JUST Rapport du Comité
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CHAPITRE 9 :
ENJEUX
GÉNÉRAUX ET
ENJEUX À LONG TERME TOUCHANT
LE SYSTÈME CORRECTIONNEL ET
DE MISE EN LIBERTÉ SOUS CONDITION
9.1 Au cours de ses travaux, le Sous-comité a pu constater que le système correctionnel et de mise en liberté sous condition a beaucoup changé depuis l'adoption de la Loi actuelle. Les changements les plus évidents touchent l'aspect physique de bon nombre d'établissements. D'autres, moins évidents ceux-là, ont une portée beaucoup plus large.
9.2 La composition de la population carcérale a changé elle aussi. Le système correctionnel et de mise en liberté sous condition et son personnel sont soumis à des exigences plus grandes et plus complexes. De nouvelles façons de gérer sont apparues. Ces changements se sont produits à une allure tellement rapide qu'il est de plus en plus difficile pour le personnel de remplir efficacement ses fonctions de plus en plus complexes. Les victimes et les Canadiens en général se montrent plus exigeants à l'égard du système, car ils lui font moins confiance.
9.3 Ce dernier chapitre du rapport traite de ces enjeux et d'autres questions connexes. Nous les avons regroupés ici parce qu'ils touchent, directement ou indirectement, toutes les composantes du système correctionnel et de mise en liberté sous condition, ainsi que les personnes qui y travaillent ou qui y sont soumises. Nous traiterons également de plusieurs questions touchant le long terme.
9.4 L'alinéa 4j) de la Loi prévoit que le Service correctionnel doit fournir de la formation, des possibilités de perfectionnement professionnel et de bonnes conditions de travail à ses employés. Ces derniers doivent aussi avoir la possibilité de participer à l'élaboration des politiques et des programmes correctionnels.
9.5 Au cours de ses visites dans les établissements, le Sous-comité a souvent pu constater les difficultés professionnelles auxquelles est confronté quotidiennement le personnel. Partout, on a soulevé le problème de la formation et du perfectionnement. On en a parlé en rapport avec les fonctions que doit remplir le personnel auprès d'une clientèle difficile dans un milieu caractérisé par la complexité, les changements opérationnels et de politiques, et des ressources limitées.
9.6 Le Syndicat des employés du solliciteur général a soulevé ce problème dans le mémoire qu'il a adressé au Sous-comité. Il a recommandé que l'alinéa 4j) de la Loi soit modifié de façon, premièrement, à permettre aux associations d'employés de participer à l'élaboration des politiques et des programmes correctionnels et, deuxièmement, à exiger la prestation d'une formation permanente obligatoire et normalisée qui soit appropriée à chaque cas et dont le Service correctionnel assurerait la gestion à l'échelle nationale123.
9.7 Le Sous-comité se rallie à cette recommandation. L'ajout de ces dispositions aux principes de fonctionnement proposés ailleurs dans le présent rapport permettrait de reconnaître les difficultés auxquelles est confronté le personnel de correction dans son milieu de travail et garantirait que l'employeur lui donne les outils nécessaires pour faire son travail de façon efficace et en toute sécurité. Cette modification servira et de fondement pour la résolution d'un bon nombre de problèmes liés à la formation et à des questions connexes.
RECOMMANDATION 42
Le Sous-comité recommande de modifier l'alinéa 4j) de la Loi sur le Service correctionnel et la mise en liberté sous condition de façon à permettre aux associations d'employés de participer à l'élaboration des politiques et des programmes correctionnels, et à exiger pour le personnel une formation permanente obligatoire qui soit appropriée.
9.8 Les questions de formation ne sont pas seulement importantes pour les personnes qui participent au processus de correction et de mise en liberté sous condition, mais aussi pour les Canadiens qui en subissent les effets ou qui viennent en contact avec lui d'une façon quelconque. Ces questions ont beaucoup préoccupé le jury du coroner qui s'est penché sur les événements entourant la mort de Robert Gentles survenue en octobre 1993, quand on a sorti M. Gentles de force de sa cellule du pénitencier de Kingston. Sur les 74 recommandations du jury du coroner, 11 touchaient la formation du personnel de correction. Ces dernières portaient, entre autres, sur la formation en réanimation cardiorespiratoire, le recyclage, la sensibilisation aux diverses cultures, les techniques de sortie de cellule et la façon de traiter avec les détenus réticents. Le Service correctionnel a répondu officiellement à ces recommandations en janvier 2000, en précisant les mesures prises pour offrir aux employés la formation nécessaire.
9.9 Le Sous-comité estime essentiel de donner une formation de haut calibre au personnel du système correctionnel et de mise en liberté sous condition. Ainsi, il pourra non seulement mieux faire son travail, mais aussi remplir les obligations juridiques qui lui ont été conférées par le Parlement lors de l'adoption de la Loi en 1992. Il sera également mieux armé pour affronter les conditions changeantes dans lesquelles il travaille chaque jour. Son niveau de satisfaction professionnelle augmentera, ce qui se répercutera sur le moral au travail.
9.10 Le Sous-comité a examiné la documentation et les cours de formation et de perfectionnement qu'offrent le Service correctionnel et la Commission nationale des libérations conditionnelles, et a constaté que les deux organismes font des efforts louables pour répondre aux besoins de leur personnel sur ce plan. Mais il ne suffit pas d'offrir des cours et d'autres moyens de formation, encore faut-il les rendre disponibles et accessibles.
9.11 En parlant au personnel de correction, le Sous-comité s'est souvent fait dire qu'il n'était pas toujours facile de se prévaloir des possibilités de formation et de perfectionnement. On a invoqué plusieurs raisons à cela : soit que la formation souhaitée n'était pas disponible au moment voulu, soit que les employés ne pouvaient se rendre aux séances parce qu'il n'y avait personne pour les remplacer, soit encore que les crédits budgétaires étaient insuffisants, déjà dépensés ou réaffectés à d'autres fonctions. Certaines personnes ont dit que les cours étaient trop théoriques et qu'ils n'étaient pas directement liés aux tâches quotidiennes.
9.12 Le Sous-comité a entendu à maintes reprises les employés de première ligne dire que les fonctions qu'ils accomplissent quotidiennement sont souvent absentes de leurs descriptions de poste. Ils se plaignent en outre que la formation en milieu de travail est souvent superficielle, brève et incomplète. De plus, ils ne sont pas toujours tenus au courant, en temps utile, des changements législatifs, réglementaires et de politiques qui influent sur leurs tâches quotidiennes.
