SDIR Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mardi 22 novembre 2011
[Enregistrement électronique]
[Français]
Nous sommes le Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international.
Aujourd'hui, le 22 novembre 2011, nous tenons notre neuvième séance.
[Traduction]
Je fais remarquer que nous avons le quorum requis pour l'audition de témoins, mais nous ne sommes pas assez nombreux pour adopter des motions. Si vous voulez bien, nous allons donc remettre à plus tard l'examen des motions.
Je signale aux membres du sous-comité que notre séance d'aujourd'hui est télévisée. Comme je le rappelle toujours dans ces cas-là, il vaut mieux bien se tenir et ne rien faire que l'on ne voudrait pas voir enregistrer de manière permanente.
Monsieur le président, le quorum est de quatre membres. J'ai eu des entretiens avec tout le monde concernant Mme Jalal et sa visite. Si vous vouliez bien...
Juste un instant. Nous sommes sur le point de répondre à votre question, monsieur Sweet.
Sachant que vous obtiendrez le consentement unanime, pourquoi ne pas simplement attendre quelques minutes? Ève va arriver incessamment et nous pourrons alors tous nous y mettre. Cela vous convient-il?
Parfaitement, monsieur le président. Je ne voulais simplement pas faire attendre le témoin. Je m'en remets à vous.
Très bien.
J'étais sur le point de dire que nous recevons aujourd'hui un invité qui a déjà comparu ici à plusieurs reprises. Le révérend El Shafie est le président et fondateur de One Free World International.
Vous êtes toujours pour nous un ami. Nous sommes heureux de vous voir, révérend El Shafie. Je vous invite à commencer votre témoignage, s'il vous plaît.
Merci, monsieur le président
Tout d'abord, je tiens à vous remercier tous de m'avoir invité. C'est toujours un plaisir que de vous revoir tous.
Je vais parler aujourd'hui de la situation des droits de la personne en Égypte et en Irak. Je vais également aborder brièvement la situation des minorités en Iran.
Commençons avec l'Égypte. Après ce que l'on appelle le printemps arabe — et je n'ai pas idée qui a commencé à appeler ce mouvement le printemps arabe — le monde a découvert très lentement, mais sûrement, que le printemps arabe n'est rien d'autre qu'un hiver froid et meurtrier pour les minorités. La situation en Égypte, particulièrement celle de la minorité chrétienne, mais aussi des autres minorités, est telle que, à l'heure où nous parlons, depuis le début de la révolution égyptienne le 25 janvier, nous avons constaté — et nos sources ont recensé — 12 attaques majeures contre la communauté chrétienne en Égypte. Lorsque je dis 12 incidents majeurs, cela ne signifie pas qu'il n'y en a pas eu d'autres. Nos sources indiquent qu'il y a eu plus de 36 attaques, mais les 12 attaques majeures sont celles qui étaient suffisamment massives pour que les médias, la presse, en parlent.
L'une des grandes attaques dont je traiterai aujourd'hui a pris pour cible une manifestation pacifique le 9 octobre 2011, connue sous le nom de massacre de Maspero. Avant de parler du massacre de Maspero et de ce qui s'est passé à Maspero, j'aimerais revenir un peu en arrière.
Le 30 septembre, dans la province d'Assouan, 20 imams des mosquées entourant les zones chrétiennes ont lancé un appel violent à attaquer les chrétiens de la région. Trois mille extrémistes musulmans ont attaqué les villages et les bourgades chrétiennes dans la province d'Assouan. Cela s'est produit le 30 septembre. Après ces attaques, les chrétiens indignés ont organisé une manifestation pacifique le 9 octobre. J'insiste sur le fait qu'il s'agissait d'une manifestation pacifique le 9 octobre. L'armée égyptienne a tiré sur les manifestants à balles réelles, et en a tué en les écrasant sous les roues de véhicules blindés. Ces photos extraites de prises de vue montrent les victimes de Maspero.
Il nous est impossible de les voir d'ici. Ce n'est pas quelque chose que j'ai réellement envie de regarder, mais pourriez-vous les faire circuler, je vous prie?
Je dois vous avertir tous que certaines des images sont très crues, alors ne les regardez pas si vous n'avez pas l'estomac pour cela.
Au cours de cette attaque, plus de 27 manifestants chrétiens pacifiques ont été tués et plus de 300 blessés. Certains des blessés ne pouvaient pas aller dans un autre hôpital parce que les hôpitaux de la région les refusaient, à l'exception d'un seul, l'hôpital copte. Voilà la vérité et la réalité. Ensuite, la police a attaqué l'hôpital copte et a arrêté certains des blessés dans l'hôpital même. Ce n'est là qu'une des attaques majeures.
Pour marquer le 40e jour anniversaire du massacre de Maspero, les chrétiens ont de nouveau défilé dans une manifestation pacifique. Ils ont été de nouveau attaqués à Shoubra et au Caire. C'était le 40e jour anniversaire de l'attaque de Maspero.
Le 16 octobre 2011, après l'attaque de Maspero, un étudiant de 17 ans nommé Ayman Nabil Labib portait une croix. Son professeur lui a demandé de retirer la croix. Lorsqu'il a refusé, le professeur et d'autres étudiants s'en sont pris à lui. Ils l'ont battu à mort. Cela est arrivé également après l'attaque de Maspero, le 16 octobre.
Vous trouverez la relation de ces incidents dans notre rapport sur l'Égypte, qui vous sera remis, et je suis sûr qu'il est actuellement en cours de traduction en français.
Lorsque nous parlons de l'Irak et de la situation en Irak, je m'y suis rendu il y a deux mois. J'ai été à Baghdad. J'étais accompagné par un député, M. John Weston, de Vancouver. Ma délégation comprenait également le sénateur Don Meredith, et j'étais accompagné par M. Robiah Elias de la communauté irakienne, et de Martin Himel, journaliste canadien.
