ENVI Rapport du Comité
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7. LES AUTRES GROUPES VULNÉRABLES DE LA POPULATION
7.1 Toute la population sans exception est vulnérable aux contaminants qui circulent dans l'environnement, mais à des degrés divers. La géographie a une influence sur le niveau de risque auquel est exposée la population. Les chercheurs ont démontré que la pollution est élevée dans les bassins des Grands Lacs et du Saint-Laurent, où se concentre la population canadienne. À cause de l'effet sauterelle et des caractéristiques de certaines substances, les contaminants s'accumulent aussi dans la partie nordique du pays. Lorsque l'on consulte la littérature fournie par les témoins, on constate que trois segments de la population sont particulièrement vulnérables à la présence des pesticides. Dans le premier groupe on retrouve les femmes et les enfants qui, en raison de leur constitution, sont plus sensibles aux contaminants. Le deuxième groupe englobe les personnes en moins bonne santé (incluant les personnes âgées) qui risquent d'avoir une capacité moindre à se défendre contres les agresseurs chimiques. Le troisième groupe comprend la population qui est davantage en contact avec les pesticides, soit les travailleurs qui manipulent des pesticides et les populations qui se nourrissent de la pêche, de la chasse et de la cueillette et vivent dans les régions où s'accumulent les polluants.
Les causes de leur vulnérabilité
7.2 Le chapitre précédent démontre en quoi l'organisme des enfants est particulièrement sensible aux pesticides, ce qui, selon les membres du Comité, fait d'eux le groupe le plus vulnérable de la population. L'organisme des femmes, qui comporte davantage de tissus gras, est plus susceptible que l'organisme des hommes à l'accumulation de polluants organiques persistants (POP). Quelques chercheurs supposent donc, partant de ce constat, que les pesticides persistants soupçonnés perturber le système endocrinien jouent un rôle important dans le développement du cancer du sein91. Lors de sa comparution devant le Comité, le Sierra Club du Canada a souligné la vulnérabilité des femmes ayant fait l'objet de plusieurs études, dont une amorcée à Windsor en 1995 sur les antécédents professionnels de 1 000 personnes atteintes d'un cancer et qui révélait que les femmes vivant en milieu agricole présentaient un taux élevé de cancer du sein avant la ménopause92. Même si plusieurs études ont été citées en exemple, il reste difficile, voire impossible, de lier directement le cancer du sein aux pesticides. Une étude effectuée à Hawaii en 1997, par exemple, suggère que le sol volcanique et les pluies acides peuvent amplifier la contamination de l'eau potable et des eaux souterraines par la dieldrine93. Selon le Dr Kelly Martin, membre de l'Association canadienne des médecins pour l'environnement et qui a comparu devant le Comité, de nombreux paramètres peuvent effectivement entrer en ligne de compte avec les effets des contaminants, ce qui fait qu'il est presque impossible d'isoler les effets qui leur sont particuliers. Il n'empêche que l'Association est inquiète et craint que les pesticides causent, entre autres, le cancer du sein.
7.3 Les personnes qui souffrent d'asthme ou d'allergies, les gens particulièrement sensibles aux produits chimiques (polysensibilité chimique) et les personnes âgées représentent le deuxième groupe vulnérable. Selon l'information disponible sur le site Internet du Environmental Health Center de la Nouvelle-Écosse, qui soigne et fait de la recherche sur les problèmes de sensibilité liés à l'environnement, certaines personnes auraient parfois des réactions plus violentes au contact des pesticides que d'autres personnes en meilleure santé. Par exemple, les gens atteints du syndrome de polysensibilité chimique peuvent souffrir de symptômes multiples dont : irritation des yeux, problèmes respiratoires, faiblesse musculaire, maux de tête, fatigue, asthme, allergies et infections chroniques94. Le Dr Nicole Bruinsma, de l'Association canadienne de santé publique, a soulevé ce problème devant le Comité, tout en lui faisant remarquer que les effets des pesticides sur ce groupe de la population sont encore mal connus, comme c'est le cas pour les autres groupes vulnérables d'ailleurs.
