propose que le projet de loi , soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
— Monsieur le Président, chers collègues, je suis très heureux de prendre la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi , Loi sur les préjudices en ligne. J'interviens aujourd'hui non seulement en tant que ministre et parlementaire, mais aussi en tant que père, membre de la communauté sud-asiatique et musulman canadien.
Il existe de rares moments à la Chambre où notre travail prend une tournure très personnelle. C'est le cas pour moi en ce moment. Je m'explique. En 2015, j'ai posé ma candidature pour diverses raisons, la principale étant pour lutter contre la discrimination et en faveur de l'égalité dans ce que je considérais être un monde de plus en plus polarisé. Ces dernières années, on a pu constater que cette polarisation s'est aggravée et que la haine se propage, y compris ici même, au Canada.
Je n'aurais jamais imaginé qu'en 2024, le Canada serait en tête des pays du G7 pour le nombre de décès attribuables à l'islamophobie. Parmi nos alliés du G7, c'est le Canada qui a connu le plus d'attaques mortelles visant des musulmans. Il y a eu onze décès. Onze décès évitables. Je dis « évitables », car le tireur de la mosquée de Québec, qui a assassiné six hommes le 29 janvier 2017, et l'homme qui a assassiné quatre membres de la famille Afzaal à London, en Ontario, ont tous deux admis au cours de leurs procès, en plein tribunal, qu'ils avaient été radicalisés en ligne. Ils ont admis ce que beaucoup d'entre nous savent depuis toujours: la haine en ligne a des conséquences réelles.
Hier, c'était le troisième anniversaire de l'attaque contre la famille Afzaal, une attaque décrite par le juge comme un « acte terroriste ». En mémoire de Talat, Salman, Yumna et Madiha, qui ont perdu la vie dans un acte de haine le 6 juin 2021, nous agissons.
Le projet de loi , Loi sur les préjudices en ligne, est un élément essentiel de cette démarche. Ce projet de loi est le fruit de plusieurs années de travail.
[Français]
Nous avons consulté pendant plus de quatre ans en parlant aux groupes de victimes et de défense, aux partenaires internationaux, aux gens de l'industrie technologique et au public. Nous avons organisé une consultation de niveau national et mené 19 tables rondes nationales et régionales. Nous avons publié un rapport sur ce que nous avons entendu. Nous avons écouté les recommandations de notre groupe consultatif d'experts sur la sécurité en ligne, un groupe de réflexion diversifié composé d'experts respectés partout au Canada. Nous avons acquis des conseils et des connaissances inestimables grâce à ces consultations, et tout cela a éclairé l'élaboration du projet de loi .
Beaucoup de nos partenaires internationaux tels que le Royaume‑Uni, l'Australie, l'Allemagne, la France et l'Union européenne ont déjà accompli un travail législatif considérable pour tenter de limiter les risques du contenu préjudiciable en ligne. Nous tirons des leçons de leur expérience et adaptons la meilleure partie de leurs plans les plus efficaces dans le contexte canadien.
[Traduction]
Nous avons également appris ce qui n'a pas fonctionné à l'étranger, notamment le retrait immédiat de tous les types de contenus préjudiciables, une mesure initialement adoptée en Allemagne, ou la restriction excessive de la liberté d'expression, qui a été jugée inconstitutionnelle en France. Nous ne répéterons pas ces erreurs ici. Notre approche est beaucoup plus mesurée et elle tient compte de l'importance cruciale de la liberté d'expression, protégée par la Constitution dans la démocratie canadienne. Cette vaste consultation nous a appris qu'Internet et les plateformes de médias sociaux peuvent être une force positive au Canada et dans le monde entier. Des militants s'en servent pour défendre la démocratie. Ce sont des plateformes d'expression critique et de discours civique critique. Ils rendent l'apprentissage plus accessible à tous.
Internet a permis aux gens de notre vaste monde de se sentir davantage liés les uns aux autres, mais Internet a aussi un côté sombre. En décembre dernier, la GRC a mis en garde contre une hausse alarmante de l'extrémisme en ligne chez les jeunes au Canada et de la radicalisation des jeunes en ligne. Nous savons que le cyberespace est particulièrement dangereux pour les plus vulnérables. Selon une étude récente de l'organisme Plan International, 58 % des filles ont été victimes de harcèlement en ligne.
Les plateformes de médias sociaux sont utilisées pour exploiter des gens et diffuser des messages dévastateurs aux conséquences tragiques. La raison à cela est simple. Depuis trop longtemps, les profits des plateformes l'emportent sur la sécurité des utilisateurs. L'autoréglementation n'a pas permis d'assurer la sécurité de nos enfants. Les histoires tragiques sont devenues beaucoup trop courantes. Il y a des conséquences tragiques, comme la mort d'Amanda Todd, une élève de 15 ans de Port Coquitlam qui s'est suicidée, le 10 octobre 2012, après avoir été victime d'exploitation et d'extorsion par plus de 20 comptes de médias sociaux. Ce harcèlement incessant a commencé alors qu'Amanda n'avait que 12 ans et était en 7e année.
Il y a eu Carson Cleland, l'automne dernier. Il avait le même âge que mon fils à l'époque: 12 ans. Carson a commis une erreur. Il a partagé une image intime avec ce qu'il croyait être une amie internaute, pour finalement tomber dans le piège de la sextorsion, dont il ne parvenait pas à s'extirper. Incapable de se tourner vers ses parents, trop gêné pour se tourner vers ses amis, Carson s'est retourné contre lui-même. Carson n'est plus parmi nous, mais il devrait l'être.