Il y a deux mois, je me suis donc rendu dans la capitale irakienne et y ai rencontré des hauts responsables de l'Irak, tels que le vice-premier ministre, le vice-président de l'Irak, le président du Parlement irakien, le ministre irakien des droits de la personne. Je dirais que s'il existe dans un pays un ministre des droits de la personne, cela signifie qu'il n'y a pas de droits de la personne du tout, et qu'ils utilisent le ministre plus ou moins comme paravent. Nous avons également rencontré le ministre de l'Environnement de l'Irak.
Lorsque nous parlons de la minorité en Irak, commençons par les chrétiens. Plus de la moitié de la communauté chrétienne d'Irak a été contrainte à l'exode ou a été tuée. Nous voyons là le début d'un génocide. Ce n'est pas simplement du nettoyage ethnique ordinaire, c'est le début d'un génocide en Irak.
Nous avons visité l'une des églises, Notre Dame du Salut. À titre d'exemple, en octobre dernier, cinq terroristes ont fait irruption dans l'église Notre Dame du Salut. Ils ont attaqué l'église et tué plus de 45 fidèles, dont le prêtre.
Monsieur le président, j'ai ici quelques-unes des balles qui ont été retirées de l'église et du corps des victimes. Certaines ont encore sur elles le sang des innocents.
Mesdames et messieurs, pendant quatre heures, les terroristes ont massacré les chrétiens sans aucune intervention de la police irakienne — quatre longues heures. Ensuite, lorsque la police irakienne a pénétré dans l'église, elle n'a rien fait pour aider les gens. Les policiers ont immédiatement commencé à voler l'argent et l'or des victimes, au lieu de les aider. Cela est arrivé en Irak, en octobre dernier.
Il n'y a pas que les chrétiens d'Irak qui souffrent de persécution, il y a également les sabéens et les mandéens. Plus de 90 p. 100 des sabéens et des mandéens ont été tués en Irak. La population des sabéens et des mandéens en Irak était d'environ 50 000 à 60 000 en 2003. En 2010, leur nombre n'était plus qu'entre 3 500 et 7 000.
À côté d'eux, les yézidis sont également persécutés en Irak. Bien sûr, la communauté Baha'i en Irak et en Égypte compte un total de 2 000 membres dans chaque pays. Leur dilemme est qu'ils sont persécutés. Ils n'ont pas de carte d'identité, et ils ne sont donc pas reconnus par leur gouvernement en Égypte ou en Irak. Cela signifie qu'ils ne peuvent pas se marier. Ils ne peuvent pas divorcer. Ils ne peuvent enterrer leurs morts. Ils ne peuvent acheter des biens immobiliers. Et voilà la situation à laquelle nous sommes confrontés.
La solution... Nous pouvons lire le rapport rédigé par One Free World International. Je rappelle que nous avons deux rapports, l'un sur l'Égypte et l'autre sur l'Irak, tous deux en anglais. Ils ont été envoyés à la greffière. Je crois que certaines parties sont encore en cours de traduction. Si vous souhaitez ces copies en anglais, j'en ai avec moi. Je suppose qu'ils sont en cours de traduction en français.
Ce dilemme comporte de nombreuses solutions, notamment confronter ces gouvernements sur la scène internationale, soutenir les réfugiés et ouvrir les portes de l'immigration canadienne pour accueillir les réfugiés des camps, et encourager sur le terrain, en Irak et en Égypte, les programmes qui protègent les droits des femmes et des minorités. Mais la recommandation sur laquelle j'insisterais le plus à l'heure actuelle, c'est de rendre notre aide et notre commerce international conditionnels à l'amélioration des droits de la personne dans ces pays. Je ne dis pas qu'il faut les supprimer, je dis qu'il faut lier l'aide et les échanges commerciaux à l'amélioration de la situation des droits de la personne dans ces pays. J'entends par-là que si un pays ne respecte pas les droits des minorités ou des femmes, nous pouvons utiliser l'aide et les échanges internationaux et soit les augmenter soit les diminuer, selon la mesure dans laquelle ces droits sont respectés.
Par exemple, les échanges commerciaux entre le Canada et l'Irak se chiffrent à plus de 2 milliards de dollars — plus de 2 milliards. Entre 2003 et 2010, le gouvernement canadien a octroyé pour 300 millions de dollars d'aide à l'Irak. Je n'ai aucune donnée sur l'usage qui a été fait de ces 300 millions de dollars. Je suis allé voir sur le site Internet du ministère des Affaires étrangères, j'ai essayé partout. Je ne sais pas comment ces 300 millions de dollars ont été dépensés en Irak.
Même en Égypte, l'aide à l'Égypte tourne autour de 18 millions de dollars et les échanges commerciaux entre le Canada et l'Égypte atteignent plus de 900 millions de dollars. Je n'ai, là non plus, aucune donnée sur ce qu'il est advenu des 18 millions de dollars.
Lawrence Cannon était anciennement notre ministre des Affaires étrangères. Il s'est rendu en Égypte et a dit que le Canada voulait donner 11 millions de dollars au cours des cinq prochaines années pour encourager la révolution en Égypte. Sauf tout mon respect, je ne vois pas comment il peut encourager un gouvernement qui massacre des innocents.
L'année a été celle où, pour la première fois, le gouvernement égyptien a attaqué directement les chrétiens, de front. Habituellement, il utilise pour cela des groupes extrémistes. Il se cache derrière des groupes extrémistes. Mais, pour la première fois, l'armée égyptienne a attaqué la communauté chrétienne de front, simplement parce qu'elle a manifesté pacifiquement.
Nous devons aujourd'hui relier notre aide et notre commerce international à l'amélioration de la situation des droits de la personne dans ces pays. Cela amènera des progrès, car ces gouvernements veulent l'argent. Je ne suis pas partisan de donner un chèque en blanc à quelque gouvernement que ce soit. Sauf tout mon respect, il s'agit là de l'argent des Canadiens. Ce n'est pas l'argent du gouvernement canadien, c'est l'argent des Canadiens. Je ne pense pas qu'il faille leur donner cette aide ni autoriser ces échanges commerciaux tant que nous ne verrons pas d'amélioration sur le plan des droits de la personne, et ce devrait être la condition.