9.13 Le jury du coroner dans l'affaire Gentles a recommandé que les employés du Service correctionnel suivent une formation de sensibilisation au racisme, aux diverses cultures et au harcèlement. Le Service a répondu qu'il continuera de fournir ce genre de formation à tous les employés. Or le Sous-comité a pu constater lors de ses visites dans les établissements et ailleurs que la composition ethnoculturelle de la population carcérale a changé au cours des dernières années et varie en outre d'une région à l'autre. Il importe donc plus que jamais que le Service correctionnel et la Commission nationale des libérations conditionnelles élargissent leurs programmes de recrutement et de formation en fonction de cette nouvelle composition ethnoculturelle de la population carcérale.
9.14 Dans les réponses qu'il a données aux questions écrites du Sous-comité en juillet 1999, le Service correctionnel a déclaré que ses dépenses de formation représentent environ 2 p. 100 de la masse salariale, comparativement à 3 p. 100 à Statistique Canada, à 2,6 p. 100 à Santé Canada, à 1,7 p. 100 à Travaux publics Canada et à 1,1 p. 100 à la Commission de la fonction publique.
9.15 Il est essentiel que le personnel du Service correctionnel et les membres de la Commission nationale des libérations conditionnelles bénéficient d'une formation professionnelle appropriée qui leur permette de bien s'acquitter des responsabilités importantes qui leur ont été conférées par le Parlement. Le Sous-comité n'est pas en mesure de juger si les efforts qui sont faits de ce côté à l'heure actuelle sont suffisants. Mais le Service correctionnel et la Commission des libérations conditionnelles ont, eux, la capacité et l'expertise nécessaires pour évaluer d'une façon permanente l'efficacité de la formation qu'ils offrent à tous les niveaux professionnels.
9.16 Le moment est propice en cette période de transition pour que le Service correctionnel et la Commission évaluent en profondeur la justesse, la disponibilité, la pertinence et l'efficacité de la formation qu'ils offrent et des systèmes de classification des postes. Ensuite, ils devraient s'efforcer d'exercer une surveillance constante dans ce domaine. Cela s'impose, non seulement pour fournir au personnel des possibilités de formation et d'avancement pertinentes et appropriées, mais aussi pour illustrer clairement l'objectif philosophique d'un apprentissage continu.
RECOMMANDATION 43
Le Sous-comité recommande que le Service correctionnel et la Commission nationale des libérations conditionnelles examinent en profondeur leurs programmes de formation et de classification des postes pour déterminer s'ils sont suffisants, disponibles, accessibles, pertinents et efficaces. Grâce à cet examen exhaustif : tous les postes seront assortis de descriptions de tâches détaillées qui refléteront constamment les fonctions réellement accomplies par les employés et les membres; tous les employés et les membres seront munis d'un manuel modifiable contenant l'information à jour nécessaire pour exécuter leurs tâches; tous auront accès à une formation en cours d'emploi à l'échelle nationale liée directement à leurs fonctions. Cela fait, les deux organismes devraient exercer une surveillance constante sur leurs programmes de formation et de classification des postes.
9.17 Comme le prévoient les articles 85 à 89 de la Loi, le Service correctionnel est tenu de fournir à tous les détenus les soins de santé essentiels et de leur donner un accès raisonnable à des soins de santé mentale non essentiels, afin de les aider à se réadapter et à réintégrer la collectivité. Dans ce contexte, on entend par « soins de santé » des soins médicaux, dentaires et de santé mentale fournis par des professionnels agréés et conformément à des normes reconnues par la profession124.
9.18 Lorsque le Service correctionnel prend des décisions au sujet du placement, du transfèrement et de l'isolement préventif d'un détenu, ou encore des décisions d'ordre disciplinaire, il doit prendre en considération son état de santé et ses besoins en soins de santé. Il doit aussi tenir compte de ces facteurs lorsqu'il prépare le détenu pour la mise en liberté et la surveillance communautaire.
9.19 En juillet 1999, le Service correctionnel a fourni les renseignements suivants au Sous-comité en réponse à ses questions sur les soins de santé. En 1998-1999, le Service correctionnel a consacré 82 millions de dollars aux soins de santé fournis aux détenus, y compris des soins de santé mentale, ce qui représente environ 8 p. 100 de son budget total. Trente pour cent du budget des soins de santé ont servi à payer les services de spécialistes, de médecins, de dentistes, d'infirmières, de psychiatres, de psychologues et autres. Les dépenses à ce titre représentent le poste le plus élevé du budget de soins de santé. Les autres coûts importants sont les suivants : 5 millions de dollars pour des séjours d'hospitalisation à l'extérieur, 4,6 millions de dollars pour des travaux de laboratoire et de radiologie, et 5,3 millions de dollars pour des médicaments.
9.20 Le Service correctionnel a déclaré au Sous-comité qu'il avait de la difficulté à attirer des professionnels de la santé agréés, surtout des psychiatres et des psychologues. Cela s'explique en partie par le fait que la rémunération qu'il offre n'est pas compétitive avec celle pratiquée dans le secteur privé ou les autres ordres de gouvernement.
9.21 À la demande du Sous-comité, le Service correctionnel a identifié comme suit, en juillet 1999, ses nouveaux besoins en soins de santé :
- prévalence de maladies infectieuses, surtout l'hépatite et le VIH;
- problèmes de santé mentale;
- population carcérale vieillissante;
- soins chroniques et palliatifs;
- besoin croissant d'information des détenus sur les soins de santé;
- introduction de mesures de réduction des préjudices pour éviter les conséquences de l'abus d'alcool ou d'autres drogues et des comportements dangereux;
- introduction continue de nouvelles techniques d'évaluation de la santé et de nouveaux traitements.
9.22 En dernier lieu, le Service correctionnel a fait savoir au Sous-comité qu'il prévoyait des insuffisances budgétaires dans les années à venir au titre des soins de santé, en raison de l'augmentation des coûts des diagnostics, des médicaments ainsi que des coûts liés aux évaluations et aux traitements. Il conclut en affirmant qu'il aurait besoin de 10 millions de dollars de plus annuellement pour répondre aux nouveaux besoins en soins de santé et de santé mentale.
9.23 Le Sous-comité a visité un certain nombre d'infirmeries et d'unités de santé mentale dans les établissements correctionnels. Il a constaté que le personnel de ces services est confronté chaque jour à des problèmes de santé parfois très graves. D'après les observations du Sous-comité, le personnel de santé et le personnel connexe fonctionnent souvent avec des ressources réduites qui risquent de diminuer encore. Même s'ils travaillent dans ces conditions difficiles, les membres du personnel que le Sous-comité a rencontrés font preuve d'un engagement certain à l'égard de leurs responsabilités, mais ils sont frustrés par les contraintes de ressources auxquelles ils sont soumis tous les jours.