Nous devons en faire davantage pour protéger les Amanda Todd et les Carson Cleland de ce pays, et c'est ce que nous ferons grâce à ce projet de loi. J'ai rencontré des gens incroyables au Centre canadien de protection de l'enfance plus tôt cette année, et ils m'ont dit qu'ils reçoivent 70 appels chaque semaine de la part d'enfants effrayés de partout au Canada qui se trouvent dans des situations comme celle d'Amanda et de Carson.
En tant que père de deux jeunes enfants, c'est une question qui me touche de très près. À mesure qu'ils grandissent, mes garçons de 10 et 13 ans passent de plus en plus de temps devant un écran. Je sais que ma femme et moi ne sommes pas les seuls à se trouver dans une telle situation. Partout au pays, les parents sont aux prises avec les mêmes difficultés.
À ce stade-ci, on ne peut pas revenir en arrière. Nos enfants et nos adolescents sont exposés à pratiquement tout en ligne, et je ressens, tout comme les Canadiens, un besoin criant de mieux protéger ces enfants en ligne. C'est précisément ce que nous ferons avec le projet de loi.
Le projet de loi se fonde sur quatre objectifs importants. Primo, il vise à réduire l'exposition à du contenu préjudiciable en ligne, ainsi qu'à habiliter et à soutenir les utilisateurs. Secundo, il vise à dénoncer la montée de la haine et des crimes haineux. Tertio, il permettrait aux victimes d'actes de haine d'avoir accès à de meilleurs recours. Quarto, il renforcerait le mécanisme de déclaration du matériel d'abus pédosexuels afin d'améliorer la réponse du système de justice pénale à ce crime odieux.
[Français]
La loi sur les préjudices en ligne aborderait sept types de contenus nuisibles basés sur des catégories établies au cours de plus de quatre années de consultations.
[Traduction]
Les préjudices ne seront pas tous traités de la même façon. Les services seront tenus de retirer rapidement le contenu représentant de la victimisation sexuelle d'enfants ou perpétuant la victimisation de survivants et de supprimer ce que l'on appelle la « porno-vengeance », y compris les hypertrucages sexuels. Ce contenu n'a absolument pas sa place sur Internet.
Pour d'autres types de contenu, comme celui qui pousse un enfant à s'automutiler ou qui lui fait subir de l'intimidation, nous imposons aux plateformes l'obligation de protéger les enfants. Il y aura ainsi un nouveau cadre législatif et réglementaire pour que les médias sociaux réduisent l'exposition sur leurs plateformes à tout contenu préjudiciable et de nature exploitante. Il s'agira de mettre en place des protections spéciales pour les enfants. Il s'agira également pour les plateformes de fournir aux utilisateurs les outils et les ressources nécessaires pour signaler les contenus préjudiciables.
Pour s'acquitter de l'obligation de protéger les enfants, les plateformes de médias sociaux devront intégrer des caractéristiques de conception adaptées à l'âge afin d'y rendre la navigation plus sûre pour les enfants. Ce pourrait être des contrôles parentaux par défaut et des mises en garde pour les enfants. Ce pourrait aussi être des paramètres de confidentialité pour la messagerie instantanée dans le cas des enfants ou encore des paramètres de recherche sécuritaires.
Protéger les enfants est l'une des tâches les plus importantes que nous ayons à accomplir en tant que législateurs à la Chambre. En tant que père, je suis carrément terrifié à l'idée que les jouets les plus dangereux de ma maison, les écrans de mes enfants, ne sont assujettis à aucune norme de sécurité à l'heure actuelle. Cela doit changer et, avec l'adoption du projet de loi , cela changera.
Non seulement les enfants sont exposés en ligne à des cas d'agression sexuelle ou d'intimidation épouvantables, mais ils y sont aussi exposés à du contenu haineux, comme tous les utilisateurs d'Internet, quels que soient leur âge ou leurs origines. Voilà pourquoi le projet de loi cible le contenu qui fomente la haine ou qui incite à la violence ou au terrorisme. Ce projet de loi n'obligerait pas les entreprises de médias sociaux à supprimer ce genre de contenu préjudiciable. Plutôt, les plateformes seraient tenues de réduire l'exposition à ce contenu en créant un plan de sécurité numérique, en déclarant au commissaire à la sécurité numérique les mesures qu'elles mettent en place pour réduire les risques et en faisant rapport de leurs progrès à ce chapitre.
Les plateformes seraient également tenues d'offrir aux utilisateurs des options de recours commodes, comme des outils pour permettre soit de signaler le matériel préjudiciable, soit de le bloquer dans leur fil de contenu. Une telle mesure est essentielle pour assurer la sécurité de la communauté, d'autant plus que le fait de ne pas s'y conformer est passible sanctions considérables. Ces sanctions que je qualifie de « considérables » correspondraient au montant le plus élevé entre celui égal à 6 % des revenus globaux et 10 millions de dollars. De plus, dans le cas d'une contravention à une ordonnance de la commission de la sécurité numérique, la sanction passerait à 25 millions de dollars ou, s'il est supérieur, au montant égal à 8 % des revenus globaux.
Le projet de loi sur les préjudices en ligne est une étape importante vers la création d'un environnement en ligne plus sain et plus inclusif, où les plateformes de médias sociaux cherchent activement à réduire le risque pour leurs utilisateurs d'être exposés à du contenu préjudiciable et contribuent à prévenir la propagation d'un tel contenu. Ainsi, tout le monde au Canada se sentira plus libre de s'exprimer ouvertement. C'est crucial: l'initiative vise d'abord et avant tout à favoriser la prise de parole et la participation au débat public en ligne. On peut penser à Carla Beauvais et aux propos qu'elle a tenus lorsqu'elle se trouvait à mes côtés à la présentation de ce projet de loi, en février dernier. Elle a parlé du torrent d'attaques qu'elle a reçues lorsqu'elle a exprimé ses préoccupations au sujet de l'affaire George Floyd aux États‑Unis, ce qui l'a effrayée et l'a empêchée de participer en ligne. Nous voulons qu'elle puisse faire entendre sa voix dans le débat public. En ce moment, elle a été réduite au silence.
