vous pouvez ressentir ce type de symptômes. Si c'est le cas, sachez que ce sont des réactions normales à la suite d'un procès et voici quelques techniques qui pourraient vous aider: ne fumez pas, ne prenez pas d'alcool, détendez-vous, faites de la respiration profonde, du yoga, de l'exercice » ou des activités qui vous permettront de revenir à la normale. Ce sont des mesures suffisantes pour la plupart des jurés.
    En fait, nous encourageons les tribunaux à faire en sorte que les jurés échangent leurs coordonnées. Ici, aux États-Unis, rien n'interdit aux jurés de première instance de parler à quiconque après le procès. Nous avons constaté que le fait de parler aux autres jurés qui ont vécu le même procès peut constituer un énorme appui pour eux.
(1550)
    Les deux autres types de traitement habituellement réservés aux procès beaucoup plus graves sont les débreffages de jurés. Il s'agit le plus souvent de très courtes séances de counseling de groupe qui ont lieu avec les jurés, en général immédiatement après la fin du procès. Elles sont normalement dispensées par un psychologue qualifié ou un autre professionnel du counseling, et sont semblables au type d'aide offert aux premiers intervenants — policiers, pompiers et personnel des services d'urgence — après un accident ou un événement traumatique. Encore une fois, ces séances aident les jurés à gérer un peu leurs émotions en leur donnant des conseils sur la façon de gérer le stress au cours des jours ou des semaines à venir et à trouver de l'aide supplémentaire si les symptômes ne disparaissent pas.
    Aux États-Unis, un certain nombre de tribunaux ont conclu des contrats avec des prestataires de services de santé mentale ou des bureaux d'aide aux victimes de leur localité pour fournir ces types de services au besoin. Ils exigent que les professionnels soient formés en counseling.
    L'autre modèle consiste simplement à offrir aux jurés un counseling individuel après coup. Les tribunaux fédéraux du pays le font par l'entremise du Programme fédéral d'aide aux employés de la Division de la santé et des services sociaux. Je serais heureuse d'envoyer au Comité un peu plus de renseignements à ce sujet, mais disons qu'en général, dans les six mois suivant le procès, les jurés ont la possibilité de rencontrer un professionnel fédéral de la santé mentale dans le cadre d'une séance de counseling individuel. Nous avons recommandé aux États d'adopter ce modèle. Je ne sais pas si cela a déjà été fait. Il s'agit d'un programme relativement nouveau, qui a probablement débuté en 2012-2013 et qui n'a donc pas encore été largement reproduit.
    Voilà, ce sont les observations que je voulais formuler. C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.
(1555)
    Merci beaucoup, madame Hannaford-Agor. C'est fort utile.
    Nous avons maintenant entendu nos trois témoins et nous allons passer aux questions du Comité. Nous commencerons par M. Nicholson.
    Merci beaucoup et merci aux trois groupes qui ont témoigné ici aujourd'hui. C'est très précieux pour le Comité. C'est la première fois que le Parlement canadien se penche sur cette question en particulier.
    Je vais commencer par vous, professeure Thomas. Vous avez dit que vous nous aviez envoyé la nouvelle demande de convocation du jury. Juste pour que vous le sachiez, nous l'avons reçue, mais elle est en cours de traduction. Je suis impatient d'en savoir davantage.
    Vous avez dit que personne ne devrait être exclu. Plus tôt cette semaine, des témoins nous ont dit que certaines personnes sont en fait exclues parce qu'elles n'ont pas les moyens de faire partie d'un jury et que leurs revenus sont essentiels pour assurer leur vie quotidienne. Est-ce un phénomène que vous avez observé? Vous n'avez pas abordé cette question directement, mais j'aimerais avoir vos commentaires à ce sujet.
    Oui, bien sûr. C'est un point très important. Je ne voulais pas dire qu'il ne devrait pas y avoir d'excuses pour les jurés. Il est justifié d'excuser ceux qui ont des motifs légitimes, comme des médicales pour lesquelles il serait difficile d'exercer la fonction, ainsi que des responsabilités familiales. Certaines personnes ne sont pas en mesure de consacrer du temps à l'exercice de la fonction de juré. La question du revenu est particulièrement pertinente, disons, pour les travailleurs autonomes. Les jurés en Angleterre sont rémunérés pour leurs services. Ils sont payés pour la perte de leurs revenus, mais la compensation maximale n'est que d'environ 100 £ par jour.
    Pour certains, ce montant est inférieur au revenu, alors que pour d'autres, c'est plus. Mais dans tous les cas, les jurés doivent faire valoir devant le bureau central de convocation des jurés qu'ils ont une raison financière légitime de ne pas faire partie d'un jury.