9.24 La prestation efficace de soins de santé aux détenus par le Service correctionnel est une question qui en touche beaucoup d'autres dont nous parlons dans le présent rapport. Les soins de santé fournis aux détenus sont importants à toutes les étapes de la gestion de la peine, à partir du moment où les délinquants sont écroués jusqu'à leur mise en liberté sous condition dans la collectivité, en passant par les diverses décisions qui doivent être prises à leur sujet. Ce n'est pas seulement le bien-être du détenu qui est en jeu, mais aussi la santé de tous ceux avec qui il vient en contact, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'établissement correctionnel.
9.25 Le personnel de soins de santé, les détenus, les membres du comité consultatif de citoyens et d'autres ont soulevé auprès du Sous-comité la question de l'accès à des soins de santé de haute qualité. Tous reconnaissent que le personnel de soins de santé du Service correctionnel fait son possible avec les ressources limitées dont il dispose. Mais ils ont souligné, en particulier, les retards des services de soins de santé spécialisés et la difficulté de faire faire des évaluations en temps opportun. Ces problèmes sont invariablement liés à l'insuffisance des ressources et à la difficulté d'obtenir les services de spécialistes qui pourraient fournir un traitement approprié.
9.26 M. Thomas Mann, de Prison Life Media, a bien décrit la situation lorsqu'il s'est adressé au Sous-comité en ces termes :
Bien qu'il y ait un grand nombre de professionnels de la santé très consciencieux et dévoués qui travaillent au Service correctionnel du Canada, ils ont, habituellement, trop d'activités, peu de ressources et pas assez d'employés de soutien. Leurs patients ont en commun l'expérience d'une origine socio-économique faible, la consommation abusive de drogues et une mauvaise opinion d'eux-mêmes : ces éléments contribuent à détériorer la santé physique et mentale en général.
Le stress dans les centres médicaux des établissements correctionnels est souvent extrême, en raison du milieu physique, de la clientèle, de la tension avec les autres employés et les dirigeants de l'établissement, ainsi qu'à la crainte de savoir que les Canadiens meurent à cause de politiques mal conçues125.
9.27 Par ailleurs, tant le personnel du Service correctionnel que les détenus s'inquiètent qu'il n'y ait pas de personnel médical et infirmier 24 heures sur 24 dans les établissements correctionnels. L'une des conséquences des récentes compressions financières est la réduction des ressources de soins de santé dans bon nombre de pénitenciers. On a tenté de remédier au problème en éliminant le quart infirmier de nuit dans tous les établissements sauf les plus isolés. Il a donc fallu former le personnel non médical et non affecté aux soins de santé pour qu'il puisse donner les premiers soins et d'autres traitements d'urgence.
9.28 M. Thomas Mann, de Prison Life Media, décrit la situation au Sous-comité en ces termes :
La plupart des établissements, dont la population excède, pour un bon nombre d'entre eux, 500 détenus, n'offrent pas de services de santé entre 22 h et 6 h. Dans certains cas, de nombreuses heures s'écoulent avant qu'ils n'aient accès aux services d'urgence. Le personnel de correction de base ne possède pas de formation médicale et n'est pas très nombreux. Un certain nombre de décès ont été causés par des surdoses d'héroïne; ce sont des tragédies qui auraient pu être évitées par l'administration du médicament Narcanon. Mais il est interdit au personnel de correction d'administrer le médicament salvateur; seuls les professionnels de la santé peuvent le faire126.
9.29 Le Syndicat des employés du Solliciteur général a lui aussi soulevé ce point dans le mémoire qu'il a présenté au Sous-comité. Il propose de modifier la Loi de façon à exiger que le Service correctionnel fournisse des soins de santé aux détenus en tout temps, c'est-à-dire 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Il fonde sa recommandation sur le fait que les compressions budgétaires dans le domaine de la santé ont fait en sorte que les employés du Service qui ne sont pas des professionnels de la santé agréés sont maintenant tenus de dispenser des soins médicaux d'urgence127.
9.30 Le Sous-comité partage ces préoccupations. Les soins de santé, quels qu'ils soient, devraient être administrés par des professionnels de la santé ou de la médecine agréés et compétents. Il devrait en être ainsi, sauf dans des circonstances exceptionnelles où des professionnels ne sont pas disponibles et où l'urgence médicale exige que des personnes présentes qui ont reçu la formation nécessaire dispensent des soins immédiats.
9.31 Ces dernières années, le Service correctionnel a adopté une politique en matière de soins de santé selon laquelle le personnel infirmier est, dans la plupart des cas, le premier intervenant dans les soins de santé et les soins médicaux donnés aux détenus. Cette politique a souffert jusqu'à un certain point de la décision de ne pas exiger la présence permanente d'un personnel infirmier dans les établissements correctionnels. Cette décision, prise afin de réduire les coûts, alourdit injustement le fardeau des employés qui ne sont pas des professionnels de la santé agréés et qui doivent quand même apporter un secours médical d'urgence. Il en résulte aussi que la santé des détenus qui ont des problèmes médicaux graves est compromise.
9.32 Selon le Sous-comité, il faut à tout prix fournir aux détenus des soins de santé de haut calibre de la façon la plus efficace et la plus efficiente possible. Ne pas le faire causera des préjudices non seulement aux détenus, mais également aux personnes avec qui ils viennent en contact à l'intérieur et à l'extérieur des établissements. Le personnel du Service correctionnel fait son possible avec des ressources limitées, mais il est évident qu'il pourrait être plus efficace si l'on augmentait le budget ne serait-ce que modestement.
RECOMMANDATION 44
Le Sous-comité recommande que le Service correctionnel du Canada augmente l'allocation budgétaire prévue pour la santé des détenus, en utilisant les ressources financières actuelles ou accrues, de façon à offrir la prestation de services de qualité à l'interne ou de l'extérieur du Service correctionnel.
9.33 Les employés du Service correctionnel, leurs délégués syndicaux et d'autres ont signalé au Sous-comité plusieurs problèmes liés aux soins de santé. Ce sont les employés de première ligne qui ont le contact le plus direct avec les détenus sur une base quotidienne et qui sont donc les plus susceptibles d'être au courant de leurs besoins en soins de santé. Ce sont donc eux aussi qui risquent le plus d'être confrontés à des urgences médicales qui pourraient avoir un effet immédiat ou éventuel sur leur propre santé et leur propre sécurité.
