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CIMM Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON CITIZENSHIP AND IMMIGRATION

COMITÉ PERMANENT DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 1er juin 2000

• 0919

[Traduction]

Le président (M. Joe Fontana (London-Nord-Centre, Lib.)): Je vous souhaite la bienvenue, Martha, ainsi qu'aux personnes qui vous accompagnent. Je vous présente mes excuses pour l'absence de certains de nos membres. C'est un beau jeudi matin ensoleillé à Ottawa, alors Dieu sait ce qu'ils font.

• 0920

Martha, je sais que vous avez des commentaires d'ouverture. Comme vous le savez, nous avons entendu le vérificateur général hier, et il nous a parlé de l'aspect économique de son rapport qui concerne l'immigration. Il nous a signalé qu'il y avait de véritables défis et je suis sûr que vous en êtes déjà consciente. Essentiellement, il a dit que le projet de loi C-31 serait utile mais que votre plan d'action, même à son avis, mérite d'être un peu plus approfondi au niveau des délais ou des responsabilités et des interventions administratives ou de gestion.

Nous pourrions en parler un peu aujourd'hui. Peut-être aurez-vous une réponse aux préoccupations qu'il a exprimées, et nous pourrons donc entamer ce dialogue.

Bienvenue encore une fois, et merci beaucoup d'être venue nous rencontrer. Vous pourriez nous présenter vos collègues.

M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Nous les connaissons tous.

Le président: Oui.

Mme Martha Nixon (sous-ministre adjointe, Opérations, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration Canada): Je me ferai un plaisir de vous présenter mes collègues. Vous connaissez bien Georges Tsaï, le sous-ministre adjoint. Vous connaissez très bien la sous-ministre adjointe intérimaire pour les Politiques, Joan Atkinson, et mon excellent collègue le directeur général du Règlement des cas, Bill Sheppit. Il y a aussi d'autres collaborateurs derrière qui sont là pour nous aider.

Serait-il utile que je vous présente mes remarques très rapidement?

Le président: Certainement. Je pense que ce serait un excellent point de départ.

Mme Martha Nixon: Je vais donc vous présenter officiellement ces remarques.

Je commencerai par dire que nous sommes très heureux d'avoir cet entretien avec vous aujourd'hui. Nous nous préoccupons très sérieusement des remarques du vérificateur général. Elles mettent véritablement en exergue les préoccupations que nous avions nous-mêmes. Nous avons entrepris très sérieusement un travail continu d'amélioration de la situation. Nous le faisons déjà depuis un certain temps, et il est utile que nous ayons ce rapport qui va nous permettre de collaborer avec vous et avec le vérificateur général pour progresser encore.

Je vais simplement faire quelques remarques préliminaires afin qu'elles soient consignées au dossier, et nous pourrons ensuite entamer le dialogue.

Nous sommes heureux d'être ici pour discuter des plans que nous avons établis en réponse au rapport du vérificateur général, et je pense que sa comparution ici hier a été une excellente chose. Notre sous-ministre a comparu devant le Comité des comptes publics le 16 mai dernier et elle a souligné que nous estimons que ces vérifications contribuent de manière fort importante à la façon dont nous gérons notre programme. Nous pensons qu'il est important de...

Est-ce que ce sont les membres du comité qui entrent joyeusement dans la pièce?

M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Ils n'avaient pas le quorum, alors ils ont cessé de faire la fête.

M. Steve Mahoney: Ils avaient besoin de moi pour voter sur leur voyage au Chili, et maintenant que cette motion a été adoptée, ils sont tous en train de faire la fête.

Mme Martha Nixon: Ah bon, ils font un pique-nique.

Nous estimons qu'il est important que les Canadiens sachent que les programmes fédéraux sont exécutés de façon efficace et convenable.

Monsieur le président, je crois aussi qu'il est important que nous parlions un peu du contexte dans lequel le vérificateur général a formulé ses recommandations.

Quand notre ministre a comparu, elle a bien précisé que le travail que nous accomplissons s'articule autour de cinq priorités. La première consiste à moderniser la Loi sur la citoyenneté au Canada, et vous vous en occupez très activement. La deuxième consiste à faire adopter une nouvelle Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. Je sais que vous allez vous pencher très bientôt sur cette question.

Nous élaborons aussi un plan d'immigration pluriannuel avec les provinces et les territoire, conformément à l'accord cadre sur l'union sociale, et nous allons les rencontrer la semaine prochaine. Une autre priorité consiste à affermir l'intégrité de nos programmes tant sur le plan de la protection de la sécurité du public que sur celui de l'amélioration des services à la clientèle. Notre objectif est d'avoir un processus de traitement plus équitable et plus rapide. Nous estimons aussi qu'il est prioritaire de poursuivre notre action à l'échelon international en vue de régler un éventail de questions pressantes liées aux migrations à l'échelle mondiale.

En outre, nous allons contribuer à l'objectif prioritaire que s'est fixé le gouvernement de fournir aux Canadiens des services en ligne d'ici l'an 2004. En même temps, nous savons très bien que nous devons continuer à gérer nos ressources humaines de manière à ce que la Fonction publique canadienne devienne un employeur de choix.

[Français]

On doit bien reconnaître les priorités soulignées hier par le vérificateur général. Les députés doivent également reconnaître que nous donnons suite aux recommandations du vérificateur général dans un contexte marqué par la réduction de 20 p. 100 des ressources de CIC, résultat de l'Examen des programmes entrepris au début des années 1990. Cette situation a diminué notre capacité de prestation au cours d'une décennie cependant caractérisée par la croissance du programme, le nombre total de demandes reçues ayant augmenté de 37 p. 100. En 1999, nous avons dû livrer respectivement 76 p. 100 et 27 p. 100 plus de visas d'étudiant et de touriste qu'en 1989.

• 0925

Inévitablement, la charge du travail du personnel s'est considérablement accrue. Il a donc été difficile de maintenir l'excellence du service.

CIC accueille avec plaisir les tout derniers commentaires du vérificateur général sur des questions qui préoccupent déjà la direction. Notre réponse à cette vérification s'appuiera sur ce que nous avons déjà fait et sur ce que nous continuons de faire pour donner suite à celle de 1990.

Depuis cette vérification, nous avons amélioré les mesures en place pour contrer les méfaits, un phénomène peu répandu parmi notre personnel, mais lourd de conséquences. Nous avons amélioré la formation, surtout celle du personnel chargé d'évaluer les demandes complexes des gens d'affaires immigrants. Nous avons apporté des changements clés à la législation afin d'interdire l'entrée aux membres du crime organisé ou des les renvoyer dans leur pays. Nous prenons actuellement des mesures efficaces contre les criminels de guerre contemporains.

[Traduction]

Plus particulièrement, nous allons donner suite à la vérification, et nous avons déjà commencé à le faire, en nous concentrant en priorité sur les pressions attribuables à la charge de travail—vous vous êtes préoccupés de cet aspect—et sur les questions d'intégrité du programme. Nous insistons aussi beaucoup sur les questions de contrôle liées à la sécurité et à la criminalité—et j'en parlerai plus en détail—et naturellement, sur les vérifications de l'admissibilité sur le plan médical, et nous savons que ce sont là aussi des questions qui vous préoccupent, de même que le vérificateur général.

Le Rapport du vérificateur général a fait ressortir le décalage entre le mandat opérationnel de CIC et ses niveaux de financement. Je pense que le gouvernement a reconnu qu'il fallait accorder davantage de ressources: il a annoncé un montant supplémentaire de 139 millions de dollars dans le budget fédéral, ce qui est très encourageant. Grâce à cet argent, nous espérons affermir nos efforts pour intercepter un plus grand nombre de passagers non munis des documents voulus, procéder plus rapidement aux renvois, renforcer nos activités d'exécution de la loi aux points d'entrée, et améliorer la sélection des demandeurs à l'étranger.

Un montant de 25 millions de dollars servira à faire face aux pressions qui s'exercent sur le traitement à l'étranger et au Canada, ainsi qu'à améliorer le service à la clientèle. Grâce à ces fonds supplémentaires, nous espérons déployer 81 agents en affectation temporaire pour les six prochains mois. Ces agents nous ont beaucoup aidés à la fois à réduire les arriérés et à améliorer notre capacité d'émission de visas au cours des deux dernières années. À plus long terme, nous allons accroître de 25 p. 100 notre effectif permanent à l'étranger, et nous espérons que d'ici 2002, nous aurons 45 agents des visas supplémentaires dans nos bureaux situés à l'étranger.

[Français]

Nous élaborons un projet-pilote destiné à vérifier s'il est possible de traiter au Canada certaines demandes d'immigration. Nous améliorons notre capacité de traitement en développant le Système mondial de gestion des cas, ce qui nous permettra d'améliorer considérablement notre capacité d'échanger des informations au sein de notre ministère ainsi qu'avec nos partenaires.

[Traduction]

Parlons maintenant de la deuxième question clé, aussi bien pour nous que pour le vérificateur général: les contrôles liés à la sécurité et à la criminalité. Pour nous, c'est l'un des facteurs les plus importants de l'intégrité du programme. En travaillant étroitement avec des partenaires plus nombreux que jamais, nous parviendrons à un échange plus efficace de renseignements, en particulier sur le crime organisé et les crimes de guerre contemporains. Je crois que nous avons un rôle de chef de file à cet égard.

De plus, nous avons affecté des ressources à l'amélioration de la gestion des affaires liées à la sécurité. Nous élaborons notamment une procédure nationale de dépistage des criminels et de contrôles de sécurité qui nous permettra d'intervenir tout au début du processus de revendication du statut de réfugié.

• 0930

Dans le cadre de la nouvelle loi, nous avons l'intention de mettre sur pied une démarche améliorée en ce qui concerne les attestations de sécurité, et nous élaborerons une stratégie qui améliorera notre capacité d'intercepter les migrants non munis des documents voulus et de travailler avec nos partenaires étrangers, y compris des pays comme la Chine, en vue de bloquer l'infiltration clandestine de migrants et le trafic d'êtres humains auxquels nous sommes confrontés actuellement.

Je sais que nous allons parler plus longuement tout à l'heure de la question de l'admissibilité sur le plan médical. L'une de nos initiatives les plus importantes dans ce domaine consiste à élaborer une définition préliminaire du concept de «fardeau excessif»—soit les affections médicales dont souffrent les demandeurs de visas et qui pourraient exercer des pressions inacceptables sur notre système de soins de santé. Cette nouvelle définition permettra de prendre des décisions plus objectives et transparentes au sujet de l'admissibilité médicale.

En outre, nous collaborons étroitement avec Santé Canada et nous nous attendons à recevoir bientôt l'avis de ce ministère quant à savoir s'il faut modifier notre examen habituel. Nous allons également continuer d'améliorer notre surveillance médicale et mieux expliquer aux arrivants souffrant de certaines maladies infectieuses mais inactives pourquoi ils doivent se présenter aux services de santé publique.

Enfin, nous allons étudier des façons de réduire le temps que les demandeurs du statut de réfugié passent au Canada avant de subir leur examen médical réglementaire. Au Québec, un projet pilote vient tout juste de commencer, qui réduira le délai de 60 jours à cinq. S'il est véritablement efficace, nous pourrons le développer.