Il existe aussi des personnes sensibles aux substances chimiques, qui ne sont pas en parfaite santé, notamment celles souffrant d'asthme ou d'allergies, ainsi que celles qui réagissent aux produits chimiques, qui sont plus gravement atteintes que les autres par les effets résultant de l'exposition aux pesticides. Du reste, il convient de s'interroger au départ sur l'origine de leur sensibilité. Est-ce l'exposition à un grand nombre de substances chimiques dès la vie intra-utérine? Pour ces personnes, chaque jour présente des risques, puisqu'elles ne peuvent pas échapper à l'utilisation généralisée et persistante de ces toxines95. |
7.4 Lors de son témoignage, le Congrès du Travail du Canada, qui représente 2,3 millions de travailleurs dans les secteurs public et privé, n'a pas hésité à affirmer que les travailleurs sont les premières victimes des maladies chroniques causées par les pesticides. Il a fait remarquer que la plupart des résultats utilisés par le Centre international de recherche sur le cancer proviennent d'études faites sur les expositions professionnelles96. Selon le Congrès, les personnes qui manipulent des produits antiparasitaires dans le cadre de leur travail (agriculteurs et membres de leur famille; forestiers; exterminateurs; préposés à l'entretien des pelouses, des terrains de golf, et des parcs; employés de municipalités et de chemins de fer; travailleurs dans les manufactures de pesticides; etc.) sont parfois exposées à de très fortes doses de pesticides. En plus des effets à long terme présumés, ces travailleurs risquent de subir les effets aigus des pesticides s'ils ne respectent pas les conseils associés à la manipulation de ces produits. L'Association canadienne de santé publique a informé le Comité du fait que les pesticides peuvent persister sur la peau plusieurs mois après le premier contact et que les traces résiduelles affecteraient même les enfants des personnes ainsi exposées97. L'Association a mentionné au Comité que le lymphome non hodgkinien semblait s'observer surtout chez les gens les plus exposés aux pesticides, soit ceux qui s'en servent dans le cadre de leur travail. Certains chercheurs sont arrivés à démontrer une relation dose-réponse significative entre des champs vaporisés d'herbicides et le risque de contracter le lymphome non hodgkinien98 alors que d'autres n'arrivent pas à démontrer statistiquement ce lien entre la présence de pesticides et les différentes maladies observées99. Le Dr Bruinsma, qui fait partie du premier groupe de chercheurs a mentionné :
Les personnes atteintes du lymphome non hodgkinien présentent une mutation génétique très particulière sur l'un des chromosomes. C'est un gène qui se détache de l'ADN et qui se retourne, selon ce qu'on appelle une mutation par inversion. C'est un phénomène très rare, que l'on rencontre dans le lymphome non hodgkinien. Où peut-on également le trouver? Chez les personnes les plus exposées aux pesticides. On le rencontre chez les travailleurs qui manipulent ces produits à doses concentrées à des fins techniques, chez les agriculteurs et les travailleurs du secteur agricole, chez les exterminateurs, chez les personnes qui appliquent des pesticides, chez les responsables de l'entretien des pelouses et des terrains de golf ainsi que chez les anciens combattants de la guerre du Vietnam qui ont été exposés à des doses massives de 2,4-D, aussi appelé agent Orange100. |
D'autre part, les témoins ont soulevé deux problèmes qui, de l'avis du Comité, rendent les travailleurs encore plus vulnérables à l'exposition aux pesticides. Dans un premier temps, l'information fournie aux agriculteurs par le fournisseur, qui consiste à les informer sur les risques liés à la manipulation des pesticides, serait inadéquate. Deuxièmement selon M. Yussuff du Congrès du Travail du Canada, les précautions (équipements de protection, temps d'attente après une application), que l'on suggère de prendre à ceux qui manipulent des pesticides seraient moins efficaces qu'on ne le croit et ne protégeraient pas les utilisateurs des effets chroniques des pesticides :
Il est possible de limiter les expositions aiguës des travailleurs en prévoyant des équipements de protection individuels et des délais de sécurité après traitement, mais ces moyens sont beaucoup moins efficaces en pratique qu'en théorie. Par ailleurs, ils ne protègent pas les travailleurs contre les effets chroniques sur la santé, qui sont, dans des pays industrialisés comme le Canada, beaucoup plus importants que les effets aigus101. |