[Français]
La loi sur les préjudices en ligne réglementera les services de médias sociaux dont l’objectif principal est de permettre aux utilisateurs de partager du contenu accessible au public, des services qui présentent le plus grand risque d’exposer le plus grand nombre de personnes à du contenu nuisible.
[Traduction]
La loi s'appliquerait aux plateformes de médias sociaux, comme Facebook, X et Instagram; aux services de contenu pour adultes téléversé par les utilisateurs, comme Pornhub; et aux services de diffusion en direct, comme Twitch. Cependant, elle ne s'appliquerait pas aux communications privées, c'est-à-dire aux textos privés ou aux messages privés sur les applications de médias sociaux, notamment sur Instagram et Facebook Messenger. Il importe de souligner, encore une fois, qu'il s'agit d'une approche mesurée qui évite d'aller trop loin comme certains pays que nous avons étudiés l'ont fait à cet égard. L'objectif est de cibler les principales plateformes de médias sociaux, là où le plus grand nombre de personnes au Canada passent leur temps en ligne.
Certains se demandent pourquoi le projet de loi traite à la fois des préjudices en ligne et des crimes haineux, qui peuvent se produire à la fois en ligne et hors ligne. Je vais l'expliquer. Les dangers en ligne ne restent pas en ligne. Nous assistons à une augmentation spectaculaire des crimes haineux dans tout le pays. Selon Statistique Canada, le nombre de crimes haineux déclarés par la police a bondi de 83 % au cours de la période allant de 2019 à 2022. B'nai Brith Canada signale une hausse alarmante de 109 %, de 2022 à 2023, du nombre d'incidents antisémites. Depuis le 7 octobre 2023, j'entends souvent des groupes juifs et musulmans se demander ouvertement s'il est sécuritaire d'être ostensiblement juif ou musulman au Canada en ce moment. Cette situation est intenable et elle ne devrait jamais être tolérée. Pourtant, la violence motivée par la haine se poursuit. Les Canadiens nous demandent d'agir. C'est à nous, en tant que législateurs, de le faire.
Nous devons prendre des mesures concrètes pour mieux protéger tous les Canadiens contre les préjudices, tant en ligne que dans nos collectivités. Nous avons besoin de meilleurs outils pour lutter contre le contenu préjudiciable en ligne qui fomente la violence et la destruction. Le projet de loi donne aux forces de l'ordre ces outils dont elles ont grandement besoin.
Le Service de police de Toronto a exprimé ouvertement son appui au projet de loi , car ses membres savent que cette mesure rendra notre pays plus sûr. Les membres de la famille Afzaal ont exprimé haut et fort leur appui au projet de loi , car ils savent que la haine islamophobe qui pousse au meurtre commence quelque part, souvent en ligne.
Cela dit, nous savons qu'il n'existe pas de solution unique à la propagation de la haine en ligne et dans la vie de tous les jours. C'est pourquoi le projet de loi propose un certain nombre d'outils pour contribuer à mettre fin à la haine, à commencer par des modifications au Code criminel du Canada. En effet, le projet de loi modifierait le Code criminel afin de mieux cibler les crimes haineux et la propagande haineuse, et ce, de quatre façons.
Premièrement, il érigerait les crimes haineux en infraction. Les forces de l'ordre nous ont demandé cet outil afin que le caractère haineux d'un crime soit constaté dès la mise en accusation au lieu de n'être considéré que comme un aspect secondaire au moment de la détermination de la peine. Cette nouvelle infraction aiderait aussi les forces de l'ordre à suivre l'évolution du nombre réel de crimes motivés par la haine au Canada. C'est d'ailleurs pourquoi elles m'ont exhorté à créer une infraction distincte de crime haineux semblable à ce qui existe dans 47 des 50 États au sud de la frontière. Une agression motivée par la haine n'est pas qu'une agression: c'est un crime haineux qui devrait être reconnu comme tel dès le dépôt d'accusations.
[Français]
Deuxièmement, le projet de loi augmenterait les peines pour les quatre infractions existantes de propagande haineuse. Il s'agit d'infractions graves, et les peines doivent refléter cette gravité.
Troisièmement, le projet de loi C‑63 créerait un nouvel engagement de ne pas troubler l'ordre public spécifiquement conçu pour empêcher la commission de l'une quelconque des quatre infractions de propagande haineuse et de la nouvelle infraction de crime haineux.
Cela serait inspiré des engagements de ne pas troubler l'ordre public existants, tels que ceux utilisés dans les cas de violence conjugale, et nécessiterait qu'une personne craigne raisonnablement que ces infractions soient commises. Le seuil de crainte raisonnable que telle ou telle infraction sera commise est courant à presque tous les engagements de ne pas troubler l'ordre public.
De plus, comme certains mais pas tous les engagements de ne pas troubler l'ordre public le font, cela exigerait que le procureur général approprié donne lui-même son consentement avant qu'une demande soit faite à un juge pour imposer à une personne l'engagement de ne pas troubler l'ordre public. Cela garantit une couche supplémentaire d'examen du processus.
