[Français]
Monsieur le président, je vous remercie de nous donner l'occasion de discuter de notre rapport du printemps 2017 sur le soutien en santé mentale apporté aux membres de la Gendarmerie royale du Canada, ou GRC.
[Traduction]
En mai 2014, la GRC a lancé sa stratégie quinquennale en matière de santé mentale pour favoriser un milieu de travail sain et sécuritaire sur le plan psychologique et pour mieux soutenir ses employés. Dans cette stratégie, la santé mentale est définie comme un état de bien-être dans lequel la personne peut se réaliser, surmonter les tensions normales de la vie, accomplir un travail productif et fructueux et contribuer à la vie de sa communauté.
Notre audit visait à déterminer si les membres de la GRC avaient accès à des services de santé mentale qui répondent à leurs besoins. Nous avons examiné certains programmes et services de santé mentale rattachés à deux secteurs clés de la Stratégie en matière de santé mentale de la GRC, c'est-à-dire la détection et l'intervention précoces, ainsi que l'amélioration continue. Nous avons conclu que, dans l'ensemble, les membres de la GRC n'avaient pas accès à des services de santé mentale qui répondaient à leurs besoins.
La GRC a pris une importante mesure en lançant sa Stratégie en matière de santé mentale. Toutefois, elle n'a pas donné la priorité à la mise en oeuvre des programmes et des services de santé mentale ni affecté les ressources nécessaires pour les soutenir. Ces programmes et services n'ont donc été mis en oeuvre que partiellement.
Lors de notre examen d'un échantillon représentatif des dossiers, nous avons constaté que, même si 57 % des membres de la GRC avaient reçu facilement et en temps opportun les services de soutien en santé mentale dont ils avaient besoin, cela n'avait pas été le cas pour 16 % d'entre eux. Pour 27 % des membres, la GRC n'avait pas de dossier nous permettant de déterminer si les membres concernés avaient reçu l'aide dont ils avaient besoin au moment voulu.
Le soutien aux membres de la GRC ne se limite pas à leur donner accès à un traitement en santé mentale. Les superviseurs et le personnel des services de santé doivent aussi apporter aux membres un suivi et un soutien pendant qu'ils sont en congé de maladie et quand ils sont prêts à reprendre le travail. Toutefois, nous avons constaté que les superviseurs et le personnel des services de santé n'avaient pas toujours apporté un suivi aux membres en congé de maladie comme ils étaient censés le faire, et qu'ils n'avaient pas adéquatement soutenu les membres quand ils étaient prêts à reprendre le travail. Certains membres nous ont dit que ce manque de soutien avait aggravé leur problème de santé mentale et retardé leur retour au travail. Nous avons constaté qu'un membre sur cinq qui avait demandé de l'aide pour un problème de santé mentale auprès des bureaux des services de santé n'était pas retourné au travail ou avait choisi de quitter la GRC pour des raisons médicales.
[Français]
Enfin, nous avons constaté que la GRC n'avait pas d'indicateurs de rendement pour évaluer sa stratégie en matière de santé mentale et vérifier si elle fonctionnait comme cela avait été prévu pour répondre aux besoins de ses membres. La GRC n'avait pas de cadre d'assurance de la qualité. Elle n'a pas non plus fait de suivis de ses activités pour favoriser l'amélioration continue. La GRC n'a pas systématiquement recueilli ou communiqué de l'information sur les résultats des programmes et des services conçus pour appuyer la stratégie.
Pour que la stratégie réussisse, la GRC doit savoir si les programmes et les services en place répondent aux besoins de ses membres, s'ils sont efficaces par rapport au coût et s'ils réduisent les effets néfastes que les problèmes de santé mentale peuvent avoir sur la vie personnelle des membres et sur la GRC.
Ces constatations sont importantes parce que la force de la GRC provient de ses membres. Si l'organisme ne gère pas efficacement les problèmes de santé mentale de ses membres et ne les aide pas à retourner au travail, ceux-ci auront de la difficulté à remplir leurs fonctions, ce qui pourrait miner leur confiance envers la GRC et réduire l'efficacité de l'organisme. Finalement, les problèmes de santé mentale de certains membres peuvent nuire à la capacité de la GRC de servir et de protéger la population canadienne.
La stratégie en matière de santé mentale est importante pour la GRC, pour la population canadienne et pour le gouvernement dans son ensemble, et il faut qu'elle fonctionne. Les problèmes que nous avons relevés doivent être réglés pour assurer le succès de cette stratégie.
Celle-ci en est à sa troisième année de mise en oeuvre. La GRC a donc la possibilité d'apporter les améliorations qui s'imposent.