7.5 Les populations nordiques incluent celles vivant dans les régions arctiques et subarctiques au nord du 60e parallèle, depuis la mer de Beaufort à l'Ouest jusqu'au détroit de Davis à l'Est, et de la partie septentrionale de l'île d'Ellesmere au Nord jusqu'à la baie d'Hudson au Sud102. Cette région représente 40 p. 100 de la surface terrestre du Canada et compte 85 000 habitants, dont plus de 40 000 Autochtones. Tout comme les gens qui manipulent des pesticides, les populations nordiques sont davantage en contact avec ces contaminants que les autres Canadiens. Cela s'explique d'une part par le fait, comme nous l'avons vu au chapitre qui traite des pesticides dans l'environnement, que certaines de ces substances, plus précisément celles qui sont persistantes, se retrouvent dans les régions nordiques par transport atmosphérique, même si elles ne sont pratiquement pas utilisés dans l'Arctique (figure 4.2). Parmi ces polluants organiques persistants (POP) on retrouve des organochlorés et même si la plupart sont aujourd'hui interdits au Canada, on les retrouve encore en quantité importante dans l'environnement à cause de leurs caractéristiques et parce que certains pays les utilisent encore. D'autre part, les populations nordiques consomment de la nourriture traditionnelle, qu'ils obtiennent grâce à la pêche et à la chasse. Ces deux critères font que leur exposition globale est plus élevée que celle des autres populations et qu'elles constituent donc un groupe vulnérable103. Le Comité a appris de M. David Stone, directeur de la recherche sur les sciences et les contaminants dans le Nord au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, qu'à cause d'une plus grande consommation d'espèces animales, les concentrations de polluants organiques persistants dans le sang des populations nordiques sont considérablement plus élevées que chez les populations du Sud. Les Inuits sont particulièrement concernés par l'accumulation de toxaphène, de chlordane et biphényles polychlorés (BPC) dans leur organisme. Dans cette population, ce sont évidemment les ftus et les nourrissons qui sont les plus susceptibles d'être touchés par les POP, compte tenu des pesticides qu'ils absorbent par l'intermédiaire du placenta et du lait maternel. Selon les résultats obtenus jusqu'à maintenant, les concentrations d'organochlorés dans le lait maternel des Inuits du Nunavik sont de deux à dix fois supérieures à celles mesurées dans une population non autochtone du Sud104.
7.6 Malgré que la population nordique
connaisse ces résultats et s'en inquiète, les représentants de la Conférence
circumpolaire inuit et du ministère des Affaires indiennes
et du Nord canadien ont expliqué au Comité que la nourriture traditionnelle joue un
rôle irremplaçable dans la vie des Inuits pour ses aspects économique, social et de
santé. À leurs yeux, la consommation de ces aliments est donc essentielle et
incontournable. Il a été évalué par exemple qu'il en coûterait près de 35 millions
de dollars par année pour remplacer ces denrées par des produits commerciaux. Les
chercheurs considèrent aussi la nourriture traditionnelle plus saine et plus nutritive
que la nourriture provenant du Sud. Selon les résultats de la phase 1 du Programme de
lutte contre les contaminants dans le Nord, dirigé par le ministère des Affaires
indiennes et du Nord canadien, une diminution de la consommation des aliments
traditionnels aurait de multiples conséquences néfastes pour les populations
concernées, telles que : baisse de l'activité physique, obésité, caries dentaires,
anémie, résistance réduite aux infections et diabète. La chasse et la pêche sont
aussi des activités socioculturelles importantes. Dans cette optique, les Inuits sont
encouragés à inclure la nourriture traditionnelle dans leur régime alimentaire et
continuent de le faire105. Les experts
considèrent que les risques associés au fait de ne pas consommer d'aliments
traditionnels sont encore plus grands que les risques associés à une exposition à long
terme aux contaminants présents dans ces aliments. Dans cette perspective, le Comité est
d'avis qu'il est primordial d'accorder au problème de la contamination nordique les
ressources suffisantes pour mieux protéger la population.
Recherche sur la vulnérabilité de la population
7.7 Le dossier des contaminants dans la nourriture traditionnelle a suscité l'élaboration d'un programme de recherche sur les POP, le Programme de lutte contre les contaminants dans le Nord (PLCN), dont la première phase (PLCN-I) s'est terminée en 1997.
Le budget annuel de 5,4 millions de dollars de la phase II (PLCN-II) provient du conseil du Trésor et des quatre ministères suivants, qui participent aussi à la gestion du PLCN à différents degrés : Affaires indiennes et du Nord, Santé, Pêches et Océans, Environnement. Par exemple, la Direction générale de la protection de la santé (DGPS) de Santé Canada donne des conseils sur les risques présentés par certains POP et consacre environ 1 million de dollars par an à la recherche pour l'analyse des problèmes potentiels qui leurs sont associés106.
