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Monsieur le Président, je suis très heureux d'avoir l'occasion de parler du projet de loi Il s'agit d'un important projet de loi.
Comme on le sait, avec les langues autochtones, l'anglais et le français sont au cœur de l'histoire et de l'identité du Canada. Ce sont elles qui lui donnent une grande partie de son dynamisme social, culturel et économique. Notre gouvernement a toujours affirmé l'importance des langues officielles dans ce pays, et nous les considérons non seulement comme une responsabilité solennelle, mais aussi comme une reconnaissance de la diversité et de l'inclusion qui définissent notre pays.
En tant que fier francophile québécois et canadien, représentant la belle circonscription de Hull—Aylmer, je sais à quel point cette responsabilité est importante. Ma circonscription est probablement la plus bilingue du pays. Non seulement les gens de ma circonscription parlent l'anglais et le français, mais ils les parlent bien.
Cette responsabilité consiste en partie à promouvoir l'esprit de la Loi sur les langues officielles. La Loi n'est pas seulement importante pour les députés et les fonctionnaires fédéraux, mais elle est importante pour tous les Canadiens. Elle reflète ce que nous sommes. Or, notre monde change à grande vitesse et les réalités linguistiques évoluent aussi. Aujourd'hui, la transformation du contexte linguistique rend nécessaire une réforme en profondeur de cette loi.
En réalité, le bilinguisme fait partie de l'identité du Canada depuis le début. En fait, c'est en 1867, l'année de la Confédération, que le français et l'anglais sont devenus les langues officielles du Parlement du Canada.
Au cours des années 1960, le premier ministre Lester B. Pearson — qui portait aussi le nœud papillon, je le souligne en ce jeudi nœud papillon —, a mis sur pied la Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme. La Commission a fait des recommandations sur les mesures à prendre pour que la Confédération canadienne se développe d'après le principe de l'égalité entre les Canadiens francophones et les Canadiens anglophones. Ce sont ces mêmes recommandations qui allaient précéder, quelque temps plus tard, la toute première version de la Loi sur les langues officielles du Canada, qui a été adoptée en 1969, l'année de ma naissance.
Pour la première fois, la Loi a fait du français et de l'anglais les langues officielles du Canada, pas seulement du Parlement, mais du Canada. Elle stipulait que les Canadiens avaient le droit d'accéder aux services fédéraux dans la langue officielle de leur choix.
En 1988, la nouvelle version de la Loi sur les langues officielles a mis à jour et précisé les droits linguistiques des citoyens et les obligations des institutions fédérales.
Comme la Chambre le sait, notre gouvernement a pris des mesures importantes au cours des dernières années en modifiant d'abord le Règlement sur les langues officielles pour servir le public, puis maintenant la Loi sur les langues officielles.
Nous avons tenu de vastes consultations auprès de nombreux intervenants et avons écouté ce qu'ils avaient à dire. Leurs commentaires étaient essentiels dans le cadre de la modification du Règlement afin que celui‑ci devienne plus inclusif et soit représentatif de la société canadienne.
Ces modifications, qui seront mises en œuvre au cours des prochaines années, donneront lieu à la création de quelque 700 nouveaux bureaux bilingues dans tout le pays. II s'agit d'un grand pas en avant pour les services aux Canadiens dans la langue officielle de leur choix.
En première ligne et dans les coulisses, ce sont nos fonctionnaires fédéraux qui fournissent ces services. Chaque jour, ils communiquent avec les Canadiens dans la langue officielle de leur choix. Le gouvernement s'est engagé à fournir des services fédéraux dans les deux langues officielles et à promouvoir une fonction publique qui favorise l'utilisation du français et de l'anglais.
Nous avons fait d'importants progrès, puisque la fonction publique fédérale d'aujourd'hui est beaucoup plus bilingue qu'elle ne l'était quand je suis né. Aujourd'hui, plus de 90 % des cadres de la fonction publique occupent des postes bilingues. Dans les sondages, la plupart des employés indiquent qu'ils se sentent libres d'utiliser la langue de leur choix au travail, mais nous savons que le système n'est pas parfait et que nous devons faire mieux.
Le projet de loi marque une étape importante dans la modernisation et le renforcement de la législation sur les langues officielles. Je vais me permettre de présenter les changements proposés dans le projet de loi.
Le projet de loi ne fera pas que conférer au Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada le pouvoir de surveiller la conformité des institutions fédérales à leurs obligations linguistiques, il obligera le ministère à le faire.
De plus, le Secrétariat collaborera avec Patrimoine canadien afin d'établir des politiques et des règlements qui aideront les institutions fédérales à prendre des mesures positives pour favoriser l'épanouissement des communautés de langue officielle en situation minoritaire et promouvoir la dualité linguistique dans la société canadienne. Ces politiques et règlements permettront aussi de tenir les institutions fédérales responsables à cet égard.
Il sera davantage possible de faire que les institutions fédérales respectent leurs obligations en matière de langues officielles. Cela permettra aussi d'augmenter la capacité linguistique de notre fonction publique.
Or, que signifient ces changements pour les Canadiens? Cela signifie probablement deux grandes choses: un plus grand nombre de services pour tous les Canadiens dans la langue officielle de leur choix, ainsi qu'une attention accrue aux besoins des communautés canadiennes de langue officielle en situation minoritaire.
Depuis les 50 dernières années, la Loi sur les langues officielles a non seulement accordé aux Canadiens des droits linguistiques fondamentaux, mais a aussi façonné l'identité de notre pays. C'est un pays qui respecte et célèbre la diversité et l'inclusion.
Je pense que le Canada a fait un choix original. Il ne l'a pas fait exprès, il y a été forcé. Les Français sont arrivés sur le continent nord-américain, dans ce Nouveau Monde et, grâce à la gentillesse et l'accueil des Autochtones, ils ont pu survivre aux hivers très froids et ont compris que personne ne pouvait faire cavalier seul ici, mais qu'il fallait travailler ensemble et collaborer.
Quand les Britanniques sont arrivés en Amérique du Nord plus tard, au lieu de faire ce qu'ils ont fait dans plusieurs autres pays et de normaliser les différentes sociétés, ils ont fait de la place aux Français. Ils leur ont permis de maintenir leur culture, leur éducation et leur système de lois, et les francophones ont pu garder cette identité. Le Canada est donc un pays pas comme les autres.
Il faut tout de même souligner qu'au fil des années, des décennies et des siècles, le Canada a développé ce trait de caractère qui nous pousse à accommoder l'autre au lieu de simplement lui imposer notre point de vue. Pour moi, cela se reflète dans les langues officielles du Canada et il faut nous assurer de faire leur promotion, en particulier pour les Canadiens qui font partie des groupes vivant en situation minoritaire partout au Canada.
La Loi sur les langues officielles est plus qu'une simple loi. Elle est le reflet de l'évolution de notre pays et fait partie de notre identité canadienne. Ce projet de loi renforce le bilinguisme dans l'ensemble du pays pour permettre aux Canadiens d'avoir accès aux services dans la langue officielle de leur choix.
Sur ce, j'invite tous les députés à travailler ensemble et à appuyer ce projet de loi important.
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Monsieur le Président, parlons-en, de vos racines acadiennes. En tant que représentant de la circonscription Nova‑Ouest, vous représentez deux régions francophones en situation minoritaire qui sont assez impressionnantes. On a eu l'occasion d'en parler ensemble. Certains de mes collègues vont peut-être rire un peu, on parle de « par-en-haute » et de « par-en-bas ». On entend là la consonance acadienne des noms. Vous avez toujours, depuis que je vous connais, soutenu ces communautés francophones en situation minoritaire et défendu leurs intérêts. Le fait que vous vous soyez levé ce soir pour nous rappeler que vous êtes un Acadien de souche, donc un francophone de naissance, nous montre à quel point, pour vous, le fait francophone, non seulement en Nouvelle-Écosse, mais dans tout le Canada, est important. Je vous remercie beaucoup de nous avoir apporté cette petite précision à la suite de l'intervention de mon collègue de .
Cela m'amène à parler de cette Confédération canadienne qui a été créée en 1867, il y a 155 ans, par l'union de deux peuples fondateurs, l'un francophone et l'autre anglophone, avec, évidemment, la contribution des Premières Nations.
C'est de cet esprit fondateur que je veux parler, de cet esprit de collaboration, qui doit être, encore aujourd'hui, 155 ans plus tard, au cœur de l'action gouvernementale. En 2022, quand nous élaborons des lois et quand nous appliquons différentes politiques ici, au Canada, nous devons absolument garder toujours en tête le fait que deux nations, l'une francophone et l'autre anglophone, ont décidé de fonder ensemble ce grand pays, le Canada,.
L'un des éléments essentiels de cette collaboration, depuis le début, est la langue française. La langue française fait partie de l'identité du Canada. C'est donc, comme je le mentionnais, au gouvernement fédéral de veiller à l'épanouissement des communautés francophones, et ce, d'un océan à l'autre.
Je pense entre autres aux communautés acadiennes, comme la vôtre, monsieur le Président, surtout aux communautés en situation minoritaire et les communautés francophones de « par-en-haute » et de « par-en-bas ». Je pense que je vais aimer utiliser ces noms. Pour situer les gens, on parle de Baie Sainte‑Marie et d'Argyle, si je ne me trompe pas.
Monsieur le Président, vous voyez, nous avons jasé ensemble un peu, vous avez eu l'occasion de me faire le portrait de cette communauté.
Il y a également des communautés franco-ontariennes, des communautés franco-manitobaines, fransaskoises et franco-albertaines. J'ai eu l'occasion d'aller visiter, avec l'un de mes collègues, des communautés francophones en Alberta, notamment la municipalité de Falher. C'est assez surprenant.
Quand on se promène en Alberta, qu'on arrive au milieu de cette province, qu'on entre dans un village et qu'on a vraiment l'impression d'être dans un environnement entièrement francophone, eh bien, c'est la réalité, ce n'est pas qu'une impression. On sort, on parle avec les gens dans les commerces et dans les restaurants. Le français y est dominant.
Il y a donc encore une belle grande présence francophone dans plusieurs régions du Canada. Or, ce qu'on attend du gouvernement fédéral, c'est qu'il pose des gestes et qu'il ne se limite pas à parler de l'importance des communautés francophones pour le Canada. Il est temps de passer à l'action. Malheureusement, par le passé, au lieu de passer à l'action, les libéraux de ce ont souvent fait la sourde oreille aux différentes demandes des communautés francophones et du Québec.
Depuis des années, ils se targuent de vouloir promouvoir la francophonie canadienne, mais on doit le dire, pour certains libéraux, les francophones sont une minorité parmi d'autres, alors qu'on doit absolument toujours s'opposer à cette prémisse, qui est totalement fausse. Cela remonte à l'histoire de la création de la Confédération.
La modernisation de la Loi sur les langues officielles a été reportée d'année en année, malgré la promesse qu'avaient faite les libéraux aux Canadiens lors de la campagne électorale de 2015. Plusieurs organisations francophones, dont la Fédération des communautés francophones et acadienne, et les commissaires aux langues officielles ont demandé pendant des années une réforme en profondeur de la Loi sur les langues officielles.
Rappelons que cette modernisation a été proposée par les libéraux en 2018. C'était aussi une promesse électorale de 2019. Finalement, un premier projet de loi modernisant la Loi, le projet de loi , a été déposé en juin 2021. Qu'est-il advenu du projet de loi C‑32? Il est mort au Feuilleton, parce que le premier ministre a décidé, en plein été et en pleine pandémie, de déclencher des élections inutiles et coûteuses qui nous ont obligés à repartir à zéro encore une fois.
La dernière modernisation de la Loi sur les langues officielles a été celle de M. Brian Mulroney, premier ministre conservateur, qui était très fier, lui aussi, de ses racines québécoises et francophones.
Depuis des décennies, les libéraux et le premier ministre refusent de reconnaître une chose qui est primordiale, si on veut s'assurer de la survie du français. C'est que, des deux langues parlées à l'origine lors de la Confédération, une seule est menacée, aujourd'hui. Je vais le dire de façon claire: le gouvernement fédéral doit protéger le français en priorité, toujours et encore. C'est le rôle du gouvernement fédéral.
La langue française, ce n'est pas seulement un instrument de communication. Ce n'est pas seulement l'âme de la nation québécoise, c'est aussi l'âme du Canada. C'est le témoignage d'une longue histoire. Le gouvernement fédéral a le devoir de protéger la langue française et de maintenir son importance dans ses gestes quotidiens, dans l'application des différentes lois, dans l'application des différents règlements. De cela, nous ne démordrons pas de ce côté-ci de la Chambre.
Cela fait des années que les conservateurs demandent aux libéraux de moderniser la Loi sur les langues officielles. Nous avons proposé plusieurs mesures pour protéger la langue française au Québec et dans le reste du Canada, c'est-à-dire en milieu minoritaire. Je veux saluer le travail extraordinaire de mes collègues les députés de et de qui ont travaillé très fort au dossier de la Loi sur les langues officielles. Ils ont rencontré plusieurs groupes de toutes les régions du Canada. Ils ont tenu des discussions, ils sont allés chercher des avis, des commentaires, afin qu'on puisse avoir l'heure juste sur la réalité des gens qui vivent en français partout au Canada, majoritairement au Québec, mais dans toutes les régions du Canada.
Comment fait-on pour vivre en français? Est-ce qu'on peut obtenir des services en français? Est-ce qu'on a suffisamment de soutien en français? Est-ce qu'on est capable d'élever nos familles en français ailleurs au Canada?
C'est particulièrement important dans les régions et dans les communautés francophones en situation minoritaire. Je crois que c'est un élément qui a échappé au gouvernement dans la mouture actuelle du projet de loi .
En plus de vouloir moderniser la Loi, nous avons aussi proposé d'autres choses, comme l'augmentation des pouvoirs du commissaire aux langues officielles. Nous souhaitons que le Conseil du Trésor ait l'autorité nécessaire pour s'assurer que la Loi est appliquée dans tous les ministères fédéraux. Nous avons aussi suggéré la création d'un tribunal administratif des langues officielles pour régler les litiges qui vont porter sur la Loi, pour donner des sanctions plus sévères aux contrevenants, en plus d'ajouter des obligations formelles plus sévères à la partie VII de la Loi.
Ensuite, nous avons travaillé pour offrir un financement fédéral aux établissements d'enseignement postsecondaires francophones en milieu minoritaire, comme l'Université de Moncton, le Campus Saint‑Jean de l'Université de l'Alberta, l'Université de l'Ontario français. Nous avons aussi proposé la création d'une nouvelle enveloppe budgétaire de 30 millions de dollars par année, tout en participant à tout futur financement, et en plus de collaborer dans l'atteinte de ces objectifs-là avec les provinces.
Par l'intermédiaire du Programme des langues officielles en enseignement, nous avons proposé d'augmenter le soutien à l'éducation de langue française aux niveaux primaire et secondaire, afin de mieux refléter la croissance démographique des élèves francophones. Oui, il y a une croissance démographique dans plusieurs régions où les communautés francophones sont en situation minoritaire.
De plus, pour nous assurer que le poids démographique des minorités francophones hors Québec est maintenu, nous avons proposé d'augmenter le nombre d'immigrants de langue française, pas uniquement au Québec, mais partout au Canada.
Voilà certaines des mesures que nous avons proposées pour la protection des minorités francophones et de leurs droits.
Comme l'a dit le député de , le gouvernement a malheureusement pris son temps. En fait, il lui a fallu sept ans avant de présenter son projet de loi. Il a dit qu'il fallait bien faire les choses. Malheureusement, malgré les sept années de consultations, de pressions et de conseils, il semble que le gouvernement n'a pas tout à fait écouté les demandes des gens qui sont directement concernés par la refonte de la Loi sur les langues officielles.
Plusieurs éléments majeurs et importants ont été laissés de côté par le gouvernement libéral, mais j'en parlerai un peu plus tard.
Il a fallu sept années de travail. Or il semble qu'on a perdu quelques mois pendant lesquels on a fait autre chose que s'occuper de la Loi sur les langues officielles.
Selon nous, le projet de loi constitue une réponse législative plutôt faible au problème du déclin du français au pays. Comme nous l'avons déjà mentionné, il aurait fallu de véritables réformes, pas seulement des petits ajustements.
Comme il a fallu sept années de travail, nous nous attendions que le projet de loi des libéraux couvre tout le portrait, tout le dossier, tous les problèmes et toutes les situations. Or il semble que le projet de loi est malheureusement dépourvu des principales réformes promises par les libéraux.
Comme je l'ai dit, les libéraux auraient pu agir beaucoup plus tôt, non pas pour déposer un projet de loi, mais pour protéger le français au Canada. Ce qui nous préoccupe, ce n'est pas qu'on modifie le projet de loi et qu'on change des règlements ou des règles, entre autres. Notre rôle et le but que nous visons, c'est de protéger le français au pays.
Dans sa mouture actuelle, le projet de loi ne va malheureusement pas permettre d'arrêter le déclin du français, ni au Canada ni au Québec.
Comme toujours, les libéraux sont forts quand vient le temps de parler, mais ils le sont moins quand vient le temps d'écouter. Ils n'ont pas mis en œuvre les conseils qu'ils ont reçus des organismes francophones, dont la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada. Cette dernière demandait entre autres d'éliminer le fractionnement des pouvoirs entre le Conseil du Trésor et Patrimoine canadien. Il s'agissait pourtant d'une demande concrète, claire et précise qui aurait permis de donner du mordant à la réforme de la Loi sur les langues officielles. Je vais y revenir un peu plus tard.
Le projet de loi n'a pas de mordant. Le résultat, c'est qu'il n'y a aucune obligation de résultat. Le projet de loi C‑13 est rempli de bonnes intentions, mais il contient peu de choses qui vont vraiment permettre d'arrêter le déclin du français. Quand on va soulever certaines situations, le gouvernement ne va pas savoir qui peut faire quoi; personne n'aura les moyens d'agir pour régler la situation.
Mme Liane Roy, la présidente de la FCFA, a dit: « Il y a des gains importants, mais il faut encore travailler sur certains points pour se dire mission accomplie. »
Comme peuvent le constater mes collègues, je ne dis pas juste des choses négatives. Certaines personnes ont émis des commentaires positifs, mais d'autres ont émis des commentaires plus cinglants selon lesquels le projet de loi aurait dû aller beaucoup plus loin.
Le président de l'Assemblée de la francophonie de l'Ontario a dit: « Si je compare [avec le précédent projet de loi, soit le projet de loi ], il y a des améliorations [...] » On a donc pris un peu de temps pour l'améliorer, mais ce n'est pas encore suffisant. On doit continuer de l'améliorer.
Parmi les problèmes les plus importants dans le projet de loi , nous en avons identifié six principaux.
Le premier est la coordination pangouvernementale ou la centralisation des pouvoirs au sein d'un seul ministère. Le nouveau paragraphe 2.1(1) charge le ministère du Patrimoine canadien « d'assumer un rôle de premier plan [pour] la mise en œuvre de la présente loi ». Tout le monde reconnaît que Patrimoine canadien n'a pas l'expertise pour gérer les autres ministères, contrairement au Conseil du Trésor. Le peut bien dire à ses collègues de faire quoique ce soit, mais il ne peut rien faire s'ils n'obtempèrent pas, si ce n'est refuser de leur donner des drapeaux pour la fête du Canada. Ce sont les seules menaces que peut faire le ministère du Patrimoine canadien à ses collègues.
Si le Conseil du Trésor avait été chargé d'appliquer la loi, l'histoire aurait été tout autre. C'est lui qui détient les clés du coffre-fort et qui autorise les dépenses de chacun des ministères. C'est lui qui supervise les autres ministères. Le Conseil du Trésor aurait pu amener les autres ministères à appliquer la nouvelle mouture de la Loi sur les langues officielles. Le gouvernement a cependant choisi de prendre le ministère du Patrimoine canadien. C'est une perte d'efficacité et, selon nous, seul le Conseil du Trésor aurait dû être responsable de la mise en œuvre de cette loi, et ce, pour de nombreuses raisons sur lesquelles je reviendrai à un autre moment.
Deuxièmement, on parle de la promotion du français et de l'anglais. La Loi est modifiée pour y préciser des engagements fédéraux, soit l'épanouissement des minorités, la promotion du français et de l'anglais, la protection du français et l'apprentissage dans la langue de la minorité. Comme je l'ai dit, nous croyons que le terme « engagement » ainsi que les définitions de ces engagements devraient être précisés. Le Conseil du Trésor devrait là encore être chargé de cette partie et de l'ensemble de la Loi, contrairement à ce que propose le projet de loi . Par ailleurs, la partie VII de la Loi n'est pas couverte par le nouveau pouvoir d'ordonnance du commissaire aux langues officielles, ce qui pose un autre problème.
Troisièmement, il y a l'immigration. Le nouvel article 44.1 propose que le « ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration adopte une politique en matière d'immigration francophone afin de favoriser l'épanouissement des minorités francophones du Canada ». Or, il n'y a aucune obligation de résultat pour s'assurer que les cibles, les objectifs et les indicateurs sont atteints et respectés. Ce ne sont encore que de belles intentions.