    Pour en revenir à la nouvelle demande de convocation du jury, vous avez dit, dans votre examen initial de la question, que les gens étaient désorientés par rapport au système. Ils ne savaient pas quelles étaient leurs responsabilités. La nouvelle demande de convocation du jury a-t-elle fait une différence par rapport aux recherches que vous aviez effectuées?
    Oui, cela a fait une différence considérable dans la compréhension qu'ont les jurés de leurs responsabilités juridiques.
    En Angleterre, le Parlement a récemment adopté une loi criminalisant un certain nombre d'activités que pourraient exercer des jurés. Dans le passé, il existait des règles de common law qui faisaient de diverses actions des jurés une infraction criminelle, mais elles n'ont jamais été imposées par la loi. Nous devions nous assurer de la bonne compréhension des jurés. L'un des principaux problèmes auxquels nous faisions face était de nous assurer que les jurés comprennent qu'ils ne peuvent pas utiliser Internet pour faire des recherches sur leur dossier, chercher de l'information sur les accusés, etc. Il s'agit d'une question à laquelle sont confrontés tous les pays qui ont adopté le système de jugement par jury.
    Il s'agissait là d'une question particulièrement préoccupante pour le juge en chef, le Lord Chief Justice, qui a présidé un certain nombre de procès dans lesquels des jurés ont été accusés d'outrage au tribunal, condamnés et emprisonnés, ce qui semble être une mesure assez musclée. Nous voulions nous assurer d'avoir trouvé une façon de faire en sorte que le plus grand nombre possible de jurés comprennent clairement leurs responsabilités. S'ils décident alors d'ignorer ces responsabilités, il y a davantage de motifs de poursuites.
    Cette nouvelle demande de convocation du jury signifie maintenant que presque 100 % des jurés comprennent leurs responsabilités juridiques.
(1600)
    Je vous en félicite.
    Madame Hannaford-Agor, vous avez dit que pour certaines personnes, le stress était en partie dû à la perturbation de leur routine quotidienne.
    Laissez-moi vous poser la même question. S'agit-il de perturbations financières dans leur vie, ou vos études à l'échelle de l'État indiquent-elles que ce n'est pas un sérieux problème?
    Les difficultés financières sont un gros problème partout, je crois. Je suis particulièrement heureuse d'apprendre que l'Angleterre et le pays de Galles paient jusqu' à 100 livres par jour. C'est beaucoup plus que ce que la plupart des tribunaux d'État paient aux États-Unis. Généralement, la rémunération moyenne des jurés est d'environ 22 $ par jour dans tous les États et certains d'entre eux versent aussi peu que 10 $ par jour, ce qui est à peine suffisant pour prendre un repas chez McDonald's ou stationner sa voiture.
     Il y a beaucoup de jurés qui n'ont pas les moyens d'exercer leur fonction si le procès doit durer plus d'un jour ou deux. Ils seraient exclus des procès plus longs. En général, ils peuvent venir au moins une journée. La plupart des gestionnaires de jurys les inciteront à prendre une journée de congé ou à solliciter un quart de travail supplémentaire. Nous tentons de trouver des mesures d'adaptation pour qu'ils soient en mesure d'exercer leur fonction au moins durant cette journée.
    Aux États-Unis, la plupart des procès ne sont pas très longs. Un procès typique dure probablement de un à trois jours et de nombreuses causes ne durent qu'une journée. C'est une journée de salaire perdu. Mais souvent, plusieurs de ceux qui ont un salaire horaire rattrapent leur retard en prenant un quart de travail supplémentaire ou en s'y prenant autrement.
    Vous avez piqué mon intérêt quand vous avez mentionné que des dépliants sont remis aux jurés pour les aider une fois qu'ils ont terminé leur travail. On y donne un certain nombre de conseils. Je ne fais pas la promotion du tabagisme ou de quelque chose en particulier, mais je suis étonné que l'on conseille de ne pas fumer ou de ne pas boire d'alcool. Pour certaines personnes, ne serait-ce pas leur façon d'essayer de se détendre après un procès devant jury?
    C'est peut-être le cas, mais ce n'est qu'un exemple de la façon de traiter le stress. La caféine, l'alcool ou la nicotine peuvent faire monter le niveau d'anxiété.
    Merci.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Boissonnault.
    Merci, monsieur le président.
    Professeure Thomas, j'ai appris avec intérêt que vous venez d'Oxford. Il y a deux semaines, j'étais tout près pour prononcer un discours à Corpus. Je suis un Corpuscule. Je faisais un discours sur le bien-être des étudiants à l'occasion du cinquième centenaire de l'établissement. Cela m'a fait réfléchir à ce que nous faisons pour leur mieux-être une fois que les étudiants quittent l'université et commencent à exercer leur profession, et à ce que nous leur demandons de faire dans la société civile.