Pour conclure, je vous remercie de l'invitation. Je répondrai avec plaisir à vos questions.
Monsieur le président, si vous pouviez m'accorder deux minutes à la fin de la séance, je vous en serais reconnaissant. Merci.
Nous veillerons, révérend, à vous réserver quelques minutes pour conclure lorsque nous en aurons fini avec nos questions.
J'apprécie, au fait, que vous ayez respecté aussi scrupuleusement le temps imparti.
Peut-être, monsieur Sweet, pourrais-je me tourner d'abord vers vous.
Merci, monsieur le président, de me permettre de présenter cette motion.
Je pense que tous les membres seront d'accord pour que le sous-comité invite Mme Massouda Jalal et ses associés à comparaître devant le comité au sujet de la question des droits de la femme en Afghanistan. Cette rencontre aurait lieu lors du voyage au Canada de Mme Jalal.
C'est une motion. Y a-t-il des interventions à son sujet? Sommes-nous d'accord?
Une voix: Je suis en faveur.
Le président: Bien. Dans ce cas, elle est adoptée à l'unanimité.
(La motion est adoptée.)
Le président: Monsieur Sweet, vous avez également la parole pour le premier tour de questions. Allez-y. Vous disposez de six minutes.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Et je veux remercier le révérend Majed El Shafie de sa présence parmi nous.
Je veux également attirer l'attention du comité sur le fait que notre ancien collègue, Mario Silva, avec qui nous avons tous travaillé, est ici. Nous apprécions qu'il ait pris la parole au petit-déjeuner inter-religion ce matin et il s'y est très bien débrouillé.
Révérend El Shafie, vous êtes né en Égypte, n'est-ce pas?
Je n'ai pas de relation avec ma famille, car elle m'a renié lorsque je me suis converti de l'islam au christianisme à l'âge de 18 ans.
D'accord.
Sur cette note, l'histoire de la persécution des chrétiens en Égypte est bien documentée. Pourtant, lors de ce soulèvement, ils se sont tenus au coude à coude avec les autres protestataires pour amener des changements. Ils avaient donc des attentes.
Pourriez-vous expliquer au comité quelles étaient ces attentes et comment la communauté chrétienne dans son ensemble — coptes compris — se sent face à ce dérapage incontrôlé de la situation?
L'attente était la liberté, la liberté religieuse. Monsieur Sweet, nous ne sommes pas ici pour nous en prendre aux musulmans, nous sommes ici à cause de la persécution des minorités chrétiennes. Je suis ici parce que je m'oppose aux extrémistes, quels qu'ils soient.
Lorsque la révolution a commencé le 25 janvier, la communauté chrétienne était aux côtés de la communauté musulmane pour combattre le régime dictatorial et l'attente était que nos droits seraient protégés et que nous pourrions vivre dans la liberté de religion. On ne peut construire une démocratie sans la liberté de religion. Celle-ci est le fondement de la démocratie. Sans elle, pas de démocratie, c'est aussi simple que cela. La réalité, en l'occurrence, est que si vous privez les hommes ou les femmes de leur foi, il ne leur reste rien en quoi croire.
Lorsque le soulèvement a commencé, tout le monde l'a appelé — particulièrement les médias occidentaux, et je crois que les Américains ont été les premiers — le printemps arabe. Quel printemps arabe? Quel printemps arabe? La réalité est que lorsque vous défaites une dictature comme celle de Mubarak — et je suis complètement d'accord avec le renversement de Mubarak, car il était un dictateur et a commis de nombreux crimes contre l'humanité — vous créez un vide politique. Ce vide politique ne peut être occupé que par le groupe le plus organisé existant. Malheureusement, le groupe le plus organisé là-bas, à part l'armée, ce sont les Frères musulmans. Les Frères musulmans sont une organisation terroriste. Je dois vous faire savoir clairement que les Frères musulmans sont une organisation terroriste.
Lorsque vous avec une société comme l'égyptienne, 30 à 40 p. 100 de ses membres sont illettrés. Ils ne savent ni écrire ni déchiffrer leur propre nom, alors comment pourraient-ils lire une constitution? Même si vous réformez la constitution, comment vont-ils la lire? Ils ne savent ni écrire ni lire leur propre nom.
Aussi, la démocratie ne peut être construite du jour au lendemain. La démocratie doit se faire pas à pas.
La réalité sur le terrain en ce moment est qu'une organisation comme les Frères musulmans exploite ce vide politique pour prendre le contrôle du pays. Je regrette de dire, monsieur Sweet, que le 6 février, Lawrence Cannon, notre ancien ministre des Affaires étrangères, a salué l'ouverture de négociations entre le gouvernement égyptien et les Frères musulmans. Cela a été diffusé sur CTV le 6 février. Il a déclaré cela lors d'une conférence de presse, accueillant favorablement des pourparlers entre le gouvernement égyptien et les Frères musulmans à titre d'opposition.
Les Frères musulmans sont à la base de la fondation d'al-Qaïda et du Hamas. En gros, leur doctrine a donné naissance à cette autre organisation que nous voyons ici aujourd'hui. Un dirigeant des Frères musulmans a déclaré l'autre jour qu'il n'accepterait jamais qu'un chrétien ou une femme devienne président. Où sont les droits de la personne? Où sont les droits de la personne lorsqu'on a affaire à un groupe comme celui-ci qui refuse qu'une femme ou un chrétien dirige le pays?
La vérité et la réalité, c'est que la démocratie sans instruction dépérit. L'éducation est l'oxygène de la démocratie. Ce que nous voyons aujourd'hui n'est pas un printemps arabe, c'est un hiver glacial mortel.
Merci, monsieur.