Quatrièmement, le commissaire aux langues officielles se voit confier trois pouvoirs: conclure des accords de conformité avec les institutions fédérales qui contreviennent à la Loi; enjoindre par ordonnance toute institution fédérale à remédier à une contravention à la partie IV; et imposer des sanctions administratives à un nombre restreint d'entreprises de transport de voyageurs qui contreviennent à la partie IV. Nous croyons que ces pouvoirs devraient s'étendre à d'autres parties de la Loi, notamment à la partie VII. De plus, le montant maximal de ces sanctions administratives et pécuniaires est de 25 000 $ et nous nous demandons quel sera l'effet dissuasif d'une amende de 25 000 $ sur une entreprise comme Air Canada, qui avait un chiffre d'affaires de plus de 2 milliards de dollars en 2021.
Cinquièmement, le projet de loi ne prévoit aucune obligation pour le gouvernement du Canada d'inclure des clauses linguistiques dans les ententes négociées avec les autres paliers gouvernementaux pour s'assurer du respect des obligations de la Loi, surtout lorsque des transferts fédéraux sont impliqués. Pourtant, la Cour d'appel fédérale a déclaré invalides les ententes dépourvues de clauses linguistiques: le gouvernement aurait dû s'y fier un peu.
Sixièmement, le projet de loi comporte un volet important sur les entreprises privées de compétence fédérale et institue une nouvelle loi, la Loi sur l'usage du français dans les entreprises privées de compétence fédérale et apportant des modifications connexes à d'autres lois. Au Québec, les entreprises auraient le droit de choisir entre le régime québécois et le régime fédéral. Autrement dit, cela revient à laisser aux entreprises le choix de se faire punir ou non.
Pour nous, ce projet de loi doit être amélioré. Pour ces raisons, je propose l'amendement suivant:
Que la motion soit modifiée par substitution, aux mots suivant le mot « Que », de ce qui suit:
« le projet de loi C‑13, Loi modifiant la Loi sur les langues officielles, édictant la Loi sur l'usage du français au sein des entreprises privées de compétence fédérale et apportant des modifications connexes à d'autres lois, ne soit pas maintenant lu une deuxième fois mais que l'ordre soit révoqué, le projet de loi retiré et l'objet renvoyé au Comité permanent des langues officielles. »
En conclusion, le projet de loi C‑13 ne constitue pas la réforme promise par les libéraux depuis des années et ne concrétise pas leurs promesses.
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Monsieur le Président, c'est avec énormément de plaisir que je me prononce aujourd'hui sur le projet de loi C-13 comme Acadien et comme quelqu'un qui a travaillé en éducation pendant une trentaine d'années et qui a consacré beaucoup de temps de sa vie à l'avancement du français en Nouvelle-Écosse et partout au Canada.
Je veux remercier la ainsi que de leur travail acharné depuis plusieurs années. Comme ancien président de la Section canadienne de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie et actuel président-fondateur du caucus libéral des communautés de langue officielle en situation minoritaire, ces années ont été intéressantes pour continuer mon travail.
Je vais commencer par certains points très importants. Mon collègue Raymond Daigle, un ancien sous-ministre, m'a raconté qu'au début des années 1960, il avait lu un article qui disait que, si la tendance continuait, il n'y aurait plus de français en Nouvelle-Écosse. Ce n'est pas certain que cela serait passé par chez moi ou chez vous, monsieur le Président, mais c'est ce que l'article annonçait.
Pour être honnête, mon père m'a raconté aussi que, au début des années 1960, le curé et la communauté discutaient de la suppression du seul cours de français qui existait dans nos écoles, ce qui aurait signifié l'élimination complète du français. C'était totalement inacceptable. Mon père et la communauté se sont levés pour défendre ce droit, mais ils n'avaient pas d'outils pour les aider. Par contre, quelque chose est tombé du ciel en 1969: la Loi sur les langues officielles.
Puisqu'il n'y avait pas d'école française, j'ai fait toute ma scolarité, de la maternelle à la 12e année, en anglais. Ensuite, je suis allé à l'Université de Moncton, en français.
Cette loi est venue et elle indiquait clairement que le Parlement du Canada allait fonctionner en français et que les institutions fédérales qui représentaient le gouvernement du Canada ainsi que les Canadiens avaient le choix d'utiliser le français ou l'anglais. C'était une protection exceptionnelle pour les gens du Canada et de mon coin du pays.
Qu'est-il arrivé après 1969? En 1982, la Charte canadienne des droits et libertés a été promulguée, donnant des privilèges et des droits aux Canadiens et aux Canadiennes.
L'article 23, consacré à l'éducation, constitue une partie essentielle de cette Charte. L'alinéa 23(1)a) concerne la langue d'instruction des citoyens qui ont d'abord appris le français et qui le parlent toujours. L'alinéa 23(1)b) concerne la langue d'instruction des citoyens qui ont étudié dans une école française. Le paragraphe 23(2) concerne le droit de choisir pour tous ses enfants la langue d'instruction dans laquelle étudie un enfant de la famille.
Je vais en parler plus tard, mais on n'avait encore jamais recensé les parents et les enfants qui ont étudié en français. C'est notre gouvernement qui a fait cela pour la première fois cette année et c'est très important.
En 1982, la Charte canadienne des droits et libertés est donc venue ajouter ce droit à l'éducation. Les provinces ont signé, mais, tout à coup, se sont mises à soulever des interrogations: quels pouvoirs allaient-elles avoir? Faudrait-il n'installer qu'une petite classe française et pour combien d'élèves, parce que cela allait dépendre du nombre d'élèves?
Il a donc fallu aller en cour à plusieurs reprises. En 1990, l'arrêt Mahé a changé le monde de l'éducation en français au Canada. Un parent de l'Alberta demandait le droit non seulement à l'éducation française, mais aussi à la gestion scolaire « par nous et pour nous », ce qui constituait une grande différence. La Cour suprême lui a donné raison.
Tout à coup, on a vu des conseils scolaires francophones se développer partout au Canada. Chez nous, en Nouvelle-Écosse, le conseil scolaire francophone a vu le jour en 1996. Je pense qu'aujourd'hui, il y a 28 conseils scolaires francophones partout au Canada, 174 000 élèves qui étudient en français langue première — pas en immersion —, et 700 écoles en français langue première. C'est exactement ce qui s'est passé.
Il y a eu d'autres arrêts après cela, bien sûr, comme l'arrêt Doucet-Boudreau relatif aux nouvelles écoles en Nouvelle-Écosse, et l'arrêt Arsenault-Cameron relatif aux distances à parcourir à l'Île-du-Prince-Édouard.
En 2005, je suis devenu le directeur général du Conseil scolaire acadien provincial. Il y avait deux grandes tâches à accomplir. Il fallait assurer la qualité de l'éducation et assurer la construction d'écoles et de centres communautaires. Il fallait travailler avec le gouvernement provincial ainsi qu'avec le ministère du Patrimoine canadien. On a fait du chemin de ce côté.
Cependant, il faut dire qu'il y avait une hésitation chez les parents. En effet, leurs enfants ne parlaient pas la langue française. Ils l'avaient perdue. C'était des Acadiens: des LeBlanc, des Samson, des Fougère, des Landry, des Arseneault, des Béliveau. On retrouve, bien sûr, des noms comme ceux-là au Québec et partout. Ces parents se demandaient si leurs enfants allaient perdre un an ou deux ans d'éducation parce que cela prendrait une année ou deux pour apprendre le français.
C'est à ce moment-là que le Conseil scolaire, sous mon leadership, a pu développer un programme de quatre ans pour tous ces élèves qui arrivent. Ce n'était pas l'école formelle. C'était informel. Il s'agissait de jouer en français, de s'amuser en français et d'apprendre en français. Voilà qui est bien. Les parents ont commencé à nous envoyer leurs enfants. Cela a donné une chance à l'école et aux enseignants de bâtir des relations avec les familles et avec la communauté. Puis, tout à coup, on a vu notre population étudiante passer de 4 000 à 6 000 élèves, que nous avons aujourd'hui, ce qui est vraiment exceptionnel.
Ensuite, en 2015, j'ai été élu député de Sackville—Preston—Chezzetcook. Chezzetcook est la deuxième plus ancienne communauté francophone de la Nouvelle‑Écosse. Maintenant, j'ai l'occasion de faire quelque chose. Pendant 32 ans, j'ai été un acteur sur le terrain. Je faisais de la vente, je discutais, je poussais, je convainquais le gouvernement, le ministère du Patrimoine canadien et les autres de nous appuyer. Maintenant, depuis 2015, je suis un décideur. Quand j'étais un acteur, je blâmais les décideurs. Ils n'allaient pas assez vite. Je leur disais de se dépêcher, d'adopter des lois pour nous aider. Maintenant, je suis devenu un décideur, et il va falloir que je travaille rapidement. C'est exactement ce qu'on a pu faire.
Qu'avons-nous fait depuis 2015?
Nous n'avons pas dormi comme l'a prétendu le député de l'opposition. Nous nous sommes attelés directement à la tâche. Quels projets avons-nous réalisés?
Je me souviens du Bureau de la traduction. Les conservateurs, pendant leurs 10 années au pouvoir, avaient coupé, coupé et coupé dans le personnel et ils envoyaient les textes se faire traduire par des compagnies de consultation, disant qu'elles faisaient cela assez bien, que c'était correct, que cela n'avait pas besoin d'être parfait. Nous étions les meilleurs au monde en traduction. Les gens venaient de partout pour voir comment nous faisions cela. Il a fallu remettre cela en place.
Ensuite, les conservateurs ont commencé à couper les fonds destinés aux contestations judiciaires. Il n'y avait pas d'argent pour faire ceci ou pour faire cela. Nous ne pouvions rien contester pour faire respecter nos droits. Qu'avons-nous fait? Nous avons remis cela en place pour assurer que les gens aient à nouveau accès à ce programme. J'ai parlé tantôt du dénombrement des élèves. C'est très important. La nomination de juges bilingues à la Cour suprême est une autre de nos réalisations au cours des six dernières années.
En réalité, le projet de loi est l'ensemble des nombreuses choses que nous avons faites en plus de choses que nous avons entendues et qui ont été avancées en tant qu'arguments. Je remercie la ministre d'avoir pris tout cela et de l'avoir mis dans un projet de loi qui va certainement rendre les Canadiens et les Canadiennes fiers de cette loi si importante.
Parlons maintenant de ce qui se trouve dans ce projet de loi. On y retrouve des changements majeurs. Par exemple, des intervenants nous ont dit que nous devions nous assurer que l'agence centrale est un ministère et qu'une coordination se fait. Qui serait mieux placé pour le faire que le Secrétariat du Conseil du Trésor, qui s'occupe de cela pour tous les ministères? C'est lui qui assure la surveillance, qui fait l'évaluation, qui fait les observations et les suivis nécessaires. La reddition de compte, c'est lui qui va s'en charger. C'est une grande amélioration que nous apportons. De plus, le pouvoir qu'il avait de manière discrétionnaire est maintenant une obligation. C'est un grand changement qui va beaucoup aider les gens.
Ensuite, il a regardé les pouvoirs du commissaire. Comment peut-on s'assurer qu'il peut avoir plus d'outils dans son coffre? On lui a donné le pouvoir d'imposer des sanctions. On lui a donné le pouvoir de créer des ententes avec différentes parties pour assurer une conformité, ainsi que le pouvoir de donner des ordonnances. Si on regarde Air Canada aujourd'hui, on pourrait faire des suivis comme cela, donner des sanctions et s'assurer que les gens, les Canadiens et les Canadiennes, qui voyagent avec Air Canada peuvent s'exprimer dans la langue de leur choix. Cette obligation est également là.
Parlons des mesures positives. On a vu dans le jugement Gascon que les mesures positives n'étaient pas assez bien définies. Elles n'étaient pas assez claires et pas assez descriptives. Donc, le juge a dit qu'il fallait lui donner les outils pour être beaucoup plus clair. Voilà ce que le projet de loi vient faire. Il vient vraiment mettre en place des mesures très positives qui vont aider à faire avancer le dossier.
Au sujet des juges bilingues, mes collègues savent que nous en avons nommé trois. C'est fait. Les conservateurs sont toujours contre cela aujourd'hui. Maintenant, c'est cimenté dans cette nouvelle loi impressionnante.
En matière d'immigration francophone, notons que l'immigration au Canada est extrêmement importante. Il y a une pénurie de main-d'œuvre, mais plus encore dans les communautés francophones où on avait une cible de 4,4 %. Cette cible n'a jamais été atteinte, et nous devons l'atteindre. Nous sommes en train de perdre notre poids démographique. C'est sérieux et c'est pour cela que nous proposons, dans le projet de loi C‑13, de mettre en placer une stratégie nationale qui permettra d'établir des objectifs clairs, des cibles claires, des indicateurs clairs et de faire des suivis.
Concernant la langue de travail et la langue de service dans les entreprises de compétence fédérale, notre gouvernement est le premier à reconnaître qu'il y a un déclin du français au Québec. Non seulement on doit appuyer le français à l'extérieur du Québec, mais on doit l'appuyer au Québec et à l'international. C'est exactement ce que nous sommes en train de proposer. Les entreprises de compétence fédérale devront collaborer pour s'assurer que le français continue d'être promu.
Comme chacun le sait, notre gouvernement est responsable d'offrir des services bilingues. Nous devons être des leaders à cet égard. Pendant la pandémie, on a vu qu'il y avait des manques. Nous apportons donc des correctifs par le truchement du projet de loi C‑13 afin d'assurer l'usage des deux langues officielles dans les situations d'urgence et dans les opérations quotidiennes. Nous avons également modifié la réglementation pour les services en français. Ainsi, il y aura 700 bureaux bilingues supplémentaires partout au Canada. Ce sont des changements majeurs.
J'ai donné un bon aperçu de la situation, mais il y a quand même des questions et c'est raisonnable. Il y a des discussions. C'est pour cela qu'on a des comités, notamment le Comité permanent des langues officielles. Tous les comités sont indépendants. Donc, il y aura des discussions et des débats de ce côté.
Les intervenants avancent certains points intéressants. C'est important de le mentionner. Par exemple, le fait que le Conseil du Trésor peut déléguer sa responsabilité pour ce qui est de la coordination, cela me fait peur. Cela ne me fait pas peur pour nous, cela me fait peur si jamais les conservateurs sont au pouvoir. Concernant les juges bilingues et les contestations judiciaires, on pourrait perdre tout cet avancement. C'est un élément majeur et je crois que le Comité doit en débattre davantage.
Il y a aussi la question des clauses linguistiques. Mon collègue qui est actuellement a été le premier à insérer une clause linguistique pour les garderies scolaires, c'est donc faisable. Oui, c'est vrai qu'on a des mesures politiques qui viennent enrichir et donner des outils. On peut certainement regarder comment on pourrait s'assurer du résultat. Moi, j'ai été sur le terrain. L'argent arrive, on n'est pas consulté et on n'a pas sa part. Il faut faire quelque chose pour atteindre cet objectif et je propose de mettre en place l'obligation d'avoir des clauses linguistiques et des moyens de communiquer avec les organismes ou les conseils scolaires si les provinces n'avancent pas sur les dossiers. On a vu qu'elles n'avancent pas toujours et qu'elles ne fournissent pas leur part d'investissement pour l'infrastructure, ce qui fait qu'on n'avance pas. Il faut donc s'assurer de trouver des moyens à cet égard.
Les mesures positives constituent le troisième élément que je trouve très important. Comme je l'ai expliqué tantôt, le juge Clément Gascon a expliqué qu'il faut vraiment décrire ces mesures.
Le projet de loi C‑13 fait un travail exceptionnel. D'ailleurs, je tiens à féliciter l'équipe qui a fait ce travail de renforcement en lui donnant du mordant. Cela nous permet de nous assurer qu'il y aura des changements majeurs sur le terrain.
Je vais donner des exemples.
On pourrait être encore un peu plus précis et dire « des mesures positives nécessaires ». Cela peut changer, dépendamment de la situation. Des mesures positives, cela ne veut pas dire un cinq à sept. En fait, c'est quelque chose que l'on fait sur le terrain.
Voici un exemple. La Colombie‑Britannique a cherché un terrain pendant 20 ou 25 ans. Il n'y avait pas de terrain où construire une école francophone.
Aujourd'hui, grâce à la vente d'un terrain du gouvernement fédéral, le Conseil scolaire va pouvoir construire une école francophone, parce que c'est important pour les langues officielles.
Halifax vient juste de vivre la même expérience. Le Conseil scolaire acadien provincial, dont j'ai déjà été le directeur général, cherchait, lui aussi, un terrain. Une vente de biens immobiliers du Canada a permis au gouvernement de la Nouvelle‑Écosse d'acheter un terrain pour le Conseil.
Comme on peut le voir, tout fonctionne bien quand les règles du jeu sont bien établies et quand elles visent une réelle égalité entre le français et l'anglais au Canada.
Pour conclure, je vais parler de quelques éléments importants.
Premièrement, le gouvernement du Canada est un leader. Il doit en être un. Sinon, qui va l'être?
Deuxièmement, il faut combattre l'assimilation qui continue et trouver des correctifs. C'est très important; la question ne se pose même pas.
Troisièmement, je suis très fier des changements apportés sur le plan de l'éducation. Quand j'étais directeur général, on disait que l'école publique était seulement destinée aux enfants de 5 à 18 ans. On disait qu'on ne devait pas s'inquiéter pour eux.
Notre gouvernement a apporté un changement en ajoutant les élèves de prématernelle et les étudiants du postsecondaire. Ce que je me demande, c'est pourquoi on ne les inclut pas de la naissance à la mort. La mort, ce n'est pas un mot qu'on aime. Je vais le remplacer par « adulte bien âgé ».
Enfin, je termine en disant un bout de phrase que j'ai emprunté à un texte dont j'ai oublié l'auteur: l'histoire du français au Canada continue d'être écrite.
Ce projet de loi va nous amener très loin. Je sais que mes petits‑enfants et que les petits‑enfants de mes collègues vont en profiter bien longtemps.
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D'accord, madame la Présidente, ça va aller.
Avec le député de , j'ai été porte-parole du Mouvement Montréal Français. Cela remonte à bien longtemps.
J'avais organisé une manifestation qui s'appelait J'aime ma langue dans ta bouche.
L'idée de faire vivre le français, c'est de faire du français au Québec le territoire où tout le monde se rejoint, la place où tout le monde se rencontre, le lieu de jonction de tous les gens qui sont sur le territoire du Québec. Les gens débarquent de partout au monde. Ils viennent chez nous. Ils adoptent notre pays. Ils viennent au Québec. Ils viennent à Montréal. Ils viennent à Québec. Ils viennent à Matane. Ils viennent à Rimouski. Ils viennent à Sept‑Îles. Alors il faut faire en sorte que ce soit le lieu de rencontre privilégié de tous ces gens qui habitent notre territoire.
Quand nous avions fait ce spectacle, je m'en souviens, nous n'avions peur de rien, alors, nous avions organisé un spectacle de 12 heures. J'étais un peu excessif à l'époque. Cela commençait à midi et finissait à minuit. C'était interminable, mais nous envoyions un signal fort. À ce spectacle, j'invitais des gens de partout, des artistes qui étaient au Québec depuis deux ans, six mois, douze ans, vingt ans. Je les invitais à venir fêter la culture québécoise, fêter autour de cette langue qu'on partage tous. C'était tellement extraordinaire. C'est encore disponible sur les réseaux sociaux.
Je me rappelle très bien qu'il y avait un groupe de musique tamoul qui s'appelait Ananda Prasad. C'était au Lion d'Or, sur la rue Papineau, à Montréal. Ces musiciens étaient venus en costumes traditionnels. C'était très beau. Ils étaient assis sur la scène du Lion d'Or. Derrière, j'avais mis une photo de Serge Fiori. Ils avaient des instruments du Sud-Est asiatique. C'était très beau. Ils ont chanté Comme un sage d'Harmonium. C'était tellement beau avec les accents de cette musique. Il y avait, sur la scène du Lion d'Or ce soir-là, comme une rencontre entre nous et eux, entre la langue et les gens de partout au monde. C'était magnifique. C'était extraordinaire.
Nous avions fait cela un an ou deux. À un moment donné, je me suis calmé. Le spectacle est passé de douze heures à deux heures. Après, nous avons compris que donner ce spectacle au Lion d'Or était particulier, parce que cette salle est sur le Plateau Mont‑Royal. Nous voulions convaincre les gens de cette idée de faire du français le lieu de rencontre, mais tout le monde, sur le Plateau Mont‑Royal, est convaincu de cela. Enfin, tout le monde l'était, il y a 10 ans. Aujourd'hui, les gens le sont peut-être un peu moins.