9.34 Ces employés ont par conséquent des préoccupations de deux types différents. Ils veulent avoir accès à des renseignements sur la santé et les antécédents médicaux des détenus avec qui ils travaillent. Ils veulent aussi être assurés qu'ils auront rapidement accès à une aide adéquate pour traiter les cas d'urgence et les événements inhabituels.
9.35 L'article 13 de la Loi se lit comme suit :
Faute d'un certificat délivré par un professionnel de la santé agréé contenant l'information disponible sur l'état de santé de la personne visée à l'article 12 et précisant si elle semble ou non atteinte d'une maladie grave, contagieuse ou infectieuse, le directeur du pénitencier n'est pas tenu d'écrouer cette personne.
9.36 Cette disposition autorise le directeur de l'établissement correctionnel à ne pas écrouer un délinquant pour qui aucun certificat de santé signé n'a été délivré. Les employés du Service correctionnel qui sont en contact direct avec des détenus veulent avoir accès à l'information concernant leur santé le plus tôt possible au cours de la peine afin de pouvoir prendre les précautions nécessaires pour se protéger eux-mêmes. À cette fin, le Syndicat des employés du Solliciteur général recommande dans son mémoire que l'expression, à l'article 13, « n'est pas tenu d'écrouer » soit remplacée par les mots « n'écroue pas ». Il recommande également de modifier la disposition de façon à exiger que le Service correctionnel communique aux membres de son personnel l'information sur l'état de santé des détenus.
9.37 Le Syndicat des employés du Solliciteur général explique comme suit cette recommandation :
Actuellement, tous les agents ont le statut d'agents de la paix et ils peuvent être en contact avec les détenus. Ils ont le droit de connaître l'état de santé qui pourrait avoir des répercussions sur leur propre santé et sécurité. La santé et la sécurité des agents devraient l'emporter sur les préoccupations concernant la vie privée du délinquant128.
9.38 Le Syndicat des employés du Solliciteur général recommande aussi de modifier en conséquence le paragraphe 23(1) de la Loi. Cette disposition exige que le Service correctionnel prenne toutes les mesures possibles pour obtenir cinq genres différents de renseignements au sujet d'un délinquant qui est condamné, écroué ou transféré à un pénitencier. Le Syndicat recommande d'ajouter une sixième catégorie de renseignements, soit « un certificat signé par un professionnel de la santé agréé, qui précise l'information disponible sur l'état de santé » du détenu129.
9.39 Le Sous-comité comprend bien les préoccupations des employés de première ligne du Service correctionnel au sujet des répercussions possibles sur leur propre bien-être de l'état de santé et des antécédents médicaux des détenus. Il faudrait les renseigner sur la façon de se protéger, vu surtout la prévalence des maladies infectieuses de nos jours.
9.40 Il faut cependant tenir compte d'autres intérêts lorsqu'on étudie ces questions. Les détenus peuvent encore raisonnablement s'attendre à ce que leur vie privée soit protégée par le biais de la Charte des droits et de la Loi sur la protection de la vie privée, quoique dans une mesure moindre qu'auparavant. En donnant au personnel de correction davantage accès aux renseignements sur l'état de santé et les antécédents médicaux des détenus, il faut prendre soin de protéger également le droit du délinquant à sa vie privée. Toutefois, le Sous-comité est d'accord avec le Syndicat des employés du Solliciteur général pour dire qu'il est possible de prévoir un tel mécanisme de protection en modifiant les articles 13 et 23 de la Loi.
RECOMMANDATION 45
Le Sous-comité recommande de modifier l'article 13 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition de façon à exiger que le directeur d'un établissement correctionnel refuse d'écrouer un délinquant si aucun certificat n'a été délivré par un professionnel de la santé agréé au moment de son admission ou de son transfèrement. Il faudrait également apporter une modification prévoyant que le personnel de correction aura accès à l'information sur l'état de santé des détenus, seulement dans la mesure strictement nécessaire pour lui permettre de se protéger lui-même.
RECOMMANDATION 46
Par conséquent, le Sous-comité recommande de modifier également l'article 23 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition de façon à exiger que le Service correctionnel obtienne le certificat de santé dont il est question à l'article 13 à l'égard des délinquants condamnés, écroués ou transférés à un pénitencier.
9.41 Dans presque tous les établissements correctionnels que le Sous-comité a visités, on a soulevé la question de l'entrée, de la présence et de l'utilisation de drogues illicites dans un milieu où il ne devrait pas y en avoir. Le Sous-comité a aussi appris que la fabrication, la distribution et la consommation d'alcool constituent un problème sérieux dans bien des établissements. Les conséquences de la présence d'alcool et de drogues dans les établissements peuvent être néfastes à la fois pour le milieu correctionnel et pour les résultats que le personnel de correction tente d'atteindre auprès des détenus.
9.42 Beaucoup de délinquants tombent dans l'activité criminelle parce qu'ils sont toxicomanes. D'autres commettent des infractions liées à la drogue et sont condamnés. Bon nombre sont toxicomanes au moment où ils sont incarcérés. Leur plan correctionnel exige souvent qu'ils participent à des programmes de désintoxication en prévision de leur mise en liberté sous condition dans la collectivité. La disponibilité et la consommation d'alcool et de drogues nuisent aux efforts qui sont faits pour supprimer les facteurs criminogènes des détenus.
9.43 D'autres conséquences découlent de la présence d'alcool et de drogues dans les établissements correctionnels. La possession, la distribution et le trafic de drogues constituent des infractions criminelles. La fabrication d'alcool pour la vente et la distribution est illégale. Dans les établissements correctionnels, ces activités criminelles s'accompagnent souvent de comportements inacceptables.
9.44 Toutes sortes de personnes font entrer des drogues dans les établissements correctionnels, souvent sous le coup de la menace ou d'autres formes de coercition. Une fois les drogues dans l'établissement, leur distribution donne souvent lieu à bon nombre des phénomènes qu'on observe dans la collectivité en rapport avec le commerce de la drogue : dettes, intimidation et confrontations violentes. C'est aussi le cas lorsque des détenus fabriquent de l'alcool dans les établissements.
9.45 Le commerce de la drogue et de l'alcool nuit à la sûreté et la sécurité des établissements correctionnels et met en danger à la fois le personnel du Service correctionnel et les détenus. Il nuit aussi aux progrès que font les détenus grâce à leur participation à des programmes antidrogues et à d'autres programmes.