J'espère que les questions traitées ici montrent à quel point CIC est déterminé à restructurer et à simplifier ses processus et ses dispositions administratives, et j'espère que cela vous montre que nous avons bien l'intention de collaborer avec le vérificateur général à cet égard. Nous avons l'intention de le faire participer à notre comité de suivi et de collaborer étroitement avec lui à ces changements.

Les ressources budgétaires supplémentaires qui ont été allouées à notre ministère nous permettent de procéder à des investissements cruciaux dans notre infrastructure ainsi que dans nos partenariats. Grâce à ces investissements, nos activités et la façon dont nous exécutons nos programmes sont non seulement plus efficientes, mais aussi plus efficaces.

Je vous remercie de votre attention. J'en ai terminé avec mon exposé. Nous nous ferons maintenant un plaisir d'entamer avec vous une discussion plus détaillée et utile pour nous tous.

Le président: Merci, Martha.

Steve.

M. Steve Mahoney: Vous voulez que je commence?

Le président: Oui, bien sûr. Vous êtes là depuis 9 heures. Je vais commencer par les gens qui étaient là dès le début. Allez-y.

M. Steve Mahoney: Très bien. Merci.

Je vous remercie. J'aimerais que vous répondiez à certaines remarques formulées par le vérificateur général hier.

Tout d'abord, à la fin de son allocution d'ouverture, je lui ai fait remarquer qu'il avait ajouté un mot à son texte, ce qu'il ne fait pas souvent, et que c'était un mot très important. Quand il a parlé du plan que vous avez récemment publié sur Internet, il a dit: «Nous pensons que le ministère ferait bien d'élaborer un plan d'action», mais il a ajouté le mot «réel»—«un réel plan d'action». Je lui ai posé la question et il m'a dit qu'il avait ajouté cet adjectif délibérément. Autrement dit, il est clair qu'il n'est pas satisfait du plan d'action que vous avez publié, et dont j'ai un exemplaire ici.

Pourriez-vous répondre à cette remarque? Allez-vous élaborer un plan d'action détaillé conformément aux orientations...? Je veux dire, quand vous parlez de ramener le délai pour l'examen médical de 60 jours à cinq jours, c'est assez remarquable. Allez-vous faire ce genre de chose pour tout le programme?

Mme Martha Nixon: Je vous remercie de cette question, car nous tenons à bien souligner que nous avons commencé à élaborer tout cela dans notre plan d'action avant que le vérificateur général ne publie son plan. Cela a été notre premier niveau de réponse.

Nous savons bien que nous avons des responsabilités dans un vaste éventail de domaines. Nous allons nous rencontrer la semaine prochaine. Joan Atkinson et moi-même avons présidé un comité de suivi. Nous avons mis sur pied un groupe de travail qui va examiner de façon beaucoup plus détaillée cet été les mesures concrètes qui nous permettront d'accomplir ce que nous avons annoncé dans ce plan très préliminaire. Nous allons fixer un échéancier. Nous inviterons le vérificateur général à siéger à ce comité et nous vous soumettrons à l'automne un plan beaucoup plus détaillé dont vous pourrez vous servir pour suivre nos progrès.

Nous sommes déterminés à assurer ce suivi. Les mesures que nous avons esquissées sont à notre avis un excellent point de départ et elles représentent les grandes orientations que nous devons suivre. Je pourrais très facilement vous les présenter en vous expliquant ce que j'ai l'intention de faire. Mais il s'agit vraiment d'un plan préliminaire, et nous allons nous engager à y donner suite avec des mesures beaucoup plus concrètes accompagnées d'un calendrier.

• 0935

M. Steve Mahoney: Bon.

Franchement, une bonne partie de ce qui a été dit hier serait inquiétante pour n'importe quelle personne qui lirait le compte rendu, par exemple des choses du genre:

    Enfin, nous constatons que le ministère est particulièrement vulnérable à la fraude et aux abus. Il ne dispose pas de mesures efficaces pour dissuader les personnes de présenter des demandes frauduleuses [...]

L'un des arguments favoris des critiques de votre ministère et de ce gouvernement consiste à dire qu'il y a une sorte d'afflux de candidats frauduleux au Canada, et qu'on ne vérifie pas leurs dossiers de sécurité, que ce sont des criminels, des drogués, des porteurs de toutes sortes de maladies, et tout cela. Quand quelqu'un d'aussi crédible que le vérificateur général exprime ce genre d'inquiétudes en termes très francs et très directs, notre rôle de membres de ce comité n'est pas de prendre la défensive, mais au contraire d'essayer de savoir pourquoi il affirme de telles choses et si vous êtes d'accord avec ce qu'il dit, et dans ce cas, ce que vous faites pour y réagir.

Je sais bien que vous parlez d'un plan d'action à l'automne, mais vous avez eu des crédits supplémentaires de 139 millions de dollars et j'imagine que vous n'allez pas attendre l'automne pour les utiliser.

Avez-vous une réponse? En fait, ce sont plusieurs questions que je vous ai posées.

Mme Martha Nixon: Bien sûr.

Je vais commencer et je demanderai à mes collègues de compléter ma réponse. En tant que hauts fonctionnaires du ministère, nous sommes très sensibles au tableau que le vérificateur général a brossé de la situation et nous savons que nous devons le prendre très au sérieux; d'ailleurs je pense que ses commentaires montrent bien que ce ministère a traversé une période problématique à maints égards. Bien souvent, il faut admettre que nous nous sommes concentrés ces dernières années sur la constitution du ministère, sur la mise en oeuvre de lois importantes, sur l'établissement de notre cadre de travail, et que certains des éléments qui ont été soulignés par le vérificateur général sont le résultat des coupures que nous avons subies.

Cela dit, nous sommes prêts maintenant car une bonne partie des éléments essentiels sont en place. Nous avons énormément travaillé sur la loi, nous avons beaucoup travaillé pour mettre en place une nouvelle base de ressources et nous avons fait un énorme effort pour mettre en place les éléments complémentaires concernant les contrôles médicaux, la fraude et les abus et l'assurance de la qualité. Nous n'allons pas attendre le plan d'action de l'automne pour agir sur ces divers éléments. En fait, nous sommes déjà en train de le faire et je crois qu'avec les ressources, avec la loi et avec les mesures administratives que nous mettons en place, nous allons disposer des instruments nécessaires pour progresser et réaliser les améliorations que réclame le vérificateur général.

Si nous examinons les problèmes un par un, nous pourrions parler un peu... Bill pourra parler des problèmes de fraude et d'abus et Joan pourra intervenir sur les questions d'admissibilité médicales, et nous pourrons étudier tout cela en détail. Est-ce que cela vous va?

M. Steve Mahoney: Peut-être pourriez-vous aussi aborder—et ensuite je m'arrêterai peut-être—la question des niveaux ou des cibles. On a dit qu'en fixant la cible à 225 000, le gouvernement faisait preuve d'irresponsabilité. S'il y a autant de fraude, d'abus et de problèmes dans ce système, faut-il réduire nos cibles même si nous ne les atteignons pas? Est-ce que nous exposons les Canadiens à certains risques en les maintenant à un niveau qui est peut-être artificiellement élevé? Je ne propose pas de les réduire. Je dis simplement que certains critiques ont émis ces jugements et qu'il faudrait y répondre de façon claire.

Mme Martha Nixon: Nous allons commencer par...

M. William A. Sheppit (directeur général, Règlement des cas, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration Canada): Merci, Martha.

• 0940

Il est clair, quand on lit les remarques d'introduction du vérificateur général, que nous sommes vulnérables à la fraude et aux abus. Actuellement, n'importe qui peut présenter une demande en racontant n'importe quoi, et c'est à nous de prouver que ce n'est pas la vérité. Comme le vérificateur le souligne, nos agents à l'étranger utilisent des méthodes de détection extrêmement coûteuses et qui peuvent prendre beaucoup de temps. Si nous coinçons des fraudeurs et que nous rejetons leurs demandes d'immigration, ils en présentent une nouvelle le lendemain. Il n'y a aucune sanction administrative.

On passe donc beaucoup de temps à prouver que ces demandeurs ne sont pas admissibles, mais il n'y a aucune sanction. C'est un des problèmes qui, espérons-le, sera réglé avec la loi, car il devrait y avoir une sanction administrative de deux ans, me semble-t-il. Quand on constatera que quelqu'un a essayé de frauder ou a fait de fausses déclarations, on rejettera sa demande et cette personne n'aura plus le droit d'en présenter une pendant deux ans. Cela répond donc à ce problème particulier.

Pour ce qui est de la question générale de la sécurité et de la criminalité, nous avons beaucoup progressé face au crime organisé au cours des 10 dernières années. Nous avons présenté des mesures législatives qui nous permettent de refuser l'accès à des personnes lorsque nous avons des motifs raisonnables de penser qu'elles appartiennent au monde du crime organisé. Comme vous l'avez vu dans The Sopranos, ou dans une saga quelconque sur le crime organisé, les membres sérieux de la pègre ne se voient infliger que des peines mineures lorsqu'ils sont jeunes, et c'est tout. Au fur et à mesure qu'ils montent dans l'organisation, ils échappent complètement aux condamnations car ils font faire les choses par d'autres individus.

Nous avons maintenant la possibilité législative, et je crois que c'est unique au monde, d'interdire à quelqu'un l'accès au Canada si nous avons des motifs raisonnables de penser que cette personne participe à une organisation de crime organisé. Nous n'avons pas besoin d'une condamnation pour cela.

De même, sur le plan de la sécurité, nous avons conclu des protocoles d'entente avec nos partenaires internationaux. Nous échangeons avec les Américains des bases de données sur les terroristes. En ce qui concerne les crimes de guerre modernes, nous avons eu une rencontre avec des Américains, des Britanniques et des Australiens il y a un mois ou deux, et il est clair qu'ils nous considèrent comme le fer de lance des mesures contre les auteurs de crimes contre l'humanité. Là encore, la loi et le programme que nous avons au Canada sont uniques au monde.

Nous sommes intervenus auprès de l'Union européenne, nous avons collaboré étroitement avec le Tribunal pénal international en Yougoslavie, et nous progressons beaucoup dans ces domaines. Le défi bien souvent dans ce genre de cas—le crime organisé, le terrorisme et les crimes de guerre modernes—c'est qu'on est souvent confronté à des allégations et à des informations classifiées. Les choses sont rarement tranchées, il y a beaucoup de zones d'ombre. C'est à ce défi que nous sommes constamment confrontés au ministère, l'équilibre entre les activités d'application de la loi et les activités de facilitation, car nous voulons tous que les formalités soient les plus rapides possible pour les bons immigrants, mais nous souhaitons aussi nous assurer que les gens que nous accueillons sont de bons immigrants et que nous faisons bien toutes les vérifications concernant leur identité, la provenance de leur argent et ce genre de choses.

Donc, c'est toujours un équilibre.

Je vais laisser Joan poursuivre sur les autres questions.

Mme Joan Atkinson (sous-ministre adjointe, Développement des politiques et programmes, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration Canada): Je vais commencer par vous parler de la question des niveaux car je crois que cela prolonge bien ce que disait Bill.

Quand nous sommes venus parler à votre comité des niveaux, nous avons expliqué un peu pourquoi le ministère n'avait pas pu atteindre ses cibles au cours des deux dernières années. Nous avons notamment expliqué que les pays d'origine changeaient. C'est très important en ce qui concerne les questions de fraude, de fausse représentation et d'intégrité du programme, car nous prenons très au sérieux les préoccupations d'intégrité du programme.