Nous sommes heureux de signaler que la GRC a accepté nos sept recommandations.
Monsieur le président, je termine ainsi ma déclaration d'ouverture. Nous serons heureux de répondre aux questions des membres du Comité.
Merci.
:
Monsieur le président, membres du Comité, mesdames et messieurs, bonjour et merci de me donner l'occasion de m'adresser à vous.
Mes commentaires seront, pour la plupart, en anglais, mais vous avez également la version française de ma déclaration devant vous.
[Traduction]
Tout d'abord, permettez-moi de remercier le Bureau du vérificateur général pour son rapport. À titre de commissaire, j'accorde beaucoup d'importance au bien-être des membres et des employés de la GRC. C'est également important pour l'organisation dans son ensemble. En effet, la santé de son effectif est, après tout, ce qui permet à la GRC de s'acquitter de son mandat. Alors que nous poursuivons la mise en oeuvre de notre stratégie en matière de santé mentale, les recommandations du BVG appuieront certainement nos efforts, et je suis convaincu que nos services continueront de s'améliorer. En fait, les services et les programmes en santé mentale doivent constamment évoluer. Par conséquent, nous avons accepté les sept recommandations du BVG et nous nous emploierons rapidement à les mettre pleinement en oeuvre.
J'aimerais toutefois souligner de manière respectueuse plusieurs domaines qui ont été négligés ou peut-être décrits dans une mesure inutilement négative dans les conclusions du rapport du BVG.
En 2014, la GRC a été l'un des premiers ministères fédéraux à adopter une stratégie complète de cinq ans en matière de santé mentale. Cette stratégie, dont la mise en oeuvre se poursuit à ce jour, contient cinq éléments clés, à savoir la promotion, l'éducation, la prévention, la détection et l'intervention précoces et l'amélioration continue.
De ces cinq éléments, seulement deux — la détection et l'intervention précoces, ainsi que l'amélioration continue — ont été examinés par le BVG. Par conséquent, la vérification n'offre pas une vue complète de tout le travail qui se fait à la GRC en matière de santé mentale.
La portée de la vérification comprenait les programmes, les services et les activités suivants: la formation En route vers la préparation mentale, le système de soutien par les pairs, les évaluations périodiques de santé, les bureaux des Services de santé de la GRC, les droits et les prestations de soins de santé de la GRC, et la gestion des cas d'incapacité. Toutefois, elle n'incluait pas des programmes et des activités clés comme les Services d'aide aux employés de Santé Canada, un service confidentiel offert à tous les employés de la GRC, 24 heures sur 24, sept jours sur sept; le programme des aumôniers de la GRC; le Programme de services en milieu de travail pour les membres; le travail des champions de la santé mentale, aux échelons national et divisionnaire; les efforts importants que l'organisation a fournis pour réduire la stigmatisation associée à la maladie mentale et le succès global de la stratégie en matière de santé mentale de la GRC.
Plusieurs des recommandations du BVG traitent de la gestion des invalidités des membres de la GRC. En raison de la date de la vérification, le BVG n'a pas pu évaluer le Programme amélioré de gestion de l'incapacité et des mesures d'adaptation que la GRC a lancé le 1er avril 2017, et auquel elle a consacré un investissement important de nouvelles ressources à partir de ses affectations existantes. En 2016, la GRC a affecté une somme de 4,8 millions de dollars en financement permanent pour le programme, y compris le financement de 30 conseillers en gestion de l'incapacité. À ce jour, nous avons embauché 25 conseillers en gestion de l'incapacité et 7 coordonnateurs de la gestion de l'incapacité.
Pour les besoins de sa vérification, le BVG a examiné un petit échantillon de dossiers médicaux de membres réguliers et de membres civils, à savoir 51 dossiers au total, sélectionnés en fonction des services reçus. Dans 37 des dossiers, le BVG a déterminé qu'il y avait suffisamment d'information aux dossiers pour évaluer si les membres avaient eu accès aux services de santé mentale en temps opportun. En effet, le BVG a déterminé que cette norme de service était atteinte pour 78 % des membres. Toutefois, les dossiers médicaux des membres ne rendent pas compte des mesures d'intervention précoce qui ne relèvent pas des Services de santé, par exemple les services de consultation confidentielle obtenus par l'entremise des Services d'aide aux employés. D'autre part, cet examen a été complété par des personnes qui n'ont pas l'expertise médicale nécessaire pour évaluer l'information contenue dans ce type de dossiers.