J'aimerais beaucoup rester sur le sujet de l'Égypte, mais parce que nous parlons aujourd'hui de deux sujets... Et d'ailleurs, révérend, je conviens avec vous que la liberté de religion est à la base de tout. Si vous avez la liberté de culte, vous avez la liberté de rencontre, la liberté de conscience, la liberté de parole.
Les chrétiens irakiens ont vécu dans une paix relative en Irak jusqu'il y a quelques années. Pourriez-vous expliquer brièvement au comité ce qui a changé aujourd'hui en Irak?
Ce qui a changé aujourd'hui?L'Irak vivait dans une atmosphère pacifique, plus ou moins, sous Saddam Hussein. Après que l'invasion américaine a renversé Saddam Hussein, la majorité chiite a commencé à mettre la main sur le gouvernement irakien, car les chiites sont majoritaires. Ils ont financé l'organisation du nom de Jaysh Al-Mahdi, l'armée mahdi. Ils ont commencé à prendre le contrôle du gouvernement. Ils veulent maintenant intégrer cette armée au régime irakien. Ce qui s'est passé, c'est que les sunnites et les chiites, les deux principaux groupes en Irak, avaient des milices qui ont commencé chacune à attaquer les chrétiens, et le gouvernement irakien n'a rien fait pour les arrêter. Il n'a rien fait pour les empêcher.
Je connais un cas où, en 2006, un monsieur du nom de Ahtra Kyriakos, a été kidnappé, blessé par balles et torturé par la Jaysh Al-Mahdi. Personne n'a été arrêté; il n'y a pas eu de justice. La plupart des attaques contre les chrétiens ou les bahá’ís ou les sabéens et mandéens restent impunies. La communauté chrétienne et les autres minorités ne portent pas d'armes. Elles n'ont pas de milice et n'ont donc aucune façon de se protéger, elles, leur enseignement et leur religion.
Ce que nous voyons aujourd'hui, c'est que les milices attaquent la communauté chrétienne pour tenter de l'extirper d'Irak. Et sauf mon respect, si je peux le dire — Irwin, je suis sûr que vous êtes avec moi — cela était déjà arrivé à la communauté juive irakienne. Aussi, lorsqu'on dit que cela n'arrivera peut-être jamais aux chrétiens, cela est bel et bien arrivé à la communauté juive d'Irak. Elle a été contrainte à fuir l'Irak, surtout à Farhud — vous vous souvenez du massacre de Farhud, où 182 juifs irakiens ont été tués. Nous avons d'ailleurs ici l'une des victimes, l'un des survivants. L'un des survivants de ce massacre est ici. C'était donc déjà arrivé auparavant et cela arrive de nouveau aux chrétiens.
Merci. Cela met fin à votre tour.
J'avais d'ailleurs fait erreur plus tôt en disant que c'était six minutes chacun. Les mathématiques dictent qu'avec six membres ici et 30 minutes, nous ne disposons en fait que de cinq minutes chacun. Veuillez m'en excuser. De plus, nous voulons laisser le temps pour des observations finales.
Monsieur Marston, je vous prie.
Nous pourrons les prélever sur le temps d'un autre député conservateur plus tard au cours de la réunion.
Cela a été un plaisir de prendre la parole récemment lors de votre conférence sur la reconstruction de l'Irak.
Nous regardons nos informations télévisées chaque soir. Nous voyons les Égyptiens redescendre dans la rue pour essayer de garantir ce qu'ils pensaient avoir arraché au printemps. Qu'ils aient fait partir la figure de proue ou le soi-disant leader Mubarak et l'ont renversé ne signifie pas qu'ils ont renversé le système. Celui-ci existe depuis tellement longtemps. Votre histoire est très préoccupante.
Un mot que je manie avec très grande prudence est « génocide », car nous savons tous qu'il signifie la liquidation de toute une population. Certes, le massacre dans l'église que vous avez décrit — et lorsque je vous ai rendu visite, vous m'avez donné un morceau de l'église où les 54 personnes ont été massacrées — on ne trouve pas d'autres mots. Ces images de l'église, proviennent-elles de...
Je soupçonne que, dans un cas comme dans l'autre, le résultat aurait été très semblable, car c'est tellement horrible.
L'une de mes questions porte sur les Frères musulmans. Vous les avez qualifiés de groupe terroriste. Qui leur a donné cette appellation? Est-ce qu'ils ont vraiment été déclarés groupe terroriste par un pays, ou bien fondez-vous ce qualificatif uniquement sur leurs actes tels que vous les percevez?
Les deux. Ils sont un groupe terroriste aux yeux de la plus grande partie du Moyen-Orient. On les appelle ainsi dans la plupart des pays arabes. Cependant, le fait que l'Égypte les appelle un groupe terroriste ne signifie rien pour moi, car ils qualifieraient également de groupe terroriste une organisation comme One Free World International.
Non. Aux États-Unis et en Grande-Bretagne... La plus grande partie du monde libre les appelle ainsi. Cependant, ce n'est pas mon critère. Mon critère, ce sont leurs actes concernant...
Non, je comprends votre position, et quiconque a vu les images de ce qui s'est produit pensera la même chose. J'essayais simplement de savoir si la communauté internationale a réagi en désignant ainsi ce groupe. La description que vous avez donnée, en parlant de l'escalade... La première attaque était le fait d'individus, et ensuite le système ou l'armée ou la police s'y sont joints.
Sait-on si la moindre personne a été arrêtée, inculpée ou traduite en justice pour l'un des crimes dans ces deux pays?
Pas à ma connaissance. Et d'ailleurs, lors du massacre de Maspero, beaucoup de chrétiens ont été arrêtés et certains d'entre eux sont encore en prison. Donc, on a arrêté les victimes elles-mêmes.
Dans l'église Notre Dame du Salut, les cinq terroristes qui ont fait irruption se sont fait sauter à la fin, et il n'y avait donc personne à arrêter; eux aussi sont morts dans l'attaque.