Ensuite, nous avons déménagé le spectacle dans Côte‑des‑Neiges. Dans Côte‑des‑Neiges, il se parle 91 langues différentes. Nous nous étions installés dans un parc. Nous avions installé une scène. Je me souviens. Yann Perreau était venu, ainsi que Catherine Major et d'autres artistes d'un peu partout. C'était vraiment magnifique. Nous essayions de séduire les gens, de mener les gens à dire que notre langue est magnifique et que notre culture est extraordinaire. Nous voulions qu'ils l'adoptent, qu'ils se joignent à cette aventure fondamentale pour nous: faire de ce petit coin d'Amérique une terre francophone.
On se rend compte aujourd'hui que cela n'a pas complètement fonctionné. On le voit. La langue n'est pas une simple suite de phonèmes utilitaires. Ce n'est pas juste « passe-moi le beurre », « est-ce qu'on va au cinéma ce soir » ou « je vais aller faire réparer ma voiture ». Ce n'est pas seulement des trucs utilitaires. Une langue, ça dit des choses. Ça dit ce qu'on est, ça parle de nos valeurs et de notre histoire.
Je veux raconter une chose. Serge Bouchard, on le connait, est cet anthropologue qui écrivait des livres et qui est décédé il y a un an ou deux. Serge a écrit des choses extraordinaires. Il avait une chronique à la radio de Radio‑Canada. Il racontait des choses sur la langue, sur la culture, sur toutes sortes de sujets. Dans l'un de ses livres, il raconte quelque chose d'absolument fascinant. Cela montre comment, une langue, voire un mot, peut dire tant de choses sur ce que nous sommes. C'est cela qui est en jeu. C'est cela qui pourrait disparaître.
Au Québec, quand on dit le mot « orignal », il y a des images qui surgissent. Cela parle de quelque chose.
Nous avons tous des oncles, des pères, des grands-pères ou des frères qui partaient à la chasse, l'automne. Ils revenaient avec des panaches d'orignaux. Ils les mettaient sur le capot de leur voiture et se promenaient dans les rues des villes. Au Québec, tous ceux qui ont 40 ans ou plus connaissent ça. Le mot « orignal » fait donc partie de la culture québécoise. Le mot « orignal » est un mot basque. C'est tellement extraordinaire de penser cela. Il vient du mot oreinak, qui veut dire « chevreuil ». Comment se fait-il qu'on ait adopté cela? L'histoire est fascinante. Les Basques venaient pêcher dans le fleuve du Saint‑Laurent, avant l'arrivée de Jaques Cartier, avant l'arrivée de Champlain et avant l'arrivée des Français. Ils rencontraient les Innus de la Basse-Côte‑Nord. Ils venaient pêcher, ils s'arrêtaient sur la plage et ils fraternisaient avec les Innus, ils leur parlaient et ils échangeaient. On imagine la scène.
On imagine une journée, ils sont en train de manger sur le bord de la plage quelque part dans le coin de Blanc‑Sablon ou encore plus au nord. Ma collègue de pourrait me parler davantage. On imagine qu'un jour, un orignal est sorti du bois. C'est sûr que les Innus avaient un mot pour nommer l'orignal, c'est évident. Ils sont ici depuis 20 000 ans, ils avaient certainement un mot pour nommer l'orignal. Il y a probablement un Basque qui a dit que ça s'appelait un oreinak, ou quelque chose du genre. On l'imagine. C'est Serge Bouchard qui racontait cela, mais c'est vraiment intéressant quand on y pense. Or les Innus ont adopté le mot oreinak, qui s'est transformé en « orignal ». Quand Champlain est arrivé, 200 ou 300 ans plus tard, il n'avait jamais vu d'orignaux. Les Innus qui ont rencontré Champlain lui ont dit que c'était un orignal. C'est fascinant, c'est extraordinaire et c'est riche, une histoire. Qui veut que cela disparaisse? Qui veut perdre cela? Qui veut perdre cette richesse?
Le mot « bécosses » fait partie de notre histoire. Je ne sais pas si les anglophones vont comprendre la référence, mais le mot « bécosses » est un mot de la langue populaire québécoise. Il vient de back-house, cela vient de « la maison en arrière ». À l'époque, on faisait nos choses dans une petite cabane derrière la maison. C'est important, ce que je raconte. Cela parle de ce qui est arrivé au Québec.
Il y a tellement de choses intéressantes par rapport à cela. À un moment donné, un menuisier m'expliquait que, au début, quand il commençait à y avoir des toilettes à l'eau dans les maisons, elles étaient surélevées. Voilà pourquoi on appelait cela le « trône ». À une certaine époque, les gens étaient contents de montrer qu'ils avaient des toilettes dans les maisons, plutôt que derrière la maison. C'était important. C'était comme un avancement social de partir de la back-house à la in-the-house, si on peut appeler cela ainsi. Donc, c'était un trône.
Le mot « bécosses » fait rire, mais il parle. On appelle cela ainsi à cause des anglophones. Bon, les anglophones sont arrivés il y a 200 ans. Ils nous ont conquis, ils ont gagné la bataille des plaines d'Abraham. Depuis ce temps, on est pris avec eux. C'est comme ça.
Tout cela pour dire que la culture parle. On partage cela et on veut que cela continue. Quel peuple au monde veut voir disparaître sa culture? Qui veut la perdre? Qui ne veut pas que ses enfants parlent sa langue? Qui ne veut pas que ses enfants se souviennent d'où ils viennent, d'où ils sont partis, de leur histoire et de ce que je viens de raconter? Cela fait partie de ce que nous sommes. C'est extrêmement important. Cela nous définit. On ne peut pas détricoter cela.
Ces rencontres ont eu lieu avec les Innus et avec les personnes qui étaient ici quand on est arrivés, quand les anglophones sont arrivés. Maintenant, tous les immigrants arrivent de partout au monde et ils viennent nous enrichir. Or, au Québec, il faut que nous réussissions ce combat de faire du français le lieu de rencontres privilégiées et l'endroit où nous allons tous communier. C'est vraiment extraordinaire, quand on y pense.
Il ne me reste pas beaucoup de temps. Je vais me faire un cadeau. J'ai apporté L'homme rapaillé, de Gaston Miron. La dernière fois que j'ai pris la parole...
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Madame la Présidente, je vous avise que je vais partager mon temps de parole avec le député de .
En tant qu'habitant d'une région assez éloignée, je pense que c'est important de parler du contexte yukonais.
La population du Yukon est de 40 000 habitants. Il y en a 14 % qui parlent le français et l'anglais et environ 5 %, 1 600 personnes, ont le français comme première langue. Le Yukon a la troisième plus grande population par habitant de francophones au Canada. C'est une communauté dynamique, pleine d'esprit et engagée qui fait beaucoup de progrès depuis des décennies.
La renaissance francophone du Yukon prend ses racines dans les années 1970, après l'adoption de la Loi sur les langues officielles. Renforcée par cet engagement fédéral, la communauté francophone du Yukon a depuis grandi à tous les égards.
Culturellement, la communauté francophone du Yukon est forte. Elle a une influence sur toutes les communautés du Yukon. Le progrès continue. En fait, le Yukon va bientôt ouvrir un centre de santé bilingue. Récemment, on a appris qu'une troisième école francophone ouvrira à Dawson City pour la prochaine année scolaire. Dawson City est située au nord du Yukon. C'est une petite ville qui possède un grand esprit et une très belle histoire.
Au Yukon, le nombre d'élèves dans les classes d'immersion française a explosé. Maintenant, c'est possible d'entendre parler français un peu partout au Yukon.
En tant que francophile, je suis fier de constater le progrès réalisé depuis la mise en œuvre de la Loi sur les langues officielles du Canada.
Personnellement, j'ai grandi, plus ou moins, avec l'histoire des progrès et de l'avancement du français comme langue seconde au Canada. Oui, dans les années 1970, j'ai été inspiré par l'appel de voir un Canada bilingue. J'ai été inspiré par nul autre que Pierre Elliott Trudeau, pour ce qui est de nous comprendre et de surmonter les deux solitudes avec une meilleure compréhension l'une et de l'autre grâce à l'utilisation de la langue de l'autre.
J'ai commencé à suivre un cours d'immersion française en Alberta. J'ai voyagé, j'ai étudié en France. Plus tard, j'ai déménagé à Montréal pendant quelques mois. J'ai vécu et travaillé dans un milieu francophone à l'étranger. J'ai fait de mon mieux pour améliorer mon français au fil des années. Mon français est évidemment loin d'être parfait, mais le noyau est là. C'est assez pour que je puisse participer, au moins dans une certaine mesure, à la communauté francophone, une communauté si ouverte aux francophiles.
Maintenant, ma femme parle le français comme langue seconde. Mes deux enfants, élevés au Yukon, ont fréquenté des établissements francophones pour la majeure partie de leurs années préscolaire et scolaire et sont donc parfaitement bilingues.
Le Yukon a maintenant un si bon noyau de population francophone qu'il attire des gens du Canada, de l'Acadie, du Québec, de la France et d'autres pays francophones qui désirent vivre une vie aventureuse dans une communauté nordique, tout en préservant leur capacité à parler en français.
Au moyen du projet de loi C‑13, nous pouvons aller encore plus loi en appuyant nos communautés de langue officielle en situation minoritaire et ainsi améliorer la richesse de la vie pour nous tous.
Lorsque j'étais en campagne électorale, candidat pour la première fois, j'ai pris connaissance de l'ancien projet et de l'importance pour la communauté francophone d'améliorer davantage le projet de loi. La nécessité d'aller plus vite et plus résolument vers une loi révisée modifiant la Loi sur les langues officielles était l'une des mesures clés que j'avais en tête en tant que nouveau député.
Je suis donc heureux de parler du succès du travail acharné de la part de la , du et de leur équipe, ainsi que des consultations et des analyses qui ont mené au projet de loi .
Ce projet de loi est important pour tous les Canadiens, y compris ceux d'entre nous qui vivent loin du centre et ceux d'entre nous qui vivent dans le Nord. Une loi sur les langues officielles forte est importante pour toutes les langues, y compris les langues autochtones. Je sais que cette fertilisation croisée est bien reconnue au Yukon, avec la préservation et la promotion actives des droits linguistiques, qu'il s'agisse des langues officielles ou des langues autochtones. Chacune sert l'autre.
C'est dans ce contexte que je parle non seulement des importants progrès que nous avons faits, des progrès du projet de loi C‑13, mais aussi des améliorations qui donnent des dents à ce nouveau projet de loi, c'est-à-dire des mesures positives, une agence centrale et une portée dont nous bénéficierons tous.
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Madame la Présidente, je suis heureux de me prononcer sur le projet de loi ce soir. Par contre, je vais un peu briser l'élan de la joie de vivre et de bonheur généralisé.
Je commence en soulignant que c'est la deuxième fois qu'on traite d'un projet de loi comme celui-ci en très peu de temps. La dernière fois, on était bien avancé, mais le projet de loi est mort au Feuilleton parce que notre bon gouvernement a décidé qu'il était grand temps d'avoir une élection. Alors, on recommence.
Ce projet de loi émet des principes fondamentaux: le droit de communiquer avec les institutions fédérales, de travailler dans la langue de son choix et d'avoir des chances égales d'emploi. On émet des engagements généraux, comme promouvoir le français et renforcer la possibilité de faire des apprentissages. Tout cela est très bien, et on constate tout de même certains gains pour les communautés francophones hors Québec. Nous le reconnaissons.
Le grand problème que je vois, ce soir, c'est que le projet de loi C‑13 crée une nouvelle loi. Il crée une nouvelle loi pour venir imposer le bilinguisme au Québec. De plus, cette loi a un problème important. En effet, elle propose aux entreprises privées d'adhérer volontairement à cette loi. Elles ont le droit, soit de se rapporter à cette loi, soit de s'adapter à la Charte de la langue française du Québec. On comprendra que notre choix est assez évident. C'est la Charte de la langue française que nous voulons voir s'appliquer.
De plus, cette loi prévoit pour une des premières fois des sanctions financières. Cela a été mentionné, je pense, par mes collègues du Parti conservateur, tantôt. On parle d'une atroce amende de 25 000 $ qui ne pourra être imposée plus d'une seule fois pour la même infraction. Disons cela à Air Canada, qui est le champion annuel de toutes catégories des plaintes au Commissariat aux langues officielles du Canada, année après année. Air Canada est morte de rire. Elle n'a qu'à payer 25 000 $ une seule fois et ce sera réglé.
Il y a donc bien des choses dans ce projet de loi. Je veux bien être de bonne humeur et me réjouir avec tout le monde. J'apprécie d'ailleurs ces débats où on parle de la langue, parce que c'est l'occasion d'apprécier la qualité du français de plusieurs députés, comme celui de ou celle de , entre autres. C'est magnifique. Cependant, concrètement, il n'y a rien de rose dans ce projet de loi. Il n'y a rien de rose.
Je viens de parler du Commissariat aux langues officielles. Je vais profiter de l'occasion, on parle de la langue, pour reparler du scandale Switch Health. Rappelons-nous que le printemps dernier nous avons posé une série de questions à la Chambre. Nous nous étions révoltés parce que nos producteurs agricoles étaient obligés de passer d'innombrables heures au téléphone pour inscrire leurs travailleurs étrangers temporaires et pour leur faire passer des tests de COVID‑19. Ils avaient le choix entre passer 15, 20, 25 heures en ligne au téléphone pour avoir un service en français, qui coupait après 18 h 30, et attendre 2 heures et demie pour parler à une infirmière anglophone. Voilà le vrai Canada.
Je suis encore en train de me fâcher. Je ne suis pas capable de faire autrement. J'ai averti mes collègues que j'allais péter la bulle. C'est commencé. J'ai tout de même reconnu les avancées pour les gens de l'extérieur du Québec. Ce qui est le plus choquant pour nous dans tout cela, c'est qu'on ne répond à aucune des demandes du Québec. On va nous faire des beaux discours pour dire que c'est important, que tout le monde parle français, qu'on est généreux, qu'on est bon et qu'on est fin. Cependant, le Québec a transmis des demandes, celle d'être respecté comme compétence locale au Québec pour défendre le français.
Il y a deux façons de protéger des langues. Toute la communauté scientifique s'entend sur l'aspect géographique. On peut essayer de protéger deux langues en même temps partout. C'est malheureux que je n'aie pas deux heures pour parler; j'ai ici environ 15 pages de statistiques que je pourrais vous montrer, qui montrent que le pourcentage de francophones au Québec et de gens parlant français à la maison est en baisse au Québec et à Montréal, et que, partout au Canada, il est en chute libre. Je pense que cela tombe encore plus vite depuis l'adoption de la Loi sur les langues officielles il y a plus de 50 ans. Alors, on peut me faire des beaux discours pour vanter la Loi sur les langues officielles, mais je n'y crois pas.
Pourquoi est-ce que je semble de si mauvaise foi? C'est parce que j'ai enseigné l'histoire du Québec et du Canada.
Quelqu'un m'a parlé des deux peuples fondateurs tantôt. J'aimerais qu'il m'en reparle quand on parle du poids politique du Québec à la Chambre des communes et qu'on refuse de garantir 25 % à la nation québécoise dans ce Parlement qu'on dit le sien.
On fait semblant de maintenir notre poids politique en nous gardant 78 députés, alors qu'on va en ajouter partout ailleurs. C'est la même chose et c'est un marché de dupes.
Il y a deux peuples fondateurs en 1867. En 1871, le Common School Act of New Brunswick coupe le financement des écoles acadiennes distinctes, mettant fin à l'instruction en français au Nouveau‑Brunswick. Je suis désolé pour les Néo‑Brunswickois, mais cela fait partie de l'histoire.
En 1877, le Public School Act de l'Île-du-Prince-Édouard met fin aux écoles françaises. En 1890, on décide que le Manitoba a une seule langue officielle, à savoir l'anglais. Pourtant, le Manitoba avait été créé en 1870 à la suite de la rébellion des Métis, un peuple francophone et catholique à qui on avait garanti ses droits, qu'il n'a fallu que 20 ans à effacer.
En 1892, l'anglais est la seule langue parlementaire et de l'enseignement, 1901 aux Territoires du Nord-Ouest. En 1905, après une immigration massive en provenance de l'Europe, l'Alberta et la Saskatchewan sont créées en tant que provinces unilingues anglophones, alors qu'elles ont été développées par les francophones.
J'espère que les Ontariens se souviennent qu'en 1912, le Règlement 17 interdisant l'éducation en français en Ontario entre en vigueur et le restera pendant 32 ans. En Ontario français, j'ai parlé avec des gens de Prescott-Russell cette semaine, des francophones très agréables. Imaginons à quel point ils seraient forts et dynamiques s'ils n'avaient pas été étouffés pendant 32 ans.
En 1916, la loi Thornton au Manitoba met fin aux écoles bilingues, donc à l'enseignement du français. En 1931, il n'y a plus aucune heure de classe consacrée au français en Saskatchewan: si on veut apprendre le français à ses enfants, on le fait le soir et la fin de semaine. Voilà qui fait un beau pays bilingue.
Cela continue. En 2018, le gouvernement Ford, en Ontario, attaque l'Université de l'Ontario français et le Commissariat aux services en français. Pendant ce temps‑là, le pourcentage de locuteurs et d'utilisateurs du français diminue partout à l'extérieur du Québec.
Tantôt, quelqu'un a mentionné la Colombie‑Britannique. Je reconnais l'exception de la Colombie‑Britannique, où il y a un certain dynamisme du français. Malheureusement, ailleurs, incluant la magnifique région qu'est le Yukon et que j'ai visitée, les chiffres sont en baisse, et ce, même à Montréal.
Maintenant, le gouvernement fédéral vient nous dire qu'il faut protéger les pauvres anglophones minoritaires du Québec, ce pauvre 9 % de population qui reçoit 40 % du financement de l'éducation postsecondaire au Québec. Ils font supposément vraiment pitié.
Soyons sérieux. Au Québec, on a voté la loi 101 en 1977. Depuis ce temps‑là, il y a eu 5 jugements, 8 modifications et 250 amendements provoqués par le tribunal du pays voisin. C'est de cela qu’il s'agit. Après cela, comment s'étonner que je parle d'indépendance dans ce Parlement? Je pourrais parler toute la nuit.
Parlons des anciens combattants. Mon collègue de a découvert que le délai pour le traitement d'une demande d'un anglophone est d'environ 20 semaines, mais de 60 à 70 semaines pour un francophone. C'est normal, à moins que les méchants bloquistes se scandalisent de cette situation‑là.
Il serait si facile de laisser le Québec gérer la situation en appliquant la loi 101 aux entreprises de compétence fédérale. Je suis content de voir que la ministre est là pendant que je parle et je lui dis que ce serait facile d'inclure une petite exemption. Je l'ai mentionné tantôt.
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Madame la Présidente, c'est un grand plaisir pour moi d'avoir l'occasion de participer au débat ce soir. Mon français est un peu rouillé, alors je vais d'abord résumer mes commentaires. Après, je vais fournir plus de détails en anglais.
Premièrement, la langue française est très importante pour moi. Dans ma famille, ma femme et moi parlons un peu français, mais mes enfants ne parlent pas français. Donc, c'est très important que nous utilisions le français dans certaines situations. Sans entrer dans les détails, j'ai l'occasion de m'exercer à parler français à la maison de temps en temps.
Nous avons une communauté francophone forte dans ma circonscription. Il y a aussi beaucoup de francophiles, des gens qui aiment le français, des anglophones qui envoient leurs enfants dans des écoles d'immersion française.
Ce soir, nous débattons du projet de loi . À mon avis, ce projet de loi constitue une réponse législative faible à l'urgent problème du déclin du français. Il aurait fallu une réforme plutôt que des modifications. Il a fallu six ans aux libéraux pour présenter un projet de loi qui ne constitue pas la réforme qu'ils promettaient. Les libéraux auraient pu agir plus tôt pour protéger et promouvoir le français.
Le projet de loi n'arrêtera pas le déclin du français. Il manque de mordant et ne possède aucune obligation contraignante. En particulier, l'absence de mesures fortes est évidente dans le contexte des mesures de l'immigration. En général, je parlerai des mesures sur l'immigration et de leurs conséquences sur notre place dans le monde.
[Traduction]
Je parle du projet de loi , qui, selon le Parti conservateur, est une réponse assez timide au problème urgent du déclin de la langue française, et nous voulons voir plus d'efforts dans ce dossier.
Nous allons appuyer ce projet de loi à l'étape de la deuxième lecture, mais lors de l'étude en comité, nous allons certainement nous efforcer de proposer des amendements qui répondent aux préoccupations des minorités linguistiques du Canada et qui renforceront le projet de loi.
Ce soir, j'aimerais parler plus particulièrement des dispositions de ce projet de loi concernant l'immigration. Elles sont limitées. Elles sont importantes, mais j'estime qu'elles reflètent aussi certaines des principales lacunes du projet de loi.
Pour faire une mise en contexte au sujet des dispositions sur l'immigration et de leurs effets, j'aimerais dire que, en ce qui a trait à nos rapports avec d'autres pays et à la place que le Canada occupe sur la scène mondiale, la situation du Canada en tant que pays bilingue représente une occasion stratégique exceptionnelle.