Le BVG a également enquêté des membres actifs et des membres en congé de maladie. Étant donné que la GRC n'en était qu'à la deuxième année de mise en oeuvre de sa stratégie en matière de santé mentale au moment de la vérification, un certain nombre des membres en congé de maladie interrogés n'étaient pas conscients des progrès accomplis par la GRC dans le soutien de ses membres qui souffrent de troubles de santé mentale. Par conséquent, les réponses de ces membres en congé de maladie depuis la période précédant la mise en oeuvre de la stratégie en matière de santé mentale pourraient ne pas avoir reflété la réalité courante de la GRC.
Les statistiques présentées par le BVG mettent l'accent sur les domaines à améliorer, mais dans l'ensemble, les statistiques sont relativement positives. Par exemple, le sondage révèle que 73 % des répondants en service actif estiment que les membres de la GRC ont facilement accès aux services et aux programmes de santé mentale au besoin, et que 75 % des répondants jugent que l'accès est rapide.
Par ailleurs, les résultats de l'examen des dossiers indiquent que quatre membres sur cinq — soit 80 % — en congé de maladie pour des raisons de santé mentale retournent au travail dans une capacité totale ou avec la prise de mesure d'adaptation.
Soyons francs, nous n'atteindrons probablement jamais un taux de retour au travail de 100 %, étant donné la nature des problèmes de santé mentale qu'éprouvent certains de nos membres, des problèmes qui peuvent nécessiter que certains membres aient besoin de prendre plus d'une période de congé de maladie. De plus, compte tenu du genre de travail confié à nos membres, on aurait tort de s'attendre à ce que tous les membres en congé de maladie puissent reprendre le travail ou puissent s'acquitter des mêmes tâches qui leur étaient confiées avant leur maladie.
La GRC s'est engagée à offrir la formation En route vers la préparation mentale à l'ensemble de ses 30 000 employés d'ici le 31 mars 2018. Déjà, cette formation fait partie du plan de cours de l'École de la GRC, et tous les nouveaux membres de la GRC ont reçu cette formation essentielle en santé mentale avant même d'avoir servi un seul jour en tant que policiers.
De plus, le programme de soutien par les pairs a aussi évolué ces deux dernières années. Les employés ont aujourd'hui accès à 442 coordonnateurs et conseillers du soutien par les pairs à l'échelle du pays, et d'autres s'y ajouteront dès juin 2017. Bien que la vérification ait conclu que la GRC n'a pas systématiquement ou complètement mis en oeuvre des programmes dans toutes les divisions, c'est un exemple positif que nos programmes continuent de croître.
Il est tout aussi important de souligner que la GRC ne refuse pas de services en santé mentale à ses employés. Même si le régime de prestations de soins de santé offert par la GRC comprend une variété de services en santé mentale, il ne les couvre pas tous. Nos médecins-chefs ne sont pas des médecins traitants et nous comptons sur les services médicaux et sur le soutien offerts par le régime public de soins de santé, au même titre que tous les autres Canadiens. La mise en oeuvre et le roulement d'un réseau de cliniques et de médecins traitants propre à la GRC nécessiterait énormément d'investissements et de ressources.
Dans son rapport, le BVG a indiqué que la GRC n'avait pas consacré suffisamment de ressources financières et humaines à l'appui des nouveaux programmes. Je tiens à souligner que la GRC a une équipe de services de santé dévouée qui fait un travail louable pour soutenir les membres de la GRC. La GRC reconnaît que des ressources supplémentaires sont nécessaires dans certains secteurs et nous procédons actuellement à une analyse approfondie de nos besoins en ressources, afin d'identifier un niveau de financement suffisant pour approvisionner adéquatement toutes les nouvelles initiatives découlant des recommandations du BVG, ainsi que les initiatives qui ne sont pas visées par la vérification.
Entre-temps, la GRC continue d'offrir à ses employés de nouveaux programmes et services en santé mentale. Cela comprend un atelier pratique de deux jours en intervention face au suicide et une formation en ligne sur la sensibilisation au suicide et sur sa prévention fournie par le Réseau canadien du savoir policier. De plus, on mène une étude longitudinale des cadets de la GRC sur 10 ans qui vise à cerner les variables susceptibles d'être associées au développement de traumatismes liés au stress opérationnel. Nous offrons également une stratégie de trois ans en matière de condition physique, ainsi qu'un programme de soutien par les pairs pour les traumatismes liés au stress opérationnel fondé sur des pratiques exemplaires d'Anciens Combattants Canada et du ministère de la Défense nationale et mené par la GRC, afin de fournir des évaluations, des traitements, des compétences en prévention et du soutien aux membres de la GRC qui souffrent d'un trouble de santé mentale lié à un traumatisme de stress opérationnel.