9.46 C'est dans ce contexte et pour régler ces problèmes que le Service correctionnel a adopté sa Stratégie canadienne antidrogue130. L'objectif de base de cette stratégie est de créer un milieu pénitentiaire sûr et libre de toute drogue, qui aidera les détenus à réintégrer la société à titre de citoyens respectueux des lois. À cette fin, le Service correctionnel affirme qu'il ne tolérera ni la consommation d'alcool ou de drogues, ni le trafic de drogues dans ses établissements.
9.47 Les directeurs d'établissement doivent élaborer et mettre en application des stratégies antidrogues de façon à établir un équilibre entre la détection, la dissuasion et le traitement. Pour ce faire, ils doivent recourir à l'analyse d'urine, à l'évaluation de l'effet de la consommation ou du trafic d'alcool ou de drogues, à des mesures administratives et à des sanctions disciplinaires.
9.48 Le Sous-comité est d'avis que la présence d'alcool et de drogues dans les établissements du Service correctionnel est un problème grave qu'on doit enrayer par des mesures préventives vigoureuses. Le Service correctionnel a pour politique de ne tolérer ni alcool ni drogues dans ses établissements. Cette politique fondamentale doit être renforcée par des mesures d'interdiction fermes.
9.49 On ne pourra pas, par ces seules mesures, éliminer toutes les conséquences de la consommation illicite d'alcool et de drogues dans les établissements. Le Service correctionnel a déjà mis en place certains programmes et politiques préventifs et curatifs. Il faudrait toutefois les élargir et imaginer d'autres approches novatrices aux problèmes de toxicomanie chez les détenus. Il faudrait, pour ce faire, à la fois la participation des établissements correctionnels et celle de la collectivité. La réinsertion sociale sera plus susceptible de réussir si l'on résout efficacement les problèmes de toxicomanie et si l'on élimine les conséquences pour la santé et les autres effets qui en découlent.
9.50 Le Sous-comité est d'avis que ces programmes antidrogues continueront d'être moins efficaces si l'on ne réduit pas de façon appréciable l'entrée de drogues illicites dans les établissements correctionnels. Il a appris que ce sont surtout des personnes de l'extérieur qui pénètrent dans les établissements qui y apportent des drogues. Il est donc important de déceler et de prévenir le plus possible ces entrées de drogue.
9.51 Ainsi, par exemple, on pourrait fouiller toutes les personnes qui entrent dans l'établissement et qui en sortent. La Loi et le Règlement autorisent des fouilles plus ou moins approfondies, selon les circonstances. Le Sous-comité est d'avis que cela ne devrait pas changer. Selon lui, toutefois, toute personne qui entre dans un établissement correctionnel ou en sort devrait être soumise à une fouille discrète pour déterminer si elle a de la drogue sur elle. À l'heure actuelle, bien des établissements se servent d'un scanner ionique pour les fouilles. Il y a sans doute d'autres façons de procéder à des fouilles discrètes, et il faudrait y recourir dans les circonstances appropriées.
9.52 Parce que le Sous-comité juge grave le problème de l'entrée de drogues illicites, il estime que toutes les personnes qui entrent dans un pénitencier ou en sortent devraient faire l'objet d'une fouille discrète pour déterminer la présence de drogues, qu'il s'agisse de détenus, de visiteurs, d'entrepreneurs, de bénévoles, de membres du personnel de correction ou d'autres personnes.
RECOMMANDATION 47
Le Sous-comité recommande de modifier les dispositions de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition touchant les fouilles et les saisies de façon à exiger que toutes les personnes qui entrent dans un pénitencier ou en sortent fassent l'objet d'une fouille discrète pour déterminer la présence de drogues.
9.53 L'article 62 de la Loi exige que le Service correctionnel affiche un avis à l'entrée des terrains des établissements correctionnels et aux postes de vérification pour avertir les visiteurs qu'eux-mêmes et leur véhicule peuvent faire l'objet d'une fouille conformément à la Loi et au Règlement. En conséquence de la recommandation précédente, toute personne qui entre dans un pénitencier ou en sort serait susceptible de faire l'objet d'une fouille discrète pour déterminer la présence de drogues. Par conséquent, le Sous-comité est d'avis qu'il faudrait modifier l'article 62 pour tenir compte de cette proposition.
RECOMMANDATION 48
Le Sous-comité recommande de modifier l'article 62 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition de façon que chaque pénitencier soit tenu d'afficher un avis bien en vue à l'entrée des terrains ou au poste de vérification pour avertir les visiteurs qu'eux-mêmes et leur véhicule peuvent faire l'objet d'une fouille conformément à la Loi et au Règlement; l'avis devrait mentionner qu'il s'agit d'une fouille pour déterminer la présence de drogues.
9.54 Le Sous-comité a appris que ce sont les visiteurs, entre autres, qui font entrer illicitement des drogues dans les établissements correctionnels. Il n'y a aucun doute que les privilèges de visite jouent un rôle important dans la réadaptation et la réinsertion sociale des détenus. Ils permettent de maintenir et de renforcer les liens avec le conjoint, la famille et la collectivité. Les visites peuvent prendre différentes formes : des visites-contacts dans une aire commune et des visites familiales privées dans des installations prévues à cette fin.
9.55 Utiliser les occasions de visites familiales et communautaires pour faire passer de la drogue dans un établissement correctionnel revient à compromettre sérieusement ces éléments importants de la réadaptation et de la réinsertion sociale des détenus.
9.56 Il faut faire savoir clairement aux détenus et aux visiteurs que l'entrée de drogues illicites ne sera pas tolérée et qu'elle entraînera des conséquences et pour le détenu et pour le visiteur. Par conséquent, le Sous-comité a conclu qu'il faudrait, dans un tel cas, suspendre pour une période déterminée les droits de visite du détenu et du visiteur impliqués. Les conséquences d'une telle infraction doivent être expliquées très clairement et aux détenus et aux visiteurs.
RECOMMANDATION 49
Le Sous-comité recommande de modifier la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition et le Règlement de façon à permettre au directeur d'un établissement correctionnel de suspendre pour une période déterminée les droits de visite d'un détenu et/ou d'un visiteur lorsqu'il a été déterminé que ce dernier a tenté d'apporter de la drogue dans l'établissement.