Le fait que le Canada compte des anglophones et des francophones qui ont tous la possibilité d'apprendre l'autre langue officielle, ce qui veut dire que beaucoup de Canadiens peuvent devenir bilingues, offre un avantage stratégique considérable au Canada en ce qui concerne sa participation dans le monde. Ces deux langues permettent aux gens de voyager facilement vers un grand nombre de destinations et de converser dans la langue locale. Elles facilitent les échanges interpersonnels. Elles sont sources de possibilités commerciales. Elles nous permettent aussi de jouer un rôle plus vaste sur l'échiquier géopolitique. Nous pouvons participer à des négociations et à des processus de médiation, et il est simplement plus facile de converser directement avec les gens sans avoir à passer par des services de traduction.
Le bilinguisme du Canada nous ouvre réellement des portes. En effet, l'anglais et le français sont des langues très répandues dans le monde. Le fait qu'elles occupent une place prédominante au Canada accroît d'autant plus les possibilités d'échanges.
Je tiens particulièrement à souligner que la présence du français au Canada offre de belles occasions de rapprochement avec l'Afrique. À mon avis, nous ne parlons pas assez, à la Chambre, de la valeur et des avantages que peut apporter un resserrement de nos rapports avec les pays africains. Je crois que nous devrions réfléchir de façon plus stratégique aux avantages qu'il y aurait à renforcer nos liens avec les pays d'Afrique.
L'Afrique a récemment établi une zone de libre-échange. De nombreux pays africains ont une population très jeune, de sorte que nous assisterons à une croissance démographique importante et soutenue en Afrique. Dans les décennies à venir, cette croissance démographique et l'importante croissance économique que nous observons dans de nombreux pays africains signifieront que les décisions prises en Afrique influeront de plus en plus sur les affaires internationales. Nous pouvons prendre une longueur d'avance en reconnaissant le libre-échange, la croissance économique et la croissance démographique, ainsi que l'incroyable innovation, qui se manifestent actuellement en Afrique et dans divers secteurs. Le Canada peut prendre de l'avance si nous commençons à réfléchir davantage aux possibilités qui découlent d'une collaboration avec l'Afrique.
Autrefois, lorsque nous parlions de l'Afrique, c'était souvent uniquement dans le contexte du développement international, ce qui posait problème. Cela ne représente qu'une partie du tableau. Il y a tellement de possibilités pour le commerce, l'engagement stratégique et d'autres types de débouchés qui peuvent s'offrir à nous grâce à un partenariat accru avec les pays d'Afrique. Nous devons reconnaître cela et prendre conscience des possibilités de partenariat dont dispose le Canada, en tant que pays bilingue, notamment pour ce qui est d'accroître la collaboration avec les pays francophones d'Afrique. Nous devons reconnaître qu'il existe déjà une concurrence à cet égard.
Plus tôt aujourd’hui, avant d’amorcer le débat sur ce projet de loi, nous avons examiné certains des problèmes et des défis propres à la relation du Canada avec la Chine. Nous savons que le gouvernement de la Chine a adopté une stratégie très agressive pour tisser des liens avec l’Afrique, avoir accès à ses ressources naturelles et à certaines des possibilités qui en découlent. La plupart des pays démocratiques n’ont pas déployé suffisamment d’efforts pour être présents en Afrique et collaborer avec les pays africains. Je considère que la manière dont le gouvernement de la Chine collabore avec l’Afrique est problématique, notamment en ce qui concerne le manque de respect envers les populations de ces pays. Or, le Canada peut tisser des liens avec l’Afrique en tant que nation bilingue, avec l’anglais et le français comme langues officielles. Nous pouvons bâtir cette relation tout en renforçant notre présence durant le processus. Cela procurerait des avantages économiques pour le Canada. Cela enrichirait notre culture grâce aux possibilités de faire des échanges avec le peuple africain et d’interagir avec lui. Cela ouvrirait la voie pour reconnaître les possibilités relatives aux affaires étrangères et au commerce international qui découleraient d’une relation avec les pays d’Afrique.
J'ai eu une véritable révélation récemment, alors que je discutais avec des ambassadeurs de pays africains du lien entre les mesures d'immigration et d'autres aspects de notre engagement avec d'autres pays. Lorsqu'on a un système d'immigration qui fonctionne en deçà de sa capacité, qu'il y a des arriérés importants, des taux de refus élevés et des retards, il est très difficile d'avoir d'autres formes d'engagement.
Si les gens veulent venir au Canada dans le cadre d'une mission commerciale, mais qu'il leur est impossible d'obtenir un visa, qu'ils subissent des retards importants, qu'ils n'ont pas l'impression d'être traités avec respect ou qu'ils estiment tout simplement que la logistique est trop compliquée, alors il y a moins de possibilités d'avoir les interactions interpersonnelles par le commerce. Si des personnes souhaitent venir au pays pour des raisons diplomatiques, pour discuter de partenariats commerciaux ou universitaires potentiels, ou si elles viennent simplement pour voyager ou nouer des relations susceptibles de générer des débouchés économiques ou autres, mais qu'elles s'en voient empêchées par un système d'immigration qui n'arrive pas à accorder des visas de visiteur en temps voulu et qui présente des taux de refus disproportionnés pour certaines parties du monde, cela freine notre engagement.
Nous devons interagir davantage avec les pays d'Afrique. Il y a diverses raisons qui expliquent pourquoi nous nous sommes mal acquittés de cette tâche, en tant que pays, par le passé. L'une de ces raisons, c'est le système d'immigration. Le taux de refus des demandes présentées par les personnes qui veulent venir au Canada est beaucoup plus élevé dans de nombreux pays d'Afrique. Les gens ont du mal à obtenir des visas de visiteur. Le comité de l'immigration a récemment réalisé une étude sur les obstacles à l'obtention d'un visa d'étudiant. Des gens présentent des demandes pour venir au Canada en tant qu'étudiants et le taux de refus est très élevé pour les demandeurs qui viennent de pays africains, en particulier de pays africains francophones.
Si nous parlons de la nécessité d'avoir plus d'immigration francophone et des politiques connexes visant à fixer des objectifs, mais que le taux de refus des personnes qui font une demande est très élevé, nous serons désavantagés dans cette concurrence à l'égard des talents et nous allons perdre les occasions de nouer des liens qui en découlent.
J'ai pu comprendre récemment comment ces défaillances de notre système d'immigration affectent tant d'autres domaines de dialogue. Si une jeune personne veut venir étudier au Canada, elle pourrait rester par la suite ou repartir tout en préservant les liens qu'elle a créés ici. Elle pourrait retourner dans son pays et y démarrer une entreprise. Elle voit, parce qu'elle a passé du temps au Canada, les possibilités qui peuvent découler de l'élargissement de ces liens. Cependant, si nous mettons soudainement fin à la possibilité de nouer des liens entre notre pays et les leaders émergents de divers pays africains francophones, en particulier, nous allons manquer les occasions de relations commerciales, économiques et culturelles qui pourraient se présenter plus tard.
De façon plus précise, voici ce qu'on peut lire dans l'article sur l'immigration du projet de loi :
« Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration adopte une politique en matière d’immigration francophone afin de favoriser l’épanouissement des minorités francophones du Canada. » Il y a ensuite ceci:
La politique comprend notamment:
a) des objectifs, des cibles et des indicateurs;
b) un énoncé du fait que le gouvernement fédéral reconnaît que l’immigration est l’un des facteurs qui contribuent au maintien ou à l’accroissement du poids démographique des minorités francophones du Canada.
Quel effet cela aura-t-il concrètement sur l'immigration francophone? L'article prévoit que le doit élaborer une sorte de politique, que cette politique doit comporter des objectifs, des cibles et des indicateurs, et qu'il doit y avoir un énoncé au sujet de l'importance de ce domaine. Cet article n'a aucun mordant. Il exige seulement l'expression d'une aspiration. Il n'y a rien dans le projet de loi sur la nature de cette politique, sur les cibles à atteindre ou sur la façon dont on peut s'assurer que le gouvernement atteint ces cibles.
D'après ce que j'ai compris, nous avons déjà depuis longtemps des cibles d'immigration francophone. Depuis que le gouvernement libéral est au pouvoir, ces cibles n'ont jamais été atteintes. Il y a déjà des cibles, mais nous ne les atteignons pas, et pourtant, nous avons maintenant un projet de loi et une déclaration qui disent qu'il faut vraiment une politique et des cibles.
Le gouvernement devrait réellement s'attaquer à certains des problèmes fondamentaux qui nous empêchent d'avancer. Oui, c'est bien de se donner des cibles, mais il faut prendre l'atteinte de ces cibles au sérieux et, au moment d'établir ces cibles, il faut trouver ce qui n'a pas fonctionné jusqu'à maintenant et comprendre pourquoi.
Nous savons que le taux de refus concernant de nombreux pays d'Afrique sont élevés, en particulier des pays francophones. Il y a des francophones qui veulent venir au Canada, qui veulent venir étudier ou peut-être vivre et travailler au Canada, et on les refuse en grand nombre.
Grâce au travail du comité de l'immigration, nous avons aussi pu détecter — et nous en avons beaucoup entendu parler — des problèmes de racisme à IRCC, notamment dans la sélection des dossiers. Nous savons aussi qu'il y a d'énormes arriérés dans le traitement des demandes d'immigration. Les gens qui déposent des demandes pour venir au Canada attendent leur réponse très longtemps. Ces demandeurs sont des étudiants, des travailleurs ou des visiteurs temporaires.
Des personnes se voient refuser leur demande sans explication claire, ou alors on leur donne des raisons dénuées de logique ou qui ne correspondent pas au contexte. Par exemple, on a dit à certains demandeurs que leurs antécédents de voyage étaient insuffisants, alors qu'il faut bien un début à tout. Un jeune qui possède les compétences et les aptitudes demandées, et qui a été accepté pour faire ses études Canada, peut se voir refuser sa demande pour des motifs liés aux antécédents de voyage.
Certaines des raisons invoquées pour les refus ne tiennent pas la route et sont vraiment frustrantes pour les demandeurs. Ces situations sont injustes pour les demandeurs, mais représentent aussi une grosse perte pour le Canada. Nous parlons ce soir des avantages de notre bilinguisme et de la façon dont nous pourrions freiner le déclin du français au Canada.
L'immigration peut constituer une grande partie de la solution. Si la loi prévoit que nous devons nous doter d'une politique et d'un énoncé en matière d'immigration francophone et que nous devons reconnaître l'importance de l'immigration, mais que, en pratique, nous refusons une grande proportion des demandes d'immigration, alors il manque un élément fondamental.
À la longue, ces refus auront pour conséquence de pousser les gens, les personnes les plus qualifiées et les brillantes du monde, à présenter une demande d'immigration ailleurs. Les pays se disputent le talent. C'est la réalité. L'une des façons pour le Canada d'être concurrentiel est de s'assurer que son système d'immigration fonctionne efficacement, sans heurt et procure aux utilisateurs une expérience aussi positive que possible. Le gouvernement aime vraiment faire connaître ses visées dans bien des dossiers, mais nous ne voyons aucun résultat.
Par exemple — et je change légèrement de sujet —, à la période des questions aujourd'hui, un député de mon caucus a posé une question sur la création d'une ligne téléphonique à trois chiffres pour la prévention du suicide. C'est un dossier très important. Le gouvernement affirme qu'il fait des pieds et des mains pour établir cette ligne dans les plus brefs délais. Combien de temps faut-il pour mettre en service un numéro de téléphone?
Le a dit que le gouvernement n'éliminerait pas l'exigence de visa pour les Ukrainiens qui souhaitent venir au Canada, car le processus prendrait 12 semaines. Comment peut-on avoir besoin de 12 semaines pour supprimer une exigence? On ne parle pas d'ajouter une exigence; on parle d'en retirer une. Le gouvernement met un temps fou à mettre en œuvre des mesures pourtant simples. Encore une fois, en ce qui concerne ce projet de loi, les libéraux vantent les mérites de l'immigration francophone. Ils disent vouloir la favoriser et se doter d'une politique en la matière, mais ils n'atteignent même pas les objectifs actuels.
Comme je l’ai souligné, il faut bien comprendre l’interrelation entre un système d’immigration efficace et d'autres formes de coopération. Prenons l’exemple de personnes qui veulent faire des affaires et bâtir des relations. Ce qui n'est au début que de simples vacances peut mener à des rencontres fructueuses. Si notre système d’immigration n’offre pas le niveau de service attendu, notre pays pourrait rater ces possibilités de tisser des liens et de bâtir des relations d’affaires.
Je crois sincèrement que nous pouvons renforcer notre engagement envers les pays francophones, notamment les pays d'Afrique. Les possibilités pour le Canada sont énormes si nous nous donnons la peine de renforcer ces liens. Pour y arriver, notre système d’immigration doit être efficace, équitable pour toutes les régions du monde et dépourvu de biais. Évidemment, les demandes d’immigration ne seront pas toutes acceptées, mais chacun des refus devrait reposer sur des motifs valables.
C'est surtout là‑dessus que je voulais insister dans mes observations. Je tiens à dire que l'incapacité à fournir une feuille de route claire sur l'immigration francophone, comme ce que nous constatons dans le projet de loi , dénote en fait des problèmes plus vastes. Outre son libellé très flou, le projet de loi comporte un engagement général qui se traduit par de bonnes idées et aspirations, mais on n'y explique pas comment le tout pourrait se concrétiser. Certaines dispositions comportent des problèmes structurels, notamment l'octroi de nombreux pouvoirs au ministère du Patrimoine canadien plutôt qu'au Conseil du Trésor, qui entraîneront des difficultés sur le plan administratif. Cela fait partie d'une question plus large concernant l'efficacité de certaines dispositions du projet de loi.
Les conservateurs sont très favorables aux langues officielles. Nous appuyons sans réserve l'idée de renforcer la dualité linguistique au pays. Cela procure des avantages à notre pays, mais, comme je l'ai également fait valoir, cela nous offre aussi des avantages et des possibilités stratégiques importants dans nos relations avec le monde. Cependant, il faut que ce soit réel. Il faut que ce soit concret. On ne peut pas se contenter de formuler des engagements vagues. Nous devons en voir les résultats.
J'aimerais donc présenter un sous-amendement. Je propose:
Que l'amendement soit modifié par adjonction de ce qui suit: « ; que le Comité présente son rapport au plus tard 10 jours de séance après l’adoption de la présente motion ».
:
Madame la Présidente, je tiens tout d'abord à dire que je partagerai mon temps de parole avec le député de .
C'est un grand plaisir pour moi, en tant que députée polyglotte et personne ayant grandi en parlant le français et l'arabe à la maison, de me lever aujourd'hui pour discuter du projet de loi .
Je pense que tout le monde peut reconnaître qu'il est temps de moderniser la Loi sur les langues officielles. Je crois aussi qu'on peut reconnaître que le gouvernement fédéral doit en faire plus pour établir et maintenir une égalité réelle entre nos deux langues officielles.
[Traduction]
La modernisation de la Loi sur les langues officielles par le gouvernement est un grand pas dans la bonne direction. Elle démontre notre engagement à protéger et à promouvoir le français partout au Canada, y compris au Québec, tout en appuyant les communautés de langue officielle en situation minoritaire d'un océan à l'autre. Ces objectifs ne sont pas mutuellement exclusifs. Nous pouvons et devons faire les deux avec fierté. Le projet de loi à l'étude nous permettra de progresser vers un objectif qui, je crois, nous tient tous à cœur, à savoir l'égalité réelle des deux langues officielles au Canada.
[Français]
C'est l'une de mes priorités personnelles, et je suis fière que ce soit également une priorité du gouvernement.
[Traduction]
Comme mes collègues le savent, le projet de loi s'appuie sur celui qui avait été déposé au cours de la législature précédente. Je tiens à saluer et à remercier mon amie la pour le travail qu'elle a accompli et l'attention qu'elle a portée à cette question, ainsi que pour le choix du lieu historique de Grand‑Pré, dans ma belle province, la Nouvelle‑Écosse, pour annoncer ce nouveau projet de loi. Le symbolisme de ce choix n'est pas passé inaperçu.
[Français]
Je voudrais aussi reconnaître le travail que l'ancienne ministre des Langues officielles, qui est présentement , a fait dans ce dossier. C'était un privilège pour moi d'assister avec elle, en 2021, aux réunions fédérales, provinciales et territoriales des ministres responsables de la francophonie canadienne. Là, nous avons abordé le sujet de la modernisation de cette loi, ainsi que l'offre des services en français et la pénurie de la main-d'œuvre bilingue.
[Traduction]
Ce projet de loi amélioré ajoute des dispositions importantes qui améliorent le respect de la Loi sur les langues officielles dans l'ensemble du gouvernement, renforcent les pouvoirs du commissaire aux langues officielles et encouragent l'utilisation du français dans les entreprises sous réglementation fédérale au Québec et dans d'autres régions à forte présence francophone.
[Français]
Comme plusieurs de mes collègues l'ont fait remarquer, il s'agit de la première réforme majeure de la Loi en plus de 30 ans.
[Traduction]
Nous avons aujourd'hui plus de recul sur le fonctionnement de la loi au fil des ans et sur ses lacunes. Nous bénéficions d'une importante rétroaction de la part des intervenants et des groupes représentant les communautés de langue officielle en situation minoritaire sur laquelle nous pouvons nous appuyer pour moderniser la loi, et cela comprend notamment les réactions au projet de loi présenté l'an dernier.
[Français]
Pour ma part, j'ai eu l'occasion de rencontrer des représentants de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada et de la Fédération nationale des conseils scolaires francophones. J'ai apprécié leurs commentaires au sujet du projet de loi . Au moyen de ce projet de loi, nous avons démontré notre engagement à écouter les organismes communautaires, rempli l'une des principales promesses de notre plateforme électorale et présenté un projet de loi équilibré qui reflète les réalités linguistiques des Canadiens francophones et anglophones.
[Traduction]
Que permettraient de faire les modifications présentées dans ce projet de loi? Beaucoup de choses, et je vais en souligner quelques-unes. Le projet de loi préciserait que les obligations juridiques relatives aux langues officielles s’appliquent en tout temps, notamment lors de situations d’urgence. Il prévoirait que l’article 16 de la loi s’applique à la Cour suprême du Canada. Il apporterait des précisions sur la nature de l’obligation des institutions fédérales de prendre des mesures positives pour mettre en œuvre certains engagements du gouvernement fédéral et la manière dont l’obligation doit être exécutée. Il prévoirait que le est tenu d’adopter une politique en matière d’immigration francophone. Il centraliserait la coordination de la loi sous l'égide d'un seul ministre, qui aurait accès aux ressources d'un organisme central, le Conseil du Trésor.
Le Conseil du Trésor serait tenu d’établir des principes d’application de certaines parties de la loi, de surveiller et de vérifier l’observation par les institutions fédérales des principes, instructions et règlements en matière de langues officielles, et d’évaluer l’efficacité des principes et programmes des institutions fédérales en matière de langues officielles.
[Français]
Selon moi, ces changements sont sensés. Avoir une responsabilité claire est essentiel pour que les Canadiens puissent s'assurer que leur gouvernement livre des résultats concrets.
[Traduction]
Renforcer le rôle du Conseil du Trésor et retirer le pouvoir de discrétion nous aiderait à atteindre le dessein d’une fonction publique où chacun travaille dans la langue officielle de son choix.
Le projet de loi renforcerait aussi les pouvoirs des commissaires aux langues officielles pour qu’ils disposent des outils nécessaires afin d’appliquer la loi, c’est-à-dire qu’il donnera du mordant à la Loi sur les langues officielles. Cela consiste notamment à leur donner la capacité d’infliger des sanctions pécuniaires aux entreprises qui travaillent auprès des voyageurs et de conclure des accords de conformité.
Le gouvernement du Canada s’engagerait à faire la promotion du français, à veiller à ce que les exigences liées à l’éducation soient respectées, et à renforcer les possibilités pour les membres des communautés de langue officielle en situation minoritaire de bénéficier d’un enseignement de qualité dans leur propre langue tout au long de leur vie.
Le projet de loi prévoirait certaines mesures positives que les institutions fédérales peuvent prendre pour mettre en œuvre nos engagements, notamment toute mesure pour promouvoir et appuyer l’apprentissage du français et de l’anglais au Canada, pour appuyer des secteurs essentiels à l’épanouissement des minorités anglophones et francophones ainsi que pour protéger leurs institutions.
Il permettrait au de promouvoir les droits des Canadiens en ce qui concerne leur langue de travail et de favoriser la progression vers l'égalité de statut et d'usage du français et de l’anglais dans la société canadienne.
Le projet de loi édicte la Loi sur l’usage du français au sein des entreprises privées de compétence fédérale, laquelle prévoit des droits et des obligations concernant l’usage du français en tant que langue de service et langue de travail relativement aux entreprises privées de compétence fédérale au Québec et, à une date ultérieure, dans des régions à forte présence francophone.