Pour que les choses soient bien claires — nous avons des téléspectateurs qui nous regardent — cet événement particulier s'est déroulé en Irak.
Je voulais juste le préciser pour le compte rendu, car nous alternons entre l'Irak et l'Égypte, et les situations sont terriblement similaires dans les deux pays.
Revenons à l'Égypte un instant, car c'est votre pays d'origine, dans quelle mesure la discrimination est-elle fondée sur la religion? Quelle est l'ampleur du phénomène? Vous dites qu'actuellement les chrétiens coptes semblent être dans le collimateur, pour ainsi dire, et vous avez déjà fait état de la situation des Juifs. Ainsi donc, un chrétien ne se sent pas en sécurité dans ce pays et souffre assurément de discrimination?
La majorité ne se sent certainement pas en sécurité, et se considère comme entourée de discrimination. Certes, il existe divers degrés de persécution et de discrimination. Il se peut que vous vous fassiez insulter dans la rue simplement parce que vous arborez une croix, ou bien que vous soyez congédié par votre employeur, mais cela peut aller jusqu'à une agression physique ou psychologique ou même l'emprisonnement.
Vous décrivez là une discrimination de citoyen à citoyen, ou d'employeur à employé... Vous avez mentionné aussi l'État, et dans un cas l'État, par l'intermédiaire des militaires, a attaqué directement des gens.
Donc, au sein de l'administration de l'État, si vous demandez un passeport ou quelqu'autre document, vous rencontrez là aussi une discrimination systémique en Égypte?
Pendant des années, l'Égypte a été présentée comme l'idéal. C'est loin d'être un idéal, si je vous suis bien.
C'est très loin d'être l'idéal.
Je veux juste porter un point à votre attention concernant les personnes arrêtées et le système judiciaire. Après le massacre de Maspero, de fortes pressions internationales ont été exercées sur l'armée pour qu'elle ouvre une enquête internationale. L'armée a répondu en nommant son propre conseiller à la tête de l'enquête. L'armée fait donc enquête sur elle-même.
Dites-moi, pensez-vous que ce sera une enquête équitable?
Il est bon de vous revoir, révérend El Shafie. Vous avez toujours été un excellent témoin à ce comité, nous mettant au courant de ce qui se passe dans le monde. J'apprécie votre témoignage d'aujourd'hui.
Je voudrais juste porter à votre attention et à l'attention de ceux qui nous écoutent la déclaration de notre ministre des Affaires étrangères, John Baird, après les événements en Égypte. Il a déclaré, entre autres, au nom du gouvernement du Canada, que la liberté de culte est un droit humain fondamental et un élément constitutif vital d'une démocratie saine, et que les croyants doivent pouvoir pratiquer leur culte dans la paix et la sécurité, et que l'extrémisme religieux n'a pas sa place dans une société moderne et une Égypte nouvelle.
Parlant de l'Égypte nouvelle, un témoin a comparu il y a un mois devant le Comité des affaires étrangères, témoin qui a choisi de rester anonyme, et qui a déclaré ceci, et je cite:
Je ne suis pas trop sûr que l'on puisse qualifier ce qui se passe dans le monde arabe de printemps arabe. Je l'appellerais plutôt le printemps islamique. Et nous devons y prêter attention car, de la Tunisie à l'Algérie et à l'Arabie saoudite, et dans toute la région, tous ces pays adoptent la charia.
Vous êtes d'origine égyptienne. La charia a été promue plus récemment en Égypte comme une modification future à apporter à la constitution. Nous avons entendu récemment dans notre comité des témoignages à ce sujet. Pourriez-vous nous expliquer quelles seraient les conséquences de l'adoption de la charia sur la liberté religieuse en Égypte?
À mon avis, ce serait un désastre. Je vais vous expliquer pourquoi. Je suis un très fervent partisan de la séparation entre la religion et l'État. Peu importe la religion. Lorsque vous mélangez les deux, c'est là que vous... Si la charia devient la loi, la source de la constitution égyptienne, il en résultera beaucoup de persécution des minorités: chrétiens, baha-'is et autres. Vous aurez beaucoup de violations des droits de la femme. Les femmes seront forcées de porter l'habit islamique et ainsi de suite. Leur travail s'en ressentira, de même que la façon dont leurs maris les traitent, sans parler de la relation entre le mari, la femme et les enfants. Au bout du compte, je pense que l'accord de paix entre l'Égypte et Israël sera mis en question. C'est un problème, car cela va plonger toute la région dans la guerre.
Je ne dis pas que ceux qui veulent vivre selon la charia sont de mauvaises gens. Qu'ils vivent selon la charia. C'est très bien. Je suis chrétien, je vis chez moi comme un chrétien. Je vais à l'église comme un chrétien. Cela ne concerne que moi. Je vis comme un chrétien chez moi, je fréquente mon église et je pratique mon culte. Ce n'est pas un débat sur la religion, mais sur la liberté religieuse.
La séparation entre l'État et la religion est extrêmement importante. Il ne faut pas mélanger les deux. C'est mon point de vue.
Avec la chute de Mubarak, et maintenant les manifestations de rue qui demandent le renversement du gouvernement militaire provisoire, pouvez-vous nous dire ce qui pourrait se passer? Si les manifestants obtiennent gain de cause, qui remplacerait le gouvernement militaire provisoire?
Ma crainte est que ce soit en grande partie les Frères musulmans. Ils sont le groupe le plus organisé. Je suis sûr qu'il y aurait une opposition. Je suis sûr qu'il y aurait un parti laïc pour prendre part aux élections. Mais j'ai l'impression que les Frères musulmans auront la majorité.
Passant à l'Irak, à votre avis, qui sont les premiers responsables des attaques contre les chrétiens en Irak? Qu'est-ce qui motive ces attaques?
