Recueil de décisions du Président John Fraser 1986 - 1994
La procédure financière / Les travaux des subsides
Recours aux mandats spéciaux du Gouverneur général durant l'ajournement du Parlement; députés n'ayant pas l'occasion d'examiner les projets de loi de crédits pertinents; Président lié par un ordre spécial; Président ne rend pas de décision sur des questions d'ordre constitutionnel ou juridique
Débats, p. 1325-1326
Contexte
Le 4 mai 1989, M. Peter Milliken (Kingston et les Îles) invoque le Règlement pour souligner le fait que les députés n'auront pas l'occasion d'examiner le projet de loi portant affectation de crédits sur lequel la Chambre doit se prononcer à 17 h 45 conformément à l'ordre qu'elle a adopté le 4 avril 1989 et qui prévoit la confirmation des sommes octroyées en vertu des mandats spéciaux du Gouverneur général pour l'année financière 1988-1989. Il demande que ces mandats spéciaux soient déférés aux comités compétents de la Chambre, de façon à ce que ceux-ci puissent examiner ce qui aurait dû être le Budget des dépenses supplémentaire pour l'année financière précédente. D'autres députés interviennent également à ce sujet[1]. Le Président rappelle aux députés l'essence de sa décision du 2 mai 1989 soit que le remède à ce grief réside normalement dans le recours aux mécanismes législatifs pour modifier la Loi sur la gestion des finances publiques. Il laisse toutefois entendre qu'il examinera la question à nouveau. Plus tard au cours de la séance, le Président rend une décision qui est reproduite intégralement ci-dessous.
Décision de la présidence
M. le Président: J'ai dit il y a quelques minutes, en réponse aux rappels au Règlement du député de Kingston et les Îles et de celui de Glengarry-Prescott Russell (M. Don Boudria), que je considérerais ces rappels. Tout d'abord, il est important de bien comprendre le point que les deux députés soulèvent. Résumé de façon aussi simple que possible, le voici :
Pendant l'ajournement de la Chambre, parce que le gouvernement avait besoin d'argent, des mandats spéciaux ont été émis. Ces mandats ont été émis en vertu de la Loi sur la gestion des finances publiques. Il y a un projet de loi, sur lequel on votera à 17 h 45, qui entre autres choses, à l'article 3, et je lis les notes en marge, prévoit la confirmation du paiement en vertu de mandats spéciaux pour l'année financière 1988-1989. Ce sont les mandats spéciaux dont se plaignent les députés.
Pour que tout le monde comprenne, disons que, normalement, un projet de loi fait l'objet d'une première lecture, d'un débat de deuxième lecture, d'une étude en comité après adoption en deuxième lecture, puis il revient à la Chambre où il est étudié à l'étape du rapport, avant de faire l'objet d'une troisième lecture.
Ce projet de loi qui confirme les mandats ne sera pas soumis à cette procédure, car il y a un ordre spécial de la Chambre qui dit que :
Le jeudi 4 mai, lorsque la Chambre abordera l'ordre du jour, elle débattra une motion de l'opposition dont il aura été donné avis la veille, et au plus tard à 17 h 45, le 4 mai, le Président interrompra le débat et mettra aux voix sur-le-champ et successivement, sans débat ni amendement, toutes les questions nécessaires à l'expédition de cette motion, le Président mettra ensuite aux voix sur-le-champ et successivement, sans débat ni amendement, toute motion relative aux crédits provisoires et à l'adoption, à toutes les étapes, du projet de loi fondé sur ces crédits, après quoi le Président ajournera la Chambre [...].
C'est ce que prévoit l'ordre spécial, et les députés n'ignorent pas que je suis lié par cet ordre spécial. Je ne peux y mettre fin ni le modifier. C'est un ordre de la Chambre. Je vous ferai remarquer que c'est aussi un ordre qui s'applique aujourd'hui par consentement unanime, mais cela ne change rien à la question.
Si la motion de l'opposition est débattue tout le reste de l'après-midi, nous n'aurons plus le temps, conformément à cet ordre spécial, de débattre le contenu de ce projet de loi. Autrement dit, les députés font valoir qu'ils n'auront pas l'occasion de débattre la nature, les causes et les raisons des crédits demandés et dépensés conformément aux mandats spéciaux. Je crois avoir bien compris les députés.
Je suppose qu'on pourrait aussi dire que si le débat de la motion de l'opposition se termine tôt aujourd'hui, il restera du temps pour cela, mais personne ne peut le prévoir. Il se peut fort bien qu'il ne reste pas suffisamment de temps.
Les députés ont aussi fait allusion à un rapport spécial qui avait été déposé à la Chambre en 1980 par le président du Conseil du Trésor de l'époque. On me dit que ce rapport a été déposé uniquement à des fins d'information et que cela ne fait pas partie des travaux des crédits. C'est peut-être une bonne chose que de tels rapports soient communiqués à la Chambre en pareilles circonstances, mais ce n'est pas nécessaire et je ne peux l'exiger.
À mon avis, les députés ont clairement exprimé ce qu'ils considèrent être leurs doléances. Comme je l'ai dit au début, on se plaint que la Chambre doive ce soir franchir toutes les étapes d'un projet de loi qui confirme des mandats spéciaux que la Chambre n'a pas eu l'occasion d'examiner ou de débattre en suivant la marche habituelle.
Les députés font valoir qu'à prime abord du moins, il semble que ce soit une atteinte à la tradition parlementaire, et nous avons entendu il y a quelques jours des arguments percutants sur l'importance du droit de regard du Parlement sur les dépenses et sur l'obligation qui incombe aux députés, conformément à ce qui se fait depuis longtemps, d'examiner les besoins financiers du gouvernement et de voter ou non les crédits.
Comme Je député l'a fait remarquer, il est probable que ces mandats ne seront ni étudiés ni débattus, ce qui veut dire que la Chambre pourrait rejeter le projet de loi ce soir, en théorie du moins. Je n'en dis pas plus.
Quoi qu'il en soit, la situation se résume à ceci : le Règlement de la Chambre n'a pas été enfreint. Ce qui ne veut pas dire qu'il n'y a pas eu atteinte à une tradition ou à une convention de la Chambre. Mais là-dessus, je suis impuissant.
Il me semble que la solution consiste à modifier soit la Loi sur la gestion des [finances} publiques, soit le Règlement de la Chambre. Il y a quelques instants, les députés ont fait valoir ce point dans les appartements du Président et ont suggéré que le gouvernement pourrait renvoyer toute l'affaire au comité permanent approprié. Je le répète encore une fois, je n'ai aucun pouvoir en cette matière. C'est aux partis des deux côtés de la Chambre de se consulter.
De toute façon, je reviens au rappel au Règlement fait par le député de Kingston et les Îles et le député de Glengarry- Prescott- Russell. Le point qu'ils font valoir est clair. Selon toute probabilité, la Chambre n'aura pas l'occasion d'examiner et de débattre les mandats. Malheureusement pour les députés qui s'en plaignent, il est impossible au Président de régler cette question. À chacun de juger le point qu'ont soulevé les députés.
Je remercie les députés pour leur intervention.
F0603-f
34-2
1989-05-04
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[1] Débats, 4 mai 1989, p. 1316-1319.