Comme je l'ai mentionné, notre projet de loi donnerait au commissaire aux langues officielles plus d'outils, tel qu'il avait déjà été prévu, pour lutter contre le problème persistant du non‑respect de la loi.
De plus, le projet de loi s'attaque également à des tendances inquiétantes, comme la diminution du poids démographique de la population francophone au Canada, y compris au Québec, et le taux stagnant de bilinguisme chez les Canadiens. Le projet de loi reconnaît deux vérités importantes. Premièrement, le secteur privé doit jouer un rôle dans la promotion de nos langues officielles et dans l'épanouissement des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Deuxièmement, le français connaît un recul important au pays, et il faut agir de manière concertée pour renverser cette tendance.
[Français]
J'aimerais aussi, durant le temps qui m'est imparti, exprimer pourquoi je ressens la responsabilité de soutenir ce projet de loi.
[Traduction]
La promotion du bilinguisme est l'une de mes priorités, tout comme la croissance de notre population francophone. Moi aussi, je suis préoccupée par la diminution du poids démographique des francophones au Canada.
[Français]
Je crois que nous pouvons progresser en ce qui a trait à ce problème en faisant de grands efforts pour accroître l'immigration francophone et en faisant d'importants investissements dans l'éducation en français. Je pense aux besoins criants en enseignants et éducateurs de la petite enfance francophones dans ma propre province. Il faut en faire plus pour que les familles puissent voir leurs enfants grandir en français.
[Traduction]
Comme j'ai appris le français avant l'anglais, et que je suis revenue dans ma province natale alors que j'étais enfant sans maîtriser l'anglais, je suis très consciente de l'importance des mesures prises par le gouvernement pour garantir la vitalité et l'utilisation à long terme de la langue française.
À titre d'ancienne ministre de l'Immigration et d'ancienne ministre des Affaires acadiennes et de la Francophonie, j'ai lancé en 2019 le Plan d'action pour favoriser l'immigration francophone en Nouvelle-Écosse. J'ai insisté pour qu'on installe des panneaux d'arrêt en français dans les régions acadiennes de la Nouvelle-Écosse. J'ai travaillé étroitement avec le Conseil scolaire acadien provincial...
:
Madame la Présidente, je suis extrêmement honoré et heureux de participer à ce débat ce soir sur un sujet qui me tient particulièrement à cœur, la vitalité et l'avenir du français, que ce soit au Québec ou partout dans la fédération pour les communautés francophones en situation minoritaire.
C'est pour cela que je veux soulever quelques éléments de réflexion dans la discussion ce soir. La première chose à faire est de dresser un portrait de la situation.
Comment se fait-il qu'on soit rendu au point où une modernisation de la Loi sur les langues officielles est absolument nécessaire? Je retiens une date: 1988. La dernière réforme majeure de la Loi sur les langues officielles date de 1988. Je m'en souviens, j'avais 15 ans, j'étais en troisième année de secondaire à l'école Beaulieu à Saint‑Jean-sur-Richelieu. Cela commence à faire un bail. Je pense donc qu'une modernisation de la Loi s'impose. De fait, cette modernisation accuse plusieurs années de retard.
La situation a bien changé depuis 1988 et elle ne s'est pas améliorée pour les francophones du Québec ou d'ailleurs au Canada dans certaines communautés. Je note quelques chiffres pour commencer. En 1971, le poids démographique des francophones dans la fédération était de 27,5 %. En 2016, il est de seulement 22,8 %. Il s'agit donc d'une chute considérable pendant ces 45 années.
Les admissions d'immigrants francophones hors Québec entre 2008 et 2020 ont été d'à peu près 50 000 personnes, bien en-deçà des 125 000 immigrants francophones hors Québec qui étaient prévus et requis pour maintenir un poids démographique de 4,4, % de leur population hors Québec. Ce déficit de 75 000 immigrants francophones hors Québec représente l'ensemble de la communauté francophone de la Colombie-Britannique. Ce n'est pas peu dire.
D'ailleurs, la cible de 4,4 % d'immigrants francophones à l'extérieur du Québec établie en 2003 était censée être atteinte en 2008. Elle a été repoussée de 15 ans, car, en 20 ans, jamais le gouvernement fédéral n’a réussi à favoriser la minorité d'expression française au Canada à l'extérieur du Québec. Il n'a jamais atteint cette cible. Au contraire, le taux de francophones parmi les immigrants qui s'installent à l'extérieur du Québec a stagné autour de 2 %, avec un creux historique de 1,5 % enregistré en 2015. C'est bien loin de la cible de 4,4 % d'immigration francophone exprimée par le précédent gouvernement.
On a des chiffres plus récents qui sont extrêmement préoccupants en lien avec le refus systématique de permis de travail aux étudiants francophones en provenance de pays d'Afrique souvent francophones, révélant un problème systémique au sein d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. Le taux de refus est beaucoup plus élevé au Québec que dans le reste du Canada pour ces pays d'Afrique. Au Canada, on parlait d'un taux de refus de 29 % en 2015 et de 33 % en 2021, une légère augmentation, donc. Au Québec, pour ces immigrants francophones provenant de l'Afrique, on parlait d'un taux de refus de 29 % en 2015, mais de 52 % en 2021, ce qui constitue une augmentation considérable.
Non seulement il y a des chiffres affolants dans ce qui se passe en ce moment, mais on a aussi un effritement du fait français dans le reste du Canada et au Québec depuis des années. C'est préoccupant et c'est mis en exergue par le commissaire aux langues officielles. Ce dernier nous dit que, pour 2021, il a reçu à peu près 1 000 plaintes pour non-respect de la Loi sur les langues officielles et non-respect du français dans les entreprises de compétence fédérale ou les ministères fédéraux. Cette année-ci, par contre, il a déjà reçu 5 500 plaintes et l'année n'est pas finie. C'est donc cinq fois plus que l'année dernière. Les gens voient qu'il y a un problème. Au NPD, nous avons vu qu'il y avait un problème, au fil des ans, mais surtout ces dernières années.
Il y a des événements récents qui ont énormément choqué beaucoup de gens à propos de la Loi sur les langues officielles. Le président du Conseil du Trésor a dit qu'il n'a fait aucun compromis et qu'il n'y a aucun compromis à faire pour ce qui est des langues officielles.
Pourtant, regardons bien les communications internes du gouvernement fédéral pendant la pandémie: des communications uniquement en anglais; des réunions sans service d'interprétation où, si on parlait français, c'était gênant et où on n'osait pas prendre la parole; une autorisation d'étiquetage de produits en anglais uniquement. Cela pouvait, dans certains cas, mettre à mal la santé et la sécurité des gens parce que ceux-ci n'avaient pas la possibilité d'avoir la version française de l'étiquetage.
Comment se fait-il que Santé Canada ait autorisé une telle chose? C'est assez ahurissant. C'est assez surprenant.
Je vais revenir sur des éléments récents de l'actualité qui viennent renforcer le portrait que je suis en train de dresser. Les libéraux nomment une lieutenante-gouverneure du Nouveau-Brunswick qui est unilingue anglophone alors que le Nouveau‑Brunswick est la seule province officiellement bilingue. D'ailleurs, les libéraux se sont fait taper les doigts là-dessus. Également, ce qui a fait couler beaucoup d'encre récemment, c'est Air Canada dont le PDG ne parle pas français et qui est très content de dire qu'il vit à Montréal depuis des années, qu'il n'a pas besoin de parler français et qu'il n'a pas de problème. Plus récemment, on a vu le conseil d'administration du Canadien National composé uniquement d'anglophones unilingues qui ne comprennent pas le français et qui ne voient pas la nécessité d'avoir quelqu'un au sein du conseil d'administration qui parle français.
On doit agir. Il était plus que temps d'agir. Je dois souligner, comme certains collègues l'ont fait précédemment, qu'il y avait un certain cynisme de la part du gouvernement libéral à dire qu'il avait agi en présentant le projet de loi alors qu'il s'est traîné les pieds pendant six et qu'il n'a rien fait pour moderniser la Loi sur les langues officielles alors qu'il y avait des problèmes flagrants. C'est sans compter qu'on n'a pas parlé d'accès aux garderies, d'éducation, des écoles secondaires, du fait de pouvoir vivre en français, d'avoir des activités culturelles en français. Le gouvernement disait qu'il avait tout de même proposé un projet de loi.
Il a proposé un projet de loi deux semaines avant la fin des travaux parlementaires alors qu'il savait très bien qu'il allait déclencher une élection. C'était l'année dernière, en 2021. Il a déposé un projet de loi, un livre blanc qui n’a servi strictement à rien. Il a fallu tout recommencer à la nouvelle législature. Quand le gouvernement dit qu'il est préoccupé, que cela lui tient à cœur et qu'il est pressé, on repassera, parce qu'il n'a rien fait pendant des années et c'est pitoyable.
Force est de constater que la pression exercée par le Nouveau Parti démocratique, différents intervenants et des gens des communautés francophones et acadienne au pays a fini par porter ses fruits. Le gouvernement est revenu à la charge avec un nouveau projet de loi, qui amorce quand même des changements substantiels. C'est tant mieux. Il ne faut pas nier ces changements. Il ne faut pas les minimiser.
Ainsi, le préambule de la loi modifiée sur les langues officielles reconnaît que le français est en situation minoritaire au Canada, qu'il s'agit de la langue officielle du Québec, et, tout en reconnaissant les régimes linguistiques adoptés par les autres provinces comme le Nouveau‑Brunswick, cette modification rappelle aussi l'importance de maintenir et de valoriser l'usage des langues autochtones. Pour la première fois, on reconnaît que le français est en situation minoritaire au Canada et que le français est la langue officielle du Québec. Ce n'est pas rien. Cela n'existait pas avant. C'est vraiment un pas dans la bonne direction. Il ne faut pas se cacher les yeux, se mettre la tête dans le sable pour des raisons idéologiques ou électoralistes. C'est quand même quelque chose de notable. On n'a jamais eu d'affirmation de l'asymétrie de la situation des langues dans une loi fédérale. C'est inscrit, et nous sommes très contents de cela au NPD, parce que cela va donner des outils supplémentaires aux communautés francophones au Québec, mais surtout à l'extérieur du Québec. C'est du jamais vu. Il faut quand même le dire.
Il y a aussi dans le projet de loi une clarification des mesures positives que le gouvernement doit prendre en faveur des communautés francophones minoritaires à l'extérieur du Québec. Il y avait eu des situations en cour où ce n'était pas clair. On vient clarifier cette situation.
:
Madame la Présidente, avant de me lancer en politique, j'ai eu le privilège de travailler pendant 34 ans dans la fonction publique pour Parcs Canada partout au pays. J'ai été en mesure de constater toute l'importance de la Loi sur les langues officielles quand il s'agit de fournir des services en français à la population et aux touristes du Canada.
J'ai également pu en constater l'importance pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire que j'ai visitées en Ontario, au Manitoba, en Saskatchewan, en Alberta, en Colombie‑Britannique, au Yukon et dans les Territoires du Nord‑Ouest. Je me suis rendu compte que ces communautés souhaitaient s'épanouir et véritablement célébrer leur culture. Cependant, elles devaient aussi affronter de nombreux obstacles à cet égard. Voilà pourquoi j'ai le plaisir de parler ce soir de l'importance du projet de loi , qui représente la modernisation que propose le gouvernement à la Loi sur les langues officielles.
Tout d'abord, j'ai été ravi que la dépose aussi rapidement un projet de loi à la 44e législature. Cela faisait partie des promesses de notre plateforme électorale des dernières élections de même que de sa lettre de mandat. Elle a non seulement concrétisé cet engagement, mais elle a déposé un projet de loi encore plus solide que celui qui avait été déposé durant la législature précédente. Je veux remercier et féliciter la ministre de ses efforts dans ce dossier.
Depuis le début, depuis la première fois où le a promis de moderniser la Loi sur les langues officielles, notre objectif a été de présenter un projet de loi qui allait refléter les réalités linguistiques de tous les Canadiens. Nous voulions un projet de loi qui allait protéger et promouvoir le français dans l'ensemble du pays, y compris au Québec. Nous voulions un projet de loi qui allait défendre les communautés de langue officielle en situation minoritaire d'un océan à l'autre.
Nous y sommes parvenus avec le projet de loi . En fait, nous avons présenté un projet de loi qui a du mordant et qui répond aux observations du commissaire aux langues officielles, des parlementaires à la Chambre et à l'autre endroit et des principaux intéressés partout au pays. Je vais donner un exemple très précis pour illustrer ce point: les pouvoirs accordés au commissaire aux langues officielles et la conformité des institutions fédérales assujetties au régime des langues officielles.
Dans les dernières années, les Canadiens ont déposé de plus en plus de plaintes auprès du commissaire. Depuis 10 ans, le nombre annuel de plaintes est passé de quelques centaines à plus d'un millier. L'an dernier, le commissaire aux langues officielles a reçu un nombre record de plaintes. Si ce fait indique que les Canadiens comprennent mieux les droits linguistiques, il montre aussi qu'ils s'attendent à ce que nous en fassions plus. Ils s'attendent à ce que les institutions canadiennes respectent davantage les obligations en matière de langues officielles.
Ces plaintes sont soumises au commissaire aux langues officielles, car il a le pouvoir d’enquêter sur celles-ci et de publier ses conclusions. Cependant, le commissaire nous a fait savoir que cela n’est pas suffisant. Il a demandé des pouvoirs accrus pour pouvoir exercer son mandat et veiller à ce que les droits des Canadiens en matière de langues officielles soient respectés. À titre de mandataire du Parlement, le commissaire estime qu’il doit avoir des pouvoirs similaires aux autres mandataires du Parlement, surtout la commissaire à l’information. Nous avons entendu sa requête, et nous y avons donné suite avec le projet de loi .
Dès le premier jour où le projet de loi aura reçu la sanction royale, le commissaire bénéficiera de pouvoirs accrus pour remplir son mandat et faire en sorte que les institutions fédérales respectent leurs obligations conformément à la Loi sur les langues officielles. Le commissaire aux langues officielles jouira d’une série de pouvoirs élargis qui lui donneront une plus grande marge de manœuvre pour faire son travail.
D’abord, il aura le pouvoir de conclure des ententes de conformité avec les institutions fédérales. Ces ententes, signées par le commissaire et les hauts fonctionnaires des institutions fédérales, présenteraient en détail les conditions à remplir afin de ne plus enfreindre la loi. Le commissaire aurait ensuite le pouvoir de superviser la mise en œuvre des modalités de l’entente de conformité pour avoir la confirmation que les institutions fédérales respectent entièrement leurs obligations.
Si l'institution continue de ne pas respecter les accords, le commissaire aura le pouvoir d'émettre une ordonnance demandant à l'institution fédérale de procéder instamment à des changements. Si cette ordonnance n'a pas les résultats escomptés, les citoyens et le commissaire pourront saisir une autorité supérieure du dossier. Il est précisé dans le projet de loi que le commissaire pourra aussi recourir à d'autres modes de règlement des différends, comme la médiation, pour désamorcer un conflit.
Dans certains cas, pour les sociétés qui offrent des services aux voyageurs — comme Air Canada, Via Rail, Marine Atlantique et les autorités aéroportuaires —, le commissaire aura même le pouvoir d’infliger des sanctions administratives pécuniaires. Il pourra imposer des sanctions à la suite de plaintes individuelles, ce qui lui donnera plus de pouvoir pour s'assurer que ces entreprises, qui font régulièrement l'objet de la plupart des plaintes, respectent leurs engagements. Même si ces sanctions font partie d'un éventail de pouvoirs, dans les cas où les entreprises refuseraient de respecter la Loi sur les langues officielles, elles pourraient représenter une grande victoire pour les voyageurs canadiens qui constatent depuis longtemps que de telles entreprises enfreignent la loi.
En vertu de ce projet de loi, le commissaire aurait le pouvoir de publier les conclusions et les recommandations de ses enquêtes. Cela renforcerait la conformité des institutions en établissant la primauté du public dans un grand nombre de questions linguistiques.
Évidemment, les fonctions quotidiennes du commissaire demeureraient en grande partie inchangées. Le bureau du commissaire serait toujours chargé de traiter les plaintes des citoyens et des fonctionnaires fédéraux qui ont de la difficulté à travailler dans la fonction publique, à être servis ou à communiquer avec les institutions fédérales dans la langue officielle de leur choix.
Le commissaire serait également autorisé à continuer à produire des rapports, à enquêter de sa propre initiative et à sensibiliser les institutions fédérales en leur faisant part de ses recommandations et mesures correctives. Encore une fois, ces changements interviennent à la demande du commissaire aux langues officielles. En effet, nous avons été informés de la nécessité de ces modifications pour que les Canadiens puissent s'exprimer dans la langue officielle de leur choix lorsqu'ils traitent avec les institutions fédérales ainsi qu'avec les entreprises de compétence fédérale; le gouvernement a agi.
Ces changements feront en sorte que les institutions reflètent les réalités linguistiques des Canadiens et que, lorsque ces derniers ne sont pas en mesure d'obtenir les services dont ils ont besoin dans la langue officielle de leur choix, ils puissent porter plainte auprès du commissaire aux langues officielles, qui sera en mesure d'intervenir grâce à ses pouvoirs accrus.
J'ai récemment eu une rencontre avec la Fédération des francophones de la Colombie‑Britannique. Cet organisme croit que nous pouvons également faire plus. Depuis sa promulgation, la Loi sur les langues officielles a fait croître l'usage du français et de l'anglais au Canada, mais elle a toujours manqué de précision et nous n'avons pas les moyens d'en assurer l'entière application. Vivre en français au quotidien demeure difficile à bien des endroits au pays, notamment dans ma province, la Colombie‑Britannique. La Fédération des francophones de la Colombie‑Britannique milite en faveur de diverses améliorations, notamment pour que l'on confère un pouvoir global plus grand aux organismes fédéraux responsables de mettre en œuvre différentes parties de la loi. Il faut également clarifier ce que doivent faire concrètement les organismes fédéraux pour promouvoir le français et l'anglais et soutenir les communautés de langue officielle en situation minoritaire. Par ailleurs, le projet de loi moderniserait la Loi sur les langues officielles.
Le projet de loi représente une nette amélioration par rapport à son prédécesseur, qui proposait une modernisation déjà très ambitieuse du régime des langues officielles au Canada. Nous effectuons ces démarches parce que nous comprenons que si nous voulons que la Loi sur les langues officielles réponde aux besoins des Canadiens, alors nous devons adopter un projet de loi audacieux qui rejoint la réalité des communautés de langue officielle en situation minoritaire au Canada, qu'elles soient francophones ou anglophones.
Voilà pourquoi je suis si fier d'appuyer le projet de loi , qui vise à moderniser la Loi sur les langues officielles.
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Madame la Présidente, je suis heureux de participer au débat concernant le projet de loi . Je suis heureux de me lever à la Chambre à 22 heures, même si c'est habituellement l'heure à laquelle je vais me coucher.
Nous sommes rassemblés pour parler du projet de loi C‑13, du bilinguisme et des deux langues officielles au Canada.
Tout d'abord, je ferai le portrait de la situation. Je crois que tous les députés de la Chambre reconnaissent que le français est en déclin et, d'une certaine façon, qu'il est menacé. C'est le cas au Québec et dans les communautés en situation minoritaire du Canada.
L'Assemblée nationale du Québec a fait la démonstration presque mathématique, de façon bien documentée, que, depuis plus d'une décennie, l'utilisation du français diminue. Le gouvernement du Québec a déposé une loi qui est débattue à l'Assemblée nationale. Laissons le débat se faire là où il doit se faire, c'est-à-dire à l'Assemblée nationale, au Québec.
Ici, nous débattons du projet de loi , qui s'attaque à la question du bilinguisme et au déclin du français au pays. J'aurai l'occasion d'y revenir plus en détail, mais, selon nous, c'est une réforme mineure, alors qu'on aurait dû faire une vraie réforme. Il s'agit de modifications alors qu'on aurait eu besoin de donner un coup de collier.
Nous estimons actuellement que ce projet de loi n'arrêtera pas le déclin du français. Pourquoi? C'est essentiellement parce qu'il manque de mordant. Nous allons le décrire tout à l'heure, mais, ce qu'il faut, ce sont des mesures concrètes et, à la limite, coercitives. Les amendes doivent être considérables et non pas symboliques. Ce projet de loi ne contient pas les mesures nécessaires. Il fait également la sourde oreille aux réclamations qui ont été faites par, essentiellement, tous les groupes de protection du français.
L’endroit où la décision ultime doit être prise et où les mesures doivent être prises, c'est au Conseil du Trésor. C'est là que tout se joue. Je dis cela en tout respect pour le ministère du Patrimoine canadien et pour le ministère qui s'occupe des langues officielles. C'est le Conseil du Trésor qui devrait avoir les outils nécessaires pour imposer avec autorité le bilinguisme et le français dans certaines régions où il est en déclin. Malheureusement, ce projet de loi ne va pas aussi loin que cela.
