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HESA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 074 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 14 février 2013

[Enregistrement électronique]

(1535)

[Traduction]

    Je vous souhaite à tous une joyeuse Saint-Valentin.
    Nous avons deux autres témoins qui seront bientôt là. Ils assistent à une réunion en ce moment, mais ils seront avec nous sous peu.
    Nous voulons commencer à l'heure afin que tout le monde ait l'occasion de vous poser des questions.
    Vous aurez d'abord 10 minutes pour nous présenter votre exposé. Ensuite, s'ils ne sont pas encore arrivés, nous passerons directement aux questions, afin de ne pas perdre de temps. Je veillerai à ce que tout le monde dispose d'un temps de parole équivalent pour tout aborder. Je pense que c'est la chose la plus judicieuse à faire.
    Nous avons avec nous Mme Gagné, directrice générale, et M. Michaël Béland, directeur des communications et des programmes, pour — et vous allez devoir prononcer cela pour moi.

[Français]

    Il s'agit du Conseil canadien de la coopération et de la mutualité.

[Traduction]

    Vous serez heureuse d'apprendre que je suis des cours de français; mais je ne voudrais pas me couvrir de ridicule à cause d'une prononciation incorrecte.
    Je vous souhaite la bienvenue. Vous disposez de 10 minutes pour nous présenter votre exposé. Veuillez commencer.
    D'abord, nous tenons à remercier les membres du comité de nous avoir invités à venir discuter des coopératives dans le secteur de la santé. Je ferai mon exposé en français, mais nous parlons aussi anglais — avec un fort accent. Nous pouvons répondre dans la langue que vous préférez.
    Nous avons un service d'interprétation, alors ça va.

[Français]

    Pendant l'Année internationale des coopératives, qui vient de se terminer, nous avons présenté au Comité spécial sur les coopératives les enjeux et les spécificités reliés au mouvement coopératif canadien.
    Nous désirons porter à votre attention les recommandations suivantes. Tout d'abord, il s'agit de stimuler le développement de nouvelles coopératives de santé en forgeant des ententes de partenariat avec les réseaux locaux de santé et en offrant un soutien financier ponctuel au démarrage. Ensuite, il importe de clarifier les règles d’application de contributions annuelles des membres des coopératives de santé. Il faut également reconnaître l’investissement des membres des coopératives de santé en leur permettant d’inclure le montant de leurs cotisations à titre de frais médicaux. Nous recommandons aussi de favoriser le développement de nouvelles coopératives de santé afin de créer de nouveaux vecteurs d'innovation adaptés aux besoins précis des communautés. Finalement, il est recommandé de mettre en place un comité d'étude sur les possibilités de complémentarité entre le modèle des coopératives de santé et le développement de l'offre de services de Santé Canada.
    Voici maintenant les éléments qui soutiennent nos recommandations.
    Le système de santé canadien a des atouts indéniables, dont l'accès à un panier de services de base pour tous les citoyens. Il faut toutefois reconnaître qu'il y a des dysfonctionnements sérieux. Les coopératives naissent du désir d'un groupe d'individus de répondre à un besoin collectif sur le plan social, économique ou culturel. Ils rassemblent leurs ressources et leurs compétences pour y parvenir. Ils se dotent de moyens et d'expertise auxquels ils n'auraient pas eu accès sans la coopérative. Ils adhèrent aux principes coopératifs de démocratie — un membre, un vote —, de participation économique, d'autonomie, d'intercoopération et d'engagement envers leur communauté. Notons ici que lorsque nous parlons du principe d'accessibilité, nous faisons référence aux termes de la Loi canadienne sur la santé.
     Le concept des coopératives de santé est simple et novateur. Une collectivité définit ses besoins quant à l'accessibilité de soins de santé ou à l'ajout de nouveaux services de santé. Elle crée ensuite une entreprise coopérative qui offrira gratuitement ou à un prix concurrentiel des locaux, des équipements, des outils technologiques et des services administratifs à des médecins et des professionnels de la santé. Elle y greffe généralement des services complémentaires, comme des services de prévention, selon les besoins définis par la communauté.
    On peut définir les coopératives de santé comme des entreprises collectives qui produisent des services pour promouvoir, maintenir et améliorer l'état de santé et les conditions de vie des communautés. Alors que la coopérative implique ses membres dans l'organisation des services sur une base décisionnelle, ces derniers définissent et gèrent les services et les investissements de la coopérative en fonction de leurs besoins. Cette gestion démocratique assure l'arrimage entre les besoins locaux et les services offerts.
    Afin d'assurer les opérations de la coopérative, les membres conviennent de financer eux-mêmes leur coopérative par voie de parts de qualification, de cotisations annuelles et de dons. Dans la grande majorité de ces coopératives de santé, il n'y a aucune participation financière de l'État.
    Il est important de noter que la coopérative ne prétend pas offrir des services de santé, mais plutôt d'en assurer l'accès sur son territoire. Elle considère que son rôle est double. En premier lieu, il s'agit d'offrir un environnement professionnel, moderne, à prix compétitif, et d'améliorer l'accessibilité aux différents services de santé en s'impliquant dans le recrutement de médecins et d'autres professionnels de la santé. En deuxième lieu, il s'agit d'offrir des activités de prévention ou de soutien relativement à des problèmes de santé dans la communauté.
    Alors que les activités locatives peuvent générer des revenus autonomes, toutes les autres activités de la coopérative — les équipements, les services administratifs et ainsi de suite — n'en génèrent pas. Elles ne génèrent aucun revenu et ne peuvent compter sur le soutien de l'État. C'est ici que la part des membres et les dons de la communauté sont interpellés pour financer les activités de la coopérative. En assumant collectivement les coûts de fonctionnement de cette structure, la communauté s'assure de devenir attrayante pour les professionnels dont elle a besoin.
     Il est intéressant de constater que les coopératives qui créent un nouveau service dans la communauté représentent environ 54 % des cas. Quant à celles qui prennent la relève d'une clinique médicale fermée ou en risque de fermeture, elles constituent 46 % des coopératives créées.
    Les médecins qui décident de pratiquer au sein d'une coopérative sont rémunérés par le système public de santé de leur province. Aucune rémunération ne provient des cotisations des membres. En contrepartie, toute la population, qu'elle soit membre ou non de la coopérative, a accès aux services du médecin, et ce, sans restriction.
    Le mouvement coopératif croit à la prise en charge individuelle et collective comme valeur centrale des coopératives de santé. Plutôt que d'être un simple consommateur de services de santé, l'individu prend en main sa propre santé et participe par la suite au suivi nécessaire. Il est aussi invité à s'impliquer dans les activités de prévention.
    Le mouvement coopératif croit aussi à la prise en charge collective de la santé. Elle est gérée démocratiquement par un conseil d'administration composé de membres élus qui peuvent choisir les orientations lors de leur assemblée générale annuelle. La communauté détermine de cette façon non seulement la manière dont elle veut structurer son offre locale de santé, mais également le financement des projets.
    Nous croyons qu'entre le secteur privé et le secteur public, il y a de la place pour l'entreprise coopérative. Les coopératives de santé ne constituent pas une forme de privatisation des services de santé. Au contraire, elles sont un partenaire qui facilite la tâche de l'État en améliorant l'accessibilité des soins de santé de première ligne et en offrant des services complémentaires. Les coopératives de santé sont à but non lucratif. Elles servent de véhicule aux citoyens pour investir dans leur besoin de rapprochement des services de santé assurés par l'État.
    L'entreprise coopérative offre des possibilités exceptionnelles au système de santé canadien. Il s'agit d'un investissement collectif supplémentaire dans l'accessibilité et dans la couverture des soins de santé primaire. Ce modèle représente une occasion de partenariat entre les gouvernements et les collectivités pour améliorer la prestation de services de santé. Il redonne à l'individu le pouvoir de gérer sa santé et à la communauté, un meilleur accès aux soins de santé.
    La création d'une coopérative de santé requiert la participation de nombreux bénévoles et l'engagement financier de milliers de membres. À ces défis s'ajoute celui du développement d'ententes nécessaires de partenariat avec les administrations locales du système de santé public.
    Cet exercice est laborieux et ardu. On parle de petites organisations communautaires, d'un groupe d'individus bénévoles qui travaillent à la création de leur coopérative. L'absence de financement, à ce moment précis de leur développement, décourage les bénévoles et ralentit considérablement la mise en oeuvre du projet.
    Nous croyons que l'État gagnerait à jouer un rôle de facilitateur pour ces communautés en quête de prise en charge dans cette phase cruciale de structuration de leurs services locaux de soins de santé. Ce soutien pourrait prendre diverses formes en fonction des besoins de la coopérative. Les coopératives de santé sont jeunes, leurs activités ne coûtent rien à l'État, elles lui permettent plutôt de faire des économies.
    Comme les coopératives de santé sont financièrement autonomes, il s'agit donc d'un coût de fonctionnement nul pour l'État. En améliorant l'accessibilité aux services médicaux et en offrant des services de prévention, ces coopératives permettent au système de santé canadien de mieux remplir sa mission et d'éviter des coûts à court, moyen et long terme.
    Nous considérons aussi qu'il serait juste de reconnaître que les membres des coopératives de santé posent, d'abord et avant tout, un geste constructif pour notre société lorsqu'ils choisissent de réinvestir dans le système de santé volontairement. Il faut, à ce titre, permettre d'inclure le montant de leurs cotisations aux frais médicaux lors de leur déclaration fiscale.
    En raison de la relation directe entre le membre et les gestionnaires de la coopérative, l'innovation devient une obligation constante. Les membres sont exigeants. Ils veulent voir concrètement en quoi leur contribution supplémentaire à l'offre de services change leur accès à ces services.
    Je vous citerai quelques exemples: la mise en place d'un service de télémédecine pour donner accès à un médecin du réseau public à des membres dans les communautés éloignées en Nouvelle-Écosse; la création d'une clinique médicale mobile se déplaçant dans les communautés éloignées en Colombie-Britannique; l'intégration d'un service d'urgence public et d'une clinique médicale au même étage en Beauce, au Québec; la création de services adaptés pour la population...
(1545)

[Traduction]

    Veuillez m'excuser. Votre temps est déjà écoulé. Nous avons dépassé le temps alloué.
    Puis-je vous demander de conclure rapidement?

[Français]

    En conclusion, je dirai que le modèle coopératif est centré sur l'individu, d'abord et avant tout. Nous croyons que ce modèle fait partie des solutions novatrices qui ont le potentiel de maximiser l'investissement des contribuables dans leur système de santé public.

[Traduction]