    J'ai donc été intéressé par votre rapport. Votre recherche a-t-elle révélé d'autres sources de stress pour les jurés? Dans l'affirmative, quelles mesures le gouvernement britannique prend-il pour atténuer ces formes de stress? Et le personnel? Et les gens qui conduisent les procès? Existe-t-il des mécanismes au sein du gouvernement britannique pour aider ces personnes?
    Puis-je tout d'abord vous dire que je viens d'être informée que ma communication prendra fin à 10 heures? Si je disparais dans une heure, ce sera pour cette raison.
    Ma recherche visait principalement à vérifier l'efficacité de cette nouvelle demande de convocation du jury, mais aussi à déterminer dans quelle mesure nos jurés actuels réclament des soins après coup. Nous n'explorions pas vraiment les sources de stress, mais plutôt la mesure dans laquelle les jurés ressentent le besoin d'obtenir un soutien confidentiel après le procès.
    Comme je l'ai dit, la conclusion générale est que l'écrasante majorité des jurés ont affirmé qu'ils n'ont pas besoin d'aide. Cependant, si un tel service d'assistance téléphonique général existait à leur intention, presque la majorité des jurés ont mentionné qu'ils s'en serviraient ou pourraient s'en servir pour discuter de sujets pouvant être liés au stress, par exemple, de ce qu'ils pensent de leur participation au jury ou de la façon de traiter avec d'autres jurés. Cela indique un certain niveau de stress, je crois. Ils voulaient aussi utiliser la ligne d'assistance téléphonique pour des raisons qui ne sont pas liées au stress, par exemple pour des questions de procédure judiciaire comme la façon de régler les dépenses, connaître le moment où elles allaient être payées, etc.
(1605)
    J'ai des questions qui dépassent peut-être le cadre de vos recherches, mais dont certaines me semblent surgir ici au Canada.
    Dans quelle mesure le système fonctionne-t-il encore aujourd'hui selon l'approche britannique de la « maîtrise de ses émotions », qui consiste à faire son devoir civique, à aller de l'avant, à prendre une bonne tasse de thé et à ne pas s'en faire?
    Je crois que c'est un mythe. De nos jours, la population de l'Angleterre et du pays de Galles est très cosmopolite. Je ne dirais pas que les jurés soient tous des Britanniques impassibles typiques. De plus en plus, les jurés demandent de l'information, du soutien et autres. À mon avis, cela indique clairement qu'ils ne veulent plus assister passivement au processus.
    Je voudrais cependant souligner une chose. Vous avez soulevé le problème du soutien au personnel. Je vous dirai qu'ici, les juges éprouvent un besoin croissant de recevoir du soutien à leur mieux-être, car dans nos tribunaux de la Couronne, ils font face à ce que l'on pourrait appeler « un régime quotidien de causes portant sur le sexe », ce qui les trouble toujours plus profondément.
    Je leur parle régulièrement des jurys au Judicial College. J'y mentionne l'organisme Samaritans qui soutient les jurés, et plusieurs juges m'ont demandé si nous pourrions créer une ligne d'aide téléphonique pour les juges. La magistrature examine cette possibilité.
    Merci beaucoup. J'admire beaucoup votre excellent travail.
    Je me demande si nos collègues de l'Association canadienne de normalisation pourraient jeter un coup d'oeil sur leurs excellentes normes sur la gestion de la santé et de la sécurité au travail pour y cerner les lacunes éventuelles. Avez-vous examiné cette question? Est-ce que le personnel et les gens chargés des procédures judiciaires vous ont parlé du stress qu'ils subissent et du fait que le système n'a pas été conçu pour en tenir compte?
    Vous parlez ici du respect de la santé psychologique et des systèmes de sécurité?
    Oui, c'est cela.
    L'Association élabore la norme. Nous collaborons avec nos partenaires. Dans ce cas-ci, il s'agit de la Commission de la santé mentale du Canada. Ces cinq dernières années, depuis que la norme est en vigueur, la Commission a mené une étude de cas auprès de 40 organismes participants, des organismes du gouvernement fédéral qui traitent avec les petites et moyennes entreprises.
    Le modèle de cette norme est en évolution constante. Par conséquent, un seul cycle ne suffit pas. Cette norme est un processus, et non une destination. Après avoir utilisé la norme une première fois pour repositionner certains éléments, il faut évaluer leur rendement. C'est un processus d'amélioration sans fin.