• 0945

Si nous n'avons pas pu atteindre les niveaux prévus au cours des deux dernières années—et encore, nous sommes arrivés très près en 1999 avec 95 p. 100 du niveau inférieur de la cible, ce qui était fantastique—c'est en partie parce que les pays d'origine ont changé et que dans les nouveaux pays on ne pouvait pas avoir tout de suite la documentation, ou on pouvait l'obtenir mais c'était de la documentation qui pouvait être achetée à n'importe quel prix et qui n'était pas nécessairement crédible.

Comme le disait Bill, nous voulons faciliter les choses et traiter le plus rapidement possible les demandes des immigrants dont nous avons besoin au Canada, mais nous devons rester constamment vigilants parce que nous fonctionnons dans un contexte où la fraude et la fausse représentation sont manifestes et que nous savons très bien que les candidats peuvent se procurer très facilement des documents frauduleux.

Nous avons donc été obligés de ralentir le traitement pour nous assurer de bien contrôler les risques et de garantir l'intégrité du programme. Mais nous devons en faire encore plus, comme le souligne le vérificateur général.

Bill a parlé des modifications législatives qui vont nous donner de meilleurs instruments pour mieux lutter contre la fraude et les fausses représentations. Entre-temps, nos missions à l'étranger ont déjà pris l'initiative de faire certaines des enquêtes dont parlait Bill pour certains de leurs dossiers afin de dévoiler les fraudes auxquelles nous sommes confrontés.

Nous voulons répartir nos nouvelles ressources de manière stratégique dans ces divers domaines de façon à pouvoir consacrer plus de temps et d'attention à la lutte contre les fraudes et à nos enquêtes, afin d'améliorer les mesures que nous avons déjà prises dans certaines régions du monde pour détecter les fraudes et identifier la façon dont elles se présentent afin de prendre les mesures correctives nécessaires.

C'est donc un travail continu et notre plan d'action parle entre autres de la mise sur pied et du renforcement des activités de lutte contre la fraude pour étendre ces pratiques exemplaires à tout notre réseau. Nous accroissons l'attention et les ressources que nous consacrons à la lutte contre la fraude.

Pour ce qui est d'atteindre les niveaux, comme je le disais, si nous n'avons pas réussi à atteindre nos objectifs, c'est parce qu'il y a de nouveaux pays sources et que nous devons faire preuve d'une vigilance accrue.

Il y a eu d'autres facteurs aussi: les restrictions dont nous avons déjà parlé, la récession économique en Asie en 1997-1998. Il y a toute une série de facteurs.

Pour ce qui est d'atteindre les niveaux, comme nous l'avons dit lorsque nous avons comparu devant votre comité, il faut voir les choses à long terme. Si vous regardez nos plans au cours des 20 dernières années et notre rendement par rapport à ces plans, vous constaterez que nous avons dépassé ces niveaux à certains moments et que nous ne les avons pas atteints à d'autres, mais que sur 19 ou 20 ans nous avons cependant assez bien réussi à respecter les objectifs d'immigration que nous avait fixés le gouvernement.

N'oubliez pas que quand on parle de niveaux, on parle d'une cible, d'un résultat souhaité. Il y a des quantités de facteurs indépendants de notre volonté qui influent sur notre capacité d'atteindre ces objectifs, mais si vous regardez les choses à long terme, vous verrez que dans l'ensemble nos résultats ont été assez honnêtes. Sur 19 ans, on avait prévu d'accueillir 3 467 000 immigrants. En fait, nous en avons accueilli 3 461 000, c'est-à-dire 6 000 seulement de moins que ce qui avait été prévu sur 20 ans.

Encore une fois, toutes sortes de facteurs interviennent et font que nous pouvons dépasser ou ne pas atteindre nos cibles pour une année donnée, et les questions d'intégrité du programme sont un de ces facteurs très importants.

Le président: Merci.

Leon.

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Alliance canadienne): Madame Atkinson, au cours de cette période de 20 ans, on a recouru à une ou deux amnisties générales parce qu'on avait accumulé un arriéré colossal. C'est quelque chose que vous n'avez pas mentionné.

Il y a quatre domaines principaux sur lesquels je voudrais me concentrer aujourd'hui. Je vais commencer par un problème qui me paraît sérieux dans vos relations avec le Parlement. Je ne sais pas pourquoi il y a ce malaise. Je pense que c'est peut-être une sorte de problème général entre les divers ministères et le Parlement, mais c'est quelque chose qui a été signalé par le vérificateur général en 1990 pour la première fois, lorsqu'il a écrit dans son rapport, à la page 3-12, que les informations sur le programme d'immigration transmises au Parlement étaient incomplètes et fragmentaires.

• 0950

La réponse des autorités ministérielles à l'époque a été que le ministère s'était doté d'une nouvelle structure qui permettrait au Parlement d'évaluer l'efficacité et l'efficience du ministère.

Ensuite, en avril 2000, dans son rapport, le vérificateur général revient sur cette question et dit à la page 3-42—et il est très précis—que les informations fournies aux parlementaires sont limitées.

J'aimerais en parler un peu plus. Je sais que votre ministère a un prétendu plan d'action. Le vérificateur général a dit hier qu'il ne considérait pas que c'était un plan d'action, mais je sais qu'il existe. Il a été distribué au comité la semaine dernière. Il en a été question au Comité des comptes publics. En fait, à ce comité, quand j'ai posé une question à la sous-ministre, Mme Cochrane, à ce propos, elle m'a dit que le plan était sur le site Web; ce n'est certainement pas un document secret. C'est bien exact?

Mme Joan Atkinson: Oui.

M. Leon Benoit: Il est publié sur le site Web?

Mme Joan Atkinson: Il est sur notre intranet.

M. Leon Benoit: Intranet?

Mme Joan Atkinson: Il est sur notre site intranet interne, mais ce n'est certainement pas un document secret.

M. Leon Benoit: Mais il n'est pas sur le site public?

Mme Joan Atkinson: Pas encore.

M. Leon Benoit: Mais ce n'est pas un document secret?

Mme Joan Atkinson: Tout le monde peut l'obtenir.

Le président: Ce n'est manifestement pas un document secret maintenant. C'est un document public.

M. Leon Benoit: Mais s'il est public...

Le président: Ce n'est pas...

M. Leon Benoit: Monsieur le président, je vous serais reconnaissant de me laisser poser mes questions comme je le souhaite. Je n'ai pas besoin de vos interventions.

Le président: Écoutez, j'aimerais avoir la vérité. Je ne veux pas que vous laissiez planer des doutes dans l'esprit du public.

Ce document est maintenant public. Il est dans le domaine public. La précision sur l'Internet et l'intranet est satisfaisante.

M. Leon Benoit: Monsieur le président, mes questions avaient pour but de mettre en relief les difficultés que le ministère avait à rendre des comptes au Parlement. Je vous prierais de me laisser poser mes questions. En fait, je vous en serais très reconnaissant.

La sous-ministre a donc dit que ce document figurait sur le site Web du ministère. Je ne sais pas; je ne considère pas que l'intranet fasse partie du site Web du ministère. À mon avis, c'est plutôt une façon d'essayer de garder certaines informations hors de portée de notre comité et du Parlement.

En fait, en ce qui concerne ce tableau que nous avons finalement obtenu, et qui date du 11 avril—je crois que c'est le lendemain du Rapport du vérificateur général ou quelques jours après—je ne vois pas pourquoi on n'aurait pas pu soumettre ce tableau au comité, au moins à ce moment-là, pour nous aider à examiner le Rapport du vérificateur général.

Il faudrait tout de même qu'il y ait une certaine coopération entre le ministère et notre comité et le Parlement d'une manière générale, car nous sommes le principal intermédiaire qui vous permet de rendre des comptes au public. En particulier, quand des documents comme celui-ci ne sont pas publiés sur un réseau public, je crois que c'est préoccupant.

Mme Martha Nixon: Je pense que nous nous sommes concentrés sur notre comparution devant le Comité des comptes publics. Nous avons toujours eu l'intention de rendre ce document public. Nous l'avons déposé au Comité des comptes publics. Nous pensions que vous aviez des liens avec ce comité.

Nous sommes très heureux de déposer ce document auprès de votre comité aujourd'hui. Nous y travaillons depuis un certain temps. Nous avons estimé qu'il était important de le publier sur notre site intranet parce que nous voulons que chacun de nos employés comprenne que nous prenons ce rapport et notre plan d'action très au sérieux. Il est essentiel que chacun d'entre eux comprenne que nous avons délimité un certain nombre de domaines d'action sur lesquels nous devons agir de manière très intensive.

M. Leon Benoit: Je n'essaie pas de savoir pour quelle raison ce document n'a pas été publié sur le réseau public. Je vous encourage simplement à faire votre possible à l'avenir pour nous aider vraiment.

Ce n'est peut-être pas exact, mais quand on constate ce genre de chose, on a l'impression que cela ne correspond pas vraiment au niveau de coopération auquel on s'attendrait et...

Le président: Mais cela inclut aussi les membres du comité, donc...

Mme Martha Nixon: En fait, j'essaie de faire en sorte que notre rapport annuel au Parlement soit un document qui explicitera beaucoup mieux le travail du ministère.

Comme vous le savez, nous faisons chaque année un rapport sur nos plans et priorités qui est tout à fait public. Nous tenons à être aussi transparents que possible. Nous n'avons rien à cacher. Nous avons un programme d'action. Nous avons dit que nous allions nous engager à préciser chacune de ces actions en lui adjoignant un échéancier. Cela aussi sera rendu public.

Monsieur Benoit, nous sommes déterminés à ne rien cacher sur ce que nous avons l'intention de faire.

• 0955

M. Leon Benoit: Cela semble encourageant. J'ai un peu tendance à m'énerver quand je me rends compte que j'ai du mal à obtenir des informations.

Le deuxième exemple est le moteur de recherche du site Web du ministère. Quand je suis devenu critique de l'immigration au Parti réformiste—l'Alliance canadienne—il y a un an et demi, nous sommes allés consulter le site Web et nous avons essayé de nous servir du moteur de recherche pour trouver certaines choses, mais cela ne marche pas. Je m'aperçois maintenant qu'il ne marche pas depuis quatre ans que... Nous pensions que c'était quelque chose qui pouvait être réparé, que c'était quelque chose de temporaire, mais ce moteur ne marche pas. Autrement dit, vous n'avez pas de moteur de recherche permettant de trouver des informations sur le site Web, c'est-à-dire que votre site Web, franchement, ne vaut à peu près rien. Pourriez-vous nous parler un peu de cela?

M. Georges Tsaï (sous-ministre adjoint, Services de gestion, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration): Si vous me le permettez, monsieur le président, nous reconnaissons que notre site Web n'est probablement pas le plus avancé au monde. Nous avons toutefois l'intention de l'améliorer dans le cadre de l'initiative Canada en ligne du gouvernement.

Nous avons établi la structure de gouvernance en vue de la mise en oeuvre du projet et nous respectons les délais fixés par le gouvernement pour cette initiative de branchement en ligne des services gouvernementaux. La première étape dont nous devrons rendre compte sera la mise en place d'un site Web beaucoup plus convivial d'ici la fin de l'exercice.

Par conséquent, même si notre site Web contient des informations très utiles... Le nombre de réponses satisfaisantes est considérable, 85 000 par mois...

M. Leon Benoit: Mais il faut une éternité pour trouver ce que l'on cherche.

M. Georges Tsaï: Je suis d'accord.

M. Leon Benoit: Vous comprenez pourquoi j'ai l'impression qu'on essaie de nous cacher quelque chose. Je ne le crois pas, vous savez; ce n'est pas ce que je dis. Mais c'est l'impression qu'on a.

Ensuite, quand mes collaborateurs ont téléphoné au bureau du ministre au moins deux fois—et j'ai appelé d'autres bureaux aussi, pour tirer les choses au clair—nous n'avons jamais eu de réponse. C'est vraiment inquiétant, vous savez—encore un obstacle à la communication entre mon bureau, le comité, le Parlement en général et le ministère. J'aimerais vraiment que cette situation s'améliore.

Je sais que je donne peut-être l'impression de chercher la petite bête, mais même dans le document que nous avons aujourd'hui, il n'y a pas de traduction. Il y a une partie en anglais et une partie en français.

Je suis arrivé ici tard. Je n'ai pas eu d'autre choix que de le lire très rapidement, et il y en a une partie qui est en français, or je ne parle pas très bien cette langue. Alors, si vous pouviez...

Mme Martha Nixon: Nous nous ferions un plaisir de vous donner...

M. Leon Benoit: Encore une fois, je ne veux pas avoir l'air... Je me demande simplement pourquoi il est si difficile d'obtenir ces informations quelquefois. Je vous serais vraiment reconnaissant de vous en occuper. Je crois que c'est très important. Vous comprenez qu'il est important que le ministère rende des comptes au Parlement, je suis sûr que vous le comprenez très bien.

Mme Martha Nixon: Monsieur Benoit, je crois que vous nous avez déjà entendu parler de nos efforts pour améliorer le service à la clientèle; en particulier, nous avons décidé d'essayer de mieux répondre aux députés. Nous voulons essayer de répondre le plus rapidement possible. Nous avons énormément de demandes qui concernent souvent la situation de certains dossiers, ce genre de choses.

L'un des premiers projets que nous voulons mettre en oeuvre pour exploiter les nouvelles technologies consistera à trouver un moyen de communiquer en ligne les informations sur ces dossiers, par exemple, en tenant compte de tous les impératifs de respect de la confidentialité. Je crois que nous essayons sincèrement de répondre de façon beaucoup plus efficace aux questions de députés, et j'espère que la prochaine fois que vous nous téléphonerez, vous n'aurez pas de difficultés

M. Leon Benoit: Je vous en remercie.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): J'aimerais avoir une précision avant de donner la parole à M. Bryden. Le document dont vous parliez, et qui est rédigé en partie en français, ce sont les observations préliminaires. Est-ce bien...

M. Leon Benoit: Oui. Mon exemplaire est en partie en anglais et en partie en français.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Oui, le mien aussi. Évidemment, nous avons la traduction mais il est normal que ces textes nous soient remis le jour même.

M. Leon Benoit: Dans les deux langues, je crois.

• 1000

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Dans les deux langues, mais le jour même. Nous ne les recevons pas à l'avance, n'est-ce pas?

M. Leon Benoit: J'aimerais bien les avoir à l'avance, en particulier quand cela vient du ministère. Il n'y a pas de raison de ne pas nous les faire parvenir la veille pour que nous puissions y jeter un coup d'oeil.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): À tous les comités auxquels j'ai participé, on reçoit le texte le jour même, y compris au Comité des comptes publics, quand c'est le vérificateur général.

Je n'ai pas besoin de votre aide, soit dit en passant. Vous travaillez pour ce monsieur et pas pour moi. Vous pouvez donc garder vos motions.

À ma connaissance, les observations préliminaires sont communiquées le jour même parce qu'elles sont considérées comme confidentielles, à ce qu'il me semble.

Enfin, je voulais simplement que ce soit précisé.

Monsieur Bryden.

M. Leon Benoit: Je dis simplement que ce document est en...

M. John Bryden: Le témoin a lu ce texte, et si vous aviez été là, monsieur Benoit, vous auriez pu en entendre l'interprétation. Je pense donc qu'il est inutile de nous éterniser là-dessus.

Pourrions-nous passer à autre chose?

Vous avez dit dans votre témoignage que les pays d'origine changeaient. Pourriez-vous préciser cela?

Mme Joan Atkinson: Certainement. Nous avons effectivement constaté un changement important dans les pays d'origine. La Chine est devenue notre premier pays source, depuis 1998.

Auparavant, c'était Hong Kong. En 1996 et 1997, Hong Kong était le premier d'origine. Il est passé au quatrième rang en 1998 et il ne fait même plus partie des 10 premiers maintenant. C'est un changement important.

C'est important non seulement en terme de qualité des immigrants, parce que nous accueillons des immigrants de très haute qualité en provenance de la République populaire de Chine, des travailleurs immigrants éminemment qualifiés et aussi des hommes d'affaires, etc. Mais ce que ce changement a signifié pour notre contexte de travail, c'est une augmentation du nombre de demandes provenant d'une région où il est beaucoup plus difficile d'obtenir les informations dont nous avons besoin pour traiter rapidement et efficacement une demande.

Cela veut dire que nous avons dû passer plus de temps à vérifier les informations et la documentation qui nous étaient soumises dans ces demandes pour nous assurer que l'identité des demandeurs était la bonne, qu'ils avaient effectivement les qualifications et les ressources financières qu'ils prétendaient avoir, etc. Et le vérificateur général a souligné à juste titre dans son rapport que c'est quelque chose que nous devons non seulement continuer à faire, mais faire avec encore plus d'attention.

De plus, l'Inde demeure notre deuxième pays source. Le Pakistan était auparavant notre sixième pays source et il est maintenant devenu le troisième. Là encore, c'est une région du monde d'où nous accueillons des immigrants de très haute qualité, mais c'est aussi une région pour laquelle nous devons continuer à vérifier avec beaucoup de vigilance les informations et les documents qui nous sont fournis par les demandeurs.

M. William Sheppit: Si je peux me le permettre, j'aimerais vous expliquer plus concrètement ce que cela signifie pour l'agent des visas à l'étranger. À Hong Kong, par exemple, il y avait un régime politique à l'occidentale, un régime judiciaire à l'occidentale et une règle du droit. Dans ce cas-là, on pouvait compter sur une police extrêmement fiable et efficace. Il y avait une commission indépendante de lutte contre la corruption qui s'occupait précisément du crime organisé en Asie. Il y avait un excellent système d'enregistrement des gens d'affaires et un régime fiscal analogue à celui du Canada.

Très souvent, quand on recevait des documents, on pouvait prendre une décision uniquement sur la foi de ces documents. Si l'on voulait préciser quelques points, on pouvait facilement convoquer le candidat à une entrevue. La grande majorité d'entre eux parlaient l'anglais, et une entrevue d'une demi-heure suffisait à tirer les choses au clair.

Dans le cas de la Chine, nos agents à l'étranger sont souvent obligés d'aller voir sur place si l'entreprise mentionnée existe véritablement. On doit faire appel à des interprètes. Les entrevues sont beaucoup plus poussées et prennent beaucoup plus de temps et évidemment, le nombre d'entrevues qu'un agent des visas peut avoir en une journée n'est absolument pas le même.

M. John Bryden: Est-ce que nous contrôlons ou est-ce que nous devrions contrôler cette liste de pays sources? Savons-nous dans lesquels il y a le plus de trafic? Est-ce que nous essayons d'enrayer cela?

Mme Joan Atkinson: La politique d'immigration du Canada est universelle et s'applique à tous les individus, quelle que soit leur origine. Les critères de sélection sont conçus de manière à nous permettre de sélectionner des personnes qui vont pouvoir s'installer au Canada et y réussir sur le plan économique, quel que soit leur pays d'origine.

• 1005

La loi actuelle nous permet de limiter certaines catégories d'immigrants, mais certainement pas en fonction de leur pays d'origine. Notre politique d'immigration repose depuis de très nombreuses années, et elle va continuer, sur le principe de l'universalité, quel que soit le pays d'origine.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Monsieur Bryden, je suis le suivant sur la liste, mais je vais vous laisser mes cinq minutes si vous voulez prendre les 10 minutes.

M. John Bryden: Merci. Je vais prendre tout le temps dont je pourrai disposer.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Allez-y.

M. John Bryden: J'ai beaucoup de questions que je voudrais aborder.

Je vous explique où je veux en venir, puisque nous avons l'occasion d'en discuter. J'ai souvent été fasciné de voir qu'en Europe beaucoup de travailleurs étrangers dans des pays comme la France ou particulièrement l'Allemagne n'ont jamais l'occasion d'en devenir citoyens. Ce sont des gens qui ont de remarquables compétences.

Je me suis demandé pourquoi un pays comme le Canada ne pouvait pas cibler ces personnes-là pour en faire des immigrants potentiels. Je pense en particulier aux personnes d'origine turque qui travaillent en Allemagne et sont extrêmement qualifiées. Est-ce que nous pouvons faire quelque chose pour les attirer?

Mme Martha Nixon: Nous avons probablement tous notre point de vue là-dessus, mais je dirais simplement que cela fait partie de tout le débat que nous devons avoir lorsque nous envisageons un plan d'immigration pluriannuel et que nous essayons de voir quelles initiatives nous pouvons prendre pour atteindre la cible de 1 p. 100 dont la ministre a parlé.

Dernièrement, nous n'avons pas beaucoup pris l'initiative d'aller mener des campagnes dans ce genre de pays pour attirer ces immigrants, mais sachant que de nombreux pays vont essayer d'attirer de bons immigrants prometteurs au cours des prochaines années et que nous voulons continuer nous-mêmes à recruter des personnes possédant de grandes qualités, nous devrons peut-être envisager ce genre de choses.

Mme Joan Atkinson: Peut-être pourrais-je ajouter quelque chose. Comme l'a dit Martha, nous n'avons peut-être pas pu entreprendre activement des activités de promotion et de recrutement aussi poussées que nous l'aurions souhaité en raison des ressources dont nous disposions.

Nous avons mené des campagnes de promotion et de recrutement en partenariat avec les provinces. La ministre a notamment dit que nous devions trouver des moyens de détourner les immigrants des trois grands centres urbains pour les orienter vers les petites communautés et les petites villes des provinces qui ont désespérément besoin de ces personnes. Nous avons donc signé avec plusieurs provinces des accords sur les candidats d'une province. C'est le Manitoba qui amené le plus activement ce programme, et en fait ses activités de promotion et de recrutement pour attirer des immigrants a été une réussite remarquable.

Nous avons aidé et appuyé toutes les provinces qui menaient ces activités de promotion et de recrutement. Nous avons nous-mêmes essayé de puiser, dans la mesure de nos modestes ressources, dans les bassins de personnes dont vous parliez précisément.

Aux États-Unis, par exemple, il y a tout un bassin de personnes qui sont arrivées aux États-Unis dans le cadre du programme de visa H-1B, le visa pour travailleur temporaire. Quand leur visa expire, beaucoup d'entre eux cherchent un endroit où ils pourront s'installer de manière permanente, et n'ont pas nécessairement envie de retourner dans leur pays d'origine.

C'est une source potentielle d'immigrants très qualifiés dans laquelle nous voulons continuer à puiser. Nous avons réussi, dans la limite de nos modestes ressources, à faire la promotion du Canada pour encourager ces personnes à immigrer chez nous chaque fois que nous en avons eu l'occasion.

M. John Bryden: Si je peux me le permettre, au nom au moins d'une personne au Parlement, je vous exhorte à continuer de prendre l'initiative dans ce domaine.

Puis-je poursuivre?

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Il vous reste encore un peu de temps.

M. John Bryden: Il y a autre chose dont j'aimerais bien que vous nous parliez un peu. Quand on parle de politique à long terme et d'élaboration de programmes, comment les choses se passent-elles sur le plan administratif dans votre ministère? Je vois que nous avons affaire à des sous-ministres et à des sous-ministres adjoints. Comment élabore-t-on les plans? Est-ce que votre sous-ministre est là avec les sous-ministres adjoints? Comment se passent les choses?

• 1010

Mme Martha Nixon: Il n'y a que nous trois. Vous avez toute l'équipe au complet ici.

M. John Bryden: Dans ce cas, comment élaborez-vous vos politiques? Quel est le mécanisme?

Mme Martha Nixon: Je vais commencer et ensuite je laisserai la parole à Joan qui a des années d'expérience dans ce domaine.

C'est probablement un peu comme pour les autres ministères. En général, une conversation avec la ministre permet de dégager une orientation générale. Ensuite, il y a des gens au niveau du directeur général et aux paliers inférieurs qui travaillent sur un projet de politique. Dans l'ensemble, ils partent d'un document qui énonce divers scénarios ou diverses idées. Ce document est ensuite généralement discuté avec le directeur général et au niveau des SMA en vue d'une discussion des sous-ministres et de la ministre.

Donc, la plupart du temps, c'est un processus par étapes auquel participent souvent les provinces et des gens que nous consultons à l'extérieur du ministère. Selon le sujet et sa portée, les consultations peuvent être plus ou moins officielles ou approfondies.

Joan a accompli ce genre de choses bien des fois.

Mme Joan Atkinson: Merci, Martha.

Comme l'a dit Martha, la démarche peut partir de la base ou du sommet. La ministre peut formuler une idée ou le souhait d'étudier une initiative particulière, et à ce moment-là le ministère reprend cette idée et la développe de la manière qu'a décrite Martha.

Les idées peuvent aussi partir de la base. Par exemple, s'il y a un problème au niveau de l'exécution du programme, les gestionnaires et les responsables hiérarchiques signalent qu'il faut y trouver une solution. S'ils peuvent le résoudre localement en modifiant localement leurs procédures, ils le font. Si cela implique un changement de politique parce qu'on n'atteint pas l'objectif souhaité ou qu'il y a un problème dans l'exécution de cette politique, ils le signalent à la direction du ministère et nous élaborons une nouvelle politique à partir de la base parce que c'est de là qu'est partie la demande.

Dans les deux cas, que cela parte de la base ou du sommet, nous avons au ministère—et je pense que c'est probablement la même chose dans beaucoup d'autres ministères—un comité de la politique et des opérations auquel participent ensemble les cadres opérationnels et les cadres politiques. Quand nous élaborons nos politiques, nous tenons à être certains qu'elles sont fondées sur la réalité opérationnelle parce que cela ne sert à rien d'élaborer une politique qui ne pourra pas être appliquée concrètement. Nous prenons donc soin, lorsque nous élaborons une politique, de faire participer les agents opérationnels dès le début aux discussions afin de déterminer si cette politique est réaliste et comment elle peut être mise en oeuvre, avant d'aller plus loin.

Comme l'a dit Martha, pour toutes les questions de politique publique au gouvernement, nous travaillons beaucoup au niveau horizontal, c'est-à-dire que nous avons des discussions non seulement avec nos ministères partenaires au niveau fédéral—et dans le domaine de l'immigration nous en avons plusieurs—mais aussi avec DRHC, Santé Canada, la GRC, le SCRS, l'Agence canadienne des douanes et du revenu, etc. Nous collaborons avec toute une série de partenaires au niveau fédéral parce que notre programme touche à une foule d'autres domaines de la politique publique.

Nous avons aussi une collaboration extérieure avec les provinces et les territoires concernés par les politiques que nous élaborons et avec divers intervenants, des ONG dont certaines vous sont bien connues puisqu'elles ont comparu devant votre comité. Nous collaborons avec les représentants de l'industrie et du monde des affaires pour nous assurer d'avoir la plus grande variété possible de points de vue sur nos politiques. Enfin, comme l'a dit Martha, une fois que nous avons élaboré de façon assez poussée nos politiques, nous en arrivons à la discussion avec la ministre qui prend la décision finale avec ses collègues du Conseil des ministres.

M. Georges Tsaï: Peut-être pourrais-je ajouter simplement que quand nous discutons d'un nouveau projet au niveau du Comité des politiques et des opérations, nous examinons aussi toutes les répercussions qu'il aura sur le plan des ressources, qu'il s'agisse de la technologie, des ressources humaines ou des ressources financières.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Merci.

Leon.

M. Leon Benoit: J'aimerais parler des demandes présentées à l'étranger. Comme vous le savez sans doute, j'ai déjà abordé la question avec le vérificateur général hier. Évidemment, nous parlons ici des demandes présentées dans un tiers pays. Peut-être faudrait-il voir les choses de façon un peu différente, car il n'y a pas de bureau dans tous les pays, en tout cas disons que ce n'est pas évident.

• 1015

De 1992 à 1998, le nombre de demandes est passé de 7 600 à 39 000; c'est assez phénoménal. Plus de 48 p. 100 des demandes reçues en 1998 étaient des demandes provenant d'immigrants à vocation économique. C'est donc un pourcentage considérable. Le vérificateur général en parle abondamment dans son rapport. Je sais que plusieurs cadres ministériels ont aussi dit que cette situation posait un problème.

À votre avis, pourquoi y a-t-il eu une telle augmentation? Quatre fois plus de demandes en quelques années seulement, c'est impressionnant.

Mme Martha Nixon: Je pense qu'il faut considérer le traitement des demandes à l'étranger à la fois sous l'angle de la gestion des risques et sous celui du service à la clientèle, car nous devons tenir compte des deux. Si vous regardez le monde tel qu'il fonctionne aujourd'hui, la façon dont les entreprises fonctionnent et la façon dont les gens se déplacent, vous comprenez que quelquefois les candidats choisissent un bureau plutôt qu'un autre parce que cela leur convient mieux.

Nous examinons soigneusement la question du traitement des demandes à l'étranger depuis plusieurs années. Nous avons essayé d'améliorer l'efficacité de nos méthodes de traitement en prenant comme modèle les centres d'affaires. Nous avons désigné neuf centres d'affaires et quatre sous-centres en 1998, afin d'avoir un noyau d'experts pour pouvoir traiter les demandes des gens d'affaires dans ces centres au lieu qu'elles soient dispersées un peu partout car il est très difficile de disposer de ces connaissances et de cette expertise dans tous ces endroits. Donc, nous examinons de près dans quelle mesure cela influe sur les choix des gens d'affaires et sur le fonctionnement du programme dans ce secteur.

Nous venons de décider, en fonction des commentaires de nos propres agents et de notre expérience... Nous avons maintenant dans nos bureaux un protocole régissant la façon dont doivent être traitées les demandes à l'étranger. Les agents de ces bureaux doivent contacter le bureau des visas le mieux qualifié pour vérifier le contexte d'origine du demandeur. S'il s'agit d'un Indien qui présente sa demande à Los Angeles, le bureau de bureau de Los Angeles, s'il a besoin de renseignements complémentaires, va contacter le bureau de Delhi pour obtenir ces renseignements.

Nous reconnaissons aussi...

M. Leon Benoit: Vous dites que vous avez désigné un bureau particulier pour traiter les demandes des personnes venant d'une région donnée du monde?

Mme Martha Nixon: Non. Dans le cas de l'immigration des gens d'affaires...

M. Leon Benoit: Uniquement les gens d'affaires. Pourquoi cette disposition n'a-t-elle pas été étendue à tous les immigrants qui contribuent à l'économie? Cela me paraît tellement logique. Ce serait un grand pas vers la solution d'un problème délicat.

M. William Sheppit: Il ne s'agit pas tellement de désigner des bureaux qui disposent de l'expertise nécessaire; c'est simplement que le bureau responsable du pays d'où vient la personne est manifestement mieux renseigné qu'un bureau situé aux États-Unis par exemple, Si quelqu'un vient de l'Inde, vit en Inde, et fait sa demande dans un bureau situé aux États-Unis, les agents de ce bureau vont renvoyer la candidature et toutes les questions qu'ils ont sur le contexte, les références et les qualifications du candidat au bureau situé en Inde pour qu'il vérifie tout cela. Il ne s'agit pas de désigner des bureaux particuliers; c'est simplement que les agents du bureau situé sur place ont plus d'informations qu'un bureau situé à l'autre bout du monde.

M. Leon Benoit: Mais on ne vérifie pas auprès d'autres bureaux si d'autres demandes ont été présentées?

M. William Sheppit: Cela fait partie de cette procédure.

M. Leon Benoit: Dans tous les bureaux? Autrement dit, quand quelqu'un présente une demande, on vérifie auprès de tous les autres bureaux que cette personne n'a pas déjà présenté une demande dans un autre bureau?

Mme Joan Atkinson: On peut le faire avec notre système de traitement informatisé des demandes d'immigration. Vous pouvez avoir accès à cette base de données mondiale à partir de n'importe quel bureau dans le monde.

M. Leon Benoit: On peut, mais est-ce qu'on le fait dans tous les cas?

Mme Joan Atkinson: Oui. Cela fait partie du protocole dont parlait Martha. On vérifie dans la base de données mondiale s'il n'y a pas déjà eu une autre demande. Si une demande a été présentée à un autre bureau, comme le disait Martha, on contacte ce bureau pour obtenir des précisions.

• 1020

Mme Martha Nixon: Je crois qu'il est important de bien préciser que nous avons essayé de pondérer les problèmes, et que nous essayons en particulier de mener à bien un projet pilote de service à la clientèle. Je pense que nous en avons déjà parlé au comité. Nous essayons de voir si nous ne pourrions pas avoir un service à la clientèle plus efficace en centralisant le contrôle des demandes au Canada. Nous essayons de voir si nous pouvons rendre le système plus efficace en éliminant certains des problèmes liés au traitement des demandes à l'étranger et en mettant sur pied un projet pilote de traitement au Canada.

La question est de savoir comment on peut centraliser l'expertise nécessaire pour répondre à des demandes venant d'une telle diversité d'endroits dans le monde. Nous pensons que nous avons maintenant la possibilité d'importer ou de faire venir une partie de ces compétences des bureaux situés à l'étranger, mais nous allons nous fixer un calendrier d'évaluation très rigoureux pour ce projet pilote. Nous allons faire l'expérience avec les demandeurs d'un nombre limité de bureaux des visas. Et nous espérons que d'ici deux ans nous aurons une bonne réponse sur la question des demandes à l'étranger, nous saurons si cela marche ou non.

Évidemment, il faut toujours tenir compte en même temps du service à la clientèle. Si l'on a affaire à un citoyen indien qui vit à Los Angeles, est-il juste de lui dire qu'il doit repartir à Delhi pour que sa demande de visa soit traitée? Est-ce qu'on trouve que c'est un bon service à la clientèle? Pourtant, nous savons que nous devons trouver un moyen de transférer toute l'expertise disponible à Delhi soit à Los Angeles, soit à une unité centrale de traitement au Canada.

Nous allons donc devoir déterminer la bonne façon de procéder, en pesant le pour et le contre.

M. Leon Benoit: Je pense que bien des gens seraient très heureux, même dans le cas que vous venez de mentionner, de repartir à Delhi pour présenter leur candidature et fournir les informations nécessaires si la procédure prenait trois fois moins de temps. Si vous pouvez améliorer le système de manière à accélérer radicalement le traitement des données, je crois que les candidats seront bien souvent prêts à accepter cela.

L'unité centralisée est certainement une option possible, mais il y en aurait une autre qui serait d'exiger que les candidats présentent leur demande à leur bureau local dans pratiquement tous les cas. Il faudrait prévoir des exceptions, mais dans la plupart des cas ce serait une possibilité. Avez-vous envisagé de ne plus autoriser les demandes à l'étranger?

Mme Martha Nixon: Eh bien, la loi actuelle nous permet de dire à des candidats qu'ils doivent présenter leur demande à certains endroits, et c'est ce que nous avons fait avec ce principe du centre d'affaires. Donc nous envisageons effectivement cette possibilité. Nous en discutons et nous espérons que le projet pilote que nous entreprenons va nous éclairer. Mais je crois qu'il faut aussi envisager diverses autres options pour atteindre notre objectif d'accroissement de notre efficacité par toutes sortes de mesures.

M. Leon Benoit: Actuellement, nous avons des consultants en immigration qui recherchent des clients, et qui, quand ils en trouvent un qui veut immigrer au Canada, essaient de trouver le bureau qui à leur avis donnera les meilleurs résultats à ce client particulier, en fonction de son pays d'origine, de sa situation, de son contexte, etc. J'imagine que si j'étais candidat à l'immigration, c'est ce que j'attendrais du consultant en immigration que je paierais. Mais quand il y a autant de différence... Comme le soulignait le vérificateur général, il y a un énorme problème d'incohérence des décisions prises par des bureaux différents face à des situations identiques. Le contexte peut être le même, et pourtant la décision sera très différente d'un bureau à l'autre. Tant que ces écarts demeureront, les candidats essaieront de choisir le bureau qui leur convient le mieux, tant que ce sera autorisé.

Mme Martha Nixon: Il y a une chose sur laquelle nous nous sommes particulièrement concentrés—et nous allons accroître nos efforts dans cette direction—c'est la mise en place d'un système d'assurance de la qualité. Nous avons demandé à Conseils et Vérification Canada de nous aider à élaborer un système de ce genre dans le cadre de notre initiative d'amélioration du service à la clientèle. Nous avons déjà un dispositif d'assurance de la qualité dans certains bureaux à l'étranger et au Canada, mais nous savons bien qu'il ne fonctionne pas de façon uniforme. Il faut que nous soyons en mesure de contrôler, comme vous le dites, l'efficacité avec laquelle les bureaux traitent ces demandes et l'intégrité de leur fonctionnement durant toute la procédure.

• 1025

Nous vous communiquerons donc nos plans pour la mise en oeuvre de cette initiative à laquelle nous accorderons une très haute priorité au cours de l'année prochaine.

M. Leon Benoit: Tout de même, le vérificateur général soulignait déjà ce problème d'incohérence dans son rapport de 1990. Dix ans après, vous êtes en train de me dire que c'est seulement maintenant que vous allez essayer de mettre en place un programme pour assurer un fonctionnement plus uniforme du système. J'aimerais bien savoir ce qui s'est passé pendant ces 10 ans?

Mme Martha Nixon: Le vérificateur général avait dit il y a 10 ans que nous devions déléguer plus de pouvoir au personnel local. Nous avons suivi cette orientation, et cette année il nous accuse de donner trop de pouvoir au personnel engagé localement et de mal agir...

M. Leon Benoit: Enfin, je crois que ce qu'il dit, c'est que vous devez sélectionner votre personnel avec beaucoup plus de soin et que vous devriez aussi avoir des vérifications constantes pour détecter les problèmes. Voilà ce qu'il dit. Soyons justes envers le vérificateur général.

Mme Martha Nixon: Nous prenons des mesures pour améliorer notre capacité de vérification, et Georges pourra vous en parler. Nous allons aussi accroître la formation. En matière de formation, nous avons probablement accru d'environ 50 p. 100 au cours des deux dernières années les ressources consacrées à notre budget de formation par rapport au montant que nous avions auparavant. Nous avons fait un gros effort pour donner à nos agents à l'étranger et à nos cadres qui partent à l'étranger une formation plus poussée, en sachant bien que c'était un investissement rentable. Nous avons aussi mis sur pied un excellent programme de formation pour nos agents d'immigration désignés à l'étranger, et ces agents viennent régulièrement au Canada suivre une formation qui leur permet de mieux faire leur travail.

M. Leon Benoit: Évidemment, le vérificateur général a dit que dans l'ensemble les agents du ministère sont très compétents, et souvent très bien formés... Il dit des choses très positives. C'est d'ailleurs une opinion que je partage généralement à l'égard de la fonction publique, qu'il s'agisse du ministère de l'Immigration ou d'autres secteurs. Je pense qu'il faut accroître et améliorer la formation, mais que cela ne va pas résoudre tout le problème. En dépit de ce que dit le vérificateur général au sujet de la compétence et de la bonne volonté des fonctionnaires, ces problèmes sont toujours là.

J'ai tendance à en conclure qu'il s'agit d'un problème de gestion. Si vous avez des gens compétents, il faut leur donner les outils, le système et la loi—et il ne s'agit pas simplement de gestion, il faut que le gouvernement ait une loi qui leur permette de fonctionner de façon efficace, en particulier en ce qui concerne le problème des demandes à l'étranger. C'est un énorme problème. J'aimerais avoir vos impressions sur...

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Je crois que je vais devoir vous demander de terminer sur cette remarque. Je pense que nous aurons l'occasion de vous redonner la parole.

M. Leon Benoit: Oui. Puis-je tout de même poser cette petite question?

Le vice-président (M. Steve Mahoney): D'accord. Encore une.

M. Leon Benoit: J'aimerais savoir ce que vous pensez de la gravité de ce problème des demandes à l'étranger et, si vous pensez qu'on peut le régler, ce que vous pensez de la méthode que vous proposez ou dont vous parlez à titre de projet pilote, ou de l'idée de limiter étroitement les possibilités de demandes. Dans quelle mesure ces solutions permettraient-elles de régler votre problème de manque de ressources au ministère et de faire mieux fonctionner le système?

Mme Martha Nixon: Tout d'abord, permettez-moi de vous remercier pour vos remarques au sujet de notre personnel. Nous sommes très encouragés de voir le vérificateur général dire que nos employés sont des gens très professionnels et très dévoués. Je ne suis à ce ministère que depuis deux ans environ, et je dois dire que je n'ai jamais vu des collaborateurs aussi motivés par leur travail.

Pour les demandes à l'étranger, je crois que la question est plus compliquée que cela. Je pense que le traitement à l'étranger est un des facteurs. Je pense qu'il faut voir les problèmes soulevés par le vérificateur général comme un vaste ensemble. Il y a certainement une question d'outils et de capacité, de mesures administratives nécessaires au sein de notre administrative, et nous l'avons reconnu. Je pense que nos collaborateurs seront encouragés de savoir que nous sommes sur le point d'avoir une nouvelle loi, que l'on a reconnu qu'il fallait nous donner plus de ressources, que nous allons pouvoir avoir plus d'ACI, plus d'agents à l'étranger.

Nous avons des dispositifs qui devraient nous permettre de mieux transférer les informations d'un bureau à un autre qui en a besoin. Nous aurons un meilleur accès à ces informations.

• 1030

La question de l'étranger est délicate. Nous avons besoin d'un réseau dans le monde entier. Nous devons pouvoir être accessibles localement. Nous devons pouvoir réagir à une main-d'oeuvre qui se mondialise de plus en plus et qui n'est plus localisée à un endroit particulier, mais qui se déplace. Je pense que nous n'avons pas toutes les réponses.

Nous espérons que le projet pilote de centralisation nous apprendra certaines choses. Nous devons continuer à discuter avec nos collaborateurs. Nous devons essayer de voir si les améliorations que nous proposons nous permettent de travailler de façon plus efficace. Je serais heureuse de revenir sur cette question lorsque nous aurons fait certains progrès, car je crois qu'elle est importante. J'en suis bien consciente.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Merci beaucoup.

Avant de donner la parole à M. Bryden, j'aimerais poser une ou deux questions, si vous me le permettez.

Accélérer la procédure de traitement semble être la bonne chose à faire, mais le revers de la médaille, c'est qu'on risque d'avoir plus de fraude, des contrôles médicaux bâclés, peut-être pas assez de contrôles de sécurité et ce genre de choses, en particulier pour les dossiers médicaux. Hier, j'ai précisément demandé si le problème était lié à la quantité d'examens médicaux qui sont faits ou à leur qualité. Je me souviens qu'on m'a répondu que c'était la qualité de ces examens.

J'étais à Nairobi il n'y a pas longtemps, et je me souviens des examens médicaux qu'on fait là-bas. Nous avions notre propre équipe médicale fantastique, qui est peut-être partie maintenant. Je crois que ces agents allaient partir pour leur affectation suivante. Mais nous utilisons du personnel médical local. Avons-nous dans un endroit comme Nairobi la même qualité qu'à Londres, par exemple, où nous aurions des gens plus formés à la médecine occidentale et qui auraient peut-être une formation différente? Je ne sais pas si je devrais vraiment parler de meilleure formation. Il y a aussi des problèmes très différents. L'un des problèmes qui se posent à Nairobi est de savoir s'il faut faire des tests obligatoires de détection du sida. La rapidité est donc peut-être un objectif louable, mais il ne faut pas qu'elle se paie par une augmentation de la fraude.

Soit dit en passant, j'ai vu les agents faire un contrôle informatique d'un candidat lors d'une entrevue, et j'ai vraiment été très impressionné par la vitesse à laquelle ils ont obtenu les renseignements dont ils avaient besoin pour prendre leur décision. Ils ont rejeté la demande en raison des informations qu'ils ont obtenues sur leur ordinateur. Je pense donc que ce système fonctionne très bien.

L'autre question—et vous pourrez peut-être répondre à toutes les questions en même temps—concerne vos rapports avec des organisations comme le SCRS. Est-il raisonnable de s'attendre à ce que nos agents des visas aient le bagage nécessaire pour se prononcer sur des questions techniques comme les dossiers médicaux ou des informations qui pourraient relever du SCRS ou de Santé Canada?

Mme Joan Atkinson: Je vais d'abord vous parler de l'aspect médical. Comme vous le précisez, monsieur le président, nous faisons des évaluations médicales à l'étranger en nous servant des réseaux de médecins locaux désignés. Ces médecins sont soigneusement choisis et contrôlés. Le médecin agréé basé au Canada est chargé d'effectuer les contrôles appropriés et d'assurer le contrôle de la qualité du travail des médecins désignés du réseau de son secteur d'action.

On peut certainement pousser plus loin la surveillance et le contrôle de la qualité du travail des médecins désignés du réseau, et c'est probablement l'une des questions auxquelles faisait allusion le vérificateur général. Nous l'avons reconnu, et c'est un problème auquel nous voulons nous attaquer dans nos plans de vérification et d'examen des diverses activités du ministère.

Les agents médicaux ont eu beaucoup de difficulté à faire tous les contrôles de qualité et à assurer toute la surveillance qu'ils auraient voulue auprès des médecins désignés du réseau en raison de la réduction de nos ressources. Par suite de l'examen des programmes, le nombre d'agents médicaux et d'agents des visas a été réduit.

• 1035

Comme vous l'avez sans doute constaté quand vous étiez à Nairobi, les médecins agréés sont actuellement responsables non seulement de l'évaluation médicale en vue de l'immigration, mais aussi de la santé dans la fonction publique et de l'hygiène du milieu professionnel. Dans un endroit comme Nairobi, le médecin agréé a une tâche colossale. Il est responsable non seulement du programme d'immigration et du traitement de ces examens médicaux, mais aussi de la santé et de la sécurité des Canadiens postés à l'étranger dans cette région—pas seulement au Kenya, mais dans une très vaste zone. C'est donc certainement l'un des domaines auxquels nous allons continuer à accorder énormément d'attention.

Nous essayons aussi d'avoir une certaine constance de qualité dans les évaluations médicales des médecins agréés, grâce à des directives, des procédés et des démarches d'évaluation normalisés. Comme vous le savez, nous avons un examen médical normalisé pour tout le monde dans le monde entier, avec certains tests de routine. Chacun des médecins agréés que nous choisissons reçoit des informations et une formation pour effectuer ces examens médicaux pour le Canada.

Dans certaines régions du monde, nous envisageons aussi de faire appel à d'autres organisations pour nous aider éventuellement à faire ces examens médicaux, par exemple l'Organisation internationale pour les migrations. Quand c'est possible, nous pouvons profiter des services de cette organisation dans certaines régions du monde. Ce sont des domaines auxquels nous accordons beaucoup d'attention.

Pour ce qui est des tests de routine, vous avez parlé du test de dépistage du VIH à Nairobi. Comme nous l'avons déjà dit à votre comité ainsi qu'au Comité des comptes publics, et comme Martha l'a signalé dans son allocution d'ouverture, nous avons l'intention de moderniser nos examens médicaux pour les immigrants. Nous avons l'intention d'envisager une série de tests de routine pour le dépistage du VIH et d'autres maladies.

Nous avons demandé à Santé Canada de nous communiquer des informations scientifiques qui nous permettront de moderniser nos examens médicaux pour les immigrants et de faire des contrôles adéquats sur les personnes qui veulent venir au Canada, en recherchant non seulement les maladies infectieuses, mais aussi certaines maladies ou certains états qui relèvent de notre notion de fardeau excessif. Nous espérons pouvoir modifier très prochainement notre régime d'examens médicaux pour l'immigration.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Ensuite, il y a l'aspect de ma question qui concerne le personnel: peut-on raisonnablement s'attendre à ce qu'un agent des visas soit à la fois un étudiant en médecine, un super-détective, ce genre de choses.

Mme Joan Atkinson: On ne peut pas demander à un agent des visas d'être un étudiant en médecine, et ce n'est pas ce que nous attendons de lui. C'est pour cela que nous avons des médecins agréés à l'étranger, qui ont évidemment une formation en médecine.

Le médecin agréé évalue les résultats de l'examen médical pratiqué par le médecin désigné et détermine si le candidat peut être ou non admis au Canada. Quand l'agent des visas reçoit les informations transmises par le médecin agréé, il vérifie si elles sont en bon ordre et s'il n'y a pas de contradictions apparentes dans la décision communiquée par le médecin agréé. Mais c'est surtout le jugement du médecin agréé et du médecin désigné qui joue, pas celui de l'agent des visas.

M. William Sheppit: Pour poursuivre sur ce sujet, en ce qui concerne les super-détectives, comme dans le cas du médecin, les avis techniques sont fournis par l'expert en la matière, mais il peut arriver que quelqu'un ait été membre d'une organisation terroriste de son pays il y a 20 ans parce qu'il était obligé de le faire pour avoir un travail. Cela peut être quelqu'un qui est devenu membre parce qu'il voulait un emploi dans la fonction publique, qu'il voulait travailler comme enseignant, et qui s'est contenté de distribuer des tracts. Techniquement, la candidature d'une telle personne devrait être rejetée, et le SCRS nous fournirait ces renseignements. Mais cet individu pourrait néanmoins avoir de bonnes raisons de venir au Canada, en dépit de cette inadmissibilité: il s'agit d'événements qui se sont passés il y a longtemps; l'individu n'a pas eu d'activités qui menaçaient la sécurité publique; il a pu épouser une Canadienne ou il a peut-être des enfants. Il peut y avoir d'autres raisons, indépendamment de l'inadmissibilité technique, qui militent en faveur de son acceptation au Canada. Dans ce cas, la ministre a le pouvoir d'autoriser l'admission.

• 1040

C'est la même chose pour les examens médicaux. Quelqu'un peut être inadmissible sur le plan médical, et le médecin va nous dire: «À mon avis, cette personne n'est pas admissible», mais il peut s'agir de quelqu'un qui va venir ici pour suivre un traitement ou pour une durée limitée, ou encore il peut s'agir de quelqu'un qui est marié à une personne canadienne. On pondère cette notion d'inadmissibilité en fonction d'autres facteurs. C'est ce jugement qu'exerce l'agent des visas.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Merci.

Monsieur Bryden.

M. John Bryden: Pour poursuivre dans cette veine, en ce qui concerne les médecins désignés, dans un pays comme le Pakistan par exemple, où la corruption est omniprésente à tous les niveaux de la société, comment pouvez-vous vous assurer que votre médecin désigné ne va pas se laisser corrompre?

Mme Joan Atkinson: Là encore, cela fait partie du travail des médecins agréés à l'étranger qui doivent assurer la surveillance et le contrôle de la qualité au sein du réseau de médecins désignés.

Nous avons aussi mis sur pied des mesures de sécurité pour notre processus d'évaluation médicale, en particulier concernant le formulaire d'examen médical. Nous essayons de nous assurer que l'individu qui se présente à l'examen médical, qui fournit un échantillon d'urine, qui passe une radio, etc., est effectivement le candidat. Nous exigeons que des photographies soient jointes à tous les formulaires d'évaluation médicale, qu'elles soient fixées au dossier par le bureau des visas, et tamponnées pour garantir qu'elles ont bien été jointes par le bureau des visas. L'individu, quand il se présente devant le médecin désigné, il doit présenter des preuves et une photographie pour démontrer que c'est bien lui le candidat qui se présente devant ce médecin, etc.

M. John Bryden: Vous voyez, nous qui sommes députés, nous entendons toutes sortes d'histoires.

Mme Joan Atkinson: Bien sûr.

M. John Bryden: Faites-vous des contrôles au hasard des échantillons de sang ou d'urine par exemple? Car il n'y a pas que les photos, il y a là aussi une possibilité de substitution. Faites-vous des contrôles ponctuels?

Mme Joan Atkinson: Je ne peux pas vous le dire, et je ne sais pas si mes collègues dans la salle savent si nous faisons des contrôles ponctuels des radios ou des échantillons d'urine.

Neil, vous avez peut-être quelque chose à ajouter?

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Pourrais-je vous demander de vous présenter?

Dr Neil Heywood (directeur, Division de la politique de la santé, ministère de la Citoyenneté et de l'immigration Canada): Je m'appelle Neil Heywood et je suis directeur de la Division de la politique de la santé au ministère.

Effectivement, nous faisons des contrôles ponctuels sur des candidats qui viennent d'avoir leur entrevue. Notre médecin agréé, dont relève tout le processus d'examen et d'évaluation médical pour l'immigration, va rendre visite aux médecins désignés à l'occasion de ses voyages. Il ne les prévient pas nécessairement à l'avance et il peut très bien, lors d'une visite locale, aller chez un médecin désigné voir les gens qui viennent d'avoir leur examen médical; il vérifie la qualité des informations notées par ce médecin sur le formulaire normalisé dont vous a parlé Mme Atkinson; et il peut, en tant que clinicien, formuler sa propre interprétation des données cliniques.

C'est malheureusement une pratique assez limitée en raison de la faiblesse de nos ressources. Nous n'avons que neuf médecins agréés à l'étranger, et nous sommes donc manifestement très limités. Mais c'est un outil très efficace, car cela incite nos médecins désignés à être très honnêtes là où nous l'avons fait.

Par ailleurs, les médecins agréés qui voient défiler constamment les rapports des médecins désignés ont une grande expérience de la comparaison des résultats d'un jour à l'autre ou d'un mois à l'autre. S'ils constatent quelque chose d'anormal chez un médecin désigné particulier, ils déclenchent une enquête.

M. John Bryden: Mais si je peux faire une remarque, vous n'avez pas vraiment apaisé mon inquiétude car on peut toujours acheter un bon échantillon de sang. Il suffit d'y mettre le prix. Si vous avez le sida ou si vous avez une forme de tuberculose résistante aux antibiotiques et si vous avez assez d'argent, j'ai l'impression, d'après ce que j'entends dire, que nous ne pouvons pas faire grand-chose contre ce genre d'activité.

• 1045

Mme Joan Atkinson: Comme vous l'a dit le Dr Heywood, nous avons des procédures: les médecins agréés essaient de détecter les problèmes éventuels, de faire des contrôles ponctuels, ils font des contrôles de qualité et ils interrogent des personnes au moment où elles sortent de leur visite chez le médecin désigné. Mais comme nous l'avons aussi souligné, ce système n'est pas parfait. Nous savons que c'est un des domaines dans lesquels nous devons travailler encore plus, et c'est une des raisons pour lesquelles nous voulons faire une évaluation et un examen approfondis de tout le réseau des médecins désignés.

M. John Bryden: Je ne vais pas pousser cela plus loin, mais vous comprenez bien ma préoccupation.

Mme Joan Atkinson: Tout à fait.

M. John Bryden: Comme la possibilité que ces médecins désignés le fassent existe, et tant que nous n'avons pas un moyen de les coincer, on ne peut jamais être sûr.

Je voudrais vous poser une question hypothétique vraiment difficile dans la même veine. Quand nous examinons le dossier médical d'un réfugié qui arrive chez nous, à la lumière de la loi actuelle ou du projet de loi dont la Chambre est saisie, pouvons-nous ou devons-nous expulser un demandeur légitime du statut de réfugié qui souffre d'une forme de tuberculose résistante aux antibiotiques? Que devrions-nous faire, que pouvons-nous faire et que faisons-nous dans ce genre de cas?

Mme Joan Atkinson: Ce que nous pouvons et devons faire, et ce que nous faisons, quand nous constatons qu'un demandeur du statut de réfugié est porteur d'une maladie infectieuse comme la tuberculose, c'est réagir rapidement pour que cette personne reçoive un traitement approprié et soit suivie.

Nous ne pouvons pas exclure ces personnes de la procédure de détermination du statut de réfugié, et nous ne le faisons pas. Ce serait contraire à la Convention de Genève et à notre propre Charte des droits et libertés d'empêcher une personne porteuse d'une maladie infectieuse de présenter une demande de statut de réfugié et d'avoir droit à l'audition de cette demande.

M. John Bryden: Je vais en terminer avec cette série de questions. Je ne parle pas d'une maladie infectieuse qui peut être traitée. Je parle de quelque chose comme ces choses terrifiantes que l'on voit se développer dans le monde et qui vont se développer encore plus. Quand quelqu'un arrive au Canada avec une maladie comme la tuberculose résistante aux antibiotiques, nous ne pouvons pas garder cette personne en détention indéfiniment. Que faisons-nous? Sommes-nous obligés de l'accepter?