Les chrétiens ne sont pas les seuls attaqués, ce sont les chrétiens et toutes les autres minorités. Ce qui motive ces attaques est le fait qu'ils sont différents et le fait qu'on les considère comme des infidèles, des personnes ayant des croyances ou une religion différente. Cela est motivé également en partie par une volonté de vider le Moyen-Orient de ces minorités. Il s'agit essentiellement de les mettre à la porte.
Les racines chrétiennes en Irak et en Égypte sont largement antérieures à l'Islam. Nous assistons aujourd'hui à un exode. Les gens sont forcés de partir. L'absence de protection de la part de l'État est réellement alarmante. Il est alarmant que le gouvernement ne les protège pas ou ne fasse rien pour les aider. À mon avis, le motif de leur persécution est qu'ils ont des croyances différentes et qu'on cherche, de façon générale, à les contrôler.
Un autre élément important est que le christianisme en Irak est perçu comme une religion américaine et la religion de l'occident. On considère les chrétiens comme des collaborateurs ou des traîtres. C'est un autre motif de leur persécution, car les chrétiens adhèrent à la religion de l'occident.
Merci, monsieur le président.
Je suis heureux que vous ayez rappelé ce qui s'est passé en Irak en 1941, le massacre de Farhud. C'en est maintenant le 70e anniversaire et il a été largement passé sous silence, et je suis donc heureux que vous en ayez fait mention.
La question que je veux vous poser intéresse une personne qui a émergé comme une sorte de symbole du printemps arabe égyptien. Je parle de Michael Nabil, un blogueur de 26 ans qui a parlé avec tellement d'espoir du printemps égyptien sur la Place Tahrir, dans une déclaration où il dit que l'armée et le peuple sont « main dans la main »; autrement dit, l'armée et le peuple agissent ensemble. Il a ensuite été témoin de la répression par l'armée des civils et manifestants et d'autres, puis a déclaré que l'armée et le peuple ne sont plus main dans la main.
Pour cela, on l'a illégalement traîné en justice et condamné à trois années de prison. À l'heure où nous parlons, il en est à son 91e jour de grève de la faim. Sa vie ne tient qu'à un fil.
Considérez-vous son cas comme symbolique de l'échec du printemps arabe égyptien? En outre, pensez-vous que le fait qu'il se trouve être un chrétien copte qui a appelé à la normalisation des relations entre Israël et l'Égypte ait contribué en quoi que ce soit à sa condamnation et son emprisonnement, à la situation dans laquelle il se trouve aujourd'hui?
Absolument. Je suis complètement d'accord avec vous.
De fait, deux blogueurs sont actuellement en prison pour avoir critiqué le Conseil militaire. C'est Michael Nabil, et aussi Alaa Abd El Fattah. Les deux ont critiqué le Conseil militaire et se trouvent emprisonnés pour cette seule raison.
Où sont les principes de la résolution? Où est la démocratie? Où est la liberté d'expression? Absolument, ces deux-là sont symboliques.
Aussi longtemps que Mohamed Hussein Tantawi, le chef du Conseil militaire, sera au pouvoir en Égypte, je ne crois pas que les choses changent du tout.
Merci, monsieur le président, et merci à vous, révérend El Shafie, de votre temps et de votre exposé.
J'ai trois toutes petites questions. Voici la première: Pourriez-vous nous dire en quoi la discrimination religieuse se répercute sur la vie et les activités quotidiennes des chrétiens coptes en Égypte?
Vous trouverez dans mon rapport sur l'Égypte d'autres exemples d'attaques. Certaines sont des attaques majeures, et d'autres sont mineures. Mais parlons des exemples que l'on voit. Certains ont même été relatés ici, à Toronto, et il nous a fallu prouver la véracité des faits.
L'un des messieurs, du nom de Magdi Youssef, tenait une librairie et avait un employé musulman. D'une façon ou d'une autre, l'employé musulman a eu en main un livre sur le christianisme et a commencé à le lire. Sa famille pensait que Magdi Youssel tentait de convertir cet employé, ce qui était faux. Son magasin a été incendié, il a été empoisonné, les autorités l'ont arrêté et il a été torturé. Il s'est enfui au Canada, et après cela, l'affaire... Vous trouverez cette histoire sur CTV, car c'est ainsi que nous avons été mis au courant.
Vivre quotidiennement dans la crainte ou en butte à un harcèlement constant... Vous pouvez identifier la plupart des chrétiens d'Égypte parce qu'ils ont une croix tatouée sur la main, ou porte une croix. Même la carte nationale d'identité égyptienne doit indiquer si vous êtes musulman ou chrétien. Il est donc facile de les surveiller, facile de savoir qui est qui. Lorsque ce harcèlement se produit, votre travail, votre vie quotidienne s'en ressentent... Cela peut se répercuter sur beaucoup de choses.
Pourquoi le gouvernement iranien considère-t-il les groupes chrétiens comme une menace pour le régime?
Parlons-nous de l'Iran?
Un fait marquant, lorsque nous étions en Irak et avons confronté le gouvernement irakien... Comme je l'ai dit, j'étais accompagné par un député et un sénateur, tous deux du Parti conservateur. J'avais envoyé également une invitation à nous accompagner aux libéraux et aux néo-démocrates.
Lorsque nous avons abordé le sujet avec le régime irakien et l'avons confronté à toutes les preuves — et nous avions une recommandation pour le gouvernement irakien et nous avons abordé tous les sujets dont nous parlons en ce moment... Je ne suis pas le type de militant pour les droits de la personne qui se cache; je vais vous regarder droit dans les yeux et vous dire: voici les faits. Nous nous sommes assis avec eux et ils ont reconnu les faits. Ils les ont admis. Le vice-président de l'Irak a admis la réalité de cette situation.
Le problème avec le régime irakien, c'est qu'il va blâmer l'ancien régime pour ces attaques, ou bien blâmer la Syrie et l'Arabie saoudite. Mais lorsque l'on aborde l'Iran, ils ne veulent pas parler de l'Iran, parce que la plupart d'entre eux...