    Nous sommes convaincus d'y avoir posé tous les éléments. Les plus grands experts en la matière l'ont élaborée, mais elle est en évolution constante. Nous réévaluons continuellement les normes afin d'y apporter les améliorations nécessaires. Nous avons terminé le document générique sur les lieux de travail. Nos partenaires l'examinent justement aujourd'hui à Toronto. Le document sur la santé des étudiants devrait sortir, je dirais, dans deux ou trois mois.
    J'aurais besoin de me rafraîchir la mémoire au sujet du nombre de premiers intervenants qui se sont suicidés. Je voudrais me rappeler ce chiffre exact pour y faire référence plus tard. À quelle période ce nombre s'applique-t-il?
    C'était l'année dernière.
    Vous avez dit 56?
    Cinquante-six, oui.
    Quand vous parlez de travailleurs de première ligne, à quelles professions faites-vous référence?
    J'ai lu cela dans un rapport ce matin. Les auteurs ne mentionnent que le groupe des premiers intervenants, alors je suppose qu'il s'agit des ambulanciers, des pompiers, et...
    Des services médicaux individuels?
    Oui, exactement.
    Merci beaucoup.
    Me permettez-vous d'ajouter une observation à cela?
    Bien sûr, monsieur Morton.
    Candace a indiqué dans son allocution que 20 % des téléchargements de la norme provenaient d'organismes policiers et judiciaires. Elle a également cité un rapport que la Commission a publié en 2015 et qui mentionne plus de 40 organismes qui ont adopté cette norme ou des sections de cette norme. Nous nous ferons un plaisir de consulter ce rapport afin de voir quels organismes ont téléchargé la norme et nous en informerons la greffière, si cela peut vous être utile.
(1610)
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup, monsieur Morton.
    Monsieur Rankin.
    Merci, monsieur le président. Je remercie les témoins pour leurs allocutions très intéressantes.
    Je voudrais reprendre la question de M. Boissonnault si vous me le permettez, madame Sellar.
    Vous nous avez dit que l'Association canadienne de normalisation collabore avec la Commission de la santé mentale du Canada pour élaborer ces normes, qui s'appliqueraient à différentes situations. Vous avez parlé d'étudiants, du travail qui vous occupe à l'heure actuelle, de travailleurs et autres. Pourriez-vous nous parler un peu plus de ce que vous comprenez des traumatismes que subissent les jurés? Votre norme serait-elle différente, ou contiendrait-elle seulement des fragments tirés de diverses normes qui s'appliquent à ces autres contextes?
    Nous avons eu une conversation très similaire avec des représentants de l'Association des paramédics du Canada qui sont venus nous demander de produire un document pour leur secteur à partir du document générique sur les lieux de travail. Ce dernier ne traite pas avec précision du trouble de stress post-traumatique, par exemple, ou de contextes traumatisants auxquels les ambulanciers sont exposés. Je n'ai aucune expertise des jurys, mais je suppose que les jurés qui assistent à des affaires judiciaires graves sont exposés à un grand nombre des images et des expériences qui traumatisent les ambulanciers. J'y vois quelques éléments communs. Il me semble que le contenu général serait assez similaire. Les jurés auraient des besoins particuliers qui distingueraient leur norme, bien entendu.
    C'est très utile.
    Madame Thomas, vous nous avez parlé de l'organisme Samaritans qui offre partout au Royaume-Uni, notamment au pays de Galles, un service téléphonique sans frais que je trouve fascinant. La géographie canadienne est gigantesque; elle s'étend sur quatre fuseaux horaires et demi. Il serait excellent de pouvoir offrir un service similaire aux jurés pour atténuer leur stress. Nous pourrions atteindre les jurés de toutes les régions.
    Je voudrais d'abord que vous nous donniez un peu plus de détails sur ce service. Ensuite, vous avez indiqué qu'il vous était difficile de faire comprendre au public que ce service n'est pas uniquement une ligne téléphonique de prévention du suicide. Comment veillez-vous à ce que ce service ne se limite pas à cela?
    Votre question est très intéressante. Au Royaume-Uni, les gens pensent que s'ils ont des pensées suicidaires, ils doivent appeler les Samaritans. Pendant des années, on plaçait des dépliants dans les salles des jurés pour les inciter à appeler les Samaritans s'ils ressentaient le besoin de parler à quelqu'un. Oui, les Samaritans n'offrent pas leurs services uniquement aux personnes suicidaires, mais c'est la perception du public.