7.8 Le Programme de lutte contre les contaminants dans le Nord consiste à évaluer les risques de contamination associés aux aliments traditionnels consommés par les peuples autochtones. Les résultats de la phase I du Programme ont démontré la distribution spatiale et les tendances temporelles des contaminants dans le Nord, ont confirmé l'hypothèse selon laquelle ces contaminants viennent du Sud et ont sensiblement contribué à nos connaissances sur la contamination des aliments traditionnels. Outre d'autres faits, la phase I du Programme de lutte contre les contaminants dans le Nord a permis de démontrer que le toxaphène est le principal contaminant organochloré retrouvé dans tous les poissons analysés dans l'Arctique canadien, même si ce pesticide n'est plus vendu au Canada depuis 1982. Ceci démontre l'importance de prendre en considération tous les pesticides lorsqu'on en étudie les effets, même ceux qui ne sont plus vendus.
7.9 Les résultats de la phase I du Programme, publiés sous forme de rapport, ont aussi servi à une étude circumpolaire similaire publiée en 1997-1998 par le Programme de surveillance et d'évaluation de l'Arctique (PSEA). La phase II, qui se poursuivra jusqu'en 2003, vise à établir les espèces principales par l'intermédiaire desquelles les populations nordiques sont les plus exposées aux contaminants, de même que les régions et les populations pour lesquelles les risques sont plus élevés107. Compte tenu de l'importance des aliments traditionnels dans la vie des populations nordiques, la continuité du Programme est essentielle.
7.10 Le Comité s'inquiète des commentaires de certains témoins, selon lesquels ce programme, comme plusieurs autres projets gouvernementaux à caractère scientifique, aurait été particulièrement touché par les restrictions budgétaires. Le Comité a effectivement cru comprendre que le Programme de lutte contre les contaminants dans le Nord est confronté à un manque de ressources financières. M. Joe Losos, de Santé Canada, a déclaré :
Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien a un programme consacré aux toxines dans le Nord. Nous l'appuyons avec nos évaluations en matière de santé. Nous effectuons des études à long terme sur certaines de ces toxines pour savoir si elles ont des effets durables. Donc, tout dépend vraiment des toxines. Nous consacrons environ 1 million de dollars à ce programme. C'est une des victimes des compressions des dépenses de programmes, de sorte que nous n'avons pas autant d'argent que nous l'aimerions108. |
7.11 Pour ce qui est de la recherche sur les travailleurs qui entrent en contact avec les pesticides, la Direction générale de la protection de la santé (DGPS) de Santé Canada surveille notamment les effets potentiels des pesticides dans les collectivités agricoles du Canada, par l'intermédiaire du Laboratoire de lutte contre les maladies (LLCM). La DGPS participe aussi à un programme de recherche sur les habitudes alimentaires et à une enquête nationale sur le lait maternel, qui fournissent des données sur l'exposition des Canadiens et des Canadiennes à toute une gamme de substances potentiellement dangereuses, dont les pesticides109. Le ministère de la Santé a aussi signifié au Comité qu'il encourage la mise sur pied de projets qui touchent certains dossiers prioritaires, par exemple celui des perturbateurs du système endocrinien, dans le cadre de l'Initiative de recherche sur les substances toxiques. De plus, le représentant du Ministère a fait part au Comité des plans de réorganisation de la DGPS, qui visent à établir un plan d'action pour une nouvelle stratégie sur la salubrité de l'environnement et qui aura pour but d'améliorer la capacité du Ministère ainsi que celle de la DGPS de réduire les dangers pour la santé que posent les risques environnementaux.