9.57 Le Sous-comité estime que ces stratégies d'interdiction des drogues dans les établissements correctionnels et d'autres aussi sont nécessaires, mais elles ne réussiront pas à stopper complètement l'entrée de drogues. Même si elles réussissent, il faudra néanmoins songer à se pencher sur les répercussions de l'entrée de drogues dans les établissements sur les soins de santé et d'autres considérations. S'ils l'ont fait en établissement, les détenus continuent souvent de consommer de l'alcool ou de la drogue une fois retournés dans la collectivité. Par conséquent, pour qu'un programme de lutte contre l'alcool ou la drogue fonctionne bien, il doit reposer à la fois sur l'établissement et sur la collectivité.
DÉLINQUANTES À NIVEAU DE SÉCURITÉ MAXIMALE OU AYANT DES BESOINS SPÉCIAUX
9.58 Depuis quasiment l'ouverture de la Prison des femmes de Kingston en 1934, commissions et comités réclament la fermeture du pénitencier afin de le remplacer par d'autres types d'établissements. La plus récente initiative à cet effet a été lancée en 1990 par le Groupe d'étude sur les femmes purgeant une peine fédérale, qui a publié un rapport intitulé La création de choix et a demandé de remplacer le pénitencier par quatre établissements régionaux pour les femmes et un pavillon de ressourcement pour les détenues autochtones. L'administration de ces nouvelles installations et les programmes offerts aux détenues seraient façonnés en fonction d'une population carcérale féminine, différente de la population masculine.
9.59 En 1990, le gouvernement fédéral a annoncé qu'il acceptait ces propositions et a amorcé les préparatifs nécessaires à leur réalisation, Le Service correctionnel a ainsi ouvert quatre établissements régionaux au milieu des années 1990, soit à Truro (Nouvelle-Écosse), à Joliette (Québec), à Kitchener (Ontario) et à Edmonton (Alberta), et le pavillon de ressourcement pour les détenues autochtones a ouvert ses portes à Maple Creek, en Saskatchewan. Des délinquantes sous responsabilité fédérale ont aussi été incarcérées au Centre correctionnel pour femmes de Burnaby, dans le cadre d'une entente d'échange de services conclue avec la Colombie-Britannique.
9.60 Plusieurs évasions et d'autres événements sont survenus peu après l'ouverture de ces établissements régionaux qui ont montré clairement au Service correctionnel que les nouvelles installations ne convenaient pas à un certain nombre de détenues sous responsabilité fédérale. Le Service a donc incarcéré ces délinquantes à sécurité maximale et aux besoins spéciaux dans des petites unités autonomes à l'intérieur d'établissements correctionnels pour hommes ou dans la Prison des femmes de Kingston, encore ouverte. Comme ces dispositions n'ont contenté personne, le Service s'est mis en devoir de trouver une solution permanente et à long terme aux problèmes de l'incarcération de ces femmes sous responsabilité fédérale.
9.61 Conscient de la complexité des questions entourant l'incarcération des délinquantes sous responsabilité fédérale, le Sous-comité a visité le plus grand nombre possible d'établissements correctionnels pour femmes, dans les délais fixés pour l'étude. Il s'est rendu dans plusieurs installations régionales, au pavillon de ressourcement pour les détenues autochtones, dans plusieurs des petites unités pour les cas spéciaux dans des établissements correctionnels pour hommes, ainsi que dans les portions occupées de la Prison des femmes de Kingston.
9.62 Le Sous-comité a compris, comme nombre d'autres intervenants avant lui, qu'il était grand temps que la Prison de Kingston ferme ses portes. Il ne faut pas y voir un reproche à l'égard des travailleurs de première ligne ou des équipes de gestion qui travaillent avec les détenues dans cet établissement : ils font de leur mieux dans une situation difficile, traitant avec une population carcérale exigeante dans un vieil immeuble, dont les installations et l'infrastructure sont vétustes.
9.63 De plus, les unités autonomes destinées aux délinquantes à sécurité maximale et ayant des besoins spéciaux laissent à désirer pour plusieurs raisons. L'aspect matériel de ces installations, récemment construites, n'est pas mis en cause. Mais le petit groupe de femmes dans chaque unité présente des besoins et des facteurs criminogènes très divers, de sorte qu'il est difficile d'offrir à chacune des programmes adaptés, malgré les diligents efforts déployés par les travailleurs de première ligne pour faire de leur mieux dans des circonstances défavorables. De plus, les déplacements des délinquantes à l'extérieur de leur unité pour des soins de santé ou d'autres besoins entraînent des complications puisqu'il faut chaque fois empêcher les hommes détenus dans l'établissement de circuler dans les parages. Enfin, il y a lieu de s'interroger sur le bien-fondé d'incarcérer des femmes dans un établissement correctionnel pour une population masculine, lorsque l'on sait que bon nombre d'entre elles ont été malmenées par des hommes à un moment ou à un autre de leur vie.
9.64 Les visites du Sous-comité dans les établissements régionaux et le pavillon de ressourcement ont offert un contraste saisissant. En premier lieu, les établissements, de construction récente, se présentent comme de petites maisonnettes où les délinquantes, à niveau de sécurité moyenne ou minimale, vivent en petit nombre et se chargent de nombreuses tâches ménagères et d'autres besoins. Les programmes qui y sont réalisés sont axés sur les femmes et diffèrent de ceux que l'on retrouve dans un milieu correctionnel traditionnel. Bon nombre des intervenants de première ligne que le Sous-comité a rencontrés viennent d'ailleurs dans le Service ou de l'extérieur, mais ont une expérience et une compétence appropriées. Il est très clair que ces travailleurs ont à coeur les valeurs véhiculées dans ces nouvelles installations et tiennent à les mettre en pratique.
9.65 Le Sous-comité est très sensible aux questions difficiles qui entourent toute tentative de traiter équitablement et efficacement les délinquantes à niveau de sécurité maximale ou ayant des besoins spéciaux. C'est sans doute l'une des questions les plus épineuses que le présent rapport et le Service correctionnel aient à aborder, et elle ne se prête pas à une solution simple.
9.66 En septembre 1999, le Service correctionnel a annoncé qu'il adoptait à l'égard de ces questions une stratégie d'intervention intensive, soit : accroître le niveau de sécurité des unités d'habitation à environnement structuré dans les quatre établissements régionaux afin qu'elles puissent accueillir les délinquantes à sécurité maximales qui sont actuellement dans des établissements pour hommes; construire de nouvelles unités d'habitation à environnement structuré pour les femmes ayant des grands besoins dans chacun des établissements régionaux; fournir des programmes spécialisés aux deux groupes de délinquantes par le biais d'équipes interdisciplinaires. Le tout devrait être terminé d'ici septembre 2001, auquel moment la Prison des femmes de Kingston fermera définitivement.