    Tout d'abord, les résultats de ma recherche indiquent que la plupart des jurés ne remarquent même pas ces dépliants. Ils les laissent dans la salle sans même les lire. Même si nous leur expliquions ce service, ils hésiteraient à appeler les Samaritans de crainte de leur faire perdre du temps en leur parlant du stress que leur service dans un jury leur cause. Pour corriger cela, il suffirait de changer le nom de l'organisme. Les résultats de ma recherche indiquent que si l'on appelait ce même service simplement « Ligne d'aide aux jurés », un plus grand nombre de personnes appelleraient.
    Nous allons nous occuper de cela très bientôt, je crois, mais en attendant, nous avons ajouté à la demande de convocation du jury un texte qui indique clairement que les Samaritans sont prêts à aider n'importe qui et à parler de n'importe quoi, même si le problème semble trivial. Nous y indiquons aussi que quiconque sert dans un jury au Royaume-Uni peut demander aussi des services de counseling sans frais auprès du National Health Service. La plupart des jurés ne le savaient pas.
    Pendant que vous répondiez, je me disais que des dépliants déposés dans la salle des jurés ne seraient pas très efficaces, mais que peut-être les téléchargements dont ont parlé les témoins de l'Association canadienne des normes, reliés au numéro d'une ligne téléphonique, indiqueraient clairement aux jurés que le service n'est pas uniquement offert aux personnes suicidaires, mais qu'il s'agit, comme vous le disiez, d'une ligne téléphonique et d'un site Web qui s'adressent spécialement à eux.
    C'est une excellente idée. Les résultats de notre recherche indiquent que la demande de convocation du jury ne serait efficace qu'à moitié si on la laissait dans la salle des jurés. En outre, on ne la remet qu'aux personnes assermentées pour faire partie d'un jury. En fait, le juge la remet à ces jurés à l'occasion de son discours d'ouverture au jury. Cela donne aux jurés l'impression que ces renseignements sont beaucoup plus importants et aussi plus accessibles.
(1615)
    Si vous me permettez, ma dernière question s'adresse à Mme Hannaford-Agor.
    Quand vous nous décriviez votre expérience au Center for Jury Studies dans les tribunaux d'État, il nous a semblé que vous nous disiez que le problème n'est pas aussi grave que nous le pensons. Il est évident que le stress s'accumule, mais en vous écoutant, j'ai eu l'impression que cela ne crée pas un problème très grave. Les résultats de l'un de nos chercheurs, M. Alain Brunet de l'Institut universitaire en santé mentale Douglas, indiquent qu'entre 10 et 15 % des jurés exposés à des éléments de preuve sordides souffrent de stress post-traumatique.
    Pensez-vous que ce pourcentage assez général de jurés souffrant de TSPT est similaire aux États-Unis?
    Désolée. Le système d'éclairage semble devenir fou, je ne sais pas ce qu'il a.
    Nous vous voyons encore de temps en temps.
    Pour répondre à votre question, je suis renversée de vous entendre, parce que nous avons aussi découvert qu'environ 10 % des jurés souffrent de niveaux élevés de stress. La similarité de ces pourcentages en dit long. Leurs symptômes ne sont peut-être pas cliniquement ceux du TSPT, mais ils sont similaires ou indiquent une forme bénigne de TSPT.
    Je crois que cela dépend du type de causes auxquelles nous assistons. Aux États-Unis, le nombre de causes déposées devant les tribunaux a chuté. En droit pénal, les parties concluent des négociations de plaidoyer et du côté civil, on conclut des ententes pour éviter les tribunaux. Je n'ai pas de chiffres à vous présenter là-dessus aujourd'hui, mais je crois que les jurés sont exposés à un bien moins grand nombre de causes traumatiques qu'ils ne l'étaient il y a 20 ans quand nous avons entamé notre étude.
    Par conséquent, l'incidence du stress chez les jurés n'est probablement pas aussi élevée qu'elle l'était il y a 20 ans. Toutefois, dans le cas des causes entraînant la peine capitale où l'on présente des éléments de preuve atroces, 10 % des jurés subiraient probablement ce type de stress.
    Je vous remercie tous beaucoup.
    Monsieur Fraser.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup de vous être joints à nous aujourd'hui.
    Madame Hannaford-Agor, je vais commencer par m'adresser à vous. Je suis désolé que la salle dans laquelle vous êtes semble secouée par le stress alors que nous discutons justement de stress aujourd'hui. J'espère que vous réussirez à répondre à toutes mes questions sans que la situation ne devienne trop dramatique.
    Vous avez mentionné une séance de verbalisation à la fin du procès et suggéré que l'on engage un psychologue pour aider les personnes présentes à comprendre ce qu'elles venaient d'endurer. Pensez-vous que dans la pratique, il serait logique d'obliger les jurés à participer à une telle séance, ou serait-ce trop leur imposer? Vous savez vous-même que chaque personne réagit différemment à ce genre de chose. Certaines s'en sortent sans trop de perturbation alors que d'autres ont besoin d'un peu plus d'attention, voire d'un peu de counseling.