7.12 Malgré toutes ces études, à priori nombreuses et pertinentes, le Comité a entendu critiquer le genre de recherche effectué sur l'exposition des travailleurs. D'après Mme Hammond, fondatrice de l'organisme Citoyen(nes) pour les alternatives aux pesticides, les études effectuées sur l'exposition des travailleurs ne sont pas satisfaisantes, car les protocoles (nombre d'échantillons, temps d'échantillonnage, différence entre le pesticide homologué et celui analysé) sont mal élaborés :
Les tests très restreints sur l'exposition professionnelle des travailleurs agricoles sont tout à fait insuffisants. D'habitude, il vaut mieux un échantillon plus grand. C'est excellent. Je préférerais plusieurs milliers d'agriculteurs. [...] Mais ce n'est pas ce qu'on fait. Un nouveau produit chimique a été approuvé pour être utilisé au Canada après un test pendant lequel on y a exposé 13 agriculteurs. |
Pendant combien de temps? C'est un nouveau produit. Nous ne savons pas quel effet il aura sur l'être humain. Combien de temps devrions-nous y exposer ce grand échantillon d'agriculteurs? Idéalement, ce devrait être au moins une saison ou deux pour qu'on sache ce qui risque d'arriver. |
Ces 13 agriculteurs ont été exposés au produit pendant une période de quatre à sept heures, c'est-à-dire pendant une journée de travail. La moitié était dans des tracteurs fermés et d'autres, dans des tracteurs ouverts. Je répète, c'était pour quatre à sept heures et il y avait 13 agriculteurs. |
Mais il y a pire encore [...] Le produit chimique qu'on voulait homologuer s'appelait Imazethapyr, mais le produit de remplacement qui a été accepté était tout à fait différent. On a prétendu qu'il avait une composition chimique semblable, mais ce produit n'est pas métabolisé de la même façon par le corps humain. C'est la compagnie qui l'a dit. |
Le Canada a donc homologué l'Imazethapyr, communément appelé Pursuit, en mars 1994, alors qu'on avait mené les tests pour un pesticide appelé Assert. Ces épreuves de quatre à sept heures avec un échantillon de 13 agriculteurs portaient donc sur un produit chimique tout à fait différent. On a cependant jugé que c'était suffisant à cause du système que nous avons. Voilà le test d'innocuité professionnelle qui a été faite pour l'Imazethapyr. Le document de décision porte comme date le 30 mars 1994110. |
7.13 Santé Canada met actuellement en uvre une stratégie relative à la salubrité de l'environnement. Le Ministère examine en particulier les capacités scientifiques, les liens avec ses propres experts et ceux de l'extérieur, ainsi que les rapports internationaux qui lui permettront d'obtenir de l'information scientifique de pointe. Il considère de même les changements qu'il pourrait apporter à son cadre de gestion des risques, en se concentrant plus précisément sur les populations spécialement vulnérables. Par ailleurs, un représentant du Ministère a mentionné l'existence d'un Centre d'études financé par le Ministère, ainsi que la réalisation de projets sur les effets cumulatifs des produits toxiques parrainés par les ministères de l'Environnement et de la Santé111. Santé Canada met également à la disposition de la population de l'information sur la polysensibilité chimique, mais cette maladie n'est pas reconnue légalement au Canada en tant que véritable état pathologique.
7.14 Le Comité est en mesure de constater, après cette série d'audiences, que même si la preuve scientifique demeure incomplète, les pesticides représentent pour l'être humain et son environnement une menace suffisamment inquiétante pour que l'on s'en préoccupe. D'une part, la vulnérabilité des enfants et des autres groupes mentionnés est de plus en plus reconnue; d'autre part, les données scientifiques son insuffisantes et des travaux de recherche supplémentaires s'avèrent nécessaires. On pense aussi que les travailleurs seraient moins bien protégés et informés qu'on ne nous le laisse entendre. On pense ici à l'information mise à la disposition des travailleurs pour leur protection. Les membres du Comité considèrent que le gouvernement doit protéger la population en mettant en uvre une gestion proactive des pesticides. Pour avoir une bonne gestion, on doit commencer par reconnaître le danger que présentent les pesticides pour la population et par avoir à sa disposition un financement adéquat pour la recherche qui permettra de mieux cibler ce danger.
7.15 La loi actuelle ne semble pas offrir de protection spéciale aux groupes vulnérables de la population112. C'est ce qu'ont déclaré le Fonds mondial pour la nature et l'Institut canadien de la santé infantile devant les membres du Comité.
Aux États-Unis, la loi sur la protection de la qualité des aliments (Food Quality Protection Act) est un exemple de loi qui a été expressément modifiée pour protéger les enfants113 (voir à cet effet le chapitre suivant).
Mme Sandra Schwartz, directrice des Programmes environnementaux de l'Institut canadien de la santé infantile, a dit :
La loi américaine sur les pesticides, la Food Quality Protection Act, a été révisée en 1996 à la lumière de l'étude intitulée Pesticides in the Diets of Infants and Children, effectuée en 1993 par la National Academy of Sciences. Les résultats ont démontré que le processus de réglementation ne tenait pas compte de la vulnérabilité particulière des enfants. On y recommandait que ce processus soit modifié afin de mieux protéger la santé des nouveaux-nés et des enfants. La loi a été adoptée à l'unanimité devant les preuves incontestables présentées dans le rapport. |
Afin de protéger les enfants canadiens contre l'exposition aux pesticides, nous avons besoin de stratégies similaires dans nos propres structures de gouvernement114. |
7.16 Le Comité a retenu ces propos et est d'avis que le gouvernement devrait s'inspirer des derniers développements qui ont eu lieu aux États-Unis relativement à la protection des enfants pour faire de même et protéger ainsi tous les groupes vulnérables de la population canadienne.