Pourquoi en sommes-nous là aujourd'hui?
Rappelons d'abord que c'est dans les années 1960 qu'a commencé le débat sur le fait que le Canada devait être ou non un pays bilingue et sur le fait que, dans ses institutions, les deux langues, soit le français et l'anglais, devaient avoir le même statut.
Il y a eu la création de la commission Laurendeau-Dunton, soit la Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme. Cette commission a été instituée dans les années 1960, sous l'égide du premier ministre le très honorable Lester B. Pearson, comme l'a mentionné le député de .
En 1969, le premier ministre du Canada, le très honorable Pierre Elliott Trudeau, a fait adopter à la Chambre des communes la première loi sur les deux langues officielles, qui définissait le français et l'anglais exactement au même palier, au même niveau, avec les mêmes responsabilités et les mêmes privilèges.
Partout au Canada, dans l'État fédéral, à la fonction publique et ailleurs dans ses territoires, cela incitait à avoir les mêmes services d'un océan à l'autre dans les deux langues officielles. On aura compris que, au début, cela pouvait amener des grincements de dents, ce qui est tout à fait prévisible et légitime, pour celles et ceux qui avaient grandi dans un pays où le bilinguisme formel n'existait pas. Quand on doit apprendre une seconde langue du jour au lendemain, cela peut paraître un défi de grande taille.
Presque 53 ans plus tard, il est tout à fait normal que celles et ceux qui ambitionnent d'avoir une carrière dans la fonction publique fédérale aient à parler dans les deux langues officielles un jour ou l'autre. C'est ce à quoi doivent s'attendre celles et ceux qui ont l'ambition d'accéder au plus haut rang. C'est très bien ainsi.
En 1969, il y a eu la première Loi sur les langues officielles. Elle a été grandement rafraîchie par le gouvernement progressiste-conservateur du très honorable Brian Mulroney. La Loi sur les langues officielles a été bonifiée en 1988. Par la suite, rien n'a été fait de façon immédiate pour revoir au complet le bilinguisme. On sait très bien que, sous le gouvernement Harper, des mesures ont été prises pour s'assurer que le français est bien protégé dans certains secteurs où il n'est pas majoritaire.
Arrive l'élection de 2015, et on se souviendra que l'actuel parti ministériel s'était engagé, la main sur le cœur, à revoir la Loi sur les langues officielles.
De 2015 à 2019, aucune avancée n'a été faite à ce sujet. On a eu une élection, puis, en 2021, grande surprise, des éléments ont commencé à apparaître. Cependant, puisque le premier ministre a décidé de déclencher une deuxième élection en pleine pandémie contrairement à tous les avis scientifiques, cette approche du gouvernement n'a pas pu aller plus loin.
On se trouve donc aujourd'hui avec le projet de loi , alors que mes amis ministériels s'étaient engagés à le faire dès 2015. Il leur aura donc fallu six ans.
Nous avons des préoccupations par rapport à ce projet de loi. Nous estimons que, trop souvent, lorsqu'on parle des deux langues officielles, il y a beaucoup de vœux pieux. On est tous en faveur de la tarte aux pommes, comme on dit en mauvais français, en voulant la protection des langues minoritaires et du français. Cependant, prend‑on les moyens sérieux, nécessaires, efficaces, pertinents et percutants pour y parvenir pleinement? Malheureusement, c'est là que le bât blesse.
C'est pourquoi, comme j'en ai un peu parlé tantôt, nous aurions souhaité que ce soit le Conseil du Trésor qui ait le dernier mot sur l'application de la Loi sur les langues officielles, pour montrer qu'il y a du muscle et que c'est sérieux et rigoureux. En effet, quand on parle des services de l'État à la population, c'est le Conseil du Trésor qui détient la plus grande autorité puisque c'est lui qui, au sein de l'administration fédérale, dit oui ou non aux dépenses fiscales.
Je ne vais pas porter de jugement sur l'enthousiasme avec lequel les présidents successifs du Conseil du Trésor depuis 2015 ont accepté des dépenses sans fin. L'autorité requise pour accepter ou refuser d'engager des dépenses revient au président du Conseil du Trésor. Plusieurs groupes avaient demandé que ce soit le Conseil qui ait la responsabilité, mais, malheureusement, ce n'est pas le cas.
Le gouvernement veut aussi assurer une immigration francophone réussie et acceptable dans toutes les communautés d'un océan à l'autre, mais, encore une fois, il n'y a pas d'objectif clair et précis.
Il n'y a pas non plus de pouvoir d'ordonnance ni d'amendes dissuasives visant les entreprises qui ne respecteraient pas les langues officielles. On mentionnait tout à l'heure cet exemple d'une amende de 25 000 $ à un organisme national dont le président n'est pas bilingue, un montant qui n'est pas la fin du monde pour de telles gens.
On laisse également aux organismes de compétence fédérale au Québec le choix de respecter ou la loi 101 ou la loi fédérale, mais ce n'est pas la façon de gérer ce dossier. On ne peut pas être à moitié enceinte. On est pour la loi 101 ou on est contre. Dans le cas présent, on laisse les entreprises choisir, ce qui n'aurait pas dû se passer.
C'est pourquoi bien des organismes de protection des droits minoritaires se sont fait entendre et estiment que le projet de loi C‑13 est peut‑être plein de bon esprit et de bons objectifs, mais que, fondamentalement, il ne répond pas aux besoins.
Comme le disait si bien Liane Roy, présidente de la Fédération des communautés francophones et acadienne, la plus grande déception, c'est qu'il faut un chef qui regarde les autres ministères, qui peut donner des ordres et qui peut être en amont plutôt que toujours en mode réactif. La responsabilité de la nouvelle loi est encore séparée entre Patrimoine canadien et le Conseil du Trésor, qui peut déléguer des pouvoirs à d'autres ministères.
Comme l'a dit la FCFA le 2 mars dernier, il manque un objectif précis à cette politique sur le bilinguisme: est‑ce que ce sera le rétablissement du poids démographique ou son maintien? Cela n'accomplit pas ce que le gouvernement dit qu’il veut faire en immigration si on se réfère au document de février 2021 de l'ancienne ministre des Langues officielles.
En terminant, le Conseil de développement économique des municipalités bilingues du Manitoba a dit le 1er mars dernier que l'expérience du Manitoba était qu'il faut une approche en immigration francophone qui va au‑delà des cibles et des objectifs du fédéral, qu'elle implique tous ceux qui travaillent sur le terrain, même les pouvoirs municipaux, comme cela s'est vu avec les projets des communautés accueillantes.
Du point de vue des conservateurs, le projet de loi C‑13 ne va pas assez loin et devrait retourner sur la table à dessin.
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Madame la Présidente, je me lève ce soir pour parler de nos langues officielles et du projet de loi , qui propose une réforme de notre régime linguistique qui était tant attendue.
En tant que francophone du Sud-Ouest de l'Ontario, je suis fière de pouvoir intervenir à la Chambre des communes sur ce projet loi, qui a pour but d'appuyer la modernisation de la Loi sur langues officielles au Canada.
Il faut que nous parlions de la conformité des institutions fédérales qui animent nos régimes linguistiques. De nombreux Canadiens ont porté plainte auprès du commissaire aux langues officielles au cours des dernières années. Ils ont demandé que nous nous assurions de faire le travail nécessaire pour appuyer les institutions afin qu'elles fassent un meilleur travail en matière de langues officielles. Il est temps que le commissaire aux langues officielles du Canada ait un niveau de pouvoir comparable à celui de ses homologues, notamment la commissaire à l'information.
Si le projet de loi est approuvé, le travail au quotidien du commissaire aux langues officielles ne changera pas de manière radicale. Par contre, il sera toujours responsable de traiter les plaintes des citoyens et des fonctionnaires fédéraux qui ont de la difficulté à travailler dans la fonction publique, d'obtenir les services d'un ministère ou de communiquer avec les institutions fédérales dans la langue officielle de leur choix.
Le commissaire pourra dès le premier jour exercer un large éventail de pouvoirs, y compris des pouvoirs plus coercitifs envers les institutions fédérales qui sont déjà assujetties à la Loi sur les langues officielles. Ce pouvoir consiste à établir un accord de conformité avec les institutions fédérales et il détaillera les modalités précises auxquelles elles doivent se conformer afin de rectifier la situation de la non-conformité. Le commissaire pourra aussi superviser la mise en œuvre de l'accord et pourra aider les institutions fédérales à assurer son plein respect. En gros, il s'agit d'un continuum de pouvoirs qui va renforcer les pouvoirs du commissaire aux langues officielles.
Mon deuxième point est basé sur l'immigration francophone au Canada, qui peut sûrement répondre aux préoccupations que nos amis du Bloc québécois ont mentionnées tout à l'heure. La nouvelle mouture du projet de loi prévoit un appui plus important à l'immigration francophone hors Québec.
Avant d'entrer plus en détail dans le vif du sujet, j'aimerais dire que nous plaçons les communautés francophones hors Québec au cœur de notre démarche. Ce chantier d'envergure a débuté en 2019 par un examen d'envergue visant la modernisation de la Loi sur les langues officielles. Lors de cet examen, le gouvernement du Canada est allé à la rencontre des Canadiens dans le cadre d'événements organisés dans chacune des provinces et dans chacun des territoires. Depuis, nous avons rendu public un document de vision qui indique clairement aux Canadiens les intentions derrière cette réforme.
En juin 2021, nous avons déposé une première mouture de ce projet de loi qui décrivait en détail les changements proposés au texte de la Loi sur les langues officielles. Je comprends très bien les inquiétudes que les communautés francophones en situation minoritaire ont quant à la croissance de l'immigration francophone qu'elles veulent avoir dans leur milieu. Avec ce projet de loi, nous pourrons le faire. Nous pourrons répondre aux inquiétudes des francophones en milieu minoritaire. Nous savons qu'au cours de l'histoire du Canada, les flux migratoires ont enrichi notre pays de manière continuelle.
L'immigration est un levier de développement économique, social et culturel majeur, et nous sommes dans une période de notre histoire qui mise plus que jamais sur l'apport de l'immigration même si la pandémie a réussi à compliquer les choses.
Nous avons entendu l'appel des Canadiens qui nous demandent d'en faire plus sur l'immigration francophone hors Québec. C'est notre devoir d'appuyer le poids démographique de ces communautés.
Je vais apporter une précision sur cette question. L'immigration francophone est susceptible d'appuyer le poids démographique de ces communautés en situation minoritaire, mais l'immigration francophone ne pourra pas se porter garante à elle seule du poids démographique de ces communautés. D'autres facteurs contribuent à cette équation: les mouvements entre provinces et à l'intérieur d'une même province, les naissances et plusieurs autres éléments. D'ailleurs, même les provinces et les territoires ont aussi un rôle à jouer pour assurer que ces communautés continuent à croître et à s'épanouir dans l'avenir.
En somme, un appui à l'immigration francophone hors Québec est un solide coup de pouce donné à la vitalité des communautés francophones en situation minoritaire comme la mienne, laquelle se trouve dans la ville de London, en Ontario. Voilà pourquoi nous proposons des mesures ciblées en immigration francophone.
Nous proposons une réforme des dispositions relatives à l'immigration francophone hors Québec. Le projet de loi nous propose de modifier l'obligation du d'adopter une politique en matière d'immigration francophone, ce qui a été mal mentionné tout à l'heure par mon collègue de l'autre côté de la Chambre. Je sais que c'est une chose qui nous tient tous à cœur. Désormais, cette loi sur les langues officielles sera claire à cet égard. Cette politique devra contenir des éléments précis et avoir des objectifs plus clairs. Elle devra contenir des cibles plus précises.
De plus, le texte de loi contiendra une reconnaissance à l'égard du fait que l'immigration est un facteur parmi d'autres pouvant contribuer au maintien et à l'accroissement du poids démographique des minorités francophones du Canada. On parle ici d'une politique uniquement destinée aux communautés francophones en situation minoritaire, puisque le Québec a déjà une entente particulière avec le Canada sur la sélection des immigrants. Nous aurons d'ailleurs d'autres occasions de parler de notre engagement à appuyer la francophonie partout au Canada, y compris au Québec.
Toutefois, modifier le texte de la Loi sur les langues officielles ne sera probablement pas suffisant. Voilà pourquoi nous avons pris l'engagement de prendre des mesures administratives afin d'appuyer l'immigration francophone dans les communautés hors Québec. J'invite les parlementaires de la Chambre à suivre nos travaux en préparation du prochain plan d'action sur les langues officielles. Ce document stratégique contiendra les priorités gouvernementales ainsi que des moyens pour les atteindre. Nous comptons y faire une place à la question de l'immigration francophone.
Toutes ces initiatives convergeront vers un idéal commun, soit celui de favoriser une égalité réelle entre l'anglais et le français au Canada. Ensuite, les institutions fédérales seront mieux outillées pour prendre en compte les besoins de nos communautés de langue officielle en situation minoritaire. Elles seront mieux guidées pour développer des mesures positives dans l'intérêt de ces communautés. Le ministre de l'Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté aura l'obligation de se servir de cette politique en immigration francophone comme outil de développement de la démographie en appui à ces communautés en situation minoritaire.
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Madame la Présidente, même si nous débattons ce soir d'un projet de loi du gouvernement qui vise à modifier la Loi sur les langues officielles, je ne pense pas que mes collègues — et encore moins les interprètes — voudraient m'entendre pratiquer mon français, alors je m'excuse si je vais parler en anglais pendant les 10 minutes qui me sont imparties. Ce n'est que partie remise.
Lorsque nous parlons des deux langues officielles du Canada, il est important de commencer par reconnaître leur rôle respectif dans notre histoire, et le fait qu'elles continuent de façonner notre culture nationale. Cela ne se limite pas au passé, au présent, voire à l'avenir du Québec, comme nous le verrons ce soir.
Notre pays regorge de trésors du patrimoine francophone. Aujourd'hui même, il y a des communautés francophones dans les provinces de l'Atlantique, en Ontario, au Manitoba et même dans l'Ouest canadien. En fait, dans ma propre circonscription, Cypress Hills—Grasslands, il y a plusieurs communautés francophones, et je vais prendre quelques minutes pour en parler ce soir, si les députés me le permettent.
Commençons par le beau village de Gravelbourg, dans ma circonscription. Son patrimoine catholique y est représenté par l'église Sainte‑Philomène, qui est devenue la cathédrale Sainte‑Philomène le 27 juillet 1930 pour ensuite être renommée cathédrale Notre‑Dame‑de‑l'Assomption en 1965. Sa construction a commencé en 1918, et le très révérend O.‑E. Mathieu, archevêque de Regina, a présidé la cérémonie de sa bénédiction le 5 novembre 1919. Cependant, fait important à souligner dans le contexte du débat de ce soir, l'architecte était le seul et unique J.‑E. Fortin, de Montréal.
Le 14 décembre 1918, le Collège catholique de Gravelbourg a ouvert ses portes à ses premiers étudiants. Il s'agit du plus ancien établissement toujours en exploitation à Gravelbourg. En 1976, les oblats de Marie‑Immaculée ont confié la direction du collège à la francophonie de la Saskatchewan.
Ce collège a occupé une place importante dans ma vie. J'ai grandi dans la belle municipalité de Frontier et j'ai joué bien des parties de volleyball au Collège Mathieu. Nous y sommes allés maintes fois pour y jouer. C'est une très belle et bonne école située en plein cœur des Prairies et elle rend un grand hommage au patrimoine francophone de la communauté de Gravelbourg. Les gens sont très fiers de cette communauté et, en tant que représentant de la région, je suis extrêmement fier du riche patrimoine qui y est représenté.
Je veux également mentionner la superbe communauté de Lafleche, en Saskatchewan. Lafleche a été nommée en l'honneur de Louis-François Richer Laflèche, missionnaire catholique romain dans la Terre de Rupert de 1844 à 1856, qui a également été évêque de Trois‑Rivières, au Québec, de 1867 à 1898.
Les députés auront certainement relevé une tendance concernant le grand patrimoine francophone importé du Québec à la Saskatchewan par l'entremise de l'Église catholique. Il y a toutefois une autre communauté dont je veux parler ici ce soir. Il y a plus que ces trois merveilleuses communautés, mais je vais me concentrer sur celles-ci ce soir, parce que le temps dont je dispose est limité.
La troisième communauté est celle de Ponteix, en Saskatchewan, et je vais parler de son histoire. La paroisse Notre-Dame D'Auvergne est née du rêve du père Albert-Marie Royer de fonder une paroisse qu'il dédierait à la Vierge Marie. En 1907, après avoir étudié la nature du sol à plusieurs reprises, le père Royer a choisi les terres qui longent le ruisseau Notukeu, en Saskatchewan, qui lui semblaient prometteuses. Il n'y avait pas de forêt, mais la terre était fertile et facile à cultiver.
Je m'en voudrais de ne pas mentionner que ces terres se trouvent dans le triangle de Palliser, qu'on jugeait impropre à l'habitation humaine. Pourtant, de nos jours, il abrite de nombreuses collectivités formidables qui nourrissent non seulement le Canada, mais l'ensemble de la planète, et qui le font très bien.
Il y a une chose qu'il faut se rappeler, et je suis sûr que la plupart des partis seront d'accord avec moi. La langue française, tant sur le plan de son histoire que sur celui de son avenir au Canada, est bien plus importante que le Parti libéral, ou que n'importe quel autre parti politique d'ailleurs, y compris le Bloc québécois. Il y a déjà eu — et il y a encore — des conservateurs et des députés de plusieurs autres partis qui ont contribué à son histoire et soutenu sa croissance.
En plus de transcender les allégeances politiques et la partisanerie, le Canada français va bien au-delà de ce que le gouvernement tente de faire. C'est pourquoi nous devons nous assurer d'agir avec prudence pour régler toute question relative aux langues officielles afin de trouver le juste équilibre. C'est aussi pour cette raison qu'un député de la Saskatchewan a voulu se prononcer sur cet important projet de loi ce soir.
J'aimerais maintenant aborder une inquiétude plus générale, qui a déjà été soulevée par certains autres députés, y compris le député de au Québec, le ministre du cabinet fantôme conservateur en matière de langues officielles. Cette inquiétude concerne le ministère du Patrimoine canadien et son ministre. J'estime qu'il y a certaines questions de forme à examiner à propos de la façon dont ils devraient participer à l'application des modifications proposées. Avant d'aborder ces éléments, j'aimerais vous mettre en contexte. Certaines personnes ont exprimé leur confusion et donné leurs avis à propos de ces éléments, non seulement du côté de l'opposition, mais aussi dans d'autres segments de la société. Selon ce qu'a rapporté Radio-Canada, la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada se questionne sur le fait que Patrimoine canadien conserve un rôle de coordination au chapitre de la mise en œuvre de la loi, alors qu'il n'a aucune autorité à l'égard des autres institutions fédérales.
Au bout du compte, dans un contexte de gouvernement minoritaire, nous devons demander des comptes au gouvernement fédéral. Nous devons veiller à ce que tout pouvoir que nous lui accordons soit utilisé de façon responsable pour le bien des francophones canadiens: il ne doit pas être en quelque sorte détourné par les libéraux pour promouvoir leurs intérêts partisans et faire des gains politiques.
Comme toujours, je tiens également à ce que nous n'oublions jamais le point de vue des régions rurales. La politique canadienne sur les langues officielles ne touche pas une seule région du pays, et j'espère que l'expérience des francophones qui vivent à l'extérieur des grandes villes du Québec est prise en compte.
Voici un extrait du sommaire du projet de loi que j'ai relevé:
l) permettre au commissaire aux langues officielles de conclure des accords de conformité et de rendre, dans certains cas, des ordonnances;
m) permettre au commissaire aux langues officielles d’infliger des sanctions administratives pécuniaires à certaines entités qui contreviennent à certaines dispositions de la partie IV de la Loi.
Elle apporte également une modification connexe à la Loi sur le ministère du Patrimoine canadien.
La partie 2 édicte la Loi sur l’usage du français au sein des entreprises privées de compétence fédérale, laquelle prévoit notamment des droits et des obligations concernant l’usage du français en tant que langue de service et langue de travail relativement aux entreprises privées de compétence fédérale au Québec et, à une date ultérieure, dans des régions à forte présence francophone. Entre autres, elle permet aux employés des entreprises privées de compétence fédérale de porter plainte auprès du commissaire aux langues officielles relativement aux droits et obligations liés à la langue de travail, et autorise le commissaire à renvoyer la plainte au Conseil canadien des relations industrielles dans certaines circonstances. En outre, elle prévoit que le ministre du Patrimoine canadien est chargé de promouvoir ces droits. Enfin, la partie 2 apporte des modifications connexes au Code canadien du travail.