Je sais, d'une manière certaine, madame, mais je ne peux pas vous indiquer mes sources, qu'avant qu'un ministre irakien soit nommé, l'Iran doit donner au préalable son aval.
La triste réalité aujourd'hui est que si nous n'intervenons pas immédiatement, si le Canada... L'une de nos recommandations est que le Canada rouvre son ambassade à Baghdad. Nous n'avons pas d'ambassade; nous n'avons aucune voix en Irak. Si le Canada n'ouvre pas l'ambassade en Irak et si davantage de pays ne s'ingèrent pas, l'Iran va prendre l'Irak.
L'Iran exerce déjà une forte influence en Irak, et Jaysh al-Mahdi, qui est loyal envers l'Iran, est l'une des principales organisations persécutant les chrétiens aujourd'hui.
Quelle preuve existe-t-il que les chrétiens évangéliques connaissent un plus haut degré de persécution que d'autres groupes chrétiens?
Je ne suis pas d'accord avec cela. Je crois que tous les groupes chrétiens souffrent de persécution, et je ne dirais pas qu'un groupe souffre plus qu'un autre. Je conteste cela. Tous les groupes chrétiens connaissent, dirais-je, une persécution égale; je ne dirais pas qu'il y a différents niveaux.
[Français]
Merci beaucoup d'être ici aujourd'hui.
Ma première question concerne l'Iran. On sait que le Canada a adopté, hier, de nouvelles sanctions contre l'Iran. Je voudrais savoir si vous pensez qu'il y aura des conséquences sur la situation des minorités religieuses en Iran. Pensez-vous que ça va affecter la position du gouvernement? Pouvez-vous faire des commentaires là-dessus?
[Traduction]
Des sanctions sont imposées à l'Iran depuis aussi longtemps que je me souvienne. Je ne pense pas que de nouvelles sanctions feront une grosse différence.
Bien entendu, je suis partisan des sanctions contre l'Iran, car elles continuent à les étrangler, plus ou moins, et c'est mieux que la guerre. Si vous voulez mon avis, c'est mieux que d'envoyer des troupes et de commencer une guerre.
Voici le problème avec l'Iran...
Excusez-moi.
Voici le problème avec l'Iran. Lorsque nous parlons de l'Iran, 99 p. 100 des fois c'est à propos de son programme nucléaire. Nous ne parlons pas autant de la situation des droits de la personne dans ce pays, et je ne sais pas pourquoi.
À l'heure actuelle, en Iran, plus de 120 chrétiens ont été arrêtés lors d'une répression pendant la période de Noël et du Nouvel An 2010-2011. Plus de 200 ont été arrêtés en janvier 2010 et février 2011.
L'une des situations dont on a le plus parlé est le cas du pasteur Youcef, qui risque actuellement la peine de mort en Iran.
Lorsqu'on parle des autres minorités, telles que les bahá'í en Iran, le 11 octobre, sept enseignants ont été attaqués et arrêtés en Iran. En août 2004, 500 bahá'í ont été arrêtés et le 13 février, 201; 200 parmi les dirigeants des bahá'í ont été tués, la plupart par exécution, entre 1978 et 1998.
Là encore, lorsqu'il s'agit de la communauté juive d'Iran, vous vous souviendrez qu'en 2000, 13 de ses membres ont été arrêtés en Iran sur l'accusation de collaboration avec Israël et le Mossad.
Je ne crois donc pas que de nouvelles sanctions vont changer radicalement la situation en Iran; cependant, je suis en faveur des sanctions, car elles maintiennent le régime sous pression.
[Français]
Les prochaines questions que je vais vous poser touchent autant l'Irak que l'Iran et l'Égypte. Elles portent sur la discrimination devant la loi.
La discrimination ne se fait pas seulement par la violence, elle se fait aussi directement par loi, par exemple devant les cours de justice. Quels sont les moyens pris pour punir la discrimination?
Le problème n'est-il pas justement que les minorités chrétiennes ne sont pas égales devant la loi, ce qui fait que la possibilité d'aller devant les cours de justice est minée? Sachant au départ que leurs problèmes ne seront pas nécessairement entendus ou ne seront pas traités avec l'impartialité d'une cour de justice comme on pourrait en trouver au Canada, les minorités n'iront pas porter plainte. J'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet.
[Traduction]
Lorsqu'on considère la plupart des lois en Égypte ou en Irak, on voit que c'est un problème qui existe depuis très longtemps. Dans mon rapport sur l'Irak et l'Égypte, nous passons en revue les aspects juridiques respectifs.
Le système juridique en Irak et en Égypte, et même en Iran, est marqué par deux problèmes. Premièrement, ils disent toujours que l'Islam est « la » source de la législation et de la constitution. Je préférerais qu'ils disent « une » source, plutôt que « la » source. Il y a une grosse différence. Mais ils disent « la source », ce qui donne la primauté à la religion.
Deuxièmement, il y a le droit lui-même. Lorsque vous lisez la constitution irakienne, elle est très bien écrite. Elle n'est pas si mauvaise. Même chose pour la constitution égyptienne. Vous y trouverez des problèmes, mais elle est comparativement bonne. Le problème n'est pas la loi, le problème réside dans son application. Donc, quand un gouvernement ferme les yeux, ou ne rend pas justice, et justice différée est justice refusée.
[Français]
[Traduction]
Une minute.
[Français]
En Égypte, il y aura une élection qui rendra le pouvoir légitime démocratiquement. On peut faire le lien avec la situation qui existe aujourd'hui en Tunisie, où c'est le parti islamiste qui a été élu démocratiquement. On sait qu'il y a une majorité de la population qui n'est pas du tout d'accord avec cela. On a des préjugés positifs par rapport au fait que les frères musulmans seront élus démocratiquement par la population.
Selon vous, quel effet aura sur la situation des chrétiens le fait que le pouvoir soit démocratiquement élu mais qu'il soit quand même un pouvoir religieux, comme en Tunisie en ce moment?