9.67 Le Sous-comité ne peut pas formuler de remarques sur la stratégie, puisqu'il serait injuste de la commenter avant sa mise en oeuvre. Toutefois, certaines observations de nature générale s'imposent. Le Service correctionnel s'est accordé 24 mois pour réaliser complètement sa stratégie quand il l'a annoncée. Or, le Sous-comité estime qu'il faut accélérer cette réalisation s'il est possible de le faire, car il est inacceptable de retarder davantage la fermeture de la Prison des femmes de Kingston, promise depuis longtemps. Il juge également que la stratégie du Service jouira d'une plus grande crédibilité auprès de la population et d'autres si la collectivité et des parties s'intéressant aux services correctionnels pour les délinquantes sont mises à contribution pour l'élaboration et la mise en oeuvre de la stratégie. Cette fonction pourrait être accomplie par le comité consultatif national des femmes dont la création est proposée ailleurs dans le présent rapport.
9.68 Le Sous-comité recommande à la fin du présent rapport la tenue d'un autre examen, dans cinq ans, du système fédéral des services correctionnels et de mise en liberté sous condition. Il précise également dans sa recommandation certains éléments essentiels qui devront alors être revus. Étant donné la complexité des sujets dont il est question dans la présente partie du chapitre et puisque le Service correctionnel commence tout juste à mettre en oeuvre sa stratégie qui aura atteint sa maturité dans cinq ans, le Sous-comité estime que ces sujets devront aussi être étudiés lors du prochain examen prévu par la Loi. La stratégie aura alors été réalisée et le Service correctionnel aura eu le temps de recueillir des données et de fournir au Parlement une évaluation de la stratégie pour traiter les délinquantes à niveau de sécurité maximale ou ayant des besoins élevés.
DISPOSITIONS LÉGISLATIVES SUR LES BANQUES D'EMPREINTES GÉNÉTIQUES
9.69 Au cours de la dernière session de la présente législature, le comité permanent s'est penché sur les dispositions législatives concernant les banques d'empreintes génétiques (projet de loi C-3), et a examiné en même temps les dispositions (projet de loi C-104) que contient déjà le Code criminel sur le même sujet. Il a publié ses constatations et ses recommandations dans le neuvième rapport qu'il a déposé à la Chambre des communes le 15 mai 1998.
9.70 Dans son rapport, le comité permanent s'engageait à examiner certains éléments des textes législatifs sur les banques d'empreintes génétiques dans le cadre de l'examen statutaire des dispositions et de l'administration de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. De là la mise sur pied du Sous-comité.
9.71 Le comité permanent a décrit cet engagement dans les termes suivants :
Le Comité convient de réexaminer les circonstances dans lesquelles des échantillons d'ADN peuvent être prélevés rétroactivement auprès de contrevenants purgeant déjà des peines d'emprisonnement, durant l'étude exhaustive qu'il entreprendra sur les dispositions et l'application de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition.
9.72 Le Sous-comité s'est penché sur la question et a décidé de ne formuler ni constatations ni recommandations, faute de données suffisantes ou d'autres renseignements lui permettant de procéder à un examen éclairé.
9.73 Signalons toutefois que le comité permanent s'est engagé, dans son neuvième rapport, à examiner de nouveau les dispositions législatives sur les banques d'empreintes génétiques avant la fin de la présente législature. L'étude aura pour but de déterminer s'il y a lieu d'y apporter des corrections sur le plan législatif, technologique ou des ressources. La question, qui avait été soumise au Sous-comité, devrait donc plutôt être étudiée dans le contexte plus large d'un nouvel examen des textes législatifs sur les banques d'empreintes génétiques par le comité permanent.
DISPOSITIONS LÉGISLATIVES : UN STYLE CLAIR ET SIMPLE
9.74 Les Canadiens se plaignent souvent de la complexité des lois. Les législateurs doivent traiter de sujets d'intérêt public qui sont complexes, mais ils le font parfois en rédigeant des lois dans un style presque incompréhensible pour le citoyen ordinaire. Comme on pouvait s'y attendre, c'est également le cas de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition.
9.75 Beaucoup des témoins que le Sous-comité a entendus se sont plaint de la complexité de la Loi et de l'obscurité d'une bonne partie de ses passages. C'est l'avis des personnes chargées d'appliquer la Loi dans le quotidien, de celles qui sont chargées de donner de la formation sur l'application de la Loi et d'en recevoir, de celles dont les peines sont administrées en vertu de la Loi, et de celles qui ne font pas partie du système correctionnel et de mise en liberté sous condition mais qui tentent de comprendre la Loi et son application.
9.76 Pour bien comprendre la Loi et son application quotidienne, il ne suffit pas de la lire indépendamment. Il faut aussi consulter d'autres documents : le Règlement, les directives du commissaire, les ordres permanents de l'établissement, les consignes de poste de l'établissement, les directives, les manuels de politiques et d'autres documents semblables. Les tentatives pour simplifier la gestion d'un système complexe ont souvent l'effet contraire.
9.77 À la complexité du système correctionnel et de mise en liberté sous condition s'ajoute celle du texte de loi lui-même. Voici quelques exemples que le Sous-comité a relevés :
- style trop compliqué - voir, par exemple, les articles 129 à 132 de la Loi, qui traitent du maintien en incarcération au cours de la période prévue pour la libération d'office;
- des éléments connexes des programmes de mise en liberté sous condition qui se trouvent dans des parties différentes de la Loi - voir, par exemple, l'article 17, qui traite de la permission de sortir avec escorte, et les articles 115 à 117, qui portent sur la permission de sortir sans escorte;
- des éléments des services établis par la Loi qui sont liés sur le plan structural, mais qui sont séparés les uns des autres dans le texte - voir, par exemple, les articles 146 et 147, qui portent création de la Section d'appel de la Commission nationale des libérations conditionnelles, et les articles 103 à 111, qui établissent la compétence et les fonctions de base de la Commission.
9.78 Le style lourd et parfois obscur de la Loi fait qu'il est parfois difficile de savoir ce que le Parlement voulait dire. Le Sous-comité est d'avis que les lois doivent être rédigées de façon que tous les citoyens puissent les comprendre, et pas seulement les experts. Par conséquent, il a conclu que toute modification apportée à la Loi devrait être rédigée dans un style clair et simple pour que tous puissent les comprendre : les personnes visées, celles qui l'appliquent et celles qui s'y intéressent. Le Sous-comité estime aussi qu'on devrait examiner la Loi dans sa forme actuelle dans le but d'en simplifier la structure, l'organisation et le style.