    Que pensez-vous de cela? Cette séance devrait-elle être obligatoire ou non? Comment se dérouleraient ces séances, selon vous?
    Ces séances de verbalisation après un procès ont suscité des critiques et présentent quelques inconvénients. En effet, après un long procès particulièrement difficile, les jurés sont épuisés et rendus quelque peu insensibles par leur expérience. Si l'on tient cette séance juste après le procès, un grand nombre d'entre eux n'en retireront pas grand-chose. Ils préféreraient ne pas y participer.
    En général, ils ne s'aperçoivent que deux ou trois jours plus tard, ou même une semaine ou plus après le procès, que la cause continue à les ébranler. Ils continuent à y penser très souvent, certains en font même des cauchemars, et leur tension artérielle monte. Ils comprennent alors qu'ils ont besoin d'aide. Cela ne leur vient pas à l'esprit immédiatement à la fin du procès.
(1620)
    Je vais passer à un autre problème. Certains jurés qui ont déjà témoigné devant nous dans le cadre de cette étude nous ont dit qu'à la fin du procès, ils avaient l'impression qu'on les congédiait en les remerciant simplement de leur service sans plus. S'ils avaient rendu un verdict de culpabilité, on ne leur disait pas ce qui se passait après; on ne les informait pas sur la sentence et sur le reste. Avez-vous des observations à ce sujet? Serait-il bon pour les jurés qu'on leur dise comment se déroule la cause après leur service?
    En fait, de nombreux juges des tribunaux d'État font l'effort de rencontrer les jurés à la fin du procès, non pas à un endroit semi-officiel, mais dans un lieu qui paraît moins officiel que la salle du tribunal. Ils le font pour remercier les jurés d'avoir servi et pour répondre à toutes les questions auxquelles ils peuvent répondre. Il est évident qu'ils ne peuvent pas divulguer certaines choses aux jurés, mais les jurés ont beaucoup de questions à poser. Les juges qui font cela régulièrement nous ont dit qu'ils apprennent beaucoup des jurés et que les jurés sont reconnaissants du fait que les juges tiennent compte de leurs sentiments.
    En général, ces juges leur donnent une idée de ce qu'ils devraient faire s'ils éprouvent des difficultés après le procès, surtout si la cause était ardue. Ils leur disent qu'ils peuvent s'adresser à la cour. De nombreux jurés disent qu'ils désirent savoir comment la cause se poursuit. Si la condamnation a lieu deux ou trois semaines ou plusieurs mois plus tard, les jurés veulent savoir comment la cause se termine, alors nous nous efforçons de leur envoyer des avis sur les prochaines audiences et autres.
    En outre chez nous, comme nous avons le Premier Amendement et que les médias vont souvent interviewer les jurés, surtout lorsque l'affaire a fait les manchettes, nous leur disons à quoi ils doivent s'attendre des médias. Nous leur disons qu'ils ne sont pas obligés de parler aux journalistes. Nous leur donnons quelques conseils pratiques pour régler certains problèmes auxquels ils se heurtent après un procès, comme des difficultés avec leurs employeurs, par exemple, qui ne sont pas heureux que leurs travailleurs se soient absentés pour servir dans un jury, surtout si le procès a duré longtemps.
    Merci beaucoup.
    Cela m'amène à ma prochaine question, que je vais adresser à Mme Thomas. Le Code criminel canadien interdit aux jurés de divulguer toutes conversations, discussions et délibérations tenues pendant leur service. Je sais que la situation est différente aux États-Unis, mais au Royaume-Uni, il y a le sceau du secret que vous nous avez mentionné.
    D'après ce que nous disent nos témoins, le gouvernement envisage de modifier l'article 649 du Code criminel du Canada qui porte sur la divulgation des délibérations du jury. Il voudrait y ajouter une exception, comme l'a fait l'Australie, pour permettre aux jurés de discuter des délibérations à des fins thérapeutiques avec un conseiller en santé mentale. Savez-vous si l'on en a parlé au Royaume-Uni? Que pensez-vous d'une telle exception à la règle habituelle?
    Oui, nous en avons aussi parlé un peu ici. Nous interdisons aussi la divulgation de tout ce que les jurés ont dit et fait dans la salle des délibérations.