[Traduction]
Enfin, le projet de loi définit la haine dans le contexte des infractions de propagande haineuse ou de la nouvelle infraction de crime haineux en se fondant sur la définition rédigée par la Cour suprême du Canada dans ses décisions majeures pour les affaires R. c. Keegstra et Saskatchewan Human Rights Commission c. Whatcott. La définition indique non seulement ce qu'est la haine, mais aussi ce qu'elle n'est pas, ce qui aidera les Canadiens et les forces de l'ordre à mieux comprendre l'étendue de ces infractions.
La Cour a défini le discours haineux comme étant du contenu qui exprime la détestation ou la diffamation d'une personne ou d'un groupe pour des motifs comme la race, l'origine nationale ou ethnique, la religion et le sexe. La définition ne s'applique qu'aux formes d'expression les plus extrêmes et marginales, et par conséquent, ne vise pas, ou à peu près pas, le discours, politique ou autre, qui se trouve dans la catégorie de contenu que certains qualifient d'affreux, mais légal. Il s'agit des propos qui sont offensants et horribles, mais qui sont encore permis au titre de la liberté d'expression, qui est protégée par la Constitution en vertu de l'alinéa 2b) de la Charte. Cette catégorie de contenu ne correspond pas à la définition de discours haineux de la Cour suprême.
[Français]
Je tiens à préciser ce que le projet de loi ne fait pas. Il ne sape pas la liberté d'expression. Il renforce la liberté d'expression en permettant à toutes les personnes de participer en toute sécurité aux débats en ligne.
[Traduction]
Le projet de loi fournirait aussi un autre outil. Il modifierait la Loi canadienne sur les droits de la personne afin de définir un nouvel acte discriminatoire consistant à communiquer un discours haineux en ligne. Le projet de loi indique clairement qu'on ne considère pas qu'un contenu fomente la haine pour la seule raison qu'il discrédite, humilie, blesse ou offense des gens. Cela dit, lorsqu'il y a bel et bien discours haineux, un mécanisme permettra de demander que ces expressions de haine soient supprimées. Les modifications à la Loi canadienne sur les droits de la personne ne visent pas à punir qui que ce soit. Elles donneraient simplement aux Canadiens un outil pour faire retirer les propos haineux.
Enfin, le projet de loi moderniserait la loi concernant la déclaration obligatoire et éliminerait des échappatoires qu'elle permet. Cela aiderait les forces de l'ordre à enquêter plus efficacement sur les cas d'abus et d'exploitation sexuels à l'endroit d'enfants, à traduire les responsables en justice, à conserver l'information plus longtemps et à s'assurer que les entreprises de médias sociaux signalent le contenu pédopornographique à la GRC.
La Loi sur les préjudices en ligne bénéficie d'un vaste appui. Lorsque j'ai présenté ce projet de loi en février, j'étais fier d'avoir à mes côtés des représentants du Centre consultatif des relations juives et israéliennes et du Conseil national des musulmans canadiens. Ces deux groupes ont eu de grandes divergences d'opinions au cours des derniers mois, mais ils sont unis quand il s'agit de la nécessité de lutter contre la haine en ligne. On retrouve cette même unité dans ce qu'ont exprimé Deborah Lyons, envoyée spéciale pour la préservation de la mémoire de l'Holocauste et la lutte contre l'antisémitisme, et Amira Elghawaby, représentante spéciale chargée de la lutte contre l'islamophobie.
Le moment est venu de lutter contre toutes les formes de haine en ligne. La haine en ligne peut déboucher sur la violence dans le monde réel. Je suis toujours ouvert aux suggestions de bonne foi sur la manière d'améliorer le projet de loi. Je me réjouis de suivre son étude en comité. J'ai le devoir fondamental de défendre la liberté d'expression garantie par la Charte et de protéger tous les Canadiens contre les préjudices. Je prends ces deux devoirs très au sérieux.
Certains m'ont demandé de scinder le projet de loi en deux, en ne traitant que les dispositions qui empêchent la diffusion de matériel d'exploitation sexuelle et en rejetant les mesures de lutte contre la haine. À ces personnes, je réponds que je ne ferais pas mon travail de ministre si je ne m'attaquais pas à la haine endémique sur les plateformes en ligne. Il est de mon devoir de protéger tous les Canadiens contre les préjudices. Cela concerne les enfants et les adultes. Les gens réclament qu'on mette un frein à la propagation de la haine. Il est temps d'agir.
Le projet de loi est une réponse exhaustive aux préjudices en ligne et à la haine dangereuse que nous voyons se répandre dans les collectivités. Nous avons le devoir de protéger les enfants dans le monde réel. Nous devons prendre des mesures décisives pour les protéger également en ligne, où les dangers peuvent être tout aussi pernicieux, sinon plus. Cette action commence par l'adoption du projet de loi C‑63.
:
Monsieur le Président, nous devons protéger les Canadiens à l'ère numérique, mais le projet de loi n'est pas le bon moyen d'y parvenir. Il forcerait les Canadiens à faire des compromis inutiles entre la garantie de leur sécurité et leurs droits garantis par la Charte. Je vais expliquer pourquoi le projet de loi comporte de graves lacunes et pourquoi il ne protégerait pas suffisamment les droits des Canadiens. Surtout, je présenterai un plan de rechange bien étoffé qui est plus respectueux des droits des Canadiens garantis par la Charte et qui fournirait des protections immédiates aux Canadiens qui subissent des préjudices en ligne.