[Français]
En conclusion, je souligne que la GRC est déterminée à prendre soin de ses employés, y compris de leur santé mentale. Cela comprend aussi faire évoluer notre culture et toute attitude obsolète selon laquelle la maladie mentale est moins grave qu'une blessure physique. Nous travaillons fort pour nous assurer que tous les employés sont soutenus et qu'ils obtiennent les ressources et les services qui répondent à leurs besoins.
Mes collègues et moi sommes prêts à répondre à vos questions. Merci.
:
Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Je vous remercie d'être ici aujourd'hui.
Comme vous le savez, lorsque nous recevons ces rapports du vérificateur général, nous examinons toujours ceux que nous voulons examiner en premier et ceux sur lesquels nous aimerions personnellement insister.
Je suis très troublé lorsque je pense que la stratégie en matière de santé mentale a été proposée en 2014 et qu'il y avait toujours des lacunes et des problèmes omniprésents au moment de la vérification. Je suis heureux de constater qu'il y a eu des progrès, mais notre comité s'est déjà penché sur cette situation.
L'une des choses qui reviennent souvent, c'est que de nombreux ministères ont établi des plans. Ils mettent en oeuvre un plan stratégique et ils se dotent d'une vision admirable. Le plan stratégique existe, mais il n'y a aucun plan pour le mettre en oeuvre, et il n'y a donc pas de progrès. Je suis toujours très étonné de constater que cela se produit dans tous les cas, et de la même façon.
Avant de poser quelques questions à M. Paulson, j'aimerais que le vérificateur général commente les propos qu'il a écrits dans la section « À propos de l'audit » de son rapport. En effet, vous avez dit: « La direction de la GRC a refusé de confirmer que les constatations figurant dans le présent rapport étaient fondées sur des faits, en raison d'un désaccord concernant l'approche utilisée pour rendre compte des statistiques provenant de l'examen des dossiers et du sondage mené auprès des membres. »
Pourriez-vous formuler des commentaires à cet égard? C'est une déclaration troublante, car vous affirmez qu'il y avait un désaccord sur les données que vous aviez recueillies relativement à la GRC.
:
Merci. Je vais prendre cette question sur les récidives.
L'un des problèmes que l'audit a bien reconnus est que notre logiciel ne reconnaissait pas ces invalidités autant que nous le voudrions. Nous utilisons un certain système, mais nous sommes en passe d'en acheter un autre.
D'après les données des Anciens Combattants, à qui nous demandons de nous les fournir, l'une des invalidités les plus répandues chez nos membres en service et des plus récidivantes serait le syndrome de stress post-traumatique. Son incidence élevée pourrait signifier qu'il est très généralisé, parce que ce n'est qu'un symptôme. Par exemple, il y a la dépression. Nous avons fait de la recherche dans certains cas où l'alcoolisme ou la dépendance à l'égard des médicaments ne sont pas élevés. C'est donc une bonne nouvelle, mais vous pourriez constater plus de sautes d'humeur et de dépression. Le syndrome est l'une des nombreuses causes pour lesquelles nos membres en service toucheraient leur pension. Ce serait de ce type d'atteintes dont ils souffriraient, auxquelles iI faudrait ajouter les blessures physiques. Vous les qualifieriez peut-être de récidivants. Voilà la tendance que nous constatons.
Nous essayons d'en faire une analyse approfondie. Cela fait partie de notre rôle, essayer d'obtenir une mise à niveau du logiciel pour mieux discerner ce qui se passe chez nous, les types de lésions subies, pour, si tout va bien, les prévenir. C'était...
Je pense que vous avez raison en ce qui concerne le ton, à cause du fait, exclusivement, que l'organisation, comme l'a noté le vérificateur général, a été l'un des premiers ministères à s'organiser, à élaborer une stratégie en matière de santé mentale et un plan d'action et à les déployer. Si on excepte le fait que c'était en 2014, deux éléments, deux parties de cette stratégie ont été audités et très critiqués.
Je pense que j'essayais seulement d'expliquer que ce n'est pas comme si nous n'avions pas favorisé la santé mentale de nos employés ni fourni des stratégies très innovantes à cette fin et, à mon avis, couronnées de réussite. Mais ça se situe dans le contexte très difficile du maintien de l'ordre et pendant une mutation des relations de travail à la GRC. C'est donc une période très difficile.
Je me sens absolument à l'aise avec le fait que nous avons obtenu des recommandations et des conseils très judicieux. Nous y donnerons suite et nous sommes prêts à en répondre. Mais ce rapport a coïncidé avec d'autres rapports, le rapport sur le harcèlement en milieu de travail à la GRC, rédigé par la Commission civile d'examen et de traitement des plaintes relatives à la GRC, notamment. Ça me met peut-être un peu sur la défensive.