    Chez nous, le principe de confidentialité entre un thérapeute et son client résout le problème. Ce principe s'applique aussi à l'organisme des Samaritans. Évidemment que dans ce cas, la conversation est entièrement confidentielle. Le Samaritan ne saura jamais à qui il a parlé, et le client ne connaîtra jamais l'identité du Samaritan qui l'a aidé. En fait, il ne peut pas y avoir de poursuite pour atteinte à la vie privée à cause du principe de confidentialité.
    La seule exception à cette interdiction de divulguer ce qui se passe dans la salle des délibérations a trait aux enquêtes que l'on pourrait mener sur une allégation d'inconduite au sein du jury. Jusqu'à l'adoption récente de la loi, le tribunal n'avait pas l'autorisation d'enquêter sur une telle allégation.
(1625)
    Le principe de confidentialité ne rachète cependant pas la sanction pénale imposée à une personne qui a enfreint la loi. Je ne voudrais pas qu'un juré, même après avoir lu le Code criminel, craigne de se confier à un thérapeute. De ce point de vue, il ne me semble pas que le principe de confidentialité résolve entièrement le problème.
    Non, du point de vue purement juridique, cela ne résout pas entièrement le problème. Cependant, l'aspect pratique de ce problème ne me préoccupe pas autant que le fait d'offrir aux jurés, qui comprennent leurs responsabilités face à la loi, une occasion de parler de leur expérience en toute confidentialité après le procès.
    Merci beaucoup. Vous nous aidez énormément.
    Mesdames et messieurs, nous allons passer à des questions très brèves. Si vous avez une courte question, n'hésitez pas à lever la main, et je vous donnerai la parole.
    Je prie les témoins de répondre aussi brièvement que possible à ces questions.
    Monsieur Duvall.
    Merci beaucoup. Je suis désolé d'être arrivé en retard. Je ne fais que remplacer un collègue ici.
    Certains résidants de ma circonscription d'Hamilton m'ont confié que l'un des plus grands problèmes de la participation à un jury est la maigre indemnisation des jurés, ou l'argent qu'ils perdent en servant. L'indemnisation est très, très insuffisante. Les gens tiennent à faire leur devoir de citoyens. Ils tiennent à aider le gouvernement dans le cadre du système judiciaire. Toutefois, ce service leur occasionne des dépenses comme les déplacements, la garderie d'enfants, la perte de salaire, qui compliquent leur vie.
    Je ne sais pas si les témoins auraient quelque chose à nous dire à ce propos. Pensez-vous qu'en toute équité, on devrait rembourser la perte de salaire ou toute autre dépense qu'entraîne la participation à un jury?
    Je ne sais pas qui pourrait répondre à cette question.
    Madame Hannaford-Agor, à vous la parole.
    Je vais ouvrir la discussion. Aux États-Unis, huit États, je crois, ont adopté une loi exigeant que les employeurs continuent à rémunérer pendant une période donnée les employés convoqués comme jurés. En général, ils doivent les payer pendant trois à cinq jours, ce qui correspond à une semaine de service dans un jury. Cela s'applique à 90 ou 95 % des procès qui ont lieu aux États-Unis. Les employeurs en assument le fardeau, principalement parce qu'ils en tirent avantage en faisant preuve de conscience sociale. C'est la justification que donnent ces États. Huit États imposent cela à l'heure actuelle.
    En outre, l'Arizona a établi un fonds spécial pour les procès qui s'étendent sur plus de cinq jours. Les jurés reçoivent un remboursement de leur salaire d'un maximum de 300 $ par jour. Cela dédommage tous les jurés, sauf ceux dont le salaire est très élevé. Ce fonds est alimenté par les droits de dépôt en cour civile. Je crois qu'en Arizona, ce dépôt est de 15 $. L'État réussit ainsi à autofinancer ce fonds, qui permet aux jurés de servir à des procès qui peuvent durer un ou même plusieurs mois.
    Merci pour votre réponse. J'ai une petite question de suivi. Vous avez indiqué que chaque État suit une méthode différente. Pourquoi n'applique-t-on pas cela de façon égale dans tout le pays?
    Nous sommes aux États-Unis, où les droits des États sont importants. La loi fédérale ne se mêle pas des règlements que les États fixent sur l'indemnité que les employeurs doivent verser.
    Je comprends. Merci.
    Merci beaucoup. Au Canada aussi, ces règles relèvent des provinces.
    Je voudrais juste poser à Mme Thomas une question sur les Samaritans. Le gouvernement du Royaume-Uni a-t-il signé un contrat avec l'organisme Samaritans pour engager ses services? Les membres de l'organisme reçoivent-ils une formation spéciale sur les jurés? Comment ce service fonctionne-t-il?