    Merci.
    N'oubliez pas qu'il y aura une période de questions et de réponses; si vous tenez à ajouter quelque chose, vous en aurez alors l'occasion.
    Nous accueillons le Dr Bradley Dibbie. Vous êtes cardiologue, docteur Dibbie?
    Oui, en effet.
    Je suis aveugle d'un oeil et je ne vois pas de l'autre, docteur, alors c'est difficile. Je suis désolée.
    Merci beaucoup.
    Vous venez d'arriver, et j'espère que votre réunion s'est bien déroulée. Nous sommes très heureux que vous soyez parmi nous.
    Nous accueillons également le Dr Rob Ballagh, qui témoignera à titre personnel. Ai-je bien prononcé votre nom, docteur?
    Nous sommes très heureux de vous accueillir.
    Nous avons aussi été ravis d'accueillir nos premiers témoins. Mme Gagné nous a présenté son exposé avant que vous n'arriviez, pour que nous ne prenions pas de retard. Nous allons maintenant procéder de façon individuelle, en commençant par le Dr Dibble. Vous disposez de 10 minutes, docteur. Ce sera ensuite au tour de M. Ballagh.
    Avez-vous une présentation à mettre à l'écran?
    Oui.
    Nous allons d'abord entendre le Dr Dibble, après quoi vous aurez le temps de le faire.
    Soyez le bienvenu, docteur. Vous disposez de 10 minutes.
    Merci beaucoup.
    Pardonnez-moi mon retard, mais la Saint-Valentin est un jour très important pour un cardiologue, comme vous pouvez sûrement le comprendre. La dernière fois que j'ai vérifié, je n'ai pas trouvé d'autre organe auquel on consacrait une journée particulière.
    Parce que vous êtes ici et que vous êtes très spécial, nous avons quelque chose pour vous, n'est-ce pas, Tanya?
    Joyeuse Saint-Valentin.
    Des voix: Oh, oh!
    Merci beaucoup.
    Je n’ai pas besoin de rappeler à quiconque autour de cette table que le Canada est un vaste pays. Toutefois, j'aimerais vous faire part de certaines statistiques provenant de la Société de la médecine rurale du Canada.
    Parmi les médecins exerçant en milieu rural, il y en a un sur sept qui prévoit quitter sa collectivité dans les deux prochaines années, ce qui menace les régions déjà mal desservies.
    La superficie de 10 millions de kilomètres carrés du Canada est considérée comme rurale à 99,8 p 100.
    Neuf millions de Canadiens, soit 31,4 p. 100 de la population totale, vivent dans ces régions rurales.
    Les villes de moins de 10 000 habitants représentent 22,2 p. 100 de la population du Canada, mais elles ne sont desservies que par 10,1 p. 100 des médecins du pays; cela représente donc moins de la moitié de la proportion nécessaire.
    Les centres ruraux et régionaux plus importants — ceux de 10 000 à 100 000 habitants — représentent 15,9 p. 100 de la population, mais ils ne sont desservis que par 11,9 p. 100 des médecins du pays.
    Donc, pour la moitié de la population canadienne, les services sont insuffisants.
    La pénurie de médecins est un problème grave, et bien des gens déploient de grands efforts pour remédier à la situation. Le Dr Ballagh et moi avons participé, avec le député de Barrie, Patrick Brown, à un groupe de travail sur le recrutement de médecins pour tenter d'attirer des médecins à Barrie. Cela dit, le problème ne se réglera pas du jour au lendemain, mais dans l’intervalle, des mesures peuvent être prises pour aider ces gens. De nombreux patients n’ont pas de médecin de famille, et à titre de spécialiste, je m’inquiète du fait qu'ils n’ont alors pas accès aux services de spécialistes, car ils doivent passer par un médecin de famille pour consulter des spécialistes, en particulier dans ces régions rurales.
    Cet aspect du problème n’a pas à être aussi grave qu’il l’est actuellement, cependant. Étant donné la connectivité du monde moderne, qui permet à chacun d'être branché au reste du monde par courriel, messagerie texte, Facebook, Linkedin, Twitter et Skype, rien ne justifie que ces personnes ne puissent avoir accès à distance aux services de leur spécialiste et de leur médecin de famille. La technologie existe à l'heure actuelle; ce n'est pas comme si elle devait être développée dans l'avenir.
    Je vais vous donner quelques exemples.
    Il y a la formation simulée, grâce à laquelle les médecins de soins primaires qui exercent en milieu rural n'ont pas besoin que le spécialiste soit sur place. Ils peuvent acquérir à distance les compétences nécessaires en se servant de pseudopatients. Ces patients respirent, se lamentent, bougent et verbalisent. On peut les intuber, leur donner des médicaments et insérer des tubes dans diverses parties de leur corps, et ils réagiront en conséquence. Si les médecins commettent des erreurs, ils en tireront des leçons. Une telle formation permet aux médecins exerçant en milieu rural dans les régions éloignées d'acquérir l'ensemble des compétences dont ils ont besoin.
    Il y a aussi la réanimation vidéo à distance. Il n'est pas toujours nécessaire qu'un médecin soit sur place. De nombreuses collectivités n'ont pas de médecin sur place. Ces équipes de réanimation sont formées d'infirmiers, de membres du personnel d'entretien, de personnel soignant, et même de membres de la collectivité — en somme, de toute personne intéressée à faire partie de cette équipe.
    Les caméras peuvent être utilisées pour le patient et l'équipement, et le médecin donnera les conseils et dirigera à distance l'équipe de réanimation.
    Il y a également la médecine robotisée, en particulier à Nain, à Terre-Neuve-et-Labrador, la collectivité la plus au nord de cette province. Il n'y a pas de médecin sur place, mais il y a un robot appelé Rosie. Elle mesure 165 centimètres; elle est donc juste un peu plus grande que moi, je crois. Sa tête consiste en un écran d'ordinateur doté de capacités audio et vidéo bidirectionnelles, afin qu'un médecin puisse utiliser une manette à distance et la guider vers chaque patient. Il peut ainsi interagir directement avec le patient, voir ce qu'il doit voir, que ce soit regarder le patient, la bouteille de comprimés ou le dossier; et il peut donner les avis nécessaires.
    Le système « Docteur en boîte » peut être transporté à divers endroits, comme avec les équipes de SMU, s'il n'y a pas de médecin sur place lorsque l'ambulance les transporte. Il permet non seulement de voir ce qui se passe, mais aussi de recevoir les données télémétriques du rythme cardiaque et orienter directement la prise en charge du patient afin qu'il reçoive dès le départ des soins spécialisés.
    Les systèmes de chirurgie robotique permettent également de pratiquer des interventions à distance à l'aide d'instruments robotiques à la fine pointe de la technologie. Ces types de systèmes se limitent généralement aux grands hôpitaux universitaires, mais on pourrait facilement installer des systèmes plus simples dans les régions éloignées où les chirurgiens expérimentés pourraient surveiller ce qui se passe dans la salle d'opération en utilisant les capacités audio et vidéo bidirectionnelles. Ainsi, les chirurgiens ayant l'expertise nécessaire pourraient conseiller et orienter les chirurgiens moins expérimentés directement dans la salle d'opération. Ils pourraient examiner le champ chirurgical et voir l'état du patient.
    Enfin, il y a des consultations en télésanté. À titre de cardiologue, je dirais que 90 p. 100 des diagnostics que je pose découlent d'un examen des antécédents de mes patients. Bien que l'examen physique soit utile, il n'est pas toujours essentiel pour soigner ces patients. Si j'avais la possibilité d'interagir avec eux à distance et si je disposais d'un échocardiogramme me permettant d'examiner les images prises par un technologue qualifié, je pourrais très bien aider ces patients.
(1550)
    Vous remarquerez que la plupart de ces technologies sont dotées de capacités audio et vidéo bidirectionnelles.
    Les technologies de Rosie et du Docteur en boîte ne sont pas aussi répandues qu'elles devraient l'être, selon moi, dans un pays comme le nôtre. Et tout ce que j'ai décrit ici fait appel à des technologies qui existent déjà. Elles permettraient à des spécialistes comme moi de gérer à distance des cliniques dans toute la province, dans tout le pays, et je crois que tous ces patients méritent de bénéficier d'un tel accès. Dans un pays aussi merveilleux, mais aussi vaste que le Canada, nous devons nous donner comme objectif que chacun, sans égard à son lieu de résidence, puisse avoir accès non seulement à des soins de base, mais aussi à une aide médicale spécialisée. Grâce à ces technologies, nous pouvons atteindre cet objectif.
    Je vous remercie beaucoup du temps que vous m'avez accordé.
    Merci beaucoup, docteur.
    Je dois vous dire, docteur Dibble, qu'on nous a déjà présenté un exposé sur le robot Rosie et que nous avons été étonnés de voir ce qu'elle pouvait faire. Nous vous remercions d'avoir attiré à nouveau notre attention sur cette question.
    Nous allons maintenant donner la parole à notre prochain témoin, le Dr Ballagh.
    Je suis un spécialiste en oto-rhino-laryngologie et en chirurgie cervico-faciale à Barrie, en Ontario. Je travaille aussi à Collingwood et à Orillia, en Ontario, et deux jours par mois, je fais cinq heures, à l'aller comme au retour, pour me rendre à Kirkland Lake, plus au nord de l'Ontario. Mes patients m’appellent leur spécialiste des oreilles, du nez et de la gorge.
    En tant que chirurgien dans l’une des régions connaissant la plus forte croissance au pays, j’ai été ravi d’être invité par le Comité permanent de la santé à venir témoigner.
    Depuis mon arrivée au sein de la collectivité de Barrie, il y a près de 20 ans, je me suis voué à promouvoir l’innovation dans la prestation des services de santé à presque tous les niveaux. Mon désir d’enseigner aux jeunes médecins m’a amené à faire du bénévolat pour le rural Ontario Medical Program, qui permet d’accueillir à Barrie des apprenants et des étudiants en médecine, de même que des résidents en formation, pour qu’ils fassent équipe avec des médecins et des chirurgiens expérimentés de première ligne et qu’ils aient ainsi l’occasion de vivre une expérience qui changera la vie de bon nombre d’entre eux. Nombreux sont les jeunes médecins qui, à la fin de leur formation, retournent pratiquer dans des collectivités mal desservies comme Barrie.
    Je suis maintenant professeur adjoint en clinique de chirurgie à l’Université McMaster et professeur auxiliaire en oto-rhino-laryngologie et en chirurgie cervico-faciale à l’Université Western Ontario.
    En tant qu’innovateur en éducation médicale, je suis fier de l’association que j’ai forgée, au cours de la dernière décennie, avec le Centre d’instruction des Services de santé des Forces canadiennes de la base de Borden, où je suis précepteur et conférencier pour le programme de formation d’adjoints au médecin. Le fait de travailler auprès de soldats professionnels et très qualifiés et de leur enseigner m’a permis d’avoir une incidence indirecte sur la vie et la santé de bon nombre de nos militaires et, par conséquent, sur celle de nombreux civils traités par nos médecins et adjoints aux médecins militaires partout dans le monde.
    J’ai terminé mes études en médecine et ma résidence à l’Université Western Ontario en 1993. Par la suite, j’ai fait une sous-spécialité pendant un an à l'Université de Cambridge, en Angleterre, et je suis devenu expert dans les maladies et les troubles de l’oreille, notamment ceux qui entraînent vertige et déséquilibre. Dans ma spécialité et au sein de ma collectivité, je suis connu comme le « docteur Vertige ».
    Le processus de diagnostic d’un patient souffrant de vertiges est l’un des plus difficiles en médecine clinique. Je me souviens de nuits où mon père, médecin de famille d’une petite ville, revenait à la maison et nous disait à quel point il était épuisé d’avoir discuté de problèmes de vertiges avec deux ou trois patients ce jour-là. Le diagnostic différentiel et la liste des causes possibles des vertiges peuvent sembler infinis au début d’une entrevue avec un patient.
    Les troubles vestibulaires, ou troubles de l’organe de l’équilibre de l’oreille interne, font partie des troubles du vertige les plus fascinants, mais ils sont également parmi les plus difficiles à diagnostiquer. Je suis certain que vous avez tous entendu le terme labyrinthite, un trouble sévère du vertige causé par une infection virale de l’oreille interne. Vous serez peut-être surpris d’apprendre que bien peu de médecins, en présence de ce trouble, en reconnaissent les symptômes, bien qu’il soit le trouble de l’oreille interne le plus commun causant des vertiges sévères. Les patients souffrant de troubles de l’oreille interne peuvent être très souffrants une journée, mais se sentir très bien le lendemain. En fait, certains sont très étourdis pendant quelques secondes tous les soirs lorsqu’ils vont au lit, mais ne souffrent d’aucun autre symptôme durant le reste de la journée.
    En médecine, on nous apprend à étudier l’historique d’un problème, puis à faire un examen physique pour confirmer nos hypothèses. Le problème, avec la plupart des troubles de l’oreille interne, c'est que lorsque le patient n’est pas étourdi, c’est-à-dire la plupart du temps, on ne trouve rien. Lorsqu’un patient est étourdi à cause d’un trouble comme une labyrinthite, il a habituellement plusieurs autres symptômes — il transpire, son coeur bat plus vite, il ressent des nausées —, mais tous ces symptômes sont non spécifiques, sont communs à d’autres problèmes. Je ressens même ces symptômes en ce moment dans cette salle…
    Des voix: Oh, oh!
    Dr Rob Ballagh: Et il y a d’autres éléments sur cette liste de diagnostic différentiel.
    Cependant, il existe un symptôme très fiable qui caractérise les troubles de l’oreille interne, soit le nystagmus, un mouvement d'oscillation involontaire qui provoque un déplacement rapide de l'oeil. Lorsqu’un diagnosticien observe ce symptôme, il peut poser son diagnostic sans hésitation. Souvent, ce signe nous permet également de savoir quelle oreille est atteinte, ce qui n’est pas toujours évident à déterminer. Une fois le diagnostic posé, le traitement peut commencer sur-le-champ.
    Le problème, c’est que le nystagmus n’est visible que durant une crise, qui dure de quelques minutes à quelques heures. Au début de ma pratique, je trouvais très contrariant de ne pas pouvoir examiner mes patients durant leur crise. J’écrivais des notes que les patients plaçaient dans leur portefeuille ou leur sac à main et qu’ils remettaient à leur médecin de famille pour lui demander de consigner leurs mouvements oculaires durant les crises de vertige. Mais, essayez de voir votre médecin de famille dans l’heure qui suit ou de voir un médecin à l’urgence dans les six heures suivant votre arrivée à l’hôpital! C’est très difficile.
    Puis, un jour, il m’est arrivé quelque chose de très intéressant, et je vais essayer de vous le raconter aujourd’hui. Une dame me rendait visite une seconde fois pour ses vertiges. J’étais convaincu, ayant examiné ses antécédents et effectué un examen physique complet lors de sa première visite, et n'ayant rien trouvé d'anormal, qu’elle n’avait sans doute pas de problème vestibulaire. Or, deux minutes après s’être assise sur ma table d’examen, elle a fait la chose la plus incroyable: une crise de la maladie de Ménière. Elle est devenue très pâle et désemparée; son corps a commencé à s'incliner dans un angle étrange, et ses yeux se sont mis à bouger très rapidement, de gauche à droite. Cela a duré 20 minutes.
(1555)
    J’ai appris beaucoup de choses durant ces 20 minutes, la plus importante étant que ma première impression était mauvaise. Immédiatement après, j’ai commencé à encourager mes patients à filmer leurs mouvements oculaires au plus fort de leurs crises de vertige.
    J'essaierai de vous donner un exemple tout à l'heure.
    Après neuf ans de ce travail de pionnier, commencé à Barrie, en Ontario, au départ avec ma caméra numérique et maintenant avec mon téléphone intelligent, j’ai fait part de mes observations à des spécialistes du vertige de partout au pays et, en fait, de partout dans le monde grâce à mes relations à Cambridge. Nous avons fait beaucoup de nouvelles découvertes médicales à Barrie et nous avons été témoins de choses que nous ne pouvions expliquer, ce qui a soulevé de nouvelles questions dans des domaines où nous n’aurions pu imaginer en avoir.
    Si cela fonctionne et s'il me reste du temps, j'aimerais vous montrer un très court...
(1600)
    Vous avez le temps. Allez-y, je vous en prie.
    Même s'il ne vous restait plus de temps, je vous permettrais tout de même de poursuivre.
    Nous voulons vraiment voir cela.
    Je voudrais que vous regardiez cette femme, qui est atteinte de la maladie de Ménière à l'oreille droite. Nous traitons actuellement sa maladie de façon très radicale. Puisque son état s'est aggravé dernièrement, elle est convaincue que la maladie de Ménière est en train de se développer dans son oreille gauche. Elle n'a eu aucun symptôme physique objectif dans mon bureau, et les résultats de son examen auditif de l'oreille gauche sont normaux. La seule façon pour moi de déterminer quelle oreille est à l'origine du problème, c'est de vérifier ses mouvements oculaires.
    La voilà. On peut voir que ses yeux bougent très rapidement vers la gauche, vers son oeil gauche.
    J'ai reçu cette vidéo et je l'ai choisie non pas parce qu'elle est de la meilleure qualité — j'en ai une autre de meilleure qualité, si cela vous intéresse —, mais plutôt parce que je l'ai reçue seulement une heure après avoir reçu votre invitation à venir témoigner aujourd'hui.
    Pour cette femme, ce fut l'élément clé de son diagnostic. Cela veut dire que la maladie de Ménière dans son oreille droite se fait sentir et s'aggrave. Je dois faire passer son traitement de la maladie dans son oreille droite à l'étape suivante, ce qui pourrait impliquer des changements destructifs dans l'oreille interne. En fait, je pourrais devoir rendre son oreille interne sourde de ce côté afin d'améliorer les choses. Mais il est préférable de traiter cette oreille que de traiter une oreille saine qu'elle soupçonne d'être anormale.
    Vous nous avez présenté un excellent exposé aujourd'hui.
    Nous allons maintenant passer à notre série de questions et réponses de sept minutes.
    Commençons par Mme Davies.
    Merci beaucoup, madame la présidente. Et merci pour les biscuits de la Saint-Valentin. J'ai déjà mangé le mien. Il était très bon.
    Je tiens à remercier les témoins de leur présence aujourd'hui. Je trouve que la diversité des opinions est assez inhabituelle.
    J'aimerais d'abord m'adresser à Mme Gagné.
    J'ai quelques questions à vous poser au sujet des coopératives de santé. Je connais très bien les coopératives, mais je dois dire que je ne connais pas les coopératives de santé.
    Je crois qu'il y en a environ 50 au Canada. Sont-elles situées principalement au Québec?

[Français]

    En effet, la grande majorité de ces coopératives sont situées au Québec, surtout les coopératives de nouvelle génération. Cependant, on en trouve aussi en Colombie-Britannique, au Manitoba, en Saskatchewan, au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse.

[Traduction]

    Merci. Je voulais simplement clarifier cela.
    J'ai trouvé votre mémoire très intéressant, mais il y a deux choses que je ne comprends pas bien. Une coopérative n'exerce pas nécessairement ses activités dans un lieu physique. C'est une coopérative qui assure des services à ses membres, qui sont peut-être ailleurs. Je veux être certaine de bien comprendre.
    Ensuite, je n'ai pas bien compris quels sont les droits d'adhésion. J'aimerais que vous nous en donniez une approximation. Je n'ai pas compris ce que l'on obtient. Je peux aller consulter mon médecin de famille aujourd'hui et je n'aurai rien à payer. On peut m'envoyer à un spécialiste, à l'hôpital ou à une clinique communautaire, et je n'aurai rien à payer. Quel service offrent les coopératives de santé? C'est ma deuxième question.
    S'il reste du temps, j'ai une troisième question. Pourriez-vous nous parler un peu des données démographiques? Vos coopératives offrent-elles des services à tous les Canadiens? Traitez-vous les personnes atteintes de maladies chroniques? Vous dites que les gens doivent prendre en main leur propre santé. Quelle est votre clientèle cible dans la collectivité? Qui sont les gens qui reçoivent des services de votre coopérative?

[Français]

    Je vais essayer de répondre aux trois questions.
    Le modèle coopératif est intéressant parce que les membres vont décider du type de services qu'ils désirent s'offrir. La plupart du temps, on parle d'un site physique, c'est-à-dire une clinique comme on l'entend généralement, avec un médecin. D'autres fois, il s'agit d'une clinique mobile. Cela pourrait aussi être de la télémédecine ou une clinique qui se déplace dans la communauté. Par conséquent, les membres, pendant leur assemblée ou après avoir discuté avec leurs administrateurs, détermineront leurs besoins, qu'il s'agisse d'un service de télémédecine ou de sauver la clinique du village. Cela dépend vraiment des besoins de la communauté.
    Généralement, comme on le mentionne dans le mémoire, cela se passe dans une clinique proprement dite. Essentiellement, si on veut qu'il y ait un médecin dans la communauté quand on n'en a pas, ou si on perd des médecins, la communauté crée une coopérative. Il est important de comprendre que la coopérative sera un véhicule.
    Pour répondre à la deuxième question, je dirai que les contributions des membres serviront à financer le véhicule, c'est-à-dire le bâtiment, les équipements supplémentaires, des infirmières supplémentaires, des services de prévention supplémentaires ou autres. L'avantage pour le membre consiste à s'assurer que ces services sont accessibles dans la communauté et que l'on a accès, peut-être à moindre coût, à des services qui ne sont pas assurés par l'État.
    Évidemment, les gens se demandent toujours pourquoi ils paieraient une contribution annuelle de 60 $, en moyenne, si les membres n'ont pas un accès privilégié aux médecins par rapport aux non-membres. Il faut préciser que des contributions annuelles ne sont pas toujours exigées. En fait, c'est vraiment un investissement pour la communauté, la plupart du temps. Parfois aussi, il est question d'ajouter des services qui ne sont pas disponibles autrement. Les services de prévention, selon le modèle japonais, constituent un bon exemple. On voit cela souvent. On crée donc des services de prévention supplémentaires qui ne sont pas assurés par l'État. Dans ce cas, cela pourrait être ouvert uniquement aux membres. Cependant, pour ce qui est des services assurés par l'État, les membres n'ont pas d'avantage par rapport aux non-membres.
    Pour répondre à la troisième question, qui portait sur la démographie, il est intéressant de noter que la démographie des membres des coopératives de santé suit généralement celle de la population en général. On pourrait penser que comme les personnes âgées ont le plus besoin de services médicaux, elles seront plus souvent membres. Au contraire, on a des membres qui sont, par exemple, dans la vingtaine ou dans la trentaine. On en a de tous les types.
(1605)

[Traduction]

    Permettez-moi de vous interrompre un moment.
    J'essaie encore de comprendre pourquoi les gens préféreraient une coopérative à ce que nous avons maintenant — même s'il nous faudrait faire de nombreux changements. On parle de 50 coopératives en 50 ans. C'est peu. Supposons, par exemple, que votre coopérative voulait retenir les services du Dr Dibble ou du Dr Ballagh; les patients ne pourraient-ils pas consulter directement ces spécialistes?
    J'ai du mal à faire le lien entre ce que vous... quel est l'avantage.

[Français]

    Généralement, on trouve les coopératives de santé dans des communautés rurales ou dans des communautés éloignées. On y verra rarement des spécialistes. Généralement, on va y trouver des omnipraticiens, des généralistes ou encore d'autres types de professionnels de la santé. Si on n'a pas de physiothérapeutes, de nutritionnistes, de médecins généralistes dans sa communauté, s'il faut 20 minutes, une demi-heure ou 45 minutes pour aller à la prochaine clinique ou avoir accès à une autre clinique, les gens de la communauté vont décider d'investir pour avoir ces médecins plus près.

[Traduction]

    Les médecins que vous embauchez sont-ils rémunérés à l'acte? Ou reçoivent-ils un salaire? Est-ce vous qui les embauchez?

[Français]

    Non, les coopératives ne paient pas le médecin. La rémunération est assurée par le service public. La coopérative va financer les bureaux, la technologie, bref, tout ce qui va entourer le médecin.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Merci, madame Davies.
    C'est maintenant au tour de M. Brown.
    Merci, madame la présidente.
    J'ai quelques questions à poser aujourd'hui.
    Je m'adresserai d'abord au Dr Ballagh. Vous avez parlé de votre travail à la base de Borden. Il est clair que les Forces canadiennes relèvent de la compétence fédérale. L'un des aspects intéressants de cette étude, c'est que nous examinons des secteurs où nous pouvons contribuer par l'entremise du gouvernement fédéral, et les forces en étant un, ce sujet nous intéresse donc particulièrement.
    Selon vous, quel type de technologie n'étant pas utilisée à l'heure actuelle pourrait servir à améliorer l'efficacité des soins de santé au sein des forces armées? Avez-vous formulé des observations qui pourraient intéresser notre comité?
(1610)
     Je vous répondrais de deux manières. Tout d'abord, l'innovation est déjà en oeuvre dans les Forces armées canadiennes. Dans l'installation de soins de santé construite à la Base Borden, on offre une formation de loin supérieure à celle qu'on y prodiguait il y a une décennie à peine, particulièrement en ce qui concerne les auxiliaires médicaux.
    Certains des auxiliaires médicaux avec lesquels je travaille à l'hôpital et à mon cabinet sont des soldats qui ont été dans l'armée pendant 17 ou 20 ans. Ils ont reçu la formation médicale professionnelle traditionnelle et sont retournés à Borden afin de suivre le programme de formation sous-spécialisé, dans le cadre duquel ils accomplissent deux années supplémentaires de formation, l'une en classe et l'autre dans des cabinets et des hôpitaux comme le nôtre. C'est presque l'équivalent des deux dernières années de formation médicale que j'ai suivie à l'école de médecine au chapitre de l'apprentissage didactique.
    Ils nous font donc bénéficier d'un certain degré d'innovation et de leur expérience considérable également. Les auxiliaires médicaux ne sont pas médecins. Dans l'armée, on les qualifie d'adjoints au médecin. L'armée manque de médecins depuis des lustres, et c'est l'une des manières qu'elle a choisies pour résoudre le problème. Ces gens terminent notre programme fort d'un ensemble de compétences presque équivalent à celui d'un médecin ou d'un infirmier praticien, mais ils travaillent sous la supervision d'un médecin.
    Je répondrais en outre que la technologie devrait permettre à ces auxiliaires médicaux d'obtenir des renseignements au moment où ils en ont besoin et d'acquérir les compétences en communication pour recommuniquer avec le médecin avec lequel ils parlent. Nombreux sont ceux qui peuvent être joints par téléphone ou par liaison téléphonique par satellite par leurs superviseurs quand ils sont en toute première ligne.
    Merci.
    Dr Dibble, vous avez parlé de l'utilisation de la robotique dans la technologie et la prestation des services qu'un cardiologue offrirait. Je me souviens que lorsque le comité de la santé s'est rendu au Nunavut, il y a quelques années, il y a visité des services de soins de santé. Je me rappelle qu'on y utilisait des services de vidéo pour fournir certains services de soins de santé. Je suis certain qu'en cardiologie, le nombre de médecins varie d'une région à l'autre du pays. Je sais que vous avez fait des exposés sur la cardiologie à l'échelle nationale.
    Que savez-vous des défis que doivent relever les cardiologues dans les régions éloignées et du Nord canadien? Savez-vous si de graves pénuries y sévissent? Quel modèle proposeriez-vous pour servir ces régions?
    Je suis certainement au fait des pénuries. Selon moi, le problème, c'est qu'un cardiologue offre un niveau d'expertise qui requiert un certain bassin de population. Ainsi, à mesure qu'on s'enfonce dans les régions éloignées et du Nord, il n'y a généralement pas assez de patients pour occuper un cardiologue à temps plein. Je sais que certains de mes collègues qui voulaient quand même choisir ce style de vie ont commencé à travailler comme cardiologue, mais tendent à assumer les fonctions d'un interne général. Ils se rebattent sur certaines compétences qu'ils possèdent dans d'autres domaines de la médecine interne, comme la gastro-entérologie ou la pneumologie.
    L'ennui quand on veut offrir des services de cardiologie à distance, c'est qu'il faut utiliser une technologie de communication bidirectionnelle. Par exemple, je pourrais travailler une journée par semaine pour une clinique dans une région très éloignée. Je pourrais y effectuer des épreuves d'effort, car un technicien formé à cette fin serait sur place. Je pourrais ainsi participer à l'examen grâce à une communication audio et vidéo bidirectionnelle qui me permettrait non seulement de voir le patient et ce qui se passe sur le tapis roulant, mais aussi, idéalement, d'afficher à l'écran les données télémétriques envoyées à distance.
    Je pourrais également faire une consultation, au cours de laquelle je parlerais une quinzaine de minutes avec le patient. Je pourrais ensuite faire faire un échocardiogramme, grâce encore une fois au technicien qualifié, et voir les images sur mon écran, car il n'y a aucune raison pour laquelle l'information ne pourrait pas être transmise à distance par voie numérique.
    Je crois que le plus difficile quand on veut offrir des services de cardiologie dans ces régions, ce n'est pas d'y affecter des cardiologues, mais bien de s'assurer qu'il y a des infrastructures adéquates pour permettre à ces derniers d'appliquer leur savoir-faire. Je dirais que les épreuves d'effort et les échocardiogrammes constituent une bonne partie des services que nous devons offrir.
    J'ai posé une question d'ordre général à chaque groupe de témoins que nous avons entendu au sujet de l'innovation technologique dans le domaine de la santé sur le rôle du gouvernement fédéral dans la réglementation des appareils et des produits médicaux, une autre sphère de compétence fédérale.
    Est-ce que l'un d'entre vous a participé à la conception d'un appareil ou d'un produit médical, et comment les choses se sont-elles passées? Comment, selon vous, pouvons-nous devenir plus efficaces en ce qui concerne les appareils médicaux? Le processus s'enlise-t-il dans les formalités administratives? Considérez-vous qu'il y a une atmosphère ou un environnement qui favorisent et stimulent l'innovation, ou est-ce que le gouvernement constitue une entrave dans ce domaine?
(1615)
    Je peux certainement répondre à cette question.
    En cardiologie, nous tendons à utiliser des stimulateurs cardiaques, des appareils médicaux fort complexes qui stimulent les deux cavités cardiaques simultanément. À ces appareils s'ajoutent les défibrillateurs cardioverteurs implantables.
    D'après ce que j'ai pu constater, les règlements fonctionnent fort bien. Je n'implante pas ces appareils. Je ne m'occupe pas particulièrement de cette spécialité de la cardiologie, mais je dirais que le principal obstacle vient probablement plus du gouvernement provincial, qui accorde aux hôpitaux un budget pour financer un nombre donné d'implantations par année. Selon mon expérience, ces appareils sont bien réglementés, car nous tendons à y avoir accès quand nous en avons besoin, dans ma région de l'Ontario du moins.
    Est-ce que quelqu'un souhaiterait ajouter quelque chose?
    Je ne crois pas que nous en ayons jamais discuté, mais j'ai déjà été président-directeur général d'une entreprise de biotechnologie. Quand j'étais résident en chirurgie, j'ai fait une découverte dans le domaine de la radiothérapie. J'ai découvert quelque chose qui semblait rendre la radiothérapie plus efficace dans le traitement du cancer. J'ai connu une expérience intéressante dans cette entreprise. Je considère que c'est l'entreprise de biotechnologie qui a connu le moins de succès au Canada, mais je suis toujours convaincu que notre produit était viable et aurait pu être utile.
    Le transfert de technologie, qui va de la découverte à la commercialisation, est un processus difficile et lourd. Nous avons déboursé 50 000 $ pour faire breveter notre projet, et ce, avant de pouvoir en souffler un traître mot en public. À titre de résident, c'était mon projet de l'année. Je devais breveter mon produit avant de pouvoir le présenter à mes collègues et réussir ma résidence.
    Merci, docteur. C'est très intéressant.
    Monsieur Easter, vous êtes le prochain intervenant.
    Merci, madame la présidente. Je vous remercie de comparaître.
    Je commencerai par Mme Gagné et M. Béland. Je connais bien la structure des coopératives, mais je suis un peu comme Libby. Contrairement à ce qui se fait dans une clinique financée par le gouvernement fédéral, le gouvernement provincial ou les deux, je crois comprendre que vos membres, en échange d'une cotisation, utilisent les ressources afin d'acheter du matériel pour faire de la télémédecine ou autre chose. La coopérative sert-elle à pallier le manque de fonds dans le système de soins de santé public à l'intention de ses membres?
    Ces coopératives risquent-elles de faire concurrence aux cliniques médicales ou au secteur hospitalier?

[Français]

    Il s'agit véritablement d'un réinvestissement par les collectivités dans leur système de santé. Le système public de santé paie les professionnels, paie les salaires des gens. Lorsque les gens créent une coopérative, c'est vraiment un réinvestissement. Ils veulent maximiser ce que fait l'État. Ils vont réinvestir pour s'assurer d'avoir des équipements, des locaux et des infirmières supplémentaires, pour maximiser le travail des médecins.
    Il est important de souligner que 46 % des coopératives sont créées parce que la clinique est en train de fermer ou qu'elle a fermé. Par ailleurs, 54 % des coopératives sont créées parce que les gens ont beaucoup de difficulté à obtenir des services de santé de proximité. Ils sont obligés de voyager pendant des heures pour être en mesure de les recevoir.

[Traduction]

    Merci.
    J'indiquerai aux deux médecins que je suis bien au fait des difficultés qui se posent au chapitre des soins de santé en région rurale. J'ai fait partie d'un comité il y a 10 ans, et je ne m'attends pas à ce que la situation se soit améliorée.
    Vous dites qu'un médecin sur sept a l'intention de quitter la communauté rurale où il travaille; voilà qui aggrave le problème. Pour quelle raison veulent-ils partir? Manquent-ils d'installations hospitalières et de matériel pour pouvoir exploiter pleinement leurs compétences? Se peut-il que la qualité de vie de leur famille et les perspectives d'emploi de leur conjoint soient moins intéressantes? Quelle est la vraie raison qui les incite à quitter les régions rurales?
(1620)
    Docteur Dibble.
    Je commencerai et laisserai le Dr Ballagh ajouter ses commentaires.
    Je crois que plusieurs facteurs entrent en compte, comme vous l'avez souligné. La situation s'explique en partie par le fait que quand on travaille dans une collectivité rurale, comme certains de mes collègues l'ont fait, on travaille très fort et on ne tend pas à revenir à la maison à temps pour souper, vers 17 ou 18 h, parce qu'on est le seul médecin en ville. Ils sont bien plus souvent sur appel, et souvent les seuls à l'être.
    Il faut également tenir compte du fait qu'on leur en demande beaucoup plus. S'ils travaillent dans une grande communauté, ils peuvent faire appel aux ressources de spécialistes. Si un cas dépasse un peu leur champ de compétence, ils savent qu'ils peuvent diriger le patient vers une personne dotée d'une meilleure expertise. Mais dans une petite communauté éloignée, ils ne bénéficient pas de ces ressources, et tout repose sur leurs épaules. C'est un stress que bien des gens ont de la difficulté à supporter.
    Il se peut également que dans quelques communautés, certains considèrent qu'ils ne disposent pas de l'infrastructure nécessaire pour bien appuyer leurs besoins sur le plan médical. Ils éprouvent de la frustration, car les fonds manquent pour mettre en place de meilleurs systèmes de télésanté permettant de travailler avec des spécialistes à distance.
    Après un certain temps, à moins qu'ils ne fassent preuve d'un dévouement remarquable, ils envisagent de partir. C'est le cas d'un faible pourcentage des médecins en région rurale, mais c'est la tendance que la Société de la médecine rurale du Canada a observée parmi les membres de son groupe.
    Avant que le Dr Ballagh ne réponde, je lui demanderai de répondre aux deux en même temps, en ce qui concerne la question que je viens de poser.
    Que considérez-vous que le gouvernement fédéral peut faire, seul ou en collaboration avec les gouvernements provinciaux, pour résoudre le problème de pénurie de médecins en région rurale, et...
    Votre vidéo m'a vraiment intrigué, Dr Ballagh. Je connais plusieurs personnes à qui la maladie de Ménière cause de gros problèmes.
    Que peut faire le gouvernement pour favoriser une meilleure santé en agissant sur le plan des soins de santé en région rurale et de certaines des technologies que vous avez évoquées afin de pouvoir y accéder dans un délai d'une heure quand on en a besoin?
    Je suppose que ma réponse portera surtout sur l'enseignement médical. Quand Brad et moi-même avons fait nos études en médecine, il n'y avait pas beaucoup de possibilités de pratiquer dans les communautés et d'acquérir de l'expérience éducative. En chirurgie, je n'ai eu aucune possibilité d'aller pratiquer dans une collectivité, à l'exception de Toronto, London ou Ottawa, pour apprendre aux côtés d'un chirurgien communautaire comme moi.
    Le rural Ontario medical program auquel je suis affilié — et je travaille également avec l'École de médecine du Nord de l'Ontario du fait de mon affiliation à Kirkland Lake — offre maintenant toutes ces avenues. Le mois dernier, un résident en oto-rhino-laryngologie est venu travailler avec moi à Barrie. J'ai en outre travaillé avec deux résidents en médecine familiale à Kirkland Lake.
    Nous avons constaté qu'au chapitre de la formation pédagogique en médecine dans les régions rurales, si on bénéficie d'une formation éducative qui permet de faire ses premières armes en traitant une crise cardiaque ou une hémorragie grave causée par une lacération au cou dans un hôpital situé dans une petite ville dotée de très peu de ressources, mais pouvant compter sur des médecins expérimentés et dévoués, on reste marqué par ces expériences, qui nous poussent à retourner vers ce genre de pratique.
    À la fin de ma formation, on m'a affirmé que j'avais du potentiel et qu'on voulait que je revienne au centre universitaire. Je n'avais rien connu d'autre. On m'a indiqué que si je pratiquais à Barrie, je gaspillerais mon talent d'universitaire. En fait, je vous dirais que c'est le contraire qui est vrai. Fort de mon expérience, j'espère pouvoir communiquer aux médecins qui viennent travailler avec moi l'enthousiasme qu'il faut pour travailler dans des endroits comme Barrie, Collingwood, Orillia, et même aussi loin dans le nord que Kirkland Lake.
    Merci beaucoup. Voilà des propos éclairés.
    Madame la présidente, ai-je le temps de répondre à la deuxième question?
    Le temps est écoulé, et je dois laisser la parole à M. Lizon.
    Merci.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je remercie les témoins de comparaître devant le comité.
    La première question s'adresse tant au Dr Dibble qu'au Dr Ballagh.
    Nous traitons de l'innovation en médecine, mais les témoignages que nous avons entendus portent surtout sur les traitements.
    Que se passe-t-il au chapitre de la prévention? Par exemple, j'ai entendu parler de gens qui ont subi une crise cardiaque et qui sont décédés. C'était inattendu, car ils étaient en pleine forme et ne se seraient jamais attendus à ce que cela leur arrive.
    Existe-t-il aujourd'hui un dispositif électronique ou un autre appareil qui signalerait à son détenteur qu'il a un problème et qu'il devrait consulter son médecin?
(1625)
    Pour ce qui est précisément des crises cardiaques, ce que nous appelons un infarctus du myocarde, on peut obtenir un profil de risque complet en ayant une bonne évaluation générale, qui n'a pas toujours besoin d'être effectuée par un médecin de famille, mais qui peut être réalisée par un infirmier praticien ou même une infirmière très qualifiée. Il existe neuf facteurs de risque typiques qui contribuent à environ 95 p. 100 des crises cardiaques.
    Les gens doivent connaître les risques auxquels ils s'exposent. Ils savent parfois qu'ils ne sont pas en forme, qu'ils ont un surplus de poids ou qu'ils fument, mais ils ne connaissent pas leur pression sanguine ou leur taux de cholestérol. Nul besoin de consulter un spécialiste comme moi pour déterminer ces risques. Si les gens ont accès aux données, ils peuvent faire évaluer leurs risques, puis accéder aux renseignements dont ils ont besoin pour apporter les changements nécessaires, qui relèvent bien souvent du simple bon sens.
    Je me souviens que le Guide alimentaire canadien nous a beaucoup aidés à expliquer aux gens comment s'alimenter sainement. À mon avis, il faudrait publier un guide canadien de la santé pour indiquer comment mener une vie saine en général afin que les gens fassent suffisamment d'exercice et ne fument pas. Ces bons conseils, tout le monde les entend, mais ils tombent souvent dans l'oreille d'un sourd, car il est parfois difficile de modifier ses habitudes de vie. Une évaluation de base des risques permettra de prévoir bien des crises cardiaques. Le vrai défi ne consiste pas à déterminer le risque, mais à inciter les gens à apporter les changements nécessaires pour réduire ce risque.
    Je m'intéresse à la question depuis 20 ans, et c'est un véritable combat.
    Chaque fois que je réponds à une question sur la prévention dans ma spécialité, je conseille toujours à tout le monde de diffuser le message suivant par la suite. Dites à tout le monde de ne pas se mettre de cure-oreille dans les oreilles. La prévention est essentielle dans notre domaine pour éviter les blessures aux oreilles.
    Pour ce qui est de la prévention dans notre domaine, il faut qu'il y ait des soins primaires de bonne qualité en chirurgie. Voilà ce qui manque dans bien des collectivités. Dans notre communauté, 30 p. 100 des gens n'avaient pas de médecin de famille il y a 10 ans. En l'absence de médecin de famille, ils n'ont pas de porte d'entrée vers le système de soins de santé. Il ne peut leur conseiller de perdre du poids ou de surveiller leur cholestérol.
    Voilà ce que je dirais à tous les ordres de gouvernement. Il faut s'assurer que chaque patient du pays a un médecin de famille ou son équivalent, comme un infirmier praticien ou un spécialiste en soins primaires.
    Pour continuer dans la même veine, combien de chemin nous reste-t-il à parcourir pour qu'au lieu de consulter un médecin, on puisse s'asseoir devant l'ordinateur et se faire examiner par un médecin grâce à un dispositif en suivant ses instructions?
    On procède déjà ainsi dans certaines régions. À Kirkland Lake, certains spécialistes donnent des consultations en télémédecine. Il est difficile pour moi de le faire, car il faut que quelqu'un manipule un instrument ou un dispositif pour examiner l'oreille ou le larynx du patient pour voir le mouvement des cordes vocales.
    Le Dr Dibble vous dira ce qu'il en est dans sa spécialité.
    L'accès à distance est couramment utilisé. Grâce à la nouvelle technologie, je peux parler à certains médecins avec mon téléphone intelligent et parfois leur demander de me montrer le patient. J'évite ainsi parfois de courir à l'urgence.
    Cette technologie ne se limite pas l'envoi de vidéos et de courriels; elle permet d'apporter des soins directement au chevet du patient. J'entrevois un élargissement des applications, notamment avec l'utilisation de plus en plus courante des vidéoconférences sécurisées en technologie. Il faut toutefois assurer la confidentialité pour éviter que les signaux ne soient utilisés à des fins inappropriées.
    La technologie existe en cardiologie aujourd'hui. Il suffit d'avoir les ressources nécessaires pour l'offrir à ces collectivités. Encore là, un profil de risque bien établi, une étude des antécédents, une épreuve d'effort et un électrocardiogramme effectués à distance par des techniciens, de façon à ce que je puisse examiner les patients peu importe où je me trouve, permettra de rassurer bien des gens. C'est une chose.
    Quelqu'un a demandé ce que le gouvernement fédéral pouvait faire, compte tenu que les soins de santé sont de compétence provinciale. Je pense que le gouvernement fédéral devrait offrir un programme de subventions afin que les communautés rurales puissent obtenir les fonds nécessaires pour se procurer de tels appareils, et ainsi avoir accès à des spécialistes à distance.
    Me reste-t-il du temps?
    Vous avez environ une minute.
    Je ne suis toujours pas certain de comprendre le principe des coopératives. Permettez-moi de vous poser une question rapidement.
    Dans les cas comme ceux que vous avez décrits, lorsqu'on veut éviter la fermeture d'une clinique, si au lieu de créer une coopérative un investisseur décidait d'injecter des fonds, d'acheter le matériel, et d'embaucher des médecins... Est-ce la même chose que la création d'une coopérative par un groupe de personnes?
(1630)
    Il y a des similitudes. Je vais vous donner un exemple très précis.
    Si une collectivité veut se munir de la technologie dont parlait le Dr Dibble, et que le public n'a pas les moyens financiers pour cela et qu'il ne peut pas obtenir de subvention, on se réunit, on forme une coopérative pour acquérir la technologie et l'offrir à l'ensemble de la collectivité. C'est une autre façon de s'organiser et d'avoir accès à la technologie.
    Il y a aussi la prévention. Nous utilisons le modèle japonais Hans Kai. Nous embauchons des gens qui donnent des outils éducatifs aux gens pour qu'ils puissent prendre en charge eux-mêmes leur santé selon certains indicateurs. C'est en plus des services offerts à la population. Nous n'embauchons pas de médecin pour pratiquer dans nos bureaux.
    Je comprends, mais ces personnes qui forment la coopérative doivent trouver l'argent quelque part. Elles mettent des fonds en commun. Qu'est-ce qu'elles en retirent? Est-ce un investissement? Est-ce un don? Comment est-ce que cela fonctionne? Quelles sont les retombées pour elles?
    C'est en quelque sorte un don leur permettant d'avoir accès à de meilleurs services de santé, à des technologies plus poussées et à des services supplémentaires.
    D'accord, merci. Le temps est écoulé.
    Nous passons maintenant à des interventions de cinq minutes. Vous devez tâcher de respecter le temps qui vous est alloué, car nous voulons poser le plus de questions possible, cinq minutes à la fois.
    Nous allons commencer par Mme Sellah.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Je vais commencer par vous avouer que je n'avais jamais entendu parler de coopératives en santé avant un triste épisode. Je parle d'il y a quelques années, lorsque le ministre de la Santé du Québec avait demandé à la RAMQ de faire enquête sur certaines allégations. En effet, on disait que les trois quarts des coopératives en santé faisaient payer les gens pour avoir accès à un médecin, ce qui est une pratique illégale. J'aimerais entendre vos commentaires par rapport à cette situation.
    Par ailleurs, je voudrais savoir quelle est la différence réelle entre un groupe de médecins de famille — un projet-pilote instauré au Québec — et les coopératives en santé.
    Tout d'abord, je suis tout à fait d'accord avec vous, tout comme l'est l'ensemble du mouvement coopératif: restreindre l'accès à un médecin, que l'on soit membre ou pas, est une pratique illégale. D'ailleurs, la Fédération des coopératives de services à domicile et de santé du Québec a fait un important travail là-dessus pour s'assurer que cela n'existe pas dans le réseau. Il y a eu des mauvaises perceptions, probablement. Ce sont des choses que l'on prend grand soin à éviter.
     Il faut bien comprendre que le membre n'a pas de privilège en ce qui a trait à l'accès à son médecin lorsqu'on parle d'un service assuré. Le membre va avoir des privilèges pour l'accès à des services additionnels. Par exemple, il pourrait avoir droit à certains services à un coût moindre, ou accès à des services supplémentaires gratuits en prévention, des choses comme ça. Toutefois, quand c'est un service assuré, il est très clair pour nous qu'il ne doit pas y avoir de privilège ni pour les membres ni pour les non-membres, puisque tout le monde paie des impôts qui servent à payer le médecin.
    Pourriez-vous répéter la seconde question?
    J'aimerais savoir quelle est la différence entre une GMF et une coopérative en santé.
    Je vais vous donner un exemple extrêmement concret. Dans mon village, il y a une coopérative de santé. Les médecins sont payés par l'État et ils font aussi partie du GMF. Les membres de la coopérative de santé offrent un environnement aux médecins. Ce peut être une clinique de santé avec un loyer moins cher, avec plus d'équipement, avec un meilleur entourage. On donne aux médecins une plateforme relativement gratuite ou qui coûte moins cher au système de santé. Cela permet de s'installer dans le village.
     Par exemple, M. Ballagh a dit que les gens ne voulaient pas aller à Barrie, à Kirkland Lake ou à des endroits éloignés. Par les coopératives, on crée un environnement de travail intéressant pour les médecins. Ils vont donc venir travailler là. Ils continuent à être payés par notre système de santé. Ils continuent à être affiliés à un GMF et à fonctionner comme un GMF.
     La différence est ailleurs. Par exemple, une coopérative peut décider d'ajouter une infirmière, en plus de celle que paie déjà le GMF. Cette dernière va faire du travail supplémentaire, ce qui va alléger la tâche du médecin et lui permettre de rencontrer plus de patients.
    Essentiellement, les gens de la communauté se regroupent pour ajouter des services supplémentaires. Cela va permettre de créer un environnement où le médecin va trouver intéressant de venir travailler.
    Cela constitue vraiment un complément au réseau public. Il n'y a pas de concurrence. C'est surtout dans des endroits ou des secteurs d'activité — ceci va peut-être répondre à d'autres questions — où le privé ne tirerait pas d'avantages à aller construire un bâtiment pour les médecins, par exemple, avec des prix avantageux, des choses comme ça. Lorsque le privé ne peut pas offrir un tel service, la communauté va décider de le faire en créant une coopérative.
    C'est la même chose pour la télémédecine. En Nouvelle-Écosse, il y a un service de télémédecine offert par une coopérative. Il n'y avait pas d'investisseur privé intéressé à offrir ce service, car il n'y avait pas d'argent à faire. Les gens de la communauté ont donc décidé de former une coopérative pour se donner accès aux services publics qu'ils payaient déjà en tant que contribuables. Par un investissement supplémentaire, ils ont facilité leur accès à des soins. Ils ont vraiment regarder quels étaient leurs besoins pour avoir plus facilement accès aux services publics. Ils ont décidé de mettre de l'argent sur la table, parce que le privé trouvait qu'il n'y avait pas d'argent à faire, essentiellement.
(1635)
    Puis-je poser une autre question?

[Traduction]

    Non, vous n'avez pas vraiment le temps. Vos cinq minutes sont écoulées. Mais vos questions étaient excellentes.
    La parole est à M. Lobb.
    Je veux passer un commentaire à propos des coopératives. Je crois savoir pourquoi il y a une certaine confusion. Je vais vous donner l'exemple de ma collectivité.
    Il n'y avait pas vraiment de clinique à Goderich. Au lieu d'une coopérative, on a créé un organisme sans but lucratif. En gros, les gens de la collectivité ont fait des dons en argent, la municipalité aussi, de même que les municipalités voisines, afin d'ouvrir une clinique.
     Il y avait une pénurie de médecins à Goderich. On a construit une clinique ultra moderne, parce qu'il n'y avait rien avant, vraiment, et la pénurie de médecins n'est plus qu'un souvenir du passé. Les gens aiment beaucoup la clinique. Il y a bien moins de citoyens de la région qui n'ont pas de médecin de famille aujourd'hui.
    Dans ce cas-là, c'est un organisme sans but lucratif. Vous appelez cela une coopérative, mais c'est du pareil au même. Les gens qui n'ont pas fait de don peuvent quand même se présenter à la clinique et recevoir des soins. C'est une façon de faire bouger les choses dans une petite collectivité. Ce n'est pas comme s'il y avait une clinique au coin de la rue et qu'on décidait d'en ouvrir une autre juste en face. Il n'y a rien, et c'est pourquoi les gens doivent s'organiser.
    Je voulais simplement que les choses soient claires pour tout le monde.
    Merci pour cette précision.
    Merci. Je suis aussi disponible pour du travail de consultation à temps partiel.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Ben Lobb: Docteurs Dibble et Ballagh, nous avons reçu plusieurs bureaucrates qui sont venus nous parler de ce qui se passe avec les dossiers médicaux électroniques. J'aimerais que vous nous disiez ce qu'il en est à Barrie, par exemple, une collectivité assez progressiste. Quand vous recevez un patient, est-ce que vous examinez son dossier sur papier ou sur support électronique? Je suis curieux de le savoir.
    Je vais commencer.
    Je suis encore à l'époque des dinosaures. Même si j'apprécie beaucoup la technologie, j'ai toujours un système de dossiers médicaux non électroniques dans mon bureau. Toutefois, si j'ai attendu avant de faire la transition, c'est entre autres parce que je déménage ma pratique dans un nouvel immeuble, juste au bout de la rue. Je vais ouvrir mon nouveau bureau l'an prochain, et je procéderai à la transition à ce moment-là. Il me paraissait plus censé de tout faire d'un seul coup.
    Je dois par contre avouer que j'ai attendu un peu parce que j'ai entendu dire de bon nombre de mes collègues qu'il y avait plusieurs correctifs à apporter au système. Je suis content d'avoir attendu, parce que je crois que la technologie actuelle est suffisamment efficace pour que je sois en mesure de l'utiliser.
    La situation est différente pour les bureaux de médecin de famille, où les choses sont probablement très semblables d'une pratique à l'autre. Par contre, pour les cardiologues de Barrie, ce sera un peu différent de ceux de Newmarket, qui n'auront pas le même système non plus que ceux de Toronto. J'avais besoin d'un système de dossiers médicaux électroniques qui répondait à mes propres besoins.
    Juste avant que le Dr Ballagh nous donne sa réponse, pouvez-vous me dire si Barrie privilégie un fournisseur en particulier pour les dossiers médicaux électroniques? Est-ce que les médecins généralistes ont accepté d'utiliser un seul et même système, ou y en a-t-il plusieurs en circulation?
(1640)
    Vous savez, je...
    Dr Rob Ballagh: Je crois pouvoir répondre à la question.
    Dr Bradley Dibble: D'accord, allez-y.
    Nous avons la plus grande équipe de médecine familiale de l'Ontario. C'est cette équipe qui a donc en quelque sorte mené le bal en ce qui concerne les dossiers médicaux électroniques dans notre collectivité. Elle a examiné tous les fournisseurs et tous les produits offerts, et elle a arrêté son choix au terme d'un processus très rigoureux et diligent.
    Un des médecins de famille de l'équipe est en fait le chef de la TI, le dirigeant du système de dossiers médicaux électroniques, et c'est un bon ami à moi. Quand j'ai dû choisir un système pour ma pratique, j'en ai discuté avec lui. J'ai moi aussi fait mes recherches, mais de façon abrégée, et j'ai finalement adopté le même système qu'eux.
    Dans notre collectivité, beaucoup de médecins, mais pas tous, utilisent aussi ce système. Ils communiquent tous ensemble de façon plus ou moins efficace.
    Ce que je trouve le plus difficile avec les dossiers médicaux électroniques, c'est que les patients que je vois... notamment cette dame qui souffre d'étourdissements, le cas complexe que j'ai présenté aujourd'hui. Souvent, la demande de consultation initiale est accompagnée d'une lettre indiquant « vertige? ».
    Soit dit en passant, le vertige est un symptôme, pas un diagnostic, alors je sais quand je reçois une lettre comme celle-là que je dois recommencer à zéro. J'ignore souvent jusqu'à ce que le patient se présente à mon bureau qu'il a consulté deux autres spécialistes avant moi. Il a vu un neurologue et un cardiologue, et il a subi six examens.
    Un jour, j'aimerais qu'on ait des dossiers médicaux électroniques sur clé USB, que je pourrais brancher directement à mon ordinateur. Le patient pourrait garder son dossier médical électronique avec lui, et nous pourrions avoir toute l'information directement dans nos bureaux.
    Il y a quelque chose de drôle dans ce débat sur les dossiers électroniques. Vous travaillez avec l'Université McMaster, n'est-ce pas? Je vous garantis que tous les dossiers possibles d'un étudiant de première année à l'université sont disponibles en format électronique, accessibles à tous. C'est assez incroyable que le système de santé n'en soit pas encore là.
    Je me questionne à propos d'une chose. Quand vous investissez dans l'installation d'un système de dossiers médicaux électroniques, est-ce qu'une partie est subventionnée par Inforoute, ou est-ce que vous devez débourser la totalité des coûts vous-mêmes?
     En ce moment, grâce à un programme provincial offert par l'entremise d'une organisation appelée OntarioMD, il est possible d'obtenir des subventions et des incitatifs pour adopter un système électronique dès maintenant. C'est entre autres pourquoi j'ai décidé d'aller de l'avant rapidement. Nous avons une pratique progressiste. Notre équipe d'oto-rhino-laryngologistes est assez jeune. Nous sommes quatre en ce moment, et nous avions prévu accueillir un cinquième membre. En fait, le quatrième membre de notre équipe, qui est arrivé il y a un an et demi, ne fonctionne qu'avec des dossiers électroniques.
    Je suis désolée, docteur Ballagh, mais je dois vous interrompre.
    Merci.
    Monsieur Morin, la parole est à vous.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Mon collègue M. Lobb avait une bonne question. Je vais donc poursuivre dans la même veine.
    Lorsque j'ai fait mes études en chiropratique, il n'y a pas si longtemps, on n'adoptait pas beaucoup les nouvelles technologies, surtout quand il fallait pratiquer dans la vraie vie. Je considère que j'aime la technologie à la maison et en dehors du travail, mais dans mon travail, je ne suis pas porté à utiliser les technologies, comme la vidéo ou le nystagmus.
    Une des raisons pour lesquelles les professionnels de la santé en général n'adoptent pas plus ces technologies dans leur pratique est la question de la confidentialité. Je pense, par exemple, à avoir des radiographies sur l'ordinateur. Cela peut engendrer un risque de fuite et donc un problème de confidentialité. J'imagine que c'est la même chose pour cette vidéo en tant que telle. Cela fait partie du dossier du patient. Il faut donc absolument que ce soit dans un endroit sécuritaire.
     Docteur Ballagh, pouvez-vous préciser votre pensée et me mettre dans un contexte où il faut adopter davantage les nouvelles technologies, mais faire très attention à la confidentialité des patients?

[Traduction]

    Certainement. Je dois préciser d'emblée que je suis marié à une avocate du contentieux des affaires civiles. La confidentialité est devenue une obsession pour moi depuis que je la connais, et en fait depuis ma première année de médecine.
    Pour vous donner un exemple, j'étais très préoccupé par la protection de la vie privée de la dame qui figure dans la vidéo que j'ai présentée aujourd'hui. Le comité m'a assuré que la vidéo ne serait pas archivée, ni affichée sur Internet, et que seules les personnes présentes dans la salle pourraient la voir. J'ai aussi pris la peine d'appeler la dame dimanche après-midi pour lui expliquer comment j'allais utiliser la vidéo, et j'ai eu sa permission de le faire. Elle travaille également dans le domaine de l'éducation et elle tenait vraiment à ce que vous preniez part à cette expérience.
    Dans ma pratique, les renseignements personnels ne sont pas archivés; ils sont simplement documentés. Quand je vois telle ou telle chose, je sais ce que c'est, et j'en prends note. Je n'ai pas besoin de garder cette information, mais certaines informations doivent être archivées et conservées. Par exemple, si un patient a eu un tomodensitogramme il y a cinq ans, et qu'on détecte une tumeur cette année, on retournera étudier l'examen précédent pour voir si la tumeur était présente à ce moment-là. Nous avait-elle échappé? Était-elle très petite? Comment aurions-nous pu éviter cette erreur?
    Je pense donc qu'il est important d'avoir cette information, mais elle doit être conservée derrière des pare-feux on ne peut plus sécuritaires. Il peut s'avérer très difficile d'outrepasser ces pare-feux, surtout de l'extérieur de l'hôpital ou des installations. Même si je partage un dossier médical électronique avec 85 p. 100 des médecins de ma collectivité, j'ai parfois de la difficulté à obtenir les résultats de la consultation précédente en neurologie, le tomodensitogramme de l'an dernier.
(1645)
    Merci beaucoup.

[Français]

    Ma prochaine question s'adresse aux représentants du Conseil canadien de la coopération et de la mutualité.
    Je sais que les coopératives de santé sont beaucoup implantées au Québec et qu'il y en a quelques-unes en Ontario. J'ai peut-être manqué ce que vous avez dit à cet égard lors de votre présentation, mais pouvez-vous nous faire le portrait d'où en est le développement des coopératives de santé? Je trouve que ce modèle est très prometteur depuis de nombreuses années, malgré les possibles abus de gestion. Ce sont des détails. En effet, je crois que lorsqu'un milieu se mobilise pour investir et se doter de ressources, il s'agit d'un modèle gagnant, surtout dans le contexte où, partout au Canada, on a des systèmes de santé quand même défaillants qu'il faut pallier.
    En effet, dans toute innovation, il y a toujours des processus itératifs.
     Parlons de l'évolution. Au Québec, il y a maintenant une cinquantaine de coopératives de santé. La première de cette nouvelle génération a été créée en 1996. En 10 ans, une cinquantaine d'entre elles ont été créées.
    Il y a aussi 46 coopératives de services à domicile au Québec. Dans ce cas, les personnes se déplacent pour aller dans les maisons des gens.
    J'aimerais ajouter que les coopératives sont présentes sur le plan international de façon très importante. Au Japon, des millions de personnes sont membres de coopératives. C'est aussi le cas au Brésil. Au Canada, cela avait commencé, entre autres, avec la Coopérative de services de santé de Québec. Il y en a eu aussi en Saskatchewan dans le temps de Tommy Douglas. En Saskatchewan, il y a quatre coopératives de santé. À Winnipeg, au Manitoba, en Ontario, en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick, il y a une coopérative en télémédecine. Au total, il y a présentement au Canada 120 coopératives en santé impliquées en soins primaires.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    La parole est maintenant à Mme Block.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je veux aussi tous vous remercier d'être ici aujourd'hui.
    J'ai quelques questions à vous poser. Certaines de nature très générale, et d'autres beaucoup plus précises.
    J'ai déjà été mairesse d'une très petite municipalité. Je ne dirais pas que c'était une collectivité éloignée, mais c'était certainement une collectivité rurale. Nous avions une clinique médicale. Nous avions fourni les locaux, puis embauché différents professionnels pour offrir des services.
    En Saskatchewan, nous avons des régions sanitaires. Je me demandais si vous pouviez me décrire les liens qu'il y a, s'il y en a, entre les coopératives et les régions sanitaires ou les provinces, selon le cas.

[Français]

    Je vais vous parler de la situation de façon générale. Chaque coop est autonome et a, par conséquent, ses propres particularités, mais il reste que les premiers partenaires sont généralement les municipalités. Nous nous assurons de maintenir ou de créer les services dans les municipalités. En général, les gens des municipalités font partie des conseils d'administration ainsi que des centres de santé. Les représentants du service public font donc partie du conseil d'administration et sont des partenaires. Il y a toujours des échanges entre les deux.
    Voici un exemple très concret. En Beauce, au Québec, une coopérative s'est installée au même étage que l'urgence, de façon à pouvoir offrir ce service à la clinique quand l'urgence n'est pas ouverte. Dans ce cas également, les premiers investissements sont venus des municipalités. Il y a un lien de partenariat très fort entre tous ces joueurs. C'est vraiment la clé du succès d'une coopérative.
    Par contre, c'est différent de ce que vous avez mentionné, en ce sens que la coopérative est ouverte à la communauté au complet. Ce n'est pas la municipalité qui prend en charge une clinique. On invite tout le monde à devenir membre. Il y a en moyenne de 3 000 à 4 000 membres. Tous ceux qui deviennent membres apportent leur contribution et participent au processus démocratique. Ils décrivent le genre de services qu'ils veulent et la façon dont ils veulent que ce soit organisé. On est donc vraiment très près du citoyen. On détermine quels services veulent les gens dans la communauté, et s'il est question d'obtenir des services supplémentaires, on vérifie si les gens sont prêts à assumer la facture qui vient avec ces services.
(1650)

[Traduction]

    Merci.
    Ma deuxième question s'adresse à vous, docteur Ballagh.
    Vous avez dit que vous aimeriez que vos patients arrivent avec leur dossier médical sur une clé USB. Je ne comprends pas toute la réglementation entourant l'échange d'information. Je sais que nous sommes protégés par la Loi sur la protection des renseignements personnels. Mais vous dites que la première question qui vient en tête est « qu'est-ce qui appartient à qui? » Quand un patient a toutes ces informations sur une clé USB, est-ce que cela inclut également vos dossiers et toutes les notes que vous avez pris lors des consultations? Et il en va de même pour les consultations suivantes avec un autre médecin, et un autre. J'ai du mal à comprendre comment fonctionne la protection des renseignements.
    Est-ce que certains dossiers vous appartiennent, ou appartiennent-ils au patient? Est-ce que tout va sur la clé USB, peu importe si vos notes pourraient être consultées par d'autres?
    C'est compliqué comme question, car il s'agit des renseignements du patient.
    Tout d'abord, je précise que je rêve de l'option de la clé USB; ce n'est pas encore fait. Et nous pouvons tous y rêver ensemble cet après-midi, du moins je l'espère. Il devrait y avoir un dossier médical complet sur cette clé USB, et toute consultation avec un médecin devrait y figurer très rapidement après la visite. Les antécédents complets devraient aussi s'y trouver, idéalement depuis la naissance.
    À savoir qui peut y accéder et dans quelle mesure, mais aussi si le patient peut lui-même y avoir accès, ce sont des questions très difficiles dont il faudra discuter. Quand les patients lisent leurs dossiers, ils peuvent parfois mal interpréter certaines choses ou être froissés par les commentaires. Nous tâchons de bien peser nos mots, mais il arrive que les patients s'inquiètent de la façon dont les choses ont été documentées, entre autres.
    De plus, si je n'ai pas ces renseignements, notamment si je ne peux pas les obtenir pendant la courte consultation avec le patient — nos consultations se font rapidement, et dans ma spécialité la norme est de 20 minutes —, cela garantie parfois une deuxième visite. Bon nombre de mes patients arrivent de loin pour cette première consultation, qui est si importante, alors nous voulons en faire le plus possible dans le temps dont on dispose. Mais si on pouvait avoir cette information supplémentaire, ce serait beaucoup plus facile d'en faire plus en une seule visite.
    Merci beaucoup, docteur Ballagh.
    C'est au tour de M. Kellway.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Merci à vous d'être venus nous voir aujourd'hui.
    On a beaucoup parlé aujourd'hui de l'accès à des médecins dans les régions rurales et éloignées. Je n'ai jamais considéré Barrie comme une collectivité rurale. Je viens de Toronto, alors c'est juste un peu plus loin sur la route, après plusieurs villes de banlieue.
    Je vais laisser ce sujet de côté pour le moment. Hier soir, j'ai regardé le bulletin The National et j'ai vu qu'une dame de Toronto est décédée en attendant l'ambulance, parce que les ambulanciers ont été réaffectés à d'autres cas à sept reprises sur une période de trois heures.
    Si je peux me le permettre, je vais vous parler de ma propre expérience. J'ai eu le même médecin pendant presque 20 ans à Toronto. Je pensais pouvoir prendre rendez-vous pour un examen deux mois à l'avance, mais il semble que ce ne soit pas possible. Il faut prendre rendez-vous six mois à l'avance. Je n'ai pas pu me présenter à ce rendez-vous, alors il a fallu que j'attende cinq ou six mois de plus. Il m'a ainsi fallu un an pour avoir mon examen médical annuel. Chez nous, mon fils et moi — les hommes de la famille — allons toujours voir le même médecin. Arrivées à un certain âge, mes filles ont décidé de consulter une femme médecin de notre quartier. C'est en fait une clinique où il y a une rotation constante et où on ne voit jamais deux fois le même médecin.
    Donc, bien que je comprenne les difficultés des collectivités rurales et éloignées, je souligne qu'il est aussi très difficile dans les grandes villes d'avoir accès à des soins de santé et de consulter un médecin sur une base régulière.
    Je devrais ajouter que c'est difficile même au centre-ville de Toronto. Avec la multiplication des condos là-bas et la densité de la population, même s'il y a une foule d'hôpitaux tout le long de l'avenue University, ils n'arrivent pas à répondre à la demande.
    Après cette longue introduction, ma première question s'adresse aux gens des coopératives. Vous avez surtout parlé des coopératives en milieu rural. Est-ce qu'on peut aussi appliquer ce modèle au contexte urbain?
(1655)

[Français]

    Oui, bien sûr.

[Traduction]

    Il y en a à Saskatoon, Regina, Winnipeg et Vancouver, alors oui, on en trouve dans les régions urbaines. On travaille d'ailleurs à en établir une à Montréal.
    Très bien.
    Docteur Dibble et docteur Ballagh, en ce qui concerne les innovations et les technologies que vous utilisez dans les collectivités rurales, y a-t-il une raison pour que cela ne s'applique pas aussi aux centres urbains?
    Non, je pense que cela devrait s'appliquer, surtout s'il faut attendre six mois pour avoir un rendez-vous dans la plus grande métropole du Canada, comme vous nous le disiez. Tout le monde devrait pouvoir y accéder.
    Cependant, la situation demeure plus problématique dans les régions rurales. En effet, les statistiques de la Société de la médecine rurale que je vous ai données démontrent qu’il y a encore un plus grand pourcentage de médecins par habitant à Toronto que dans les régions rurales. C’est pourquoi j’ai mis l’accent sur ces régions. Mais c’est vrai, tout le monde devrait pouvoir recevoir ces services s’ils en ont besoin.
    Pour ce qui est de la pénurie de médecins, je dois dire que l'expansion de notre collectivité est arrivée à un bien mauvais moment, c'est-à-dire au moment où on a connu une réduction des places en faculté de médecine dans la province. On commençait à peine à voir les effets de ces compressions quand la croissance démographique a explosé. Au pire de la crise, 35 p. 100 de la population n'avait pas de médecin de famille. Les gens devaient donc recourir aux cliniques sans rendez-vous et aux urgences pour leur examen de santé annuel ou, pour les femmes, faire un test Pap.
    Notre salle d'urgence est la deuxième plus sollicitée de la province de l'Ontario. Et elle n'est pas au centre-ville de Toronto ou de London. Des centres urbains font face à ce genre de crise, et c'est ce que nous traversons à Barrie en ce moment. C'est en partie pour cette raison que nous nous intéressons de près à la pénurie de médecins.
    J'ai déjà été président de notre groupe de travail chargé du recrutement des médecins, et quand je me suis installé à Barrie, j'étais loin d'imaginer que nous aurions un jour besoin de cela. Je peux vous dire que nous avons dû faire preuve d'ingéniosité pour attirer des médecins chez nous.
    En ce qui a trait à la technologie, je vois l'urgence de l'hôpital de mon bureau, mais trois feux de circulation nous séparent, et je dois aussi trouver un stationnement. Entre me précipiter à l'urgence et recourir à la technologie pour examiner le patient, le temps que je gagne peut aussi sauver la vie du patient. Il n'y a pas de différence entre les zones rurales et les zones urbaines pour ce qui est de l'utilisation de telles technologies et des moyens de communication qu'elles offrent.
    Merci beaucoup.
    La parole est à M. Wilks.
    Merci, madame la présidente, et merci à vous d'être ici aujourd'hui.
    Docteur Ballagh, j'ai trouvé intéressant que vous nous parliez des forces armées et des adjoints au médecin. Mon fils était en Afghanistan pour la dernière mission de combat. Il est sapeur de combat, alors il est exposé à toutes sortes d'engins explosifs improvisés. Il aime trouver des choses à faire exploser, en espérant de ne pas y passer aussi.
    À ce sujet, je suis curieux de savoir comment vous pouvez offrir vos services à distance. Votre spécialité étant l'oreille interne, est-ce une possibilité pour vous? Un sapeur de combat qui se fait sonner peut en garder des séquelles. Existe-t-il une technologie qui vous permettrait d'examiner un soldat en Afghanistan, par exemple, depuis votre bureau de Barrie? Si quelqu'un pouvait vous contacter à distance, pourriez-vous l'aider?
    Premièrement, pouvez-vous remercier votre fils de ma part d'avoir servi notre pays? J'essaie de remercier tous les militaires que je rencontre dans le cadre de mon travail.
(1700)
    Il va bien.
    Pour ce qui est de l'accès à distance et de ce genre de transfert d'information, comme nous avons été les précepteurs des adjoints au médecin et de certains médecins militaires, il arrive souvent qu'on nous pose des questions par courriel à propos des soins à donner aux patients et des choses du genre, des mois même des années plus tard.
    En ce qui a trait au contact direct, les choses évoluent, mais ce n'est pas encore possible. Les choses n'avancent pas aussi vite qu'elles le pourraient. Pour un adjoint au médecin qui est aux premières lignes en Afghanistan et qui doit traiter un patient ensanglanté blessé au cou, il est très difficile actuellement pour lui de me montrer la blessure à distance.
    Je crois qu'il serait possible de faire de la recherche et développement là-dessus grâce au gouvernement fédéral. Les minutes et les secondes comptent quand un membre des forces armées est blessé à des milliers de kilomètres d'ici et que les choses tournent mal.
    L'apprentissage va dans les deux sens. Un de nos soldats d'élite, qui est aussi technicien médical, est venu travailler avec moi un samedi. Je ne les oblige pas habituellement à venir travailler le samedi, alors j'ai pensé que ce serait bien de lui offrir un café et de lui enseigner quelque chose.
    Je lui ai donné la mise en situation suivante: un engin explosif improvisé a explosé, son Buffalo a été renversé — c'est leur ambulance — et il doit faire une cricothyrotomie d'urgence, car les voies respiratoires du patient sont obstruées. Je lui ai demandé de me dire quelles étapes il allait suivre. Il m'a répondu ceci: « Docteur Ballagh, voici ce que j'ai fait les trois fois que ça m'est arrivé. » Je n'ai pas honte de vous dire que même si je suis un oto-rhino-laryngologiste certifié, je n'en ai jamais fait moi-même. C'est en fait lui qui m'a enseigné comment faire. C'est donc dire que le transfert d'information va dans les deux sens.
    C'est bien.
    Docteur Dibble, le système Docteur en boîte m'intrigue. Le robot Rosie est aussi une technologie fort intéressante, particulièrement pour les régions rurales.
    On a probablement sauvé des milliers de vie depuis l'installation des défibrillateurs dans tous les centres récréatifs du Canada, ou presque. Je pense que munir les véhicules d'urgence — que ce soit les ambulances ou les autos-patrouilles — du système Docteur en boîte pourrait aider les premiers répondants qui doivent intervenir très rapidement quand la situation l'exige. Pensez-vous que cela pourrait servir aux ambulanciers ou aux policiers qui sont les premiers arrivés sur les lieux et qui ont très peu de connaissances médicales, mais qui pourraient être guidés pour intervenir correctement?
    Oui, absolument. Je pense que cela pourrait servir à tous les premiers répondants qui ont les compétences pour gérer une situation de crise, mais qui n'ont peut-être pas l'expertise médicale voulue.
    Les défibrillateurs automatiques externes dont vous parlez et qu'on trouve un peu partout au Canada sont parfaits pour secourir quelqu'un qui a un malaise cardiaque soudain, mais ce n'est pas toujours l'outil dont on a besoin en cas d'urgence. Le défibrillateur automatique ne sera d'aucune utilité s'il ne détecte aucun rythme choquable. Par contre, le Docteur en boîte sera en mesure d'évaluer la situation et de diriger le répondant.
    Un urgentologue spécialisé en traumatologie pourrait guider les répondants à distance et leur indiquer comment gérer la crise. Je ne suis pas certain que cela fonctionnerait aussi bien que les défibrillateurs fixés au mur, et que le public pourrait intervenir même en suivant les directives d'un médecin, mais les services de police, les services d'incendie et les services médicaux d'urgence pourraient sans doute en tirer profit.
    En 20 ans de carrière dans les forces de l'ordre, j'ai vu bien des choses intéressantes. Cela me paraît comme une occasion en or.
     Monsieur Wilks, je vais profiter de cette occasion en or pour vous informer que votre temps est écoulé.
    Cela me désole, car j'aime beaucoup vos questions.
    Je vais profiter de cette occasion en or pour vous remercier.
    Monsieur Wilks est un vrai gentleman. Il a transporté tous mes sacs en route vers la réunion du comité aujourd'hui. Il ne le fait pas que pour moi, mais pour d'autres dames également — seulement quand elles ont des sacs lourds à transporter.
    C'est difficile d'interrompre un gentleman de la sorte, mais bon. J'ai un coeur de pierre, monsieur Wilks.
    Monsieur Carrie, la parole est à vous.
    Merci beaucoup, madame la présidente, de me permettre de poser une question.
    Je veux remercier mon collègue, M. Lobb.
    Je pense que vous avez effectivement de l'avenir comme consultant.
    Vous savez, je crois que le modèle des coopératives permettrait aux collectivités locales de mieux contrôler les choses. Au Canada, nous avons des collectivités tellement diversifiées.
    On nous a parlé des collectivités des Premières Nations. Certaines collectivités aimeraient peut-être recourir aux services de chiropraticiens ou de naturopathes. Celles des Premières Nations, par exemple, voudront probablement des soignants autochtones. Elles pourraient avoir des difficultés à l'égard des soins de relève ou des soins à domicile.
    Pourriez-vous donner un exemple au comité pour illustrer dans quelle mesure le modèle des coopératives peut favoriser l'innovation, si ces collectivités décident que c'est un bon moyen pour attirer des médecins et des ressources humaines en santé?
    On nous répète constamment qu'il est extrêmement difficile d'attirer des professionnels de la santé dans ces collectivités. Pourriez-vous nous donner un exemple d'un modèle de coopérative qui aiderait dans une telle situation?
(1705)

[Français]

    Je vais tenter d'être aussi clair que M. Lobb.
    Prenons l'exemple de Saskatoon. On y trouve une coopérative de santé qui a décidé d'offrir un service supplémentaire aux Autochtones, adapté à eux, parce qu'aucun service public ne faisait une telle chose. On a décidé de le faire à même les ressources de la coopérative.
    Je vous donne un autre exemple. Dans le Nord du Québec, chez les Inuits, on a un projet avec des coopératives. En effet, des coopératives locales ont décidé d'offrir des services de prévention en santé, ce qui comprend de l'éducation en santé, parce que c'est un défi très important chez les Inuits. Cela se fait selon le modèle coopératif. Le service public n'offrait pas de tels services, alors on a utilisé le modèle coopératif pour avoir ces services adaptés.
    Je trouve très intéressant votre commentaire sur le fait d'impliquer les citoyens. Pour simplifier le plus possible, le modèle de coopérative de santé implique que des citoyens décident de consacrer des ressources financières supplémentaires pour des services supplémentaires ou pour avoir un plus grand accès à des services. Ces citoyens décident de la façon dont ils vont faire cela. Il s'agit donc d'un vecteur d'innovation. On va regarder les innovations nécessaires pour répondre à ses propres besoins, étant donné que les services publics seuls n'y arrivent pas. On va donc réinvestir et aller chercher ce qu'il faut pour adapter le service public aux besoins de sa collectivité, et on va payer la note.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    J'ai une autre question.
    Un de mes collègues a parlé de la Loi canadienne sur la santé. Je suis curieux. Est-ce que le modèle des coopératives est reconnu dans toutes les provinces? Est-ce que l'interprétation de ce modèle pose quelque problème que ce soit en vertu de la Loi canadienne sur la santé?

[Français]

    Toutes les provinces reconnaissent les coopératives en général et elles reconnaissent les coopératives de santé. Par ailleurs, quelle est l'interprétation de l'accessibilité? La contribution d'un membre influence-t-elle cela? Je vous donne un exemple très concret.
    En Nouvelle-Écosse, il y a un service de télémédecine. On demande aux membres de payer 10 $ pour couvrir les coûts de la technologie. C'est accepté par la province sans problème, alors que d'autres provinces pourraient interpréter cela différemment. C'est difficile, parce que les coopératives sont gérées par des bénévoles. Il faut savoir bien interpréter ce qui est acceptable et ce qui ne l'est pas. Il y a bel et bien une zone grise.
    Au Québec, comme je le mentionnais, le mouvement coopératif a fait en sorte de préciser les balises pour s'assurer que c'était bien compris.

[Traduction]

    Ai-je encore du temps?
    Il vous reste 30 secondes.
    J'ai une toute petite question.
    J'aimerais en savoir plus sur les adjoints aux médecins. J'en ai beaucoup entendu parler et on dit qu'ils sont très utiles. Vous avez indiqué qu'ils ne pouvaient pas traiter des patients seuls; ils doivent être supervisés.
    Y a-t-il un moyen de les rémunérer, ou doivent-ils être rémunérés par le médecin de famille? Peuvent-ils envoyer la note aux programmes provinciaux?
     Très brièvement, les adjoints aux médecins militaires sont rémunérés par les Forces canadiennes. C'est un modèle qui a tranquillement commencé à s'implanter dans le secteur civil. Au Manitoba, on emploie des auxiliaires médicaux en médecine rurale. En Ontario, le ministère de la Santé leur accorde des contrats distincts.
    À l'urgence de Kirkland Lake, nous avons un des auxiliaires médicaux que j'ai formés à Borden. Il travaille maintenant dans le secteur civil. Il offre un modèle de pratique pour les autres auxiliaires médicaux civils. Il y a un programme de formation dans ce domaine à l'Université McMaster, alors il sert de modèle aux jeunes auxiliaires.
    Merci beaucoup.
    La parole est à M. Easter.
    Merci, madame la présidente.
    Monsieur Dibble, avant de poser une autre question, je vais vous donner la chance de répondre à celle que je vous ai posée à propos de ce que le gouvernement fédéral ou les provinces pourraient faire pour faire avancer les choses, que ce soit à l'égard des politiques ou des ressources financières.
    Merci. J'ai essayé de donner une réponse à ce sujet, en fait, en répondant à une autre question.
    Je pense qu'une chose qui aiderait beaucoup, comme ces technologies ne sont pas gratuites, c'est qu'au lieu de laisser cette responsabilité financière aux collectivités et aux coopératives, on pourrait peut-être offrir des subventions ou des programmes fédéraux qui permettraient aux collectivités de demander des fonds pour se les procurer. On le sait, les soins de santé sont de compétence provinciale, mais un programme de subventions fédéral pourrait certainement offrir à la population un robot Rosie, un Docteur en boîte, ou encore des services de télésanté adéquats, de façon à ce qu'une personne comme moi puisse procéder à une épreuve d'effort, à un électrocardiogramme et à un examen en un tournemain.
(1710)
    Les deux médecins ont parlé de l'utilisation de la télémédecine et d'autres technologies pour guider le personnel infirmier dans une région éloignée, ou même à trois coins de rue à Toronto, en fait. Vous êtes des spécialistes déjà extrêmement sollicités, alors avez-vous le temps d'offrir des services à distance? Comment arrivez-vous à gérer tout cela? Cela ne doit pas être évident.
    Vous avez vos propres patients dans votre pratique, et vous êtes appelés à faire des consultations à distance, que ce soit à Nain, au Labrador ou ailleurs. Comment y arrivez-vous? Pouvez-vous aussi me dire s'il y a moyen de gagner en efficience dans ce secteur?
    Je pense que M. Dibble a dit plus tôt qu'un des défis pour un médecin en région rurale est qu'il est le seul sur place. Il est sur appel 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, et il finit par être épuisé. C'est ce qui est arrivé à mon médecin. Comment évitez-vous l'épuisement quand vous devez répondre à la demande de votre propre pratique, et en plus faire des consultations à distance? Comment pourrait-on rendre les choses plus efficaces pour éviter de mettre nos spécialistes à bout eux aussi?
    Je vais faire un commentaire bref. Il faut s'assurer selon moi que les médecins passent moins de temps à se déplacer à la campagne. Par exemple, le temps que le Dr Ballagh prend pour se rendre à Kirkland Lake pourrait être consacré aux patients. Je pense que nous devons veiller à fournir les technologies aux médecins pour qu'ils n'aient pas besoin d'être sur place et pour économiser du temps.
    Bien sûr, les collectivités ne doivent pas être pénalisées parce que leurs médecins donnent des soins à la campagne. Par exemple, je suis le seul cardiologue de mon hôpital. Ce serait difficile de passer un jour par semaine dans une collectivité rurale. Mais nous consacrons beaucoup d'efforts au recrutement. Je suis convaincu que, d'ici la fin de l'année prochaine, le nombre de cardiologues dans ma collectivité sera bien suffisant. Nous parlons déjà de mettre en oeuvre des programmes de sensibilisation. Au lieu de me déplacer une heure dans un sens ou dans l'autre, je préférerais simplement travailler à distance pour épargner du temps.
    Docteur Ballagh.
    Je dirai très brièvement qu'il nous faut plus de personnel. C'est intéressant de savoir qu'aux yeux de la population, la pénurie de médecins ne concerne que les médecins de famille en raison des problèmes dont nous avons parlé, mais elle concerne aussi les médecins spécialistes. En fait, il n'en manque peut-être pas présentement, mais il manque de ressources pour que ces médecins puissent travailler. Vous avez lu sur les chirurgiens orthopédistes qui ont leur diplôme, mais qui n'ont pas accès à la salle d'opération. Certains d'entre eux travaillent sur appel à notre hôpital la fin de semaine pour faire partie de notre groupe. Lorsque la salle d'opération est disponible, ces chirurgiens peuvent se mettre au travail.
    Je siège au conseil national de ma spécialité. Selon le rapport que nous avons reçu l'an dernier, nous formons à l'heure actuelle 30 p. 100 plus de médecins spécialistes des oreilles, du nez et de la gorge que nous n'aurons de ressources lorsqu'ils seront diplômés. Autrement dit, il n'y aura pas assez de temps en salle d'opération et en clinique, d'infirmières ou de ressources à l'hôpital pour que ces médecins effectuent des opérations. Mais vous avez raison, nous sommes surchargés. Je travaille dans quatre collectivités.
    Pour répondre à votre question, nous devons simplement gérer notre temps avec beaucoup de soin.
    Le comité doit réfléchir à ces commentaires, madame la présidente.
    Je vais céder la parole à un autre député.
    Nous allons mettre un terme à notre réflexion pour l'instant, mais en effet, c'est un excellent commentaire.
    Puisqu'il nous reste quelques minutes, le Dr Morin va entamer une série de sept minutes.
    Merci beaucoup.
    Ma prochaine question s'adresse au Dr Dibble. Vous avez dit plus tôt qu'un programme de subventions fédéral pour l'infrastructure médicale et les nouvelles technologies serait profitable. Je n'ai rien contre cette demande de fonds supplémentaires, mais elle soulève une question. Combien d'argent faudrait-il investir dans le programme et d'où proviendrait-il?
    Il faut tenir compte de la conjoncture économique au Canada; l'argent ne pousse pas dans les arbres. Nous avons donc le choix d'effectuer des compressions ailleurs... Avez-vous une suggestion quant aux fonds que le fédéral pourrait réaffecter?
(1715)
    C'est difficile à dire pour moi, car je ne comprends pas tous les rouages financiers du gouvernement fédéral.
    Des voix: Oh, oh!
    Dr Bradley DIbble: Mon expérience qui se rapproche le plus de la question, c'est le comité pour le DEA auquel je siège à la Fondation des maladies du coeur et de l'AVC de l'Ontario. Chaque année, nous choisissons les collectivités qui recevront des DEA en fonction des demandes reçues.
    Nous pourrions... Ce ne serait pas forcément des demandes de fonds, parce qu'on ne sait pas à coup sûr comment les fonds seront dépensés lorsqu'ils sont ajoutés au budget global de l'établissement de la collectivité. La demande pourrait porter sur une Rosie ou un docteur en boîte.
    C'est difficile de savoir d'où viendra l'argent. Je demande souvent aux gens s'ils préféreraient se passer de leur coeur ou de leurs poumons; les deux sont nécessaires. Mais on peut vivre avec la surdité, même si le Dr Ballagh vous dira que ce n'est pas forcément une belle vie...
    C'est la Saint-Valentin. Nous devons ménager le Dr Ballagh.
    Pas de bisbille, s'il vous plaît.
    Je pense que c'est d'abord aux cardiologues que devrait revenir le droit de faire ce genre de remarque.
    Cela dit, les fonds doivent être disponibles. La plupart des gens estiment que l'éducation et les soins de santé sont primordiaux. Il faut simplement s'assurer de dépenser les fonds le plus judicieusement possible.
     Par exemple, ce n'est pas parce que les gens choisissent de vivre au nord de la rivière des Français qu'ils ne doivent pas avoir accès aux soins de santé. Ce sont des Canadiens, après tout. Nous devons faciliter l'accès le plus possible.
    Nous ne voulons pas envoyer les médecins comme moi dans les régions où ils ne pourront pas travailler à temps plein en tant que cardiologues. Mais nous pourrions faire en sorte qu'ils travaillent à partir de leurs propres collectivités.
    C'est excellent si les collectivités peuvent demander ce genre de technologies. C'est de l'argent très bien investi. Par contre, il faudrait que j'examine le reste du budget pour indiquer les postes qui pourraient subir des compressions.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Ma prochaine question s'adresse à M. Béland.
    Beaucoup de gens se familiarisent en effet avec le concept des coopératives de santé. En anglais, on entend davantage parler des community health centres. Il s'agit de modèles de soins de santé assez similaires. Il peut même y avoir un chevauchement. Étant donné que vous êtes une organisation pancanadienne, j'aimerais que vous nous parliez davantage de ce système, surtout celui des community health centres.
    Dans certaines provinces, les community health centres sont un peu l'équivalent des CLSC. C'est vraiment un système public. D'ailleurs, il est intéressant de mentionner que l'Alberta considère créer des family care clinics et étudie la possibilité d'adopter le modèle coopératif.
    Il est aussi intéressant de constater que les quatre coopératives de la Saskatchewan font partie du réseau des community health centres et du réseau public. Le processus démocratique est ce qui différencie un organisme qui fonctionne selon le modèle coopératif d'un autre dont ce n'est pas le cas. Dans le premier cas, il y a une implication de la population, des membres. Il y a souvent une contribution financière, qui peut être plus ou moins importante. Il reste que les membres deviennent, dans une certaine mesure, propriétaires de leur outil de développement en matière de santé, dans leur communauté. Il y a donc une implication supplémentaire de la part des membres.
    Dans une coopérative, on croit à la responsabilité collective à l'égard de la santé, mais également à la responsabilité personnelle. Le principe est que les gens doivent s'engager face à leur propre santé, apprendre à la gérer eux-mêmes. On voit une différence. De façon générale, les services supplémentaires ont trait à la prévention, essentiellement parce qu'on veut s'entraider. Plutôt que de recourir à un programme ou à une approche de manière uniforme consistant à allouer une subvention à une fin précise, on fait confiance aux communautés et on les laisse déterminer elles-mêmes leurs besoins. Dans bien des cas, leurs solutions correspondent vraiment à leurs besoins, étant donné qu'elles les connaissent. C'est la différence que nous observons.
    Merci.
    Ma prochaine question...
     Est-ce terminé?
(1720)

[Traduction]

    Non, il vous reste une minute.
    D'accord, je serai bref.

[Français]

     Je pense que beaucoup de gens ont peur des coopératives, parce qu'ils ont l'impression qu'on n'y dispense que des soins médicaux qui devraient être gratuits. Pouvez-vous rassurer ces gens afin qu'ils comprennent vraiment l'utilité et la complémentarité de cela?
    Je fais partie d'une coopérative, soit celle d'Aylmer. Elle compte 9 000 membres. Chaque année, j'assiste à l'assemblée générale.
    J'ai demandé à un médecin pourquoi il travaillait à la coopérative. Il m'a répondu que c'était parce que les services qu'il recevait de la coopérative lui permettaient de mettre l'accent sur sa pratique médicale plutôt que d'essayer de comprendre l'administration, les rapports et tout le charabia que cela implique. Il a ajouté qu'il voulait vraiment faire de la médecine. On essaie de donner aux gens la possibilité de mettre l'accent sur ce qu'ils font le mieux: pratiquer la médecine.
    Merci.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Monsieur Brown.
    Merci.
    Il y a une question que je n'ai pas eu l'occasion de poser durant ma première série, concernant la collaboration internationale en matière de recherche. C'est clair que la recherche en santé est un moteur d'innovation. Le fédéral investit beaucoup là-dedans à l'aide de divers organismes fédéraux, comme les IRSC. À votre avis, la collaboration entre les chercheurs est-elle adéquate? L'exemple que j'ai donné à un groupe précédent, c'est le projet pour le pancréas artificiel que la Fondation de la recherche sur le diabète juvénile a réalisé à Hamilton et à Waterloo. Un projet de recherche semblable a été mis en oeuvre en Australie. Je suis sûr qu'on effectue de la recherche sur des questions semblables dans tous les pays.
    Par expérience, diriez-vous que la collaboration est adéquate dans les milieux de la recherche médicale?
    Par expérience, je dirais que la collaboration est excellente entre les cardiologues. Nous sommes uniques dans la mesure où la première cause de décès, c'est les maladies cardiovasculaires. Nous réalisons donc beaucoup d'études sur nos patients. Il y a constamment des conclusions d'essais cliniques rendues publiques. Par exemple, je collabore avec les IRSC, et on m'invite parfois à participer à des essais cliniques.
    C'est très facile de collaborer à l'échelle internationale, parce que nous obtenons toujours de l'information. Nous la consultons en général sur Internet, ou nous recevons des courriels venant de toutes nos organisations, comme la Société canadienne de cardiologie et les organisations américaines, dont nous avons tendance à être membres, comme l'American Heart Association et l'American College of Cardiology. Nous sommes mis au courant du contexte exact des essais cliniques, de leur début, de leur fin et de la personne-ressource si nous voulons y participer.
    Je dirais que les chercheurs du milieu mondial de la cardiologie collaborent beaucoup. En général, les bons essais qui répondent à mes questions sur les meilleurs soins à donner à mes patients sont multinationaux. De nos jours, très peu d'essais ne sont réalisés que dans une seule collectivité ou même un seul pays, car on veut savoir si les résultats s'appliquent aux patients à l'étranger. En général, les essais sont donc multinationaux et comportent des milliers de patients. Ce serait impossible sans une grande collaboration.
    Je vais parler de ma région, parce que je viens de quitter la présidence de l'équipe médicale de mon hôpital. Je siégeais au conseil de l'hôpital et au comité médical consultatif, qui doit examiner toutes les propositions de recherche qui lui sont présentées. Contrairement à ce que vous pourriez penser en raison de la taille de notre hôpital, nous faisons beaucoup de recherche muticentrique. C'est surtout de la recherche en oncologie qui vise à traiter le cancer et qui est menée en ville, à l'hôpital Sunnybrook ou à l'hôpital Princess Margaret.
    C'est intéressant de savoir que notre conseil d'éthique en recherche et celui de Sunnybrook doivent approuver les propositions de recherche. Ce sont bien sûr des étapes très importantes, car nous veillons à ce que toute la recherche soit éthique, mais s'il y avait 20 hôpitaux, 20 conseils devraient approuver les recherches avant qu'elles ne commencent. La technologie permet parfois de rationaliser les processus. Je pense que les conseils des hôpitaux au pays et à l'étranger doivent la mettre à profit. Les essais multicentriques ne devraient pas se limiter à de petites régions comme l'Ontario; ils devraient se réaliser partout dans le monde.
    L'innovation en santé crée aussi de l'emploi, surtout la technologie. C'est clair qu'un accès accru aux soins de santé représente un grand avantage pour les Canadiens, mais l'emploi constitue également un aspect très important. Je veux connaître votre opinion là-dessus.
    Par exemple, l'entreprise Southmedic de Barrie a conçu un nouvel appareil médical qui est maintenant produit au Canada, après avoir été fabriqué en Chine. Cette entreprise a réussi à créer un produit supérieur qui est employé partout en Amérique du Nord. Southmedic n'est qu'un exemple.
    Vous avez dit que votre résidence a été difficile. À votre avis, quel type d'occasions ratons-nous à cause du processus réglementaire fastidieux, comme vous l'avez décrit? Quelles possibilités s'offrent au Canada si nous facilitons la mise en marché des appareils médicaux?
(1725)
    C'est une question très vaste. Ma longue expérience ne peut se résumer en une ou deux minutes.
    De nos jours, la conception et la mise en marché d'un médicament coûtent entre 750 millions et un milliard de dollars. Il aurait fallu investir un tel montant pour que mon produit se retrouve sur les tablettes des pharmacies. Chaque étape comporte son lot de processus réglementaires très importants, dont certains sont plus faciles que d'autres. Les processus sont semblables dans tous les pays où il y a des brevets. Ma compagnie et moi avons connu des difficultés à la troisième ou à la quatrième étape liée à la démonstration du principe. Nous devions établir un partenariat avec une autre entreprise.
    Nous pourrions beaucoup améliorer les processus au pays si nous avions de l'aide pour les transferts de technologie et les brevets.
    Le Canada accuse-t-il du retard par rapport aux autres pays industrialisés, concernant le processus réglementaire? Le processus prend-il beaucoup de temps dans tous ces pays de nos jours?
    Je ne pense pas que nous accusons du retard, mais nous pourrions selon moi être des chefs de file. Nos médecins et nos chercheurs sont parmi les meilleurs au monde. À mon avis, le Canada pourrait être un chef de file en matière d'innovation.
    Merci.
    Je dois dire que c'était un après-midi formidable. Ce qui est frappant, c'est l'humilité de tous les témoins, surtout les deux médecins. Je suis très impressionnée. Je comprends pourquoi vous êtes des chefs de file dans le domaine. Votre opinion compte beaucoup.
    Le bon travail et les bonnes idées de tous les témoins feront partie du rapport que nous préparons. Nous avons encore beaucoup de chemin à faire, parce que notre étude sur l'innovation technologique est extrêmement importante.
    Je vous souhaite une belle Saint-Valentin. N'oubliez pas vos conjoints.
    Bonne soirée.
    Merci.
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