J'exprime mon opinion et je réserve d'avance un bon accueil à votre réponse, mais, pour moi, ce document se place beaucoup sur la défensive. Votre réaction me déçoit beaucoup, cette méconnaissance de l'importance des problèmes, votre échec dans l'accomplissement de votre devoir, vos promesses de réaliser les changements nécessaires.
Vous pouvez prétendre que vous avez accepté les recommandations, mais c'est facile à dire. Sachez aussi que l'essence de notre travail est de juger si les documents sont objectifs, si les observations du vérificateur général sont justes. J'espère que nous passerons un peu de temps à la fin pour en parler plus en profondeur, parce que, à un certain point, je suis prêt à faire appel à un organisme de l'extérieur. La GRC est une importante organisation internationale. Si elle accuse notre vérificateur général de partialité, je tiens à aller au fond des choses.
Si le vérificateur général est partial, nous nous en occuperons, mais, dans le cas contraire, je n'accepterai pas que des chefs de service et des organismes viennent ici et remettent en cause son professionnalisme. Soit vous acceptez ses conclusions, soit vous les condamnez et le prouvez. À tout le moins, j'aurais espéré que vous auriez exposé par écrit vos doléances et que vous nous les auriez communiquées, parce que, pour nous, c'est sérieux. Si ce document n'est pas objectif, nous devons le savoir, parce que c'est un document clé pour notre travail.
Supposons que vous avez raison. Encore une fois, j'arrive à mes questions, monsieur le président, mais ce n'est pas la première fois que nous en discutons avec la GRC. D'abord, il est tellement difficile de lui faire reconnaître son erreur ou des imperfections. Quand, enfin, ça se produit, elle est obligée d'agir. L'autre jour, nous avons reçu un rapport de la même commission civile d'examen sur un autre raté. Encore une fois, la GRC a fait tout ce qu'il fallait, elle a publié toutes les bonnes annonces, mais ça s'est terminé en queue de poisson. Voilà pourquoi nous sommes ici.
Ma première question concerne la page 5 du rapport, où le vérificateur général écrit:
Dans l'ensemble, nous avons constaté que la GRC n'avait pas répondu adéquatement aux besoins en matière de santé mentale de ses membres. La GRC a été l'un des premiers organismes fédéraux à lancer une stratégie en matière de santé mentale. Elle n'a cependant pas accordé la priorité à la mise en oeuvre de sa stratégie, ni consacré les ressources humaines et financières nécessaires pour procéder à une mise en oeuvre intégrale et efficace de celle-ci.
Que répondez-vous à ce constat général, monsieur le commissaire? Je vous accorde volontiers toute la latitude que vous voulez pour répondre sur le fond et sur le ton de mes propos. Allez-y, foncez.
:
Merci, monsieur le président.
J'aurais bien aimé voir les observations du vérificateur général sur les deux autres secteurs qu'il a examinés: la détection et l'intervention précoces, et l'amélioration continue. J'aurais aimé qu'il se penche sur le premier volet de la stratégie, à savoir la promotion de la santé mentale.
Plusieurs agents de la GRC m'ont fait part de leur frustration concernant le manque de diversité dans les rangs de niveau intermédiaire et de la haute direction à la GRC. Lorsque je dis « diversité », cela inclut les femmes. Cela inclut les Autochtones. Cela inclut les minorités visibles. Cela inclut les personnes handicapées.
Je sais que cette frustration entraîne des problèmes de santé mentale.
Maintenant, pour entrer un peu plus dans les détails, je vais continuer en répondant à la question de M. Christopherson. Le vérificateur général a clairement dit que vous n'avez pas consacré les ressources humaines et financières nécessaires pour assurer la mise en oeuvre complète et efficace de la stratégie. Plus précisément, il dit que la GRC n'a pas alloué les budgets pour l'appuyer.
Je sais que vous avez dépensé des sommes d'argent, mais il faut déterminer si les sommes versées étaient suffisantes.
:
Merci, monsieur le président.
Tout d'abord, je veux signaler que nous avons reconnu le fait que dans un certain nombre d'endroits, et je l'ai reconnu chaque fois que j'ai discuté de ce rapport, la GRC était l'une des premières organisations à mettre en place une stratégie en matière de santé mentale. C'était une étape importante, et je pense que je l'ai reconnu. Nous l'avons reconnu par écrit et je l'ai reconnu chaque fois que j'en ai parlé.
Je pense avoir également dit que c'est une stratégie importante qui doit réussir. Ce n'est pas seulement important pour la GRC, mais aussi pour l'ensemble du gouvernement car la GRC est l'une des premières organisations à avoir cette stratégie en place. Tout le gouvernement devrait investir pour aider la GRC à faire de cette stratégie un succès. Ce serait la première étape.
Pour ce qui est des pourcentages, on peut les examiner de deux façons. Ce qui nous préoccupait, par exemple, c'était le résultat du sondage selon lequel 51 % des gens en congé de maladie ont déclaré ne pas avoir eu accès en temps opportun à des programmes et services de santé mentale lorsqu'ils en avaient besoin. On peut conclure que 49 % des gens ont eu accès à ces programmes. Ce n'est cependant pas le cas pour 51 %.
Des membres en service actif, 25 % ont essentiellement dit qu'ils n'auraient pas accès à ces programmes en temps opportun s'ils en avaient besoin. Donc, nous pourrions conclure que 75 % ont eu accès à ces programmes. Nous avons indiqué que 25 % ne pensaient pas qu'ils pourraient avoir accès à ces programmes, car nous estimons que c'est un chiffre important: 25 % des gens, dont la majorité n'ont probablement jamais eu accès à ces services, ont dit qu'ils n'étaient pas certains de pouvoir accéder à ces services s'ils en avaient besoin. À notre avis, c'est un message important.
On peut dire qu'environ 75 %, par exemple, pensent qu'ils pourraient y avoir accès, mais l'important, c'est que lorsqu'ils ont besoin des services et qu'ils sont en congé de maladie et qu'ils reçoivent ces services, le chiffre passe soudainement à 51 %.
Un nombre beaucoup moins important de personnes ont eu accès à ces services. Le pourcentage de 51 % est peu élevé, et le pourcentage de 25 % est élevé. Je n'essaie pas de dire que la GRC ne prend pas cette question au sérieux et n'estime pas que c'est important. Ce que nous essayons de dire, c'est que nous pensons que de nombreuses améliorations peuvent être apportées. C'est important que ces gens améliorent leur état de santé et qu'ils obtiennent du soutien d'autres organisations pour les aider à réussir. Lorsque 25 % des membres actifs qui ont répondu au sondage disent qu'ils ne sont pas certains s'ils auraient accès en temps opportun à des services de santé mentale s'ils en avaient besoin, nous pensons que cela démontre qu'il y a largement place à l'amélioration.
:
Il me reste encore une minute, alors je vais poser une question rapidement dans le même ordre d'idées.
En ce moment, un de mes très bons amis qui travaille au sein de la GRC est en congé de maladie après avoir été impliqué dans une fusillade. Au départ, il croyait pouvoir s'en remettre sans problème, mais ce n'est pas le cas.
Les gens nous disent qu'on s'attend parfois à ce qu'ils jouent alors qu'ils sont blessés. C'est un peu comme un joueur de hockey qui doit vivre avec sa blessure et retourner au jeu.
C'est une situation que nous avons beaucoup observée ces dernières années chez nos vétérans, qui sont confrontés aux mêmes types de problèmes. Ces personnes retournent travailler en pensant qu'il n'y aura aucun problème, mais ils s'aperçoivent que ce n'est pas aussi facile qu'ils l'imaginaient. Ce n'est pas quelque chose qui apparaît du jour au lendemain; cela peut prendre un certain temps. Il y a donc des défis.
D'après les témoignages que nous avons recueillis et la frustration que l'on peut ressentir dans certains cas, j'imagine qu'une personne pourrait vouloir agir, alors qu'une autre pourrait dire que ce n'est qu'un autre rapport qui, même s'il ne blâme pas la GRC, ne vous ménage pas.
Y a-t-il un problème en ce qui concerne l'accès aux soins de santé? Vous dites que vous avez accès à des soins de santé.
Nous savons qu'au sein d'Anciens Combattants Canada, il est parfois difficile de trouver suffisamment de psychologues et de psychiatres. Qu'en est-il pour la GRC?
Y a-t-il une différence entre les régions rurales et urbaines?
Je viens d'une collectivité rurale. Je sais qu'il est difficile d'avoir accès à des services de santé lorsqu'on ne vit pas dans le centre-ville de Vancouver, de Toronto ou d'Ottawa.
Y a-t-il des mesures particulières que vous devez prendre, compte tenu des facteurs démographiques et géographiques qui peuvent entrer en ligne de compte?
Vous pourriez peut-être faire quelques observations, après quoi je vais céder la parole à M. Harvey.
:
Tout d'abord, sachez que vous avez entièrement raison. Il y a des désavantages géographiques à certains endroits où se trouvent nos membres, parce qu'il n'y a tout simplement pas de services. L'organisation doit donc composer avec cette situation, tout en essayant d'identifier les gens qui ont besoin d'aide. C'est très difficile de reconnaître les problèmes de santé mentale au sein de la police.
Si, en raison de son comportement, une personne fait l'objet de mesures disciplinaires ou s'attire des ennuis, c'est peut-être parce qu'elle souffre d'un problème de santé mentale qui n'a pas été décelé par son superviseur. La personne en question ne se sent peut-être pas prête à révéler qu'elle a besoin d'aide. Cela fait partie de notre stratégie. Il s'agit d'un problème très complexe, surtout lorsqu'on sait à quel point l'organisation est répartie.
Cependant, étant donné la réalité de notre modèle décentralisé, nous avons dû élaborer des stratégies qui ne sont pas les mêmes pour un détachement de deux personnes dans l'un de nos territoires que pour la région métropolitaine de la vallée du bas Fraser où on trouve différentes formes de soutien.
Nous tenons compte de ces difficultés dans le cadre de notre stratégie et nous essayons de les surmonter. L'un de nos systèmes — que je connais très bien — est la disponibilité du soutien par l'entremise de la ligne 1-800. Lorsque nous apprenons que des gens ont appelé, nous entreprenons tout de suite les démarches nécessaires et nous faisons venir les gens par avion.
Dans un premier temps, il faut déterminer s'il s'agit d'un problème de santé mentale à la base, et ensuite surmonter les obstacles géographiques.
:
Vous êtes pardonné cette fois.
Monsieur le commissaire, je tiens à vous remercier, vous ainsi que votre personnel, d'être ici aujourd'hui. J'éprouve le plus grand respect pour vous et pour ce que vous faites.
J'ai quelques questions à vous poser rapidement sur la situation actuelle, nos progrès et notre orientation. Je vous félicite, vous et votre organisation, d'avoir assumé cette responsabilité et d'avoir fait oeuvre de pionnier en la matière. Effectivement, au cours des cinq dernières années, on a réalisé d'énormes progrès au chapitre des services de santé mentale et on a su relever certaines des lacunes. Je pense qu'il est important que nous prenions en considération tous ces facteurs aujourd'hui.
En réfléchissant à ce qui nous a amenés ici, dans le contexte du rapport du vérificateur général, et aux complexités de votre travail, si vous pouviez remonter dans le temps, qu'est-ce que vous auriez fait différemment ou qu'est-ce que vous n'auriez pas fait différemment au cours des quatre ou cinq dernières années?
Une chose est sûre; je ne suis pas un agent de la GRC ni un expert en matière de santé mentale, alors je compte sur vous pour m'éclairer quant aux pratiques exemplaires que vous auriez changées.
:
Merci, monsieur le président.
En effet, ce que vous avez décrit est tout à fait juste. Je crois que c'est l'histoire de la GRC lorsqu'il s'agit de s'attaquer à ces enjeux importants et d'apporter les changements nécessaires.
C'est pourquoi j'ai cru bon, dans ce contexte, de montrer ma bonne foi en ce qui concerne les services policiers. Je comprends les complexités et ainsi de suite, mais effectivement, il y a des critiques légitimes, et il semble difficile, dans un premier temps, d'attirer l'attention de la GRC, puis de l'amener à prendre les mesures qui s'imposent et à s'assurer de régler la situation adéquatement. Au bout du compte, on y parvient, mais c'est souvent avec plus de difficulté qu'on l'aurait espéré.
Monsieur le commissaire, personnellement, j'ai constaté que le ton de vos réponses était différent. Si ce que vous avez dit au sujet de la vérification et des constatations pendant notre discussion s'était retrouvé dans votre déclaration, mon ton aurait été certainement différent. Je suis parti avec une mauvaise impression. Je suis désolé, monsieur, mais je considère que vous étiez sur la défensive, à la limite, arrogant, en refusant de reconnaître un réel problème.
Maintenant, j'aimerais revenir sur un aspect, car j'estime que l'équité est une question très importante. Ce sont des réunions difficiles. Ce n'est pas censé être joyeux. Personne ici n'aime rendre des comptes. Nous le faisons ici au quotidien, mais voilà où je veux en venir. Encore une fois, j'ai été directeur civil de la Police provinciale de l'Ontario, alors je connais très bien les budgets alloués aux services de police, du moins ce qu'ils étaient à l'époque. Je suis tout à fait conscient qu'on peut avoir un programme et que, simplement parce qu'on n'a pas d'analyse de rentabilisation, cela ne signifie pas qu'on ne fait rien.