Mme Joan Atkinson: Tout d'abord, il faut prendre du recul et bien comprendre que nous ne pouvons pas enfermer le Canada dans une bulle étanche, vous comprenez bien. Pendant que des agents examinent les dossiers de demandeurs du statut de réfugié qui constituent un groupe particulier de personnes qui arrivent au Canada, il y a des millions d'autres personnes qui traversent chaque année la frontière, y compris des Canadiens qui sont allés en vacances, qui sont allés travailler ou qui sont allés vivre ailleurs pendant un certain temps et qui peuvent être porteurs de maladies infectieuses comme la tuberculose multirésistante, selon la région du monde dans laquelle ils ont vécu, travaillé ou passé un certain temps. Il est donc important de replacer cette question des maladies infectieuses dans son contexte général car il ne s'agit pas simplement des demandeurs du statut de réfugié.

Deuxièmement, quand nous avons une situation comme celle des Tibétains qui ont traversé la frontière au sud de l'Ontario pour demander le statut de réfugié, nous collaborons étroitement avec les autorités provinciales de la santé et avec nos collègues de Santé Canada pour protéger le public des personnes qui peuvent avoir des maladies comme la tuberculose multirésistante. Nous veillons avec les autorités publiques de la santé à ce que de bonnes précautions soient prises pour assurer la sécurité des Canadiens dans ce genre de situation.

Mais encore une fois, il faut bien voir le contexte général.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Merci.

Monsieur Benoit, vous allez pouvoir conclure.

M. Leon Benoit: Merci, monsieur le président.

Je voudrais revenir sur la question médicale et sur quelque chose que vous avez dit tout à l'heure: vous avez maintenant quelqu'un de Santé Canada, je crois, qui est en train de déterminer s'il faut faire des tests de dépistage de l'hépatite C, du VIH, etc. Ce sont des problèmes auxquels nous sommes directement confrontés depuis longtemps, et je me demande pourquoi c'est seulement maintenant et pas il y a 10 ans que l'on fait ce genre de choses et pourquoi ces tests ne sont pas pratiqués de façon routinière depuis 10 ans.

• 1050

Mme Joan Atkinson: La procédure existe depuis un certain temps. Ce n'est pas que nous sommes simplement en train de commencer. Nous avons entamé avec Santé Canada une démarche à laquelle participent non seulement Santé Canada, mais aussi des experts des maladies infectieuses d'autres pays, notamment les États-Unis, le Royaume-Uni et l'Australie.

Santé Canada a en fait décidé de réunir des experts en maladies infectieuses du Canada et d'autres pays pour étudier la question de ces maladies infectieuses dans le contexte des migrations. Ils examinent toute une série de maladies—pas seulement le VIH, mais aussi la tuberculose, d'autres maladies à transmission sexuelle, l'hépatite, etc.—et ils vont nous soumettre, au ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration, les meilleurs arguments scientifiques qui nous permettront de déterminer la façon dont nous aborderons les questions de maladies infectieuses du point de vue...

M. Leon Benoit: Ce n'est pas simplement les maladies infectieuses; il y a aussi le coût potentiel pour notre système de soins de santé, qui est un autre facteur que vous examinez. Je crois qu'il est très difficile de faire face au problème des maladies infectieuses parce que nous recevons des visiteurs du monde entier, pas seulement des gens qui viennent immigrer au Canada. L'autre aspect extrêmement important, c'est le coût potentiel pour notre régime de soins de santé, qui est déjà surchargé comme nous le savons tous. C'est un élément critique qui est plus particulièrement important dans le cas des gens qui immigrent.

Mme Joan Atkinson: Tout en travaillant sur la notion de fardeau excessif, nous avons aussi modifié et amélioré la façon dont nous organisons les examens médicaux, même dans le cadre de la réglementation et de la loi actuelle. Nous avons fourni et nous continuons à fournir des informations aussi à jour que possible à nos médecins au sujet des protocoles de traitement de certaines maladies au Canada, ce qui leur permet de se prononcer en tout état de cause lorsqu'ils constatent que quelqu'un est porteur d'une maladie ou présente des conditions qui risquent de constituer un fardeau excessif.

M. Leon Benoit: J'aimerais vous demander de remettre au comité votre définition actuelle de ce «fardeau excessif» et du «niveau de risque acceptable», car ce sont deux termes qui reviennent souvent. Vous dites que vous essayez de définir cela. J'aimerais savoir où vous en êtes exactement pour l'instant, et nous verrons ensuite à quoi vous en arriverez.

Mme Joan Atkinson: Nous pouvons certainement faire parvenir au comité le guide du médecin agréé, c'est-à-dire le manuel et les lignes directrices dont se servent actuellement nos médecins agréés pour déterminer la notion de fardeau excessif. Pour ce qui est de la définition de cette notion dans notre réglementation, c'est quelque chose qui sera...

M. Leon Benoit: Où en est actuellement le ministère sur cette notion de détermination du niveau des risques acceptables, et qu'entend-on exactement par fardeau excessif pour notre système de soins de santé, ce genre de choses?

Mme Joan Atkinson: Comme la ministre l'a promis, quand le comité sera saisi du projet de loi C-31 et que nous examinerons le projet de loi, nous avons l'intention de remettre au comité le plus de détails possible sur la réglementation. Il y aura notamment les règlements concernant le fardeau excessif.

M. Leon Benoit: Ce que le vérificateur général a dit hier et que son bureau a déjà dit bien des fois auparavant, c'est qu'il n'est pas nécessaire d'attendre cette loi pour faire tout cela. Il va peut-être falloir encore attendre un certain temps avant que la loi soit adoptée. On pourrait très bien apporter beaucoup de changements très importants de manière isolée—je ne veux pas dire de manière complètement isolée, mais sans attendre que la loi soit adoptée. J'aimerais savoir où vous en êtes maintenant, et nous verrons ensuite ce qui se passe avec le règlement définitif. Ce serait intéressant à voir. Je pense que le public est en droit d'exiger que le ministère lui rende des comptes sur la situation actuelle.

Mme Joan Atkinson: Nous menons des consultations continues avec les provinces et d'autres intervenants sur la question du fardeau excessif, en plus de nos discussions avec nos collègues de Santé Canada. Encore une fois, tout le processus d'élaboration de la réglementation qui accompagnera le projet de loi C-31 est parfaitement transparent et ouvert au public.

M. Leon Benoit: Je pense qu'il serait très utile de savoir ce que les diverses provinces considèrent comme un niveau de risque acceptable et comme un fardeau excessif, car ce sont elles qui vont payer l'essentiel de l'addition.

• 1055

Mme Joan Atkinson: À l'heure actuelle, nos médecins se servent du guide du médecin agréé et des directives, et je pense que vous y trouverez une bonne partie des informations que vous recherchez sur la notion actuelle de fardeau excessif. Pour ce qui est de la nouvelle réglementation concernant cette notion, nous remettrons au comité les informations sur cette question lorsqu'il étudiera le projet de loi.

M. Leon Benoit: J'ai épuisé mon temps?

Le président: Non, c'est bon.

M. Leon Benoit: Je voudrais d'abord poser une question très directe. Si un Canadien ou une Canadienne épouse une personne qui n'est pas canadienne et que l'on constate que cette personne a une maladie qui pourrait être très coûteuse pour notre régime de soins de santé, peut-on lui interdire l'entrée au Canada, ou est-elle automatiquement autorisée à y entrer? Si un Canadien ou une Canadienne épouse quelqu'un qui n'a jamais été accepté au Canada, cette personne est-elle autorisée à y entrer dans tous les cas?

Mme Joan Atkinson: Actuellement, si l'on constate que quelqu'un est porteur d'une maladie ou est dans une situation qui constituerait un fardeau excessif, on peut lui refuser l'entrée quelle que soit la catégorie dans laquelle il se situe, donc cela inclurait les conjoints parrainés.

Comme vous le savez, nous avons proposé dans le contexte du projet de loi C-31 de créer une exemption à cette disposition dans le cas des conjoints parrainés, des enfants à charge et des réfugiés au sens de la Convention choisis à l'étranger. Nous l'avons fait notamment parce que même si l'on peut refuser l'entrée à un conjoint parrainé en vertu de la Loi actuelle sur l'immigration en alléguant que cette personne a une maladie ou un état qui constituerait un fardeau excessif, compte tenu des considérations humanitaires et de l'objectif de la réunification des familles, il peut arriver deux choses. Lorsque l'agent des visas examine le cas, y compris les aspects humanitaires et les motifs impérieux de commisération, il peut décider d'émettre un permis du ministre pour autoriser la personne à entrer au Canada en dépit de son inadmissibilité médicale; ou encore, le parrain peut faire appel auprès de la Division d'appel de l'Immigration ou de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, qui pourra déterminer qu'en dépit du fait que la personne est considérée comme inadmissible au Canada, il existe des considérations humanitaires et des motifs de commisération impérieux; elle va alors renverser la décision de refuser l'entrée, et la personne recevra un visa d'immigrant.

M. Leon Benoit: Vous dites donc que vous pensez qu'une fois que le règlement accompagnant le nouveau projet de loi sera déposé, il comportera une exemption totale pour les conjoints de Canadiens?

Mme Joan Atkinson: En ce qui concerne les motifs de fardeau excessif, oui, c'est l'intention.

M. Leon Benoit: Quel sera le coût de cette décision pour notre régime médical?

Mme Joan Atkinson: Je ne sais pas si nous avons des chiffres précis à ce sujet. Mais comme je l'ai dit, quand on examine la situation actuelle, une grande partie, sinon la plupart des conjoints parrainés finissent par arriver de toute façon au Canada, soit en obtenant un permis du ministre, soit en faisant appel auprès de la Commission, en raison des objectifs de réunification de la famille et des considérations humanitaires et de commisération dans ce genre de cas. Je pense donc que l'augmentation de coût pour le régime de soins de santé au Canada sera assez minime.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Nous aurons tout le loisir d'examiner cela lorsque nous serons saisis du projet de loi.

Je pense que vous voudrez aussi examiner les risques de fraude, en cas de mariage de convenance...

Mme Joan Atkinson: Certainement. Nous allons continuer...

M. Leon Benoit: Vous n'êtes pas en train de dire que c'est moi qui ai suggéré cela, monsieur le président.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Je vous crible de questions parce que c'est mon travail. Cela n'a rien à voir.

M. Leon Benoit: Bon.

Mme Joan Atkinson: Monsieur le président, nous allons manifestement continuer à veiller à ce que nos procédures, notre réglementation et notre loi comportent des dispositions très fermes à l'égard des mariages de convenance.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Je vais vous remercier d'être venus nous rencontrer. Je pense que nous avons eu une discussion très utile et très intéressante. Nous vous remercions pour la franchise de vos réponses. Je suis sûr que nous aurons l'occasion de nous revoir. Merci à tous et à toutes.

Avant de lever la séance, monsieur Benoit, je voudrais vous demander de m'excuser de m'en être pris à vos collaborateurs. Je peux le faire avec vous, mais je ne devrais pas le leur faire.

M. Leon Benoit: Vous pouvez me le faire, mais pas à mes collaborateurs.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): La séance est levée. Nous nous réunirons de nouveau à 15 h 30 le mercredi 7 juin.