91 A.P. Hoyer, P. Grandjean, T. Jorgensen, J. W. Brock, H. B. Hartvig « Organochlorine Exposure and the Risk of Breast Cancer », Lancet, 352(9143), 1998, p. 1816-1820.
92 Sierra Club du Canada, mémoire présenté au Comité.
93 R. H. Allen, « Breast Cancer and Pesticides in Hawaii : The Need for Further Study », Environmental Health Perspectives, vol. 105, 1997, p. 679-683.
94 Environmental Health Center de la Nouvelle-Écosse, site Web, janvier 2000; The Environmental Hypersensitivity Association of Ontario, site Web, janvier 2000.
95 Témoignages, réunion no 4, le 16 novembre 1999.
96 Congrès du Travail du Canada, mémoire présenté au Comité; Témoignages, réunion no 7, le 23 novembre 1999.
97 Association canadienne de santé publique, mémoire présenté au Comité.
98 D. T. Wigle, R. M. Semenciw, K. Wilkins, D. Riedel. L. Ritter, H. I. Morrison, Y. Mao, « Mortality Study of Canadian Male Farm Operators : Non-Hodgkin's Lymphoma Mortality and Agricultural Practices in Saskatchewan », Journal of the National Cancer Institute, vol. 82, no 7, le 4 avril 1990; H. I. Morrison, K. Wilkins, R. Semenciw, Y. Mao, D. Wigle, « Herbicides and Cancer », Journal of the National Cancer Institute, vol. 84, no 24, le 16 décembre 1992.
99 A. Blair et al., « Occupational and Environmental Risk Factors for Chronic Lymphocytic Leukemia and Non-Hodgkin's Lymphoma », 1997 UHPHS Workshop Proceedings : Determining the Role of Environmental Exposures as Risk Factors for B-Cell Chronic Lymphoproliferative Disorders; G deJong, G. M. Swaen et J. J. Slangen, « Mortality of Workers Exposed to Dieldrin and Aldrin: A Retrospective Cohort Study », Occupational and Environmental Medicine, vol. 54, 1997, p. 702-707; P. C. Oloffs et al., « DDT, Dieldrin, and Heptachloroperoxide in Humans with Liver Cirrhosis », Clinical Biochemistry, vol. 7, 1974, p. 297-306.
100 Témoignages, réunion no 4, le 16 novembre 1999.
101 Témoignages, réunion no 7, le 23 novembre 1999.
102 J. Jensen, K. Adare et R. Shearer, Rapport de l'évaluation des contaminants dans l'Arctique canadien, Programme de lutte contre les contaminants dans le Nord, Affaires indiennes et du Nord Canada, 1997, 508 p.
103 D'autres populations autochtones se nourrissent d'aliments traditionnels, ailleurs au Canada. On pense notamment à certaines populations de la Saskatchewan qui font la cueillette des petits fruits, de champignons ou de riz sauvage, alors que les arrosages aériens risquent d'être responsables du dépôt de pesticides sur la végétation. Ces populations sont probablement aussi très vulnérables aux pesticides, mais le Comité n'a pas entendu de témoignage à ce sujet.
104 Témoignages, réunion no 16, le 14 décembre 1999.
105 Ibid.; Conférence circumpolaire inuit et Inuit Tapirisat du Canada, mémoire présenté au Comité.
106 Témoignages, réunion no 2, le 2 novembre 1999; Témoignages, réunion no 16, le 14 décembre 1999.
107 Témoignages, réunion no 16, le 14 décembre 1999.
108 Témoignages, réunion no 2, le 2 novembre 1999.
109 Ibid.
110 Témoignages, réunion no 10, le 30 novembre 1999.
111 Témoignages, réunion no 126, le 1er juin 1999.
112 Témoignages, réunion no 5, le 17 novembre 1999.
113 S. Schwartz et G. W. Chance, « Children First », Alternatives Journal, 25:3, été 1999.
114 Témoignages, réunion no 4, le 16 novembre 1999.