Le principal problème du projet de loi , c'est la façon dont le gouvernement a choisi de présenter les multiples préjudices qui se produisent dans l'espace numérique comme étant homogènes et susceptibles d'être résolus au moyen d'une approche ou d'une mesure législative unique. En réalité, les préjudices qui se produisent en ligne sont un ensemble de problèmes incroyablement hétérogènes qui exigent une multitude de solutions adaptées. On pourrait croire que le premier objectif est plus difficile à atteindre que le second, mais ce n'est pas le cas. Il est relativement facile de dresser la liste des multiples problèmes qui surviennent en ligne et qui causent du tort aux Canadiens. À partir de là, il devrait être facile de déterminer comment les lois et les processus réglementaires qui existent pour l'environnement physique pourraient être appliqués à l'environnement numérique.
Il y a peu ou pas d'exemples de préjudices en ligne qui ne pourraient pas être couverts en élargissant ou en modifiant des lois ou des structures de réglementation existantes. À l'inverse, depuis près de 10 ans, le gouvernement essaie plutôt de créer de nouveaux processus passe-partout, extrajudiciaires, bureaucratiques et réglementaires qui s'adapteraient aux besoins des acteurs de l'espace numérique au lieu de les obliger à s'adapter à nos lois existantes. Toutes ces tentatives ne sont pas devenues des lois, et c'est probablement le sort qui attend le projet de loi .
Cette approche est contraire au bon sens. Avec elle, rien n'a été fait pendant près de 10 ans pour procéder à la modernisation plus que nécessaire des systèmes existants. Par conséquent, les forces de l'ordre n'ont pas les outils dont elles ont besoin pour prévenir les crimes, ce qui cause des préjudices aux Canadiens. Cette approche a aussi mené à une balkanisation des lois et des règlements dans les diverses régions du pays, à une perte d'investissements à cause de l'incertitude créée et à un manque de coordination avec la communauté internationale. Encore une fois, au bout du compte, tout cela cause des préjudices aux Canadiens.
Le projet de loi adopte la même approche en n'énumérant que quelques-uns des préjudices occasionnés en ligne, et il crée une nouvelle bureaucratie extrajudiciaire lourde et opaque, tout en faisant naître de graves problèmes pour les droits garantis par la Charte canadienne. Par exemple, le projet de loi C‑63 créerait une nouvelle disposition relative à une « infraction motivée par la haine » qui pourrait entraîner l'application d'une peine d'emprisonnement à perpétuité pour des infractions mineures prévues par toute loi fédérale, une disposition parasite qui ne serait pas surveillée dans la portée de la loi. Autrement dit, des paroles à elles seules pourraient mener à l'emprisonnement à perpétuité.
Bien que le gouvernement ait tenté de faire valoir que ce n'est pas le cas, en disant qu'il faudrait qu'un acte sous-jacent grave soit survenu pour que la disposition s'applique, ce n'est tout simplement pas ainsi que le projet de loi est libellé. Je demande à mes collègues d'y jeter un coup d'œil. Le projet de loi vise à modifier l'article 320 du Code criminel. On peut y lire ce qui suit: « Quiconque commet une infraction prévue par la présente loi ou toute autre loi fédérale […] est coupable d'un acte criminel passible de l'emprisonnement à perpétuité. »
Cette année, au comité de la justice, le a déclaré:
[...] la nouvelle infraction de crime haineux vise toute infraction existante si elle était motivée par la haine. Cela peut passer par toute la gamme des infractions, d'un vol motivé par la haine jusqu'à une tentative de meurtre motivée par la haine. La fourchette des peines dans le projet de loi C‑63 a été conçue de manière à refléter les options existantes [...] pour toutes ces infractions sous-jacentes, des plus mineures aux plus graves [...]
Le a poursuivi en disant: « Cela ne signifie pas que les infractions mineures seront soudainement punissables de peines [...] sévères. » Cependant, les juges qui prononcent les peines sont tenus de suivre tous les principes juridiques. Ainsi, « [u]n meurtre motivé par la haine entraînera une peine d'emprisonnement à perpétuité, ce qui ne sera [...] pas le cas pour une infraction mineure ».
Dans cette déclaration, le a admis, d'une part, que la nouvelle disposition pourrait s'appliquer à n'importe quelle loi fédérale, comme le précise le projet de loi, et, d'autre part, que le gouvernement se fierait aux juges pour veiller à ce qu'une peine maximale ne soit pas imposée pour une infraction mineure. Le Parlement ne peut laisser le gouvernement faire preuve d'une telle paresse. On ne peut accepter qu'il n'énonce pas clairement à quoi il souhaite qu'une peine d'emprisonnement à perpétuité s'applique en droit. On ne peut le laisser ainsi confier à une magistrature hautement imparfaite le soin de déterminer l'application d'une loi trop générale, car cela risque d'avoir des conséquences négatives extrêmes.
De même, l'introduction, dans le projet de loi , d'un engagement de ne pas troubler l'ordre public se rapportant aux crimes haineux, que les libéraux qualifient de mesure préventive, soulève une quantité énorme de préoccupations dans tout le spectre politique. Cette mesure est hautement problématique, car elle étend explicitement aux crimes relatifs au discours haineux le pouvoir d'ordonner au défendeur de contracter l'engagement de ne pas troubler l'ordre public. Or, le projet de loi ne définit pas adéquatement le discours haineux ni ne donne l'assurance que cela satisfait aux critères de criminalité relatifs à la haine.
Autre élément tout aussi préoccupant, une disposition du projet de loi créerait un nouveau processus permettant à des particuliers ou à des groupes de soumettre des plaintes à la Commission canadienne des droits de la personne concernant des publications en ligne qui leur sont adressées et qu'ils considèrent comme étant discriminatoires. Ce processus entièrement extrajudiciaire ne serait pas soumis aux mêmes exigences en matière de preuve que les tribunaux pénaux et pourrait durer des années. Les décisions seraient fondées sur la prépondérance des probabilités plutôt que sur une preuve hors de tout doute raisonnable, comme le veut la norme en matière pénale.