Je trouve qu'il est intéressant que ce projet de loi permette d'imposer des amendes de 25 000 $ au maximum à une entreprise privée ou à une société d'État qui ne respecterait pas la loi. Je sais que cela fait suite aux pressions exercées sur le gouvernement pour l'embauche d'un dirigeant anglophone chez Air Canada et qu'il s'agirait d'une amende de 25 000 $ imposée à une entreprise qui rapporte des millions et des millions de dollars de profits, mais je m'interroge à propos des lourdes conséquences que pourrait avoir une réaction impulsive à cette décision.
Par exemple, si l'on remonte dans l'histoire, je me demande si cela signifie que le gouvernement aurait exclu ou mis à l'amende un surveillant de pâturage non bilingue de l'Administration du rétablissement agricole des Prairies, quand cette dernière faisait toujours partie des programmes fédéraux. Je me questionne aussi à propos d'autres entreprises de compétence fédérale dans ma circonscription.
Par exemple, qu'en est-il de Financement agricole Canada, qui procure des services financiers essentiels aux agriculteurs et aux éleveurs? Au cours des deux dernières années, un très grand nombre de personnes ont parlé des répercussions que Financement agricole Canada avait eues sur leurs fermes. Que signifiera cette loi pour ceux qui font des affaires dans une industrie très vaste comme l'agriculture? Que signifiera cette loi pour une entreprise comme Financement agricole Canada? Qu'en sera-t-il des élévateurs à grains et des terminaux intérieurs, qui sont de compétence fédérale et qui ont la responsabilité de la passation de marchés et de l'expédition de produits de base jusqu'aux côtes en vue de leur traitement ou de leur exportation vers les marchés internationaux?
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Madame la Présidente, j'aurais envie de dire d'entrée de jeu que la langue française au Québec et à l'extérieur du Québec est vivante.
À la Chambre, j'ai parfois eu l'impression dans certains discours qu'elle a été « folklorisée », dans le sens d'une langue qui est en train de disparaître. On a cité certains monuments du passé. Je suis d'accord que l'on peut être fier, mais le français n'est pas qu'un passé, et le Bloc québécois en témoigne, il est également un avenir. Cependant, quand je songe au projet de loi , à mes yeux, c'est un recul.
Je vais expliquer ma pensée, tout comme l'ont fait certains de mes collègues, pour aller peut-être vers une dimension un peu plus personnelle, parce qu'on a tous un lien très étroit et personnel avec sa langue maternelle, voire dans ce que j'ai fait même à l'extérieur de la Chambre. Dans ma vie professionnelle, cela a toujours été très important.
J'ai évoqué un recul.
Il y a eu le projet de loi , et nous étudions aujourd'hui le projet de loi C‑13. On s'entend qu'il y a eu des projets de loi bonnet blanc, blanc bonnet. Cela se ressemble tout de même un peu. On nous parle d'urgence et d'améliorations, mais l'urgence est bien relative quand on décide finalement en 2021 de cesser les travaux parlementaires et de déclencher des élections au moment où la ministre des Langues officielles de l'époque avait déposé le projet de loi C‑32. On a fait quelques modifications. Je me rappelle avoir entendu tout à l'heure un collègue nous dire que le précédent projet de loi était vraiment extraordinaire, à tel point que finalement on décide d'en faire une refonte à la législature suivante.
On continue de nous parler d'égalité. À mon sens, le terme « égalité » est assez fort. Ce n'est pas « équité » ou « possibilité d'équité ». Je ne crois pas que le projet de loi C‑13 traite d'égalité. Même si on parle de bilinguisme institutionnel ou de bilinguisme individuel, j'estime que c'est du déni de dire que le bilinguisme existe vraiment au Canada.
Je pourrais parler de mon expérience personnelle comme citoyenne et pas seulement avec l'exemple d'Air Canada. Même si le projet de loi C‑13 dit viser « l'égalité réelle », on est encore dans un projet de loi. Comme dans toutes les questions de droit, il peut encore y avoir un droit. On peut viser sur le plan du droit une égalité, mais, quand on arrive dans les faits et dans la pratique sur le terrain, cela demande pas mal plus. Un collègue a parlé de « mordant », mais je pense que c'est trop fort pour ce qui se trouve dans le projet de loi. J'ai parlé de recul, et on est donc loin de mordant.
Au Bloc québécois, reconnaissons une chose intéressante qui est la constatation d'un fait. Je ne sais pas si on peut applaudir un tel constat, mais le projet de loi constate que le français est en situation minoritaire au Canada, ainsi qu'en Amérique du Nord. On s'entend sur ce point. Ce sont des chiffres, mais c'est du moins une reconnaissance et cela demeure un pas, aussi humble soit-il.
Le Bloc québécois revient souvent sur la question du statut minoritaire, mais le français du Québec est minoritaire au Canada, et nous y tenons. Ce n'est pas une langue majoritaire. Elle est sur le territoire du Québec, mais elle demeure noyée. J'y reviendrai plus tard avec des exemples personnels. Je pense que c'est important de parler de la situation minoritaire du français.
Au Bloc québécois, nous sommes bien sûr solidaires avec les francophones hors Québec. Le projet de loi C‑13 n'a pas les mêmes répercussions sur les communautés hors Québec que sur les communautés du Québec. Cela peut être parfois positif pour certaines communautés. Je pense à ce que la disait plus tôt concernant le Programme de contestation judiciaire. Pour des groupes francophones hors Québec, c'est peut-être intéressant, mais, au Québec, c'est tout le contraire. Cela tue.
En ce qui concerne le projet de loi C‑13, la meilleure chose à faire aurait été de respecter le Québec et ses choix. Seule une nation peut défendre correctement sa propre langue. On le dit pour la culture: la langue est son véhicule premier. C'est un moyen d'expression qui est chargé d'histoire et de sens.
C'est au Québec de le protéger. C'est le Québec qui sait le mieux comment faire, notamment avec la Charte de la langue française. En fait, on nous impose un projet de loi qui va à l'encontre de ce qu'on a déjà comme mécanisme de défense et de promotion de la langue. On nous oblige à bien des choses. Cela fait plusieurs fois que je le souligne, cette semaine. On nous impose beaucoup de choses ici.
Tout à l'heure, j'ai parlé de déni. Je pourrais parler de quelque chose qui sonne absolument faux. Ce qu'on nous propose, c'est quelque chose qui va être nuisible. On voudrait vraiment quelque chose qui soit asymétrique, or ce n'est pas du tout cela qui arrive.
J'aurais aimé parler de beaucoup d'autres éléments. Il m'aurait fallu 20 minutes, mais je vais tout de suite poursuivre sur un aspect plus personnel. De toute façon, je pense qu'on est tous d'accord, on l'a répété: pour nous, c'est inacceptable.
J'aurais aimé parler de différences entre le droit et le devoir. Pour ce qui est du Québec, ce projet de loi permet notamment aux entreprises de compétence fédérale de choisir la langue, tandis que la Charte dit qu'on doit parler en français au travail. C'est une immense différence. C'est le jour et la nuit. Il faut donc vraiment que la protection aille au-delà du choix. En effet, si ce choix existe, nous n'arriverons pas à défendre notre langue. Parfois, on choisit la facilité et la facilité ce serait le projet de loi C‑13.
Cela dit, je voulais parler de mon expérience personnelle. Mon collègue de a vraiment une spécialisation en langues, mon collègue de est historien, mon collègue de est comédien. Moi, je viens du domaine des lettres. Je suis une littéraire à la base. Je suis une professeure de littérature. J'ai travaillé dans le milieu de l'édition et dans le milieu de l'écriture. Chez nous, c'est bourré de livres. Bien sûr, ce sont des livres de littérature française, bien que j'aie également travaillé sur la littérature britannique. Il reste que, même si ce n'était pas une tendance familiale, je suis tombée dans les lettres et dans le domaine langagier. Mes réflexions quotidiennes sont émaillées de questions sur la langue, sur la littérature, sur la culture et sur l'identité. Notre identité passe par la langue.
J'ai aussi des enfants. Quand on a des enfants, ils ont une langue maternelle. Bien sûr, je leur ai appris le français, mais nos enfants nous échappent. Cela est normal, cela fait partie de notre existence. J'ai trois enfants, dont un qui est tout petit. Il ne parle pas pour le moment. J'en ai des plus vieux. Malgré tout, tout ce que je vois dans leur vie — on parle de territoire, alors mes collègues me permettront un parallèle ou une analogie plus ou moins exact —, c'est une certaine romanisation, au sens d'anglicisation, qui va écraser la langue française jusque dans nos maisons. Je ne suis pas contre tous les outils informatiques, mais je vois, en observant mes enfants, qu'en matière de langue, on n'est plus en 1950, alors qu'il fallait traverser une frontière pour être submergé par une mer anglophone. Maintenant, c'est dans les maisons elles-mêmes. Nous devons donc vraiment trouver des mesures très fortes.
Je pense à mon fils qui est un joueur de jeux vidéos. Il est bilingue et j'en suis très heureuse. Je parle plusieurs langues aussi. Je parle un peu l'allemand, l'espagnol, j'ai fait du latin, du grec et je parle français et anglais. J'adore les langues. Je vois qu'il est devenu bilingue, mais, en même temps, je vois à quel point la langue change. Je parle de la langue écrite, de la langue parlée ainsi que du rapport à la langue. Même s'ils sont jeunes, il y a quand même une domination. Dans le concept lui-même, il y a une idée de domination culturelle qui fait en sorte qu'on va assimiler l'autre.
C'est la même chose pour ma fille, par le biais des médias sociaux. « Par le biais », et je pense que l'expression est bonne, c'est péjoratif. Parfois, elle n'aura pas le choix d'avoir accès à de l'information, même si c'est extraordinaire. On a une énorme encyclopédie. Elle va finir par s'angliciser aussi.
Ce sera aussi le cas de mon petit garçon; qu'on pense aux Netflix de ce monde et à tout ce à quoi on a accès. C'est surtout en anglais que cela se passe.
Tout ce que je viens de décrire est vraiment présent, et une loi comme celle-là constitue vraiment un recul total. Quand on veut renforcer une langue, et je parle encore du Québec, on ne présente pas un projet de loi contre la volonté d'une nation et contre la volonté d'un gouvernement. Cela affaiblirait la langue.
À mon avis, et les mots que je vais dire sont durs, ce projet de loi constitue une politique d'assimilation linguistique indirecte pour le Québec. Quand on ne fait pas quelque chose de front, on le fait insidieusement, et je crois que le projet de loi C‑13 est un miroir aux alouettes.
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Madame la Présidente, je vais commencer en reconnaissant que je suis sur le territoire autochtone des peuples de la nation wsanec, dans ma circonscription, Saanich—Gulf Islands.
Comme nous parlons de langues ce soir, je tiens à préciser que le mot « saanich » est en langue sencoten, une langue autochtone. Ce mot a été changé par les peuples européens en raison d'une mauvaise prononciation. C'est ce qui explique le nom de ma circonscription, aujourd'hui.
Nous sommes ici ce soir pour débattre du projet de loi . Cela a été un long chemin de luttes et d'obstacles pour avoir la protection des deux langues officielles ici, au Canada. Comme nous en avons plus tôt, c'est la langue française qui est évidemment menacée, parce que c'est elle qui minoritaire au Canada et en Amérique du Nord. La culture du Québec est la plus francophone de notre pays, mais elle n'est pas la seule communauté francophone. Il y a les peuples acadiens dans les provinces de l'Atlantique, mais il y a également d'autres communautés francophones partout au Canada, comme les Franco-Manitobains et les Franco-Albertains. Il y a aussi une communauté francophone en Colombie‑Britannique. Elle n'est pas grande, mais elle est très importante.
La Loi sur les langues officielles a été adoptée en 1969. C'était il y a longtemps. Les langues française et anglaise y ont été déclarées comme étant les deux langues officielles du Parlement et du gouvernement du Canada. La prochaine étape a eu lieu en 1982, avec la Charte canadienne des droits et libertés, qui a réaffirmé le français et l'anglais comme étant les langues officielles du Canada. Il y a maintenant 30 ans qu'ont eu lieu les dernières grandes réformes en profondeur.
C'est lors de la dernière législature, en 2021, que le projet de loi a été déposé, mais ce dernier est mort au Feuilleton lorsque du déclenchement des élections au mois d'août dernier. Nous avons maintenant le projet de loi C‑13, qui a été déposé au mois de mars 2022. C'est pour moi la première occasion de faire un discours au sujet de ce projet de loi. Il est clair qu'on doit répondre au déclin du français au pays, car, malgré tous les efforts faits à l'égard des deux langues officielles du Canada, le français est encore menacé.
Ce projet de loi a reçu un bon accueil. Le commissaire aux langues officielles a dit: « J’ai pris connaissance des mesures proposées et, selon moi, elles devraient donner un second souffle aux efforts déployés pour protéger et promouvoir nos deux langues officielles [...] ». Voilà une différence entre le projet de loi C‑32 de la dernière législature et l'actuel projet de loi C‑13: protéger et promouvoir le français, ainsi que promouvoir et appuyer l'apprentissage du français et de l'anglais. II est toutefois évident que c'est d'abord la langue française qui a besoin d'être protégée. On parle aussi de promouvoir la langue française, d'appuyer les communautés francophones et, pour la première fois, de protéger les droits du travail et de la consommation en français.
En réalité, le projet de loi , c'est deux projets de loi en un. Il modifie la Loi sur les langues officielles et met en œuvre la Loi sur l'usage du français au sein des entreprises privées de compétence fédérale, tout en apportant des modifications connexes à d'autres lois. C'est un effort important pour la protection et l'utilisation du français dans les entreprises privées.
Comme on a pu le constater pendant le débat de ce soir, le Bloc québécois n'appuiera pas cet effort concernant le Québec. Il a raison de demander la protection du français dans les entreprises privées au Québec. C'est clair qu'on doit utiliser la langue française dans les communautés à majorité francophone. Le projet de loi soulève des questions, mais je pense que nous allons pouvoir y apporter des améliorations en comité.
Le projet de loi C‑13 étend et renforce les pouvoirs du commissaire aux langues officielles. C'est une bonne idée de lui donner plus de pouvoirs et de renforcer son rôle en lui donnant le droit de présenter et de trouver des solutions aux violations en lien avec l'usage de la langue française au Canada.
De plus, dans cette loi, il y a assurément un effort de reconnaissance des langues autochtones. Ce n'est pas grand-chose: il ne met pas sur pied de nouveaux pouvoirs ou de nouveaux droits. Cependant, nous retrouvons maintenant, dans le préambule de la loi modifiée, de nouvelles reconnaissances, notamment: « [...] du maintien et de la valorisation de l'usage des autres langues et de la réappropriation, de la revitalisation et du renforcement des langues autochtones. »
Je trouve que c'est un pas dans la bonne direction. C'est dans les autres lois et les autres programmes de réconciliation qu'il faut protéger les langues plus menacées, les langues autochtones de notre pays.
[Traduction]
Aux unilingues anglophones qui suivent ce débat, je ne peux dire à quel point il est important pour ceux dont la langue maternelle n'est pas le français de continuer d'essayer de l'apprendre. Je sais que c'est ce qu'ont fait beaucoup des députés présents ici ce soir, tout comme moi d'ailleurs. J'adore parler français et j'adore essayer d'améliorer mes compétences dans cette langue. C'est un peu plus difficile tard le soir, mais à n'en pas douter cette langue améliore et enrichit notre société.
Ce n'est pas pour rien qu'on appelle le français la langue de Molière. C'est une belle langue, et nous devons veiller sur l'identité du Canada sur ce continent, cette identité qui nous distingue vraiment — je ne sais pas si on peut l'appeler ainsi — de la culture américaine — ou de ce qui passe pour de la culture —, même si on ne doit pas trop s'autocongratuler au sujet de la richesse de la société canadienne dans les domaines du divertissement et de la musique. Le fait québécois et la réalité francophone, qui font que nous ne sommes pas un pays unilingue, nous enrichissent énormément nous, les anglophones du Canada. C'est en protégeant et en élevant les langues autochtones et en tenant à elles que nous nous améliorerons et nous enrichirons en tant que peuple.
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Madame la présidente, je veux répondre à mon amie la députée de Saanich—Gulf Islands.
Quand on regarde les statistiques, le français recule au Québec. Ce qu'on voit est reconduit dans le projet de loi. Quelque 100 millions de dollars par année sont donnés à la communauté anglophone, alors que cette communauté est en pleine expansion. Ce qui est en danger au Québec, c'est le français, qui affiche un recul.
En fait, quand on parle des langues au Canada, il y a trois problèmes majeurs. D'abord, comme la députée de Saanich—Gulf Islands l'a dit, il y a les langues autochtones. Il faut s'attaquer aux problèmes pour bien les soutenir. Ensuite, il y a le français hors Québec et, finalement, le français au Québec. L'anglais au Québec n'est pas en danger, il est en expansion.
Quand on regarde les dernières années et les dernières décennies, on voit que la part du français hors Québec diminue. Les politiques et le soutien mis en place ont-ils été suffisants? Les chiffres parlent d'eux-mêmes: le français est en baisse. Quand on regarde ce qui se passe au Québec, les statistiques démontrent que le français recule aussi. Les politiques mises en place sont-elles adéquates pour protéger le français au Québec et hors Québec? La réponse nous est donnée par les statistiques: non.
Le projet de loi , ce n'est pas la mer à boire. Il n'y aura pas de révolution. Les choses vont continuer de la sorte. On comprend que le but du gouvernement, peu importe sa couleur, c'est l'assimilation, la disparition à petit feu du français. C'est ce qu'on voit. Le français est en recul hors Québec et au Québec. Cela fonctionne, bravo! C'est le but. Si cela n'est pas le but, on a affaire à des incompétents sans bon sens. Je pense que le gouvernement est incompétent à bien des chapitres, mais pas là-dessus.
Au Québec, les francophones se sont dit que c'était le seul endroit où les francophones étaient encore en majorité. La seule solution pour stopper ce déclin chez nous, c'est l'indépendance. Je veux réitérer un message de solidarité indéfectible à tous les francophones hors Québec et les rassurer: le Québec sera toujours solidaire. Tous sont nos frères, nos sœurs, nos cousins et nos cousines. C'est la même chose pour tous les Autochtones partout au Québec et au Canada. Ils sont nos frères et nos sœurs.
Mon collègue de , qui est de loin l'éminence en la matière à la Chambre, au Québec et au Canada, faisait allusion aux frogs. On aime souvent traiter les francophones de grenouilles. Si on met une grenouille dans le chaudron d'eau bouillante, elle va sauter tout de suite; elle ne va pas tolérer cela. Si on la met dans l'eau froide et qu'on allume le feu, tranquillement, l'eau va chauffer. Quand la grenouille va se rendre compte que l'eau est trop chaude, il va être trop tard. J'ai l'impression que c'est ce qui se passe pour les francophones au Canada, hors Québec et au Québec. Ce n'est pas mal, ce n'est pas pire, ça empire et, quand c'est pire et qu'on s'en rend compte, c'est trop tard. Ce n'est pas encore trop tard pour le Québec, mais on le voit encore dans le projet proposé que cela ne changera pas.
La seule solution, c'est l'indépendance. Je travaille dans le domaine de l'économie. Je vois à quel point, si on était maître chez nous, on pourrait avoir des leviers, des outils et tout les reste. Il faut se rappeler le principe de base: deux peuples, deux cultures différentes. La seule façon de protéger le français et de le faire perdurer en Amérique du Nord, c'est de déclarer notre indépendance. Quand on se fie à ce que fait le gouvernement, on voit un recul au Québec et hors Québec. Les chiffres le prouvent. J'en conclus que le but visé, c'est l'assimilation.
Je veux citer un texte du grand Guy Rocher, qui a été un grand bâtisseur de la Révolution tranquille et un corédacteur de la loi 101. Son texte a été publié dans Le Devoir il y a cinq ans, et il a été repris dans d'autres journaux pour les 40 ans de la loi 101. Cet été, la loi aura 45 ans, et rien n'a changé.
Voici le texte:
La loi 101 est une loi nationale. Elle est liée à l'identité de la nation québécoise, parce qu'elle en dit le cœur, la langue française. La loi 101 a contribué à cette identité, et continue à le faire, mais dans un contexte sociopolitique qui a évolué, qui n'est plus celui de 1977, nous imposant du même coup de repenser notre politique linguistique québécoise.
La Charte de la langue française n'est pas apparue comme par magie sur la scène politique québécoise. Sa gestation s'est produite sur plusieurs années, elle a une histoire. Sans invoquer un passé lointain, rappelons que la loi 101 de 1977 est étroitement liée à la Révolution tranquille des années 1960. En effet, la loi 101 découle directement du « Maître chez nous », qui voulait dire bien des choses. Cette formule annonçait avant tout, ainsi l'interprétait-on, la prise en charge de notre économie québécoise par l'État et la collectivité, le contrôle de nos ressources naturelles et le rapatriement de leurs revenus.
Mais le « Maître chez nous » impliquait plus en profondeur l'affirmation d'une identité québécoise qui allait se substituer à l'identité canadienne-française. C'est au cœur de la Révolution tranquille que cette substitution s'est produite. Les Canadiens français deviennent des Québécois, en même temps qu'on voulait donner une connotation inclusive à notre appellation, pour que tout citoyen du Québec se sente bel et bien Québécois.