RECOMMANDATION 50
Le Sous-comité recommande d'examiner la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition dans le but d'en simplifier la structure, l'organisation et le style.
RECOMMANDATION 51
Le Sous-comité recommande également que toute modification éventuelle apportée à la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition soit rédigée dans un style clair et simple.
9.79 En raison, entre autres, de la complexité qui caractérise le système correctionnel et de mise en liberté sous condition, on constate souvent une désinformation et l'absence de renseignements fiables à son sujet. Il s'ensuit parfois qu'on tire des conclusions et qu'on entretient des croyances qui ne sont pas toujours fondées.
9.80 Très souvent, les fonctions qui incombent aux divers éléments du système correctionnel et de mise en liberté sous condition ne sont pas très bien comprises. Ainsi, par exemple, on croit souvent à tort que la Commission nationale des libérations conditionnelles s'occupe des délinquants mis en liberté sous condition, alors que c'est le Service correctionnel. Par ailleurs, les gens confondent souvent les différentes formes de mise en liberté sous condition : ils disent qu'un délinquant est en liberté conditionnelle, alors qu'il peut avoir été mis en liberté d'office dans la collectivité, mis en probation ou mis en liberté provisoire (une sorte de caution). Or la première seulement de ces formes de mise en liberté sous condition est régie par la Loi.
9.81 Ce manque de renseignements fiables a eu pour effet de miner la confiance du public à l'égard du système correctionnel et de mise en liberté sous condition. Le Service correctionnel et la Commission ont fait le nécessaire pour renseigner le public. Ils se sont adressés à des groupes communautaires, ont rencontré les comités de rédaction des journaux, organisé des visites des établissements correctionnels et des occasions d'assister aux audiences de la Commission, collaboré à la production de documentaires télévisés, participé à des réunions et à des conférences ainsi qu'à la production et à la diffusion de dépliants, de feuilles de renseignements et d'encarts dans les journaux. Les deux organismes ont également des sites Internet et disposent d'agents d'information et de communications dans toutes les régions du pays.
9.82 Le Service correctionnel et la Commission méritent des félicitations pour ces efforts d'éducation du public et pour d'autres encore, mais ils doivent faire encore davantage. Souvent lors des visites du Sous-comité dans les diverses régions du pays, les médias ont rapporté des événements qui s'étaient produits dans les établissements correctionnels visités. Une fois sur place, le Sous-comité a pu constater que ces reportages étaient incomplets, trompeurs et simplistes. Même si les organismes ont tenté de corriger les situations en question, ils ne sont pas intervenus assez rapidement et leurs efforts ont par conséquent été inefficaces.
9.83 Le Sous-comité est d'avis que le Service correctionnel et la Commission devraient revoir leurs stratégies de communication et d'éducation du public de façon à pouvoir contrer cette désinformation. Toute bonne stratégie de communication et d'éducation du public ne devrait pas faire appel au seul personnel du Service correctionnel et de la Commission.
9.84 Il faut s'efforcer davantage d'y faire participer les organisations non gouvernementales, notamment celles avec lesquelles les deux organismes ont des liens contractuels à titre de fournisseurs de services. Il faut aussi faire appel aux membres des comités consultatifs de citoyens, tant de ceux qui existent déjà que de ceux dont le Sous-comité recommande la mise sur pied dans le présent rapport. Les détenus dont la réadaptation a réussi devraient être pris en exemple pour démontrer que le système correctionnel et de mise en liberté sous condition fonctionne bien.
RECOMMANDATION 52
Le Sous-comité recommande que le Service correctionnel du Canada et la Commission nationale des libérations conditionnelles revoient leurs stratégies de communication et d'éducation du public de façon à pouvoir contrer la désinformation au sujet du système correctionnel et de mise en liberté sous condition.
9.85 Comme nous l'avons mentionné plus haut dans le présent rapport, le Parlement, lorsqu'il a adopté la Loi en 1992, a imposé un examen au bout de cinq ans. En prévision de cet examen, le ministère du Solliciteur général a fait paraître un document de consultation et un certain nombre de documents techniques connexes. Il a aussi publié un sommaire des résultats de la consultation. Le Sous-comité s'est servi de toute cette documentation, essentielle à la réalisation de cet examen exhaustif. De plus, le Service correctionnel, la Commission, le Bureau de l'enquêteur correctionnel et le ministère du Solliciteur général ont fourni au Sous-comité beaucoup des documents et des données qu'il leur avait demandés.
9.86 Tous ces renseignements ont permis au Sous-comité de cerner les questions examinées dans le pré sent rapport et de les étudier. À la lecture du présent rapport toutefois, on constatera que beaucoup des questions qu'on y aborde évoluent, en raison des changements récents et des nouveautés qui planent encore à l'horizon. Dans le présent rapport, le Sous-comité expose aux décisionnaires et aux législateurs son point de vue sur les orientations que devraient prendre le système correctionnel et la mise en liberté sous condition.
9.87 Cependant, le Sous-comité estime que son travail ne devrait pas marquer la fin du rôle du Parlement pour ce qui est de la suite des améliorations à apporter au système correctionnel et de mise en liberté sous condition. Ce n'est en fait que le début. À son avis, le Parlement devrait procéder à un examen exhaustif de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition dans cinq ans. En s'inspirant des données recueillies et des renseignements fournis par les organismes gouvernementaux impliqués dans cet examen, il sera en mesure à ce moment-là d'évaluer pleinement l'évolution du système correctionnel et de la mise en liberté sous condition.
RECOMMANDATION 53
Le Sous-comité recommande de modifier la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition de façon à exiger qu'un comité de la Chambre des communes procède à un examen exhaustif de ses dispositions et de son effet dans cinq ans. Si la Loi n'est pas modifiée, cet examen devra commencer dans les cinq ans qui suivront la réponse du gouvernement au présent rapport et porter sur : les mesures prises pour mettre en oeuvre les conclusions et les recommandations contenues dans le présent rapport; la libération d'office; les délinquantes à niveau de sécurité maximale ou ayant des besoins spéciaux; le protocole d'entente entre le Service correctionnel et l'Enquêteur correctionnel.
123
# Mémoire, p. 2.124# On trouvera des détails dans la Directive du commissaire no 800 (1997-12-22), intitulée Services de santé, et la Directive no 850 (1995-05-01), intitulée Services de santé mentale.
125# Témoignages, 13 mai 1999, 10:50.
130# On trouvera des détails dans la Directive du commissaire no 585 (1996-01-02), intitulée Stratégie nationale antidrogue.