Le caractère subjectif de la définition de discours haineux mènerait inévitablement à des peines pour des discours protégés. La simple possibilité qu'une plainte en matière de droits de la personne soit déposée limitera une bonne partie des discours protégés et le système sera inévitablement submergé de plaintes vexatoires. Il n'y a absolument rien dans le projet de loi pour empêcher que cela se produise.
Il y a près d'une décennie, même le Toronto Star, qui est loin d'être un bastion de la pensée conservatrice, a rédigé un article d'opinion cinglant contre ce genre de dispositions. Le même principe devrait s'appliquer aujourd'hui. Il n’est pas exagéré de supposer que la nouvelle disposition ouvre grand la porte aux abus lorsqu'on sait que les éléments hautement problématiques du projet de loi sont proposés par un gouvernement qui a invoqué illégalement la Loi sur les mesures d’urgence. Le gouvernement s'emploie régulièrement à faire tourner en bourrique les Canadiens qui remettent en question l’efficacité ou la moralité de ses politiques en les accusant de se livrer à de la mésinformation, comme l’a fait le dans sa réponse à ma question, en disant que je faisais une mauvaise interprétation du projet de loi. Les abus que permettrait la nouvelle disposition pourraient être commis par n'importe quel gouvernement, peu importe le parti au pouvoir.
L'énoncé de conformité à la Charte du gouvernement, qui est long et vague et qui n'a été publié que récemment, devrait inquiéter les parlementaires à cet égard, car il s'appuie sur l'énoncé suivant: « Les avantages associés à la protection des membres de groupes vulnérables visés par un motif de distinction protégé [l’emportent] sur les effets du projet de loi sur [la liberté d'expression]. » Il a déjà été établi que le gouvernement avait violé la Charte dans le cas du projet de loi , en raison de fausses présomptions selon lesquelles un avantage l’emporte sur d’autres. Je soupçonne que ce serait la même chose pour le projet de loi s’il était adopté, ce qui, je l'espère, n'arrivera pas.
Je crois que les Canadiens sont capables de s'exprimer dans les limites de la liberté d'expression et d'assurer la primauté du droit au sein de notre pluralisme dynamique. Quelle que soit notre allégeance politique, nous devons valoriser la liberté d'expression et l'application régulière de la loi, car c'est ce qui prévient les conflits violents. Dans le droit canadien, la liberté d'expression est déjà soumise à des limites clairement définies. Les dispositions du projet de loi que je viens de décrire vont à l'encontre de ces principes. Pour être claire, je dirais qu'on ne devrait pas s'attendre à ce que les Canadiens acceptent de voir leur liberté d'expression compromise ou limitée afin d'être en sécurité en ligne. Pourtant, c'est ce que le projet de loi C‑63 leur demande.
Le projet de loi créerait également une hydre bureaucratique à trois têtes qui n'existe toujours pas. Une grande partie des règles auxquelles le projet de loi fait allusion seraient définies et mises en application en vertu de règlements qui n'existent pas encore et qui seraient établis par l'hydre bureaucratique à une date ultérieure très éloignée dans le temps. Dans bien des cas, nous ne pouvons pas attendre avant d'agir. Comme me l'a expliqué un expert, c'est comme si on esquissait un tableau et que l'on s'attendait à ce que les bureaucrates, et non les législateurs élus, finissent la peinture à leur guise, derrière des portes closes, sans rendre de comptes aux Canadiens.
Le gouvernement aurait dû tirer des leçons des coûts de l’échec lorsqu’il a tenté la même approche avec les projets de loi et , mais hélas, voilà où nous en sommes. Le nouveau processus bureaucratique serait lent, coûteux et incertain. Si le gouvernement va de l'avant, les Canadiens se retrouveront sans protection, et les innovateurs et les investisseurs se retrouveront privés des garanties réglementaires nécessaires à la croissance de leur entreprise.
Cette mesure serait également coûteuse. J'ai demandé au directeur parlementaire du budget d'effectuer une analyse des coûts associés à la création de la structure bureaucratique, et il a accepté. Aucun parlementaire ne devrait envisager d’appuyer le projet de loi sans savoir quelles ressources le gouvernement entend affecter à la création de la nouvelle commission sur la sécurité numérique, du nouvel ombudsman de la sécurité numérique et du nouveau bureau de la sécurité numérique, d’autant plus que les conclusions du rapport accablant présenté cette semaine par le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement mettent en évidence de façon claire ce que nous coûte le choix du gouvernement de ne pas affecter à la GRC les ressources dont elle a tant besoin.
Autrement dit, si le gouvernement ne peut pas financer et maintenir les activités essentielles de la GRC, qui a déjà le mandat d'appliquer les lois liées à la sécurité publique, le Parlement devrait avoir de sérieux doutes quant à l'efficacité de la création de trois nouveaux organes bureaucratiques pour régler des problèmes qui pourraient probablement être gérés par des organismes de réglementation existants, comme le CRTC, ou dans le cadre de l'application du Code criminel. De plus, les Canadiens devraient être très réticents à l'égard de la création de nouvelles structures bureaucratiques qui donneraient aux grandes entreprises technologiques bien financées et extrêmement puissantes le pouvoir de faire du lobbying et d'agir en coulisses, à l'abri des regards du Parlement, pour trafiquer la réglementation à leur avantage.