Cette transition vers l'identité québécoise était préparatoire à la loi 101. Elle en fut assurément une condition essentielle. Elle allait donner son sens national à la loi 101. La fonction identitaire portée par cette loi trouva sa source dans cette dimension fondamentale de la Révolution tranquille.
L'autre mutation opérée par la Révolution tranquille, et qui fait partie du contexte de la loi 101, c'est la transformation de l'État québécois. À compter de 1960, il devient interventionniste en matière économique, sociale et culturelle. Il contribue directement à la promotion des intérêts économiques des Québécois et de la société québécoise. Il se charge de l'ensemble du système de l'éducation, financièrement et pédagogiquement, il crée un ministère de la Culture. C'est dans cette même foulée que le législateur québécois a entrepris de légiférer en matière de politique linguistique.
De 1967 à 1977, le Québec a vécu une grande crise linguistique, la plus importante de son histoire. Dix années charnières dans l'histoire moderne du Québec, où les Québécois furent à la recherche de ce qu'ils étaient, de ce qu'ils sont. L'élément déclencheur en fut le fait apparu dès le début des années 1968 comme une menace à la communauté francophone: l'anglicisation à peu près systématique des enfants issus de l'immigration, par leur adhésion massive à l'école anglaise plutôt qu'à l'école française. On peut dire que ce choix pouvait aisément être interprété comme un rejet, le rejet de l'école française et, de ce fait, de la communauté québécoise de langue française et de sa culture.
Le « libre choix de l'école » devint un enjeu majeur. La question était simple: devait-on laisser aux parents québécois de toute origine, qu'ils soient « de souche » ou immigrants, le libre choix entre l'école anglaise et l'école française? Ou fallait-il restreindre l'accès à l'école anglaise à la seule minorité québécoise de langue anglaise? Ce dilemme enflamma les esprits, entraînant d'importantes manifestations de rue et des affrontements, divisant l'opinion publique.
Dans ce climat d'effervescence, le législateur québécois tenta à deux reprises de calmer le jeu, mais sans succès. Le projet de loi no 63 de 1969, qui entérinait le libre choix de l'école, indigna la majorité francophone. En 1974, le projet de loi no 22, qui imposait aux enfants des immigrants des « tests linguistiques » pour accéder à l'école anglaise, choqua la minorité anglophone et les communautés ethniques. Pour comprendre la loi 101, son « esprit » et sa substance, il faut la situer dans le contexte de cette crise linguistique de la décennie 1967‑1977. L'arrivée-surprise au pouvoir du Parti québécois le 15 novembre 1976 s'inscrit dans le cadre de cette « crise »: c'est en bonne partie l'opposition au projet de loi no 22 qui porta le Parti québécois au pouvoir.
Je viens de lire la première partie du texte. Guy Rocher poursuit en disant que, 40 ans plus tard, beaucoup de choses ont changé et qu'il faut réfléchir à cela.
Premièrement, il faut penser la politique linguistique aujourd'hui « pour un Québec traversé par la mondialisation sous toutes ses formes, surtout culturelle. »
Deuxièmement, « en 1977, la langue anglaise est dominante par la force de l'histoire, celle de la colonisation par la Grande‑Bretagne », mais, aujourd'hui, « la langue anglaise américaine s'est répandue comme langue de communication bien en dehors du Commonwealth et connaît chez les Québécois une attraction [très forte]. »
Troisièmement, « les technologies de l'information et des communications ont explosé, principalement à l'avantage de l'anglais sur toutes les autres langues. »
Quatrièmement, « la situation du français ne suscite plus d'émotion chez un nombre suffisant de Québécois pour inquiéter les dirigeants politiques, malgré tous les indices de la fragilisation du français. »
Je continuerai à parler du texte de Guy Rocher au cours de la période réservée aux questions et aux observations.
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Madame la Présidente, je suis heureux de contribuer au débat sur le projet de loi , Loi modifiant la Loi sur les langues officielles, afin d'exprimer à quel point les libéraux déçoivent tous les gens préoccupés par le déclin du français partout au Canada et à quel point le gouvernement actuel ne semble pas prendre la chose vraiment au sérieux.
Faits à l'appui, on a demandé pendant des semaines de faire avancer ce projet de loi, ce qui nous aurait permis d'en discuter de manière plus approfondie en comité. Qu'ont fait les libéraux? Ils ont inscrit le débat à l'ordre du jour ce soir très tard, un jeudi ou un vendredi, quand personne n'écoute et que personne n'est au courant de ce qui se passe. C'est exactement ce que les libéraux font depuis toujours.
J'ai siégé au Comité permanent des langues officielles pendant plusieurs années, de 2015 à 2021. La réforme de la Loi sur les langues officielles est quelque chose dont on parlait depuis le tout début de la 42e législature. Nous sommes rendus à la 44e législature. Il y a eu deux élections entretemps et la dernière était, comme on le sait, complètement superflue. Chaque fois, c'est comme si tout le travail fait par le Comité était mis de côté et qu'on recommençait à neuf.
Certains groupes de témoins sont venus au moins trois fois au Comité pour nous faire part de leurs recommandations. Depuis la pandémie, beaucoup de présentations se sont faites en mode virtuel, mais, avant cela, le Comité avait reçu à répétition à Ottawa des intervenants venus du Nouveau-Brunswick, de l'Ontario, de la Saskatchewan, et même du territoire du Yukon. Je salue par ailleurs ces témoins, qui sont venus débattre de l'avancement du projet de loi ou des projets de loi qui ont été déposés depuis tout ce temps.
D'innombrables rapports ont été produits, chacun faisant part des préoccupations des communautés de langue officielle en situation minoritaire partout au Canada, avec des recommandations proposées par un comité dont les travaux sont généralement non partisans et très collégiaux. J'en ai été témoin pendant de nombreuses années et je salue mes collègues, avec qui j'ai eu le plaisir de siéger à ce comité.
Le gouvernement a eu la possibilité à plusieurs reprises au cours des dernières années de déposer un projet de loi qui aurait répondu aux préoccupations des intervenants et aurait mis en œuvre l'ensemble des recommandations. Ce n'est pourtant pas ce que nous avons devant nous, dans le projet de loi C‑13. Ce dernier semble être davantage une ébauche qu'une loi modernisée dont la dernière modification remonte à plus d'un demi-siècle.
Les libéraux veulent faire adopter le projet de loi C‑13 pour bien paraitre et faire semblant qu'ils se préoccupent de la langue française au Canada, mais le texte final qui est devant nous laisse plusieurs personnes perplexes. D'ailleurs la Fédération canadienne des communautés francophones et acadienne a déclaré s’interroger sur le fait que le ministère du Patrimoine canadien conserve un rôle de coordination de la mise en œuvre de la Loi, alors qu’il n’a pas autorité sur les autres institutions fédérales.
La présidente de la FCFA, Mme Liane Roy, a déclaré qu'elle aurait aimé voir un objectif plus précis de rétablissement et d’augmentation du poids démographique de la communauté francophone en situation minoritaire.
Le projet de loi C-13 est bourré de contradictions. On veut que le français soit renforcé au sein des ministères canadiens et d'institutions fédérales, mais on confie la tâche à un ministre qui n'a même pas d'autorité.
On souhaite accroître l'immigration francophone pour maintenir le poids démographique des communautés de langue officielle en situation minoritaire, mais on n’inclut même pas de mécanismes pour atteindre les cibles existantes, ou on omet de préciser des cibles tout court.
Je vais citer quelques exemples. Le projet de loi C‑13 propose au gouvernement à la page 9 « de veiller à ce que [...] les gestionnaires et les superviseurs soient aptes à communiquer avec les employés dans [les deux langues officielles] lorsqu'ils exercent leurs attributions [...] et à ce que la haute direction soit en mesure de fonctionner dans ces deux langues. »
Le gouvernement compte-t-il modifier les conditions de travail des cadres existants? Est-ce qu'il s'engage à en faire une condition d'embauche, par exemple? Si oui, on peut s'attendre à ce que le président du Conseil du Trésor ait un rôle à jouer, pas le ministère du Patrimoine canadien qui n'a aucune autorité sur la fonction publique. C'est un exemple très concret.
À la page 15, en matière d'immigration francophone, le projet de loi mentionne que la politique comprend notamment des objectifs, des cibles et des indicateurs. Les cibles seront-elles contraignantes? Est-ce qu'il y aura des conséquences pour les ministères ou fonctionnaires concernés, si elles ne sont pas atteintes? Le gouvernement ne peut pas nous le dire.
Le gouvernement fait un peu référence aux sanctions à la page 25, en stipulant que, sur la recommandation du ministre du Patrimoine canadien, le gouverneur en conseil peut prendre des règlements pour appliquer ces sanctions ou pour le non-respect de la Loi.
Si on veut traduire pour le lecteur, le gouverneur en conseil, c'est le conseil des ministres. Donc, on nous demande en tant que parlementaires de voter sur un projet de loi dont les conséquences pour le non-respect de la Loi seront déterminées plus tard, et uniquement par le premier ministre et son entourage.
Une fois adopté, le projet de loi accorde tous ses pouvoirs à une branche exécutive, et nous, qui appartenons à la branche législative, n'aurons pas un mot à dire, sauf lors des périodes de commentaires avant l'arrivée en vigueur du Règlement.
Il y a un autre exemple où le gouvernement laisse perdurer un flou et manque à ses engagements de présenter une modification tangible à la Loi sur les langues officielles, c'est en matière d'usage du français au sein des entreprises privées de compétence fédérale. Aux pages 57 à 59, on fait référence aux entreprises situées au Québec, ou dans une région à forte présence francophone. Mon Dieu! Je ne sais pas comment ils définissent cela, mais ce n'est écrit nulle part. Or le projet de loi ne va pas jusqu'à définir ce qu'est une région à forte présence francophone. Qui va décider cela? Comment vont‑ils faire? Encore une fois, il y a beaucoup de questions, et pas de réponses.
Encore une fois, le projet de loi C‑13 accorde tout le pouvoir au Conseil des ministres en stipulant que, lorsqu'il prend un règlement avant de définir une région à forte présence francophone, le gouverneur en conseil peut tenir compte de tout critère qu'il estime approprié, notamment le nombre de francophones dans une région par rapport à la population totale de la région. Quel est ce chiffre? Est‑ce 50 %, 20 %, 5 % ou 1 %? On ne le sait pas.
Sans préciser des seuils pour le projet de loi C‑13, le gouvernement nous dit essentiellement de voter pour lui et qu'il vous dira plus tard. Cela fait sept ans et demi que les libéraux font cela. On sait ce que cela donne aujourd'hui. Cela manque de crédibilité, et c'est pour cela qu'on souhaite que le projet de loi C‑13 puisse se rendre rapidement en comité s'il est possible d'y apporter les précisions nécessaires.
En résumé, le projet de loi C‑13 constitue une réponse législative faible à l'urgent problème du déclin du français. Il aurait fallu une réforme plutôt que de n'avoir que des rajustements. Il a fallu plus de six ans aux libéraux pour présenter un projet de loi qui ne constitue pas la réforme qu'ils promettaient. Les libéraux auraient pu agir plus tôt pour protéger et promouvoir le français. Le projet de loi C‑13 n'arrêtera pas le déclin du français, s'il conserve sa forme présente. Il manque de mordant et ne possède aucune obligation de résultat. Les libéraux font la sourde oreille à plusieurs demandes des organisations et des organismes nationaux tels que celles d'éliminer le fractionnement des pouvoirs entre le Conseil du Trésor et le ministère du Patrimoine canadien.
Les conservateurs reconnaissent le déclin du français au Québec, et ailleurs au Canada, et ils soutiendront toujours les deux langues officielles et les droits linguistiques.
Les langues officielles sont appréciées par une très grande majorité de Canadiens et de Canadiennes et constituent un atout majeur pour notre pays. Certains de mes collègues en ont parlé tout à l'heure: en permettant l'épanouissement de l'ensemble de nos communautés, ce n'est assurément pas en faisant l'indépendance du Québec qu'on va améliorer cela.
Nous demandons alors que les libéraux s'engagent à travailler avec les partis de l'opposition pour permettre au Comité permanent des langues officielles de continuer son travail dans le but d'améliorer le projet de loi C‑13, afin de répondre aux attentes des Canadiens et des intervenants qui ont contribué tellement de temps et d'efforts tout au long du processus de consultation pour moderniser la Loi sur les langues officielles.
Cela dure depuis 2015, j'étais là et on parlait de cela en 2009 aussi. Cela fait 12 ans. C'est une question de respect et de reconnaissance de notre identité et du caractère unique de notre grand pays, et nous devrions être fiers d'avoir les deux langues officielles que sont l'anglais et le français, ou le français et l'anglais, et qui nous permettent d'accéder, d'échanger et de partager notre culture avec 50 autres pays membres du Commonwealth et 54 pays membres de la Francophonie.
Il me reste une minute. Je vais revenir sur les commentaires de mon collègue de . Je dois l'inviter à me poser des questions. Lucien Bouchard avait dit, il y a 25 ans, que si le Bloc québécois faisait plus d'un mandat, cela aurait été un échec. Cela fait 25 ans que le Bloc québécois est à Ottawa, que le Parti québécois est pratiquement en train de disparaître de la province du Québec et que son option est en train de disparaître, alors ce n'est certainement pas comme cela qu'on va protéger la langue française au Canada, encore moins en essayant de séparer ce groupe francophone, important au Canada et dans l'Amérique du Nord, du reste du Canada, où il y a des millions de Canadiens qui sont à la fois francophones, francophiles ou ami des francophones. Je pense que c'est important qu'on demeure un grand pays, comme nous le sommes déjà actuellement et que nous l'avons été depuis toujours.
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Madame la Présidente, j'ai l'immense plaisir d'être ici ce soir. J'aimerais reconnaître que nous sommes tous réunis ce soir sur les territoires traditionnels non cédés de la nation algonquine anishinabe.
Avant que je commence formellement mon discours, je veux mentionner à nouveau que je suis acadienne du Nouveau‑Brunswick. Ce que je n'ai pas mentionné plus tôt, c'est que je suis la plus jeune d'une famille de 10 enfants. J'ai eu le droit d'étudier en français au primaire, au secondaire et au postsecondaire grâce, en partie, à la Loi sur les langues officielles. Plusieurs de mes frères et sœurs aînés n'ont pas eu ce droit. Ils ont dû aller à l'école secondaire anglophone. La modernisation de la Loi sur les langues officielles est donc quelque chose de très personnel pour moi. Comme je l'ai dit, c'est mon vécu, c'est mon quotidien. Si à Moncton j'ai eu le droit de travailler en français au cours de ma carrière, c'est encore une fois grâce à la Loi sur les langues officielles. Je pense que tous les députés de la Chambre veulent vraiment mettre en avant un projet de loi qui a plus de mordant pour protéger et promouvoir nos belles langues.
Depuis 2019, notre gouvernement s'est donné comme mandat de faire le point sur la situation linguistique au Canada et de prendre acte de l'évolution des langues officielles depuis l'adoption de la première Loi sur les langues officielles, il y a plus de 50 ans. Le portrait linguistique est en constante évolution. Le monde dans lequel nous vivons a aussi changé depuis 1969. Le temps était venu de se pencher sur les bons coups de cette Loi ainsi que sur ses défis afin de proposer une nouvelle vision modernisée de notre dualité linguistique et de notre bilinguisme. La conjoncture pour moderniser la Loi sur les langues officielles est particulière. Alors que la planète entière est plongée dans une crise sanitaire avec la COVID‑19, au Canada nous avons pu voir comment les pressions et l'urgence d'agir pouvaient avoir des répercussions sur l'application des obligations en matière de communication et de service au public. Nous avons le devoir d'agir, et nous l'avons fait afin de tenir compte de cela dans notre projet de modernisation.
Depuis plus de 50 ans, force est de constater que la Loi sur les langues officielles a permis de modeler le paysage linguistique du pays. Non seulement elle a établi le bilinguisme institutionnel et permis aux francophones d'accéder aux carrières dans la fonction publique fédérale, mais elle a aussi permis aux francophones d'être servis et éduqués dans leur langue. Depuis plus de 50 ans, en plus de faire la promotion de nos deux langues officielles, la Loi a protégé les droits de nos communautés de langue officielle en situation minoritaire. C'est vrai tant pour les communautés francophones partout au Canada que pour les communautés d'expression anglaise au Québec. Elle a assuré leur dynamisme.
Il s'agit ici d'une réalité canadienne incontournable, d'une distinction canadienne appréciable; mais c'est aussi un défi. C'est une situation qui demande une intervention de la part du Canada. Nous avons le devoir et l'obligation d'appuyer la vitalité de ces communautés d'un océan à l'autre pour les générations à venir. Notre riche histoire tient compte de la présence, de la persévérance et de la résilience des communautés francophones en situation minoritaire d'un bout à l'autre du pays et des communautés d'expression anglaise au Québec.
Cependant, les chiffres peuvent être préoccupants, car le maintien du poids démographique de ces communautés est important pour nous. Les chiffres parlent et en disent long. Nous l'avons entendu à maintes reprises ce soir. Le poids démographique de la population francophone s'effrite. La proportion des gens dont la première langue parlée est le français à l'extérieur du Québec était de 6,6 % en 1971 et passera à 3,9 % d'ici 2036. Encore une fois, ce sont des statistiques effrayantes.
En dépit d'efforts en matière d'immigration francophone et de protection du droit d'accès à des services fédéraux dans la langue de son choix, il faut en faire plus afin de respecter la responsabilité et l'engagement de notre gouvernement à favoriser l'épanouissement des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Nous avons besoin d'institutions fortes, d'institutions qui agissent comme un phare au sein de ces communautés. Il nous faut aussi de meilleures données pour mieux cibler nos interventions au sein de ces communautés. Pour ce faire, il faut aussi que les institutions fédérales soient à l'écoute de leurs communautés. On sait que les communautés en situation minoritaire, tant francophones qu’anglophones, ont besoin d'institutions et de services dans leur langue.
Ces institutions font partie de l'espace public dont elles ont besoin pour vivre de leur langue et s'épanouir. Lorsqu'on parle de services, on parle de ce qu'offrent les grandes institutions publiques, comme les administrations provinciales ou municipales ou encore les organisations communautaires. Celles-ci incluent les commissions et les conseils scolaires, les garderies, les cliniques de santé communautaire et les organismes culturels. Le projet de loi que notre gouvernement a déposé vise, entre autres, le développement du plein potentiel de ces communautés en appuyant la vitalité des institutions dans des secteurs clés.
Pour ce faire, nous voulons apporter des modifications à la partie VII de la Loi sur les langues officielles, notamment: inscrire des exemples concrets de mesures positives. Par exemple, il s'agit de fournir un appui aux secteurs clés des communautés de langue officielle en situation minoritaire, comme l'éducation, l'emploi, la santé, l'immigration, la culture, ainsi que la justice; inclure une obligation pour le gouvernement du Canada de contribuer à une estimation des enfants des ayants droit à l'instruction dans la langue de la minorité officielle; affirmer l'engagement du gouvernement du Canada à renforcer le continuum en éducation, de la petite enfance à l'école postsecondaire, dans la langue de la minorité.
Ces modifications auraient pour effet d'obliger le gouvernement à prendre plus de mesures positives pour appuyer les communautés de langue officielle en situation minoritaire, de clarifier les obligations des institutions fédérales, notamment de consulter ces communautés, et de protéger les services et les programmes clés.
Le projet de loi que nous avons déposé présente des solutions concrètes, ainsi que des solutions durables, visant à protéger la pérennité de nos communautés de langue officielle en situation minoritaire et leurs institutions. Le projet de loi propose aussi des avancées innovantes. On pense notamment à la création de nouveaux droits d'être servi et de travailler en français dans les entreprises privées de compétence fédérale. Notre gouvernement est profondément engagé envers nos deux langues officielles et envers ses communautés partout au Canada.
Le dépôt du projet de loi pour la modernisation de la Loi sur les langues officielles est un grand moment pour notre identité en tant que Canadiens et Canadiennes, ainsi que pour la défense de nos droits linguistiques aujourd'hui et pour les générations à venir. Nous savons depuis longtemps que nos grands objectifs en matière de langues officielles ne peuvent faire une réelle différence dans la vie des Canadiens qu'en étant mis en œuvre de concert avec les communautés visées. Ce projet de loi met la table pour une collaboration renforcée entre les institutions fédérales et les communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Au cours des derniers mois, j'ai eu le privilège de rencontrer plusieurs intervenants d'un bout à l'autre du pays qui nous ont donné leurs commentaires au sujet de la nouvelle mouture du projet de loi. Encore une fois, en faisant de l'écoute active, nous avons inséré dans le nouveau projet de loi plusieurs des recommandations proposées par plusieurs groupes provinciaux et nationaux pour nous assurer d'avoir un projet de loi avec plus de mordant.
J'ai bien hâte de répondre aux questions.