(1630)
    Il n'existe pas de contrat entre le gouvernement et les Samaritans parce que, comme je vous l'ai dit, ceux-ci se mettent à la disposition des gens qui les appellent, pour quelque raison que ce soit, jour et nuit pendant toute l'année. L'organisme a même offert de collaborer avec le service judiciaire pour expliquer cela aux jurés.
    Votre question sur la formation axée sur les jurés est très intéressante. J'ai formé, au centre de Londres, un petit groupe de Samaritans qui s'intéressaient particulièrement aux jurés. Je leur ai expliqué les règles imposées aux jurés, dont la confidentialité, etc. Je leur ai décrit le type de personnes qui participent à un jury ainsi que le stress et les tensions qu'elles subissent souvent. Ce cours ne constituait qu'une première étape.
    J'espère qu'un jour, nous aurons un groupe distinct de Samaritans dûment formés qui répondront en tout temps et partout au pays à un numéro de téléphone distinct que l'on appellera « la ligne d'aide aux jurés », pour que ces appels ne soient traités que par des Samaritans formés à cet effet.
    Merci beaucoup.
    Madame Hannaford-Agor, j'ai une question à poser sur les États-Unis. Nous examinons à l'heure actuelle les programmes que différentes provinces ont établis pour offrir du counseling en santé mentale aux jurés après un procès. Savez-vous si des États ont établi un système par lequel les jurés reçoivent automatiquement, à la fin d'un procès, un avis les informant des soutiens qui leur sont offerts? Pouvez-vous nous recommander de meilleures pratiques appliquées dans un État?
    Malheureusement, la mise en oeuvre dans ce domaine ne fonctionne pas très bien, parce que chaque État fait les choses à sa façon. Le Texas et l'Alaska ont tous deux adopté une loi autorisant le greffier de la localité à créer un programme de soutien en santé mentale pour les jurés; cependant, cette disposition ne les oblige pas à le faire et ne leur affecte pas de fonds pour cela. Seuls certains tribunaux l'ont fait parce que ce problème inquiétait un juge ou un greffier, qui s'est efforcé d'y apporter une solution.
    Je le répète, cela dépend énormément de la formation judiciaire. On voit la création de ces programmes là où les juges et les membres du personnel de la Cour remarquent qu'un procès bouleverse particulièrement les jurés et savent que ces ressources existent. Ces services comportent souvent des lacunes. Même ceux qui existent n'attirent pas beaucoup de clientèle.
    J'ai une dernière question à vous poser, à vous qui êtes experte des enjeux qui concernent les jurés. Mme Thomas voudra peut-être compléter votre réponse après cela. Selon les discussions tenues ici au Comité, je crois que toutes les parties s'accordent sur le besoin de fournir du soutien aux jurés après le procès.
    Certains témoins nous ont parlé du besoin de fournir du soutien pendant le procès, de permettre aux jurés de se confier à des professionnels de la santé pendant un procès. On craint bien sûr que ces séances de thérapie n'influencent les jurés. Je voudrais savoir ce que vous pensez de cette question. À votre avis, si l'un des jurés indique pendant le procès que la cause le perturbe profondément, faudrait-il simplement le congédier et convoquer un suppléant, ou devrait-on lui permettre de se confier à un thérapeute?
    J'ai entendu des juges discuter de cela. Je crois qu'ici aux États-Unis, nous nous entendons tous sur le fait que l'intervention d'un thérapeute perturberait le processus de jury. Si un juré souffre d'un tel degré de stress, on en parle au juge, qui excusera le juré et convoquera un suppléant. Tous les autres commentaires que j'ai entendus soutenaient qu'il faudrait fournir des services une fois le procès terminé.
    En outre, pendant l'étape de sélection du jury, on s'efforce d'éliminer les personnes qui ne semblent pas avoir la stabilité émotionnelle nécessaire pour examiner les détails de la cause.
(1635)
    Merci.
    Madame Thomas, avez-vous quelque chose à ajouter à cela?
    Ici, l'opinion est exactement la même. Cette question souligne l'importance du personnel judiciaire pendant les procès. Le rôle du juge est important, bien sûr, mais les huissiers-audienciers et les shérifs sont bien placés pour remarquer si un juré éprouve des difficultés, pour les aider pendant tout le procès et pour signaler les problèmes au juge.
    Merci beaucoup.
    Avez-vous d'autres questions, mesdames et messieurs?
    Il semble bien que non. Je tiens à remercier les témoins de tout coeur. Votre aide nous a été extrêmement précieuse, et nous vous en remercions. Je tiens à remercier tout particulièrement nos invités des États-Unis et du Royaume-Uni, qui ont eu la gentillesse de faire part de leurs opinions aux Canadiens.
    La séance est levée.
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