Cette approche ne protégerait pas nécessairement les Canadiens et elle risque de créer des obstacles artificiels à l'arrivée de nouvelles entreprises innovatrices dans l'industrie. Il serait nettement préférable d'adapter et d'élargir les lois et les systèmes de réglementation qui existent depuis longtemps, de fournir les ressources suffisantes aux organes d'application de la loi et d'exiger que les grandes entreprises technologiques et les autres acteurs de l'espace numérique se conforment à ces lois, et non l'inverse. Cette approche offrirait aux Canadiens une véritable protection au lieu d'ouvrir la voie à un nouveau service inefficace de traitement des plaintes qui coûterait très cher aux Canadiens et qui leur rapporterait très peu d'avantages.
En aucun cas le Parlement ne devrait permettre au gouvernement d'adopter une loi qui donne le pouvoir aux entreprises de médias sociaux d'agir comme arbitres de la liberté d'expression, mais c'est exactement ce que risque de faire le projet de loi . Si le gouvernement souhaite imposer de nouvelles restrictions pour encadrer la liberté d'expression des Canadiens, c'est le Parlement qui devrait en débattre. Ce n'est pas aux organismes de réglementation ni aux géants de la technologie de prendre ces décisions derrière des portes closes, surtout dans le contexte où elles n'ont que très peu de comptes à rendre au public.
Bref, ce projet de loi comporte de graves lacunes et il devrait être abandonné, d'autant plus que le ministre a annoncé ce matin qu'il n'est pas du tout disposé à y apporter quelque amendement que ce soit.
Cependant, il y a une meilleure façon de procéder. Il existe une alternative, qui serait un plan plus efficace et plus facile à mettre en œuvre pour assurer la sécurité des Canadiens à l'ère du numérique. Ce plan moderniserait les lois et les processus en place afin de les adapter aux progrès dans l'univers du numérique. Il protégerait la liberté d'expression dans tous les cas où elle n'est pas limitée par une disposition du Code criminel et il favoriserait un environnement propice à l'innovation et aux investissements dans les technologies numériques. Il prévoirait l'attribution de ressources suffisantes aux organismes qui ont déjà des responsabilités en matière d'application de la loi, plutôt que de créer des structures bureaucratiques extrajudiciaires qui seraient comme une sorte de département des plaintes.
Tout d'abord, la GRC et de nombreux organismes d'application de la loi d'un bout à l'autre du pays manquent de ressources après que certains politiciens se sont ligués avec les partisans du définancement de la police au cours de la dernière décennie. Il faut immédiatement renverser cette tendance. Il est essentiel que les forces de l'ordre disposent de ressources suffisantes et soient respectées pour que la société demeure libre et juste.
Deuxièmement, le gouvernement doit également réformer ses politiques laxistes de mise en liberté sous caution, qui permettent aux récidivistes de commettre des crimes à répétition. Les criminels qui sévissent dans l'espace numérique ne seront jamais traduits en justice, quelles que soient les lois adoptées, si on ne met pas fin aux politiques de capture et de remise en liberté du gouvernement libéral. Je pense à une femme de ma ville, Calgary, qui a été assassinée en plein jour devant une école primaire parce que son conjoint a bénéficié de la politique libérale de capture et de remise en liberté sous caution, même s'il la harcelait en ligne depuis très longtemps.
Troisièmement, le gouvernement doit faire respecter…
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Monsieur le Président, troisièmement, le gouvernement doit appliquer les lois qui sont déjà en vigueur mais dont l'application a été délaissée à cause d'un leadership malhonnête, de politiques de mauvaise foi et d'un manque extrême de volonté politique, en particulier en ce qui concerne les propos haineux. Cet enjeu est particulièrement important dans un contexte où s'intensifient les dangers auxquels sont exposées des communautés religieuses canadiennes vulnérables, dont la communauté juive du Canada, comme l'a mentionné le .
Pour faire respecter les lois déjà en vigueur, on pourrait notamment veiller à ce que la GRC, y compris les Équipes intégrées de la sécurité nationale et les Sections d'enquête de la sécurité nationale, fournisse des ressources et travaille directement avec les services de police provinciaux et municipaux compétents de manière à échanger les renseignements permettant d'assurer la protection des collectivités. On pourrait aussi veiller à ce que le financement du Programme de financement des projets d'infrastructure de sécurité soit accessible rapidement afin que les institutions et les centres communautaires puissent améliorer les mesures de sécurité dans leurs lieux de rassemblement.
Quatrièmement, dans les domaines où il faut moderniser immédiatement des règlements et le Code criminel pour tenir compte de l'ère numérique et où il pourrait y avoir consensus entre les partis, le gouvernement devrait procéder à ces changements d'une façon qui permettra leur adoption rapide et non partisane au Parlement.
Ces éléments pourraient inclure certaines des dispositions examinées dans le projet de loi . Pensons notamment à l'obligation de rendre inaccessible aux personnes au Canada, dans certaines circonstances, le contenu qui victimise sexuellement un enfant ou victimise de nouveau un survivant, ou le contenu intime communiqué sans consentement; d'imposer aux fournisseurs en ligne certaines obligations de conserver tous les fichiers liés à de la victimisation sexuelle; de prévoir des dispositions permettant aux personnes au Canada de déposer une plainte auprès des organismes d'application de la loi existants, tels que le CRTC ou la police, et non auprès d'un nouvel organe bureaucratique qui prendrait des années avant de se matérialiser et qui serait coûteux ou inefficace; de veiller à ce que le contenu d'un service de médias sociaux qui victimise sexuellement un enfant, victimise de nouveau un survivant, ou qui est un contenu intime communiqué sans consentement, soit, avec l'autorisation d'un tribunal qui rend des ordonnances aux exploitants de ces services, rendu inaccessible aux personnes au Canada; et de faire respecter la modification proposée à une loi concernant la déclaration obligatoire de la pornographie juvénile sur Internet par les fournisseurs de service Internet.
Il y a d'autres dispositions que le gouvernement a choisi de ne pas inclure dans le projet de loi , mais qui auraient dû l'être et que le Parlement devrait examiner dans le contexte des préjudices qui sont causés en ligne. Pensons notamment à la modernisation des lois canadiennes existantes sur la distribution non consensuelle d'images intimes. Il faut s'assurer que la distribution d'hypertrucages à caractère sexuel est également criminalisée, vraisemblablement par une simple mise à jour du Code criminel. Nous aurions pu le faire avec le consentement unanime de la Chambre aujourd'hui si le gouvernement avait pris l'initiative de procéder ainsi. Il s'agit déjà d'un grave problème au Canada: des jeunes filles dans des écoles secondaires de Winnipeg voient des images à caractère sexuel les dépeignant et les montrant parfois en train de se faire agresser sexuellement, comme le disent certains articles, sans que la loi ne puisse intervenir.
Le gouvernement doit également ériger en infraction pénale le harcèlement en ligne, pour actualiser l'infraction de harcèlement criminel existante afin de tenir compte de la facilité avec laquelle il est possible de faire du harcèlement en ligne sous le couvert de l'anonymat. Plus précisément, cette infraction pourrait s'appliquer aux personnes qui envoient de manière répétée des messages ou des contenus menaçants ou explicites à des personnes sur Internet et dans les médias sociaux, alors qu'elles savent ou devraient savoir que ces messages ou contenus ne sont pas les bienvenus. Cette mesure pourrait inclure des facteurs aggravants pour l'envoi répété de ce type de matériel sous couvert de l'anonymat et s'accompagner d'une sorte d'ordonnance numérique restrictive, ce qui permettrait aux victimes de harcèlement criminel en ligne de demander à un juge, dans des circonstances précises, de désigner le harcèlement et d'y mettre un terme.
Cela permettrait de protéger la vie privée, de retirer aux plateformes de médias sociaux la responsabilité de déterminer quand elles devraient révéler l'identité d'une personne à la police pour éviter que le harcèlement en ligne s'intensifie jusqu'à entraîner de la violence physique. Cela donnerait aux policiers et aux victimes des moyens bien définis et faciles à comprendre pour prévenir le harcèlement en ligne et l'escalade de violence qui peut s'en suivre. Cela permettrait de lutter contre un problème majeur qui contribue à la violence entre partenaires intimes et faciliterait la lutte contre le contrôle coercitif.
J'aimerais d'ailleurs indiquer au que des députés du Parti libéral au pouvoir ont convenu récemment, lors d'une réunion du comité de la procédure qui a eu lieu la semaine dernière, de la nécessité d'adopter de telles mesures pour combattre le harcèlement en ligne envers des élus.
Cinquièmement, le gouvernement devrait envisager de meilleures mesures, qui relèveraient probablement du CRTC et du ministère de l'Industrie, pour réglementer plus efficacement les plateformes en ligne afin de mieux protéger les enfants en ligne tout en protégeant les droits garantis par la Charte.
Cette voie pourrait comprendre de meilleures mesures à cet égard. On pourrait passer par la voie législative, sans prendre de règlements en coulisses, mais en définissant avec précision dans la loi l'obligation de diligence requise par les plateformes en ligne. On a déjà parlé de ces obligations de diligence dans les questions posées aux ministres aujourd'hui. Voilà ce sur quoi le Parlement devrait se pencher, plutôt que de permettre à un futur organisme de réglementation encore inconnu de prendre ces décisions à notre place, pendant que des géants de la technologie et leurs groupes de lobbyistes définissent tout cela derrière des portes closes. C'est notre travail, pas le leur.
Nous pourrions offrir aux parents des mesures de protection, de contrôle et de transparence pour prévenir les préjudices faits à leurs enfants lorsqu'ils sont en ligne. Cela pourrait faire partie de l'obligation de diligence. Nous pourrions également exiger que les plateformes en ligne fassent passer les intérêts des enfants en premier avec des mesures de protection appropriées mises en place dans le cadre d'une obligation de diligence définie par la loi, comme je l'ai déjà expliqué.
Il pourrait également y avoir des mesures pour prévenir et atténuer l'automutilation, les troubles de santé mentale, les comportements addictifs, l'intimidation et le harcèlement, la violence sexuelle et l'exploitation, ainsi que la promotion de la publicité et des produits interdits aux mineurs. Voilà autant de cas où il y a obligation de diligence.
Nous pourrions améliorer les mesures visant à mettre en place des méthodes de vérification de l'âge qui préservent la vie privée et qui sont dignes de confiance, ce que de nombreuses plateformes ont toujours la capacité de faire, tout en interdisant l'utilisation d'une identification numérique dans l'un ou l'autre de ces mécanismes.
De cette façon, on pourrait également inclure des mesures visant à ce que l'application de ces mécanismes, dont un système de sanctions et de conséquences administratives, se fasse au moyen d'organismes qui existent déjà. De plus, nous pourrions veiller à ce qu'il y ait peut-être d'autres recours, comme la possibilité de demander réparation en cas de préjudice civil, si ce devoir de diligence n'est pas respecté.
Il s'agit d'une liste non exhaustive de préjudices en ligne, mais le fait est que nous pourrions parvenir à un consensus à la Chambre avec de simples démarches de modernisation qui permettraient de mettre immédiatement les lois à jour. J'espère que le gouvernement acceptera ce plan.
Je salue Sean Phelan et David Murray, deux travailleurs formidables. Nous sommes arrivés à cette solution sans armée de bureaucrates, et j'espère que le Parlement envisagera cette option au lieu du projet de loi . La sécurité des Canadiens est en jeu.