Pour ce qui est du fait que vous consacrez beaucoup de ressources, je comprends, mais je crois qu'il est juste de dire, monsieur le commissaire, à moins que je me trompe — je ne voudrais pas vous prêter des propos —, que vous avez dit qu'au début, si vous aviez eu une stratégie, un plan d'entreprise rattaché au plan d'action et le financement nécessaire, vous auriez probablement obtenu des résultats différents. Encore une fois, vous avez beau avoir dépensé de l'argent dans cette optique, je crois qu'on peut vous reprocher, à juste titre, de ne pas avoir eu de plan réel concernant ces ressources.
Vous n'êtes pas d'accord, monsieur le commissaire?
:
Merci, monsieur le président.
Monsieur le commissaire, monsieur le vérificateur général, je vous remercie d'être ici aujourd'hui en compagnie de vos équipes.
Au bout du compte, je suis convaincue que nous avons été à la hauteur au cours de la séance. Il est très pertinent qu'elle porte sur la santé mentale, car personne n'en parlait il y a quelques années seulement, alors que le sujet est désormais sur toutes les lèvres. Vous avez lancé la stratégie en 2014 dans un milieu qui, je peux l'imaginer, n'était pas réceptif à ce genre de travail, que ce soit à l'externe ou à l'interne. Nous vous en félicitons.
Cela dit, je pense que nous pouvons tous apprendre quelque chose d'une séance comme celle d'aujourd'hui. En tant que membres du comité des comptes publics, nous nous fions à l'intégrité du travail de l'auditeur général et de son équipe. Il ne sert à rien de remettre en question les méthodes de collecte des données, mais nous ne devons pas oublier que c'est un couteau à double tranchant.
Cela dit, l'objectif n'est vraiment pas de prendre qui que ce soit en défaut — ce n'est vraiment pas mon impression, et je sais que nous en avons discuté. L'objectif est plutôt de recevoir le résultat d'un processus qui prend du temps… Le vérificateur général pourra me corriger si j'ai tort, mais je crois qu'il s'écoule habituellement deux années ou 18 mois entre la vérification et la préparation du rapport. Vos réponses s'y trouvent. On prévoit le temps nécessaire pour planifier le rapport et le diffuser, lorsque nous décidons de tenir la séance, après quoi un plan d'action est soumis. Ce plan d'action progresse dans le temps, et nous nous réservons le droit d'y revenir et de demander des mises à jour. Je vous invite donc à l'envisager sous cet angle. Il s'agit vraiment d'un outil de gestion qui vise uniquement à formuler une critique constructive à tous les égards.
Cela dit, vous avez partiellement répondu à ma question tout à l'heure. J'étais préoccupée par la recommandation 4.43 du Bureau du vérificateur général qui porte sur l'élaboration d'un plan d'activités. Le plan d'action donne bien une date d'achèvement du 30 juin 2017. Où vous situez-vous dans ce plan d'activités? Que pouvez-vous nous dire à ce sujet?
[Français]
M. Dubeau pourra peut-être répondre à cela.
:
Eh bien, je ne vais pas prolonger la séance pour une question. D'autres ont dit vouloir…
Dans ce cas, je considère qu'il s'agit d'une motion visant à conclure cette partie de la séance.
Je tiens à vous remercier d'être venus aujourd'hui pour témoigner.
Monsieur le commissaire, nous vous remercions évidemment d'avoir servi le pays. Je sais que vous prendrez une retraite bien méritée cet été. Je pense que vous pouvez être fier de vos nombreux accomplissements à la GRC. Dans ce genre de domaine, qu'il s'agisse de la GRC ou d'autres organismes, nous sommes tous conscients que l'évaluation a été réalisée au milieu de la mise en place de la stratégie. Par contre, nous nous attendons à ce que les recommandations du vérificateur général soient appliquées sans heurt pour que nous observions des améliorations. D'ici l'automne prochain, vous pouvez vous attendre à devoir revenir, du moins pour nous informer de la progression du dossier. Nous parlons de la vie des gens ici. Tout le monde s'attend à ce que ce genre de problèmes de santé mentale soient pris en charge, même s'ils sont très difficiles à comprendre et à traiter. Nous pouvons donc nous attendre à cela.
Je vous remercie de votre comparution. Bonne chance.
Quant à vous, monsieur le vérificateur général, nous vous remercions encore une fois de votre excellent rapport.
Nous allons suspendre nos travaux deux minutes pour laisser aux témoins le temps de quitter la salle. Nous poursuivrons ensuite à huis clos afin de nous attaquer à des travaux du Comité fort importants.
[La séance se poursuit à huis clos.]