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HERI Rapport du Comité

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Introduction

Le vingtième siècle a été terni par d’horribles actes génocides et d’innombrables crimes contre l’humanité et autres atrocités. Le Comité remercie Sarkis Assadourian, député de Brampton-Centre, d’avoir soulevé la question du triste sort des victimes de crimes contre l’humanité, car ce n’est qu’en tirant les leçons qui s’imposent des erreurs du passé que nous pouvons espérer bâtir un avenir meilleur. Il remercie également les auteurs des mémoires qu’il a reçus ainsi que les témoins qui sont venus lui exposer de vive voix leur point de vue et, dans certains cas, lui faire part de leur expérience vécue d’actes génocides et de crimes contre l’humanité.

Les témoins et les auteurs des mémoires ont suggéré de nombreux moyens de ne pas oublier les victimes des génocides et des crimes contre l’humanité perpétrés au XXe siècle. Au lieu de demander au Musée canadien des civilisations de créer une exposition permanente sur le thème du génocide, ils préféraient en général que le gouvernement fédéral crée un musée distinct spécifiquement consacré à ce thème. Ils ont proposé deux formules fort différentes à l’égard du nouveau musée : selon la première, il s’agirait avant tout d’un musée de l’Holocauste qui comporterait des segments d’exposition relatant d’autres génocides ou crimes contre l’humanité commis dans le contexte de l’Holocauste, tandis que selon la seconde, il s’agirait d’un musée du génocide et des crimes contre l’humanité et accorderaient à tous les cas la même importance. Si les divers témoins et groupes se sont entendus sur une chose, c’est sur la nécessité que le projet retenu, quel qu’il soit, comporte trois éléments cruciaux, à savoir la recherche, l'éducation et la mémoire des victimes.

Ce consensus a été souligné par le témoignage des représentants du Musée canadien des civilisations, qui ont proposé un moyen d’atteindre les trois objectifs sur lesquels il portait. Leur suggestion renforcerait cette tradition canadienne, qui privilégie la création d’institutions favorisant la tolérance et la réconciliation, et éviterait les dissidences qu’un musée traditionnel pourrait susciter quant à la forme et au contenu de l’exposition.

 

Le souvenir des victimes

Au cours de la Deuxième Guerre mondiale, les soldats canadiens ont certes libéré les détenus de Westerbork, en Hollande, un camp de transition d’où les Juifs et autres victimes du génocide nazi étaient envoyés dans les infâmes camps de la mort, mais pas ceux des camps de la mort, qui ont été libérés par les forces soviétiques, britanniques et américaines. Il n’en demeure pas moins que tout au long du XXe siècle, le Canada est devenu la terre d’asile de millions d’immigrants venus s’y réfugier de partout dans le monde pour échapper aux actes génocides, crimes contre l’humanité et autres atrocités commis ou appréhendés dans leurs pays d’origine. Ainsi, comme des millions de Canadiens ont personnellement vécu ces horreurs ou en ont pris connaissance par le récit que leur en ont fait leurs parents, leurs grands-parents ou d’autres membres de leur famille, ces événements ont enrichis notre histoire commune.

Depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, toutefois, les Forces canadiennes ont fortement contribué aux opérations de maintien de la paix mises sur pied par les Nations Unies, et à la faveur de ces opérations, un nombre beaucoup grand de membres actifs des Forces et d’anciens combattants participant à ces missions civiles ou militaires ont été personnellement témoins de crimes contre l’humanité et d’actes génocides. La vie dans la société canadienne ne les avait nullement préparés aux horreurs qu’ils ont vues, et même aujourd’hui, leur formation les prémunit très mal contre les expériences de ce type qu'ils pourraient vivre à l’étranger. Et cela vaut non seulement pour les militaires actifs, mais aussi pour les civils envoyés à l’étranger pour accélérer la remise sur pied des systèmes judiciaires, faciliter les enquêtes sur les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité et aider les organismes non gouvernementaux à s’occuper des victimes et à rebâtir les économies locales ruinées.

 

Une façon canadienne de dégager un consensus

La piste de solution évoquée par le Musée canadien des civilisations amène le comité a suggérer à Patrimoine Canada d'évaluer l'opportunité que soit confié à un ou à des centres académiques l'examen de tous les génocides et crimes contre l'humanité. Ce centre ou ces centres pourraient constituer de la documentation sur les actes génocides et crimes contre l’humanité commis au XXe siècle et correspondant à la définition donnée aux articles 6 et 7 de la partie 2 du Statut de Rome sur la Cour criminelle internationale, document dont le Canada est signataire, et de publier des ouvrages sur le sujet.

La sensibilisation des Canadiens en général et des jeunes en particulier à l’histoire et à la nature des génocides et des crimes contre l’humanité serait au coeur de ce projet.

 

L’importance de la sensibilisation

Tous les témoins ont convenu que les Canadiens de tous âges et de tous horizons devraient pouvoir s’informer des actes génocides et des crimes contre l’humanité commis au XXe siècle. S’informer les rendrait conscients de l’infamie dans laquelle des gens ordinaires et respectueux des lois peuvent sombrer et des crimes qu’ils peuvent commettre. Tous pourraient ainsi être sensibilisés à la multitude de formes que peuvent prendre les crimes contre l’humanité et aux phénomènes qui peuvent conduire au génocide pur et simple : dans un premier temps, le préjugé social ancré débouche sur la ségrégation légale, puis la suppression par l’État des droits fondamentaux des parias contribue à les déshumaniser et, enfin, le « nettoyage ethnique » se transforme en tuerie systématique que l’État érige en politique officielle dans le but d’exterminer partiellement ou complètement un groupe national, ethnique, racial ou religieux en tant que tel.

Idéalement, la sensibilisation devrait viser à promouvoir le respect des droits de la personne, la tolérance à l’égard des différences et les dégoûts vis-à-vis la discrimination et ses manifestations des atrocités afin d'empêcher la transmission de ses derniers de génération en génération.

 

Reconnaissance

Le Comité a trouvé intéressante la proposition faite par la Ukrainian Canadian Civil Liberties Association et consistant à créer un Livre canadien des morts pour immortaliser les victimes de génocides ou de crimes contre l’humanité. Le passé des peuples du Canada recèle de nombreux événements traumatiques qui ne se sont toutefois pas tous produits au XXe siècle et qui ne correspondent pas tous à la définition moderne du génocide ou du crime contre l’humanité.

Le Comité est sensible à la nécessité d’une réconciliation entre Canadiens de confessions religieuses et d’origines ethniques différentes et le besoin de savoir et de se souvenir. Cette question pourrait être étudiée par le ou les centres suggérés plus haut.

 

Conclusion

Nombre de témoins entendus ont exprimé leur appréciation relativement au projet de loi C-224, y voyant un excellent point de départ. C'est dans cet esprit que le comité offre quelques pistes susceptibles d'y donner une suite respectueuse, à la poursuite des objectifs et de ce projet de loi, qui sont la recherche, l'éducation et la mémoire des victimes des génocides et des crimes contre l'humanité.

Un exemplaire des procès-verbaux pertinents du Comité permanent du patrimoine canadien (Séances no 37, 38, 40 et 41, qui comprent le présent rapport) est déposé.

 

 

Respectueusement soumis

Le président,

 

Clifford Lincoln, député, Lac St-Louis