[Traduction]
Je crois que l'effet sur la minorité et sur l'accord de paix entre l'Égypte et Israël sera très négatif. Pour la première fois, nous avons vu l'ambassadeur égyptien fuir sa maison du Caire, fuir l'ambassade, il y a juste un mois. Nous pouvons voir la préparation.
Je suis d'accord avec vous, si les Frères musulmans sont élus, ils seront élus démocratiquement. Voilà le dilemme, et je l'ai déjà expliqué. La plupart des Égyptiens sont analphabètes, ils ne savent même pas écrire leur propre nom. Ils vont choisir une religion automatiquement. Sachant que plus de la moitié d'entre eux vivent en dessous du seuil de pauvreté à cause de la corruption de l'ancien régime, les gens ont faim. Lorsque les Frères musulmans leur disent qu'ils vont ouvrir pour eux un magasin, leur donner un commerce, qu'ils vont leur apporter la solution tout de suite, ils vont automatiquement les élire parce qu'ils veulent le résultat tout de suite. Ils ne veulent pas des résultats dans cinq, 10 ou 20 ans. Non, les gens sont fatigués maintenant, et ils ont besoin de résultats tout de suite.
Le fait que les Frères musulmans seront choisis démocratiquement ne signifie pas que c'est le bon choix. En cette occasion, le peuple a de l'influence. La plus grande partie des moyens financiers des Frères musulmans viennent de pays comme l'Arabie saoudite; de grands pays soutiennent les Frères musulmans. Voilà ce que je pense des élections qui vont se dérouler en Égypte le mois prochain.
Merci.
Cela met fin à la période des questions. Nous avons dit au début que nous accorderions quelques minutes au révérend El Shafie pour quelques mots de conclusion, et je l'invite à les prononcer maintenant.
Merci.
Monsieur le président, membres respectés du Parlement, je vous remercie infiniment de m'avoir reçu. Je viens ici depuis 2006 et j'ai noué avec la plupart d'entre vous, sinon tous, une relation et une amitié merveilleuses.
Je dois vous dire aujourd'hui que je suis parfois découragé. Il m'arrive de me demander si, en dépit de mes comparutions et de mes témoignages ici, nous verrons jamais des résultats sur le terrain. J'ai confiance en notre pays, le Canada. Je fais confiance à notre système. Je crois que le Canada est la conscience du monde et le champion des droits de la personne. Le Canada peut montrer le chemin, être la voix de ceux réduits au silence, comme il l'a toujours été.
Si vous regardez derrière moi, ces personnes qui ont fait le déplacement depuis Ottawa, Montréal, Toronto et même de plus loin, certains d'entre eux appartiennent à la communauté égyptienne, d'autres à la communauté irakienne, d'autres encore à la communauté canadienne — tous s'intéressent à ce qui se passe ici. Les nôtres meurent. Je me réveille chaque matin en me demandant si je fais assez pour eux ou non.
Il y a deux jours encore, j'ai comparu devant le Congrès américain. Le Sous-comité sur l'Afrique, la santé mondiale et les droits de la personne du Comité des affaires étrangères de la Chambre des représentants a tenu une audience sur la question de la liberté religieuse. Il était présidé par Chris Smith. J'ai presque pleuré parce que je ne voyais personne vouloir bouger pour venir en aide à ces gens. Nous les abandonnons, et ils sont mes frères et soeurs en le Seigneur. C'est la réalité, où qu'ils se trouvent.
J'étais jadis l'un d'entre eux. J'ai été prisonnier en Égypte et je connais la souffrance. Même encore aujourd'hui je me réveille la nuit avec, dans mes oreilles, les hurlements des victimes. Même encore aujourd'hui, lorsque j'enlève ma veste, vous pouvez voir les cicatrices sur mon corps. Je suis incapable de les abandonner et je vous supplie d'agir. Ce n'est plus l'heure de la diplomatie, des pourparlers, c'est l'heure d'agir. C'est l'heure d'aller voir nos ministres, nos gouvernements ou notre opposition et de leur demander de mettre un peu la pression. Dites-leur de convoquer l'ambassadeur afin que nous puissions lui parler. Dites-leur de rendre l'aide conditionnelle aux échanges internationaux et à l'amélioration des droits de la personne. Les recommandations sont nombreuses. Nous ne faisons pas que blâmer, nous proposons une direction.
Au bout du compte, la seule chose que je retiens de toutes mes années de labeur est que des croyants sont en butte aux persécutions, mais qu'ils sourient néanmoins. Ils sont plongés dans une nuit obscure, mais ils ont néanmoins la bougie de l'espoir. Notre ennemi possède une très forte armée, des armes puissantes, mais nous avons le Seigneur tout puissant. Croyez-moi lorsque je vous dis qu'à chaque nuit succède un nouveau matin et un jour nouveau, après chaque tempête brille le soleil, et après chaque persécution il y a la victoire en Son nom. Croyez-moi lorsque je vous dis qu'ils peuvent toujours tuer le rêveur, mais que nul ne peut tuer le rêve. Je continuerai de venir ici jusqu'au bout, et je sais que je gagnerai.
Merci.
Merci beaucoup, révérend El Shafie.
J'ai quelques questions d'ordre interne à expédier avant de lever la séance. La première est que notre prochaine séance, jeudi, aura lieu non pas dans cette salle, mais à l'étage en dessous, dans la pièce 112, dans le couloir nord. Nous avons deux témoins potentiels, l'un confirmé et l'autre possible. Nous traiterons encore du même sujet, l'étude sur les coptes en Irak et en Iran.
Un autre point que je veux porter à votre attention est que nous avons la présence d'un ancien membre et ami de ce comité, Mario Silva, qui a parlé si éloquemment ce matin lors d'un petit-déjeuner sur la Colline du Parlement.
Il est bon de vous voir, Mario. Je suis toujours heureux de voir que vous vous intéressez d'aussi près aux droits de la personne. Merci beaucoup.
La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication